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ARCHIVES PARLEMENTAIRES
SOCIÉTÉ D'IMPRIMERIE ET LIBRAIRIE ADMINISTRATIVES ET DES CHEMINS DE FER PAUL DUPONT 41, RUE J.-J.-ROUSSEAU (Cl.)270.3.86.
ARCHIVES RARLEMENTAIRES DE 1787 A 1860
RECUEIL COMPLET DES DÉBATS LÉGISLATIFS &POLITIQUES DES CHAMBRES FRANÇAISES IMPRIMÉ PAR ORDRE DU SÉNAT ET DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS SOUS LA DIRECTION DE M. J. MAVIDAL CHEF DU BUREAU DES PROCÈS-VERBAUX, DE L'EXPÉDITION DES LOIS, DES IMPRESSIONS ET DISTRIBUTIONS DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS ET DE M. E. LAURENT BIBLIOTHÉCAIRE DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS
PREMIÈRE SÉRIE (1787 à 1799) TOME XXIII DU
PARIS SOCIÉTÉ D'IMPRIMERIE ET LIBRAIRIE ADMINISTRATIVES ET DES CHEMINS DE FER PAUL DUPONT 41, RUE J.-J.-ROUSSEAU (HÔTEL DES FERMES)
1886
PRÉSIDENCE DE M. RIQUETTI DE MIRABEAU L'AÎNÉ.
Séance du
La séance est ouverte à onze heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'bier au malin, qui est adopté.
Un membre dépose sur le bureau les procès-verbaux de la prestation du serment de Jean-Pierre Musson, Jacques Bergonnioux, Henri Héron, Louis-Joseph Vezelai et Thiriot, curé et vicaires à la Charité.
donne lecture du procès-verbal de la prestation du serment de Gabriel Poughol, Jean-Baptiste Poughol, Antoine Savignac, André et Pagerie, curé et vicaires à Allanche.
Messieurs, une feuille antipatriotique ayant cherché à égarer les
peuples sur les motifs de la démission de M. Mou-rellon, élu à l'évêché
du département de la Creuse, et l'ayant faussement présentée comme le
produit des remords que lui causait le serment qu'il avait
solennellement prononcé le 9 du mois dernier, je suis chargé de déclarer
que ce vertueux ecclésiastique persiste dans son serment ; mais que,
quoiqu'il ait motivé sa démission sur des raisons senties, ne l'ayant
réellement donnée que parce qu'on lui avait persuadé qu'il y avait des
vices de nullité dans la forme de son élection et qu'il ne connaissait
pas alors le décret de l'Assemblée qui l'avait confirmée, il vient de
rétracter sa démission et il va prendre au plus tôt les voies canoniques
et légales pour se mettre en état de remplir les fonctions de
l'épiscopat, qu'il ne peut qu'honorer par ses vertus.
(.Applaudissement.s.)
(Cette motion est décrétée.)
Un membre fait lecture d'une pétition de la commune de Louhans qui demande un tribunal de commerce.
(Cette pétition est renvoyée au comité de constitution.)
Plusieurs membres du comité d'aliénation présentent des projets de décrets portant ventes de domaines nationaux à différentes municipalités.
L'Assemblée les adopte ainsi qu'il suit :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites suivant les formes prescrites, déclare vendre les biens nationaux dont l'état est annexé aux procès-verbaux respectifs des évaluations ou estimations desdits biens, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, payables de la manière déterminée par le même décret.
Savoir :
A Ja municipalité de Clermont-Ferrand, département du Puy-de-
Dôme, pour.......... ,1,446,796 1. '6 s. » d.
A celle de Saintes, département de la Cha-rente-Inférieure....... 492,680 * »
A celle de Nérac, département de la Gironde....................51,960 4 8
« Le tout ainsi qu'il est plus au long porté dans les décrets de ventes et états d'estimations respectifs, annexés à la minute du procès-verbal de ce jour. »
, au nom du comité des finances (1). Messieurs, plusieurs dépenses faites
par les officiers de la maison du roi à Versailles,
11 est contre vos principes d'ordonner le payement d'une somme quelconque sans qu'il été vérifié si cette soifirme est réellement due et pourquoi. Je demande donc que cette liste soit renvoyée à la liquidation selon la route ordinaire.
(L'Assemblée ordonne le renvoi de la motion de M. de Gernon au bureau de liquidation.)
, au nom du comité des pensions. Messieurs, il y a maintenant dans la caisse de l'extraordinaire 89 millions.
J'ai l'honneur de proposer, de la part du comité des pensions, îe projet dé décret suivant pour ordonner le payement des brevets de retenue liquidés :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de Son comité des pensions, qui a rendu compte des vérifications faites par le directeur général de la liquidation, décrète qu'en conformité de l'article 3 de la loi du 1er décembre 1790, il sera payé aux porteurs de brevets de retenue, dont les noms vont suivre, les indemnités qui seront pareillement désignées avec les intérêts, à compter du jour de la remise et enregistrement de leurs mémoires et piècés, conformément à l'article 4 de la loi du 19 janvier dernier, savoir:
« À César-Henri de La Luzerne , ci-devant secrétaire d'Etat au département de la marine, 400,000 livres d'indemnité, et les intérêts de ladite somme, à compter du 1er janvier dernier.
«À Armand-Marc de Montmorin, secrétaire d'Etat au département des affaires étrangères, 400,000 livres d'indemnité, et les intérêts de ladite somme, à compter du 13 janvier dernier.
« A François-Emmanuel Guignard, ci-devant secrétaire d'Etat, 400,(KM) livres d'indemnité, et
les intérêts de ladite somme, à compter du 13 janvier dernier.
« A Didier-Michel de Saint-Martin, commissaire des guerres, 70,000 livres et les intérêts de ladite somme, à compter du 12 janvier dernier^
« À Jeau-François-Henri Gollot, commissaire des guerres, 70,000 livres et les intérêts , à compter du 13 janvier dernier.
« A Antoine-Pierre Buhot, commissaire des guerres, 70,000 livres et les intérêts, à compter du 10 janvier dernier.
« A la charge, par chacun des dénommés au présent état, de se conformer aux lois de l'Etat pour les mandats à obtenir de l'administrateur de l'extraordinaire, et pour les quittances à donner au trésorier de l'extraordinaire. »
Il paraît que les effets dont le payement est ordonné par le décret sont loin de remplir la somme qui reste sans emploi dans la caisse de l'extraordinaire.
(Le projet de décret est adopté.)
, au nom des comités de l'extraordinaire, des finances, de la direction de liquidation, de liquidation et de fabrication des assignats. Voici, Messieurs, un autre projet de décret concerté entre vos commissaires de l'extraordinaire, des finances, de la direction de liquidation, de liquidation et de fabrication des assignats, et je suis venu ici pour dire qu'il n'y a qu'a présenter le mémoire pour être payé.
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités de l'extraordinaire, des finances, d»î la direction de liquidation, de liquidation et de fabrication des assignats, décrète ce qui suit :
1° Les états, soit arrêtés au conseil, soit ordonnancés, des gages, traitements et appointements des différents départements, seront remis sans délai au commissaire de la liquidation, et les parties prenantes lui remettront leurs mémoires, pour, par ledit commissaire, en rendre compte au comité de liquidation, lequel en fera son rapport à l'Assemblée;
Les fournisseurs et entrepreneurs dans les différents départements, porteurs de mémoires arrêtés et ordonnancés, les remettront au directeur général de la liquidation ; ceux qui seraient au comité de liquidation seront pareillement remis audit directeur, à l'effet par lui d'en rendre compte sans délai au comité de liquidation, qui en fera son rapport à l'Assembléej
3°. Les commissaires entrepreneurs et autres auxquels il avait été délivré, pour des objets de dépense antérieurs au 1er janvier 1790, des ordonnances sur lesquelles ils ont reçu des sommes en acompte,remettront lesdi tes ordonnances entre les mains du garde du Trésor public, seront payés du restant desdités ordonnances ensuite de la vérification qui sera faite, d'après le certificat du garde du Trésor public, pour constater ce qu'ils ont reçu et ce qui leur reste dû;
4° Les porteurs de titres exécutoires et authentiques les remettront pareillement au directeur de liquidation, pour, sur le rapport qui eu sera fait par les comités respectivement chargés de la surveillance de la direction de liquidation, le payement des sommes portées auxdits titres être décrété par l'Assemblée, sans retardation de l'exécution desdits titres, lorsqu'ils ne seront pas attaqués par les voies de droit. »
(Le projet de décret est adopté.)
, au nom des comités de l'extraor-
dinaire, des finances, de ]a direction de la liquidation, de liquidation et de fabrication des assignats. Voici enfin un autre décret que les mêmes comités vous présentent relativement aux assignats :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités de l'extraordinaire, des finances, de la direction de liquidation, de liquidation et de fabrication des assignats, décrète ce qui suit :
1° La signature et l'émission des assignats de 2,000 livres sera provisoirement suspendue, lorsque la quantité de 150,000 desdits assignats, formant la somme de 300 millions, sera complète;
2° Sur la somme de 100 millions qui reste pour arriver à celle de 400 millions, et sur laquelle il a déjà été retranché, par la loi du 19 janvier dernier, la quantité de 40 millions pour former des assignats de 50 livres, il sera pris ceile de 10 millions pour former des assignats de 100 livres;
3° La proposition faite à l'Assemblée nationale, le 9 janvier dernier, pour la confection d'assignats au-dessous de la somme de 50 livres, est ajournée. »
(Le projet de décret est adopté.)
Messieurs, dans l'intérêt général du royaume, dans celui des départements et notamment pour ceux qui font des travaux, je vous propose de renvoyer la motion suivante à votre comité des assignats et de décider le jour où il devra vous en faire le rapport ;
« Il sera pris 10 millions sur la réserve des assignats de 2,000 livres, pour être convertis en assignats de 40,30 et 25 livres. » (Murmures.)
Je ne suis pas de l'avis du préopinant; cependant je sens qu'il vous a observé, avec raison, que les départements et les provinces les plus éloignés souffraient plus que celles qui sont les plus rapprochées de la capitale. En effet, Messieurs, je crois que vous êtes tous dans le cas d'être chargés de commissions particulières decréances sur le Trésor public ; et quand vous vous y présentez, j'imagine que vous n'êtes pas plus heureux que moi à pouvoir faire les divisions qui seraient nécessaires. Il est absolument instant de procurer à ceux qui sont responsables de sommes qui leur ont été comptées au Trésor royal les moyens de faire leurs comptes vis-à-vis de leurs commettants.
Je ne demande point, Messieurs, que l'Assemblée décrète sur-le-cbamp cette somme de petits assignats; mais je demande qu'elle fixe un terme court pour déterminer cette émission, parce que nous pouvons attendre longtemps les assignats de 80 et 90 livres, 'interruptions à gauche.)
Plusieurs voix : Vous les aurez demain !
Je demande que, s^ls doivent avoir lieu, on en déclare l'émission sous quinzaine, et que le comité propose son décret vendredi prochain.
On peut être tranquille. La caisse de l'extraordinaire a donné vendredi 94,000 assignats de 50 livres au Trésor public, qui seront répartis incessamment dans les provinces.
(L'Assemblée ajourne la proposition de M. Boussion.)
Je demande la permission d'an-
noncer à l'Assemblée que les fonds provenant de la vente des domaines nationaux, commencent à arriver à la caisse de l'extraordinaire, et que dans le cours de cette semaine, au lieu de 1,500,000 liv. de brûlements, comme cette semaine dernière, il sera brûlé 4 millions. (Applaudissements.)
L'ordre du jour est un rapport du comité des finances sur les dépenses publiques de Vannée 1791 (1).
, rapporteur. Messieurs, vous avez ordonné au comité des finances démettre sous vos yeux le tableau des dépenses de 1791, afin d'asseoir les bases sur lesquelles doit opérer votre comité d'impositioQ. Ce travail ne serait que lerelevé de vos décrets, sivousaviez pu statuer sur l'universalité des dépenses publiques ; mais la majeure partie n'en est pas encore définitivement réglée, et lorsque vos décisions ne sont pas notre loi, nous ne pouvons vous offrir que des calculs plus ou moins hypothétiques. Gependant tous les jours il nous devient plus facile d'approcher de la vérité que vous nous demandez. Les dépenses de l'Etat ont toutes été l'objet de discussions faites dans cette Assemblée, et de travaux trèg étendus faits dans vos différents comités; si tout n'est pas décrété, tout est du moins connu. Les principaux ^dépouillements sont achevés, et les aperçus, tels qu'aujourd'hui nous pouvons les offrir, équivaudront presqu'à des certitudes.
Vous avez tracé vous-mêmes le nouvel ordre dans lequel nous allons vous présenter le tableau de nos dépenses. Gi-devant, une immense por«-tion du territoire français fournissait aux frais du culte,-et le culte, alors, n'était point compté parmi les dépenses publiques. La nation, réintégrée dans ses droits imprescriptibles, a repris le territoire pour l'avantage de la société entière; mais, au même instant, elle a placé le culte catholique au premier rang des obligations nationales. Elle a décidé qu'il serait le premier emploi de nos tributs; aussi nous le plaçons à la tête des dépenses de l'Etat. Le traitement viager que votre justice a consacré à la subsistance des ministres de la religion et des religieux supprimés des deux sexes sera de même à la tête de nos dettes.
Dan3 la division de notre travail, dans la classification des objets qui le composent, c'est à l'ordre et à la clarté que nous nous sommes par^ ticulièrement attachés. Nous voudrions parvenir enfin à fixer toutes les incertitudes sur l'état de nos finances,* nous voudrions porter le flambeau de la vérité partout où la malveillance cherche à épaissir les ténèbres.
L'universalité des dépenses de l'Etat se divise naturellement en trois grandes parties : les dépenses générales et annuelles, les dépenses locales et les dépenses du moment. Nous comprenons dans la première celles que le Trésor public doit payer directement, parce qu'elles sont communes à tout le royaume, parce qu'elles sont d'un intérêt égal pour toutes les parties de l'Empire, et qu'aucune circonstance locale ne dispense de les acquitter dans une proportion relative. Les intérêts de la dette publique sont compris dans cette première classe.. C'est la nation qui doit, c'est en son nom que vous avez juré fidélité aux créanciers de l'Etat.
Nous intitulerons seconde partie de la dépense publique celle qui
concerne plus particulièrement
Enfin, un nombre considérable d'objets de dépense tenant uniquement aux circonstances du moment, des dépenses qui ne se répéteront pas, et qui appartiennent à la seule année 1791, ne doivent pas demeurer confondues avec les dépenses annuelles. Il serait imprudent de ne pas le s prévoir: il faut même leur supposer toute la latitude à laquelle elles peuvent atteindre. Mais il nous paraît juste de leur consacrer des fonds distincts des revenus ordinaires; et si vous leur destinez, ou des portions de vos capitaux, ou des rentrées éventuelles des différentes sommes dues au Trésor public, la nation saura du moins quelles ont été les vues d'ordre, ou les lois de la nécessité, qui vous auront commandé l'emploi de ces fonds, et elle ne regardera pas ce surcroît de dépense du moment comme un accroissement inévitable à ses charges futures.
EUe verra au contraire avec satisfaction que la somme des contributions annuelles décroîtra successivement de 175 millions par l'extinction des rentes viagères ou des traitements compris dans l'état des dépenses publiques, et cet espoir est Lien propre à en alléger le poids.
Votre comité ne vous fatiguera pas de la longue énumération de chiffres qu il faudrait accumuler pour le compte qu'il vous rend. Un tableau joint a ce rapport, tableau suffisamment détaillé et dans lequel sont distingués les objets décrétés d'avec ceux qui ne le sont pas, laissera, nous osons le croire, peu d'éclaircissements à demander. Il vous suffit, dans ce moment-ci, de savoir que le culte, la liste civile, les rentes apanagères et le traitement des frères du roi, les affaires étrangères, la guerre, Ja gendarmerie nationale, la marine et les colonies, les ponts et chaussées, les ministres et le conseil, l'administration générale des finances et du Trésor public, celle de la caisse de l'extraordinaire, de la direction générale de liquidation et de la comptabilité, l'école des mines, les dépôts publics, les primes et encouragements pour le commerce, Je jardin et la bibliothèque du roi, les universités, académies et travaux littéraires, les Invalides et les Quinze-Vingts, la haute cour nationale, le tribunal de cassation et l'Assemblée nationale, en joignant à tous ces objets un supplément de 6 millions pour tout ce qui peut être imprévu ou omis, coûteront 280 millions de livres.
Les traitements du clergé supprimé, les secours accordés aux frères du roi et à M. d'Orléans, les pensions et l'intérêt, tant des rentes viagères que de ce qui subsistera de la dette non constituée, après les remboursements que vous avez décrétés pour cette année, mon tenta 302 millions de livres»
Ainsi, les deux grands objets de dépense commune, ceux qui doivent indispensablement être payés par le Trésor public, forment un total de 582 millions de livres. (Murmures.)
La caisse de l'extraordinaire, chargée, par votre décret dd 6 décembre 1790, de recevoir le revenu des domaines nationaux, doit fournir au Trésor public 60 millions pour l'acquittement des intérêts de la dette que ces domaines représentent; ainsi, pour faire face aux dépenses nationales, il ne s'agit plus que d'assurer une recette de 522 millions. Telle doit être la base du travail de votre comité d'imposition.
Nous passons à la partie des dépenses de l'Etat, qui nous paraît de nature à être confiée aux départements.
Les provinces et généralités de l'ancienne divi^ sion du royaume, indépendamment des impositions de tout genre qui les grevaient, payaient, par, supplément, la dépense de leurs chemins, plusieurs constructions de bâtiments publics, ^entretien d'une grande partie des églises et bâtiments ecclésiastiques, la milice, les frais de collecte, les dépenses ordonnées par les intendants, subdélégués, etc.; dépenses exemptes de toute responsabilité, et dont la somme était incalculable, par cela même qu'elle était arbitraire.
L'arbitraire, aujourd'hui, n'est plus à craindre. C'est une raison de plus en faveur de la séparation que nous vous proposons d'établir entre les dépenses locales, et celles que l'administration générale doit acquitter, avec les contributions communes. Ainsi, par les motifs que nous vous avons exposés, nous vous proposons de comprendre, dans cette seconde classe, la dépense des assemblées administratives, des tribunaux, des prisonniers, de la perception des impositions directes, des hôpitaux, des secours destinés à prévenir ou à détruire la mendicité, et d'y laisser,, comme autrefois, les grands chemins et les bâtiments publics à construire ou à entretenir. Ces différents objets, réunis dans un tableau détaillé, joint à ce rapport, présentent un ensemble de 59 millions.
En chargeant les départements de percevoir, par addition aux impôts décrétés, la somme nécessaire à ces dépenses locales, vous leur imposerez, plus particulièrement encore, l'obligation de rechercher tous les moyens d'économie ; et il n'est pas douteux que leur intelligence, leur zèle et l'habitude d'administrer, n'apportent bientôt des allégements sensibles à cette partie de charges publiques. Nous ne comprenons pas, dans cet état de dépense, celle de la garde et de la police des villes. Vous leur accorderez des revenus, vous les autoriserez à lever des octrois. Ces dépenses, encore plus locales que les précédentes, sout la cause et l'emploi des concessions que vous leur ferez.
Il nous reste à vous présenter le tableau des dépenses particulières à l'année 1791, dépenses que vous ne pouvez regarder comme une charge annuelle, mais comme le résultat des circonstances passagères où nous sommes.
Nous y comprendrons : 1° les 15 millions que vous avez décrétés en dernier lieu, pour être distribués, dans les départements, en travaux de charité;
2° Les dépenses de l'Assemblée nationale, ou prolongée par la nécessité des affaires, ou remplacée par une autre législature. Nous ne l'avons employée que pour six mois dans l'état de dépense annuelle.
3° La continuation et l'achèvement des travaux du pont de Louis XVI;
4° Enfin nous avons pensé qu'il y aurait des suppléments nécessaires pour solder les différents articles de dépense, dont la réduction n'est pas décrétée, tels que les départements de la guerre et delà marine, les bureaux de l'administration générale, les frais attachés aux compagnies actuelles de finances, la prolongation de durée de quelques tribunaux, le solde de compte des remboursements qui seront faits cette année ; mais qui, ne l'étant que successivement, exigeront un décompte d'intérêts jusqu'au jour du remboursement. Nous avons évalué cet objet à 20 millions pour 1791. Les quatre articles réunis montent, à-peu près, à 40 millions.
Il est indispensable d'y ajouter le résultat de votre dernier décret, sur les précautions de sûreté intérieure et extérieure. Il ordonne une réserve de 5 millions pour l'éguipement des auxiliaires, et suppose les fonds nécessaires à l'augmentation de 50 régiments que vous portez au complet de guerre, ainsi qu'aux approvisionnements pour l'artillerie et aux équipages de campagne. Ce supplément, en y joignant l'expédition ordonnée pour nos îles, les travaux de Cherbourg et autres ports maritimes, 8 millions qui restent à fournir sur les 4 que vous avez destinés à rétablir nos forteresses, et les immenses ateliers de Paris, ne peut guère s'évaluer au-dessous de 36 millions: ainsi tous vos besoins extraordinaires de 1791 monteront environ à 76 millions. La caisse de l'extraordinaire peut faire cette avance, sans déranger aucun des plans que vous avez adoptés; elle retrouvera ses premiers déboursés dans les débets des comptables et dans les autres arriérés de recette dont vous lui avez destiné la reprise. Ainsi vous aurez passé l'année la plus critique, sans entamer sensiblement vos capitaux, sans interrompre aucune de vos dispositions d'ordre et de régénération, et en vous montrant toujours également fermes, et contre les abus, et contre les ennemis.
Vous venez d'entendre, Messieurs, les détails de votre nosition ; je vais la récapituler en deux mots. 522 millions de recette sont nécessaires au Trésor public, indépendamment des60 millions qui lui seront fournis par la caisse de l'extraordinaire; et sur cette somme de 522 millions, la contribution patriotique et la vente de vos sels et tabacs emmagasinés, doivent vous en donner 55. Vous n'êtes donc obligés d'obtenir que467 millions par les revenus ordinaires, tels que les postes, domaines, etc., et par les contributions directes et indirectes.
J'ose ici solliciter tout votre attention. De la hauteur où nous sommes, nous pouvons apercevoir, d'un coup d'œil, le terme de notre carrière, et le point d'où nous sommes partis; l'avenir et le passé sont à la fois sous vos yeux ; ce rapprochement doit vous intéresser.
Au mois de mai 1789, les ressources du Trésor public montaient à 475 millions, et au delà de cette somme la dîme coûtait à la nation 130 millions, total 605. — Alors, il existait un déficit avoué de 56millions. Alors tousles remboursements étaient suspendus, chaque département du ministère avait un arriéré considérable ; près de deux années de rente étaient dues aux créanciers de l'Etat ; elles emprunts, fatale etdernièreressource de nos finances, étaient même devenus impossibles.
Tel était, tel serait encore notre état, sans cette Révolution si calomniée. Ceux qui regrettent le
temps passé, nous diront-ils qu'à force de sagesse et par les seules ressources de l'économie, il eût été possible de regagner le crédit que nous avions perdu, et d'éviter de plus grands désastres? Eh bien! reportons-nous avec eux à ces temps de calme, ou plutôt de stupeur qu'ils nous vantent et qu'ils opposent sans cesse aux agitations inséparables d'une conquête, comme celle de la liberté; tous leurs talents, toute leur sagesse n'empêcheraient pas que la nation ne fût condamnée à payer encore en 1791, un subside de 605 millions, tant au Trésor public qu'au clergé, sans pouvoir éloigner d'elle et de ses créanciers les horreurs et les dangers de la plus honteuse banqueroute. L'arrêt de suspension du 16 août 1788 l'avait commencée, le moindre événement l'eût rendue complète; et l'on vous demande quel bien a produit la Révolution?
Dès cette même année 1791, les impositions, y compris la contribution patriotique, ne monteront qu'à 502 millions au lieu de 605, et il n'y aura plus de déficit, et l'on ne connaîtra plus ni anticipations, ni arriéré, ni remboursements suspendus ; les rentes sont au courant, la solde des troupes est considérablementaugmentée,lajustice est gratuite (Murmures et rires à droite; applaudissements à gauche), les offices sont remboursés; ces vérités sont incontestables, elles sont à la portée de tout le monde, et l'on ne m'accusera pas d'embellir mes tableaux ; car je ne vous parle... (Murmures à droite; rires à gauche.)
Ces murmures ne proviennent sûrement que de ce qu'on n'a pas bien entendu M. le rapporteur. Le seul moyen de les faire cesser est de l'inviter à recommencer.
Voix nombreuses : Oui I oui! (Applaudissements.)
, rapporteur. Dès cette même année 1791, les impositions, y compris la contribution patriotique, ne monteront qu'à 502 millions au lieu de 605, et il n'y aura plus de déficit, et l'on ne connaîtra plus ni anticipations, ni arriéré, ni remboursements suspendus ; les rentes sont au courant, la solde des troupes est considérablement augmentée, la justice est gratuite, les offices sont remboursés : ces vérités sont incontestables ; elles sont à la portée de tout le monde, et l'on ne m'accusera pas d'embellir mes tableaux; car je ne vous parle ni de ce que les anciens privilégiés payeront à la décharge du peuple, ni des frais immenses de perception qui accompagnaient la gabelle et les aides, ni des vexations que vous avez abolies, ni enfin de cette féodalité, pesant tout entière et de tout son poids sur ce peuple opprimé de tant de manières.
La dépense particulière aux départements exigera, il est vrai, une autre contribution de 59 millions : mais l'ancienne dépense des chemins, celle des milices, les frais de collecte, les dépenses locales qui motivaient tant de rôles additionnels dans le royaume, s'élevaient à une somme au moins aussi considérable, et c'était de même un accroissement aux impôts d'alors.
Ainsi, Messieurs, malgré tant de traverses, malgré tant de mécomptes inévitables au milieu de l'agitation universelle, vous avez épargné dès cette année à la nation une dépense de plus de 100 millions.
Le travail purement didactique que votre comité m'a chargé de vous présenter, n'est pas susceptible d'un projet de décret. Nous ne |faisons que précéder le comité d'imposition, et motiver les
décrets qu'il vous prépare; mais nous croyons devoir saisir cette occasion de faire passer sous vos yeux le tableau des objets de dépense sur lesquels il vous reste à statuer définitivement, et l'ordre dans lequel ils doivent vous être présentés.
1° La guerre, la marine et les colonies n'ont encore reçu que quelques décisions, et il est d'autant plus important de terminer le travail de ces départements, que ce sont les plus fortes parties des dépenses publiques. Vos comités militaire et de la marine ne peuvent trop Be hâter de compléter leur ouvrage. On avait Compté dans le principe que ces deux grandes parties donneraient de grandes économies ; cet espoir s'est réalisé d'une autre manière. Vous avez amélioré le sort du soldat sans augmenter la dépense de l'Etat; mais il n'en est pas moins nécessaire de déterminer, d'une manière invariable, des dépenses qui absorbent à elles seules la moitié de la fortune publique.
2° Votre comité de commerce doit vous mettre en état de statuer sur les primes et encouragements nécessaires au commerce et aux manufactures. Cet objet demande une détermination prompte : il faut mettre un terme aux abus dont il est susceptible.
3° L'organisation du ministère et du Trésor public est le préalable nécessaire au règlement ces dépenses de l'administration des diverses caisses, de la comptabilité et des ponts et chaussées. Les projets, à cet égard, Seront incessamment soumis à votre discussion.
4° Le système d'enseignement public a un rapport immédiat avec les dépensés du jardin et de la bibliothèque du roi, des universités, académies et travaux littéraires.
Enfin les dépenses des Assemblées nationales futures, de la haute cour nationale et du tribunal de cassation compléteront le tableau général. Le comité de Constitution doit, sur ces différentes parties, vous présenter les bases sur lesquelles on pourra asseoir des calculs fixes.
Quant à nous, Messieurs, nous vous présenterons incessamment la pétition des provinces chargées ci-devant de leur administration particulière. Elles demandent que les dettes contractées en leur nom, et pour leur propre compte, soient additionnées aux dettes de l'Etat. C'est la dernière affaire importante dont le comité dés finances aura à vous entretenir.
Il a fini ses travaux de recherches, de Vérification et d'analyse ; il n'aurait plus rien à faire, si Vous ne lui aviez confié quelques points de surveillance, et s'il ne lui restait pas à recueillir les différentes lois que vous rendrez encore en finance.
La fixation des articles de dépense dont je viens de faire l'énumération, peut se terminer en peu de temps. Alors vous aurez achevé l'édifice de la fortune publique, et nos successeurs n'auront plus qu'à l'entretenir et à le perfectionner. (Applaudissements.)
Etat des dépenses publiques pour l'année 1791, publié au nom du comité des finances. (I).
OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES.
Les états de dépense publique, que le comité des finances fait imprimer
conformément aux
La seconde partie des dépenses publiques est celle que le comité des finances a cru de nature à être confiée à l'administration particulière des 83 départements du royaume. La distribution de cette dépense est subordonnée à mille circonstances locales. Le seul moyen d'appeler l'intérêt particulier à seconder l'intérêt public, est de donner aux différentes administrations de grands motifs pour réduire toutes les dépenses susceptibles de réduction ; par ce moyeu, si dans quelques départements des districts sont encore trop nombreux, ainsi que les tribunaux qui en dépendent, ils n'excederont bientôt plus tes besoins des administrés et des justiciables; les frais de toute espèce seront réduits au simple nécessaire, dès que chaque plan économique opérera une réduction subite sur les portions contributives de tous les citoyens. Dans le système dont on n'offre ici que l'analyse, cette seconde partie des dépenses publiques ne serait point comprise dans la somme générale des contributions, mais elle serait levée par des sols additionnels au principal de l'impôt. C'est ainsi que dans l'ancienne administration la dépense des chemins, les frais de collecte, de milice et autres étaient fournis par des rôles additionnels, en sus des sommes qui composaient les revenus ordinaires de l'Etat. Ces rôles étaient odieux, parce que souvent le plus injuste arbitraire présidait à leur confection, et qu'il était interdit a tous les citoyens d'en suivre et d'en surveiller l'emploi : aujourd'hui tout est public, aucune reddition de compte ne ,peut être refusée ; le peuple est juge suprême, la responsabilité est sa sauvegarde; la nation fondera son économie désormais sur les moyens à l'aide desquels le despotisme la ruinait autrefois.
La troisième partie des dépenses publiques est formée de tous les objets qui, nécessaires en 1791* ne le seront pius, lorsque chacun des an-
tiens comptes sera apuré, lorsque l'ordre aura partout remplacé l'anarchie, lorsque la paix au dedans et la sûreté au dehors auront rendu inutiles les précautions que la prudence nous impose, et l'on doit espérer que nous serons en 1792 dans cette heureuse position. Si dans la suite il était nécessaire de conserver encore une certaine latitude pour des événements impossibles à prévoir, ou pour apporter, par des avances utiles, de grandes améliorations dans la fortune publique, les extinctions de charges qui arriveront chaque année feront indubitablement trouver cette latitude dans les seuls revenus ordinaires, sans avoir besoin ni d'attaquer des capitaux, ni de recourir à des emprunts; mais en 1791, il serait barbare, lorsque le peuple a tant sacrifié pour la liberté, de lui demander des efforts qui achèveraient de l'épuiser. Il suffit qu'une dépense intéresse toute la nation, et ne soit pas de nature à se renouveler, pour qu'il soit juste et convenable d'y consacrer une seule fois quelques portions d'un capital appartenant à toute la nation : c'est un léger sacrifice, dès qu'il doit être le dernier : ce sacrifice même sera presque nul; le Trésor public a de grands recouvrements ft faire, et sur l'arriéré de ses revenus, et sur des comptables en débet. Qes recouvrements surpasseront nos besoins, et les secours que nous proposons de demander à la caisse de l'extraordi-flaire ne sont proprement que des avances.
Ceux qui voudront comparer insidieusement les dépenses de 1791 à celles des années précédentes auront ^rand soin d'additionner les trois tableaux qui suivent, et d'en approcher le montant des 475 millions que le Trésor public percevait en 1788.
l Ils dissimuleront qu'outre ces 475 millions, la dîme enlevait, chaque année, 130 millions de produit brut à toutes les récoltes (1).
Ils dissimuleront qu'outre ces 475 millions, et Outre la dlme, le peuple payait la subvention Représentative de la corvée, les frais de collecte, la milice et les dépenses locales portées sur des rôles additionnels.
Ils dissimuleront enfin les immenses bénéfices (Je la finance, le montant dé l'ancien déficit, et l'état de banqueroute d'où nous sommes sortis.
Ceux qui voudront faire la même comparai-ion, de bonne foi, mettront
entièrement de côté le dernier de nos tableaux, celui qui contient les
dépenses particulières à l'année 1791, et ne
Le second tableau aura pour terme de comparaison à leurs yeux les sommes que la nation payait ci-devant, en sus des 475 millions, pour acquitter tous les objets qui n'étaient pas payés par le Trésor public; et la différence sera à notre avantage.
Enfin, ils porteront toute leur attention sur le premier de nos tableaux, montant à 582 millions. C'est lui qui représente exactement ce qui était ci-devant acquitté par les 475 millions versés au Trésor public, par la dîme et par les revenus ecclésiastiques. Ils trouveront que le revenu des terres du clergé formant une juste compensation de 60 millions sur la dépense générale, il ne reste à la charge de la nation que 522 millions, au lieu de 605 que dans l'ancien état elle eût été obligée de payer, ce qui lui assure un bénéfice absolu de 83 millions.
En poussant plus loin leur examen, ils verront que le débit de nos magasins de sel et de tabac pouvant produire une rentrée extraordinaire d'en* viron 20 millions, la charge réelle de cette anné® sera effectivement diminuée au moins de 100 mit» lions.
Enfin, ils remarqueront que la contribution pa* triotique, telle qu'elle a été établie, devait être indépendante de tout autre impôt, et qu'au lieu de l'ajouter au montant des impositions, on proposa dé l'en déduire; qu'ainsi, en ne Pévaluant pour un tiers qu'à 35 millions, la somme de contributions à décréter pourra être réduite, en 1791, à 467 millions, et dans ce calcul ils n'apercevront ni charlatanerje, ni mauvaise foi.
Pendant les six premiers mois de l'année dernière, lé montant de la dette publique était le sujet de la plus vive controverse. Tant que les idéea ont pu sé perdre dans le vague, le comité des finances a été inculpé par Ceux qui avaient pris à tâche de persuader au public que la nation était insolvable. Enfin, au mois d'août 1.790, le comité a fait imprimer des états détaillés de la dette» Depuis cette époque, les déclamateurs ont gardé le silence; la contradiction a cessé, et le travail du comité a servi de base à tous les calculs.
Aujourd'hui quelques mécontents cherchent à établir qu'il est impossible de subvenir aux dé* penses de l'Etat sans écraser le peuple; c'est, soul une autre forme, employer le même moyen pouf décrier la Révolution. Un tableau vrai des dépense! publiques est le meilleur argument qu'on pûissé leur opposer» Le comité des finances le présente, et se livre ouvertement à là censure. Mais ce sont des faits qu'il faut opposer à des faits, des calcul* à des calculs; les déclamations ne sont plus saison.
État des dépenses publiques.
ÉTAT DES DÉPENSES PUBLIQUES.
PREMIÈRE PARTIE.
Objets dont les fonds doivent être versés au Trésor public.
CHAPITRE PREMIER.
ARTICLE PREMIER. Le culte.
Évéchés.
1 à Paris...................................... 50,000 1.
10 à20,000..........................................................................200,000
72 à12,000..........................................................................864,000 Observations.
Les décrets du 12 et du 24 juillet 1790, ceux du 3 et du 11 août, fixent les revenus attachés à tous les bénéfices conservés, ainsi que le traitement de retraite accordé aux évêques supprimés, et le supplément aux anciens titulaires. Les traitements de retraite et les suppléments sont portés à l'article premier du chapitre second. Celui-ci ne contient que le traitement réglé et permanent, attribué aux ministres de la religion.
Corps vicariat des cathédrales.
1 à Paris, à 16 vicaires..................... .....52,000 1.
10 dans les villes principales, à 16 vicaires, à
83/ 48,600 livres chacune..................................................406,000
72 dans les petites villes, à 12 vicaires, à
25,400 livres chacune...........................1,828,000
Observations.
Ces traitements sont calculés d'après le décret du 12 juillet, qui règle les salaires des vicaires de cathédrales.
Séminaires.
83 séminaires et, dans chacun, 1 vicaire supérieur à 1,000 livres, et 3 directeurs à 800 livres chacun : total, 3,400 livres, et pour les 83............................................. 282,200 1.
On évalue la dépense intérieure de chaque séminaire, l'un portant l'autre, indépendamment des pensions payées par les élèves, à 6,000 livres, et pour les 83... 498,000
Observations.
Les sommes employées pour les évêques, le corps vicarial et les supérieurs des séminaires, ayant été calculées d'après les dispositions des décrets et sur le nombre connu des individus, il ne peut
{r avoir d'erreur sur cet objet. La seule chose incertaine est l'éva-uation de 6,000 livres par séminaire pour les frais de nourriture et d'entretien. Si cet article est susceptible de quelque erreur en plus ou en moins, elle ne peut être que fort légère.
sommes.
livres. 1,114,000
décrets.
12 et 24 juillet. 3 et 11 août 1790.
2,286,000
780,200
A reporter
4,180,200
Report..
Curés.
35,529 curés de campagne, évalués à un prix commun de 1,600 livres
chacun......................................... 56,846,400 1. i
3,000 curés des villes, évalués à un prix commun de
3,000 livres chacun............................. 9,000,000
Observations.
Le décret du 24 juillet laisse aux curés la liberté d'opter entre le traitement décrété pour le clergé futur, ou le traitement fixé sur les revenus ecclésiastiques en 1789, c'est-à-dire 1,200 livres, plus la moitié de l'excédent, pourvu que le tout n'excède pas 6,000 livres. Le nombre des curés qui pourraient prétendre à 6,000 livres est peu considérable, et l'on croit approcher de la vérité en calculant leur traitement général sur le taux moyen de 1,600 livres.
On sera peut-etre étonné de ne trouver ici que 35,529 paroisses, tandis qu'il y a près de 43,000 municipalités ; mais il est un grand nombre de ces dernières qui ne sont que succursales ou annexes, et le nombre des paroisses de campagne est effectivement de 35,529.
Si l'on connaît le nombre des curés, on ne peut pas se flatter de connaître également leur revenu, soit qu'on le fixe, eu égard à la population des paroisses, soit qu'on l'évalue d'après le revenu ecclésiastique fixé en 1789. Il a donc fallu former un traitement moyen d'après les décrets qui fixent le sort des curés des villes et des campagnes.
Vicaires et desservants d'annexes et succursales.
16,000 vicaires ou desservants d'annexes ou succursales, à 700 livres
chacun......................................................
Observations.
On ne pense pas que, dans l'état actuel, il y ait 16,000 vicaires ; c'est pourquoi on ne calcule leur traitement qu'à 700 livres, quoique ceux des villes aient davantage. L'un compensera l'autre.
Observations générales.
On n'a employé dans ce tableau que les fonctionnaires publics ecclésiastiques qui devront exister d'après la Constitution civile du clergé, et l'on n a porté leurs traitements que sur le pied où ils ont été décrétés pour ceux qui seront pourvus à l'avenir.
11 est difficile de prévoir avec précision à quel nombre les cures se trouveront réduites, lorsque les réunions utiles auront été opérées. Il est certain que ces réunions apporteront une réduction sensible dans le calcul actuel; mais, dans le cas de cette réduction, le nombre des vicaires sera nécessairement augmenté. Il faudra d'ailleurs remplacer alors le service que le culte recevra pendant plusieurs années du grand nombre d'ecclésiastiques séculiers et réguliers qui existent actuellement, et qui, pensionnés par l'Etat, lui doivent l'emploi de leur temps. Il n'en résultera pas moins par la suite une diminution considérable dans la dépense totale du culte.
Les communautés séculières de l'un et l'autre sexe, les fabriques, collèges et hôpitaux ayant été maintenus provisoirement en possession de leurs niens, on ne porte, dans le présent tableau, aucune dépense à raison de ces^ établissements.
On n'a compris ici aucun article de dépense pour l'entretien et la construction des bâtiments ecclésiastiques : on a regardé cet objet comme dépense locale. Il est renvoyé^ aux dépenses des départements.
A reporter.
sommes.
livres. 4,180,200
65,846,400
DÉCRETS.
11.200,000
81,226,600
PREMIÈRE PARTIE.
sommes, décrets.
livres.
Heport.... i 81,226,600
ARTICLE 2.
La liste civile.
Cette dépense a été fixée en masse à la somme de................ 25,000,000
Observations.
Le décret du 9 juin fixe cette dépense en masse, elle n'est par conséquent susceptible d'aucun détail. 9 juin 1760.
ARTICLE 3.
Leê trois princes apanagistes.
. ( Apanage........ 1,000,000 1. ) a rtrt« , Monsieur....... 1 Traitement 1,000,000 ( 2,000,000 1. „ . . 1 Apanage........ 1,000,000 A nnn nnn M. dArtois.... | Traitement ^000,000 f ^0d0'°00 M. d'Orléans ... Apanage...........i...» é.... 1,000,000 5,000,000
Observations.
Le décret du 20 décembre 1790 accorde, à partir du 1" janvier 1791, un million de rente àpanagère à chacun des princes apanagistes. Il accorde en même temps à chacun des frères du roi un traitement viager d'un million au lieu du traitement de 3,500,000 livres dont ils jouissaient. Indépendamment des sommes ci-dessus, l'Assemblée nationale a accordé à Monsieur un secours de 500,000 livres décroissant pendant vingt ans, pour l'aider à payer ses dettes. Elle s'est chargée d'acquitter 850,000 livres de rentes viagères dues par M. d'Artois, et elle a accordé à M. d'Orléans une somme d'un million pendant vingt ans en indemnité des améliorations de son apanage. Ces trois derniers articles seront placés au second chapitre avec les pensions et les dettes. 20 décembre 1790.
ARTICLE 4.
Affaires étrangères.
Roglces et fixecs pour la presents annce a...................... 6,300,000
Observations.
La dépense des affaires étrangères a été fixée par un décret du 5 juin 1790. Aucune autre décision n'a été rendue depuis sur ce département. On s'est arrêté à la somme fixée par le décret............................................................ - 5 juin 1790.
ARTICLE 5.
La guerre.
Le comité chargé de ce département n'a pu finir encore le travail nécessaire pour en fixer les dépenses : on les porte par évaluation, et d'après la demande du ministre, à...... i»...,.. 88,000,000 1.
Soldats auxiliaires i 1
100,000 hommes à 3 sous par jour......n.. . . ... 8,478,000 I 100,112,000
Gendarmerie nationale.
La dépense résultant du décret est de.. ............ 7,237,000
218,238,600
ÉTAT DES DÉPENSES PUBLIQUES.
sommes. décrets.
livres.
Report....... 218,238,600
Observations.
Le comité militaire n'ayant pas encore fini son travail, on ne peut établir ici, avec certitude, la dépense de ce département. Un rapporteur de ce comité a dit, en dernier lieu, à la tribune, que le département de la guerre ne coûterait qu'environ 81 millions, non compris les derniers objets décrétés, ce qui ne pouvait s'appliquer qu'à la gendarmerie nationale et aux 100,000 auxiliaires. D'un autre côté, le ministre de la guerre a porté sa demande de fonds, pour l'année 1791, à 88 millions, non compris ces deux mêmes objets. La crainte de se tromper en moins, inconvénient important à éviter dans une évaluation du genre de celle-ci, a déterminé le comité des finances à prendre pour base la demande du ministre, en y ajoutant la dépense des 100,000 auxiliaires et de la gendarmerie nationale déjà décrétés. On peut espérer que cette dépense sera moins considérable qu'elle n'est présentée ici. Par le décret du 28 février 1790, la paye de tous les soldats français est augmentée de 32 deniers par jour. Par le décret du 18 août 1790, l'armée doit être composée, à partir du l,r septembre suivant, de 110,485 hommes d'infan -terie, 30,000 hommes de cavalerie, 10,137 pour l'artillerie et le génie, et 94 officiers généraux. Les fonds de 1 artillerie et du génie sont provisoirement fixés à 5,400,000 livres. Les frais de bureau du ministre et impression des ordonnances sont réduits à 1,500,0001. Le décret du 24 décembre 1790 fixe le nombre des officiers de tout grade pour le corps du génie, à dater du 1er janvier 1791, et en porte la dépense totale à 783,000 livres.
ARTICLE 6.
Marine et colonies.
N'y ayant aucun décret relatif à la dépense totale de ce département, on l'a portée sur le même pied qu'en 1789 et 1790....... 40,800,000
Observations.
Le travail du comité de là marine pourra seul déterminer la dépense de ce département. On n'a pu, en attendant, connaître d'autre règle que les derniers états de dépenses arrêtées au conseil. On ne peut cependant se dispenser d'observer que cette somme a toujours été excédée. Etait-elle réellement insuffisante, où ne l'était-élle que par les vices de l'administration? C'est ce que le travail du comité éclaircira. Par le décret du 8 avril 1790, la solde des troupes de la marine est augmentée de 32 deniers. Par le décret du 6 juin 1790, la paye des matelots, qui était déterminée en différentes classes, depuis 14 jusqu'à 21 livres, est portée de 15 à 24 livres. La paye des officiers mariniers de différents grades, qui était fixée de 24 à 70 livres par mois, sera portée de 32 à 80 livres. Le décret du 16 décembre 1790 en fixe la répartition. Les armements extraordinaires, tels que celui qui transporte, dans ce moment«ci, des troupes et des commissaires du roi dans les îles, ne sont pas compris dans les dépenses ci-dessus. Cet article se trouvera dans la troisième partie au nombre des dépenses particulières à l'année 1791.
ARTICLE 7.
Ponts et chaussées.
Les dépenses relatives aux ingénieurs en chef, aux inspecteurs et à l'école, sont décrétées et fixées à................ 161,200 1. Les dépenses des ports maritimes, des canaux de navigation, des turcies, n'ont point été décrétées ; on porte ces objets, d'après l'ancien état, à......... 3,870,000 4,031,200
A reporter.... 262,769,800
PREMIÈRE PARTIE.
sommes. décrets.
Report..... . livres. 262,769,800
Orservations
Il est impossible de statuer avec précision sur une dépense dont le système sera nécessairement lié, à l'avenir, avec la nouvelle administration du royaume, sous des rapports que les décrets de l'Assemblée n'ont pas encore déterminés. 11 y aura nécessairement des sommes fournies par le Trésor public pour les dépenses d'un intérêt général, et, faute d'autre base, le comité des finances a pris celles des anciens fonds destinés aux dépenses de ce genre. Les décrets des 14, 16 et 31 janvier 1790 statuent sur le premier article.
ARTICLE 8.
Ministres et gages du conseil.
Gette dcpcnse est fixcc a................. 460,000
Observations.
Le décret du 5 juin 1790 fixe provisoirement cette dépense à la somme ci-dessus. Les ministres des affaires étrangères, de la guerre et de la marine ne font point partie de cet article, leur traitement est compris dans la dépense de leur département. 5 janvier 1790.
ARTICLE 9.
Administration générale des finances et du Trésor public.
Portée, par évaluation, à....................................... 1,450,000
Observations.
Cette dépense était beaucoup plus considérable sous l'ancienne administration : M. Necker était convenu avec la section du comité des finances que la dépense des bureaux pouvait être réduite à cette somme. Elle subsiste cependant encore sur l'ancien pied, et ce n'est qu'au moment de l'organisation du Trésor public que l'on doit compter sur la réduction. Il est certain qu'avec cette somme, bien distribuée, il n'y a point de finances que l'on ne puisse administrer.
ARTICLE 10.
Administration de la caisse de Vextraordinaire.
L'Assemblée n'ayant point encore statué sur cette dépense, on la porte ici, par évaluation, à................................... 300,000
ARTICLE 11.
Bureau de liquidation générale.
Cette dépense est portée, par évaluation, à.,.................. Les deux derniers articles sont des aperçus à peu près certains, et ne sont susceptibles d'aucune observation. 300,000
ARTICLE 12.
Frais de comptabilité.
Cette dépense est portée, par évaluation, à....................... 300,000
Observations.
La fixation de cette dépense tient de même aux décrets qui
A reporter..... 265,579,800
ÉTAT DES DÉPENSES PUBLIQUES.
Report.
détermineront l'organisation du ministère et du Trésor public. Lorsque l'administration sera simple, les comptes seront faciles à vérifier, et l'évaluation ci-dessus paraît suffisante.
ARTICLE 13.
École des mines et des dépôts publics.
La dépense des dépôts publics est fixée à.............. 6,000 1.
L'Ecole des mines est décrétée à....................... 7,000
Les dépôts à rentrer sont évalués à................... 14,000
Observations .
Cet article est d'une faible importance ; des décrets définitifs achèveront de le régler.
ARTICLE 14.
Imprimerie royale.
Cette dépense doit être confondue avec celle des départements qui en feront usage...........................................
ARTICLE 15.
Primes et encouragements pour le commerce et les manufactures.
Il n'y a rien de fixé encore sur cette dépense; elle est portée, d'après l'ancien état, à..........................................
Observations.
Cette dépense s'est élevée dans les dernières années jusqu'à 6,500,000 livres, et le compte n'en a jamais été rendu. Il paraît que de grands abus s'y étaient introduits. L'Assemblée nationale lui donnera sans doute l'étendue nécessaire; mais elle la circonscrira dans de justes limites : c'est au comité du commerce à lui présenter les bases d'après lesquelles elle peut être fixée.
ARTICLE 16.
Jardin et bibliothèque du roi.
La dépense du jardin du roi est ajournée ; on l'évalue à ............................................... 100,000 1.
Celle de la bibliothèque est fixée à.................. 110,000
Observations.
Il est possible que des vues d'utilité publique engagent à accorder quelquefois des suppléments à cette dépense, mais ce ne peut être que par des décrets particuliers. La somme de dépenses ordinaires ne doit pas excéder 1 évaluation ci-dessus.
ARTICLE 17. Universités, académies, travaux littéraires.
! française..................................................................26,417 1. j
des belles-lettres..............................44,108
des sciences.....................................94,658
de médecine............................................................36,200
A reporter.
sommes.
livres. 265,579,800
27,000
Mémoire.
3,862,000
210,000
decrets.
20 août 1790.
201,383
269,880,183
PREMIÈRE PARTIE.
Report.....
Observatoires................................ 8,700
Travaux littéraires.................................. "7,900
Ce qui reste à décréter, et dont une partie l'est provisoirement, est évalué à....................................................
Observations.
Le système général d'éducation donnera des bases pour régler définitivement cette dépense. U n'y a encore que quelques décrets provisoires du 20 août 1790.
ARTICLE 18. Passeports en exemption de droits.
Dans le nouveau régime ce ne sera qu'une chhrge de la régie.
Mémoire.
Observations,
On accordait ci-devant une somme de 400,000 livres, par forme d'indemnité, à la ferme générale pour les franchisés des ambassadeurs et ministres étrangers. Dans le régime actuel, les revenus de l'Etat seront régis, et les franchises ne seront plus qu'une non-valeur. Le produit des régies ne sera compté à l'avenir que déduction faite des frais de régie et des non-valeurs. Des articles de ce genre ne peuvent être compris parmi les dépenses de l'Etat; ce ne serait qu'une manière fictive d'en grossir le revenu.
ARTICLE 19.
Invalides et Quinze- Vingts.
* , i Indemnités................... 350,000 1. 1 „„„ ,
Invalides.j 0blats..................... 216;000 j 566,000 1,
Quinze-Vingts...........................................250,000
816,000
Observations.
L'Assemblée a décrété, le 10 septembre 1790, qu'il serait statué sur l'indemnité ou supplément à accorder aux Invalides après le rapport qui serait fait des frais de cet établissement; on a dû porter ici l'évaluation de ces indemnités. Il est vraisemblable que les Invalides seront compris dans la dépense du département de la guerre, ou que, s'il en est fait un article particulier des dépenses publiques, la nation reprendra en déduction les différentes propriétés de l'établissement des Invalides.
La même observation est applicable à l'hôpital des Quinze-Vingts.
ARTICLE 20.
Assemblée nationale.
Les dépenses des six premiers mois de 1791, évalués à.........4,688,000
Observations.
On n'a calculé cette dépense que sur le pied de six mois, parce que les travaux de l'Assemblée nationale avancent, de manière à faire espérer qu'ils seront finis à ce rterme. On s'est fixé à cette somme, parce qu'elle est celle des six derniers mois de 1790, et
fiarce qu'elle est supérieure à la dépense annuelle des prochaines égislatures.
Mais soit que l'Assemblée nationale soit forcée de prolonger ses séances de quelques mois, soit que la nouvelle législature vienne la
À reporter...............270,182,800
décrets.
ÉTATS DES DÉPENSES PUBLIQUES.
sommes. décrets.
Report..... ...... livres. 276,182,800
remplacer, il faut un supplément à cet article, et c'est une dépense particulière à l'année 1791. La somme de ce supplément est comprise dans la dernière partie.
ARTICLE 21.
Haute cour nationale.
Cette dépense n'est point fixée, on la porte par évaluation à.... 150,000
Observations.
L'Assemblée n'a point décrété la dépense de ce tribunal; mais, d'après le décret qui l'établit, l'évaluation ci-dessus paraît suffisante.
ARTICLE 22.
Tribunal de cassation.
Dépense également à régler, portée par évaluation à............ 400,000
Observations.
S'il y a quelque erreur dans cette évaluation, elle ne peut être bien considérable. Les calculs résultant du dernier décret s'élèvent à peu près à cette somme.
ARTICLE 23.
Supplément aux erreurs ou omissions qui peuvent se trouver 3,500,000
Observations.
Cet article de supplément était, dans ce rapport, élevé à 6 millions ; mais, l'évaluation du département de la guerre ayant été portée au maximum, le supplément a pu être diminué de cette somme.
Total du chapitre premier de la première partie..... 280,232,800
Chapitre II.
CHAPITRE SECOND.
Traitements, pensions et intérêts de la dette publique.
83
sommes.
ARTICLE PREMIER. Traitement de réforme du clergé. Évêques.
1 à Paris.......................................................................25,000
50 à 18,000 livres..............................................900,000
er">12 à 10,000 livres..............................................120,000
20 à 8,000 livres......................................................160,000
43 évêques supprimés, à 20,000 livres....................................860,000
13 évêques inpartibus, à 12,000 livres..............................................................156,000
livres. 2,221,000
Observations.
Le décret du 24 juillet, sur le traitement du clergé actuel, donne à chaque évêque conservé 12,000 livres, plus la moitié de l'excédent, pourvu que le tout n'aille pas au delà de 30,000 livres, et aux évêques supprimés les deux tiers de ce traitement. Il en est plusieurs qui, d'après le revenu dont ils jouissaient, ne seront pas dans le cas d'obtenir le maximum de 30 et de 20,000 livres.
1° Titulaires quelconques de bénéfices, autres que les évêques et les curés.
2° Les pensionnaires.
On en suppose 18,000 au prix commun de 1,400 livres.................25,200,000
Observations.
On n'a encore que des aperçus sur le nombre des ecclésiastiques autres que les évêques et les curés qui peuvent avoir droit à des traitements. Le revenu ecclésiastique de chacun d'eux est aussi inconnu en partie; on n'aura des certitudes sur ce point que lorsque les directoires des départements auront fîni le travail dont ils sont actuellement occupés, concernant la fixation des traitements. Cependant on est fondé à croire que le résultat présenté dans ce tableau s'éloigne peu de la vérité.
Il existait environ 3,566 chanoines de cathédrales, 5,000 chanoines de collégiales, 726 abbés commendataires, 111 abbés réguliers, 1,038 prieurs à collation royale; en tout: 10,451 titres de bénéfices.
Il existait aussi un très grand nombre d'autres titres de bénéfices simples à la disposition des collateurs et patrons particuliers, ecclésiastiques ou laïques. Mais il convient d'observer : 1° que plusieurs bénéfices, et les plus considérables surtout, étaient entre les mains des évêques, dont le traitement a été réglé en conséquence ; 2° que beaucoup d'ecclésiastiques, autres que les évêques, possédaient en même temps plusieurs titres de bénéfices, et cependant ils n'auront droit qu'à un seul traitement proportionné à la masse de leur revenu; 3° que le plus erand nombre des bénéfices à collation ou patronage particulier est d'un revenu très médiocre.
D'après ces diverses considérations, pour former un aperçu du traitement de cette classe de bénéficiers, ainsi que des pensionnaires, on a cru devoir supposer un nombre d'ecclésiastiques à doter avec un traitement moyen pour chacun. L'évaluation de ce nombre à 18,000 est celle qui paraît le plus probable, et le prix commun de 1,400 livres doit approcher infiniment de la vérité.
On sait bien qu'il y a plus de 18,000 pensionnaires et titulaires de canonicats ou bénéfices autres que les évêques et les curés, mais l'on sait, avec la même certitude, que le traitement du plus grand nombre n'ira pas, à beaucoup près, à 1,400 livres. Il y en a beaucoup qui n'ayant joui jusqu'à présent que de 100, 200, 300 livres, ou même moins, ne jouiront encore à l'avenir que de la même somme. L'évaluation du présent tableau est faite d'après cette juste compensation.
Au surplus, l'inexactitude des déclarations fournies par beaucoup d'ecclésiastiques, le défaut absolu de déclarations de la part de plusieurs d'entre eux, les pots-de-vin dont la majeure partie des baux était infectée, réduisent à de simples conjectures, jusqu'à la fin du travail des directoires des départements sur cette matière. Au reste, si cette évaluation est trop forte, il vaut mieux courir le risque d'avoir un excédent de recette que de s'exposer à un déficit.
Religieux mendiants ou non mendiants.
18,000, tant religieux que convers, y compris les abbés réguliers, au taux moyen de 900 livres..............................................16,200,000
Observations.
Cette somme est calculée sur le nombre connu des religieux, et d'après les traitements fixés par les décrets du mois de mars 1790.
A reporter..............43,621,000
ÉTAT DES DÉPENSES PUBLIQUES.
sommes.
Report...............................livres. 43,621,000
Religieuses.
40,000 religieuses ou sœurs converses, au prix moyen de 500 livres............20,000,000
Observations.
Le nombre des religieuses n'est pas encore entièrement connu, mais l'évaluation ci-dessus approche certainement beaucoup delà vérité. Le prix moyen est également évalué d'après les décrets.
Abbesses et chanoinesses.
Cet objet ne peut être présenté qu'en aperçu, on l'évalue à........................... 1,000,000
Pensions aux curés qui n'auraient pas prêté le serment, et autres objets imprévus ou 8,000,000
Observations.
En additionnant les sommes consacrées aux ecclésiastiques chargés du culte, traitement. qui s'élève à 81,226,000 livres, et le traitement de retraite du clergé supprimé, montant à 72,621,000 livres, on trouvera un total de 153,847,600 livres, consacrés par la nation à ce qu'elle n'a pas cessé de regarder comme le premier de ses devoirs.
ARTICLE 2.
Secours accordés aux trois apanagistes pour le payement de leurs dettes ou pour indemnités.
Secours de 20 ans à Monsieur, première année décroissante.............. 500,000 1. )
Secours de 20 ans à M. d'Orléans, pour indemnités des améliorations faites ; 1,500,000
Le secours accordé à M. d'Artois n'est pas compris ici, il fait partie des rentes viagères.
ARTICLE 3.
Pensions.
Elles sont fixees par L'Assembtee a..................................... 14,000,000 1.
Traitement des Hollandais réfugiés et Acadiens......................... 816,000 14,816,000
Cet article comprend, soit dans les 12 millions de pensions, soit dans les 2 millions de gratifications ou indemnités, la totalité des récompenses accordées par la nation. Les anciennes pensions sur les économats, qui seront continuées, feront partie de l'un de ces articles.
ARTICLE 4.
Dettes.
Rentes viagères au 1" janvier 1791................................... 101,823,846 1. 162,823,846
251,760,846
PREMIÈRE PARTIE.
Report.
ARTICLE S.
Intérêts de la dette non constituée, exigible. Elle consiste :
1° Dans la dette non constituée de l'ancien corps du clergé, déduction faite de ce qui a été reconnu appartenir à des corps et communautés ecclésias-
, tiques..........................................
Évaluation de la dette particulière des corps et communautés ecclésiastiques........................
2° Les offices de magistrature, évalués à...........
3° Les charges de finances.......................
4° Les cautionnements et fonds d'avance...........
5° Les charges des maisons du roi, de la reine et des
princes.......................................
6° Les charges et emplois militaires...............
7° Les gouverne m ents de l'intérieur...............
8° Les dîmes inféodées...........................
9° Les effets suspendus ou échus.................
10° L'arriéré des départements.................
Total de l'exigible..............
Sur cette somme on doit rembourser en 1791.
Ainsi il ne doit rester que.......................
1° Mais ce qui restera des charges de la maison du roi, etc., ne doit rien coûter en intérêts, étant déjà payés par la liste civile. 2° Ce qui restera des charges et emplois militaires est dans le même cas, étant payés par le département de la guerre.
3° Ce qui reste de l'arriéré des départements ne pouvant provenir que du défaut de preuve de la dette ne portera point d'intérêts. Les deux premiers objets ci-dessus réunis permettent, sur les intérêts compris dans la feuille ci-contre, une réduction de...............................
Il reste en intérêts à payer...........
11 faut observer que plusieurs titres des créances ci-dessus seront donnés en payement de Domaines nationaux, et feront cesser des intérêts. En n'évaluant qu'à cinquante millions les sommes employées de la sorte, en 1791, il résultera une réduction d'intérêts de.........................................
Ainsi le calcul des intérêts qui resteront à payer sur cette partie est réduit à.........................
Mais, comme dans l'emploi des 600 millions de remboursement une partie servira à payer des arriérés qui ne feront pas cesser des intérêts, il est juste d'en tenir compte ici. En supposant que les sommes employées de la sorte s'élèvent à 60 millions, il convient de rétablir dans la colonne des intérêts qui resteront à payer.................................
Total des intérêts qui resteront à payer....
Observations
Si les remboursements avaient tous lieu le 1er janvier, le calcul ci-dessus serait rigoureusement juste ; mais comme les remboursements sont successifs, il faut nécessairement compter sur un décompte d'intérêt en supplément de la somme ci-dessus. C'est pour y faire face, ainsi qu'à quelques articles de dépenses qui ne sont pas encore réglées, et pour lesquelles il faudra des suppléments, que, dans la troisième partie, ou propose un fonds de 20 millions comme dépense particulière à l'année 1791.
capitaux.
livres.
85,000,000
40,000,000 450,000,000 118,143,885 203,401,400
52 000,000
35,121,984 3,783,150 100,000,000 119,856,925 120,000,000
1,287,307,344 600,000,000
687,307,355
A reporter.
interets.
livres.
3,458,984
2,000,000 22,500,000 5,907,194 10,105,218
2,600,000 1,756,099 189,157 4,000,000 5,992,846
58,509,498 30,000,000
28,509,498
4,356,099
24,153,399
2,500,000
21,653,399
3,000,000
24,653,399
sommes.
livres. 251,760,846
24,653,399
276,414,245
ÉTAT DES DÉPENSES PUBLIQUES.
Report.. .... ...........SOMMES. livres 276,414,245
ARTICLE 6
Lo reste des effets à terme non échus, mais déclarés remboursables, coûte en intérêts..25,460,332
Total general......................................301,874,577 Nota. Les provinces, qui avaient ci-devant une administration particulière, ont fait des emprunts qu'elles acquittaient en capital et en intérêts. Elles demandent que la nation se charge de ces dettes. On n'a pu, avant la décision de l'Assemblée, porter det article SOMMES. que pour,....................................................................memotre.
Recapitulation des deux chapitres de la premiere partie des expenses publiqucs.|
cuapitre premier.........................................280,232,800
Chapitre second.......................................301,874,51
Total de la 1™ Partie................................................582,107,377
iEl XJÈNE UJiTJE,
SECONDE PARTIE.
DÉPENSES DES DÉPARTEMENTS.
NOMS des
départements.
NOMBRE des
districts.
Article premier.
Justice de paix, tribunaux et administration.
L'Aisne.............
L'Allier.............
Bouches-du-Rhône..,
Cher................
Charente........... ;
Les Àrdennes......
Le Cantal..........,
Côte-d'Or..........
L'Aude............
La Corrèze.........
Basses-Alpes.......
L'Ardèche..........,
L'Ariège............
Haut-Rhin..........
Le Gers............
Le Doubs..........
La Dordogne.......
Finistère...........
Haute-Garonne.....
L'Indre............
La Sarthe..........
Le Jura............
Loir-et-Cher.......
Loire-Inférieure....
Lot-et-Garonne.....
Mayenne-et-Loire...
La Manche.........
La Haute-Marne....
La Mayenne.......
Morbihan..........
Pas-de-Calais......
Puy-de-Dôme......
Hautes-Pyrénées...
Le Gard...........
L'Yonne...........
La Corse..........
Hautes-Alpes.......
Côtes-du-Nord......
L'Oise.............
L'Ain..............
L'Aube............
L'Aveyron..........
Calvados...........
Charente-Inférieure.
La Creuse..........
La Drôme..........
L'Eure............
L'Eure-et-Loir......
La Gironde.........
L'Hérault..........
L'Ille-et-Vilaine.... L'Indre-et-Loire
L'Isère............
Les Landes........
Haute-Loire........
Le Loiret..........
Le Lot...........
La Lozère........
6 7
7 7 6 6 4
7 6
4
5 3 3
3
6 6 9 9
8 6 9 6 6 9 9 8 7 6
7 9
8 8
5 8 7 9
4 9 9 9
6 9 6 7 7 6 6 6 7 4 9 7 4 4 3 7 6 7
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H
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ta S Ut es w S a
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a. er">M a
livres.
210,000 240,400 260,000 216,000 198,300 200,000 134,000 269,500 226,300 150,000 176,300 126,000 120,000 120,000 190,000 200,000 287,000 296,000 268,000 197,900 276,000 212,300 188,000 232,000 290,800 312,000 233,700 219,900 236,900 288,000 303,400 241,700 186,000 260,000 174,300 282,100 148,700 302,400 297,600 277,600 205,500 293,900 219,900 241,900 232,300 210,300 209,000 194,300 260,000 166,300 302,000 213,300 196,600 137,300 121,900 260,000 202,300 226,500
TOTAL de chaque partie.
DECRETS.
livres.
OBSERVATIONS.
Le calcul des dépenses de cet article a pour base les décrets, et pour règle d'évaluation le compte précis d'un grand nombre de districts. C'est par approximation qu'on a estimé la dépense de ceux qui n'ont pas encore fourni en détail l'état de leurs frais d'administration.
NOMS des
DÉPARTEMENTS.
La Marne.........
La Meurthe.......
La Meuse.........
La Moselle........
La Nièvre.........
Le Nord..........
L'Orne............
Paris..............
Basses-Pyrénées .. Pyrénées-Orientales
Bas-Rhin.........
Rhône-et-Loire... Haute-Saône.......
Saône-et-Loire....
Seine-et-Oise......
Seine-Inférieure... Seine-et-Marne.... Les Deux-Sèvres..
La Somme........
Le Tarn..........
Le Var............
La Vendée........
Haute-Vienne.....
La Vienne.........
Les Vosges.......
Total......
NOMBRE des
DISTRICTS.
6 9 8 9 9 8 6 3 6
3
4 6 6 7 9 7
5
6 5
5 9
6 6 6 9
544
en t-
t/3 S « S
9 « a
S O. H
© S
m g
-M «
livres.
219,900 290,000 274,000 290,000 273,000 229,700 205,500 600,000 196,300 102,000 142,300 150,000 202,300 283,700 276,200 244,000 172,300 202,300 230,000 190,000 300,000 210,000 202,300 202,300 276,300
18,906,800
TOTAL de chaque partie.
livres.
18,906,800
DÉCRETS.
OBSERVATIONS.
Article 2.
Report,
Article 2.
Frais des prisonniers et des procédures criminelles.
Dans l'état ancien cette dépense était portée à.................................
Article 3. Chemins.
Cette dépense est évaluée à.
Article 4. Entretien des bâtiments publics.
On les évalue ici sur le pied de l'ancienne administration à..................«......
Article S. Perception des impôts directs.
On évalue cette dépense à.........
Article 6. Hôpitaux.
Secours anciens du gouvernement.
Article 7. Secours.
Le comité de mendicité a demandé, le 19 janvier dernier, pour toutes les dépenses relatives aux dépenses, enfants trouvés, etc. (1).............................
Article 8. Frais de garde et de police des villes.
Cette dépense sera payée sur le produit des revenus ou octrois des villes.........
Total de la seconde partie.
TOTAL de chaque partie.
DÉCRETS.
OBSERVATIONS.
livres. 18,906,800
Le nouvel ordre judiciaire n'ad-Imet plus les longs transports des
ÎLe décret du 5 septembre 17901 prisonniers, les envois et gros-ordonne que les palais de justice)soyements des procédures ; il est et prisons seront entretenus aux\à présumer que cette dépense dépens des justiciables. fsera à l'avenir beauconp moins
F considérable que sous l'ancien ré-\gime.
20,000,000
f La somme de cette évaluation \est la même que dans l'ancien .{régime. Il est probable que la /nouvelle administration sera plug ^économique.
Il est impossible de déterminer
!Le décret du 10 septembre 1790,icette dépense, dont une grande rendu relativement à l'entretien/partie sera à la charge des villes, des églises, presbytères, hôpitaux, et qui ne pourra être connue que etc., n'est que provisoire. par une longue expérience. Elle
est calculée ici sur l'ancien pied.
Le décret du 14 novembre 1790, porte que le traitement des receveurs sera à raison de 3 deniers pour livre sur les premiers 200,000 livres, 2 deniers pour livre sur les seconds 200,000 livres, 1 denier pour livre sur l'excédent des 400,000 liy. jusqu'à 600,000 liv., et au delà de cette dernière somme 1 demi-denier.
8,000,000
Cette évaluation est celle portée dans le rapport du comité d'imposition.
Le décret du 23 novembre 1790, [titre 5, article 1, ordonne que ' l'adjudication du recouvrement de ! la contribution foncière sera faite au rabais, en présence et de I l'ordre du conseil général de \ chaque commune.
[ Cet objet n'étant encore fixé [par aucun décret, les hôpitaux , layant des biens sur lesquels l'As-
I Le décret du 10 septembre 1790/semblée n'a pas prononcé, et 950,000 jrenvoie la dépense des hôpitaux\jouissant d'une partie des oc-vaux départements. itrois des villes, on n'a porté ici
'comme supplément que les som-Imes fournies par le Trésor public.
4,270,887
Mémoire.
59.807,687
A décréter.
DÉPENSES PARTICULIÈRES A L'ANNÉE 1791.
Article premier. Travaux de charité.
Somme à répartir entre tous les départements ...............................
TOTAL de chaque partie.
Article 2. Assemblée nationale.
Supplément pour les six derniers mois 1791, évalué à.......................... ....
Article 3.
Travaux de Cherbourg, le Havre, Dunkerque et autres "ports.
On les évalue ici par aperçu, pour l'année 1791, à................................
Article 4. Travaux de Paris. Pont de Louis XVI, par évaluation.
livres.
15,000,000
4,000,000
4,000,000
Article s. Prolongation d'anciennes dépenses
Portées par évaluation à..
Nota. L'administration s'est chargée des dépenses de Paris jusqu'à l'organisation de l'impôt, mais le Trésor public reçoit la totalité des droits d'entrée ui sont encore sur l'ancien pied.
2® On atelier de 27 à 28,000hommes est payé par le Trésor public, indépendamment des sommes qui précèdent ; c'est un objet d'environ................
A reporter.
20,000,000 liv.
600,000
27,000,000
7,000,000
50,600,000
DECRETS.
Décret du 16 décembre 1790.
OBSERVATIONS.
L'évaluation de cette dépense (a dû être faite pour l'année 1791, l soit que les séances de l'Assem-Iblée nationale soient prolongées, Isoit qu'une nouvelle législature /vienne la remplacer. Mais dans l'état futur, la somme portée pour Icet objet dans la première partie Ides dépenses publiques sera plus [que suffisante pour l'acquitter. [ Celle-ci est donc pour une dépense particulière à l'année 1791.
A décréter.
Les travaux de Cherbourg ont coûté, dans les derniers mois de l'année 1790, 2,492,242 livres : il faut pourvoir en outre aux tra^ vaux du Havre, de Dieppe, etc.
A décréter.
Les dépenses de la guerre et de la marine n'étant pas encere fixées, auront besoin d'un supplément quelconque. La prolongation de l'exercice du conseil, de quelques tribunaux, de quelques bureaux d'administration, et des compagnies de finance,donneront lieu à quelques frais extraordinaires. Enfin les 600 militons qui doivent être remboursé» ne le seront pas tout à coup : il y àura des intérêts à payer pour une partie de cette somme pendant plusieurs mois : telles sont les raisons qu? ont fait employer en frais extraordinaires la somme de 20 millions.
Les ateliers de Paris paraîtront l une dépense très inutile. Jusqu'ici, ^malheureusement, elle a cté très ^nécessaire. Les mois d'hiver s'é-Jièvent au-dessus de l'évaluation 'de 7 millions par an; mais pour ^toute l'année ce calcul est juste ;
TOTAL de chaque partie. DÉCRETS. OBSERVATIONS.
Report........................ Article 6. Dépenses relatives d la sûreté intérieure et extérieure Equipement des centmille soldats auxiliaires à 50 livres par homme.. 5,000,000 liv. Dépenses pour porter au pied de guerre 50 régiments tant infanterie que cavalerie; pour les équipages d'artillerie et effets de campagne, évaluées à. 12,000,000 total..... 17,000,000 Expédition aux îles de r Amérique, évaluée à.. 6,000,000 Article 7. Fonds extraordinaires. Décrétés en 1790 pour les fortifications, sur lesquels il reste à payer.......... Total de la troisième partie........ 50,600,000 23,000,000 3,000,000 76,600,000 décrété le 28 janvier 1791. Les calculs des préparatifs de défense ne sont faits ici que par er"> évaluation. Le plus ou moins dépend des événements. Si les préparatifs n'étaient que le préliminaire d'une vraie dépense de guerre, l'insuffisance de l'évaluation serait évidente ; mais alors la fortune de l'Etat serait formée des fortunes de tous les citoyens.
RÉCAPITULATION GÉNÉRALE DE L'ANNÉE 1791.
PREMIÈRE PARTIE.
Dépenses du Trésor public.
Chapitre premier...................................................................... 280,232,800 livres
Chapitre second......................................................................................................................................301,874,577
Total des dépenses du Trésor public........................582,107,377
La caisse de l'extraordinaire doit fournir sur les revenus des domaines nationaux....................60.000,000
Reste à prendre sur les revenus ordinaires....................................................................................522,107,377
55,000,000
La contribution patriotique y entre pour................................ 35,000,000 liv.
La vente des sels et tabacs emmagasinés............................... 20,000,000
Il restera à percevoir des revenus ordinaires........................................ 467,107,377
SECONDE PARTIE.
Dépenses des départements.
Cette dépense est évaluée à............................................................... 59,807,687 livres
On estime que cette dépense peut être payée par des sols additionnels aux impositions générales.
Les objets semblables ou analogues formaient dans l'ancienne administration un supplément aux impositions ordinaires.
TROISIÈME PARTIE.
Dépenses particulières à Vannée 1791.
Cette dépense qui ne peut être prise sur les impositions ordinaires, et qui paraît devoir être
Sayée par les fonds de la caisse de l'extraordinaire, est évaluée à....................... 76,600,000 livres.
rota. Pendant que l'on travaillait à l'impression de ces états, l'Assemblée nationale a décrété la dépense de l'expédition aux Iles du vent à 8,991,248 livres, ce qui surpasse de 2,991,248 livres l'évaluation portée à la troisième partie.
Mais les suppléments réservés par les articles précédents suffiront à cet accroissement de dépense, et il ne doit rien changer dans l'évaluation totale.
(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport de M. de Montesquiou).
li me semble, Messieurs, qu'il importe beaucoup d'ajouter quelque chose à Impression que yous venez d'ordonner, j'ai donc l'honneur de vous proposer la publicité de toutes les opérations en finances, et l'impression d'un état exact de tout ce qui était au Trésor public à l'époque du 1er mai 1789, de tout ce qui y est entré depuis, et les dépenses qui ont été faites. C'est par l'emploi que vous justifierez d'avoir fait des contributions publiques, que vous parviendrez à donner de ]a confiance clans vos opérations. (Applaudis séments à droite ; murmures à gauche.)
Nous réclamons l'ordre du jour.
(L'Assemblée décide qu'elle passe à l'ordre du jour.)
11 me paraît, Messieurs, que ce n'est qu'attendu le moment et la position actuelle que la proposition qui a été faite n'a pu être délibérée. C'est, en effet, une opération qui doit s'effectuer, mais à la fin de vos travaux, avec le rendement de comptes universels dans l'ensemble de vos opérations, et au moment où, toutes étant consommées et achevées, elles présenteront leurs résultats définitifs, résultats qui alors seront certainement avantageux, et tels que la nation l'attend et doit le désirer. Mais, comme cependant cette opération-là demande des travaux précédents, comme le comité des finances aura à s'en occuper longtemps pour rapprocher et réunir sei matériaux, je pense qu'il n'ya pas d'inconvénient, après avoir passé à l'ordre du jour dans le moment actuel, où véritablement cet état n'était pas prêt, de renvoyer cependant au comité des finances, afin de préparer le travail qui doit nous mettre à même de publier à la fin de nos travaux ce même tableau dont on vient de parler. Voilà quelle a été, selon moi, l'intention de l'Assemblée, et je pense qu'il est bon qu'elle la fasse connaître.
La section du comité des finances, dite du Trésor public, s'occupe maintenant de la proposition qui vient de vous être faite, et déjà son travail est fort avancé; nous osons assurer que la nation entière n'aura, à la fin de notre session, aucune espèce de doute sur l'administration des finances.
(L'Assemblée ordonne le renvoi au comité des finances),
L'ordre du jour est la suite de la discussion sur les jurés.
, rapporteur. Nous en sommes restés, Messieurs, à l'article5 du titre XI. Cet article est ainsi conçu :
Art. 5.
* Sur tous les citoyens éligibles inscrits dans les registres des directoires, le procureur général syndicdu département en choisira, tous les trois mois, 200 qui formeront la liste du juré du jugement. Cette liste sera imprimée et envoyée à tous ceux qui la composeront. » (Adopté.)
Un membre propose de décréter, comme article additionnel à l'article 5, que les citoyens éligibles sont ceux qui payent la contribution requise.
(Cette motion est rejetée.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 6 qui est ainsi conçu :
« Les deux tiers de la liste, autant qu'il sera possible, seront parmi les citoyens de la ville où siège le tribunal criminel, qui se seront fait inscrire. »
Un membre propose par amendement de substituer aux mots: les deux tiers,ceux-ci : la moitié.
Un membre propose par sous-amendement de remplacer les mots : la moitié, par ceux-ci : le quart.
Un membre propose de donner aux tribunaux criminels vacances du 15 juillet au 15 octobre.
propose par amendement que les deux tiers des jurés soient pris dans le district de l'accusé et le surplus dans la ville où siège Je tribunal.
Un membre propose de ne jamais prendre plus du tiers des jurés dans la ville du siège du tribunal.
demande que le comité rédige en expressions facultatives les dispositions impératives de l'article.
, rapporteur. Les objections qui viennent d'être faites ont déjà frappé le comité; les dispositions proposées doivent être plutôt un conseil à donner aux électeurs qu'un ordre de la loi. En conséquence, le comité retire l'article 6.
L'article 7 du projet deviendrait donc l'article 6. Il est ainsi conçu :
Art. 6 (ancien 7).
« Un citoyen ne pourra, sans son consentement, être placé plus d'une fois sur la liste, pendant la révolution d'une année; et si, pendant les 3 mois que son nom sera sur la liste, il a assisté à une assemblée de jurés, il pourra s'excuser d'en remplir une seconde fois les fonctions; le tout à moins qu'il n'habite la ville même du tribunal criminel ». (Adopté.)
Un membre propose de décréter qu'aucun ci-, toyen ne puisse, sans son consentement, être placé plus d'une fois sur la liste du juré d'accusation, comme sur celle du juré de jugement, pendant la même année.
(Cette proposition est renvoyée au comité.)
Les articles 8 et 9 du projet (devenus 7 et 8), sont décrétés comme suit :
Art. 7 (ancien 8).
« Nul ne pourra être juré de jugement dans la même affaire où il aurait été juré d'accusation.
Art. 8 (ancien 9).
« Lorsqu'il s'agira de former, le 1er de chaque mois, le tableau des 12 jurés, ainsi qu'il est dit article 12, titré 4, le président du tribunal criminel, en présence du commissaire du roi et de deux officiers municipaux, lesquels prêteront le serment de garder le secret, présentera à l'accusateur public la liste des 200 jurés; celui-ci aura la faculté d'en exclure 20 sans donner de motif; le reste des noms sera mis dans le vase, pour être tiré au sort, et former le tableau des 12 jurés ».
, rapporteur, donae lecture de l'article 9 (ancien 10) : :
« Le tableau sera présenté à l'accusé qui pourra récuser ceux qui le composent. Ils seront remplacés par le sort.
proposent, par amendement : 1° que le tableau soit présenté a l'accusé 24 heures au moins avant la récusation; 2° que l'accusé puisse proposer sa récusation à vue; mais que cette seconde partie soit renvoyée au comité.
Un membre propose de porter le délai à 3 jours.
, rapporteur. J'adopte le délai de 24 heures et je demande la question préalable sur les autres amendements.
(La question préalable est adoptée.)
L'article 9 est décrété comme suit :
Art. 9 (ancien 10).
« Le tableau des douze jurés de jugement sera présenté à l'accusé, qui pourra, dans les24 heures, récuser ceux qui le composent. Ils seront remplacés par le sort. » {Adopté.)
Art. 10 (ancien 11).
« Lorsque l'accusé aura exercé 20 récusations, celles qu'il voudrait présenter ensuite devront être fondées sur des causes dont le tribunal jugera la validité. » (Adopté.)
Art. 11 (ancien 12).
« Cette récusation de 20 jurés pourra être faite par plusieurs coaccusés, s'ils se concertent ensemble pour l'exercer; et s'ils ne peuvent s'ao-corder, chacun d'eux séparément pourra récuser 10 jurés. » (Adopté.)
Art. 12 (ancien 13).
« Dans ce dernier cas, chacun d'eux récusera successivement un des jurés, jusqu'à ce que sa faculté de récusation soit épuisée. » (Adopté.)
Art. J3 (ancien 14).
« Lorsque les citoyens inscrits sur la liste des 200, formée par le procureur général syndic, et arrêtée par le directoire, prévoiront, pour le 15 du mois suivant, quelque obstacle qui pourrait les empêcher de se rendre à l'assemblée du juré, ils en donneront connaissance au président du tribunal criminel, deux jours au moins avant le premier du mois pendant lequel ils désirent d'être excusés. » (Adopté.)
Art. 14 (ancien 15),
« La valeur de cette excuse sera jugée dans les 24 heures par le tribunal criminel. » (Adopté.)
Art. 15 (ancien 16).
« Si l'excuse est jugée suffisante, le nom de celui qui l'a présentée, sera retiré du nombre de ceux sur lesquels le tableau des 12 sera tiré au sort; si elle est jugée non valable, son nom sera soumis au sort. » (Adopté.) ,
Art. 16 (ancien 17).
« S'il est du nqmbre des 12 qui doivent composer le juré, il lui sera signifié que son excuse a été jugée non valable; qu'il est sur le tableau du juré, et qu'il ait à se rendre au jour fixé pour l'assemblée du juré. Copie de cette si-
gnification sera laissée en outre aux officiers municipaux du lieu de son domicile, qui seront tenus d'en donner connaissance» » (Adopté.)
Art. 17 (ancien 18).
« Tout juré, qui ne se sera pas rendu sur la sommation qui lui en aura été faite, sera condamné en 50 livres d'amende, et à être privé du droit d'éligibilité et du suffrage çendant 2 ans. Sont exceptés de la présente disposition, ceux qui seraient retenus pour cause de maladie. » (Adopté.)
Art. 18 (ancien 19).
« Dans tous les cas, s'il manquait un des jurés au jour indiqué, le directeur du juré le fera remplacer par un des citoyens de la ville, pris au sort dans la liste des 200, et subsidiairement parmi les éligibles. » (Adopté.)
lève la séance à deux heu-res et demie.
PRÉSIDENCE DE M. RIQUETTI DÉ MIRABEAU L'AÎNÉ.
Séançe du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance de samedi soir, qui est adopté.
fait lecture d'une lettre de M. le maire de Paris, par laquelle il fait part à l'Assemblée de la vente de deux maisons : Tune, située rue des Marais, louée 1,600 livres, estimée 25,600 livres, a été vendue 30,000 livres; l'autre, située rue des Cordiers, louée 480 livres, estimée 4,895 livres, a été vendue 12,000 livres.
Dans ce moment, Messieurs, vos huissiers et vos commisse croient dans l'obligation de distribuer dans vos comités, comme toute autre distribution légale et officielle qui serait faite, une horrible diffamation contre M. Régnier.
Je crois, Messieurs, que je dois prendre vos ordres à cet égard pour arrêter des distributions qui,"en quelque sorte, ont un caractère légal, lorsqu'elles se font dans vos bureaux..
Certes, il m'est permis d'exprimer ici combien je crois que vous devez regarder comme au-dessous de vous, comme impossible d'atteindre à votre hauteur, ces restes des cris expirants d'une faction dont on connaît le but, l'objet et l'impuissance ; mais vous ne devez pas souffrir, ce me semble, dans l'enceinte même du lieu de vos séances, un semblable procédé à l'égard d'un des membres le plus estimables de cette Assemblée. On l'avait attaqué ; sa conduite a été mise au grand jour, et sa probité n'est sortie que plus éclatante d*un sévère examen.
(de Saint-Jean-d'Angély). Je me
Plusieurs membres : Nous appuyons, la motion,
(de Saint-Jean-d'Angély).Et je demande qu'il soit fait mention de cet ordre dans le procès-verbal.
.(Cette motion est décrétée.)
Messieurs, j'ai cru m'apercevoir, à la lecture du procès-verbal, c|ue certains corps administratifs se refusaient à donner le traiter ment à ceux des ecclésiastiques fonctionnaires publics qui n'ont pas prêté lé serment prescrit par la loi du ZI novembre, Je crois, Messieurs, qu'il n'y a rien de plus tyrannique, de plus contraire à cette loi même, que de refuser ce traiter ment et de considérer comme des réfractaires ceux qui refusent le serment; car ils ne font qu'user d'uue faculté qui leur est accordée par la loi même.
La loi dit, en effet, que ceux gui refuseraient de prêter le serment seront assimilés aux démissionnaires. 11 s'ensuit que ceux qui refusent le serment savent être traités comme ceux qui ont donné leur démission volontairement.
En conséquence, je demande que l'Assemblée veuille bien statuer, par un décret explicatif de la loi du 27 décembre, que ceux des ecclésiastiques fonctionnaires publics qui auront refusé de prêter le serment, recevront le traitement ordonné par la loi du 24 juillet.
Le sort des vicaires qui étaient payés par les fabriques, hôpitaux et autres que les gros décimateurs, doit être pris en considération,
Je demande que le comité ecclésiastique soit tenu de présenter un projet de décret pour établir par qui ces vicaires seront provisoirementpayés.
Il faudrait également pourvoir au sort des curés et des missionnaires qui donneraient leur démission.
On répand parmi le peuple que l'intention de l'Assemblée nationale est de réduire à la mendicité les pasteurs qui croient ne pas pouvoir prêter le serment; certainement, Messieurs, l'intention de l'Assemblée n'est pas de traiter les curés autrement que les évéques. Il ne reste donc plus, pour remplir toute justice, que de déterminer quel sera le traitement des curés et des missionnaires qui donneraient leur démission.
Je demande que le comité ecclésiastique soit chargé de vous présenter très incessamment un projet de décret sur cet objet.
, Par amendement à la proposition de M. Martineau, je demande que le comité ecclésiastique soit tenu de nous présenter demain, à l'ouverture de la séance, ce projet de décret.
(L'Assemblée renvoie ces différentes motions au comité ecclésiastique, pour en rendre compte dans la séance de demain).
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès verbal de la séance d'hier, qui est adopté.
fait lecture d'une lettre de M. Fleurieu, ministre de la marine, contenant les
noms de ceux des agents du pouvoir exécutif qui ont prêté le serment,
Ce sont MM. :
Dupont, consul à Alicante.
Puyabry, chargé des affaires de la marine et du commerce, à Madrid.
Puyabry, chancelier à Madrid.
Dannery, cpnsul à Malaga.
Esquirol, chancelier à Malaga.
Menville d'Aurin, vice-consul à Yelez-Malaga.
Poirel, employé au consulat de Cadix.
Sicard, prévôt du consulat à Cadix.
Sicard, chancelier audit consulat;
Emmanuel-Charles Coste, employé audit consulat.
Jean-Baptiste Poirel, vice-consul audit consulat.
Castagny, consul à Carthagène.
Simon de Brosse-Ronde, consul à Elseneur.
Philippe Genault, vice-consul au PorUdes-Aigles.
De Berthelet, consul à Livourne.
Favède, chancelier audit Consulat.
Le Seurre, consul à Nice.
Roussel, vice-consul à Qoron.
De Launey, consul à Oran.
Mure, consul général en Egypte.
Moutte, agent du commerce à Rome.
Digne, consul à Rome.
Philippe-Jean-Joseph Lagau, vice-consul à Mecklenbourg.
Mora, chancelier du consulat de Rome.
Jacques Garibalda, vice-consul à Savone.
Châteaufort, consul général à Lisbonne.
Charles-François Garnier, prêtre chapelain de l'Eglise française à Lisbonne.
Jacques^Philippe de la Tuellière, vice-consul à Belem.
Le Blond, consul à Venise.
Bisconstin, chancelier dudit consulat.
Messieurs, j'ai l'honneur de faire part à l'Assemblée, au nom de la ville d'Auxenre. que tous les religieux de cette ville ont renoncé à la vie commune et qu'ils ont quitté le costume ; que toutes le3 religieuses ont déclaré vou» loir continuer à vivre en communauté et qu'elles ont continué leur confiance par la voie du scrutin à leurs supérieures économes respectives; que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics out prêté leur serment sans restriction.
Les curés, au nombre de 12, ont également prêté le serment. 2 autres ont différé de le prêter; leurs cuFes étant supprimées, ils ne se regardaient plus, par ce fait, comme fonctionnaires publics.
, au nom du comité d'aliénation, propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites par les municipalités ci-après nommées, en exécution des délibérations prises par le conseil général de leur commune, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont les états sont annexés à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des évaluations ou estimations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décrétée le 31 dudit mois de mai dernier;
« Déclare vendre les biens ci-après mentionnés
aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai, et pour les prix de,
Savoir :
A la municipalité de Paris, pour la somme de.................. 4,142,207 1. 11 s. 3 d.
Département de Loir-et-Cher.
À la municipalité de Vendôme, pour celle de................... 1,361,504 » 9 » 2 »>
Département de Seine-et-Marne.
A la municipalité de
Provins, pour celle de. 1,517,579 » 11 » 2 »
A la municipalité de
Provins, pour celle de. 1,142,742 » 18 10 » »
Département de Seine-et-Oise.
A la municipalité d'Asnières et Viarmes, pour celle de.........480,043 » 2
A la municipalité de Gagny, pour celle de..1,780 » » »
A la municipalité de Montfermeil, pour celle de...............9,696 » »> »
A la municipalité de Montlignon pour celle de.................31,125 » » »
A la municipalité de Sevran, pour celle de..55,740 » »
A la municipalité de Noisy-sur-Oise, pour..26,928 » 16
A la municipalité d'Eragny, pour celle de..................5,195 » 6 »
A la municipalité de Cergy, pour celle de..89,904 »> 6 »
A la municipalité de Livry, pour celle de...116,886 ». » »
A la municipalité de Ghauffour, pour celle de...................19,800 »» »
A la municipalité de Villiers-le-Sec, pour...13,058 » 2
A la municipalité de Boisemont, pour celle de...................25,840 » 1 ».
A la municipalité dé Meuncourt, pour celle de...................1,037 »» 15 »
A la municipalité d'Argenteuil, pour celle de...................47,387 »» 5:»»
A la municipalité de Flins, pour celle de...11,143 » 4 »
A la municipalité d'Andresy, pour celle de...................163,935 »> 3 »
A la municipalité de Boasle, pour celle de..50,104 » 10 »
A la municipalité de Chatou, poup celle de.5,227 » »
A la municipalité de Nezel, pour celle de..1,267 » . 3 »
A la municipalité de Mezy, pour celle de...9,722 »» 17. »
A la municipalité des Mureaux, pour celle de. 38,042 4 » » » »
A la municipalité de Vaux, pour celle de...10,700 » 16 > » »
A la municipalité de Garrières-sous-Poissy, pour celle de.........48,131 » 2 » 5 »
A la municipalité de Saint-Lambert, pour celle de..............67,749 » » » >
« Le tout payable de la manière déterminée par le même décret, et ainsi qu'il est pins au long détaillé aux décrets et états d'estimation respectifs qui sont annexés à la minute du présent procès-verbal. »
Un membre annonce que, d'anrès l'extrait des registres des adjudications définitives des domaines nationaux' du dictrict de l'Hôtel, il résulte qu'il a été mis en vente, les 24, 31 janvier et 4 février, des biens estimés à la somme de 606,260 livres, lesquels ont été vendus 903,2371. 8 s., ce qui fait une augmentation au profit de la nation de 296,977 1. 8 s.
, au nom du comité d'emplacement des tribunaux et des corps administratifs. Messieurs, vous avez chargé votre comité d'emplacement des tribunaux et corps administratifs de^ vous présenter des dispositions générales et définitives, pour faire cesser l'espèce d'invasion de plusieurs directoires de district et de département, qui ont commencé par s'emparer des bâtiments nationaux qu'ils ont cru à leur convenance, sans daigner nous apprendre s'ils entendaient les acheter ou les louer. Une idée fausse les a égarés : il faut, en les rappelant aux principes, maintenir la subordination et protéger l'intérêt national ; il faut une mesure tellement combinée qu'elle comprenne à la fois et ceux dont les procédés ont été conformes à vos décrets, et ceux qui ne les ont pas respectés, de manière que ces derniers soient forcés à révéler le secret de leur établissement.
Pour remplir cet objet, il est nécessaire de les obliger tous : 1° à rendre compte de la manière dont ils se sont établis, c'est-à-dire à expliquer quelle est la nature de l'édifice qu'ils occupent, s'il est national ou édifice privé; s'ils en occupent la totalité ou s'ils se sont bornés à une portion seulement ; 2° à dire si cet établissement est provisoire ou définitif, et s'ils ont rempli l'indispensable formalité de l'autorisation ; 3° à produire un plan tant des différentes pièces ou appartements qu'ils occupent et de leur distribution, que du surplus de l'édifice et de ses dépendances; 4° à y joindre un état détaillé de la dépense totale de l'établissement. Cette filiation de précautions ne paraîtra minutieuse qu'aux esprits inattentifs. Rien n'est petit dans ce genre, et les détails finissent par devenir des masses. Voilà l'idée qu'il ne faut jamais abandonner. Plus ces directoires ont cherché à nous dérober leur marche, plus il faut cherchera les surprendre, comme le physicien prend la nature sur le fait. Ces premières précautions remplies, si l'édifice où s'est établi le directoire est national, et qu'il n'ait pas été autorisé à l'acquérir ou à le louer, il est indispensable de l'obliger à former sa pétition pour l'obtenir à titre de vente ou à titre de loyer, en le soumettant à joindre au plan exigé un procès-verbal d'estimation du bâtiment, et un devis
estimatif de la dépense qui sera le résultat nécessaire de l'établissement. Rien de si commun, quand on bâtit et qu'on se loge, que de s'engager dans des dépenses immodérées, et de s'y engager sans le savoir. Cette tentation est bien plus dangereuse lorsque ce n'est pas de son argent, mais de celui du public que l'on dispose : ainsi les directoires doivent nous savoir gré de les mettre au-dessus de cette tentation-là, parce qu'ils seraient très fâchés d'y avoir succombé : leur civisme en est une excellente caution.
Il y aura ensuite à distinguer les districts immuables des districts précaires : une acquisition convient aux premiers; un bail de p^ii d'années est le lot des autres. Il a été impossible de remanier en ce moment cette grande opération, non seulement d'après tous les motifs que vous a présentés le comité de constitution, mais parce que ces corps-là ont un zèle tout neuf, une jeune ferveur dont il est utile de profiler. Si cela a dû être retardé, cela ne peut s'éviter, surtout lorsque l'on aura reçu les conseils de l'expérience qui n'a encore pu parler. D'après cette certitude, la prudence ne veut-elle pas qu'une partie des directoires de district soit très sobre sur l'article de la dépense, puisque la dépense la plus nécessaire sera encore trouvée beaucoup trop forte par les administrés, lorsqu'arrivera l'instant de la suppression ?
Il y a ensuite à maintenir la hiérarchie si nécessaire entre les corps administratifs. Les départements ne peuvent trop surveiller les districts, comme l'Assemblée ne peut trop surveiller les départements. Il faut donc que les mémoires, procès-verbaux, devis et plans des directoires de district, soient visés par les directoires de département, qui les adresseront, avec leur avis, à l'Assemblée nationale. Sans cette précaution, les directoires de district nous conduiraient à sanctionner leurs erreurs ou leurs fautes. Rien donc de plus important que de leur donner un contradicteur; cela les empêchera de former des pétitions indiscrètes, ou au moins l'avis des départements tes fera rejeter, s'ils se permettent d'en faire de semblables.
On doit convenir que, pour le passé, ces différents corps ont une considération à vous présenter; ils peuvent dire : il a fallu que nous nous établissions avec promptitude; notre établissement a précédé les décrets des 2 septembre et 16 octobre; et à cette époque nous ne pouvions prévoir quelle serait la disposition de ces lois. Très souvent nous n'aurions pas trouvé une maison particulière propre à nous recevoir, et qui pût nous convenir. D'après ces motifs, ils ont pensé que provisoirement ils pouvaient se servir des édifices de la nation, pour faire les affaires de la nation : ils n'ont pas vu d'abord que les frais de chaque administration étaient une charge locale et particulière aux administrés, et que chaque directoire de district devait traiter avec la nation ou avec des particuliers, si elle n'avait pas d'édifices propres à le recevoir. Si leur erreur a pu être tolérée pour le moment, elle est si voisine d'un grand abus, qu'il devient très instant de la faire cesser.
Il est une dernière mesure non moins urgente, c'est celle qui est relative aux finances de chaquo administration. Si vous ne liez les mains sans pitié aux corps administratifs, ou il faudra surcharger les administrés, ou les finances de chaque département se dérangeront d'une manière insensible et sourde : tous ces désordres partiels for-
meront un désordre général qu'aucun moyen humain ne pourra plus réparer. Vous ne pouvez serrer trop un ressort qui naturellement cherche à se détendre. Il faut que la liberté française ait toute la force de la jeunesse, sans en connaître les erreurs.
, rapporteur, donne lecture d'un projet de décret.
Si l'article 1er subsistait tel qu'il est, il serait inconstitutionnel; il y est dit : tous les corps administratifs enverront à l'Assemblée nationale, et vous avez décrété que vous ne seriez en correspondance qu'avec les départements; il y aurait donc un changement à faire.
, rapporteur. On peut mettre : enverront par la voie des départements.
Le dernier article est déjà porté dans vos décrets sur les municipalités; il est aussi dans le décret de la constitution des corps administratifs.
, rapporteur. Pour se conformer à l'objection du préopinant, on peut mettre : conformément aux décrets des...
Il faut ajouter : à peine, par les administrateurs, d'en répondre en leur propre et privé nom.
Il me semble qu'il faudrait faire une exception pour les bâtiments qui,-étant ci-devant consacrés à l'usage des palais de justice, ont été distingués par le décret du 16 octobre dernier, pour servir d'établissement aux corps administratifs.
, rapporteur. J'adopte et je mettrai : autres néanmoins que les tribunaux.
Le projet de décret est adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d'emplacement des tribunaux et corps administratifs, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Tous les corps administratifs seront tenus de rendre compte à l'Assemblée nationale, dans la quinzaine de la publication du présent décret, de la manière dont ils ont formé leur établissement; ils expliqueront, à cet effet, quelle est la "nature de l'édifice qu'ils occupent, si c'est ou l'ensemble, ou une portion seulement; s'ils y sont établis en vertu dune autorisation de l'Assemblée nationale, et si cet établissement est définitif, ou simplement provisoire; ils produiront un plan, tant des pièces qu'ils occupent et de leur distribution, que du surplus de l'édifice et dépendances; et ils joindront un état détaillé de la dépense totale de l'établissement.
Art. 2.
« Si l'édifice est national, sans être de la nature de ceux mentionnés dans l'article 4 du décret du 16 octobre 1790, et qu'ils n'aient point encore été autorisés à l'acquérir ou à le louer-, ils seront tenus de former leur demande pour l'un ou l'autre cas. Ils produiront à l'appui, avec le plan ci-dessus exigé, un procès-verbal d'estimation de l'édifice, et un devis estimatif de la dépense que nécessitera leur établissement.
Art. 3.
« Les mémoires, pirocès-verbaux, devis et plans des directoires de districts seront Visés par les directoires de départemetit, qui les adresseront, avec leur avis, à F Assemblée nationale.
Art. 4;
« Il ne pourra être fait par les corps administratifs aucun emprunt, être établi aucune imposition sur les administrés, ni être employé aucun denier de la recette des trésoriers de districts pour lès frais d'établissement des corps administratifs et des tribunaux, sans l'autorisation spéciale du Corps législatif, conformément aux décrets des 14 et 22 décembre 1789, et 3 décembre 1790, à peine d'en répoudre en leur propre et privé nom. »
au nom du comité d'imposition (1). Messieurs, avant de remettre sous les yeux de l'Assemblée la lecture générale du décret sur le timbre, je dois lui rendre compte de ce qui l'a retardé : l'Assemblée avait ordonné qu'il serait présenté un article pour la formation du papier qui servirait aux expéditions. Un membre avait demandé que ce papier fût rayé. Le comité a été obligé de prendre des informations dans plusieurs papeteries, pour voir si ce d&iret était exécutable sans de grandes difficultés. Il n'a pas reçu les explications qu'il désirait, et plusieurs articles ont trouvé de grands inconvénients, qui ont exigé de nouvelles discussions. Cependant il est urgent de statuer sur le décret, de l'envoyer à l'acceptation du roi, pour le mettre en activité à l'époque prescrite.
Voici les modifications que le comité a cru de" voir introduire dans le texte primitivement adopté.
Tout d'abord le comité des impositions doit déclarer franchement à l'Assemblée qu'il a été induit en erreur par la traduction imprimée du tarif de l'Angleterre, relativement aux lettres de change de l'étranger. Les mots foreign bills, qui se traduisent littéralement par les mots lettres étrangères, doivent être traduits, d'après les actes du parlement qui établissent l'impôt, par ces mots : lettres tirées sur l'étranger, qui sont absolument différents ; de sorte qu'il n'est pas vrai, comme nous l'avons dit à l'Assemblée, que les lettres de change tirées sur l'étranger, soient soumises au timbre. Nous devons cette déclaration. Il y a une partie de l'Assemblée qui a pu se décider par l'exempte de l'Angleterre et non par la force des principes. Il est dit dans la version qui a été décrétée : « Même les endossements et acceptations de pareils effets venant de l'étranger, lesquels seront présentés au timbre et au visa, dans la première plaee de France, oti ils devront être endossés, et payeront la moitié du droit. * Cette locution n'est pas exacte ; il doit être dit, pour remplir l'intention de l'Assemblée :
« Même les endossements de pareils effets venant de l'étranger, lesquels seront présentés au visa, dans la place de France où ils devront recevoir le premier endossement OU l'acceptation, et payeront la moitié du droit, etc. »
Voici une addition que le comité a faite à l'ar-ticle 5 ?
« Les papiers que distribuera la régie, rece-
L'objet de cette disposition est d'ajouter atl moyen de prévenir les contrefaçons, un riioyeu qui àoit inhérent au papier même.
Le comité a l'honneur de présefitër égâlemëht une addition à l'article 21.
Cet article était ainsi cônçu : « La régie fera afficher le tarif du tirtibre avec le premier décret, et l'empreinte des différents timbres qui seront en usage, le tout à peiné de 100 livres d'amende pour chaque contravention. »
Nous proposons ae rédiger cet article dans les termes suivants :
« La régie fera disposer, au greffe des tribunaux de district, le papier marqué d'un filigrane qu'elle aura jugé convenable, et des empreintes des timbres, qui seront mis en usage : elle fera déposer de plus, dans les greffes des tribunaux de commerce, des empreintes des timbres destinés pour les lettres de change et autres mandements de payer; enfin elle fera afficher dans les bureaux le présent décret avec le tarif joint et l'empreinte des différents timbres qui seront eu Usage, le tout à peine de 100 livres d'amende, pour chaque contravention. »
Vous avez décrété, d'autre part, qu'il y aurait 8 commissaires pour l'exécution de la loi qui concerne le droit d'enregistrement : maintenant, Messieurs, que vous venez de décréter l'impôt du timbre, et que vous avez placé cet impôt sous l'administration des mêmes personnes, il a paru nécessaire au ministre des finances, ainsi qu'aux commissaires déjà nommés, de décréter la nomination de 2 nouveaux commissaires, ce qui fera 10 en tout. Je dois assurer, Messieurs, que le contrôleur général s'est rendu au comité de l'imposition, pour lui faire part des difficultés que lui suscitaient les membres de l'ancienne administration des domaines. Il a pensé que, dans le choix qui serait fait par les administrations de l'enregistrement, il n'était pas obligé de choisir entre les sujets qui, autrefois, avaient administré le contrôle, et d autres droits de cette nature qui sont maintenant fondés sûr une loi uniforme ; il a pensé que le roi ne devait pas plus perpétuer dans ce nouvel ordre de choses les sujets attachés aux finances, que le peuple n'a perpétué dans la magistrature, et dans tous les emplois qu'il confère maintenant, les anciens préposés qui administraient ou la justice ou les affaires publiques.
Eh ! Messieurs, que serait-il résulté si le ministre avait pensé autrement; car il n'est pas douteux que dans les compagnies de finances, autant au moins que dans toutes les compagnies judiciaires et administratives, il ne se soit rencontré un grand nombre de ces gens attaqués d'une maladie qui n'a plus de nom, qu'on appelait autrefois aristocratie, mais qui aujourd'hui est une démence sans exemple : on ne peut pas douter, dis-je, que ces anciennes compagnies de finances ne renferment, entre beaucoup de bons et honnêtes citoyens, beaucoup de gens affectés de cette maladie, et que même elle est absolument incurable. {Applaudissements.)
Ainsi, Messieurs» si le ministre, malheureusement pour la nation, avait cru pouvoir et devoir suivre les catalogues des employés de toutes les régies, il est certain que nous aurions vu à la tête de l'administration des finances un très grand nombre de gens plus que suspects. L'administration des domaines appelle au roi, à l'Assemblée nationale, au public, à la nation en-
tiére, de ce que par un renversement de tous les principes de l'ancienne finance, le contrôleur général, au mépris de tous leurs titres, a appelé pour administrateurs 4 sujets qui n'étaient que des gens honnêtes, éclairés et de simples directeurs. Cette nominatioa a tellement déplu à ces ministres de l'administration, que 4 sujets distingués qu'on avait nommés, ont cru déroger de se voir assimilés à d'anciens directeurs, et ont donné leur démission.
Plusieurs membres à gauche. Tant mieux 1 (Applaudissements.) Il faut leur voter des remerciements!
rapporteur. D'après «es considérations, il a été nécessaire de séparer l'ancienne administration de l'administration nouvelle, pour que celle-ci demeurât dégagée de toutes les entraves que les anciens administrateurs du timbre voudraient lui mettre. En conséquence, nous avons l'honneur de vous proposer, pour article final du timbre, l'article que voici :
« Le roi nommera deux nouveaux commissaires pour concourir avec les 8 qui ont été nommés, ou doivent l'être en vertu du décret du 5 décembre dernier, à l'administration, régie et perception tant des droits établis par ce décret du 5 décembre, que des droits de timbre et des hypothèques. En conséquence, les anciens administrateurs des domaines et autres que ceux qu'il serait permis au roi de choisir entre les régisseurs des nouveaux droits, seront bornés* à compter du 10 du présent, à l'administration des domaines corporels qu'ils continueront provisoirement et jusqu'à ce que l'Assemblée nationale ait statué sur la formation et l'organisation des compagnies de finances, sans qu'ils puissent néanmoins contrevenir aux dispositions que les commissaires nommés en vertu du présent décret et celui du 25 décembre pourraient faire sous les ordres du contrôleur général des finances, à l'égard des receveurs et préposés ci-devant chargés de l'administration des domaines. »
(de Saint-Jearb-d'Angély.) On vient de vous exposer jusqu'où va l'orgueil financier et la conduite des anciens administrateurs; mais tout cela motive la nécessité de leur enlever encore la dernière branche d'administration peu considérable et peu importante que le comité a cru devoir leur laisser; je veux dire, administration des domaines corporels. Je ne veux cependant pas dire ici qu'il faille donner définitivement aux administrateurs des domaines la régie des domaines corporels; mais je demande que provisoirement seulement, au lieu de laisser entre leurs mains cette administration, elle soit remise aux dix administrateurs que vous venez de nommer.
Nous nous sommés informés du système de l'administration : elle était composée de 28 individus, 9 seulement étaient chargés de l'administration des domaines. Ils avaient sous eux le bureau de correspondance. Dans l'ancienne administration, 19 étaient chargés des domaines corporels et n'avaient sous eux que 5 bureaux de correspondance pour cette partie des droits. Il s'est formé de ces deux comités, l'un de 19, l'autre de 9, un comité central de 4 individus.
Pour veiller la caisse^ il nous a paru que ceux qui étaient chargés de suivre le travail de 5 bureaux seulement, étaient des témoins oisifs les trois
quarts de l'année ; d'après cela, comme l'Assemblée nationale ne fait ici que des dispositions provisoires, qu'elle a chargé un comité de l'organisation générale des compagnies de finances, je crois qu'il n'y a pas de disposition plus sage que de confier provisoirement aux nouveaux administrateurs tout ce qui appartenait aux anciens administrateurs, et de supprimer l'ancienne administration. (Applaudissements.)
, rapporteur. J'adopte les amendements et je propose en conséquence la rédaction suivante :
« Le roi nommera deuxhouveaux commissaires, pour concourir avec les huit déjà nommés ou qui doivent l'être en vertu du décret du 5 décembre dernier, à l'administration, régie et perception des taxes établies par ce décret et par le présent, ainsi que des droits des hypothèques. Ces dix commissaires seront aussi chargés provisoirement de l'administration des domaines corporels. En conséquence, l'ancienne administration des domaines sera supprimée, à compter du 10 du présent mois, et il sera incessamment proposé parle comité des finances un projet de décret sur la forme dans laquelle les administrateurs rendront leurs comptes et seront remboursés. »
(Cette rédaction est adoptée.)
, rapporteur. Je demande si vous voulez mettre aux voix la question qui seoolble s'élever dans l'Assemblée relativement à l'observation que j'ai faite concernant les lettres de changes tirées de l'étranger; c'est par là qu'il faudrait commencer.
Lorsque votre comité vous a proposé d'imposer les effets étrangers, il a éprouvé des oppositions dans l'Assemblée; pour les combattre il s'est fondé sur l'exemple de l'Angleterre. MU le rapporteur reconnaît aujourd'hui qu'il y a eu erreur de fait, que l'exemple de l'Angleterre est contre la proposition que vous avez adoptée et que le comité s'est trompé en croyant que les Anglais, sous le nom de foreign bills imposaient les lettres de change. Les Anglais, au contraire, ont reconnu qu'il fallait, pour l'avantage du commerce, décharger du droit de timbre les lettres de change tirées de l'étranger pour repasser chez l'étranger.
Je demande qu'elles soieut aussi en France exceptées de l'impôt et que vous réformiez l'article dans ce sens.
La partie du droit de timbre établie sur les lettres de Change de l'étranger ne pourra guère produire que 200,000 livres. On ne peut se dissimuler, d'ailleurs, que, en ce qui concerne les lettres de change venant de l'étranger et payables eh France, cet article gênera singulièrement le commerce.
Je demande donc que ces lettres soient également exemptes du droit de timbre.
Les décrets sur le timbre ont déjà été jugés par l'opinion publique. Vous savez que l'article dont il s'agit n'a trouvé que des désapprobateurs. S'il ne s'agissait que d'un impôt, je dirais : le commerce pourra le supporter; mais il s'agit de gêne, et la gêne est la destruction du commerce.
Il est juste d'exempter dtt droit les lettres de change venant de Fétranger
pour repasser chez l'étranger; mais si vous en exemptez les lettres de change de l'étranger, payables en France, il en résultera que beauc oup de négociants tireront des lettres de change sous des noms supposés, pour se soustraire au droit, et le produit de l'impôt deviendra presque nul. -Je demande que l'Assemblée se borne à décréter l'amendement de M. Martineau.
(L'amendement de M. Martineau est adopté.)
, rapporteur. J'adopte sans difficulté; mais il me semble que, pour ne pas faire un article séparé, on pourrait modifier l'article même et le rédiger ainsi :
* Les lettres de change, même celles qui seraient tirées par seconde, troisième et duplicata; billets à ordre ou au porteur, mandats, rescrip-tious et généralement tous les écrits portant promesse ou mandement de payer des sommes déterminées et qui circulent dans le commerce ; même les endossements et acceptations de pareils effets venant de l'étranger et payables en France lesquels seront présentés au timbre ou au visa dans la place de France où ils devront recevoir le premier endossement ou l'acceptation et seront chargés seulement de la moitié du droit imposé sur les effets de même valeur faits en France.
« L'endossement des lettres de change et mandement de payer venant de l'étranger et payables chez J'étranger ne seront pas assujettis à être écrits sur papier timbré ou visés. »
(Cette rédaction est adoptée.)
Je demande que les négociants qui ont fait timbrer leurs livres de l'ancien timbre ne soient pas tenus de les faire timbrer de nouveau. {Murmures).
,rapporteur. L'observation qui vous est faite est fondée; mais elle ne peut être admise dans son entier. Il est très certain que les négociants, qui ont fait timbrer jusqu'à présent,* ne doivent pas perdre les registres qu'ils ont fait timbrer de l'ancien timbre.
L'article premier de votre décret autorise les particuliers qui ont du papier timbré de l'ancienne régie de leur apporter dans trois mois, contre remboursement du prix. Les négociants ne peuvent pas rapporter les feuilles blanches de leurs registres ; il faut donc qu'ils soient admis à les faire contre-timbrer, mais à la charge de payer le supplément du droit à raison de l'excédent du prix du nouveau timbre sur l'ancien.
Pour ne pas multiplier les articles inutiles dans la loi, je proposé d'ajouter à l'article premier une disposition qui donnera satisfaction à M. Nairac et de dire : « ou de les faire contre-timbrer en payant le supplément. »
(Cette addition est adoptée.)
La plupart des lettres de change qui sont tirees de l'étranger se tirent par première et seconde ; le tireur adresse directement la première à celui sur lequel il tire, et cette première n'est point négociée. Il passe les ordres sur la secondé, qui circule dans le commerce^ et c'est le dernier porteur souvent qui va rechercher la première chez un ban quier de Paris, par exemple, au domicile duquel elle a été indiquée. Je suppose que ce banquier n'a pas fait timbrer ; certainement il n'est pas en faute : d'après cela je demanderais qu'il fût énoncé dans l'article que le porteur ne
sera obligé d'en faire l'avance qu'autant que la formalité n'aura pas été remplie sur l'effet qui lui a été transmis. Si la forme n'a pas été remplie sur la première, c'est la faute de l'accepteur, et c'est contre l'accepteur seul qu'on doit avoir recours.
, rapporteur. Messieurs, il y a deux manières de présenter les lettres à l'acceptation : par la première, le tireur de la lettre de change s'adresse immédiatement à celui sur qui il la tire, à charge par lui de la faire accepter et de la remettre à une seconde personne; c'est de transmettre la lettre de change à une tierce per- -sonne, de la charger de la présenter à l'acceptation de celui sur qui elle est tirée. Dans l'un et dans l'autre cas, l'inconvénient que prévoit le préopinant ne doit pas arriver. En effet, Messieurs, lorsqu'une lettre de change a été présentée immédiatement à l'accepteur ou au payeur par le tireur, pour être remise par ce dernier à une tierce personne, cette tierce personne ne doit la recevoir qu'autant que l'accepteur l'auta soumise au timbre. De même, et à plus forte raison, si c'est une tierce personne quia été chargée par le tireur de présenter l'effet à l'acceptation, cette tierce personne est dans l'obligation, soit de la faire viser et timbrer elle-même, soit de la faire timbrer par l'accepteur, après l'avoir reçue de lui.
Ce n'est pas cela. Ma démande est que le porteur ne soit tenu à faire l'avance de l'amende qu'autant que la formalité n'aura pas été remplie sur l'effet qui lui a été fait.
M. de Fontenay demande que lorsque le porteur d'une troisième lettre de change est obligé de la faire protester, vous disiez si ce sera l'ac cepteur de la première qui fera l'avance des frais, ou bien si ce sera le dernier porteur. Il demande en même temps que le dernier porteur ne soit pas tenu à faire les avances, mais que les avances soient faites par le premier accepteur. Les droits du Trésor public étant à couvert, on peut adopter cette disposition, qui est purement additionnelle. Cela se réduit à ajouter dan3 l'un des articles qu'a lus M. le rapporteur, que dans le cas où une lettre de Change aurait été tirée par première et seconde, lorsque le premier porteur l'aura fait accepter, et que le dernier porteur sera forcé de la faire protester, ce n'est pas lui, mais le premier accepteur qui sera tenu de faire les avances pour les droits de timbre.
Je crois qu'il est impossible àM. le rapporteur, s'il a bien entendu la difficulté, d'y répondre réellement.
(L'amendement est adopté.)
, rapporteur. Voici encore une addition ; elle porte sur l'article 21':
« La régie fera déposer dans les greffes des tribunaux de commerce des empreintes des timbres de commerce, lettres de change et autres mandements de payer. » {Adopté.)
, rapporteur. On pourrait encore ajouter que le décret sera porté dans le jour à la sanction du roi. {Adopté.)
Un membre : Je demande si le comité a préparé son rapport sur la pétition de la communauté des parcherainiers, qui lui avait été renvoyée ?
Je prie l'Assemblée d'observer gue le décret qui permet d'employer du papier timbré, au lieu de parchemin, fait un tort considérable aux par-cheminiers, sans qu'il en résulte aucun avantage sensible pour le public.
, rapporteur. Je réponds au préopinant que nous avons en effet examiné cette aemandedes parcheminiers. Pour l'apprécier, l'Assemblée n'a qu'à se rappeler les motifs d'après lesquels elle s'est décidée : elle n'a pas supprimé l'usage du parchemin ; au contraire, elle le laisse en concurrence avec le papier, sans payer de droits plus forts. On peut donc croire qu au lieu (t'en diminuer la consommation, elle sera favorisée.
~ Si l'on rétablissait l'ordre ancien, le public et le Trésor national seraient grevés, relativement au produit que l'on attend du nouveau mode de perception ; le public, parce que vous l'avez sou-lagéen l'autorisant à employer du papier au lieu de parchemin timbré, et qu'il aura par ce moyen les expéditions à beaucoup meilleur compte qu'autrefois. Le Trésor public d'un autre côté souffrirait, parce qu'autrefois il n'y avait qu'une première expédition qui fût nécessairement en parchemin, et toutes les deuxièmes, troisièmes et ultérieures, étaient faites en papier de la régie.
Et je dis qu'en remplissant ces deux objets vous ne faites pas encore de tort aux parcheminiers, puisque vous favorisez l'emploi du parche-min pour tous les particuliers qui le préféreraient à du papier, en le leur donnant à meilleur eonapte.
11 a été distribué à l'Assemblée une pétition des papetiers de Paris. Cette pétition tombe sur l'article 2 : « La régie fournira exclusivement, et au profit du Trésor public, pour tous les actes, le papier nécessaire. » Mon observation porte sur ces mots: La régie fournira exclusivement. Je demande à M. le rapporteur si le comité entend que la régie fasse fabriquer elle-même, ou bien s'il y aura des bureaux de timbre dans tous les départements, afin d'employer en même temps toutes les manufactures du royaume.
, rapporteur. Le dommage, que les papetiers appréhendent, n'est pas du tout aussi considérable qu'ils le craignent, et même n'est pas augmenté au delà de celui que pouvait leur porter ci-devant le privilège attribué à la régie, pour la vente des papiers timbrés.
Il faut savoir, Messieurs, que la pétition des papetiers, présentée à l'Assemblée nationale, consiste a obtenir de vendre tout le papier, et à ce que la régie n'en vende point. En conséquence, l'unique moyen de perception qu'emploierait la régie serait d'appliquer un timbre aux papiers que vendraient les papetiers.
Messieurs, cela est incompatible avec le produit, parce qu'il ne suffit pas que la régie applique un timbre, il faut qu'elle ait tous les moyens qui sont dans la puissance humaine pour prévenir la contrefaçon. Or, si l'on appliquait un timbre indistinctement et à toute espèce de papiers qui seraient présentés au timbre par des particuliers, on n'aurait aucun moyen de découvrir, de reconnaître les con-trefaçonsqui pourraient s'introduire, ou, du moins, on perdrait les moyens les plus efficaces pour parvenir à cette découverte.
Cet inconvénient a été si bien senti par l'Assemblée qu'elle a décrété un timbre extraordinaire
pour les papiers autres que ceux de la régie qui seraient présentés par les particuliers, afin de réserver ainsi à la régie le moyen de reconnaître les contrefaçons de son timbre et de les poursuivre. J'observe d'ailleurs que ce privilège est tellement inséparable du droit, qu'il est établi en Angleterre.
Quant auxregistres des négociants, on ne sera tenu de faire timbrer comme autrefois que ceux portés en justice, et les négociants se pourvoiront infailliblement, chez les marchands de papier, de papier ordinaire qu'ils feront timbrer extraordinai-rement; les marchands de papier ne perdront rien à cet égard.
Enfin le comité a vu dans la pétition des fabricants de papier l'inconvénient de nuire au service public en privant la régie de la faculté de choisir elle-même les fabriques le plus à sa portée et d'éviter ainsi soit des frais considérables de transport, soit des avaries, soit toutes autres pertes. (La discussion est close.)
Le décret général portant établissement du timbre est adopté comme suit : (1)
Art. ler.
« A compter du premier avril prochain, la formule sera abolie, les timbres maintenant en usage seront supprimés, les papiers ou parchemins, qui s'en trouveraient marqués, ne pourront être employés qu'après avoir été contre-timbrés du timbre qui sera ci-après établi, et il sera libre à tout particulier, qui en serait pourvu de les rapporter dans trois mois, à compter du jour de la publication du présent décret, à la régie qui lui en rendra le prix; ou de les faire contre-timbrer, en payant le supplément.
Art. 2.
« A compter de la même époque, et dans toute l'étendue au royaume, la régie de la formalité de l'enregistrement fournira exclusivement et au profit du Trésor public, pour tous les actes qui seront ci-après indiqués, des papiers marqués de nouveaux timbres, et dont les prix seront déterminés par le tarif annexé au présent décret.
Art. 3.
« Seront écrits sur papier timbré :
« 1° Toutes les minutes et expéditions d'actes qui, soit en minute, soit en expédition dans tous les cas, ou dans quelques cas seulement, sont soumis à la formalité de l'enregistrement, en vertu du décret du 5 décembre dernier ;
« 2° Les minutes et copies signifiées des jugements des juges de paix, et les minutes et les copies des actes de procédure et instruction des instances ;
« 3° Les registres des municipalités pour tout ce qui concernera leurs affaires, et sera étranger aux fonctions publiques qui leur sont déléguées par les lois ; les registres des universités, facultés, collèges, hôpitaux, fabriques; ceux des administrateurs, syndics, marguilliers, fabri-ciens, receveurs des droits et des revenus des villes et hôpitaux; ceux des notaires, huissiers et autres officiers ministériels, greffiers et concierges des prisons et autres lieux de détention; ceux des courtiers, agents de change, et de toute personne ou corps revêtus d'un caractère public, et obligés, par les règlements, à tenir des registres ;
« 4° Les expéditions, extraits, copies certifiées
« 5° Les quittances de rentes payées par le Trésor public, celles des droits d'entrée et sortie du royaume, celles des droits et octrois des villes et de toute contribution indirecte; les actions qui seront faites pour des entreprises de commerce et de banque ; les feuilles, reconnaissances ou quittances sur lesquelles seront payés les dividendes de semblables actions, même de celles qui existent maintenant tels que les dividendes des actions de la compagnie des Indes, et de la caisse d'escompte ;
« 6° Les registres prescrits par les lois aux négociants, marchands, artisans, fabricants, banquiers, commissionnaires et associés ; ceux des entrepreneurs de travaux, fournitures et services publics ou particuliers, agents d'affaires, directeurs, régisseurs et syndics de collèges de créanciers, et tous registres qui peuvent être produits en justice ;
« 7° Les lettres de change, même celles qui seraient tirées par seconde, troisième et duplicata; billets à ordre ou au porteur, mandats, resçrip-tjons, et généralement tous les écrits portant promesse ou mandement de payer des sommes déterminées, et qui circulent dans le commerce ; même les endossements et acceptations de pareils effets, venant de l'étranger et payables en France, lesquels seront présentés au timbre ou au visa dans la place de France où ils devront recevoir le premier endossement 0U l'acceptation et seront chargés seulement de la moitié du droit imposé sur les effets de même valeur faits en France, L'endo?sement, gh$ lettres de change, et mandements de payer, venant de l'étranger, payables chez l'étranger, ne seront pas assujettis à être écrits sur papier timbré ou Visé.
« Les actes et expéditions du Corps législatif seront exempts du timbre,
Art. 4.
« Les lettres de voiture spus seing privé,comptes des fabricants, négociants et banquiers entre eux; les factures ou lettres qui en tiendront lieu, des fabricants, marchands, commissionnaires et autres, les mémoires d'ouvriers, jie marchands fournisseurs et entrepreneurs, les extraits de livres ou de correspondance seront assujettis au timbre ou au visa, dans les cas seulement où ils serviront de titre à quelque demande ou action en justice, ou seront produits par forme ou pour moyen d exception pu autrement.
Art» 5.
« Il géra libre d'user pour tout acte, registre, pièce ou écriture, assujettis au timbre, de papier de telle dimension que l'on voudra. Én conséquence, les bureaux de là régie seront pourvus de papiers de divers formats, dpnt les prix seront déterminés par le tarif.
« Les papiers destinés à des lettres de change ou autres mandements (le payer, aux quittances comptables et.autres fournies pour rentes payées par le Trésor public, aux quittances des drpits d'eiitrée et de soctrois des villes et autres contri-
butions indirectes, seront d'un format convenable à leur destination et marqués de timbres particuliers, dont les prix seront fixés par le tarif.
« Les papiers destinés aux expéditions de tous les actes civils passés en forme authentique, à celle des jugements des tribunaux et aux autres actes expédiés en brevets, seront aussi marqués de timbres particuliers, et seront payés au double des papiers de pareil format destinés à des minutes ou à des actes sous seing privé.
« Les papiers qué distribuera la régie, porteront uo filigrane particulier qui sera imprimé dans la pâte même à la fabrication.
Art. 6.
« Les particuliers, qui voudront se servir de parchemin ou d'un autre papier que celui de la régie, pourront le faire timbrer avant de s'en servir. Il y sera apposé un timbre extraordi-p naire, relatif à la classe et à la nature des actes auxquels ce papier ou parchemin sera destiné. If sera payé pour le timbre extraordinaire^ même prix que pour le papier de la régie de même destination et de même mesure ; si les papiers présentés au timbre sont de dimensions différentes de celles de la régie, le timbre en sera payé au prix du format supérieur.
« Si les papiers présentés au timbre excèdent le plus grand papier de la régie, le prix du timbre sera de 20 sols, à moins qu'ils ne soient destinés pour expédition, et en ce cas le prix sera du double.
Art. 7.
les papiers employés à des expéditions ne pourront contenir, compensation faite d'une feuille à l'autre, plus de 20 lignes par page de petit papier; « Plus de 27 lignes par page de papier moyen ; « Plus de 30 lignes par page de grand papier,. « Les expéditions seront écrites sans abréviations,
Art. 8.
« Les timbres ordinaires porteront en légende le prix du papier auquel ils seront appliqués, et le noni du département pour lequel ils seront destinés ; tous les actes, expéditions et registres, serojit assujettis au timbre du département, à l'exception^ néanmoins des lettres de change, billets à .ordre et autres actes sous signature privée, pour lesquels on pourra employer des papiers timbrés de quelque département que ce soit.
Art. 9.
Le papier ou parchemin timbré, qui aura été employé pour minute ou expédition, ne pourra plus servir, même quand ces minute et expédition n'auraient été que commencées.
« L'empreinte du timbre ne pourra être couverte d'écriture ni altérée-
.« Il ne pourra êtré fait ni expédié deux actes à la suite l'un de l'autre, sur la même feuille, nonobstant tout usage ou règlement contraire, à l'exception des actes de ratification de ceux passés en l'absence 4®s parties, des quittances de prix de vente et droits casuels, des quittances de directions de collèges de créanciers, des quittances dé remboursement de contrats de constitution ou obligation, des inventaires, procès-verbaux et autres aptes qui ne peuvent être consommés dans un seul jour et dans la même vacation.
« Les huissiers ne pourront mettre deux significations ou exploits d'assignation et autres actes sur une même feuille de papier timbré ; cependant ils pourront dopper des popies qe pièces en tête de leurs exploits, et écrire sur les expéditions des sentences l'original'de leur exploit de signification.
Art. 10.
« Les expéditions des actes civils et judiciaires qui seront délivrées, à compter du 1er avril prochain, dans les lieux où la formule n'était pas établie, ne pourront être faites que sur papier timbré.
Art. 11.
« Les personnes, corps ou communautés dont les registres sont assujettis au timbre par le présent décret, seront tenus, dans les trois mois qui suivront sa publication, de faire timbrer à l'extraordinaire, ou marquer "d'un visa, toutes les feuilles qui, à l'époque de cette publication, n'auront pas servi.
« Sont exceptés de cette disposition, le» registres de naissances, morts et mariages de la présente année.
Art. 12.
« Moyennant le payement du droit de timbre et des amendes qui seront çi-après déterminées, selon les cas, tout acte, écrit, ou expédition, assujetti à être fait sur papier timbré et qui ne le serait pas ou le serait sur papier marqué d'un timbre différent de celui qui lui est propre, pourra être marqué àrl'extraordinaire Qu visé,
Art. 13,
k « .Tout officier ou secrétaire public, qui, dans la minute ou l'expédition de quelque acte civil ou judiciaire, aura commis une contravention au présent décret, sera responsable des dommages-intérêts des parties, et, en outre, condamné à une amende de 100 livres pour la première fois, et de 300 livres en cas de récidive.
« Sont exceptées de la présente disposition les contraventions à l'article 7, pour chacune desquelles il ne sera prononcé qu'une amende de 30 livres.
Art. 14.
« Tout particulier qui ne se sera pas servi de papier timbré pour les actes privés, registres, pièces et écritures qui y sont assujettis, et autres que les lettres de change et mandements de payer dont il sera fait mention dans l'article suivant, sera condamné en 30 livres d'amende, et sera tenu d'acquitter cette amende, de faire timbrer ou viser ces pièces, actes ou écritures, et de payer le droit de timbre avant de pouvoir en faire usage en justice, à peine de nullité de toute procédure, et de tout jugemént et exécution qui pourraient avoir lieu en conséquence.
Art. 15.
« Les porteurs de lettres de change, et autres mandements de payer, non marqués du timbre auquel ils sont assujettis» ne pourront les endosser qu'après les avoir fait timbrer à l'extraordinaire ou viser.
« Les tireurs, endosseurs et accepteurs de lettres de change et mandements de payer, faits en France et non timbrés du timbre auquel ils sont assujettis, les endosseurs et accepteurs de pareils effets venant de l'étranger, seront con-
damnés solidairement au payement du droit, et à l'amende du dixième du montant de ces effets.
« Le droit du timbre et moitié de l'amende du dixième seront supportés, pour les effets tirés de France, par le tireur; le surplus de l'amende, par l'aççepteur et les endosseurs domiciliés en France; et pour ceux tirés de l'étranger, le droit et moitié de l'amende par le premier porteur domicilié en France qui aura endossé ou accepté, le surplus de l'amende, par les accepteurs et endosseurs domiciliés en France; les effets non timbrés ne pourront être reçus à l'enregistrement, à peine de 50 livres d'amende contre les receveurs du droit d'enregistrement, ni produits en justice, ! peine de nullité de toute procédure et de tout jugement et exécution qui pourraient avoir lieu en conséquence.
« Les porteurs de pareils effets, qui les feront timbrer à l'extraordinaire ou viser, feront l'avance du droit et de l'amende, et auront leur recours contre les tireurs, accepteurs ou endosseurs solidairement.
« Si cependant une première acceptée, et non timbrée, ne portait aucun endossement, le porteur serait dispensé de faire l'avance de l'amende, et l'accepteur pourrait être seul poursuivi pour 1% payer,
Art. 16.
« Les proposés de Ja régie ne pourront, h, peine de 50 livres d'amende» admettre à l'enregistrement des expéditions d'actes judiciaires, si elles ne sont dans les formes réglées par le présent décret,
« Ils ne pourront, sous la même peine, admettre à l'enregistrement aucun exploit, signification et autres actes de poursuites, faits en exécution d'expéditions délivrées par les notaires, si ces expéditions ne sont représentées et ne sont dans les formes prescrites.
« Ils ne pourront, sous la même peine, enregistrer aucun des actes, pièces ou écritures sou-mis au timbre, s'il n est timbré du timbre auquel il est assujetti, et s'il y a plusieurs actes et écrits sur une même feuille, ou que cette feuille ait déjà servi.
« Ils ne pourront enfin, et sous les mêmes peines, admettre à la formalité de l'enregistrement les protêts de lettres de change et mandements de payer, que sur la représentation de ces effets eq bonne forme*
Art. t7.
« Aucun huissier ni officier* servant près des tribunaux, ne pourra faire de significations, poursuites et exécutions, en vertu d'expéditions informes, tant d'actes çivils que d'actes judiciaires, ni protêts, exploits pu significations pour raison d'effets, actes, titres, pièces, écritures, sous signature privée, assujettis au timbre, et qui ne seraient pas marqués de celai auquel ils sont assujettis ; et, en cas de çontravention, il sera condamné à 50 livres d'amende pour la première fois, et 500 livres d'amende pour la seconde; et en cas de seconde récidive dans la même année, à compter de la première contravention, à 500 livres dTamende, et à l'interdiction pour un an. Il sera tenu en outre dés dommages-intérêts des parties pour raison des nullités prononcées par tes articles précédents.
Art. 18.
Àucun juge ou officier public ne pourra coter et parapher les registres assujettis au tim-
bre par leprésent décret, si les feuilles n'en sont timbrées, et ce à peine de 500 livres d'amende pour chaque contravention, et de 1,000 livres et interdiction pour un an, en cas de récidive.
Art. 19.
« Les juges n'auront aucun égard aux effets de commerce, actes, pièces, articles, registres et extraits d'iceux soumis au timbre par les articles précédents, s'ils ne sont écrits sur papier marqué du timbre auquel ils sont assujettis; ils ne pourront rendre de jugement sur ces actes, à peine de nullité de leurs jugements, de toutes poursuites et significations faites en conséquence. Les commissaires du roi près des tribunaux veilleront à l'exécution du présent décret.
Art. 20.
. « Sont exceptées des dispositions du présent décret les quittances, sous signature privée entre particuliers, pour créances de 25 livres et au-dessous, lesquelles pourront être sur papier non timbré.
« Il pourra être donné plusieurs quittances sur une même feuille de papier timbré pour acompte d'une seule et même créance, ou d'un seul terme de fermage ou loyer.
Les quittances au-dessus de 25 livres, qui seront données sur une même feuille de papier timbré, n'auront pas plus d'effet que si elles étaient sur papier libre, et les particuliers qui voudraient faire usage desdites quittances seront assujettis aux mêmes peines que pour les actes écrits sur papier non timbré. « Sont pareillement exceptées les copies des
Ïjièces de procédure criminelle, qui, aux termes de 'article 14 des décrets des 8 et9 octobre, doivent être délivrées sans frais.
Art. 21.
« La régie fera déposer aux greffes des tribunaux de district des papiers marqués du filigrane qu'elle aura jugé convenable, et des empreintes des timbres qui seront mis en usage; elle fera déposer, déplus, dans les greffes des tribunaux de commerce, des empreintes des timbres destinés pour registres de commerce, lettres de change et autres mandements de payer.
Art. 22.
« Jusqu'au 1er avril prochain, les notaires de Paris pourront employer du papier timbré, tel qu'il est maintenant en usage dans le reste du royaume.
Art. 23.
« L'Assemblée nationale charge ses comités de Constitution, de jurisprudence criminelle et des contributions publiques, de rédiger un projet de décret concernant les peines à infliger aux contrefacteurs de timbres et papiers, et à ceux qui feraient commerce de papier timbré, sans y avoir été autorisés par la régie.
Art. 24.
« Le roi nommera deux nouveaux commissaires pour concourir avec les huit déjà nommés, ou qui doivent l'être en vertu du décret du 5 décembre dernier, à l'administration, régie et perception des taxes établies i ar ce décret, et par le présent, ainsi que des droits des hypothèques.
« Ces dix commissaires seront ausei chargés
provisoirement de l'administration des domaines corporels.
« En conséquence, l'ancienne administration des domaines sera supprimée, à compter du 10 du présent mois, et il sera incessamment proposé par le comité des finances un projet de décret sur la forme dans laquelle les administrateurs rendrout leurs comptes et seront remboursés.
Art. 25.
« Le présent décret sera porté dans le jour à l'acceptation du roi.
TARIF.
« La feuille de petit papier de 9 pouces sur 14, feuille ouverte. » 1. 4 s. » d.
« Demi-feuille de même format........................... » 2 6
« Feuille de papier moyen de
11 pouces sur 16............... » 6 »
« Feuille de grand papier de
14 pouces sur 17.............. » 8 >
« Grand registre de 17 pouces
sur 21........................ » 10 »
« Le très grand registre de
21 pouces sur 27............... » 15 »
« Papiers pour lettres de change et autres mandements de payer, et quittances comptables, et des rentes sur le Trésor public de
400 livres et au-dessous........ » 5 »
« De 400 à 800 liv. inclusivement ......................... »> 10 »
« De 800 à 1,200 liv. inclusivement................ ........ » 15 »
« Au-dessus de 1,200 liv. indéfiniment..................... 1 »
« Papier d'expédition, le double du prix du papier de minute de même format.
« Quittances des droits d'entrées et d'octrois des villes et contributions indirectes......... 1 6
Vous avez décrété que ces droits seraient perçus d'une manière égale dans le royaume ; il faudrait pour cela que les droits^ qui en étaient auparavant représentatifs, fussent ou totalement anéantis, ou réduits à un niveau parfait. Or, je vous observe, Messieurs, que les finances des notaires, surtout à Paris, étaient une véritable représentation de l'impôt ; que cette finance, si elle n'est point remboursée, force les notaires à faire payer leurs actes plus cher et les empêche de soutenir, vis-à-vis des autres, la concurrence que doivent leur assurer leurs talents.
Je crois donc que l'Assemblée nationale ferait un acte de justice, et je le provoque de mon propre mouvement sans y avoir été excité par personne, en ordonnant le plus tôt possible le remboursement de ces notaires.
Plusieurs membres : L'ordre du jour I
, rapporteur. Le comité des impositions doit faire connaître à l'Assemblée les instructions qu'il a été dans le cas de recueillir sur la conduite des notaires à Paris.
Depuis l'époque où le droit d'enregistrement est mis en activité dans cette capitale, où il avait été jusqu'alors inconnu, l'on ne peut donner trop
d'éloges à la conduite des notaires de Paris, pour l'établissement de ce droit ; ils y ont concouru de toute leur puissance et avec rigidité poussée jusqu'au dernier scrupule. Nous devions compte de ce fait à l'Assemblée nationale, parce qu'il est satisfaisant pour elle et honorable pDur une classe de citoyens qui s'est de tout temps distinguée par son patriotisme et ses lumières.
La motion de M. de Folleville présente par elle-même une espèce de justice, qui ne permet pas de la rejeter, au moins inconsidérément : je demande qu'elle soit renvoyée au comité de ju-dicature. (Le renvoi est décrété.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur les jurés (1).
, rapporteur. Messieurs,J'ai à proposer trois articles additionnels aux dispositions que vous avez déjà décrétées au titre relatif aux contumaces.
Le premier article est ainsi conçu :
« Tout accusé qui s'évadera des maisons d'arrêt ou de justice, sera regardé comme contumax, et il sera procédé contre lui ainsi qu'il vient d'être dit. » (Adopté).
Voici le second article :
« Toute peine portée dans un jugement de condamnation ?era prescrite par vingt année-, à compter de la date du jugement. » (Adopté.)
Le troisième article est conçu en ces termes
t Après la mort de l'accusé, prouvée légale-: ment, ou après 50 ans de la date du jugement, ses Diens seront restitués à ses héritiers légitimes. »
Je propose, pour amendement, que 20 années après l'absence ou la disparition ae l'acCusé, ses Héritiers puissent demander l'envoi en possession de ses biens.
L'espace de 50 années qu'a déterminé votre comité est en faveur du condamné qui est admis par un article précédent, à se présenier à perpétuité; et en, cela, il s'est conformé aux principes qui ont été adoptés jusqu'à présent. Mais je crois qu'il est nécessaire d'établir une distinction, c'est-à-dire qu'il ne faut pas attendre que la révolution de 50 années, portée par l'article, soit consommée pour autoriser les héritiers du condamné contumax à se mettre en possession provisionnelle de ses biens. Je crois qu'après un laps de 10 ou de 20 ans tout au plus, les héritiers du condamné contumax peuvent être autorisés à entrer en possession provisionnelle de ses bieus, sauf à lui restituer la propriété desdits biens, au cas qu'il vienne à se représenter avant la révolution du terme de 50 années fixé par le décret.
J'adopte l'amendement de M. Régnier; peut-être pourrait-on mettre 20ou 25 ans; je le laisse^au jugement de l'Assemblée.
Je crois que M. Régnier a négligé d'observer qu'il invoquait, à l'appui
de cet amendement, des raisons qui ne sont applicab es qu à une absence
légitime. Il est très certain qu'il faut distinguer l'ab-
Je sais. Messieurs, qu'on se plaît très souvent à faire observer à l'Assemblée que les fautes sont personnelles, que des héritiers ne doivent pas en souffrir; mais je demande quejl moyen reste à la société pour empêcher les citoyens de chercher à s'échapper, à se soustraire aux peines prononcées par la loi contre les coupables ? Quand il y avait une absence légitime, les héritiers présomptifs avaient grande raison de demander l'envoi en possession provisoire des biens de l'absent; car on pouvait ignorer si l'absent était vivant ou mort, et, dans cette ignorance, personne n'avait un droit plus apparent que les héritiers présomptifs ; mais dès nnstant que c'est un homme qui s'est soustrait à la loi, lui personnellement ne doit pas jouir et les héritiers ne doivent pas succéder tant que l'on ne peut pas s'assurer s'il est mort. Or, je demande si un espace de dix années peut suffire pour acquérir la présomption de la mort de l'abseut?
Je combats précisément l'amendement de M. Régnier.
Il faut distinguer, en matière criminelle, deux sortes de prescriptions : 1° une prescription contre un crime non poursuivi par la société et qui s'acquiert par un laps de temps de 30 années. Je suppose un homme, par exemple, qui a versé le sang humain; on est 30 années sans le poursuivre ; mais pendant 30 années la société et la partie civile qui ont souffert de son crime ont le droit de rendre plainte contre lui : il ne s'agit pas de cette espèce ici.
Le second cas de prescription est contre le crime commis et poursuivi, voilà le cas de l'article, c'est le cas de la condamnation par contumace.
D'après le décret que vous venez de rendre, le contumax, ne se représentant pas, peut prescrire sa peine afflictive puisqu'il ne la subit pas, il peut prescrire contre cette peine par le laps de 20 années; mais il serait contre tous les principes de la prescription qu'il pût prescrire la peine d'infamie qui résulte nécessairement de la condamnation par contumace, qu'il acquît la décharge de sa peine afflictive, de sa peine corporelle, parce qu'il a été 20 ans sans la subir.
J'adopte l'amendement de M. Régnier et je demande sur tous les autres la question préalable.
, rapporteur. M. Régnier propose de limiter le temps. Là-dessu3 il n'y a qu'un motif pour se déterminer; c'est qu'il ne devrait pas y avoir tant de facilité pour les contumaces que nous en avons donné; nous avons adouci les articles de l'ordonnance de 1670 sur les contumax, en ce que d'uue part nous avons permis qu'on se représentât toute sa vie, ce qui, comme on sait, n'existait pas; d'une autre part après 5 ans. on confisquait les biens : on ne les confisque plus. Le motif qui nous a déterminé à supprimer la
confiscation est évident ; nous n'avons pas voulu que ses héritiers en fussent privés.
Ainsi je demande que l'article soit mis aux voix tel qu'il est, parce que je crois qu'il n'est pas encore assez sévère.
Je suis d'accord avec M. le rapporteur relativement aux contumax; j'observe seulement qu'il y a lieu de stipuler en faveur des héritiers après 20 ans.
(La discussion est fermée.)
Plusieurs membres demandent la question préalable sur l'amendement.
(L'Assemblée décide qu'il y a lieu à délibérer et adopte l'amendement)
Un membre: Il faut ajouter nécessairement que les héritiers donneront caution;
(Cet amendement est adopté.)
L'article additionnel) ainsi amendé, est décrété en ces termes :
« Après la mort de l'accusé, prouvée légalement, ou après 50 ans de la date du jugement, ses biens seront restitués à ses héritiers légitimes ; néanmoins, après 20 ails, ces héritiers pourront être provisoirement envoyés en possession des biens, en donnant caution. »
donhe leCturô d'une lettre de M. de Lessart, par laquelle il dontie connaissance à l'Assemblée de la séance tenue samedi dernier pour l'adjudication du bail des messageries et des motifs qui lui ont fait remettre cette adjudication à huitaine. Cette lettre est accompagnée du procès-verbal de la séance et d'un mémoire sur les mes-ageries.
(L'Assemblée renvoie Ces pièces au comité de l'imposition.)
La discussion du projet de décret siir les jurés est reprise.
Messieurs, l'Assemblée vient de décréter qu après 20 ans les biens d'un côntumax seraient rendus à ses héritiers en donnant caution ; je demande que l'on explique là-dessus si les biens seront remis aux héritiers qui se trouveront les plus proches à l'époque de 20 ans ou aux représentants de ceux qui se trouvaient les plus proches à l'époque de la condamnation par contumace, et que l'on fixe par un décret quel jour sera présumée ouverte la succession du condamné par contumace qui ne sera pas venu se représenter.
, rapporteur. C'est, au lieu de la preuve légale de mort, en admettre la supposition; mais il est évident qu'il y aurait plus de 400 articles à ajouter, si tout ce qui est affaire de jugement entrait dans une loi.
J'appuie l'observation de M. le rapporteur ; je demande l'ordre du jour, d'autant plus que ce sont les plus proches parents, à l'expiration de 20 ans, qui doivent entrer en possession des biens.
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour).
, rapporteur. Messieurs, il nous reste maintenant a examiner les titres XII et XIII du projet de décret.
Art. Ier
« Il y aura auprès de chaque tribunal de district une maison d'arrêt pour y retenir ceux qui y seront envoyés par un mandat d'officier de police, et auprès de chaque tribunal criminel une maison de justice pour détenir ceux contre lesquels il sera intervenu une ordonnance de prise de corps, iudépendamment des prisons qui pourront être établies comme peine. » (Adopté.)
Art. 2.
« Les procureurs généraux syudics veilleront, sous l'autorité des directoires, à ce que ces différentes maisons soient non seulement sûres, mais propres et saines, de manière que la santé des personnes détenues ne puisse être aucunement altérée. » (Adopté.)
Art. 3.
« La garde de ces maisons sera donnée par le directoire, sur la présentation de la municipalité du lieu, à des hommes d'un caractère et de mœurs irréprochables, lesquels prêteront serment de veiller à la garde de ceux qui leur seront remis, et de les traiter avec douceur et humanité. » (Adopté.)
Art. 4.
« Les gardiens des maisons d'arrêt, maisons de justice, ou geôliers de prisons, seront tenus d'avoir un registre signé et paraphé à toutes les pages par le président du tribunal. » (Adopté.)
Art. 5.
« Tout exécuteur de mandat d'arrêt, d'ordonnance de prise de corps, ou de jugement de condamnation à prison, sera tenu, avant de remettre la personne qu'il conduit, de faire inscrire en sa présence sur le registre l'acte dont il est porteur. L'acte de remise sera écrit de suite. Le tout sera signé tant par lui que par le gardien ou geôlier, qui lui en donnera copie signée pônr sa décharge. » (Adopté.)
Art. 6.
« Nul gardien ou geôlier ne pourra recevoir ou retenir aucun homme, qu'en vertu des mandats, ordonnances ou jugements dont il vient d'être parlé, à peine d'être poursuivi comme coupable du crime de détention arbitraire. » (Adopté.)
Art. 7.
« Le registre ci-dessus, mentionné contiendra également, en marge de l'acte de remise, la date de la sortie du détenu, ainsi que l'ordonnance ou le jugement en vertu desquels elle a eu lieu. » (Adopté,)
Art. 8.
« Dans toutes les villes où il y aura, soit une maison d'arrêt, soit une maison de justice, soit une prison, un des officiers municipaux du lieu sera tenu de faire, au moins deux fois par semaine, la visite de ces maisons. » (Adopté.)
Art. 9.
«L'officier municipal veillera à ce que la
nourriture des détenus soit suffisante et saine ; et, s'il s'aperçoit de quelque tort à cet égard contre la justice ou l'humanité, il sera tenu d'y pourvoir par, lui-même, ou d'y faire pourvoir par la municipalité, laquelle aura le droit de condamner le geôlier à l'amende, même de demander sa destitution au directoire de département, sans préjudice de la poursuite criminelle contre lui, s'il y a lieu. » {Adopté.)
Un membre demande, par amendement à l'article 10, que la police des maisons d'arrêt, de justice et de prison, appartienne au tribunal de aistrict.
Un membre demande la question préalable sur l'amendement.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer).
Art. 10.
« La police des maisons d'arrêt, de justice et de prison, appartiendra à la municipalité du lieu. » {Adopté.)
Art. 11.
« En conséquence, si quelque détenu usait de menaces, injures ou violences, soit à l'égard du gardien ou geôlier, soit à l'égard des autres détenus, l'officier municipal pourra ordonner qu'il sera resserré plus étroitement, renfermé seul, même mis aux fers en cas de fureur ou de violence grave, sans préjudice de la poursuite criminelle, s'il y a lieu. » {Adopté.)
Art. 12.
« Les maisons d'arrêt ou de justice seront entièrement distinctes des priions qui pourront être établies pour peine, et jamais un homme condamné ne pourra être mis dans la maison d'arrêt, ni un homme arrêté, même décrété, dans une prison. » {Adopté.)
TITRE XIII.
Des moyens d'assurer la liberté des citoyens contre
les détentions illégales ou autres actes arbitraires.
Art. 1er
« Tout homme, quelle que soit sa place ou son emploi, autres que ceux à qui la loi donne le droit d'arrestation, qui donnera, signera, exécutera l'ordre d'arrêter un citoyen, ou qui l'arrêtera effectivement, si ce n'est pour le remettre sur-le-champ à la police, dans les cas déterminés par la présente loi, sera puni comme coupable du crime de détention arbitraire- » {Adopté.)
Art. 2.
« Nul homme, dans le cas où sa détentiou est autorisée par la loi, ne peut être conduit que dans les lieux légalement et publiquement désignés par l'administration du déparlement pour servir de maison d'arrêt, de maison de justice ou de prison, sous la même peine contre ceux qui le conduiraient, détiendraient ou prêteraient leur maison pour le détenir. » {Adopté.)
Art. 3.
« Quiconque aura connaissance qu'un homme est détenu illégalement dans un lieu, est tenu d'en dooner avis à un des officiers muuici} aux
ou au juge de paix du canton. Il pourra aussi en faire sa déclaration, signée de lui, au greffe de la municipalité ou du juge de paix. » {Adopté.)
Art. 4.
« Ges officiers publics, d'après la connaissance qu'ils eu auront, seront tenus de se transporter, aussitôt, et de faire remettre en liberté la personne détenue, à peiné de répondre de leur négligence, et même d'être poursuivis comme coupables du crime de détention arbitraire, s'il est prouvé qu'ils avaient connaissance de la détention. » (Adopté.)
Art. 5.
« Personne ne pourra refuser l'ouverture de sa maison pour cette recherche : eu cas de résistance, l'officier municipal ou le juge de paix pourra se faire assister de la force nécessaire, et tous les citoyens seront tenus de prêter main-forte. » {Adopté.)
Art. 6.
« Dans le cas de détention légale, l'officier municipal, lors de sa visite dans les maisons d'arrêt, de justice ou prison, examinera ceux qui y sont détenus, et les causes de leur détention ; et tout gardien ou geôlier sera tenu, à sa réquisition , de lui représenter la personne de l'arrêté, ssiis qu'aucun ordre puisse l'en dispenser; et ce, sous peine d'être poursuivi comme coupable du crime de détention arbitraire. » (Adopté.)
Art. 7.
« Si l'officier municipal, lors de sa visite, découvrait qu'un homme est détenu sans que sa détention soit justifiée par aucun de3 actes mentionnés dans les articles 5 et 6 du titre XII, il en dressera sur-le-champ procès-verbal, fera conduire le détenu à la municipalité, laquelle, après avoir de nouveau constaté le fait, le met-' tra définitivement en liberté, et dans ce cas poursuivra la punition du gardien ou geôlier. » (Adopté.)
Art. 8.
« Les parents, voisins ou amis de l'arrêté, porteurs ae l'ordre de l'officier municipal, lequel ne pourra le refuser, auront aussi le droit de se faire représenter la personne du détenu, et le gardien ne pourra s'en dispenser qu'en justifiant de l'ordre exprès du juge, inscrit sur son registre, de le tenir au secret. » (Adopté.)
Art. 9.
« Tout gardien qui refuserait de montrer au porteur de l'ordre de l'officier municipal la personne de l'arrêté, sur la réquisition qui lui en serait faite, ou de montrer l'ordre du juge qui le lui défend, sera poursuivi ainsi qu'il est dit article 6 et autres. » (Adopté.)
Art, 10.
c Pour mettre les officiers publics ci-dessus désignés, à portée de prendre les soins qui viennent d'être recommandés à leur vigilance et à leur humanité, lorsque l'inculpé sera mené devant les officiers municipaux, ainsi qu'il est dit article 6 du titre lï, ceux-ci, après avoir pris note du mandat d'amener, entendront l'inculpé et leB plaintes qu'il pourrait faire des violences ou injures exercées contre lui en l'arrêtant : ils en dresseront procès-verbal, et l'enverront au juge de.paix» » (Adopté.)
Art. 11.
« Lorsque le prévenu aura été envoyé à la maison d arrêt du district, copie du mandat sera remise à la municipalité du lieu, et envoyée à celle du domicile du prévenu, s'il est connu; celle-ci en donnera avis aux parents, voisins ou amis du prévenu. » (Adopté.)
Art. 12.
« Le directeur du juré donnera également avis auxdites municipalités de l'ordonnance de prise de corps rendue contre le prévenu, sous peine d'être suspendu de ses fonctions. » (Adopté.)
Art. 13.
« Le président du tribunal criminel sera tenu, sous la même peine, d'envoyer auxdites municipalités copie au jugement d'absolution ou de condamnation du prévenu. » (Adopté.)
Art. 14.
« II sera tenu à cet effet dans chaque municipalité un registre particulier, pour y tenir note des avis qui leur auront été donnés. » (Adopté.)
rapporteur, descend de la tribune au milieu des applauJissements réitérés de l'Assemblée.
Plusieurs membres du comité de la marine ayant donné leur démission, l'Assemblée ordonne qu'ils seront remplacés par les suppléants élus lors de la nomination desdits membres.
annonce à l'Assemblée que M. Meunierdu Breuil, membre du comité de judi-cature, a donné sa démission de commissaire.
annonce l'ordre du jour de la séance de demain.
La scéance est levée à trois heures.
présidence de m. riqùett1 de mirabeau l'aîné.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires faitlecture du procès-verbal delà séanced'bier, qui est adopté.
communique à l'Assemblée une adresse de la municipalité d'Es-somes,
district de Château-Thierry, qui lui présente sa respectueuse et
profonde reconnaissance sur le décret du 26janvier dernier, qui annonce
que les droits .d'aides ne feront plus à l'avenir partie de3
contributions d'un peuple libre. Cette municipalité témoigne la joie la
plus vive de ce bienfait; mais ce Qu'elle exprime avec plus d'énergie
encore, et d une manière plus touchante, c'est son respect pour la loi,
en promettant de pay er tous les impôts avec la plus scrupuleuseéxac-
(L'Assemblée ordonne qu'il sera fait mention de cette adresse dans son procès-verbal de ce jour, et renvoie la pétition de là commune d'Essomes aux comités des impositions et des finances.)
, au nom du comité de commerce et d'agriculture, Messieurs, le comité d'agriculture et de commerce, après avoir pris une connaissance approfondie de l'affaire du sieur Lormov, s'est convaincu, depuis plusieurs années, que "le sieur Lormoy éprouve véritablement une persécution marquée : le comité a pensé qu'il serait dans nos principes d'équité et d'un exemple très utile de renvoyer cette affaire, par un décret, au pouvoir exécutif.
Voici le décret que je vous propose :
« L'Assemblée nationale décrète que l'affaire du sieur Guerrier-Lormoy, jugée par arrêt du conseil rendu le 16 juillet, et dont l'exécution a été sans effet, est renvoyée au pouvoir exécutif afin que force reste à la loi. »
Plusieurs membres demandent l'ordre du jour.
L'exécution de la loi appartient au pouvoir exécutif ; il serait peut-être dangereux que le Corps législatif fît désormais de semblables renvois.
Prenez garde, Messieurs, qu'en voulant faire entendre au peuple que vos desseins sont de donner au pouvoir exécutif d'une façon formelle ce qui lui appartient, il faut commencer par donner l'exemple de cette déférence pour ses fonctions. Un décret fera donc plus d'effet que de passer à l'ordre du jour. Il convient, c'est le bien de la chose, de le renvoyer au pouvoir exécutif.
(de Saint-Jean-d,Angély.) Il y a un moyen de rendre plus utile encore l'idée de M. Vernier ; car il est important que l'on apprenne que le pouvoir que vous avez créé est revêtu des fonctions que vous lui avez attribuées.
Il faut donc dire qu'attendu que le pouvoir exécutif est créé pour l'exécution de la loi, il n'est pas besoin d'un nouvel ordre du pouvoir législatif, parce qu'il tient ce pouvoir de la Constitution, et passer à l'ordre du jour.
En motivaut ainsi la mesure que vous allez prendre, vous donnerez bien plus d'action au pouvoir exécutif, vous apprendrez plus à le respecter.
, rapporteur. J'adopte la motion de M. Regnaud et je propose la rédaction suivante :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son^ comité de commerce et d'agriculture sur les difficultés qu'a éprouvées l'exécution d'un arrêt du conseil en faveur du sieur Guerrier-Lormoy, propriétaire dans le département de la Somme, sur la proposition que lui a faite son comité de renvoyer au pouvoir exécutif pour que la loi ait toute sa force ; considérant que la Constitution
a donné au roi toute la force nécessaire pour faire respecter la loi et les mandements de justice, et qu'un décret particulier est conséque-ment superflu, et ne peut rien ajouter aux moyens d'action du pouvoir exécutif, ni au devoir de ses agents de les employer, a passé à l'ordre du jour. »
(Cette motion est décrétée.)
, au nom du comité des finances, présente le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète que les acquéreurs de rentes constituées sur le ci-devant clergé, ou sur les ci-devant pays d'Etats, pour le compte du roi, dont les contrats sont antérieurs au premier janvier de la présente année, ne sont point tenus de prendre des lettres de ratification ; qu'en conséquence, ils doivent être immatriculés et payés sans difficulté, s'il n'y a opposition. »
(Ce décret est adopté).
Messieurs, les propriétaires des dîmes inféodées se plaignent de ne pouvoir être admis en concurrence pour l'achat des biens nationaux, parce que le comité n'a pas encore présenté une loi à ce sujet; je propose que le comité d'aliénation s'en occupe, afin de présenter, samedi prochain, dans la séance du soir, un décret qui permette aux propriétaires d'être admis en concurrence dans l'aliénation des biens nationaux.
(Cette motion, mise aux voix, est renvoyée au comité d'aliéi^Aw!>H,'pfl,Ur en rendre compte samedi prochain, à la séance du soir.)
, au nom du comité d'emplacement des. triàju/00t et corps administratifs. Messieurs, le dîflfctoire du district de Sancerre, département du Cher, demande la permission d'acquérir, pour tenir ses séances, la maison desaugustins de cette ville, avec trois boisselées de terrain qui en dépendent. Votre comité s'est généralement armé de sévérité contre le" goût trop décidé des administrateurs pour les bosquets et les jardins ; mais ici la circonstance est tout à fait différente ; le jardin dont il est question est tellement dépendant de la maison que veulent acquérir les administrateurs, que si on le séparait il resterait presque sans valeur. Nous avons pensé aussi que les administrateurs pourraient acquérir, même des pièces d'eau et des jardins anglais, lorsque cela ne coûterait pas plus de 4,200 livres.
Voici, en conséquence, le projet de décret que vous propose votre comité :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d'emplacement des tribunaux et corps administratifs, autorise le directoire du district de Sancerre, département du Cher, à acquérir aux frais des administrés la maison des augustins de cette ville, suivant les formes prescrites par les décrets sur l'aliénation des biens nationaux, à la charge qu'aucuns des administrateurs, secrétaires ou commis ne pourront y être logés. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité des contributions publiques. Messieurs, j'ai l'honneur de vous proposer, au nom du comité des contributions publiques, les dispositions nécessaires relativement au cautionnement des employés et préposés à la perception du droit d'enregistrement; elles sont contenues dans le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des contributions publiques, décrète :
(8 février 1791.| 41
Art. 1er
Les cautionnements pour l'exercice de la recette des droits régis par les commissaires-administrateurs du droit d'enregistrement, seront faits dans la même forme et sous les mêmes règles que ceux des receveurs des districts, conformément aux articles 7, 8 et suivants du décret du 14 novembre 1790. » (Adopté.)
Art. 2.
Le montant des cautionnements de chacun de ces employés sera fixé par les administrateurs, de manière à présenter une solvabilité suffisante pour les recettes et l'exercice confiés auxdïts employés. »
(de Saint-Jean-d'Angèly). Sur ce point comme sur tous les autres, tendant à compromettre les revenus de l'Etat par un événement possible, il faut que ce soit le Corps législatif qui prononce. Je demanderais uu mode commun de cautionnement.
, rapporteur. Je n'ai qu'une observation à faire à l'Assemblée sur la proposition du préopinant : je ne suis nullement éloigné de l'adopter, mais je crains qu'elle n'entraîne des lenteurs.
Il est impossible de vous proposer dans le moment actuel un mode commun de cautionnement pour les divers préposés; il faudrait donc, chaque fois que l'on changera l'arrondissement des bureaux, venir proposer un nouveau mode de cautionnement.
(de Saint-Jean-d'Angély). Je suis extrêmement touché de l'observation de M. le rapporteur, mais s'il veut ajouter à l'article 2 le mot provisoirement, il n'y aura plus de difficulté»
(L'amendement de M. Regnaud est adopté.)
L'article 2 est décrété comme suit :
« Le montant des cautionnements de chacun de ces employés sera fixé provisoirement par les administrateurs, de manière à présenter une solvabilité suffisante pour les recettes et l'exercice confiés auxdits employés. »
Art. 3.
« Ces cautionnements ne pourront être stipulés p >ur plus de neuf années d'exercice de* l'employé cautionné; l'action hypothécaire, qui en dérive, cessera trois années après l'expiratioti de ladite époque stipulée; et la caution ne pourra être poursuivie, quand même il serait découvert des omissions et reliquats de recette après ces trois années, sans préjudice cependant du droit qui subsistera en pareil cas contre le cautionné, et qui aura la même durée que les actions civiles personnelles. » (Adopté.)
Art. 4.
« Les cautionnements par hypothèque, prêtés pour le maniement et l'exercice des employés des contrôles et droits y joints, auront leur effet pour les droits d'enregistrement et autres, dont ces employés seront chargés par les commissaires de cette régie, sous les clauses et conditions qui y sont stipulées, et pour le temps qui en reste à. expirer. » (Adopté.)
Messieurs, je suischargé
d'annoncer à l'Assemblée que tous les fonctionnaires ecclésiastiques de Belley, chef-lieu du district de ce nom, département de l'Ain, au nombre de 28, ont prêté serment au milieu de fêtes publiques, sans qu'il se «oit trouvé un seul rebelle.
Je suis aussi chargé de vous demander une loi sur les ventes forcées des biens appartenant à des débiteurs fuyards.
Il ne faut pas de loi; c'est l'affaire des tribunaux.
Le comité de Constitution s'occupe de cet objet.
L'ordre du jour est un rapport du comité ecclésiastique sur les secours à donner aux curés qui n'auront pas prêté le serment décrété le 27 novembre dernier.
, rapporteur. Vous avez chargé votre comité de vous présenter un projet de décret sur le traitement qu'il convient d'accorder aux fonctionnaires ecclésiastiques qui, n'ayant pas prêté le serment, doivent être remplacés. Votre comité a pensé que vous ne deviez pas de pensions à ceux qui n'avaient pas de traitements fixes, par exemple aux prédicateurs.
Quant à la quotité de ces secours nous avons été fort embarrassés pour établir la proportion qu'ils doivent avoir aveo les anciens revenus.S'ils étaient très considérables, il pourrait sé présenter beaucoup de milliers d'ecclésiastiques. Nous avons pensé qu'ils ne pouvaient être fixés à plus de 500 livres pour les curés. Régler les secours, d'après leur patrimoine, eût été un moyen inqui-sitorial et impraticable , cependant il est convenable qu'ils n'en jouissent que dans le cas où ils n'auraient aucune pension provenant d'un bénéfice.
Nous avons ensuite examiné l'époque à laquelle ces traitements devaient commencer à courir, et nous avons pensé que ce ne pouvait être que du jour où ils auraient'abandonné tout moyen d'exciter du trouble, en donnant volori^ tairement leur démission, et en laissant installer leurs successeurs. Enfin tous ceux qui n'ayant pas prêté le serment * le prêteraient par la suite pour être nommés à de nouvelles fonctions publiques, seraient alors censés renoncer aux secours qu'on leur accorde comme démissionnaires.
Quant aux évêques qui n'ont pas prêté serment, ils sont aussi bien que les curés réputés avoir donné leur démission ; et vous avez déjà déterminé quelle serait la pension de retraite des évêques; ellenepourra excéder 10,000 livres.
Enfin nous avons cru que le traitement des autres fonctionnaires, tels que : directeurs des séminaires, professeurs, etc., devait être le même que pour les curés.
Voici," en conséquence, le projet de décret que nous vous proposons :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité ecclésiastique, décrète :
« Art. 1er Les fonctionnaires publics
ecclésiastiques, remplacés comme démissionnaires, en conséquence de leur
refus de prêter le serment prescrit par la loi du 27 novembre 1790,
cesseront d'avoir droit au traitement attaché à la place qu'ils auront
abandonnée par ce refus, du jour auquel leurs successeurs seront entrés
en fonctions. A compter de ce même jour, ita pour-
ront avoir sur le Trésor public le traitement au secours qui va être déterminé, lequel commen-. cera à courir, pour les évêques et curés, à compter du jour auquel ils auront remis une expédition de l'acte de leur démission, au secrétaire du district ou de la municipalité du lieu de leur domicile, et pour les autres, du jour où leurs successeurs seront entrés en fonctions.
« Art. 2. Ce traitement ou secours sera annuel et viager. Il leur sera payé de 3 mois eu 3 mois par le receveur du district de la situation de leur domicile.
« Art. 3. Il sera, pour les évêgues, tel qu'il a été réglé pour le cas de leur démission par l'article 3 du décret du 24 juillet dernier. Il sera de 50Ô livres pour tous autres fonctionnaires publics ecclésiastiques; et néanmoins, s'il en est parmi eux dont le traitement àraison de la place qu'ils auront abandonnée par leur refus du serment, était sôit en nature, soit en argent de moins dé 500 livres, ils recevront du Trésor public, à litre de secours annuel et viager, leur traitement actuel en entier.
« Art. 4. Lesdits fonctionnaires qui, à raison de pensions çi-devant établies sur leurs bénéfices ou titres ecclésiastiques, autres que celui qu'ils ont abandonné en refusant de prêter le serment, au-aient eu droit à un traitement au-dessus de 500 livres en vertu du décret du 24 juillet dernier, ou des articles additionnels à ce décret, pourront l'exiger; et, dans ce cas, ils n'auront pas droit aux secours accordés pjar l'article précédent.
« Art. 5. Ceux qui, pour les causes mentionnées dans l'article 4, auraient eu droit au traitement de 500 livres ne pourront également prétendre auxdits secours.
« Art. 6. Ceux qui, pour les mêmes causes auraient eu droit à un traitement au-dessous de 500 livres pourront l'exiger, s'ils ie préfèrent; mais ils Sauront droit aux secours accordés par le^présent décret, qu'en renonçant audit traitement.
« Art. 7. Tous ceux auxquels il est accordé par le présent décret, et en conséquence de leur démission pour refus de serment, un traitement ou secours, et qui, dans la suite, ayant satisfait à la loi, seraient pourvus d'office et emplois pour le service divin, cesseront aussilôt d'avoir droit auxdits traitements ou secours.
« Art. 8, Les simples vicaires n'auront droit, en aucun cas, auxdits traitements ou secours.
« Art. 9. Les directoires de département se procureront, par le moyen des municipalités et des directoires de district, les états de tous les fonctionnaires publics ecclésiastiques auxquels il sera dû des traitements en conséquence du présent décret; ils vérifieront lesdits étals, et en formeront, pour leur département, un état général qu'ils enverront, le plus tôt possible, à l'Assemblée nationale. »
(de Saint-Jean-d'Àngèly). Cette matière est de nature à être discutée avec profondeur; je demande l'impression du rapport et l'ajournement de la discussion à jour fixe et très rapproché.
Je ne vois pas pourquoi l'Assemblée ajournerait et demanderait l'impression pour accorder aux curés le modique traitement proposé par le comité ecclésiastique.
Les principes du projet qui vous est fournis me paraissent bien simples et nullement susrep-
tibles d'une longue discussion. Vous avez déjà statué sur le-traitement des évêques démissionnaires et vous reconnaissez que vous nè poiivez pas demander à revenir sur le décret que vous avez rendu. Pour les curés, on vous propose un traitement modique, mais raisonnable, et on leur indique la manière de l'obtenir : ce sera de donner leur démission, seul moyen de faire cesser les troubles. Rien ne me parait plus intéressant; parmi les réfractaires, qui se refusent à l'exécution de votre loi, il en est sans doute de bonne foi, et nous devons même le supposer pour tous ; eh bien, ils éprouveront la même répugnance pour donner leur démission que pour prêter le serment.
Le préopinant ne trouve rien de si simple que d'aller aux voix article par article sur le décret qui est proposé par le comité : je vous avoue que je ne suis pas aussi facile à me décider quand je vois des évêques, qui par leurs mandements insidieux ont entraîné dans l'erreur des pasteurs, avoir 10,000 livres de retraite, tandis que les autres n'ont que 500 livres.
Un membre : Ce sont des hommes comme les curés.
On prétend que c'est l'exécution d'un de nos décrets. Si nos décrets ont prévu le cas où les évêques se refuseraient à prêter le serment et donneraient pour cela leur démission et qu'on leur ait accordé pour récompense de leur rébellion à la loi 10.000 livres de reiitë, il faut se soumettre aux décrets : mais s'il n'est pas vrai que les décrets dont il s^agit aient prévu le cas injuste qui donne 10,000 livres aux auteurs de la rébellion, et qui ne donne que 500 livres aux curés qui ont été séduits par les évêques, je demande le droit de réfléchir et pour l'intérêt public, et pour là justice. (.Applaudissements.)
Je demande donc l'impression du rapport et l'ajournement-
Les évêques et leâ curés réfractaires ne devraient avoir tous que 500 livres.
Je crois que le décret proposé par le comité ecclésiastique n'éprouve de difficulté gue parce qu'il comprend beaucoup d'articles inutiles, et d. autres qui ne sont pas nécessaires à traiter. Ainsi dans ce moment pour satisfaire au vœu de l'Assemblée, il suffirait de décréter les dispositions que son humanité et sa justice la pressent de décider relativement aux curés démissionnaires.
. Je propose, en conséquence, de substituer au projet du comité les deux articles suivants !
« Art. 1er. Les curés qui donneront leur
démission dans la présente année, jouiront d'une retraite de 500 livres.
« Art. 2. Aucun d'eux ne sera payé dudit secours de 500 livres, s'il ne présente une expédition de son acte de démission. »
Par C9S articles, vous assurez d'une part le sort des curés, objet auquel il est le plus instant de pourvoir; et de l'autre vous maintenez la tranquillité publique.
Je dois relever une erreur qui est échappée à l'antépréopinant, et qu'il serait dangereux de laisser propager dans le royaume. Il ne faut pas croire que l'Assemblée ait voulu faire du
serment une loi impérative. Elle a donné aux ecclésiastiques là faculté de refuser, en donnant leur démission. Celui qui ne prête pas le serment n'est pas rebelle, s'il donne sa démission; au Contraire, il obéit à la loi, qui lui a dontté la faculté d opter. Le rebelle est celui qui, malgré son refus de prêter le serment, veut continuer d'exercer ses fonctions : le rébelle est celui qui, àprès avoir prêté le serment, désobéit à la loi : le rebelle est celui qui distribué deg mandements incendiaires, des écrits dèstinés à séduire les pasteurs. Aussi la loi du 26 décembre contiënt-ëlte dès dispositions particulières pour ceux qui, en refusant le serment, s'obstineraient à rester en place, ou troubleraient leurs successeurs. Aussi la même loi ordonne-t-elle aux tribunaux de poursuivre comme criminels de lèse-nation ceux qui troubleràient l'ordre public, en se coalisant pour combiner une résistance contre les lois. Mais je maintiens que celui qui donne sa démission pour ne pas être dans le cas de prêter le serment, n'est pas un réfractaire, et qu'il se trouve dans les bornes de la loi... Je demande que si le projet de décret qui vous est soumis est ajourné, il le soit à un jour très prochain.
Si l'on veut l'ajournement, j'y consens; mais si l'on veut aller aux voix, voici mon observation : La loi est faite; il ne s'agit que de l'exécuter. Vous avez décrété, dans les articles de la constitution civile du clergé, que les évêques démissionnaires auront un traitement qui ne pourra excéder 10,000 livres. Vous avez décrété le 27 novembre que les ci-devant archevêques et évêques, qui" refuseront de prêter le serment, seront censés renoncer à leurs fonctions, et qu'ils seront remplacés comme démissionnaires. Vous avez donc pris l'engagement de les traiter comme démissionnaires, et vous êtes obligés de suivre à leur égard les règles que vous avez prescrites pour les pensions de retraite.» Il en est de même à l'égard des curés. Je fais une seconde observation non moins essentielle : c'est qu'il serait souverainement injuste d'éxiger d'eux qu'ils donnassent leur démission, (Murmures) démission qui répugné absolument aux principes de ceux qui ont refusé le serment, aux principes tion les frustrerait presque Idus d'un traitement qu'on paraît leur accorder et qu'on ne peut leur refuser.
Plusieurs membres demandent l'ajournement.
Je demande la parole pour représenter que la proposition de M. Camus peut bien être décrétée aujourd'hui sans discussion ultérieure.
Plusieurs membres : Non ! non !
Elle est si simple dans ses motifs et dans sa rédaction (Interruptions.)que je ne puis croire qu'elle ait besoin d'un ajournement.
Vous devez des secours aux curés qui se retireront, et je ne crois pas que vous puissiez vous refuser à décréter que « les curés qui, en vertu de l'exécution des décrets, seront remplacés par d'autres fonctionnaires publics, recevront, à compter du jour où leurs successeurs entreront en exercice, un traitement annuel de 500 livres. »
J'appuie le projet de décret du préopinant. Vous avez chargé votre comité de
vous présenter un traitement pour les curés qui, n'ayant pas prêté le serment, sercnt remplacés. Il me paraît juste de le fixer à 500 livres. Mais d vez-vous donner aux évêques 10,000 livres ? On dit que non ; j'y consens. Je ne sais pas en effet si lorsqu'on ne donne que 500 livres à des pasteurs séduits, il faut donner 10,000 livres aux évêques qui les ont mis en mouvement ; je demande qu'on ajourne la fixation du traitement des évêques seulement.
En ce qui concerne les curés, vous ne pouvez pas mettre une seconde condition à l'admission de leur pension ; vous ne pouvez pas exiger qu'ils donnent leur démission ; car vous avez décrété que, par le refus seul du serment, ils seront réputés avoir donné leur démission. Ils ont deux manières de se démettre, ou de donner un acte formel de démission, ou de refuser le serment. Je demande que tous les curés remplacés aient 500 livres, et que le reste du projet de décret soit ajourné. (Applaudissements.)
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
(L'Assemblée ferme la discussion.)
résume la discussion.
, rapporteur. Il ne s'agit pas Feulement des curés, mais encore des directeurs de séminaires, des directeurs d'bôpitaux, hommes tout aussi respectables.
Plusieurs membres : Non ! non !
, rapporteur... Et enfin, Messieurs, il s'agit encore des principaux de collège, des régents. (Murmures.) Je demande qu'ils soient compris dans le. projet de décret ; que l'Assemblée ajourne ou qu'elle s'explique à cet égard.
Il faut savoir, en second lieu, si les secours que vous allez décréter seront donnés à ceux qui j/ouissent déjà de pensions pour bénéfices.
Je demande la question préalable sur la première proposition de M. Lanjuinais ; 1° parce qu'elle n'est pas à l'ordre du jour; 2° parce qu'il n'est pas possible de mettre sur la même ligne des titulaires perpétuels et ceux qui étaient amovibles, et n'exerçaient leurs fonctions que par commission.
Quant à la seconde observation du préopinant, je conviens que l'intention de l'Assemblée ne peut pas être de donner des secours à ceux qui ont déjà des pensions. On peut ajouter cette clause au projet de décret de M. Lec Chapelier.
Je demande la parole.
La discussion est fermée sur le fond.
Je demande à proposer un amendement.
Je n'examinerai point s'il doit être question en ce moment d'autres fonctionnaires que des évêques et des curés ; mais je dis qu'il est souverain! ment injuste de réduire les curés à un traitement de 500 livres. (Violents murmures.) Ils doivent être traités comme démissionnaires. Or, voire Constitution porte qu'un curé qui ne peut plus remplir ses fonctions, est le maître, ou de conserver sa cure et d'en faire faire le service par un vicaire, ou d'avoir le traitement qu'au-
rait eu le vicaire. Je demande donc que les curés aient 700 livres.
Un membre: Vous ne donnez à un brave militaire que 200 livres, à un brave vétéran de la gendarmerie nationale que 300 livres, à de saintes religieuses que 300 livres. Je demande que les curés aui refuseront de prêter le serment n'aient que 400 livres, ou même que 100 écus. (Applaudissements.)
Plusieurs membres demandent la question préalable sur les amendements.
Plusieurs membres demandent la division des amendements.
curé de Sergy. Je demande à faire une observation sur ce qu'a dit M. Martineau, et sur le dernier amendement. Les curés patriotes qui, ayant prêté le serment, se trouveront dans quelque temps dans le cas de donner leur démission, soit à cause de leurs infirmités dûment constatées, soit à cause de leur grand âge, n'auront aucun traitement en récompense de leurs longs services; et l'on propose de donner 500 livres aux ecclésiastiques fonctionnaires qui refuseront le serment I
Vous devez agir avec justice et impartialité. Ce n'est pas en examinant si les curés qui ne prêtent pas le serment sont réfrac-taires, que vous devez vous déterminer sur les secours qu'il leur faut accorder; c'est sur la justice, et je puis ajouter, c'est sur la politique ; c'est afin que des malveillants ne répandent pas, comme ils font déjà dans tout le royaume, que vos décrets portent le caractère de la persécution. (Murmures à gauche.)
Je prie l'Assemblée de ne point se laisser aller à l'impulsion de son patriotisme qui, quelquefois, peut avoir des suites fâcheuses. Nous devons, Messieurs, prendre des mesures pour établir la Constitution solidement et sans trouble, autant qu'il sera possible. Ce motif-là me fait conclure à admettre la proposition du comité, qui est de 500 livres.
Un membre : On dit que la seule contre-révolution à craindre est du côté de l'impôt. La politique veut donc que par-dessus tout on s'occupe à diminuer l'impôt. Je persiste dans mon amendement de 300 livres.
On demande la question préalable sur tous les amendements; on demande également la division de la question préalable. Je vais mettre la division aux voix.
(L'Assemblée décide, à une petite majorité : 1° qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la division ; 2° qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur aucun des amendements.)
La motion de M. Le Chapelier est ainsi conçue :
« L'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
« Les curés qui, d'après l'exécution des décrets, seront remplacés par d'autres fonctionnaires publics, recevront, du jour que L urs successeurs entreront en fonctions, un secours annuel de 500 livres, si, à raison de leurs autres anciens bénéfices, ou de pensions sur anciens bénéfices,
Iils n'ont pas droit à un traitement égal ou supérieur ».
(Cette motion est adoptée.)
Plusieurs membres demandent qu'on statue sur le traitement des évêques.
On m'observe que cet objet est décidé par les décrets antérieurs.
IL s'agit de savoir si les curés qui ont été séduits seront punis seuls, tandis que Tes évêques qui sont les séducteurs, ne le seront pas. (Murmures.)
Un membre: Il ne s'agit pas de punition.
Je demande l'ajournement de la question.
Est-ce le Code pénal des évêques que vous demandez?
Oui!
Il faut une loi de justice, et non de colère. La question est jugée par la loi du 26 décembre. Les évêques, qui ne prêtent pas le serment, sont des démissionnaires aussi bien que les curés, et doivent être traités comme tels. L'ajournement ne tend à rien moins qu'à jeter du doute sur les dispositions déjà jugées.
La question est de savoir si les évêques qui refusent le serment, quoique devant être regardés comme renonçant à leurs fonctions, doivent être traités avec la même faveur que ceux qui donnent leur démission pour des causes légitimes de grand âge et de longs services, ou d'infirmités. Cette question n'est pas éclaircie; c'est pour nous donner le temps de l'examiner que je demande l'ajournement.
(L'Assemblée consultée décrète l'ajournement.)
, au nom du comité d?aliénation présente le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux de la soumission faite par la municipalité de Tours, en conformité du décret du 14 mai 1790, déclare vendre à ladite municipalité les biens mentionnés en l'état annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, pour le prix et somme ae 366,359 livres, payables de la manière déterminée par ledit décret du 14 mai 1790.»
(Ce décret est adopté.)
L'ordre du jour est la discussion du projet de décret du comité de Constitution sur la formation de la haute cour nationale (Cour de cassation).
, rapporteur. Messieurs, vous avez mis à l'ordre du jour la constitution de la baute cour nationale. A l'époque à laquelle vous aviez ajourné ce travail, le comité de Constitution, dans son rapport, vous avait présenté les diverses idées qui avaient décidé, et la formation de la haute cour nationale, et le genre de sa composition. Depuis ce temps on a beaucoup réfléchi sur cet établissement ; toutes les idées sont faites à cet égard : il est inutile, ce me semble, que le comité de Constitution commence par employer votre temps* à écouter une dissertation sur la question de savoir s'il doit y avoir une haute cour nationale; c'est à sa composition qu'il me semble que la discussion s'attachera davantage.
Nous savons que quelques hommes célèbres se sont attachés à prouver que l'établissement d'une
haute cour nationale ne devait pas être dans la Constitution. Mais nous avons pensé que nous devions cependant tenir à notre projet pour certains délits et pour certaines personnes qui ne peuvent être accusées que par les représentants «le la nation ; certains délits, parce qu'ils intéressent la sûreté de l'Etat; certaines personnes, parce qu'elles seraient perpétuellement troublées dans l'exercice de leurs fonctions, si quelques citoyens pouvaient les accuser à raison de ces mêmes fonctions. Ainsi c'est pour la marche même du gouvernement qu'il faut une haute cour nationale à laquelle soient portées les affaires dans lesquelles le pouvoir législatif se rendra accusateur.
On nous a fait encore, à cette époque où vous avez ajourné notre travail après la fin du travail sur les jurés, on nous a fait une objection qu'çn nous répétera peut-être ; on nous a dit qu'avant d'établir la haute cour nationale il faudrait définir les crimes de lèse-nation, il faudrait savoir quels sont les cas dans lesquels le Corps législatif pourra se rendre accusateur.
Nous prévenons cette objection en observant que c'est une autre branche de travail toute séparée ; que nous ne faisons ici que ce que nous avons fait pour les jurés : vous n'avez pas encore rédigé votre Gode pénal ; cependant les vices, les faiblesses des hommes, les entraînent à troubler la société par les délits : vous avez cru qu'il fallait établir une manière pour les juger. Vous savez qu'il est possible qu'il y ait des citoyens prévaricateurs qui cherchent à troubler l'Etat ; vous savez qu'il est possible et fréquent que les agents du pouvoir exécutif et tous les fonctionnaires publics empiètent sur leurs pouvoirs, les excèdent et s'n servent pour vexer les -citoyens et attenter à la liberté publique, quand ces mêmes pouvoirs ne lui sont confiés que pour la défendre.
Ainsi, embrassant déjà dans votre pensée les divers délits auxquels peut être exposée la société, vous concevez assez qu'il en est de telle nature qu'ils intéressent la totalité du gouvernement, la sûreté de la Constitution et du royaume, que ces délits ne peuvent pas avoir pour accusateurs chaque citoyen ou un simple fonctionnaire public, parce qu'il n'aurait pas la faculté de rassembler tout ce qu'il lui faudrait, ni la force nécessaire pour faire punir des coupables souvent accrédités.
Je vais donc, sans autre discussion, vous donner lecture du projet de décret que nous vous avons du reste déjà lu, en vous demandant de l'adopter.
, rapporteur, donne lecture du projet de décret du comité (1).
Les 3 premiers articles sont décrétés comme suit :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le nouveau et dernier rapport, au nom du comité de Constitution, sur la formation de la haute cour nationale, décrète ce qui suit :
Art. 1er
« La haute cour nationale sera composée d'un haut juré et de quatre
grands juges, qui dirigeront l'instruction et qui appliqueront la loi,
après la décision du haut juré, sur le fait. »
« Lors des élections pour le renouvellement d'une législature, lès électeurs de chaque département, après avoir nommé Jes représentants au Corps législatif,éliront au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages, deux citoyens ayant les qualités nécessaires pour être députés au Corps législatif, lesquels demeureront inscrits sur le tableau du haut juré pendant le cours de cette législature, »
Art. 3.
« Chaque nouvelle législature, après avoir vérifié les pouvoirs de ses membres, dressera la liste des jurés élus par les départements du royaume, et elle la fera publier. »
, rapporteur, donne lecture de l'article 4, qui est ainsi conçu ;
Art. 4.
« La haute cour nationale connaîtra de tous les crimes et délits dont le Corps législatif se portera accusateur. »
On dit bien que la haute cour nationale prononcera sur les délits dont le Corps législatif se sera déclaré l'accusateur; mais on ne dit pas que le Corps législatif ne pourra se porter accusateur que des crimes qui auront été reconnus crimes de lèse-nation,
Un membre à gauche ; Gela est convenu.
Je demande donc qu'on ajoute à l'article ces mots : et reconnus par la loi pour crimes de lèse-nation,
Je reproduis la première observation faite lorsqu'il a été question de décréter la haute cour nationale. On a demandé que les délits qui formeraient la compétence de cette haute cour fussent définis. Certes, cette demande était juste, car la réponse qu'a faite M. le rappor-r teur, à savoir que vous avez décrété les jurés sans décréter un code pénal, , n'est point applicable dans la circonstance : Il existe bien, en effet, un code pénal où tous les crimes sont déjà définis, tandis qu'il n'existe aucun code pénal pour les crimes de lèse-nation. Vous décrétez donc ici un article vague, iudéfini, qui attribue au Corps législatif le droit de porter à la haute cour nationale tous les délits qu'il jugera à propos.
Je soutiens qu'une telle loi ne peut être admise et je propose en amendement une disposition qui ne nréjuge rien et qui ne doit pas trouver d'opposition. Je demande qu'on ajoute à l'article que « la haute cour nationale ço,nna\tra des délits dont il sera fait mention dans Varticle suivant », et qu'à cet effet on insère un article contenant rénumération des crimes de iè^ernatioq.
.Messieurs, je demande la question préalable sur les observations du préo-piniipt, et'voici mon motif ; j'ài entendu II. le rapporteur dire que le comité de Constitution s'occupe de la formation d'un cqde pénal, et que dans la formation de ce code les peines étant définies à raison des délits qui seront de la compétence de la haute cour nationale, ers délits y seront formellement exprimés. Qu'est-ce que vous propose aujourd'hui le comité de Constitution ?
Il vous propose que le Corps législatif puisse se rendre accusateur lorsqiikil le jugera convenable. Il en résulte doqc que le Corps législatif ne sera pas obligé de se rendre accusateur, même pour des délits qui pourraient être poursuivis devant la haute cour nationale,
Mais, quand vous décréterez quels sont les délits qui doivent être de la compétence de la haute cour nationale, vous direz que pour aucun autre délit le Corps législatif ne pourra être accusâ-leur, et l'objet se trouvera rempli par cette disposition. li ne faut pas dire que le Corps législatif sera obligé d'être accusateur, mais vpus pouvez dire, en définitive, qu'il ne pourra se rendre accusateur que pour tel ou tel délit.
, rapporteur. Il est impossible que la haute cour nationale soit en activité très promptement. Avant ce moment, vpps vpus occuperez du code pénal, dont le premier titre aura pour objet les délits que le Corpg législatif pourra dénoncer. Je demande la question préalable sur les amendemeots.
On pourrait, relativement à la haute cour nationale, dire qu'elle ne pourra se mettre en activité que le code pénal n'ait été décrété.
. Un membre ; Cela n'est pas nécessaire'
(L'Assemblée rejette les amendements et adopte l'article 4.)
Art. 5.
« La haute cour nationale ne se formera que quand le Corps législatif aura porté un décret d'accusation. »
Je demanderais qu'on décidât si le roi pourra se porter accusateur.
, rapporteur. Ceci se rapporte à la seconde partie de notre travail.
(L'article 5 est adopté.)
Art. 6.
« Elle se réunira à une distance de 15 lieues au moins du lieu où la législature tiendra ses séances. Le Corps législatif indiquera la ville où la haute cour nationale s'assemblera. »
Je crois, Messieurs, qu'au contraire la haute cour nationale devrait siéger dans la même ville que le Corps législatif. (Murmures.) Par la nature de ses fonctions, la cour nationale aura à prononcer sur le sort de personnages puissants, parce que ce ne sont pas les citoyens faibles crui conspirent contre la liberté. Ce tribunal aura donc besoin d'un grand courage et d'une grande éuergie ; et pour cela, il faut l'environner d'une grande masse d'opinion publique : or, c'est dan? les grandes villes que l'opinion publique exerce tout èon empire j et c'est dans la plus grande ville du royaume que siège le Corps législatif.
Il y a donc une raison sans réplique, puisée dans les fonctions mêmes de la haute cour nationale, pour placer ses séances près du Corps législatif : remarquez, Messieurs, qu'en la reléguant à 15 lieues, vous ne la mettez pas à l'abri de la corruption des personnages intéressés à la Gorrompre, puisqu'elle peut l'atteindre partout ; mais vous l'éloignez du centre de l'opinion publique, nécessaire pour former le contrepoids à ce
danger éminent de la corruption. Je conclus que la cour nationale doit siéger dans la capitale avec le Corps législatif. (Applaudissements.)
Les raisons du préopinant me paraissent précisément appuyer la proposition contraire. En effet, qu'est-ce la haute cour nationale ? G'est un tribunal qui doit juger entre la nation ou les représentants de la nation accusateurs, d'une part, et les accusés coupables de forfaiture, de l'autre. Quel doit être l'objet du Corps législatif? G'est celui de mettre toujours les accusés à l'abri de toute impulsion étrangère, à l'abri même quelquefois de ce qu'on appelle l'opinion publique, de cette opinion populaire, si terrible contre les accusés. (Applaudissements à droite)... Si vous m'applaudissez, Messieurs, vous me ferez perdre...
Je dis donc que dans ce principe vous devez écarter de la haute cour nationale l'extrême influence qu'exerce toujours l'opinion du Corps législatif; et en effet, Messieurs, lorsque le Corps législatif se sera déclaré accusateur, il aura déjà prononcé par-là que l'opinion est contre les accusés, puisque c'est un crime de lèse-nation.
Voulez-vous ajouter encore à toutes les preuves qui peuvent exister contre les accusés, l'influence de l'opinion publique ? Ce n'est pas là votre intention. Remarquez que, dans toute la procédure par jurés, vous avez suivi le même principe, puisque vous avez établi d'abord un juré d'accusation, ensuite un juré de jugement, qui n'est pas dans ja ville egt le juré d'accusation, et qui, s'il y est, pept être décliné par l'accusé ; et tandis que vous ave8 donné aux accusés la faculté de décliner np tribunal qui soit dans la même ville que le jure d'accusation, vous voudriez, pour les crimes de Jèse-nation, mettre le juré de jugement, qui sera la haute cour nationale, dans le même lieu où se trouverait Je juré d'accusation, qui sera le Corps législatif! Vous devez accorder aux accusés de lèse-nation le même avantage que vous avez accordé aux accusés. Et je dis plus, l'influence du juré d'accusation dans les affaires ordinaires sera très légère sur le juré de jugement, attendu que le juré d'accusation ne sera composé que de 8 personnes, ne sera pris que dans un distrjpt, et que le juré de jugement sera éloigné du lieu où se fiera l'accusation. Âq contraire, dans les crimes de lèse-nation, l'accusé sera préyenu, sera déclaré accusable par un juré de 300 personnes, par un juré qui renfermera l'opinion publique de tout le royaume. Il sera Jiyré ensuite à un juré de jugement qui ne sera P'PS composé que de 24 personnes, qui par conséquent sera infiniment inférieur et eq nombre et en lumières au cgrps accusant, au juré d'accusation. Vpus rendriez donc la situation de l'accusé véritablement effrayante. Je demandé donc la question préalable sur la proposition de U- Rpbespiérre. (Applaudissement?.)
J'appuye la motion de M. d'André.
Plusieurs membres observent que la motion de M. Robespierre n'est pas appuyée.
, évêque d'Autun. Elle est appuyée.
(L'Assemblée rejette par la question préalable l'amendement de M. Robespierre et adopte l'article 6.)
Art. 7.
« Le décret du Corps législatif, pQrtant accusation, n'aura pas besoin d'être sanctionné par le roi. » (Adopté.)
, rapporteur. On pourrait insérer ici un article additionnel ainsi conçu :
Art. 8.
« Le décret du Corps législatif, portant accusation, aura l'effet d'un décret de prise de corps. » (Adopté.)
, rapporteur. L'article 9 est ainsi conçu :
« Avant de porter le décret d'accusation, le Corps législatif pourra appeler et entendre à sa barre les témoins qui lui seront indiqués; il ne sera point tenu d'écritures des dires des té-, moins ».
Puisqu'on a fait des objections sur cet article, je dois dire en très peu de mots les motifs qui nous ont décidé à l'adopter.
1° Nous n'avons donné M faculté ni au Corps législatif de mander le prévenu, ni au prévenu de se présenter : nous avons pensé que pour son intérêt il ne fallait accorder cette faculté ni à l'un ni à l'autre ; car, lorsque le prévenu aurait
f)laidé sa cause à la barre, et que, nonobstant es motifs qu'il aurait allégués pour sa justification, le porps législatif aurait porté un décret d'accusation, alors le préjugé, très fort déjà, résultant d'un décret du Corps législatif, serait immense, de manière que les jurés seraient presque subjugués;
2° Quant à l'autre disposition de l'article, par laquelle nous avons dit que les témoins pourraient être appelés, mais qu'on ne tiendrait pas d'écriture de leurs dires, nous avons pensé que le Corps législatif ne pouvant se porter à émettre un décret d'accusation que sur des motifs très solides, il ne fallait lui refuser aucun des moyens qui pouvaient le conduire à acquérir des preuves; qu'ainsi il pourrait appeler les personnes qui auraient connaissance des délits imputés, mais seulement pour les entendre, parce que ce serait à la haute cour nationale à recevoir par écrit leurs dispositions,
Le privilège qui donne à tout calomniateur le droit de venir à la barre de l'Assemblée nationale y débiter contre un accusé les calomnies les plus absurdes, tout ce qu'il peut y avoir de plus vague, sans donner le moyen à l'accusé innocent de pouvoir ensuite poursuivre le Calomniateur, n'est pas admissible ; l'Assemblée nationale ne peut pas permettre qu'un accusé soit calomnié dans son sein avec un privilège pour le calomniateur. Je conclus donc à ce que tout délateur soit forcé de spécifier les motifs de son accusation, et qu'il ne puisse pas impunément calomnier un accusé.
Parfaitement d'accord avec le comité sur les principes qu'il vient dîexpoàer, je crois, néanmoins, que pour éviter toqçe espèce de difficulté et de doute, il ^st nécessaire de faire une addition à la fin de l'article, pour indiquer le moment où les dépositions des témoins seront rédigées par écrit pt devant qui. Je crois
Su'il faudrait ajouter à la .fin de l'article que les épositions des témoins seront reçues par écrit
devant le tribunal de cassation. Gela lèverait toute la difficulté.
, rapporteur. Je n'ai rien à opposer à cette addition : il est juste, ce me semble, que vous décrétiez ici ce que vous avez décrété pour les jurés.
Je ne crois pas qu'il soit possible de trouver des dénonciateurs qui viennent devant l'Assemblée natiooale, comme l'a prétendu, un des préopinants, articuler des faits susceptibles de motiver une accusation aussi grave sans avoir des preuves certaines.
C'est un malheur que d'être chargé, aux yeux de la nation entière, par une accusation émanée et libellée dans le sein de l'Assemblée nationale. Je pense donc que tout citoyen accusé et tranquille sur son innocence, ne redouterait pdnt révénement du combat, et qu'il doit, s'il l'exige, avoir la liberté, sur le libelle de l'accusation, de demander à l'Assemblée nationale à être entendu.
Je demande donc qu'à la fin de l'article on ajoute que le prévenu pourra être admis à la barre de l'Assemblée ainsi que les coaccusés, pour se justifier, et que les preuves par témoins seront écrites.
l'aîné. Je demande la question préalable sur cet amendement. Si le Corps législatif, qui fera dans cette occasion l'oflice de juré d'accusation, entend l'accusé, il portera un véritable jugement, et ce jugement aura une force irrésistible à laquelle le haut juré n'osera pas s'opposer.
, rapporteur. J'ai adopté l'amendement de M. Troncnet et je le place en ces termes à la fin de l'article : « Mais après que le décret portant accusation aura été reudu, les témoins seront entendus par les quatre grands juges, et leurs dépositions reçues par écrit. »
Quant à l'amendement présenté par M. Fréteau, je m'y oppose. Craint-on que l'accusé ne soit pas défendu? Mais il écrira et il publiera sa défense. Un homme éloquent voudra parler devant le Corps législatif; son accusé n'aura pas le même avantage : le spectacle imposant de l'Assemblée peut intimider un innoçent, lui faire perdre la moitié de ses moyens, et de deux choses l'une, ou bien il comparaîtra pour se préparer une défaite, ou bien il ne comparaîtra pas, et il pourra s'élever coutre lui un préjugé défavorable dont il serait peut-être ensuite difficile de préserver l'opinion publique et le juré de jugement.
Je demande donc la question préalable sur l'amendement de M. Fréteau.
VoUs avez décrété que tout accusé avait le droit d'être entendu devant le juré d'accusation, pourquoi ne feriez-vous pas en ce moment l'application d'un principe que l'humanité même a dicté? Un accusé sera certain de son innocence, et il ne pourra vous dire qu'il est innocent! La décision du Corps législatif sera portée avant qu'il connaisse les dires des témoins, et qu'il ait pu imprimer sa défense.
Je demande qu'il soit nommé dans le sein du Corps législatif quatre membres chargés de prendre connaissance des défenses de l'accusé.
(L'Assemblée adopte l'amendement de M. Tron-chet et rejette les autres amendements.)
L'article 9 est décrété comme suit :
Art. 9.
« Avant de porter le décret d'accusation, le Corps législatif pourra appeler et entendre à sa barre les témoins qui lui seront indiqués; il ne sera point tenu d'écritures des dires des témoins. Mais après que le décret portant accusation aura été rendu, les témoins seront entendus par les quatre grands juges, et leurs dépositions reçues par écrit. »
Art. 10.
« Lorsque le Corps législatif aura décrété qu'il se rend accusateur, il fera une proclamation solennelle pour annoncer la formation d'une haute cour nationale, et fera rédiger l'acte d'accusation de la manière la plus précise et la plus claire, et nommera deux de ses membres pour, sous le titre de grands procurateurs de la nation, faire auprès de la haute cour nationale la poursuite de l'accusation. » (Adopté.)
Art. 11.
« Les quatre grands juges qui présideront à l'instruction seront pris parmi les membres du tribunaPde cassation : leurs noms seront tirés au sort dans la salle où la législature tiendra publiquement ses séances. Le plus ancien d'âge présidera; le roi sera invité d y envoyer deux commissaires. » (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 12, qui est ainsi conçu :
« Le haut juré sera composé de vingt-quatre membres et pourra juger à vingt. »
Il m'est impossible de ne pas m'opposer à un article qui rend arbitraire le nombre des jurés. (Murmures.)
, rapporteur. Il peut y avoir des jurés malades, alors le juré pourra juger à vingt; voilà notre motif.
Il est indispensable soit que vous jugiez à vingt ou à vingt-quatre membres, de convoquer un plus grand nombre de jurés, par la raison que vous admettez probablement pour les crimes de lèse-nation, comme dans les autres, la possibilité d'adjoindre un certain nombre de jurés à ceux qui ont formé le premier juré. Alors il serait aussi facile et plus régulier que le nombre de ceux qui jugeront d'abord soit toujours fixe. Je vous observerai que comme dans le système que nous avons admis, la proportion doit exister entre le nombre qui forme le premier juré et le nombre additionnel de ceux qu'on peut lui adjoindre pour le second examen, il faut que le premier nombre soit fixe.
Je demande donc qu'il soit dit que le juré sera fixément du nombre de vingt, et qu'il en soit convoqué en outre quelques-uns de plus.
, rapporteur. Voici comment on peut décréter l'article, sauf rédaction :
Art. 12
« Le haut juré convoqué sera de trente membres, et le juré effectif sera de 24, dont 6 seront de réserve.
(Cet article est décrété, sauf rédaction.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 13 qui accorde à l'accusé un délai d'un mo.s pour exercer sa récusation.
Vous n'avez accordé pour le juré or.Jinaii e qu'un délai de 24 heures ; comme le haut juré v^era double, je crois que le délai pourra être porté à trois jours; mais pas au delà, sinon vous n'êtes pas justes. Vous venez de décréter que la liste des jurés serait imprimée, un délai d'un mois ne serait donc pas seulement injuste, mais encore inutile.
Je demande la question préalable sur cet amendement. Il faudra un mois pour connaître les jurés. L'impression de la liste ne serait utile qu'aux conspirateurs froids : sans ce délai l'innocent récuserait au hasard.
Je crois que le terme de la récusation doit être borné à huit jours, comme il l'était dans le premier projet du comité, et voici | sur quoi je me fonde. Il y a deux raisons légi- ! tiines de récusation. L'une est uniquement relative à l'accusé ; elle est fondée sur les rapports d'intérêt, d'inimitié, ou sur quelques autres rap-po: ts personnels qui peuvent exister entre l'accusé et le juré. Celle-ci est toujours suffisamment à la connaissance de l'accusé, il n'a pas besoin d'un mois pour s'y déterminer.
Quant à l'autre, elle est prévenue par le choix du peuple. Les jurés étant choisis dans les dé-far lements, l'accusé n'a pas besoin d'avoir le temps de circuler dans ces départements, d'y faire des recherches pour s'informer de la confiance qu'il peut avoir en ces jurés.
Ën adoptant le délai d'un mois, on donnerait souvent à une classe d'accusés puissants un .moyen très efficace d'échapper à la justice. Vous avez peut-être déjà fait beaucoup pour eux, lorsque vous avez voulu que les jurés ne fussent qu'au nombre de 166, et qu'ils fussent en fonctions pendant deux ans. Par là vous avez donné un moyen puissant au pouvoir exécutif de s'acquérir des hommes dans les départements, d'influer d'une manière quelconque sur ceux qui auront été choisis pour jurés, et si vous donnez encore à l'accusé le temps de s'assurer de ceux sur lesquels il pourra compter plus sûrement, vous faites infiniment trop pour lui. Les accusés dont il s'agit ici no.sont pas du rang des accusés ordinaires ; c'est presque toujours la cause de la nation contre celle du pouvoir et de la tyrannie.
Je demande donc la première rédaction du comité, c'est-à-dire huit jours seulement pour la récusation.
, rapporteur. Nous n'avons pas cru devoir suivre pour le haut juré la règle du juré ordinaire et voici le motif :
Les conseils habitant sur les lieux connaissent assez les jurés pour que la récusation s'exerce facilement dans les 24 heures : un plus long délai aurait été un moyen de séduction. Mais il n'en est pas de même quand il s'agit de jurés répandus sur toute la surface du royaume, éloignés les uns des autres par toute la distance qu'il y a entre les chefs-lieux des départements. Certes, alors, à moins d'avoir l'espérance que l'o i sera accusé par le Corps législatif, on ne connaît pres-qu'aucun des hommes qui doivent former le juré; il faut avoir précisément le même avantage que l'accusé ordinaire; il faut qu'ua accusé ait le
temps de chercher, avec ses conseils, non pas si tel ou tel juré mérite sa confiance, mais si tel ou tel juré la mérite plus que tel autre.
Vous avez voulu lui conserver cette faculté et vous la rendriez vaine si vous déterminiez uu délai plus court : dans huit jours quelle instruction voulez-vous qu'on prenne sur des jurés dont l'un est dans le fond de la Basse-Bretagne et l'autre sur les Hautes-Alpes? En vérité, Messieurs, cela est impossible.
Je demande donc que le délai soit d'un mois et que dans tous les cas, si on voulait abréger ce délai, il soit au moins de quinze jours.
(L'Assemblée adopte le délai de quinze jours.)
L'article 13 est, en conséquence, décrété comme suit :
Art. 13.
« Les accusés auront quinze jours pour déclarer leurs récusations. »
Un membre propose un article additionnel qui est ainsi conçu :
Art. 14.
v L'accusé ou les accusés auront la faculté d'exercer, sans donner de motifs, le double de récusations accordées par le décret sur la procédure par jurés. » (Adopté.)
Art. 15.
« Aussitôt que les récusations auront été proposées et le haut juré déterminé, les grands juges feront convoquer les trente membres dont il sera composé, lesquels seront tenus de se rendre, dans quinze jours après la notification du mandement des grands juges, dans la ville qui sera désignée. » (Adopté.)
Art. 16.
« Les grands juges adresseront, pour le faire notifier, leur mandement aux procureurs généraux syndics des départements où auront été nommés les hauts jurés convoqués. » (Adopté.)
Art. 17.
« La forme de composer le juré et de procéder qui sera établie pour les jurés ordinaires, sera suivie pour le haut juré. » (Adopté.)
Art. 18.
« Le commissaire du roi auprès du tribunal du district dans le territoire duquel la haute cour nationale s'assemblera, fera, auprès d'elle, les fonctions de commissaire du roi; elles seront les mêmes, respectivement à l'instruction et au jugement, que celles qu'il exercera au tribunal criminel ordinaire ».
Plusieurs membres demandent l'ajournement de cet article.
Un membre demande la question préalable sur l'ajournement. ,
(L'ajournement est repoussé et l'article 18 adopté.)
Je demande que, par un article additionnel, l'Assemblée veuille bien décréter que les exceptions portées contre les juges et autres fonctionnaires publics pour l'élection au juré, à l'égard du juré ordinaire, s'étendent aussi aux jurés de la haute cour nationale.
le demande également; que les jurés de la haute couri nationale soient obligés, sons une peine proposée par le comité, de se rendre à la réquisition qui leur en svra fiante.
Un membre demande si les procureurs généraux syndics pourront)sêtre accusateurs publics ou en faire les fonctions.,
(Ces propositions, mises aux voix, sont renvoyées au comité de Constitution.)
Par l'article 2, vous avez décrété que chaque département ne nommerait que deux membies du haut juré qui se trouve ainsi composé de 166 personnes, tandis que le juré ordinaire en comprend 200; et cependant vous admettez dans le premier cas une double récusation. Jè trouve qu'il n'y a aucune espèce de proportion. Je demande que vous reveniez sur cet article, et que vous décrétiez qu'il sera nommé dans chaque département quatre citoyens, qui seront: inscrits sur le tableau du haut juré, lequel se trouverait alors composé de 332 membres.
Plusieurs membres demandent l'ordre du jour. ; (L'ordre du jour est adopté.) b
Messieurs, le comité central avait placé, dans l'ordre qu'il vous a présenté, le Code pénal immédiatement après la haute cour nationale; mais Je travail sur les jurés a détourné les coraitésde la suite de leurs opérations sur le Gode pénal. Nous demandons quel:;ues semaines... (Murmures.) Nous promettons que nous n'épargnerons aucun soin, et nous espérons que vous ne nous refuserez pas quelques semaines pour on travail où il s'agit de concilier les intérêts de la justice et de l'humanité.
Je demande que le comité de Constitution, qui, depuis longtemps, nous promet l'organisation des gardes nationales, envoie son travail à l'impression, d'ici à lundi.
Il y a un décret du mois de juillet qui place ce travail à l'ordre du jour.
Plusieurs voix : L'impôt 1 l'impôt !
Je demande que le comité central s'explique sur lè travail prêt en ce moment, car, après la haute cour nationale, je ne vois plus rien de prêt pour vos séances du matin, si ce jn'est un rapport dU comité militaire sur les engagements, les rengagements et lis congés.
Plusieurs membres : C'est pour le soir.
le jeune, au nom du comité central. Le comité de Constitution doit vous présenter un travail pour lequel il vous demande encore un jour. Nous avions présumé que l'ofr ganisation de la haute cour nationale occuperait plusieurs séances. Vous avez ajourné un travail du comité de mendicité dont vius pouvi z vous oecarer... (Murmures.) Vous n'avez donc pour demain...
Plusieurs membres : Le t'bac 1 le tabac!
AprèsTimposiiion, le comité de Constitution aura beaucoup de travail à vous prése ter, vous pourriez donc, demain intervertir l'ordre et vous occuper d'c bjets moins imposants attribués aux séances du soir, par exemple les mines et minières... (Murmures.) Le comité de Constitution annonce pour demain un travail sur, les, municipalités.
, au nom du comité de Constitution. Le comité de Constitution a plusieurs parties de travail entièrement achevées, mais ell'S sont si imporiantes qu'il se propose de les faire imprimer avant que l'Assemblée les livre à la discussion. Vous pouvez cependant mettre à l'ordre du jour un rapport sur les muni ipalités centrales dont vous ordonnerez probablement l'impression après l'avoir entendu.
(L Assemblée décrète que le rapport sur les municipalités centrales sera mis à l'ordre du jour de demain,)
J'ai reçu de M. le ministre de la justice une hôte ainsi conçue :
« Le roi a donné sa sanction le 30 du mois demi r.
« 1° Au décret dé l'Assemblée nationale da 25 du même mois, concernant les paroisses de la ville de Sens ;
« 2° Au décret du même jour, relatif à l'incompatibilité des fi met 'ons de maire, officiers municipaux et procureur de la commune, avec celtes des juges de paix et de leurs greffiers; « Ét à l'aifaire de Chinon. « 3° Au décret du même jour, relatif à la réunion des paroisses delà ville d'Auxerre;
« 4e Au décret , du même jour, concernant la circonscription des paroisses de la ville d'Angers;
« 5» Au décret du 26, relatif à la nomination des juges de paix dans les villes de Toulon et de Saignes;
« A ceUe d'un sixième juge pour le tribunal de Strasbourg; « A l'union des paroisses à d's districts ; « Et à l'établissement de tribunaux de commerce dans les villes d'Auxonne et de Saulieu ;
« 6° Au décret du même jour, concernant le payement de la somme de 4,720 1. 8 s. au dé-i ta»:hement de la garde nationale qui a conduit, des prisons de Lyon à celle de l'abbaye Saint -Gfermain-des-Prés, à Paris; les sieurs Guiîlin, Terrasse et Descart ;
« 7° An décret du même jour, relatif à l'acquisition à faire, par le district de Gorbeil, de la maison du prieuré de Saint-Guenault, pour y former son établissement et celui du tribunal ;
« 8° Au décret du 27, relatif à l'élection des évêques et des curés;
« 9° Enfin au décret du même jour, relatif à une taxe d'augmentation de droits sur les eaux-de-vie dans le département du Pas-de-Calais.
« Le ministre de^ la justice transmet à M. le président les doubler minutes de ces décrets, sur chacune desquelles est la sanction du roi. er">>
Signé: M.-L.-F. Duport.
Paris, le 5 février 1791 -,
Plusieurs membres du comité d'aliénation des domaines nationaux proposent différentes ventes que l'Assemblée nationale décrète en ces termes : « L'Assamblée, nationale, sur le rapport quilui a été fait,, par son comité, de l'aliénation des
domaines nationaux, des soumissions faites suivant les formes prescrites, déclare vendre les b ens nationaux dont l'état est annexé aux procès» verbaux respectiGs des évaluations ou estimations desdit3 biens, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, payables de la manière déterminée parle même décret;
Savoir :
A la municipalité de Laon, département de
l'Aisne, pour lasommede.
A celle de Neuilly-Saint-Front, même département, pour celle
de.... —..............
A celle de Saint-Ar-noult, département de la Seine - Inférieure, pour
celle de...............
A celle de Tenne.marre, département d'Eure-et-Loir, pour celle de.....
A celle de Saint-Lo-mer-de-Luisant, même département, pour celle
de....................
A celle de Bourbôurg, département du Nord,
pour celle de...........
A celle leFontenay-le-Comte, département de l|i Vendée, pour, celle de.
A la municipalité de Valff, 'département du Bas-Rhin, pour.........
4,858,148 1. 18 s, » d.
154,337 19
5,482 8
5,085
50,743 14 3
514,319 15
2,708,119 6. 3
11,742 8
Le tout, ainsi qu'il est plus au long détaillé dans les décrets de vente et états d'estimations respectifs, annexés à la minute du procès-verbal; de ce jour. »
M. le maire de Paris m'annonce par lettre, la vente faite le 7 février, d'une maison nationale, louée 2,100 livres, estimée 26,684 livres et adjugée 42,500 livres.
D'autre part, la municipalité de Paris demande à être admise ce soir à la barre de l'Assemblée.
(L'Assemblée accueille cette demande.)
annonce l'ordre du jour de la séance de ce soir et lève la séance à trois heures.
présidence pe m. riquetti de mirabeau l'aîné.
Séance du mercredi
La séance est ouverte à six heures et demie lu soir.
Un de MM. les secrétaires annonce une adresse de l'assemblée générale dés maîtres perruquiers de Paris, qui demandent que tes comités de Constitution et des finances s'occupent d'une première pétition qui leur a été renvoyée.
(Cette adresse est renvoyée aux Comités de
Constitution et des finances pour en être rendu compte à l'Assemblée.)
(1). J'ai l'honneur d'annoncer à l'Assemblée que la plus grande partie des fonctionnaires publics ecclésiastiques dans les villes de Carhaix, Guingamp et Pont-Croix de la ci-1 devant province de Bretagne, ont prêté le serment prescrit par la loi; dan3 la ville ae Carhaix, cette prestation a été accompagnée de circonstances remarquables dont voici le détail, extrait d'una lettre des membres du bureau municipal de Carhaix, du 1er février dernier :
« Aussitôt que le décret du 27 novembre fut promulgué à Carhaix, M. Blanchard, curé de cette ville, ses deux vicaires, et plusieurs autres ecclésiastiques, s'empressèrent de faire ,au secrétariat de la municipalité leur déclaration de vouloir-prêter le serment. Un peuple immense s'était réuni dans l'église de Saiut-Tremeur, le dimanche 30 janvier. A l'issue de la messe paroissiale, et après qu'on eut chanté le Veni Creator, M. Blanchard parla ainsi :
« Non, Messieurs, non, elle ne sera point reh-« versée, l'Eglise de JéSus-Christ; elle est fondée « sur le roc, contre lequel viendront se briser « tous les efforts de l'erreur.
« Quels sont donc ces murmures criminels? « Quelles sont donc ce4 craintes prétextées et « coupables qui s'élèvent jusqu'au sanctuaire? « Quoi I des ministres des autels osent tracer « dans un avenir imaginaire la ruine de cette « même Eglise teinte du sang de ses enfants? « L'Evangile ne nous faiHl pas un- devoir iridis-« pensable de l'obéissance ? Comme citoyens, ne « l'avons-nous pas déjà prêté ce serment d'obéis-« sance ? Voudrions-nous encourir les peines du « parjure? Non, Dieu de miséricorde et de paix, « vous n'abandonnerez pas vos enfants ; votre « main paternelle Jes retirera de leur égarement ; « vous anéantirez l'idole des passions humaines ; « il couvrira ces enfants rebelles d'une confusion « salutaire, et ils viendront aux pieds de vos « autels rendre hommage à la vérité; ils adore-« ront la profondeur dé votre sagesse qui nous « conduit quand il lui plaît, et par les voies « qu'il lui plaît, à la perfection du christianisme, « et i's s'émeront avec nous qui sommes leurs « frères : O altitudo sapientiœ Dei ! (Applaudisse-« ments.)
« Pour moi, dès l'instant, soutenu par le témoi-« gnage d'une conscience sans reproche, en pré-« séuce du Dieu qui lit dans les cœurs, et de son « peuple, à qui nous devons l'exemple de la « soumission, je jure, etc. ».
« Aussitôt les voûtes du temple ont retenti d'applaudissements universels ; les autres ecclésiastiques ortt ensuite prêté le serment-, et plusieurs ont prononcé des discours où respiraient également la piété et le patriotisme. Un des vicaires de Saiut-Tremeur, détenu chez lui par maladie depuis plusieurs jours, a ranimé se3 forces pour venir signaler, avec ses confrères, son attachement à la Constitution. Le curé de Plouvenaz et son vicaire, dans le canton de Carhaix, ont également prê é le serment le même jour ». (Vifs applaudissements..):
(L'Assemblée ordonne l'impression et l'insertion de et te pièce dans son procès-verbal.)
Un membre dépose sur le bureau l'avis que tous les: ecclésiastiques
-'fouette nia aires publics de. la
J'ai l'honneur d'observer à l'Assemblée qu'ily aà laportede la barre une députation de l'hôpital des Quinze-Vingts et aveugles du royaume ; ils demandent à être introduits. (Rires).
Je ne pense pas que ces rires aient pour objet une des plus cruelles infirmités qui affligent l'espèce humaine.
Je demande, et je crois que cela n'a pas besoin d'être motivé, que la grande et très importante affaire des Quinze-Vingts, qui, depuis dix ans, intéresse et scandalise le royaume, soit en hn soumise à la délibération de l'Assemblée nationale.
Cette affaire a déjà été soumise au comité des rapports et j'en ai été nommé moi-mêmelerapporteur. Je ne croyaispas être inculpé dans cette affaire; j'ai eu le"courage de faire le rapport au comité : Je l'ai fait avec la plus grande exactitude et j'ose croire qu'il serait bien difficile.... (j'interpelle ici M. de Lameth de vouloir bien être juste à mon égard)... je crois, dis-je, qu'il serait difficile de pouvoir m'inculper en rien d'après le détail que j'ai donné de cette affaire au comité.
Je suis loin de vouloir inculper ni monsieur, ni le comité des rapports, dont je chéris le patriotisme ; mais il ne s'agit pas ici de rapport, mais bien d'une pétition que vient vous faire une classe intéressante de c tovens, puisqu'ils sont malheureux. Ce qui s'est passé au comité des rapports ne doit pas nuire au droit sacré de pétition, droit plus sacré encore quand des infortunés le réclament.
(L'Assemblée décidé que la députation des Quinze-Vingts sera introduite.)
Une députation de la municipalité de Paris est introduite à la barre.
, orateur de la députation. Messieurs, la municipalité de Paris vient vous exposer la situation de cette ville, ses réclamations et ses droits. Sous l'ancien régime la capitale était le centre de toutes les opérations financières du roya me. C'était le point où tous les canaux des richesses venaient aboutir. Le despotisme, qui n'avait favorisé cet ordre de choses que pour rapprocher sous sa main toutes les facultés de l'Etat, faisait supporter à cette ville des impôts qui égalaient pr sque ceux de toutes les autres villes réunies. Elle était la ressource d'un gouvernement dissipateur; mais, pour en tirer parti, il avait fallu lui en faire partager les abus, et ces abus contribuaient àatimenter des impôts de beaucoup au-dessus de ses forces réelles.
La Révolution, fruit de vôtre sagesse et de votre courage, la Révolution a tout changé. Les abus ont été détruits, les privilèges anéantis, et les principes rétablis. Vous avez nivelé tous les hommes et tous les droits. La ville de Paris a applaudi à vos illustres travaux; elle a oublié ses pertes pour ne s'occuper que de la liberté et du bonheur général. Privée de tous ses privilèges par le plus généreux dévouement, réduite comme toute autre ville à ses propres moyens, il ne lui reste sur
les autres que le triste avanlage de réunir dans son sein une multitude d'honnêtes artisans sans ouvrage, et d'attirer, par une suite de l'ancienne opinion, une foule d'aventuriers et de nécessiteux qui viennent y chercher d 'S ressources qui n'existent plus. Cependant, au milieu de tant de pertes et de sacrifices, la capitale seule n'a encore recueilli aucun fruit de l'ordre que vous avez établi, elle a continué de supporter les charges. Depuis la Révolution les droits sur les consommations ont excédé de beaucoup ceux perçus dans les autres villes du royaume. Des citoyens, égaux en droit, ont payé les charges publiques d'une manière inégale et contraire aux décrets ; mais leurs facultés sont épuisées. Le moment est venu de rompre le silence, et ils ne s'airessent à vous pour demander, non des faveurs, mais justice, que lorsqu'ils y sont forcés par l'impérieuse nécessité. Dans cette situation, la ville de Paris vous supplie de décréter que les droits su^ les consommations soient exactement les mêmes que ceux des autres villes du royaume. Elle le demande, parce que le contraire serait une violation des principes éternels de la justice, des principes que votre sagesse a décrétés.
On parle d'une masse à imposer sur les 83 déparlements. Votre comité d'imposition se dispose a vous soumettre son travail ; mais votre justice vous rappellera que Paris ne peut être assimilé à ce qu'il fut, et que les anciennes bases de répartition ne peuvent [dus être employées. Paris a perdu ce que les autres départements ont gagné, et comme ses moyens n'étaient que des ressources factices, les proportions anciennes ne lui sont point applicables. Il faut connaître les détails de ce qui lui reste pour être juste envers cette ville. Vous accueillerez sans doute la demande que fait la municipalité, d'être entendue sur la portion contributive qu'elle devra verser dans le Trésor public co hme sur la somme qui devra lui être assignée sur les consommations pour les dépenses annuelles.
Enfin l'embarras des finances de la commune, force la municipalité à vous demander un acompte sur ses justes réclamations, pour subvenir aux frais du service public. La ville de Paris a plus de 15 millions de créances sur le Trésor national, suivant l'état remis au commissaire général de la liquidation. La commune a épuisé toutes ses ressources. La nécessité que vous avez imposée à la commune de pourvoir aux subsistances l'effraye, puisqu'elle doit désormais y suftire par ses propres ressources ; elle y destine une partie de la somme qu'elle demande. Ses nombreux créanciers se plaignent, et ce qui reste à acquitter pour les dépenses de la Révolution s'élève à près de 4 millions. Les travaux mêmes du Champ-de-Mars, pour la fédération, laissent encore 1,200,000 livres à payer. Des entrepreneurs et des ouvriers, déjà malheureux par la suspension des travaux, le deviennent davantage par les retards qu'ils éprouvent. Enfin, nous devons vous le dire, pour vous faire sentir toute l'urgence de nos besoins, 100,000 écus que les malheurs des temps, le dessèchement de toutes les sources de bienfaisance et les sollicitations répétées des sections, nous demandent, pour venir au secours des pauvres hors d état de travailler, n'ont encore pu être répartis aux sections, malgré le désir de la municipalité, parce que cette somme ne se trouve point disponible dans le trésor municipal. Nous supplions eu conséquence l'Assemblée nationale de décréter que 6 millions seront payés à la municipalité de
Paris par le Trésor public, à imputer sur les 15 millions qui sont dus à la commune.
Vous avez entendu, Messieurs, nos justes réclamations et l'urgence de nos besoins; nous nous sommes adressés avec confiance aux pères de la patrie, bien sûrs d'obtenir protection et justice pour un peuple qui a tout sacrifié à la Révolution et à la liberté.
M. le Président. Messieurs, il est des pertes immenses que la ville de Paris a regardées comme des bienfaits; elle avait un privilège, celui de
Îjarticiper à des professions qui l'enrichissaient en a corrompant, et elle tient à honneur de n'avoir désormais d'autres richesses que celle de son industrie. L'égalité qu'elle réclame dans ses impôts n'est donc qu'une preuve de plus de son patriotisme ; elle ne veut pas payer davantage, parce qu'elle a renoncé à tous les abus qui lui en avaient fourni les moyens.
Ne soyez pas effrayés du poids de vos dettes, c'est une avance faite à la liberté, vous avez semé sur une terre féconde, elle vous resti uera tous les trésors que vous lui avez confiés; une seule source de prospérité manque encore à cette capitale, c'est l'union de ses citoyens, c'est la tranquillité publique que de fausses alarmes y troublent sans cesse, et qu'une foule d'intrigants et d'ambitieux voudraient compromettre, pour en être ensuite les modérateurs ; ce sont surtout les bonnes mœurs, sans lesquelles les meilleures lois ne seraient qu'un frein impuissant. Il est un despotisme du vice ; celui-là serait-il le seul que la ville de Paris ne saurait pas renverser? Des jeux scandaleusement multipliés infectent partout cette capitale. (Applaudissements réitérés.) On a dénoncé d'autres assemblées; celles-là ne présentent-elles donc aucun péril, même pour la liberté, lorsqu'on sait que la corruption des mœurs fut toujours le premier instrument de la tyrannie?
L'Assemblée nationale examinera votre pétition avec le plus grand soin. Elle vous invite à assister à sa séance.
Je suis parfaitement d'avis que la ville de Paris doit être distinguée de toutes les autres villes du royaume. (Murmures.)
Plusieurs membres : L'ordre du jour!
La ville de Paris ne demande pas de distinction; elle la tiendrait pour une humiliation. Je demande l'ordre du jour.
(L'Assemblée renvoie la pétition de la municipalité de Paris aux comités des finances et des impositions et [asse à l'ordre du jour.)
La députation des Quinze-Vingts est introduite à la barre.
, orateur de la députation. Messieurs, les malheureux de l'hôpital des Quinze-Vingts se présentent devant vous, pour que vous daigniez accorder quelque attention aux réclamations qu'ils vous ont déjà adressées. C'est dans la situation la plus critique, c'est au milieu du péril le plus imminent qu'ils réclament votre appui. Ils n'ont pas besoin de vous rappeler les excès d'iniquité dont ils sont victimes depuis dix ans. La France retentit d'une voix générale contre leurs oppresseurs. La voix des magistrats s'est fait entendre, et le parlement de Paris lui-même a fait des remontrances contre l'abus de notre administration.
! La vente de l'enclos des Quinze-Vingts, les intrigues qui y ont donné lieu, l'association du cardinal de Rohan. à cette acquisition, faite à moitié prix, tus ces faits sont connus. Depuis, l'oppression, la force ont été employées pour empêcher les réclamations. Les chefs de notre administration ont été destitués de la manière la plus illégale, et par des arrêts du propre mouvement, pour être remplacés par les protégés du cardinal de Rohan. Dès lors tous les règlements de la maison furent enfreints; une administration despotique en dissipa les deniers ; les payements furent suspendus. Le luxe, la dissipation, les mauvaises mœurs souillèrent l'asile de la pauvreté et de la charité. La justice fut refusée par des évocations arbitraires ; les remontrances du parlement furent infructueuses. Dans cette situation, nous avons recours à l'Assemblée. Nous demandons qu'elle veuille bien casser tous les arrêts du propre mouvement, par lesquels une partie de nos administrateurs ont été destitués, par lesquels nos instances ont été annulées, ou évoquées à de nouveaux tribunaux.
Nous demandons qu'elle veuille bien ordonner que les anciens statuts de l'hôpital soient exécutés; que les officiers destitués soient rétablis dans leurs places, et reprennent leurs fonctions; et qu'en cas de refus ou de mort de l'un d'eux, ils soient remplacés par des administrateurs élus par le3 frères assemblés en chapitre, conformément aux statuts; qu'enfin, toute évocation et toute commission, nommées pour juger nos réclamations, soient annulées... Vous avez déjà renvoyé notre requête à votre comité des rapports; mais il ne s'est pas cru compétent pour celte affaire. C'est ce qui a engagé les frères de l'hôpital à se présenter à l'Assemblée ; ils vous prient de nommer un rapporteur, et d'ajourner notre pétition à jour iixe. Notre situation est aggravée; on nous a éloigné de nos propres affaires, il n'y a plus eu de chapitre depuis six mois. Les affidés du cardinal de Rohan travaillent à tout obscurcir, à retarder le jugement qui doit prononcer entre eux et les frères de l'hôpital. Ne leur en laissez pas le temps : les aveugles craignent de vous enlever des moments précieux; mais le sort des pauvres est une partie essentielle de la chose publique. Ce ne sont pas des sulbaU rnes orgueilleux, mais des opprimés qui implorent votre justice; qu'ils jouissent de vos bienfaits, et que leurs bénédictions soient votre récompense.
Ceux qui représentent une nation, représentent surtout les malheureux qu'elle a dans son sein, et vous avez ici toutes les âmes sensibles pour organe. Cette cruelle infortune qui prive un individu de toutes les consolations de la vie, et qui cependant n'est point la mort, devrait trouver partout des asiles, il est des maux que des secours peuvent alléger ; mais ceux de la cécité exigent un rigoureux partage entre le malheur et la bienfaisance ; la perte de la lumière est déjà le lot le plus amer de la vie humaine; un aveugle sans guide devrait être un spectacle inconnu parmi des nations policées. (Applaudissements.)
Mais Vous ne vous êtes pas bornés à représenter la nécessité de l'hôpital des Quinze-Vingts, vous êtes accusateurs. A cet égard, l'Assemblée nationale ne vous doit que de l'attention et de la justice.
Vous pouvez assister à sa séance. Entendez la loi; et si le spectacle de sa création vous est mi»
dites du moins aux infortunés qui vous Ont députés que leurs plaintes ont pénétré jusqu'à nous. (.Applaudissements.)
(L'Assemblée renvoie la pétition des Quinze-Vingts au comité des rapports).
Je demande 'qKe le -comité soit tenu de faire son rapport sur cette pétition à la première séance du soir du mois de mars.
(Cette motion est décrétée.)
Les électeurs du département de la Seine-Inférieure ont envoyé une adresse à l'Assemblée nationale, qui est ici depuis trois jours ; je vous prie, Monsieur le Président, de demander à l'Assemblée si elle veut que j'en fasse lecture.
Vous la ferez, Monsieur, lorsque nous aurons entendu la troisième députation-.
Une députation de la Société des inventions et découvertes est introduite à la barre.
, orateur de la députation. Messieurs, les artistes français, plus s nsibles à leur bonheur présent qu'à leurs peines passées ne vous les retraceront pas. En effet, que pourraient-ils vous apprendre que vous ne sachiez parfaitement? Ils sortent d'une longue léthargie, et de pareils maux sont mieux connus du médecin, qui les a guéris, que du malade qui les a soufferts.
Réunis enfin par une joie commune, par l'enthousiasme de nos recherches et de nos travaux poir les biens et les besoins mutuels qui enchaînent tous les arts entre eux, et surtout par cette fraternité civique, avant-goût délicieux des fruits de la liberté, il nous a semblé qu'elle nous suggérait un moyen de réaliser quelques-unes de vos grandes pensées et d'accorder nos efforts pour les progrès de l'industrie.
Notre plan, a-t-il dit, et nos motifs ont été communiqués à la municipalité de Paris, et son accueil favorable nous enhardit à vous les offrir. Notre association volontaire admettra tous les citoyens déjà connus ou qui se feront connaître par quelque découverte, invention, ou perfection nouvelle en tous genres d'industrie ; et le premier rassemblement, empressé à se lier par une correspondance active avec tous les articles de toutes les parties de l'Empire, ne les trouvera
Eoint sourds à l'appel du patriotisme et de la fierté; mais comme l'empire des talents ne connaît pas de frontières, cette société naissante espère étendre un jour ses rapports au delà de nos limites géographiques pour fraterniser avec tous les étrangers distingués dans les mêmes genres, pour rappeler parmi nous des citoyens précieux, qui, dans des temps moins favorables au mérite, ont été chercher une patrie hors de leur terre natale pour acquérir tous les jours de nouveaux émules, et pour ne faire, s'il se peut, de tous les talents et de tous les arts, qu'une même famille, dont la France sera la principale patrie.
Là seront appelés tous ceux qui aspirent à rendre de nouveaux services au genre humain, et c'est au milieu d'eux que le génie de l'invention va recevoir enfin un culte digne de lui. L'entreprise est grande, mais votre énergie et vos triomphes élèveront notre courage ; de la région
sublime où vous planez, vous nous guiderez dans la carrière nouvelle où nous nous élançons, comme les astres dirigent de hardis navigateurs sur des mers inconnues.
Les découvertes de l'industrie et des arts étaient une propriété avant que l'Assemblée nationale l'eût déclaré ; mais le despotisme avait tout enchaîné, jusqu'à la pensée. Il est des inventions que, sans doute, l'amour de l'humanité publiera, sans en faire une source d'intérêt particulier ; mais ce sacrifice sera du moins volontaire, et la reconnaissance publique deviendra pour leurs auteurs une véritable propriété. Une société, consacrée à favoriser les découvertes, acquitte une dette de la société entière ; l'art de créer le génie n'est peut-être que l'art de le seconder ; et la Société des inventions est déjà une invention d'autant plus utile qu'elle deviendra la source de beaucoup d'autres. L'Assemblée nationale applaudit à vos vues, et vous invite à assister à sa séance. (Applaudissements.)
(L'Assemblée ordonne qu'il sera fait, dans le procès-verbal, mention honorable de cette députation.)
fait lecture d'une adresse des électeurs du département de la Seine-In férieure.
Cette adresse est ainsi conçue (1) :
« Messieurs, depuis plusieurs siècles, le peuple avait perdu la faculté de choisir ses pasteurs. La France présentait de toutes parts des prêtres oisifs et opulents, inutile fardeau de la religion.
« La cupidité, qui ne se rassasie jamais, accumulait les bénéfices sur leurs têtes, tandis que les ministres nécessaires et laborieux étaient la plupart dans l'indigence et la pauvreté, et que, chargés du poids du jour, ils manquaient sou^ vent du nécessaire. L'intrigue et la naissance portaient seules aux premières places de l'Eglise: on comptait les protestions et les aïeux d'un évêque; on ne comptait jamais ses travaux et ses vertus. (Applaudissements réitérés.)
« Les fidèles gémissaient depuis longtemps sur ces abus intolérables qui avilissaient le premier de tous les ministères. Vous êtes venus, Messieurs, par de salutaires réformes dans l'état civil du clergé, remédier à ces maux : vous avez ôté la pierre de scandale, rétabli le peuple dans ses droits, et le sacerdoce dans sa dignité.
« Grâce à vos sages décrets, des prêtres sans fonctions n'étaleront plus un luxe indécent, et ceux qui travaillent vont jouir d'une aisance honnête. (Murmures à droite ; applaudissements à gauche.)
« Nos pasteurs ne seront plus le choix arbitraire du caprice d'un seul ; ils seront les élus de leurs ouailles : estimés et chéris par elles, ils en deviendront les directeurs de confiance et les plus tendres amis.
« Ces curés si précieux, dont la piété nous édifie, dont l'instruction nous éclaire, dont la sagesse nous guide, dont la charité nous console, ne seront plus exclus de l'épiscopat ; il sera la récompense de leur mérite et de leur vertu.
« En vain les ennemis de la religion, comme de la chose publique, taxant
vos décrets d'impiété et de sacrilège, veulent-ils prétendre que vous
avez excédé les pouvoirs de la souveraineté civile: vous n'avez fait,
Messieurs, comme repré-
« Les prêtres ont sans doute une puissance divine (Applaudissements.), comme l'auteur dont elle émane-, mais leur tribunal est tout spirituel; leur pouvoir s'exerce uniquement sur les consciences ; nous devons nous y soumettre comme chrétiens et catholiques ; et, de leur cô'é, ils doivent se soumettre aux lois de l'Eat, comme Français et citoyens. (Applaudissements.)
« Vous avez, Messieurs, exactement et religieusement distingué ces deux objets. Vous avez respecté le pouvoir spirituel que, comme prêtres, ils ne tiennent que de Dieu, pouvoir parfaitement indépendant de toute puissance politique, et qui n'est pas de ce monde ; et vous les avez ramenés à la soumission qu'ils doivent, comme citoyens, aux conditions du grand pacte social dont vous avez posé les bases sur les principes éternels et inaltérables de la nature.
« Ceux-!à seuls donc seraient impies et sacrilèges, qui,voulant abuser de la confiance qu'inspire un ministère saint et révéré, se masqueraient du faux prétexte de la religion pour envahir tous les pouvoirs, maintenir le scandale, et se soustrair à l'obéissance aux lois. Ce serait professer des maximes antiévangéiiques, profaner la sainteté de nos dogmes, et tromper la foi des peuples.
« Nous sommes, Messieurs, autant que personne, attachés à la religion de nos pères; nous sacrifierions tous nos biens et nous verserions tout notre sang pour lui rendre témoignage; et c'est cet attachement pur et sincère à son culte saint, à ses dogmes divins, à sa croyance religieuse, à sa morale sublime, à ses vérités éternelles, à ses espérances consolantes, qui nous inspire les sentiments de la plus vive reconnaissance pour tout ce que vous avez fait pour elle. D 'S ministres la souillaient, et vous l'avez purifiée ; ils la détruisaient par leur conduite, et vous l'avez relevée; le temps en avait altéré la discipline, et vous l'avez rétablie : la France vous doit sa régénération et sa liberté; la religion vous devra la restauration de sa pureté primitive, et la renaissance de ses vertus et de ses beaux jours.
« Nous venons, Messieurs, d'exercer notre premier acte de nomination pour le siège épis-copal et métropolitain des cotes de la Manche. Les intrigues des malveillants ont en vain tâché, par des écrits incendiaires ou des circulaires insidieuses, de' nous détourner de l'obéissance aux lois (Applaudissements.) : fidèles au serment que nous avons prété, et que nous renouvelons encore, d'en maintenir l'exécution, nous avons procédé avec joie, avec zèle et d'un parfait accord; nous avons invoqué le Saint-Esprit, et nous avons cherche la vertu. (Vifs applaudissements.)
« Poursuivez, Messieurs, vos heureux et glorieux travaux; ne les quittez pas que vous n'ayez entièrement achevé notre Constitution; c'est notre vœu : comptez sur nos bras, nos fortunes et notre existence entière pour la maintenir : nous sommes chrétiens, catholiques,
Français, citoyens et libres; nous ne cesserons jamais de l'être. (Vifs applaudissements.)
« Nous sommes avec respect, Messieurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs,
« Les électeurs du, département de la Seine«
Inférieure.
« Signé : Massé, président de l'assemblée; Durand,curé de Vatteville, secrétaire; Lemoyne, second scrutateur; Bu >t de l'Epine, troisième scrutateur; Cher. Poullet fils, commissaire; F.-N. Auquetin, commissaire. »
Je demande que cette adresse soit imprimée, insérée d;ins le procès-verbal et envoyée aux dépnrteme >ts, où elle fera grand bien, par les principes de religion et de patriotisme qu'elle contient.
Je demande qu'on l'envoie à M. Marat pour remplir la feuille de l'Ami du peuple.
(L'Assemblée ordonne l'impression, l'insertion au procès-verbal et l'envoi officiel de l'adresse aux 83 départements.)
Je suis chargé de vous présenter une pétition à laquelle les députés extraordinaires du ommerc-'. de France ont donné leur adhésion; elle émane du commerce et des représentants du commerce de Paris et a trait à un article du droit d'enregistrement. Je vous prierai de vouloir bien la renvoyer au comité d'imposition.
Celte adresse est ainsi conçue :
« Messieurs, l'abus qu> les percepteurs de3 droits d'enregistrement veulent faire de l'article 2 du dé ret du 5 décembre dernier, concernant les billets à ordre, a répandu l'alarme dans tout le co nmerce, et excite ses réclamations.
« Ils prétendent que les porteurs des billets à ordre doivent s'assujettir à les faire enregistrer, qu'ils doivent payer le droit progressif d'enregistrement, avant de pouvoir les faire protester en la forme ordinaire par le ministère des huissiers ou autres officiers publics.
« Cette prétention est opposée non seulement à la lettre et à l'esprit du décret, mais encore à la nature des protêts, à la marche des négociations et aux ménagements dus à la portion la plus précieuse des commerçants.
« L'article 2 du décret dit bien : « que les actes sous signature privée, même les billets à ordre, en conséquence desquels il sera formé quelques demandes principales, incidentes ou en conventio seront enregistrés au bureau du domicile du demandeur, ou à celui établi près la juridiction où il formera sa demande, avant d'être signifiés ou produits en justice; toute poursuite et signification, faite ai préjudice de cette disposition, sera nulle; les juges n'y auront aucun égard, et ne pourront re idre aucui justement avant que ces actes aient été enregistrés.
« Mais il n'y a dans ces expressions d^ la loi, rien qui comprenne la cas
de simple protêt ;des billets .i orde. L'article n'assujettit
litJ;éhlWnent au droit que les billets, en conséquence desquels il sera
formé des demandes; que les bjlleti qui seront signifiés en justice, ou
qui y seront produits.
* Gomment s'aveugler sur ce point, lorsque ^'article 2 indique, pour cet enregistrement, le bureau établi près la juridiction où le demandeur formera sa demande ; lorsqu'il ordonne cet enregistrement comme un préalable à toute signification ou production des billets à ordre en justice; lorsqu enfin il prévoit l'émission d'un jugement, et interdit aux juges de le rendre sans que ces billets aient été enregistrés ? Il est bien clair que, jusqu'à ce que les billets à ordre soient portés en justice, le droit progressif sur les sommes qui en sont le montant ne peut être engendré.
» Or, un protêt n'est point un acte qui engage la discussion judiciaire sur les billets à ordre : un protêt n'est point une demande ; c'est tout simplement un acte extrajudiciaire, un ixte conservatoire, qui constitue le débiteur en demeure de pay ment, qui constate le refus qu'il ett a fait. Le porteur de l'effet protesté retire seulement du protêt la faculté de pouvoir agir ultérieurement, soit contre le souscripteur à fin de condamnation, soit contre les endosseurs à fin de remboursement.
« Il y a entre les protêts et les demandes des différences bien marquées.
« Le protêt n'est point un exploit ; il n'est pas essentiellement du ministère d'un huissier. Dans plusieurs grandes villes, telles que Lyon, Bordeaux, Marseille et autres, les protêts se font par des notaires.
« Les demandes, au contraire, ne sont jamais formées et ne peuvent l'être que par des officiers ministériels.
« Le protêt n'est point une demande, quoique l'officier qui en est chargé fasse au souscripteur la réquisition ou sommation de lui payer le montant du billet.
« On entend, par demande, dans le langage des tribui.aux, l'acte qui cite le débiteur devant un juge, l'exploit d'assignation qui l'interpelle de se présenter au juge, et de répondre aux chefs de conclusions prises contre lui.
« Le protêt n'est point une signification judiciaire ou faite en justice; il n'est pas lié nécessairement à l'insiruction juridique ; il peut n'y jamais donner lieu; ce n'est pas par lui que commence la contestation; il est en un mot extra-judiciaire.
er"> Au lieu qu'une demande est la clef, l'introduction d'un débat juridique, elle annonce toujours une discussion ultérieure entre le demandeur et le défendeur; elle est ordinairement sui-
vie d'autres actes de procédure qui n'en sont que la conséquence.
« Il ne faut pas isoler dans le décret ces mots : signifié ou signification, de ces autres: en justice, puisqu'ils sont corrélatifs et correspondants.
« C'est donc une subtilité manifeste que de vouloir assimiler les protêts aux demandes dont parle l'article 2. Ils ne se ressemblent en rien; ils ne sont pas dans la même forme ni du même contexte ; ils n'ont pas le même but.
« Le protêt précède quelquefois l'action ; la demande est toujours l'aciion elle-même.
« On ne pourrait, d'ailleurs, sans injustice et sans beaucoup d'inconvénients, appliquer aux protêis ce qui n'est réglé que pour les demandes.
En astreignant le porteur d'un billet à ordre à le faire enregistrer avant le protêt, il arrivera de deux choses l'une : ou qu'il sera exposé à supporter le droit d'enregistrement personnellement et sans répétition, ou qu'il ne pourra user du seul moment utile pour faire protester son billet.
Car, d'un côté, si le porteur, le jour de l'échéance, commeneepar faire enregistrer, le débiteur, qui est libre de se présenter pour payer pe idant tout ce jour, et tant que les caisses ne sont point fermées, prétendra n'être point tenu rie lui rembourser le droit d'enregistrement, sous prétexte que le terme fatal de son obligation u'est pas expiré.
« D'un autre côté, si le porteur, craignant cette difficulté,attend jusqu'au dernier-instant pour faire enregistrer, puis protester, alors, les bureaux de l'enregistrement étant f rmés et l'heure de la nuit avancée, il ne sera plus à temps pour remplir ni l'une ni l'autre formalité. i
er"> Dans les deux cas, le porteur serait donc victime de l'extension faussement donnée à la loi. Dans le premier cas, il supporterait, en cure perte et sans pouvoir le répéter, le droit d'enregistre^ ment qu'il aurait avancé. Dans le second cas, il lui serait impossible de se munir d'un acte rigoureusement prescrit par l'ordonnance, d'un acte qui lui est indispensable, pour conserver son recours contre les endosseurs.
« Indépendamment de ces entraves, il résulterait du plan d'exécution combiné par les percepteurs, une surcharge funeste qui pèserait précisément sur la classe des commerçants qui mérite le plus d'être soulagée, même encou ragée.
« Dans le commerce en grand, les négociants opèrent par lettres de change ; les billets à ordre ne se font guère que par les marchands détailleurs aux fabricants, cultivateurs et manufacturiers qui les reçoivent comme argent comptant et s'en aident dans leurs besoins. Ces billets à ordre sont communément à dix, douze, quinze mois d'échéance. Ce terme diminue le prix de la chose vendue de 6 à 7 0/0. Si le fabricant les escompte ou les donne en payement, il lui en coûte au moins pareils 6 à 7 0/0 : ajoutez à cela le droit d'enregistrement progressif, il se irouvera que le fabricant sera privé du très modique bénéfice qu'il faisait sur sa marchandise, et hors d'état de se soutenir.
« Ce sont ces considérations qui, depuis la création du contrôle, avaient fait affranchir de cet impôt les billets à ordre, comme les lettres de change ; on avait même accordé plus de faveur aux billets à ordre qu'aux lettres de change, eu exemptant ces billets des frais de change, rechange et retour qui ont litu pour les traiter. :
« Il se fait pour des sommes immenses de billets à ordre, payables dans Paris, centre de
toutes le s relations du royaume. Ceux de ces billets qui ne sont pas payés à leur échéance, Font renvoyés d'endosseur en endosseur, et retournent au propriétaire primitif. Celui-ci, qui a intérêt de ménager un débiteur avec lequel il fait depuis longtemps des affaires, se prête au renouvellement des billets. Le plus souvent il n'assigne pas. Toutes les classes du commerce, s'entr'aidant ainsi, se soulagent et se prêtent des secours mutuels. La perception des droits d'enregistrement lors des protêts, diminuerait ces facilités en les rendant plus coûteuses.
« Enfin, il y aurait double emploi dans la perception imaginée par les préposés. Le protêt, comme acte d'huissier, est tacitement compris par le décret au nombre des actes s >jets à i'enregistrem nt. Le vœu du commerce est même que l'Assemblée nationale fasse une mention expresse des protêts par addition à la troisième section de la troisième classe du tarif. Le commerçant payera donc pour le protêt; il payerait encore, dans le système des percepteurs, à l'occasion du même acte, le droit progressif sur le montant du billet à ordre protesté. N'est-ce pas assez que ce droit progressif ne soit acquis que par l'assignation ?
« Plus on s'arrêie sur ces diverses considérations, plus on demeure convaincu que la prétention des préposés, à l'égard de l'enregistrement des billets à ordre avant le protêt, est contraire aux intentions et au décret de l'Assemblée nationale, et plus on se persuade qu'elle réprimera cette entreprise subite contre une loi si récente.
« Signé : Les représentants du commerce de la ville de Paris; suivent leurs signatures.
« Signé : Les négociants, banquiers et marchands de Paris; suivent leurs signatures.
« Et à la suite de ces signatures est écrit : « Les juges et consuls de Paris, consomment occupés des intérêts du commerce et de tout ce qui peut tendre à le soulager, adhèrent à la présente pétition, et désirent qu'elle soit favorablement accueillie de l'Assemblée nationale. »
Fait en la chambre du conseil, le 7 février 1791.
Signé : P. Le Comte, premier juge: Robert, Janin, L.-F. Le Clerc, Renouard l'aîné.
* Suit la lettre des députés extraordinaires du commerce de France:
« Paris, le 7 février 1791.
Monsieur le Président, « Les députés extraordinaires du commerce de France ayant pris connaissance de la pétition du commerce de Paris, portant réclamation sur Je droit d'enregistrement exigé sur les billets à ordre avant le protêt, et ayant examiné, avec la plus sérieuse attention, les motifs sur lesquels cette réclamation est appuyée, ils en ont reconnu la justice et le danger imminent qui résulterait pour le commerce en général, et pour la portion du commerce la plus utile, mais la moins fortunée, de l'interprétation donnée à la loi par les administrateurs; et en conséquence ils ont l'honneur de vous prier, M. le Président, de mettre sous les yeux de l'Assemblée nationale, leur adhésion à cette réclama- 1
tion, à laquelle ils se joigne t au nom de tout le commerce de France. « Nous sommes avec respect, etc.
Signe' : Les députés extraordinaires des manufactures et du commerce de France, Baux, président ; J.-F. Serane, secrétaire.
(L'Assembléè ordonne le renvoi de cette pétition au comité d'imposition.)
J'avais placé, par votre ordre, à la discussion de cette séance, un rapport sur l'expédition des frégates pour aller i la découverte de M. de La Pérouse. On m'observe que le comité militaire demande la parole pour un rapport extrêmement intéressant sur le recrutement, les engagements et les congés; voulez-vous l'entendre ?
Ce rapport doit être examiné, car il respire bien peu l'air de la liberté. Je vous assure, Messieurs, qu'il est effrayant pour les patriotes. Ce rapport a donc besoin d'être examiné; mais il n'est pas à l'ordre du jour, et cependant on véut le passer ce soir; je demande l'ajournement. (Murmures.)
Messieurs, je demande la priorité pour le rapport de votre comité militaire sur le recrutement, les engagements et les congés; ce rapport est distribué et imprimé depuis trois semaines ou un mois.
L'objet auquel il s'applique est également intéressant et pour la chose publique et pour les individus; pour la chose publique, par l'importance bien reconnue d'accélérer l'organisation de l'armée; et pour les individus, par la facilité qu'elle donnera, à ceux qui désirent servir, d'entrer dans l'armée, et à ceux qui souhaitent rentrer dans le sein de leur famille, de la quitter; car si les lois sur cet objet remplissent le but que nous avons eu, il ne doit plus exister désormais d'engagements faits par surprise ou par contrainte, et la désertion doit être également détruite par la facilité extrême que nous donnerons de quitter un métier qui, par les nouvelles dispositions militaires, mérite qu'on s'y attache.
Puisque j'ai la parole, je profiterai, Messieurs, de cette occasion, pour vous annoncer que j'espère que le zèle soutenu des mt mbres du comité militaire mettra les travaux qu'il lui reste à faire à même de vous être bientôt soumis; et que, dans 1 mois ou 6 semaines, il pourra vous demander lui-même sa destruction, et apprendre ainsi à la nation entière que le moment approche où l'Assemblée nationale verra se terminer ses immenses travaux.
Je demande que le rapport du comité soit mis le premier à l'ordre du jour. (Applaudissements.)
(L'Assemblée décrète qu'elle entendra le rapport sur le recrutement, les engagements et les congés.)
, rapporteur du comité militaire (1). Messieurs, vous avez décrété, le 16 décembre dernier, que l'armée serait recrutée par enrôlements volontaires.
Ce décret, en laissant subsister le mode des remplacements usités
jusqu'ici, impose à votre comité militaire la loi de vous présenter ses
observations sur les formes en usage ajourd'hui, et
L'ordonnance du roi, du 20 juin 1788, présente, dans son ensemble, tous les détails relatifs à cette partie du service militaire.
Les uns tiennent à la législation, les autres uniquement à l'administration.
Vous avez prononcé que le roi était le chef suprême de l'armée : en cette qualité, les détails d'administration nous ont paru uniquement de sa compétence; et en nous bornant, dans ce rapport, à soumettre à votre discussion ceux re-latifs à la législation, nous-avons pensé que les autres appartenaient au roi, et que vous deviez les abandonner à sa sagesse pour les ordonner d'après les bases que vous lui traceriez par vos décrets.
Des recruteurs.
Les recruteurs dans les provinces, et dans les villes surtout, se permettent quelquefois de s'écarter des lois qui leur sont prescrites, se livrent souvent à ce travail sans être avoués de ceux pour lesquels ils sont censés s'en occuper, et sans y être même connus par la police des villes dans lesquelles ils recrutent. Presque toujours étrangers à ces villes, et par conséquent fort insouciants sur l'opinion qu'on pourrait y prendre de leur inconduite, ils ne sont retenus par aucun frein capable de les arrêter : la surveillance exercée sur eux se trouvant bornée, pour ainsi dire, à celle de leurs régiments, toujours éloignés d'eux, ou tout au plus à celle de quelques commandants militaires ou commissaires des guerres, qui n'ont aucun intérêt à la rendre active, devient à peu près nulle pour arrêter les malversations qu'ils pourraient être capables de commettre. Il leur faut des hommes; tous les moyens qui peuvent les leur procurer leur sont égaux. Il leur faut de l'argent pour le genre de vie personnelle qu'ils ne mènent que trop souvent; de là résultent la faveur qu'ils accordent au libertinage, les engagements conditionnels, véritables encouragements du vice, et souvent le commencement de l'opprobre des familles, ces trafics perpétuels d'hommes auxquels ils se livrent sans cesse entre eux, enfin toutes les fraudes et même les violences qu'ils se permettent, pour ainsi dm-, ouvertement.
Votre sagesse ne souffrira pas plus longtemps, sans doute, ces désordres, honte du militaire, et sujets perpétuels d'inquiétudes pour les honnêtes habitants des villes, qui craignent toujours de voir leurs enfants en devenir la victime. Votre comité militaire a pensé que le premier moyen à mettre en usage par les régiments, pour se procurer les recrues nécessaires à leurs remplacements, était d'employer par préférence, et exclusivement même, s'il était possible, à ce travail, des officiers, sous-officiers et soldats de leurs corps; des anciens militaires retirés du service, et même des particuliers, n'importe de quel état, dans le lieu même de leur domicile, fl n'est pas nécessaire, sans doute, de servir ou d'avoir servi pour être recruteur : la probité peut suppléer à l'intelligence; et si le nombre des recrues, que la première seule pourra procurer, peut en souffrir, leurs espèces et leurs qualités y gagneront bien de quoi en indemniser.
De pareils recruteurs, travaillant ainsi au milieu de leurs concitoyens, ont une réputation à conserver ; il est moins à craindre de les voir S'? livrer à des manœuvres Capables de la compromettre.
Il est des positions sans doute dans lesquelles les régiments pourraient s'entretenir avec ces seuls moyens; mais il en est d'autres cependant dans lesquelles ceux-ci se trouveraie >t peut-être insuffisants. Nous avons pen^é que les régiments devaient être autorisés en outre à détach r des officiers, sous-officiers et soldats, uniquement destinés au travail des recrues. Mais, partant du principe que les officiers municipaux des villes doivent être chargés de tous les détails relatifs à leur tranquillité en général, et à celle des citoyens, en particulier, nous avons pensé en même temps que ces recruteurs détachés devaient être assujettis expressément à tous les règlements de police des villes où ils s'établiraient, et que tous les recruteurs en général, soit détachés, soit domiciliés dans les villes, ne devaient travailler que pour un seul régiment , et ne devaient être autorisés à s'en occuper qu'après avoir été enregistrés en cette qualité à la municipalité afin d'en être connus, et de pouvoir être surveillés par élle.
Ces administrations paternelles, toujours intéressées à maintenir les droits des citoyens, seront en effet les" plus-propres à assurer ceux des recrues, et à arrêter des désordres, honte de l'armée, et dont tous les militaires honnêtes ne cessent de gémir.
Les besoins de l'armée, la nécessité de procurer des recrues, la supériorité reconnue de ceux engagés par des officiers, dans les pays mêmes de leur domicile, avaient décidé depuis longtemps les ordonnances à forcer tous les officiers allant en semestre, ou en congé équivalent, à faire deux hommes de recrue pendant leur absence : elles les avaient assujettis à une retenue sur leurs appointements, fixée en raison de leur arme, pour chacun de ceux qu'ils n'engageraient pas ainsi. L'ordonnance du 20 juin 1788 avait étendu cette obligation sur tous les officiers entrant au service, et les avait assujettis aux mêmes retenues s'ils ne la remplissaient pas.
Votre comité a pensé qu'il était des provinces que leur position particulière rendait peu propres à fournir des recrues, quelque zèle que les officiers puissent mettre à s'en procurer; qu'il serait injuste d'assujeUir à cette règle ceux qui les habiteraient, en même temps qu'il serait difficile de les en dispenser, lorsque les officiers des autres provinces y resteraient assujettis; il a pensé en outre qu'une retenue sur les appointements, subsistance de ceux auquels ils sont accordés comme prix de leur service, présentait une parcimonie peu digne d'une grande nation, et pouvait être une cause de dérangement pour quelques-uns, en leur enlevant ainsi une portion de leur nécessaire; il a donc cru devoir vous proposer de les dispenser de cette obligation, et de supprimer cette espèce de punition économique, que les chefs de corps mêmes ont toujours cherché à éluder le plus qu'il leur était possible.
Des recrues.
En nous occupant ensuite des qualités nécessaires pour l'admission des recrues, une première question s'est présentée à nous : Quel âge exige-
rait-on des hommes, pour les déclarer susceptibles d'être admis? Les ordonnances actuelles fixent l'âge de 16 ans, et permettent à tous ceux engagés auparavant de réclamer contre leur engagement.
Cet âge sans doute n'est poiut encore celui de la force de l'homme; et quoique l'éducation laborieuse de la plupart de ceux qui sont dans le cas de s'engager, les ayant accoutumés dès leur enfance à la peine et au travail, puisse les rendre très susceptibles de supporter à cet âge les fatigues de l'état de soldat pendant la paix, il n'en résulterait pas moins qu'ils en seraient souvent incapables pendant la guerre, et qu'alors il faudrait les ménager infiniment jusqu'au moment où leur croissance achevée les mettrait dans ie cas d'avoir plus de vigueur pour les supporter : il paraîtrait donc à désirer que l'âge de 18 ans fût celui fixé pour les engagements. Nous l'avons senti, Messieurs, mais la réflexion en même temps nous a démontré que les intérêts de l'armée et de sa bonne composition mettaient dans l'impossibilité d'en reculer ainsi l'époque.
L âge de 16 ans est ordinairement celui auquel un jeune homme se décide au métier ou à la rofession à laquelle son inclination l'appelle. uel que soit son goût pour l'état militaire, s'il ne peut y être admis alors, il en prendra nécessairement un aulre ; il s'y accoutumera et ne songera plus à le quitter, à moins que l'inconstance ou la mauvaise conduite ne le forcent de l'abandonner. L'armée manquera donc de sujets, ou sera réduite à n'être composée que de ceux qui n'auraient pas su se fixer. L'expérience nous démontre qu'un jeune homme engagé à 16 ans se ploie aisément à la discipline militaire, est plus propre à l'instruction et devient souvent un sujet distingué ; presque tous nos meilleurs sous-officiers, presque tous ceux parvenus au grade d'officier par leur mérite, s'étaient engagés à cet âge. Il est bien rare que ceux qui ont embrassé plus tard la carrière militaire tournent ainsi ; moins flexibles, moins accoutumés à la dépendance, à la subordination nécessaire dans le métier des armes, si la discipline les retient quelquefois, ce sont eux seuls qui nécessitent sa sévérité, et ce sont presque tous les hommes engagés dans un âge plus mûr qui dégradent l'état de soldat, en y apportant tous les vices dont ils ont contracté l'habitude dans l'oisiveté ou la perversité des villes avant de s'engager.
Nous avons donc pe isé, Messieurs, qu'il était important de ne rien changer à cet égard aux dispositions des anciennes ordonnances, qui fixent l'âge de 16 ans pour l'admission des recru s.
Un jeune homme engagé avant cet âge, qui a fraudé souvent pour se faire recevoir, dont le but a été de se soustraire, en Rengageant, à une autorité qui le contrariait, est souvent porté à ne p;is'réclamer de lui-même les dispositions favorables des ordonnances pour faire annuler son engagement contrac é avant cet âge. Notre devoir nous a paru être de concilier l'intérêt du militiire avec celui des familles, et nous avons cru devoir forcer les régiments à rendre un jeun*é humme, engagé ainsi, à ceux do t il doit naturellement dépendre à cet âge, quand bien mè ne il s'y montrerait lui-même oppo-ant.
Enfin, Messieurs, nous avons cru devoir assurer la bonne composition de l'armée en déterminant les causes qui devaient empêcher d'être admis au rang des défenseurs de la patrie. Les troupes françaises nous ont paru devoir n'être
composées que de Français. Et si la politique doit engager et fournir des moyens de service aux étrangers et même aux déserteurs des puissances voisines, il nous a paru que les régiments étrangers, faisant partie de nos armées, devaient être seuls autorisés à les recevoir.
Un homme de cette espèce, ainsi engagé pâr eux, én vaut en effet trois par nous; savoir : un de moins chez des puissances voisim s qui péut vent être nos ennemis; un de plus au service de la nation, et Un Français de plus, laissé aux travaux de l'agriculture et du commerce par cet étranger qui occupe une place qu'il serait t'orcé de remplir sans lui, pour la défense de son pays. Nous avons donc pensé qu'il était iotéres1-sant de leur laisser cette faculté, mais qu'il fallait l'interdire aux régiments vraiment nationaux, laits pour n'être composés que d'hommes nés réellement sous la domination française.
Des engagements.
Les engagements, leur durée, leurs prix et les moyens pour en assurer la validité et en écarter la fraude, ont ensuite fixé notre attention.
Quelle sera leur durée? C'est la première question que nous nous sommes faite.
Les ordonnances actuelles les fixent à 8 ans. Les premières années d'un recrue sont destinées à son éducation militaire: dans les trouves à cheval, dans l'artillerie, 4 ans y sont à peine suffisants et si dans l'infanterie un temps moins long est nécessaire pour le former matériellement, c'est-à-dire pour le rendre susce tibie de faire sou service, il n'en faut pas moins ce temps-là pour lui donner toutes les connaissances qu'un bon soldat doit avoir.
Si la >iurée des engagements était réduite à 6 ans, l'homme à peine instruit serait dans le cas de s'en aller, et les régiments ne seraient plus qu'une école perpétuelle de recrues, «u lieu d'être la réunion d'individus en état de servir la patrie. En réduisant la durée des engagements à ce terme, la dépense augmenterait considérablement; si la somme reçu - directement par le recrue peut être fixée en raison des années de service à en exiger, il n'en est pas de même des dépenses accessoires. Celles des faux frais du recruteur, celles des routes, celles enfin relatives à l'équipement de l'homme à son arrivée, sont les mêmes pour 6 ans comme pour 8 ans, et la dépense des recrues ne diminuerait pas d'un quart : ce qui serait cependant nécessaire, si l'on ne voulait pas être obligé d'augmenter les fonds à destiner à cette partie de l'entretien militaire.
Enfin, Messieurs, il est vraisemblable que votre sagesse vous engagera à donner plus de facilité aux soldats pour retourner plus souvent et plus longtemps dans leur famille pendant le temps de leur service. S'ils peuvent y aller par tiers ou au moins par quart pendant 8 ou 9 mois tous les ans, quel serait alors le service véritable d'un engagement de 6 ans? Ces considérations nous ont déterminés d'autant plus à penser qu'il fallait en fixer définitivement la durée à 8 ans pour toutes les armes, que nous comptons vous proposer encore les facilités les plus grandes pour les hommes qui voudraient se dégager avant l'expiration de leur service.
Le prix des engagements de 8 ans est aujourd'hui fixé à une somme déterminée par chaque arme.
Sur cette somme il doit en être retenu une partie qui ne doit être payable qu'à l'arrivée du recrue au régiment, pouf être employée à lui fournir tous les effets de petit équipement qui peuvent lui être nécessaires.
Enfin, les régiments dans leurs comptes ne peuvent outrepasser ces sommes fixées : telles sont les règles établies par l'ordonnance du 20juin 1788.
En fixant ainsi un tarif uniforme pour chaque arme, en faisant ainsi connaître à l'homme la somme qu'il peut être en droit d'exiger, on a augmenté considérablement la dépense des recrues : l'homme petit se croit en «iroit d'exiger autant que le plus bel homme ; et celui-ci dont l'amour-propre, disons plutôt, dont l'intérêt est blessé par la comparaison, demande davantage. Le recruteur veut rengager, il lui accorde sa demande, et, par ce moyen, le tarif n'est s«ivi avec exactitude que pour les petits hommes, les dépenses outre passent la somme fixée, le régiment y est borné dans ses comptes, il faut donc qu'il emploie des moyens cachés pour masquer ces dépenses qui ne lui seraient point allouées; il ne peut les trouver qu'aux dépens des individus : il en résulte des vexations et de l'arbitraire. Nous avons cru devoir parer à ces inconvénients.
Le moyen le plus propre à y parvenir nous a paru être de ne pas fixer des sommes positive s, de laisser le prix des engagements, payable en raison de la taille ou de l'espèce des hommes, et d'ordonner que leur dépense sera toujours portée réellement en compte, et telle qu'elle aura eu lieu effectivement. Quel iues r cruteurs et quelques régiments en abuseront, peut-être, dira-t-on ? C'est aux conseils d'administration à piescriredesrègles aux premiers ; c'est aux inspecteurs à surveiller les seconds et à prévenir les abus.
La fixation de la somme payable à l'arrivée des recrues au régiment nous a paru nécessaire seulement à conserver. Leur équipement, lorsqu'ils n'ont pointde fonds suffisants a cet effet, est une cause de malaise dont ils se ressentent longtemps, et souvent même de dégoût, occasionnée par les services qu'on est obligé de leur faire faire pour s'acquitter.
L'ordonnance y avait sagement prévu; nous avons cru devoir maintenir cette disposition.
Les recruteurs, d'après les ordonnances actuellement subsistantes, ne pouvaient rendre aux recrues les engagements contractés par eux, sans y être autorisés par les régiments. Ils l'étaient presque tous, et beaucoup en abusaient en faisant payer à un jeune homme, souvent séduit ou surpris, un prix excessif pour l'erreur d'un moment. On peut trouver avec raison que le dégagement d'un recrue, engagé quelques jours auparavant, n'ayant pas encore rejoint, ne doit pas être un objet de commerce et de bénéfice, ni pour le recruteur ni pour le régiment. Mais, comme cependant l'intérêt du recrutement exige qu'un engagement une fois consommé ne puisse pas être annulé légèrement, nous avons pensé qu'il valait mieux accorder plus de temps au repentir du recrue, en différant sa ratification, mais qu'une fois terminée, il devait être soumis à toutes les règles établi* s par ceux qui voudraient se dégager avant l'expiration de leur engagement.
Enfin, Messieurs, les engagements, leur validité, leur ratification, les jugements des contestations qu'ils pouvaient occasionner, sont uniquement soumis aux commissaires des guerres. L'autorité militaire seule ne peut agir que sur des soldats; un recrue ne le devient que par la con-
sommation définitive de son engagement. Jusqu'à ce moment, il est citoyen, et nous avons pensé, en conséquence, que les officiers publics, chargés de veiller aux droits des habitants des villes, devaient être chargés d'assurer ceux des recrues, engagés dans leur arrondissement; nous avons donc cru devoir attribuer ces fonctions aux officiers municipaux des villes, et supérieurement sur eux aux assemblées de département, en les assujettissant, néanmoins, à des formalités nécessaires en même temps pour la conservation des intérêts de l'armée, faits pour être surveillés par des militaires.
Des rengagements.
Si le bon choix des recrues peut assurer la bonne composition des troupes, il n'est pas moins essentiel à cet effet, que les régiments puissent conserver des anciens soldats par le moyen des rengagements. Autrefois, tout soldat, à la fin de la première moitié de son engagement, pouvait en contracter un autre de 8 ans ; une perspective de 12 ans de service devenait quelquefois effrayante, lorsque l'homme n'y avait été décidé que par l'appât de l'argent, prix du sacrifice de sa liberté. La majeure partie des déserteurs était dans les hommes rengagés; l'ordonnance de 1788, en prescrivant que les rengagements ne pourraient avoir lieu à l'avance, que lorsqu'il ne resterait plus que 2 ans à courir de l'engagement courant, et qu'ils ne pourraient être que de 2 ans, ou au plus de 4ans, a paré à ces inconvénients. 6 ans de service ne sont pas dans le cas d'effrayer; nous avons cru devoir adopter ces dispositions.
La même ordonnance adoptait un mode différent pour les troupes à cheval, en autorisant ces hommes à se rengager à l'avance, lorsqu'ils seraient parvenus à la première moitié de leurs engagements. Elle fixaitaussi leurs rengagements à 4 ans ou à 8 ans, et leur laissait par là la possibilité d'aliéner, à l'avance, leur liberté pour douze ans. Le degré d'instruction nécessaire dans les troupes à cheval exigerait peut-être ces dispositions pour les mettre plus dans le cas de conserver d'anciens cavaliers ; mais ceux-ci sont hommes aussi, et les mêmes motifs qui nous ont fait approuver des règles contraires pour l'infanterie, ont dû nous déterminer à rejeter pour la cavalerie des dispositions qui seraient opposées à ces principes.
L'ordonnance de 1788 ne fixait le prix des rengagements qu'en argent comptant; cette manière de les payer n'est pas profitable au soldat. La somme donnée à cet effet est mangée aussitôt, et il ne lui reste après que le regret d'avoir sacrifié sa liberté pour des plaisirs aussi passagers. Nous avons donc pensé qu'il pouvait être convenable de rétablir de hautes payes représentatives du rengagement, en faveur de ceux qui seraient assez sages pour ne pas sacrifier l'avenir au présent.
En payant les rengagements comptant et ainsi à l'avance, on court risque d'en perdre la valeur par la mort ou la désertion de ceux qui les reçoivent. En les donnant en hautes payes,v on n'est exposé à aucunes avances, et l'on ne court pas les mêmes risques; l'intérêt des hommes et ceux des régiments s'y rencontrent également.
Nous avons donc pensé encore que nous devions accorder un peu davantage de cette manière, et présenter aux hommes sages, qui savent calculer, l'appasde leur faire cumuler ces hautes
payes avec leurs soldes, qui doivent servir un jour à fixer leur retraite, afin de les décider à préférer ce moyen. Il coûtera peut-être un peu davantage pen iarit la durée entière du rengagement, pour ceux qui l'achèveront en entier ; mais il n'y aura jamais de pertes, et par ce moyen il y aura compensation.
Enfin, Messieurs,suivaut l'ordonnance actuelle, tous les grades rengageaient en les acceptant. Le hien du service s'y rencontrait peut-être; mais ces grades, faits pour être la récompense des services passés, cessaient de paraître flatteurs, dès que le rengagement pouvait être regardé comme une condition essentielle, sans laquelle ils n'auraient point été accordés; cette disposition ne nous a pas paru juste, et nous ne vous proposerons pas de la conserver.
Une autre question relative aux engagements s'est présentée ensuite. Les adjudants, les sergents-majors et maréchaux des logis en chef, resteront-ils engagés après être parvenus à ces grades? 11 serait fà heux sans doute que des sujets distingués pussent abuser de leur liberté, pour quitter les régiments dans le moment même où ils seraient dans le cas d'y servir d'une manière plus utile encore; mais nous avons pensé que la certitude de leurs avancements, pour ainsi dire acquise pour eux, suffirait pour ies en détourner; et comme rien n'est plus important que de relever la considération de ces grades, sur lesquels les détails du service roulent essentiellement, nous avons pensé que vous deviez leur accorder cette distinction, et les mettre absolument dans la classe des officiers, c'est-à-dire ayant comme eux la liberté de quitter leurs emplois, en donnant leurs démissions.
Le contrat, passé entre la recrue et l'homme qui l'engage, porte la condition de servir 8 ans; y manquer, serait êlre injuste. Une campagne ae guerre commencée, pendant laquelle il est impossible de diminuer ses forces, pourrait seule justifier le moindre retard à ce sujet. Mais, dans ce cas, l'homme doit être indemnisé; nous avons pensé, en conséquence, qu'excepté dans ce eus seulement, les congés ans dus devaient toujours être expé liés le jour même de l'expiration des engagements ou rengagements, et que si les circonstances d'une campagne commencée empêchaient de partir des tio limes que l'honneur seul suffirait pour retenir, ils n'en devaient pas moins être dédommagés de ce retard, par une indemnité équivalente au rengagement qu'ils seraient dans le cas de contracter, et proportionnée au temps de service qu'ils auraient ainsi prolongé.
Les commandants des corps, sous les plus légers prétextes, quelquefois même par caprices, refusaient des hommes de recrues arrivant aux régiments, et les renvoyaient aussitôt, après leur arrivée, sans leur donner même le temps de se remettre des fatigues du voyage. Pour faire cesser cet arbitraire, nous avons cru devoir charger les conseils d'administration de leur admission, et nous avons regardé comme un acte de justice d'assurer le retour de ces recrues jusqu'au lieu de leur domicile, en leur donnant aussi le temps nécessaire pour se reposer.
Les intirmités sans doute doivent empêcher de continuer un métier qui demande de la force et de la santé; mais si ces infirmités surviennent après de longs services, ou si elles sont la suite de quelques blessures, ou de quelques accidents occasionnés par le service même, elles semblent alors de nature à exiger que l'homme qui en est
attaqué, ne soit point exposé à une misère, capable d'avilir un état fait pour être honoré de plus en plus. Nous l'avons pensé, Messieurs, et nous avons cru devoir vous proposer des restrictions d'humanité à ce sujet, et des moyens pour écarter tout arbitraire des réformes.
Les congés de grâce étaient dans le système actuel une espèce de trafic, rendu indispensable par l'insulTisa ice des moyens accordés aux régiments. Sans eux les masses destinées au recrutement n'auraient pu fournir aux dépenses, dont elles étaient surchargées: il fallait en donner; il fallait les rendre profitables; il fallait donc impitoyablement rançonner les soldats, que leur peu de goût pour le métier des armes, ou que leurs affaires même, quelque intéressantes qu'elles puissent être, mettaient dans le cas de désirer la fin de leurs services avant l'expiration de leur engagement. Par une suite du mauvais système d'administration, certaines dépenses, quoique devant varier en raison des circonstances, étaient déterminées par les ordonnances; d'autres, quoique nécessaires, n'étaient point allouées; il fallait que les administrateurs particuliers des corps employassent des moyens cachés, et le prix des congés de grâce portés au delà de ceux prescrits par les règlements, pouvaient seuls les leur procurer. Un meilleur système d'administration s'introduira sans doute : désormais à découvert, et n'étant plus dans le cas de présenter que des comptes réels, elle n'aura plus besoin des ressources particulières et secrètes.Les masses,fixées par les représentants de la nation, ne seront plus calculées avec cette parcimonie ministérielle, qui ne portait malheureusement que sur les objets intéressants; elles le seront en ra;son exacte des dépenses dont elles devront être chargées. D'après ce système que nous espérons que votre sagesse adoptera, les congés de grâce ne seront plus nécessaires à l'entretien des corps; mais si des calculs financiers ne mettent plus dans le cas d'en exiger, les besoins des hommes, l'avantage du service même, doivent faire la loi d'en accorder. Le soldat sera bien traité, bien payé : il sera affranchi de toutes les minuties faites pour inspirer le dégoût; il verra une perspective d'avancement assuré, si sa conduite et son intelligence l'en rendent susceptible; sa carrière ne s ra plus bornée, et son ambition ainsi que son intérêt devront se réunir pour le fixer dans la profession des armes, qui deviendra par là un état honorable et honoré. L'homme étourdi ou inconstant, l'homme auquel sa conduite [enlèverait toute espérance de parvenir, pourront seuls délirer de cesser leurs services; l'homme sage en désirera nécessairement la ontinuation, à moins qu'une position extraordinaire de famille, ou des circonstances imprévues ne le forcent à y renoncer. Il est intéressa it, pour l'avantage même des corps, de donner toute facilité aux premiers : la justice exige qu'on en accorde de même aux seconds; votre comité militaire a donc pensé que vous ne deviez point chercher à borner le nombre de3 congés de grâce à donner chaque année, et que vous deviez les autoriser en faveur de tous ceux qui se présenteraient pour les obtenir aux époques présentes; en les assujettissant seulement à des formalités faites pour en empêcher les abu?.
S'il est juste, s'il est avantageux même, de relever encore de plus en plus l'état de soldat, en le mettant dans le cas d3 recouvrer, pour ainsi dire, à sa volonté, sa liberté qu'il pourrait se repentir d'avoir aliénée, il est indispensable en même temps que la nation ne supporte pas à sa
perte les dépenses qu'elle aurait pu faire pour lui, et qu'il soit assujetti à payer une indemnité en raison des services dont il aurait reçu le prix, et qu'il ne rendrait pas; nous avons donc pensé que tout homme, qui voudrait se degager avant la fin de son engagement, devait remettre à la caisse une somme proportionnée au temps restant à expirer de sa durée.
Cette somme à payer par lui ne doit jamais être exagérée, ni arbitraire sans doute; mnis elle doit cependant être proportionnée à la dépense nécessaire pour le remplacement, ainsi qu'au risque toujours inséparable de l'échange d'un homme formé contre un recrue, et d'un homme sûr et connu contre un homme inconnu : le double du prix, fixe pour le premier rengagement dans chaque arme, nous a paru remplir ce but pour l'homme qui n'aurait point atteint la première moitié de Sun engagement de 8 ans. Le prix fixé pour le rengagement est à peu près ce que coûte un recrue : le double de cette somme est indispensable pour mettre à l'abri des risques que les régiments peuvent courir en engageant des hommes inconnus. Une somme par ille seulement au piemier rengagement nous a paru suffisante pour ceux qui auront achevé la première moiiié de leur engagement ; elle ne servira réellement qu'au remplacement nécessaire; mais 8 ans de s-ervice à espérer du recrue, au lieu de 4 au plus, restant à faire à l'homme dégagé, serviront d'in iemnité aux régiments pour les risques qu'ils pourraient courir.
La valeur des congés de grâce ainsi donnés ne servira qu'aux remplacements des hommes : elle ne peut plus, ainsi que par le passé, être calculée comme un bénéfice additionnel aux fonds destinés au recrutement. Dans les projets de dépense qui vous ont été présentés par le ministre, ce bénéfice, supposé par lui devoir continuer à avoir lieu, était entré dans ses calculs pour la formation de la masse générale; et il vousles avait présentés en conséquence au-dessous des besoins réels. En supprimant ces ressources, vous vous mettez dans la nécessité de les augmenter : il en résultera une dépense plus con>iuérable, pour la formation de ces masses; mais elle pourra être aisément balancée par des réductions que nous aurons à vous proposer sur d'autres parties moins intéressantes.
Cette augmentation de dépense d'un côté, de l'autre une économie suivie de la continuation de tous les anciens abus et de toutes les vexations arbitraires qui dégradaient l'état militaire, en même temps qu'elles désolaient les familles, voilà, Messieurs, ce que vous avez à peser dans la ba ance de votre sagesse. Votre comité militaire n'a pas pensé que vous dussiez être embarrassés sur le choix. Réfléchissez-y, et prononcez.
Telles sont, Messieurs, les observations que nous avions à vous soumettre sur la partie importante du recrutement militaire. Pour vous les prése nter avec méthode, nous avons cru devoir les diviser en cinq titres ;
Titre Ier............. Des recruteurs.
Titre 11........,..... Des recrues.
Titre 111............. Des engagements.
Titre IV............. Des rengagements.
Titre V.............. Des congés d'ancienneté, de réforme et de grâce.
C'est dans cet ordre que nous avons l'honneur de vous présenter le projet de décret suivant : I
projet de décret
Sur le recrutement, les engagements, les rengagements et les congés.
L'Assemblée nationale, ayant entendu le rapport de son comité militaire sur le recrutement des troupes de ligne, les rengagements, les dégagements et les congés ; considérant qu'il appartient aux représentants de la nation de fixer, d'une manière positive, les bases de cette partie importante du service militaire, non seulement pour soustraire ceux qui se destinent à la défense de la patrie, à l'espèce d'arbitraire dont ils étaient si souvent les victimes ; mais encore pour assurer la tranquillité des provinces et le repos des familles, en prenant toutes les précautions nécessaires pour tracer aux recruteurs les devoirs auxquels ils doivent être assujettis, et ordonner la surveillance à exercer sur leur conduite, décrète :
TITRE PREMIER,
Art. lor. Tous les officiers, sous-officiers et soldats de toutes les armes en activité de service ou attachés à quelques régiments pourront se livrer au travail des recrues, dans le lieu de leur domicile ou de leur résidence; mais ils ne pourront le faire que pour le régiment même dans lequel ils serviront, sans pouvoir jamais, et sous aucun prétexte, engager aucun recrue pour un autre régiment.
Art. 2. Tous les officiers, sous-officiers et soldats de toutes les armes retirés du service, ainsi que tous particuliers, de quelques états qu'ils soient, pourront également se livrer à ce travail dans le lieu de leur domicile ou de leur résidence ; mais ils ne pourront le faire qu'en vertu d'une commission expresse pour recruter, à eux donnée par le conseil d'administration d'un régiment : ils ne pourront recevoir de pouvoir de plusieurs à la fois, et ils ne pourront sous aucun prétexte engager pour aucun autre, que pour celui qui les y aurait autorisés.
Art. 3. Indépendamment de ces deux espèces de recruteurs préférables, comme moins dispendieux, et moins susceptibles de troubler la tranquillité des villes, puisqu'ils y seraient domiciliés et connus, et en conséquence, devant principalement être employés les premiers, les conseils d'administration, en cas d'insuffisance de ces moyens, pourront, s'il leur paraît nécessaire, détacher en outre dans les villes ou dans les départements, des officiers, sous-officiers et soldats recruteurs ; mais ils seront tenus de leur délivrer à cet effet des commissions et pouvoirs, sans lesquels ils ne pourront être autorisés à s'occuper de ce travail.
Art. 4. Ces pouvoirs donnés pour recruter, soit à des officiers, sous-officiers et soldats retirés du service, ou à tous autres particuliers domiciliés, soit à des officiers, sous-officiers et soldats détachés à cet effet, seront signés du conseil d'administration, et revêtus de l'autorisation du commandant du régiment. Ils seront imprimés dans une forme uniforme, et telle qu'elle sera prescrite par les règlements de détail que Sa Majesté croira nécessaires en exécution du présent décret.
Art. 5. Tous les officiers, sous-officiers et soldats, en activité de service ou retirés, tous les
particuliers autorisés à recruter dans le lieu de feur domicile ou de leur résidence, ainsi que tous officiers, sous-officiers ou soldats détachés de feur régiment à cet effet, conformément aux dispositions des articles i, 2 et 3 ci-dessus, seront tenus, avant de se livrer au travail des recrues, de déclarer au commandant militaire, et au commissaire des guerres, s'il y en a, et en outre, à la municipalité du lieu, l'intention dans laquelle ils sont de s'en occuper, le nom du régiment pour lequel ils travailleront, et de leur demander toutes les permissions nécessaires en conséquence. La municipalité, sur le vu de leurs pouvoirs, ou après avoir reconnu leurs droits, résultant de l'activité même de leurs services, leur délivrera un certilicat de recruteur, et les enregistrera comme étant autorisés, à cet effet, pour tel régiment nominativement ; en conséquence, tous les engagements faits par des individus non enregistré** à la municipalité, ou par eux pour d'autres régiments que pour ceux pour lesquels ils aurai' nt été inscrits, seront déclarés nuls et ë nul effet.
Art. 6. Les engagements qu'ils feront contracter ne seront réputés valables qu'autant qu'ils seront passés dans les formes prescrites, et qu'ils auront été ratifiés avec les formalités qui seront ordonnées ci-après.
Art. 7. Tous les officiers, sous-officiers et soldats, employés au travail des recrues, quoique Don domiciliés habituellement dans le lieu, seront assujettis à tous les règlements de ville et de police comme les autres citoyens, et le seront en outre à tous ceux de cette espèce qui pourraient être faits particulièrement concernant les recruteurs par les corps administratifs des lieux où ils seront employés, ainsi qu'aux dispositions qui seront prescrites ci-jprès pour assurer l'ordre de leur travail.
Art. 8. Tout officier, sous-officier et soldat, détaché en recrue, dans un lieu qui ne serait pas son domicile habituel, ne pourra porter d'autres vêtements que son habit d'uniforme, avec les marques distinctives de son grade.
Les officiers, sous-officiers, soldats domiciliés dans le lieu, quoique s'occupant du travail des recrues, pendant les semestres ou congés qu'ils auraient pu obtenir, ne seront pas néanmoins assujettis à cette disposition, qui ne sera de rigueur que pour ceux qui, étrangers à la ville ou au village où ils seraient employés, ne sont pas dans le cas d'y être aussi particulièrement cornus.
Art. 9. Les officiers ou sous-officiers, détachés comme recruteurs, répondront de la conduite des subordonnés qu'ils pourraient avoir sous leurs ordres pour ce travail, et seront tenus de leur faire observer avec .exactitude les dispositions du présent décret, ou des règlements de ville et de police qui pourraient les intéresser.
Art. 10. La bonne conduite des recruteurs étant de la plus grande importance, non seulement pour assurer ou augmenter le succès du leur travail, mais encore pour le repos des familles, et pour la tranquillité des villes dans lesquelles ils sont employés; les officiers municipaux ou corps administratifs, établis dans ces villes, et auxquels ils seront expressément subordonnés, les officiers généraux employés, les commissaires des g.-erres et les officiers de maréchaussées seront tenus d'y veiller particulièrement; et s'ils s'apercevaient qu'un desdits recruteurs s'écartât des règles qui leur sont prescrites, tombât dans le dérangeaient, ou en
occasionnât dans la ville, seront tenus de le punir suivaut l'exigence du cas, d'en donner avis au commandant de son régiment, afin qu'il soit rappelé et même reconduit, en observant à ce sujet les formes militaires qui seront ordonnées aux maréchaussées pour la conduite de ceux qui troubleraient l'ordre public, pendant les congés ou semestres qu'ils p mrraient obtenir.
Art. 11. Il est expressément défendu à tout officier, sous-officier ou soldat, à tout recruteur ou psrticulier faisant des recrues, d'engager aucun homme par surprise, force ou menace, le tout à peine de nullité desdits engagements, de perte de tous les frais, et de punition plus grave, prononcée par les officiers généraux, commissaires des. guerres ou officiers municipaux, suivant l'exigence des cas.
Art. 12. Aucun marchand de vin, cabaretier, traiteur, limonadier et autres, ne souffrira qu'il soit fait chez lui aucun engagement par violence; il sera tenu d'avertir sur-le-cnamp le commissaire des guerres et les ofliciers municipaux de tout ce qui se passera à cet égard chez iui à sa connaissance, et même de requérir la garde en cas de contravention; et, faute par lui de le faire, il sera réputé participe de ce désordre, et sera en conséquence dans le cas d'être puni conformément aux règlements de police, que les municipalités seront autorisées à faire à cet effet, chacune dans leur arrondissement.
Art. 13. Tous les départements du royaume n'é ant pas également susceptibles de fournir des recrues, plusieurs par leur position, et par une espèce de service différente plus particulièrement propre à ses hab tants, étant même dans le cas de n'en pouvoir fournir aucuns, il ne sera plus exigé des officiers aucun homme de recrue, comme conditions essentielles de leurs semestres, congés, ou de leur admission au service, il ne leur sera plus fait en conséquence aucune retenue en raison des hommes qu'ils n'auraient pas engagés; mais Sa Majesté sera suppliée de vouloir bien distinguer dans sa sagesse tous les officiers, sous-officiers et soldats qui, pendant leurs congés ou semestres, auraient montré quelque zèle ou obtenu quelques succès dans cette espèce de service volontaire de leur part, et de vouloir bien les en récompenser, en leur accordant quelques facilités pour des congés extraordinaires, lorsqu'ils seraient dans le cas d'en solliciter.
TITRE II.
Des recrues.
Art. 1er. Il ne sera admis dans les troupes françaises aucun homme de recrue, qu'il ne soit sain, bien conformé, et d'une volonté décidée pour le service.
Art. 2. Dans toutes les troupes on n'engagera de recrues que depuis l'âge de 16 ans accomplis» jusqu'à 35 ans en temps de paix, et jusqu'à 40 et même 45 ans en temps de guerre, pourvu toutefois que ceux qui auront ce dernier âge aient précédemment servi,et qu'ils soient encore en état de remplir la durée entière d'un engagement.
Art. 13. Tout homme, qui prouvera avoir été engagé avant l'âge de 16 ans, sera admis à réclamer sa liberté; mais il sera tenu, pour obtenir son dégagement, de produire son extrait de baptême dûment légalisé. Après la vérification de
cette pièce comparée avec la date de son engagement, son congé lui sera expédié, aussitôt qu'il aura remis à la caisse du régiment le prix constaté sur son engagement, les frais de sa route sur le pied de 3 sous par lieue, en raison de la distance du lieu où il aura été engagé, ainsi que ce qu'il pourrait se trouver re-devoir à la caisse du régiment, sans que, sous aucun prétexte, il puisse être exigé de lui des sommes plus considérables, relativement au congé à lui expédier.
Art. 4. Tous ceux qui seront dans le cas de profiter des dispositions de l'article ci-dessus, comme ayant contracté un engagement avant l'âge de 16 ans, seront tenus de réclamer contre ledit engagement, au plus tard, dans l'espace du mois qui suivra celui où ils auront atteint ledit âge, après lequel temps leur engagement sera reconnu valable.
Art. 5. Les pères, mères et tuteurs, seulement des jeunes gens ainsi engagés avant l'âge de 16 ans, auront droit, en justifiant do leur qualité, de réclamer leur liberté dans les délais prescrits par l'article précédent, quand bien même l'homme engagé ainsi ne le ferait pas lui-même, et, en se conformant aux dispositions prescrites par l'article 3, il leur sera rendu, quand bien même encore le jeune homme s'y montrerait opposant.
Art. 6. La taille des recrues au-dessous de laquelle ils ne pourront être susceptibles d'être admis sera fixée, savoir :
Pour l'infanterie française, étrangère et légère, à 5 pieds 1 pouce.
Pour l'artillerie, les mineurs et les ouvriers, à 5 pieds 3 pouces.
Pour la cavalerie et les dragons, à 5 pieds 3 pouces.
Pour les chasseurs et hussards, à 5 pieds 2 pouces.
Le tout pieds nus et mesurés à des toises exactement conformes à l'étalon du pied de roi, qui doit être déposé dans tous les hôtels municipaux des villes.
Art. 7. Un recrue, engagé pour un régiment, ne pourra être envoyé dans un autre que de son consentement.
Art. 8. Aucun régiment français, soit d'infanterie, d'infanterie légère, soit de cavalerie, dragons ou chasseurs, ne pourra, sous aucun prétexte, engager des hommes nés hors de la domination française, ni déserteurs d'aucun régiment.
Art. 9. Les régiments allemands, irlandais et liégeois, seront seuls autorisés à engager des étrangers et à recevoir les déserteurs des puissances voisines, lorsque des conventions particulières n'en prescriront pas la restitution; il leur sera libre néanmoins de recruter en France ; mais il leur sera défendu, sous aucun prétexte, de prendre des déserteurs des régiments français, sous peine de punition exemplaire contre celui qui les aurait engagés, et contre le conseil d'administration qui les aurait admis en ayant connaissance de leur désertion.
Art. 10. Les régiments suisses continueront les opérations de leurs recrutements conformément à leurs usages et à leur capitulation.
Art. 11. La défense de la patrie ne devant point être confiée à des hommes indignes de la profession des armes, il sera défendu, sous aucun prétexte, à tout recruteur ou particulier faisant recrue, d'enrôler les déserteurs, les vaga-
bonds, les mendiants d'habitude, les gens suspects ou soupçonnés de crimes, ceux poursuivis ou flétris par la justice, ainsi que ceux qui auront été chassés des régiments, sous peine d'en répondre personnellement; ils seront tenus en conséquence ds prendre les renseignements les plus circonstanciés sur le compte des hommes qui se présenteront, et ils ne pourront engager un homme ayant déjà servi, qu'il n'ait produit ou prouvé avoir obtenu un congé absolu dûment expédié dans la forme prescrite.
Art. 12. Les sujets affligés de défauis naturels ou d'infirmités habituelles, apparentes ou secrètes, qui les rendent incapables de servir, ne seront point admis à s'engager ; et ceux qui, étant dans ce cas, seraient parvenus, par surprise ou autrement, à se faire recevoir, seront réformés sur-le-champ, et les recruteurs qui les auront engagés supporteront toutes les dépenses qu'ils auront occasionnées.
Art. 13. Tout homme déjà réformé pour infirmité, ou ayant été chassé d'un régiment, et qui ne l'aurait'pas déclaré en s'enga^eant de nouveau ; tout homme qui aura contracté un double ou un troisième engagement frauduleux, ainsi que tous les officiers, sous-officiers et soldats qui leur auront fait contracter ces engagements ayant connaissance des raisons d'exclusion prononcées contre eux, ou des premiers engagements déjà contractés par eux, seront punis suivant l'exigence des cas, et ainsi qu'il sera décrété dans le titre des lois pénales militaires concernant la désertion, ou ceux qui en auraient été les fauteurs et participes.
Art. 14. L'Assemblée nationale, n'ayant point encore prononcé sur les moyens de composition d'une armée auxiliaire destinée à renforcer les troupes de ligne, ou à assurer la défense de nos côtes, se réserve de statuer ultérieurement sur la possibilité ou non-possibilité d'engager les hommes destinés à cette espèce de service.
TITRE III.
Des engagements.
Art. 1er. Tout recruteur sera tenu de déclarer à l'homme de recrue, qu'il veut engager, le nom du régiment, et l'espèce de troupe pour laquelle il l'engage.
Art. 2. La durée de l'engagement dans toutes les troupes, tant d'infanterie que de cavalerie, dragons, chasseurs et hussards, sera fixée à 8 ans, et ne pourra, sous aucun prétexte,être portée au delà.
Art. 3. Le prix des engagements sera déterminé en raison de la taille des hommes, et sera toujours porté en dépense par les recruteurs et par les régiments, tel qu'il aura été payé réellement : il sera divisé en deux parties; l'une qui pourra être donnée comptant à l'homme qui s'engagera, et l'autre qui sera toujours réservée pour lui être payée à son arrivée au régiment, et servir à lui fournir tous les effets de petit équipement qui pourraient lui être nécessaires.
Art. 4. La partie de l'engagement réservée pour êlre payable au régiment sera énoncée sur un billet dont l'homme de recrue sera porteur : elle pourra être plus considérable ; mais elle ne sera jamaismoindre que les sommes suivantes, savoir : I Pour l'homme engagé dans le3 régiments d'in-
fanterie française, étrangère, légère, et dans l'artillerie............................ 36 liv.
Pour l'homme engagé dans la cavalerie. 60
Dans les dragons, chasseurs et hussards................................. 45
Art. 5. Indépendamment des sommes données comptant à l'homme de recrue, ou réservées pour lui être payées à son arrivée au régiment, lesquelles constitueront véritablement son engagement, il lui sera donné en outre 3 sols par lieue pour les frais de sa route, depuis le lieu de l'engagement jusqu'au régiment.
Art. 6. Sous quelque prétexte que ce puisse être, aucun recruteur ne pourra donner à un homme de recrue, soit en argent, soit en effets, aucun acompte sur la somme réservée pour être payée à so i arrivée au régiment.
Art. 7. Le recruteur, après s'être assuré par toutes les questions qu'il croira devoir faire à l'homme qui se présentera pour s'engager, s'il est admissible au service; après avoir fait constater, dans les formes qui pourront être prescrites par les règlements, qu'il n'a point d'infirmités qui puissent l'empêcher de porter les armes; après enfin avoir pris sur son compte tous les renseignements que la prudence lui suggérera, lui fera signer son engagement.
Art. 8. Tout engagement contracté dans l'ivresse sera déclaré nul à la ratification, si l'homme de recrue, en réclamant alors pour cette raison, peut en administrer la preuve.
Art. 9. L'engagement détaillera les nom, surnoms de l'homme engagé, ainsi que celui de ses père et mère, le lieu de son domicile, son métier ou sa profession, son âge, sa taille, son signalement; les nom, surnoms, demeure et qualités du recruteur qui fera contracter l'engagement, la somme payée comptant, ainsi que celle réservée payable à l'arrivée de l'homme de recrue au régiment.
Art. 10. Le recruteur, de son côté, délivrera à l'homme engagé un certificat d'engagement, lequel contiendra tous les mêmes détails, portés sur l'engagement; il lui délivrera pareillement le billet, sur lequel il devra être payé à son arrivée au régiment de la partie de son engagement, réservée conformément aux dispositions de l'article 4, et il sera spécifié sur ce billet que l'objet de cette réserve est de lui fournir tous les effets de petit équipement qui pourraient lui être nécessaires jusqu'à concurrence de cette somme.
Art. 11. Les engagements, certificats d'engagements, ainsi que les billets, payables au recrue à son arrivée au régiment, seront marqués en tête du nom du régiment, et du lieu où il sera en garnison ; ils seront, autant qu'il se pourra, imprimés et dans une forme qui sera déterminée par les règlements. S'ils sont manuscrits, ils seront au moins en tout point conformes aux modèles prescrits, sans que le contraire cependant puisse être un titre de nullité, quand l'engagement sera d'ailleurs en règle, c'est-à-dire revêtu des formalités qui seront ordonnées ci-après.
Art. 12. Si l'homme de recrue sait écrire, il remplira lui-même l'imprimé de son engagement, en y écrivant de sa main ses noms, demeure, âge, et surtout les sommes convenues avec lui tant payable? comptant, que payables à son arrivée au régiment, lesquelles seront détaillées en toutes lettres ; il le datera de même, et le signera de ses noms de baptême et de famille. Le recruteur, de son côté, remplira, datera et signera l'imprimé du certificat d'engagement, et le billet payable à l'arrivée du recrue
au régiment, et il les remettra audit recrue, en échange de son engagement pour leur servir de gage mutuel.
Art. 13. Tout engagement qui ne sera pas daté, rempli en toutes lettres, et signé par le recrue, ainsi qu'il est prescrit en l'article précédent, sera déclaré nul; et pour le rendre valable, si le recrue ne sait pas écrire, il fera sa marque au bas en présence de deux témoins, par l'un desquels les blancs de l'engagement devront être remplis, et qui devront le signer tous les deux en cette qualité.
Art. 14. Ces témoins ne pourront être des militaires, sous peine de nullité de l'engagement ; ils seront pris parmi les domiciliés de 1 endroit, et il sera fait mention, au bas de leur signature, de leur demeure et de leur qualité.
Art. 15. L'engagement étant signé, le recruteur remplira sur le reste de l'imprimé tous les détails qui seraient restés en blanc, et qui ne devraient pas être "remplis obligatoirement de la main du recrue, ou d'un des deux témoins, conformément aux articles 11 et 12 ci-dessus; il remplira de même la case qui devra être laissée sur l'imprimé de l'engagement pour y inscrire les renseignements qu'il pourra prendre relativement à l'homme engagé.
Il se fera remettre ensuite par le recrue les passeports, congés ou papiers dont il pourrait être porteur, afin de s'assurer par là autant qu'il le pourra de sa personne.
Art. 16. L'engagement, quoique signé, soldé, et quoique changé contre le certificat d'enga-gemi nt et contre le billet, payable à l'arrivée au régiment, à remettre par le recruteur a l'homme engagé, ne sera valable néanmoins qu'après la ratification faite à la municipalité du lieu, et ainsi qu'il sera dit ci-après.
A: t. 17. Le recruteur sera te iu de présenter, dans les trois jours, les hommes de recrue qu'il aura engagés, à la municipalité du lieu pour lui faire ratifier leur engagement; mais cette ratification ne pourra avoir lieu dans la même journée, pendant laquelle l'engagement aura été contracté, ni être remis au delà aes trois jours.
Art. 18. Si l'homme de recrue, au moment de la ratification, réclame contre la validité de son engagement, contre la violence qui aurait pu être employée pour le lui faire contracter, ou contre son ivresse dont on aurait abusé, la municipalité tâchera de vérifier le fait. S'il est grave, elle en fera une information dans les règles; si cette vérificaiion ou cette information lui font juger indispensable de ne point ratifier l'engagement, elle le refusera, mais, sans pouvoir avoir égard aux seuls regrets de l'homme engagé, elle ne pourra le faire que dans le cas de nullité par le défaut de quelques-unes des formes prescrites ci-dessus, de violence, de mauvaise foi ou de surprise justement reprochée au recruteur, et qu'après avoir appelé, pour être témoin des raisons de son refus, le commissaire des guerres, s'il y en a, ou à son défaut un officier, n'importe de quel garde, soit en activité, soit r etiré du service.
Art. 19. Si Ja municipalité croit devoir prononcer la nullité de l'engagement, elle fera restituer en sa présence au recruteur par le recrue la somme stipulée lui avoir été payée comptant, telle qu'elle sera énoncée par son engagement, à moins que ce dernier ne puisse prouver qu'elle ne lui a pas été réellement délivrée. Elfe fera aussi remettre au recruteur et pareillement en sa présence le certificat d'en-
gagement ainsi que le billet payable au régiment, en même temps qu'elle fera rendre au recrue son engageaient déclaré nul; si au contraire elle croit devoir procéder à la ratification, elle le fera en présence du recrue et du recruteur, en signant au bas de l'engagement la formule de ratification qui y sera insérée.
Art. 20. Si l'homme de recrue, réclamant . contre la validité de son engagement susceptible d'être déclaré nul, n'est pas eu état de restituer aussitôt les sommes qu'il aurait touchées, et qu'il pourrait avoir mangées, la municipalité, Sur la réquisition du recruteur, s'assurera de sa personne jusqu'à ce qu'il ait été en état d'effectuer la restitution, à laquelle il seia tenu, Ou qu'il ait consenti la validité de son engagement.
Art. 21. Si la municipalité, en annulant un engagement, et d'après les vérifications laites par elle, découvre quelque violence ou quelque mauvaise foi prouvée de la part du recruteur, elle ordonnera sa punition pour fait de police, ou le dénoncera aux juges ordinaires, si les contraventions étaient de nature à être punies plus rigoureusement. En le punis-ant, comme pour fait de police, elle ne pourra pas néanmoins le tenir plus de trois jours en prison.
Art. 22. Chaque municipalité tiendra un registre de recrutement; elle sera tenue d'y inscrire les fioms de tous les recruteurs de quelque espèce qu'ils soient, qui auraient fait constater, pair elle, leurs droits u leurs pouvoirs pour recruter, ainsi que tous les engage ents présentés pour chacun d'eux, qu'elle ratifiera, ou dont elle refusera la ratification ; et, dans ce dernier cas, elle y détaille ra les raisons qui l'y auraient détern inée, ainsi que les noms du commissaire des guerres, ou de l'officier, appelé pour être témoin de ce refus de ratification, lequel sera tenu de ligner au registre.
Art. V3. Les recrues qui se feront au corps, soit en garnison, soit en route, seront engagés avec le.- mêmes formalités. La municipalité de la garni.-on,GUdu lieu de passage, sera chargée des ratifications, et sera tenue aux mêmes inscriptions sur lesregisties de recrutement, que toutes les municipalités devront avoir. Lorsqu'un régiment sera en route les ratifications pourront se faire dans la journée même, si le régiment n'y a pas séjour.
Art. 24. Aucun recruteur ne pourra, par sa volonté seule, annuler les engagements qu'il aura fait contracter, même avant la ratification, en les rendant aux hommes de recrues qu'il aurait engagés ; s'il le fait, il sera cassé de Sun grade et renvoye du régiment, s'il est en activité de service, par un airêtde la cour martiale, devant laquelle il sera traduit sur la dénonciation de la municipalité ou de telle autre partie plaignante; s'il ne sert point, il sera condamné par les juges ordinaires du lieu, auxquels il sera dénoncé paroi Heure t à un emprisoi nement plus ou moins long, suivant la nature de son délit.
Art. 25. Tout homme de recrue qui, se repentant de s'être engagé, voudrait, avant la ratification, faire annuler son engagement, san- cepen-~ 4ant pouvoir aitaq-ut r sa validité, ne pourra y parvenir qu'en portant sa demande à ce moment à la municipalité; celle-ci, mais en pro ses e seulement du commissaire des guenres, s il y en a, ou à son défaut d'un officier, n'tinp rte sde quel grade, soit en activité, bdt reiiré du service, appelé à cet effet, .ainsi qu'en la présence du recruteur, en pronouctïa ia résiliation aux
conditions prescrites ci-après : une fois la ratification consommée, l'homme de recrue, pour faire annuler son engagement, sera tenu de se conformer a x dispositions qui seront prescrites ci-après .pour les congés de grâce.-
Art. 26. Tout homme de recrue qui désirera, conformément aux dispositions de 1 article précédent, se faire restituer son engagement, ne pourra le faire qu'en remettant sur-le-Champ au recruteur la somme reçue comptant par lui en s'engageant, et stipulée sur son engagement, ainsi que la somme de cinquante livres pour indemnité des faux frais de recrutement. Eu remettant par lui ces deux sommes, le recruteur, sous aucun prétexte, ne pourra en exiger davantage, ni se refuser à lui remettre son engagement.
Art. 27. La municipalité, en annulant ainsi cet engagement, en fera mention sur son registre, et cette mention sera signée par le commissaire des guerres, ou l'officier, appelé pour le suppléer ainsi que par le recruteur.
Art. 28. Toutes conventions portées dans les engagements ou faites verbalement, tendant à les annuler, en restituant les sommes reçues dans un temps fixé, ainsi que toute promesse d'une solde plus forte que celle établie par les décrets, ou d'un gracie quelconque en arrivant au régiment, sont défendues sous peine de nullité de l'engagement.
Art. 29. Tout recruteur, convaincu d'avoir engagé un homme pour un autre régiment que le sien, sera puni, savoir :
L'officier, le sous-officier et le soldat en activité de service, par un mois de prison à son arrivée au régiment, auquel il sera renvoyé aussitôt ;
Le militaire retiré du service, ou le citoyen recrutant pour quelque régiment, par la même peine prononcée comme pour fait de police par la municipalité.
Art. 30. Un soldat de recrue engagé pour un régiment ne pourra être, sous quelque prétexte que ce soit, cédé à un autre recruteur par celui qui l'aura engagé, quand bien même ce serait de gré à gré, à moins que cet échange ne soit constaté à la municipalité et inscrit sur son registre à l'article de l' ngagementde cet homme. Ceux qui le feraient, sans cette formalité, seront punis comme s'ils avaient engagé pour un autre régiment.
A t. 31. Aucun recruteur, sous aucun prétexte que ce soit, ne pourra faire arrêter un recrue avant la ratification de son engagement; mais après, s'il croyait avoir quelque raison de s'assurer de sa personne, il sera tenu de s'adresser à la municipalité, laquelle, après avoir reconnu valables les raisons dudit recruteur, pourra ordom er la détention dudit homme de recrue, à la subsistance duquel le recruteur sera tenu de pourvoir dans les prisons pendant tout le temps qu'il devra y rester; ce qui ne pourra excéder quinze jours.
Daus les cas de nécessité, absolument indispensable, pourront néanmoins les recruteurs faire ^emprisonner sur-le-champ leurs soldats de recrue; mais ils seront obligés d'en rendre compte aussitôt à la municipalité, qui prononcera dans les vrugt-quatre heures, ou la continuation de la détention, u l'élargissement de l'homme ainsi arrêté, et même la punition du recruteur, s'il l'avait f. it emprisonner injustement.
Ait. 32. !Bès qu'un recruteur sera entré en pourparler avec un homme pour l'engager, aucun
aulre ne pourra le traverser dans sa négociation, et il ne cherchera pas par des promesses faites en cachette, ni ouvertement, à l'attirer à lui, sous peine d'être puni par la municipalité sur la dénonciation qui lui en serait faite; mais il pourra avoir le droit de traiter avec lui dès qu'ils seront séparés.
Art. 33. S'il s'élevait des contestations pour raison des engagements, soit entre les recruteurs et les hommes engagés, soit entre les recruteurs de différents régiments, les uns et les autres seront tenus de s'adresser à la municipalité, qui jugera de la validité de l'engagement, mais en présence seulement du commissaire des guerres, s'il y en a, ou à son défaut, d'un officier, n'importe de quel grade, appelé conformément aux dispositions de l'article 18 ci-dessus.
Art. 34. S'il s'élève quelques difficultés entre les municipalités et les recruteurs, commissaires des guerres ou officiers appelés pour juger de la validité des engagements ou de leurs restitutions, les contestations, sur l'appel du recruteur, du commissaire des guerres ou de l'officier appelé, seront portées devant le directoire du département, qui prononcera définitivement, mais en présence seulement du commissaire-ordonnateur du département, ou de celui qui en fera les fonc tions.
Art. 35. Les recruteurs ainsi que les recrues, dont les engagements auront été ratifiés, seront toujours immédiatement sous les ordres des com mandants militaires, dans les villes où il y en aura d'établi, et leur seront en conséquence su bordonnés pour tout ce qui pourra intéresser la police et la discipline militaire.
Art. 36. Sa Majesté sera suppliée de prescrire par ses règlements les précautions ultérieures qu'il lui plaira d'ordonner, soit aux maréchaussées, soit aux commandants employés en sou nom, soit aux régiments mêmes relativement au service des recruteurs et à leur comptabilité, ainsi que relativement aux recrues, à leurs envois, à leurs conduites aux régiments, à leurs admissions ou à leurs rejections.
TITRE IV.
Des rengagements.
Art. 1er. Tout sous-officier ou soldat, tant dans l'infanterie que dans les troupes à cheval, qui sera reconnu en état de continuer ses services,
et qui aura servi de manière à faire désirer de le conserver, sera admis à se rengager de nouveau pour 2 ou 4 ans au plus; c'esi-à-iire pour un quart ou un demi-rengagement de 8 ans, le tout à son choix; et il pourra le faire lor-qu'il ne lui restera plus que 2 ms de service de son engagement ou rengagement courait; il pourra le faire aussi pour 4 ou pour 8 ans, de même à s >n choix, mais dans le morne t seulement où il serait dans le cas d'obtenir son congé absolu.
La demande en sera faite en son nom au conseil d'administration du régiment, qui pro on-cera en conséquence sur l'acceptation ou sur le refus.
Art. 2. Les prix des rengagements seront payables de deux manières, au choix de l'homme rengagé, ou en argent comptant o \ en une haute paye pendant toute la du ée du rengagement; ils seront les mè nes pour to is les grades; il sera en conséquence et nul é sur le certificat d j rengagement, si la valeur en a été couveuue payable en arg nt ou en haute paye.
Art. 3. Les prix des rengagements en argent, ainsi que les hautes pay» s qui ^n seront re >ré-sentatives, augmenteront progressivem mt du premier au second, et du second au troisième rengagement, c'est-à-dire de 8 ans en 8 ans ; le troisième rengageai nt qui n'aura lieu qu'après 24 ans de service révolu, ne sera plu qua muel.
Art: 4. Les rengagements pour 1 ans s *ront touiours payés comptant en totalité, au moment où l'homme aura obtenu la permission de se rengager.
Ceux de 4 ans, lorsqu'il se feront deux ans avant l'expiration des services, le seront par moitié au moment du rengagement, et l'autre moitié, en commençant le s rvice qui en résultera.
Ceux de4*ans, eontraet s au moment d'obtenir le congé à la fin d - l'engagement courant, -eront pavés comptant à l'homme en se rengageant.
Ceux pour 8 ans, contr ctés à la mêm époque, le seront moitié comptant au moment nême, et l'autre moitié en comm nçant la quatième anr ée du rengagement, ou mêm^ en totalité en le contractant, si l'homme l'exigeait absolum ni.
Art. 5. Les hautes payes représentatives du rengagement commenceront à être payées du jour de l'expirât on des premiers Services.
Art. 6. Les rengagements, ta iten argent comptant qu'en hautes payes représentatives, seront tixé3 pour toutes les â mes ainsi qu'il suit3 savoir :
Infanterie française, étrangère
légère... j
rabiniers
Dragons, chasseurs, hussards............. 2®
EN ARGENT COMPTANT. ES HAUTES PAYES. 1
pour 8 ans. par an. par jour. par an.
livres. il s. s. d. 1. s. d.
rengagement............ 100 12 10 » 9 13 13 9
— 130 16 5 1 » 18 5 »
_ 20 » 1 6 27 7 6
rengagement............ 120 15 » » 11 16 14 7
— ............ 150 18 15 1 2 21 5 10
x 24 » 1 8 30 8 4
rengagement.,........... 110 13 15 » 10 15 4 2
— ............ 140 17 10 1 1 19 15 5
21 » 1 7 28 17 11 -
Art. 7. Les hautes payes représentatives des | mois, d'après des états particuliers arrêtas par rengagements seront acquittées à la fin de chaque | chaque capitaine, et payées sur les fonds desàués
au recrutement du régiment, en raison du nombre de jours de chaque mois; elles seront toujours remises à l'homme même, et seront à sa libre disposition.
Art. 8. Le montant de ces hautes payes sera cumulé avec la solde de l'homme, pour établir le calcul des grâces dont il pourrait être susceptible pour sa retraite, lorsqu'il les aura préférées aux rengagements payés comptant. Ceux qui en auraient touché la valeur de celte dernière manière ne seront point admis à réclamer la cumu-lation des hautes payes dont ils auraient pu se trouver susceptibles par leurs rengagements.
Art. 9. Aucun grade obtenu ne rengagera plus désormais dans aucune arme. Ceux néanmoins qui se trouveraient dans ce cas en exécution de l'ordonnance du 20 juin 1788, concernant le recrutement, resteront assujettis aux rengagements contractés en conséquence, comme ayant reçu en indemnité le prix stipulé pour ce rengagement par cet e ordonnance.
Art. 10. Les adjudants dans toutes les armes, les sergents-majors dans l'infanterie française, étrangère, légère et'suisse, ainsi que dans l'artillerie, les mineurs et les ouvriers, les maréchaux des logis en chef dans toutes les troupes à cheval, ne seront plus engagés à compter du jour où ils parviendront à ce grade, et ils seront libres d'abandonner ces emp oîs de la même manière que Ie3 officiers au moyen de leurs démissions, et dans la forme qui sera prescrite pour ceux-ci.
. En acquérant ainsi leur liberté, ils ne seront pas tenus d; rendre la somme qu'ils auraient pu recevoir pour le re igagement auticipé qu'ils auraient pu contracter; mais ils cesseront, à compter de ce jour, de jouir de la haute paye qu'ils auraient pu obtenir à ce titre.
Les présentes dispositions auront leur effet, à compter du jour de la publication du présent décret, en faveur de tous ceux revêtus à présent de ces grades.
Art. 11. Tout soldat qui se rengagera dans un autre régiment conservera les droits résultant de l'ancienneté de ses premiers services pour l'acquisition des droits de citoyen actif, pour la vétérance, le rengagement annuel, pourvu qu'il se rengage dans l'année qui suivra l'expédition de son «congé absolu ; passé cette époque, il perdra ses droits à des giâces qui ne peuvent s'obtenir que par des services sans interruption.
Il en sera de même pour tout soldat qui, ap;ès àvoir obtenu son congé absolu, se rengagerait dans le régiment duquel il serait sorti, selon qu'ii le fera avant ou après l'expiration de l'année; dans l'un et l'autre cas, l'intervalle du temps entre le congé et le rengagement ne sera pas compté pour obtenir ces grâces.
Art. 12. Quoiqu'un soldat, ayant déjà sérvi dans un régiment, puisse être dans le cas de conserver dans un autre les droits acquis en raison de ses services précédents, il ne prendra néanmoins rang, dans la compagnie où il entrera, que du jour de son arrivée, et ne pourra parvenir aux hautes payes qu'à son rang d'ancienneté dans cette compagnie.
Tout soldat, sorti d'un régiment et qui s'y rengagera avant l'expiration de trois mois, "y reprendra son rang d'ancienneté; passé cette époque, il ne sera plus admis à cette faveur, quand bien même,rengagé avant la fiii de l'année, ii ne devrait pas perdre le fruit de ses services précédents.
Art. 13. Tous les rengagements seront faits
dans une forme uniforme qui sera prescrite par les règlements; ils seront signés par l'homme; il lui sera remis un billet de rengagement, les uns et les autres seront imprimés.
TITRE V.
Des congés d'ancienneté, des réformes
et des dégagements.
Art. 1er. En temps de paix, les congés absolus seront toujours expédiés au jour même de l'expiration des services résultant des engagements, rengagements ou restitution de temps d'absence pour ceux qui y auraient été condamnés après avoir déserté, et ils ne pourront être retardés sous aucun prétexte.
Art. 2. Eu temps de guerre, les congés absolus qui viendraient à échoir pendant la campagne, seront retardés jusqu'au moment de la rentrée des troupes dans leur quartier d'hiver. Ils seront alors expédiés aussitôt, et il sera tenu compte aux hommes dans ce cas, et par un décompte particulier, fait à cette époque, de la portion de temps, pendant laquelle leurs congés auraient été suspenuus, en les en indemnisant, d'après le tarif fixé ci-dessus par l'article 6, et en raison de la classe du rengagement qu'ils auraient été dans le cas de contracter.
Art. 3. Si les hommes, dans ce cas, préféraient la haute paye représentative du rengagement, ils seront libres de le déclarer, au moment où leur congé absolu devrait leur être expédié, et alors ils en jouiront en raison de la classe de leur rengagement, conformément au tarif de l'article 6, à compter de ce jour jusqu'à celui auquel leur congé absolu leur sera réellement expédié.
Art. 4. Les congés absolus d'ancienneté seront délivrés ainsi qu'il a été dit ci-dessus, soit que l'homme soit présent au corps, soit qu'il soit absent par^ congé ; dans ce dernier cas, on ne le forcera pas de rejoindre pour venir chercher sa cartouche ; mais alors il ne pourra pas réclamer les parties de sa solde et masse d'entretien de son absence, dont il n'aurait dû être payé que sur le rappel qui en aurait été fait à son retour, lequel rappel en conséquence n'aura pas lieu pour lui.
Art. 5. Il sera fait à tout homme congédié par ancienneté le décompte de tout ce qui devra lui revenir pour sa solde, ses hautes payes de son grade, ses six deniers de poche, et sa masse d'entretien jusqu'au jour de son départ, s'il est présent au corps, ou jusqu'au jour seulement auquel il se sera absenté, s'il est en congé; dans l'un et l'autre cas, ce décompte sera toujours détaillé sur sa cartouche.
Art. 6. Le décompte de sa haute paye de rengagement, s'il y a lieu, lui sera toujours fait jusqu'au jour de son congé absolu, soit qu'il soit absent ou présent, il en sera fait pareillement mention sur la cartouche.
Art. 7. Tout homme congédié par ancienneté emportera avec lui son habit, sa ve.4e, son chapeau, sa culotte de l'habillement courant dans l'état où ces objets se trouveront. Il sera tenu de laisser son sabre,sabuffleterie, son armement, ou de renvoyer à ses frais celles de ces parties d'armement et d'équipement qu'il pourrait avoir emportées avec lui en congé, avant de faire réclamer sa cartouche qui ne lui sera expédiée qu'après ce renvoi.
Art. 8. Toutes les parties du petit équipement, achetées sur son compte, lui appartiendront, et il géra libre d'en disposer.
Art. 9. Tout homme dans le cas d'être congédié par ancienneté, et qui se trouvera redevoir à la masse de linge et chaussure, ne pourra espérer obtenir son congé qu'après s'être acquitté envers celle masse; en conséquence, il sera tenu de continuer ses services jusqu'à ce que, par ses économies ou retenues consenties par lui, il se soit totalement libéré.
Art. 10. Tout soldat qui devra recevoir son congé absolu d'ancienneté, élant absent du régiment, commettra qui bon lui semblera pour recevoir sa cartouche au moment auquel elle lui sera due, toucher son décompte, et retirer les effets à lui appartenant ou auxquels il aurait droit par l'article 7 ci-dessus, et qu'il pourrait avoir laissés au régiment, ainsi que pour faire la remise de ceux qu'il doit laisser, et qu'il aurait pu emporter avec lu", ou acquitter les dettes qu'il pourrait avoir contractées envers la masse de linge et chaussure. Sa cartouche, son décompte, ses effets ne lui seront dans aucun cas adressés par le régiment, qui ne pourra les remettre qu'à celuf chargé de ses pouvoirs. Ceux qu'il donnera à cet effet, seront par écrit, et le régiment sera valablement déchargé par le récépissé de celui qui en sera chargé par l'homme ainsi congédié.
Art. 11. Tout homme, non porteur d'une cartouche de congé absolu à lui expédiée, sera réputé déserteur, et dans le cas d'être poursuivi comme tel, quand bien même ses services seraient expirés, sauf à la cour martiale, devant laquelle il sera traduit, à prononcer sur le cas dans lequel il pourrait se trouver ; mais il sera toujours réputé déserteur, si sa cartouche lui a été refusée, faute d'avoir remis les effets qu'il serait tenu de rendre, ou d'avoir acquitté les dettes qu'il aurait pu contracter envers la masse de linge et chaussure.
Art. 12. Tout homme de recrue, arrivé à un régiment, lorsqu'il ne sera pas admissible, soit par défaut de taille inférieure à ce qui est prescrit ci-dessus, soit pour raison de quelques infirmités, ne pourra être renvoyé que sur l'avis du conseil d'administration assemblé à cet effet. Il lui sera expédié une cartouche de réforme, et aprè3 lui avoir fourni la subsistance pendant quatre jours francs, non compris celui de son arrivée pour lui donner le temps de se reposer, il sera congédié le cinquième^ et il lui sera remis pour sa route trois sous par lieue, depuis la garnison jusqu'à l'endroit où il aura été engagé.
Art. 13. Sa Majesté sera suppliée de prescrire, par ses règlements, les différents cas dans lesquels ces faux frais devront être au compte du recruteur, et la manière de les porter en dépense sur la masse destinée au recrutement, lorsqu'ils ne devront pas être supportés par lui.
Art. 14. Aussitôt qu'un homme aura été admis dans un régiment, il ne pourra plus être réformé que par l'officier général chargé de sou inspection. Les hommes dans le cas de la réforme lui seront
Iirésentés, afin qu'il puisse la prononcer, s'il y a ieu; ils ne pourront l'être en conséquence qu êtant présent au régiment.
Art.15. Il seraexpédié à chaque homme dans ces -cas un congé de réforme qui en détaillera les causes et les motifs.
Art. 16. Tout homme à son troisième rengagement, c'est-à-dire ayant plus de vingt-quatre ans de service, ne pourra plus être réformé pour raison d'infirmités ; il sera conservé au régiment sans
faire d'autres services que ceux dont il pourrait rester susceptible, jusqu'à ce qu'il puisse obtenir les grâces qui seront dans le cas de lui être accordées d'après les règles qui seront prescrites à ce sujet.
Art. 17.Tout homme qui seraitdan? le cas d'être réformé pour une infirmité résultant d'une blessure a la guerre, ou suite de quelque accident occasionné par son service, même en temps de paix, ne pourra l'être, quel que soit son peu d'ancienneté, qu'en assurant son existence, soit par la retraite militaire, s'il est dans ce cas, soit par tout autre moyen que la bienfaisance nationale consacrera à cet effet; il restera en attendant à son régiment, en ne demeurant assujetti qu'aux services dont il pourrait être encore susceptible.
Art. 18. Tout homme réformé sera tenu de laisser au régiment toutes les parties de son habillement Courant, toutes celles d'équipement et d'armement ; son décompte lui sera fait jusqu'au jour de son départ, de même que l'homme congédié par ancienneté..
Art. 19. L'état de soldat étant devenu assez avantageux, non seulement par le traitement qui lui est accordé à présent, mais encore par les espérances d'avancement qui lui sontdonnees, pour fixer de bons sujets, et mettre l'armée dans le cas de n'en pas manquer, il sera libre à tous les soldats de toutes les armes de se dégager aux conditions qui seront prescrites ci-après lorsque leurs affaires ou leur volonté ne leur permettront pas de servir plus longtemps, leur congé absolu leur sera accordé sur la demande qu'ils en feront, iï ais seulement au moment de la revue d'inspec* tion finale de chaque année, d'après les ordres de l'officier général qui en sera chargé ; en conséquence, tout soldat qui voudra se dégager, se fera inscrire deux mois avant l'époque fixée pour cette revue : il ne sera jamais délivré de congés de grâce dans l'intervalle d'une revue à l'autre.
Art. 20. Tout homme qui obtiendra un congé de grâce sera tenu de laisser au régiment toutes les parties de son habillement, équipement et armement courant; les effets d'équipement achetés sur son compte lui appartiendront, et son décompte lui sera fait jusqu'au iour de son départ, comme aux hommes congédiés par ancienneté, sans pouvoir lui être retenu sous aucun prétexte, non plus que les effets lui appartenant.
Art. 21. Tout homme redevable de quelque somme à la masse de linge et chaussure, ne pourra être admis à obtenir son congé de grâce, qu'après s'être acquitté totalement envers cette masse.
Art. 22. Tout homme, pour obtenir son congé de grâce, sera tenu de verser préliminairement, à la caisse du régiment, le double de la somim stipulée par l'article 6 du titre Iv pour le premier rengagement de 8 ans, dans son arme, s'il a plus de 4 ans de service à faire encore, et une somme pareille seulement, s'il ne lui reste pas ce temps a finir de son engagement courant, soit que les services qui lui resteront à remplir proviennent de son premier engagement ou des rengagements qu'il aurait pu contracter.
Art. 23. Si l'homme qui voudra ainsi se dégager est en congé, il ne sera pas obligé de rejoindre
f>our obtenir sa cartouche. Il pourra en former a demande par écrit : mais, dans ce cas, il faudra que sa demande soit constatée, que les sommes qu'il devra remettre soit pour son dégagement, soit pour acquitter les dettes qu'il pourrait avoir envers la masse de linge et chaussure, soient dé-
posées, et que la remise qu'il devra faire des pariies d'habillement et d'« quipement, ainsi qu'il est dit à l'article 20 ci-dessus, soit effectuée avant l'expiration du congé en vertu duquel il se serait absenté; sinon il sera réputé déserteur, comme congé outrepassé à l'époque précise, qui >era déterminée par les décrets concernant la désertion, sans pouvoir être admis ensuite à réclamer son congé de grâce, ni à pouvoir se justifier, en annonçant qu'il en avait fait la demande, si elle n'est pas constatée auparavant. Aussitôt qu'elle le sera au régiment, dans les formes prescrites ci-dessus, il lui en sera expédié une reconnaissance par le régiment, laquelle lui servira de congé pour rester chez lui jusqu'au moment de la revue, époque à laquelle seulement sa cartouche de grâce lui sera expédiée en la remettant, ainsi que son décompte et ses effets personnels, à celui qu'il aurait chargé de ses pouvoirs pour les r« tirer, conformément à ce qui a été prescrit ci-dessus pour les congés d'ancienneté à expédier aux hommes en congé.
Art. 24. Les recrues non rejoints, ma'S dont rengagement aurait été ratifié, lorsqu'ils voudront se dégager, seront assujettis aux mêmes formalités, et aux mêmes obligations ; mais ils seront obligés de verser les sommes qu'ils devront remettre entre la mains des recruteurs pour constater leur demande.
Ceux-ci, après les avoir reçues, en rendront compte aux régiments qui en expédieront à ces hommes une recon naissance qui leur servira pour leur sûreté personnelle,en attendant l'expédition de leurs cartouches de congés de grâce, qui ne pourra leur être faite que par les ordres deloffi-.cier général au moment de sa revue finale, en la remettant à ceux qu'ils auront chargés de leurs pouvoirs pour la retirer.
Art. 25. Lorsqu'une demande de dégagement auraé!éaccompagnéedetou!e8lesformalités prescrites ci-dessus, elle sera enregistrée et présentée à l'officier général pour y faire droit, et,après l'expédition du congé, le régiment sera valablement déchargé de la remise de la cartouche, du décompte et des effets, par le récépissé du porteur des pouvoirs de l'homme ainsi dégagé.
Art. 26. Tout homme qui obtiendra son congé de grâce, étant absent, n'aura droit à réclamer .F on décompte que de la même manière presrrite, pour les hommes congédiés par ancienneté, par les articles 5et 6 du présent titre.
Art. 27. Les cartouches des congés de grâce seront signées de tous les membres du conseil d'administration et de l'inspecteur ; elles exprimeront en toutes lettres la somme qui aura été payéeen raison des années de services restai t à faire, le montant du décompte à lui remis, etc.,etc.
Art. 28. Les services précédents de touthumme qui obtiendra son congé de grâce, ne lui seront point comptés dans un autre régiment, quand bien même il s'y rengagerait tout de suite; mais il reprendra ses droits et son rang dans le régiment dont il sera sorti, s'il s'yrengage dans l'année de son dégagement.
Art. 29. Les cartouches de congé d'ancienneté, de réforme, de grâce ou de renvoi, seront imprimées dans une forme uniforme, timbrées du nom du régiment. Les motifs du congé y seront exprimés clairement.
. Eiles seront blanches pour ceux d'ancienneté, de réforme et de grâce ; elles continueront d être jaunes pour ceux du renvoi, mais les congés de cette dernière espèce ne pourront être donnés que par un jugement de la cour martiale, et pour les
cas prescrits par les décrets concernant les peines et délits militaires. Les sergents-majors, maréchaux des logis en chef n'étant plus engagés, non plus que les adjudants, il ne leur sera point expédié de cartouche lorsqu'ils voudront se retirer dans ce grade ; il leur sera délivré seulement un certificat de service pour attester qu'ils en étaient revêtus.
Art. 30. Sa Majesté sera suppliée de prescrire plus particulièrement, par ses règlements, les autres formalités de détails pour'l'expédition des différentes espèces de congés absolus, ainsi que pour la surveillance, à ce sujet, qu'il lui plaira de prescrire aux commissaires des guerres chargés des revues et police des troupes.
La discussion du projet de décret est ouverte sur le titre premier (1).
L'article premier est adopté comme suit :
« L'A-sembiée nationale, ayant entendu le rapport de son comité militaire "sur le recrut ment des troupes de ligne, les rengagements, les dégagements et les congés, décrèie :
TITRE PREMIER.
Art. 1er.
« Tous les officiers, sous-officiers et soldatsde toutes les armes en activité de service ou attachés à quelques régiments, pourront se livrer au travail des recrues, dans le. lieu de leur domicile ou de leur résidence; mais ils ne pourront le faire que pour le régiment même dans leiu 1 ils serviront, sans pouvoir jamais, et sous aucun autre prétexte, engager aucun recrue pour un autre régiment. »
Art. 2.
« Tous les officiers, sous-officiers et soldats de toutes les armes retirés du service, ainsi que tous particuliers de quelque état qu'ils soient, pourront également se livrer à ce travail dans le lieu de leur domicile ou de leur résidence; mais ils ne pourront le faire qu'en vertu d'une commission expresse pour recruter, à eux donnée par le conseil d'administration d'un régiment; ils ne pourront recevoir de pouvoir de plusieurs à la fois, et ils ne pourront, sous aucun prétexte, engager pour aucun autre que pour celui qui les y aurait autorisés. »
Le comité a beau faire, ces principes-là ne seront jamais très stricts, et je prétends que ce qu'il a fait là condamne beaucoup d'excellents serviteurs, beaucoup de gens qui voudraient se vouer au service, à rester dans l'oisiveté, et que la proposition est dans la force du terme absurde. Je conclus à ce qu'on puisse engager des hommes et pour la cavalerie et pour l'infanterie.
Plusieurs voûJ.'Non! non!
Eh I Messieurs, quand on a parlé des procureurs, je ne m'ensuis pas
mêlé, je vous ai écouté... Jeconclusà ce qu'on donne une extension de
pouvoir à un homme qui se proposera pour engager des hommes de bonne
volonté, et qu'il puisse engager pour plusieurs corps.
Un membre propose un amendement, sur l'article 3.
L'article 3 est adopté, sauf rédaction, comme suit :
Art. 3.
« Indépendamment de ces deux espèces de recruteurs, les conseils d'administration pourront, s'il leur paraît nécessaire,détacher en outre, dans les villes ou dans les départements, des officiers, sous-officiers et soldats recruteurs; mais ils seront tenus de leur délivrer à cet efset des commissions et pouvoirs, sans lesquels ils ne pourront être autorisés à s'occuper de ce travail. »
L'article 4 du projet de décret est rejeté.
propose, par amendement à Particle 5 du projet, que le certificat ne soit délivré que sur le vu de la commission donnée.
. L'article 5 du projet, devenu article 4, est adopté en ces termes :
Art. 4. (ancien art. 5.)
« Tous les officiers, sous-officiers et soldats en activité de service ou retirés, tous les particuliers autorisés à recruter dans le lieu de leur .domicile ou de leur résidence, ainsi que tous officiers, sous-ofticiers ou soldats détachés de leur régiment à cet effet, conformément aux dispositions des articles 1, 2 et 3 ci-dessus, seront tenus, avant de se livrer au travail des recrues, de déclarer au commandant militaire, et au commissaire d js guerres, s'il y en a, et, en outre, à la 'municipalité du lieu, et au directoire de district, l'intention dans laquelle ils sont de s'en occuper, le nom du régiment pour lequel ils travailleront, et de leur demander toutes les permissions nécessaires en conséquence. La municipalité, sur le vu de leurs pouvoirs visés par les directoires des districts, ou après avoir reconnu leurs droits, résultant de l'activité même de leurs services, leur délivrera, sans pouvoir le refuser, un certificat de recruteur, et les enregistrera comme étant autori-és, à cet effet, pour tel régiment nominativement; en conséquence, tous les engagements faits par des individus non enregistrés à la municipalité, ou, par eux, pour d'autres régiments que pour ceux pour lesquels ils auraient été inscrits, seront déclarés nuls et de nul effet. »
Les articles 6 et 7 du projet de décret, devenus les articles 5 et 6, sont adoptés comme suit :
Art. 5 (ancien art. 6).
« Les engagements qu'ils feront contracter ne seront réputés valables qu'autant qu'ils seront passés dans les formes prescrites, et qu'ils auront été ratifiés avec les formalités qui seront ordonnées ci-après.
Art. 6 (ancien art. 7) »
« Tous les officiers, sous-officiers et soldats employés au travail des recrues, quoique non domiciliés habituellement dans le lieu, seront assujettis à tous les règlements de ville et de police comme les autres citoyens, et le seront en outre à tetis ceux de cette espèce qui pourraient être faits particulièrement, concernant les recruteurs,
par les corps administratifs des lieux où ils seront employés, ainsi qu'aux dispositions qui seront pres rites ci-après pour assurer l'ordre de leur travail. »
Un article 7 nouveau est adopté comme nuit :
Art. 7 (nouveau).
« 11 ne sera plus exigé des officiers aucun homme de recrue, comme conditions essentielles de leurs semestres, congés, ou de leur admission au service; il ne leur sera plus fait en conséquence aucune retenue en raison des hommes qu'ils n'auraient pas engagés. »
Un membre demande que les commissions des recruteurs ne soient pas visées par les administrateurs.
Plusieurs membres proposent que les officiers soient tenus de faire des reerue3.,
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer présentement sur ces propositions ni sur les autres articles du titre Ier.
L'Assemblée passe à l'examen du titre II en commençant par l'article 2.
Je trouve que l'âge que vous propose le comité dans son titre II pour l'admission au grade de soldat n'est pas assez considérable, parce que le métier de soldat, même en temps de paix, exige un corps développé et propre à la fatigue. L'armée étant une partie de la force publique destinée spécialement à repousser l'ennemi du dehors, il faut donc qu'elle soit, même en temps de paix, composée d'éléments qui p lissent la readre efficacement utile en temps de guerre. J'ajoute, Messieurs, que vos décrets ayant amélioré l'état militaire, nous verrons beaucoup de gens aisés placer à l'avenir leurs enfants au service; ils verront avec regret des jeunes gens, à l'âg1 de 16 ans, sortir de dessous leurs yeux, sans être pénétrés des sentiments civiques qu'ils chercheraient à leur inspirer.
Je trouve donc, Messieurs, que des considérations morales se réunissent à des considérations physiques pour trouver l'âge de 16 ans trop jeune. Je demande donc que l'on y substitue l'âge de 18 ans.
D'après les moyens que vous avez donnes aux soldats pour passer par les différents grades de l'armée, vous feriez une chose impolitique, en ne les recevant qu'à l'âge de 18 ans, vous retarderiez leur avancement de 2 ans ; il faut donc chercher un moyen de concilier l'intérêt de l'individu, et celui des parents; c'est pourquoi je demanderais que l'homme qui s'engage à 16 ans, ne le fasse que du consentement de ses parents, et à 18 ans de sa pleine volonté.
Ce n'est qu'à 18 ans que vous aurez des hommes formés. Ge que vous avez décrété pour les gardes nationales, ordonnez-le pour un service plus rigoureux; ne nous exposez point, nous pères de familles, surtout dans les provinces frontières qui ne sont à proprement parler que de grands camps retranchés, ne nous exposez point à toutes les séductions qui assiègent nos enfants ; ne portez pas le désespoir et la désolation dans nos familles en nous
arrachant ce que nous avons de plus cher. J'appuie la motion de M. Dubois-Crancé. (Applaudissements}.
Je demande que le consentaient des pères et mères ne soit point "nécessaire pour engager le3 jeunes gens qui n'auront point atteint l'âge de 18 ans, mais qu'il leur soit seulement permis de réclamer lesdits jeunes gens dans les trois mois, à charge de rembourser l'argent que ceux-ci auraient reçu.
Un membre demande que le consentement des parents soit obligatoire jusqu'à l'âge de 21 ans.
(La question préalable est demandée sur les amendements.)
: {L'Assembléeadopte l'amendement deM.Dubois-Crancé et rejette les autres amendements.)
, rapporteur. C'est changer toutes les dispositions du titre II. Je demande que l'Assemblée en reste là et renvoie la discussion. Je me contenterai de dire que c'est le moyen de ne plus avoir d'armée.
Je propose que l'on puisse s'engager jusqu'à 40 ans en temps de paix, et 45 en temps de guerre.
(Cette motion est adoptée.)
Je demande pour plus de clarté qu'il soit dit que celte disposition relative à l'âge n'aura lieu que pour l'avenir.
(Cette motion est adoptée.)
Un membre propose de décréter que tout engagement contracté avant l'âge de 18 ans, sans le consentement des père, mère, tuteur et curateur, sera déclaré nul.
(Cette motion est décrétée.)
, rapporteur. Voici quelle serait la rédaction de l'article avec les amendements que vous venez d'adopter :
TITRE II.
Des recrues.
Art. 1er (ancien 2).
Dans toutes les troupes, on n'engagera à l'avenir des recrues que depuis l'âge de 18 ans accomplis, jusqu'à celui de 40 en temps de paix, et 45 en temps de guerre, pourvu toutefois que ceux qui auront ce dernier âge aient précédemment servi, et qu'ils soient encore eu état de remplir la durée entière d'un engagement. Ceux qui s'engageront avant l'âge de 18 ans ne pourront, malgré les dispositions de l'article ci-dessus, le faire que du consentement de leurs pères ou mères, ou tuteurs ou curateurs, s'ils en ont; sans ce consentement, l'engagement sera nul ; à 18 ans, ils le pourront sans aucune intervention de famille, et ils ne seront plus admis à aucune réclamation. Les présentes dispositions n'auront point d'effet rétroactif pour les soldats déjà engagés dans l'armée.
(Cet article est adopté.)
Le comité de Constitution me fait savoir qu'il ne pourra faire le rapport sur les municipalités centrales, qu'il avait annoncé dans la séance de ce matin.
Un membre du comité d'imposition expose que,
si l'Assemblée ne détermine pas la somme qui doit être imposée en masse, il sera impossible au comité de présenter la plupart des rapports qu'il a à faire.
Un membre propose que l'état des dépenses pour l'année 1791 soit mis à l'ordre du jour de demain.
(Cette motion est décrétée.)
Un membre propose de mettre également à l'ordre du jour deux rapports du comité féodal et la suite du recrutement.
(Cette motion est décrétée.)
Messieurs, M. le président du comité ecclésiastique a fait parvenir une note dont il désire que communication soit donnée à l'Assemblée.
Elle est ainsi conçue :
« Le sieur Parladelle, commandant la garde nationale à Vellonne, frontière de la comté de Clinge, duché de Luxembourg, a arrêté, avec la milice nationale, une charrette chargée de 8 bal-lois remplis d'ornements d'église, provenant de la communauté des Prémontrés de Saint-Paul-de-Verdun, et passant sur les terres de l'Empire ; le dépôt d'arrestation a été fait au district de Stenay. Le sieur Parladelle en a fait le rapport au comité ecclésiastique de l'Assemblée nationale. » (Applaudissements.)
M. le Président lève la séance à dix heures.
présidence de m. riquetti de mirabeau l'aîné.
Séance du mercredi
La séance est ouverte à neuf heures et demie du malin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture des procès-verbaux des séances d'hier au matin et au soir, qui sont adoptés.
Il est fait lecture des adresses suivantes :
Adresse de la Société des amis de la Constitution séant à Ëéziers, contenant un exemplaire de l'alliance qu'elle a contractée le 23 janvier dernier, en séance publique, avec la garde nationale, le régiment de Médoc, en garnison en cette ville, et la gendarmerie nationale.
(L'Assemblée nationale ordonne qu'il en sera fait mention honorable dans le procès-verbal.)
Adresse d» directoire du département de la Côte-d'Or, contenant une délibération de la 6e compagnie du 7e bataillon de la garde nationale de Dijon, qui, d'après la détermination prise par les volontaires de cette ville, de se porter partout où le besoin le requerrait, s'offre à faire, dans ce cas, le service extraordinaire* dont les volontaires sont chargés seuls.
Lettre de M. Cipières, député de Marseille, qui, ayant obtenu un congé de l'Assembl ée pour vaquer à ses affaires, demande sa démission.
(L'Assemblée en ordonne le renvoi au comité de vérification.)
Etat envoyé par la municipalité de Lyon, des fonctionnaires publics de ladite ville, en nombre considérable, qui ont prêté le serment prescrit par les décrets.
Extrait des registres de la municipalité de Sau-mur, qui atteste que plusieurs ecclésiastiques, fonctionnaires publics et du collège, ont fait leur serment civique, conformément a la loi.
Extra t des registres du directoire du département de Rhône-et-Loire, oui constate que lors de la crue subite de la Loire, qui a causé de si grands maux dans ce canton, le sieur Duplain a sauvé, au péril le plus imminent de ?a vie, celle de plus de 25 à 30 personnes près de périr dans le torrent débordé.
(L'Assemblée en ordonne le renvoi au comité des finances).
Adresse du directoire du département de la Gironde, en laquelle est appuyée une pétition des volontaires formant la cavalerie nationale de Bordeaux, à l'effet d'être conservés.
(L'Assemblée en ordonne le renvoi au comité de Constitution;et au comité militaire.)
Adresse de M. du Bourg, curé de Saint-Benoît-sur-Seine, qui fait hommage à l'Assemblée d'un discours patriotique qu'il a prononcé dans l'assemblée des amis de la Constitution de la ville de Troyes.
Adresse de MM. Dupuis, ci-devant chanoine de la collégiale de Cervon, département de la Nièvre, et Loisel, ancien vicaire, qui prêtent entre les mains de l'Assemblée nationale leur serment civique.
Adresse du directoire du district de Pont-de-Vaux, département de l'Ain, contenant un ouvrage intitulé : Réflexions impartiales sur la constitution civile du clergé de France, par un curé du département de VAin. Il annonce que la distribution de cet ouvrage a produit le meilleur effet; que la très grande partie des curés de ce district a prêté le serment ; que les biens nationaux se vendent avec le plus grand succès, et que leurs ventes seront consommées le 15 mai; que les impôts se payent fort exactement, et que tous s'empressent d'obéir aux décrets de l'Assemblée.
Adresse des municipalités de Villeneuve-Saint-Georges, département de Seine-et-Oise, de Lasuy-sur-Marne, Martigues, département des Bouches-du-Rbône, des villes d'Ervy, département de l'Aube, de Troyes, de Saint-LÔ, de Saint-Paul-Trois-Ghâteaux, district de Montélimart, département de la Diôme; d'Angoulin> district delà Rochelle, département de la Charente-Inférieure; d'un vicaire de la ville d'Hyères, département du Var, qui annoncent que les curés et autres fonctionnaires publics de ces différentes paroisses et villes ont prêté leur serment civique.
Autres adresses du curé de S;iint-Pierre-en Vallée, de la ville d'Auxerre ; du curé de Van-dœuvre, district de Bar-sur-Aube, département de l'Aube ; et du curé de là Coste, district de LodèVe, département de l'Hérault, qui font hommage à l'Assemblée des discours qu'ils ont prononcés lors de la prestation de leur serment civique.
Ces discours respirent la piété la plus solide, et le patriotisme le plus pur.
Un membre annonce que la seconde adjudication des biens nationaux faite le 26 janvier dernier, dans le district de Clermont-en-Argonne, département de la Meuse, monte à 302,405 livres.
L'estimation, d'après les baux, était de 170,793 livres; l'excédent est conséquemment de 131,612 livres.
Messieurs, il est dans l'intention de l'Assemblée nationale que les fonctions des juges qui composeront la haute cour nationale ne durent que deux années ; mais encore faut-il le dire dans le décret que vous avez ren lu hier.
Je propose en conséquence que, par un article additionnel, l'Assemblée nationale décrète que les juges qui composeront la haute cour nationale ne soient que deux ans en fonctions et soient renouvelés à chaque législature.
Il n'y a pas un mot de cette disposition dans les articles décrétés hier.
Je ne crois pas qu'il faille dire ce que M. Bouche propose ; car il n'a pas été dans l'intention du comité de Constitution de dire que, lorsque les quatre grands juges seront nommés, ils le seront pour deux ans. Il y a un juré qui jugera des crimes de lèse-nation et c'est quand il y aura dès crimes de lèse-nation que l'on choisira alors parmi les juges du tribunal de cassation quatre grands juges, et, dans la législature, quatre procureurs; mais jamais il ne doit y avoir dans la cour nationale de président, ni de procureurs généraux de la nation pour un temps déterminé. Il n'y a point de juré pour un cas particulier.
Je demande l'ordre du jour.
(L'ordre du jour est décrété.)
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre adressée à M. le Président de l'Assemblée par les juges du tribunal du district d'Aix, et qui est ainsi conçue (1):
« Messieurs, nous n'avons vu qu'avec une surprise mêlée d'indignation, les plaintes qui ont été présentées à l'Assemblée nationale sur la prétendue rigueur exercée envers les prisonniers impliqués dans l'affaire d'Aix. M. Rewbell avait raison de dire qu'avant de statuer sur ces plaintes, il fallait vérifier si elles étaient fondées.
« Nous nous devons à nous-mêmes d'aller au-devant de ces inculpations, que l'on a insérées dans les papiers publics et peut-être à dessein. Nous vous adressons à cet effet la copie d'une lettre que le corps des officiers du régiment de Lyonnais nous a écrite le 21 de ce mois, elle ren ferme la preuve que notre humanité a adouci aux prisonniers la rigueur de leur prison.
« Nous espérons de la justice de l'Assemblée nationale qu'elle permettra que notre justification et la preuve que nous en rapportons soient mentionnées dans son procès-verbal ; il est juste que le même dépôt renferme le tableau des dénonciations et de leur fausseté.
« Janvier 1791. »
Suit la lettre des officiers du régiment de Lyon* nais aux juges du tribunal du district d'Aix :
« Messieurs,
En vous appelant à la respectable fonction de juges, vos concitoyens
vous ont donné la preuve la moins équivoque de leur confiance et de leur
estime. Nous partageons avec eux ces sentiments qui vous honorent, et
rassurés par vos vertus, comme par notre innocence, nous vous prions,
Messieurs, de hâter le jugement de nos camarades, prisonniers à Aix :
qu'ils vous doivent, avec la liberté, le retour de la confiance publique
qu'ils ne méritèrent jamais de perdre. Nous vous dé-
« Nous sommes avec respect, Messieurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs,
« Les officiers du régiment de Lyonnais,
« Signé : Lavolvène, de Pebeyre, Meunier, Lar-chautel, Laselve, Villesac, Martillac, Dufournay, Guiran, de Codeville, Gardaillac, Saint-André, Saint-Franguecize, Desparbès.
« Tarascon, le 21 janvier 1791. »
Un membre : Je demande l'insertion de cette lettre clans le procès-verbal.
J'ai dit à l'Assemblée nationale que les prisonniers d'Aix sont traités avec toute la douceur convenable. Gomme c'est moi qui ai dit qu'à Marseille on avait refusé un conseil aux détenus, jusqu'au moment où je parlais, et qu'on semble par cette lettre vouloir infirmer ce que j'ai dit; que, d'un autre côté, M. le garde des sceaux a chargé les commissaires qui sont dans cette ville de vérifier l'état des prisonniers; que si les nouvelles que j'ai reçues étaient fausses, je serais le premier à rendre nommage à la vérité; je demande, en consentant très volontiers à l'insertion au procès-verbal, que cette lettre soit renvoyée au comité des recherches qui est déjà chargé de cette affaire, afin que, sur le rapport des commissaires que le roi a chargés de vérifier les faits, il soit décidé définitivement si j'ai eu tort ou raison, ou, pour mieux dire, si les prisonniers étaient bien ou mal dans 'les prisons.
(L'Assemblée décrète l'insertion au procès-verbal de la lettre des officiers du régiment de Lyonnais et le renvoi de l'affaire au comité des recherches.)
Plusieurs membres du comité de Valiénation des domaines nationaux proposent plusieurs ventes, qui sont décrétées de la manière suivante: « L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites par les municipalités de Sirnard, Ainay-le-ûuc, Montigny-sur-Aube, Poinçon, Tranhaui, d'Arcey, Jouys, ,Villeroy, Enville, Sézanne et Blois, en exécution des délibérations prises par le conseil général de leur commun^, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines ^nationaux, ceux dont les états sont annexés à la "minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des évaluations ou estimations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décréiée le 31 du-dit mois de mai dernier, déclare vendre les biens ci-dessus mentionnés, aux charges, clauses et conditions portées par ledit décret, savoir :
A la municipalité de Sirnard, pour......
A celle d'Ainay-le-Duc. . A eelle de Moniigny, . . A celle de Poinçon. . A celle de Tranhaut. . . A celle ue d'Arcey. . . . A celle de Jouys, département de la Meuse. . . A celle de Villeroy . . .
14,985 1. 5 s. d.
17,232 15
4,528 4 -
15,033 14
33,002 6
15,210 6
15,983 » »
12,696 » »
A celle d'Enville .... 30,618 2 8 A celle de Sézanne, département de la Marne. 697,835 8 2 A celle de Blois, département de Loir-et-Cher. . 226,648 4 7 A la même, même département ........ 2,924,868 17 9
« Le tout ainsi qu'il est plus au long détaillé dans les procès-verbaux d'estimations, et payable de la manière déterminée par les décrets. »
Dans le décret rendu hier au sujet des ecclésiastiques qui n'ont pas prêté le serment (1), il n'existe aucune disposition relativement aux vicaires.
, rapporteur du comité ecclésiastique. Les vicaires ont fait l'objet d'un amendement qui a été rejeté par l'Assemblée.
Je proposerai, pour ma part, une disposition additionnelle au décret dont il est question, disposition qui serait ainsi conçue :
« Ledit secours ne pourra être exigé par ceux qui, dans la suite, ayant satisfait à la loi, auront obtenu un office ou emploi public. »
Cette disposition est en effet conformé à l'intention de l'Assemblée ; mais je ne crois pas nécessaire de l'insérer dans le décret. Il suflit, à mon sens, d'en faire mention dans le procès-verbal. (La motion de M. Treilhard est adoptée.)
Messieurs, vous avez décrété le 7 de ce mois que les corps administratifs, avant de choisir un domicile dans les maisons nationales, vous enverraient des plans de ces maisons (2).
On entend par ce mot plan un plan figuré, qui aboutirait à faire une dépense de plusieurs millions, suivant le luxe que les architectes et dessinateurs y mettraient ; je crois, Messieurs, qu'il est à propos que vous autorisiez votre comité à substituer au mot: plan, ceux-ci: description écrite.
, rapporteur du comité (Femplacement. Je demande que l'Assemblée m'autorise à faire cette substitution. (La motion de M. Bouche est décrétée.)
En conséquence, le décret adopté le 7 février est modifié comme suit:
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d'emplacement des tribunaux et corps administratifs, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Tous les corps administratifs seront tenus de rendre compte à
l'Assemblée nationale, dans la quinzaine de la publication du pré-ent
décret, de la manière dont ils ont formé leur établissement; ils
expliqueront, à cet effet, quelle est la nature de l'édifice qu'ils
occupent, si c'est ou l'ensemble, ou une portion seulement; s'ils y sont
établis en vertu d'une autorisation de l'Assemblée nationale, et si cet
établissement est définiiif, ou simplement provisoire; ils produiront
une description écrite,
Art. 2.
« Si l'édifice est national, sans être de la nature de ceux mentionnés dans l'article 4 du décret du 16 octobre 1790, et qu'ils n'aient point encore élé autorisés à l'acquérir ou à le louer, ils seront tenus de former leur demande pour l'un ou l'autre cas. Ils produiront à l'appui, avec la description ci-dessus exigée, un procès-verbal d'estimation de l'édifice, et un devis estimatif de la dépense que nécessitera leur établissement.
Art. 3.
« Les mémoires, procès-verbaux, devis, plans et descriptions des directoires de district, seront visés par les directoires de département, qui les adresseront, avec leur avis, à l'Assemblée nationale.
Art. 4.
« 11 ne poura plus être fait par les corps administratifs aucun emprunt, être établi aucune imposition sur les administrés, ni être employé aucun denier de la recette des trésoriers de district pour les frais d'établissement des corps administratifs et des tribunaux, sans l'autorisation spéciale du Corps législatif, conformément aux décrets des 14 et 22 décembre 1789, et 3 décembre 1790, à peine d'en répondre en leur propre et privé nom. «
Un membre fait lecture de la lettre suivante adressée à l'Assemblée par M. Lalande, prêtre de l'Oratoire et professeur de théologie :
« Messieurs, j'ai toujours cru que la constitution civile du clergé n'aurait que des partisans et des admirateurs. Le fanatisme, l'ignorance et l'intérêt personnel s'agitent et font tous leurs efforts pour faire des dupes et égarer l'opinion publique.
« C'est pour tâcher d'apporter un remède à ces maux, vraiment déplorables, que j'ai composé l'ouvrage que j'ai l'honneur de vous présenter et qui a pour litre : Apologie des décrets de VAssemblée nationale sur la constitution civile du clergé, à M. le curé de***, et d'offrir à l'Assemblée nationale, comme une marque de mon sincère dévouement à la sagesse de ses lois, qui ne sout propres qu'à faire le bonheur de la France, à bannir du sanctuaire les nombreux abus qui s'y étaient introduits, et à rendre à la religion sa primitive pureté. »
(L'Assemblée décrète qu'il sera fait mention honorable de cet ouvrage dans le procès-verbal.)
Messieurs, les administrateurs du district de Montpellier, par une lettre adressée à l'Assemblée nationale, annoncent des adjudications de biens nationaux faites dans ce district.
« Cette mesure, disent-ils, nous a paru propre à soutenir de plus en plus la confiance, et à convaincre les détracteurs de l'aliénation du mauvais succès de leurs manœuvres. 11 résulte de notre état que les biens déjà vendus dans le district de Montpellier, estimés ou évalués 1,305,772 livres 7 sols 6 deniers, ont produit 2,040,190 livres..
« Dans cette même séance, à laquelle les citoyens s'étaient portés en foule, le greffier du
district a présenté au directoire pour 145,000 livres d'assignats biffés et annulés, provenant du premier payement fait par les adjudicataires. Nous les avons nous-mêmes montrés au public; nous avons annoncé qu'ils allaient être envoyés à la caisse de l'extraordinaire pour êlre brûlés.
a On nous a répondu par les plus vifs applaudissements ; et nous reportons aux augustes représentants de la nation cet hommage de leur sagesse et de leur loyauté. »
Messieurs, il y a plusieurs par-ties'du royaume où les ventes de biens nationaux sont arrêtées par l'ajournement ordonné sur les biens affectés à des fondations.
Je demande que l'Assemblée ordonne au comité d'aliénation de lui présenter incessamment le moyen de faire acquitter ces fondations.
Le comité ecclésiastique s'occupe de l'acquit de toutes les fondations ; nous ne pouvons cependant pas nous dissimuler les retards que cela occasionne dans la vente des objets qu on prétend grevés de fondations et qui, dans le fond, ne le sont pas.
Je demande, non pas que cet objet soit renvoyé au comité, mais que vous décrétiez provisoirement le principe de la vente de ces biens, alors même qu'ils seraient grevés de fondations dans les paroisses, à la charge qu'il sera tenu compte, à ceux qui en jouissent en ce moment, de l'intérêt du prix à 4 0/0.
Il y a des biens grevés de fondations, qui appartiennent à des fabriques, lesquelles acquittent ces fondations ; certainement, Messieurs, vous ne pouvez pas vendre ces biens. Il y eu a d'autres qui appartiennent à des curés ; comme je ne vois pas pourquoi, après avoir conservé à ces curés et à d'autres ecclésiastiques la jouissance et la possession de ces biens, on les leur ôterait, je demande le renvoi au comité.
(de Saint-Jean-d'Angély). Je suis d'avis des principales dispositions; mais je demande que le comité ecclésiastique nous apporte demain matin, car l'objet est urgent, les aiticles du décret.
(L'Assemblée ordonne le renvoi au comité ecclésiastique, pour présenter demain matin un projet de décret).
Messieurs, je viens de recevoir une lettre infiniment intéressante et que la suscription rend bien touchante : Lettre sauvée du naufrage de Z'Amphitrite, sur la côte de Penmarch, près Quimper.
Cette lettre est adressée à M. le Président de l'Assemblée nationale de l'Empire français par les gardes nationales de l'Ile de France ; sous tous les rapports, elle intéressera votre patriotisme- La voici : (1)
« Dé la colonie de l'Ile de France, le 30 juillet 1790.
« Nos Seigneurs, c'est au milieu de l'océan Indien, c'est d'une île
éloignée de 5,000 lieues de l'Empire français, où le cri de la liberté
s'est fait entendre; c'est enfin d'un nouvel hémisphère que nous venons
vous offrir des bénédictions et
« Les citoyens français de l'Ile de France, jadis victimes déplorables d'un despotisme d'autant plus affreux, que sa force vexatoire semblait croître en raison de son éloignement du centre, auraient pu tenter de briser leurs férs ; mais leur position était d'autant plus triste, que les tyrans trompaient la religion du meilleur des rois, et que l'amour pour leur prince, qui fait l'essence de tout Français, s'opposait à leur juste vengeance. Tout à coup la nouvelle heureuse de la régénération française frappe nos oreilles; dès lors il n'y a qu'un cri, qu'un sentiment, et tout respire la liberté. La cocarde patriotique devient le signe du ralliement, et ne forme à l'instant, de tous les Français de cette colonie, qu'un peuple de frères et de héros de la liberté.
« Le despotisme en pâlit; bientôt il se rassure, «t les cabales les plus sourdes et les plus infernales deviennent son unique occupation. L'on abuse de l'ignorance et de la bonne foi, et l'on sème dans toute la colonie des divisions intestines avec une rapidi'é et une scélératesse incroyables. Les moteurs criminels de ces complots pervers, vils agenis subalternes de l'ancien despotisme ministériel, se font connaître par la joie impie que leur inspirent leurs coupables succès; l'insurrection est subite; le créole s'élève contre l'Européen, le frère contre son frère, Te fils contre son père. Les horreurs d'une guerre civile menacent nos têtes, et les tyrans sourient avec complaisance. Ils avaient convoqué la colonie ; ils donnent contre-ordre et attendent, dans un coupable silence, l'affreux résultat de leurs noirceurs infernales. Heureusement l'illusion est de courte durée; les citoyens séduits et abusés reviennent de leur erreur, le masque tombe; l'amour de la liberté, l'horreur de la tyrannie réunissent tous les cœurs, et la consternation rentre dans l'âme des despotes, qui seuls devaient éprouver ce sentiment, au cri de la liberté et de la régénération française.
« Terrassez une seconde fois les ennemis de la chose publique; tramant encore contre la liberté, ils cherchent à intimider les bons citoyens par des bruits criminels adroitement semés; ils alarment les espri's timides par des réflexions coupables. C'est une masse de 50,000 esclaves à contenir; ce sont des troupes réglées, presque égales en nombre au reste des citoyens.
« Vains efforts d'un despotisme effrayant 1 les Français ont toujours rejeté avec horreur un soupçon si coupable; ils n'ont vu dans les soldats que des frères, des citoyens et des soldats patriotes; ils n'ont jamais pu penser que les braves défenseurs du Cap et de Pondichéry, que les terribles et fameux néros du 13 juillet, dans l'Inde,
flussent jamais songer à combattre contre la iberté de leur patrie, qu'ils avaient su défendre si glorieusement. Notre espoir n'a pas été trompé : les braves guerriers qui s'étaient tous montrés des héros contre les ennemis de l'Etat, se sont tous montrés citoyens au milieu de leurs frères. C'est avec une douce satisfaction que nous rendons ici un hommage pur et sincère à leur héroïsme et à leur dévouement à la patrie.
« Les citoyens se forment en gardes nationales; et ne faisant qu'un corps et qu'une âme avec les bons militaires qui les entourent, ils dissipent les nouveaux complots du despotisme, dont le foyer était toujours le même. Leur fermeté et leur courage, secondés par l'heureuse arrivée de votre sage décret du 8 mars, leur
obtiennent un triomphe complet, et d'autant plus flatteur, qu'il n'a été accompagné d'aucune effusion de sang.
« Les gardes nationales de l'Ile de France se flattent que leur conduite ferme et sage, qui leur permet de vous offrir les palmes non sanglantes de la liberté, sera applaudie dans le sanctuaire auguste des représentants de la nation et de l'humanité.
« L'amour des Français pour la liberté ne tient ni aux climats, ni aux lieux-qu'ils habitent, mais au sang qui coule dans leurs veines. Rien ne peut altérer en nous un sentiment si précieux. Que cette terre soit plutôt la proie de l'Océan, si telle devait être son influence éternelle!
« Les gardes nationales, pénétrées de reconnaissance et de vénération pour vos sages décrets, ne cesseront jamais de vous bénir p ur le bienfait inestimable qu'elles doivent à vus lumières, à votre sagesse, à votre courage, et à votre dévouement héroïque à la patrie; elles adhèrent avec transport à vos augustes décisions, et font entre vos mains le serment d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi; de maintenir de tout leur pouvoir, sur la réquisition des corpa municipaux et administratifs, la Constitution du royaume; de prêter main-forte pour l'exécution de leurs règlements, ainsi que pour celle des décrets de l'Assemblée nationale acceptés ou sanctionnés par le roi.
« Tels sont les sentiments purs et sacrés des gardes nationales de cette colonie. Elles vous supplient, pères de la patrie, de prendre sous votre protection immédiate des Français transplantés au milieu de l'océan Indien, dont la reconnaissance et le dévouement patriotique ne peuvent être égalés que par le profond respect avec lequel nous sommes, etc. »
(L'Assemblée ordonne l'impression de cette lettre et son insertion dans le procès-verbal.)
, au nom du comité de féodalité. Messieurs, vous avez commencé le 30 janyier et le 3 de ce mois, un décret relatif aux droits féodaux; il n'est encore composé que de cinq articles (1). Votre comité féodal vient vous proposer d'en ajouter six autres; ils ont trait au droit seigneurial des troupeaux à part, supprimé comme les autres droits seigneuriaux.
, rapporteur, donne lecture des articles présentés par le comité.
Plusieurs membres présentent sur le même objet des projets de décret particuliers, dont ils donnent lecture.
Une discussion s'eng'ge sur ces divers projets.
Un membredemande la priorité pour le projet du comité.
(Cette motion est décrétée.)
Plusieurs membres proposent divers amendements qui sont écartés parla question préalable.
Après quelques modifications de texte, le projet du comité est décrété
comme suit :
Art. 6.
Le droit seigneurial connu dans la ci-devant province de Lorraine, sous le nom de droit de troupeau à part, est aboli, à compter du jour de la publication des lettres patentes du 3 novembre 1789, intervenues sur les décrets des 4, 6, 7, 8 et 11 août précédent ; sauf aux ci-devant seigneurs à user du pâturage dans les territoires où ils ont des habitations ou des propriétés foncières, en se conformant aux mêmes règles que les autres habitants et propriétaires, et sans rien innover quant à présent aux règlements et usages des différents lieux, relativement à la faculté laissée ou à la défense faite à ceux-ci, de faire garder leurs troupeaux par un berger ou pâtre particulier.
Art. 7.
En conséquence, les particuliers qui, dans la ci-devant province de Lorraine, ont été, par Je décret du 9 mai 1790, maintenus provisoirement dans la jouissance des baux du droit de troupeau à part, à eux accordés par des ci-devant seigneurs, ne pourront payer qu'entre les mains des trésoriers de3 municipalités, dont les droits ont été réservés par ce décret^ les portions de leurs fermages qui sont échues depuis sa publication.
Art. 8.
Quant aux portions desdits fermages qui étaient échues dans l'intervalle de la publication des lettres patentes du 3 novembre 1789, à celle du décret du 9 mai 1790, les fermiers qui les doivent encore, les payeront pareillement aux-dites municipalités; ma'is ils ne pourront être inquiétés pour celles qu'ils auront payées entre les mains des ci-devant seigneurs, sauf aux municipalités à en poursuivre la restitution cçntre ceux-ci ; sans néanmoins que, sous prétexte, soit du du présent article, soit du précédent, il puisse être formé aucune répétition contre ceux des ci-devant seigneurs qui ont joui en nature du droit de troupeau à part, depuis la publication des lettres patentes du 3 novembre 1789.
Art. 9.
« Dans le cas où les ci-devant seigneurs auraient affermé le droit de troupeau à part, conjointement avec d'autrés biens ou d'autres droits non abolis parles décrets de l'Assemblée nationale, sans distinction de prix, il sera procédé à une ventilation à l'amiable ou par experts, pour déterminer les sommes que les fermiers auront à payer aux communautés pour le droit de troupeau à part, et celles qu'ils auront à payer aux ci-devant seigneurs pour les autres biens ou droits; toutes poursuites contre lesdits fermiers demeurant en état, jusqu'à ce que ladite ventilation soit faite et arrêtée définitivement.
Art. 10.
« Les dispositions des quatre articles ci-dessus sont communes à la ci-devant province du Bar-rois, au pays Messin et à tous autres pays et lieux, où, jusqu'à l'époque de la suppression du régime féodal, le droit de troupeau à part, et tous autres droits de même nature, sous quelque dénomination qu'ils ' soient connus, ont été considérés comme seigneuriaux.
Art. II.
« Sont néanmoins exceptés desdites dispositions, tant dans la ci-devant province de Lorraine, que partout ailleurs, les territoires où il sera prouvé; dans la forme déterminée par l'ar^ ticle 19 du titre II du décret du 15 mars 1790, que le droit de troupeau à part a eu pour cause une concession de fonds en propriété ou à titre d'u;age, faite par le ci-devant seigneur à la communauté des habitants, ce qui aura pareillement lieu lorsqu'il sera prouvé, dans ladite forme, qu'il a eu pour cause une remise de droits dë la nature de ceux que les décrets de l'Assemblée na-tioçiîile ont maintenus jusqu'au rachat, et dans ce dernier cas il sera rachetable aux taux et selon le mode réglés par le décret d.u 3 mai 1790.
Je demande que le gouvernement s'occupe des moyens de multiplier les troupeaux et d'en perfectionner les races.
, au nom des comités de Constitution et militaire. Messieurs, je viens vous proposer quelques changements et additions au décret sur l'organisation de la gendarmerie nationale : ce décret est sanctionné; il importe que les changements que nous .vous proi osons il'adopter soient incessamment décrétés avant l'impression, atin qu'ils puissent être insérés dans le corps même du décret.
Nous vous demandons tout d'abord de décréter les additions suivantes qui s'expliquent suffisamment dans le décret que voici :
« L'Assemblée nationale décrète que dans l'article 3 du titre premier du décret sur la gendarmerie nâtionale, apré3 ces mots : sera portée uisqu'au nombre de..., il sera ajouté ceux-ci, 7,455 hommes, y compris les compagnies de la ci-devant robe courte; qu'à la place de ces mots : l'augmentation qiii va être décrétée pour les trois départements de Paris, Seine-et-Oise et Seine-et-Marne, il sera substitué ceux-ci : l'augmentation énoncée ci-après, pour les 3 départements de I Paris, Seine-et-Oise et Seine-et-Marne, et les greffiers. » (Adopté.)
, rapporteur . Vous avez, d'autre part, .ajourné l'article concernant, la suppression de la compagnie des chasses et voyages du roi jusqu'à ce que l'on ait pu connaître les désirs du roi à ce sujet.
Le roi ayant répondu qu'il laissait à l'Assemblée nationale le soin de disposer de cette compagnie, les comités proposent de supprimer cette compagnie de manière qu'elle continue de faire partie de la gendarmerie nationale.
En conséquence, on pourrait ajouter dans l'article 1er du titre VI, après ces mots : celle de la connétablie, ces mots : et celle des voyages et chasses du roi ; et après ces mots : sont également supprimés, ces mots : et elles continueront à faire partie de la gendarmerie nationale, dans laquelle elles restent et demeurent incorporées; pour, les officiers, sous-officiers et cavaliers, être placés chacun dans son grade et selon son rang, en remplissant d'ailleurs les conditions exigées par le présent décret.
Un membre propose, par amendement, de retrancher les mots : « en remplissant d'ailleurs les conditions exigées par le présent décret. » (Cet amendement est adopté.)
L'article est ensuite décrété dans les termes suivants :
« L'Assemblée nationale décrète que,dans l'article 1er du titre \I du décret sur la gendarmerie nationale, il sera ajouté après ces mots : celle de la connétablie, ces mots-ci : et celle des voyages et chasses du roi; et après ces mots-ci: sont également supprimés, ces mots-ci : et elles continueront à faire partie de la gendarmerie nationale, dans laquelle elles restent et demeurent incorporées,pour, les officiers, sous-officiers et cavaliers, être placés chacun dans son grade et selon son rang. »
, rapporteur. Les comités proposent enfin la disposition additionnelle suivante :
« Et seront les susdits changements et additions présentés à la sanction du roi, pour être insérés dans le présent décret. » (Adopté.)
J'ai l'honneur d'annoncer à l'Assemblée que l'escadre chargée de transporter à la Martinique les quatre commissaires civils, le gouverneur général et les troupes qui sont l'objet du décret du 29 décembre dernier, a fait voile de Brest le 5 de ce mois. (Applaudissements.)
L'ordre du jour est un rapport des comités d'agriculture, de commerce et de la marine sur la recherche à faire de M. de La Pérouse.
, rapporteur (1). Messieurs, depuis longtemps nos vœux appellent M. de La Pérouse et les compagnons de son glorieux, trop vraisemblablement aussi, dVson infortu é voyage.
Vous n'osiez interroger la renommée, vous cherchiez à égarer votré sensibilité dans les illusions de l'inceriitude et de l'espérance; mais la société des naturalistes de cette capitale est venue déchirer le voile que vous n'osiez soulever; elle a fait retentir cette enceinte du cri de sa douleur; le deuil qu'elle vous a annoncé est devenu universel, et vous avez paru accueillir avec transport l'idée qu'elle est venue vous offrir, d'envoyer à la recherche de M. de La Pérouse. (2)
Vous avez ordonné à vos comités d'agriculture, de commerce et de la marine de vous présenter leurs vues sur un objet si intéressant. Le sentiment qui a semblé vous déterminer, Messieurs, leur a commanué aussi d'être de l'avis d'une expédition.
Il nous reste à peine la consolation d'en douter ^ M. de La Pérouse a subi un grand malheur.
Ou ce navigateur et ses i ompagnons ne sont plus, ou jetés sur quelque plage déserte, perdus dans l'immensité des mers innaviguées, relégués vers les contins du m nde, lutiant peut-être contre le clima' et t us les besoins, contre les animaux, les hommes et la nature, ils implorent un secours qu'ils n'osent pas même espérer, ils étendent en vain les bras vers la patrie qui ne peut que deviner leur malheur.
Réduits à embrasser cette dernière idée, et peut être cette consolante
erreur, nous ne vous offrirons pas en vain, Messieurs, le tableau de
C'est cependant cette conjecture, quelque désespérante qu'elle soit, que nous sommes,- en quelque sorte, réduits à préférer; c'est celle qu'est venue vous présenter la société des naturalistes de Paris; c'est celle que, longtemps auparavant, M. de La Borde avait offerte à tous les cœurs sensibles, dans un mémoire lu à l'Académie des sciences.
Mais alors, Messieurs, si vous saisissez aussi cette déchirante idée ; si elle vous touche, vous affecte et vous frappe, vous ne pouvez plus vous livrer à d'impuissants regrets, à des vœux stériles; l'humanité vous commande; le sentiment vous entraîne; il faut voler au secours de nos fi ères. Voler à leur secours! Un saint enthousiasme peut bien prononcer un tel vœu, mais comment l'accomplir? Où le chercher? Comment suivre leurs traces? Qui interroger sur leur sort? Peut-on explorer tous les-grands continents d'une mer en quelque sorte inconnue? Peut-on toucher à toutes les îles de ces archipels immenses qui offrent tant de dangers aux navigateurs? Peut-on visiter tous les golfes, pénétrer dans toutes les baies? Ne peut-on point, mém; en attérissant à l'île qui les recèlerait, aborder dans un point, et cependant les laisser dans l'autre?
Sans doute les difficultés sont grandes, le succès est plus qu'inespéré, mais que le motif de l'entreprise est puissant! Il est possible que nos frères malheureux appellent un libérateur; il n'est pas impossible que nous les rendions à leur patrie, et dès lors il ne nous est plus permis de nous refuser à des tentatives qui ne peuvent qu'honorer l'humanité des Français. Nous devons cet intérêt à des hommes qui se sont dévoués ; nous le devons aux scieaces qui attendent le fruit de leurs recherches.
Et ce qui doit encore augmenter cet intérêt, Messieurs, c'est que M. de La Pérouse n'était pas un de ces aventuriers qui provoquent de grandes entreprises, soit pour se faire un nom fameux, soit pour les faire servir à leur fortune; il n'avait pas même ambitionné de commander l'expédition qui lui fut confiée; il eût voulu pouvoir refuser; et,lorsqu'il en accepta le commandement, ses amis savent qu'il ne fit que se résigner. Ce qui doit augmenter cet intérêt, c'est qu'il avait heureusement, et même glorieusement rempli une partie de sa mission ; c'est ce que ce navigateur philosophe, cet homme modeste, écrivait de Macao, que l'on serait content de son voyage,, et que s'il s'en rendait un pareil compte, c'est qu'il avait de précieux tributs à vous offrir. Les dernières lettres de M. de La Pérouse sont de Botany-Bay, le 7 février 1788. D'après ces lettres adressées au ministre de la marine, en quittant
ce port, il devait remonter aux îles des Amis, parcourir la côte méridionale de la Nouvelle-Calédonie, celle de Santa-Cruz, de Mendona, ou île d'Egraont, de Carteret, des Arsacides-de-Sur-ville,et de la Louisiade-de-Bougainville.il devait, après avoir tout lento pour reconnaître les parti) s encore inconnues aeces différents archipels, chercher, au mois de juillet 1788, un nouveau détroit entre la Nouvelle-Guinée et la Nouvelle-Hollande, visiter le golfe de la Garpemarie, sur lequel les Hollandais ne nous ont donné que des notions imparfaites. Il devait longer la côte occidentale de la Nouvelle-Hollande, que nous ne connaissons que par les dangers qu'elle offre aux navigateurs. Entîn en quittant la Nouvelle-Hollande, il devait remonter au nord, pour être rendu à l'Ile de France, dans le mois de décembre 1788.
Voilà, Messieurs, le plan de la route tel qu'il l'avait tracé lui-même, voilà les points qu'il faudrait parcourir pour espérer de recueillir M. de La Pérouse, ou s'en procurer des nouvelles.
Vous avez vu, Messieurs, que cet officier général devait être rendu à l'Ile de France vers la fin de 1788; cependant il n'y a point paru, et un trop long intervalle s'est écoulé, pour qu'à cet égard il puisse nous rester beaucoup d'espérances.
Gomme tout est relatif, et quoique la distance de l'Ile de France soit pour nous considérable, néaumoins, si M. de La Pérouse y eût touché, il se serait regardé comme au terme de son voyage; il est donc plus douloureux pour nous d'avoir à vous présager que peut-être ce navigateur est venu périr au port.
C'est en décembre 1788 qu'il devait arriver à l'Ile de France, et c'est à la même époque et dans les mêmes parages qu'a éclaté le furieux ouragan qui a été si funeste à la frégate la Vénus, dont jamais depuis l'on n'a entendu parler, et qui a démâté de tous ses mâts la frégate la Résolution.
Il y a donc quelque lieu de croire que le même malheur peut avoir enveloppé les vaisseaux de M. de La Pérouse et la frégate la Vénus, que le même coup de vent peut leur avoir été fatal; et que c'est dans les même mers que ces navigateurs ont trouvé leur tombeau.
Cependant, Messieurs, ne renonçons pas à l'idée consolante que M. de La Pérouse et ses compagnons existent encore, et que nous pouvons les sauver. Nous l'avons déjà dit, il suffit que cela soit possible pour que nous devions le tenter. Heureuseme t encore nous savons la route qu'il faut suivre dans une aussi douloureuse recherche; heureusement, nous pouvons remettre à ceux qui seront chargés de cette touchante mission le fil conducteur du périlleux labyrinthe qu'ils auront à parcourir.
L'expédition qu'il s'agit d'ordonner, Messieurs, a le motif le plus saint et le plus respectable ; mais vous pouvez lui donner aussi l'accessoire le plus important, vous pouvez servir en même temps les sciences et l'humanité. Messieurs de la société d'histoire naturelle, dont la pétition a provoqué le rapport qui vous occupe en ce moment, fondent sur cette expédition des espérances qui ne sont pas chimériques, et ils concourront par leurs indications, leur zélé et leurs efforts, à réaliser celles que vous pourriez concevoir aussi. Ils s'occupent déjà, Messieurs, et avec une émulation que nous ne saurions assez louer ici, de vous présenter les moyens de la rendre utile de plusieurs manières à la science si vaste dont ils cultivent le domaine. (Test dans
cette vue qu'ils ont déjà rédigé des observations générales sur tout ce que pourrait embrasser un voyage de la nature de celui qu'il s'agit d'entreprendre, et ils nous promettent encore de nouveaux tributs, dont nous sommes à même de vous garantir l'importance, en les appréciant d'après ce qui nous a déjà été fourni. En suivant donc l'objet principal que nous avons en vue» en cherchant M. de La Pérouse, les navigateurs, chargés de cette pieuse perquisition, feraient des découvertes nautiques et astronomiques qui ne sont pas sans intérêt, puisque M. de La Perouse lui-même devait s'y livrer. Les savants, les naturalistes, les dessinateurs que vous leur adjoindriez ajouteraient encore un grand motif d'utilité à cette expédition. Et, par un concours aussi heureux que respectable, les recherches de l'humanité seconderaient celles des sciences, et les recherches des scieuces serviraient l'humanité.
En effet, Messieurs, et peignez à vos âmes combien un pareil moment serait délicieux; ne pourrait-il pas arriver que le naturaliste que les recherches particulières à ses études aurait égaré sur les aspérités des montagnes, dans les halliers et les broussailles des forêts, y trouvât inopinément les traces et la retraite de ceux dont, en ce moment, nous déplorons le malheur véritable ou supposé!
Nous avons eu l'honneur, Messieurs, de vous exposer un ^rand motif, quelque espoir, tout ce qui peut justifier et peut-être commander une tentative : pour que vous soyez en état de tout juger et de tout apprécier, il nous reste à vous mettre sous les yeux sinon l'état, du moins l'aperçu de la dépense qu'il s'agit de faire pour aller à la recherche de M. de La Pérouse. Nous ne nous humilierons pas, Messieurs, au point de vous proposer de calculer si le succès était certain; mais quand il est en quelque sorte hors des espérâmes de beaucoup d'esprits, et dans un moment aussi difficile pour les finances de l'Etat, nous sentons que vous désirerez savoir à quelle dépense peut vous entraîner l'élan de votre sensibilité, parce que, pères du peuple, vous sauriez même renoncer à l'honneur d'une grande et belle action, s'il en devait trop coûter au peuple.
Nous croyons donc, Messieurs, que ^'armement qu'il faudrait faire pour exécuter la sainte entreprise à laquelle vous êtes si puissamment provoqués pourrait être bornée à deux bâtiments. Le ministre de la marine estime que la dépense de leur équipement peut être évaluée à 300,000 livres par chaque année du voyage, qu'on peut estimer devoir être de deux ans, et dans cette somme sont comprises les dépenses extraordinaires, relatives à une expédition de cette nature : cependant il convient d'y ajouter encore un déboursé préalable de 60 à 80,000 livres, pour pourvoir les bâtiments d'instruments d'astronomie, de livres, de présents de différentes espèces, dont il est à propos que nos navigateurs soient pourvus pour se concilier les peuples qu'ils seraient dans le cas de visiter. Ainsi il est raisonnable de statuer sur une dépense d'environ 300,000 à 400,000 livres la première année, et de 300,000 pour celles qui suivraient.
Vous êtes, Messieurs, en état de juger ; nous, nous avons suffisamment annoncé que nous sommes de l'avis d'une expédition; il nous reste à vous exposer le projet de décret que vos comités réunis du commerce et de la marine ont rédigé, et que je suis chargé de vous proposer.
Avant de vous le soumettre, cependant, nous devons vous observer que les dispositions du premier article de ce projet de décret sont déjà remplies en partie, mais que nous avons cru devoir le laisser subsister pour constater aussi le vœu national, et que son expression prêiàt encore plus d'énergie au voeu du roi.
L'expédition de M. de La Pérouse a toujours inspiré au roi le plus grand intérêt. Il a depuis longtemps manifesté ses inquiétudes sur cet officier général, et c'est d'après ses ordres que ses ministres ont invité l'Angleterre à faire connaître à ses navigateurs les parages ou il se pourrait que M. de La Pérouse et ses compagnons attendissent les secours de l'Europe. Vous sentez, et le ministre, qui nous a fait part de la tendre sollicitude du roi, nous assure que l'on doit mettre quelque confiance dans l'attention qu'une nation généreuse, et pour ainsi dire toute maritime, aura donnée à une pareille invitation.
Nous pouvons donc espérer beaucoup des Anglais. En effet, si M. de La Pérouse avait échoué à la côte des Arsacides ou à celle delà Louisiane, depuis que le lieutenant Shortland a'reconnu qu'en venant de Botany-Bay pour rentrer dans le grand archipel d'Asie, la route du nord-est la plus courte et la plus sûre, sans doute il l'aura indiquée aux bâtiments qui auront celte destination; et ces bâtiments, en suivant cette route, pourront avoir et nous procurer quelque révélation sur le sort de nos infoitunés compatriotes.
Néanmoins une recherche expresse, une expédition qui, traitant secondairement tout autre objet, mettra sa première et sa plus chère ambition à cette touchante recherche ; des navigateurs qui, pour suivre les traces de M. de La Pérouse, s assujettiront à l'itinéraire que ses dernières lettres nous ont donné, et qui ne l'abandonneront qu'après avoir parcouru tous les parages qu'il se proposait de visiter, doivent inspirer une confiance bien autrement fondée.
Nous le répéterons en terminant, tout nous commande une tentative. Une proposition telle que celle qui vous est soumise, ne peut être portée à cette tribune pour y être combattue par la parcimonie, ou discutée par la froide raison, quand elle doit êire jugée par le sentiment. Si les Anglais, poussés par une juste vengeance, ont bien pu, s'ils ont dû même, envoyer dernièrement des vaisseaux dans les mêmes mers, et dans la même incertitude, à ta recherche des matelots coupables qui ont enlevé le navire le Bounty, commandé par le lieutenant Guillaume Bligh; les Fiançais, guidés par la reconnaissance et l'humanité, doivent bien plutôt encore envoyer à la recherche de leurs digues et malheureux compatriotes.
Cette expédition, décernée à M. de La Pérouse, sera pour lui ou pour sa mémoire, la plus glorieuse récompense dont vous pouviez honorer ses travaux, son dévouement ou ses malheurs. C'est ainsi, Messieurs, qu'il convient de récompenser. Il n'y a que de la grandeur dans un pareil mouvement. Vous n'inscrirez pas M. de La Pérouse, ses compagnons ou leurs enfants, sur ce livre qui portait, à juste titre, une livrée de sang, puisque ses lignes étaient tracées du sang des peuples, sur ce livre obscur et honteux qui vous a révélé la bassesse des courtisans; mais vous montrerez à l'univers le caséminent que vous faites de ceux qui vous consacrent leurs services, et le prix que vous attachez aux hommes. A cet intérêt de la France pour ses enfants, le Français reconnaîtra qu'il a une patrie; il se dévouera d'autant plus désormais, qu'il sera certain de n'en être jamais
abandonné, et cette sollicitude publique, cette gratitude nationale, cette offrande faite à l'humanité inspirera l'héroïsme de toutes les vertus civiques.
De paieils actes, Messieurs, illustrent aussi la nation qui sait s'y livrer, et le sentiment d'humanité qui y détermine caractérisera notre siècle. Ce n'est i lus pour envahir et ravager que l'Européen pénètre sous les latitudes les plus reculées, mais pour y porter des jouissances et des bienfaits ; ce n'est plus pour y ravir des métaux corrupteurs, mais-pour y conquérir ces végétaux utiles qui peuvent rendre la vie de l'homme plus douce et plus facile. Enfin l'on verra, et les nations les plus sauvages ne le considéreront pas sans attendrissement, l'on verra, aux bornes du monde, de pieux navigateurs interrogeant avec anxiété sur le sort de leurs frères, les hommes et les déserts, les antres, les rochers et même jusqu'aux écueiis : on verra sur les mers les plus perfides, dans les sinuosités des archipels les plus dangereux, autour de toutes ces îles peuplées d'anthropophages, errer des hommes, recherchant d'autres hommes, pour se précipiter dans leurs bras, les secourir et les sauver.
Voici, Messieurs, le projet de décret :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu ses comités réunis d'agriculture, de commerce et de marine, décrète :
« Que le roi sera prié de donner des ordres à tous les ambassadeurs, résidents, consuls, agents de la nation auprès des différentes puissances, pour qu'ils aient à engager, au nom de l'humanité, des arts et des sciences, les divers souverains auprès desquels ils résident, à charger tous les navigateurs et agents quelconques, qui sont dans leur dépendance, en quelques lieux qu'ils soient, mais notamment dans la partie australe de la mer du Sud, de faire toutes recherches des deux frégates françaises, la Boussole et VAstrolabe, commandées par M. de La Pérouse, ainsi que de leurs équipages, de même que toutes perquisitions qui pourraient constater leur existence ou leur naufrage ;
Afin que dans le cas où M. de La Pérouse et ses compagnons seraient trouvés ou rencontrés, n'importe en quel lieu, il leur soit donné toute assistance, et procuré tous les moyens de revenir dans leur patrie, comme d'y pouvoir rapporter tout ce qui serait en leur possession, l'Assemblée nationale, prenant l'engagement d'indemniser, et même de récompenser, suivant l'importance du service, quiconque prêtera secours à ces navigateurs, pourra procurer de leurs nouvelles, ou ne ferait même qu'opérer la restitution à la France des papiers et effets quelconques qui pourraient appartenir ou avoir appartenu à leur expédition;
« Décrète, en outre, que le roi sera prié de faire armer un ou plusieurs bâtiments, sur lesquels seront embarqués des savants, des naturalistes et des dessinateurs, et de donner aux commandants de l'expédition la double mission de rechercher M. de La Pérouse, d'après les documents, instructions et ordres qui leur seront donnés, et de faire en même temps des recherches relatives aux sciences el au commerce, en prenant toutes les mesures pour rendre, indépendamment de la recherche de M. de La Pérouse, ou même après l'avoir recouvré ou s'être procuré de ses nouvelles, cette expédition utile et avantageuse à la navigation, à la géographie* au commerce, aux arts et aux sciences ». (Applaudissements.)
( Ce décret est adopté.)
(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport de M. Delattre.)
annonce l'ordre du jour de demain.
La séance est levée à 2 heures et demie.
présidence de m. fréteau, ex-président.
Séance du jeudi
La séance est ouverte à 9 heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier, qui est adopté.
Un membre : Le décret que vous avez rendu hier en faveur de M. de La Pérouse me fait espérer que vous prendrez en considération l'observation que j'ai à vous proposer; tout porte à croire que ces infortunés navigateurs ont péri ou sont détenus dans la partie occidentale de la Nouvelle-Hollande. Il n'y a qu'un seul établissement en Europe dans la pariie orientale de ce vaste continent ; c'est celui que les Anglais ont établi à Botany-Bay. Dans ce moment, le gouvernement anglais prépare une expédition pour cet établissement.
Il est donc très urgent que vous chargiez votre président d'accélérer l'expédition de votre décret, en priant le roi de donner des ordres à l'ambassadeur de France à Londres, de solliciter une lettre du gouvernement pour les administrateurs de Botany-Bay, et de donner tous les renseignements sur le sort de M. de La Pérouse, afin que, lorsque l'expédition que vous venez de décréter ira y prendre terre, elle sache à quoi s'en tenir sur l'objet de ses recherches.
, rapporteur des comités d'agriculture, de commerce et de la marine. On ne peut qu'applaudira la sollicitude du préopinant; mais ce qu'il observe est prévenu par le projet de décret, et même a déjà été rempli à l'avance par la sollicitude du roi, qui, comme j'ai déjà eu l'honneur de l'observer à l'Assemblée, a donné des ordres à son ambassadeur en Angleterre, à la cour de Londres, d'engager à écrire pour s'assurer des démarches qui pourront concourir à la recherche de M. de La Pérouse. Ainsi les ordres sont déjà donnés à cet égard-là.
Messieurs, les vainqueurs de la Bastille viennent très fréquemment au
comité des pensions, pour réclamer la suite de l'exécution du décret du
14 juillet, dans la partie où il est dit qu'il leur serait accordé une
marque d'honneur. Le comité des pensions leur a représenté que cela ne
le regardait aucunement, parce que c'est dans la Constitution que l'on
doit fixer les marques d'honneur aux personnes qui auront bien mérité de
la patrie. Le comité des pensions désirerait que vous prissiez une
mesure précise afin de décréter, d'une manière positive, que les
vainqueurs de la Bastille seront renvoyés au co-
Cette affaire a été soumise à l'examen du comité de Constitution ; il doit vous présenter à cet égard tout ce qu'il croira nécessaire. Je demande, en conséquence, l'ordre du jour.
Je demande qu'au moins la décision de passer à l'ordre du jour soit mentionnée dans le procès-verbal. Vous n'avez pas d'idée de la contiuuité des demandes des vainqueurs de la Bastille.
{de Saint-Jean-d1Angély). Vous ne devez pas perdre de vue que, dans une circonstance remarquable, une députation des vainqueurs de la Bastille est venue faire en leur nom l'abdication des récompenses honorifiques qui leur avaient été accordées. Il a été fait mention de cette renonciation dans le procès-verbal. Si les vainqueurs de la Bastille ont oublié cette démarche généreuse, l'Assemblée ne peut pas l'oublier et elle ne doit pas faire l'inconséquence de mentionner dans son procès-verbal des pétitions dont elle ne veut pas s'occuper. Comme il serait possible d'en profiter pour exciter des troubles et des mécontentements dont les ennemis de la Révolution profitent avec une funeste adresse, je demande que l'on passe purement et simplement à l'ordre du jour.
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
,au nom du comité des rapports, Messieurs, le comité des rapports auquel a été adressée l'affaire relative aux prétendants droit à la succession de Jean Thierry, m'a chargé de vous en rendre compte.
En 1782, un arrêt du conseil établit une commission extraordinaire pour juger les demandes des prétendants droit à la succession de Jean Thierry. La plupart de ces prétendants furent renvoyés par cette commission ; ils demandèrent un autre tribunal, et leur pétition vous fut présentée par votre comité des rapports. On invoqua la question préalable sur le projet de décret qui vous fut proposé. Vous décidâtes qu'il y avait lieu à délibérer, mais vous ajournâtes la décision. Depuis, votre comité a examiné avec le plus grand soin les prétentions des parties. 11 est impossible de refuser un tribunal à celles qui n'ont pas été jugées en 1785.
Depuis que toutes les commissions sont détruites, les affaires qui y étaient pendantes doivent être renvoyées aux tribunaux de districts; mais, comme il serait difficile aux parties de s'accorder sur le choix du tribunal, elles vous prient de le déterminer. Nous vous proposons de les renvoyer au premier tribunal de Paris, puisque Je plus grand nombre des parties se trouve dans la capitale. Celles qui ont été condamnées par l'arrêt du conseil de 1785 auraient désiré n'être pas forcées à recourir à la voie de la cassation ou de la revision, mais le comité n'a pas cru que l'autorité de la règle pût fléchir en ce cas. L'existence de la succession est établie ; les preuves en ont été recueillies par les soins de MM. James et Thierry de Franqueville; le premier comme dépositaire des pièces justificatives de la succession ; le second, eu qualité de chef de branche et comme procureur fondé, et au nom des légitimes héritiers. Cette succession s'élevait en 1676, déjà à 25 ou 30 mil-
lions de capital connu ; il faut y ajouter les intérêts depuis cette époque. L'humanité doit engager l'Assemblée nationale à venir au secours de ces individus, au nombre de 2,000, qui, lors même qu'ils seraient reconnus par les tribunaux comme héritiers légitimes de Jean Thierry, ne pourraient cependant obtenir, de la république de Venise, la succession qu'ils réclament, sans la protection du gouvernement. Sous un point de vue politique, il importe à la France que ces sommes rentrent dans le royaume.
Voici en conséquence le projet de décret que j'ai l'honneur de vous proposer:
« L'Assemblée nationale décrète que ^instance pendante entre les prétendants droit à la succession de Jean Thierry, en la commission extraordinaire nommée par arrêt du conseil du 31 mai 1782, est renvoyée au tribunal du premier arrondissement du département de Paris, pour y être procédé suivant les derniers errements, et statué sur les demandes des parties, sauf l'appel ; sauf pareillement les voies de droit, s'il y a lieu, contre les jugements rendus par la commission ;
« Décrète, en outre, que le comité diplomatique prendra les mesures convenables pour procurer la pleine et entière exécution des jugements qui interviendront. »
(de Saint-Jean-d'Angély). La dernière disposition présentée par le comité est à mon sens destructive des principes constitutionnels posés par l'Assemblée nationale elle-même ; l'attribution au comité diplomatique est attentatoire aux droits du pouvoir exécutif.
Je demande, en conséquence, que l'exécution des jugements rendus soit confiée a ce dernier.
, rapporteur. Je conviens de la justesse de votre observation dans la thèse générale, mais le comité des rapports a conçu que les Bommes qui sont entre les mains de la république de Venise intéressaient essentiellement la nation. Je ne prétends pas proposer que l'on dépouille le pouvoir exécutif de ce qui lui appartient, aussi ce n'est pas l'objet du décret; car, en proposant de renvoyer au comité diplomatique, c'est pour qu'il s'assure de la quotité des sommes qu'il s'agit de récupérer et, ensuite, lorsqu'il aura constaté que, parla réalité de la succession et par son importance, la nation elle-même doit y mettre un grand intérêt, il prendra les mesures convenables pour donner l'impulsion au pouvoir exécutif qui, de son côté, remplira à cet égard les fonctions qui lui sont attribuées par la Constitution.
Je m'en rapporte, d'ailleurs, pour trancher cette question, à la décision de l'Assemblée.
(de Saint-Jean-d'Angély). J'admets l'objet d'intérêt que propose M. le rapporteur, mais je ne saurais admettre le mode très inconstitutionnel qu'il vous présente. J'insiste pour le renvoi au pouvoir exécutif. (La motion de M. Regnaud est décrétée.)
Le projet de décret est adopté en ces termes : « L Assemblée nationale décrète que l'instance pendante entre les prétendants droit à la succession de Jean Thierry, en la commission extraordinaire nommée par arrêt du conseil du 31 mai 1782, est renvoyée au tribunal du premier arrondissement du département de Paris, pour y être procédé suivant les derniers errements, et statué sur les demandes des parties, sauf l'appel; sauf |
pareillement les voies de droit, s'il y a lieu, con tre les jugements rendus par la commission.
« Décrète, en outre, que le roi sera prié de prendre les mesures convenables pour procurer la pleine et entière exécution des jugements qui interviendront. »
, au nom du comité des contributions publiques. Messieurs, vous avez ajourné le décret qui vous a été présenté sur l'échange du Clermontois; je dois vous observer que cet ajournement produit des retards légitimes dans les impositions de ce pays. Le nouveau mode de contribution commence, en effet, à s'y établir et cependant les anciens droits continuent à y être perçus au profit de M. de Condé. Les habitants ont donc quelque lieu de se plaindre, attendu, disent-ils, qu'ils ne peuvent être assujettis en même temps aux nouvelles et aux anciennes impositions.
Il est donc nécessaire de prononcer incessamment sur cette affaire : je uemande que la discussion en soit fixée à l'une de nos prochaines séances.
(L'AssemTblée fixe la discussion du projet de décret relatif à l'échange du Clermontois à la séance de samedi soir.)
,au nom du comité des impositions. Messieurs, vous avez obligé les soumissionnaires pour le bail des messageries à fournir un cautionnement de 2 millions eh immeubles. Ce cautionnement est nécessaire pour la responsabilité des objets confiés aux messageries et, pour les autres engagements à l'égard du Trésor public. Vous avez de plus obligé les nouveaux fermiers à payer, immédiatement après leur adjudication, aux anciens fermiers et sous-fermiers, tous les objets servant à l'exploitation, tels que chevaux, voitures, etc. L'adjudication a été suspendue par le motif qu'il est impossible qu'aucune compagnie puisse faire, au moment même de l'adjudication, le remboursement de ces effets, non encore inventoriés. Vous les avez déclarés insaisissables, et cependant la reprise du service doit se faire au même moment; et d'après votre décret, il pourrait résulter, de la part des sous-fermiers, un refus de fournir à la nouvelle compagnie les objets d'exploitation. Votre comité a pensé qu'il suffisait que les soumissionnaires justifiassent de la possibilité où ils se trouvent d'effectuer promptement ce remboursement. En décrétant cette disposition, vous préviendrez les difficultés qui pourraient s'élever à la prochaine séancé d'adjudication, sur l'interprétation même de la loi. Voici e projet de décret que je vous propose : *
« L'Assemblée nationale décrète que le ministre des finances, avant l'adjudication du bail des messageries, fera justifier à chacune des compagnies qui se présentera, qu'elle a, en outre des 2 millions de cautionnement exigés par le décret des 6, 7 et 8 janvier dernier, les moyens nécessaires pour monter le service et effectuer le remboursement comptant du mobilier servant à cette exploitation. »
Il me semble qiie le premier décret exigeait le cautionnement, non pas des soumissionnaires, mais seulement de la part des adjudicataires. Je fais une seconde observation qui tient à la première : une compagnie de prés de 600 maîtres de postes s'était présentée pour faire l'acquisition au bail des messageries ; fai-
gant l'exploitation par eux-mêmes, et étant déjà antérieurement créanciers de la nation, ils seraient certainement solvables; mais ces individus, pères de famille, associés en très grand nombre, ne peuvent sur-le-champ réunir tous leurs titres de cautionnement, et si vous exigez qu'avant même l'adjudication, et seulement pour s'inscrire comme soumissionnaires, ils soient tenus de fournir ce cautionnement, vous les éloignez forcément. Cette mesure est une ruse de la part des compagnies definances.
Je demande la question préalable sur le décret.
(de Saint-Jean-d'Angély). Je crois qu'il est impossible de laisser introduire parmi les soumissionnaires des hommes qui ne donneraient pas de cautionnement ; sans cette mesure, on pourrait adjuger le bail à des hommes qui n'auraient pas les fonds nécessaires pour faire le service qu'ils auraient eutrepris; on leur ferait subir la folle enchère ; mais le service public en souffrirait, et peut-être, en attendant une nouvelle adjudication, tomberait-il à la charge du Trésor public.
Il y a, de plus, à ce que je crois, 2 ou 3 millions à payer aux sous-fermiers et aux autres fermiers; or, si les 2 millions qui ont été ordonnés et qui assurent la régularité du service, étaient employés à acquitter cette première dette, des adjudicataires, il en résulterait que la nation se trouverait sans aucun cautionnement.
Quant à la compagnie dont a parlé Je préopinant, je crois qu'une compagnie nombreuse, composée de beaucoup de petits propriétaires, est une mauvaise compagnie.
On doit regarder le bail des messageries sous deux rapports, et comme devant rendre un revenu quelconque, et comme étant chargé d'un service intéressant.
Pour le premier rapport, vous exigez un cautionnement en immeubles.
Pour le second, le ministre devrait, sur sa responsabilité, s'assurer que celui qui aurait cette entreprise serait au même instant en état de faire les dépenses qu'elle exige : sans cette précaution, on exposerait le service public. Le sieur Brûlée nous a demandé la permission de faire un canal en nous disant qu'il avait une compagnie et il n'en avait point.
Qui vous a dit cela ? J'appuie l'opinion de M. Regnaud.
Un membre : II est selon moi déraisonnable de dire dans un décret que les adjudicataires nouveaux justifieront qu'ils sont en état de rembourser les voitures et les chevaux des fermiers et sous-fermiers, sans que vous sachiez à quelle somme peut monter ce remboursement; il faut que cette somme soit nettement déterminée!
Plusieurs membres : Aux voix! (L'Assemblée rejette la question préalable sur le projet de décret.)
Vous avez décrété que le bail des fermiers était anéanti dans toute l'élendue du royaume. Ces sous-fermiers n'étant pas obligés de prendre de nouveaux baux, on doit leur rembourser leurs chevaux et voitures. Ce remboursement doit être à la charge de celui qui prendra l'affaire. Voilà quelles ont été les conditions, il n'y a rien de plus juste.
Je demande que la somme qui doit être camionnée pour garantir Je remboursement comptant des objets d'exploitation soit tixée à 1 million ou à 1,200,000 livres.
Si vous ne voulez pas déterminer la somme, comment voulez-vous que le ministre puisse la déterminer? Toutes les fois qu'il n'y a pas une base quelconque établie, on est maître d'exagérer. Votre décret même deviendrait un instrument entre les mains des anciens fermiers pour écarter tous les soumissionnaires.
II est nécessaire qu'une des conditions du bail soit de forcer les adjudicataires à rembourser aux sous-fermiers les voitures et les chevaux que ceux-ci fourniront à la nouvelle compagnie, ou à donner cautionnement. Mais on nous dit de fixer la somme de garantie ; cette somme, nous ne pouvons pas la fixer : quelle base avons-nous, en effet, pour estimer les objets remboursables?
Je demande la question préalable sur l'amendement de M. Martineau.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'amendement de M. Martineau et adopte le projet de décret du comité.
, au nom du comité de judicature. Par un décret du mois de septembre dernier, vous avez déclaré que les dettes des compagnies de judicature* contractées antérieurement à l'année 1771, seraient payées par la nation, mais que celles contractées postérieurement seraient retenues sur le remboursement des titulaires. Par rapport aux anciennes, la nation s'est obligée à les acquitter, sauf à retenir aux titulaires la partie des dettes dont ils doivent être chargés.
Cependant beaucoup de créanciers se sont avisés de faire des oppositions au remboursement des compagnies, sans indiquer la cause qui les avait déterminés. Ces oppositions ont paralysé dès le premier moment les liquidations. Sur un rapport que je vous ai fait, vous avez annulé les oppositions sur les compagnies. Les créanciers se sont alors avisés de faire des oppositions sur ies particuliers et sur quelques titulaires des compagnies seulement, ce qui trompe les liquidateurs et arrête encore leurs opérations.
Je propose en conséquence le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de judicature, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Les oppositions formées sur les titulaires particuliers des compagnies désignées parle décret des 2,6 et 7 septembre dernier, et qui n'ont d'autre cause que les dettes communes desdites compagnies, sont déclarées nulles et comme non avenues.
Art. 2.
« Les créanciers qui, pour éluder l'effet des décrets précédemment rendus, auront formé des oppositions sur chacun des membres desdites compagnies pour raison des dettes communes, seront tenus de donner, dans le courant du présent mois de février, suivant les formes prescrites, les mainlevées desdites oppositions, et d'en faire opérer à leurs frais la radiation par les conservateurs des finances.
Art. 3.
« A défaut de cette mainlevée dans les formes
et le délai ci-dessus prescrits, les créanciers seront tenus,, outre les frais auxquels lesdites oppositions donneront lieu, des dommages-intérêts résultant du retard qui aura été apporté à la liquidation et au payement du prix des offices. Ces dommages-intérêts seront fixés au moins à l'intérêt à 5 0/0 du prix desdits offices, à compter de la date des certificats des conservateurs des finances jusqu'au jour de la radiation desdites ippositions sur leurs registres. Us pourront être estimés à plus forte somme dans le cas où les titulaires justifieront de pertes plus considérables qui leur seraient causées par le retard de leur payement. »
(Ce projet de décret est adopté.)
L'ordre du jour est un projet de décret du comité ecclésiastique sur les biens nationaux grevés de fondations dans les églises paroissiales.
, rapporteur. J'ai l'honneur de présenter à l'Assemblée le projet de décret qu'elle a demandé à son comité ecclésiastique, sur les biens de fondations de messes et autres services dans les églises paroissiales. Votre comité a reconnu que parmi les fondations de paroisses toutes ne méritent pas sans doute la même faveur. Il vous proposera dans peu sur ce sujet des distinctions que peut-être vous approuverez; mais cette discussion entraînerait de longs débats, et malheureusement les ventes sont retardées sous prétexte de fondation. De là des lenteurs, des chicanes, pour les ventes mêmes que vous avt z décrétées, au point que des départements ont sursis aux adjudications : il faut faire rentrer dans le commerce tous les fonds qui ne sont point employés dans les fabriques. C'est le moyen d'augmenter l'industrie, et, sans fouler le peuple, d'augmenter le produit des impôts; c'est une mesure nécessaire à cause des frais de réparation qui grèvent en général beaucoup trop les établissements publics. Il n'y a donc là qu'avantage pour tous; d'ailleurs, je n'eusse jamais demandé l'ajournement sur les biens des fabriques, si l'on avait proposé d'en faire l'intérêt; mais il s'agissait de les déclarer biens nationaux.
11 me reste à vous établir un fait. Il y a dans le royaume des paroisses qui n'ont pas de fabriques, la plus grande partie en ont ; mais enfin, dans la partie méridionale de la France, il est un grand nombre de paroisses qui n'ont pas de fabriques. Nous proposons une disposition par laquelle l'intérêt annuel du prix des biens de fondation sera payé uniquement aux fabriques qui auraient payé la desserte aux ecclésiastiques; mais nous ne pouvons pas dans ce moment créer des fabriques où il n'y en a point; votre comité croit remplir vos vues par le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité ecclésiastique, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Les immeubles réels, affectés à l'acquit des fondations de messes et autres services établis dans les églises paroissiales et succursales, seront vendus dès à présent dans la même forme et aux mêmes conditions que les biens nationaux.
Art. 2.
« Pour tenir lieu aux curés et aux autres prêtres attachés auxdites églises, sàns avoir été pourvus de leurs places à titre perpétuel de bé-
néfice, et qui administraient lesdits biens, de la jouissance qui leur en avait été laissée provisoirement pour l'acquit desdites fondations, il leur sera payé, jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, sur le Trésor public, par les receveurs de district, l'intérêt à 4 0/0, sans retenue, du produit net de la vente desdits biens.
Art. 3.
« Quant auxdites églises où lesdits biens étaient administrés par les fabriques, il sera provisoirement payés auxdites fabriques, sur le Trésor public, par le receveur du district, l'intérêt à 4 0/0, sans retenue, du produit net de la vente, à la charge de l'employer comme l'eût été le revenu desdits biens, savoir : aux dépenses du culte et à l'acquit des fondations.
Art. 4.
« Toutes ventes d'immeubles réels desdites fondations, faites jusqu'à présent dans les formes prescrites pour la vente des biens nationaux, sont validées par le présent décret, à charge de l'intérêt à 4 0/0, payable sur le Trésor public, ainsi qu'il a été ci-dessus dit. »
Je demande au comité ecclésiastique qu'il ne nous apporte pas, sans y être préparé, des dispositions relatives au décret qui a été rendu le 5 novembre, sur la désignation des biens nationaux, et qu'il se conforme à la discipline adoptée par l'Assemblée nationale, qui est qu'aucun décret ne soit proposé et ne soit mis à l'ordre du jour sans avoir auparavant été imprimé et distribué. (Interruption.)
J'appuie mon opinion sur les inconvénients qui résultent des décisions locales du comité ecclésiastique; je puis vous en citer une preuve : L'abbaye de Malvaux avait été réunie à l'abbaye de Versailles par des lettres patentes enregistrées au parlement. Il était dit que les religieuses auraient 1,200 livres de pension. Votre comité ecclésiastique, quoique les lettres patentes fussent enregistrées, a rendu une décision par laquelle leurs pensions seraient réduites à 700 livres pour une dame de chœur, et 350 livres pour les sœurs converses.
Plusieurs membres : Ce n'est pas cela.
Plusieurs membres ; C'en est assez ; à l'ordre du jourl
Je vous demande, Messieurs, si votre comité a eu le droit de rendre cette décision.
Plusieurs membres à gauche : Aux voixl
Ma demande tend à renvoyer au pouvoir exécutif toutes les consultations qui seront faites sur l'exécution des décrets.
Quant au décret dont il est question, je pense que, comme il est la suite de l'ajournement proposé par le titre premier du décret du 4 octobre, votre comité ecclésiastique aurait dû, non pas vous proposer une mesure partielle pour les biens désignés dans le décret, mais renfermer tous ceux dont l'ajournement a été prononcé. Cette disposition est d'autant plus nécessaire, que vous avez ajourné les biens des fabriques, séminaires et collèges, et que je ne vois ici qu'une disposition partielle et isolée. On a dit qu'il est nécessaire de vendre. Je ne comprendrai jamais
pourquoi il est plus instant de vendre les biens des fabriques que de vendre les autres biens ajournés; ils sont de même nature, ils doivent donc subir le même sort.
Je me borne à demander que le projet de décret soit ajourné, et que le comité nous rapporte des dispositions d'après les décrets des 4 octobre dernier et jours suivants. Je demande de plus que le décret soit mis à une séance du soir, attendu que ce n'est pas constitutionnel et que nous avons d'autres objets beaucoup plus importants.
(L'ajournement est repoussé.)
Je demande que les maisons destinées au logement des ecclésiastiques pour le service des paroisses ne soient pas vendues. Dans la province de Bretagne, que j'habite, nos paroisses sont très étendues : les particuliers ont fait des fondations pour loger des ecclésiastiques, afin d'en avoir dans leur canton ; et si vous vendez ces maisons habitées par des ecclésiastiques et nécessaires pour le service, vous occasionnerez du trouble dans la province, parce que dans chaque canton, très éloigné quelquefois du lieu principal, on est fort aise d'avoir des ecclésiastiques.
Je demande donc que vous vouliez bien excepter du décret les maisons occupées par les ecclésiastiques et nécessaires au service divin.
(L'amendement est renvoyé au comité.)
On vous propose aujourd'hui, Messieurs, que l'intérêt fixé à 5 0/0 soit réduit à 4 sur les biens ecclésiastiques ; je ne trouve pas cela juste. Je demande que l'Assemblée, conformément aux vrais principes, décrète que l'intérêt restera à 5 0/0, parce que ces sommes seront sujettes aux autres impositions, comme elles doivent l'être, ou bien, si vous vous écartez des principes, qu'il soit déclaré que cette rente ne sera pas sujette à l'impôt.
, rapporteur. Cette motion est dans le sens du comité.
Je crois qu'il y aurait une distinction à faire quant au payement de la totalité de la rente, qui vous est proposé par le comité. En effet, il y a trois espèces de fondations qui sont chargées d'une donation faite à la cure même, les autres sont des fondations qui sont chargées d'une donation formant un titre dans la paroisse, et enfin les autres sont chargées d'une rente faite à la fabrique. Il arrive quelquefois que le produit de ces fondations-là n'est pas même suffisant pour acquitter la fondation, et alors elle est sujette à s'éteindre; mais il arrive Je plus souvent que le produit de la donation est plus fort, et excède le produit de la charge à acquitter ; alors l'excédent est un bénéfice ou pour le titulaire ou pour la fabrique. Il n'y a pas de doute qu'il faut payer à la fabrique l'intérêt total du prix de la vente. Vous avez accordé aux titulaires supprimés un traitement relatif aux revenus qu'ils avaient, et ce serait faire vis-à-vis d'eux une injustice que de leur faire payer l'intérêt à 4 0/0 de la totalité du prix de la vente, puisque cela fait une partie du revenu qui fait l'objet de leur traitement.
Je propose, en conséquence, de distinguer les charges données aux fabrique^, et d'ordonner
que l'intérêt à 4 0/0 sera payé en totalité aux fabriques: à l'égard des antres fondations chargées de donations à la cure ou au chapelain titulaire dans la paroisse, je propose, non pas d'en payer l'intérêt à ces titulaires, mais de faire évaluer la somme nécessaire par chaque année pour acquitter les fondations, d'après l'état qu'en fournira la fabrique de la paroisse, et de faire payer à la fabrique de ta paroisse le montant de ce qui sera nécessaire à l'actif de ces fondations, à la charge de les faire acquitter.
C'est moi, et non pas le comité ecclésiastique, qui vous ai présenté hier le projet de décret qui est reproduit aujourd'hui. J'ai cru devoir adopter la motion de M. de Tracy, et je vous ai proposé, de concert avec lui, une rédaction que vous avez renvoyée au comité. Après avoir justifié le comité sur ce point, je crois que je peux me dispenser de le justifier sur les inculpations particulières de M. d'Estour-mel, que vos comités donnent quelquefois des dispositions hasardées. Certainement l'exemple qu'il a cité a été si mal choisi, que vous me dispenserez d'y répondre ; je cro'S qu'il suffit d'une simple observation pour vous déterminer à adopter le projet du comité. De quoi s'agit-il, Messieurs ?
Vous avez décrété l'aliénation des biens nationaux, vous avez décrété l'aliénation des biens grevés de fondations comme tous les autres.....
Plusieurs membres : Non !
Vous avez seulement fait
une exception, par le décret du 23 septembre, pour les biens grevés de fondations dans les églises paroissiales; car les biens qui appartenaient aux chapitres ou aux corps supprimés, qui dépendaient des bénéfices aussi supprimés, quoique grevés de fondations, ont été déclarés vendables ; ils sont vendus presque partout. 11 ne s'agit donc ici que des biens grevés de fondations dans les églises paroissiales.
C'est, Messieurs, dans cette position, qu'on vous a proposé de vendre tous ces objets-là. Nous sommes tous d'accord qu'il faut vendre. (Murmures à droite.)
Vous avez aussi décrété que les ecclésiastiques qui administraient ces biens et faisaient le service des fondations, sans avoir de titre perpétuel, continueront provisoirement de faire le service et de jouir de leurs anciens revenus, sans qu'ils puissent être imputés sur leurs traitements.
Nous allons vous présenter dans la suite et bientôt, je l'espère, une disposition sur la manière dont les fondations seront acquittées, sur les personnes par qui elles le seront, sur les salaires que vous pourrez donner à cet égard : le travail sera définitif, et c'est alors que la réflexion de M. Tronchet, qui est infiniment juste au fond, trouvera son application. Il faut distinguer la vente qu'il faut faire du payement provisoire des fondations, qui est très juste.
En ce moment, il ne s'agit pas d'innover quelque chose au service des fondations, ni au salaire provisoire que vous avez accordé aux desservants; mais il est intéressant de mettre dans le commerce le plus de biens-fonds qu'il sera possible. Vous conserverez la jouissance provisoire des desservants, en leur donnant une rente ; de 4 0/0 du produit net de la vente.
Je demande, non pas la question préalable sur l'amendement de M. .Tronche t, mais le renvoi au comité et l'adoption du projet du comité.
Je demande moi-môme le ren-roi de ma motion au comité.
(Ce renvoi est décrété.)
M. le rapporteur a dit que la raison qui nécessitait cette vente était que les frais supportés par les fabriques étaient une dépense locale ; j'ai dû en conclure que les biens possédés étaient aussi un avantage local. Cependant,effrayé de toutes les propositions du préopinant, je demande que l'amendement de M. Tuaut soit non seulement adopté, mais même étendu. J'observe sur cela, Messieurs, que,plus ces biens seront mis en parcelles, plus les frais de vente seront considérables. Je pense que l'intérêt doit être porté à 5 0/0.
(L'amendement est rejeté par la question préalable.)
Je demande que le comité ecclésiastique s'occupe de terminer les difficultés qui se sont élevées à raison des chapelles cas-trales et que l'on ne distingue pas les chapelles où l'évêque donne le visa de celles qui n'ont pas suivi cet usage.
Il ne faut pas comprendre dans la vente des biens nationaux les biens attachés au service des chapelles sur lesquelles le visa a été accordé, puisque cela ne change pas la nature des bénéfices.
rappelle les dispositions adoptées antérieurement sur cet objet.
La question est déjà jugée. Vous avez décrété que toute chapelle serait regardée comme affectée au culte public, c'est-à-dire comme appartenant à la nation, à moins qu'elle ne soit dans l'intérieur d'une maison particulière, et qu'elle n'ait qu'un seul chapelain dont la nomination soit à la seule disposition du propriétaire et sans nécessité de provisions de l'évêque.
Mais, lorsque vous avez besoin de l'institution du supérieur, cela devient un objet public et un bien natioual : si l'on ne regarde pas comme bien domestique et non national les biens qui ne réuniraient pas ces conditions, on pourrait s'adresser aux administrations pour s'occuper avec l'évêque des moyens de pourvoir à l'exécution des fondations.
Les mots : à la seule disposé tion du propriétaire, s'appliquent aux patrons comme propriétaires disposant par la nomination aux chapelles; l'Assembléera d'ailleurs déjà prononcé en faveur des patrons des chapelles cas-trales.
(L'Assemblée, après une épreuve douteuse, décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer.)
Messieurs, vous ne voulez pas mécontenter les communautés, les çaroisses, mais vous voulez être justes à leur égard; chacun a droit de donner son avis quand il s'agit de sa propriété : ne disposez donc pas, sans leur propre consentement, de biens dont votre comité reconnaît que la propriété leur appartient.
En conséquence, je demande par amendement qu'il ne soit procédé à la vente des biens de fondations des églises paroissiales qu'avec le consentement des communautés mêmes ou des administrateurs de leurs fabriques.
(Cet amendement est rejeté par la question préalable.)
Il' existe une espèce d'immeuble qui ne dépend pas de l'autorité de l'Assemblée nationale. Ce sont de simples fondations qui n'ont aucune hypothèque sur les propriétés foncières, qui sont données à la charge, par le curé, de faire des prières pour le fondateur. Or, il n'est pas dans le pouvoir de l'Assemblée nationale de changer cette fondation. {Murmures.) Je demande donc qu'au lieu d'immeubles, on mette les fonds de terre seulement.
,rapporteur. Je réponds à M. Foucault par la question préalable.
Je demande que M. le rapporteur me donne une réponse plus motivée que la question préalable.
Un domaine est chargé d'une redevance eu bougies, en agneaux, etc. ; comment rembourserez-vous cette fondation ?
, rapporteur. Messieurs, plusieurs de ces objections ont besoin d'éclaircissements. 11 y a deux sortes de biens affectés aux fondations ; savoir ; des rentes et des immeubles réels. Quand un bien-fonds est hypothéqué seulement à la sûreté du service, alors ce n'est pas un immeuble réel de la fondation, car c'est la rente qui est le bien delà fondation. (Murmures.) Or, vous ne parlez point des rentes. Tout est doDC clair,
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'amendement.)
Ce n'est pas assez de vendre les biens des fondations régies par les fabriques, il faut que tous les immeubles dépendant des fabriques soient vendus, puisque la nation pourvoira désormais au culte puhhc,
met aux voix le projet de décret.
Le côté droit s'écrie : Point de voixl
(Le projet de décret du comité est adopté.)
, rapporteurLe comité serait d'avis, pour plus grande sûreté, d'expliquer les bâtiments, édifices et emplacements qu'il est nécessaire de conserver.
Voici l'article additionnel que nous vous proposons :
« Les autres biens immeubles réels desdites fabriques seront de même vendus; et de leur produit net il sera payé auxdites fabriques l'intérêt à 4 0/0, comme il est dit ci-dessus, à charge de l'employer aux dépenses desdites églises. Sont exceptés seulement de ladite aliénation les bâtiments et les propriétés foncières actuellement consacrés à différents usages relatifs au culte, comme églises et sacristies, tours et clochers... (Murmures à droite)... fabriques, cimetières, presbytères des paroisses, succursales et autres bâtiments servant à loger les personnes employées au service de l'église. »
Cela renferme tout ce qu'on peut désirer.
Un membre : J'observe à l'Assemblée qu'il y a des maisons établies pour l'éducation de la jeunesse, qui devraient être aussi exceptées.
Il ne devrait être question dans cet article, ni des églises, ni des cimetières, ni des sacristies. Toutes ces choses-là sont exceptées par elles-mêmes, et il est véritablement indécent de les y trouver.
(L'article additionnel est renvoyé au comité,)
L'ordre du jour est 1 v projet ' de décret du comité des finances sur la fixation des dépenses de Vannée 1791.
, au nom du comité des finances. Lorsque le comité des finances a formé le tableau des dépenses publiques, soit en rassemblant les décrets déjà rendus par l'Assemblée, soit en évaluant les dépenses qui n'étaient pas encore décrétées, j'ai eu l'honneur de vous dire en son nom qu'il ne vous soumettrait aucun projet de décret, parce que le travail n'en était pas susceptible; qu'il ne faisait que précéder le comité d'imposition, et vous rendre un compte général ; mais, en même temps, qu'il vous rendait ce compte discuté sur des pièces, une à une, dans le comité des finances. Ces pièces composent des tableaux divisés en 3 parties, suffisamment détaillées pour donner à chacun des membres de l'Assemblée des notions précises sur le montant de chaque dépense.
Ces tableaux sont à l'impression. Le comité avait imaginé que l'Assemblée attendrait que la distribution en fût faite, et que chacun eût préparé ses observations dans le silence du cabinet, avant de mettre cette matière en discussion. Le comité étant resté dans cette opinion, j'attendrai que l'Assemblée donne de nouveaux ordres pour essayer de lui présenter un projet de décret. Si l'Assemblée veut que cette forme beaucoup plus régulière, beaucoup plus instructive, soit observée, je demanderai l'ajournement de cette discussion au surlendemain du jour où la distribution des états aura été faite ; et elle le sera sous trois jours.
(Cette motion est décrétée.)
Je voudrais bien que pendant le temps qui s'écoulera jusqu'à ce que les pièces justificatives du compte du comité des finances aient été rendues publiques, les comités de la marine et militaire voulussent bien présenter un travail d'après lequel l'Assemblée nationale pût fixer, d'une manière invariable, les dépenses de ces départements. Il est extrêmement nécessaire en effet de connaître la fixité des dépenses, afin que le comitépuisse partir d'une base fixe pour asseoir les différentes parties de la contribution dans des propositions exactes avec les diverses branches qui doivent la supporter, et afin que l'Assemblée soit en état de déterminer, par un décret général, la totalité de l'impôt de l'année 1791, qui ne peut plus sans danger souffrir le moindre délai. Or, je ne vois pas comment on pourrait le déterminer si on ne sait pas quelle est la dépense.
appuie cette motion.
La fixation des dépenses de la marine dépend de ce que vous décréterez pour |
l'organisation des différentes parties qui la constituent : elle ne peut avoir lieu que lorsque vous aurez fixé cette formation.
(de Saint-Jean-d?Angély). M. Malouet ne se rappelle pas sans doute que, lorsque M. le rapporteur a demandé qu'il lui fût ordouné par l'Assemblée de présenter un état des dépenses à faire dans l'année, il a divisé ces dépenses en deux classes : l'une qui a été déterminée d'une manière précise par vos décrets pour l'année 1790, l'autre qui,n'ayant pas pu encore être fixée, ne le serait que d'après les aperçus résul-sultant des anciennes dépenses; et ce mode a été adopté par l'Assemblée.
Ainsi, de ce que le département de la marine n'est pas organisé dans toutes ses parties, il n'en résulte pas que ces mêmes dépenses peuvent être fixées par aperçu, suivant les derniers tableaux qui vous ont été présentés. Je demande donc que, dans le plus court délai possible, le comité d'imposition vous présente les moyens de subvenir aux dépenses qui ont été ordonnées.
Par l'ohservation que j'ai faite, je n'ai pas entendu retarder le travail du comité de l'imposition. Il est tout simple que,dans l'état où se trouve actuellement le travail du comité de la marine, l'Assemblée veuille bien se contenter d'un aperçu; je n'y vois nulle difficulté.
J'observe à l'Assemblée que s'en rapporter aux états des anuées précédentes sur les dépenses fixes serait à mon avis une très mauvaise mesure : car on n'ignore pas que, dans l'administration de la marine prinr cipalementj il y avait des dépenses et des abus de tous genres. Le premier devoir de l'Assemblée nationale est de se faire présenter par le comité de la marine les moyens de détruire ces déprédations scandaleuses. Je demande qu'avant de prendre en considération les états de l'année dernière, on ne se détermine sur les dépenses fixes de la marine, qu'après avoir entendu le comité sur la réforme de ces abus.
La question qui se présente en ce moment est celle de savoir si vous ne devez pas sur-lé-champ fixer le taux des impositions pour l'année 1791. Quoiqu'une partie des dépenses ne puisse encore être présentée que par aperçu, si vous attendez pour décréter la masse des impositions que tous les objets particuliers de détail soient décrétés, vous attendrez bien jusqu'en 1792. Vous avez établi une mesure qui vous met à l'abri de tout inconvénient : c'est la caisse de l'extraordinaire. Si vous décrétez une somme d'imposition trop faible et inférieure aux besoins du Trésor puDlic, vous pourrez puiser dans cette caisse cequi vous manquera; si, au contraire, votre appréciation est trop élevée, vous y reverserez des fonds. Ce n'est pas 10 ou 15 millions qui doivent arrêter l'organisation de l'impôt.
Je demande donc que l'Assemblée statue sans retard sur la fixation des impositions pour l'année 1791.
Messieurs, je suis étonné que l'on propose à l'Assemblée de fixer la somme de l'imposition avant d'avoir déterminé la somme des dépenses,. (Murmures.) Il est infiniment im-portaut que l'Assemblée ne fasse point une erreur grave, et il y a des erreurs très graves dans
les aperçus présentés : cela est d'autant plus important que la détermination que vous allez prendre sur les dépenses publiques,sera la base de la législation nouvelle de l'impôt. Atténuer la somme nécessaire aux dépenses publiques ce serait vous mener à établir un ordre de choses qui produirait, dans la recette de l'année, un déficit de 30 à 40 millions, malheur passager qu'il serait peut-être possible de remplacer, mais qui détruirait, dans les années suivantes, les ressources que vous pourriez avoir pour suppléer à ce déficit.
Au surplus,je ne puis m'empêcher d'admirer la facilité avec laquelle le comité de3 finances et le comité d'imposition s'appuient constamment sur la caisse de l'extraordinaire, c'est-à-dire la facilité avec laquelle ils vous proposent de manger vos capitaux, au lieu d'établir vos revenus. C'est par cette méthode que les administrateurs des finances ont creusé le précipice où a failli être engloutie la fortune publique; c'est ainsi que les derniers ministres des finances ont accumulé une dette de 2 milliards par une coupable indulgence pour les peuples.
Un membre à gauche : Dites : pour les grands I
M. de Cazalès. Ainsi, je ne puis trop vous dire combien il est important que vous ne cherchiez à vous abuser vous-mêmes sur la portion d'impositions que vous devez décréter. Vous devez vous armer de sévérité à cet égard, parce que, si vous êtes trop indulgents dans ce moment-ci, les générations suivantes vous le reprocheront amèrement ; et elles auront payé bien cher le petit triomphe que vous vous serez donné d'établir 20 ou 40 millions de moins sur l'impôt.
Je conclus donc à ce que la quotité de l'impôt à répartir sur la nation ne soit déterminée qu'après la distribution des tableaux promis par le comité des finances, et à ce que les comités militaire et de marine soient invités à donner au plus tôt l'état de leurs dépenses.
Votre comité des contributions publiques ne vous entraînera pas à une indulgence coupable; mais il a senti, et vous sentirez aussi, que vous devez fixer les contributions au taux seulement nécessaire pour pourvoir à vos besoins ; et que, s'il y avait quelque incertitude, il vaudrait bien mieux que les impositions restassent plutôt au-dessous pour cette année, que de s'élever au-dessus... (Murmures à droite; applaudissements à gauche.)
Nous serons très loin de vous proposer d'absorber des capitaux considérables par vos dépenses courantes, mais nous avons pensé, et nous pensons encore, qu'il sera de votre prudence de faire faire par la caisse de l'extraordinaire, s'il y a lieu, quelques avances qui seront ensuite recouvrées par le meilleur ordre des finances que vous allez établir. Votre comité des contributions désire que vous lui disiez, le plus tôt possible, quelle somme vous est nécessaire; il vous présentera des moyens de vous la procurer. Je demande donc qu'on passe à l'ordre du jour.
Je demande que l'on présente incessamment à l'Assemblée le rapport concernant les dettes particulières des anciennes provinces, afin qu'il soit possible de déterminer la portion de ces dettes qui restera à la charge de la nation.
(L'Assemblée décrète l'ordre du jour.)
L'ordre du jour est un rapport du comité de
l'imposition sur les taxes, vulgairement nommées droits, à Ventrée des productions et des marchandises dans les villes.
(de Nemours), rapporteur (1). Messieurs, votre comité de l'imposition, en poursuivant sa pénible carrière, est obligé de vous parler aujourd'hui de3 taxes à l'entrée dans les villes sur les objets destinés à la consommation de leurs habitants.
Ces taxes sont aussi, et comme toutes les autres, des impôts déguisés sur les campagnes.
Les habitants des villes vivent, en général, de revenus déterminés. Les uns dépensent le fermage de leurs terres, l'intérêt de leurs capitaux, les honoraires de leurs emplois, et n'ont pas autre chose à dépens^; les autres reçoivent des salaires ou font des gains; et ces gains, ces salaires des commerçants détailleurs, des artisans, des ouvriers, des domestiques qui viennent participer dans les villes, pour prix de leurs utiles travaux, à la distribution de richesses que les propriétaires de revenus y exercent, ne peuvent être pris que sur la dépense de ces propriétaires.
Il y a quelques commerçants qui se livrent aux spéculations et à l'entrepôt, dont les profits s'étendent sur la dépense des propriétaires de plusieurs villes; et, quand ils se portent jusqu'au commerce étranger, ils sont balancés du plus au moins par les profits que les commerçants étrangers font sur les marchandises qu'ils donnent en retour.
Il y a des manufacturiers et des fabricants ; mais un homme qui fait des étoffes vit de son. gain, précisément comme un homme qui, de ces étoffes, fait des habits ; comme un nomme qui les use à des jeux frivoles, pour amuser des spectateurs ; comme un maçon qui construit un mur ; et ce gain, que les agents de tous les services utiles ou agréables font les uns sur les autres, ne peut, en dernière analyse, être payé que par les gens à qui la terre, les mines, les carrières où la pêche donnent un revenu, et dont ceux qui préfèrent la variété des jouissances à leur douce intensité , se réunissent dans les villes avec les principaux fonctionnaires publics.
Il faut bien remarquer ce principe fondamental et d'une incontestable vérité, qu'aucun de ces propriétaires, ni de ces fonctionnaires, ne peut dépenser plus qu'il n'a; et que les artisans qu'ils font travailler, les commerçants qui les approvisionnent, ne peuvent gagner, ni par conséquent dépenser à leur tour, qu en raison de ce que les propriétaires de revenus dépensent.
La consommation des villes, estimée en argent, est donc invioîablement bornée au revenu que les propriétaires qui s'y rassemblent tirent de leurs capitaux, de leurs terres, de leurs rentes, ou de leurs emplois.
Lorsque l'on met des taxes sur les denrées qu'eux et leurs salariés consomment, qu'est-ce à dire ? Que l'on fera renchérir leur subsistance et augmenter le prix de leurs consommations? Non ; car, sur leurs moyens bornés, ils ne peuvent pas payer plus de consommations, ni des consommations plus chères.
Quelle est donc la chose que l'on fait ?
On prend une partie du prix de leur consom-
L'effet de cette opération ne se borne point là.
C'est dans les marchés que se règlent tes prix des productions , par la concurrence qui s'y établit, tant entre les vendeurs qu'entre les acheteurs; et les marchés se tiennent dans les villes où sont les besoins les plus multiplias, et où un plus grand rassemblement d'hommes et de richesses fait affluer les vendeurs qui viennent y chercher un débit meilleur et plus assuré.
Les prix des villes, et surtout ceux des grandes villes où sont les principaux marchés, règlent et fixent donc les prix des productions de tout le royaume; car on ne peut pas vendre, dans les campagnes, plus cher qu'à la ville ; sans quoi on n'irait point à la ville : il faut même que l'on vende,, dans les campagnes, à plus bas prix qu'à la ville, au moins de toute la valeur des frais de voitures. Il en résulte que la perte éprouvée par les vendeurs de productions et de marchandises, en raison des taxes mises à l'entrée de leurs marchandises et de leurs productions dans les villes, s'étend sur la totalité des productions et des marchandises du royaume ; ce qui diminue la valeur totale des récoltes d'une somme autant au-dessus de l'impôt perçu à l'entrée des villes, que la consommation du royaume est au-dessus de la consommation des villes.
La perte qu'essuient l'agriculture et les manufactures par ces fortes taxes, est donc infiniment supérieure au produit que les villes ou le fisc en peuvent retirer.
Tels sont, Messieurs, les principes très certains qui militent contre l'établissement des taxes à l'entrée des productions et des marchandises dans les villes, qui en amèneront un jour la cessation absolue, qui devraient l'amener dès aujourd'hui, si la répugnance pour l'imposition foncière était moins puissante; mais qui doivent du moins porter à les modérer beaucoup, lorsque les dispositions que les circonstances prescrivent à la majorité des représentants de la nation, et l'opinion publique* obligent de chercher, dans une perception de ce genre, une des sources des revenus de l'Etat.
Votre comité doit vous exposer aussi les raisonnements plus ou moins spécieux qu'on allègue en faveur de cette sorte de taxes, et dont quelques-uns ne sont pas destitués de fondement.
Les villes, dit-on, en cela même qu'elles offrent un débouché pour les productions des campagnes, et qu'un plus grand nombre de propriétaires de revenus y fixent leur domicile et y établissent pour l'achat des productions et des marchandises une concurrence plus animée, les villes sont un avantage considérable pour les campagnes qui peuvent y débiter leurs productions. Ces campagnes sont plus riches que les autres campagnes, parce que la concurrence des riches acheteurs y élève nécessairement davantage le prix de leurs productions. Et s'il est juste en général que les impositions soient exactement proportionnelles aux revenus, il n'est pas contraire à la raison, que, selon le principe que SoIon avait établi dans Athènes, il y avait quelques contributions spéciales sur les citoyens les plus riches, sur les campagnes les plus productives.
Ce principe solonique qui aurait beaucoup d'inconvénients, s'il servait de base à des taxes arbitraires, paraît en avoir moins lorsqu'il s'ap-
plique à des taxes sur la consommation, qui n'exigent ni contrainte personnelle, ni inquisition domiciliaire,et qui se perçoivent aux entrées des vdles par une forme peu vexatoire.
Les villes, ajoute-t-on, sont le séjour des capitalistes que l'Assemblée nationale et que le public, dont l'opinion a tant d'influence sur les lois, désirent que l'on puisse soumettre à l'impôt, auquel une partie de leur fortune échappe toujours, auquel leurs consommations paraissent ne pouvoir échapper, môme lorsque les sommes qu'il en retire sont prises sur les vendeurs des choses consommées.
C'est encore dans les villes, continue-t-on, qu'abondent les étrangers, qui s'y rassemblent en proportion de ce que ces villes plus grandes, et réunissant plus de perfection dans les arts et dans l'industrie, plus de variété, plus de recherche dans les plaisirs de la société, leur promettent et leur procurent plus de jouissances. L'attrait qu'inspirent ainsi les villes, comme séjour des sciences, des arts et des amusements de toute espèce, appelle dans le royaume et dans l'enceinte de ces villes, des capitaux et des revenus étrangers qui viennent concourir par leur dépense à donner de la valeur aux productions et aux marchandises qui s'y consomment. La plus forte partie de cette dépense des étrangers tourne au profit des producteurs et des fabricants qui fournissent les denrées ou les autres marchandises nationales, et la moindre partie au profit de l'impôt mis sur le débit ou la consommation de ces productions plus ou moins ouvrées.
Ou en conclut qu'il n'y a pas d'injustice, lorsque tant de causes amènent dans les villes des revenus, et sur les campagnes qui peuvent contribuer à leur approvisionnement, la dépense de ces revenus, de leur demander une contribution spéciale et proportionnelle à la quantité, à la nature, à la qualité des productions et des marchandises, dont cet approvisionnement est composé.
En raison de ce que les villes sont plus considérables et tirent leur approvisionnement de plus loin, l'impôt mis sur les marchandises, destinées à leur consommation, s'étend plus loin.
En raison de ce que ces marchandises.sont en général plus précieuses, cet impôt peut et doit s'élever plus haut, relativement a leur quantité, pour approcher davantage de la proportion, avec leur valeur, qui paraît réclamée par la raison.
Ainsi, le royaume entier, et même l'étranger, concourant à la population de Paris, et à fournir les revenus qui s'y dépensent, et le royaume entier, contribuant aussi à fournir à Paris des approvisionnements en toute espèce de productions et de marchandises, les taxes à l'entrée de Paris sont véritablement une imposition générale sur tout le royaume, peut-être, à quelques égards, sur l'étranger.
Celles qui se payent à l'entrée de Rouen font un impôt particulier, tant sur la Normandie, que sur les autres ci-devant provinces qui contribuent à l'approvisionnement de Rouen.
Celles qui ont lieu à Bourges, au contraire, ne doivent être, à très peu près, qu'un impôt sur le département du Cher.
Et celles qui se perçoivent dans un simple chef-lieu de district ne sont guère qu'un impôt sur ce district.
C'est dans ce petit nombre d'observations et de maximes inutiles à développer davantage au milieu de l'Assemblée de législateurs qui a porté
jusqu'à ce jour le plus de philosophie dans son travail, que se trouve toute la théorie des taxes sur les productions et les marchandises à l'entrée des villes, et de leur graduation nécessaire, juste et naturelle, en raison de l'importance de ces villes, de la richesse de leurs habitants reg-nicoles ou étrangers, du plus grand territoire qui les alimente, et de la plus haute valeur des productions et des marchandises consommées dans leurs murs.
Cette théorie cependant éprouve quelques objections que votre comité est loin de vouloir dissimuler, ni à vous, Messieurs, ni au public ; car on ne peut fonder solidement aucune loi que sur la démonstration qu'elle est raisonnable, ou aussi rapprochée de la raison que les circonstances puissent le permettre.
Quelques personnes pensent que le tarif des droits d'entrée des villes devrait être uniforme dans tout le royaume, exactement le même pour les plus grandes et pour les plus petites villes, et que le revenu plus considérable,qu'on tirerait de ce tarif dans les villes de premier ordre, devrait résulter seulement de ce que 100,000 hommes font naturellement dix fois plus de consommations que 10,000.
Votre comité, après avoir longtemps et profondément discuté cette opinion, n'a pas cru pouvoir l'adopter.
Un seul motif peut conduire 100,000 hommes à se rassembler dans un lieu plutôt que 10,000 ; c'est que ce lieu où ils affluent leur présente plus de moyens de subsister, d'acquérir, de jouir, d'être heureux.
De cela seul donc qu'il y a dans une ville 100,000 hommes ou 500,000, et non pas 20,000, et non pas 2 ou 3,000, on peut conclure avec sûreté que chacun de ces hommes a proportionnellement, et l'un compensant l'autre, beaucoup plus de richesses dans la grande ville que dans la moyenne, et dans la moyenne que dans la petite ; que non seulement ils font des consommations plus abondantes, mais aussi des consommations plus délicates, plus précieuses, ou au moins plus chères. On peut conclure avec sûreté, que, dans le partage entre les individus qu'opèrent les dépenses et les salaires de toute espèce, les derniers des salariés auront meilleure solde dans la plus grande ville. L'examen des faits confirme ce premier aperçu. Lorsque l'on compare la valeur des consommations de Paris avec sa population, on trouve que chaque individu y a, l'un dans l'autre, quatre cents livres par an à dépenser ; tandis que dans plusieurs autres parties du royaume, chaque individu n'a pas cent francs. On voit qu'à Paris les journées de simple manœuvre valent trente à quarante sous, et dans la plupart des autres départements, de quinze à vingt sous; dans plusieurs d'entre eux, de dix à douze.
On trouve qu'à Lyon, la dépense moyenne des habitants est d'un peu moins de trois cents livres par tête, et les journées de vingt à trente sous.
Quant à la valeur des consommations, on remarque qu'à Périgueux, à Cahors, à Sarlat, on a du vin, même hon, qui, déduction faite du droit d'octroi, vaut à peine un sou la bouteille ; tandis qu'à Paris, le plus mauvais vin qu'on y boive, on peut dire même du vin réellement mauvais vaut au moins 4 ou 5 sous la bouteille avant d'avoir payé la taxe d'entrée, et détermine, en raison de cette valeur, le revenu de la vigne qui le produit, quoique déjà restreint par
le droit ou taxe d'entrée que ce vin rencontre dans son débouché principal.
Qui ne sait de plus que s'il y a une belle pièce de bétail, une volaille parfaite, un gibier excellent, un poisson rare, on l'envoie, autant qu'on le peut, à la grande ville, parce qu'on espère l'y mieux vendre, et que réellement on l'y vend mieux?
Ce petit nombre de vérités suffit pour faire abandonner l'idée de n'avoir qu'un même tarif applicable à toutes les villes, sans considérer leur importance, leur richesse, leur population, et pour convaincre qu'il faut, au contraire, examiner et peser toutes ces choses, si on veut agir avec équité, comme législateurs, avec sagesse, comme législateurs en linance, relativement aux perceptions à établir aux entrées des villes. Il est évident qu'on ne pourrait, sans injustice, traiter sur le même pied les consommations de Paris et celles de Bazas, lorsqu'il est évident que ces deux villes sont dans une position très dissemblable; que les ressources et les moyens n'y sont pas les mêmes; que le territoire qui les alimente n'a ni la même étendue, ni la même richesse ; que les consommations y sont dans un degré de fortune tout autre, et ont une autre nature de fortune.
Si vous eussiez cru, Messieurs, que toutes les consommations dussent être soumises à un tarif égal, et se réduire ainsi à une sorte de capita-tion presque uniforme sur tous les contribuables, vous auriez fondu tous les impôts dans une simple capitation, et vous n'auriez pris d'autre base de répartition, ni d'autre élément de la représentation nationale, que la population ; mais vous avez vu que, selon les localités, la population était ou riche, ou pauvre, ou dans un état mitoyen, et qu'il fallait y avoir égard dans la distribution des impôts et des taxes. Vous avez en conséquence décrété que la représentation nationale serait, en raison, composée du territoire, de la population et des contributions. Vous avez donc décrété qu'il y aurait de l'inégalité dans les contributions, relativement à la population, parce qu'il fallait y apporter toute l'égalité à laquelle vous pourriez atteindre, relativement aux facultés de ceux qui contribueraient à l'impôt ; et vous n'avez rien décrété de plus sage.
Ce n'est donc pas sans raison que votre comité croit devoir vous proposer de proportionner à la population et à la richesse des villes les taxes qui devront être établies à leurs entrées.
Cette disposition, au reste, ne sera que l'adoucissement de ce qui existait, de ce qui existence ne sera qu'un plus grand degré de perfection dans les mesures auxquelles la nécessité avait obligé de se soumettre.
11 y a dans la nature des choses une certaine puissance qui force l'ignorance même, qui contraint même le despotisme, à ne pas s'écarter entièrement des lumières de la raison; et, sans cela, il est trop certain qu'avec le pouvoir qu'ont eu la stupidité et la méchanceté, le genre humain aurait été anéanti depuis un grand nombre de siècles.
La fiscalité voulait obtenir un revenu considérable des taxes, qu'elle appelait insolemment droits à l'entrée des villes. Elle avait bien vu qu'à prendre pour règle de la contribution des grandes villes le tarif que les petites pourraient supporter, il n'y aurait pas de revenu, et l'on tir- rait à peine les frais. Elle avait bien vu qu'à soumettre les petites villes au même tarif que les grandes,
il y aurait injustice trop révoltante, attendu que les moyens de payer n'existaient pas dans les petites villes ; et que, de plus, il y aurait impossibilité de percevoir, attendu que dans les petites villes les moyens de coaction manquent également, que les clôtures y sont mauvaises, que les postes, les rondes et les patrouilles nécessaires pour percevoir un tarif un peu élevé en absorberaient le produit quand il ne porterait que sur la consommation d'un petit nombre d'individus.
On avait reconnu vaguement qu'il n'y avait en ce cas que la faiblesse de la taxe qui pût diminuer la contrebande; et l'on avait modéré les tarifs des villes dans une proportion graduelle en raison de ce qu'elles avaient moins la possibilité de payer, de ce que l'on avait moins la possibilité de les y contraindre.
On avait en générai poussé sur chacune d'elles la perception jusqu'où elle avait pu aller. On avait été rarement arrêté par aucune autre cause que par l'impuissance de demander plus; et la plupart des villes s'étaient trouvées imposées à leurs entrées avec excès, mais par des tarifs gradués avec assez de régularité.
Paris payait trente-quatre millions de taxes à l'entrée, sans compter les frais de régie; c'était sur le pied de cinquante livres quinze sols par tête de tout âge, depuis les enfants à la mamelle.
De cette énorme perception vingt-huit millions ou quarante livres dix sols par tête, même d'enfant, étaient pour le Trésor public, le surplus pour les besoins de la municipalité et des hôpi-taux.
Lyon, dont ïa population n'est, selon M. de la Michodière, qui la connaît bien, que de cent trente-huit mille huit cent quarante âmes, payait à ses entrées quatre millions trois cent quatre-vingt mille six cent vîngUsix livres, ou trente et une livre onze sols par tête d'habitant.
Orléans acquittait neuf cent soixante et un mille huit cent dix-huit livresy qui partagées entre trente-huit mille quatre cent vingt têtes, coûtaient à chacune vingt-cinq livres par année, sur lesquelles dix-neuf livres dix sous appartenaient à l'Etat ou à la maison d'Orléans, comme apana-giste, et, en cette qualité, aux droits de l'Etat : le surplus servait aux besoins de la ville et de ses hôpitaux.
Et dans les petites villes, la Flèche, où vivent quatremille quatre cent soixante-douze habitants, payait vingt mille trois cent cinquante-cinq livres, ou un peu plus de quatre livres onze sous par tête.
Rocroi, qui n'a que deux mille deux cent quatre-vingt-huit habitants» payait, de cette manière, sept mille quatre cent trente-quatre livres, ou environ trois livres par tête de tout âge.
Ces petites villes ont besoin d'être soulagées; et cependant leur tarif, s'il était appliqué aux grandes villes, n'y produirait pas les trais que leur garde exige. Or,ce ne serait pas la peine d'établir des taxes aux entrées des villes, et de nuire ainsi au commerce qui fournit leurs consommateurs, pour n'en retirer aucun revenu public. Ceux qui demandent que l'on n'établisse aux entrées des grandes villes que les mêmes tarifs qui peuvent être perçus dans les petites, que les mêmes taxes dont ces petites villes peuvent faire l'avance, feraient mieux de demander la suppression de toute taxe aux entrées ou sur les consommations; car que serait-ce qu'un impôt dont il n'existerait que le fardeau et le tourment, et qui ne produirait rien au Trésor national?
Mais si l'on supprimait cette manière, certaine-
ment peu favorable, d'imposer sur les citoyens un revenu pour la nation, il ne faudrait pas avoir deux poids et deux mesures ; il ne faudrait pas permettre aux villes d'employer pour elles-mêmes la forme qu'on aurait rejetée ; il faudrait exiger qu'elles pourvussent à leurs besoins privés, sans arrêter les voitures, sans ralentir les approvisionnements, sans priver les producteurs et les fabricants du bénéfice que peut leur procurer la dépense des consommateurs.
Les villes ne désirent point cette manière d'être; elles préfèrent leurs taxes d'entrée à l'impôt sur les fenêtres, et à celui sur les cheminées que vous avez déjà établi, avec plus de sens et de sagesse, en décrétant que la contribution mobilière aurait, pour base, le prix des loyers, toujours déterminé par la beauté, la clarté, la commodité des appartements; elles le préfèrent à ces deux impôts, qui spécialement tournés vers ces grands besoins de la vie, la lumière et la chaleur, rendent les maisons tristes et malsaines, et ne peuvent être en juste proportion avec le revenu; elles le préfèrent même aux sous pour livre qui seraient nécessaires sur la contribution foncière et mobilière pour donner le même pro-^ duit que les taxes d'entrée, quoique l'impôt dût alors être réparti, comme ces contributions fondamentales, avec une entière équité,
Quelques philosophes croient que les habitants des villes sont plus avancés dans la théorie de l'impôt, et qu'ils solliciteront la permission de fournir à la nation, par des sous pour livre additionnels à la contribution mobilière, les vingt-quatre millions pour lesquels les taxes à leurs entrées ont été comprises dans votre projet de finance, et de pourvoir, en outre, sous la même forme d'addition à la contribution mobilière, à toutes leurs dépenses municipales qui vraisemblablement seront moindres, mais qui peuvent aussi monter à vingt quatre autres millions. Votre comité de l'imposition serait loin d'y voir de l'inconvénient ; il se trouverait heureux que cette pétition pût avoir lieu, plus encore qu'elle fût générale, ou qu'elle eût au moins pour elle la majorité des villes. Il pense qu'il faudrait l'accueillir, même isolément, de la part des villes qui s'y porteraient; et il vous propo^ sera de favoriser, sous le titre d'abonnement, une mesure du même genre, lorsqu'elle sera nécessaire ou réclamée. Il voudrait pouvoir assurer les revenus publics, en respectant partout l'entière liberté du commerce, gage des succès de l'agriculture, et principe fécond de la prospérité sociale. Mais les vives objections que la contribution mobilière et les règles de sa répartition ont éprouvées, principalement dans la capitale ; les grands éloges qui furent alors donnés à la perception, qu'on appelait insensible, sous la forme de droits d'entrée et de consommation, montrent assez, peut-être trop, combien il y a peu d'apparence qu'on aime mieux augmenter des quatre cinquièmes la contribution mobilière dans tout le royaume, et la tripler peut-être à Paris,'plutôt que d'avoir des taxes d'entrée. Plût au ciel que votre comité se trompât, et que l'on pût douter à ce sujet de la véritable opinion publique dont le poids irrésistible vous fait la loi I Car, Messieurs, telle est l'obligation qu'une impérieuse nécessité vous prescrit, surtout dans un temps de commotion et de régénération universelle : c'est d'avoir à la fois l'argent qu'exigent les besoins publics, et l'affection du peuple; cest de préférer, autant qu'il est possible, les impôts qui plaisent le plus à ceux qui les payent, ou
même à ceux qui n'eu font que l'avance, mais qui croient les payer.
Toutes les villes crient contre les octrois ou les taxes à leurs entrées et sur leurs consommations; mais toutes les villes veulent des octrois au moins pour leurs besoins municipaux, et toutes sont accoutumées à en payer aussi pour le Trésor national; elles répugneraient à une autre manière de fournir à l'Etat le même revenu, ou même un moindre revenu.
De quoi s'agit-il donc pour toutes ces villes? De diminuer, autant qu'on le pourra, leur contribution : c'est ce que propose votre comité. Les villes ont payé jusqu'à ce jour soixante-dix millions eh taxes d'entrée, dont quarante-six pour le gouvernement. Le comité demande qu'au lieu de quarante-six millions la nation n'en perçoive plus que vingt-quatre. Les détracteurs de vos projets appellent «cela mettre des taxes sur les villes : non pas, Messieurs, c'est en ôter.
De quoi s'agit-il encore? De faire en sorte que les taxes,qui seront laissées sur la consommation de leurs habitants, ne soient réellement que des taxes de consommation, et ne deviennent pas des impôts sur la circulation et sur le commerce.
Vous avez cru devoir détruire les péages; mais les taxes à l'entrée des villes, quoique diminuées conformément à vos intentions et au projet de votre comité, seraient encore des péages, si elles portaient sur les marchandises destinées au commerce. Elles ne peuvent être regardées comme justes et proportionnelles que sur les denrées et marchandises destinées à la consommation directe des habitants de la ville où on les perçoit.
Votre comité vous proposera donc, premièrement, de permettre le passage de bout de toutes les marchandises dans toutes les villes autour desquelles on ne peut pas tourner pour suivre sa route.
Il vous proposera, secondement, d'exempter de la taxe de consommation, les marchandises qui sont les plus connues pour être l'objet d'un commerce d'entrepôt. Il ne vous proposera pas la restitution de la taxe d'entrée, lors de la sortie des marchandises qui l'auraient acquittée; cette forme est trop compliquée, elle est nécessairement coûteuse ;mais vous devez la repousser, surtout parce qu'elle invite à la fraude, et qu'elle appelle ensuite la vexation qui détruit la liberté.
En deux mots : réserver à chaque ville, selon sa localité, la liberté du commerce de spéculation, d'importation et de réexportation, imposer la consommation de chaque ville par des taxes à l'entrée, dont le tarif soit proportionné à la richesse et à la population de la ville, comme aussi à l'étendue et à la richesse du pays qui concourt à son approvisionnement, et sur la culture et les manufactures duquel la taxe d'entrée retombe inévitablement en définitive : tels sont les flambeaux dont votre comité a toujours tâché d'éclairer sa marche; il avoue que, malgré eux, elle a été embarrassée et ralentie par des difficultés de toute espèce.
Les affaires des villes et les taxes qu'elles supportent présentent actuellement une étonnante diversité.
Les unes, indépendamment de ce qu'elles fournissaient directement au Trésor public, acquittaient comme charges municipales et locales des dépenses de fournitures aux troupes ou aux états-majors; et ces dépenses de quelques villes étaient une seconde espèce d'impôt à la décharge ou du département de la guerre ou du service
des pensions. Ces villes, qui avaient plus de charges, étaient obligées de se soumettre à des tarifs plus hauts, plus nuisibles à leur commerce, plus onéreux à leurs habitants.
Cette apparence de revenus municipaux, liés à des charges qui les absorbaient, et qui auraient dû être ou supprimées, ou prises au compte général de la nation, mettait obstacle à ce qu'on pût soumettre à aucun ordre raisonnable et justement gradué, à aucune proportion régulière, les taxes à l'entrée des villes.
D'autres avaient acheté du gouvernement, par des sommes effectives qu'elles lui avaient fournies, ou par des emprunts faits à son profit, le droit d'établir certains octrois ou l'engagement de certaines branches de revenu, dont il y en a même qui sont dénaturé à ne pouvoir subsister. Tel est le droit sur les soies étrangères, matière première très importante pour les manufactures nationales. On avait assujetti ces soies, pour payer ce droit anticommercial, à passer par la douane de Lyon, de quelque côté qu'elles entrassent dans le royaume. Le droit et la servitude étaient visiblement très injustes et très onéreux pour les manufactures de Tours, de Nîmes, de Saint-Chamont et de Paris. Vos comités de commerce et d'imposition vous ont proposé de supprimer l'assujettissement, de diminuer considérablement la taxe d'entrée dans le royaume, et d'en appliquer le produit au Trésor public. Rien n'est plus juste; mais vous ne le pouvez, sans indemniser la ville de Lyon des sommes qu'elle a fournies pour acheter ce .monopole et ce revenu, ou sans prendre au compte de l'Etat les dettes qu'elle a contractées pour se procurer ces sommes que l'Etat n'aurait pas dû recevoir.
Quelques autres villes se sont endettées pour bâtir des casernes, ou pour des fortifications qui devaient être une dépense générale de la nation, et on a exagéré leurs tarifs pour solder ces dépenses.
Il est juste et nécessaire de régler ces vieux comptes, de prendre à la charge commune ce qui ne doit pas être une charge particulière, de rétablir ainsi toutes les villes dans leur état naturel, de faire cesser les motifs d'exception qu'elles pourraient alléguer, afin de pouvoir ensuite les classer avec équité et avec bon sens, et ne leur demander ni plus ni moins qu'elles ne doivent à la contribution générale, dans un système régulier et raisonnable de taxes d'entrée.
Votre comité croit utile, conforme à votre justice et à votre sagesse, de nettoyer, par cette mesure équitable et préparatoire, le champ sur lequel vous devez travailler et recueillir.
Arrivé à ce terme, et au moment de classer enfin les villes par leurs distinctions naturelles, votre comité a trouvé devant lui deux obstacles en apparence insurmontables :
Le premier est la nécessité de réunir dans la même classe des villes dont la population présente des différences plus grandes que celle qu'on trouve entre la population des autres villes qui occupent le terme le plus bas et le terme le plus élevé de deux classes qui se touchent.
Le second est le danger de regarder comme pareilles et de soumettre aux mêmes taxes des villes d'une population égale et d'un degré de richesse très disproportionné.
Le premier inconvénient semble d'abord être inséparable des classifications sur lesquelles se repose la faiblesse de l'esprit humain; mais il
ne serait réel que pour la paresse,la prévention, l'insensibilité qui regarderaient les classifications comme des barrières inflexibles, exclusives de tout adoucissement, de toute facilité, de tout rapprochement dans le passage d'une classe à l'autre. Il est nul, dans le fait, pour les philosophes laborieux qui ont le bon sens de concevoir que toute classification n'est qu'une nomenclature faite pour donner du repos à la pensée, qui n'empêche point la nature ae procéder toujours par nuances insensibles. Or, c'est la nature dont votre comité voudrait vous proposer d'imiter la marche; il voudrait que votre travail fût en tout digne de votre équité.
Cette équité, qui est à la fois votre devoir et votre puissance, ne serait pas satisfaite, si vous ne trouviez pas les moyens de suivre pour le tarif des taxes d'entrée la progression croissante et décroissante, que présente la population des villes dans le passage d'une classe à l'autre.
Elle ne serait pas satisfaite, si, pour élément de vos classes, vous n'aviez égard qu'à la population.
Elle ne serait pas satisfaite encore si, dans les modifications que vous devrez apporter à la classification des villes, vous vous exposiez à vous déterminer par des considérations arbitraires ; car l'arbitraire, même lorsqu'il s'applique à rencontrer la justice, ne peut jamais démontrer qu'il l'ait véritablement trouvée, et il n'y a point d'injustice qu'il ne puisse rendre plus ou moins plausible.
Il faut donc s'imposer des lois invariables appuyées sur la nature des choses et sur des faits publics, par rapport auxquels il ne soit pas possible de se tromper. Il faut enchaîner par elles, et l'ingéniosité scrupuleuse de la vertu qui, voulant trop bien faire, pourrait s'induire elle-même en erreur, et la faiblesse qui pourrait se laisser émouvoir par l'éloquence des allégations et des sollicitations, et les efforts de ce patriotisme privé qui, dans le balancement des intérêts de sa ville et de ceux de l'Etat, entraîne quelquefois des" citoyens d'ailleurs recomman-dables à préférer la partie au tout, et à ne s'estimer que davantage pour avoir commis ce délit sérieux.
Votie comité a tourné tous ses soins et toute son intelligence à saisir ainsi quelques règles simples et claires, qui puissent diriger, vous, lui, et les exécuteurs de vos décrets dans une route obscure, où la plus grande équité de détail peut seule compenser le malheur d'être obligé, par l'opinion générale,de s'écarter des vrais principes de l'imposition.
Il espère avoir réussi autant qu'il était possible. Il espère même avoir trouvé des moyens de balancer, de compenser, de borner, de réparer les erreurs qui duraient pu, ou pourraient échapper à son zèle et à celui de ses coopéra-teurs.
Il vous proposera de ranger les villes sous huit classes ; mais de ne regarder ces classes que comme des lignes générales de démarcation qui permettront, dans chaque classe, toutes les modifications, toutes les subdivisions que la justice pourra réclamer.
La première classe comprendra Paris, ville sans pair.
La deuxième, les villes moindres que Paris, qui ont plus de quatre-vingt mille habitants.
La troisième, celles qui en ont depuis cinquante mille jusqu'à quatre-vingt mille.
La quatrième, depuis trente mille jusqu'à cinquante mille.
La cinquième, de dix-huit mille à trente mille. , La sixième, de dix mille à dix-huit mille.
La septième, de six mille à dix mille.
La huitième, au-dessous de six mille, mais non pas au-dessous de deux mille cinq cents.
Il croit à désirer que les rassemblements de population qui présentent moins de deux mille cinq cents individus, ne soient pas soumis à ces suppléments d'impositions, si nuisibles à l'impôt même, qu'on appelait improprement droits, et qu'il faudra désormais nommer taxes à l'éntrée ou sur la consommation.
Dans le cas cependant où des villes moins considérables voudraient et solliciteraient des taxes sur leurs consommations pour leurs dépenses municipales, votre comité a songé aux moyens d'avertir leurs habitants de leur véritable intérêt, en liant dans ces villes mêmes,comme dans celles qui sont d'une plus grande importance, le revenu privé de la ville avec un revenu national ; car il lui paraît que le meilleur moyen de prévenir les abus dans toute perception, est de n'en laisser faire aucune sur le peuple sans que l'Etat y ait
Aart, sans que le gouvernement et le pouvoir égislatif aient droit, devoir et intérêt, d'y apporter une utile et vigilante surveillance.
Ainsi huit classes de villes qui auront nécessairement des taxes à leurs entrées ou sur leur consommation, et une neuvième classe, en quelque façon surnuméraire, de plus petites villes qui ne pourront être assujetties à cette sorte de taxes que sur la demande même de leurs habitants.
Vous avez reconnu. Messieurs, la justice et la nécessité de graduer les taxes d'entrée entre ces différentes villes selon leur importance et leur opulence, pour en tirer un revenu de quelque valeur, et pour le proportionner à la fois aux moyens de payer et aux moyens de percevoir.
Votre comité doit vous indiquer pour cette graduation une échelle fondamentale, et les soins, les règles, les précautions qui seront nécessaires pour adoucir chaque pas qu'on fera en suivant cette échelle, et pour arriver dans chaque ville au point le plus exact d'équité relative auquel il soit possible d'atteindre.
D'abord dans Paris, où les taxes d'entrée produisaient à l'Etat quarante livres dix sols par tête de tout âge, et avec les frais de régie, coûtaient au peuple plus de quarante-trois, livres par tête, sans compter dix livres cinq sols de plus qui étaient perçus au profit de la ville et des hôpitaux ; le comité croit que les taxes d'entrée doivent être à l'avenir réduites et combinées, de manière à ne plus rendre à la nation que. dix-huit livres par tête d'habitant de Paris.
C'est une grande diminution ; mais Paris a fait de grandes pertes. Paris de plus était relativement à la taille ce qu'on appelle une ville tarifée, dans laquelle les taxes d'entrée tenaient lieu de celte imposition qui se trouvera généralement supprimée, et dout le remplacement sera confondu avec celui des vingtièmes et de la capita-tion, dans les deux contributions foncière et mobilière,
Paris, sur le tout, éprouvera un soulagement de plusieurs millions; mais,1e royaume entier en recevra de semblables, et n'enviera point à Paris, dout la contribution foncière et mobilière sera beaucoup plus considérable que n'étaient ses vingtièmes et sa capitation, la diminution de ses taxes d'entrée de quarante-trois livres à dix-huit livres par tête.
Les dépenses de Paris d'ailleurs sont notablement augmentées ; et quoique la nation doive reprendre à sa charge, dans la capitale comme dans les autres villes, les frais qui intéressent l'Etat entier, il est à craindre qu'on ne soit forcé d'établir pour la commune de Paris, à ses entrées, des taxes égales à celles qui seront levées pour le Trésor public.
Les dépenses municipales d'aucune autre ville ne peuvent s'élever dans une proportion aussi forte avec les taxes d'entrées qu'elles auront à payer au Trésor public.
Le principe qui détermine la graduation décroissante de ces taxes, oblige de mettre une grande distance entre les contributions aux entrées des villes de la seconde classe et celles de Paris.
Votre comité estime que la différence ne doit pas être moindre d'un tiers ; car, en comparant la valeur des consommations de ces villes avec leur population, on trouve que les individus y dé-
ensent environ un quart de moins qu'à Paris.
r, les impôts de supplément qui ne doivent porter que sur l'aisance demandent une graduation plus forte que celle des facultés prises en masse ; et c'est cette vérité qui vous décide à baisser le taux des tarifs sur chaque production, à raison de ce que les villes sont moindres en population et en richesse.
Celles-ci décroissent dans une progression assez régulière, depuis les villes de la secondé classe jusqu'aux plus petites villes. Les tarifs y peuvent être gradués Ue manière à produire, frais de régie compris, une perception sur le pied moyen de douze livres par tête dans les villes de la seconde classe ;
De dix livres dans celles de la troisième ;
De huit livres dans celles de la quatrième ;
De six livres dans celles de la cinquième ;
De quatre livres dans celles de la sixième ;
De quarante sols dans celles de la septième ;
De vingt sols seulement dans celles de la dernière.
De moins encore dans les villes de la classe surnuméraire, qui pourraient croire utile de solliciter des taxes sur leurs propres consommations.
Le comité annexe à ce rapport 8 projets de tarifs calculés avec soin pour les 8 classes de villes, à l'effet de donner ce produit, et qui ne peuvent s'en éloigner que de très peu de cnose.
Ces tarifs portent pour les villes des premières classes sur les boissons, les bestiaux ou la viande, quelques autres comestibles, les fourrages, les principaux combustibles, un très petit nombre de marchandises, et les matériaux à bâtir.
Toutes les étoffes, les toiles, la draperie, la soierie, la mercerie, la quincaillerie, la droguerie, et presque la totalité de l'épicerie en .sont exemptes.
On a réservé la même exemption à plusieurs espèces de comestibles, au charbon de terre et à la tourbe ; de sorte que le pauvre puisse vivre dans toutes les villes du royaume sans payer aucune taxe d'entréé.
La maxime de l'ancien gouvernement et dè l'ancienne finance, maxime odieuse qui avait enfanté la gabelle et les droits de détail sur les boissons, était que les taxes de consommation devaient porter sur la dépense des pauvres qui les rendait plus productives, parce que les pauvres sont nombreux. La maxime de votre comité, la vôtre, celle de la Constitution, est que les taxes de consommation ne doivent pas demander au
pauvre l'avance d'un argent qu'il n'a pas, et que le riche pourrait ne lui restituer que tard. Cette maxime de la raison et de la philosophie est qu'il faut soulager le pauvre, parce qu'il est sacré : Sacerrima res homo miser. L'histoire vous rendra témoignage que vous êtes les premiers législateurs fiscaux qui n'ayez jamais perdu cet axiome de vue.
C'est en suivant son esprit que, dans les villes des quatre dernières classes, on a joint aux exemptions qui auront lieu dans les classes supérieures celle de toute taxe sur le poisson, de quelque espèce qu'il soit.
Dans celle des trois dernières, on a ajouté l'exemption de taxe sur la volaille et le gibier.
Dans celle des deux dernières, on a étendu l'exemption aux bestiaux, à la viande et au petit nombre de marchandises d'épiceries qui peuvent payer des taxes modérées dans les grandes villes.
Ces villes des deux dernières classes, dans plusieurs desquelles les habitants nourrissent des bestiaux, seront débarrassées, par cette exemption, des formes gênantes établies aujourd'hui sur la sortie et la rentrée du bétail de la ville.
Enfin, dans la dernière classe, les fourrages et les bois de construction ont aussi été compris au nombre des marchandises exemptes.
Les bois de construction et le poisson le seront dans tous les ports'de mer; on arrivera au produit qu'ils doivent rendre en y baissant un peu moins la taxe sur les autres comestibles ou les autres matériaux à bâtir.
Mais le comité vous répète, Messieurs, qu'il ne vous propose ces tarifs que comme des bases générales qui pourront se prêter aux variétés qu'exigera le commerce particulier de chaque ville.
S'il en est une pour laquelle la taxe sur une certaine marchandise paraît trop onéreuse, on diminuera cette taxe, on la modifiera, on la supprimera même, et on en remplacera le produit en soutenant un peu plus haut le tarif sur une autre marchandise.
On aura le soin général de baisser le taux de quelques articles du tarif ou d'en supprimer quelques-uns en entier dans les dernières villes de chaque classe, afin qu'elles ne payent que très peu plus que les premières de la classe suivante.
Il faudra, par la même raison, hausser le taux de quelques articles dans les premières villes de chaque classe, pour rapprocher leur contribution de celles des dernières de la classe qui lui est immédiatement supérieure; en telle sorte néanmoins que chaque classe produise la somme totale indiquée par son taux moyen.
Il faudra enfin déterminer le taux du tarif dans chaque ville, non seulement par l'importance que donne à la ville sa population, mais encore par le degré d'aisance dont cette population jouit.
Là, on se trouvera entouré de pétitions et de prétentions d'un genre précisément inverse de celles dont votre comité de Constitution et de division du royaume a été assiégé lorsqu'il a fallu désigner les chefs-lieux des départements et des districts et l'emplacement des tribunaux. Il n'y avait pas une ville alors dont les députés n'exagérassent les ressources, la commodité, les facultés; où ils ne montrassent un grand nombre de citoyens vivant dans l'aisance et propres, par leur fortune comme par leurs études, à se livrer à tous les travaux de l'administration et de la judi-cature. Lorsqu'il s'agira de taxes d'entrée, il semblera qu'en moins d'un an la population de ces villes soit diminuée de moitié, que l'aisance ait
totalement disparu, qu'il n'y ait plus de moyens d'aucune espèce.
Le dernier tableau sera inexact en moins, comme le premier l'était en plus; mais de combien ? Voilà ce que la raison et ce que les observations même les plus scrupuleuses ne pourraient jamais dire, si elles portaient sur des faits vagues. Voilà ce que l'arithmétique dira, avec un degré d'approximation très suffisant, si on l'applique à des faits positifs, de manière à prévenir au moins les injustices de l'homme ; carie peuple pardonne, et avee raison, les erreurs involontaires, quand il voit que l'on a fait tout ce qu'on a pu pour les prévenir: il ne pardonne pas, même la justice, si elle peut avoir la moindre apparence de la faveur.
Bannissons donc la possibilité de la faveur; appuyoùs-nous sur des faits incontestables; rapprochons-les, éclairons-les l'un par l'autre, tellement que leuF combinaison ne puisse laisser place qu'à peu d'erreur.
D'abord, quant à là population, les dénombrements .nominatifs seraient très longs; et, faits dans des vues fiscales, ils ne mériteraient que peu de confiance -x car, de toutes les peurs qui peuvent faire cacher et mentir les hommes, la plus active en France, et peut-être la seule, est la peur de l'impôt. Il n'en sera pas toujours ainsi; le patriotisme à cet égard inspirera, dans la suite, une juste honte. Mais notrechose publique est encore bien neuve; le véritable esprit qui la maintiendra n'est pas encore généralement formé. Il faut donc juger de la population d'après un élément que toutes les familles ont le plus grand intérêt de rendre exact, d'après les registres des naissances, qui, depuis trois ans, comprennent les non-catholiques, et qui, de jour en jour ^ront plus fidèles sur ce point. Le nombre des naissances, multiplié par trente, donne, avec assez de justesse, l'état de la population dans les villes. Il faut, dans les campagnes, employer un multiplicateur plus faible, parce que les campagnes recrutent les villes d'un grand nombre d'ouvriers et de serviteurs.
Le différent degré de richesse et de pauvreté de chaque ville est bien plus difficile à connaître; cependant on peut en acquérir encore une assez juste idée, en partant d'un fait connu et certain : c'est la valeur des maisons.
Dans les villes riches ou aisées, ce sont des gens aisés ou riches qui rentrent en concurrence pour se loger. Ils poussent donc plus haut l'estimation de ce besoin de la vie, et les maisons se louent, elles se vendent plus cher, elles sont
Erisées plus haut dans les partages de famille.
'est à raison de cette valeur qu'elles ont été imposées aux vingtièmes, et qu'elles le seront désormais à la contribution foncière.
Dans les villes pauvres, la concurrence pour les logements est entre des familles pauvres, qui n'enchérissent qu'à proportion de leurs moyens. Les loyers, les maisons, les vingtièmes, la contribution foncière sont moindres, même pour une égale population.
Dans les villes manufacturières, où un grand nombre d'ouvriers se contentent d'un très petit logement, chaque maison en particulier se loue cher; mais le nombre des maisons est petit, relativement à la population, et la valeur des maisons, prise en masse, conserreun certain rapport avec la somme de richesses, de salaires et de jouissances de cette population.
Ainsi, ne voulant rien donner à l'arbitraire, et cherchant opiniâtrement l'équité dans la nature des choses,on pourra fixer la graduation des tarifs
entre les villes, en raison composée de leur population et de leurs vingtièmes. Une ville de 20,000 âmes, dont la valeur des maisons sera telle, qu'elle ait été soumise à deux cent mille francs pour les deux vingtièmes, sera justement assujettie au même degré de tarif qu'une ville de 25,000 âmes, qui, moins opulente, aura des maisons d'une moindre valeur, et n'aura été imposée, pour les deux vingtièmes, qu'à cent soixante mille francs. Si l'une des deux villes indiquait, par la valeur de ses maisons, une plus grande aisance, on soutiendrait son tarif à un taux un peu plus élevé. Si cette valeur était moindre, on baisserait son tarif en totalité ou en partie, ou l'on en retrancherait quelques articles.
Les villes des provinces abonnées ne seront comparées qu'entre elles. Le taux de leurs impositions foncières était différent ; mais, dans l'intérieur de chacune de ces provinces, il suivait de ville à ville les mêmes proportions, avec la valeur des immeubles.
Vous avez envisagé presque toutes ces patentes^ lorsque vous avez décrété les bases de la représentation nationale; et c'est aux conceptions de ce genre qu'on reconnaît les hommes dignes de donner des lois à leurs commettants et à leurs égaux; car chacun voudrait être juste. Dans le silence des passions, c'est le désir de tous les cœurs, même des méchants; mais savoir l'être ne fut donné en partage qu'aux âmes fortes, aux esprits profonds, aux caractères laborieux.
Sans doute, Messieurs, l'application de ces règles à toutes les villes sera un grand et fatigant travail. Il sera utile et nécessaire; il n'effrayera donc ni vous, ni votre comité des contributions publiques. Qu'est-ce que le travail, au prix de l'équité, au prix de la confiance qu'elle inspire, au prix de la soumission qu'elle assure, au prix de la paix qu'elle enfante ét qu'elle entretient? .
Votre comité en a préparé les bases. Si elles vous paraissent justes, elles seront prescrites par vos décrets. Quelques administrateurs en chef et un nombre suffisant de coopérateurs concourront ensuite à les appliquer aux localités. Votre comité tiendra la main à la fidélité de cette application, tant que se prolongeront vos devoirs, et que vous perpétuerez les siens. Il vous proposera les décrets nécessaires pour chaque ville; et votre esprit pourra encore animer la fin de ce travail, même 1 quand il ne serait pas terminé pendant votre session.
Mais un puissant motif la rendra plus rapide qu'on ne pourrait le croire, en pensant qu'il doit s appliquer à cinq cent vingt-neuf villes; ce sera l'intérêt de la plupart de ces villes, qui, aspirant après le soulagement, après la simplification de régime qui naîtront pour elles de votre nouveau système, et ne pouvant en jouir, ne pouvant changer la forme ni le taux de leurs perceptions et contributions actuelles qu'après que le décre-particulier à leur nouveau tarif sera rendu, cont courront naturellement, de tous leurs efforts, de toutes leurs lumières et de tout leur zèle, à la perfection de ce nouveau tarif.
Il ne faut point, à cet égard, Messieurs, se laisser entraîner à une dangereuse et particulière indulgence que l'intérêt général de la patrie nous interdit; jusqu'au moment où chaque ville recevra, par vos décrets, son nouveau tarif, les anciens doivent être suivis. Il n'y aura point, il ne peut pas y avoir d'intervalle dans les contributions; il ne doit point y avoir de suspension dans les reveuus auxquels tient l'existence de la chose publique. Nulle société, nulleportion de la société
ne doit être un moment sans loi. Il faut exécuter religieusement l'ancienne, jusqu'au soir du jour où elle doit finir ; et commencer l'exécution de la nouvelle, au lever du soleil, le lendemain. Or, la nouvelle étant meilleure que l'ancienne, chacun aura intérêt à faire cesser, le plus prompte-ment possible, le régime de celle-ci.
Cependant, Messieurs, il ne faut pas croire qu'aucun travail humain soit, ni puisse être pur-fait ; il ne faut pas même y prétendre en administration, où le péril de ne rien faire et de laisser la chose publique en souffrance est plus grand que celui de taire médiocrement.
Quelque attention, quelques lumières et quelque concours d'efforts que l'on puisse apporter dans la fixation des tarifs des taxes d'entrée dans les villes, ils pourront, en chaque lieu, produire un peu plus ou un peu moins qu'on ne l'aura présumé; et néanmoins ce n'est pas une charge inconnue que vous voulez mettre sur les villes; ce n'est pas pour des besoins imaginaires que vous songez à rétablir. 11 y faut donc un régulateur qui en balance la casualitè, qui en rectifie les erreurs, qui en perfectionne la manutention.
Votre comité a imaginé ce régulateur, et il est d'une nature très simple. Il consiste dans une mesure qui ne permette pas à l'impôt, sous la forme de taxes à l'entrée des villes, de laisser dans les revenus publics un déficit imprévu ; qui ne lui permette pas de passer la borne que vo>us lui aurez fixée, et d'aggraver le fardeau que vous aurez cru que chaque ville pourra et devra supporter.
Vous aurez décidé, par le décret qui établira chaque taiif, qu'il a pour objet de lever, sous la forme de taxes d'entrée, une contribution qui revienne, dans chaque ville, sur le pied de tant par tête de la population, calculée, pour éviter l'arbitraire, dans une certaine proportion, avec les naissances. Lorsque le produit aura excédé la somme qu'une telle contribution devait fournir au Trésor public, vous accorderez, pour l'année suivante, sur la contribution mobilière de la ville dans laquelle il aura été levé, remise d'une somme égale à ce que cette ville aura payé en taxes d'entrée, au delà de ce que vous aviez trouvé juste de lui imposer.
La législature pourra même ordonner l'affaiblissement du tarif, la diminution de quelques articles, la suppression entière de quelques autres, si l'expérience indique qu'il ait été établi sur un pied trop haut.
Si, au contraire, le tarif ne produit pas, dans quelques villes, la recette que le Trésor public en devait attendre, vous pouvez décréter qu'il sera pourvu au déficit par une addition de sous ou de deniers pour livre aux contributions foncières et personnelles de cette ville.
Ainsi l'intérêt de tous les habitants des villes sera que les taxes d'entrée soient perçues avec exactitude et fidélité ; que la contrebande y soit autant restreinte qu'il sera possible, puisque la négligence y serait punie par une augmentation de contribution foncière et mobilière ; puisque la vigilance, au contraire, y peut être recompensée par une diminution de la contribution mobilière de tous les citoyens, et par un baissement de tarif qui leur sera pareillement avantageux à tous.
Ainsi le revenu public serait partout assuré; la perception tendrait sans cesse à se perfectionner par l'impulsion de l'intérêt général ; et néanmoins aucune ville ne pourrait être soumise, en
masse, à une contribution plus forte que celle qui aurait été fixée parla loi ; puisque tout excès dans la perception variable des taxes d'entrée serait nécessairement versé, en soulagement pro-protionnel, sur tous les citoyens soumis a la contribution mobilière.
C'est une vue convenable à votre sagesse de lier, sur tous ces points et de toutes les manières possibles, l'intérêt particulier des villes à l'intérêt général de la nation.
Toutes les villes ont des besoins auxquels il faut pourvoir par desdépenses communes ; toutes sont accoutumées à faire face à ces besoins par des octrois. Leurs anciens tarifs ne peuvent pas subsister, lorsque vous changez tous les vôtres, lorsque vous diminuez les charges locales de là plupart d'entre elles, lorsque vous relirez les droits qui leur avaient été imprudemment engagés, lorsque vous réduisez leurs besoins communs à ceux de leur administration, de leur police et de leurs hôpitaux ; mais enfin il faudra pourvoir à ces dépenses communes, et vous pouvez, vous devez peut-être les autoriser à lever à cet effet des sous pour livre additionnels aux tarifs des taxes d'entrée qui se percevront au profit de la nation. Ce sera encore un moyen d'engager les municipalités à surveiller la fraude que l'on pourrait faire contre les taxes nationales, et qui tournerait, en deux manières, à la perte de la ville.
La faculté d'ajouter au profitdes villeâ des sous pour livre à la perception faite à leurs entrées au profit de l'Etat doit cependant avoir une limite: Vos tarifs seront calculés d'après la possibilité locale de la perception ; si l'on pouvait les augmenter indéfiniment sur un article ou sur l'autre, au profit des villes, leurs pétitions inconsidérées, ou l'ambition mal combinée dé leurs officiers municipaux, pourraient conduire à forcer le taux de quelques articles, de manière à exciter la contrebande toujours corruptrice, et qui porterait dans les finances au moins un déficit passager qu'on ne pourrait couvrir ensuite que par une augmentation d'impositions directes.
Il faut donc prévenir cette tentation, en déclarant qu'il ne pourra être mis au profit des villes, sur les taxes nationales d'entrée, de sous pour livre additionnels sur aucune denrée ni sur aucune marchandise que jusqu'à concurrence au plus d'une somme égale à celle dont la perception sera ordonnée par le tarif, sur cette même production ou cette même marchandise. S'il se trouvait quelques villes dont les besoins excédassent ce qu'elles pourraient retirer ainsi du doublement à leur pofit des taxes nationales imposée s à leurs entrées, ce qui n'est aucunement vraisemblable, pas même a Paris, il y faudrait pourvoir d'une autre manière qui ne mît en danger ni la morale des habitants, ni le revenu de l'Etat.
Il ne faut pas souffrir qu'il soit fait dans aucune ville aucune perception municipale, qui ne soit liée à une perception nationale. Il faut que partout soient la liberté et la propriété ; mais que partout aussi l'on trouve et l'on voie la patrie associée, mère, maîtresse, garante d'une bonne administration.
Vous trouverez dans cette utile et perpétuelle société un des principaux moyens d'exécution de vos taxes d'entrée ou de consommation sur les villes, et l'unique voie peut-être qu'il y ait pour vaincre une des plus grandes difficultés que ce système d'imposition présente, comme aussi pour préparer la route qui doit conduire, au bout d'un certain temps, à n avoir plus que des impositions
qui puissent, sous tous les aspects, soutenir les regards de la raison et de la philosophie.
Il y a un grand nombre de villes closes dans lesquelles la perception des taxe3 d'entrée ne présente presque aucun embarras ; mais il y en a un grand nombre d'autres qui n'ont aucune clôture, ou bien dont font réellement partie des faubourgs considérables, qui sont entièrement ouverts.
Ces villes néanmoins ont aujourd'hui des octrois, et attachent une très juste importance aux revenus qu'elles en tirent. Si les circonstances particulières où se trouvent les villes de celte dernière classe rendent impossible d'y établir complètement aujourd'hui le même régime qui aura lieu pour les villes closes ou faciles à clore, on pourra du moins. y appuyer la perception nationale sur celle à laquelle elles soot déjà familiarisées pour leurs propres besoins : on pourra du moins en accepter des abonnements, pour fournir les sommes auxquelles devra se monter leur contribution ; et ces abonnements, nécessaires en ce cas, faute d'une autre manière d'exécuter la loi, ne pouvant manquer d'avoir beaucoup de succès, instruiront les villes elles-mêmes, et les législatures qui nous succéderont, sur la possibilité de simplifier les formes de toutes les perceptions, et de les reûdre plus constitutionnelles.
Vous êtes trop éclairés, Messieurs, pour ne pas voir les défauts qui existent encore dans plusieurs branches du système d'impositions que la nécessité publique vous contraint d'adopter ; vous êtes trop honnêtes pour les dissimuler : mais en rasant l'écueil, il est digne de vous d'y mettre un fanal à l'usage.de vos successeurs; il est de voire devoir euvers vos commettants de leur montrer que vous avez manœuvré, avec le plus de sagesse qu'il vous a été possible, le vaisseau de l'Etat.
Ainsi votre comité doit terminer aujourd'hui son travail, en vous observant qu'il n'a pas dépendu de lui de faire que les taxes à l'entrée des villes fussent une bonne imposition; et qu'il ne dépend ni de lui ni de vous d'empêcher qu'à l'époque actuelle, l'opinion publique ne décide l'établissement, ou plutôt la conservation de ces espèces de taxes que l'on croit propres à diminuer la contribution foncière, quoiqu'elles en soient uue véritable et nuisible augmentation.
Ce qui dépendait de lui était d'en rechercher les principes; de soumettre à des règles de justice, de prudence, de convenance, celte institution qui ne peut encore être anéantie; d'y réunir la fiscalité qu'exigent les besoins publics, avec la proportion, la modération, la commercialité, l'humanité qui sont conformes à vos maximes.
Ce qui dépend de vous est de faire en sorte que les intérêts du commerce soient ménagés, que la contribution soit proportionnée, en chaque ville, et aux moyens que les habitants ont d'en faire l'avance, et aux facilités ou difficultés locales de la perception; d'empêcher qu'aucune ville puisse, même sous cette forme obscure, être imposée au delà de ce que la nation aura jugé qu'eJle doit l'être; de faire sortir avec une exacte précision le soulagement des contribuables de tout excès imprévu dans la recette ; d'intéresser tout le monde à l'exécution de la loi; enfin de conduire nécessairement l'opinion générale à flétrir et à repousser la contrebande, que les anciennes institutions induisaient au contraire à favoriser.
Ce que pouvait votre comité de l'imposition, il
a tâché de le faire. Fondé sur l'esprit patriotique que vous avez déployé dans vos décrets précédents, il espère que ce que vous pouvez de votre côté sera fait; et il résume, dans le projet de décret qu'il a l'honneur de vous présenter, les dispositions fondamentales nécessaires à l'établissement de la branche de revenu public que vous l'avez chargé de vous proposer dans ce rapport.
De la Rochefoucaulo , Dauchy, o'Allarde,
Rqeoerer, Defermon, Dupont (de Nemours).
projet oe oécret.
L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des contributions publiques, relativement aux taxes à l'entrée des villes, décrète ce qui suit:
TITRE PREMIER.
Articles fondamentaux.
Art. 1er. Il sera établi, au profit de l'Etat, à l'entrée des villes dont la population n'est pas au-dessous de 2,500 âmes, et sur quelques-unes des productions et des marchandises que leurs habitants aisé3 ou riches consomment le plus généralement, des taxes, combinées de manière que les pauvres puissent vivre sans être assujettis à presque aucune d'entre elles, et que le commerce de transit, ainsi que les principales branches du commerce d'entrepôt, ne puissent en souffrir.
Art. 2. La nation prendra à sa charge les dépenses dont les villes étaient grevées pour fournitures militaires, ainsi que celles relatives aux états-majors qui ne seront pas supprimés.
Art. 3. Les droits, taxes ou octrois aliénés ou engagés à quelques villes seront supprimés. La nation indemnisera les villes eogagisles ou concessionnaires des fonds qu'elles jusiifieront avoir versés dans le Trésor public, pour prix desdits engagements ou concessions, ou prendra à sa charge les dettes contractées à cet effet.
Art. 4. Les villes débarrassées, conformément aux deux articles précédents, des charges particulières qui mettaient entre elles de l'inégalité, relativement aux taxes sur leur consommation, ne seront plus imposées sous cette forme, qu'à proportion de leur importance et de leurs facultés.
Elles seront à cet effet divisées en 8 classes, savoir :
Première classe : Paris.
Deuxième classe : Les villes moindres que Paris, qui ont quatre-vingt mille habitants et au-dessus.
Troisième ( lasse : Celles qui ont cinquante mille habitants et au-dessus, jusques et non compris quatre-vingt mille.
Quatrième cla-se : Les villes dont la population monte depuis trente mille, jusqu'à moins de cinquante mille habitants.
Cinquième classe : Les villes qui renferment depuis dix-huit mille, jusqu'à trente mille individus exclusivement.!
Sixième classe : Celles dont la population n'est pas au-dessous de dix misâmes, et n'arrive pas à dix-huit mille.
Septième classe : Les villes qui n'ont que depuis six mille habitants, jusqu'au-dessous de dix mille.
- Huitième et dernière classe : Celles qui 11'ont .que moins de six mille, et pas moins ide deux mille cinq cents habitants.
Art. 5. La contribution qui, sous la forme de taxes à Centrée, était, chaque année, dans Paris, de quarante livres dix sous par tête au profit de â'fitat, non compris les frais de régie, sera réduite, pour le Trésor public, à dix-huit livres par tôle, frais de régie compris.
Dans les autres villes, la réduction et la combinaison des taxes 'semblables sera telle, que 'la contribution, frais de régie 'pareillement compris, n'excède pas pour le taux moyen :
De celes de. la deuxième classe, douze livres ;
De celles de la troisième, dix livres ;
De celles de la quatrième,, huit livres ;
De celles de la cinquième, six livres.;
De celles de la sixième, quatre livres ;
De celles de la septième, quarante sous;
De celles de la huitième, vingt sous par tête chaque année.
Art. 6. Les villes qui ont moi h s de 2,500 habitants ne seront soumises à aucune taxe d'entrée ni de consommation an profit de l'Etat, que sur leur propre pétition, et dans le cas où elles voudraient lever, sous cette forme, les deniers nécessaires à leu s dépenses communes ; auquel cas l'Assemblée mationalo, après avoir pris,-sur leur demande, l'opinion du directoire de district et l'avis diu dinectoire de département, fixera le tarif jqui devra être perçu., et réglera, 'd'après le taux moyen adoptté pour les villes immédiatement supérieures, quelle quotité de ladite perception devra tourner au profit du Trésor national.
Art. 7. Pour éviter l'arbitraire ou les négligences dans le calcul de la populalion, elle sera estimée sur le pied de trente fois le nombrede s naissances, constaté par les registres publies.
Art. 8. Les tarifs annexés au présent décret serviront de base pour les taxes a imposer sur ila consommation des villes dans chaque classie.; il sera néanmoins apporté, dans iles sept dernières classes, par la diminution ou suppression de quelques articles, et raugme®latiom de quelques autres., les modifications qui, d'après les circonstances locales, seraient reconnues utiles, tant pour faciliter le commerce spécial de chaque ville, que pour rapprocher., par nuances insensibles, :1a contribution des dernières villes de chaque classe supérieure, ci des premières delà classe qui la suit immédiatement, dont les tarifs seront,, de leur côté, portés au-dessus de îa proportion moyenne, pour concourir à ce rapprochement.
Art. 9. La gradation entre les villes de chaque «classe, comme aussi entre les dernières villes des classes supéritutes et les premières des classes inférieures, ainsi que les modifications relatives à cette gradation, seront déterminées par la raison composée de leur population et de la valeur de leurs maisons, connue au moyen des vingtièmes ou de la contribution foncière.
Art. 10. Lorsque lesdites modifications auront été arrêtées et fixées par l'Assemblée nationale, iles tarifs seront mis à exécution aux entrées des villes et faubourgs clos ou faciles à clore.
Le ministre des finances (sera autorisé à concerter, avec les municipalités des villes ou faubourgs ouverts, les mesures les plus propres à faciliter et assurer la perception, jusqu'à ce que leur clôture ait pu être effectuée; même à accepter de,s abonnements égaux en produit à la perception qui aurait dû être faite dans les villes où
cette perception présenterait, à Taison des circonstances locales, trop de'difficultés.
Art. 11. Jusqu'à l'établissement desdits nouveaux tarifs, nouvelles perceptions ou nouveaux abonnements, les tarifs actuels et perceptions en usage continueront d'avoir lieu.
Art. 12. Dans le cas où le produit des nouveaux tarifs qui seront arrêtés se trouverait avoir excédé le terme qui sera réglé pour chaque ville, conformément aux articles 5, 6 et 7, il seraifait, dans il'année suivante, sur la contribution mobilière de là ville où cet excédent aura été perçu, diminution d'une somme égale à l'excédent procuré par la taxe d'entrée; et s'il y a lieu de présumer que l'excédent doive être du-rabte, le tarif pourra être diminué par la législature, sur la demande de la ville, l'opinion m directoire de district, et l'avis du directoire de département.
Dans le cas, au contraire, où le produit en aurait é'é iirferieimr à la contribution déterminée, il y ;sera pourvu, dams la ville où le déficit aura été éprouvé, par l'addition, à la contribution foncière et mobilière de l'année suivante, d'uue somme égale à oelle de ce déficit.
Ant. l3. Les villes, pour faire face à leurs dépenses municipales et à eelles de leurs hôpitaux, ainsi qu'aux dettes qui leur seraient personnelles, pourront proposer à l'Assemblée nationale d'ajouter aux taxes d'entrée, perçues au profit général de la nation, des sous pour livre municipaux, à la charge que ces sous pour livre n'excéderont jamais, ni en totalité, ni dans aucun article du tarif, ia somme levée pour l'Etat; et sur la 'demande desdites villes, l'opinion du directoire de district et l'avis du directoire de département, vérification faite par lesdits directoires de la réalité des besoins, l'Assemblée nationale permettra la levée des sous pour livre additionnels qui lui seront demandés, et leur application aux besoins particuliers des villes.
Art. 14. Dans le cas où les sous pour livre additionnels aux taxes d'entrée, poussés jusqu'à d'égalité même avec ces taxes, ne pourraient suffire aux dépenses particulières d'une viMe, elle pourra proposer à l'Assemblée nationale d'y pourvoir par des sous pour livre additionnels sur les contributions foncière et mobilière ; et l'Assemblée nationale, après «'être fait rendre compte de l'opinion du directoire de district et de l'avis du directoire >de département, prendra lesdits avis et opinion des directoires et la demande desdites villes en considération.
TITRE III.
Articles réglementaires.
Art.1er. Les taxes à l'entrée seront
acquittées par toutes personnes indistinctement, sans exception ni
privilège, et même pour ce qui sera destiné pour le service personnel,
et la consommation du roi et de sa famille. Les voitures où seront
personnellement 'le roi, la reine et les ambassadeurs des puissances
étrangères, ch(z lesquelles la France jouit, à cet égard, du droit de
réciprocité, seront seules exemptes de visites.
Art. 2. Les laxes à'l'entrée des villes seront régies, quant aux déclarations, aux visites dt aux formes de raoquittement et de l'enregistrement, d'après les règlements intervenus et à intervenir pour la régie et perception des droits des dotanes nationales.
Art. 3. En cas de refus de visite, de violence et de rébellion, les employés seront autorisés à conduire ou faire conduire les refusants ou rébellionnaires par-devant le commissaire de police ou tel autre officier public qu'il.appartiendra, lequel jugera sll y a lieu d'ordonner l'emprisonnement. Pourront les employés requérir la force publique, toutes les fois qu'ils le jugeront nécessaire, et elle ne pourra leur être
refusée, à peine contre les refusants de tous dommages et intérêts.
Art. 4. Le comité de l'imposition est chargé de proposer à l'Assemblée un règlement général, pour l'admission et la promotion aux emplois vacants; de manière à fermer tout accès à lit faveur, et à assurer la récompense due au travail, à l'activité et à la bonne conduite.
Tableau.
TABLEAU des denrées et marchandises qui jouiront de 1"exemption totale des taxes
assujetties aw
DENRÉES ET MARCHANDISES EXEMPTES DE TAXES.
Blé.... Seigle.. Farine,
Denrées...
Combustibles.
Boissellerie et raclerie.
Pain .....................................................................
Légumes verts de toute ospèce.............................................
Poids et haricots verts; le sac............................................
Fruits de toute espèce, à l'exception du raisin par quantité de 10 livres et
au-dessus ..............................................................
Châtaignes..... \
JSa.rrons....... le sac...................................................
Noix.......... t
Noisettes...... )
Bière fabriquée flans la ville, le muid.................. 24 1. 2 s. 4 d. 1/2
Poisson de mer sec et salé, la voie........................................
Œufs, le cent.............................................................
Fromages de Brie, Pont-l'Évéque, Livarot, etc.; l'un dans l'autre, la douzaine
environ................................................................
Fromages cuits faisant partie du commerce de l'épicerie....................
Fèves sèches... 1
Haricots secs... [ le muid.....................................-..........
Pois secs...... )
Riz, le quintal...........................................................
Charbon de terre, la voie.................................................
Tourbe, la voie...........................................................
Attèles, pelles à four, manches à balais, etc., le cent de bottes............
Seilles, poulies, cuillers à pots, soufflets, croissants de bats, courbes, battoirs, écuelles, sébilles, lanternes, salières, égrugeoirs, bois de brosses et de bottes, fourreaux d'épées, bringes de bouleau, osier, galoches, sandales, etc., la
voie
Jattes, arçons, rondeaux, pelles et sabots, la voie.
Soie, le quintal..................................
Fil, le quintal...................................
Coton, le quintal...............................
écrue. filée..
en laine, filé.......
ecrue.
Marchandises.
Laine, le quintal........................................ î
Bois de marqueterie, d'ébénisterie, le quintal......... ....................
Toiles, toileries et toiles cirées; l'aulne, non compris les droits de contrôle, de
balle et de gare.........................................................
Draperies et étoffes de laine ; le quintal, non compris les droits qui se payent
à la halle aux draps....................................................
Mercerie....... I , . . ,
Quincaillerie... \ le 1umlal..............................................
Etoffes de soie............................................................
Dentelles de fil et de soie.................................................
Drogueries, le quinlal.................................... j communes'.'./.'.
Épiceries, le quintal..................................... j communes!!.'!.
Chevaux et mulets neufs; par chacun......................................
Cheval et mulet de messagerie.............................................
Chaise de messagerie....................................................
Carosse, charrette et fourgon de messagerie................................
Plans d'arbres et sarments; la voie de 2,000 livres pesant...................
Lie pour les chapeliers, le quinlal.........................................
Terre à pots et poterie; la voie de 2,000 livres pesant.......................
Porcelaine, le quintal.........-...........................................
Pierres à aiguiser et a briquet.........................«...................
Spart œuvré et non œuvré, le quintal.....................................
Cordes à puits, la voie....................................................
Ventrées dans toutes les villes du royaume, et tarif des droits auxquels elles étaient mtrées de Paris.
DROITS
auxquels elles étaient assujetties a paris.
Par eau.
Par terre.
liv. s. d. liv. s. d.
» » » » » » » » » » » »
» » » » » » » » » » h »
» » » » » »
» 2 9 » 2 9
» » » » » »
» 3 3 3/5 » 3 3 3/5
» » » » M »
1 2 3 3/10 1 4 9
» 8 1 1/5 » 8 1 1/5
» 1 4 » 1 4
» 14 10 2/25 » 14 3
» 2 5 7/10 » 6 7 2/10
2 3 6 3/50 2 1 3
3 » » 3 M »
» 18 1 4/5 » 18 1 4/5
16 3 8 4/10 » » »
8 1 10 2/10 » » »
8 6 1 13/20 » » »
2 4 10 23/25 2 4 3
2 13 2 2/5 9 10 10 3/10
2 4 10 23/25 2 10 10 2/10
2 4 10 23/25 2 4 3
2 9 3 39/100 2 10 10 2/10
2 4 10 23/25 2 4 3
2 9 3 39/100 2 10 10 2/10
2 6 6 2 4 3
» 1 7 8/10 » 1 7 8/10
2 3 3 9/10 2 » 11 8/10
1 16 7 14/50 1 14 4 2/10
» » » » m
2 9 3 39/100 2 » 11 4/10
3 10 11 76/100 3 8 8 70/100
3 9 4 62/100 » » »
2 6 6 6/100 s » »
2 4 10 92/100 » » »
» » » 1 2 3 3/10
» » » » 8 3
» » » » 19 9 6/10
» » » 1 11 4 2/10
» 9 * 9/10 » 18 1 8/10
» 5 6 66/100 » 3 3 6/10
M 9 » 9/10 m 18 1 8/10
1 15 » 6/50 1 14 4 2/10
» » » » M »
» 15 M » 15 *
1 13 » » 18 1 8/10
OBSERVATIONS.
Les villes de la cinquième classe, ou depuis 30,000 âmes jusqu'à 18,000, joindront aux exemptions ci-contre, qui auront lieu dans les villes des quatre premières classes, et seront communes à toutes les villes, celle de toute taxe sur le poisson frais, tant de mer que d'eau douce.
Les villes de la sixième classe^ ou depuis 18,000 âmes jusqu'à 10,000, jouiront de toutes les mêmes exemptions que celles des cinq premières, ot auront de plus celle de toute taxe sur la volaille et le gibier.
Les villes des doux dernières classes, ou au-dessus de 10,000 âmes, auront toutes les mêmes exemptions que celles des six premières, et de plus celle de toute taxe sur les bestiaux, la viande et le petit nombre de marchandises d'épicerie qu'on a cru susceptibles d'être soumises à des taxes dans les grandes villes.
Ces mêmes marchandises d'épicerie pourront être exemptées dans toutes les villes qui le désireront, et qui en font commerce d'entrepôt, à la charge de payer un peu plus sur quelques autres articles du tarif, et seulement ce qui sera nécessaire pour compenser la valeur de l'exemption qu'elles réclameront.
Les villes de la dernière classe ou de moins de 6,000 âmes, outre les mêmes exemptions assurées à celles des sept premières, auront de plus celle de toute taxe sur les fourrages et les bois de construction.
Tous les ports de mer, outre les exemptions particulières aux villes de leur classe, auront de plus celle de toute taxe sur le poisson et sur le bois de construction : elle y sera compensée par létaux un peu plus élevé de quelques autres articles du tarif.
Toutes les villes qui, pour l'intérêt particulier de leur commerce, désireront diminution ou même exemption de taxe sur quelque denrée ou marchandise mentionnée dans les projets de tarifs généraux, l'obtiendront, à la charge de compensation, par l'augmentation de la taxe proposée sur quelque autre denrée ou marchandise.
autre observation.
L'état ci-contre n'est pas assez détaillé ni entièrement complet; il sera donné avec un plus grand développement dans le travail relatif aux entrées de Paris.
TABLEAU du produit des taxes
NOMBRE TOTAL de PORTION PRODUIT
CLASSIFICATION DES VILLES.
des villes de chaque classe. la population des villes de chaque classe. de l'impôt par individu. bubt de l'impôt par classe.
habitants. livres. livres.
classe, Paris.....'............................. 1 600,000 18 10,800,000
È 2® villes au-dessus de 80,000 habitants............... 4 414,000 12 4,968,000
[3® Idem, de 50 à 80,000............................ 4 231,000 10 2,310,000
1 Idem, de 30 à §0,000............................. 11» 400,000 8 3,200,000
5® Idem, de 18 à 30,000............................. 18 407,000 6 2,442,000
-6® Idem, de 10 à 18,000_____________________________________ 40 526,000 4 2,104,000
' 7® Idem, de 6 à 10,000............................. 72 535,000 2 1,070,000
8® Idem, de 2,500 à 6,000............................. 379 1,439,653 1 1,439,653
.1 | Totaux.................................. 529 4,552,635 28,333,653
WQposée aux enimes des villes:
1 FRAIS PRODUIT .. . y |
de perception OBSERVATIONS.
par ket.
estimation.
à 10 0/0. livres. 1,080,000 livres: ji 9,720,000 Il sera, dans chaque classe, accordé aux villes, qui sont au-dessous du terme moyen de leur classe, modération sur quelques articles du tarif,, oa exemption de quelques-uns de ces articles, afin de rapprocher la* contribution des plus petites villes de chaque classe supérieure,, de celle das plu» grandes de la classe qui la suit immédiatement.
à 10 0/0. 496,800 4,471,200 Par Fa même raison, quelques articles du, tarif seront soutenus, à un taux | plus élfevé que le taux moyen dans les plus grandes villes de chaque- classe,, pour concourir à ce> rapprochement.
à 10 0/0. à 12 0/0. à 14 0/0. 231,000 384,000 341,880 2,070,000 2,816,000 ' 2,100,120 Ce soin n'aura lieu qu'à partir de la seconde classe, pour suivre la gradation qui existe depuis cette classe jusqu'aux dernières villes contribuableSf aux taxes d'entrée; et les haussements comme les modérations, pour lés villes. qui s'éloignent du terme moyen, suivront une proportion régulière : chaqpe/ classe demeurant, en masse, soumise à la somme de contribution qui' sera-décrétée par l'Assemblée nationale, sans qu'il y ait plus de distance, d'une classe à l'autre, qu'entre les villes de la môme classe, qui diffèrent également en richesse et en population.
à 16 0/0. à 18 0/0. à 20 0/0. 336,610 192,600 287,930 1,767,360 877,100 1,131,708 Le rang entre les villes de chaque classe ne sera pas fixé uniquement, par leur population, mais en- raisorn composée de leur population etr de leur contribution foncière ou de leurs vingtièmes, qui était leur ancienne contribution foncière ; car il est sensible que de deux villes d'une population égal'e„ celle où les. loyers sont plus chers, et où les maisons valent davantage, est évidemment la plus riche ; que ce sont des gens plus riches dont la concurrence fixe dans celte ville le prix des loyers et la valeur des immeubles, et que par conséquent ses habitants peuvent faire l'avance d'une plus forte taxe sur leurs consommations.
3^350,830 24,982,788 Les villes devant être autorisées a lever, pour leurs dépenses communes,, des sols pour livre additionnels aux taxes nationales établies a ffeurs entrées,, chacune d'elles peut, en raison de ses dépenses municipales,, juger à quoi, devra se monter son tarif, tant au profit de la nation qu'à celui dé là villfc. elle-même. Il y a lieu de penser qu'à Paris l'es dépenses communes contraindront de doubler le tarif national'. Dans les villes quf ont de moindres, besoins, les sois pour livre municipaux pourront être dans une moindre, proportion. 1
TARIF.
TARIF des taxes proposées pour être
DÉNOMINATION DES OBJETS SUJETS AUX TAXES D'ENTRÉE.
Boissons.
Par muid de vin ordinaire, de 288 pintes...................................
Par pinte................................................................
Par muid de vin de liqueur...............................................
Par pinte...............................................................
Par muid d'eau-de-vie simple, n'atteignant pas 22 degrés complets du pôse-
liqueur de Cartier, à la température de 10 degrés.........................
Par pinte................................................................
Par muid d'eau-de-vie double ou rectifiée, marquant 22 degrés complets, ou plus
au pèse-liqueur de Cartier..............................................
Par pinte.. ..............................................................
Par muid d'esprit-dé-vin, marquant 32 degrés ou plus au pèse-liqueur de Cartier.
Par pinte............................................................ ...
Par muid de bière.......................................................
Par pinte...............................................................
Par muiil de cidre ........................................................
Par pinte................................................................
Par muid de poiré........................................................
Par pinte................................................................
Par muid de vinaigre ou vin gâté, à la charge d'une police qui no permette pas
de le rétablir, et de frauder ainsi la taxe du vin...........................
Par pinte............................................................... .
Mélasse, le quintal........................................................
Bestiaux et Poissons.
Par chaque bœuf.........................................................
Par chaque vache.........................................................
Par chaque veau..........................................................
Par chaque mouton et par chaque bouc ou chèvre...........................
Par chaque agneau ou chevreau............................................
Par chaque porc, vivant ou mort..........................................
Par livre pesant de bœuf, vache et mouton, porc frais ou salé...............
Par livre pesant de veau, agneau ou chevreau, et par livre de jambon salé et
fumé..................................................................
Par livre pesant de poissou de mer frais, et de poisson d'eau douce, avec réserve provisoire à Paris des formes actuellement établies pour la perception.
Volaille sur une évaluation moyenne, revenant par livre à..................
Gibier sur une évaluation moyenne, revenant par livre à.....................
Fourrages.
Foin ; le 100 de bottes de 10 livres chacune .. Paille; le 100 de bottes de 10 livres chacune.
Grains, Graines et Grexailles.
Avoine, le muid...........................................................
Orge, le muid............................................................
— le setier...........................................................
Vescc, le muid..........................................................
Tous les autres grains et grenailles seront, ainsi que le riz, exempts de toute taxe.
1" CLASSE.
paris.
liv. 23
9 28
144
s. d.
1 16 9.
64 16 a 4
100 16
» 7 »
10 8
3 12
» %>
25 4
» 1
1 16
» »
7 10
8 15
4 10
2 5
» 12
» 8
2 10
5 » 2 10
12 12 1 6
M »
»
4 1/2 »
3 »
9
1 1/2
2® CLASSE.
villes
au-dessus do 80,000 âmes.
liv. s.
1G 16 » 1
19 »
43
67 »
96
4 1
4
3
4
4 »
6 12
16 16 » 1
6 11 3 7 1 13 9 6 17
3 15 1 17
9 »
8 »
>» 15
4 10
3 6 9
6 »
6
4 1/2
6 3/4
4 1/2 4 1/2 6 3/4
Combustibles.
Bois à brûler ou corde, la voie.............................j................
Fagots, falourde et cotrets ; selon leurs dimensions et qualités, pour les uns de moitié^ pour les autres des dans, tiers, pour d'autres- des trois, quast&r et pour d'autres entin des quatre cinquièmes au-dessous des bois de corde.
[Charbon de bois...........................................................
Le charbon de terre sera exempt de tous droits.
Denrées et Marchandise?.
DÉNOMINATION DES OBJETS SUJETS AUX TAXES D'ENTRÉE.
j Beurre frais, le quintal.............
Beuri'e salé ou fondu, le quinlal.....
Huiles.*......... ......»........
Café....,...........................
Sucre..............................
Houblon........................—
Sel,...................................
Suif................................
Papiers et cartons .................
Ptitasse, soude el cendres gravelées. Cuirs et peaux, et ouvrages de cuir.
Tan et ccorce d'arbre..............
Fer, plomb, etain et cuivre.........
Cire' et bougie, le quintal...........
/le quinlal.
bois carrés et a ouvrager.
1" Classe, le pied cube
2* Classe, idem........
3" Classe, idem.........
4" Classe, idem........
Matériaux a bâtir.
Marbre brut ou travaillé, le pied cube....,....................................... .. .
Pierre de liais, le piedl cube.............................................. ...
Pierre de taille de toute espèce, le pied cube...........................
Moellon de toute espèce, la toise cube, composée do 216 pieds cubes.........
Chaux, le muid composé de 20 minots....................................
Plâtre, le muid composé de 36 sacs.......................................
Ardoises fortes, le millier..................................................
Ardoises petites et cartelles, le millier............................. »...........
Briques el tuiles, grand moule, le millier................................
Tuiles, pelit moule, le millier.............................................
Carreaux do terre cuite, de 6 pouces, le millier..............................
Carreaux de terre cuite, de i pouces, le millier..............................
Pavés de grès, de 8 à 9 pouces de côté; ou environ 620 pouces cubes, le
millier.................................................................
Pavés refendus, le millier..........................-.......................
Glaces, le quintal.....»............................. . —...............
Verre à vitre...............................................................
CLASSE
liv. a. d. 2 10 »
.» 10 »
5 » » » 18 9
2e CLASSE-
VILLES
au-dessus de 80,000 âmes.
llV. si. d.
1 17 6 » 7 6
3 13 » » 12 6
» 18 9
3 15
» Q o » » 2 3
» 1 6 » 1 1 1/2
» » 9 ». » 6 3/4
2 14 » 2 » 6
5t j> » a 15 »
1 16 » » 1 7
5 » » 3 15 »
2 10 V t 17 6
s » 3 15 »
3 2 6 2 1 8
1 5 » » 18 9
30 12 6 » 9 i 1/2
5 » » 3 15 »
2 10 » 1 17 6
7 10 » 5 x> »
2 10 » 1 13 8
3e CLASSE. VILLES':
de KO à 80,000 âme?.
liv. s. d-il 3?
» 6 3'
3 2 6 >» 10 5
» 15 7 1/2
3 2- 6.
3 3 2 1
9
1 1/2 6
10 1/2
1 10 1/2 » 1
» 11 1/4 » »
» 5 5/8 » »
13 9 1 7
2 6 2 10
2 6 » 18
2 6 2 10
11 3 1 &
2 6 2 10
15 » 1 8
15 T 1/2 » 12
7 9 3/4 » 6
2 6 2 10
11 3 1 S
3 6 3 6
7 9 1 2
4° CLASSE.
VILLES j
de 30 à 50,006- âmes.
Iiv. s . al 1 3> »
» 5 »
2 10 » 8
» 12 6
2 10
5e CLASSE..
VILLES
île l'8 à 30,000 âmes;
» 3 »
» 2 6.
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6° CLASSE.
VILLES de 101 à 18,000 a m cf.
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7e CLASSE.
VIT.LES
de 6' à 10,000 âmés.
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»
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8" CLASSE.
VILLES
de 2,500 à 6,000 âmes.
» » 8 w » 6
» » 4 » » 3.
» » 2. » » 1
» 9 8 » 7 3
1 2 10 2/3 » 17. 2
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1 2 10 2/2 » 47 2
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IIV.. Si. dta
» . A 4 1/3 » » 10 7/15,
1/2.
1/2
i/a
(L'À'Pomblée ordonne l'impression du rapport et du projet de décret, et ajourne la discussion à la séance de demain matin.)
La députation du Haut et Bis-Rhin a r çu successivement ta. t par des courriers ordinaires que par des courriers extraordinaires, ce matin, des nouvelles qui ont rapport à ces départements et qui sont très importantes; elles consistent principalement dans le récit et le détail des difticultés que MM. les commissaires du roi, envoyés dans ces deux départements, ont éprouvés dans l'exécution de leurs fonctions et mission. Ces difficultés, dans le département du Haut-Rhin et dans la ville de Colmar, ont été de nature à leur faire éprouver des menaces et presque des violences ; et même sans le dévouement d'un grand nombre de gardes nationales bons patriotes, il est probable qu'ils auraient éprouvé des violences personnelles. La réunion des efforts de ces bons patriotes est parvenue à les repousser, ces violences, à rétablir le calme de la ville, et à permettre le lendemain aux commissaires de faire les fonctions pour lesquelles ils s'étaient présentés.
Maintenant un autre genre de difficulté s'oppose à l'exécution de leurs fonctions; cette difficulté consiste dans ta résistance des corps administratifs, et particulièrement du directoire du département du Ras-Rhin, à exécuter les ordres qui leur avaient été donnés par les commissaires du roi.
Ces différentes affaires, intéressant une province frontière, ont paru à la députation des départements du Haut et Bas-Rhin exiger nn rapport circonstancié et instant. Comme ces différents objets sont de la compétence de plusieurs comités de l'Assemblée, la députation m'a chargé de lui demander le renvoi du fond de cette affaire au comité des rapports, en y adjoignant 11 comité militaire, celui de Constitution, le comité diplomatique et celui des recherches. (Murmures.)
Il est surprenant qu'il s'élève des murmures dans l'Assemblée, parce qu'une députation demande qu'une affaire très importante soit examinée par les comités qui ont les connaissances propres à l'éclaircir; mais cela ne m'empêche pas de demander que ma proposition soit mise aux voix.
(L'Assemblée décrète le renvoi de l'affaire aux comités des rapports, de Constitution, militaire, diplomatique et des recherches, réunis.)
lève ta séance à trois heures.
PRÉSIDENCE DE M. EMMERY, EX-PRÉSIDENT ET DE M. DE MIRABEAU, PRÉSIDENT.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Ûn de MM. les secrétaires donne lecture des adresses suivantes :
Adresse des officiers municipaux de la ville de Dax, qui demandent que le tribunal criminel de son département siège dans son sein ; elle est renvoyée au comité de Constitution.
Adresse de félicitation, adhésion et dévouement des citoyens actifs du canton d'Evmel, district de Bergerac, département de la Do'rdogne, et de plusieurs laboureurs du district de tiuéret.
Adresse de l'assemblée électorale du département de l'Aisne, contenant le procès-verbal d'élection à l'évêché de ce département, en faveur de M. Marolies,curé de Saint-Jean de Saint-Quentin, membre de l'Assemblée nationale, et un autre procès-verbal qui constate la nomination du juge du tribunal de cassation, et celle de son suppléant.
Adresse des officiers du tribunal du district de Pont-Croix, qui, dès les premiers moments de leur installation, présentent à l'Assemblée nationale le tribut de leur admiration et de leur dévouement.
Adresse des administrateurs composant le directoire du district de Brignoles, qui annoncent que tous 1rs prêtres fonctionnaires publics de ce district ont prêté leur serment civique, et que les citoyens montrent le plus grand empressement pour l'achat de3 domaines nationaux.
Adresse de M. Durand, ci-devant religieux bénédictin et professeur de plusieurs écoles militaires, résidant à Avoise, près Sablé, et de M- llerbaud, supérieur de l'Oratoire de Pertuis, qui expriment une admiration respectueuse pour la constitution civile du clergé, et prêtent entre tes*mains de l'Assemblée 1; serment civique.
Adresse du curé de la paroisse de Coulanges-sur-Yonne, et du vicaire d'AigU'Wives, qui se sont empressés de prêter le serment prescrit par l'Assemblée, intimement convaincus de l'excellence de la constitution civile du clergé.
Adresse de dévouement des maîtres d'éducation de la ville d'Orléans. Ils supplient l'Assemblée de les prendre en considération dans ses importants travaux sur l'éducation nationale.
Adresse des officiers municipaux de la ville de Maur?, qui annoncent que leur curé, accompagné d'un vicaire et de 4 ecclésiastiques connus par 20 ans d'exercice de toutes les vertus sacerdotales, ont fait leur serment avec une franchise et un empressement qui a augmenté l'amour, le respect et la confiance du peuple pour eux.
Adresse de la majeure partie des habitants d'Ouchy-le-Château, district de Soissons, au département de l'Aisne, qui exposent que leur paroisse est propriétaire d'environ 150 arpents de terrains marai-; qu'il> payent annuellement les impôts en commun pour ces marais, lesquels cependant ne sont possédés que par très peu d'hnbitants. Ils ont en vain demandé le partage de ces marais : cette justice leur a constamment été refusée. Ils supplient l'Assemblée nationale de renvoyer leur pétition à son comité d'agriculture et de commerce, pour lui en être incessamment rendu compte.
(Ce renvoi est décrété.)
Discours patriotique de M. du Mesnil, curé de Savigny, prononcé le dimanche 23 janvier, lors de la prestation de son serment civique.
Discours sur la constitution du clergé par M. Mille, bachelier de Sorbonne, curé d'Evry-sur-Seine, ou Petit-Bourg, prononcé lors de la prestation de son serment.
Procès-verbal de la municipalité de Rouffiac-^d'Aubeierre, département de la Charente, qui rend compte à I Assemblée nationale de la prestation de serment de son curé, faite le 30 janvier 1791, avec l'extrait du discours très patriotique, prononcé par ce vertueux pasteur le jour de la cérémonie.
quitte le fauteuil.
l'aîné, président, le remplace.
Un membre annonce un don patriotique de 449 livres fait par la commune de Viterbe.
Une députation de quakers est introduite à la barre; tous ses membres restent couverts.
L'orateur de la députation s'exprime ainsi (1) :
« Respectables législateurs,
« La nation française vous ayant nommés ses législateurs, et vos âmes ayaut été disposées à lui donner des lois sages, nos cœurs ont été vi-vemeut excités à solliciter votre justice et votre bienfaisance pour la société des chrétiens paisibles à laquelle nous appartenons. Vous savez qu'il existe dans plusieurs Etats de l'Europe et de l'Amérique septentrionale un grand nombre de chrétiens connus sous le nom de quakers, qui font profession de servir Dieu suivant l'antique simplicité de la primitive Kgl:se chrétienne.
« Plusieurs villes et vil ai;es du Languedoc renferment nombre de familles attachées à ce christianisme primilif; plusieurs autres familles, parties de l'Amérique, sont venues s'établir à Dunkerque sous les auspices de l'ancien gouvernement; elles y sont venues rur les invitations adressées aux habitants de l'île de Nantucket, dans le but û'étendre les pêcheries françaises. Ces insulaires ont prouvé qu'ils méritaient vos bienfaits par leurs succès, et le même zèle les portera à les mériter encore. Mais d'autres intérêts bien plus grands nous amènent aujourd'hui devant vous.
« Dans ce siècle où les lumières ont fait de rapides progrès, vous avez senti que la conscience, ce rapport immédiat de l'homme à son créateur, ne pouvuit pas être assujettie à la puissance des hommes; ce sentiment de justice vous a portés à décréter la liberté générale de tous les cultes; c'est un des plus beaux décrets de la législation française : vous avez donné un grand exemple aux nations qui persécutent encore les opinions religieuses, et nous espérons qu'elles le suivront tôt ou tard.
« C'est cet esprit de justice que nous venons invoquer ici pour qu'on nous laisse suivre en paix quelques principes et quelques formes auxquels la grande famille des amis appelés quakers est restée inviolablement attachée depuis son origine- . . .
« Un de ces principes nous a vainement attire de vives persécutions ; la Providence nous a donné la force de les surmonter sans user de violence : c'est celui qui nous défend de prendre les armes et de tuer les hommes sous aucun prétexte, principe qui s'accorde avec les Ecritures saintes, le Christ ayant dit : « Ne rendez pas le mal pour le mal, mais faites du bien à vos ennemis. »
Eh ! plût au ciel que ce principe fut universellement adopté ! Tous les
hommes ne faisant plus qu'une famille, ne seraient plus que des frères
unis par la bienfaisance. Vous en êtes convaincus, vous généreux
Français : vous avez déjà commencé à le mettre en pratique; vous avtz
juré de ne jamais souiller vos mains dans le sang pour des conquêtes ;
ce pas vous conduit-il conduit le monde entier vers la paix universelle.
Vous ne verrez donc pas avec des yeux
« Soumis à vos lois, nous ne vous demandons que de pouvoir être ici, comme ailleurs, les frères de tous les hommes, et de ne jamais armer nos mains contre aucun.
« L'Angleterre et les Etats-Unis de l'Amérique, où nos frères sont beaucoup plus nombreux qu'en France, nous laissent suivre paisiblement ce grand principe de notre religion, sans nous regarder comme des membres inutiles à la société.
« Il est encore une demande, et nous espérons que vous ne nous la refuserez pas, parce qu'elle découle des principes de justice auxquels vous rendez hommage: nous avons conservé dans nos enregistrements de naissances, de mariages et sépultures, la simplicité de la primitive église ; nos maximes nous défendent les formes qui sont inutiles; elles nous font une loi de nous borner à celles qui sont indispensables pour constater ces époques de la vie dans leur rapport avec l'ordre social: nous demandons que nos simples enregistrements suflisent pour légitimer légalement nos mariages, naissances, et constater nos décès, en faisant faire une déclaration devant les magistrats.
« Nous demandons enfin à être dispensés de toute formule de serment. Christ nous les a expressément détendus eu ce3 termes : « Vous « avez appris qu'il a été dit aux anciens : vous « acquitterez vos serments; et moi je vous dis, « ne jurez en aucune manière, mais que votre « oui soit oui, et que votre noti soit non. »
« Sages législateurs,vous êtes persuadés comme nous que la formule du serment n'ajoute rien à la bonne foi, qu'elle n'ajoute rien à la déclara-ton de l'honnête homme, et qu'elle n'effraye pas les parjures ; vous convenez que le serment n'est qu'une manière particulière d'exprimer une déclaration, que ce n'est qu'une langue particulière... Nous espérons que vous ne refuserez pas de nous entendre dans la nôtre : c'est celle de notie commun maître, c'est celle de Christ.
« Nous espérons qu'on ne nous accusera pas de vouloir nous soustraire au grand but du serment civique; nous nous empressons de déclarer ici que nous resterons fidèles à la Constitution que vous avez établie ; nous la chérissons, nous la respectons, et notre intention est d'en suivre les lois duns toute leur pureté; et, d'un autre côté, si nos paroles, nos dépositions judiciaires ne sont pas trouvées conformes à la vérité, nous nous soumettons à la peine due aux faux témoins et aux parjures.
« Balanceriez-vous, respectables législateurs, à accueillir notre pétition ? Jetez les yeux sur l'histoire de notre société dans lts pays où elle est établie : plus d'un siècle s'est écoulé sans qu'on nous ait jamais trouvés compris dans aucune conspiration contre les gouvernements dans lesquels nous étions établis; notre sévère morale nous défend l'ambition et le luxe; une surveillance rigide et domestique les uns envers les autres a pour but de nous maintenir dans la pratique et les moeurs que notre fondateur nous a prêctiées par ses discours et son exemple.
« Le travail est à nos yeux un devoir indispensable, ordonné à tous les hommes; ce précepte nous a reudus actifs et industrieux; ainsi notre société convient à la France sous ce rap-
port; en nous accueillant, vous appelez- l'indus-r .trie ; elle cherche .maintenant les contrées où l'honnête homme laborieux ne craint pas de voir la persécution enlever en un quart d'heure les fruits de 100 ans de travaux.
« Maintenant que la France va devenir l'asile de la liberté, de l'égalité des droits et de l'heureuse fraternité; qu'elle joint à ces sources de prospérité la liberté pour chaque individu de suivre sa conscience dans ses rapports avec l'Etre suprême, enfin un pays favorisé par la nature... que d'avantages n'appelleront pas en France ceux de nos frères qui existent dans des climats moins favorisée, dès qu'ils sauront que vous leur accordez la même liberté civile et religieuse, dont ils jouissent en Angleterre et dans les Etats-Unis dè l'Amérique I
« Telle est la pétition respectueuse que nos cœurs ont été excités à vc.us faire pour la pa x de nos frères de France et pour la prospérité d'une patrie qui nous est chère. Nous espérons qu'au milieu de vos grands travaux pour régénérer cet Empire, et multiplier les sources de son bonheur, vous étendrez sur nous et sur nos enfants votre justice et votre bienfaisance; elles vous mériteront les récompenses du Créateur et l'affection des hommes vertueux- '
« Signé : J. Mansillac, W. Rotch, Benj. Rotch. » (Applaudissements réitérés.)
répond à la députation en .ces termes ;
« Les quakers, qui ont fui les persécuteurs et les tyrans, ne pouvaient que s'adresser avec confiance aux législateurs qui, les premiers en France,,ont réduit en lois les droits de l'homme; et la France régénérée, la France au sein de la paix dont elle se commandera toujours l'inviolable respect, et qu'elle désire à toutes les autres nations, peut devenir aussi une heureuse Pen-sylvanie.
« Comme système philanthropique, vos principes obtiennent notre admiration; ils nous rappellent que le premier berceau de chaque société l'ut une famille .réunie par ses mœuis, par ses affections et par ses besoins; et sans doute, les plus sublimes institutions seraient celles qui, créant une seconde fois lies,pète humaine, la rapprocheraient de celte première et vertueuse origine.
«L'examen de vos principes, considérés comme des opinions, ne .nous regarde plus. Nous avons prononcé. Il est une propriété qu'aucun homme ne voudrait mettre en commun : les mouvements cLe son âme et l'élan de sa pensée. Ce domaine siiçié place l'homme dans une hiérarchie plus relevée que l'état social; citoyen, il adopte une forme de gouvernement; être pensant, il n'a de patrie que l'univers. (Applaudissements.)
Gomme principes religieux,, votre doctrine ne sera point l'objet de nos délibéiations. Les rapports de chaque homme avec l'Etre d'en haut sont indépendants de toute institution politique. iEntre Dieu et le cœur de chaque homme, quel gouvernement oserait être l'intermédiaire? (Applaudissements.)
.« Comme maximes sociales,, vos réclamations doivent être soumises à la discussion du Corps législatif. U examinera si la forme que vous ob-ser\ez pour constater les naissances et les mariages -.donne .astez d'authenticité à cette filiation de l'espèce humaine, que la distinction des propriétés rei.d indispensable, indépendamment des .bonnes mœurs.
« Il discutera, si une déclaration dont .la fausseté serait soumise aux peines établies contre les faux témoins etles parjures, ne serait pas un véritable faux serment.
« Estimables citoyens, vous l'avez déjà prêté, ce serment civique, que tout homme digne d'être libre a regardé plutôt comme une jouissance que comme un devoir; vous n'avez pas pris Dieu à témoin (Applaudissements), mais vous avez attesté votre conscience; et une conscience pure n'est-eile pas aussi un ciel sans nuages? Celte partie de l'homme n'est-elle pas un rayon de la divinité? IApplaudissements réitérés.)
« Vous dites encore qu'un article de votre religion vous défend de prendre les armes et de tuer, sous quelque prétexte que ce soit. C'est sans doute un beau principe philosophique que celui qui donne en quelque sorte un culte à l'humanité; mais prenez garde que la défense de soi-même et de ses semblables ne soit aussi un devoir religieux. Vous auriez donc succombé sous les tyrans! Puisque nous avons conquis la liberté pour vous et pour nous, pourquoi rel'use-riez-vousde la conserver?
« Vos lrères de la Peusylvanie, s'ils ava;ent été moins éloignés des sauvages, auraient-ils laissé égorger leurs femmes, leurs enfants et leurs vieillards, plutôt q e de repousser la violence ? Et les stupides tyrans, les conquérants féroces ne sont-ils pas aussi des sauvages? (Applaudissements.)
" L'Assemblée discutera toutes vos demandes dans sa sagesse.; et si janais .un de nous rencontre un quaker,, il lui dira :
«,Mon frère, si tii as le droit d'être libre, tu as le droit d'empêcher qu'on ne te fasse esclave.
« Puisque tu aimes ton semblable^, ne le laisse pas égorger par la tyrannie : ce serait le tuer toi-même.
« Tu veux la paix? Eh bien! c'est la faiblesse qui appelle la guerre : une résistance générale serait la paix universelle,.
« L'Assemblée vous invite à assister à sa séance. » (Vifs applaudissements.)
(L'Assemblee ordonne l'impression de l'adresse des quakers et de la réponse de M. le Président, et renvoie l'examen de la pétition au comité de .Constitution.)
. Une députation de la municipalité: d'Issy-VEvêque est introduite à ,la barre.
Vorateur de députation s'exprime ainsi : Nous sommes envoyés vers vous par la commune et la municipalité du bourg d'Issy-l'Evêque, en .Bourgogne, dont nous sommes habitants, et par cinq autres municipalités du canton. Nous venons, Messieurs, demander à la (puissance nationale que vous représentez, qu'elle fasse rendre à nos vœux notre curé et maire, Jean-François Carillot, opprimé et illégalement tmprisonué par le Châtelet depuis six mois. Le système de cette persécution commencée par deux mauvais riches, nommés Frappet et Mollerot, secondés par le bailliage d'Autun et .-le Châtelet, est d'avoir présenté.tout le bien que.notre commune a fuit pendant .la Révolution,, comme des crimes, puis de les avoir appelés crimes de lèse-nation, et ensuite de les avoir imputés à notre pasteur, pour nous vexer tous .ensemble dans sa personne.
La commune d'Issy-l'Évêque avait établi pour les subsistances et pour la police un comité permanent et une garde nationale. Notre curé fut élu président du comilé et maire. Il ne fit qu'exé-
enter'les délibérations prises par î'apsemblée générale de la commune; ses entremis l'accusèrent d'avoir agi de «on propre chef, devoir usurpé le pouvoir administratif; il fut traduit devant le .ci-devant bailliage d'Autan; le Châtelet même se mêla de cette affaire, quoiqu'elle lût purement administrative, et le décréta de prise de corps. Nous prenons fait et cause dans cette affaire. 'Ge qui a été fait par le curé n'es1! que l'exécution des délibérations de la commune set de~hi municipalité : c'est nous qui, le 6-octobre 1789, avons librement établi le comité et celte garde nationale que l'ex-bailliage d'Autun et le Châtelet, ainsi que Frappet etMollerot, appellent la troupe de brigands du curé, quoique nous soyons nous-mêmes cette troupe, qui ne souffre aucun brigandage; que c'est nous qui "avons établi notre grenier d'abondance; que c'est nous qui avons fait arrêter du bléque les accapareurs connus pour tels enlevaient pour nous réduire à la famine, ce que nous avons fait à la prière et sur les arrêtés des comités de 20 lieues à la ronde, 'qui nous les avaient indiqués;; et comme notre curé-maire est de'jimis six mois dans bs fers pour tous ces laits, nous venons à pied, de 80 lieues, quittant nos travaux et tout, pour demander qu'il soit »entin libre ou qu'on nous mette s'il le faut à sa place. (AppImdusemeiDts,)
Nous devons faipe connaître à eeite auguste Assemblée, au sein de laquelle il a été faussement inculpé, lies faits qui lui sont réellement personnels. 11 a débité à 50 francs des blés qu'il avait achetés très cher ; il a sacrifié une partie de son jardin pour l'utilité de la communauté ; il a donné des secours aux ouvriers qui étaient sans travail ; il nous a fait des avances pour former notre garde u ai ion aie ; il a donné à la commune !e prix des baux qu'elle ne pouvait pas payer; il nous a toujours inspiré l'ainwur de la patrie, le respect dû à l'Assemblée nationale ; il nous engageait à n'exercer aucune vengeance, pas même contre MM. Frappet et Mollerot; enlin, on ne vous a pas dit que depuis 10 ans que nous le possédons, il nous a toujours défendus contre les tyrans avec le même zèle qu'il a manifesté depuis la Révoluton...
Il y a déjà six mois que nous ne le voyons pas ; car il y a six mois qu'il est en prison pour nous. Nos pauvres, nos enfants en ont plus besoin que de nous; nous aimons mieux qu'on nous mette en prison que lui. Le Châtelet qui l'a décrété de prise de corps, qui l'a fait conduire à Paris .pour l'opprimer, de concert avec le bailliage d'Autun, le Châtelet était incompétent pour des affaires purement administratives. Cette lettre de cachet judiciaire doit être levée à l'instant.
Tel est le vœu de la commune d'Issy et de toutes les communes environnantes. {Applaudissements.)
répond à la députation *: Vous dites que si votre curé était coupable, vous seriez ses complices : nous aimons à croire que le crime n'aurait pas votre langage : vous vous plaignez que les anciens tribunaux ont puni des actes de patriotisme. Vous avez de nouveaux magistrats, vous aurez 'bientôt de nouvelles lois. L'Assemblée, au moment où elle a délégué le pouvoir judiciaire, a*cessé de pouvoir et de vouloir l'exercer. Si vous avez à vous plaindre d'un déni de justice, vous ne pouvez pas douter que l'Assemblée ne l'examine avec la scrupuleuse attention qu'elle a mise à recouvrer et qu'elle
mettra toujours à maintenir les droits des citoyens. Elle vous permet d'assister à.sa séance.
Je demande le renvoi au comité des rapports.
Votre comité des rapports, chargé de cette affaire, a examiné trois choses. Premièrement une dénonciation eontre M. le curé...
Monsieur Merle, le rapport de celle affaire n'est .pas à l'ordre du jour ; veuillez donc dire votre avis sur le renvoi demandé.
Ce décret de prise de corps a fait la matière de l'examen de notre comité des rapports ; il a vu un acte judiciaire, et il a respecté cet acte.
(L'Assemblée décrète le renvoi de la pétition au comité des rapports.)
Je suis fâché de tous faire perdre vos moments ; mais je suis obligé de réclamer justice pour une malheureuse rel gieuse qu'on a mise en prison (Rires). J'ai fait, pour obtenir son élargissement, toutes les démarches qu'un honnête homme peut faire vis-à-vis d'un honnête homme. Je me suis adressé à M. Voidel ; je l'ai prié d'écrire pour faire mettre cette religieuse en liberté. Il me l'a promis en me regardant sinistrement. Je l'ai remercié; et il m'a répondu : Vous 'voyez bien que je ne suis pas si noir qu'on le dit (Rires). Quand un collègue député, quand un homme manque à sa parole, que puis-je demander? M. Voidel n'a pas écrit; Mme de Mauclerc, chanoinesse de Meaux, est toujours en prison.
Plusieurs voix : Concluez'1
Je demande qu'on rende justice à cette ma heureuse religieuse.
De quoi l'accuse-t-on? d'avoir distribué des libelles; et c'est pour cela qu'elle est enfermée depuis'trois semaines. J'ai montré une lettre à ce sujet à M. Voidel; il a voulu en voir la signature, mais je m'en ^uïs bien gardé : j'ai remis la lettre dans ma poche. Celte religieuse avait été à Besançon achet r sept à huit imprimés, dont /'an était un faux bref du f ape. Elle en a distribué t;ois ou quatre (Murmures;) à trois heures du malin elle fut arrêtée ; les gardes nationales eu-rant l'attention de mettre des cadenas aux portières de la voiture. Le tribunal lit mettre en liberté une dame qui l'accompagnait; mais le commissaire du roi, qui est sans doute un jeune homme, courut après et dit à la garde nationale, à laquelle cependant il n'avait pas le droit de commander :'Ramenez-la. Le tribunal n'est pas le maître. On l'a en effet ramenée, et l'autre est toujours restée en prison, grâce à M. 'Voidel qui m'a promis d'écrire. (Rires.)
Je commence par remercier M. d'Am-bly de la préiérence qu'il a bien voulu m'accor-der sur mes collègues ; car Î1 m'a tait l'honneur de me regarder, moi tout seul, comme un comité. Voici ce qiui s'e.rt passé : Je n'ai connu de cette affaire que ce que M. d'Ambly m'en a raconté et ce -qu'il vient de dire dans de moment.
Et ce que je vous ai laissé écrit...
M. d'Ambly m'a communiqué une
lettre que je crois être d'un de ses amis, qui fait une loogue narration de l'événement arrivé à Mm8 de Mauclerc, en effet arrêtée pour avoir distribué (Je prétendus brefs du pape. J'ai dit à M. d'Amblv, plus gaiement que sinistreme it, qu'un bref du pape, répandu par une ci-devant chanoinesse, ne me paraissait pas une affaire très grave; que la première fois que j'irais au comité, j'examinerais cette affaire, et que je croyais que le comité se déterminerait à écrire pour qu'on lui rendît sa liberté. Voilà, Messieurs, ce qui s'e-t passé. Je suis dans ce moment au bureau où la confiance de l'Assemblée m'a placé. Je ne sais [as faire deux choses à la fois; et en conséquence je n'ai point été depuis au comité. Je tiendrai parole à M. d'Atnblyla première fois que j'irai.
(L'Assemblée renvoie la demande de M. d'Am-bly au comité des recherches pour lui en faire le rapport incessamment.)
, au nom du comité des rapport?. Messieurs, des négociants de Marseille accoutumés à payer les huiles en piastres et autres monnaies étrangères, en ont fait charger une certaine quantité sur de x felouques qui ont pris la route de Toulon. Elles avaient relâché en un lieuqu'on appelle Cuvalaire, près Saint-Tropez. Un excès de patriotisme de la part de la garde nationale, l'a engagée à arrêter les deux felouques et à s'emparer des espèces. Les négociants de Marseille ont réclamé auprès du directoire du Var, qui s'est assuré de la destination de ce numéraire. Cependant, par prudence, le département a pris le parti d'eu déférer à l'Assemblée nationale.
Le comité des rapports, après avoir pris connaissance de cette capture, m'a chargé de vous présenter le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des rapports, décrète que les piastres et sommes d'argent arrêtées par la garde nationale de Cavalaire, près Saint-Tro-pez, sur deux felouques, chargées à Marsei le, et qui avaient relâché à Cavalaire, seroi.t remises aux propriétaires qui les avaient fait expédier. »
(Ce projet de décret est adopté).
l'aîné quitte le fauteuil.
, ex-président, le remplace.
, au nom du comité ecclésiastique. Messieurs, avant de vcus présenter jin projet de décret sur la circonscription de paroisses dans la ville du Mans, je suis chargé de vous lire trois lignes d'un curé qui envoie son serment civique. C'est M. Salton, curé de Ventouse, près Meuitre. Voici comment il s'explique :
« Bien différent de cet évêque qui ne voulait pas souiller sa vieillesse en faisant le serment ordonné par la loi, je veux, moi, honorer la mienne (Applaudissements) et la couvrir de gloire en me soumettant de toute mon âme à ce qui émane de cette auguste Assemblée. Recevez mon serment, comme un tribut d'obéissance que je dois aux décrets du Corps législatif, lesquels je lis à mes prônes les dimanches comme des lois faites pour le bonheur des fidèles qui me sont conliés. » (Applaudissements.)
Voici maintenant, Messieurs, eu ce qui concerne les paroisses de la viiie du Mans, le projet de décret que le comité vous propose :
« L'Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par son comité ecclésiastique de la délibération du directoire du département de la Sarthe du 27 janvier 1791, sur la réunion et la circonscription des paroisses de la ville du Mans, de l'avis du district et de celui de la municipalité du Mans, relatif au même objet, en date des 21 et 24 du même mois, enfin du refus de M. l'évêque du Mans, de concourir à ce travail, refus déclaré par sa lettre au directoire du département, du 11 décembre 1790, décrète :
Art. 1er.
« Il y aura dans la ville du Mans quatre paroisses", savoir : la cathédrale, sous l'invocation de Saint-Julien ; Notre-Dame de la Couture, dans l'église de la ci-devant abbaye de ce nom ; Notre-Dame du Pré, dans l'église de la ci-devant abbaye du Pré, et la paroisse Saint-Benoît.
Art. 2.
« Ces paroisses seront formées et circonscrites ainsi qu'il est exprimé dans la délibération du département du 27 janvier dernier, excepté néanmoins qu'il sera distrait une partie du territoire attribué à la paroisse cathédrale par cette délibération, afin d'en composer la paroisse Saint-Benoît.
« L'enceinte de cette dernière paroisse sera bornée par la rivière de Sarthe, à partir de la porte Samson jusqu'à l'abreuvoir de l'Eperon : elle aura au surplus le contour formé par une ligne qui, partant dudit abreuvoir, passant par le milieu de la rue de l'Abreuvoir, de la place de l'Eperon et de la rue des Boucheries, renfermera tout l'escalier des Boucheries, ensuite ( rendra le milieu de la rue Godard; de là, coupera la grande rue, passera par le milieu de la rue de la Verrerie, jusques et compris l'escalier de la Poterne, renfermera en outre les maisons qui ont leurs entrées par les rues de la Tannerie, de Danse-Renard et de Gourdaine, sans comprendre le coin où se trouve l'église dudit Gourdaine, et enfin aboutira à la susdite porte Samson.
Art. 3.
« Les autres paroisses de la ville du Mans sont supprimées.
Art. 4.
« L'église ci-devant paroissiale de Saint-Vincent sera provisoirement conservée comme oratoire ou chapelle de secours de la paroisse cathédrale.
« Les églises ci-devant paroissiales de Saint-Gilles et de Saint-Germain seront aussi conser-servées provisoirement comme oratoires de la paroisse de Notre-Dame. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité de judica-ture. Messieurs, les percepteurs du droit d'enregistrement, subtilisant déjà de la manière la plus fiscale sur l'exécution de vos décrets, veulent exiger ce droit sur les quittances de liquidation et remboursement des offices, en disant qu'elles ne sont exceptées que du droit de contrôle qui n'existe plus.
Pour arrêter ces abus, le comité propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, informée par son comité de judicature, que les bureaux nouvellement établis pour la perception du droit d'enre-
gistremènt, veulent exiger ce droit sur les quit- , tances de liquidation et remboursement des offices, sous le prétexte que le décret du 28 novembre dernier, sanctionné le 10 décembre, ne porte que la dispense du contrôle; et considérant qu'à l'époque du 28 novembre, le droit d'enregistrement n'était pas encore établi, et qu'il ne l'est qu'en remplacement de celui de contrôle, décrète :
« Que l'exemption prononcée du droit de contrôle, par les articles 7, 12 et 13 de son décret du 28 novembre dernier, doit s'entendre également du droit d'enregistrement. » (Ce décret est adopté.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret du comité militaire sur le recrutement, l'engagement et le rengagement (1).
, rapporteur. Messieurs, vous avez décrété avant-hier l'article 1er du titre II du projet de décret du comité; nous avons dû, en raison des dispositions que vous avez adoptées, modifier le texte des articles suivants ;
Les articles 3, 4 et 5 du projet ne formeraient plus que deux articles, qui prendraient les numéros 2 et 3, et qui seraient ainsi conçus :
« Art. 2 (ancien art. 3 et 4). Tout homme qui prouvera avoir été engagé, avant l'âge de 18 ans, d'une manière contraire aux dispositions de l'article ci-dessus, sera admis, en produisant son extrait de baptême dûment légalisé, et les réclamations de ses père, mère, tuteur ou curateur, à demander son dégagement; mais il sera tenu de le faire dans les trois mois qui suivront la passation de son engagement, soit qu'il ait rejoint ou non son régiment; et il ne pourra lui être refusé, . en remettant la somme qu'il pourrait avoir reçue telle qu'elle serait portée par son engagement, les frais de sa route, à raisonHe trois sous par lieue, en raison delà distance du lieu où il aura été engagé, ainsi que la somme qu'il pourrait devoir pour les avances qui lui auraient été faites pour son équipement, ainsi qu'il pourra être justifié.
« Art. 3 (ancien art. 5), Les père, mère, tuteur et curateur seulement des jeunes gens ainsi engagés avant l'âge de 18 âns, auront droit, en justifiant de leurs qualités, de réclamer leur dégagement dans Içs délais prescrits par l'article précédent, quand bien même l'homme engagé ne le ferait pas lui-même, et en se conformant aux conditions prescrites; il leur sera rendu, quand bien même le jeune homme s'y inontrerait opposant. »
Je demande à dire quelques mots sur les articles proposés; les dispositions que vous présentez, Monsieur le rapporteur, sont totalement opposées à ce qui a .été décrété avant-hier. On est, en effet, convenu que l'engagement des jeunes gens qui serait contracté sans l'aveu de leurs père, mère ou curateur, serait nul.
Je ne le crois pas. Quelles été, en effet, l'intention de M. le
rapporteur? C'est de donner aux père, mère ou curateur la faculté de
réclamer leurs enfants qui auraient été engagés avant l'âge de 18 ans ;
mais l'Assemblée nationale a-t-elle pensé que ce droit qu'elle don-
Le droit est jugé par l'Assemblée nationale; mon devoir est de maintenir ce qu'elle a jugé.
Un membre donne lecture de l'article adopté dans la séance d'avant-hier, tel qu'il est inséré au procès-verbal.
L'article n'a point été décrété; il a été renvoyé, à la rédaction. Tout ce que j'ai entendu, c'est que l'Assemblée a paru vouloir qu'on n'engageât personne à l'âge de 16 ans, et qu'à l'âge de 18 ans,un engagement fût irrévocable, (Applaudissements.)
Un membre demande la question préalable sur les nouveaux articles 2 et 3 proposés par le comité.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur ces articles et consacre la rédaction de l'article lor adopté dans la séance d'avant-hier.)
, rapporteur. Nous vous proposons maintenant, Messieurs; de passer à la discussion des articles 8 et 9 du projet qui deviendraient les articles 2 et 3. En vojici la rédaction :
Art. 2 (ancien art. 8).
« Aucun régiment français, soit d'infanterie, d'infanterie légère, soit de cavalerie, dragons ou chasseurs, ne pourra, sous aucun prétexte, engager des hpmmes nés hors de la domination française, ni déserteurs d'aucun régiment. » (Adopté.)
« Art. 3 (ancien art. 9). Les régiments allemands, irlandais et liégeois .sont seuls autorisés à engager des étrangers et à recevoir les déserteurs des puissances voisines, lorsque des conventions particulières n'en prescrivent pas la restitution, il leur sera libre néanmoins de recruter en France; mais il leur sera défendu, sous aucun prétexte, de prendre des déserteurs des régiments français, sous peine de punition exemplaire contre celui qui les aurait engagés, et contre le conseil d'administration qui les aurait admis en ayant connaissance de leur désertion. »
Entend-on que les régiments allemands, irlandais et liégeois pourront recruter en France comme les régiments français ? Si vous décidez l'affirmative, vous n'avez plus besoin de régiments allemands, irlandais et liégeois.
Aujourd'hui que tous les régiments sont Français, qu'il n'y a plus de propriétaires de régiments, si l'on ôte aux régiments français, sous les différentes dénominations de trentième, quarantième, cinquantième régiment, la faculté de recruter en France, il n y aura plus de recrutements ni d'engagements.
Si vous ne composez vos régiments que d'étrangers, vous n'aurez ni discipline, ni rien de ce qui fait la solidité d'un régiment. Il faut avoir des corps qui, lorsqu'on fera la guerre, soient susceptibles de se recruter aux dépens de l'armée ennemie et de trouver dans 10 ou 12 régiments
français des frères, des amis, des cousins. Si l'on n'adoptait pas ce mode-là, il faudrait réformer en totalité ces régiments étrangers, et ce serait entièrement contraire à l'esprit de quelques-uns des départements. Un des départements de la ei-devant province de Bretagne vient de prier le roi de mettre le plus tôt possible le régiment de Walsh au complet de 1,500 hommes,parce qu'il a toujours fait l'éditication et la sûreté d'une partie de ce pays.
Quand l'Assemblée a décrété qu'il y aurait des troupes étrangères, elle a décrété qu'il n'y aurait que 26,000 hommes ; mais, constitutionnellement, elle n'a point décrété qu'il y aurait des troupes étrangères au service de. France. D'après cela, les régiments qui y sont ne peuvent être regardés comme étrangers et le projet du eomité doit être posé tel qu'il est.
le jeune. Je conviens que les régiments étrangers Ont toujours servi avec distinction; mais, en même temps, je erois que, dans une nation aussi nombreuse que la nôtre, il n'est nullement nécessaire d'avoir des troupes, allemandes. Nous avons des régiments suisses, nous avons des provinces où l'on parle allemand; el par ces provinces nous aurionç le même moyen de recruter en temps de guerre des déserteurs étrangers, si jamais, contre mon avis, il était nécessaire d'avoir des étrangers pour défendre le royaume de France^
Je conclus, d'après ced différentes réflexions, que les régionts étrangers ne doivent se recruter qu'avec des Français et être assimilés à des régiments français. "J'excepte les régiments suisses, que je regarde comme étant d'une nation alliée de tout temps à la nôtre, plutôt que comme des troupes étrangères à notre service.
Pour fixer la discussion à ses vrais termes f je dois à l'Assemblée une observation de fait. Il existe un décret constitutionnel, accepté par le roi, qui porte qu'aueune troupe étrangère ne sera admise au service de France, autrement que par un décret du Corps législatif, sanctionné par le roi. Je ne connais aucun décret qui ait admis au service de France d'autres troupes étrangères que les régiments suisses.
Il est sûr que l'Assemblée a rendu un décret; mais je vous demande s'il est vrai qu'elle a cry réformer un seul régiment étranger ?
Plusieurs membres ) Non ! non 1
D'abord, Monsieur le Président, je crois que vous devez quitter le fauteuil; je vous invite à engager un autre président à le prendre, car, avant que vous le prissiez, vous avez déclaré vous-même que vous étiez fort fâché d'être président actuellement, parce que vous comptiez parler précisément dans la question des régiments étrangers.
Je vous prie done de cédep le fauteuil à qqel-que autre ex-président; alors vous aurez la honté de donner votre opinion, afin que je puisse vous répondre.
Les difficultés qui viennent de s'élever prouvent que cette question n'est pas
suffisamment éolaircie; en conséquence, j'en demande l'ajournement et le renvoi au comité militaire.
Vous ave?; paru former des doutes pour savoir si l'Assemblée connaissait au service de France les régiments allemands. Un fait me paraît le prouver d'une manière invincible, puisqu'en décrétant les principes d'avancement, vous avez dit que la cavalerie ferait une arme, que les dragons feraient upe arme, que les régiments français feraient une arme, que les régiments suisses feraient une arme, que les régiments allemands feraient une arme.
, rapporteur y Monsieur le Président, je demande que ce^ article soit ajourné jusqu'à ce que vous puissiez porter la parole, parce que dans ce moment, Monsieur le Président, vous êtes gêné.
, président, quitte le fauteuil.
, ex-président, le remplace.
Je demande l'ajournement, attendu le petit nombre de membres qui se trouvent à présent dans l'Assemblée.
J'appuie l'ajournement.
, à la tribune. Messieurs Je ne m'oppose pas à l'ajournement ; ie demande au contraire qu'une questipn de ^importance de celle-ci ne soit pas décidée ou plutôt enlevée dapis une séance du soir. Je ne dissimula point que mon opinion estj que, dans les circonstançes actuelles, nous ne devons avoir à notre service d'autres troupes étrangères que les Suissep. On nè répondra pas à cette question; un décret constitutionnel porte qu'aucune troupe étrangère ne pourra être admise au service de France sans un décret du Gqrps législatif.
Vous ayez décrété qu'en attendant le renouvellement de la capitulation avec les Spisges, les régiments suisses jouiraient des mêmes avantages qu'autrefois, et même de plusieurs autres, II n'y a pas de décret popr l'adipissiori des trpu-pes allemandes. Voùà avez seulement décrété là proportion étrangère avec le reste de l'armée,
Avec une armée de 100,000 hommes, vqs ne pouvez avoir que 28,000 hommes «de troupes étrangères. Vous avez déjà 11,000 Suisses, et la Suisse est dans le cas de vous fournir au premier moment, et en cas de soin, encore 6,000 hommes, conformément aux traités : 17,000 homme§ sont Ibieq près de 26,000. Si vous admettiez les régiments actuellement dits Allemands, cqmme troiipes étrangères, vous excéderiez le non bre que yôqs avez fixé. Comment serait-il (J'ajllpyirs possible d'ap- peler ces régiments trouves étrangères? Quefje est la puissance qui les avoue, quel ££jt lç traité, quelle est la capitulation en vertu desquels' ils vous spnt soumis? Quand vous avez 0té la propriété de ces régiments à ceux qui l'avaient, au prince des Deux-Ponts, par exemple, au prince de Salm, au prinçé d'Armstadt ; je vqûs qemqjicle si vous n'avez pas été d^terpipés paj* la considération qu'aucune puissance ne vous donnait ces régiments, qu'aucune'puissance ne lés avouait, et qu'ils ne pouvaient pas plus être la propriété de quelques individus, que tous les autres régiments français? Vous avez sagement rompu ce
lien qui les attachait, en quelque sorte, des puissances étrangères.
11 avait été arrêté dans le comité militaire de mettre tous les régiments actuellement appelés allemands, sur un pieçt parfaitement égal a celui des autres régiments français, et; de (lire tel régiment portant tel numéro aura la liberté de se recruter en partie d'étrangers, De cettç manière, ils seront ep tout Français; mais, recrutés en partie dans vos dépatrtejnépts où là langue allemande est en psage, ils présenteront l'avantage de pouvoir, en temps de guerre, se recréer aux dépens de l'ennemi. Mais je ne vois pas que, sans l'aveu dés princes, sans capitulation, vous puissiez dire que vous ayez uu régiment des Deux-Ponts, un régimeliégeois, et autres çhosçs semblables. (Applaudissements.)
, rapporteur, Nous sommes parfaitement d'accprd, M. Emmery et mot; ce n*est qu'ubè affaire dé mots. Il né s'agit qUe de dire : Les régiments ci-devant connus sous le norifi d*allemands, irlandais et liégeois_
Tout ce que je demande, c'est que vous ne donniez pas de prétextes aux princes étrangers.
Je pense que les régiments allemands dpivent faire arme à part en France et je le demande.
Je conviens qu'on a bien fait d'(Her à des particuliers la propriété de ces régiments, et en cpla je ne suis pas suspect, puisqu'on m'a ôté la propriété d'un régiment que ma famille a levé, il y a cent aus, Je péuse ainsi qu'il faut cesser de donner aux, régiments allemands et irlan^ dais des noms d'étrangers ;. mais il est très intéressant qu'ils çonservent ' et la faculté de se recruter d étrangers et leur uniforme, i/armée ennemie reconnaît ces régiments; et les dése.f^ teurs viennent se ranger parmi ces corps où ils trouvent leurs frères, leurs amis* leurs pompa--trio tes, et des gens qui parlent leur langue- Je me trouvai dans là dernière guerre en Amérique avec mon régiment. Dan? la prise de Saint-Eustaehp nous prîmes uqp garnison anglaisé de 940 hommes, dont o30 Irlandais s'engagèrent ians le régiment de ijiitQP, 4e Waish, Ge Tait prouvé eembieo i| est important que vous ayez des régiments qui puissent recruter des étrangers.
, le j§unç. 1Q0,000 français servent en pays étrangers; et cependant les puissances étrangères, l'Autriche, par exemple) n'a pas de régiment français, ni de régiments spécialement destinés, à recruter les Français; elle les admet dans tous ses régiments. Je he crois Eas qu'une puissance telle que la France ait ^esoin de trpupea étrangères pour sa défense. Je crois même que le système d'en admettre ne serait pas gaPS danger, comme on l'a vu en Amérique lorsque les troupes hessoises étaient à la solde du congrès au nombre dp 16,000 hommes
Ne UQUS parle? pas de ces marchés d'hommes. Je ne diffli rien sur la manière dont le? régiments hegsoig ont servi en Amérique; ces événements ne seraient pas arrivés, si les régiments besseis eussent déjà existé en Amérique, et qu'ils ne se fussent recrutés que iUpitié d'étrangers,
Je demande donc que cette faculté soit accordée
aux régiments ci-devant appelés étrangers; ce n'est )as dans uu moment où il manque 33,000 hommes a l'armée, pû les avantages que vpus accordez aux soldats ne l'pnt pas complétée, qu'on peut refuser d'admettre la moitié d'étrangers dans les régiments qui sont susceptibles d'en recevoir sans inconvénient.
L'Assemblée n'est pas assez nombreuse en ce moment pour prononcer sur ces questions : j'en demande l'ajournement, nous ne spmmes pas 200.
Un membre : Je m'oppose à l'ajournement; lorsqu'on ne vpudra pas prendre une délibération, on présentera toujours un prétexte.
Plusieurs membres appuient l'ajournement.
(L'ajqprnement est décrété).
lève la séance à 10 heures.
PRÉSIDENCE DE M, RIQUETTI DE MIRABEAU L'AINÉ.
Séance du
La séance est yuverte à neuf heures et demie du matin-
Un 4e MM. Içf sécrétons, fait lecture du procès-verbal de la séançe d'hier au spir, qui est adepté.
donne lecture de la pétition suivante adressée à l'Assemblée nationale par le sieur |8age, membre de l'Aoadémie des sciences et professeur de minéralogie:
« Messieurs, c'est avec autant d'empressement que de plaisir que je vous ai fait, il y a un au, l'hommage patriotique de plus de la moitié de ma fortune pour concourir à l'amélioration de la chose publique, dont vous vous occupez avec tant de courage.
Aujourd'hui, Messieurs, j'ai recours avec cpnfiauoe à votre justice ; il me restait une rente de 5,000 livres pour la cession que j'ai faite au roi de tout ce qui compose le cabinet et le laboratoire de l'école des mines. Çelui qui a rédigé le brevet a mis pension, et depuis J3 mois je n'ai pu riea recevoir.
« J'ai, à ce que je erois, tous les titres que vous requérez pour mériter votre attention ; Voici ta 88» année que je professe publiquement et sans interruption une science utile que j'ai naturalisée en France, la chimie métallurgique j tous mes ouvrages ont toujours eu pour but le bien public ; mais il ne me rpste plus de quoi continuer mes travaux, si vous n'avez pas la bonté d'avoir égard à ma pétition et de décréter qu'pn me fasse jQuir de çe qui est, si légitimement 4 mpi.
« signé ; Sage. »
(L'ASsemblée renvoie cette demande au commissaire liquidateur et ordonne qu'il en sera fait mention dans le procès-verbal).
J'ai reçu de M. le ministre de la marine la lettre suivante :
« Monsieur le Président, j'ai l'honneur de vous adresser, en vertu du décret du 1er septembre dernier, les états sommaires des recettes et dépenses faites pourles mois d'octobre et novembre derniers pour la marine. Ils sont accompagnés d'un bordereau derecettes et dépenses etdepaye-ments sur chaque service en particulier et sur tous en général.
« J'aurais bien désiré, Monsieur le Président, pouvoir vous adresser également ceux du mois de décembre; mais, comme ils né ope sont pas encore parvenus des ports en totalité, je suis obligé d en attendre la réunion pour en faire dresser le bordereau général et le présenter à l'Assemblée nationale.
« Signé : de Fleurieu. »
(L'Assemblée ordonne le renvoi de cette lettre au comité de la marine). 1
donne lecture d'une lettre de M. Guiton, prévôt général de la marine à Roche-fort, admis au comité de la marine par un décret du 7 septembre dernier, pour concourir à préparer un projet de loi sur la police des chiourmes et la punition des forçats, par laquelle il annonce a l'Assemblée que sa santé ne lui permet pas de continuer ses fonctions; il demande un congé de six semaines. (Ce congé est accordé).
membre du comité des recherches. Messieurs, vous avez renvoyé hier au comité des recnerches, en le chargeant d'en rendre compte incessamment à l'Assemblée, l'affaire de Mme de Mauclerc, ci-devant chanoinesse.
J'ignorais alors qu'il y eût un tribunal saisi de cette question ; c'est le tribunal de Champlitte : je l'ai su depuis.
Dans ces conditions, cette affaire ne peut plus regarder ni le comité, ni l'Assemblée,et il n'y a pas lieu au renvoi décrété.
Je demande que mon observation soit insérée au procès-verbal, afin qu'on ne vienne pas prétendre que le comité a refusé de faire son rapport.
(La motion de M. Yoidel est décrétée).
donne connaissance à l'Assemblée d'une lettre des administrateurs du directoire du district de Tours, département d'Indre-et-Loire, qui annoncent à l'Assemblée le bénéfice fait par la nation pendant le mois de janvier, sur les ventes des biens nationaux ; il se monte à la somme de 606,872 1. 7 s. 6 d.
L'ordre du jour est un rapport du comité de la marine sur les dépenses ae l'expédition extraordinaire pour les Antilles, ordonnée par le roi..
, rapporteur (1).
Messieurs,
La loi du 8 décembre dernier, promulguée le 11 du "même mois, ordonne une expédition extraordinaire pour les îles françaises de l'Amérique. 4 vaisseaux, indépendamment de ceux'
antérieurement votés, un nombre proportionné de frégates et autres bâtiments, et 6,000 hommes de troupes de terre, sont destinés à seconder les opérations des commissaires nommés par le roi pour rappeler l'ordre et la paix dans des contrées qui vivifient l'industrie de la nation, et qui feraient l'admiration de la France, si le patriotisme des vrais colons eût été libre d'éclater dans toute son énergie.
Aussitôt que cette loi a été promulguée, le département de la marine a dû s'occuper du projet de fonds qu'elle nécessite. Les recherches, relatives à cette opération, en ont prolongé lé travail jusqu'au 7 de janvier, époque à laquelle le ministre vous a fait connaître à quelle somme il estime que pourra s'élever l'expédition ordonnée par le roi, et quel doit être l'emploi de cette somme.
Vous vous rappelez, Messieurs, que l'état général dé ces dépenses s'élève à la somme de 9,096,996 livres. Chargé par votre comité de marine d'en vérifier toutes les parties, j'étais près d'en faire le rapport, lorsque votre décret du 30 janvier a changé les bases élémentaires des frais de.passage. La nécessité de réformer mon travail sur ce nouveau tarif a suspendu jusqu'à ce jour la remise des premiers fonds demandés pour les besoins les plus pressants de l'escadre et de l'armée de terre. Il fallait cependant ne pas retarder leur départ : car c'est particulièrement dans les occasions majeures que la responsabilité des ministres devient une loi rigoureuse, aux yeux de laquelle la pénurie des fonds ne serait qu'une vaine excuse.
Que devait faire le ministre dans une circonstance aussi délicate? Employer tous les moyens qu'il avait à sa disposition, et vous en rendre compte. Les fonds à faire en novembre par le Trésor public, à compte des dépenses des armements extraordinaires, s'élevaient à la somme de 2,374,294 livres. Les payements exigibles pour le moment ne consommaient qu'une somme de 274,294 livres. Le surplus montant à 2,100,000 liv., a été employé à rembourser à MM. Monneron frères, et Le Normand, une somme égale, fournie par eux en piastres, et destinée à payer dans les colonies le prêt des 12 bataillons qui devaient s'y rendre incessamment. Mais, pour éclairer sa conduite, le département de la marine a établi deux états de distribution, l'un pour le service extraordinaire de3 armements, l'autre pour le service des colonies, lesquels ont été envoyés en finances à la fin de décembre. Cette opération n'est qu'un emprunt momentané, fait au service de la marine, pour le service plus pressé de l'expédition ordonnée pour les Antilles, dont les fonds n'avaient pas pu encore être décrétés. Elle est simple, exempte d'inconvénients, commandée par la prévoyance; elle mérite d'être approuvée.
Ces détails particuliers qu'il convenait de vous soumettre, en démontrant les besoins actuels de la marine,me ramènent naturellement à l'examen des dépenses dont il est nécessaire que vous décrétiez les fonds.
5 vaisseaux (2) de 74 canons, 2 frégates, portant du 18,9 portant du 12,
2 flûtes et3gabares, viennent de faire voile pour les îles de
l'Amérique. Ces 21 bâtiments armés sur le pied de paix, pour ne point
alarmer la tranquillité de
Cette expédition imposante est sans doute justifiée par la protection due aux colonies : mais elle entraîne des dépenses considérables. Il s'agit de vous les présenter avec ordre, et de vous faciliter les moyens d'en apercevoir les détails.
Je vous dirai quels sont les frais de passage, d'après les nouvelles lois de l'Etat.
J établirai ensuite les frais d'armement sur les bases que vous avez déjà adoptées.
Enfin, Messieurs, après vous avoir rendu compte des dépenses annuelles à faire dans les colonies, pour l'armée de terre, et pour le traitement des commissaires et du secrétaire de la commission nommés par le roi (2), je vous indiquerai les
sommes qui doivent être payées comptant, et celles qui doivent être mises,mois par mois, à la disposition du ministre de la marine.
FRAIS DE PASSAGE.
Avant le décret du 30 janvier, il existait autant de gratifications différentes pour les passages des chefs militaires et d'administration, qu'il y avait de grades. Le nouveau tarif,^ en faisant disparaître ces nuances, fixe la même indemnité pour tous les passagers nourris à la table du capitaine, et conserve aux passagers nourris à la table de l'état-major le traitement accordé par les anciennes ordonnances. Ce traitement est de 3 1. 17 s. par jour, et la nouvelle indemnité est de 800 livres pour la traversée. Il
our rester en station, tant aux îles du Vent qu'aux îles sous le Vent. Les dépenses de ceux-ci sont comprises ans les fonds faits pour l'exercice de 1790.
On voit, dans l'état suivant, quels sont les vaisseaux stationnaires, ceux extraordinairement armés, et leurs différentes destinations.
ETAT des vaisseaux; frégates et autres bâtiments expédiés de Brest et de Lorient pour les îles du Vent
DE BREST POUR LES ILES D0 VENT.
et sous le Vent.
Vaisseaux.
Frégates,
Corvettes. Aviso
Flûtes......
Gabares.....
Vaisseaux...
Frégates Navire frété.
de brest pour les iles d0 vent.
L'Éole, de 74..........................................................Girardin, chef de division.
L'Apollon, de 74.............'.........................Du Chilleau, chef de division.
Le Jupiter, de 74..................................................Relizat, chef do division.
Le Duguay-Trouin, de 74..................................Trogoff, capitaine.
La Didon, portant du 18....................................Villevieille, capitaine.
La Fidèle, portant du 12.................................Rosily, major de vaisseau.
La Réunion,, portant du 12..............................Querebars, major de vaisseau.
La Fine, portant du 12......................................Truguet cadet, major de vaisseau.
La Bellone, portant du 12........................S. Pierre, major de vaisseau.
La Surveillante, portant du 12........................De Cercey, lieutenant de vaisseau.
L'Amphitrite, portant du 12............................Grimaldy, lieutenant de vaisseau.
La Calypso, portant du 12...V.......................Mallevault, lieutenant de vaisseau, doit stationner à
la Martinique.
La Précieuse, portant du 12....................Obet, lieutenant de vaisseau.
La Danaé (en flûte)...............................................Piquet de Melesse, lieutenant de vaisseau.
Le Maréchal-de-Castries, portant du 6..........D'Aché, lieutenant de vaisseau, doit stationner à
Saint-Domingue.
La Fauvette, portant du 6....................Boisgelin, lieutenant de vaisseau.
Le Cerf, portant du 4..........................................Blanchard, sous-lieutenant, doit stationner à la Martinique .
La Normande, de 750 tonneaux........................Roux, sous-lieutenant.
Le Marsouin, de 750 tonneaux..........................Portzamparc, sous-lieutenant.
! L'Espérance, de 400............................................Dudrezit, sous-lieutenant.
La Moselle, de 400...............................Guillotin, sous-lieutenant.
Le Barbeau, de 350..............................................Kerilteau, sous-lieutenant.
de lorient pour les îles sous le vent.
I Le Fougueux, de 74............................Commandeur de Villages, chef de division, doit sta-
î tionner à Saint-Domingue.
Le Borée, de 74...........................................Grimouard, capitaine.
L'Uranie, portant du 18......................................Bataille, capitaine.
La Prudente, portant du 12..............................Joyeuse, lieutenant, doit stationner à Saint-Domingue.
Le Nantais, de 500 tonneaux.............
Bâtiments actuellement en stations aux Antilles.
îles du vent.
Vaisseau.... La Ferme, portant du 74.................. Robert, lieutenant.
Frégate..... L'Embuscade, portant du 12............... Deniau, sous-lieutenant.
Avisos ( Levrette, portant du 4................. D'Orléans, major.
......( Le Balon, portant du 4..........i......... Rivière, chef de division.
îles sous le vent.
Frégate..... L'Aglaé, portant du 12................... De Paroy, major.
Corvette .... La Favorite, portant du 12................ Négrier, lieutenant.
( Le Sans-Souci, portant du 12.............. Saint-Vincent, lieutenant.
Avisos......] Le Serin, portant du 12................... Du Moutier, sous-lieutenant.
( Le Curieux, portant du 12................ Buissy, lieutenant, doit revenir incessamment.
(1) Ces seconds bataillons sont détachés des régiments de Normandie, Artois, Beauce, Ile-de-France, Rohan, Bassigny, Rouergue, Poitou, Maréchal-Turenne, Angoulême, Aunis, Forez. Les deux premiers sont destinés pour Saint-Domingue, les autres pour la Martinique.
(2) Les membres de la commission sont MM. De La Coste, De Mondenoix, de Nagnitot, Linger, et Régis de Curt, secrétaire nommé par Sa Majesté.
est en outre accordé 200 livres pbur le passage de chaque domestique des officiers supérieurs, et 15 livres de gages par mois» avec Une ration à ceux des capitaines.
C'est sur ces nouvelles bases que l'état des dépenses doit être formé. Il convient de vous en présenter les détails.
Pour le passage de quâtte bommiSsaires et du secrétaire de la commission nommés par le roi et l'indemnité accordée pour leufs domestiques, ci...............7,400 liv*
Idem du commandant général dé rtrfaée». it.........................2,000
Idem du commissaire ordonna* teur de l'armée 1,400
Idem de l'aide major général des troupeB et de l'aide-major général dès logi..............2,400
Idem des 12 lieutenants-colonels. 14,400
Idem de 336 officiers, à 3 h 17 s, par jour, pendant 45 jours........ 58,212
Pour gages de 120 domestiques, à 15 livres par mois............. 2,700
Pour les lits de bord de 348 officiers â 50 livres.. ................ 17,400
Pour les hamacs et couvertures
de 5,748 soldats, à 20 livres...... i 04,960
Idem de 173 domestiques*.. *... 3,468
Pour 270,000 rations, pendant 45 jours de traversée, à 17 souS la ration.......................... 9,500
Total des frais de passage ...........443,040 liv.
ARMEMENT.
Les 21 bâtiments, qui composent l'escadre envoyée aux Antilles, se trouvaient armés, lorsque leur destination a été ordonnée. AidSi il ne doit paâ être question de dépenses préalables poUr réparations à l'armement et pour CôflduitéS des gens de mer. Ces dépenses ont été prises Sut» les fonds décrétés en juin et Septembre derttièrs, époques où vous avez montré aveq tant d'ênèrgie ce que devait la loyauté française à 1 alliance d'Espagne.
Ce qu'il convient de payer pdur l'armement, dont j'ai l'honneur de vous présenter les détails, se réduit conséquemment :
1° Au dépérissement de la mâture, des agrès et appâraùx, du doublage en cuivre, et de Tin-demnité accordée aux chirurgiens des vaisseaux pour leurs instruments;
2° Aux journées d'bôpitaux et à la consommation journalière des diverses munitions et marchandises ;
3° Aux dépenses de tablé des officiers de la marine ;
4° A la subsistance en argent des élèves et volontaires, et aux appointements des aumôniers ;
5° A la solde et à la subsistance des équipages.
L'évaluation du dépérissement et de la consommation journalière des vaisseaux a été mise sous vos yeux, le 12 juin dernier, par le rapporteur de la marine, et vous l'avez décrétée le même jour, comme base élémentaire. C'est sur cette évaluation que votre comité a combiné les dépenses de l'armement actuel. Cependant il eBt nécessaire de vous rappeler qu'il serait imprudent de les re* garder comme fixes. Personne ne peut ealculer les événements de la mer. Trop souvent ils ont entraîné au delà des probabilités humaines, et l'expérience confirme, tous les jours, que le dé-
partement de la marine est le seul dont on Hë pourra jamais fixer invariablement toutes les dépenses*
Celles qui se détermineront toujours avec pré" cision, selon les temps et les lieux, concernent les appointements et les soldes, les subsistances et les tables. Elles ont été provisoirement arrêtées par deux lois suécessivement promulguées les 15 juin et 15 septembre derniers* C'est donc entièrement d'après les nouvelles bases élémentaires, que votre comité fous présente les frais d'armement que vous avez à décréter.
FRAIS D'ARMEMENT POUk UN MOIS.
De 5 vaisseaux de 74, 2 frégates portant du 18, 9 frégates portant du 12, 2 flûtes et 3 gabares»
Pour dépérissement de la mâture* des agrès et apparaux,......... 65,900 liv ;
Idem du doublage en ottivre........... 15,982
Journées d'hôpitaux, plus-value de la viande fraîche et autres dépenses imprévues.............17,900
Consommation journalière de diverses munitions et marchandises. 18,828
Table dès capitaines et des états- majors^.........................32,760
Subsistance en argent des élèves èt VdldntâiréS..........;.... 2,670
Appointements des aumôniers et instruments des chirurgiens». 1,309
Soldes des équipages.................. 113,727
Subsistance des équipages...... 133,880
Pour les trâitemëûts d'tifl èftef d'escadre et de trois commandants de divisions....,............ 6,570
Total pour un mois de l'expédition navale, ci.ts., 409,526 liv.
Ce qui fait pour une année là somme de 4,914,312 livres.
DÉPENSES RELATIVES A L'ARMÉE DE TERRE.
Il est de mon devoir, Messieurs, de fixer un moment votre attention sur le Chapitre des dé» penses, pour lequel je h'al trotiVé dé bases élémentaires que dans les anciennes ordonnances. Quoique le département de la guerre fournisse aux régiments qui passent dans les colonies les appointements, Tes soldes et les masses accordés par ia loi, ia marine porte en dépenses un supplément qui s'élève par mois à 38,026 livres. Cét usage, consacré par le temps, ne pourrait êtrê aboli sans inconvénients, et peut-être sans injustice. Il est tout simple que des hommes qui se transportent dans des climats où les besoins de la vie sont plus éhers et plus multipliés qu'efl France, reçoivent dé l'Etat tifl dédommagement proportionné à leurs bëBoihâ et à l'Utilité de leurs SërviCés.
Telles sont, Messieurs, les réflexions que présentent les dépenses fixes de l'armée de terre. Quànt aUx dépenses non fixes, elles sôht fondées sur l'usage constant des colonies. La ration sans vin y est évaluée à 15 sous* à causé de la détérioration dans lès vaisseaux, dd fret et des assurances. La cuisson du pain, rçvient à 15 livres par an pour chaque homme. Le bois à brûler, les lits, la lumièfe et les fournitures des casernes doùt un objet annuel de 12,000 livres par bataillon. Les logeméflts des officiers ëtdes soldats Sont
plus ou moihs chers, seltid les circonstances. Quant aux journées d'hôpitaux, on compte, année commune, sur un dixième de malades;
Il serait impossible, - Messieurs» de vouloir compter d'avance avec la marine, et lui assigher invariablement des fonds pour Ces différents détails. Vous devez donc accorder provisoirement ce qu'elle demande, en vous reposant sur l'ordre, envoyé aux ordonnateurs* de travailler à toutes les réductions dont le service peut êtfe susceptible* Ce qui, d'ailleurS, garantit un meilleur ordre de comptabilité, c'est la surveillance obligée des commissaires du roi sur toute espèce de dépensés; AprèS avoir employé les pouvoirs honorables qui leur soiit délégués, à rappeler la paix, ils sauront bien établir les Vrais prindipes de l'économie.
Bn attendant, Messieurs, il cônviënt de constater les dépenses relatives à l'armée de terre, qui se trouve à la charge de la marine.
DÉPENSES FIXES PÔUR UN MOIS.
De 12 bataillons, composés chacun dë 4*79 hommes.
Supplément d'appointements. * *. 27,7*70 liv.
Supplément de soldes— ..........8,340
Supplément de masse* à 4 livrés
par an..>.......................1,916
DÉPENDES NON FIXES .
SubSiStaitdë de 12 bàtâiliôils.... J3Ô
GhiSSdn dll pain................1Ô,000
Bois a brûler, lits, ltlmitiaiféé ët fournitures deS tiasernes.........
Journées d'hôpitaux. —.............B0,000
Logement eu argent dès dracierâ. 25,000
Logement des soldats........... . §0,000
Total des dépenses non fixes.... 256,330
Total pour un mois des dépenses relatives aux troupes de tërrè.. ».. 294,356 liv.
Ce qui fait pour un an la somme de 3,352,296 liv.
Dépenses fixes poUt uil nïàîs aê là bofUnilSêîon __ déléguée aux' lleè du Vefli.
Poùr le traitement dé îjùâlftj Commissaires du roi, à raison de 2,000 litrëspar moié, éhutuun m*.*» 8,000 liv.
Pour le traitement Au secrétaire dë la commission, à raison de 400 llVres, 400
Total pouf un mois,et...............8,400 H¥.
Që qui fait jidtiF l'ftfiftêë tinè sômitië de 100,800 livres.
Telles sont, këSsleurs, lë3 dlfrêrëhteS sofllffles qué vous avëz à décfétef potif l'êXfièditioû dès Antilles. Vdtfè eoûillé tt a p&s cru dèvoit y ôtftli-jjrertdre le transport dé 80 hdmtiiëS dë rèdfueâ, et de 40 hommes ôongédiés ou rêpassktit eu France hâr congé. N'ayaht tti bà^êS hi êpoqfuéê certaines pour Cette dêpfehsë què la màrinë jidrte à 14,000 francs par bataillon, il Vods propoSë de n'en faire leâ fonds que lorsqu'ils seront exigibles.
Il est temps, Messieurs, de rassembler les différente chapitres de dépenses, et de vous en présenter le résultât pour une années
RECAPITULATION.
Frais de passage, ci ....... 443,840 liv.
Dépenses d'armement;.na... 4*914,312
Dépenses de l'arlnée de terre t. 3,532,296
Traitements des commissaires et du secrétaire de la commission nommés par le roï»»............ 100,800
Tdtâl de la dépense pour l'ëxpé-ditioil extraordinaire pôiïr les Antilles.î.11«un.m.-U.. 8,991,248 liv.
Gétte somme ne doit point être remise en un Seul payement, au département de la marine. Elle est le prix des besoins d'une année entière. Si due grande partie de ces besoins extraordinaires ont exigé des avances considérables, ou par précaution, ou par échéance, les autres ne doivent être remboursés qué par douzième, c'est ce qu'il importe dë constater;
Les frais de passage étant une avance forcée, il est indispensable d'en ordonner , sans délai, le rembourse* ment. Gës Mis s'élèvent à la somme de.................. ; * 443,840 liv.
La pfttdehce exigeait de songer aux rafraîchissements des équipages, au moment de leur arrivés dans lés colonlës. 11 a été en conèéqùèhce embarqué urie somme de 125,000 livres qui doit êtrë remboursée. t. 125,000
Vous devez, par les mêmes raisons dë prudehde, rembourser 1*800,000 livres eu piastres, achetées à Cadix, pour être mises aux ordres des commissaires du roi, chargés dè veiller aux premiers besoins des trou« pes...................... 1. 1,800,000
Tôtàl des avances à rembourser.......;.............. 2j368,840 liv.
Si VOUS déduisez cette somme dë la dépënse totale de l'expédition, il resté un solde de 6,662,408 livres, lequel divisé par douze, donne dnë somme dé 551,867 1. 6 S; 8 cL, à remettre chaque mois à la disposition du ministre dë la tfiarinëj à conipter du lbt janvier derniers
Telle est, Messieurs, l'opération qui conduit au résultat des payements à faire pour l'expédition extraordinaire des Antilles» Il reste quelques Observations que l'exactitudë des comptes commande^ et qu'Un homme jaloux de votre confiance ne peut oublier de vous soumettre.
Qttoiqtie votre comité vous proposé de payer mois par mois la dépënse annuelle dë cette expédition, à compter du 1er janvier, il existe beaucoup dé dépenges qui ne pourront avoir lieu que du jour dë l'arrivée de l'escadre à la Martinique. Une grande partie de celles qui concernent les troupes se trouvé de ce nombre. 11 en est aussi qui regardent l'armée navale: Si; dans mon opération, je n'ai point établi les époques^ c'est qu'il eût été presque impossible de les fixer; d'un
autre côté, ce travail ne présentait aucune utilité réelle, car rien ne pouvait détruire l'obligation de fournir d'avanceles moyens d'approvisionner, à temps, des armées destinées pour les colonies, et qui doivent plus que jamais vivre dans l'abondance.
Frappé de ces vérités politiques, après avoir .établi les frais de passage, j'ai calculé ce que pourrait coûter l'expédition pendant une année, j'en ai déduit les secours embarqués en argent, et j'ai proposé d'en rembourser la solde par douzième, à compter du premier janvier.
De cette manière, le service des deux armées se trouve assuré d'avance. Le compte de leurs dépenses n'en reste pas moins soumis à l'exactitude des époques, et le ministre, maître de tous les moyens que votre sagesse met à sa disposition, n'en devient que plus responsable.
C'est d'après ces considérations que votre comité n'a eu qu'un avis pour adopter la distribution de fonds faite dans le projet de décret que je vais vous soumettre :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité de la marine, décrète :
« Qu'il sera fait un fonds extraordinaire de 8,991,248 livres pour les dépenses de l'expédition ordonnée pour les îles du "Vent, savoir :
« 443,840 livres pour frais de passage ;
« 4,914,312 livres pour les frais d'armement pendant une année;
« 3,532,296 livres pour les dépenses annuelles
de l'armée de terre; .................
« 100,800 livres pour le traitement annuel des commissaires et du secrétaire de la commission nommés parle roi; j; ' r
« Décrète que, sur le fonds extraordinaire de 8,991,248 livres, il sera mis sans délai à la dis Sosition du ministre de la marine, une somme e 2,368,840 livres., pour avances faites pour ladite expédition; et le restant, montant à 6,662,408 livres, sera également à sa disposition, au commencement de chaque mois, à raison d'un douzième, à compter du 1er janvier dernier;
« Décrète que ces différentes sommes ne sont que provisoirement accordées, et sans entendre rien préjuger sur la distribution des fonds, laite par le département de la marine, qui sera tenu de se conformer, pour la reddition des comptes, aux dispositions du décret du premier septembre dernier. »
(Ce décret est adopté.)
(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport de M. deGurt.)
L'ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur remplacement des tribunaux criminels dans les différents départements du royaume.
, rapporteur (1). Messieurs, le comité de Constitution vous propose ce
qu'il a jugé le plus convenable à l'établissement des jurés, et surtout
à la tranquillité des départements ; c'est de les fixer dans les villes
qui sont chefs-lieux, ou qui sont les sièges actuels de leur
administration, à l'exception de quatre en faveur desquelles les décrets
antérieurs ont retenu la fixation des tribunaux de département. Comme le
projet de décret, qui va vous être proposé, contrarie les .intérêts des
villes qui ont ambi-
Vous vous rappelez qu'il n'a pas été possible de donner à la formation des départements une perfection que vous auriez désirée, celle d'avoir au centre de chacun d'eux une ville principale qui aurait attiré tous les établissements publics. Non seulement la nature, mais encore la loi que vous vous êtes faite de respecter les limites des provinces, se sont opposées, autant que les divers intérêts, à celte beauté d'exécution que l'on ne peut jamais parfaitement atteindre, et dont il faut se contenter d'approcher. Ainsi, Messieurs, forcés de vous plier aux localités de l'ancienne division de France, vous avez senti qu'il eût été impolitique et dangereux de priver vos corps administratifs des lumières et de l'opinion dont ils s'entourent dans les grandes villes, en les réléguant dans de petites villes, centrales à la vérité.
Ce que vous avez fait pour les administrations de département, vous devez le faire pour les tribunaux de jurés : ce sont les mêmes motifs, les mêmes considérations; elles sont même plus déterminantes. En effet les fonctions de juré seront belles, mais elles seront pénibles, elles exigeront des dépenses, l'exécution de rétablissement rencontrera d'abord quelques obstacles qui résulteront soit de la multiplication des fonctions publiques, auxquelles les Français ne sont pas encore accoutumés, soit de l'intérêt personnel ou de plusieurs autres causes. Enfin, Messieurs, vous n'en finiriez jamais : le moindre inconvénient ne serait pas de perdre le temps que vous devez à l'achèvement de la Constitution, mais un plus grand et plus important serait de remettre les troubles dans les départements, de réveiller les contestations intestines qui m'ont tant de fois contristé dans cette tribune. Déjà plusieurs députés extraordinaires sont arrivés, d'autres s'annoncent encore.
La mesure que vous propose votre comité est donc la seule sage; elle a pour base que la détermination des établissements des tribunaux de jurés doit être réglée par les mêmes principes, par les mêmes motifs que ceux qui vous ont décidés pour les chefs-lieux d'administration. Voici, en conséquence, le projet de décret que le comité vous propose :
« L'Assemblée nationale après avoir entendu le rapport du comité de Constitution, décrète ce qui suit :
, « Art. 1er. Les tribunaux criminels seront
établis et fixés dans les villes actuellement sièges des administrations
ou des directoires des départements, soit que les chefs-lieux soient
déterminés, ou que les administrations alternent avec une ou plusieurs
villes, et sans que le? tribunaux puissent alterner en aucun cas.
« Art. 2. En exécution des décrets rendus pour les départements du Cantal, des Landes, de la Meuse, du Puy-de-Dôme et des Vosges, les tribunaux criminels de ces départements seront établis et fixés dans les villes d'Aurillac, de Dax, Saint-Mihiel; Riom et Mirecourt; en conséquence, l'administration du département des Landes ne pourra alterner en faveur de la ville de Dax, et celle du département de la Meuse demeurera fixée à Bar-le-Duc.
« Art. 3. Le tribunal criminel du département de Saône-et-Loire sera établi dans la ville de
Ghâlon, et celle de Màcon sera définitivement le siège de son administration. »
Plusieurs membres demandent la parole.
Un grand nombre de membres : Aux voixl aux voix! (Mouvement prolongé.)
(L'article l,r du projet de décret est mis aux voix et adopté.)
Les mêmes raisons doivent déterminer la même règle pour tous les départements; il ne doit donc être fait d'ex-cention pour aucun d'eux.
Je propose en conséquence ou de rejeter l'article 2 en son entier, ou tout au moins d'en décréter la division pour en distraire le départemen t du Puy-de-Dôme.
Six districts de ce département, en effet, sont obligés de passer à Clermont, chef-lieu de l'administration, pour se rendre à Rio m, où le comité propose de fixer le tribunal criminel. Un précédent décret renvoie aux électeurs le cboix du lieu où sera établi le tribunal du département; il convient, dans le cas actuel, de fixer ce tribunal à Clermont, ou d'attendre le vœu du département pour l'indication du lieu où ce tribunal doit être établi.
(L'Assemblée rejette la division, puis la question préalable, proposée par M. Gaultier-Biau-zat sur l'article 2, et adopte les articles 2 et 3.) (Le décret est adopté.)
, au nom du comité d'aliénation, propose plusieurs ventes de biens nationaux, qui sont décrétées comme suit :
« L'Assemblée nationale, sur les rapports qui lui ont été faits par plusieurs membres du comité d'aliénation, des soumissions faites suivant les formes prescrites, par différentes municipalités ci-après nommées, déclare leur vendre les biens nationaux dont l'état est annexé aux procès-verbaux respectifs des estimations desdits biens, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, payables de la manière déterminée par le même décret, savoir :
A la municipalité du Mans, département de Sarthe................. 5,160,641 I. 14 s. » d.
A celle de Saint-Galais, même département..... 614,053 4 8
A celle de Tours, département d'Indre-et- Loire.................. 472,725 » »
A celle de Puiseaux, département du Loiret. 165,564 » 4 A celle de Guilly, même département............ 1,706 » »
A celle de Merignies, département du Norcl.... 17,045
A celle de Toufflers, même département...... 2,013 15
A celle de Leers, même département............ 42,483 7 6
A celle de Masny, même département..... 191,242 19 6
A celle de Valencien-nes, même département. 3,762,019 13 6
Le tout ainsi qu'il est plus au long porté aux décrets et états d'estimations respectifs annexés à la minute du procès-verbal de ce jour. »
L'ordre du jour est un rapport du comité de
Constitution sur le traitement et le costume du tribunal de cassation.
, rapporteur. Messieurs, je viens vous proposer, au nom du comité de Constitution, les dispositions qui complètent l'organisation du tribunal de cassation, qui fixent le terme auquel les membres doivent se rassembler pour que l'installation du tribunal se fasse, et d'autres dispositions qui fixent la manière dont 1>'S requêtes civiles qui étaient prises contre des jugements en dernier ressort devront être portées désormais dans les tribunaux de district. Jecom* mence par la fin de l'organisation du tribunal de cassation : il s'agit de fixer le traitement et le costume.
Nous vous proposons tout d'abord de fixer le traitement de chacun des membres du tribunal de cassation et du commissaire du roi au chiffre de 10,000 livres, dont la moitié sera distribuée en droit de présence.
Maintenant, Messieurs, je dois vous dire les motifs qui nous ont déterminés à cette fixation^ contre laquelle j'ai cru entendre quelques réclamations. Je prie de se rappeler le principe qui doit diriger l'Assemblée législative, c'est que les fonctionnaires publics soient payés de manière qu'on puisse choisir tous les citoyens capables de remplir les fonctions publiques, et que tous les citoyens capables puissent accepter la confiance de leurs concitoyens. Après cette réflexion, je vous prie de considérer que vous avez décrété que les membres du tribunal de cassation seront nommés pour 4 ans ; que par conséquent le citoyen qui doit se déplacer et venir à Paris, pour y exister 4 ans, a besoin de faire un établissement ; que ce n'est pas là le cas de celui qui doit passer 3 ou 4 mois à Paris et qui n'est pas obligé d'amener avec lui sa famille. Pour que tous les citoyens éclairés qui habitent la province et qui peuvent être l'objet de l'élection du peuple puissent accepter cette fonction honorable, il ne faut pas qu'ils voient à la suite d'un travail pénible une ruine certaine : il faut leur donner un dédommagement ; il faut même encore que le dédommagement ne soit pas strictement la dépense ; et peut-être la somme de 10,000 livres ne sera-t-elle que cela.
Lorsqu'on est dépositaire d'une magistrature considérable, puisque c'est le seul grand tribunal qui existe, et qu'on est assujetti à un peu plus de dehors, je dis qu'on doit à ce fonctionnaire, non seulement le strict dédommagement, mais le profit qu'il ferait en exerçant paisiblement, dans le lieu qu'il habite, les fonctions qui lui auraient été confiées, ou que son industrie aurait pu lui procurer. La somme de 10,000 livres, dans une très grande ville, ne remplit peut-être pas ce double motif. Ainsi votre comité a cru vous proposer une disposition conforme à votre justice.
Je propose de fixer le traitement à 6,000 livres.
Je propose 8,000 livres.
Si vous donnez 10,000 livres à chaque membre, sans vous occuper des frais de déplacement qui sont très considérables pour ceux qui viennent de loin, il en résulterait une injustice pour les élus des départements éloignés de la capitale. Je demande que ce trai-ment soit fixé à 8,000 livres, et qu'il soit d'ail-
leurs payé* à tous les membres qui viendront, une somme pour les frais de voyage* de manière que ceux qui viendront de très loin seront payés plus que ceux qui demeurent plus près. {Murmures.)
Je maintiens qu'un traite* ment de 8,000 liyres sera parfaitement suffisant...
Plusieurs membres à gauche: Oui ! Oui! (Applaudissements»)
Ce serait une économie de 84,000 livres. Faites attention que vous ne donnez que 4*000 livres aux juges de Paris ; faites attention que vous ne donnez que 1$00 livres aux juges de province.
(L'Assembléerejette l'amendement de M. Ramel-Nogaret relatif aux frais de voyage et adopte le traitement de 8,000 livres.)
MM. les juges de paix porteront-ils le costume fixé par l'article 4 pour les membres du tribunal de cassation ?
, rapporteur « Non, il n'y a que les juges de district et des tribunaux criminels.
Plusieurs membres t Mettez-le donc dans le décreti
, rapporteur. On pourrait mettre à la fin de l'article 4 ces mots : « Ce costume sera désormais celui de tous les juges de district et des tribunaux criminels. » (Adopté.)
Un membre : Lés suppléants seront-ils Jénus d'être en costume lorsqu'ils Seront en fonctions?
Plitiieufê membres ! Otll ! Gui I
, rappdrtetiï. MeSsiëuPs, VOUS avez maintenant à fixer le tbOmeht du rassemblement des membres dû tribunal de caSsaiioh ; il est lttipoMant dé l'aôëélérëp, vu lê grafid nombre dê demander ën càssaitiôn contré les juge*-ments dés ci-devant tributiatiii 11 | a déjà pïtl sieurs élections de faitès.
Je vous propose de décréter quë deux qui Seront nommés par les électeurs de département pour êtré tiiettibfeâ du triblihâl de CâSsâtidîi, se réunifodt à Patis le lôr Uvril prochain. ' (Cette mdtibU est décrétée.)
Le projet de décret eèt adopté en Êes termes :
« L'Assemblée nationale décrète ce qui suit i
Art. 1er.
« Le traitement de chacun des membres du tribunal de cassation et du commissaire du roi sera de 8,000 livres dont la moitié sera distribuée en droits de présence ; il sera en conséquence tenu un registre de pointe par le greffier, lequel sera fiigûè, à chaquë séance, tahf par lui que par le président.
Art. 2.
« Tous les trois mois il sera délivré à chacun déS membres et au commissaire du roi un certificat de la portion qui leur reviendra dans le produit des feuilles d'assistance; le Trésor public acquittera, sur ces certificats, ce qui reviendra à chacun des membres dtt tribunal ; il acquittera aux mêmes époques, de trois mois en trois mois, le quart dë la portion file du traitement
Art. 3.
« Le greffier aura le tiers du traitement des juges et les taxations qui lui seront allouées pour ses expéditions.
Àrt. 4.
« Les membres du tribunal dë cassation porteront, seulement lorsqu'ils seront en fonctions, l'habit noir, le manteau de drap ou de soie noir; les parements du manteau seront de la même couleur, et un ruban en sautoir aux trois couleurs de la nation, au bout duquel sera attachée une médaille dorée, sur laquelle seront écrits ces mots : La Loi ; ils auront la tête couverte d'un chapeau rond, relevé sur le devant et surmonté d'un panache de plumes noires : ce costume sera désormais celui de tous les jugës de district et des tribunaux Criminels*
Art. 5.
« Le costume des commissaires du roi sera le même, à la différence que les commissaires du roi auront un chapeau relevé avec une gânee et un bouton d'or*
Àrt. 6.
« Les greffiers auront un chapeau rond, relevé sur le devant, sans panache.
Art. 7.
« Ceux qui seront nommés par les électèUrs des départements, pour être membres du tribunal' de cassation, se rendront à Paris au iér avril prochain. i
L'ordre du jour est un projet de dêèrêt du comité de Constitution sur les requêtes civiles.
, rapporteuri Voici; Messieurs, les dispositions que le comité de Constitution vous propose relativement aux requêtes Civiles.
L'article ler dë notre projet porte qUë « lês
requêtes civiles seront, dë la même mnièfe et dans les mêmes formes que
les appels, portées à l'un des sept tribunaux d'arrondissement. Au
surplus, jusqu'à ce qu'il ait été autrement statué, toutes les autres
dispositions dë l'ordohnancë de 1667, relatives àux requêtes eivileSj
oontihue-ront d'être exécutées. L avis dé trois nommes de loi sera
signifié ëh tête de l'exploit du demandeur en requête civile ».
Vous savez, Messieurs, qu'il y a dans une requête civile ce que les juriconsultes appellent le rescindant et le rescisoire* Lé rescindant Consiste dans les moyens de faire aunuler les juge*-ments par des fautes contre la forme* Le reSci-soire, au contraire, consiste dans les rnoyèus du fond. Jamais, suivant l'ordoflflàncè, le rescindant ne peut être jugé avec le rèseisoire ; et jadis c!était une mauvaise fdfthe que le rescindant fût jugé par les mêmes juges qui avaiedt jugé le procès au fond, de manière qu'ils étaient juges de leuf propre cause- Ainsi il n'est pâs possible de faire renvoyer au tribunal, doilt le jugemëût est attaqué par requête civile, le jugement de cette même affaire, lorsque la feqhête civile aura été admise. Il n'est pas possible non plus, pour le bott ordre judiciaire, de rënvdyer au tribunal qui aura jugé la requête civile le jugement du fond.
Nous proposons par l'article 2 que « lorsque le rescindant aura été jugé et la requête civile
admise, les parties ne pourront pôrtei" 16 procès ni au tribunal dont le jugement en dërnier ressort aura été annulé par l'admission de la requête civile» ni à celui qui l'aura déjà admise. La partis la plus diligente s'adressera au directoire de district qui fera au tableau un supplément de deux nduYeaux tribunaux ) et la détermination du tribunal qui jugera le procès en dernier res* sort êerâ faite datis la forme prescrite par le titre 5 dtj décret sur l'organisation de l'ordre judiciaire. Là déclaration de l'intimé ou de l'appelant, du demandeur ou du défendeur, sera faite au greffé du tribunal qui aura prononcé sur la requête civile t>.
Enfin l'article 8 porté que « les Requêtes civi« les qui étaient pendantes dans les tribunaux supprimés, OU celles qui ont lté présentées contre les jugements rendus par les stneienues cours, seront portées à l'un des tribunaux d'appel du tribunal de district établi dans là Ville où siégeait l'ancienne cour Ou tribunal >u
Telles sont, Messieurs, les dipositions que nous vous proposons d'adopter.
Un trtmbre demande l'impression des articles et l'ajournement de la discussion au lendemain.
Plusieurs membres demandent la question préalable sur cette motion»
(L'Asêëttibléé décrète qu'il n'y a pai lieu à délia béfëi1 sur iftdëtflaudë d'impression et d'ajournement).
(L'article 1er du projet de décret est mis âUx voix et adopté.)
Je fëffli tin amendement à l'article 2t Je Conviens de la nécessité d'avoir sept tribunaux d'arrondissement 5 mais il est du bou ordre* du grand principe de la justice de faife eu sorte, autant qu'il est possible» qu'il, n'y ait jamais ni jUgëë dë choix, ni tribunaux dé Choix.
Il me sëmble que l'oti peut satisfaire a ëeia par une opération bien simple ; c'est que, comme voUS avez décrété que le district déterminera pôuf chaque tribtifliluhe liste dessept tribunaux d'arrondissement auxquels il sera nécessaire dë porter soit les appels» soit les requêtes civiles^ on jiëUt lë chal^eP d'ajouter à sa liste deux tribunaux qui Serviront j en cas de bëëdin, à compléter lé nombre dëë sept tribunaux.
, rapporteur.J'adopte l'amendement.
(L'ârticle î est déërété aVed cette modification).
81 VOus établissez que leë requêtes civiles seront portées à l'uû des sept thbuimtJX d'app 1 dU tribUbâl de district établi dans la ville où étaient leë ci^dëvàht parlements^ il est évident que Vous allez faire plaider" à de très gràhdës distances et oëcasiounef de tfrëfegfatlfls frais aux plaideurs qui avaient dës pfofeès dans les Villes où résidàlënt les parlements.
Je demande qtië leë rejjuêtëë civiles présentées Côhtré iës jUgemeotê réïldUs par leë ci-devant parlements sôieut portées à l'un des sept tribu-4 nâux auxquels doivent être portés par appel lës jugements rendus par les juges dë district où le pfocêë aura été jugé;
Jê Crois qu'il fàUt rédiger à peu prêé eû cés tbrniës ï « Les parties se retireront au greffe du tribUhal qui aurait été Coflipé
tent pour doûualtre de l'affaire en première ing tance, à l'effet d'y faire le choix, suivant les formes proscrites, du tribunal où lie pourront procéder, »
(L'article 3 est adopté avec cette modification.)
Le projet de décret est adopté dans lës termes suivants s
«L'Assemblée hâtiottalë décrète ce qui suit :
Art. 1er
« Lës réqUêtëë Civiles ëérdùt dé la ïhêfne manière et dans lès mêmes formés que les appels, portéês à l'un des Sëpt tribunaux d'arrondisse-mènt; âu surpîtiè, jusqu'à 6é qu'il en àit été autrement statué, toùtéS les àUtrëS dispositions de l'ordonnance de 16@7, relatives âtlX requêtes eîviiëë, continueront d'être exécutées; l'aViS de trois hommes de loi sera signifié en tète de 1 exploit du dënJàndèur èn réquêté civile.
Art, 2.
« Lorsque le fêëcittdant aurà été jugé et la requête civile admisë, Si lès parties ùë conviennent pas respectivement du tribunal où elles feront juger le rescisOire, elles hè pourront le pOrtër ni au tribunal dont le jugement en der-nier ressort aura été annulé pâr l'admission dé la requête civile, ni à celtii qui l'aura admise \ les directoires de district ajouteront Sur lé tableau dës sept tribunaux d'arrondissement deux tribunaux Oui serviront, dans le cas des requêtes civiles. a compléter le nombre des sept tribUhaux. La hxatibn du tribunal qui jugera en dernier rêsëort le rësèiëOire serâ faite dans la forme prescrite par le titré V du décret sur l'organisation dë l'ordre judiciaire; les déclarations nécessaires pour pai'VeUir à {a fixation du tribunal seront fàiteS au greffe dë celui qui aura prononcé sur la requête divilé.
Art. 3.
« Potif lès fëqtiêtés civiles qui étaiefit pendantes dans les tribunaux sUp^rimé^ oU celles qui pourront être présentées contre lës jugements rendus par ces anciennes cours* les parties se retireront au greffe du tribunal de district» qui» sUiVant lë nouvel ordre judiciaire, connaîtrait de l affaire en première instance, ët dans les formes prescrites par les décrets sur la faculté de fétevêr l'appel. On déterminera celui des tribunaux d'tytfondisseraent qui prononcera sur ia requête civile. »
Un tnèmbre : Je propose par article additionnel de renvoyer, sur le rescisoire, dans l'arrondissement de celui des sept tribunaux où séra domicilié le défendeur.
Plusieurs Membres : C'est cela même,
, rapporteur. Je demande le renvoi de cette disposition additionnelle au comité.
(L'Assemblée décrète le renvoi*.)
L'ordre du joUr est la discussion du projet de décret sur les taxes à Ventrée des villes (1).
(2). Messieurs, le
En effet, Messieurs, il jette les plus grandes lumières sur la manière de classer les villes et d'en combiner les taxes, d'après leur population, sans, pour ainsi dire, en faire supporter de bien sensibles aux pauvres et sans que le commerce de transit ou d'entrepôt en souffre.
Il abolit les anciens octrois des villes, qui mettaient entre elles tant d'inégalité, fet ne les charge qu'à proportion de leur importance et de leurs facultés.
Il fait éprouver à la ville de Paris une diminution de taxe par tête bien considérable, en ne ne l'élevant qu'à 18 livres, au lieu de 40 1. 10 s.
Malgré ces précieux avantages, et comme, en dernière analyse, le-.système de votre comité, tout ingénieux qu'il soit par cette gradation qu'il établit entre les villes de chaque classe, ainsi qu'entre les dernières villes d'une classe supérieure, et les premières de la classe inférieure, d'après la raison composée de leur population et de la valeur de leurs maisons, connue au moyen de la contribution foncière, pour en déterminer la véritable échelle, et quoiqu'il laisse la faculté de se réformer toutes les fois qu'il se sera glissé quelque erreur, et jusqu'à ce qu'on ait atteint la taxe véritablement proportionnelle qui doit exister entre les habitants des différentes villes ; Ce système, dis-jè, présente le terrible inconvénient de tout soumettre à l'arbitraire des corps administratifs, déjà trop puissants, et de n'être véritablement qu'un champ vaste et une terre féconde, où le commis et le contrebandier pourront semer et recueillir bientôt d'abondantes récoltes : d'où conclure que nous ne devons l'admettre dans aucune de ses parties, et qu'il suffit qu'il tienne à l'édifice gothique de la finance, pour être rejeté. J'ai l'honneur, en conséquence, Messieurs, de vous proposer, non pas la question préalable, mais le renvoi aux autres peuples de la terre, dans la vue de leur procurer incessamment une Constitution semblable à la nôtre, car c'est aux abus de la fiscalité que nous devons notre heureuse Révolution.
Ne détruisons donc point, Messieurs, notre propre ouvrage; éloignons de nous à jamais ces barrières, ces commis, ces contrebandiers, ces marchands d'argent, ces compagnies de finances ; en uu mot, tous ces agents du fisc et de l'agiotage : soyons libres enfin.
Vous avez décrété des impôts dignes, sans doute, d'un peuple de frères ; ils sont de véritables chefs-d'œuvre : et un jour viendra, l'époque en est même prochaine, que les seules contributions foncière, mobilière, d'enregistrement et de timbre, suffiront à vos besoins, sans recourir à d'autres mesures.
Ces impôts, qui atteignent toutes les richesses, ne pèsent sur personne ; et ce n'est point un paradoxe, ils ne sont que de simples avances qu'on retire, avec usure, sur les fruits de la terre, du négoce et de l'industrie. Que les propriétaires, marchands et artistes cessent donc de s'inquiéter. L'impôt, justement réparti, n'est qu'une partie intégrante de la richesse et qu'un prêt mutuel que tous les citoyens se font les uns aux autres; car la moitié de la société fait vivre l'autre moitié. Mais ce n'est point de cette ques-
tion qu'il s'agit en ce moment; il s'agit du remplacement de l'impôt qui vous est proposé, ou de prouver qu'il n'est pas nécessaire.
En effet, Messieurs, si je parviens à vous démontrer, non par des calculs hypothétiques qui ne peuvent fixer votre volonté, mais par des résultats vrais, puisés dans la logique de fiarême, que, sans autres impôts que ceux actuellement décrétés ou conservés sans droits sur le tabac, sur les boissons, ni aux entrées des villes, sauf quelques sols additionnels, même en ne fixant le taux de la contribution foncière qu'aux trois vingtièmes des revenus nets, il est possible de balancer la recette avec la dépense, il me semble que c'est véritablement là le terme que nous cherchons et que le problème est résolu.
Je ne serai pas long, et j'ai besoin, Messieurs, et de votre indulgence, et de votre attention.
Votre comité de l'imposition vous a présenté un tableau sur l'état général des contributions.
Un honorable membre en a discuté toutes les parties; et si je n'avais un moyen de rapprocher deux systèmes aussi problématiques l'un que l'autre, et tous deux peut-être également éloignés de la vérité, j'aurais essayé de les combattre.
J'avais d'abord cru, je le crois même encore, qu'un système général des finances devait être discuté a son comité. Je désirai en conséquence soumettre mon plan à ses (lumières; mais le comité des finances a pensé que cette question lui était étrangère et qu'elle ne regardait absolument que le comité de l'imposition.
Messieurs de ce comité n'ayant pu suspendre leurs longs et pénibles travaux pour m'entendre, c'est avec regret que je me vois contraint de monter à cette tribune, pour y développer une opinion qu'il est de mon devoir de vous soumettre et que vous accueillerez, j'espère.
Le comité de l'imposition présente, dans son résultat, par la comparaison qu'il fait des sommes payées par les contribuables, selon l'ancien régime, à celles qui doivent se payer en 1791, un bénéfice de 251,207,033 livres, c'est-à-dire de plus d'un tiers.
M.de Delley, loin de convenir de ce fait, prouve, par ses calculs, aussi hypothétiques, sans doute, que ceux du comité, que, loin que les contributions foncières, en les élevant à 300 millions, présentent un bénéfice, elles monteront, en y joignant toutes les parties des autres impôts qui pèsent sur les fonds, à 460 millions, au lieu de 347 : ce qui fait une surcharge réelle de 113 millions.
L'honorable membre va plus loin encore, en n'évaluant lai contribution mobilière qu'à 58,700,000, livres, au lieu de 67, à quoi le comité la porte; et en préjugeant que les rentrées de cet impôt, en 1791, éprouveront un retard d'une somme de 20 millions.
Il calcule ensuite un déficit de 7 millions sur le droit d'enregistrement.
De 12 millions sur les douanes.
De 10 millions sur la rentrée du don patriotique.
Et de 9 millions sur les forêts nationales.
Et les 38 millions ne font pas, dit-il, un simple retard, mais un déficit effectif pour 1791.
D'accord avec M. de Delley sur la manière dont le comité complète la recette de 1791, je dis, avec lui, qu'en effet la contribution patriotique, la dette des Américains, celle sur le duc des Deux-Ponts, et les sels et tabacs qui sont en magasin, sont des capitaux qui ne peuvent figurer avec aucune branche des revenus publics; j'y ajouterai même que si le comité avait voulu, par un bilan, calculer l'actif de la France.et l'employer au paye-
ment de l'impôt, il aurait été facile de subvenir à la majeure partie des dépenses publiques de 1791, parce qu'il appartient à la nation des remboursements des droits casuels de féodalité, dus par les propriétaires des ci-devant fiefs, seigneuries, terres titrées, ou autres relevant directement ou indirectement de la nation, dont personne n'a encore parlé, dont elle pourrait disposer et qui montent à une somme considérable : mais ce n'est pas le moment de traiter cette question.
11 est incontestable, sans doute, que l'on ne doit attribuer l'insuffisance des résultats sur l'impôt qu'à la marche irrégulière que l'on a suivie, et parce que l'on a commencé par où l'on devait fitiir.
On ne pouvait se dispenser, sans doute, d'établir une contribution foncière, une contribution mobilière et des impôts indirects, pour atteindre toutes les facultés; et il ne pouvait résulter aucun inconvénient, de déterminer dans quelle proportion ces droits seraient établis.
Je l'ai proposé, comme M. de Delley; j'ai posé les bases fondamentales de l'impôt et j'ai divisé, comme lui, les richesses foncières et celles résultant de l'habitation, de celles relatives à l'industrie.
C'était également à deux cinquièmes que j'évaluais les propriétés foncières; un cinquième, celles que je distinguais par l'habitation; et deux cinquièmes, tout ce qui devait se trouver soumis aux impôts indirects; et,en tout ceci, je remarque que le comité, M. de Delley et moi, sommes d'accord; et que si nous paraissons différer, c'est que M. de Delay et moi avons posé, les bases et que le comité en a présenté les résultats.
Mais, où nous ne sommes personne de même avis, c'est sur l'évaluation du produit des impôts décrétés ou conservés.
Le comité, dans ses calculs, nous donne des résultats satisfaisants ; et M. de Delley nous inspire les plus vives inquiétudes.
Absolument tranquille entre ces deux extrêmes, voici comme je raisonne; et je crois qu'il est sage de raisonner ainsi, et que c'est le seul parti que l'Assemblée puisse adopter ; surtout que quels que puissent être les résultats qu'on lui présente, ne posant toujours que sur des calculs hypothér tiques, elle ne peut se fixer à rien.
Ou le produit des impôts décrétés et autres revenus publics est suffisant pour acquitter les dépenses de 1791, ou il est insuffisant.
Au premier cas, nous devons être sans inquiétude ; au second, il nous faudra toujours payer : et alors établir des impôts. Mais, aujourd'hui, pourquoi anticiper sur l'avenir ? et pourquoi ne pas croire que nous avons assez d'impôts de décrétés pour subvenir aux besoins de l'année courante ? Quant à moi, Messieurs, c'est ainsi que j'envisage la question ; et voici, en conséquence, comment je pense que nous devons la traiter.
Vous avez décrété une contribution foncière, une contribution personnelle et un droit d'enregistrement et de timbre.
Vous avez conservé les traites, la ferme dés postes et celle des messageries.
Peut-être conserverez-vous les loteries, impôt malheureux, mais nécessaire ; et établirez-vous un impôt progressif dans les villes et municipalités, à raison de leur importance, en remplacement des droits sur les boissons et sur le tabac, qu'il serait, selon moi, impolitique, et même dangereux, de laisser subsister : c'est même, je ne crains pas de le dire, la volonté générale de la nation, que cette suppression.
Le produit de tous ces droits et contributions, joint à celui des domaines nationaux que vous avez réservé, ou dont la vente est suspendue, suffit, je pense, pour acquitter les dépenses publiques de cette année.
S il était possible de déterminer la somme à laquelle s'élèveront les droits d'enregistrement et de timbre, ainsi que ceux qui seront perçus à toutes les entrées et sorties du royaume, il serait facile de fixer la masse des contributions foncière et mobilière ; mais comme il est de toute impossibilité, quelles que soient les probabilités, de fixer la masse d'aucun impôt, sans une opération préalable, et que votre iutention doit être de les régir tous, pour en connaître les véritables produits, je ne dore vous soumettre d'autres réflexions que celles qui, embrassant le système général des revenus publics, peuvent jeter quelques lumières sur les différentes parties de leur administration.
Je considérerai d'abord les contributions dans leur ensemble ; j'entrerai ensuite dans les détails de leur répartition, afin de réunir la pratique à la théorie.
Ce n'est point en fixant à quel denier du produit net des revenus fonciers ou des revenus industriels et mobiliers, déterminés d'après le prix des loyers de maison, que vous connaîtrez ce que produiront ces deux contributions.
Ce n'est point non plus en déterminant la somme à laquelle vous voulez élever ces contributions que vous pourrez connaître soit la taxe sur l'héritage, soit la part d'impôt que chacun doit supporter.
Dans l'un ni l'autre objet vous ne pouvez avoir aucun résultat; et si quelque chose peut fixer votre volonté, c'est la certitude où je suis que tant que vous n'aurez acquis la connaissance des produits nets des revenus fonciers et industriels, vous devez vouloir que le citoyen contribuable ne donne que des comptes à valoir sur Vimpôt véritable qu'il devra supporter un jour.
J'expliquerai dans un instant ce que j'entends par ce mot Vimpôt véritable.
Vous avez fixé les taux des droits d'enregistrement et les prix des différentes espèces de papier timbré; mais vous né pouvez savoir ce qu'ils produiront, et celui qui les élèvera à 50 millions sera peut-être plus éloigné de la vérité que celui qui les élèvera au double; tout ce que Ton sait, c'est que plus la nation jouira des bienfaits de la Constitution, plus ces droits rapporteront.
Il en sera de même du droit de traites ; car plus il y aura de richesses, plus on se fera de besoins qu'il faudra satisfaire, et plus alors le droit produira.
Déjà le tarif des droits qui seront perçus à toutes les entrées et sorties du royaume nous présente un si grand nombre d'articles véritablement productifs, que je ne serais pas surpris que ces droits joints à ceux d'enregistrement et de timbre, ainsi qu'à la partie des domaines nationaux, et autres objets déterminés, seraient en état d'acquitter une grande partie de3 dépenses publiques.
De ces observations véritablement importantes et auxquelles je vous suppjie, Messieurs, de prêter quelque attention, il résulte que les bases de l'impôt sont toutes décrétées et, que s'il était possible de connaître ce que chaque citoyen doit en supporter, vous n'auriez plus rien à désirer; mais malheureusement le travail qui vous reste à faire à cet égard est immense, et vous ne pou-
vez vous flatter de le terminer dans une môme année, si vous voulez qu'il soit bien fait.
Avant d'entrer dans les détails sommaires de ee travail (oar il serait trop long de vous en présenter tous les développements),! je dois vousdlire un mot sur la question du produit présuiqé des impôts squs son véritable point de Vue : sous le point de vue de savoir que, quelle que soit la taxe à laquelle chaque citoyen sera imposé d'ici à trois anfe, je suppose, il ne doit payer en définitive qu'une somme proportionnée à seB revenus, d'après l'esprit des décrets, et telle qu'en réunissant les sommes .payées pendant ce laps de temps qu'il faut pour connaître cet impôt véritable que ehaque héritage et ohaque citoyen devront supporter un jour; la somme de cet impôt, que j'appelle véritable, parce qu'il est ia moyenne proportionnelle des sommes à payer pendant trois ans, soit égale à celle acquittée.
Mais pour arriver à ce but,, Messieurs, il nous faut opérer par ce qu'on appelle une règle de fausse position. C'est-à-dire qu'il nous faut supposer que les sommes, d'après lesquelles nous opérerons, sont justes, et que ce ne sera qu'après que nous serons parvenus au terme que nous cherchons, que nous rendrons à tous les contpi-buables la justioe distributive qui leur est due, en tenant, s'il est permis de s'énoncer ainsi, un compte ouvert avéc chaque héritage et ehaque citoyen contribuable de l'Empire, pour être soldé ce compte ouvert à l'époque de trois aneées, en deniers ou quittances, et c'est alors. Messieurs, que vous pourrez dire, avee raison/et non pas prématurément, comme l'a dit le eomité de l'imposition, que 4a nation jouira de toua les avantages de sa Constitution,
Pour parvenir | l'établir, cette règle, quatre choses sont indispensables à déterminer chaque année; car chaque année on pourra se rectitier aftn d'être toujours le plus près de la vérité.
La première chose à déterminer, c'est la masse de l'impôt, et cela est conforme à vos décretp.
La seconde, c'est un denier quelconque de produit net des revenus fonciers; et ce denier pour» r§.it varier pour baiser le brevet d'uppOPlU011 de l'an ripe précédente,
La troisième, c'est lin pareil denier quelconque des revenus mobiliers, industriels qu personnels présumés d'après le prix du loyer dep maisons, et ce dernier pourra également varier, daqa la même hypothèse que ci-devant.
Et la quatrième? c'est une régie ou compte de clerc 4 maître de tous les autres impôts pu revenus natiqpaux de telle nature que ce soit.
La masse de l'impôt, c'est toujours celles de nos besoins ; or, Cette masse est CQgnue et sera connue chaque année»
Pour 1791, C'est une somme d'environ millions; lés années suivantes, g'ù n'arrive auçun besoin extraordinaire, il y aura uué diminution telle par rapport à l'acquit de la dette nationale, que si cette dette peut s'acquitter en trois ans; si elle s'élève à 175 millions, jj y aura une diminution de 17§ mjljfjons à ladite époque de trois années^ et cela dans l'hypothèse que je fois, et comme je le crois fermement, que la vente des biens nationaux surpassera le capital de la dette, ou au moins l'égalera.
Cela posé, la masse des impositions ne pourra excéder à l'époque de trois années la somme de 417 millions, et pour les trois années 1791, 1792, et 1793, la somme de 1,450 millions ; et, dans ce cas, rien de si facile alors, que de faire le compte à chaque eiloyeà, -dès que dans trois ans la masse
de l'impôt véritable qu'il doit payer est connue, puisqu'il ne s'agira que de multiplier cet impôt par trois et d'en comparer le montant avec çelui des impôts payés jusqu'à cette époque, et d'en régler le eompte.
L'avantage de cette contribution est tel, « que la contribution patriotique, la plus mal nommée et la plus inique des impositions, peut devenir la pins juste et la plus salutaire, en la joignant à la mapse des contributions ordinaires et en tenant epmpte aux bons patriotes, qui se sont exécutés avec tant dé générosité, des sommes par eux payées sous çe titre, sur la masse de J'impôt qui doit se payer pendant trois ans. »
Cette disposition est absolument conforme à l'esprit du déèret qui a préjugé le remboursement; probablement parcé qije l'Assemblée, dans ses grandes vues, était persuadée d'avance que de toutes les cpntrijmtions qu'elfe décréterait il n'y en aurait aucune d'aussi mal répartie et d'aussi diversement acquittée, surtout par ce qu'on appelle les ennemis de là Révolution; et que c'est pour en réparer un jour l'injustice, qu'elle s'est réservé le droit de la rembourser.
Après avoir ainsi déterminé, chaque année, ia masse de l'impôt, il ne reste plus qu'^ indiquer les moyens de répartition; e| ces moyens sont infiniment simples; ee sont Ceux que j'ai indiqués plus haut, dans cette règle de fausse position que j'ai posée et que je reprends ou plutôt que je suis.
J'ai dit, relativement au produit net 4es revenus fonciers, qu'il fallait uéterminçr pn deniçr quelconque.
Avant qu'on décrétât les droits d'enregistrement et de timbre, et que l'on eût sous les yeux le tarif des droits qui séfont perçus a tQÙtes Jes entrées et sorties du royaume, j'avais çfeîl ce denier aux quatre vingtièmes dU profit pet des revenus fonciers ; mais aujourd'hui que je suis persuadée que ces droits s'élèveront à upe somme considérable, je ne démange plus que ies trois vingtièmes; et je suis assuré qu'ils suffiront pour compléter, avec le produit des autres impôts, la masse des dépenses publiques, sinon de la présente anqée, au moins pendant trois années, par rapport à la diminution des'dépenges que l'a^uit de la dette doit procurer : d'ailleurs, quand ils ne suffiraient pas, il n'en pourrait résulter aucun inconvénient, puisqu'on pourrait y remédier l'année suivante et même chaque annge, en dêçré-tant « une augmentation de denier »,
Je pense que les trois vingtièmes du produit net des revenus fonciers sont dans le cas de rapporter 24Q à 2§0 giflions, évaluant ces revenus à 1,600 millions et plus, tant à cause 4e l'abolition des dîmes que des droits de chasse et de la féodalité, doqt les bénéfices sont incalculables, surtout si l'on ajoute 4 ces bénéfices ceux résultant de la suppression de l'ànçiéu régime fiscal-
J'observe que çgttç évaluation (je dénier, aux trois vingtièmes des revenus fonciers pour cette anqée 1791, ne doit ayo|r lien que pour les laitages dont les contributions ne sont pas connues ou sont incomplète, a cause des privilèges dont ils jouissaient. Dans toutes les autres circons-. tances, pour cette première a"née* je voudrais qu'on suivît les ^nçierxqcotes de rôle, autrement jl serait impossible d'eu finir. Youg saye?jj Messieurs, combien il est instant de dresser les rôles de 1791. et que le moindre retard e§t dans le cas de porter un potable préjudice à la chose publique.
A l'égard de la partie de contribution qui sera
établie sur les revenus d'industrie et de richesses mobilières, présumés d'après le prix du loyer des maisons, je ne vois aucun inconvénient de le fixer à 12 deniers pour livre de leur montant, conformément au projet du comité et au tarif décrété.
Il est presque impossible, sans doute, de dire quel sera le produit de cet impôt \ cependant je pense qu'on peut, sans exagération, élever les revenus d'industrie est de richesses mobilières des citoyeus non propriétaires au taux du produit net des revenus fonciers, surtout en comprenant les accessoires de cet impôt, d'où il s'ensuit qu'il doit produire environ 80 millions.
Quant à la régie, ou compte de clerc à maître, de tous les autres impôts; ou revenus nationaux de telle nature que ce soit, on conçoit qu'il est plus que probable, d'après les réflexions que j'ai déjà laites, que tous ces droits et revenus s'elè-veront à plus de 240 millions.
Or, eh rapprochant toutes ces sommes, la masse des dépenses publiques est balancée par les produits. Cependant il est possible qu'il se rencontre un déficit ; et, dans ce cas, voici le remède qu'on peut y apporter qui est déjà PopiniQn dé l'Assemblée ;
Le déficit sera d'une somme plus ou moins considérable ; et comme il est d'ailleurs du plus grand intérêt d'accprder aux villes et municipalités des revenus particuliers et uniformes pour leur tenir lieu de « leurs anciens octrois que je propose d'abolir dans le royaume », je crois qu'il est convenable d'établir, par forme de supplément aux impôts déjà décrétés ou jje remplacement de droits sur les boissons êt le tabac, dont la suppression a été tant demandée, d'établir, dis-je, dans toutes les villes et lieux du royaume qui sëraient chargés d'eq compter chaque année des sols pour livre additionnels aux contributions foncières et mobilières, mais progressifs en raison dè l'importance des villes.
Tels sont, Messieurs, à mon avis, les points de vue généraux sous lesquels on peut considérer les contributions que vous avez décrétées ; et si je n'avais encore un mot à dire sur la manière de connaître « l'impôt véritable » et de rendreàchaque contribuable la justice qui lui est due, je me résumerais, en vous présentant un projet de décret conforme $ux dispositions que je viens de développer ; mais j'y reviendrai dans un instant.
Pour rendre a chacun cette justice et counaître eet impôt véritabley yous avez remarqué qu'on ne peut y parvenir qu'en 3 qnnées. Mais, diréfc-vous, pourquoi p ans, ét non quelques mois, comme vous ayez^ paru le désirer, et que vous l'avez même décrété ? Le voici.
Une municipalité, le chef-lieu d'un canton, je suppose, doit payer une somme quelconque de contribution foncière, et cette somme doit être proportfonnelle, non seulement aveccellesacquit-tées par les municipalités voisines, mais avec toutes les municipalités du royaume ; et l'on conçoit alors que cette somme ne peut être connue que par des opérations combinées et successives.
On sait bien, par exemple, que cette municipalité ou chef-lieu de caqton payé, je suppose, une contribution de 24,000 livres, en y comprenant les biens des ci-devant privilégies', et que cette contribution est à peu près dans l'esprit de la loi que je propose, c'est-à-dire à raison de trois vingtièmes (te son revenu net ; cependant elle ne paye pas en proportion de ses voisins, parce que les contributions fonciè-
res detj municipalités environnantes sont, les unes à raison ae quatre vingtièmes et même plus, et les autres au-dessous de trois vingtièmes ; et attendu ra'jl fyut par cette opération combinée et successive, (font je viens de parler, rectifier ces inégalités, la municipalité en question, quoique primitivement bien imposée, doit cesser âe l'être, jusquVce qu'après avoir asso* cié toutes les municipalités les unes avec les autres, on soit parvenu à avoir un rapport commun ; mais cette opération combinée et succès» sive a besoin de Quelque développement ; elle doit se faire à différentes époques. Ja la rendrai plus sensible, cette opération, par un exemple.
Première époque.
Le canton de Maintenon, dans le district de Chartres, département d'Eure-et-Loir, est composé de dix paroisses ou municipalités, payant réellement, suivant le relevé que j'en ai fait sur l'état des impositions de l'année 1787, 80,026 1, 7 s, 7 d.
Cette somme est répartie entre ces çlix municipalités comme il suit.
Citoyens
Paroisse de : . actifs,
ChartainvilUers.................87 7,850 1. 15 s. 3 d.
Rouglainvah.'.V.;......... .46 .7,76$ 8 11
Pierres-.... vUki'..____10Q 9,134 J9 AO
Maintenons,,.,.......... 222 17.590 8 10
Yermen on ville.......,*.,,,' :68' 4,0pS 16 5
Mevoisin... j,.................54 2,462 13 1°
Saint-Fiat...........13» 7,479 * 1:5 1
Soulaires................. 70 7,835 3 9
Joay«. Vf........___ 137 8,629 4 11
SainUPierresdâcRercbères... 49 7,186 6 9
TQTAI,,....,.,..... 937
citoyens actifs, acquittant..... 80,0261. 7 s. 7 d.
J'ai dit qu'en évaluant aux trois vingtièmes du produit net des revenus la contribution foncière, je n'entendais, pour la formation des rôles de cette contribution en 1791, soumettre à cette condition que les héritages dont les contributions ne sopt pas connues ou sont incomplètes à cause des privilèges dont ils jouissent, et que dans toutes les autres circonstances il fallait suivre les anciennes cotes des rôles^
Je divise en conséquence, dans chaque municipalité, les héritages en deux classes ou chapitres.
Je mets daps la première ceux actuellement soumis à une contribution fonoière^
Et dans là seconde, ceux qui n'étaient soumis qu'au vingtième, où qui n'acquittaient même aucune espèce de contribution, quand les ci-devant privilégiés les exploitaient par eux-mêmes.
Et je charge alors les dix municipalités de oe canton de procéder, chacune en particulier, à la répartition de ees deux espèces de contributions foncières, et d'en dresser les rôles de la manière ci-dessus indiquée.
Ici se termine la première époque de l'opération^ J'observe seulement que s'il n'était pas auss,i instant de faire dresser les rôle3 des contributions foncières de 1791, j'aurais proposé de confondre les deux chapitrés, pour n'avoir qu'un seul résultat i mais cela prendrait trop de temps : d'a,illèurs, loin que cela occasionne le moindre inconvénient^ il est au contraire avantageux d'opérer ainsi, afin de rectifier, dans la réparti-
tioo de 1792, les^erreurs qui se seront glissées dans les rôles de 1791.
Seconde époque.
Les contributions foncières anciennement acquittées et formant le premier rôle de 1791,sont connues.
Celles du second chapitre ne peuvent l'être qu'après la rédaction du rôle.
Mais, pour opérer avec plus de facilité, je vais supposer que les contributions foncières de ce second chapitre sont également connues, et qu'elles s'élèvent à une somme de 19,973 I. 12 s. 5 d.
Nous acquérons alors la connaissance de toutes les contributions foncières du canton de Main-tenon, et nous savons qu'elles s'élèvent à la somme de 100,000 livres.
le suppose ensuite que ces 100,000 livres se partagent entre les dix municipalités du canton de Maintenon, comme il suit:
Çhartainvilliers..........10,000 livres.
Bouglainval....... 9,000 —
Pierres........' . 11,000 —
Maintenon. . ... . . . 24,000 —
Yerihenonville..........5,000 —
. Mévoisin. . ...........3,000 —
Saint-Piat.. ...... 9,000 —
Sou I aires...............10,000 —
Jouy...............10,000 —
Et Saint-Pierre de Ber- chères......................9,000 —
Somme égale . . 100,000 livres.
qu'il faut répartir dans un seul et même rôle.
Par le résultat de Cette seconde répartition, je remarque qu'à Çhartainvilliers, la contribution d'un héritage, d'un arpent de terre, si l'on veut, valant 10 livres de produit net s'élève à la somme
de...... .........34 sous
A Bouglainval, à.......35 —
A Pierres, à........ . 27 —
A Maintenon, à ........30 —
A Yermenonville, à . , . . . 38 —
A Mévoisin, à........40 —
A Saint-Piat, à.......32 —
A Soulaires, à. ...... . 36 —
A Jouy, à..........41 —
Et à Saint-Pierre de Berchères à 37 — et qu'on a pour dix arpents, puisqu'il y a dix municipalités, 350 sous de contribution foncière, c'est-à-dire 35 sous par arpent, ou héritage quelconque de 10 livres de revenu net, faisant trois vingtièmes et demi ou 3 s. 6 d. pour livre d'imposition foncière.
Cette proportion ainsi déterminée, rien de si facile que de connaître les municipalités qui payent trop ou trop peu, puisque, par ce résultat, on sait que la contribution commune, dans toute l'étendue du canton, doit être de trois vingtièmes et demi, ou de 35 sous par 10 livres, et qu'il ne s'agit que de répartir sur ce pied dans chaque municipalité : aussi n'est-ce que d'après ces connaissances acquises que je fais procéder à la répartition de la contribution foncière de tout le canton, par municipalité.
Mais, avant de procéder à cette répartition, je demande qu'il soit lait une estimation ou vérification mieux combinée et plus exacte que celle qui a eu lieu à la première époque de l'opération
et qui a précédé le rôle de 1791, afin de présenter, pour la contribution foncière de 1792, la plus juste répartition possible, attendu que c'est de cette répartition que doit dépendre l'organisation générale et particulière de la contribution foncière, par ordre de paroisse ou municipalité, canton, district et département.
Cette seconde rédaction ou répartition des contributions foncières que je propose de faire dans les six derniers mois de 1791, présente cet autre avantage, qu'elle prépare à l'avance le rôle des contributions foncières de 1792, et qu'il sera possible d'en faire la collecte dans tout le royaume, au commencement de ladite année 1792.
Troisième époque.
Qu'on répète ainsi l'opération que je viens de tracer, de cantons en cantons et de districts en districts, pendant lé cours de l'année 1791; loutes les municipalités d'un même département supportent une masse proportionnelle de contribution, et il ne reste plus d'autres opérations à faire pour la répartition des contributions, payables en 1793, qiie d'associer les 83 départements les uns avec les autres pour en trouver le rapport commun. Or, il est donc certain que toutes les municipalités, du royaume seront encadastrées, et qu'alors il ne sera pas un héritage dans le royaume, qui n'ait éprouvé des variations de taxe pendant trois années, et que ce n'est qu'à cette époque que sa taxe est celle de l'impôt véritable que cet héritage doit supporter pendant les années 1791, 1792 et 1793 ; et comme pendant les premières années les sommes payées ne doivent être que des acomptes, il est démontré pourquoi j'ai fixé trois années pour perfectionner ou préparer les travaux préliminaires du cadastre et la raison pour laquelle j'ai dit qu'il était facile de faire le compte a chaque citoyen, si dans trois ans la masse de l'impôt était connue, puisqu'il ne s'agissait que de multiplier cet impôt par trois, et d'en comparer le montant avec les impôts fonciers par lui payés. Il est également démontré qu'à cette époque on est assuré de connaître quels sont les rapports du produit net de toutes les municipalités du royaume, comme je l'ai déjà observé ; que c'est alors que doit commencer le travail que j'ai présenté sous le titre d'exécution du cadastre général de la France, et que ce travail, déjà préparé par les opérations que je propose, devient indispensable pour circonscrire les municipalités èt perfectionner le grand œuvre du cadastre. Finfin, que ce n'estqu'à cette époque que doit commencer la levée desplansde toutes les paroisses du royaume, la vérification des déclarations ou rôles de répartition, et la rédaction de tous les actes qui doivent composer le cartulaire universel de l'Empire ; actes que vous avez consacrés dans vos décrets, mais qui ne peuvent avoir lieu dans le court délai que vous avez fixé; et attendu qu'il faut au moins quatre années pour ces vérifications, déclarations et rédaciions, c'est la raison pour laquelle j'ai demandé sept années pour l'entière exécution du cadastre dont vous avez décrété tous les résultats.
De tout ce qui précède, il résulte, et comme l'a dit M. Deslandres, dans son système de l'imposition, mais sous un autre point de vue que j'adopte, qu'après avoir associé successivement les propriétés et les citoyens habitants d'une même municipalité avec celles d'un canton, les municipalités de canton par district, et celles-ci
par département, en un mot, toutes les municipalités du royaume en une seule association, les avoir ainsi fédérées, s'il est permis de parler ainsi, par propriétés ou richesses, tant foncières que mobilières, rie la même manière que nous l'avons fait le 14 juillet pour être tous enfants d'une même famille; il en résulte, dis-je, un seul et unique Trésor national, maintien de la force publique pour tous et auxiliaire vis-à-vis de chacun.
Il n'est pas besoin, je pense, d'en dire davantage; tout me paraît concluant et démonstratif : en conséquence et pour me résumer, j'ai l'honneur de proposer à l'Assemblée le projet de décret suivant:
PROJET DE DÉCRET
Sur le système général de l'impôt.
L'Assemblée nationale, désirant rassembler, dans un décret, tous les moyens d'exécution des lois du royaume, relatives aux contributions et autres revenus publics, et indiquer aux officiers municipaux, conseils des communes, corps administratifs, et à tous les agents du pouvoir exécutif suprême, la marche qu'ils doivent suivre à cet égard ;
Considérant que le brevet général des contributions n'est et ne peut être que le résultat ou relevé des masses particulières de revenus public?, par ordre de municipalités, cantons, districts et départements, comme celles-ci n'en sont que les répartitions, et que leur recensement ne peut se faire que par des gens de l'art, à des centres ou établissements commun?, combinés selon l'ordre de division du royaume, à l'effet d'en dresser le cartulaire ou cadastre ;
Persuadée de plus qu'il importe à la chose publique que les impôts soient exactement acquittés à leurs échéances, et que les fonds en soient versés, sans délai, dans les caisses publiques, par les percepteurs et receveurs ;
Et convaincue surtout qu'il devient presque impossible de faire les recouvrements des impôts, si la loi ne prononce, avec plus de sévérité qu'elle ne l'a fait jusqu'à présent, contre ceux qui, par une indolence condamnable, ou une mauvaise volonté plus condamnable encore, sont en retard de les acquitter ou d'en verser les fonds dans les caisses publiques,
Décrète ce qui suit :
TITRE PREMIER.
Des contributions en général.
Art. 1er. Il est établi, pendant les années
1791, 1792 et 1793, sous les ordres du roi, une régie de toutes les
contributions ou revenus nationaux quelconques.
Art. 2. Il sera en conséquence présenté incessamment, par les comités de Constitution, de finances et de l'imposition réunis, un projet d'organisation de cette régie, qui sera le centre commun de toutes les administrations de finances, et aura le titre de comité général des finances.
Art. 3. Ce comité sera divisé en deux sections principales : la première, pour connaître tout ce qui peut concerner les deux contributions foncière et industrielle, mobilière ou personnelle.
Et la seconde, toutes les autres contributions ou revenus nationaux quelconques.
Art. 4. La première section portera le titre de bureau général de correspondance des contributions directes; et la seconde, des contributions indirectes.
Art. 5. La contribution foncière, pendant le cours de trois années que durera la régie établie par l'article premier, est fixée depuis trois jusqu'à quatre vingtièmes du produit net des revenus fonciers.
Art. 6. Cette contribution est fixée, pour la présente année 1791, aux trois vingtièmes seulement pour la partie des biens non imposés ou imposés au-dessous du taux ordinaire; et,pour l'autre partie des biens anciennement imposés, à la même masse d'imposition que celle portée aux rôles de 1790.
Art. 7. Tout citoyen propriétaire ne payera, pendant les années 1791, 1792 et 1793, que des acomptes à valoir sur l'impôt auquel sa propriété devra être taxée au rôle de 1793, l'impôt de cette année étant le véritable et le seul proportionnel au produit net des revenus fonciers d'une extrémité de l'Empire à l'autre.
Art. 8. L'impôt véritable connu, il sera multiplié par trois.
La somme en résultant sera celle à laquelle chaque héritage aura été imposé pendant trois ans, et cette somme devra être payée en deniers ou quittances par chaque contribuable ou propriétaire.
Art. 9. La contribution industrielle, mobilière ou personnelle, dont les revenus sont présumés d'après le prix du loyer des maisons, est fixée sur le pied de 12 deniers pour livre de ces revenus pour la présente année 1791.
Art. 10. Cette contribution est soumise aux mêmes dispositions de l'article 7, afin de tenir compte à tout citoyen de la. partie de contribution patriotique qu'il aura payée.
Art. 11. La contribution patriotique portant sur les revenus fonciers et industriels, mobiliers ou personnels, le remboursement en sera fait sur la masse de ces deux contributions des années 1791, 1792 et 1793, et il sera tenu compte, à chaque contribuable patriote, de la somme par lui payée sous ce titre.
Art. 12. Il sera remis dans les trois premiers mois de chaque année, par les membres du bureau général de correspondance des contributions directes, un compte exact du produit de ces contributions pendant l'année précédente, afin de statuer à quels deniers ces mêmes contributions devront être fixées l'année suivante, pour balancer la masse des impositions des deux années.
Art. 13. Il sera rendu compte aussi chaque année, et dans les trois premiers mois de l'année suivante, par les membres du bureau général de correspondance, des contributions indirectes et autres revenus nationaux, un compte de clerc à maître du produit de ces contributions et revenus, afin de faire connaître à l'Assemblée nationale alors existante, en cas de déficit, sur quelle partie de contribution le rejet devra en être fait.
Art. 14. S'rl y a déficit en la présente année 1791, il est établi d'avance et par forme de supplément aux impôts et contributions décrétés, à l'effet de balancer la recette avec la dépense, un droit d'un ou deux sous pour livre au plus des deux contributions directes, foncières ou mobilières; et si les deux sols pour livre sont insuffisants, il y sera pourvu par la caisse de l'extraordinaire,
qui en fera l'avance sur le produit des revenus arriérés.
Art. 15. Il est aussi établi un droit de sol pour livre des mêmes contributions directes, foncières et mobilières* sous le titre d'impôts de secours et de localité, tant en remplacement d'octrois des villes et autres revenus des municipalités qui sont tous abolis, qu'à l'effet de pourvoir au soulage-ment des pauvres, extinction de la mendicité et au dédommagement de tous ceux qui éprouveront des pertes par cas fortuits, tels qu'inondation, feu dii ciel ou autres fléaux destructeurs des récoltes et fortunes défi citoyéns;
Art. 16. La mesure du dédommagement est Celle de l'impôt exactement acquitté ; et, à cet effet, il sera présenté un projet dérèglement par le comité de l'imposition;
Art. 17 Ce droit s'élèvéfa à 4 sol3 pour livre des contributions directes dans les villes* chefs-lieux de départements ou évêchés ;
A 3 sols dans les villes* chefs-lieux de district ou de tribunal de district oii de commerce;
A 2 sols dans les bourgs ou lieux établis chefs de canton;
Et à 1 sol dans toutes les autres municipalités du royaume.
Art. 18; Les comptes de ce drdit seront rendus aux corps administratifs dans l'ordre de leur hiérarchie;
Art. 19. La masse des impôts relatifs à la Contribution foncière sera répartie sur tous les héritages delà municipalité* en proportion du revenu net de chaque héritage, aux termes des décrets, et cette opération sera faites dans tout le royaume, aussitôt la publication du présent décret.
Art. 20; Les héritages dont les contributions ne sont pas portées sur les anciens rôles d'imposition, soit par omission* soit comme jouissant anciennement de privilèges, seront imposés, en 1791, sur le pied des trois vingtièmes du produit net de leurs revenus fixés d'après les décrets; et la masse de cette contribution sera jointe à celle de la contribution foncière de l'article précédent, pour établir la masse de contribution foncière et de chaque municipalité, en 1792;
Art. 21. Aussitôt après la rédaction des rôles de 1791, c'est-à-dire pendant les six derniers mois de cette année, il sera fait une association ;
1° Des municipalités d'un même cànton, à celle du chef-lieu de Gan ton»
2° Des municipalités de chaque canton, ainsi réunies à celles du canton chef-lieu de district;
3° Et des municipalités d'un même district à celles du district chef-lieu du département 3
Le tout à l'effet de répartir entre elles, par cantons et districts, et successivement d'association en association, la masse géûëfàle des contributions foncières de ces municipalités ainsi associées; ,.
Et ensuite d ën faire la répartition particulière sur tous les héritages déjà municipalité, sans distinction aucune, et toujburâ eh proportion du produit net des rëvenus dë chaque héritage, âUx termes des décrets.
Art. 22. En 1792, celte àssôciatiôn së fera graduellement de département en département, à l'effet de répartir ëtitre eux et successivement, de la première association à l'association des 83 départements, la massë généralë des contributions foncières, comme d'en faire la répartition sur tous les héritages de Chaque municipalité.
Art. 23. En 1793, il sera procédé à une nouvelle démarcation des limites de chaque municipalité, et le recensement du produit net des fë-
venus de toutes les propriétés comprises dans ces bornes nouvelles en sera fait pour constater le revenu net de chaque municipalité, et il en sera dressé un cadastre ou cartulaire.
TlTRE II.
cadastre.
Art. 1er. Il sera fait un arpentage général
de tout le royaume.
Art. 2. L'arpentage sera rapporté à une échelle d'une ligne pour 10 toises.
Art. 3. Tout terrain renfermé entre quatre bornes sensibles sera considéré comme une seule et même pièce qui sera estimée sur le pied de son produit net, et cette estimation sera faite ainsi qu'il est décrété.
Art. 4. Les communautés de paroisses, sous l'inspection des corps administratifs, conviendront entre elles des limites de leurs territoires, conformément aux dispositions de l'article 23 du titre Ièr, et en dresseront procès-verbal dans la forme prescrite par l'article 1®* du titre ÎI de la loi sur la contribution foncière.
Art. 5. L'arpenteur chargé du plan d'un territoire Sera tenu de tracer les bases principales de son opération.
Art. 6. Le pian sera toujours Regardé au nord ët numéroté depuis 1 jusqu'à son dernier numéro.
Art. 7. En marge de la carte, ou plutôt sur des feuilles particulières, il sera fait une indication par tableau, contenant :
1° Le numéro de l'objet; .
2° Le nom du terrain, nom qui sera donné par la communauté s il n'en existe pas ;
3 L'étendUe du terrain, à la mesure que l'Assemblée décrétera ;
4° L'estimation du terrain, ainsi qu'il est décrété;
5* Le nombre des habitants ; 6° Celui des citoyens actifs; 7° Celui des domestiques mâlés ët femelles ; 8° Celui .des chevaux, etc. ; 9® Le prix du loyër des maisons ; 10ô Et tôîiS les détails et observations relatifs aux contributions.
Art. 8. Les salaires des arpenteurs seront payés par les communautés et supportés au marc la livre des produits nets.
Art. 9. Il est établi, sous les ordres du roi, des comités ou bureaux de cadastre,- savoir :
1° Un comité général ;
2° 27 comités dans les villes les plus au centre de 3 départements, sous le tltrë de comités de contrées ;
3 Et 298 comités d'arrondissement de districts dans les villes les plus au centre d'un, de 2 ou 3 districts.
Le tout conformément à la liste quisera dressée à cet effet
Les ingénieurs des ponts et chaussées seront membres de ce comité*
Art; 10. Le comité général de cadastre surveillera particulièrement la compagnie d'itigéniëUrs chargée de la mise au net des plans, ët particulièrement d'une carte générale de la Frahee à une échelle double de celle que MM. dë l'académie ont adoptée, sur laquelle carte seront seulement placée les chefs-lieux de toutes les municipalités et le tracement de tous les triangles qui ont servi de bases à l'exécution de cette carte, parce que
cë doit êtrë sur cette carte qiie seront vérifiés les arpentages qui seront envoyés par ieé communautés du rOyâumë.
Art. 11. Le mémè cdtiiité géhëràl cdires^Ondra seûlemeut aVéc lès riti mitéS dé fconti-ées, Cëui-ci avec les comités d'arrondissement de districts, et ceS derniéi'S avec les chefs-lieUx ae ëântdns qui, réunis dvec les difîérentès pài'oisèeè, né formeront , pour tous les travaux du cadâsti-e, qu'une seule ét même municipalité, sous le titre de municipalité centrale.
Art. 12. Le comité de Constitution sera tenu dé présenter à l'Assemblée nationale ùri projet de décret sur l'organisation de ces différents comités ou bureaux et sur lestravaux dont chacun sera spécialement chargé.
Art. 13. Les procès-verbaux des dêpartemènts, tels qu'ils sont présentés dans la nouvelle rédaction faite au comité de Constitution, SërOnt imprimés, ét ii ën sera retnis uti exemplaire à chaque eomité de cadastre ; mais il né sera remis à cbaqUë département ët district que l'exemplaire des prdfcès-verbaux dépendant de lëur comité de contréë.
Art. 14. Lëiâ limites dë chaqùe paroisse Sont les lignés éqUidistantes avec les voisines,. à hioihà qti'il fié se rencontre dëâ limités tracées par là nature (1).
Àrt. 15. Les limites dë chaqde chef-liëù dé cah-ton sont les lignés équidistantes àvéc les cantons voisins, à moins qu'il në se rencontre également des limites tracéës par lâ naturë.
Art. 16. Les limites dès pàroisses, municipalités ou chefs-Iiëux de cantons, diëtiicts ét départements , ainsi constatées d'après le rapport général qui ën sera fàil à i'ÀSéëmblëë àlôrs existante, seront considérées comme Constitutionnelles pat les inconvénients qui résulteraient de ia mutabilité des limites dàns l'exécution du cadastre.
TITRE III.
Des moyens coeréitifs pour l'acquit des impôts (2).
Art. 1er. Èri ajoutant aux dispositions des
articles 23 ët 24 des dêcrèts de£ 12 et 14 novembre 1790, ainsi qu'à
celles portées dàns l'instruction du 12 août 1790, sur les fonctions dès
assemblées administratives,
Les trésoriers ou receveurs deè districts Sertit garants eiivërs ïës directoires de districts ét départements du versement dans les caissèé des trésoriers généraux ou gardes des OaisëëS du Trésor plafclfiCî du montant total des sommés qui doivént être versées dans leurs caisses, à moins qu'il n'y ait insolvabilité de la part de-quelque^ receveurs eu percepteurs de deniers publics, et qu'ils n'aient fait constater cette insolvabilité et les diligences qu'ils auront faites, par les directoires de districts.
Faute d'avoir rempli ces_ formalités, les trésoriers où receveurs de
districts seront tenus d'en faire l'avance, a leur défaut les
directoires dë districts et subsidiàirement les directoires de dé-
Art. 2. Les trésdriërs génératii oU gardes des différentes cdiSsës du Trésor public, soit ordinaires, Soit extraordinaires, sont responsables du payement des receveurs de districts, ou autres receveurs versant directement dans leurs caisses, à mdins qu'il n'y ait insolvabilité de la part de quelques receveurs ; mais, jusqu'à ce que ces trésoriers généraux aient fait constater l'insolvabilité; ou les diligèdcës qu'ils auront faites pour y parvenir; par lés directoires de départements, ils sont tenus de térsër dans leurs caisses les sommes qu'ils Ont négligé de faire rentrer; et s'il arrive qu'il y ait déficit, ce qui sera constaté chaque mois par le comité général des finances, ils seront tenus d'en payer les intérêts sur le pied de 5 0/0, pendant tout le temps qu'ils auront négligé de remplir les formalités ci-dessus prescrites..
Art. 3. Nul ne pourra être admis à aucune place, charge eu oftiee public, s'il n'est en état de justifier qu'il a payé ses impôts et contribution patriotique des termes échus, ou s'il n'a fait constater au directoire dé son département qu'il a été dans l'impossibilité de les aqqUitter.
Art. 4. Un maître est responsable pour son do-ihèstique, ét tënîi de payer pour lui, quand le maître a été averti, par la commune oii. les cottimUftes oti lë^ bieùs sont situés, dë là niasse d'impôt Où contribution (JUe lë domëstique doit acdUittéT.
Art. 5. On fonctionnaire pùblic ëst responsable poUr ses cothùiis ët employés, et tenu dë payer pour eux, s'ils Se trdhvëht dàns le cas de l'article précédent.
Art. 6. ToUt contribuable en retard d'acquitter son impôt, o'u ïà partie dë sbn impôt ou contribution pàtriotic(ue, aux termes fixés pàr la loi, s'il laisse écouler plus d'un mois sans i acquitter, à édmpter dd jour où il aurà été inscrit dans le tàblëàu public dont il sëra parlé ci-àptês, payera uùë amendé dé o soùs àu profit dë' son collec-tettr OÙ pércepteùr, et 1 u/0 par mois dë l'impôt ou contribution échue ; savoir : moitié au profit deô pauires dë là pàfoisâë, ët l'àiitrè moitié àu profit des membres dit cortsèii èèùéfàt de la comrnnné.
Àrt. 7. Tout èoné'éteuf et, feç'êtettf dé' deoiërâ publics éd fe'tàrd de vôrsër lés fôlfwt de sâ càtééè aux époques fiiéës tàr la loi. S'il laisse égrena éiït écouler plùs d'uù m 6îs, k fc'Oiçipter du jo'ur où il àurà êté^ inscrit dàns le tàbleau pùblic août il sérà p'arté cî-àprès,|jayéraî ûfië àmênde ; sàvOir : le Collectëùr ou pèrcëpteùr. dë 2u sou^, ëf lé ré-ce vëtîr particulier de dtètnct, de 3 livrés: l'uOè et t'aûtrë au p'fofït dég receveurs dàni leâ caisses dëstfùels le verèemént doit Se faire ; ét outré cël'intérêt, sur je pied de 5 Ô/CP, de la sommé que chàëtin étàit obligé dë vérser ;. savoir : M profit des membres du directoire dé district, ou des membres dÙ directoire du déparfèmënt, là partie des fconectëurs Ou pëfcèpteursj ët aU prOfit deS tiésoriëlrs généraux, fà partie des receveurs particuliers ; le tout jusqu'à l'époquè dut versement dans les différentes caisses.
Art. 8. Ces amendes ne pourront être remisés ni Modérées dans aucun cas et sOus telles consi-
dérations que ce puisse être, et sont acquises aux pauvres, collecteurs ou percepteurs, communes, receveurs, membres de directoires du districts, départements, et trésoriers généraux, à l'expiration précise du mois où le nom des débiteurs aura été inscrit dans le tableau public.
Art. 9. Tout contribuable, ainsi que tout collecteur et receveur, porté sur le tableau public trois mois de suite, sont déchus, jusqu'à ce qu'ils aient satisfait, du titre de citoyen actif, et comme tels, ne peuvent être électeurs ni éligibles dans aucune assemblée.
Les biens des contribuables sont déclarés saisis de plein droit, et les places, charges ou offices des délinquants déclarés vacants ; en conséquence, il peut être vendu de ces biens sur simple affiche, jusqu'à concurrence de la dette, à la réquisition de la commune ou receveurs et trésoriers.
Il peut même être procédé à l'élection des places, charges ou offices vacants, à la réquisition de tout citoyen actif.
Art. 10. Il sera établi à la porte de l'église, s'il n'en n'existe déjà, dans chaque municipalité du royaume, un tableau public, fermant à clef.
Art. 11, Il sera établi un pareil tableau public de district à la porte de la maison commune du chef-lieu de district, et enfin un semblable tableau à la porte des différentes recettes générales du Trésor public.
Art. 12. Il sera dressé, tous les mois, un bordereau par état nominatif des contribuables en fetard de payer leurs impôts et contribution patriotique, par le collecteur ou percepteur de chaque municipalité.
Cet état sera signé du collecteur et présenté au corps municipal, qui en ordonnera l'affiche dans le tableau public pendant un mois, avec injonction au collecteur de déclarer à la fin du mois ceux qui auront satisfait, afin que leurs noms soient rayés de l'état nominatif.
Art. 13. Il sera dressé aussi tous les mois un pareil bordereau, par état nominatif, des collecteurs ou percepteurs des contributions des différentes municipalités d'un même district en retard de verser dans la caisse de district.
Cet état sera signé du receveur de district, présenté au directoire, qui en ordonnera l'affiche dans le tableau de district pendant un mois, avec injonction au recevéur de district de déclarer à la fin du. mois ceux des collecteurs ou percepteurs qui auront satisfait, afin que leurs noms soient rayés de l'état nominatif.
Art. 14. Il sera enfin dressé tous les mois un pareil bordereau, par état nominatif, des receveurs de districts en retard de verser dans les différentes caisses du Trésor public.
Cet état sera signé du trésorier général ou garde des différentes caisses du Trésor public ou de premier commis, présenté au comité général des finances, qui en ordonnera l'affiche dans le tableau public des caisses du Trésor national ou de l'extraordinaire pendant un mois, avec injonction au trésorier général, ou son premier j commis, de déclarer ceux des receveurs de districts qui auront satisfait, afin que leurs noms soient rayés de l'état nominatif.
Art. 15. Les contribuables qui auront acquitté leurs impôts, seront déchargés de l'amende prononcée envers les pauvres et les membres du conseil général de la commune; mais ils seront tenus d'acquiiter les 5 sols au profit du collecteur, pour s'être laissé inscrire dans le tableau public, ces -5 sols étant destinés à dédommager
le collecteur de ses frais de rédaction de l'état nominatif.
Il en sera de même des 20 sols au profit des receveurs de district et des 3 livres au profit des trésoriers généraux ou gardes du Trésor public.
Urimembre demande l'impression du discours et du projet de décret de M. Aubry du Bochet. (Cette motion est décrétée.) (La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.)
J'ai reçu de M. le ministre de la justice la note suivante :
« Le roi a donné sa sanction aux décrets suivants :
« 1° Au décret de l'Assemblée nationale, du 16 décembre dernier, concernant la vente des biens nationaux à la municipalité de Tours;
« 2° Au décret du 25 janvier, concernant un jugement du tribunal du district d'Amiens, sur l'exécution d'une délibération du directoire du département de la Somme, relative au remplacement des ecclésiastiques fonctionnaires publics, refusant de prêter le serment prescrit;
« 3° Au décret du 27. concernant les conservateurs des hypothèques et greffiers expéditionnaires, appelés à l'exercice des chancelleries établies près les tribunaux de' district, et les sceaux des lettres de ratification;
« 4° Au décret du même jour, relatif à la circonscription des paroisses delà ville d'Autun;
« 5° AU décret du même jour, relatif à l'établissement d'un tribunal de commerce dans la ville de Paris ;
« 6° Au décret du même jour, relatif à l'envoi à la caisse de l'extraordinaire, tant par les receveurs des districts, des assignats annulés, que par les deux membres des directoires de district qui auront fait là vérification de la caisse des receveurs des districts ;
« 7° Au décret du même jour, concernant l'adjonction de quatre commissaires pour la fabrication de 800 millions d'assignats, et de 2 signataires pour les assignats de 50 livres;
« 8° Au décret du même jour, relatif à la nomination de 4 membres du comité des finances, pour assister à la vérification et au brû-lement des effets reçus dans l'emprunt national de 80 millions et autres de même nature;
« 9° Au décret du même jour, relatif à un tableau du reste des dépenses non acquittées de l'année 1790, et à celui des besoins de l'année 1791;
« 10° Au décret du 28, relatif à un nombre de 57,903 fusils à ajouter à celui de 50,000, qui doit être distribué aux gardes nationales du royaume ;
« 11° Au décret du même jour, relatif aux pensions de retraites des agents du pouvoir exécutif, dans les pays étrangers; « Et à une augmentation de troupes.
« 12° Au décret du 29, concernant l'organisation de l'armée et les soldats auxiliaires destinés . à être répartis dans les régiments ;
« 13° Au décret du 29, concernant l'acquisition de la maison des bénédictins d'Orléans, pour l'établissement du directoire du département du Loiret;
« 14° Et enfin au décret du 30, concernant le rachat du droit dù pour mutations par donation ou par vente. « Le ministre de la justice transmet à M. le
Président les doubles minutes de ces décrets, sur chacune desquelles est la sanction du roi.
« Signé: M. L.-F. Duport.
« Paris, ce
donne lecture de deux lettres du maire de Paris, qui annonce à l'Assemblée la vente de sept maisons au profit de la nation.
Par la première lettre, en date du 9 février 1791, il apprend qu'il a été adjugé le8dece mois trois maisons nationales : la première louée 600 livres, estimée 5,667 livres, vendue 12,200 livres; la deuxième louée 2,350 livres, estimée 31,160 livres, vendue 70,400 livres; et la troisième louée 2,400 livres; estimée 32,640 livres, et vendue 57,300 livres.
Et trois autres maisons, la première louée 1,000 livres, estimée 32,160 livres, vendue 33,900 livres; la deuxième louée 500 livres, estimée 8,720 livres, vendue 12,100 livres; et la troisième louée 1,742 livres, estimée 16,192 livres et vendue 42,300 livres.
La seconde lettre,en date dull,contientannonce d'une adjudication de maison nationale, située rue de Sèvres, louée 1,450 livres, estimée 16,170 livres, adjugée 23,000 livres.
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du procureur général syndic du département des Pyrénées-Orientales, qui annonce à l'Assemblée la nomination de M. Deville, curé de Saint-Paul, àl'évêché de Perpignan.
Cette lettre est ainsi conçue:
« Perpignan, le
Monsieur le Président, j'ai l'honneur de vous annoncer que MM. les électeurs du département des Pyrénées-Orientales, s'étant réunis dimanche 30 janvier, dans l'église cathédrale de Saint-Jean, ont procédé à la Domination d'un évêque, le siège étant vacant par le relus du sieur d'Esponchés de prêter,le serment prescrit par l'article 4 de la loi du 26 décembre dernier. La très grande pluralité des suffrages s'est réunie en faveur de M. Deville, curé de Saint-Paul (Applaudissements réitérés). Ce prêtre, aussi respectable par ses lumières que par ses mœurs, n'a cessé depuis deux ans de donner des preuves de civisme. Son élection a été universellement applaudie : il a été proclamé par le président de l'assemblée électorale avant la messe solennelle, que le nouvel évêque a célébrée. Après la cérémonie, le corps des électeurs, le directoire du département, celui du district, la municipalité, l'ont reconduit dans sa maison, escorté par la garde nationale, au milieu d'une troupe immense de citoyens. C'était vraiment un jour de fête, un hommage public que la justice rendait à la vertu.
« Tout est calme dans le département; la presque totalité des curés de campagne a prêté le serment; il ne me conste pas qu'il y en ait un seul qui se refuse à remplir un devoir si précieux à tout bon citoyen; trois curés de Perpignan, deux de la ville d'Ille, un de celle de Thuir sont seuls réfractaires.; Cette distinction vous fera peut-être juger, Monsieur, que les consciences urbaines sont plus délicates que celles de nos bons pasteurs villageois ; mais elle vous convaincra que Je fanatisme n'est plus à craindre: il a repassé les monts qui divisent les deux royaumes; le siècle est trop éclairé, et notre patriotisme trop vigilant pour craindre qu'il rétrograde.
« Je suis avec respect, Monsieur le Président, votre très humble et très obéissant serviteur.
« Le procureur général syndic du département des Pyrénées-Orientales. » ( Vifs applaudissements.)
(L'Assemblée ordonne l'impression de cette lettre et l'envoi à chacun de ses membres.)
J'ai l'honneur de rendre compte à l'Assemblée que tous les curés de la ville de Roye ont prêté le serment civique. Parmi ces curés est le frère d'un de nos collègues, M. Du-metz.
Ce serment a été prêtê à l'acclamation universelle.
Je suis bien aise de rendre compte à l'Assemblée de cet événement, parce que plusieurs pamphlets ont mal parlé des curésae Roye. (Applaudissements.)
(ci-devant de Mauthou), au nom des comités militaire, diplomatique, de Constitution, des rapports et des recherches réunis. Messieurs, vous avez chargé hier vos comités de Constitution, des rapports, militaire, diplomatique et des recherches, de vous présenter des mesures relatives aux événements qui se sont nouvellement passés dans les départements du Haut et Bas-Rhin. Ils viennent d'arrêter le projet de décret que je suis chargé de vous soumettre. L'urgence des circonstances ne leur permet pas de différer à vous entretenir de cette affaire, et ne m'a laissé que Je temps de lire avec attention les pièces qui m'ont été remises. Je sollicite votre indulgence.
Vous ayez envoyé des commissaires dans tes départements du Haut et Bas-Rhin au sujet des troubles occasionnés par quinze cents particuliers qui s'étaient décorés du nom de citoyens caiholiques, apostoliques et romains, ou société d'union, pour s'opposer, même par la violence, à l'exécution de vos décrets relatifs au clergé. Les commissaires avaient été précédés à Strasbourg par d'odieuses calomnies, inventées pour les rendre suspects aux deux partis. Ils ont exprimé leurs sentiments dans une proclamation qui a produit l'effet qu'ils en attendaient; et tous les corps, excepté le département, dont quelques membres seulement se sont séparés à cet égard, leur ont douné des témoignages de bienveillance.
Les commissaires ont été étonnés de voir, à la fin de leur première séance au département, les administrateurs leur présenter les pétitionnaires de la société des citoyens catholiques, etc. Cette société, suspendue et dénoncée par l'accusateur public, demandait à être rétablie dans tous ses droits. C^tte démarche a éveillé la surveillance des commissaires sur l'administration du département, à laquelle ils ont écrit pour l'inviter à faire exécuter exactement les décrets, et à désavouer les libelles qu'on avait publiés, et notamment un faux bref du pape, et pour l'avertir qu'ils allaient établir une correspondance avec tous les districts et toutes les municipalités. Le département a alors manifesté ses véritables intentions. Il a dénoncé formellement au ministre les commissaires du roi, en disant qu'ils devaient se concerter avec lui, et ne pas détruire ainsi la hiérarchie des autorités; qu'ils ne pouvaient avoir aucune correspondance avec les municipalités et les districts ; que le département ne croyait pas devoir leur obéir, ni souffrir qu'on déshonorât l'autorité constitutionnelle déposée dans ses
mains, et que les administrateurs n'avaient pas besoip des invitations des commissaires pour se livrer à tout leur zèle et à tout leur patriotisme.
Sur ce mot de patriotisme, je dois vous dire que depuis cinq mois il est impossible au comité de liquidation d'obtenir du département l'exécution de vos décrets. La dénonciation au ministre avait aussi pour objet des dispositions relatives à l'assemblée des catholiques ou de l'union. Les commissaires du roi avaient dirigé leur route vers Colmar. La municipalité, prévenue de leur arrivée, avait invité la garde nationale à leur rendre les honneurs dus à leur caractère; mais le comité, militaire de la garde nationale, présidé, malgré les défenses qui avaient été faites par le ministre, comme officier de ligne, par M. Dubois, commandant, délibéra de n'accordeF aucun honneur aux commissaires, et motiva sa délibération sur une ordonnance du feu roi. Des citoyens de bonne volonté s'offrirent pour former une garde aux commissaires et se présentèrent à la municipalité, qui resta assemblée jusqu'à huit heures du soir. Le maire et le procureur syndic continuèrent à tenir séance. Les commissaires entrent dans la ville à dix heures; ils sont environnés d'un peuple immense ; ils entendent crier : Vive le comte d'Artois! les commissaires à la lanterne! Arrivés à leur hôtel, sans avoir éprouvé de violences personnelles, ils demandent au maire et au procureur syndic la cause de ces troubles. Ils se présentent à ia fenêtre, et déclarent n'avoir pas besoin de gardes au milieu des bons citoyens, de leurs amis, de leurs frère6. La municipalité connaissant le danger que couraient les commissaires du roi, insistait tandis que le commandant de la garde nationale cherchait, inutilement à la vérité, à faire retirer les citoyens soldats, qui s'étaient établis dans leur hôtel, et que le peuple rassemblé faisait entendre de nouveau les cris de ; Vive le comte d'Artois! les commissaires à la lanterne!
Alors M. Stokmeyer, l'un des officiers municipaux, arrive à la tête des habitants du faubourg, armés de bâtons, et dissipe l'attroupement où se trouvaient entr'autres personnes de marque M. Chennevot, frère du procureur général syndic de l'administration du département à Strasbourg, M. Malezi, un chevalier de Saint-Louis et un officier de milice qui se retirent fort maltraités. M. Stokmeyer rétablit l'ordre, et le commandant de la garde nationale, requis de la iqu-nicipalité, ne peut se refuser de se rendre à la réquisition, qu'en disant qu'il a donné sa démission. Cependant il commande de se retirer aux postes établis pour assurer la tranquillité publique, que les bons citoyens maintiennent.
Le lendemain, les commissaires du roi se rendent au département pour exhiber leurs ppuvoirs, et tout se passe paisiblement. Le soir, les écoliers, sur l'instigation de leurs professeurs, se répandent dans la vjlle en jetant les cris quelés attroupés avaient fait entendre la veille. Les commissaires apprennent au même instant qu'une discussion théblogique est ouverte au collège, sur le serment civique exigé des fonctionnaires ecclésiastiques. Ils se rendent à cette assemblée, et, armés de l'autorité de la loi èt de la raispn, ils entrent dans la discussion : 8 professeurs sont convertis. (Une grande partie de \ Assemblée qp-plaudit.) Ils ont prêté le serment. Les jepqes écoliers reconnaissent leur faute et comblqpt de bénédictions ceux qu'ils ont outragés.
Après avoir reqdu au département du Haut-
Rhin l'activité qui semblait lui manquer, les commissaires sont partis de Colmar avec des espérances consolantes et au milieu des acclamations d'un peuple qui les bénissait du calme qu'ils avaient rétabli dans cette yille, A leur arrivée à Strasbourg ils ont appris la dénonciation dont je vous ai rendu compte et gui avait produit ifô vives inquiétudes. Un district même a écrit qu'il craignait de se compromettre s'il suivait la correspondance érigée de lui. Les commissaires ont cru ne pas devoir perdre de temps pour s'adresser à yous. Il faut faire cesser cette incerti'ude, il faut que les citoyens sachent à qui obéir. Vpps sentirez combien il est instant de fournir aux commissaires des moyens d'achever une ipissioq commencée squs de si heureux auspices, si vous v-ous rappelez quels pouvoirs vous avez voulu leur copier, si vous vpus rappelez qu'ils exercçpt une espèce de dictature sur leur responsabilité; ils u'pnt vii dans toqtes les démarches du département Que des prétextes d'opposition à l'exécution de la loi. Vps comités vous proposent de suspeqdre le directoire et le procureur général syndic, afin de ne pas laisser plus Jpngtemps à ces administrateurs une autorité qui devient une arme dangereuse dans leurs mains. Les commissaires choisiront un nombre suffisant de personnes pour veiller à l'administration. En les prenant parmi les administrateurs des districts du département, on appuiera des citoyens revêtus qe la confiance publique a reijiplacer qpsqon}RPré§ qiii en avaient été honorés. C'est la première disposition du projet de décret que je suis chargé de yous pré^ senter.
Les événements arrivés à Colmar ont fixé l'attention des commissaires; ils ont ordonné une information ; ainsi yous n avez rien à statuer à Cet égard ; mais vous devez des témoignages de satisfaction à M. Stokmeyer et aux bons citoyens gui, avec lui, q'ùt si bien servi la chose publique. cpent|ant une compagnie de gardes nationales, nommée 1p. compagnie des chasseurs, a manifesté dès sentiments; coupables ; elle portait l'uniforme d'Artois et la cocarde blaqcbe; une partie de ses membres qui avait passé le RJiin poqr aller, djsait-elle, sery|r dans l'armée de Condé, était cle retour.
Vous ne pouvez vous dispenser de dissoudre cette compagnie, et d'ordonner aux citoyens qui la qomposent, de sqjvre les dispositiqus des décrets pour l'exercipe des fonctions des gardes nationales. Il s'agissait de nommer un évêque dans le département du Bas-Rhin. te directoire du département a contrarié ]p vœu de la loi sur cet objet comme sur tous les autres, parce que M, l'évêque de Strasbourg habite une partie de sqn diocèse située hors du royaume* Dette administration prétend qu'il doit être traité comme les évêques absents. Les commissaires croient qu'une nouvelle élection à ce siège peut contribuer efficacement à la cessation des troubles. L'évêque de Strasbourg, résidant de l'autre côté dq Rhin, est dans soq diocèse. Je vais lire sa propre lettre, et j'espère que son aveu ne laissera prise à aucune contradiction dans cette Assemblée, M. le maire de Strasbourg lui avait écrit le 2$ janvier, copformément à l'article 1er de la loi dq 26 décembre, qui exige que les ecclésiastiques fonctionnaires publics prêteqt» dans le délai de quinzaine, le sèment exigé par le décret de rAssemblée nationale : J'ai l'honneur de vous préyeqir que le terme expire dimanche prochain, et que pi vous ne vous soumettez pas la loi, je serai obligé de dénoncer lundi votre défaut ue prestation de serment. »
Voici la réponse de M. l'évêque de Strasbourg, en date du samedi 29.
« Monsieur le maire, je réponds à votre lettre du 28, que je reçois le 29. J'aurais cru que l'instruction pastorale et la déclaration que j'ai publiées auraient suffi pour faire connaître ma façon de penser au sujet du nouveau serment. Cette façon de penserest invariable, puisqu'elle est ; fondée sur des principes invariables eux-niêmes pour tous ceux qui professent la Feligion catholique, apostolique et romaine ; et je jouis de la douce satisfaction de voir que tout mon clergé, aussi dévoué que moi aux vrais principes, a refusé et refusera de prêter un tel serment, et qu'enflo nous resterons attachés à notre devoir, au risque de notre fortune et même de la vie. Je continue d'ailleurs à rendFe l'administration responsable des suites funestes que pourront faire naître dans cette province des innovations aussi contraires à la religion.
« Signé ; le pardinal-prince de Roh^n. »
Cette lettre est datée de Itheneim, à 6 lieues de Strasbourg.
M. l'évêque parcourt indistinctement son diocèse sur les deux rives du Rhin. Ne pouvant contester sa présence qu'il avoue, il est dans le cas des évêques non absents, qui n'ont pas prêté le serment dans le temps prescrit. Il faut également ordonner la nomination de l'évêque du Haut-Rhin, où il n'y avait pas de siège épiscépal. Vos comités ont aussi pensé qu'il était à propos de stimuler l'activité des tribunaux,, par une disposition qui aurait pour objet d'ordonner au ministre de la justice de vous rendre compte, jour par jour, des progrès des procédures ordonnées par les commissaires du roi. Ces commissaires représentent dans leur lettre l'influence que pourrait avoir sur les départements du Haut et Bas-Rbin votre décision sur le tabao. Sans doute, cette décision se conciliera avec l'intérêt du fisc et celui des propriétés t l'incertitude seule peut occasionner de grands malheurs. H est important d'accélérer votre décret pour ôter tout prétexte aux malveillants qui agitent les deux départements. La tranquillité renaîtra bientôt; vous pouvez compter sur les commissaires dont votre justice doit louer le zèle» le patriotisme et l'intelligence. Vous devez aussi des éloges au district et à la municipalité de Strasbourg : ils ont balancé les influences du département qui cherchait à anéantir vos lois, ou du moins à annuler leur effet. Vous en devez à la municipalité de Colmar et à la société des amis de la Constitution, qui a rendu, à Strasbourg, de grands services aux commissaires. Telles sont les dispositions du projet de décret que je vais vous lire, et les conclusions d'un .rapport où j'ai cherché à exposer tous les faits sommairement et avec exactitude, et pour lequel j'ai dû solliciter votre indulgence. (Une très grande partie de l'Assemblée applaudit
PROJET DE DÉCRET.
« L'Assemblée nationale, après avoir ouï leg comités militaire, diplomatique, de Constitution, des rapports et de3 recherches, réunis, sur les événements arrivés dans les départements du Haut et Bas-Rhin, sur la conduite des administrateurs de ce dernier département, ét les dénonciations faites par ces administrateurs contre les commissaires du roi, envoyés en vertu du décret du 20 janvier dernier^
« Déclare que les commissaires du roi ont pu et dû, pour l'accomplissement de la mission qui leur est confiée, correspondre sans intermédiaire avec les corps administratifs et tous autres officiers publics exerçant leurs fonctions dans les départements du Haut et du Bas-Rhin, et prendre généralement toutes les mesures qu'ont exigées le maintien de l'ordre public et 1 exécution des décrets de l'Assemblée nationale.
« En conséquence, elle a décrété et décrète:
« 1° Que les administrateurs,composant le directoire du département du Bas-Rnin, seront, ainsi que le procureur général syndic de ce département, suspendus provisoirement de leurs fonctions, pour, ensuite des informations qui seront prises et du compte qui en sera rendu, être par l'Assemblée nationale statué ce qu'elle jugera convenable;
« 2° Que pour pourvoir à l'administration de ce département, les commissaires envoyés par le roi seront autorisés à nommer un nombre suffisant de personnes qui exerceront provisoirement les fonctions des administrateurs du directoire du département et du procureur général syndic dont la suspension est ordonnée par l'article précédent, lesquelles personnes seront choisies parmi les membres qui composent les corps administratifs du département et des districts du Bas-Rhin;
« 3° Qu'il sera procédé incessamment à la no-^ mination des évêques des départements du Haut et du Bas-Rhiq, et qu'en conséquence le procureur général syndic de celui du Haut-Rhin et eelui qui, dans le département du Bas-Rhin, en exercera les fonctions, convoqueront à cet effet les électeurs de ces deux départements ;
« 4° Enfin, que conformément au décret du 12 juin 1790, la compagnie de chasseurs existant en la ville de Colmar est dissoute; en conséquence, les citoyens qui la composent seront tenus de se conformer aux dispositions des décrets pour remplir les fonctions dé gardes nationales.
« L'Assemblée nationale approuve la conduite du district et la municipalité de Strasbourg, et déclare que le sieur Stokmèyer,ceux des gardes natjonales et ceux des citoyens qui ont agi pour maintenir l'ordre public èt le respect du aux commissaires du ont honorablement rempli leur devoir, et que le président est chargé de leur écrire à cet égard une lettre de satisfaction eh la personne dû sieur Stokmeyer.
« L'Assemblée nationale ordonne en outre que le ministre de la justice sera tenu de lui rendre compte,de jour à autre, des progrès de l'instruction des procédures commencées, soit à Colmar, soit en la ville de Strasbourg, soit par-devant les autres tribunaux du Haut et Bas-Rhin, relativement aux troubles qui y ont eu lieu.
« L'Assemblée nationale charge son président de se retirer dans le j ouf par devers le roi, pour lui présenter le présent décret, et le prier de presser l'exécution des mesures décrétées le 26 janvier relativement à la sûreté des frontières, et d'envoyer dans les départements du Haut et du Bas-Rhin une force publique suffisante.»
Plusieurs membres : Aux voix 1 aux voix !
Un mot d'observation pour les commissaires du roi. Il me semble que c'est trop réduire les témoignages de la satisfaction de l'Assemblée, nécessaires d'ailleurs pour les acoréditer dans le cours de leurs opérations, que de vous borner à dire qu'ils ont pu et dû.
Il me semble qu'il faudrait ajouter une phrase honorable pour la manière dont ils se sont conduits. (Applaudissements).
Je demande que les témoignages de satisfaction soient étendus à la municipalité de Colmar.
Messieurs* je crois qu'il est de la justice de l'Assemblée d'excepter de la suspension des fonctions un des membres du département du Bas-Rhin, lequel, depuis dix-huit mois, n'a pas partagé ses fonctions. C'est M. Kuln, qui a été nommé commissaire à Schelestadt pour rétablir dans cette ville l'ordre et la paix qui y avaient été troublés depuis longtemps. lia rempli cette mission à la satisfaction des habitants de cette ville ; et,depuis ce moment, le calme le plus parfait y règne.
Je demande donc que, comme c'est une espèee de tache que la suspension de ce département, il n'y soit pas compris.
Plusieurs membres : Il pourra être nommé par les commissaires.
Messieurs, quant à cette compagnie de chasseurs, vous devriez vous contenter de dire qu'elle est dissoute, sans rien ajouter.
, rapporteur. J'adopte les amendements.
(Le projet de décret est adopté avec les amendements sauf rédaction, et renvoyé aux comités réuni.)
annonce l'ordre du jour de la séance de demain. La séance est levée à trois heures.
PRÉSIDENCE DE M. RIQUETTI DE MIRABEAU L'AÎNÉ
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier, qui est adopté.
Je demande que les comités de judicature et de commerce et d'agriculture réunis, soient tenus de nous présenter un projet de décret pour délivrer les métayers et colons par-tiaires des sequestrages provenant des saisies qui souvent, dans l'ancien régime, étaient cause qu'on décernait, contre ces malheureux cultivateurs, des contraintes par corps et des emprisonnements,-et de commettre le soin de ces saisies à la gendarmerie nationale.
(Cette motion est renvoyée aux comités de judicature et de commerce et d'agriculture réunis).
Un membre demande que le comité de Constitution présente un projet de
décret sur la levée
(Cette motion est renvoyée au comité de Constitution).
Plusieurs membres du comité d'aliénation proposent et l'Assemblée décrète la vente de biens nationaux à différentes municipalités, ainsi qu'il suit :
L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites suivant les formes prescrites, déclare vendre les biens nationaux dont l'état est annexé aux procès-verbaux respectifs des évaluations ou estimations desdits biens, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, payables de la manière déterminée par le même décret, savoir :
A la municipalité de Bourguignon, département du Doubs........ 4,545 I. 16 s. » d.
A celle de Lons-le-Saulnier, département du Jura .............. 596,517 13 1
A celle d'Yvory, même ;département.......... 3,080 » »
A celle de Cernans, même département.... ,10,065 » »
A celle de Montigny-les-Arsures, même département ............ 73,799 » »
A celle de Saint-Germain, même département................. 5,120 10 «
A Celle d'Augerans, même département — 7,086 9 6
A celle de Champvans, même département.... 42,617 » »
A celle de Rahon, même département.... 5,348 3 »
A celle de Chaleu, même département.... 1,408 »
» A celle de Gigny, même département.......... 49,214 » »
A celle de Breurey, département de la Haute- Saône................ 47,663 » 2
A celle de Fleurey, même département.... 8,011 17 »
A celle de Faverney, même département.... 131,526 18 4
A celle d'Ecquevilley, même département .... 1,959 13 » A celle de Pérouze, même département____ 24,228 12 4
A celle de Yoray, même département......... 42,311 .19 2
A celle de Vaivre, même département____ 2,720 » »
A celle d'Echenoz-la-Meline, même département ................. 5,874 » »
A celle d'Amance , même département — 24,266 » »
A celle de Chazelot-les-Mailley, même département................. 7,370 » »
A celle d'Epenoux, même département — 17,094 »
» A celle de Pusy, même département.......... 32,230 » »
A celle de Montboillon, même département.... 16,322 > »
A celle de Beau jeux, même département — 9,374 1. 16 s. A celle deMotey, même département........... 8,600 3
A celle de Quentrey, même département.... 3,219 6
A celle de Velezon, même département.... 23,638 »
A celle de LaRochelle, même département .... 11,386 2 A celle d'Autrey, même département.......... 97,346 »
A celle de Brove-les-Loups, même département.............................3,520
A celle de l'Heuilley, même département — 15,818 »
A celle de Nantilly, même département.."..' 37,603 » A celle d'Argilières, même département---- 400 2
A celle de Ri gny, même département.......... 100,210
A celle de Ville-Neuve, ci-devant les Chanoines, département de l'Aude. 14,339
A celle de Mouestiés, même département .... 12,430 »
A celle de Montolieu, même département .... ; 10,299 18 A celle de Fa, même département.......... 3,105 19
A celle de Chalon-sur-Saône, département de Saône-et-Loire......... 54,386 12
À celle du Mans, soumissionnaire , département de la Sarthe..... 991,449 4
A la même, même département ............ 622,987 »
A celle: de Nomécourt, département de la Haute Marne................ 55,739 15
A celle d'Hémévillé, département de l'Oise.. 188,902 18
A celle du Plessis-Bouillancy, même département ............ 87,685 10
A celle de Béthisy-Saint-Pierre, même département ............ 20,160 2
A celle d'Avranches, département de la Manche................... 380,610 2
A celle de Grand-Camp, , département de l'Eure.. 56,376 11
A celle de Sainte-Marie-des-Champs, même département ............ 9,311 10
A celle de Saint-Au bi n-le-Guichard, mêtne département ............ 3,858 »
A celle de Port-Mort, département de l'Eure. 469 19
A celle du Plessis-Mayet, même département................. 60,698 »
A celle de Créton, même département____ 3,250 »
A celle de Montabot, département de la Manche .................. 5,500
A celle de la Neuville, département de l'Eure - 40,296 6
A celle d'Ardevon, département de la Manche
A celte d'Huynes, même département ....
A celle de Gorneville, département de l'Eure .
A celle de Louviers,, même département.... 1,083,991
A celle d'Evreux , même département....
A celle de la Croix-Saint-Leuffroy, même département ............
A celle de Pont-Aude-mer, même département
A celle d'Illiers-l'Evê-que, même département
A celle de Boisemont, même département....
A celle de Saint-Pierre-de-Bonafles, même département................23,564 9 6
« Le tout ainsi qu'il est plus au long détaillé dans les décrets dé vente et états d'estimations respectifs, annexés à la minute du procès-verbal de ce jour ».
, au nom du comité de commerce et d'agriculture. Messieurs, d'après le travail du ministre, votre comité de commerce et d'agriculture devait vous faire un rapport sur le placement tles bureaux à nos frontières; mais la dépense monte à 9 millions et demande qu'on vous présente un plan qui entoure toutes les parties. De plus, votre comité a été arrêté par l'incertitude des mesures que vous prendrez à l'égard d'Avignon et du Gomtat Venaissin.
Vous savez quel est l'état des choses dans ce pays; vos comités d'Avignon et diplomatique ont été chargés de vous faire un rapport y relatif.
Je demande que l'Assemblée ordonne la réunion du comité diplomatique à celui du commerce1 et d'agriculture, à l'effet de présenter, dans le plus court délai, un projet de décret relatif aux barrières et à la perception des droits à Avignon et dans le Gomtat Venaissin.
(Cette motion est décrétée.)
, au nom du comité de vérification des pouvoirs. Messieurs, le comité de vérification des pouvoirs vous propose de décréter queMM.Monneronet deMissy, nommés suppléants par l'assemblée coloniale de l'Ile de France, en place des députés qu'elle avait élus, et qui ont eu le malheur de périr avec le vaisseau VAmphitrite, sur la côte de Penmarch, sont admi3àl'Assemblée nationale en qualité de députés de l'Ile de France, pour représenter cette colonie.
(Cette motion est décrétée.)
Je dois prévenir l'Assemblée qu'alors que j'étais président il m'a été adressé parle,sieurHumbert une lettre par laquelle ir m'annonçait l'envoi de deux paquets qui ne me sont pas parvenus; je me trouve donc dans l'impossibilité de faire part à l'Assemblée de leur contenu.
Pour arrêter les progrès de l'agiotage, je demande que l'on décrète qu'il ne sera plus fabriqué des billets de 200 livres et qu'on se détermine à mettre en circulation des billets de 24 livres.
(Cette motion est renvoyée au comité des finances.)
, au nom du comité de Constitution. Lors de la division du royaume, un décret a prononcé l'union du faubourg de la Guillotière à la ville de Lyqn, Depuis deux siècles il existait entre ce faubourg et Lyon une guerre de chicane dont les tribunaux et le conseil ont retenti, et qui a causé le malheur de ses habitants.- Elle prenait sa source dans la position du faubourg de la Guillotière, qui était de la ci-devant province du Dauphiné, quoiqu'il ne fût séparé de Lyon que par le Rhône, et quoique la nature en eut fait une dépendance de cette ville; c'est un des plus grands bienfaits de la division du royaume, d'avoir éteint ces querelles, d'avoir détruit ces antipathies locales qui divisaient les Français entre eux et qui les rendaient respectivement ennemis et étrangers,
L'Assemblée nationale, en prononçant l'union de la Guillotière à Lyon, a renversé un mur de séparation que cinquante arrêts ou jugements avaient cimenté; mais elle a en même temps renvoyé à l'administration du Rhône-et-Loire l'examen des droits et des prétentions qui fondaient ou qui causaient la résistance des habitants de la Guillotière, et elle a déterminé qu'elle lui présenterait les conditions sousJesquefles s'effectuerait la réunion qu'elle avait prononcée.
Il s'agit aujourd'hui de confirmer cette délibération ; elle a paru sage à votre cqmité, et je pense qu'elle concilie tous les intérêts, et qu'elle réunira fraternellement des citoyens qu'un mau? vais régime a divisé jusqu'à ce jour. Eq çonsét-quence, nous vous proposons Je projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Conptitution sur l'arrêté du conseil général du département de Rhône-ret-Loire, pris en exécution du décret du 13 février 1790, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Le bourg de la Guillotière et le territoire en dépendant, demeurent unis à la ville de Lyon, conformément aux décrets des 6et 13 février 1790, et suivant les limites qui y sont déterminées; en conséquence, la municipalité dudit bourg est supprimée, pour ne former qu'une seule commune avec la ville de Lyon.
Art. 2.
« Les citoyens actifs, habitant le canton de la Guillotière, concourront aux élections à venir des officiers de la ville de Lyon.
Art. 3,
« Les dettes contractées par le ci-devant bourg de la Guillotière et par la ville de Lyon, ainsi que les fonds et revenus publics, léur serpnt communs.
Art. 4.
« Les impositions directes et indirectes seront également et proportionnellement supportées et réparties.
Art. 5.
« Il y aura la nuit et le jour une libre circulation et communication par le pont du Rhône, entre Lyon et le canton de la Guillotière, et leurs habitants jouiront des mêmes immunités.
Art. 6.
« Les bureaux des droits nationaux, ainsi que ceux d'octrois perçus au profit de la ville de
Lyon et de ses hôpitaux seront placés où le bien et la sûreté de la perception pourront l'exiger, de manière qu'il n'existe pas de ligne de séparation entre Lyon et la Guillotière.
Art. 7.
« Les pauvres du canton de la Guillotière seront reçus dans les hôpitaux et admis aux charités publiques, et ils participeront à tous les établissements de bienfaisance ou d'utilité commune, ainsi et de même que les habitants des autres cantons de la ville de Lyon.
Art. 8.
« Le canton de la Guillotière sera illuminé pendant la nuit comme les autres cantons de la ville.
Art. 9.
« Les lettres missives et paquets de la poste seront remis par la direction, sous les mêmes taxes générales que pour la ville de Lyon.
Art. 10.
« Les rues et voies publiques du canton de la Guillotière seront entretenues par la municipalité de Lyon, ainsi que les bâtiments et constructions qui sont de droit à la charge de la commune.
Art. 11.
« Les habitants de la Guillotière exerçant un art ou un métier depuis un an, continuerqnt de le faire sans trouble et sans être tenus de paver aucuns droits de maîtrise jusqu'à ce que l'Assemblée nationale ait statué sur les jurandes.
Art. 12,
« Le service des gardes nationales de la gendarmerie nationale et des troupes de ligne pour la sûreté publique aura lieu pour le canton delà Guillotière comme pour la ville de Lyon; en conséquence, les habitants de la Guillotière, inscrits ou à inscrire dans la garde nationale, seront incorporés à celle de Lyon, auront les mêmes commandant et état-rmajor, les mêmes régime et discipline.
Art. 13.
« Il sera procuré au canton de la Guillotière une église paroissiale convenable à sa population soit par construction, soit par l'acquisition de l'église des religieux de Picpus, et il sera fait, depuis le pont Morand, les travaux nécessaires pour garantir le territoire de la Guillotière des ravages du Rhône contre ses bords, d'après les plans et devis qui seront arrêtés.
« En conséquence, il sera assigné, sur les deniers communs, pour l'exécution desdits ouvrages, une somme équivalente au produit des perceptions qui seront faites au profit de la commune sur le canton de la Guillotière. ».
(Gè décret est adopté.)
,au nom du comité de Constitution. Le ci-devant marquisat de Chaussin formait une enclave de la ci-aevant province de Franche-Comté, dans le district de Lousans ; il en résul-f tait l'inconvénient pour les administrés, d'être ! éloignés du siégé de l'administration et de la justice.
L'Assemblée a accueilli leurs pétitions et a uni le ci-devant marquisat au district de Dôle, département du Jura, a la charge d'une compensation en faveur du district dé Lousans, proposée
comme avantageuse aux administrés par l'admis nistration de Saône-et-Loirp.
Le comité de Constitution vous présente la confirmation de cette compensation, ainsi que l'établissement de tribunaux de commerce dans les villes d'Agep, Tplle. Beauvaïs et Isigpy,
Voici son projet de décret ;
« L'Assemblée natiopale, après avoir enteptju le rapport de son comité de Constitution sur les arrêtés et pétitions den directoires des départements 4e Sa^ne-et-^nire, de Lpt-et-Qaronne, de la Corrèze et de'l'Qise, décrète ce qui suit «
« L^s communes deTuré.la Rarineuse, Brienne, Saint-Etienne et Sérigny sont distraites du district de CJialon et feront unies a celui de Lounans,
« Il sera établi des tribunaux de commerce dans les villes d'Agen, Tulle, Beauvais et Isigny.
« La juridiction consulaire actuellement existante à Beauvais continuera d'être en activité jusqu'à l'élection et l'installation des ppuveaux juges, qui seront faites dans la forme prescrite par la loi de l'organisation judiciaire.
(Ce décret est adopté.)
L'ordre du jour est un rapport du comité des finances sur la contribution patriotique des ci-devant bénéficiers ecclésiastiques,
,, rapporteur.
Messieurs, parmi les dispositions que vous avez prises pour le payement de la contribution patriotique, il eu est de relatives au$ ecclésiastir ques, que votre comité des finances a cru que vous ne pouviea vous dispenser d'expliquer et de modifier. Plusieurs ecclésiastiques, dont; le zèle et le patriotisme ne leur pnt pas permis de différer leurs déclarations, en exécution de votre décret du 6 octqbre 1789, spnt pressés par le3 receveurs de Ja contribution patriotique de payer le premier tiers de cette contribution sur le pied du revenu total dont ils ont joui eq 1789, lorsqu'on même temps, et sous leurs yeux, ceux qui se sont abtenus de faire leurs déclarations, ne sont taxés d'office, par les municipalités, que d'après le traitement que l'Assemblée leur a fait pour 1790, Ainsi, un abbé commendataire a fait ^a déclaration en 1789 ou 1790, lorsqu'il était titulaire d'une abbaye de 60,000 livres de rente; on lui demande aujourd'hui le tiers de sa contribution patriotique, d'après la déclaration par lui faite du quart de son revenu à 15,000 livres i p'est-àrdire que des 6,000 livres auxquelles son revenu a été réduit, il sera obligé d'en donner 5,000 pour chaque terme de sa con-? tributionj lorsqu'il est très possible qu'un autre ecclésiatique, jouissant ci?devant du môme bénéfice, mais taxé d'office, ne pave que 1,50Q livres pour la totalité de sa contribution déterminée sur son traitement actuel,
Aux réclamations déjà faites par plusieurs bénéficier, l'administration a répondu négativement par une lettre circulaire où l'on établit que la réduction survenue dans les revenus des titulaires, saisis à compter du lw janvier 1790, ne les autorisait à réduire sur le pied du revenu qui leur était laissé, que le deuxième et le troisième tiers de leur contribution patriotique; le premier tiers devant être payé sur le prix du revenu dont ils ont joui en 1789. Cette réponse est conforme à vos décrets; mais le comité des finances a cru pouvoir en demander une modification qu'exigent la justice et l'humanité; voici ses motifs ; Un bénéficier qui paye la contribution en I
1790, ne peut la payer qu'avec le revenu de cette même année, puisque les dépenses de chaque année ne peuvent être payées que sur le reveau de cette année. Presque tous les baux des bénéficiera commencent au mois de janvier, et les termes de payement pour l'année spnt à Saint-Jean et à Noël,
A l'époque des déclarations, yers la fin de 178$ et dans îep prpmieps mois de 1790, le retenu de 1789 se trouvait donc consommé, ou était censé l'être; le bénéficier ne peut donc payer que sur le revenu dent il jouit en 1790.
Il est d'ailleurs évidentquela plupart des titulaires ayant, avant l'époque de [eurs déclarations, dépensé leur revenu ^e 1789, comme ils en avaient le droit, op même l'ayant depuis, par nécessité, employé à acquitter leurs dettes, ou à des gratifications, parce qu'ils n'ont pas voulu renvoyer leurs anciens et nombreux serviteurs sans leur assurer leur subsistance, au moins pour le temps qui leur était nécessaire pour sé prpcqrer d'autres ressources, ne peuvent Payer sur leur revenu actuel, diminué peut-être des peuf dixièmes, |e quart du revenu qu'ils n'ont p|us„,
Û'pst d'après ces motifs que votre comité des finances m'a chargé de vous présenter le projet de décret gui vent ;
p L'Assemblée nationale déclare qu'elle modifie les dispositions antérieures de ses décrets des 6 octobre 1789 et 27 mars 1790, relativement à la contribution patriotique des ecclésiastiques, Ci-devant bénéficiera, et d'après le rapport de son comité des finance?, elle décrète ce qui suit:
« Art, 1er, ^a GQRtribution patriotique des
ecclésiastiques cwlevant bénéficiers sera réglée, tant pour le premier
tiers que pour jes deux autres, ep proportion du traitement établi pour
eux, à compter du 1?* jauyier 1790, sans préjudice de ce qu'ils doivent
contribuer, en raison des revenus qu'ils possèdent en patrimoine.
« Art, 2. Sur les deux derniers payements de la contribution patriotique, il sera tenu compte aux ecclésiastiques ci-devant bénéficiers, qui auront fait leurs déclarations en raison dés bénéfices dont ils jouissaient en 1789, des sommes qu'ils auront payées, ou qu'ils seraient dans le cas de payer en acquit du premier tiers de leur contribution patriotique, conformément à leurs déclarations.
« Art. 3. Cette disposition ne pourra néanmoins donner lieu à aucune restitution de deniers, dans le cas où la somme déjà payée par le3 ecclésiastiques, ci-devant bénéfieiers, excéderait le quart de leur traitement annuel, établi à compter du 1er janvier 1790. »
Je demande que les dons patriotiques faits par MM. les ecclésiastiques entrent en compensation de leur contribution patriotique.
Cette proposition est contraire à la libéralité de ceux qui ont fait des dons patriotiques dans la certitude où ils étaient qu'ils ne seraient point imputés sur leur contribution ; je combats la motion du préopinant.
Je trouve, Messieurs, dans le projet qui vous est soumis, une injustice révoltante. S'il était adopté, il en résulterait que ceux des ecclésiastiques qui, guidés par un motif très louable, se sont présentés les premiers pour faire leurs soumissions de contribution patriotique,
payeraient plus que ceux qui ont eu assez peu de patriotisme, et j'ai presque dit assez peu d'honneur, pour se refuser à donner le secours qu'exigeait la patrie en danger.
Il n'y a que deux moyens de décider la question qui nous est soumise : le premier serait de rendre aux bons prêtres, aux vertueux citoyens, le premier tiers de leur contribution, ce qu'ils auraient payé de plus que les prêtres dont le patriotisme est glacé. Mais ces bons citoyens ne voudraient pas souffrir cette restitution; elle souillerait leurs mains; leur généreux patriotisme la rend donc impraticable.
Le second moyen, et le seul qui nous reste donc, est de rendre la contribution uniforme; et c'est à quoi je conclus par la question préalable sur le projet du comité.
(de Saint-Jean-d' Angèly) appuie la question préalable.
Je crois, Messieurs, qu'un législateur sage né doit faire de lois que lorsqu'elles sont absolument nécessaires; si vous entrepreniez de décider tous les cas possibles, je maintiens que vous n'auriez jamais fini. Or, l'objet qui nous occupe actuellement, rie nous regarde précisément pas; il regarde les tribunaux ou les corps administratifs chargésde jugerlesdemandes en décharge d'impositions.
D'ailleurs, Messieurs, autant que je puis me le rappeler, il y a, dans le décret sur la contribution patriotique, un article qui remédie à tout. Il y est dit que ceux qui, dans l'intervalle accordé pour la contribution de trois années, éprouveront un changement dans leur fortune, dans leur état, pourront se faire décharger en partie et jusqu'à concurrence de la somme pour laquelle ils auront fait leur, soumission. Voilà donc, Messieurs, une règle générale.
Un citoyen aura souffert une détérioration, il présente requête au corps administratif ; mais qu'on fasse uue loi pour les ecclésiastiques, aussitôt vous verrez les anciens gouverneurs de province, les magistrats, les pensionnaires de toute espèce, venir vous demander chacun des lois. Je maintiens donc qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le projet de décret qui vous est proposé.
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le projet de décret du comité.)
Un membre propose d'ajouter aux articles 5 et 6 du décret rendu hier sur le costume et le traitement des juges au tribunal de cassation les dispositions suivantes :
« Le greffier aura un manteau semblable à celui des juges:
« Là médaille des commissaires du roi portera ces mots : La loi et le roi. »
(Ces additions sont décrétées.)
En conséquence, les articles 5 et 6 du décret sont rédigés en ces termes :
Art. 5. « Le costume des commissaires du roi sera le même que celui des juges, à la différence que les commissaires du roi auront un chapeau relevé avec une gance et un bouton d'or, et que sur la médaille qu'jls porteront seront écrits ces mots : La loi et le roi. »
Art. 6. « Les greffiers auront un chapeau rond, relevé sur le devant, sans panache, et un manteau pareil à celui des juges. »
Je propose d'ajouter au décret
rendu hier sur les requêtes civiles, la disposition additionnelle suivante :
« Le temps qui se sera écoulé depuis le 1er février 1790 jusqu'à l'expiration de la quinzaine qui suivra la publication du présent décret, ne sera point compté dans les délais fixés par l'ordonnance, pour se pourvoir en requête civile.
(Cet article additionnel est décrété.)
(ci-devant de Hanthou), au nom des comités militaire, diplomatique, de Constitution, des rapports et des recherches, donne lecture du projet de décret relatif aux troubles d'Alsace, dont la rédaction a été renvoyée au comité dans la séance d'hier; il est ainsi conçu:
« L'Assemblée nationale, après avoir ouï ses comités diplomatique et militaire, dè Constitution, des rapports et des recherches réunis, sur les événements qui ont eu lieu dans les départements du Haut et du Bas-Rhin, sur la conduite des administrateurs de ce dernier déparlement, et la dénonciation faite par ces administrateurs contre les commissaires du roi envoyés en suite du décret du 20 janvier dernier ;
« Déclare qu'elle est satisfaite du zèle et de la conduite des commissaires du roi; qu'ils ont pu et dû, pour l'accomplissement de la mission qui leur est confiée, correspondre sans intermédiaires avec les corps administratifs, et tous autres officiers publics exerçant leurs fonctions dans les départements du Haut et du Bas-Rhin, et prendre généralement toutes les mesures qu'ont exigées le maintien de l'ordre public et l'exécution des décrets de l'Assemblée nationale.
« En conséquence, l'Assemblée nationale décrète :
.,« 1° Que les administrateurs composant le directoire du département du Bas-Rhin, à l'exception du sieur Kuln, exerçant depuis plusieurs mois les fonctions de commissaire à Schelestadt, seront, ainsi que le procureur général syndic de ce département, suspendus provisoirement de leurs fonctions, pour, en suite des informations qui seront prises et du compte qui en sera rendu, être décrété par l'Assemblée nationale, ce qu'elle jugera convenable;
« 2° Que pour pourvoir à l'administration de ce département, les commissaires envoyés par le roi seront autorisés à nommer un nombre suffisant de personnes qui exerceront provisoirement les fonctions des administrateurs du directoire et de procureur général syndic, dont la suspension est ordonnée par l'article précédent ; lesquelles personnes seront choisies parmi les membres qui composent les corps administratifs de département et de districts du Haut-Rhin ;
« 3° Qu'il sera procédé incessamment à la nomination des évêques des départements du Haut et du Bas-Rhin, et que le procureur général syndic de celui du Haut-Rhin, et celui qui, dans le département du Bas-Rhin, en exercera la fonction, convoqueront, à cet effet, les électeurs de ces deux départements ;
« 4° Enfin, que, conformément au décret du 12 juin 1790, la compagnie des chasseurs existante en la ville de Colmar est dissoute.
L'Assemblée nationale approuve la conduite du district et de la municipalité de Strasbourg, ainsi que celle des officiers municipaux de Colmar; déclare que Je sieur Stokmeyer-, ceux des gardes nationales et ceux des citoyens de Colmar, qui ont agi pour maintenir l'ordre public et le respect dû aux commissaires du roi, ont honorablement rempli leur devoir, et que le
Président est chargé de leur écrire, à cet égard, une lettre de satisfaction en la personne du sieur Stokmeyer.
« L'Assemblée nationale ordonne en outre que le ministre de la justice sera tenu de lui rendre compte, de jour à autre, des progrès de l'instruction des procédures commencées, soit à Golmar, soit dans la ville de Strasbourg, soit devant les autres tribunaux des départements du Haut et du Bas-Rhin, relativement aux troubles qui y ont eu lieu.
« L'Assemblée nationale charge son Président de se retirer par devers le roi, pour lui présenter le présent décret, et le prier de presser l'exécution des mesures décrétées le 26 janvier, relativement à la sûreté des frontières, et d'envoyer dans les départements du Haut et du-Bas-Rhin une force publique suffisante. »
(Cette rédaction est décrétée.)
, au nom du comité des finances. Messieurs, le département du Pas-de-Calais, représentant l'ancienne province d'Artois, payait une partie des contributions publiques sur ies droits qu'il percevait sur les eaux-de-vie; ces ortrois ont déjà donné lieu à deux de vos décrets.
Le dernier de ces décrets, du 27 janvier dernier, portait que, par ies administrateurs, il serait procédé à une taxe d'augmentation telle qu'ils la jugeraient convenable. Il est arrivé que le prix des eaux-de-vie est porté à un taux si excessif, qu'elles sont inaccessibles au peuple à qui elles sont de première nécessité.
, rapporteur, donne lecture d'un projet de décret.
J'ai l'honneur de vous représenter que voilà les intérêts des anciens fermiers entièrement compromis; on détruit l'impôt qui était leur gage et on ne le remplace par aucun. Il est dû par les fermiers des sommes considérables dont les provinces sont garantes.
Je demande qu'avant de statuer sur ce décret on assure le revenu des villes et au Trésor public la rentrée de quelques centièmes de plus; car sans cela, Messieurs, étant au moment de prononcèr sur les dettes des provinces et vraisemblablement l'Assemblée étant dans l'intention de s'en charger, c'est encore une addition à nos charges. Je demande en outre qu'avant d'admettre ce décret on vous présente les moyens de remplacement.
J'observe à l'Assemblée que les objections faites par M. de Folleville ont été discutees pendant plusieurs séances au comité des finances avec les députés du Pas-de-Calais et des députés extraordinaires envoyés par cette province; qu'on n'a pas trouvé la moindre solidité à ce3 objections, le moindre embarras pour faire face aux engagements que la province d'Artois avait contractés avec le Trésor public, parce qu'il est notoire que tous les ans la province d'Artois avait en réserve daqfi son Trésor des sommes d'économie qui excédaient tous les ans ce qu'elle devait au Trésor public et qu'elle se trouve déchargée des dépenses pour le militaire.
Pourquoi doit-elle?
Les régisseurs convien-
nent eux-mêmes qu'il leur est impossible de percevoir des droits contre la rigueur desquels tous les citoyens réclament. Ces raisons ont déterminé le comité des finances et les députés de ce pays à se réunir pour demander la suppression de cet impôt.
(de Saint-Jean-d'Angély). Je suis absolument contraire, en principe, au dernier article : il prétend que chaque commune est autorisée à proposer le mode d'impôt qui lui convient; et moi je nie absolument cela. En effet, suivant un pareil système, vous seriez obligés d'avoir autant de modes d'imposition qu'il y aurait de municipalités, ce qui rendrait limpôt impossible à percevoir. En un mot, les municipalités ont des représentants, elles ne peuvent et ne doiventdélibérer que sur la quotité de leurs besoins.
Je demande que mon amendement soit mis aux voix.
Déjà on nous a lu un rapport sur le droit d'entrée des villes ; il me semble que la proposition actuelle est comprise dans cette matière. Ainsi j'en demande l'ajournement jusqu'à ce qu'on ait statué sur le rapport.
Il ne s'agit point ici d'approfondir la matière très étendue, et peut-êire trop peu connue, des pouvoirs des municipalités ; il s'agit uniquement de conserver à des villes, qui en jouissent en vertu de titres authentiques, un octroi sur les eaux-de-vie et de ne pas confondre la destruction de cet octroi municipal avec l'octroi qui s'étendait sur toute la province d'Artois, et dont nous sollicitons la suppression. Je demande donc que la question soit réduite au fait et que l'on mette aux voix le projet de décret.
(L'Assemblée, consultée, adopte l'amendement de M. Regnaud (de Saint-Jean-dAngély).
Le projet de décret est adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, considérant que, par son décret du 27 janvier 1791, elle s'en était rapportée à la prudence et à la sagesse des administrateurs du directoire du département du Pas-de-Calais, représentant l'ancienne province d'Artois, sur l'augmentation qu'il convenait de faire aux droits d'octrois perçus sur les eaux-de-vie, dans ledit département, pour l'acquit des sommes dues au Trésor public ; que, d'après ies représentations desdits administrateurs, il y aurait des inconvénients sans nombre à faire une augmentation quelconque, vu le prix excessif des eaux-de-vie et la prochaine organisation des impôts de l'année 1791, décrète:
« Que la vente et le commerce des eaux-de-vie demeureront libres dans ledit département, sauf le payement des droits qui pourraient être établis au profit des villes, par la nouvelle organisation, le tout, néanmoins, sans rien innover aux engagements contractés par la ci-devant province d'Artois, d'acquitter envers le Trésor public les sommes qui ont dû y être versées en 1789, 1790 et années antérieures.
« Déclare que le bail de la régie desdits droits et octrois demeurera résilié à compter du 20 du présent mois ; que l'indemnité due aux fermiers sera réglée, tant en exécution du présent décret que de ceux des 16 novembre et 27 janvier derniers, pour y être ensuite définitivement statué par l'Assemblée nationale.
« Ët comme leâ reVëtibs dë la plupart dés vîllës dtidit dëpartenièht êtàlëtit établis SUr deê tiërcep-tlons additionnelles aux dédits d'octrois, il y sera suppléé, s'il est nécessaire, par de nouveaux droits au profit deS communes, stir lës vins, bières, cidres et autres boissons, et cë, jusqu'à Ce qu'il ait été autrement pourvu aux revenus des villes par là nouvelle organisation des impôts. »
L'ordre dii jour est la suite dè la discussion du projet de décret sur le tabac.
Ci"A-devant Delley d*Àgier). Messieurs, avant de commencer la discussion sur lë tabàc, une question préliminaire se présenté : iPouvons:nous, sans risquer de compromettre et d'affaiblir la majesté du Gorps législatif, porter aujourd'hui un décret sur la culture du tabac? (Murmures.)
Messieurs, j'observë que là majesté de l'Assemblée sera plutôt blessée par le bruit tyue par la discussion sur le tabao et j'observe à M. de Delley qu'il y a un décret qui fixe l'ordre du jour;
(ci-devant Delley d'Agier). L'Assemblée ne veut SÙfëtiïèMt pâS àèfirédller les bruits déjà répâhdUS et je demande à êtrë entendu.
Est-il permis dé demander la révpdàtiofi d'Un déCrët porté hier tffci met à l'ordre du jour pour Cë matin la diSCUSsion sur le tabac ?
Je dëmàtidë à M; de Delle$, si c'estUn àmeflaèrnentqu un ajournement qtt'il VèUt proposer ; dans ce dërûier 6aij jë dënrahde là question préalable;
(ci-devant Delley d'Agier). Jamais oh n'a exigé qu'un membre donnât sa conciUsioti avant son opinion.
Voix nombreuses : L'ordre du jour I
consulte ^Assemblée sur l'ordrë du jour.
(L'épreuve est douteuse.)
Dans le doute, la présomption est pour l'opinant.
(ci-devant Delley d'Agier). Jetez les yeux, Messieurs, sur la marche qui paraîtrait avoir été suivie dans cëitê affaire, et jugez si elle ne prête pas aux plus malignes interprétations.
Si je considère qu'hier M. le rapporteur des troubles d'Alsace sembla nous indiquer qUe çe décret inflderait sur ces troubles ; si je réfléchis à la maniéie dont on demanda sur-le-champ que cette matière fût mise à l'ordre du jour ; je m'effraye des conséquences d'une décision prématurée. Vos comités des finances et d'impositions nous assurent qu'on pourra se passer dp l'impôt du tabac. Cet espoir est consolant/mais il faut qu'il se réalise. Il est donc néc ssaire d'qntenure votre comité de l'imposition sur le système général des contributions qu'il vous promet depuis si longtemps. Le respect que vous devez avoir pour vos décrets vous en fait encore uuè loi. Vous avez décrété à différentes reprises que vous
ne Vous oçctipëriez dù tabac qU'al^rés aVbit1 ëh-tëfiuU lë plàh général des impositions; voUSavëz décrété que le tabac serait le dernier objet ddht vous votis Occuperiez : ces résolutions étaient dictées par la prddebce; i'tise voUs y rappeler.
Vendredi 4 février, la question était â l'ordre dtl jodr; le comité dë l'imposition ëh demanda l'ajourheiiient pdur, disait-il, avoir lë ténias dë vous présenter son plan général: nous devons ddhc àttenurë ehcore ce plan ; nousledevods d'autant plus que rien ne périclite et que, malgré l'entière liberté tolëréé, le tabac continué d'dlimën-tër le TrêSor public bëadcdup plus fr'uëtheuse-ffiënt duë tous lès autres impôts. La prudënçé eiige dodc hnë sàge retënué ; mâië ce que la prbdehce fous dicië, votre gloirë ët le Saltlt dë là Constitution, dui en ëst inséflar'àblë, vbUS le prescrivent plus impérieusement ëiicore. Ld choSë publique n'est-ellë pas ën dâhgèr, si Ses eflnéniis peuvent persuader que vous n'avez rendu qu'un aêbfet dë dircdhôtaùcë? Lë pouvoir qtië ridUs avoùS jué(|u'ici dë faire lë biétt est là suite dë Votre courage et dë votre fermeté. Lé serment du JeU de paume vous a donné votre force, eh Vous ëdnciliant les hommages de l'dhivers. Ainsi les Ro'itiaitls durent l'empire du monde....
Plusieurê Membres ; Il ne s'agit pas de Romains !
Il n'est pas défendu de pariei* des Romains dans une motion d'drdrë.
Nous voulons qu'on puisse parler dés Romains dans l'Assemblêé nationale ; nous aimons à nous rappeler leur courage.
(ci-devant Delley «i'Âgier). Ainsi lës Romains durent lVmpirë du monde au refus de la paix, lorsqu'Anuibàl vint aux portes de Rome leur en faire la loi.
Nos preuves sont faites,. Messieurs; il n'est aucun de nous qui ne brûlât d'imiter ces sénateurs après le sac du Capitole^. Assis dans leurs chaises cUrules, ils y attendaient et recevaient là mort ; mais ieUrs bourreaux në purent en arracher dés Signes de faiblesse et leur grand caractère en imposa à lëurs vainqueurs.
Jë prie l'Opinant de se rehfermër dans là question d'ordre pour laquelle il a demandé là parole.
(ci-devant Delley d'Agier.) Je vais m'y renfermer. Là raison, Messieurs, voS principes, vôtre Constitution peuvent décréter la liberté de la culture du tabac ; mais nous ue pouvons, sans compromettre, nofre gloire et la. liberté, porter ce décret pendant [es troublés d'Aisace ; l honneur même de ées, départements s y trouve intéressé. Lës députés de la ci-devant province d Alsace, pénétrés de tout de cmils se doivent à eux-mêmes et à la France entière, seront lës premiers â réclamer I'èxécu-tion dè vos décrets antérieurs sur, l'ajournement de la discussion du tabac après les décrets sur touteS les autres. parties de î'imDÔt. J'en fais moi-même la motion, ët je prie M. le Président de la mettre aux voix.
S'il était question dans l'objet qui nous occupe de , réclamer pour l'Alsace la continuation d'itn privilège exclusif, j'appuie-
rais moi-même toutes les réflexions du préopinant.
Mais de quoi s'agit-il? Il s'agit, non pas d'accorder à l'Alsace un privilège ou la continuation d'un privilège, mais de réclamer, pour tout le royaume et pour l'Alsace qui y est comprise, l'exercice d'un des droits imprescriptibles de l'homme. (Interruptions.)
Malgré les interruptions, je dis que la conservation d'un privilège répugne à la Constitution que vous avez donnée à la France. Je dis que d'ailleurs le préopinant ne s'est pas aperçu sans doute qu'il manquait de considération pour l'Assemblée en indiquant que son opinion pour la prohibition ou pour la liberté serait influencée par les circonstances* (Murmures à gauche.)
Plusieurs membres à droite ; C'est vrai 1
Je dis que, dans quelque circonstance que l'Assemblée nationale délibère, elle jouit de la plus parfaite liberté, et qu'elle prononcera ce que la raison et la justice lui dictera. J'ajoute, M. le Président, qu'il n'est pas question de dire que l'Alsace est révoltée pour la culture du tabac, et qu'il ne faut pas la lui accorder. Plusieurs fois on a demandé des ajournements dans l'éspérànce de forcer la culture en faveur de la prohibition. Mais maintenant de quoi s'agit-il 1 De savoir si on jouira, oui ou non, du droit indéfini de liberté pour toute culture. Nous demandons qu'ën vertu du décret d hier on veuille bien discuter définitivement cette matière.
Si quelque Chose pouvait dégrader vos décrets, Ce serait le discours de M. de Delley qui tend à faire entendre que vôtre délibération peut être influencée par une partie du royaume que l'on dit eu révolte. Il faut le dire, il n'y a en révolte dans la ci-devant province d'Alsace, que ceux qui veulent la prohibition de la culture du tabac, je veux dire les ecclésiastiques et leurs adhérents. (Applaudissements à gauche.) La question n'est nullement relative a l'Alsace particulièrement. Fût-elle effectivement en révolte, votre comité des contributions publiques n'en changerait pas pour cela d'opinion. Si la prohibition doit tomber sous l'effort du principe, qu'on ne tienne pas supposer qu'elle n'a été anéantie que par des considérations particulières. Je demande que, pour repousser cette Idée injurieuse, on passe à l'ordre du jour et que l'on discute la question. (Applaudissements.)
Au moment où l'Assemblée allait passer à la discussion sur le tabac* M. de Delley, sous le nom de motion d'ordre, a demandé l'ajournement de la 'discussion. Maintenant on réclame l'ordre du jour : je vais mettre aux voix celle des deux propositions pour laquelle on réclamera la priorité»
Plusieurs membres demandent la priorité pour l'ordre du jour.
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'elle passe à l'ordre du jour;)
, au nom du Comité d'imposition. Messieurs, pour terminer enfin la discussion qui s'est élevée depuis six mois relativement au tabac, il est nécessaire de marquer avec précision les points sur lesquels tout le monde parait s'accorder, et ceux sur lesquels il reste du dissentiment, et qui ont encore besoin d'être éclaircis.
Une des causes de l'incertitude qui est testée dans un grand nombre d'esprits -, c'est qu'on a, jusqu'à présent, confondu dans la discussion l'impôt avec ses modes de perception.
Plusieurs personnes pensent qu'il serait désirable de continuer à retirer de la consommation du tabac un revenu de 32 millions pour le Trésor public; le comité, partage cette opinion.
Ce n'est pas qu'il né trouvé une grande injustice à grever d'une charge inégale les citoyens qui Consomment du tabac et Ceux qui n'en consomment pas; à soumettre lés premiers à une sorte de peine péCUniaire, comme si la société avait le droit de défendre ou de gêner certaines jouissances plutôt que d'autres, quand ëllés sont toutes licites de leur nature; dé mettre àu-dessus de la portée du pauvre le seul plàiëir qde la modicité de sës. ressources lui permette; delUifaire acquitter, sous un vain déguisement) une taxe égale à celle du riche poUr qui le tabac n'est pas même compté entre, les innombrables jouissances que Chaque jour lui apporte, que chaque moment diversifie; enfin d'inviter le misérable à la cdntrebaode par l'appât du gain et ensuite dé lui itifliger des peines pour des délits qui sdnt l'oUVrage dë la loi même, et dont la richesse est préservée comme de bien d'autres maux.
Mais, d'un autre côté, le comité reconnaît à la taxe du tabac des avantages, qui, Comme l'a dit M. de Mirabeau, la rendent un des inéilleUfs des mauvais impôts.
Elles'aequitteinsensiblementjourpàrjour, heure par heure.
Elle n'est exorbitante jioùr personne.
Elle est lé prix d'une sensation de plaisir.
La perception peut en être assurée sans frais extraordinaire, au moyen des gardeë établis pour la perception des droits de traite.
Elle n'a pas, comme la gabelle ou but autre impôt sur des consommations de première héces-sité, le double inconvénient de renchérir la main-d'œuvre et de grever les familles en raison du nombre des enfants qui eh font partie.
Elle n'a pas, comme le droit d'enregiëtrethëtit, le défaut d'attaquer des capitaux, et de dérober à l'agriculture, à chaque mutàtidn des avances utiles;
En un mot, il est impossible d'en trôuter de plus douce tant que la terre, ci-devant appauvrie par la féodalité, ne sera pas fécondée par la liberté et par une partie des capitaux innombrables employés maintenant dans l'agiotage des effets publics ou dans l'usure particulière; et enfin, tant que les bénéfices de l'industrie, concentrés par des privilèges exclusifs entre quelques individus et quelques Corporations, seront disproportionnés avec la nature et la mesure de trayail dont ils sdnt le prix.
Voilà, Messieurs, ce que le comité pensé; avec uhe grande partie de l'Assemblée, sur la taxe du tabac considérée en elle-même. ËcartOclS doné désormais de la délibération l'éloge où la censuré de l'impôt, séparé de ses aecéssoires, c'est-à-dirë de ses moyens de perception.
Ce n'est que dans l'examen dé ces accessoires que se rencontrent les questions dont nous devons nous occuper.
Quels sont donc des accessoires ? Quelles sont les questions auxquelles ils donnent lieU 1
Hous séparerons les! morvefns.de perception en dëtix classés : les moyens immédiats, les moyens secondaires et médiats.
L'impôt du tabac se lève sous le régime actuel par quatre moyens immédiats, savoir :
1° Un double privilège exclusif, celui de la fabrication, celui du débit;
2° La prohibition de la culture du tabac dans le royaume ;
3° La prohibition du tabac étranger fabriqué ;
4° La traite exclusive du tabac étranger en feuilles.
Les moyens médiats et secondaires d'assurer la perception, sont;
1° La police du fisc pour prévenir les fraudes ;
2° Les lois du fisc pour les punir ;
3° Les tribunaux extraordinaires institués pour appliquer ces lois.
Tout le monde s'accorde à proscrire les moyens de la dernière classe comme contraires aux droits naturels des hommes en société.
La police du fisc consistait essentiellement en deux choses : l'usage des visites dans les domiciles et celui des visites au passage d'une province dans une autre. Nui ne souffrirait, à l'avenir, les visites domiciliaires quand même la loi les ordonnerait; les citoyens qui ont conquis la liberté ne sauraient s'y soumettre, et dans ce cas, la loi serait coupable et non la résistance.
Je demande que M. le rapporteur soit rappelé à l'ordre. La loi n'est jamais coupable et le législateur ne peut pas considérer comme légitime la résistance à la loi.
Il ne s'agit pas ici d'une injure faite au Corps législatif, d'un écart manifeste de langage qui puisse motiver un rappel à l'ordre. Il s'agit simplement d'une maxime incidente bien ou mal rédigée, d'une expression plus ou moins inconsidérée, mais dont à coup sûr l'intention est pure et ne peut pas être incriminée. (.Applaudissements
(L'Assemblée décrète qu elle passe à l'ordre du jour).
, rapporteur. Je disais, Messieurs, que les moyens de la dernière classe ne pouvaient plus être employés aujourd'hui et que les visites domiciliaires étaient devenues impossibles : la loi ne peut les ordonner car elles offensent la liberté. J'ajoute que les visites au passage d'une province dans l'autre ne peuvent plus avoir lieu depuis que les barrières des traites sont reculées aux frontières uu royaume.
Personne ne pense que les lois pénales du fisc puissent prononcer la mort ou même les galères pour fraude d'une taxe. Le seul principe pénal qui soit juste en finance, c'est que le travail du fraudeur soit appliqué au profit du fisc qu'il a voulu frauder.
Enfin, il n'est sûrement pas un seul membre de cette Assemblée, qui jette un regard de regret ou même de pitié sur les ruines de ces tribunaux impurs qu'entretenaient des compagnies de finances et que le mépris public avait dégradés, avant même que la liberté les eût frappés.
Ainsi, Messieurs, écartons encore de la délibération la question de savoir si les moyens secondaires de l'ancienne perception subsisteront ou non : tout le monde est d'avis de les proscrire.
L'examen des moyens immédiats de perception est donc le seul objet qui puisse maintenant vous occuper. Les empioiera-t-on, les rejettera-on ? Voilà la matière de la délibération, elle présente deux questions :
1° La nation a-t-elle intérêt à les employer?
2° La nation a-t-elle le droit de les employer?
Nous allons examiner séparément ces deux questions.
Première question.
La nation a-t-elle le droit d'employer le régime prohibitif et exclusif?
Nous savons, Messieurs, qu'aux yeux de bien des gens, cette question n'est pas même propo-sable, tant l'affirmative est évidente. Voici en substance les raisonnements sur lesquels ils se fondent.
Dès qu'une nation, disent-ils, peut voter des contributions par ses représentants et à la pluralité des suffrages, elle peut de même voter le mode de ces contributions; elle peut donc, si elle le juge à propos, choisir pour mode de contribution l'abdication du droit de cultiver, de fabriquer et d« débiter une certaine plante, et attribuer exclusivement ces facultés à une régie nationale qui les exercera pour le profit du Trésor public ; il n'y a pas plus d'irrégularité à sacrifier un moyen particulier de se former un revenu ou d'accroître celui que l'on a, qu'à sacrifier annuellement une portion de son revenu. Voilà, Messieurs, assez exactement la doctrine de nos adversaires.
Daignez donner un moment d'attention à nos réponses.
D'abord nous distinguons le régime exclusif en ce qui concerne la fabrication et le débit du tabac, et en ce qui concerne la culture de cette plante, et nous divisons la question.
La nation a-t-elle le droit d'établir, au profit du Trésor public, un privilège exclusif de fabrication et de débit?
Je commence par établir un principe qui servira à résoudre aussi la question relative à la culture.
Ce principe est simple; quelque mode d'impôt qu'adopte une nation, soit qu'elle fournisse le Trésor de l'Etat par des contributions foncières ou par des contributions indirectes, ou par des privilèges exclusifs, elle est dans l'obligation de répartir les charges publiques proportionnellement aux facultés des citoyens. Autrement elle attaquerait les fondements de la société et violerait les principes et le but de l'association politique, puisqu'elle donnerait atteinte à la propriété. Ce sont maintenant des vérités triviales que la contribution proportionnelle n'est qu'une dépense conservatrice de la propriété; mais que l'impôt arbitraire et disproportionné en est la spoliation.
Vous avez consacré ces vérités dans la déclaration des droits; d'abord, en disant que l'impôt serait payé proportionnellement aux facultés; secondement, en disant que nul ne pourrait être privé de sa propriété, même pour 1 utilité- commune, sans une indemnité préalable, ce qui est déclarer, en d'autres mots, que la loi ne peut pas imposer au citoyen de contribuer indéfiniment à l'utilité publique, mais qu'elle peut seulement l'y assujettir en commun avec tous les autres citoyens et proportionnellement aux facultés de chacun.
Je viens à l'application de ce principe.
Il y a plusieurs cas à distinguer dans la question; ou il s'agit d'établir un privilège exclusif pour une fabrication ou pour un négoce inconnu dans le pays; ou il s'agit de le proroger dans un pays où il existait depuis longtemps ; ou enfin il s'agit de l'établir dans un pays où il
n'existait pas et où la fabrication et le négoce, qui en sont l'objet, étaient pratiqués.
Dans les deux premiers cas, il n'est pas douteux que la nation n'ait le droit d'établir l'exclusif au profit de son Trésor; puisqu'elle ne fait que priver les particuliers d'une faculté dont les avantages étaient proportionnels à la fortune et au talent que chacun d'eux pouvait consacrer à l'exercer.
Mais dans le troisième, c'est-à-dire quand il s'agit d'un pays exempt de l'exclusif, nous n'hésitons pas à dire que la nation n'a pas le droit de l'établir même a son profit, sans donner une indemnité préalable aux particuliers qui avaient consacré leurs capitaux et leur industrie à des entreprises de l'espèce de celle qu'elle voudrait mettre en exclusif. Autrement elle commettrait un attentat sur la propriété de ces capitaux et sur l'industrie même qu'on peut aussi regarder dans certaines professions comme un capital placé en mieux-value sur les particuliers qui la possèdent.
Dans le centre du royaume, l'exclusif de la fabrication du tabac est généralement établi. Les principes ne s'opposeraient donc pas à sa conservation. Mais, dans les départements belges et du Rhin, la fabrication et le débit ont toujours été libres; un grand nombre d'entreprises en ce genre y sont florissantes ; à leur égard donc la naiion violerait la propriété, si elle y établissait l'exclusif, sans donner une indemnité préalable à tous les entrepreneurs de fabriques et de négoce de tabac, et à tous les ouvriers qui se sont voués au genre d'industrie qu'exigent le débit et la fabrication de cette plante.
Maintenant j'examine si la nation a le droit d'établir la culture exclusive. ® Le principe que j'ai invoqué plus haut décide encore la question.
Quand on met en privilège exclusif une culture quelconque, le sacrifice qu'on impose aux propriétaires de terre est absolument disproportionné avec leurs facultés; et la raison en est sensible, c'est que tous les territoires ne sont pas également propres à fournir une même production. Qu'un décret national mette en France la culture de la vigne en privilège exclusif, les propriétaires de vignes de Champagne seront inévitablement ruinés par l'impôt, tandis que les propriétaires de terre en Brie n'en supporteront rien. Ce décret aura donc attenté à la propriété du Champenois, qui cependant ne s'est mis en état de société avec le reste de la France que pour conserver sa propriété et sa liberté ; le Corps législatif aura donc blessé les droits de l'homme, sans le respect desquels les lois ne sont pas des lois, mais des crimes, les sociétés ne sont pas des sociétés, mais des hordes ennemies les unes des autres, et dans l'état sauvage de pure nature. (.Applaudissements.)
Or, Messieurs, ce qui serait évident pour la culture de la vigne, attribuée à un privilège exclusif, ne le serait pas jfioins pour la culture exclusive du tabac. Il y af dans un grand Etat comme la France, des cantons privilégiés par la nature pour la production du tabac; tandis que la presque universalité du territoire n'en peut donner que de mauvais et à grands frais. La culture exclusive serait donc l'anéantissement de la propriété de quelques individus, tandis qu'elle ne toucherait pas le plus grand nombre ; elle ferait donc payer par quelques-uns la charge qui doit être commune à tous, proportiounelJe entre tous;
elle ne peut donc pas être votée même par la pluralité des représentants de la nation.
Si, suivant la déclaration des droits, nul ne peut être privé de sa propriété sans avoir été préalablement indemnise; si l'Etat,quand il prend mon champ pour un chemin public, pour un canal, pour une digue, est obligé de mele payer; comment concevoir que l'impôt puisse, non me prendre mon champ, mais m'en dérober la valeur, ou la réduire de trois quarts? Est-il permis de faire, sous une forme et sous une dénomination, ce que l'on regarde comme impossible de faire sous une autre?
Mais, Messieurs, peu nous importent les réponses que l'on voudrait balbutier sur ces questions; peu nous importe leur solution, car nous n'avons pas à combattre la culture exclusive; on ne nous propose pas de mettre la plantation du tabac en privilège exclusif. Ce qu'on veut est bien pire ; c'est la prohibition absolue de la culture en France : et c'est une subtilité que nous avons à relever dans l'argumentation de nos adversaires, que d'avoir confondu la prohibition de culture avec le privilège exclusif de fabrication et de débit, et de n'avoir parlé du régime de la ferme du tabac, que comme d'un régime purement exclusif.
Nous disons que la prohibition de culture est pire que la culture exclusive ; et en effet, Messieurs, du moins la culture exclusive placerait-elle quelque part dans le royaume l'avantage d'une exploitation utile, au moins n'enlèverait-elle pas à toutes les terres l'avantage de leur propriété particulière pour produire du tabac, au moins ne diminuerait-elle pas le travail national de tout celui qu'emploierait cette culture, au moins ne ferait-elle pas perdre, à deux ou trois cent mille bras, un moyen de subsistance. Au lieu que la prohibition produit tous ces odieux effets ; elle donne de plus à un peuple étranger ce qu'elle fait perdre à la nation. Ainsi cette manière d'assurer la perception de l'impôt du tabac, consiste non seulement à commettre d'énormes injustices particulières, mais eocore à diminuer la richesse nationale pour obtenir une partie du reste, et à stériliser pour recueillir.
On nous fera ici une objection. On nous dira que la prohibition ou le privilège exclusif de la culture ue sont point des atteintes à la propriété des terrains propres au tabac, tels que le pays de Clérac et d'autres parties méridionales du royaume; que les possesseurs actuels de ces terrains ne les ont payés qu'en raison de la valeur qu'ils avaient, relativement à toutes les cultures libres, et sans égard à leur propriété particulière pour la production du tabac dont la culture était défendue ; qu'ainsi, en maintenant le régime prohibitif, on n'ôte rien aux propriétaires de ces terrains.
Il se présente plusieurs réponses à cette objection .
La première est, qu'outre les possesseurs actuels qui ont acquis les terrains dont il s'agit, il y en a un très grand nombre qui les ont hérités; que s'il est contestable que la nation doive aujourd'hui aux premiers la réparation d'un dommage qui est tombé autrefois sur leurs vendeurs, il ne l'est pas qu'elle ne doive faire cesser dans la possession des enfants le préjudice annuel porté à la possession des pères.
Notre seconde réponse est que le prix des acquisitions n'est nullement la mesure de l'exercice du droit de propriété. La société n'a point à s'informer des transactions privées pour enga-
Faillir les effets. Et cjuand le prix des acquisitions s'est réglé sur la violation des droits de la propriété, il est absurde de donner pour règle et mesure de ces droits le prix des acquisitions; car c'est vouloir légitimer le vice de la loi par les effets même qu'il a produits.
S'il était juste de régler l'exercice du droit de propriété sur lé prix des acquisitions, vous seriez fort injustes, Messieurs, non seulement d'avoir supprimé les dîmes, mais encore de mettre dans la répartition des contributions foncières cette égalité proportionnelle si souvent réclamée : oui, dans le système que nous combattons, vous seriez injustes, puisque les terres nobles, les grandes propriétés ayant été ci-dévant moins imposées que les petites, plusieurs terres ayant toujours été exemptes ou peu chargées de dîmes, tandis que d'autres l'étaient excessivement, toutes ont été achetées proportionnellement à leurs charges.
Ainsi, Messieurs, nous pou vons: regarder comme une vérité incontestable que la société n'a pas le droit de prohiber une culture sans donner un dédommagement préalable aux propriétaires des terres douées d'une qualité particulière qui les rend plus propres que d'autres à cette culture.
Cette vérité une fois reconnue, il s'ensuit que la nation française ne peut absolument prohiber la culture du tabac: car la condition qui rendrait cette prohibition légitime, celle de l'indemnité préalable est impossible à remplir. En effet, on ne sait pas quelles sont en -France les terres douées de la propriété de produire d'excellent tabac; par cette raison on ne sait pas précisément à qui la prohibition de culture a porté préjudice, à qui elle cause du dommage, à qui il faut en tenir compte; on sait seulement que ce danger existe et qu'il est nécessaire de le réparer ou du moins de le faire cesser.
Je conclus donc, sur la première question :
1° Que la nation n'a pas le droit d établir l'exclusif de la fabrication ou du débit dans toute l'étendue du royaume, sans indemniser les citoyens qui, dans les provinces frontières, ont consacré des capitaux et de l'industrie à ces genres d'entreprises. Je dis les citoyens, les individus, et non, comme on l'a proposé, les provinces où la liberté s'est maintenue jusqu'à présent; car ce serait indemniser beaucoup de gens sans intérêt, et ne pas indemniser sérieusement les personnes souffrantes.
2° Que la nation ne pouvant connaître à qui elle devrait une indemnité en établissant ou perpétuant la prohibition de culture, et cependant lésant par là la propriété, ne peut établir, ni perpétuer la prohibition de culture.
Seconde question.
La nation a-t-elle intérêt à l'établissement du régime prohibitif et exclusif?
M. de Mirabeau vous a dit, Messieurs, qu'il était impossible de retirer un produit de 32 millions de la consommation du tabac dans le royaume sans y prohiber la culture. Nous pommes absolument dans cette opinion; nous l'avons annoncée dans notre rapport; nous l'avons appuyée de preuves auxquelles on n'a ni répondu, ni ajouté; comme M. de Mirabeau, nous avons dit positivement que des licences de fabrication et de débit ne pouvaient rapporter plus d'un ou deux millions; de plus que lui, nous avons dit, et prouvé, que ce serait une chimère,
une absurdité de prétendre retirer,pour le Trésor public, un produit sensiblement plus fort de la terre cultivée en tabac que de toute autre culture, et, pour le dire en passant, ce n'est pas sans étonnement que nous avons entendu M. de Mirabeau nous supposer dans l'opinion contraire, tandis qu'il ne faisait que nous aider à la combattre.
Mais, Messieurs, nous avons été plus loin dans notre rapport. Nous avons soutenu aussi que, même en conservant le régime exclusif, la prohibition de culture et la prohibition du tabac étranger, il serait impossible de retirer du tabac le même revenu que par le passé. Nous avons distingué deux temps, le présent et l'avenir, c'est-à-dire, l'année présente d'une part, et les suivautes de l'autre; et nous avons dit que celte année et la prochaine, le tabac, quoi qu'on fit, ne rapporterait pas plus de 14 ou 15 millions, et qu'à la suite il n'en produirait pas plus de 18 où 20.
Il est très important, Messieurs, de fixer votre attention sur ces propositions qui n'ont pas encore été débattues; elles touchent évidemment à la question que nous nous sommes proposée : car, s'il était prouvé que le tabac ne peut rapporter cette année et la prochaine que 14 ou 15 millions, et 18 ou 20 à la suite, il ne serait pas question, comme beaucoup d'orateurs ont affecté de le supposer, de remplacer ou de sacrifier un revenu de 32 millions; et sans doute il y aurait une grande différence entre la position où nous serions réellement, et celle ou l'on nous suppose ; il serait fort différent d'avoir à remplacer 14 millions ou 32 sur la consommation du tabac; il serait fort différent enfin, si tout remplacement était impossible sans eniraînerdes inconvénients majeurs, d'avoir à souscrire à un sacrifice de 14 millions, ou d'avoir à en consentir un de 32.
Plusieurs circonstances particulières à cetie année et à la prochaine nous ont fait penser qu'elles seraient très peu productives pour le fisc.
La première, c'est qu'il y a en France un énorme amas de contrebande.
La seconde, c'est qu'il a été fait, l'année dernière, des plantations de tabac dans diverses parties du royaume, où la culture n'en était pas permise, et qu'elles ont été augmentées daus les autres.
Ces deux vérités de fait sont notoires et n'ont pas besoin de preuve.
Mais, veut-on en calculer les effets sur le produit, il n'y a qu'à consulter l'expérience de l'année qui vient de s'écouler. Il résulte des tableaux qui ont été fournis à votre comité par M. le contrôleur général des finances que, l'année dernière, le tabac n'a pas rapporté plus de 13 à 14 millions, c'est-à-dire plus d'un cinquième environ de ce qu'il produisait par le passé.
Les causes qui ont influé sur la modicité de ce profit sont toujours subsistantes; la culture même est une cause de plus; car les plantes recueillies l'année dernière n'entreront dans le commerce que cette année. Nous ne pourrions donc raisonnablement compter sur un profil plus grand, dans cette année, que dans la précédente, en conservant l'ancien régime avec quelque modification.
M. de Mirabe.u a senti tout le poids de cctte circonstance; et ce qui constate son opinion à cet égard, c'est la disposition suivante de son projet de décret ; « Les propriétaires et cultiva-
teurs, qui auront des tabacs en leur possession au moment de ia sanction et de la publication du présent, en feront, dans la quinzaine, déclaration aux proposés à la vente nationale du tabac, et il sera incessamment statué sur les conditions auxquelles ils seront retirés pour le compte de 1a nation. »
On m'observera que si M. de Mirabeau a senti la nécessité de retirer le tabac de contrebande, il donne aussi le moyen d'y parvenir. Mais c'est ce qu'il faut examiner.
Si nous pouvions raisonnablement espérer qu'en invitant chaque citoyen à déclarer le tabac de contrebande dont il peut être pourvu, de le remettre à la régie nationale au prix coûtant du tabac qu'elle fabrique, on fît rentrer aux mains des régisseurs une partie de cette contrebande, sans doute l'existence du tabac étranger, introduit dans le royaume, ne serait pas un obstacle au produit de la vente exclusive.
Mais comment concevoir une semblable espérance? Une sommation faite au patriotisme ne produira rien; car ce ne sont pas les patriotes, tu du moins les patriotes assez éclairés pour observer l'obéissance libre qu'ils doivent aux lois, qui ont fait la contrebande.
Il faudra donc de deux choses l'une, ou offrir un très haut prix pour du tabac très mauvais, ou employer des moyens iaquisitifs et coactifs pour découvrir Ja contrebande.
Si l'on offre un très haut prix d'un tabac au moins très médiocre, au lieu de retirer le tabac de contrebande qui est en France, on en attirera de nouveau, et alors, au lieu d'assurer la recette du Trésor public, on l'anéantira.
Si vous autorisez les moyens inquisitifs et les visites domiciliaires, alors, Messieurs, qu'aurez-vous fait? Non seulement vous aurez rétabli l'ancien régime, mais encore vous l'aurez vengé. Et certes, ce serait une lâche bien assez pénible, que d'avoir à le rétablir.
Et encore quel sera le résultat de pareilles tentatives en n'y supposant aucun obstacle? Y a-t-il des moyens de pénétrer dans tous les réduits des maisons? D'y découvrir tous les dépôts? De reconnaître la nature des tabacs qui seront trouvés, d ; les distinguer des tabacs de la ferme? Les visites domiciliaires seront évidemment impuissantes pour découvrir une contrebande universellement répandue, divisée à l'infini : leur grande utilité était de prévenir Ja contrebande, et non de la surprendre.
M. de Mirabeau ne vous a donc indiqué qu'une mesure désirable, mais non une mesure praticable. Il a vu le mal auquel il fallait porter remède ; il a va quel pourrait être le remède, mais il en est resté là. Un pas de plus, il aurait vu que le remède était imposable à administrer. L'article 8 de son projet de décret n'est donc autre chose que l'aveu ae cette vérité : que la contrebande existant dans le royaume est un obstacle au produit du régime prohibitif et exclusif.
Outre les circonstances propres à l'année courante, il en est de communes à tous les temps à venir, qui contrarieront toujours le revenu du tabac.
Ces circonstances communes sont : 1° La suppression des visites domiciliaires ; 2° La suppression des visites au passage d'un iépartemem à un autre; 3° La modération du nouveau Code pénal; 4° La suppression des tribunaux dii la ferme. Permettez-nous, Messieurs, d'arrêter votre at-nation sur le secours que chacun de ces moyens
donnait à la perception de l'impôt, et d'en apprécier l'efficacité.
La faculté d'exercer des visites domiciliaires étaient la plus puissante police que l'on pût opposer à la contrebande et à la circulation.
En effet, il ne suffisait pas de franchir la première enceinte des gardes de la ferme aux extrêmes frontières, pour faire, avec profit, de grandes spéculations de fraude; il fallait, en outre, pénétrer les enceintes formées autour de chaque province; il fallait échapper aux poursuites des employés apostés sur toutes les routes, aux regards des délateurs excités par l'appât de récompenses considérables; il fallait enfin pouvoir garantir des recherches domiciliaires les entrepôts et magasins où la contrebande était recélée; en un mot, à chaque pas la contrebande rencontrait un danger et elle ne pouvait trouver de sûreté dans aucun réduit.
Il est évident qu'un semblable ordre de choses empêchait toute grande spéculation de fraude en tabac. Nul espoir de profit ne pouvait faire disparaître tant de risques imminents attachés à la fraude. Nul appât ne pouvait tromper sur l'impossibilité du succès. Aussi ne se faisait-il d'autre contrebande en tabac qu'une misérable importation à dos d'hommes, qu'on appelle maintenant, dans le langage delà ferme, fraude d'infiltration, et elle n'avait lieu que pour la consommation de quelques habitants des provinces frontières de l'étranger.
A l'avenir, il n'en sera pas de même. Il ne s'agira que de tromper la vigilance d'un bureau d'employés, de les corrompre ou de les mettre en fuite pour que la contrebande soit en sûreté; une fois entrée, elle parcourra librement le royaume; elle sera déposée dans les lieux les plus commodes au débit; elle sera vendue, distribuée ouvertement, comme autrefois la quincaillerie anglaise, dont on a vu des magasins publics dans Paris, malgré les prohibitions qui en défendaient l'entrée dans le royaume.
Qu'on exagère tant qu'on voudra l'exactitude de la surveillance aux frontières et la force des préposés, elle n'empêchera jamais la fraude d'un impôt aussi considérable que celui du tabac; on sait que la contrebande franchit les triples enceintes des villes de guerre ; elle franchira, à plus forte raison, la ligne invisible qui forme l'enceinte du royaume.
On nous dit bien qu'on diminuera l'attrait de la contrebande en baissant le prix du tabac ; on propose, par exemple, de le fixer à 48 sols au lieu de 3 1.12 s.
Mais on n'observe pas d'abord que ce moyen d'assurer la perception tend aussi à diminuer le produit; car il ne faut pas croire qu'en baissant d'un tiers le prix du tabac, on en augmenterait la con-sommationd'un tiers, cequiseruit nécessaire pour que la recette demeurât au même niveau; l'expé-rieuce a prouvé que la consommation du tabac en France a toujours été en augmentant depuis cent ans,inalgrélaprogr ssioncontinuelledesonprix; il est donc très incertain que la consommation augmentât justement en proportion de ce que l'impôt diminuerait. Mais, quoi qu'il et) soit, et ceci suffit à notre opinion, il est certain qu'au moins ia consommation du tabac n'augmenterait pas tout d'un coup, ni même dans l'espace de deux, ans, suivant la proposition de la baisse du prix.
Ce n'est pas to t. Quand le prix du tabac serait réduit à 48 sols, il y aurait toujours un assez grand attrait à la contrebande et une assez médiocre difficulté à la faire, pour qu'on dût
croire qu'elle se ferait. Et eu effet, Messieurs, le prix auquel revient le meilleur tabac de la ferme, fabriqué, est de 12 sols la livre. On en fabrique à 6, a 8*sols. Ainsi,en vendant le tabac en France à 48#l#la livre, le droit levé au profit du fisc est de 300 0/0. Or, je demande, si un droit de 300 0/0 n'est pas de la nature de ceux qui appel-lenôè^plus la contrebande ; je demande à toute personne qui a quelque connaissance du régime des traites, si un droit d'entrée de 300 0/0 sur une marchandise, de même volume qUe le tabac, a jamais été regardé comme un droit réellement perceptible et véritablement productif?
Non, Messieurs ;ilne faut pas se faire illusion sur ce point ; on fera la même contrebande, le tabac étantà 48 sols, que s'il était à 3 1. 12 s. 11 suffira que nul commerce, nulle entreprise ne puisse offrir aux étrangers voisins de la France, un profit de 300 0/0, accompagné d'aussi peu de péril que la contrebande du tabac, pour qu'ils se livrent à ce genre de spéculations que la morale même ne leur interdit pas d'exercer sur un pays aux lois duquel ils ne sont pas soumis.
Nous avons un témoignage non suspect à invoquer sur la nécessité des visites domiciliaires pour la conservation du produit de l'impôt du tabac: c'est celui de M. Duvaucel, fermier général, qui, dans la lettre à M. de Blacons, déclare qu'il est nécessaire d'établir ces visites au moins aans lesprovinces frontières; c'est-à-dire dans les parties du royaume où elles seraient le plus intolérables, parce qu'elles y ont toujours été inconnues, et parce qu elles n'y commenceraient qu'au moment où elles finiraient pour le reste du royaume ; ce qui y accréditerait cette idée que pour les frontières le moment de la liberté générale est devenu l'époque de la servitude.
Nous avons enfin sur ce point le témoignage de M. de' Mirabeau lui-même, qui vous propose de permettre les visites, dans le cas d'un grand approvisionnement, ce qui revient à les permettre indéfiniment et dans tous les cas. Car, qu'appel-lera-t-on un grand approvisionnement? Et s'il faut être sûr de l'existence d'un grand approvisionnement dans une maison avant d'y pénétrer, à quoi sert d'y faire une visite? En ce cas, il n'y a qu'à saisir. A la vérité, M. de Mirabeau propose d'appeler aux visites un officier municipal; mais ce moyen nous paraît plus propre à faire haïr le magistrat qu'à faire aimer les visites.
Au resie, Messieurs, ce n'est pas seulement l'importation frauduleuse du tabac étranger qui réduira le produit du droit : ce sera aussi sa culture qui s'établira malgré la loi. Cette culture, à laquelle invitera la terre, à laquelle sollicitera le sentiment désormais très énergique des droits de la propriété et de la liberté, ne rencontrera plus d'obstacles, maintenant que la milice du fisc a tout à fait disparu de la France.
Permettrez-vous à des citoyens, comme M. l'abbé Maury vous l'a proposé, d'être les délateurs des cultures frauduleuses? Je ne pense pas que vous consentiez à jeter dans la société de semblables semences de haine et de défiance. .
Laisserez-vous, comme l'a proposé M. de Délley, la culture libre dans les terrains enclos? Alors, Messieurs, vous aurez accordé la liberté de culture sans en avoir le mérite; car, dans la Flandre seule, il y a deux fois plus d'enclos qu'il n'en faudrait pour fournir à la France tout le tabac de sa consommation.
Ainsi, Messieurs, en renonçant aux visites domiciliaires et aux visites sur les routes, il faut s'attendre pour l'avenir à une contrebande qui
ne pouvait pas avoir lieu par le passé; il ne faut donc pas espérer du régime prohibitif et exclusif, séparé des lois de police qui l'accompagnaient, le même produit qu'on en a obtenu quand elles en faisaient partie.
Nous avons dit que le Code pénal concernant les contraventions aux lois du tabac, ainsi que les tribunaux institués pour l'applicatiun de ces lois, étaient aussi d'un puissant concours pour réprimer la fraude. Ehl qui pourrait douter de cette vérité? Comment ce qui faisait la terreur des honnêtes gtns n'aurait-il pas imposé aux hommes enclins à la fraude ? Comment croire que Ces abominations, qui ne seraient jamais entrées dans la tête des hommes si la cupidité financière ne les y eût introduites, aient été infructueuses à la finance...?
Mais, Messieurs, écartons toutes les preuves purement morales qui peuvent s'offrir à nous dans cette affaire et jeter dans sa discussion une chaleur qui mettrait la vérité en péril; bornons-nous à rassembler celles que nous fournissent des calculs très simples et des rapprochements très faciles à saisir.
Voulons-nous nous convaincre que la rigueur des peines portées contre la fraude a été une des causes du produit de l'impôt : prenons d'une main les baux des fermes depuis cent ans, et de l'autre les lois qui ont prononcé des peines; remarquons chaque époque où le prix du bail de la ferme du tabac a augmenté ; examinons ensuite les lois pénales promulguées pendant la période du temps qui a précédé, et nous verrons qu'une loi cruelle avait été inscrite et ajoutée à d'autres lois cruelles ; nous verrons que,quand le produit s'est accru de quelques millions, le Gode s'était enflé de lignes barbares. Si donc les produits ont augmenté avec la dureté des peines, en retournant aux peines modérées, vous retomberez dans les produits modiques.
En Angleterre, où la contrebande est incomparablement plus difficile qu'en France, où la culture du tabac est prohibée comme en France, où l'exemple du produit obtenu en France a souvent excité l'émulation du parlement, jamais on n'a pu parvenir à tirer du tabac plus de 6 à 7 millions pour le Trésor public; parce qu'un produit plus fort est incompatible avec la liberté.
Reconnaissons donc, Messieurs, une vérité qui ne peut plus être contestée: c'est qu'il fallait le système entier de l'ancien régime, pour retirer 32 millions de la consommation du tabac; c'est qu'un profit pareil, vrai prodige en finance, ne pouvait résulter que de l'accord de tous les moyens combinés dans le code du tabac par la cupidité et la dureté financières, aidées l'une de l'autre pour enfanter leur chef-d'œuvre. L'impôt du tabac n'a pu donner si abondamment des fruits si faciles à recueillir que dans la terre de la servitude, que dans le bois de l'ancienne finance. On n'a jamais regardé qu'aux rameaux de cet arbre, c'était au pied qu'il fallait voir : on aurait appris à déplorer sa fructification même en en découvrant les causes on aurait vu que sa culture était le désespoir d'un grand nombre de malheureux, et que ses racines avaient besoin d'être arrosées de sang.
Aussi, Messieurs, à compter du 15 juillet 1789, il n'y a plus eu à examiner si l'on sacrifierait une partie des récoltes de l'impôt ; dès lors la perte en était devenue irréparable. Il faut donc épargner à votre comité de l'imposition le reproche qu'on lui fait sans cesse de proposer
la destruction d'un impôt de 30 millions ; avant que ce comité existât, il n'y avait plus de possibilité à retirer 30 millions du tabac.
Nous venons de prouver que désormais la consommation du tabac ne produirait plus en France ce qu'elle a produit, même quand on conserverait le régime exclusif et prohibitif. Nous avons prouvé qu'aux circonstances générales qui devaient affaiblir ces produits, se joignaient des circonstances particulières à l'année courante et à la prochaine, et qui pendant ces deux années réduiraient encore le produit à une somme moindre qu'elle ne pourra être à la suite.
Mais ce n'est pas tout ; en dotant le régime prohibitif, on serait obligé de sacrifier encore une forte partie du modique produit qu'on en retirerait pour sauver les difficultés de son établissement. Ici, Messieurs, nous ne faisons que répéter ce que vous ont proposé nos adversaires eux-mêmes. M. de Mirabeau, M. de Delley vous proposent d'indemniser l'Alsace et la Flandre ; ces indemnités coûteraient, suivant leurs propres calculs, la moitié du revenu que nous avons cru raisonnable d'attendre de l'impôt.
On observe à la vérité qu'à la suite il s'étendrait à ces départements qui en étaient ci-devant exempts : mais il faut considérer aussi que la contribution foncière de ces mêmes départements b lisserait d'un sixième au moins, par la prohibition de culture ; puisque cette culture y est comptée pour le sixième des récoltes annuelles, à cause de la prohibition qui avait lieu dans le leste du royaume.
Il ne reste donc plus qu'à conclure. La question se réduit à deux points :
1° Convient-il de se ménager pour l'avenir,par la prohibition et l'exclusif, un revenu, ou du moins l'espérance d'un revenu de 18 ou 20 millions sur le tabac ?
2° Convient-il de se ménager, par le même moyen pour l'année courante et la prochaine, un revenu de 12 ou 14 millions sur le tabac, dont encore il faudrait sacrifier environ la moitié pour indemniser les départements belges et du Rhin?
Personne, je pense,ne contestera que, quand le bon état des affaires publiques permettra de réduire ou de convertir les impôts, la conversion ou la réforme ne doive commencer, je ne dirai pas seulement par les plus mauvais, mais aussi par ce qu'il y a de plus mauvais dans les accessoires d'impôts tolérables par eux-mêmes.
On ne niera pas non plus que quand même on pourrait qualifier de bon impôt une contribution levée sur une consommation de fantaisie, telle que celle du tabac, du moins c'est un mauvais accessoire de ce bon impôt, que la prohibition de culture, et le privilège exclusif de fabrication et de débit, et qu'ainsi il faudrait du moins sacrifier ces modes de perception, dès que l'aisance du Trésor public le permettrait,et se réduire au modique revenu que l'on pourrait retirer de moyens moins contraires aux droits naturels de l'homme.
Or, Messieurs, dans trois ans, l'intérêt de ladettç. sera diminué par des remboursements, par des amortissements, par des réductions amiables. Dans trois ans les pensions du clergé seront aussi considérablement diminuées, la plupart portant sur des têtes très âgées. Dans trois ans, en un mot, les dépenses publiques seront très sensiblement diminuées ; dès lors donc, la somme des contributions publiques sera moins forte, etl'Etat n'aura pas un besoin assez urgent de 18 ou 20 millions pour les acheter par le régime exclusif et prohibitif.
Si donc il faut, en 1793, renoncer à ce régime, on ne doit pas le mettre aujourd'hui en vigueur pour n'en retirer des fruits qu'en 1793, c'est-à-dire à une époque où ces fruits seront devenus heureusement superflus.
Si le régime prohibitif et exclusif ne peut produire 18 ou 20 millions, qu'à une époque où l'Etat ne sera pas obligé d'acheter si cher une si modique contribution, il ne s'agit plus que de voir s'il est possible de retirer d'un régime plus doux et plus régulier une somme à peu près égale à celle que produisaient cette année, la prohibition el l'exclusif. Or, Messieurs, un calcul très simple du résultat de notre projet va vous prouver que son produit doit être au moins de 8 millions.
Nous proposons d'abord d'établir des licences de fabrication, nous en estimons le produit.......................... 1 million.
2° Des licences de débit...... 1 —
3° Un droit d'entrée de 40 livres par quintal qui produira pendant chacune des deux années prochaines...................... 4 —
4° Une fabrique nationale..... 2 —
8 millions (1).
Nous ne comptons pas,dans ce calcul, l'accroissement que pourra éprouver la contribution foncière, par une culture qui va donner une valeur considérable à des terres qui en avaient peu. Cet avantage sera peu sensible pour le Trésor public, et il est éloigné. Mais, quoi qu'il en soit, nous pouvons espérer 8 millions ; le sacrifice que nous vous proposous d'offrir à la liberté est donc nul si l'on indemnise les départements belgiques et du Rhin, il ne sera que de 4 à 6 millions pendant deux ans, si on ne les indemnise pas.
Mais dussions-nous gagner de 4 à 6 millions au régime prohibitif et
exclusif, sera-ce pour un si modique intérêt que vous voudrez la couvrir
d'un voile, et l'asservir dès sa naissance ? Sera-ce pour un si chétif
revenu, qu'on arrachera aux départements belgiques et du Rhin une
culture ancienne, et à laquelle ils sont habitués ; qu'oi y ruinera des
fabriques considérables et nonif breuses ; qu'on y fera des milliers de
malheu-ï reux; qu'on y multipliera tous les gens inquiets ; qu'on y
autorisera les mécontents; qu'on y justifiera des calomuies; qu'on y
jettera des semences de guerre civile? Non, Messieurs, la nation n'a
sans doute point à craindre que vos décrets lui imposent une souffrance
stérile, et lui fassent courir d'inutiles dangers ; dès que le
Répondrons-nous à une objection qui a été répétée jusqu'à satiété sur le prétendu danger de voir la France manquer de grains, si on lui rend la liberté de cultiver le tabac?
Observerons-nous qu'une pareille objection tendrait à faire proscrire ou limiter toute autre culture que celle au blé, puisqu'il n'y aurait pas plus de danger à une culture immodérée du tabac, que des turneps, des colzas,des chanvres, à celle de la vigne ?
Rappellerons-nous que c'était sur le même principe que les parlements faisaient arracher, dans leur ressort, des . plantations de vignes, comme si les excès en ce genre ne portaient pas avec eux leur peine et leur remède?
Redirons-nous encoie que si l'on veut jouir de l'aspect des campagnes riches en blé et en pâturages, il n'y a qu'à tourner ses regards sur les départements belgiques et du Rhin, seules parties du royaume où l'on cultive du tabac?
Non, Messieurs, il n'est pas besoin de relever davantage des objections que l'expérience de tous les temps et de tous les pays repousse, et que l'on ne pourrait accréditer sans mettre en problème les droits les plus sacrés de la propriété.
Je conclus donc que la nation n'a pas plus d'intérêt que de droit à maintenir le régime prohibitif et exclusif, et je demande que l'Assemblée aille aux voix, sur l'article lep du dernier projet de décret du comité ; en voici les termes :
« A compter de la promulgation du présent « décret, il sera libre à toutes personnes de « cultiver, fabriquer et débiter du tabac dans le « royaume. »
(L'Assemblée ordonne l'impression du discours de M. Rœderer.)
Plusieurs membres ; Aux voix 1
Douze personnes ont demandé la parole ; je pense que l'intention de l'Assemblée est de l'accorder maintenant à quelqu'un qui soit opposé au projet du comité,
Pour bien fixer l'ordre de la délibération et pour ne pas retomber dans des redites, il faut se renfermer dans la discussion du nouveau rapport que vient de faire le comité; il est donc d'une extrême importance que l'on puisse examiner et les moyens et les motifs de ce rapport parce que l'on intimide beaucoup de monde par de vaines terreurs qui n'ont aucune espère de fondement. (Rires ironiques à gauche.)
Puisque vous avez ordonné l'impression du rapport de votre comité, vous voulez sans doute que tous les membres de cette Assemblée aient la faculté de le lire pour le réfuter s'il y a lieu. Je demande donc que la discussion soit ajournée jusqu'après la distribution du discours de M. Rœderer. (Murmures à gauche.)
Quoique la question n ait pas fait de grands progrès, l'opiniop 4e l'Assemblée est bien chan-
gée depuis le, dernier jour où l'on s'est occupé de cette affairé. (Murmuresprolongés.)
Je sens parfaitement tout le tort que je vais faire au régime exclusif en prenant i-a défense; mais je crois de mon devoir d en courir les risques et je persiste à demander l'ajournement de la discussion,
Si la discussion doit s'ouvrir sur la proposition de M. l'abbé Maury, je demande la parole; si, au contraire,, on veut passer à l'ordre du jour, ainsi qu'on l'a décrété, je n'ai rien à dire.
(L'Assemblée décrète l'ordre du jour.)
fait une analyse rapide du discours de M. Rœderer et en rappelle les conclusions.
J'observe que la présente discussion est contraire au premier décret par lequel vous ayez ajourné cette question, après le rapport de votre comité sur l'ensemble des impositions, qui doivent former le retenu public. Ce plan général ne vous a pas été soumis ; car il est facile d'apercevoir, dans le plan imparfait qu'on a mis sous vos yeux, un déficit considérable qui ne nous permet pas. de prononcer en dernier ressort sur l'impôt du tabac. Cette discussion est donc au moins prématurée. Je n'affaiblirai point, par mes réflexions, les moyens développés- victorieusement à cette tribune sur la légitimité de cet impôt. Je me bornerai à réfuter quelques objections frivoles du comité.
Votre comité soutient que cet impôt, dans l'état où il estj ne rendra pas 15 à 16 millions : ce Berait toujours une somme qu'il ne faudrait pas négliger; mais je garantis, sous le cautionnement des administrateurs, un produit de 30 millions, sans efforts et sans vexations.
Il assure que la contrebande du tabac, favorisée par le reculementdes barrières, en affaiblira beaucoup le produit : mais il ne vous a pas dit que la diminution du prix du tabac éteindra la contrebande, en détruisant l'intérêt qu'on pourrait avoir à la faire; que d'ailleurs les moyens pris pour en empêcher- les ventes, proscrites par l'Etat, seraient aussi efficaces contre ce genre de contrebande. ^ Quelque faible que soit le produit de l'impôt, il rie faut pas le détruire ; son produit servira au remplacement des contributions du pauvre cultivateur, aux entrées de Paris, qui pèsent sur la partie indigente de ce peuple à qui nous devons le bienfait de la liberté. — Cet impôt deviendra une considération bien majeure si, loin d'être supeitlu, il occasionne un déficit qu'on ne peut combler sans aggraver le sort des contribuables.
On a invoqué les droits de l'homme et de la liberté de cultiver son champ comme il convient à ses propres intérêts : on a comparé la culture du tabac à celle de la vigne; mais le vin est rangé dans la classe des subsistances nécessaires à la vie et l'inutilité du tabac n'est pas contestée.
On vous a cité l'aveu de M. Duvaucel, fermier général, pour prouver que l'exploitation de la f» rme du tabac exigerait des visites domiciliaires. J'oppose à cette autorité isolée celle de la compagnie entière des fermiers généraux qui désavouent cet écrit et qui ont déclaré qu'avec le secours des municipalités ou autres corps administratifs, et en intéressant les dénonciateurs de la fraude, on suppléerait aux visites domiciliaires; d'ailleurs, le comité,dans son système, ne
nous préserve pas de l'inconvénient des recherches inquisitorïales pour assurer l'exécution de son plan. Il suffit pour combattre la proposition d'une vente nationale, én concurrence avec les marchands particuliers, de rappeler la concur-rénce du gouvernement dans le commerce des blés. 40,000 arpents de culture suffisent pour la consommation du royaume en tabac. Cette étendue de terrain, si elle est suffisante, est si peu de chose eu comparaison du sol de la France, qu'elle ne vaut pas la peine d'être exceptée de la prohibition dans les pays où elle u lieu, et porte un préjudice notable aux provinces jusqu'à présent privilégiées; qui'cultivent le tabac, et dont^ le produit est fondé sur le droit exclusif dOht elles jouissent.
On s'est récrié contre le Code pénal de la ferme; on l'a nommé un code de sang : il ne prononce cependant jamais la peiné de mort que contre les contrebandiers assassins. Il peut devenir le mêflié que celui qui servira à maintenir la perception de tous les autres impôts.
On vous parle enfin du mécontentement des provinces de Belgique et d'Alsace, Mais on peut ne pas les contraindre ou les indemniser, elles seront alors complètement désintéressées; leur mé on te ntement serait beaucoup plus fondé si la culture devient générale, puisque leur bénéfice est fondé sur la prohibition qui frappe les autres provinces*..
Je conclus au maintien de la ferme du tabac* bous les conditions dévelppées par M. de Delley, et mises dans un si grand jour par M. de Mirabeau l'aîné, et, subsidiairement dans le cas où icette décision souffrirait quelques difficultés^ il faut surseoir à toutes délibérations sur le sort de cet impôt jusqu'après l'exécution du décret qui en a prononcé l'ajournement.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée. (Tumulte.)
(ci-devant Delley d'Agier.) M. Rœderer®'invité à répondre aux objections...
Vous devez, Monsieur le Président,mettre aux voix une motion lorsqu'elle est appuyée, et celle qui est appuyée, c'est de fermer la discussion.
Je prie celui qui veut me rappeler à mon devoir de se demander à lui-même si le devoir du président, lorsqu'on crie : Aux voix! sur une discussion, n'est pas plutôt d'attendre que le vœu de l'Assemblée soit fortement prononcé. (Murmures et applaudissements.)
Voix diverses : Il l'est!—Non!
(Une grande partie du côté gauche se lève et demande à aller aux voix.)
Je demande la parole pour prouver qu'il -né faut pas fermer la discussion.
Je demande à faire une observation...
Plusieurs membres demandent la question préalable contre la motion de fermer la discussion.
La question préalable est proposée et appuyée.
La doctrine de M. Gouttes
est absolument hétérodoxe. Je demande la parole pour M. de Cazalès.
J'insiste pour que la motion de fermer la discussion soit mise aux voix.
Plusieurs membres : La question préalable ! (L'Assemblée, consultée, décrête qu'il y a lieu à délibérer sur la demande de fermer la discussion,).
J'ai l'honneur de représenter à l'Assemblée qu'elle a décidé de ne prendre une détermination définitive,.relativement à l'imposition du tabac, qu'après qu'elle aurait connaissance des sommes nécessaires pour fournir aux dépensés publiques. (Murmures.) Cette détermination était sage, car il n'y a pas d'impôt bon absolument; et l'impôt du tabac n'est bon que-relativement, parce que, s'il est supprime, vous [ serez obligés d'y suppléer par un impôt plus désastreux encore. '
Pour pouvoir décider à cet égard en connaissance de cause, il faudrait savoir quelles seront les dépenses et les ressources de cette année. Votre comité d'imposition est composé en partie d'hommes dont, les intentions sont pures, mais qui, substituant des idées abstraités à dés vérité? pratiques, croient que tous les impôts doivent porter sur lés terres ; ne vous ayant jamais .présenté cette question avec la franchise qui devrait caractériser les comités dé l'Assemblée, n'ayant jamais demandé qu'on déterminât la somme à affecter particulièrement aux impôts indirects et aux impôts directs, et vous conduisant toujours à la suppression de' tous les impôts parle tableau des inconvénients qui sont attachés à la perception de chacun d'eux, il arrivera, lorsque vous devrez remplir la masse des contributions nécessaires à l'Etat, à vous mettre dans l'obligation de frapper les terres d'un impôt beaucoup plus fort. Vous regretterez alors une contribution ae 30 millions établie sur le caprice et la fantaisie.
Vous aviez voulu ne délibérer sur le tabac qu'après que la quotité des dépenses publiques aurait été fixée ; les circonstances vous ont déterminés à changer cette sage disposition, mais jamais des circonstances vne peuvent autoriser l'Assemblée à ôter la liberté ae manifester des opinions contradictoires. Il est très facile de ré-pondre.aux raisons du rapporteur, quoiqu'il ait ait qu'bn n'y répondrait pas; En effet, il est cer-? tain qu'on n'y répondra pas Si on ferme la discussion sans discuter. Si l'Assemblée prenait une déctèion précipitée, elïé se vérrait forcée, en cas de mécompte, à écraser les terres... Mes calculs peuvent être inexacts, mes idées peuvent être faussés ; mais il faut entendre mes idées, mais il faut examiner mes calculs. Nulle circonstance né peut déterminer à une marche contraire. Je persiste donc à demander que la discussion ne soit pas fermée.
L'Assemblée a fort bien remarqué que lepréopinant, sous le prétexte de s'opposer à la fermeture de la discussion, a cherché à la rouvrir lui-même et à rentrer dans la discussion du fond : or,ce n'est point du fdnd qu'il s4agit actuellement. Pour déterminer si^ la discussion doit être fermée ou non, il n'y a qu'un point à examiner, et ce point, c'est l'Assemblée qui peut le décider sans que personne l'ait aidée à mûrir son opinion* c'est de savoir si chaque point est suffisamment éclairtfl, si chaque opinant est suffisamment éclairé.
J'observerai d'ailleurs qu'il est fort remarquable que les mêmes personnes qui à la dernière séance se croyaient assez instruites, que les mêmes opinants qu'il y a huit jours, insistaient si vivement pour que la discussion fût fermée, sont ceux-là mêmes qui aujourd'hui demandent avec la même insistance à ce qu'elle soit continuée. (Applaudissements.)
L'Assemblée nationale n'a, du reste, rien à calculer lorsqu'on lui dit : La loi proposée est contraire à la déclaration des droits. (Murmures à gauche.)
Un grand nombre de membres demandent à aller aux voix.
(L'Assemblée, consultée, décrète que la discussion est fermée.)
Les propositions générales se bornent à celles du comité et à celles de M. l'abbé Charrier.
(ci-devant Delley d'Agier). Je demande que la discussion soit continuée jusqu'après l'impression du rapport.
Je ne crois pas que je doive consulter l'Assemblée sur une pareille demande, quand elle vient de fermer la discussion. (Bruit)... Silence, Messieurs* silence I La voix qui parle dans le bruit est encore plus faible que celle qui parle dans le désert. M. Rœderer a demandé la parole ; je la lui donne.
, rapporteur. Je prie l'Assemblée de me permettre une observation qui est peut-être nécessaire. L'article qui nous occupe maintenant n'est autre chose que le premier du projet de décret dont vous avez connaissance et qui a déjà été discuté dans plusieurs séances. Les articles suivants, il est important de le rappeler, ont pour objet d'établir des droits de fabrication, de licence et d'entrée. Déclarer la culture, la fabrication et le débit libres, c'est anéantir tout privilège exclusif ; mais ce n'est pas proscrire tout droit de fabrication, de licence et d'entrée.
Un grand nombre de membres demandent à aller aux voix.
(ci-devant Delley d'Agier). J'ai à faire un amendement.
Vous demandez à faire un amendement, présentez-le nuement... Je dis nue-ment, parce que la discussion est fermée. (Murmures...) Je ne suis pas la volonté de l'Assemblée, mais l'organe de sa volonté.
(de Saint-Jean-d'Angély). Le président n'est pas le maître de l'Assemblée.
Apprenez de moi que quand le président dit ces propres mots : Je ne suis pas la volonté de l'Assemblée, mais l'organe de sa volonté, il montre assez qu'il connaît son devoir. M. Regnaud n'a pas alors le droit de lui dire qu'il n'est pas le maître de l'Assemblée.
(ci-devant Delley d'Agier). L'Assemblée veut que la France soit persuadée qu'on a ici le droit de défendre son opinion et de répondre à celles des autres. Je demande la même faculté que M. Rœderer : il vient de parler;
il a fait un court épisode auquel il aurait dû ajouter que le droit de licence est nul sans visites domiciliaires, et il ne veut pas de visites domiciliaires; que le droit de fabrication n'est fondé que sur des bases immorales, et il s'est fait un devoir de chercher à éloigner toute espèce d'immoralités. Il importe de discuter les derniers articles du projet de décret avant le premier ; car si je prouvais, moi, que le droit de licence ne peut se percevoir sans visites domiciliaires, que le droit de fabrication est immoral, que le droit d'entrée sera d'un produit presque nul...
Plusieurs membres : Aux voix !
(ci-devant Delley d'Agier). Je passe à mon amendement.
M. le Président. M. Rœderer m'a donné, pour résultat de la première observation qu'il a présentée, cette addition au premier article : Sauf les modifications qui vont être établies ci-après sur la fabrication et le débit.
(ci-devant Delley d'Agier). Quoique la discussion n'ait point été fermée sur aucun des articles en particulier, car on n'en a pas fait mention, mais seulement sur le décret général, je me résume, et je dis que l'Assemblée ne doit plus désormais supprimer un impôt sans avoir trouvé le moyen de remplacement. Voici donc mon amendement : que les articles qui suivent le premier dans le projet du comité, soient discutés et décrétés, avant qu'on s'occupe du premier article.
Plusieurs membres demandent la question préalable.
Je demande la priorité pour le projet de décret proposé par M. de Mirabeau dans une précédente séance.
Il faut accorder ou refuser la priorité au plan du comité; on s'occupera ensuite, non pas de l'amendement de M. de Delley, qui n'est autre chose qu'un ajournement...
(ci-devant Delley d'Agier). Non, c'est un mode de délibération, un mode sage.
On ne peut demander la question préalable sur ce mode ; car c'est une chose jugée. L'Assemblée a renvoyé au comité le soin de lui fournir un remplacement de l'impôt du tabac ; il faut donc commencer à délibérer sur les droits dé licence d'entrée et de fabrication, autrement vous seriez inconséquents; et par conséquent il y a lieu à délibérer sur le mode proposé par M. de Delley.
Plusieurs membres demandent de nouveau la question préalable contre la motion de M. de Delley.
(La question préalable est mise aux voix.)
déclare qu'il n'y a pas lieu à délibérer. (Applaudissements à gauche. — Vives réclamations à droite. — Bruit prolongé.)
Voix nombreuses à droite : Il y a doute.
Je dois déclarer que le bu-
reau est unanime; mais comme des membres des diflérentes parties de la salle ont des doutes, je vais renouveler l'épreuve.
Plusieurs membres : L'appel nominal !
(Une seconde épreuve a lieu).
déclare qu'il n'y a pas lieu à délibérer. (Applaudissements à gauche. — Protestations à droite. — Tumulte.)
Voix nombreuses à droite : Il y a doute ! L'appel nomiual I
. On demande l'appel nominal ; il va se faire sur cette question ; Le premier article du comté sera t-il décrété le dernier ?
(de Saint-Jean-d'Angély). M. le Président pose mal la question (Bruit).
(de Saint-Jean-d'Angély) parlent ensemble dans le bruit....
. Monsieur le Président, auquel de nous deux avez-vous donné la parole ?
. J'ai donné la parole au silence.
. Il est impossible de décréter les mesures qui doivent suivre la reconnaissance du principe avant que le principe ait été reconnu.
Plusieurs membres : Vous ouvrez la discussion.
. Je dirai d'abord comment je pense qu'il faut poser la question. Je ferai ensuite de très courtes réflexions sur lés circonstances qui vous environnent. La manière de poser la question est d'abord de déclarer le principe qui est dans l'esprit de tous les membres qui ont concouru à la Constitution : ce principe est la liberté de la culture. L'Assemblée décrétera ensuite les moyens d'imposer le tabac. 11 est impossible de suivre un autre mode de délibération. J'observe, quant à l'acharnement avec lequel une partie de l'Assemblée appuie une manière insidieuse de faire adopter un ajournement déguisé, mais certain.....
. Il serait facile de prouver que les mouvements de l'Alsace ont été causés pour déterminer la question ; mais je me résume et je demande que la question soit posée, ainsi que M. de Delley l'a proposée, parce que c'est là l'ordre naturel du la délibération, ordre conforme à l'usage constant de décréter les amendements avant le principe.
, rapporteur, fait une nouvelle lecture du projet de décret du comité dans son entier, et propose par amendement d'ajouter au premier article ces mots : sauf les modifications ci-après décrétées.
(La priorité, est demandée sur cette rédaction.)
. L'Assemblée veut-elle que je mette aux voix la question dans les termes suivants : La culture du tabac sera-t-elle libre ou-nonl
. Je demande que la question soit posée comme suit : L'article premier sera-t-il mis aux voix avant les derniers ?
(La motion de M. La Poule est adoptée.)
. L'article 1er sera-t-il mis aux voix avant les derniers? Telle est la question sur laquelle, sous votre bon plaisir et si 1 on veut faire silence, on va procéder à l'appel nominal; il est tnmps que cette situation tumultueuse tinisse. Ceux qui voudront que l'article 1er soit décrété le premier, diront oui, ceux qui voudront qu'il soit décrété le dernier, diront non.
(L'appel nominal a lieu.)
. Le résultat de l'appel nominal donne, sur 732 votants, 372 voix pour oui et 360 Voix pour non. En conséquence, l'Assemblée décrète que l'article 1er sera le premier mis aux voix.
Un grand nombre de membres demandent à aller aux voix sur cet article.
L'article 1er du projet de décret du comité
est mis aux voix et adopté en ces termes:
Article premier.
« L'Assemblée nationale décrète qu'à compter de la promulgation du présent décret, il sera libre à toutes personnes de cultiver, fabriquer et débiter du tabac dans le royaume, sauf les modifications qui seront ci-après décrétées. » (Vifs applaudissements.)
prévient l'Assemblée qu'il n'y aura pas de séance ce soir et annonce l'ordre du jour de demain.
La séance est levée à cinq heures.
a la séance de l'assemblée nationale du
Appui de Vopinion de M. La Ville-Leroux contre tout système prohibitif de la culture, fabrication et vente libre du tabac, par M. Rou-ehette, député du département du Nord.
On peut regretter un impôt de 30 millions, on peut désirer de le rétablir; jusque-là, rien de plus raisonnable. Reste à savoir s'il y a quelque juste moyen pour en effectuer la perception.
Sans doute, avec des forces, ou viendra facilement à bout d'empêcher la culture du tabac «tans les départements frontières. Mais la force, la violence, sont-ce des moyens bien justes?
Les habitants des départements frontières sont les premiers exposés aux incursions et au fer des ennemis ; et, dès lors, il semble qu'ils devraient mériter le plus de ménagemenis de la part de l'administration. S'ils ont une plus grande population; si leurs terres sont mieux cultivées, s'ils payent plus d'impôts que partout ailleurs, de si précieux avantages doivent être encouragés, et rien ne doit être entrepris qui puisse les anéantir ou diminuer.
Or, c'est la libre culture du tabac qui jusqu'à présent a été la grande et principale cause de
ces précieux avantages. Je parle de la Flandre en particulier : que l'on y supprime la culture du tabac, bientôt on y verra languir les campagnes; les habitants manqueront de subsistances et les impôts cesseront d'y être fournis avec promptitude et facilité.
C'est au moyen de la culture du tabac qu'en Flandre les terres ne reposent jamais. Cela prouve que le tabac n'est point un1 plante nuisible et vorace, qui épuise les terres n peu d'années, ainsi qu on ne cesse de le dire et répéter de toutes parts (1). L'expérience seule peut en parler avec certitude : elle écarte et détruit toutes les vaines suppositions. Et voici ce que l'expérience apprend constamment :
Une terre est épuisée ou, par la malice d'un fermier sortant, elle est tellement empoisonnée qu'elle ne pro luirait plus que des plantes nuisibles, sauvages et inutiles : on prépare cette terre par de forts labours, on lui donne de bon fumier et on la plante en tabac. Si la saison est bien favorable, le cultivateur se trouve largement remboursé par son tabac de toutes les avances et frais de culture, des impositions dont son champ est chargé, ainsi que du prix de son fermage; mais sa terre est améliorée pour 4 à 5 années. Après la dépouille du tabac, le cultivateur sème du blé froment, qui ne manque jamais de lui donner une récolte des plus abondantes ; ensuite il a de beau lin, et après le lin du trèfle; après quoi il peut remettre sa terre en blé et avoir encore une très bonne récolte. Demandez au cultivateur pourquoi il ne fume point sa terre après le tabac; il vous dira que la racine de cette plante est du fumier, et qu'elle opère le miracle de produire deux épis de blé au lieu d'un. Et c'est cette plante qu'on voudrait bannir de nos contrées (2) !
Le tabac est donc favorable pour les cultures les plus précieuses (3), le blé froment et le lin. Bien plu-, lorsque le lin vient à manquer, on le remplace par le tabac. 11 en est de même lorsque
le colza vient à être gelé, soit par un rude hiver, soit dans sa fleuraison. Si l'on n'avaitpas le tabac, on n'aurait de ressource que dans la chétive culture du sarrazin ou blé noir qui ne fait qu'appauvrir et refroidir le sol pour les cultures qui suivent.
Mais si chez nous la culture du tabac est interdite, elle en sera d'autant plus encouragée chez nos voisins du territoire étranger. Gomment en empêcher l'introduction dans un pays où il y a mille et mille communications? Il faudra donc y-caserner des légions de commis, qui seront continuellement sur pied pour veiller sur la fraude. Et quel fardeau sur l'Etat qu'une double ligne de ces satellites du fisc I Mais la fraude ne sera pas alors plus retenue qu'elle ne l'est à présent que des bandes de 50, de 100 et de 150 fraudeurs franchissent toute espèce d'obstacles, opposent la force à la force, et mettent en déroute les gardes qui voudraient les arrêter.
Eh quoi I une double ligne de gardes sur la frontière 1 Déjà nos concitoyens, habitants de la Flandre,frémissent en apprenant cette nouvelle, lis regardent un pareil établissement comme un fléau dévastateur. Est-ce là, disent-ils, l'effet de cdte liberté conquise? Comment serons-nous égaux en droits avec nos frères de l'intérieur du royaume?
Ceux-là seront libres, tranquilles, tandis que nous, plus esclaves que jamais, nous ne pourrons faire deux pas sans être arrêtés, molestés, visités, soit que nous allions à nos affaires ou que nous en revenions, et de quelque côté que nous regardions.
Après cela, doit-on être étonné de la répugnance qui s'y fait voir pour l'acquisition des biens nationaux ?
Quelle justice, d'ailleurs, d'aller faire payer 48 sous la livre une drogue qui, aujourd'hui, ne leur coûte pas deux sous? Car à la campagne chacun cultive du tabac, soit dans son potager, soit ailleurs, pour sa provision à fumer.
Et quand chaque ouvrier ne consommerait que 12 livres de tabac par au, quel effroyable impôt que celui que vous mettez sur cette jouissance de ce pauvre malheureux ! Vous dites que c'est une fantaisie dont il pourrait se passer: moi, je vous dis que c'est pour lui un besoin, une nécessité; que c'est un remède et un préservatif contre les maux dont ce pauvre ouvrier serait bientôt accablé, s'il était réduit à devoir s'abstenir de l'usage du tabac.
Non ; que l'on pose tant de barrières que l'on voudra, jamais la fraude ne sera empêchée, si la vente du tabac est mise en régie ou en ferme, et la culture prohibée. Eh ! quel appât pour la fraude que 48 sous la livre! C'est plus que dix fois la valeur de la denrée : impôt unique et outrageant, s'il en fût jamais. Vous ne voulez plus de peines afflictives pour fait de contrebande : et, bientôt vous ferez planter des potences pour punir les nombreux massacres que votre prohibition du tabac aura occasionnés.
Il est impossible que cela soit autrement: la culture du tabac doit être libre..... Mais il faudra toujours du tabac étranger pour mélanger le tabac indigène : mettons donc un droit considérable sur celui qui sera importé de l'étranger (1), et seulement sur celui en feuilles, et
que l'importation du tabac fabriqué soit prohibée, ou bien qu'il soit soumis à un triple droit, et en outre une amende du décuple à la charge des contrevenants qui pourront la payer. C'est le seul et unique moyen d'assurer la perception d'un impôt juste et utile, puisque, de cette façon, il n'exigera point de frais de gardes extraordinaires, Les habitants des frontières seront eux-mêmes les premiers intéressés à surveiller la fraude, s'il pouvait y en avoir, comme faisant tort à leurs cultures. On pourrait encore les y engager davantage, en assignant une part dans les captures au profit de la communauté, dont le garde aura fait ou concouru à faire l'arrestation. Et pourquoi ces citoyens s'y refuseraient-ils, puisque désormais la contrebande ne pourra être envisagée que comme un crime, un vol fait à la patrie, une spoliation des revenus publics, contre laquelle tous les particuliers ne pourront qu'être vivement animés et toujours prêts à l'empêcher?
présidence de m. riquetti de mirabeau l'ainé.
Séance du
La séance est ouverte à onze heures et demie du matin.
. M. Monneron, que vous avez admis hier comme député de l'Ile de France et des Indes orientales, en remplacement deM. Colin, décédé, demande à prêter le serment.
monte à la tribune, prête le serment et dit :
Messieurs, quelques lettres jetées sur le bord de la mer, lors du naufrage de VAmphitrite, ont confirmé les dispositions tranquilles que les habitants de l'Ile de France vous ont manifestées dans l'adresse dont j'ai eu l'honneur de vous faire part. Leur respect pour les lois qui ne sont pas abrogées, un attachement inviolable aux décrets de l'Assemblée nationale sanctionnés par le roi, voilà leur catéchisme et leurs lois.
Vjus jetterez sans doute les yeux sur ce qui sYst passé avant la réception de la loi du 8 mars sur le régime des colonies. Alors la liberté naissante était aux prises avec les abus que vous avez frappés d'une mort éternelle ; les deux partis étaient prêts à se déchirer, lorsque cette loi leur est parvenue et les a réunis sous les mêmes drapeaux. S'il m'était permis de vous exprimer leurs sentiments, vous les entendriez jurer par mon organe, à la France libre, un attachement éternel.
J'arrive, Messieurs, au milieu de vous, sans avoir reçu aucune
instruction de la colonie que je représente; mais je n'en suis pas moins
fort, puisque vous n'êtes ici que pour le bien commun et que vous avez
juré de ne point vous séparer
Je finis, Messieurs, en priant l'Assemblée de décréter que tous les papiers échappés au naufrage de C Amphitrite et concernant la députation de l'Ile de France seront remis au comité colonial, et en demandant à être personnellement autorisé à les prendre en communication.
(Cette motion est décrétée.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture du pro-cès-verbal de la séance d'hier, qui est adopte.
, au nom du comité de judicature présente le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de judicature,
« Décrète que les officiers municipaux supprimés, qui sont dans le cas de faire liquider la finance de leurs offices, seront incessamment payés de leurs gages et autres émoluments arriérés, jusques et y compris le 31 décembre 1790 inclusivement, comme par le passé, par les caisses qui étaient ci-devant enargées de le3 payer. »
(Ce décret est adopté).
, au nom des comités de Constitution et militaire. Messieurs, j'ai l'honneurde vous proposer un projet de décret qui ne doit pas entraîner une longue discussion, mais qui devient extrêmement instant par les circonstances. Vous aviez décrété dans le titre 4 du décret du traitement de la gendarmerie nationale, que les traitements et appointements de la gendarmerie nationale seront iixés et payés mois par mois par le ministrede l'intérieur chargé désormais de payer ce traitement; par l'article 12 du titre 7, vous avez dit que les officiers, sousr officiers et cavaliers de la gendarmerie nationale continueront à être payés, du 1er janvier 1791, suivant la nouvelle division des compagnies, sur le pied fixé par le décret du 23 septembre dernier; en conséquence de ces décrets, MM. les commis de l'ancienne administration de la guerre dans les provinces, ont remis des ordres de ne plus rien payer à la cavalerie de maréchaussée, à compter du 1er janvier 1791, conformé nent à l'organisation du corps de la gendarmerie nationale. Si les divisions de cette troupe ne sont pas encore faites dans les départements et qu'il faille trois ou quatre mois pour y parvenir, il en résulterait, Messieurs, que de trois ou quatre mois les officiers et gendarmes ne seraient pas payés. Ce corps souffrirait prodigieusement et tomberait incontestablement en dissolution. C'est en conséquence de ces réflexions que j'ai l'honneur de vous propo-er le décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète q_ue l'article4 du titre IV et l'article 12 du titre VI des décrets rendus les 23 décembre et 16 janvier derniers, par rapport à l'organisation du corps de la gendarmerie nationale, ne recevront leur exécution que lorsque les divisions des ci-devant compagnies de maréchaussée, même des compagnies supprimées, seront faites par département; et jusqu'à ce, les officiers, greffiers, sous-officiers, cavaliers et trompettes seront payés, de mois en mois, dans les lieux actuels de leurs différentes résidences, de tous leurs traitements et gratifications, sous quelque dénomination qu'ils soient affectés à leurs différentes places, par les mêmes mains et sur le même pied qué
par le passé, en observant les formes qui ont eu lieu jusqu'à présent.
« Les loyers de casernement qui ne sont pas fournis en nature seront également acquittés comme par le passé. »
(Ce décret est adopté.)
fait lecture de deux lettres de M. le maire de Paris qui annonce que la municipalité de cette ville a fait avant-hier et hier l'adjudication de six maisons nationales et qui informe l'Assemblée du résultat de ces ventes.
M. de Beauchamp, député de Saiut'-Jean-d'Angély, m'a adressé hier une lettre par laquelle il demande à rassemblée de lui accorder un congé de cinq semaines.
(Ce congé est accordé.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse des officiers municipaux de Saint-Valéry-en-Caux, qui informent l'Assemblée que le curé, ses cinq vicaires et l'aumônier de la garde nationale de cette ville ont prêté, dimanche dernier, le serment' prescrit par le décret du 27 novembre dernier, aux acclamations des citoyens.
, au nom des comités de judicature, des finances, de l'extraordinaire et de direction de la liquidation. Messieurs, vous avez ordonné, par votre décret du 30 octobre, que les gages des officiers supprimés seront incessamment acquittés en la forme ordinaire jusqoes et y compris le 30 décembre 1790. Depuis lors votre comité de judicature n'a cessé de presser l'exécution de ce décret et n'a été arrêté que par le temps nécessaire pour dresser les états d'après lesquels les payements doivent être faits.
Par un décret du 6 février vous avez ordonné que les états seront remis sans délai au commissaire du roi; et que les parties plaignantes remettront leurs mémoires, pour ledit commissaire ën rendre compte au comité de liquidation, lequel en fera son rapport à l'Assemblée. Ce décret, nécessaire pour les arrérages d'appointements et pour les appointements des différents départements, et pour tous les objets susceptibles de liquidation, a alarmé les propriétaires d'offices; ils ont craint d'être compris dans la disposition générale de ce décret et que chaque titulaire fût obligé d'envoyer ses mémoires, de fournir les pièces justificatives et de poursuivre la liquidation et le recouvrement à Paris pour des gages très modiques dont souvent la valeur n'égalerait pas les dépenses qu'il y aurait à faire.
Votre comité de judicature a pensé qu'après que les états auront été réglés et arrêtés comme a l'ordinaire, qu'ils auront été remis au commissaire du roi; directeur de la liquidation en vertu de votre décret du 6 février, par lui Vérifiés de nouveau, examinés par Vos comités et définitivement arrêtés par nos décrets, rien ne devait plus suspendre 1 exécution du décret du 30 octobre, et que les anciens titulaires d'offices devaient être payés comme par le passé et sans être assujettis à aucunes formalités. C'est d'après ces principes que vos comités de liquidation, des finances, de l'extraordinaire et de direction de la liquidation m'ont chargé de vous présenter le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités de judicature, des finances, de l'extraordinaire et de direction de la liquidation, décrète ce qui suit :
« Lorsque les états des gages d'offices, pour les années échues jusqucs et y compris 1790, auront été vérifiés par le commissaire du roi, directeur général des liquidations, et décrétés par l'Assemblé nationale, sur le rapport qui lui en sera fait par le comité de judicature, l'administrateur provisoire de la Caisse de l'extraordinaire se concertera avec l'ordonnateur du Trésor public, pour faire effectuer le payement dans les villes, conformément à l'article 1er du décret du 30 octobre dernier. »
. J'observe à M. le rapporteur que le projet qu'il propose est absolument contraire à un décret rendu, il y a peu de jours. J'observe à l'Assemblée qu'il serait à désirer que M. le rapporteur, avant de décréter le projet qu'il propose, voulût bien se concerter avec quelques membres du comité oû la question qu'il présente a été singulièrement examinée et où on a reconnu beaucoup de dangers et beaucoup d'inconvénients à adopter la forme qu'il propose.
En voici une raison : ci-devant, c'étaient les receveurs généraux des finances qui étaient chargés de faire les payements des gages actuellement existants. Dan3 ce moment-ci, la compagnie de la recette générale des finances étant supprimée, le comité de la liquidation avait voulu se charger de payer encore dans les provinces ; mais il a réfléchi que ce serait retarder pour longtemps la solde de ces comptes et s'engager à conserver des commis et des employés; quoique leurs fonctions fussent infiniment peu considérables. Ce sont ces motifs, et d'autres dont je ne me rappelle pas, qui ont déterminé le comité à solliciter le décret du 6 février.
Je demande donc l'ajournement de celui qui vous est proposé et son renvoi au comité des finances.
, rapporteur. Ce que M. de Croix demande a été fait hier. Le comité général de la liquidation, dans lequel se trouvaient des membres de tous les comités qui concourent à la liquidation, a de nouveau examiné le décret du 6 février dont M. de Croix parle. Il a pesé lés inconvénients qu'il y aur.ait de faire payer par les anciens receveurs généraux des finances ; mais il a également considéré l'inconvénient majeiir qu'il y aurait d'obliger chaque propriétaire de gages modiques de venir pour cet objet poursuivre une liquidation particulière et un payement à Paris.
C'est après avoir balancé ces inconvénients qu'il s'est décidé à vous proposer, non pas de iaire faire le payement par les receveurs géuéraux des finances qui n'ont véritablement plus aucune fonction, mais bien par le Trésor royal, de concert avec l'ordonnateur de la caisse ae l'extraordinaire. „
Le comité a pensé que le décret du 6 février ne pouvait pas être appliqué aux gages des offices. Il a pensé qu'il y avait un décret du 30 octobre précédent qui était absolument contraire au décret du 6 février dernier, et qui ordonnait que le payement des gages des offices serait fait en province comme à l'ordinaire- C'est pour concilier ces deux décrets que votre comité général de la liquidation m'a chargé de vous proposer le projet de décret dont j'ai eu l'honneur de vous faire lecture.
Plusieurs membres : Aux voix 1
. Je retire ma proposition.
(Le projet de décret du comité est mis aux voix et adopté.)
se présente à la tribune pour faire un rapport au nom des comités des finances et de liquidation, pour la liquidation des offices des receveurs généraux (1).
. Monsieur le Président, l'impression en matière de finances est ordinairement ordonnée avant le rapport; il n'y a pas de matière où elle soit plus nécessaire. Je demande donc l'impression.
(de Saint-Jean-d1 Angély) appuie la motion de M. de Croix.
. En fait de finances on ne peut pas présenter de projet avant qu'il soit imprimé.
(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport et du projet de décret.)
, au nom du comité de l'emplacement des tribunaux et des corps administratifs. Les doctrinaires auxquels est confié le collège de Bastia ont présenté une pétition dans laquelle ils se plaignent de ce que le directoire du district de Bastia s'est emparé à force ouverte des bâtiments qu'ils occupent; ils demandent en même temps le payement de leurs salaires échus. Le district a commis une double contravention au décret : 1° il a fait choix d'un local sans en instruire le comité d'emplacement, et il ne lui était pas plus permis de s'emparer d'une propriété nationale que de celle d'un particulier; 2° il a évincé des instituteurs et fonctionnaires publics que les lois maintiennent dans la jouissance provisoire des maisons qu'ils occupaient au moment de l'émission de vos décrets. Les administrateurs disent, dans leur correspondance, que les bâtiments dont ils se sont emparés étaient occupés, il y a deux ans, par le premier président du conseil supé^ rieur. Sous l'ancien régime, un premier président d'outre-mer était une manière de pacha devant lequel on se rangeait toujours; et le calcul dés considérations avait déterminé les doctrinaires à user d'une grande patience. L'intention du gouvernement s'était manifestée, et malgré cela les doctrinaires ont été forcés d'attendre longtemps avant d'entrer en possession de la totalité du bâtiment. Le directoire a fait des ménagements qu'ils ont employés une objection contre eux. Elle ne prouve rien, sinon que les doctrinaires sont très patients et que le premier président, au contraire, souffrait impatiemment qu'ils vinsent le déplacer; ils étaient en possession au premier de janvier dernier. D'après vos décrets, les corps enseignants sont conservés dans la jouissance non d'une partie, mais de la totalité des maisons, enclos et jardins en dépendant. Il est très constant que chacun reprenne sa place et y reste. Il n'est pas plus possible que les administrateurs soient au collège que les écoliers à la maison de l'administration. Les réunir c'est assembler deux tumultes.
Le directoire doit restituer aux doctrinaires une jouissance dont vous
avez défendu de les dépouiller : ce sont d'utiles cultivateurs dans le
champ de l'instruction publique, et rien ne peut intéresser davantage
l'Assemblée que ce grand
« L'Assemblée nationale, considérant d'un côté que, par l'article 9 de son décret du 23 octobre, les bâtiments, enclos et jardins occupés par les congrégations chargées de l'instruction publique et vivant en commun, leur sont réservés; et de l'autre, que, par l'article 6 de celui du 16 du même mois, les corps administratifs sont tenus d'envoyer au comité de l'emplacement un mémoire expositif de leurs vues, et d'y joindre un devis estimatif, contenant l'étendue de l'édifice qu'ils jugeront leur convenir ; que le directoire du district de Bastia s'est entièrement écarté de ces dispositions, en s'emparant, de son autorité privée, de la très grande partie du collège de cette ville ;
« Décrète que les doctrinaires seront, en conformité du décret du 23 octobre, provisoirement rétablis et maintenus dans la jouissance des bâtiments, enclos et jardins dépendant du collège de Bastia, qu'ils occupaient, sauf au directoire du district de la même ville, ain i qu'à celui du département qui s'e3t emparé des bâtiments publics sans rattache du Corps législatif, à se conformer aux décrets des 16 octobre et 7 février.
« Quant à la demande en payement de la portion de traitement qui reste due aux doctrinaires, l'Assemblée l'a renvoie à son comité ecclésiastique, pour y être pourvu après qu'il lui en aura été rendu compte, s'il y a lieu. »
(Ce décret est adopté.)
donne lecture d'une lettre du président électoral du département de l'Indre, qui le prie de vouloir bien annoncer à l'Assemblée que M. Héraudin, curé de Chaiilac, a été nommé évêque de ce département. Le procès-verbal de cette nomination est joint à la lettre.
. Voici une autre lettre adressée à l'Assemblée par les administrateurs du-département de Maine-et-Loire :
« Messieurs,
« Nous aimons la Constitution et nous la faisons respecter. Vos décrets ont ordonné la prestation du serment civique aux ecclésiastiques fonctionnaires publics.
a M. Louet, évêque de ce département, a refusé le serment dans les délais prescrits par les décrets. Le corps électoral'a été convoqué par les procureurs syndics des districts, sur l'avis à eux donné par le procureur général syndic de la
dénonciation faite par le maire d'Angers, du défaut de prestation de serment de l'évêque.
« Dimanche, 6 février, les électeurs du département, réunis dans l'église cathédrale d'Angers, ont élu M. Pelletier, chanoine régulier de la congrégation de France, prieur, curé de Beaufort, dis rict de Baugé, dans notre département. Le défaut de prestauon de serment de M. Louet a rendu son évêché vacant, comme par démission : le corps électoral était aux termes d s décrets et les a suivis, persuadé que son patriotisme vous serait agréable.
« Angers,
A cette lettre est jointe celle du président de l'assemblée générale d § électeurs du département; elle est ainsi conçue :
« Réunis en assemblée électorale pour procéder à la nomination de l'évêque du département de Maine-et-Loire, nous avons été guidés dans cette importante opération par le zèle et le patriotisme que la nation attendait de nous. Vous nous avez rendu le droit des premiers chrétiens; le pasteur que nous avons choisi égale en vertus ceux de l'Eglise naissante. En vain le fanatisme et l'hypocrisie, se couvrant du voile de la vertu, tenteront-ils de tromper la crédulité des peuples, et de les armer au nom d'un Dieu de paix.
« Les bous citoyens entourent la Constitution, ils en soutiendront l'édilice; la religion n'aura que des ministres dignes de sa sainteté, et le fanatisme sera banni pour jamais du pays de la liberté.
« Angers,
Un membre annonce que les électeurs du département du Jura ont nommé à l'évêché de Saint-Claude, M. Guilloz, curé d'Orchamps-en-Venm* et membre de l'Assemblée nationale. ( Applaudissements.)
Il annonce également que presque tous les curés du district de Saiut-Claude ont prêié le serment civique.
Messieurs, vous avez mis à l'ordre du jour le rapport du comité militaire sur les invalides.
. Oui, Monsieur, mais en seconde ligne.
. Je prie l'Assemblée de décider si elle veut m'entendre.
le jeune. Messieurs, vous avez décrété que, jusqu'à l'époque de la convocation de la prochaine législature, vou3 ne vous occuperiez dans vos séances du matin que d'objets d'impositions ou constitutionnels.
Je demande donc que le rapport de M.Dubois-Crancé soit renvoyé à une séance du soir.
(de Saint-Jean-d'Angély). Je demande l'impression du rapport ce M. Dubois-Crancé. Il ne s'agit rien moinsquedela suppression de la maison des invalides. Je suppose que le comit a eu pour se décider des motifs importants ; mais encore il faut les connaître.
Plusieurs membres appuient la motion d; M. Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély).
(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport de M. Dubois-Crancé.)
Ce rapport est aUisi conçu :
Rapport du comité militaire, sur le traitemen des invalides de l'Hôtel, des invalides détachés, des invalides retirés avec pension, des soldes et demi-soldes, par M. Dubois-Crancé.
Messieurs, le comité militaire vous a présenté successivement toutes les bases d'organisation d'une armée de Français ; il est enlin parvenu à débrouiller ce chaos dont l'intrigue, toujours harcelant le pouvoir arbitraire, avait comblé la mesure. Il n'existera plus de places sans fonctions, de talents sans récompense ; la carrière est ouverte à tous les hommes également ; et si, par vos lois nouvelles, le riche sans mérite est destiné à végéter toute sa vie dans l'obscurité, le soldat sans protection et sans fortune pourra, s'il s'en rend digne, devenir maréchal de France. Tel sera, Messieurs, le résultat heureux de vos travaux sur l!organisation militaire.
Vous avez démontré que la véritable économie pour une grande uatiou consiste dans une exacte distribution de ses bienfaits ; et sans égard au poids de vos charges anciennes, de ces charges que vous avez mises sous la sauvegarde de la loyauté française, vous avez amélioré d'une manière très sensible et très juste le sort de toutes les classes du militaire; vous avez cru devoir aussi porter votre attention sur les derniers instants de la vie des hommes qui en ont consacré la pius belle portion au service de la patrie ; et vous avez voulu que.de grade en grade jusqu'au dernier soldat, chacun reçût de la nation une récompense proportionnée, qui le mît à l'abri du besoin.
Par suite de la même équité, vou3 avez appelé à jouir de ce bienfait la classe très nombreuse de ceux qui n'avaient point été récompensés d'une manière digne de leurs services (1). Cette surcharge vous honore : c'est ainsi, Messieurs, que l'Assemblée nationale doit répondre aux détracteurs de ses opérations, à ceux dont elle a réduit ou annulé les traitements, parce qu'ils n'ont eu à produire aucun titre légal des bienfaits qu'ils avaient usurpés.
Je suis chargé aujourd'hui, Messieurs, par votre comité militaire, de vous présenter ses idées sur l'hôtel des Invalides et les nombreuses branches de cette institution.
Tous les militaires,qui ont obtenu des retraites à titre d'invalides ou vétérans, se distinguent en quatre classes :
1° Les invalides détachés ;
2° Les invalides retirés chez eux avec un traitement;
3° Les soldes et demi-soldes des soldats retirés ;
4° Les invalides entretenus à l'hôtel.
Tous ces pensionnaires de l'Etat forment une masse d'environ 28,000 hommes, dont les traitements réunis coûtent près de 6 millions, mais dans une grande disproportion entre eux.
Nous fixerons d'abord votre attention, Messieurs, sur le sort des
habitants de l'hôtel des Invalides, de ces hommes, d'autant plus
intéressants qu'ils n'ont eu de l'état militaire que les épines, et que
leur cœur, encore plein de ce patriotisme brûlant qui les guidait dans
les combats,
II est d'autant plus urgent de vous occuper de leur sort que, par le riouvel ordre de choses que vousavez decrjfet' pour l'armee active, les quatre deniers que l'ou prelevait ci-devant sur les mas- ses, dont trois elaient applicable ci I'entretien de 1'bOtel, sont supprim6s, que les oblats sur le clerg6 sont confbndus dans laproprieienaiionale, que pmb.iblement les 350,000 livres que pavait annuellement la ferme generale pour tenir lieu du privilege des droits i'entr6e des invalides, vont Hre abolis, et qu'il n'appartient & cet lifltel que 100.000 livres de rente en eontratsur la ville, et 15,000 livres en propriete fonciSre, resie de 2 millions de traitenient umiuel auquelilest ius- luiil He nnnrvnir
Frappes da spectacle imposant de ce magni- fique bdtel, qu«* Louis XIV fit 6 ever pour ser- "vir d'asileaux veritables instruments desa gloire, vous eprouvez sans doute, Messieurs, un respect religi*;ux pour ce monument de justice et de re- r* r» r» ii'iioc"»n^
Louis XIV avaitvoulu rendre cet Gtablissement digue de son objei; inais les alms inseparables d'une administration nombreuse et compliquee Pont denafcuiG, et le brave soldat qui, parson courage et de longs services, a men teles regards et la reconnaissance de sa patrie; qui, epuise de fatigues et de blessures, a bien acquis le droit de metlre un iniervalle entre la dependunce etla mort, retrouve dans cet asile toutes hs passions subalternes qui, dC^uiseessous ees noms d'ordre, d'Sconomie, de police, lui presents sans cesse de nouveaux devoirs a remplir, des punitions i eviier, des privations penibies a essuyer!
Je ne cherdierai i oint a vous engager dans la discussion des details miautieux de i'administra- tion de l'hdtel des Invalides; comme represen- tantsde la nation, nous ne devuus pas Stre inu- tilement les d^tracteurs ni les apologistes de quelques individus. Des que I'on a que j'etnis le rapporteur nomm6 par voire comit6, on ra'a entoure d'obscurii6s, de contradictions. Les uus m'ont port6 les plainies les plus ameres, les auires m'ont vante la sagesse de leur admiuistraiion. J'ai ecarte tous ces chocs d'int6r6ts divers; mais il est de fait qu'exceple ceux qui out quelque part clans l'alminisiration de l'hotel, qui jouis- sent de faveurs parli uiiere.% ou ceux en qui la perte des facultes physiques a detruit le moral, tons deraandent a respirer I'air pur de la liberie.
Ge n'est done pas le faste des editions qu'il faut ici considered mais 1'utilite de la chose, mais l'interfit de ceux que Ton veut et que I'jon doit recompenser de Jeurs bons services.
L'emretien de l'hfltel des Invalides a coute 2 millions en 1789.
M. de la Tuur-du-Pm avait fait espt rer des eco- nomies importanies en 1790, et eeperdant la de- pense de ceite an nee a monte a 2,100,000 livres, ce qui est justili6 par les etats remis a voire co- mite par le sieur Freminville, tresorinr des Inva- lides.
Le dernier 6tat de revue prouve que Toil y entretient 418 officiers de tons grains et 2,45't ! sou—officierset sol lat*. Eh bien, Messieurs, oil'rez a cliaque soldat et sous-ol'ficier le inaximuai que vous avez decreie pour les pensions de rdraitea venir. Donnez 600 livres aux lieutenant?, 800 li- vres aux capitaines, 1,000 livres aux comman- dants de baiaillon, et 1,200 livres aux lieute-
nants-colonols, demain 1'hdtel sera vacant; il n'y restera que le pouverneoaent et ce qu'on aj/pelle manicrots ou moines-lais.
Cupendanl cette munilicence qui, sous I'ancien regimn, eat paru exorbitante, ne coiitera pas 900,000 livres.
En voici le calcul releve d'aprSs le deniier etat de revue:
t lieutenants-colonels a 1,200 livres 401)1. 20 com ma nd ants de bataillon a 1,000 livres................ 20,000
147 capitaines a 800 livres...... 117.600
144 lieutenants 4 t>00 iivres..... 146,400
141 ma echaux des loeis & 422 I.
6 8. \ d..................... 69,525 444 sous-officiers que je mets tous de la premiere elasse, a 300 livres................. 133,200 1811 soidais a 227 1. 10 s........412,002
Total................... 897,1281. »s.
Les £tats qui ont ete remis a votre comile par l'adroinislration, portent ladeperise habituelle et necessaire de ces braves militaires & l'hotel, sans compter tous les acccssoiri'8 a 1,391,436 livres. L'economie sur cet article seul sera done evi- demment de 494,308 livres.
Le comite vous propose, Messieurs, d accorder 100 litres par aa de plus aux invalidcs qui ont perdu un bras, uae jainbe, qui sont prives de !a vue; etifin a ceux qui par leurs intimites ac- tuelles sont classes parmi ce qu'on appelle moines-lais.
On ne manquera pas dc vous dire que M. dc Saint-Germain a d6ji fait 6vacuer en partie cet hfttel, que la prudence et l'humanitg du gouver- uement ont ete a(llig6es du spectacle douloureux, de plusieurs invalided que leur intemperance ou leur defautd'ordre et de prevoyance avait reduits a lelat le plus deplorable, et qu'ils ont 6te trop heureux de rentrer & I'h6tel; mais le comii6 vous observe que ces soldats invalides u'ont pas 6t6 rmvoves avec une pension aussi forte de moitiG que celles qu'il vous propose : qu'ils trouveront parlout uu parent, un ami, un Granger m6me qui se chargera de les recueillir a ce prix; au surplus, le comitS vous indiquera ci-apr&s des moyens simples de suppleer a ce que les inva- lides pourraient perdre dans la suppression de 1'hdtel et a l'abandon auquel l'iineret prive, ileguis^ sous le voile de i'humanite, suppose que seraient exposes ces braves gens.
On ]> urra objecter, d'autre part, que plusieurs de ceux qui porte: t le nom et l'liabit tfinvalide n'ont pas merits cette faveur, qu'il est injuste d'apphquer la merne recompense a un suppdt de la police qu'a un ancien militaire qui a verse son sang et consomme ses faculties au service. Je sais qu'il y a eu sur cet objet des erreurs de commises et qu'il en est ni^me parmi les ofli- ciers qui n'ont jamais servi la patrie. Mats, Mes- sieurs, s'il est de votre sagesse de prevenir tous les abus dce gen e pour I'avenir, le comite a pense qu'il ser .it de la diguiie de la nation de ne pas se livrer a des reeherches qui ne ten- draii'nt qu'a reduire aa dese-poir des individus qui n'ont pas d'autre existence tt pour qui la mort deviendrait un bietafait.
II ne sagit point ici de ci s notnmes luxueux qui, abreuves du sang du pen pie, ue pouvaient en 6tre rassasies,. mais de malheureux peres de famiile, a la subsistance desquels vous devriez
pourvoir quand ils n'y auraient pas d'autre titre que leur misère et votre humanité.
Le sort avantageux que vous avez destiné à tous les anciens militaires, par vos décrets sur les pensions, vous assure que désormais très peu de ces braves gens eussent sollicité l'hôtel pour retraite. Ainsi, sous ce rapport, ce monument fastueux ne peut plus être considéré par vous que comme le sépulcre où devraient s'éteindre en peu d'années ceux qui l'habitent aujourd'hui. Ces vétérans eussent encore . moins sollicité d'être employés dans les compagnies d'invalides détachés ; et celui qui a mérité le prix de 40 ans de sacrifices veut et doit en jouir en paix au terme de sa carrière; d'ailleurs ces invalides détachés vont devenir inutiles à la garde des forts qui seront la plupart supprimés; il ne resterait pour les occuper que les maisons royales; mais vous avez pourvu à ce genre de service en décrétant la liste civile de Sa Majesté.
Cependant l'artillerie demande à conserver ses compagnies de canonuiers invalides parce qu'elles servent les batteries des côtes, et qu'il serait impossible de suppléer à ce service, en cas de guerre, sans augmenter le corps actif de l'artillerie, ou sans nuire au développement de r os force* militaires dont vous avez combiné toutes les relations.
Nous vous proposons, en conséquence, de déclarer qu'attendu les récompenses militaires qui ont été décrétées pour les différents grades, suivant la nature et la durée des services; et l'intention qu'a manifestée l'Assemblée naiionale d'assurer,à tous les anciens serviteurs de la patrie, des ressources suffisantes pour achever leur carrière dans l'aisance et la liberté, il ne sera plus reçu d'invalides à l'avenir autre* que ceux qui, destinés à servir les batteries des côtes, seront pris dans l'artillerie parmi les officiers, sous-officiers et soldats que des infirmités prématurées ou des accidents résultant de leur service mettraient hors d'état de le continuer avec la même activité avant l'époque fixée pour obtenir des retraites. Enfin, pour prévenir toutes réclamations, nous allons pourvoir aux besoins du petit nombre de ceux qui, accablés de blessures et d'infirmités, sans parents, sans amis, vous demanderaient un asile.
Ces asiles, Messieurs, doivent être multipliés dans le royaume. Il faut que le citoyen qui a perdu pendant une longue période d'années, dévouées au service militaire, ses parents, ses amis, toutes ces relations du sentiment si douces à éprouver encore vers le déclin de la vie, puisse du moins revoir les lieux où il est né et qui rappelleront à ses derniers moments cet âge dont l'homme conserve un souvenir auquel il aime à être ramené.
Chaque département offrira un hospice à ces braves et intéressants militaires. L'hôtel des Invalides ne rassemblait que les soldats du Trône, inconnus et même indifférents à cette cour dont ils avaient servi les passions. Les 23 hospices de la patrie montreront aux citoyens attendris et reconnaissants les soldats de la nation.
Le comité a donc pensé que chaque déparlement serait jaloux de remplir un devoir si cher envers ses concitoyens, et il vous propose d'établir dans chaque ville, où se lient l'administration générale et sous sa surveillance, un hospice où seront recueillis librement tous les hommes qui ont bien servi leur pays et qui désireront y entrer en payant, à titre de pension, les trois quarts de leur traitement.
Le comité est convaincu que ces établissements vraiment fraternels, où les pensionnaires seront vraisemblablement plus nombreux, qui, dans les circonstances présentes, seront aussi faciles à former que peu dispendieux, satisferont le vœu de tous les bons citoyens; que la tendresse et la reconnaissance en seront les gouverneurs et que la paix, le bien-être et la liberté adouciront la rigueur de ces derniers instants que la nature a marqué pour les héros, comme pour les êtres vulgaires. Les invalides détachés ont un sérvice actif, et doivent participer aux mêmes avantages dans leurs corps que les troupes de ligne ; mais votre comité a cru de toute justice d'accorder à ceux que vous, supprimez la totalité de leurs appointements pour retraite. Libres enfin de revoir leurs foyers, appartenant à la France entière, ils auront la faculté de choisir entre la cohabitation paisible avec leurs concitoyens, ou les hospices que nous vous proposons de décréter. Les officiers et soldats qui ont 24 ans de service soit dans les troupes de ligne, soit dans les détachements d'invalides, obtiendront la décoration militaire affectée à leur grade. Ces deux objets intéressants étant réglés, il nous reste à vous entretenir des invalides retirés chez eux avec pension, des soldes et demi-soldes.
Ces deux classes très nombreuses, puisqu'elles excèdent 20,000 hommes, ne coûtent à l'Etat que 2,404,081 1. 10 s.
La majeure partie de ces vétérans n'a de traitement que 3 sols par jour ou 54 livres par an, et un habit tous les 4 ou tous les 6 ans. Cependant 2,100,000 livres employés à là solde, sans compter 300,000 livres de masse d'habillement, font 105 livres par chaque individu ; il y a donc d'étranges disparates dans la distribution de ces récompenses ; et l'ordonnance qui fixe à 100 pistoles la plus forte pension qu'on pourra obtenir sur les invalides prouve qu'il y a eu des abus. Il sera donc important de vérifier tous ces détails;et, pour éviter les doubles emplois contraires à vos décrets, de séparer de l'état de la guerre tout ce qui est retraite ou récompense militaire et de le réunir au travail des pensions, le comité militaire a pensé qu'il paraissait convenable de confondre en une seule masse le traitement des vétérans retirés avec solde ou demi-solde, et les économies résultant du nouvel ordre de choses que nous avons l'honneur de vous proposer afin d'améliorer de tout ce qu'il sera possible le sort de ces braves gens et de n'attendre que de leur extinction le bénéfice réel que doit faire la nation; et pour rendre cette opération plus sensible, je dirai que la masse de fonds applicables chaque année à l'hôtel des invalides, était
de............................ 2,000,000 liv.
Les i h valides détachés coûtaien t. 895,898
La masse de l'habillement..... 300,000
Les pensions et gratifications aux officiers, sous-officiers et soldats invalides hors de l'hôtel. 677,065
Les soldes,demi-soldes,pensions et récompenses militaires payées
à des soldats retirés............ 1,340,024
Les soldes conservées aux corps réformés de grenadiers à cheval
et de la gendarmerie............ 128,450
Pensions à des officiers et soldats suisses retirés.................. 180,040
Total..... 5,521,477 liv.
Sur quoi :
Les invalides demeurant à l'hôtel, d'après le plan proposé,
coûteront environ.............. 950,000 liv.
Les 8 compag n i es de cano n n iers-invalides conservées pour solde.. 93,588
Masse d'habillement de ces 8 compagnies d'invalides, à 34 li- -
vres par homme................ 16,320
Les invalides détachés........ 802,310
Total..... 1,862,218 liv.
Restent sur 5,511,477 livres, 3,649,259 livres,au lieu de 2,325,579 livres à répartira ceux qui ont obtenu des récompenses militaires, après avoir pourvu aux traitements qu'il conviendra d'accorder aux administrateurs et employés de l'hôtel des Invalides.
Ainsi, Messieurs, sans augmenter les charges que la nation supportait après avoir pourvu d'une manière digne d elle au sort des invalidés, soit demeurant à l'hôtel,, soit détachés dans les forts, vous pouvez améliorer, d'une manière très sensible, l'état de 18 à 20,000 braves et anciens militaires, qui n'ont obtenu qu'une récompense trop modique de leurs services ; car d'une part, vous avez une plus-value de 1,323,680 livres sur la masse -, et de l'autre, vous avez à récupérer tous les traitements qui ont été usurpés, sur cette partie, par des hommes riches et en faveur. Enfin la dépense actuelle sera la même ; mais elletournera tout entière au profit de ceux pour quiéllea été établie, et sans augmenter les charges delà nation, vous doublerez les moyens d'existence de ces braves vétérans qu'elle a dû et voulu récompenser.
En admettant ces bases, Messieurs, vous n'aurez donc plus qu'à vous occuper de l'emploi de l'hôtel des Invalides, du mobilier qui s'y trouve et des traitement faits ou à faire aux agents de l'administration.
Le comité vous propose de renvoyer également au comité des pensions tout ce qui concerne les administrateurs actuels et leurs agents, ainsi que ceux qui ont obtenu des récompenses de leurs anciens services; le comité militaire n'a pas cru cet objet de sa compétence; mais le sort de l'état-major de cet hôtel sera réglé sur les bases que vous décréterez pour les états-majors des places de guerre à réformer.
Quant à l'hôtel et ses accessoires, c'est une propriété nationale qui convient à la ville de Paris, pour former soit un corps de casernes, soit un hôpital également utile au faubourg Saint-Germain, au Gros-Caillou et au quartier Saint-Honoré, et vous accueillerez, sans douté, les propositions que vous feront ses administrateurs pour cette acquisition.
iLe mobilier des Invalides appartient également à la nation ; nous vous proposerons d'en ordonner l'inventaire et la vente à son profit; mais vous ne pouvez refuser aux Officiers, sous-officiers et soldats qui vont en sortir un habit neuf complet et le petit équipement d'usage qui leur était affecté, dont la note est annexée au présent rapport. Nous vous proposons de faire payer aussi, sur le prix de cette vente, 5 sols par lieue à chaque .invalidé pour se rendre à ses frais dans la retraite qu'il lui plaira de choisir, et dix sois par lieue à chaque oflicier.
Telles sont, Messieurs, les vues de justice etdé bienfaisance de votre comité militaire sur les
très intéressants objets que je viens de vous exposer. En conséquence, nous avons l'honneur de vous proposer le projet de décret suivant :
projet de décret.
Art. 1er L'Assemblée nationale ayant décrété
pour tous les grades militaires des récompenses proportionnées aux
services, déclare qu'à l'avenir il ne sera plus reçu d'invalides autres
que pour le servirce de l'artillerie sur les côtes; en conséquence, à
dater du 1er avril 1791, l'hôtel royal des Invalides et toutes les
compagnies d'invalides détachées,à l'exception des huit compagnies de
canonniers réparties sur les côtes, seront et demeureront supprimés.
Art. 2. Tous traitements à des officiers, sous-officiers ou soldats retirés ne feront plus partie des fonds de la: guerre ët seront réunis au travail du comité des pensions.
Art. 3. Le traitement annuel des différents grades pour les officiers, sous-officiers et soldats actuellement demeurant à l'hôtel sera fixé, ainsi qu'il suit :
Aux lieutenants-colonels________1,200 1. s. d.
Aux commandants de bataillon.......................1,000 » >»
Aux capitaines..............800 » »
Aux lieutenants.................600 » »
Aux maréchaux des logis en
chef. ................... 422 3 4
A tous les sous-officiers— 300 10 »
A tout soldat invalide....... 227 10 »
Art. 4. L'Assemblée nationale, prenant en considération particulière là situation de ceux qui ont été les plus maltraités à ia guerre, accorde 100 livres de gratification annuelle, en sus des traitements ci-dessus désignés, à tous officiers, sous-officiers ou soldats invalides retirés à l'hôtel, qui se trouvent privés d'un bras, d'unejambe, de la vue, ou qui, par d'autres accidents quelconques, sont dans la classe dite moines-lais.
Art. 5. Tous les traitements ci-dessus désignés leur seront payés sans aucune retenue, mois par mois, partout où ils désireront fixer leur retraite, et sans frais; mais ils ne jouiront à l'avenir d'aucun autre privilège pécuniaire, ni de leur habillement.
Art. 6. Ceux des officiers invalides qui se croiront lésés par le présent décret et auront à réclamer des droits plus étendus, à raison de l'ancienneté et de la qualité de leurs services, dans les troupes de ligne, la maison du roi, ou la maréchaussée, avant d'avoir été reçus aux Invalides, pourront opter entre le traitement ci-dessus désigné et celui qui leur appartiendra en vertu des décrets du 3 août 1790, concernant les récompenses militaires, à la charge par eux de justifier de leurs titres au comité des pensions.
Art. 7. Les ofliciers, sous-officiers et soldats des compagnies d'invalides détachés, et qui sont réformés par le présent décret, auront pour retraite la totalité des appointements dont ils ; jouissent, dans la même forme et aux mêmes conditions que les officiers, sous-officièrs et soldats actuellement résidant à l'hôtel, désignés dans les articles 5 et 6 du préseut décret. IIS pourront de plus obtenir la décoration militaire attachée à leur grade, s'ils ont eu, à dater du 1er janvier 1791, 24 années de service, tant dans les troupes de ligne que dans les compagnies d'invalides détachés.
Art. 8. Les huit compagnies de canonniers invalides seront conservées, sous le nom dé canonniers vétérans, pour le service des côtes et places maritimes. Leurs officiers, sous-officiers et soldats ne pourront être tirés que des troupes du corps de l'artillerie; et ils' devront être encore susceptibles de remplir les objets de ce service. Ils y seront considérés, comme en activité, pour obtenir les pensions de retraite, ainsi que les décorations militaires relatives à leur grade et ancienneté. Ces compagnies continueront à jouir de leur solde et appointements actuels ainsi que de leur habillement, dont il leur sera fait une masse particulière à prendre sur la masse générale.
Leur uniforme sera le même: mais le bouton portera un canen dans le milieu et aura pour légende : vétérans de la patrie.
Art. 9, Les directoires dès départements sont avertis par le présent décret d'étaDlir, dqns le plus court délai,sous leur surveillance immédiate et dans les endroits le§ plus sains, un hospice dans chaque département, destiné à recevoir les officiers, sous-officiers et soldats, soit invalides, soit retirés après 30 années de service effectif, et qui désireraient finir leurs jours en communauté, en payant, à litre de pension alimentaire, les trois quarts de leur traitement.
Art. 10. Ces lieux de retraite porteront le nom l'hospice* de la patrie,
Art. 11. Au moyen des arrangements susdits^ la nation rentre en possession de l'hôtel des Invalides et de tous les biens y appartenant, tant en fonds qu'en contrats, droits a'oblats, indemnités sur la ferme générale; le tout produisant 700,000 livres de rentes, non compris la valeur de l'hôtel; et renvoie au comité des finances et d'aliénation, les propositions ultérieures à faire sur ces objets.
Art. 12. Le mobilier de l'hôtel |ea Ioyalid^s sera vendu au profit de la nation, et sur le prix de cette vente il sera fourni à cnaque officier, sous-officier et soldats-invalides demeurant à l'hôtel, un habit neuf et un petit équipement complet, tel qu'il est annexé au présent décret, indépendamment de 10 sous par lieue pour chaque officier, étde 5 souspay Jiepe ppur chaque sous-officier et soldat, poqr se rendre h, destination qu'il lui plaira de choisir.
Art. 13. L'Assemblée nationale renvoie à son comité des pensions toutes demandes en traitements ou indemnités qui pourront être faites,scqt par les agents de l'adminisiration des Invalides, soit par ceux qui ont obtenu précédemment des pensions sur les fonds de l'hôtel,* pour lui en rendre compte incessamment,
Art. 14. Le traitement de l'état-major de l'hôtel des Invalides supprimé sera réglé sur Jes. bases qui seront décrétées pour les. états-majors des places de guerre
Art. 15. L'Assemblée ordonne à son comité des pensions de s'occuper incjèssaipnjient dé vérifier l'état des différents traitements accordés sur les fonds des In valides, soldes, demi-soldes et autres récompensés militaires; de ramener aux principes et à l'esprit des décrets pepx ep faveur desquels on s'en serait écarté, de faire une masse de la totalité des ronds que coûtaient les différents objets énoncés 4ans ie présent rapport et, après avoir satisfait aux articles du présent décret, de présenter à l'Âss.emblép moyens d'amélioration du sort àès vétérans retires chez eux, sans modification ni augmentation de la dépense totale qui était annuellement appliquée s tous ces dé-
tails; et jusqu'à ce que cela soit réglé, ils continueront à être payés comme par le passé.
Signé : Alexandre de Lameth, président ; Victor de Broglîe, secrétaire; Rostaing, Dubois-Crancé, Félix de Wimpffen, J. Menou, Louis de Noailles.
État du linge et mobilier affectés à chaque officier, sous-officier et soldat, invalide.
Officiers de tous les grades ont, tant en magasin qué dans leur chambre,
Savoir :
Chemises............... .............................5
Mouchoirs ...................................5
Paires de chaussons....................................5
Cols de basin...................—...........5
Coiffes de nuit..................................5
Serviettes, compris celles du réfectoire.... 5
Essuie-mains....................................3
Couvert d'argent........................................1
Sous-officiers et soldats, dans tous les grades, ont, tant en ïpagagin que dans leur chanibre, Savoir :
Chemises....................................................3
Mouchoirs........................................4
Chaussons, paires........................2
Coiffes de nuit..................................2
Cols de basin ...................................2
Serviettes.......'........................ 2
Envirqn 60 à 80 hommes, qui perdent leurs urines, ou autres infirmités, ont de plus : Paires de chaussettes de toile.......... 2
Caleçons............................". 2
L'ordre du jour est ta suite de la discussion sur le tabac,
, rapporteur du comité des impositions. L'Assemblée a décrété hier la liberté de la culture, de la fabrication et du débit du tu bac ; c'est d'après ces vqes que votre comité vous pyopose le secoqd article,,
« Art. 2.
« L'importation du tabac étranger fabriqué continuera à être prohibée. *
Cette prohibition assure la main-d'œuvre pour nps ouvriers. La fabrication de nos tabacs continuera d'être aussi parfaite, leur assurera la préférence qu'ils ont obtenue, et pur conséquent donnera a notre commerce une branche qui est extrêmement avantageuse. (L'„artjcle 2 est décrété). /
, rapporteur. La liberté doit avoir de£ formes, lorsque c'est l'intérêt public qui les i|xe, personne n'^ le droit de s'en plaindre. C'est d'après ces principes que le comité a cru qu'il popyait vous proposer de charger les tabacs étrangers en feuilles,d'un droit par quintal. ke comité yous avait proposé, Messieurs, de fixer ce droit à 5QI ivres ; ma(s, délibérant hier sur la fixation de ççtte somme et calculant les avantages et les inconvénients d'ya droit pareil, i| a cru devoir vous proposer de réduire le droit à g livres par quintal. Voici ses motifs : vous n'ayez ps poijr objet 4'encoqrager la culture du tabac dans toute l'étendue du royaume. Vous désirez que les manufactures nationales conti-
nuent d'en approvisionner la majeure partie du royaume et d'en fabriquer et pour l'intérieur et pour l'extérieur. Or, %X vous pqrtez un droit trop considérable sur les tabacs en feuilles importés dans le royaume, c'est une véritable prime d'encouragement que vous donnez à la culture dans tout le royaume.
Messieurs, il est encore une vue politique que l'on a présentée au comité : les tabacs de l'Amérique sont assujettis à un droit de 50 livres par quintal pour être admis en Angleterre : ils y passent presque tous ; et si vous modérez votre droit,, les tabacs de la nouvelle Angleterre viendront presque tous en France. Il s'ouvrira une branche de manufacture intéressante pour la fabrication ; et votre droit porté à 25 livres seulement vous assure cette préférence. Il ne diminue pas l'impôt; car plus le droit est en relation directe avec l'intérêt public, plus il est productif.
L'Angleterre, sûre de ne rencontrer aucune concurrence, a imposé une charge considérable sur l'entrée des tabacs américains dans ses ports; il nous est facile d'attirer dans nos ports les Américains, et d'étendre nos rapports et nos relations avec eux. Ils nous doivent la liberté, nous sommes devenus libres comme eux, nous sommes leurs amis et leurs alliés ; il ne s'agit plus que de perpétuer cette alliance également utile pour eux et pour nous.
Ouvrons-leur donc pos ports, dégageqns-les de toutes les gênes de la fiscalité ; l'Angleterre verra baisser sa balance à notre avantage, et un léger sacrifice assurera à jamais le spccès de notre commerce et multipliera les sources de nos richesses et la masse de nos forces.
Telles sont, Messieurs, les observations qui ont déterminé votre comité à vous proposer de fixer le droit à 25 livres par quintal. Voici l'article que nous vous proposons.
« Art, 3. Il sera libre d'importer, par lés ports qui seront désignés, du tabac étranger en feuilles, moyennant une taxe de 25 livres par quintal. »
J'ai déjà eu l'occasion de vous entretenir de nos relations commerciales avec l'Amérique. Votre comité, Messieurs, vient de nous observer qu'en effet les tabacs américains, qui entraient dans les ports de l'Angleterre,étaient assujettis à un droit plus considérable, à un double droit ; et il vous a dit que votre intérêt commercial était d'attirer les tabacs d'Amérique, attendu que votre fabrication étant beaucoup meilleure que celle de tous les autres pays consommateurs, vous attireriez par là toute cette branche de commerce et que cette branche de commerce fournirait des bénéfices plus étendus.
Votre comité aurait pu vous, ajouter, Messieurs, que quoique les tabacs américains, chargés dans les ports d'Angleterre, payent un droit, double de celui qu'il vous propose, cependant les négociants américains trouvent encore des avantages à s'y rendre. Vous n'ignorez pas, Messieurs, les anciennes habitudest les anciennes relations qui unissent ces deux contrées» Un avantage considérable attache les négociants anglais aux négo-ciants américains, et les américains aux anglais; c'est que les négociants anglais accordent des délais considérables aux négociants américains ; de sorte que si le droit est double, ils en sont par là récompensés ; et vous ne pourries pas avoir un espoir fondé d'attirer parmi vous les
négociants américains, de les voir aborder dans vos ports, et y apporter leurs tabacs.
Messieurs, 1 Angleterre est toujours jalouse de conserver son commerce avec les Etats-Unis i elle fait tous les sacrifices nécessaires pour conserver ce comnaerce, et nous venons d'en avoir un exemple bleu frappant. Aussitôt que vous avez eu chargé les huiles américaines d'un droit, un courrier est parti pour Londres. Quelle en a été la suite ? Une proclamation du roi d'Angleterre a déclaré que les huiles américaines seraient exemptes d'impôts.
Déjà l'Angleterre sert d'entrepôt pour les tabacs américains, et c'est elle qui vous les vend. Aussitôt que vous en aurez allégé le droit, aussitôt que vous offrirez des avantages aux commerçants américains, comme tous les intérêts de nation à nation ne sont jamais fondés que sur des bénéfices réciproques, vous attirerez dans vos ports les négociants américains.
La proposition qui vous est faite de réduire à 25 livres le droit a paru exciter quelques murmures dans l'Assemblée. Quoique j'aie moi-même proposé le droit de 25 livres, d'après les cqnver-sations et les explications que j'ai eues, je crois qu'il serait bon encore de diminuer d'avantage ce droit- Mais, enfin, Messieurs, si vous ne voulez pas le diminuer, je vous supplie dé ne pas augmenter la taxe que vous propose votre comité. Dans mon opinion personnelle, je crois qu'une taxe de 12 livres est suffisante.
Je crois que l'avis de M. Pétion est celui qui doit être adopté ; car je soutiens qne non seulement l'intérêt, de la France n'est pas de charger les tabacs américains, mais même que son Intérêt bien entendu serait de ne mettre aucun droit et qu'enfin, si nous voulons tirer quelque chose, tout ce que nous devons faire, c'est d'imposer 10 livres par quintal.
Si quelqu'un veut combattre l'avis de M. Pétion et l'avis du comité, c'est-à-dire prétendre qu'on doit mettre un droit très considérable sur les tabacs étrangers importés en France, c'est à lui à parler» Je me réserve de lui répondre ; sinon je demande la permission de développer mon avis.
Je propose l'ajournement de la question [Bruit prolongé.Monsieur le Président, je demande que la. question soit ajournée jusqu'à ce que le comité diplomatique ait rapporté l'acte de navigation et les impôts divers mis par les Américains, tant sur les marchandises françaises qui fréquentent leurs ports que sur celles importées chez nous; car il ne faut pas favoriser les étrangers, mais bien calculer pour nos relations decommerce» (Mwmures.). Et dans le cas l'Assemblée voudrait modérer le droit, je demande que cette modératian ne porte que sur les tabacs qui seront importés par les navires français.
D'après le décret qui accorde la liberté de la culture, il n'y a qu'une considération majeure qui puisse nous occuper : c'est ce qui en résultera pour notre commerce avec les Américains.
Cette considération, Messieurs, est d'une grande importance. Si vous chargez les tabacs améri-cains d'un droit considérable, vous anéantissez les relations les plus utiles que cette nation ait avec nous : conséquemment,vous vous interdirez
à vous-mêmes la réciprocité utile de ces relations.
On vous a dit que les Anglais s'étaient emparés de la fourniture du tabac qui nous est faite. Cela est vrai; les Américains n'étant pas en état de fairel'avaDce des droits à payer en Angleterre, ce sont des négociants et navigateurs anglais qui font venir les tabacs, qui font les avances et qui ont tout le profit de ce commerce.
Pouvez-vous, maintenant, en établissant un droit de 25 livres par quintal être dans une concurrence utile avec les Anglais ? Je ne le crois pas. Les Américains éprouveraient toujours une grande difficulté pour faire l'avance du droit, et nos négociants français, dans l'incertitude du succès qu'ils pourront avoir en France, ne feraient aucune spéculation.
J'opine donc, en ne considérant plus les droits à établir sur les tabacs étrangers comme une ressource précieuse pour le fisc, j'opine pour la suppression totale du droit sur les tabacs qui seront importés sur les vaisseaux français; pour la réduction à 12 livres par quintal sur les tabacs importés sur des navires américains; et, quant à ceux qui arriveront par tou3 autres navires que sur des navires français venant de l'Amérique ou sur des navires appartenant aux cultivateurs et négociants américains, j'en demande la prohibition (Applaudissements.) El c'est ainsi, Messieurs, que vous établirez les principes de la navigation. (Applaudissements.)
Un traité de commerce fait avec l'Angleterre porte que les droits les plus forts sur les marchandises, parmi lesquelles se trouve le tabac, seront de 12 0/0.
Je demande que l'on ne statue sur la question qu'après que le comité diplomatique aura été entendu sur les dispositions de ce traité.
Si nous ne voulons pas voir l'Angleterre se saisir de cette partie dé notre commerce avec les Etats-Unis, il faut débarrasser léurs tabacs arrivant chez nous de toute espèce de contribution.
Je demande la suppression en entier de tous les droits.
Je pense que deux considérations importantes doivent nous déterminer à décider la question actuelle. D'abord, il est nécessaire d'encourager notre commerce avec les Américains, parce que les Américains sont nos alliés les plus naturels pour soutenir* pour défendre nos colonies ; ensuite, parce que les Américains peuvent nous fournir un grand nombre de matelots, des bois de construction et beaucoup d'autres objets dont nous manquons.
En second lieu, le meilleur moyen de nous lier avec les Américains, c'estde former avec eux des échanges. De quelle manière pouvons-nous le faire? C'est en prenant de leurs denrées, pour leur rendre de nos marchandises.
Les denrées qu'ils peuvent nous fournir, c'est principalement le tabac et le blé qu'ils nous apportent dans les années de disette ; mais leur meilleure denrée, c'est le tabac. Nous, nous pouvons leur fournir des marchandises de plusieurs espèces: c'est du vin, de l'eau-de-vie, des draps et une infinité d'autres objets qui alimentent nos manufactures. D'après cela, notre intérêt doit être pour fournir le plus dé marchandises possible; et comme ils ne peuvent nous fournir
guère que du tabac, il faut donc encourager l'apport de leur tabac en France,
Je ne dirai pas qu'il faut rendre ici la culture du tabac plus ou moins productive; ce n'est point là ce qui devrait nous arrêter; mais nous devons nous borner à ce point de vue important, qui est qu'en encourageant l'importation de tabac en France, nous facilitons par cela même le débouché des marchandises que nous pouvons fournir aux Américains, et que nous enlevons aux Anglais la vente qu'ils font eux-mêmes de leurs marchandises.
J'ajoute qu'il serait impolitique d'imposer même à 10 livres par quintal les tabacs venant des vaisseaux américains. Vous sembleriez par là exclure la navigation américaine de vos ports. Gui, Messieurs, il semblerait que, par cet impôt de 10 francs par quintal, vous avez voulu favoriser vos bâtiments. Or, Messieurs, entre deux nations libres qui doivent toujours se réunir, il ne doit point y avoir de différences. D'ailleurs, le produit que nous pourrions retirer de cette différence, ne vaudrait pas la peine de l'imposer. En conséquence, je demande la priorité pour l'avis qui tend à ne mettre aucune espèce d'impôt sur les tabacs venant en feuilles de l'Amérique.
Un membre : Je prie M. d'André,comme membre du comité diplomatique, de nous expliquer quel est l'acte de navigation qu'ont fait les Américains. (Murmures.)
Je ferai observer tout d'abord que le traité dè commerce entre la France et l'Angleterre, dont il a été parlé tout à l'heure, n'a aucun rapport avec l'importation du tabac américain.
D'un autre côté, puisque les Américains ont mis un droit de fret sur les vaisseaux français, puisqu'ils ont commis cette faute, il serait peut-être bon, pour les éclairer sur les véritables principes de la liberté du commerce, d'établir un droit de fret égal sur ceux de leurs vaisseaux qui arrivent dans nos ports, jusqu'à ce qu'ils aient eux-mêmes aboli le droit de fret qu'ils ont établi sur nos vasseaux.
Ce que vient dé dire le préopinant, répond, à mon ;avis, et anéantit la proposition qu'il vous fait de nous conformer à la conduite qu'ont tenue les Américains : il vous dit lui-même que c'est une faute qu'ils ont commise; et nous ne ferions pas mal,ajoute-t-il, de commettre la même faute. Quant à moi, je ne crois pas que le commerce se gouverne par des parités. Je crois qu'il est assujetti à des principes inaltérables, et qu'une fois que nous reconnaîtrons qu'il nous importe essentiellement d'établir les relations les plus intimes et les plus directes avec les Américains, nous sentirons que nous ne pouvons y parvenir qu'en donnant à l'importation du tabac la plus grande facilité.
Tout autre moyen nous conduit à acheter les tabacs par des négociants anglais, et par conséquent à faire une exportation de numéraire qui nous est absolument nuisible, et à détruire notre commerce qui n'existe que par les échange?. Car le commerce ne consiste pas à acheter des marchandises avec de l'argent; il consiste à échanger des marchandises avec des marchandises Si les Américains ont commis une faute à notre égard, en nous assujettissant à des droits auxquels nous ne devons pas être soumis, quelle doit être notre marche, nous qui voulons,
nous qui désirons lier des rapports commerciaux avec eux? C'est d'affranchir les denrées qu'ils nous apportent, ou les denrées que nous allons porter chez eux, de tous droits, et de préparer ainsi le moyen de former des échanges avec eux et de faire que nos fabriques de tabac très perfectionnées puissent en vendre dans tous les marchés de l'Europe à 10 sous la livre, ce qui établit une telle différence en leur faveur qu'aucune nation ne pourra lutter avec nous pour ce commerce.
Je ne sais pas si cette proposition un peu réfléchie ne pourrait pas nous conduire à la mesure d'affranchir le tabac américain de tout droit, et de faire disparaître cette distinction très inutile pour nos finances entre les navin s américains et les navires français, distinction qui ne produira presque rien; distinction qui n'aura pas l'avantage d'encourager notre marine, car elle le sera suffisamment, lorsqu'elle trouvera des profits dans le commerce qu'elle fera avec l'Amérique; distinction d'autant plus inutile que, comme tout le monde le sait, les Américains ont peu de vaisseaux, et que notre commerce en a beaucoup.
C'est donc un véritable avantage pour nous de ne pas établir cette distinction. Je demande donc qu'il soit décrété que les tabacs importés en feuilles, par des vaisseaux français ou américains, seront exempts de tous droits dans tous les ports de France. (Applaudissements.)
Je n'ai pas reconnu l'Amérique septentrionale dans les tableaux qu'en oni faits les préopinanls et je ne crois pas que de longtemps elle soit pour nous une puissance à craindre ou à rechercher. (Murmures.)
Ce n'est pas le moneut de le prouver et je ue crois pas même qu'il soit d'une bonne politique de calculer nos intérêts avec elle sur ce qu'elle sera un jour à la nation française.
Je dirai seulement que l'Amérique septentrionale possède, à l'exception des vins et des huiles, tout ce que nous possédons nous-mêmes; toutes les autres denrées y croissent en meilleure qualité et en plus grande quantité.
Ils ont établi, depuis l'époque de leur liberté, un grand nombre de manufactures pour les marchandises grossières et n'ont pas besoin de la France pour cette partie du commerce : les marchandises manufacturées fines seront toujours tirées de l'Angleterre; la France même, qui a de plus grands moyens de ce côté-là,ne renoncera jamais à ses habitudes d'aller chercher chez ses voisins ees objets de luxe et de frivolité.
Si nous faisons à l'Amérique de trop grands avantages par la suppression de tout impôt sur les tabacs, nous faisons un tort manifeste à la France. Jusqu'à présent, les tabacs américains sont d'une qualité bien supérieure; mais il est possible que le nôtre s'améliorera et deviendra tout aussi bon. Je ne vois donc pas pourquoi nous donnerions aux étrangers une concurrence avantageuse.
Un conséquence, je crois que les raisons du préopinant ne sont pas fondées et ne peuvent empêcher q ie l'article du comité ne soit adopté. (Applaudissements à gauche.)
Je pense que la priorité doit être accordée à l'opinion de M. Pé* tion. Je crois qu'un droit modéré,te-t que 12 livres par quintal,réunira tous les avantages. Je supplie l'Assemblée de ne pas perdre de vue ce grand
principe de commerce et d'impôt, c'est que les droits exorbitants sont un appât pour la contrebande. Dès ce moment,ces droits deviennent improductifs. Or, je supplie l'Assemblée de calculer que le droit de 12 livres par quintal est encore un droit de 40 à 45 livres 0/0 sur le tabac qu'il s'agirait d'importer : je la supplie d'observer qu'un droit de 25 livres par quintal serait un droit de 100 0/0; or, un pareil droit est impossible à percevoir. Il ne faut pas perdre de vue la maxime qu'en finance 2 et 2 ne font pas quatre. On ne double pas le produit de l'impôt en doublant les droits.
L'expérience nous a appris que le fisc lui-même avait détruit ce droit en cherchant à l'éxagérer. L'Angleterre nous a donné à cet égard un exemple à jamais mémorable par la sagesse avec laquelle elle a fait produire, en le diminuant, le droit qu'elle avait exorbitamment imposé sur les thés. C'est à la fabrication du tabac que la France doit s'attacher.
Actuellement la grande fabrication du tabac de l'Europe est en Angleterre; et les liaisons qui se sont formées entre elle et les planteurs et négociants américains ne pourront être rompues que par une violente secousse. Pour rompre des liaisons aussi anciennes, il faut un intérêt considérable. Les planteurs et les négociants américains sont liés aux planteurs et négociants anglais, non seulement par l'habitude, mais encore par la dette immense dont ils sont en arrière.
Pour rompre cette liaison, il faut que l'intérêt de la dette des Américains envers l'Ecosse et l'Angleterre soit couvert par le bénéfice qu'ils feront en vous apportant le tabac. Or, une diminution de 25 livres au quintal ne suffira pas pour produire cet effet en entier; il faut porter cette diminution jusqu'à 12 livres.
, rapporteur. J'observerai que l'Assemblée a déjà renvoyé à ses comités le soin de rédiger un acte de navigation et qu'alors on s'occupera de tout ce qui regarde cette partie intéressante.
Plusieurs membres demandent l'ajournement de la discussion.
(L'ajournement est repoussé par la question préalable).
On a assez parlé pour les Américains; je vais parler pour le Trésor public de France. (Applaudissements à gauche; murmures à droite.)
Hier, on nous reprochait de vouloir ruiner le Trésor public; aujourd'hui que nous voulons en sauver quelques débris, on nous en fait un crime.
Je demande la priorité pour l'article du comité;
Plusieurs membres : Aux voix!
Je ne combattrai pas la nouvelle théorie du commerce que vous a exposée M. Le Chapelier, ni les erreurs de M. d'André sur le continent de l'Amérique.
Je respecte les Américains et les vertus qui leur ont fait conquérir la liberté. Je saurai cependant combattre ici une proposition dont l'adoption leur serait avantageuse, lorsque l'intérêt de la France exige qu'elle soit combattue. Si vous diminuez les droits sur les tabacs d'Amérique, il faudra augmenter les droits de fabrication, de licence ; ce sera un impôt que vous mettrez sur le pauvre.
Je demande donc que, par considération pour la classe indigente, on mette sur les tabacs venant de l'Amérique un impôt qui ne sera payé que par les riches, car eux seuls useront de cette denrée.
Plusieurs membres à gauche demandent que la discussion soit fermée.
, Je n'entends rien aux idées extraordinaires du préopinant. Il me semble au contraire qu'en favorisant l'importation des tabacs américains non fabriqués, vous fournissez de l'ouvrage aux ouvriers français, et vous faites fleurir nos manufactures. Le moyen de favoriser nos ateliers est, ce me semble, d'attirer dans nos ports des marchandises qui se manufacturent en France ; en conséquence, je persiste dans ma première opinion.
Je demande que pour fixer les opinions on décrète l'article 6 avant celui qui est en discussion.
Hier, nous avions les moyens de défendre les intérêts du Trésor public ; aujourd'hui, nous ne pouvons chercher qu'à guérir la plaie qui lui a été faite... {Murmures.)
Je demande que M. Malouet soit rappelé à l'ordre, car il ne parle jamais autrement des décrets de l'Assemblée.
Ceci, Messieurs, n'a rien de contraire aux décrets; quand ils sont rendus contre mon avis, je sais les respecter...
Oui, en les insultant.
Je dis mon opinion. Oh ne peut donc plus espérer de tirer un grand parti, pour le Trésor public, de ce qui vous reste à faire sur le régime du tabac ; mais vous pouvez encore en tirer un grand parti pour le commerce, si d'une part vous offrez à la navigation nationale un nouveau débouché qu'elle n'a pas encore.
Vous pouvez. Messieurs, à présent que la liberté est décrétée, vous pouvez la rendre avantageuse à la nation, en offrant l'emploi de 100 vaisseaux de France ; mais vous ne pouvez parvenir à ce but-là qu'en affranchissant le tabac américain de tous les droits, lorsqu'il sera importé sur des navires français.
Or, Messieurs, au moyen de la supériorité effective qu'ont vos manufactures, Vous pourrez devenir les fournisseurs exclusifs d'une grande partie de l'Europe. Alors, Messieurs, vous conserverez, vous augmenterez les relations de la France avec les Etats-Unis qui, à ce qu'il m'a paru, ne sont pas encore suffisamment connus; car les Etats-Unis ont 40,000 matelots qui sont prêts à être au service de l'Angleterre ou au service de la France.
Je persiste à vous prief dé prendre garde que les intérêts de l'Alsace n'influent encore sur la taxation. (Murmures et interruptions.)
Je vous prie, Monsieur le Président, de rappeler à l'ordre M. Malouet, qui prêche la guerre civile, en disant que l'Al-sace influe sur nos délibérations.
Les considérations politiques que e vous indiquais s'opposent peut-être à ce que
vous mettiez par chaque quintal de tabac, qui coûte 10 livres, un droit de 25 livres, ou autrement de 250 0/0. Comme le nombre des riches est moins considérable que celui des pauvres et que les pauvres et les gens médiocres n'usent que de marchandises médiocres, vous ne tireriez pas beaucoup de ce droit. Votre intérêt même n'est donc pas contraire aux considérations politiques que je vous présente : elles sont la base d'un acte ae navigation qui serait favorable à l'exportation et à l'importation sur vos vaisseaux. Ces principes sont ceux de l'Angleterre, et lui ont assez réussi pour que vous n hésitiez pas à les reconnaître, et à en faire l'application.
J'insiste donc sur ce que, conformémentàl'avis de M. Pôtion, le droit ne soit que de 12 livres; et je demande, de plus, que le tabac américain, apporté par des vaisseaux français, soit affranchi de ce droit.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
Je demande la parole.
Avez-vous quelque chose de nouveau à dire? Je tous observerai d'ailleurs que toute chaleur est inutile pour éclairer la discussion.
Je connais trop mon collègue pour n'être pas assuré qu'il n'a pas voùlu, et qu'il ne nous a pas soupçonnés de vouloir mêler des intérêts particuliers aux grands intérêts de l'Etat.Quand on fait des observations qui embrassent les deux mondes, elles ont besoin d'être mûrement réfléchies, et il est possible qu'elles ne soient pas toujours d'une grande justesse... La Révolution de l'Amérique nous a donné l'espérance de grandes relations commerciales avec les Etats-Unis : elle nous a rendu le service essentiel de nous donner un grand exemple par ses efforts heureux pour la liberté...
Je vais, puisqu'il le faut, répondre à M. Pétion par des chiffres.Sans doute, la consommation du tabac précieux ne sera pas très considérable dans ces premiers moments; mais eUe le deviendra quand le calme, entièrement rétabli dans le royaume, aura ramené les Consommateurs de marchandises de luxe, qui s'en sont expatriés. Il entrait en France 30 millions pesant de tabacs américains ; ces 30 millions produiraient à 25 livres le quintal, 7,500,000 livres; à 12 livres, 3,600,000 livrés. La différence d'un droit de 1,000 livres ou de 12 livres, changera peu la quotité de consommation, mais produira un grand changement pour le Trésor public. Je demande que l'on aille aux voix sur l'avis du comité.
La priorité pour la motion du comité a été demandée et appuyée; je la mets aux voix.
(Beaucoup de membres ne se lèvent ni pour, ni contre; l'épreuve est douteuse.)-
Quand il s'agit d'une question importante, quand il s'agit de faire la loi, c'est-à-dire, d'exercer la fonction la plus auguste qu'on puisse remplir sur la terre, il est bien étrange que des membres du Corps législatif ne concourent point à la délibération. Je vous invite tous à vous lever pour ou contre la proposition. Je vais recommencer l'épreuve.
(La priorité est accordée à l'avis du comités)
résume la discussion et fait un exposé des diverses propositions.
Pour obtenir les avantages que désirent MM. Malouet et Le Chapelier il suffit d'exempter de droit les tabacs entrant en France sur des vaisseaux français ou américaius.
. Où serait l'avantagé de la navigation française?
Je demande qu'on délibère sur mon amendement qui tend à ne porter la taxe sur les tabacs étrangers qu'à 12 livres par quintal.
C'est là une proposition rejetée par le fait même que la priorité à été àc-cordée à l'article du comité.
Je demande la parole pour faire remarquer à l'Assemblée qu'il n'y avait pas d'autre ordre de délibération que d'écarter ou d'admettre successivement toutes les propositions faites; car ce ne sont que des amendements à l'avis du comité, qui ne donnaient pas lieu à une question de priorité.
Ce ne sont pas des amendements, mais des propositions principales.
Et moi je soutiens que toutes les propositions qui ont été faites sur le projet du comité, ne tendant qu'à modifier l'avis du comité, elles peuvent être proposés par amendement : car il y avait une proposition à ne pas considérer comme amendement; c'est célle de n'établir aucun droit, qui est en effet une espèce de question préalable; mais la proposition qui tend à diminuer le droit est évidemment une modification. Or, quelle est la marche? c'est d'abord de mettre aux voix s'il y aura uh droit, ensui'e s'il sera de 12 livres, ensuite...
Permettez-moi dè vous observer que je ne pouvais pas mettre aux véix une question qui n'avait pas été agitée; Ainsi votre leçon tombe à faux.
Je ne donne point de leçon *, mais permettez-moi de vous dire que je ne dois pas en recevoir.
Plusieurs membres: Cela est vrai I
Je suis dans l'ordre de la délibération.
Ayez la bonté d'indiquer quel est l'amendement que vous voulez que je propose.
C'est ce que jê veux dire, et c'est précisément pourquoi je ne dois pas tre interrompu.
Je vous demande pardon, Monsieur.
Monsieur le Président, j'ai donc l'honneur d'observer à l'Assemblée que si elle veut faire une délibération qui ait de l'or-
dre, elle ne doit pas s'attacher à la priorité jugée, mais examiner les amendements de la manière suivante : d'abord y aura-t-il Un droit ? ensuite sera-t-il de 12 ou de 25 livres? enfin le droit de 12 livres sera-t-il perçu sur les vaisseaux français comme sur les vaisSeâUx américains, et sur les américains comme sur les français?
L'Assemblée ayant accordé la priorité à l'avis du comité, je demande que les tabacs qui seront importés, venant directement du continent de l'Amérique sur des vaisseaux français, ne payent que la moitié du droit que vous décrétez devoir être payé sur les tabacs qui arriveront soit Bur les vaisseaux américains, soit sur les vaisseaux d'autres nations.
Je crois que nous avons maintenant deux objets en vue i le premier est de retirer du tabac un revenu quelconque, mais modique ; l'autre est d'en faire une. branche de commerce et de navigation très importante. Je crois que, pour ce dernier moyen, il convient de recevoir tous les tabacs étrangers en entrepôt dont la durée serait d'un an, suivant mon opinion, avec la liberté de réexporter ce même tabac à l'étranger, sans payer aucun droit. Que s'il entrait dans la circulation du royaume, alors je trouverais raisonnable de l'imposer à 25 livres le quintal, lorsqu'il aurait été transporté par les navires du pays; et seulement à 12 livres 10 sous le quintal, lorsqu'il aurait été transporté par des navires français.
, rapporteur. J'observe à l'Assemblée que ce serait; unë prime.......
Non, Monsieur.
, rapporteur.:.... C'est uae prime que d'accorder au commerce tous les avantages que l'Assemblée peut lui accorder. Je demande que l'avantage qu'on vous propose ne soit décrété que lorsqu'on voUs proposera les primes pour la navigation.
J'observe qu'en admettant une diminution de 12 1. 10 s. par quintal, il en résulte 250 livres par tonneau. En conséquence, tout vaisseau de 300 tdnUëaux aurait, effectivement, 75,000 livres de prime.
Je crois hue, pour ne pas porter trop loin l'avantage t(u oh vous propose, c'est assez d'accorder aii éommerce français une diminution du quart. (Applaudissements.)
,je demande que les tabacs importés sur les vaisseaux américains payent 25 livres par quintal et que ceux portés sur les vaisSeàu* français né payent rien.
Plusieurs membres demandent. la question préalable sur l'amendement de M. Bêgoueu.
Je propose que là taxe sur les vaisseaux français soit de douze livres, suivant l'opinion de M. Pétion.
(L'amendement de M. Pétion dë Villenèuve èst rejeté par ia question préalable.)
On observe sur l'amendement de M. Bégouen que, s'il y avait une préférence pour les vaisseaux français, nous ruinerions le commerce des Américains.
Plusieurs voix : Non !
Nous les empêcherions d'entrer dans nos ports, nous romprions tous nos rapports avec ce peuple.
Je demande, par sous-amendement, que la diminution soit étendue aux tabacs qui seront importés par des vaisseaux français ou par des vaisseaux américains, en fixant le droit à 10 livres pour les premiers, à 15 livres pour les seconds et à 25 livres pour tous les autres.
le jeune. Je propose de modérer à un huitième des droits les vaisseaux américains et à un quart les vaisseaux français; je demande d'ailleurs la division.
Plusieurs membres demandent la question préalable sur l'amendement.
Je demande la question préalable feur tous les amendements et que l'article du comité soit adopté tel qu'il est.
met aux voix la division sur l'amendement de M. de Grillon.
(La division est décrétée et l'amendement re-)eté par la question préalable).
Je retire mon amendement.
Je demande l'ajournement de la délibération à demain, afin que le commerce ne soit pas la victime de l'esprit de parti. (Murmures.) .
, rapporteur, donne lecture d'une nouvelle rédaction de l'article 3 amendé par le comité ; ce nouvel article est ainsi conçu :
Art. 3.
« Il sera libre d'importer, par les ports qui seront désignés, du tabac en feuilles, moyennant une taxe de 25 livres par quintal.
« Tous navires français qui importeront directement du tabac de l'Amérique ne seront astreints qu'aux trois quarts de ce droit. »
(Cet article est décrété.)
Plusieurs membres du comité d'aliénation proposent et l'Assemblée décrète la vente de biens nationaux comme suit :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites suivant les formes prescrites, déclare vendre les biens nationaux dont l'état est annexé aux procès-verbaux respectifs des évaluations ou estimations desdits biens, aux charges, clauses «t conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, payables de la manière déterminée par le même décret ;
Savoir :
A la municipalité du Mans, département de la Sartne, pour la somme de........ 1,066,185 1. 42 s. » d.
A la même municipalité, district de la Ferté, même département................ 131,963 » »
A celle de Saint-Mihiel, département de la Meuse pour celle de.................. 567,557 1 6
A celle de Thiau-court, département de la Meurtbe, pour celle de.................. 13,8931. 7 s. 8d.
A celle de Ghàlons, département de la Marne, pour celle de. 385,889 18
A celle deBerzieux, même département, pour celle de........ 35,327 2 2
A celle de Sainte-Marie-Apy, même département, pour celle de..............:... 5,244 »
A celle de Troyes, département de l'Au- v- be, pour celle de.... 945,256 9 3
A celle de Gler-mont-Ferrand, département du Puy-de-Dôme, pour celle de. 423,692 9
A la même municipalité, même district, même département pour celle de....... er"> 351,463 5 »
A celle de Mur-de-Barès, département de l'Aveyron, pour celle de............ 294,392 13 4
A celle de Mézin, département de Lot-et-Garonne , pour celle de............. 361,811 18 2
A celle de Lous-seignan, même département, pour celle de...........................37,954 16 2
A celle de Doudas, même déparlement, pour celle de........ 9,154 » »
A celle de Preuilly, département d'In-dre-et-Loire, pour celle de..................83,799 » 9
A celle de Souvi-gné, même département, pour celle de.................. 10,974 10 »
A celle" de Saint- . Pierre-du-Bois , département de Loir-et-Gher, pour celle de ................. 17,626 8 »
A celle de Tonnerre, département de l'Yonne, pour celle de. 646,994 6 »
« Le tout ainsi qu'il est plus au long porté aux décrets annexés au procès-verbal de ce jour. »
annonce l'ordre du jour de la séance de demain et invite les membres de l'Assemblée à se retirer dans leurs bureaux respectifs pour y procéder à la nomination d'un président et de trois secrétaires.
Un membre demande, à raison de l'heure tardive, que cette nomination soit renvoyée à demain.
(Le renvoi à demain est décrété.)
lève la séance à quatre heures. -
présidence dem. riquetti de mirabeau l'aîné.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier, qui est adopté.
Un membre du comité d'aliénation propose de décréter la vente de domaines nationaux à la municipalité de Roye,pour la somme de 1,544,7081. 10 s. 10 d.
(Cette vente est décrétée.)
La longueur de la séance de samedi matin ne nous a pas permis d'en faire une le soir du même jour; je demande, en conséquence, que l'Assemblée tienne ce soir une séance extraordinaire.
(Cette motion est décrétée.)
Un membre annonce que 12 ecclésiastiques, fonctionnaires publics de la ville de Lorient, et le sieur Maquet, curé de celle de Stenay, ont prêté le serment prescrit par la loi du 26 décembre dernier.
M. Lebrun réclame la parole pour vous demander de l'argent.
, au nom du comité des finances. Messieurs, avant de vous parler d'argent, je dois vous rappeler que, dans le mois dernier, j'ai eu l'honneur de vous annoncer l'aperçu des besoins des trois premiers mois de cette année. Jj vous ai annoncé qu'on aurait besoin de 60 millions pour le mois de janvier : vous l'avez décrété. De ce même rapport, il résultait que le mois de février aurait besoin d'un secours de 72 millions, et je viens vous les demander. Pour le mois de mars, je ne sais pas ce que je vous demanderai.
Je vous observe que, dans ce moment, le Trésor public est sur le point de toucher à son numéraire effectif, qu'il est intéressant de le ménager.
Yous avez paru désirer connaître le résultat de la situation du Trésor royal depuis l'époque de vos premières séances. Je vais vous le présenter :
Au mois de mai 1789, il y avait en caisse 58 millions; la recette s'est élevée depuis à 1,159,000,000 livres à peu près; je dis à peu près parce qu'il y a environ 25 à 30 millions employés à l'acquit de charges dans les départements, qui ne sont connues que par le compte des régisseurs et receveurs parliculiers.
La dépense a été d'environ 1,178,000,000 livres à peu près. Je dis encore à peu près à cause de ces 25 ou 30 millions qui ne sont connus que par évaluation.
La recette a été formée : 1° des revenus ordinaires; 2°de l'emprunt
national; 3° de quelques restes d'emprunt des pays d'Etat; 4° de
quelques rentrées inattendues; 5° des billets de la caisse d'escompte et
d'assignats ; 6° de la contribution patriotique; 7° d'un douzième des 60
millions qui représentent les revenus des biens nationaux.
L'emprunt national, 30,903,600 livres.
Les restes d'emprunt des pays d'Etat, 6,912,850 livres.
Les rentrées inattendues, 1,632,600 livres.
La contribution patriotique, 3,472,900 livres.
Il reste à acquitter d'anticipation,28,400,000 livres. Je ne parle que de ces anticipations ; les autres ont été soldées.
On a versé en assignats 584,616,000 livres.
Je ne vous parle pas des billets de la caisse d'escompte, ils ont été soldés en assignats.
La caisse de l'extraordinaire a perçu, de l'abonnement des biens nationaux, 5 millions.
La dépense a fourni aux besoins du roi et de sa famille, qui, dès les six derniers mois de 1789, ont été au delà de ce qu'ils sont aujourd'hui, au service de la guerre et de la marine, aux besoins urgents que les circonstances ont multipliés (vous vous rappelez que la marine seule a coûté près de 20 millions d'extraordinaire), à des approvisionnements très onéreux de subsistance, à des dépenses imprévues de toute espèce daus les différents départements, à l'avance des frais du culte pour 1791, au traitement partiel des ecclésiastiques et religieux pour 1790, au payement de plus de deux années de rentes, de gages, de pensions, enfin au remboursement de 52 millions de dépense effective.
La dépense du mois de janvier, dont nous avons fait imprimer le tableau, présente, parmi les dépenses connues, plus de 7 millions à la guerre, 7 millions à la marine, 14 millions en remboursement d'anticipations, 10 millions envoyés dans les départements pour les dépenses du culte, indépendamment des sommes qui y ont été laissées à leur disposition, des remboursements à Gênes et à Amsterdam.
La recette a été à peu près comme nous l'avions prévue.
Au 1er février il y avait dans la caisse 38
millions 517,000 livres; en ce moment il serait question le toucher au
numéraire effectif qu'il faut ménager.
En conséquence, je vous propose de décréter que la caisse de l'extraordinaire versera, immédiatement dans le Trésor public la somme de 72 millions. (Rires à gauche.)
Je demande, à cause du petit nombre de membres présents, que la votation de ce décret soit renvoyée au moment où l'Assemblée sera plus complète.
Je crois que nous ne sommes pas assez nombreux pour décréter une demande de cette espèce; en conséquence,je déclare qu'avant de prendre l'ordre de l'Assemblée même sur cet objet, j'exigerais qu'elle fût complète.
Je demande que l'Assemblée ordonne l'impression des aperçus sur lesquels porte la demande qu'on nous fait; car quand nous serions 200, nous ne pourrions nous dispenser de demander à M. le rapporteur les bases d'après lesquelles on demande plus ce mois-ci que le mois passé.
, rapporteur. Gela est facile, mais je ne puis le faire, car ce n'était pas moi qui étais chargé de ce rapport.
Une incommodité assez^ grave m'ayant empêché de faire ce rapport, je priai M. Lebrun de me remplacer.
Le comité des finances fera imprimer incessamment le compte général des recettes et des dépenses depuis le 1er mai 1789 jusqu'à présent; mais j'ai l'hOnrieur de vous observer que les besoins dû Trésor public sont si instants qu'il n'est pas possible d'attendre le moment où ce compte général sera sotimis à votre examen : si l'on ne peut délibérer actuellement sur toute la somme jusqu'à cè que le tableau vous ait été mis sous les yeux, il faut au moins accorder dès à présent 15 à 20 millions.
Les causes de ces demandes, Messieurs, vous les connaissez i les payements des rentes étaient retardés de 18, 20, 30 mois; il en était de même des pensions et de toutes les charges de là caisse publique. Votre comité en les payant n'a donc fait que suivre le vœu de l'Assemblée et assurer l'exécution de ces décrets sur les anticipations et autres dépenses dont les payements avaient été arriérés par l'ancien gouvernement.
Vous avez raison d'exiger un compte général ; mais if est urgent de délivrer provisoirement au trésor public la Somme nécessaire pour qu'on ne soit pas obligé de dépenser le numéraire qui s'y trouve.
Il est bien étonnant que les besoins du Trésor public soient Si pressants qu'il ne soit pas possible d'attendre une heure. -
»*. Veuillez bien saisir les choses dans leur sens. Je ne vous dis paS de ne pas attendre une heure, mais je dis que comme une heure ne nous apportera pas de changement sur une chose nécessaire, il faut nous accorder ce qu'on demande.
Il de petit être question dans ce moment de votation; nous ne sommes pas 200. Le vœu de l'Assemblée serait contraire, que je m'y opposerais en mon propre et priVô nom.
Tout 6n demandant l'impression du rapport, j'appuie la dernière proposition de M. Vemier; je crois que les assignats ne seront pas compromis si vous én délivrez pour une valeur de |16 millions, lorsque vous avez un gage de même somme en éctis.
Je répondrai d'autre part à M. le Président que je he lui reconnais pas le droit, sans s'arroger une autorité arbitraire, d'arrêter la délibération sur une question quelconque dès qu'il en a laissé entamer la discussion; il aurait pu rofuser la parole au rapporteur, mais du moment que le ranport a été fait, il ne peut plus empêcher la délibération.
Monsieur, si vous aviez été présent au commencement de la séance, vous n'éprouveriez pas le dissentiment d'opinion que vous venez de manifester. Un long et non interrompu usage a autorisé le président à laisser passer au commencement dés séances, et bien que l'Assemblée soit alors composée de moins de 200 membres, des décrets formulaires et de peu d'importance; et cet usage est bien légitimé par l'assiduité de nos travaux et par la fréquence de nos séances. Mais quand Un rapporteur vient présenter tin projet de décret d'une importance
générale, qui touche aux grands intérêts de la nation et surtout ayant pour objet les contributions générales du royaume, le président a le droit de dire : Nous ne sommes pas en nombre légal. — Si vous prétendez le contraire, j'ai en-encore le droit d'exiger que l'Assemblée se compte ; je ne crois pas enfin pouvoir mettre à la votation, lorsque l'Assemblée n'est pas à peu près complète, un objet aussi important que celui qui vous est présenté.
Au surplus, il est étrange qu'un esprit aussi sagace que celui de M. de Folleville puisse conclure que le président doit laisser délibérer l'Assemblée en nombre illégal, précisément parce qu'il l'a laissée discuter.
Je renvoie doUc l'objet qui nous occupe actuellement au milieu de la séance.
, au nom du comité des pèrtsions. Messieurs, je suis chargé par votre comité des pensions de vous présenter un projet de décret pour le remboursement de plusieurs porteurs de brevets de retenue liquidés. A Cet égard, je dois répondre à quelques objections qui m ont été faites.
On a dit que votre comité se mêlait de toutes sortes d'objets administratifs et d'èxéetitiori, qui ne devraient pas le concerner. Je> réponds que c'est le commissaire du roi, directeur général de la liquidation, qtii vérifie les titres et qui fait là la liquidation sous sa responsabilité, il en fait ensuite son rapport au comité qui Vérifie l'application de la loi, et soumet les liquidations à la sanction de l'Assemblée. Le commissaire du roi n'en demeure pas moins responsable de Son travail, quoique votre comité soit l'organe par lé-quel il vous ie présente. Les fonctions de vos commissaires se bornent à une simple surveillance.....
Voici le projet de décret î
« L'Assemblée nationale, ôtiï le rapport de son Comité des pensions, qui a rendu compte des vérifications faites par le directeur général de la liquidation.
« Décrète qu'ed conformité de l'article 3 dè la loi du lw décembre 1790, il sera payé aux porteurs des brevets de retenue dont les noms vont suivre des indemnités qui seront pareillement désignées, avec les iûtérèts.à compter du jour de la remise et enregistrement de leurs mémoires et pièces, conformément à l'article 4 de la loi du 9 janvier dernier, Savoir : t
« A Nicolas-DèniS-FrançoiS Brisout, dit de Bar-neville, commissaire des guerres, 70,000 livres, aVéb les intérêts à compter du 25 janvier 1791.
« À Charles-François de Lobel, dit Dalancy, commissaire des guerres, 70,000 livres, avec les intérêts à compter du 14 janvier 1791.
A Pierre-Philippe-Clément Lançon, procureur général au ci-devant parlement de Metz, 60,000 livres, avec les intérêts à compter du 21 janvier 1791.
« A Louis ThirdUX, dit de Crosne, ci-devant lieutetiànt général de police à Paris, 230,000 ii-vres, avec les intérêts à compter du 20 janvier 1791, à la charge, par chacun des dénommés, de se conformer aux lois de l'Etat, pour obtenir sa reconnaissance de liquidation et le payement des sommes qui y seront portées. »
(Ce décret est adopté.)
Messieurs, lors du débrêt c]ue Vous avez rendu sur le timbre, vous avez décidé que les actes du Corps législatif ne seraient point as-
sujettis à cette formalité ; toutefois,cette décision n'a pas été insérée daDs le décret.
Je demande donc que, suivant l'intention première de l'Assemblée, vous adoptiez l'addition suivante :
« Les actes et expéditions du Corps législatif seront exempts du timbre. »
(Cette addition est mise aux voix et décrétée^
, au nom des commissaires de l'extraordinaire. Messieurs, j'ai à vous rendre compte maintenant de ce qui a été fait à la caisse de l'extraordinaire.
Vos commissaires ont assisté le 12 de ce mois au brûlemeut, fait en public, dé 4 millions d'assignats rentrés à la caisse pour prix d'acquisitions des domaines nationaux. Vendredi prochain, 18 de ce mois, il sera également brûlé 3 autres millions d'assignats rentrés par la même voie. On ne peut pas en brûler davantage, parce que le travail de décharger les registres, de constater par dés procès-verbahx l'extinction des assignats est très long. Cependant nous croyons parvenir à en pouvoir brûler pour 4 ou 5 millions par semaine.
D'autre part, il a été remboursé à la caisse de l'extraordinaire, du 1er au 12 de ce mois, une somme de 13,413,757 livres. Le compte général et particulier de toutes les opérations de cette caisse et son état au 31 janvier dernier sont à l'impression depuis plusieurs jours et seront distribués dans le commencement de cette semaine.
J'ai une demande à faire à Monsieur le rapporteur. Je le prie de me dire si, lors des brûlements d'assignats, il se fait un procès-verbal qui constate le brûlement et le numéro des assignats brûlés.
, rapporteur. Oui, Monsieur, il se fait un procès-verbal de ces brûlements et l'on y joint le numéro des assignats. Et non seulement on en tient registre, mais encore un de ces registres est déposé à la Bourse où tout le monde peut en prendre connaissance. Cette publicité sera même désormais indiquée sur les affiches qui annonceront les brûlements. .
Je voudrais qu'il fût fait Un tableau comparatif des assignats mis chaaue mois en circulation, et de ceux qui rentrent à la caisse de l'extraordinaire.
, rapporteur. L'objet de la demande du préopinant va être rempli. D'un côté, le comité d'aliénation a arrêté qu'il serait imprimé, à la fin de chaque mois, l'état des biens nationaux vendus aux particuliers, et le prix de. ces ventes définitives ; l'état de celles faites jusqu'à ce jour va paraître.
D'un autre côté, vos commissaires de l'extraordinaire font imprimer l'état de la caisse de l'extraordinaire, le compte exact et détaillé de ses recettes et de sës dépenses jusqu'à ce jour, l'état de la fabrication des assignats, l'état en masse du papier enfermé dans le coffre à trois clefs, et ils continueront ainsi mois par mois. La nation pourra vérifier toutes les opérations de la caisse de l'extraordinaire, ainsi que celles du Trésor public.
, au nom du comité des pensions. Plusieurs personnes se sont plaintes de ce que
les pensions de 1789 n'étaient pas encore acquittées et que, d'un autre côté, on laissait les pensionnaires dans une trop longue incertitude sur leur sort. Je crois à propos d annoncer publiquement que les arrérages des pensions échus pour l'année 1789 ont été payés à toutes les personnes qui se sont présentées. Le fait m'a été assuré il y a plus de deux mois par le directeur du Trésor public; ainsi, le premier sujet de plainte n'a plus d'objet.
Relativement au sbrt des pensionnaires, je n'ai pas oublié, Messieurs, que vous avez rendu un décret qui ordonne au comité des pensions dë vous présenter incessamment un rapport pour procurer des secours auX pensioilhaireS dont le sort ne peut pa3 être fixé définitivement en ce moment. Ce rapport sera lu au comité des pensions ce soir, et immédiatement mis à l'impression; lorsqu'il aura été distribué, nous vous demanderons vos ordres : c'est un document d'une feuille qui ne souffrira pas grand retard;
Il en est de même d'uh autre rapport de votre comité sur les gouvernements.
, au nom du comité des impositions. Messieurs, votre comité des impositions m'a chargé de vous présenter un arrêté pris par la société des amis de la Constitution de Loches, qui s'offre à aider gratuitement les muni' cipalités de campagne pour toutes les opérations relatives à l'assiette de la contribution foncière en 1791.
Je demande à l'Assemblée de lui faire lecture de ce document :
« Du premier février 1791,
« La société des amis de la Constitution de Loches, craignant qué lés officiers municipaux des campagnes ne puissent pas terminer austei promp-tement qu'il est à désirer les opérations relatives à l'assiette de la contribution foncière pour 1791, surtout s'ils sont privés Savoir, dans l'étendue de leurs paroisses, des propriétaires cultivateurs qui soient en état de Concourir à la rédaction des états qui sont exigés, vient d'adresser â toutes les municipalités du district, une circulaire dans laquelle cfette société leur offre, à ce sujet, gratuitement ses services : « Vous trouverez, leur » disent ces amis de la Constitution, dans notre » sein, plusieurs membres qui se feront un de-» voir de vous donner tous les éclaircissements » dont vous pourrez avoir besoin, non seulement » dans le lieu de hos séances, mais encore sur » les lieul, où ils se transporteront avec plaisir. » Ils s'interdiront cependant de coopérer en quoi > que ce soit à l'évaluation du revenu net des » térres imposables en 1791, ce qui ne doit » appartenir qu'aux commissaires. Si vous dési-» rez donc, Messieurs,profiter des offres que vous » fait la société, vous voudrez bien lui faire con-» naître vos intentions, en prenant une délibéra-» tion que vous lui adresserez, et l'un des .socié-» taires se rendra aussitôt auprès de vous. »
(Applaudissements.)
Messieurs, le comité a cru que l'acte donné par les amis de la Constitution de Loches, acte vraiment patriotique, mérite de votre part une approbation expresse.
Je vous demande donc, pour donner à Cette société un témoignage de satisfaction, d'ordonner l'insertion dé cet arrêté dans le procès-verbaL
Voix nombreuses : Oui l oui !
(L'insertion au procès-verbal est décrétée.)
Ou ne voit pas partout régner le même zèle que dans la société des amis de la Constitution de Loches. Il est certain que dans des petites municipalités de campagne, le travail de l'imposition ne se fera pas. Cette observation vous fait sentir la nécessité d'organiser bientôt les municipalités centrales. Je demande que le comité de Constitution vous fasse incessamment son rapport sur cet objet.
Messieurs, la ville de Narbonne, quoique d'une étendue assez vaste, ne renferme qu'une population de 8,000 âmes ; elle est partagée en deux par le canal, appelé le canal de Narbonne. Une partie, appelée la cité, renferme trois paroisses;l'autre partie, appelée le bourg, en renferme deux. Le directoire de district estime qu'une paroisse suffit de chaque côté du canal.
Avant de procéder à ce travail, lé directoire de district avait requis le concours de l'évêque du département; mais l'évêque, étant absent, n'a pu donner son avis, et n'a pas comparu.
Voici le projet de décret que nous vous proposons :
« L'Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par son comité ecclésiastique, de deux arrêtés, l'un du directoire du district de Narbonne, en date du 22 janvier dernier, et l'autre du directoire du département de l'Aude, du 28 du même mois, relativement à la réduction et circonscription des paroisses de la ville de Narbonne, en l'absence de l'évêque diocésain légalement requis, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Il y aura dans la ville de Narbonne deux paroisses, savoir : la paraisse cathédrale, sous l'invocation de saint Just et saint Pasteur, à la-quellesont réunies lesJeux paroisses Saint-Etienne et Saint-Sébastien, et de Notre-Dame de la Major; et la paroisse Saint-Paul, à laquelle est et demeure réunie celle de Notre-Dame de la Mour-guier.
Art. 2.
« Le canal formera la ligne de démarcation des deux paroisses ; de manière que la paroisse cathédrale comprendra, dans son arrondissement, toute la cité et la partie du territoire de la ville qui se trouve de ce côté du canal; et que celL de Saint-Paul s'étendra sur tout le bourg et sur la partie du territoire qui est du même côté du canal. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité féodal, présente une suite d'articles additionnels aux décrets déjà er">portés sur la féodalité (1).
Ces articles sont décrétés comme suit :
Art. 12.
« Sont et demeurent communes à tout le royaume, les dispositions des
anciens règlements
Art. 13.
« Pourront à l'avenir s'intenter par simples requêtes, et s'instruire comme procès ordinaires, toutes les actions ci-devant sujettes aux formalités d'ajour, clain, plainte à loi, plainte propriétaire; et autres tenantes au système féodal; sans que, dans les lieux où ces formalités étaient indispensables pour pouvoir agir en justice dans les matières pour lesquelles elles avaient été introduites, les défendeurs puissent exciper d'aucune prescription acquise depuis la cessation absolue des fonctions des officiers des justices seigneuriales, opérée par l'installation des tribunaux de district, jusqu'à la publication du présent décret, et sans préjudice des saisies, qui continueront d'être autorisées dans les cas de droit ou indiqués par les coutumes.
Art. 14.
« Provisoirement, et jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, les consignations qui, dans quelques coutumes, devaient, en certains cas, s'effectuer entre les mains des ci-devant mayeurs, baillis ou autres officiers seigneuriaux, se feront à l'avenir sans frais aux greffes des tribunaux de district.
Art. 15.
« Sont abolies, à compter dù jour où ont été installés les tribunaux de districts, toutes les lois et coutumes qui, pour la validité même intrinsèque des donations et des testaments, les soumettent à la nécessité d'être ou passés, ou recordés, ou reconnus, ou réalisés, soit avant, soit dans un certain délai après la mort des donateurs ou testateurs, en présence d'échevins, d'hommes de-liefs, jurés de Gattel ou autres officiers seigneuriaux; et dans les pays soumis auxdites lors ou coutumes, il suffit pour la validité de ces actes, à compter de l'époque ci-dessus, qu'ils aient été ou soient passés par-devant deux notaires, ou un notaire et deux témoins, ou même, à l'égard des testaments, eu forme olographe; sans que le défaut de la transcription au greffe, substituée par l'article 3 du décret des 17 et 19 septembre 1790. aux désaisines, saisines, déshéritances, adhéritances, reconnaissances échevinales, et autres formalités de cette nature, puisse,dans aucun des ci-devant pays de nantissement, être opposé aux donataires ou légataires par les héritiers des donateurs ou testateurs.
Art. 16.
« Sont pareillement abolies, à compter de l'époque fixée par l'article précédent, toutes les lois et coutumes, qui exigeaient, pour la validité de certains actes ou exploits, la présence ou l'intervention d'aucun des officiers ci-dessus désignés, et il suffit pour la validité de ces actes ou exploits, qu'ils soient faits par des notaires ou des huissiers, suivant les distinctions et les règles établies par le droit commun du royaume.
ArL 17.
« Tous actes de désaisines, saisines, déshéri-
tances, adhéritances, et autres atlribués par les anciennes lois au ministère exclusif des officiers seigneuriaux, qui dans l'intervalle de la publication des décrets du 4 août 1789, à celle du décret des 17 et 19 septembre 1790, auront été faits en présence des officiers des nouvelles municipalités, auront le même effet que s'ils l'avaient été en présence des anciens échevins ou autres officiers des justices seigneuriales.
Art. 18.
« Sont abolies sans indemnité, sauf en cas où il serait prouvé, de la manière énoncée dans l'article 11 ci-dessus, qu'elles ont eu pour cause des concessions de fonds ou de mises de droits déclarés rachetables, les redevances connues sous le nom de blairie, et généralement toutes celles que les ci-devant seigneurs jusiiciers se faisaient payer pour raison de la vaine pâture, ensemble le droit qu'ils s'étaient attribué en certains lieux d'admetire les forains à la jouissance de ladite vaine pâture dans l'étenJue de leur justice.
Art. 19.
« Les redevances connues sous le nom de mes-serie, ou sous tous autres, que les ci-devant seigneurs justiciers exigeaient en certains lieux pour la faculté par eux accordée aux habitauts de faire garder les fruits de leurs terres, sont également abolies, sans indemnité. »
Je demande la permission d'annoncer à l'Assemblée que tous les professeurs du collège de Bergues, dans la Flandre maritime, ont prêté le serment prescrit par la loi du 26 décembre, ainsi que les curés et vicaires de la ville de Bourbourg et du bourg de Watten dans le département du Nord.
Mais en même temps, je vous annonce avec une vive douleur que tout ce pays est dans ce moment dans la plus grande agitation par l'effet des manœuvres de M. l'évêque d'Ypres.
Je demande que l'Assemblée renvoie aux comités ecclésiastique et diplomatique réunis, l'examen et la proposition des mesures propres à empêcher les actes de juridiction que cet évêque prétend exercer dans la ci-devant partie française de son diocèse.
(Ce renvoi est décrété.)
, au nom du comité des finances, reprend le projet de décret qu'il avait présenté au début de la séance et dont la délibération avait été reportée au cours de cette séance (1).
Ce projet de décret est adopté dans les termes suivants :
« L'Assemblée nationale décrète que la caisse de l'extraordinaire versera au Trésor publicla somme de 72 millions pour le service du mois courant. »
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur le tabac.
, rapporteur du comité des contributions publiques. Messieurs, l'article 4, où nous nous somuies arrêtés, r. mplit une des vues d u commerce que l'on a regardée hier comme très importante à remplir, celle défavoriser le commerce d'entrepôt.
Il est ainsi conçu :
: Art. 4. Le tabac en feuilles, provenant
de l'étranger, pourra ê;re mis en entrepôt dans les magasins de la régie, qui seront destinés à cet usage, et réexporté à l'étranger, saus payer aucun droit. »
Je demande que l'on fixe à une année le délai d'entrepôt; on pourrait donc dire : « ... pourra être mis en entrepôt pendant un an, dans les magasins de la régie... ».
, rapporteur. J'adopte l'amendement.
L'article 4 est mis aux voix et décrété dans les termes suivants :
Art. 4.
« Le tabac en feuilles,provenant de l'étranger, pourra être mis en entrepôt pendant un an, dans les magasins de la régie, qui seront destinés à cet usage, et réexporté à l'étranger, sans payer aucun droit. »
,rapporteur. L'article 5 est ainsi conçu :
« Nul ne pourra fabriquer ou débiter du tabac dans le royaume, s'il n'a acquitté Ja taxe qui cent réglée et s'il n'en peut produire la quittance. »
Je vous prie de vouloir bien considérer si votre article ne conduira pas à des perquisitions et à des visites domiciliaires. On a fuit un sacrifice pour la liberté publique ; mais si, après avoir fait ce sacrifice, il nous restaitencore des vestiges d'inquisition fiscale, j'auraisbeaucoup de peine à y plier mon opinion.
Je crois que, pour une petite recette qui parviendrait au Trésor public, l'on n'est pas dans le cas de transiger avec les principes. Si votre intention est d'établir les visites domiciliaires, je vous prie de l'exposer à l'Assemblée, parce que pour lors je demanderais la question préalable sur l'article proposé.
, rapporteur. L'Assemblée nationale a déjà décrété des moyens par lesquels il sera possible d'assurer le produit d'un droit du licence. Un moyen décrété par l'Assemblée se trouve dans le décret qui lui a été présenté par le comité d'agriculture et de commerce, concernant les inventions nouvelles, projet que l'Assemblée a adopté.
Il est évident que la nation ayant voulu, par le décret dont j'ai parlé, assurer aux auteurs d'une découverte importante le produit de leur invention, elle a dû donner des moyens pour le succès de cette vue; et c'est en conséquence qu'elle a décrété que lorsqu'un inventeur, porteur de patentes, ce qui est précisément notre cas, pourra prouver qu'une personne s'est emparée du privilège qui lui aura été accordé, il le fera poursuivre. On ouvre donc une action par les voies ordinaires de la justice, en produisant les preuves qui sont suffisantes dans toutes les actions judiciaires-
Gela ne conduit, comme le voit le préopinant, à aucune espèce de visites domiciliaires ; et, en un mot, puisque l'Assemblée a jugé cette mesure propre pour assurer le privilège exclusif des découvertes mécaniques, elle doit être bonne pour assurer le succès des découvertes d'un autre genre.
J'observe qu'il n'y a rien
Le comité adopte l'ajournement et fera, quand yous youdrez, son rapport sur les patentes.
(L'Assemblée ajourne l'art. 5),
, rapporteur. Nous passons à l'article 6 qui est ainsi conçu :
« Une régie nationale fera fabriquer et vendre du labac au profit du Trésor public, çt les tabacs en feuilles qu'elle jugera à propos de tirer de l'étranger, seront exempts de droite» »
Je demande aussi l'ajournement de cet article.
, rapporteur. Plusieurs objections ont été faites sur cet article ; on a demandé s'il était de la dignité de la nation de se conserver le privilège exclusif de la vente du tabac. Nous avons en France plusieurs exemples de cette espèce de dérogeante, et nous l'avons dans les dér crets que vous avez rendus vous-mêmes récemment. L'Etat est marchand de poudre à canon, l'Etat est marchand de papier timbré, donc, l'Etat peut être marchand de tafyac, si parle tabac il retiré un revenu profitable au Trésor pubiic, et si par là il dispense d'une imposition plus onéreuse. Rien de ce qui est utile ne doit être dérogeant, pas plus pônr l'Etat que pour des particuliers.
Une autre objection s'est élevée contre cet article : on trouve qu'il est injuste d'accorder à cette régie nationale la faculté exclusive de tirer, en franchise des droits établis par l'article 3, les tabacs en feuilles qui seront nécessaires pour la fabrication. Messieurs, ici l'intention du comité n'est pas de dissimuler que l'on yeut donner, non pas un privilège exclusif à la régie nationale, mais une faveur qui rende le produit profitable au Trésor public. Cette fabrique nationale n'aurait aucun avantage, ne serait que d'un produit imperceptible, si l'on ne lui dopnait pas le moyen de vendre en concurrence avec, le commerce, et au même prix, des tabacs qiii lui coûteraient moins.
Les fabricants de tabac ou les personnes qui se destinent à en fabriquer dans le royaume, pensent que l'on détruirait leur fabrication ou qu'on l'empêchera de naître, papce que la ferme pu la régie nationale ayant la' matière première, c'est-à-dire le tabac en feuilles à plus bas prix que le commerce, pourra par cette raison vendre du tabac à beaucoup meilleur prix, et par conséquent éloigner les consommateurs des fabriques du commerce libre.
C'est là qu'est toute l'erreur du raisonnement. Car ce n'est pas pour vendre à meilleur marché que nous demandons poùr la régie nationale le
privilège exclusif de la traite, en franchise des droits, de toutle tabac étranger, c'est seulement pour qu'elle puisse vendre avec plus de profit au même prix. C'est un moyen très innocent de faire valoir les fabriques que nous avons maintenant dans le royaume : elles sont au nombre de 7, elles emploient à peu près 3,000 hommes ; et, quand on devrait un jour faire a la libre fabrication du tabac le sacrifice de ces fabriques, il ne conviendrait pas de le faire aujourd'hui, parce qu'il ne serait ni sage ni prudent de disperser 3 milliers d'hommes qui actuellement n'existent que par le moyen de la fabrication. Tels sont, Messieurs, les motifs qui nous ont déterminés à vous proposer cet article.
Le préopinant a oublié de vous dire, ou bien il vous a caché que l'exécution de l'article 6 détruisait véritablement le bénéfice des droits de perception établis par les articles précédents.
Lorsque nous avons demandé la suppression du privilège exclusif pour la vente du tabac, nous ne consultions que l'intérêt général, et j'en vais donner une preuve. L'article que propose le comité est très avantageux pour la ci-devant province d'Alsace; car nos fabriques sont toutes établies, et il est presque sûr que nous et la régie serions ies seuls qui vendrions du tabac.
Je ne sais pas si vous avez voulu fonder un commerce entre les mains de régisseurs qui ne sont rien autre chose que les fermiers généraux ; mais^ si-c'est là votre intention, vous atteindrez parfaitement ce but en décrétant l'article du comité,
Messieurs, l'article 6 doit être divisé en deux parties : la première, je l'adopte ; la seconde, je la rejette.
Je crois, comme le comité, qu'il est nécessaire que nous ayons une régie pour nos fabriques nationales ; mais la dernière partie de l'article est destructive de notre commerce. On veut donner à notre régie nationale un avantage immense sur le commerce ; on veut qu'elle soit exempte de droits sur les tabacs qu'elle achètera : cette mesure fera le plus grami tort à notre commerce, parce que l'exemption de droits place la régie dans une concurrence beaucoup trop avantageuse avec nos négociants, qui ne pourront plus au même prix, au même bénéfice, s'occuper de ce commerce.
Voici maintenant la ruine de notre commerce sous une autre espèce. Le commerce ne consiste qu'en objets d'échange et la régie faisant toujours le sien parles moyens les plus expêditifs, achètera des tabacs avec de l'argent, sans s'occuper de donner des marchandises en échange. De là une perte considérable pour nos manufactures.
Je demande donc, par amendement, que la régie soit consèrvée pour nos fabriques nationales; mais que cette régie ne puisse acheter de tabacs que dans les ports dé France, en payant les droits établis pour le commerce, et qu'il lui soit interdit de contracter des marchés à l'avance avec les maisons étrangères.
Je ne vois pas comment la nation peut trouver quelque avantage en exemptant la régie des droits d'entrée. Si nous pouvons fabriquer 100,000 quintaux de tabac et que la régie en achète 50,000, nous perdons 50,000 fois 25 livres, Ce calcul me paraît assez juste et prouve que rien ne nuit plus à l'industrie que les privilèges exclusifs.
En mettant au contraire 25 livres par quintal sur tous les tabacs importés en France, vous aurez un bénéfice net qui, je crois, surpassera le bénéfice que vous feriez sur les régies, Aujour? d'bui que vous avez décrété la liberté du tabac, c'est le meilleur principe que vous puissiez adopter.
Je conclus donc, Monsieur le Président, à ce que, laissant une régie pour la vente du tabac au profit du Trésor public, la seconde partie de l'article soit totalement retranchée. (Applaudisse-ments
(de Nemours). Le préopinant a très bien motivé les raisons qui doivent nous déterminer à établir une régie nationale. Quant à la seconde disposition de 1 article du comité, je la trouve très sage ; , je propose seulement d'y ajouter que l'exemption des droits ne s'appliquera qu aux tabacs importés dans nos ports par des vaisseaux français, américains et espagnols et que la régie sera tenue de se pourvoir dans les entrepôts.
appuie l'opinion de M. Dur» pont-
, rapporteur. Je propose de modifier, comme suit, la rédaction de l'article 6 î
« Une régie nationale fera fabriquer et vendre du tabac au profit du Trésor public : les tabacs étrangers en feuilles, qu'elle jugera à propos d'employer, seront exempts de droits, elle sera tenue de s'en pourvoir dans les entrepôts qui auront lieu en vertu de l'article 4. »
Il est évident que vous avez voulu favoriser la navigation, et il est évident que vous la détruiriez aujourd'hui, ainsi que le commerce, si vous adoptiez la mesure qu'on vous propose. On vous alarme sur le défaut de travail ; vos ouvriers seront recherchés par tous ceux qui voudront élever de nouvelles manufactures; bien loin de diminuer leur salaire, vous aurez augmenté leur bien-être, en leur procurant plus d'occasions de travailler.
Je persiste dans mon opinion, et je demande la question préalable sur l'article même.
(ci-devant Delley d'Agier). Vous prendrez les mesures nécessaires pour faire disparaître les abus, mais vous voudrez conserver daus toute l'Europe la vente de vos tabacs supérieurement fabriqués, et tellement recherchés en Russie qu'ils s'y vendent jusqu'à 2 roubles et demi, c'est-à-dire 10 livres la livre ; mais pour ce, il faut une régie et traiter comme le propose le comité.
On sait assez que je ne suis ni flamand ni alsacien; je défends l'intérêt du commerce français contre l'intérêt des traitants et des gens du fisc. (Applaudissements.) L'intérêt du commerce français est qu'il n'y ait pas une compagnie qui ait le privilège exclusif d enlever les tabacs.
Or, une compagnie qui ne payera point de de droit aura un privilège exclusif : l'Assemblée, qui a détruit tous les privilèges, voudrait-elle en établir un sous le frivole avantage que c'est un bénéfice pour la nation ? je prétends, moi, que c'est un grand préjudice pour la nation. (Interruptions.)
Il n'y a rien qui nuise plus à la fabrication
et à l'industrie que les privilèges exclusifs, même au profit de la nation.
Il faut donc en revenir au principe qui est de retirer le plus de prqfit possible de la fabrication dq tabac ; et le moyen, c'est de faire payer tout le monde à l'entrée. Je conclus à mon amendement.
(La discussion est fermée.)
met aux voix la première pptie de l'article, portant établissement d'une régie nationale.
(L'Assemblée décrète l'établissement d'une régie nationale.)
met aux voix la deuxième partie de l'article, relative à l'exemption des droits.
(L'Assemblée décrète que la régie ne sera pas exempte des droits établis sur l'importation des tabacs étrangers.)
Vn membre propose^ par amendement, que la régie ne soit assujettie qu'aux trois quarts des droits décrétés pour les particuliers.
(Cet amendement est rejeté par la question préalable.)
Pour favoriser nos fabriques, je demande qu'il soit lait à la régie restitution de la totalité des droits payés par elle pour des tabacs importés, qu'elle aurait fabriqués et qu'elle réexporterait.
(Cet amendement est rejeté par la question préalable.)
consulte l'Assemblée sur la troisième partie de l'article, portant obligation pour la régie de faire ses approvisionnements aans les entrepôts.
(Cette disposition est rejetée par la question préalable.)
L'article 6 (devenu article 5) est décrété en ces termes :
« Art. 5. Une régie nationale fera fabriquer et vendre du tabac au profit du Trésor puolic, et sera assujettie aux mêmes droits que les particuliers. »
L'ordre du jour est un rapport des comités ecclésiotstique, des rapports et des recherches sur les troubles du Morbihan.
, rapporteur. Messieurs, quelques mouvements dernièrement excités par les ennemis du bien public, dans le département du Morbihan, ont été dénoncés à vos comités eoclé-siastique, des rapports et des recherches, par le directoire du département du Morbihan. Les pièces, qui ont été envoyées à vos comités, ne laissent aucun doute sur la vérité des faits que je vais avoir l'honneur de vous rapporter.
Il y avait déjà longtemps qu'on cherchait à exciter le peuple dans cette partie de l'Empire. Vers les derniers jours de décembre, il y eut une espèce de soulèvement dans le bquFgde'Sarzeau. Les habitants de la ville de Lorient y avaient en* voyé plusieurs citoyens pouF l'approvisionnement des grains. Les habitants de la papoisse de Meuve voulurent s'opposer au transport dé ce grain destiné à subvenir à la consommation et à la nourriture du peuple de Lorient.
La tentative risquée fut inutile; les marchands
s'approvisionnèrent; mais le peuple s'attroupa et chercha à prendre sa revanche. 11 investit et assaillit les maisons de ceux qui distribuaient le blé; les vitres furent cassées ; quelques fenêtres furent brisées. Vous présumez bien que le décret du 27 novembre fut Je prétexte des mouvements dont je vais avoir l'honneur de vous rendre compte.
Il a d'abord été envoyé à vos comités 2 adresses de la part du directoire de département; la première, en date du 5 de ce mois, annonce qu'il y a une grande fermentation parmi le peuple ; que peu de fonctionnaires'publics ecclésiastiques ont prêté le serment. A cette adresse est jointe une pétition de citoyens qui s'opposent, dit-on, dans les campagnes, à ce que le serment exigé des ecclésiastiques soit prêté par eux, et une lettre du directoire de Rochefort, portant que l'on n'a rien négligé pour prévenir le peuple contre le décret; qu'on persuade au peuple qu'il n'aura plus ni recteurs, ni curés, que les enfants ne seront plus baptisés, que les fidèles, à la mort, ne recevront plus les sacrements ; que ces discours, adroitement semés, fout une sensation extraordinaire; que les paysans menacent d'aller mettre le feu aux bureaux de district.
Il est certain, disent les administrateurs du directoire, que les prêtres sont seuls les auteurs de ces pétitions. Les mêmes intrigues sont employées par eux dans les confessionnaux ; les chaires retentissent de leur esprit de révolte et de sédition. Ils se plaignent de n'avoir que quelques débris du régiment de Walsh,irlandais. Ils ajoutent que Lorient est la seule ville du département où, sur 15 fonctionnaires publics ecclésiastiques, 12 ont prêté serment; que partout ailleurs les prêtres et les campagnes sont séduites ; que l'évêque du Morbihan, avant d'avoir quitté 1j ville de Vannes, paraît avoir formé entre lui et tous les curés du département une coalition d'autant plus dangereuse, que le peuple ignorant est soumis à l'influence de ses chefs spirituels.
Le directoire observe de plus qu'il n'y a, dans le département, que 3 ou 4 compagnies du régiment de Walsb, it 130 hommes de Normandie; il demande qu'il lui soit envoyé une garnison.
Dans le même moment où cette adresse partait de Lorient, il partait en même temps aussi de Vannes, de la part du département, une nouvelle adresse à l'Assemblée naiionale. Ce département a dressé, le 7 de ce mois, un procès-verbal des événements qui ont uu lieu. Le directoire lut instruit par un billet anonyme qu'il y avait aux environs de Vannes, au lieu qu'on appelle Gondon, un attroupement assez considérable.
Le directoire écrivit sur-le-champ à la municipalité, qu'elle s'assurât du fait et prît des précautions. Le directoire fut aussi instruit que l'attroupement qui existait à Gondon n'était pas le seul ; qu'il en existait plusieurs autres semblables.
Le directoire se détermina à demander à la ville de Lorient 4 pièces de canon et des artilleurs en nombre suffisant pour faire le service. Il dépêcha un des commis du directoire pour faire cette commission à midi dudit jour 7 février.
La municipalité, qui avait envoyé un cavalier de maréchaussée, renvoya au directoire réponse qu'il y avait effectivement à Gondon un assez grand nombre de paysans qui y étaient rassemblés; que cela ne présentait rien d'alarmant ; que tout y paraissait tranquille, et que d'ailleurs la municipalité avait pris tous les moyens d'assurer la tranquillité publique.
Le directoire ne trouva point que les mesures prises par la municipalité fussent suffisantes. Il lui écrivit pour qu'elle eût à faire proclamer la loi martiale et dissiper l'attroupement qui existait à Gondon.
A trois heures de l'après-midi, une députation de paysans, sachant qu'on voulait dissoudre leur assemblée, vint à la municipalité et demanda la permission de continuer leur assemblée. La municipalité ne crut pas devoir s'y opposer : elle fit part de ses motifs au directoire du département.
Dans le moment où les administrateurs prenaient lecture de cette lettre et se disposaient à y répondre, on annonce dans la salle du directoire une députation de dix à douze paysans qui étaient porteurs de diverses adresses. Au moment de les introduire, les administrateurs furent prévenus qu'il y avait à la porte cent cinquante paysans au moins, lesquels cent cinquante paysans étaient suivis d'un assez grand nombre d'écoliers et de gens du peuple.
Un membre du directoire qui était sorti, avant que la porte fût assaillie, apercevant le danger que pouvaient courir les administrateurs, se transporta à la municipalité et requit la force publique : 20 hommes de la garde nationale envoyés par la municipalité partirent, ayant à leur tête deux officiers municipaux et un notable; l'attroupement fut promptement dissipé.
Le directoire rentra dans le lieu de ses séances, et trouva sur son bureau plusieurs adresses qui avaient été déposées par ceux des paysans qui avaient été envoyés en députation. Elles sont très inconstitutionnelles; mais j'ai l'honneur de vous observer, Messieurs, qu'elles ne portent aucune signature, quoiqu'elles aient été annoncées devoir être présentées au nom de 20 paroisses.
Le département a cru devoir vous informer de ces faits, en vous envoyant le procès-verbal dont je vous, ai donné la substance : il y a joint une lettre conforme où il donne les plus grands éloges au dévouement du brave détachement de Walsh et de son chef citoyen, M. O'Riordan.
Plusieurs membres à droite demandent la lecture des adresses.
, rapporteur. J'ai plusieurs adresses à lire à l'Assemblée, et j'observe qu'on est très curieux d'apprendre ce qu'on sait très bien; car les principes qui y sont consacrés sout ceux qui sont écrits dans les pamphlets qu'on distribue tous les jours aux portes de l'Assemblée nationale; et même elles renferment certains principes inconstitutionnels qui ont été avancés à la tribune. (Applaudissements.)
Vous allez être à portée de juger de l'esprit de ces adresses par la lecture que je vais vous faire de la lettre écrite par les officiers municipaux de Sarzeau aux administrateurs du département, le 5 de ce mois. (Murmures à droite.)
Plusieurs membres à gauche : Les fabricateurs doivent les connaître.
, rapporteur. Voici la lettre : « Nous avons tous juré de maintenir la Constitution; mais c'est un principe dont vous devez convenir qu'aucun homme ne peut s'obliger par serinent à manquer à son devoir, aux lois de la conscience et de la raison : une partie du serment qu'on exige des prêtres consiste à jurer de maintenir de tout son pouvoir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et sanctionnée
par le roi et tous les décrets qui seront rendus à l'avenir. Il est du devoir d'un prêtre de maintenir la doctrine de J.-C., d'employer tous ses soins pour que le3 fidèles de l'Eglise ne s'écartent jamais des principes catholiques dans leur croyance, et des leçons évangélique3 dans leur conduite. Or, il est de foi que le pape étant successeur de saint Pierre, vicaire de J.-G., il a une véritable juridiction sur chaque évêque, chaque prêtre, chaque personne et chaque fidèle ; qu'à lui seul convient le droit de paître les brebis et les agneaux du troupeau. (Rires.)
« Il est de foi que l'absolution d'un prêtre est nulle, comme sa mission, s'il n'est envoyé par l'Eglise. Il est de foi que l'évêque est supérieur au prêtre. Il est de foi que la profession religieuse est une profession de sainteté et de perfection ; cependant les décrets de l'Assemblée nationale contiennent des principes contraires à ces lois, évidemment* contraires à ces vérités. Les décrets sont donc contraires à la foi dans la religion ; c'est donc détruire la foi, que de vouloir les soutenir.
« Prêter le serment, c'est jurer de maintenir, de tout son pouvoir, ce qui sera décrété et sanctionné par tel suite ; de sorte que si l'Assemblée décrète le mariage des prêtres, le divorce, le mariage devant le maire; si elle décrète des articles contraires au bien public, à la foi catholique; si une assemblée d'hommes sans principes défend de reconnaître la divinité de Jésus-Christ, ou de rendre à Dieu le culte qui lui est dû, on s'obligerait par serment à maintenir de tout son pouvoir ce qui serait injuste et impie I on prendrait Dieu à témoin 1 Un pareil serment ne serait-il pas un blasphème ? Quel est le prêtre, le laïque même qui prêterait un serment qui, non seulement renverse les principes de la religion, mais encore qui révolte la conscience, qui révolte même la droiture, la raison et le bon sens?
« Non, Messieurs, quand toutes les puissances de l'enfer se réuniraient contre nous, nous ne prêterions jamais la main aux décrets qui l'exigent. Si les places du sanctuaire et de la législation civile ne peuvent être occupées que par des hommes obliges de faire ce serment, la France est le plus malheureux de tous les Etats. Nulle puissance ne peut bannir de ce royaume une religion que l'on y professe depuis 1,400 ans, et qui jouit du culte public, et à laquelle sont attachés, de corps et d'esprit, tous les bons Français qui sont encore la majorité des habitants, malgré les efforts redoublés de l'irréligion et des passions.
« Nous sommes Français, Messieurs; nous ne savons pas gémir sou3 la tyrannie d'un despotisme irréligieux. Nous sommés libres; une Constitution qui contrarierait ces grandes vérités anéantirait notre liberté et notre bonheur, serait enfin un abus terrible. »
Cette lettre est signée des officiers municipaux de Sarzeau. Voilà la seule pièce authentique; elle paraît être d'un style bien relevé pour avoir été composée par des paysans de la basse Bretagne, qui n'entendent pas le français.
Nous avons plusieurs autres adresses du même genre, mais comme il n'était question que de l'intérêt du clergé et de quelques seigneurs, on a pris le parti très politique de demander la suppression des domaines congéables. Voici quel est le langage des pétitionnaires :
Us disent qu'indépendamment des décrets de l'Assemblée nationale, ils jurent de maintenir la
religion, que le serment exigé de leur-vénérable prélat porte atteinte à la foi et à la puissance spirituelle; qu'ils ne savent pas si la puissance temporelle est bien ou mal constituée, que les biens donnés au clergé par le peuple lui ont été enlevés sans que le peuple y consentît, que l'Assemblée nationale doit se rétracter, que les députés de Bretagne n'y sont pas libres, que l'expulsion des chanoines, la suppression de certains évêchés ne peut avoir lieu, qu'il faudrait un bref du pape ou un concile général de l'Eglise de France.
Les termes des pétitionnaires sont toujours ceux-ci : nous voulons et exigeons. Nous voulons et exigeons, disent-ils, qu'on ne demande à nos prêtres et à nos prélats aucun serment; nous voulons et «exigeons qu'on n'en déplace aucun, nous aimons notre évêque et nos recteurs, nous voulons qu'ils soient entretenus décemment, et en conséquence nous donnons à nos recteurs la dîme à la trente-troisième gerbe. Nous voulons qu'ils soient en nombre suffisant, qu'on ne fasse aucun changement à la circonscription des paroisses, aux dispositions des collèges, que notre bon pasteur reste dans son palais et nos recteurs dans leurs maisons; nous déclarons que ceux u'on voudrait mettre à leurs places seront regarés par nous comme intrus et illégitimes; nous voulons la paix, nous désirons qu'on ne la trouble
Sas et qu'on ne nous force pas à la résistance, ous voyons avec peine la suppression des vœux monastiques; nous voyons avec indignation et horreur la vente des biens du clergé et leurs acquéreurs. (Rires.)
J'observe à l'Assemblée qu'elle doit plutôt prendre les mesures nécessaires pour faire cesser des troubles, que de rire, parce qu'il n'y a rien de moins plaisant que la résistance, même aveugle.
Plusieurs membres : A l'ordre 1
Les rires sont fort indécents.
, rapporteur. Les pétitionnaires s'occupent ensuite de leurs intérêts, ils demandent la liberté du domaine congéable, le payement des frais des municipalités par le Trésor public, etc., etc. Ces pétitions sont annoncées comme formées par vingt paroisses ; elles portent également que le collège et séminaire de Vannes y adhèrent. Dans une de ces pétitions, on donne au directoire deux jours pour répondre, et l'on dit que, si dans ce délai ii ne fait pas connaître sa réponse, on ira la chercher.
Voici une lettre du procureur général syndic du département, adressée à un député du pays ; elle est datée du 10,et contient ce qui s'est passé depuis le procès-verbal du département.....
« Nos administrateurs, voyant les attroupements s'accroître, envoyèrent à Lorient chercher quatre pièces d'artillerie. Le bruit y courait que nous étions tous égorgés ; en conséquence, au lieu de 50 hommes, nous vîmes arriver hier 1,300 à 1,400 hommes, tant à pied qu'à cheval, et en belle ordonnance. L'habitant murmurait d'un logement aussi gré van t, il venait d'avoir pendant dix jours deux bataillons de troupes de ligne. Enhn les officiers municipaux parvinrent à les placer.
« On me rapporta peu après que quelques étourdis étaient allés chez l'évêque pour lui faire prêter son serment. Au lieu de se montrer, l'é-
vêque fit un trait de faiblesse en voulant s'esquiver par la porte de son jardin ; il se sauva dans le grenier d'une baraque: et il fallut aux municipaux envoyer un détachement des Irlandais pour le ramener dans sa maison.
« Le sieur Gervais fut aussi insulté, ainsi qùe d'autres particuliers qui étaient sans cocarde. »
On ne dit pas que M. l'é-vêque était poursuivi, le sabre nu.
Plusieurs membres à gauche : Voilà un correspondant de M. l'évêque.
, rapporteur. Il a été fait lecture ce matin dans vos comités, par quelques membres de la députation de Bretagne, de différentes lettres qui confirment la vérité de celle-ci, et qui jmnoncent qu'il y a encore quelques assemblées de paysans, à la tête desquelles sont les nobles et les prêtres.
Je vous observerai, Messieurs, qu'il y a entre autres trois personnages dans l'ancienne province de Bretagne qui excitent la plus grande inquiétude ; ce sont MM. les évêques de Léon, de Tréguier et de Vannes. J'ai eu l'honneur de vous rendre compte de l'adresse dans laquelle on annonce qu'avant de partir de Vannes, M. l'évêque avait fait une coalition avec tous les curés et vicaires de son diocèse pour les empêcher de prêter serment.
Je vous observerai aussi, Messieurs, qu'il en est de même de l'évêque de Tréguier, qui, par une instruction pastorale, à raison de laquelle il est dénoncé dans les tribunaux, s'est aussi coalisé avec les prêtres de son diocèse.
Il y déclare qu'il sera toujours évêque de Tréguier ; qu'indépendamment des décrets de l'Assemblée nationale, il administrera tes secours spirituels à ses diocésains. Il a adressé cette lettre à tous les curés et vicaires qui y ont donné leur adhésion, imprimée à la suite de la lettre pastorale.
La même chose s'opère de la part de l'évêque de Léon. On estime que c'est à la présence de ces trois personnes qu'est due l'espèce de mouvement qui a eu lieu dans l'ancienne province de Bretagne.
Vous avez pu voir que ce n'est pas de simples dires que je rapporte : voici une lettre du procureur général syndic du département du Finistère : « La résidence de M. de la Marche (c'est M. l'évêque) dans le pays de Léon y entretient les troubles les plus funestes à la tranquillité que nous désirerions voir régner dans le département. Il n'y a pas de poste que je ne sois instruit de nouvelles démarches de sa part. Les ecclésiastiques, qu'il soutient et encourage, prêchent ouvertement contre la Révolution, contre l'exécution des décrets et contre les membres de l'Assemblée nationale. Le séminaire est supprimé, mais va néanmoins son train ; et il y a même un quartier dans ce moment.
« L'évêque, délogé enfin du palais épiscopal, mais résidant dans le diocèse et à peu de distance de Saint-Pol, continue d'exercer ses fonctions comme au passé, quoique les lois qui le lui défendent impérieusement, lui aient été notifiées. Plusieurs ecclésiastiques, intimidés par sa présence, n'osent prêter le serment ; d'autres sont pratiqués pour prêcher que la religion est dans le plus grand danger, qu'il n'y a plus de sûreté pour les ecclésiastiques qui veulent l'observer et la faire observer. J'ai dénoncé ce ci-devant évêque au tribunal de Morfaix, depuis ie 14 janvier;
mais ce tribunal conduit cette affaire avec une lenteur vraiment alarmante. Il en résulte que le mal se propage avec plus de hardiesse et plus d'audace. On veut un incendie général dans cette partie du département, ce qui ne tardera pas à se vérifier par l'insouciance des juges de Morlaix, leur mollesse ou leur complaisance.
« Je fis hier au directoire du département un réquisitoire tendant à s'adresser au pouvoir exécutif pour qu'il donnât au tribunal de Morlaix les ordres les plus pressants de suivre cette affaire. Il est certain que si l'évêque cessait de résider dans le pays, le calme s'y rétablirait facilement. Les juges de Morlaix devraient en être convaincus par les preuves qui leur ont été déjà servies. Comment donc pourraient-ils ne pas se croire assez autorisés à éloigner l'évêque de son ci-devant diocèse, et à défendre à tout ecclésiastique de communiquer avec lui pour les pouvoirs spirituels, sous peine d'être déclaré réfractaire à la loi et puni comme tel ?
« Vous sentez, Monsieur, de quelle importance il est pour ce département de presser les juges de Morlaix de juger. Je suis, etc. »
Voici copie d'une lettre des administrateurs du département du Finistère, adressée à M. de la Marche, ci-devant évêque de Léon :
« Les écrits inconstitutionnels et séditieux que vous répandez, Monsieur, au mépris du caractère dont vous êtes revêtu, lés insurrections que vous provoquez publiquement, les sermons et les prônes que vous autorisez pour exciter une contre-révolution, toute votre conduite nous oblige à vous regarder comme un perturbateur du repo9 public.
« On nous annonce qu'une fermentation inouie agite en ce moment les villes et les campagnes de Saint-Pol-de-Léon, et que vous comptez beaucoup sur l'explosion prochainedont les résultats flattent votre amour-propre et nourrissent votre ambition. Vos funestes efforts, soyez-en sûr, Monsieur, auront un effet tout contraire à celui que vous en attendez ; mais s'il se verse une seule goutte de sang, nous ne vous le dissimulons pas, vous en répondez sur votre tête.
« Pour éviter la catastrophe que vous préparez, nous jugeons qu'il est de notre devoir de vous engager à quitter à l'instant lepays où vous avez allumé les torches du fanatisme et de la rébellion ; et c'est au nom de la loi que nous vous sommons de le faire. Si vous vous y refusez, Monsieur, nous donnerons contre vous des ordres qui seront à la fin exécutés.
« Mais nous aimons à croire que, vous dépouil. lant enfin de toute passion et revenant à cet esprit de paix, de charité et de concorde que l'Evangile vous commande, vous ne balancerez pas à rappeler l'ordre et la tranquillité dans les lieux que vous habitez.
« Nous sommes, etc......Les administrateurs du
département du Finistère. » (Applaudissements.)
D'après l'examen fait par vos comités des différentes pièces, ils ont cru qu'il était indispensable d'envoyer d'abord dans le département du Morbihan des commissaires chargés de rétablir la paix et la tranquillité par tous les moyens nécessaires, et de prendre les informations sur ce qui s'est passé; ils ont cru qu'il fallait y envoyer des troupes.
Il est certain, Messieurs, que les trois évêques de Vannes, Léon et Tréguier, répandent le trouble dans leurs départements.
Je vous demande, Mon-
sieur le rapporteur, si vous avez quelque preuve que M. l'évêque deVarinesait mis le désordre dans son diocèse, car c'est l'homme le plus pacifique du monde.
, rapporteur. Je n'ai d'autre preuve, Monsieur, que cé qui a été adressé à l'Assemblée nationale par la municipalité dë Lorient et par le directoire du département.
Voici le projet de décret :
« L'Assemblée nationale, Sur le compte qui lui a été rendu par ses comités ecclésiastique, des recherches et des rapports réunis, des différentes pétitions des administrateurs du département du Morbihan, décrète ce qui suit :
« 1° Le roi sera prié, dans [le jour, d'envoyer sans délai trois commissaires dans le département du Morbihan, lesquels se rendront directement à Vannes, et incessamment dans tous les endroits où leur présence pourrait être utile, à l'effet d'employer tousles moyens nécessaires pour procurer l'exécution des décrets de l'Assemblée nationale, acceptés ou sanctionnés par le roi ; éclairer le peuple, le prémunir contre les erreurs dans lesquelles les ennemis de la loi et de l'ordre cherchent à l'entraîuer, et rétablir la tranquillité publique.
«2® Sa Majesté sera également priée de faire passer dans ledit département une force suffisante pour arrêter le cours des désordres qui y ont été excités. v
« 3° Les commissaires envoyés prendront tous les renseignements et éclaircissements qu'ils pourront se procurer, tant sur les mouvements qui ont eu lieu à Vannes et paroisses voisines, les 5, 7 et autres jours du présent mois, que sur les causes qui oùt pu les déterminer. Ils sont autorisés à requérir le secours des gardes nationales et des troupes de ligne, tant dans le département du Morbihan que dans les départements voisins ; ils pourront faire toutes proclamations, et em ploy er tous les moyens qu'ils croiront utiles au rétablissement de la paix et au maintien du bon ordre.
« 4° Il sera incessamment informé devant les tribunaux, contre les auteurs et instigateurs des troubles qui ont eu lieu dans le département du Morbihan, et particulièrement à Vannes, ainsi que contre les officiers municipaux de Sarzeau qui ont souscrit, le 5 de ce mois, la lettre par eux adressée aux administrateurs du directoire du département, a. l'effet dé quoi ladite lettré et autres pièces déposées au comité des rapports seront incessamment envoyées à la personne chargée de l'accusation publique près au tribunal du district de Vannes.
« 5° Le ministre de la justice sera tenu de rendre compte dé jour à autre, à l'Assemblée nationale, du résultat desdites informations.
« 6° Les officiers municipaux de Sarzeau, qui ont souscrit ladite lettre, demeureront suspendûs de leurs fonctions.
« Les commissaires nommés pourvoiront à leur remplacement-par tel nombre de personnes qu'ils jugeront à propos de désigner à cet effet.
« L Assemblée nationale décrété que les ci-devant évêques de Tréguier, Saint-Pol-de-Léott et Vannes seront tenus ae se rendre, à l'instant de la notification du présent décret, à la suite de l'Assemblée nationale.
« Sera le présent décret porté à la sanction dans le jour. »
Messieurs, ce n'est pas pour m'opposer aux dispositions du projet du comité,
tendant à rétablir la paix dans le département du Morbihan, paix qui n'aurait jamais dû y être troublée, que j'ai demandé, la parole, quoique peut-être il soit extraordinaire de donner aux commissaires le pouvoir de remplacer des officiers municipaux, pouvoir que le peuple a gardé. Je m'oppose simplement à là partie du décret qui mande à la suite de l'Assemblée les trois évêques, parce que je ne peùse pas que cette disposition doive rétablir le calme ; parce crue je crois qu'il est absolument illégal de mander des citoyens contre lesquels on n'a prouvé aucun délit, de les mander sur une simple lettre d'une municipalité qui ne contient que des soupçons vagues; parce que cette marche ressemble entièrement à celle de l'autoriié despotique qUe vous avez détruite, de cette autorité ministérielle qui, sur une délation, mandait, d'Une extrémité de l'Empire à la suite de la cour ou du conseil, les hommes qui lui étaient dénoncés.
Je crois donc que si l'Assemblée nationale veut exercer une autorité plus conforme aux principes de liberté et de justice qu'elle a décrétés, elle doit se contenter d ordonner les informations les plus promptes et les plus actives contre ces trois évêques. S'ils^ sont convaincus d'avoir fomenté par leurs intrigues les troubles qui existent dans ces départements, alors on pourra les mander à la suite de l'Assemblée.
Je me borne donc à demander la question préalable sur cette partie du décret; j'adopte tout le reste.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'amendement.)
(Le projet de décret du comité est adopté.)
invite les membres de l'Assemblée k se rendre dans leurs bureaux respectifs pour y procéder à la nomination du président et de trois secrétaires.
La séance est levée à trois heures.
présidence de m. riquetti de mirabeau l'aîné.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance de ce matin, qui est adopté.
Je demande à l'Assemblée la permission de lui lire uhe adresse du district d'Epernav, relative aux prestations de serment des fonctionnaires ecclésiastiques.
J'ai ordonné que toutes les adresses contenant l'annonce de prestations de serment fussent mentionnées dans le procès-verbal-, sans être lues, même par extrait dans la séance, attendu qu'il y en a une telle aflluence, qu'elles feraient consumer tous les moments le rAssemblée.'
En ce cas, je me contente d'an-
Un dé MM. les secrétaires donne lecture des adresses suivantes :
Adresse de félicitation, adhésion et dévouement des juges composant le tribunal du district de Saint-Yrieix.
Adresse de M. Viochot, curé de Maligny, membre de l'Assemblée nationale, absent pour cause de maladie, qui fait hommage du discours patriotique qu'il a prononcé lors de la prestation de son serment civique. Il exprime le vœu de voir arriver le terme dé ses douleurs, afin de reprendre ses fonctions de député.
Adresse de M. Grignon, maire de Rougemont, département de la Côte-d'Or, qui fait hommage à l'Assemblée d'un manuscrit contenant des observations militaires, géographiques, d'histoire naturelle, sur les frontières du Dauphiné.
Adresse des officiers municipaux de la commune de Fretigny, contenant un arrêté contre un ouvrage incendiaire.
Discours patriotique qui a précédé le serment civique de M. Hollier, ci-devant chanoine de Saint-Emilion, et de M. Ducruzel, aumônier du régiment national de cette ville.
Adresse du curé de Notre-Dame d'Eu, qui annonce que les ecclésiastiques fonctionnaires publics qui avaient refusé de prêter-serment le 30 janvier, s'y sont soumis presque tous le 6 février.
Adresse de M. Bruslon, chanoine du ci-devant chapitre de Langeais-Touraine, qui prête entre les mains de l'Assemblée le serment civique.
Adresses des officiers municipaux de Saint-Ouen, du Pont-Gheuil, d'Oussey, district de Mon-targis, d'Hengueville, district d'Andely, deSaint-Cybardeau, des villes de Chevreuse, de Mon-treuil-sur-Mer, de Louviers et de Bagnères, enfin de la garde nationale d'Abrecheville, département de la Meurthe, qui annoncent que les curés et autres fonctionnaires publics des différentes paroisses de ces villes et communautés, ont prêté le serment civique selon les formes prescrites.
' La municipalité de Bagnères demande si les ci-devant prébendés et religieux qui exerçaient les fonctions publiques de- la confession et prédication sans être salariés, peuvent à l'avenir exercer les mêmes fonctions sans avoir prêté le serment civique.
Adresse des curés d'Epineuil, département du Cher, de Vezelay, département de l'Yonne, de Hesse, département de la Meurthe, et du vicaire de Cherac, département de la Charente-Inférieure, qui s'empressent de présenter à l'Assemblée les prestations de leur serment civique. Ils manifestent une admiration respectueuse pour la constitution civile du clergé.
Une députation des docteurs agrégés de la faculté de droit de l'Université de Paris demande à être admise à la barre.
(La députation est introduite.)
Uorateur de la députation s'exprime ainsi :
« Messieurs, les docteurs agrégés dé la faculté de droit de Paris, que. vous daignez admettre devant vous, viennent dénoncer à votre vigilance une loi qui depuis longtemps a paralysé
l'enseignement de la jurisprudence et qui empêche qu'aujourd'hui nous n'expliquions vos décrets avec la solennité qui convient à la Constitution française.
» Sans doute les docteurs, membres des facultés de droit, ne peuvent s'empêcher d'honorer ceux de leurs confrères qui, siégeant dans cette illustre Assemblée, ont signalé leur savoir pour le service de la patrie ; sans doute iïs se réjouissent d'un nouvel ordre de choses qui compense la diminution de leur fortune et la perte de leurs titres, par l'espérance qu'ils doivent concevoir que leurs talents auront à l'avenir un emploi plus utile. Mais ils n'ont point encore élevé la voix pour développer la philosophie de ce droit public qui adonné à la nation française la liberté que, jamais, jusqu'à nos jours, un grand peuple n'avait pu obtenir.
Les élèves de l'université d'Angers ont les premiers sollicité publiquement cet honneur;ils ont montré que l'homme a été remis par vos mains, dans cet état de liberté qu'il tient de son Créateur.
« Nous avons espéré que la Constitution étant près de s'achever nous pourrions entreprendre davantage. Notre qualité de docteurs agrégés nous fait partager toutes les fonctions des professeurs de droit ; celle d'enseigner publiquement nous est attribuée, quand ils ne peuvent le faire; la liberté que vous avez rendue à chacun de répandre des opinions utiles, surtout celles qui sont d'un intérêt général, paraissait ajouter à nos pouvoirs particuliers.
« Nous avons d'abord cru qu'il nous serait permis de suivre les mouvements de notre patriotisme. Nous nous préparions à donner des leçons publiques sur ces questions qui occupent tous les citoyens, et dont la solution est si importante pour le bonheur de la nation, savoir : par exemple, quel est en France et quel doit être le souverain ; si le gouvernement en est distinct et lui est subordonné; ce qu'on doit entendre par cette idée de suprématie jointe à celle de chef, dans le pouvoir exécutif ; si les pouvoirs partiels qui lui sont soumis peuvent agir les uns sur les autres; s'ils sont tenus de prendre les ordres, ou de la loi seule, ou de ce chef suprême ; si, pour déployer la force publique, ils doivent consulter le chef, ou s'ils peuvent contrarier ses ordres.
« Mais nous avons reconnu que notre zèle était dans l'impuissance de servir la chose publique. Il existe, Messieurs, une loi positive qui permet aux seuls professeurs d'élever la voix. Cette loi nous serait opposée et punirait avec sévérité de fidèles citoyens. Elle a été portée par le plus absolu de nos rois ; et probablement, Messieurs, l'intention de ce monarque était aussi de défendre aux docteurs agrégés d'enseigner publiquement rien de pareil a vos principes.
« Louis XIV, dans un éditdu mois d'avril 1679, article 5, s'exprime ainsi :
e Défendons à toutes personnes autres que les-dits professeurs, d'enseigner et de faire leçon publiquement du droit civil et canonique, à peine de 3,000 livres d'amende, applicables, moitié aux professeurs, et l'autre moitié à notre profit, d'être déchus de tous les degrés qu'ils pourraient avoir obtenus et d'être déclarés incapables d'en obtenir aucuns à l'avenir ; ce que nous voulons avoir aussi lieu contre ceux qui prendroient les leçons desdits particuliers. »
t De nos jours, un arrêt du parlement de Paris, du 23 mars 1765, a jugé conformément à cet édit.
« Cette loi n'a absolument aucune proportion
raisonnable avec ce prétendu délit, surtout quand on l'applique aux docteurs agrégés, dont elle reconnaît la capacité et l'expérience.
« Un des premiers vices de cette loi, c'est d'éteindre l'émulation, qui, dans la concurrence aurait animé les professeurs. Par cette loi, dans la plupart de nos facultés de droit, les classes sont désertes ; par cette loi, les docteurs agrégés gémissent d'être dans l'impossibilité d'expliquer aux citoyens la nouvelle Constitution, dont tous les bons Français, même avant la Révolution, avaient entrevu le principe, mais dont tous désirent qu'on leur explique la théorie : c'est par la liberté, dont nous réclamons l'exercice, que le public apprendra insensiblement à saisir l'ensemble de ce grand ouvrage, qui, Messieurs, vous assure un rang élevé parmi les législateurs.
« Ainsi nous venons vous prier d'abroger l'article 5 de l'édit du mois d'avril 1679, portant règlement poUr l'étude du droit canonique et civil, quant à la défense faite aux docteurs agrégés des facultés de droit, de donner, sur les lois, des leçons publiques.
« Nous allons, si vous le permettez, remettre sur le bureau l'édit du roi et l'arrêt du parlement.
« Pour ne point borner l'utilité de ces leçons, mais l'étendre de plus en plus dans tout le royaume, nous saisissons, Messieurs, l'instant où vous allez poser les bases des études publiques, pour avoir l'honneur de vous présenter un plan général d'enseignement de droit public et privé. Nous avons lieu d'espérer qu'il se liera aisément avec les idées qui dirigent le comité de Constitution : le droit public y tient le premier rang : son enseignement v est réparti graduellement, et pour les localités, et pour la manière de l'expliquer, à commencer par les villes des départements qui doivent l'inspecter, jusque dans ces divisions des campagnes, qui touchent aux premiers éléments de la représentation du peuple français. L'utilité des différentes espèces de droit privé y est aussi discutée, tant relativement aux matières dont il est composé, qu'aux diverses époques où elles doivent être ènseignées ou abandonnées.
« Si vous daignez, Messieurs, l'admettre pour être examiné, votre amour pour le bien public agréera le sacrifice de nos intérêts particuliers, et la patrie reconnaîtra que les docteurs agrégés de la Faculté de droit de Paris sont au nombre de ses plus zélés défenseurs. »
Signé : Berthelot, homme de loi, docteur agrégé de la Faeulté de droit de Paris, au nom des docteurs agrégés de cette Faculté.
répond :
« Messieurs, c'est parmi les maîtres éclairés de l'art, que les productions humaines trouvent leurs meilleurs juges; sous ce point de vue, notre nouvelle Constitution mérite une estime particulière de la part des jurisconsultes, comme elle a des droits à votre attachement, en vous considérant seulement comme citoyens. L'Assemblée nationale reçoit avec intérêt l'expression de vos sentiments à ce double égard.
« Nous approchons de l'instant où la plus grande partie du droit public et privé, qui nous a régis jusqu'à ce jour, sera mêlée dans ces vastes ruines dont nous nous voyons environnés. Il ne restera plus guère à notre usage, de l'ancienne jurisprudence, que ces vérités éternelles, qui, prises dans la nature de l'homme et de la société, voient tout changer autour d'elles,
sans jamais changer elles-mêmes, et qui sont le principe de toute régénération durable.
« Le droit naturel a été le tronc primitif de toutes les tiges de cette science générale, qu'on appelle Droit : mais des branches parasites ont fini par étouffer l'arbre. Il a fallu les abattre ; il faudra descendre jusqu'aux racines pour faire pousser partout des rejetons sains et vigoureux. (Applaudissements.)
« Beaucoup de choses sont faites sur cette matière; beaucoup sont à faire. Notre droit particulier n'exige pas de moindres réformes, que notre droit public n'en a éprouvé. Nous avons déjà fourni une assez ample matière à l'enseignement général. Hommes de loi, vous êtes désignés, par votre état même, pour faire connaître et chérir "nos lois.
« La justice a toujours eu pour tous les peuples quelque chose de sacré. Nous venons d élever partout de nouveaux temples à son honneur: vous êtes comme les prêtres de ces temples ; vous en enseignerez le culte, Vous en écarterez les fausses doctrines, vous empêcherez que la religion de la justice ne se souille; avec le temps, par des coutumes insensées, par des interprétations infidèles.
« Avant toutes les facultés du royaume, il existait une grande faculté, celle de la réunion de tou3 les citoyens qui, chacun dans leurs divers genres, ont le droit de donner l'essor à leurs talents, et de se rendre utiles à lenr patrie.
« Si l'esprit des corporations a été de tout resserrer, de tout arrêter, celui de la Constitution actuelle est de tout développer, de tout étendre : elle s'applique à rouvrir les canaux qui peuvent rendre libre et facile toute espèce d'utile com munication, et surtout celle de l'esprit et de la pensée.
« Ne doutez point que cette Assemblée ne con sidère votre demande dans ses rapports avec les principes de liberté et de sagesse qui l'ont dirigée jusqu'à présent : elle accepte l'hommage que vous lui faites de votre projet d'enseignement du droit public et privé, eu consentant à la remise sur son bureau des pièces que vous lui avez annoncées, et elle vous invite à assister à sa séance. » (Applaudissements.)
Je demande l'impression du discours et surtout de la réponse.
(L'Assemblée ordonne l'impression du discours des docteurs agréeés et de la réponse du Président et renvoie à l'examen du comité de Consti- . tution la pétition concernant l'article 5 de l'édit de 1679 et le plan général d'enseignement de droit public et privé.)
Messieurs, le résultat du scrutin pour la nomination du président et de trois secrétaires a donné le résultat suivant ;
Pour la présidence,M. Du port a obtenu 230 voix et M. Tronchet 141 voix.
Pour les fonctions de secrétaires, M. Pétion de -Villeneuve a obtenu 224 voix; M. Voulland, 219 voix, et M. de Sillery, 204 voix.
En conséquence, sont élus : président, M. Du-port ; secrétaires, MM. -Pétion de Villeneuve , Voulland et de Sillery , en remplacement de MM.Voidel, Goudard et Jacquemart.
L'ordre du jour est un rapport du comité des domaines sur Valiénation du domaine de Féné-tranges.
,rapporteur (1). Messieurs, parmi les domaines nationaux, indûment aliénés, celui de Pénétrantes était un des premiers qui devait provoquer l'examen de votre comité des domaines, soit par rapport à sa valeur, soit par rapport au genre ou aux caractères de l'aliénation.
Vous avez trouvé dans le livre des décisions de finances, connu sous le nom de Livre rouge, au chapitre des dons et gratifications, année 1782, la mention d'une ordonnance au porteur, de 1,200,000 livres à laquelle somme Sa Majesté a fixé le prix de l'engagement de la comté de Féné-tranges, accordée a M, de Polignac.
Ge texte a dû naturellement faire élever des doutes sur cet engagement, ou le faire soupçonner de déguiser une libéralité. Le comité a cherché à éclairer cette idée par la connaissance des pièces relatives à l'aliénation. Il s'est adressé à l'ordonnateur de l'administration des domaines, qui lui a fait parvenir la copie de deux états de consistance du domaine de Fénétrangès, un bon du roi, du 7 avril 1782, un arrêt du conseil, du 4 juin suivant, qui commet la chambre des comptes de Lorraine pour passer l'engagement de ce domaine à M. et Mmo de Polignac, au prix de 1,200,000 livres, un nouveau bon du roi, sur lequel est intervenu un second arrêt du conseil, le 4 mars 1783 ; enfin, un mémoire et un troisième arrêt du conseil, du 1" mars 1785.
L'ordonnateur, en adressant ces pièces au comité, lui a écrit que « c'est là tout ce qu'il lui « est possible d'envoyer d'instructif sur la con-« cession faite à M. de Polignac, et sur ce gui « s'en est suivi ; d'ailleurs, que ce qui existe « dans ses bureaux de relatif à cette concession... « n'ajouterait absolument rien aux notions que « le comité recueillera des pièces jointes ».
C'est -donc d'après ces pièces, jointes au résultat du livre rouge, et à l'arrêt de la chambre des eomptes de Lorraine, intervenu à la suite de la commission du conseil, que le comité s'est procuré auprès des officiers de cette cour, qu'il a dû asseoir l'opinion qu'il vient vous soumettre.
Il résulte de l'un des deux mémoires de consistance remis au comité, que les biens composant la ci-devant baronnie de Fénétrangès sont devenus une propriété domaniale, ensuite de la cession de la Lorraine et de divers échanges faits en 1751, 1758 et 1775v avec les princes de Salm et de Nassau, et le sieur Gérard, subrogé aux droits du dernier.
La ci-devant justice seigneuriale de cette baronnie s'étendait sur une ville et 19 villages ou bourgs, réduits à 16 par un démembrement fait en 1775.
Ses domaines corporels ou incorporels s'étendaient encore «ur 15 communautés, paroisses ou hameaux; des droits nombreux y étaient attachés sous 33 dénominations différentes.
11 résulte du même état, que les produits annuels de ce domaine, non compris les bois, étaient portés, à l'époque de l'aliénation, à 75,8621. 12 s. 10 d. cours de Lorraine, se réduisant à environ 60,000 livres cours de France.
Une lettre moderne des officiers municipaux de la contrée en porte Je revenu actuel à 66 ou 67,000 livres de France, ce qui s'accorde avec un état indicatif des augmentations de produit survenues depuis l'aliénation.
Les bois consistent en 4,314 arpents, mesure de Lorraine, situés, sur la rive droite de la Sarre,
dépendance de la maîtrise de Sarreguemines. Ces bois sont divisés en coupe de 30 années, avec de la futaie sur taillis dans quelques parties.
L'état remis par l'administration n'apprend rien sur le produit de ces bois. Mais la maîtrise de Sarreguemines, consultée par votre comité, lui a appris, par un état détaillé et certifié, que les coupes annuelles s'élevaient à 155 arpents, dont le produit, variable de 120 à 150 livres par arpent , donnait un résultat moyen d'environ 20,000 livres.
Ainsi, ce domaine, avant les suppressions décrétées par l'Assemblée nationale, devait être envisagé comme un objet d'environ 80,000 livres de rente.
Il paraît que M. et Mme de Polignac jetèrent les yeux sur ce domaine en 1781.
On trouve, à la date du 10 septembre de cette année, une première décision du roi, énoncée dans le bon du 7 avril 1782. Il résulte de cette énonciative, que M. et Mme de Polignac avaient obtenu la concession de ce domaine, au moyen de l'abandon qu'ils avaient offert d'une pension ou gratification de 33,000 livres qui leur était annuellement accordée par le roi, et de la rétrocession du fief de Puy-Paulin, qu'ils possédaient à titre d'engagement. Il est bon d'observer que, d'après les renseignements fournis au comité, la finance de cet engagement n'étaitque de 106,920 livres en principal et sols pour livre. Il paraît que le roi, en accordant cette grâce, en avait différé la jouissance, et qu'il avait excepté les bois de la libéralité.
Ces restrictions donnèrent lieu à un nouveau mémoire, sur lequel intervint le bon du 7 avril 1782. M. et Mme de Polignac demandèrent la jouissànce actuelle du domaine de Fénétrangès, même de la partie des bois exceptés par la première décision. Ils se fondèrent sur ce que l'abandon de leur pension ou gratification annuelle de 33,000 livres et la rétrocession du fief de Puy-Paulin balançaient à peu près le revenu de Fénétrangès, qu'ils évaluaient à 48,000 livres. Quant aux bois, ils offraient de se charger de l'entretien des salines de Dieuze, auquel ils étaient affectés.
Des observations qui suivent ce mémoire, et qui paraissent appartenir au ministre qui le mettait sous les yeux du roi (1), portent « qu'il « résulte des éclaircissements qui ont été pris, « qu'en effet le montant des revenus ordinaires « de Fénétrangès-est à peu près balancé par les « compensations qu'offrent M. etMm0de Polignac ; « qu'ainsi l'avantage le plus réel que leur procu-« rerait la possession de ce domaine serait de « convertir en s une propriété la jouissance « annuelle, pendant leur vie, des 33,000 livres de gratiQcation ou de pension ».
Quant aux bois, le ministre les divise en deux parties ; l'une de 4,314 arpents dépendant de la maîtrise de Sarreguemines, qui n'était soumise à aucune affectation, et dont il énonce le produit d'abord comme un objet de 4,200 livres, et plus bas, comme pouvant être considéré pour 7 à 8,000 livres.
La seconde partie, de 23,000 arpents, affectée aux salines de Dieuze, et
dont il porte le produit à 30,000 livres. Il observe qu'il ne paraissait
pas comment M. et Mma de Polignac, au moyen de la jouissance de ces
bois, pourraient se charger de l'entretien des salines, qui entraînaient
une dépense annuelle de 60,000 livres, que Ge serait
Le ministre conclut que si Sa Majesté était disposée à donner, dès à présent, à M. et Mmede Polignac la satisfaction de les mettre en jouis-sauce du don qu'elle a eu la bonté de leur assurer, ei à y ajouter une nouvelle preuve de sa bienveillance, elle pourrait leur abandonner :
1° La jouissance de tous les revenus de Féné-tranges ;
2° La partie de bois de 4,314 arpents, non affectée aux salines.
Et au moyen des renonciations et rétrocessions offertes par M. de Polignac, de leur gratification et du fief de Puy-Pauhn, que l'avantage pécuniaire qu'ils trouveraient pendant leur vie dans cette concession ne serait annuellement que de 9 à 11,000 livres en partant de l'état actuel des choses.
Ce mémoire fut revêtu du bon du roi. C'est à la suite de ce bon en date du 7 avril 1782, qu'on trouve immédiatement l'arrêt du conseil du 4juin suivant, par lequel le roi en son conseil, par grâce et sans tirer à conséquence, commet la chambre des comptes de Lorraine pour passer vente et aliénation, avec clause de rachat perpétuel, à M. et Mme de Polignac, des domaines et bois de la baronnie de Fénétranges, à l'exception des bois affectés aux salines de Dieuze, de la justice, et de la nomination aux offices qui demeurent réservées à Sa Majesté. Il est dit que, pour prix de vente, M. et Mme de Polignac verseront au Trésor royal la somme de 1,200,000 liv., au moyen de quoi ils ne pourront être dépossédés qu'étant préalablement remboursés de la même somme en argent effectif et non en aucuns billets ou papiers, et qu'ils jouiront de l'intérêt de cette finance à compter du jour de la quittance qui leur en sera passée, jusqu'au 1er janvier 1784, époque fixée à leur entrée en jouissance.
Il n'est peut-être pas inutile de remarquer que cet arrêt intervint sur une requête de M. et M®9 de Polignac, où ils débutent en disant que les bontés du roi leur inspirent la confiance cle solliciter une nouvelle grâce, qui les mette à portée de soutenir l'éclat ei la splendeur de leur maison ; et où ils déclarent, pour conclusion, qu'ils s'en remettent purement et simplement à la fixation de prix qui sera faite par Sa Majesté.
Cet arrêt fut suivi d'une aliénation ou délivrance passée le 13 juillet suivant par la chambre des comptes de Lorraine, à ces fins commise.
La quittance du prix déterminé par l'arrêt du conseil est annexée à l'aliénation \ elle est sous la date du 26 juin précédent ; le sieur Savalette, garde du Trésor royal, confesse avoir reçu comptant de M. et Mme de Polignac la somme de « 1,200,000 livres, « laquelle ils déclarent être la « même que celle à eux prêtée par M. de Mous-« seau, suivant l'obligation passée devant Armet « et son confrère, notaires à Paris, le 10 du « même mois. »
C'est en concours avec ces pièces que se trouve au chapitre des dons et gratifications du Livre rouge, et à la date de la même année 1782,lamen-tion de l'ordonnance au porteur ci-devant énoncée de 1,200,000 livres sur le Trésor royal, « à laquelle « so mme Sa Majesté à fixé le prix de l'engage-
« ment de Fénétraoges, accordé à M. le duc de « Polignac».
Un coup d'oeil rapide sur ce qui a suivi n'est pas étranger à l'instruction.
La chambre des comptes, en procédant à l'aliénation, avait accepté les droits de patronage et nomination aux bénéfices ecclésiastiques, soit comme tacitement compris dans les réserves exprimées par l'arrêt du conseil du 4 juin, soit comme un droit régalien expressément réservé au prince par les lois de Lorraine.
D'autre part, la maîtrise de Sarreguemines soutenait que la forêt deHatzhalz sur le ban de Wecker-willer comprise dans la délivrance de la chambre des comptes était une dépendance de la principauté de Lixheir et non pas de la baronnie de Fénétranges.
M. et Mme de Polignac exposèrent dans un mémoire à ce sujet que les droits de patronage et nomination aux bénéfices ecclésiastiques devaient suivre le fief et avaient été engagés en d'autres occasions, et que les bois sur Wecker-viller avaient toujours été adjugés avec ceux de Fénétranges. Un arrêt du conseil du 4 mars 1783, sans s'arrêter à la réserve faite par la chambre des comptes, ordonne que M. et MIn, de Polignac jouiront des droits réservés, dérogeant en tant que de besoin à toutes lois et usages contraires,-et qu'ils jouiront pareillement des bois sur Weckerviller, nonobstant le certificat de la maîtrise de Sarreguemines.
M. et Mme de Polignac étendirent leurs demandes par un nouveau mémoire sur lequel intervint un troisième arrêt du conseil, le iermars 1785.
Celui du 4 juin 1782 avait réservé au roi l'entière justice de Fénétraoges et par conséquent tous les droits qui pouvaient en dépendre.
D'autre part, les ordonnances avaient pourvu à ce que les engagistes ne dussent couper aucune futaie dans les bois de leurs engagements.
M. et Mm8 de Polignac demandèrent :
1° La faculté d'établir une justice champêtre ;
2° La jouissance du tiers denier dans les bois des communautés ;
3° Celles des amendes et dommages-intérêts, soit dans les boisde la concession, soit dans ceux des communautés pour la part qui en revenait au roi ;
4° Un aménagement des forêts concédées avec la faculté de couper les arbres dépérissants, ce qui emportait indirectement la jouissance de la futaie.
Le grand-maître du département, entendu sur Ces demandes, observe, quant à l'aménagement, qu'il adopte ce chef de conclusion... à la charge de laisser 30 arbres anciens bien venants et 12 baliveaux par arpent.
Quant au droit de tiers denier, que l'engagement n'en faisant point mention, il devait être réputé réservé au roi, d'autant plus qu'il était ordinairement regardé comme une dépendance de la juridiction ; il ajoute, consultativement en faveur de M. et M®" de Polignac : « Que l'on doit supposer que l'engagement a été précédé de l'évaluation du produit des objets qui le composaient ; que, si le droit de tiers denier n'a point été compris dans le nombre de ces objets, il faudrait, en supposant que le roi fût disposé à le céder, procéder à son évaluation particulière et déroger aux ordonnances qui semblaient en défendre l'aliénation».
Quaut aux amendes, qu'elles étaient un fruit absolu de la justice réservée au roi;
Le mémoire répond à ces observations à mesure qu'il en rend compte.
M. et Mm8 de Polignac reconnaissent la justice de celles qui concernent les amendes ; « aussi, « disent-ils, ce n'est pas à titre de justice et de « droit acquis qu'ils demandent à en jouir, mais « à titre de grâce, et pour réunir dans une même « main tous les objets dépendant du domaine à « eux. engagé».
Ils ajoutent tant relativement aux amendes qu'au droit de tiers denier que, s'il pouvait y avoir des difficultés à déclarer qu'ils font partie de leur cession, nonobstant des exemples qu'ils énoncent à l'appui de leur demande, « on pour-« rait les lever, en les leur abandonnant par un « nouvel engagement, moyennant une rente que « l'on concerterait avec eux».
Le nouvel arrêt du conseil, interprétant les précédents et y ajoutant en tant que de besoin, toujours, par grâce, et sans tirer à conséquence, accueillit les nouvelles demandes. Il déroge à tous édits, lois et ordonnances contraires à l'abandon du droit de tiers denier, et notamment à l'ordonnance de Lorraine du 23 mai 1664 et à la déclaration du 31 janvier 1724.
Tel est l'état auquel se présente l'aliénation du domaine ci-devant baronnie de Fénétranges.
Vous ne regarderez peut-être pas comme inutile de vous rendre compte des sommes que M. et Mme de Polignac puisaient, à peu près concurremment, dans le Trésor public.(Rires et applaudissements.) '
Ils offraient, en 1782, l'abandon de leur pension ou gratification annuelle de 33,000 livres et la rétrocession de l'engagement du fief de Puy-Paulin pour le domaine de Fénétranges. Ce domaine leur est concédé la même année au prix de 1,200,000 livres compensé par une ordonnance de comptant sur le Trésor royal, aux termes du Livré rouge; ils ne touchent pas moins le montant de leur gratification. (Rires.)
L'année suivante 1783, M. de Polignac obtient une pension de 80,000 livres sur le Trésor royal, entièrement réversible à son épouse (1). (Nouveaux rires.)
11 touche les intérêts des 1,200,000 livres dont il avait reçu l'ordonnance de comptant l'année précédente, sur le fondement que sa jouissance de Fénétranges était retardée jusqu'au 1er janvier 1884.
Et il continue de recevoir sa gratification annuelle de 33,000 livres (2).
Eu 1784, il obtient une ordonnance particulière de comptant de 100,000 livres (3).
En 1785, il en obtient une autre de 60,000 livres sur le receveur des finances de là Guyenne, causée pour frais de voyage et encouragements à donner dans l'inspection des haras (4).;
En 1786, il lui fut accordé une somme de 800,000 livres à titre
d'indemnité de la suppression d'un droit de huitain dépendant du fief de
Puy-Paulin (5); et vous n'aurez pas oublié que la totalité de ce fief
n'était tenu à engagement que pour 106,920 livres qu'il aurait suffi de
rembourser, et que M. de Polignac n'en présentait lui-même le produit
entier que pour 15,000 livres
Quelle est maintenant l'opinion qu'on doit se former de l'aliénation dont il s'agit?
Votre comité des domaines n'a pas douté un instant qu'elle dût être regardée comme unq libération déguisée sous l'apparence d'un engagement.
Il est certain d'abord, sous quelque rapport qu'on envisage cette aliénation, que la nation est au cas de rentrer dans le domaine aliéné.
Comme libéralité, cette aliénation est radicalement nulle et toujours révocable, soit en vertu de l'inaliénabilité absolue du domaine qui a fait la loi du royaume, jusqu'au changement introduit par vos décrets, soit en vertu des dispositions particulières des ordonnances relatives aux dons et concessions gratuites, soit en vertu de l'article 29 de la nouvelle législation domaniale.
Comme engagement, l'aliénation est également révocable, à la seule condition de rembourser ce que les engagistes justifieraient avoir réellement versé en espèces dans le Trésor public, aux termes de l'article 26 de vos décrets de la législation domaniale.
Dansïes deux hypothèses, le domaine de Fénétranges est donc dans le cas d'être réuni.
Mais M. et Mme de Polignac ne doivent-ils être dépossédés que sous le remboursement préalable des 1,200,000 livres stipulées en l'arrêt du conseil du 4 juin 1782, et quittancées le 26 du même mois?
Votre comité ne le pense pas, parce que tout indique ou plutôt tout manifeste que celte somme n'a point été réellement fournie par M. et Mme de Polignac, et qu'ils ne l'ont payée que fictivement par l'ordonnance de comptant de la même somme énoncée dans le même temps et pour la même cause.
Vous n'avez pas perdu de vue que M. etMma de Polignac commencèrent par obtenir le domaine de Fénétranges, pour la simple renonciation à une pension ou gratification, et la rétrocession de l'en^ gagement du fief de Puy-Paulin ; et qu'ils firent confirmer et étendre cette concession par un second bon du roi le 7 avril 1782.
C'est moins de deux mois après qu'intervient sur leur propre requête, l'arrêt du 4 juin suivant qui leur engage le même domaine au prix de 1,200,000 livres; certainement on ne se persuadera pas que si cette stipulation n'eût pas été purement fictive, si M. et Mme de Polignac n'eussent pas eu la remise ou la compensation du prix stipulé, ils eussent renoncé à l'avantage de posséder ce même domaine au titre presqu'entière-ment gratuit auquel ils venaient de l'obtenir à deux différentes reprises.
Parle premier bon du 10 décembre 1781,énoncé dans celui du 7 avril 1782, le domaine de Fénétranges était accordé à M. et Mm8 de Polignac, pour l'abandon de leur pension ou gratification de 33,000 livres et la rétrocession du fief de Puy-Paulin dont la finance n'était quede 106,920 livres. Par le second, la jouissance de M. et Mmede Polignac était rapprochée, et le roi leur donna de plus les bois dépendant de la maîtrise de Sarregoe-mines, extension que le ministre évaluait de 9 à 11,000 livres de rente à leur avantage.
Ainsi, à 106,920 livres près, montant de la finance de Puy-Paulin, tout était libéralité dans les deux bons du roi.
Est-il concevable que M. et Mme de Polignac eussent provoqué eux-mêmes la substitution d'un
engagement de 1,200,000 livres à cette libéralité, s'ils n'avaient concerté en même temps la remise ou la quittation gratuite du prix de cet engagement?
Il est aisé de pénétrer et de suivre la combinaison qui a produit cette interversion.
Les deux dons du domaine de Fénétranges en remplacement d'une gratification, et de la finance du fief de Puy-Paulin, étaient perpétuellement révocables sans que M. et Mme de Polignac eussent à répéter autre chose que le montant peu considérable de cette finance. Un engagement apparent au prix de 1,200,000 livres éloignait le danger de la dépossession par l'importance du remboursement, et, dans tous les cas, donnait lieu à une répétition spécieuse contre le Trésor public. On conçoit que M. et Mme de Polignac aient imaginé un pareil arrangement, et l'on conçoit aussi qu'après avoir obtenu le don lui-même, il dut être facile d'obtenir une forme d'aliénation qui pouvait n'être présentée que comme un moyen d'y donner plus de solidité ou de consistance.
Si de ces circonstances antérieures on passe à l'arrêt même du 2 juin 1782, qui forme le titre de l'engagement, tout y respire la libéralité.
1° On lit dans la requête de M. et Mme de Polignac sur laquelle il intervient, que les bontés du roi leur inspirent la confiance de solliciter une nouvelle grâce, qui les mette à portée de soutenir l'éclat et la splendeur dé leur maison.
L'engagement d'un domaine au prix réel delà chose engagée n'est pas précisément une grâce, n'est pas surtout un avantage pour soutenir l'éclat d'une maison. M. et Mm* de Polignac ne poursuivaient donc pas un véritable engagement, M. et Mme de Polignac sollicitaient donc une nouvelle grâce. Or, à 106,920 livres près, montant de la finance de Puy-Paulin, ils avaient l'assurance du domaine de Fénétranges à pur titre de don; ils sollicitaient donc une concession encore plus avantageuse; c'était donc un engagement purement libéral qu'ils avaient en vue : disons mieux, une couleur d'engagement sur Une libéralité entière et effective.
La conclusion de la requête répond parfaitement à sa teneur, lorsque M. et Mma de Polignac, sans énoncër eux-mêmes aucunement la valeur du domaine qu'ils poursuivent, en demandent la concession moyennant telle finance qu'il plaira à Sa Majesté d'imposer.
2° L'arrêt n'est précédé d'aucune évaluation ni même d'aucun renseignement positif qui puisse servir à fixer la valeur de l'objet prétendu engagé.
L'administration n'a communiqué que les deux mémoires ou états que j'ai énoncés, l'un relatif au produit de la baronnie, indépendamment des bois; l'autre qui ne donne que la contenance des bois delà maîtrise de Sarreguemines sans aucune énonciation dé leur produit; et vous avez pu remarquer que le ministre était si peu instruit à ce sujet que, dans ses observations sur le mémoire de M. et Mme de Polignac du 7 avril 1782, il donnait à ces bois une valeur tantôt de 4,200 livres, tantôt de 7 à 8,000 livres.
Si on eût négocié un marché effectif, s'agissant surtout d'un objet aussi important, peut-on douter qd'on aurait pris d'autres mesures; qu'on eût commencé par s'assurer des deux parts de la valeur réelle de l'objet négocié?
3° Enfin l'arrêt porte expressément qu'il est rendu par grâce et sans tirer à conséquence; il était donc une opération concertée pour l'avantage particulier de M. et Mme de Polignac, et non
pas un engagement effectif, un marché réciproquement utile aux parties contractantes. *
C'est dans ce concours de circonstances que le Livre rouge énonce « l'ordonnance au porteur de « 1,200,000 livres, à laquelle somme Sa Majesté « a fixé le prix de l'engagement de Fénétranges « accordé à M. de Polignac. » Le prix de cet engagement était donc purement fictif, puisqu'on accorde en même temps une ordonnance de la même somme et pour le même objet sur le Trésor royal ; le prétendu engagement n'est donc effectivement qu'une libéralité.
L'opinion de votre comité n'a point été suspendue par la quittance du Trésor royal, portant que M. et Mme de Polignac ont déclaré que la somme quittancée était la même « que celle à eux prê-« tée par le sieur de Mousseau, suivant obliga-« tion passée devant Armet et son confrère, no- taires à Paris, le 10 du même mois. »
On conçoit que M. et MmB de Polignac ont pu passer au sieur de Mousseau toutes .les déclarations ou obligations qu'ils ont crues utiles à leurs intérêts, et en faire insérer la mention dans la quittance du Trésor royal ; et ce n'est pas la seule fois que le Trésor royal aurait accédé a des énon-ciations de ce genre (1). Mais que M. et Mm® de Polignac aient réellement emprunté du sieur de Mousseau 1,200,000 livres; qu'ils aient compté cette somme au Trésor royal, et qu'ils l'aient ensuite remboursée au sieur de Mousseau, avec l'ordonnance de comptant énoncée au Livre rouge; ou bien que le garde du Trésor royal ait reçu cette ordonnance en payement, et en ait passé quittance comme de la somme effective, et que M. et Mme de Polignac eussent passé au sieur de Mousseau une obligation simulée pour cacher les traces de la libéralité, la cbose est absolument indifférente. Toujours est-il constant que le prix de l'engagement de Fénétranges a été remis, compensé ou acquitté par une ordonnance de comptant de la même somme; d'où il suit que cet engagement aété purement gratuit, et par conséquent qu il est sujet a révocation comme une libéralité, sans remboursement ni restilutiou.
Ce qui a suivi ne concourt pas moins à manifester la libéralité qui a été le principe et le fond du prétendu engagement.
C'est par grâce et sans tirer conséquence qu'intervient l'arrêt du 1er mars 1785, qui concède à M. et Mm0 de Polignac l'établissement d'une justice champêtre, le droit de tiers denier dans les bois des communautés, les amendes, etc. Le roi en fait à M. et Mmo de Polignac tout don et cession nécessaires. Ici, M. et Mme de Polignac ne demandaient effectivement les nouveaux objets
au'à titre de grâce (2). Mais un titre antérieur 'engagement aurait-il été conçu comme le titre de don qui en a été la suite ou la conséquence? Et des cessions purement libérales auraient-elles été ainsi ajoutées à un vrai titre d'engagement?
Les facilités de M. et M"® de Polignac à puiser arbitrairement dans le Trésor public, tantôt par une voie, tantôt par une autre, n'ont pas moins paru à votre comité un indice frappant de la gratuité du prétendu contrat.
De tout cela, le comité a conclu que l'engagement dont il s'agit n'en
avait que l'apparence; qu'au fond c'était un don pur et simple, puisque
le prix en avait été remis ou acquitté par une ordonnance de comptant,
et qu'il devait vous en proposer la révocation sans remboursement.
Un second point a fixé l'attention du comité : c'est la négociation postérieure du fief de Puy-Paulin, demeuré au pouvoir de M. de Polignac, au moyen du dernier titre auquel il avait obtenu le domaine de Fénétranges. Ce fief, aliéné en 1723, au prix principal de 97,200 livres et les sols pour livre était passé à M. de Mancini, et successivement à M. de Polignac. Il dépendait de ce fief un droit de huitain, qui se percevait sur la vente du poisson à Bordeaux. Ce droit, onéreux par lui-même, donnait lieu à des contestations, ce qui en fit désirer l'extinction par la ville de Bordeaux. Il s'agissait alors d'aliéner le château Trompette, dépendant du domaine. Des prétentions de la ville de Bordeaux sur les terrains de ce château devinrent un objet de compensation. L'aliénation du château Trompette et la suppression du droit de huitain furent ordonnées par des lettres patentes du mois d'août 1785, sauf l'indemnité de l'en gagiste, à laquelle il fut réservé de pourvoir.
Cette indemnité a été le prétextedes 800,000 liv. accordées à M, de Polignac au commencement de 1786. Cette somme fut accordée par un bon du roi, au bas d'un mémoire, où le ministre d'alors (1) expose à Sa Majesté, « que M. le duc de « Polignac a produit des états de recettes, qui « justifiaient que la perception du droit pendant « ladite année (1785) montait à plus de 40,000 liv. « et qu'il a prétendu qu'après la décision de plu-« sieurs contestations pendantes au parlement de »er"> Bordeaux, cette perception pourrait augmenter « considérablement ; en conséquence, qu'il avait « cru pouvoir espérer que son indemnité ne serait « pas moindre d'un million : mais, continue l'au-« teur du mémoire, je lui ai fait connaître que « comme il ne possédait ce droit qu'à titre d'en-« gagement, Votre Majesté avait jugé qu'il ne « devait être estimé qu'au denier vingt de son « produit, ce qui faisait 800,000 livres, et il s'est « soumis à cette décision. »
La fin du mémoire énonce que le payement sera pris sur le produit du château Trompette ; que M. de Polignac ne demande qu'une somme de 250,000 livres comptant, et l'intérêt dii surplus au denier 20, jusqu'au remboursement.
Ce mémoire, et le bon du roi qui le termine, se trouvent, sous la date du
8 janvier 1786, dans un registre de décisions de finances, déposé au
comité des pensions, On trouve en marge une note en ces termes : M. le
duc de Polignac ;
Voilà donc, Messieurs, 800,000 livres accordées en indemnité de la suppression d'un droit faisant partie d'un engagement dont la finance n'était que de 116,920 livres*
Votre comité des domaines a pensé que cette somme de 800,000 livres était dans le cas d'être répétée sous l'imputation de la finance légitime. Ce n'est pas un don que le roi a voulu faire à M. de Polignac, mais une dette qu'il a cru payer sur l'exposé de son ministre. Il n'était dû à M. de Polignac que le remboursement effectif de sa finance. C'est en la déguisant au roi, et en lui alléguant la perte d'un produit annuel de 40,000liv. que M. de Polignac a obtenu une somme près de huit fois plus considérable. Le roi a entendu payer ce qu'il devait, et on ne lui a fait payer au delà qu'en le trompant sur le montant de la créance. Rien n'est plus constant, en principe de justice et d'administration, que le droit de répéter ce qu'on a perdu par erreur ou sans le devoir. C'est absolument le cas dans lequel le Trésor public se trouve vis-à-vis de M. de Polignac.
D'après cela le comité propose le décret suivant :
projet de décret.
« L'Assemblée nationale, considérant que l'engagement du domaine de Fénétranges aux sieur et dame ci-devant duc et duchesse de Polignac, a été substitué à des décisions, en vertu desquelles ce domaine devait leur être concédé à titre presque entièrement gratuit, et qu'il résulte du registre particulier des décisions de finances, connu sous le nom de livre rouge, qu'il a été accordé une ordonnance au porteur, du montant de la finance dudit engagement, en sorte qu'aucune fi-nanc effective n'a réellement tourné au profit du Trésor public, a décrété et décrète :
« Que l'arrêt du conseil, du 2 juin 1782, portant commission à la chambre des comptes de Lorraine pour l'aliénation dudit domaine, ci-de-vant baronnie de Fénétranges, aux sieur et dame de Polignac, au prix de 1,200,000 livres, l'ordonnance au porteur du montant de cette finance, énoncée dans le livre rouge ; la quittance de ladite finance, passée par le garde du Trésor royal, le26.du même mois de juin ; l'arrêt de la chambre des comptes de Lorraine, du 13 du mois de juillet suivant, portant aliénation et délivrance dudit domaine, et tout ce qui a précédé et suivi, sont et demeurent nuls et révoqués ; en conséquence que ledit domaine et ses dépendances sans en rien excepter, sont et demeureront réunis au domaine national, pour, à compter du jour delà publication du présent décret, les biens et droits en dépendant être régis, perçus etad-ministrés, et les produits comptés par les agents et préposés de l'administration des domaines, et
les officiers des maîtrises, chacun pour ce qui le concerne, comme si ladite aliénation n'était pas intervenue.
Au surplus, l'Assemblée nationale décrète que la liquidation de l'indemnité du droit de buitain dépendant du fief de Puy-Paulin, à, !la somme de 800,000 livres, par la décision du 8 janvier 1786, est et demeure pareillement nulle et révoquée ; en conséquence que le contrôleur des restes se pourvoira contre M. de Polignac en répétition de ladite somme de 800,000 livres, ou de telle partie de ladite somme qui lui aurait été payée, sous l'imputatioo et compensation de la finance de l'engagement dudit droit dehuitain, suivant qu'elle sera justifiée. »
Plusieurs membresAux voixl
Personne ne demande la parole?.,.
(Quelques minutes se passent dans le silence).
, s'avançant précipitamment vers la tribune. (Applaudissements à gauche.) Messieurs, après les applaudissements que je viens de recevoir dans cette Assemblée, pour la première fois. (.Applaudissements), c'est avec la connaissance de la défaveur la plus insigne, que je prends la parole. Mais je m'en réfère aux propres paroles souvent répétées du rapporteur. Je jetterai un voile très religieux sur les faits consignés dans le Livre rouge, et qu'on nous a rapportés ; mais il me semble que si nous commençons à le feuilleter, nous devons le finir.
Plusieurs voix : Oui I oui 1
Je regarde, comme a fait le rapporteur, l'engagement du domaine de Fénétranges comme une libéralité, une générosité déplacée ; mais qui n'a pas reconnu, jusqu'au 1er de mai 1789, que les rois avaient le droit d'user de la libéralité de la muni-li cence ? (Murmures. )
Plusieurs voix : JamaisI
Je me suis servi jusqu'à présent du mot de générosité et de munificence, parce qu'il a été le plus familier au rapporteur ; mais si je considère l'engagement dont il est question, sous le rapport de vente, je vois que cette vente a été payée par un bon du roi. Or, n'avait-on pas le droit de faire des marchés et de payer avec des bons du roi. quoiqu'ils provinssent de la générosité et de la munificence du monarque? Si vous adoptez le projet de décret de votre comité, je demande si nous ne devons pas remonter au moment où les bons du roi ont commencé à être en usage et revenir sur tous les marchés q i ont été faits jusqu'à ce jour. Mais les rois n'ont-ils pas toujours eu le droit d'être libéraux? (Murmures.)
Plusieurs voix : Non ! non !
S'il est vrai qu'à titre de vente ils aient le droit d'engager leurs domaines... (Murmures.)
Plusieurs voix : Non ! non ! jamais 1
Ah I c'est
différent! En ce cas-là, s'ils n'avaient pas ce droit, il me parait extraordinaire que le comité soit allé prendre pour exemple une vente faite avec des bons du roi, qui jusqu'ici avaient été regardés comme monnaie courante. Je m'étonne qu'il ne vous ait pas demandé ce dont nous étions tous chargés, c'est-à-dire que le roi rentrât dans tous les domaines engagés à vil prix.
C'est à cet effet que vous avez particulièrement institué votre comité des domaines, pour revenir sur les marchés dans lesquels le roi avait été lésé sans le savoir. Ici je vois un domaine payé en bons du roi, que je regarde comme monnaie courante. Les rois ont toujours eu, et auront toujours, je l'espère, le droit de récompenser*..
Plusieurs membres : Aux voix 1
Je me Tésume. (Exclamations.VSous le titre de vente, je vois que le comté de Féuétranges a été vendu. Sous le titre de libéralité, je vois que le roi avait le droit de donner un non de 1,200,000 livres. Je ne vois pas comment on peut revendiquer ce domaine. — Le comité ne s'est pas encore acquitté de son emploi, depuis 21 mois. Il aurait dû chercher, dans le dédale des domaines, ceux qui ont été vendus sans que ce fût une libéralité. (Murmures.)
Un membre à droite : On commence par là.
Je dis que le choix qu'il a fait de son rapport est une injustice (Exclamations.)... C'en est une, vous ne pouvez en disconvenir.
Comme de chaque côté on crie à l'injustice, il ne reste plus qu à savoir de quel côté elle est.
Défaisons- >nous de tout esprit de prévention.....Voici mon amendement : premièrement, la question préalable. (Rires.) S'il arrivait qu'il ne réussît point, je demande que cette affaire soit ajournée. Je de* mande enfin que le comité des domaines se pénètre bien de l'esprit de la fondation.
Est-ce là votre amendement?
Qu'il n'intervertisse point l'ordre du jour. Car je vous assure qu'il a été fait une concession beaucoup plus scabreuse et que nous savons encoré beaucoup d'affaires qui mériteraient d'avoir la préférence sur celle-ci. Je demande la question préalable et je la motive par des moyens que j'ai déjà employés; c'est que, sous le rapport de vente, il n'y a rien qui n'ait été fait avec des bons du roi.
L'Assemblée, dans la sévérité de sa justice, va ordonner la restitution d'un don de 1,200,000 livres consigné dans le Livre rouge. Je demande en conséquence que tous les dons faits par le roi et constatés dans le Livre rouge, je veux parler de tout don occulte et caché à la nation, soient remis dans le Trésor public par ceux qui les ont reçus. (Applaudissements.)
Plusieurs membres : Aux voix !
, Une des plus grandes injus-
tices dans lesquelles le Corps législatif puisse tomber, est d'invoquer la sévérité des lois pour un temps antérieur à celui auquel elles ont été faites ; ainsi l'Assemblée serait beaucoup trop rigoureuse, si elle invoquait la sévérité des lois pour leur donner un effet rétroactif et les appliquer à un temps antérieur à son existence. Certes, même d'après les anciennes lois, les libéralités du monarque devaient avoir une mesure, et je ne m'oppose pas à ce qu'un domaine que vous croyez avoir été illégalement engagé soit réuni au domaine national; je m'abstiens de donner là-dessus mon avis ; mais je ne crois pas que vous puissiez adopter en même temps la mesure rigoureuse de faire poursuivre M. de Polignac pour une somme de 800,000 livres, qu'il a touchée comme une indemnité; ce payement était peut-être injuste; peut-être dans la rigueur du droit devrait-il être en partie restitué; mais il n'est pas de la dignité de la nation d'exercer une justice aussi sévère. (Murmures.)
Je dis même à l'Assemblée que l'une des raisons qui peut-être doivent l'en détourner est que M. et Mme Polignac sont dans ce moment absents, sans considération, sans existence ; ce n'est pas le moment d'être aussi sévère envers eux. S'ils jouissaient encore de la faveur qui les environnait autrefois, je serais le premier à monter à cette tribune pour les dénoncer; mais il serait aujourd'hui beaucoup trop sévère de les poursuivre pour 800,000 livres qu'ils tiennent de la libéralité du roi. (Murmures.) Libéralité qui leur a été faite dans un moment où,n'ayant qu'une fortune médiocre, ils occupaient une place que les mœurs de la cour rendaient infiniment dispendieuse; et j'observerai que ce serait le comble de l'injustice que d'appliquer à un temps des lois faites pour un autre..
. J'ajoute que votre décret envahirait toute la fortune de M. Polignac; et je ne crois pas que l'Assemblée veuille ruiner une famille quelconque. Je persiste donc à croire que si la rentrée de la nation dans la possession du domaine de Féné-tranges est une justice; que s'il est peut-être même dans l'esprit d'une justice rigoureuse qu'elle se fasse restituer les 800,000 livres, il n'est pas de la générosité de l'Assemblée de vouloir ruiner une famille avec tant d'acharnement. (Murmures.)
JedemandequeledomainedeFénétranges rentre dans la possassion de la nation; mais qu'il ne soit Sas ordonné au contrôleur des restes de poursuivre. Polignac pour une somme de 800,000 livres. Peut-être dans une assemblée où la défaveur que j'éprouve serait moins marquée, parviendrais-je à justifier cette libéralité elle-même.
Je demande la parole.
Plusieurs membres réclament en même temps la parole.
Je dois l'avoir pour une motion d'ordre.
Je vous la donne,
Monsieur le Président, je dois l'avoir le premier.
Mousieur, je suis ici l'homme de tous et non pas l'homme des passions particulières.
Nous avons actuellement à dis-
cuter l'affaire de Fénétranges; c'est sur cette affaire, sur le projet de décret seul qu'on doit proposer des amendements. Je demande qu'il ne soir délibéré sur aucune motion incidente, aucun amendement qui ne se rapporte directement à\la motion principale, ces motions incidentes paraissant exiger elles-mêmes des rapports très-étendus.
(L'Assemblée décrète qu'elle passe à l'ordre du jour.)
Monsieur le Président, j'avais la parole sur l'ordre du jour.
Attendez, Monsieur, un déni de justice avant de me montrer de la chaleur. On a passé à l'ordre du jour et vous avez la parole.
L'ordre du jour est le rapport du comité des domaines sur l'aliénation du domaine de Fénétranges, et les di-agressions accordées sur le degré de créance que l'on doit accorder au Livre rouge... (Murmures et interruptions.) Je ne sais pas pourquoi, lorsqu'on a entendu les préopinants avec la plus grande faveur, vous ne voulez pas maintenant entendre un membre de l'Assemblée nationale qui, j'ose le dire, n'a jamais pris la parole que pour l'intérêt public, que pour le renversement de tous les abus,
Je ne vous ai jamais parlé de moi, Messieurs... (Murmures prolongés.)
Il est cruel de vouloir empêcher un opinant de parler; je ne souffrirai de qui que ce soit que M. de Lameth soit interrompu.
Je crains que l'amendement de M. de Gustine, si vous l'adoptez, ne porte dans plusieurs maisons le chagrin et la désolation; je crains qu'il n'ait une telle extension, qu'il réduise une quantité de familles au désespoir. Mais, Messieurs, après les libelles, les diffamations plus ou moins circonstanciées, mais que j'ai toujours profondément méprisés, après un système ourdi depuis l'époque de la convocation des Etats généraux, contre moi et contre ma famille, je dois... (Murmures et interruptions).
Voix nombreuses : A l'ordre du jour !
J'entends fort bien les sourdes réclamations de l'ordre du jour; mais je déclare que si le nom de M. de Lameth est sur le Livre rouge, je le trouve parfaitement à l'ordre jour.
Je n'ai pas éludé d'en parler à l'Assemblée nationale et je suis charmé d'en trouver occasion. Je désire que toutes les personnes qui m'écoutent y mettent la même franchise. (Applaudissements.)
Oui, Messieurs, mon nom est sur le Livre rouge pour 60,000 livres ; cette gratification accordée à ma mère pouvait être regardée avec raison comme une indemnité qui lui était due à cause des différentes réductions qu'on avait faites à ses pensions dans différentes circonstances, et notamment sous M. l'abbé Terray.
Je n'observerai pas à l'Assemblée nationale que ma mère, fille et sœur d'officiers qui avaient été assez heureux pour rendre à la patrie des servi-
ces importants et décisifs, veuve avec une nombreuse famille et peu de fortune, avait le- droit de ne pas être recherchée, déchirée par les ennemis de la chose publique, qui sont devenus les siens et les nôtres. Malgré les distinctions insidieuses que l'on voudrait faire, on ne parviendra jamais à jeter la désunion et l'inimitié dans une famille dont l'amitié et l'union ont toujours fait le bonheur. Ainsi, je m'associerai à ma mère et je la défendrai envers et contre tous.
Je dirai qu'il vient d'être fait une motion par M. de Gustine ; elle pouvait m'avoir pour objet, si ce n'est dans son intention, au moins dans les applaudissements qu'elle a reçus; Il y a longtemps que je cherchais ardemment l'occasion de pouvoir déclarer ma façon de penser à l'Assemblée nationale. Le jour même où cette gratification, accordée à ma mère, fut connue du public, elle ouvrit la carrière aux libelles et aux diffamations contre nous; et je formai le projet de faire bénéficier l'Etat, de rendre cette somme à la nation, de la manière qu'il me serait possible, sur mon propre bien, quoiqu'il ne soit pas considérable ; je la lui rendrai, soit que l'Assemblée décrète l'amendement que je n'ose appuyer, mais contre lequel je ne m'élèverai pas, soit qu'elle lè repousse.
Voilà, Messieurs, ce que je voulais dire à l'Assemblée nationale ; j'en prends l'engagement, je le rendrai public ; et les quittances qui me l'auront fait remplir seront des preuves authentiques. (Applaudissements réitérés de tous les côtés de la salle.)
fait un résumé de la délibération.
J'insiste sur mon amendement qui consiste à ne pas ordonner de poursuites contre M. de Polignac.
(L'amendement de M. de Cazaiès est rejeté par la question préalable. )
Vous avez entendu que la crédulité du roi a été surprise pour un don de 800,000 livres ; vous avez entendu qu'un ex-ministre prévaricateur, M. de Galonné, a été le principal ouvrier de cet œuvre d'iniquité ; je demande qu'il soit poursuivi comme solidaire du payement. (Applaudissements.)
, rapporteur. Le comité adopte l'amendement de M. l'abbé Grégoire, et voici sés motifs :
Lorsque M. de Polignac demandait à être indemnisé de la perte qu'il prétendait avoir faite, quél était le devoir du ministre des finances?Son devoir était de remettre cette demande sous les yeux du roi, de s'informer à quel prix elle devait s'élever en effet. Point du tout ; au lieu d'instruire le roi de tout ce qu'il était important qu'il apprltdans cette affaire, il le cache avec adresse ;il parle d'un droit de 48,000 livres, d'un droit à une indemnité d'un million, pour laquelle il prétend avoir fait accepter 800,000 livres.
Le ministre a donc nécessairement participé à l'infidélité commise envers le roi.
Je propose de dénoncer le ministre devant un tribunal.
L'Assemblée est assez instruite pour rendre MM. de Galonné et de Polignac responsables ; mais elle ne l'est pas assez pour stipu-
ler la somme. Je demande l'ajournement et le renvoi de l'amendement de M. l'abbé Grégoire à un nouvel examen du comité.
Je crois que la responsabilité de M. de Galonné est un point de droit acquis ; mais, malgré cela, je ne crois pas nécessaire de l'énoncer dans le décret. Il suffirait de charger le contrôleur des restes de poursuivre M. de Galonné et M. de Polignac en restitution de la somme due.
Il faut non un jugement, mais un ordre au contrôleur des restes.
(L'Assemblée décrète l'amendement de M. l'abbé Grégoire.)
Le projet de décret est adopté comme suit :
« L'Assemblée nationale, considérant que l'engagement du domaine de Fénétranges aux sieur et dame ci-devant duc et duchesse de Polignac, a été substitué à des décisions en vertu desquelles ce domaine devait leur être concédé à titre presque entièrement gratuit, et qu'il résulte du registre particulier des décisions de finance, connu sous le nom de Livre rouge, qu'il a été accordé aux sieur et dame de Polignac une ordonnance au porteur du montant de la finance dudit engagement, laquelle est comprise dans le compte de l'arriéré de 1782, en sorte qu'aucune finance effective n'a réellement tourné au profit du Trésor public, décrète:
« Que l'arrêt du conseil du 2 juin 1782, portant commission à la chambre des comptes de Lorraine pour l'aliénation dudit domaine, ci-devant baronnie de Fénétranges, aux sieur et dame de Polignac, au prix de 1,200,000 livres, l'ordonnance au porteur du montant de cette finance, énoncée dans le Livre rouge; la quittance de ladite finance, passée par le garde du Trésor royal le 26 du même mois de juin ; l'arrêt de la chambre des comptes de Lorraine, du 13 du mois de juillet suivant, portant aliénation et délivrance dudit domaine,, et tout ce qui a précédé et suivi, sont et demeurent nuls et révoqués ; en conséquence, que ledit domaine et ses dépendances, sans en rien excepter, sont et demeureront réunis au domaine national, pour, à compter du jour de la publication du présent décret, les biens et droits en dépendant être régis, perçus, administrés, et ses produits comptés par les agents et préposés de rad-ministration des domaines et les officiers des maîtrises, chacun pour ce qui le concerne, comme si ladite aliénation n'était pas intervenue*
« Au surplus, l'Assemblée nationale décrète que la liquidation de l'indemnité du droit de huitain, dépendant du fief de Puy-Paulin, à la somme de 800,000 livres, par la décision du 8 janvier 1786, est et demeure pareillement nulle et révoquée ; en conséquence, que l'agent du Trésor public se pourvoira tant contre M. de Polignac que contre le sieur de Galonné, ci-devant contrôleur général des finances, en répétition solidaire de ladite somme de 800,000 livres, 60us l'imputation et compensation de la finance de l'engagement dudit droit de huitain, suivant qu'elle sera justifiée. »
Une députation de la municipalité de Paris est introduitela barre.
, officier municipal, présente cette députation et s'exprime ainsi :
Messieurs, la municipalité de Paris ne pou-
vait voir sans douleur l'abandon que faisait d'un roi ehéri une partie de sa famille : elle a fait des démarches qu'elle a vu avec chagrin n'avoir pas tout le succès qu'elle en pouvait espérer. Dans ces circonstances délicates, 32 sections de la commune ont cru devoir manifester leur vœu, s'il était possible de le renforcer de l'opinion publique.
« Messieurs, le temps presse, les circonstances sont urgentes ; le conseil général de la commune m'a chargé de vous présenter les commissaires des 32 sections qui vont avoir l'honneur de vous lire leur adresse.
« D. m'est glorieux, Messieurs, de pouvoir, en cet instant remplir cette honorable fonction; et, si vous ne voyez pas à la tête des sections le citoyen vertueux que deux fois le peuple de Paris s'est choisi pour son chef, et qu'une maladie, suite de ses travaux civiques, prive de cet honneur; vous y voyez du moins un citoyen admirateur de vos décrets, un prêtre qui se fait gloire d'être soumis aux lois que votre sagesse a dictées. » (Appaudissements.)
, orateur de la députation. « Messieurs, tandis que vous travaillez avec courage à élever l'édifice imposant de la liberté publique, chaque citoyen, à son poste, lit son devoir dans vos décrets et vous seconde par ses efforts. La France est couverte d'hommes ou armés pour défendre la Constitution, ou occupés à la bénir, et, jusqu'à présent nous avons vu, sans inquiétude, ceux qui devaient gémir du nouvel ordre de choses s exiler d\in séjour d'où l'esclavage a disparu : mais, aujourd'hui qu'une portion de la famille royale manifeste aussi le dessein de quitter la France, la nouvelle de ce départ alarme la capitale, et la commune de Paris nous a chargés, Messieurs, de déposer dans votre sein ses vives inquiétudes, exprimées par la majorité des sections.
« Peut-être il vous paraîtra que Louis XVI, comme chef de la dynastie régnante, a droit de fixer près de lui tous les membres qui la composent; qu'il a sur eux une inspection naturelle et particulière; qu'ils doivent lui être soumis comme a leur tuteur, comme à leur père, comme à celui qui répond d'eux à la nation, dont la munificence leur assigne auprès de sa personne un traitement honorable. Le roi seul est dépositaire du pouvoir exécutif suprême, mais l'honneur en rejaillit sur tout ce qui l'environne; mais surtout son sang partage avec lui les fruits de ses fonctions augustes, tout son sang forme avec lui une maison inséparable, un tout indivisible, et c'est au heu de sa demeure habituelle que sa famille paraît devoir résider.
« On dit, Messieurs, qu'au mépris de ces prin-.' cipes, Mesdames les tantes du roi, s'autorisant de vos décrets, se disposent à s'éloigner du royaume. Nous ne recherchons point si ce voyage inconsidéré serait encore l'effet de quelques insinuations perfides.
« Nous ne voulons pas croire que les tantes du roi aient jamais eu le projet d'aller encourager ou seconder par leur présence ces fugitifs qui osent menacer la patrie, Comme des enfants faibles et malheureusement nés, lèvent la main contre leur mère. (Apptaudlssemen ts.)
« Nous ne croyons pas qu'elles veuillent, comme ces citoyens ingrats, disperser hors de la patrie des richesses qui ne leur ont pas été données pour cet usage et nourrir les étrangers de là substance nationale. Nous éloignons de nous la pensée qu'un
sexe si timide, et fait pour conseiller la paix, soit chargé de négocier des traités de guerre. Nous nous refusons à ridée que le départ de Mesdames soit une espèce d'essai adroitement suggéré pour exciter le peuple à quelque violence, afin d'acquérir le droit de s'en plaindre. (Applaudissements.)
« Il nous suffit d'apprendre que ce départ afflige un roi patriote, dont on veut lasser le courage par des chagrins domestiques, pour vous demander une loi qui prévienne un pareil malheur ; et déjà, Messieurs, cette loi serait faite si l'événement qui la nécessite ne vous eût pas paru impossible. Déjà l'un dé vos membres a appelé votre attention, sur le mode particulier d'existeuce propre à la dynastie régnante ; il vous a invités à fixer les d evoirs de cette famille dont vous n'avez encore déterminé que les prérogatives. Vous devez à la nation sur ce point une discussion approfondie, qui se lie si intimement aux bases de la Constitution ; et par un ajournement déjà prononcé cette loi nous est promise.
« Vous nous la devez aujourd hui que le salut du peuple en dépend. L'exemple qu'on veut donner trouvera des imitateurs; et nous verrions peut-être un roi généreux, qui lutte depuis si longtemps, qui se livre avec tant de zèle aux nobles travaux que sa vertu lui impose, perdre successivement chaque jour un des objets de sa tendresse, s'effrayer de sa solitude profonde, verser dans son palais désert des pleurs que sa bonté nous épargne; nous redemander, dans un abandon douloureux, tous ceux qui, dans l'ordre de la nature, lui doivent le tribut de leur affection. (Applaudissements.)
« Pesez, Messieurs, dans votre sagesse les motifs de nos alarmes; calmez nos inquiétudes naturelles et légitimes; vous en avez le droit, vous en avez le pouvoir; car vos lois justes.et bienfaisantes ne trouvent que des cœurs prêts à s'y soumettre, et des bras prêts à les exécuter. (Applaudissements à gauche; murmures à droite.)
« Dignes organes de la France, représentants d'une nation qui a recouvré sa souveraineté, vous, qui tant de fois et de la même main qui traça les règles éternelles de la justice, avez repoussé les attaques de la Constitution, détruisez leur dernier espoir.
« Voyez d'un côté des hommes errants, qui vont de cour en cour nous susciter desénnemis, qui cherchent à éveiller contre nous la haine des rois, que notre liberté fait trembler; qui, pour échapper au mépris dont toutes les nations les accueillent, voudraient s'environner d'objets honorés ; qui nous menacent, dit-on, de ne rentrer dans nos murs qu'à la lueur des flambeaux de la guerre civile. Laisserez-vous des personnes que nous révérons s'associer aux dangers de leur vie errante? Leur livrerez-vous le seul dépôt qu'ils regrettent et le seul gage que soit capable de respecter leur fureur ?
« D'un autre côté, voyez ce roi digne de servir de modèle à tous les rois de la terre, qui, d'une main puissante, a brisé les fers de l'Ameri-que esclave, qui a rendu à tous les peuples la navigation libre et paisible de l'océan; ce roi, l'ami de vos décrets, ne croit pas qu'il lui Soit permis de retenir près de lui sa famille. Souf-irirez-vous que son cœur ait des craintes à concevoir, dans l'attente de votre loi ? Souffrirez-vous qu'on se dérobe à la tendresse qui lui est due ? Souffrirez-vous qu'on le punisse de nous rendre heureux?
« Tels sont, Messieurs, les sentiments dont la
majorité des sections nous a rendus auprès de vous les interprètes, et que vous prendrez sûrement en considération. Nos ennemis veillent pour tout perdre; veillons pour tout sauver. Dans l'état actuel des choses, on a droit de tout craindre; et, dans une Constitution naissante, cette crainte est la sauvegarde de la liberté. (Applaudissements répétés.) »
répond : «Messieurs, vous venez de proposer au Corps constituant une des plus grandes questions dont il ait à s'occuper.
«. L'indépendance de tout autre pouvoir que de celui des lois est un droit de chaque citoyen, parce que cette indépendance constitue la liberté même d'une nation. Quiconque a le droit de résister doit connaître un fait : le devoir de l'obéissance ; et,comme chaque individu est obligé de consacrer à l'état social sa liberté, il faut qu'il puisse empêcher qu'aucun pouvoir,étranger a la volonté publique, n'étende ce sacrifice.
« Ce principe est notre sauvegarde à tous ; mais il y a des exceptions aux règles les plus générales.
« La famille royale est indivisible du Trône et ce n'est point là que la royauté peut trouver ni barrière, ni contrepoids.
« Même en voulant défendre la liberté, les membres de cette famille pourraient ne cacher qu'une ambition coupable, et l'on serait bien près de la tyrannie si la liberté avait besoin de chefs de parti.
« Les membres de la même famille, s'ils osaient être rebelles aux lois, seront peut-être contenus sans trouble parleur chef, qui, en leur transmettant de grandes espérances, a le droit de leur imposer de grands devoirs.
« Tous ces motifs, l'Assemblée nationale les pèsera dans sa sagesse ; mais ne croyez pas, quelle que soit la conduite de ceux qui l'entourent, que le monarque qui répare les fautes puisse être isolé. Un grand peuple est devenu sa famille; son nom, joint à celui de la nation et de la loi, est prononcé dans tous nos serments ; et un ordre durable assurera tout à la fois son bonheur et sa puissance.
« L'Assemblée vous invite à assister à sa séance ». (.Applaudissements.)
(L'Assemblée ordonne le renvoi de la pétition au comité de Constitution pour en rendre compte incessament ; elle en décrète également l'impression, ainsi que de la réponse de M. le Président.)
(La séance est levée à neuf heures et demie.)
présidence de m. duport.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier au soir, qui est adopté.
l'aîné cède le fauteuil à M. Dupert.
, au nom du comité des finances. Messieurs, les nommés Morel et Prudhomme ont été transférés des prisons de Besançon dans celles de Paris ; une partie des frais de ce voyage a été avancée par les brigadiers et cavaliers des maréchaussées de Montereau et Fontainebleau; l'autre partie a été payée par les capturés mêmes. Il u'est pas sans danger et sans injustice de souffrir que des prisonniers payent ainsi leur dépense ; une loi générale pour déterminer le mode de payement de frais de conduite des prisonniers est nécessaire.
Je propose le renvoi de cette question générale au comité de Constitution et jrai l'honneur de vous présenter pour le cas particulier qui nous occupe actuellement le projet de décret suivant:
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités des finances et des recherches, sur le mémoire des brigadiers et des cavaliers de maréchaussée ès résidences de Montereau et de Fontainebleau. à raison d'une partie des frais de conduite des nommés Morel, et Prudhommej partis des prisons de Besançon pour être amenés a Paris,
« Décrète qu'il sera payé auxdits brigadiers et cavaliers, par le Trésor public, la somme de 316 livres portée audit mémoire ; et,à l'égard de l'autre partie desdits frais, l'Assemblée renvoie l'objet au comité de Constitution, pour être fait une loi générale sur les règles et le mode de payement des frais de conduite des prisonniers. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité féodal. Messieurs, votre comité féodal m'a chargé de vous proposer plusieurs dispositions additionnelles au décret que vous avez rendu sur les droits féodaux.
A l'article 15, après ces mots : « en forme olographe, » il s'agirait d'ajouter l'exception suivante :
« Sans préjudice, jusqu'à présent, de l'exécution du statut Delpninal, ou autre loi semblable; concernant les formalités des donations entre vifs, pour lesquelles le juge de paix sera subrogé à l'officier seigneurial. »
Nous vous proposons ensuite d'intercaler entre les articles 18 et 19 un nouvel article ainsi conçu :
« Sont pareillement valides, à compter de leurs dates respectives, toutes les transcriptions de contrats ou autres actes qui, dans les ci-devant pays de nantissement, ont pu être faites aux greffes des tribunaux de districts, en conformité de l'article 3 du décret des 17 et 19 septembre 1790, antérieurement à la publication officielle de cette loi. »
Enfin, après les articles relatifs aux droits de blairie et de messerie, nous vous demandons d'introduire la disposition suivante :
« Les suppressions prononcées par les deux articles précédents auront leur effet à compter de l'époque déterminée par l'article 11 ci-dessus »
(Ces additions sont décrétées.)
Messieurs, voici une lettre des administrateurs du directoire du district de Nîmes :
« Vainement le fanatisme a voulu, dans le
district de Nîmes, opposer des obstacles à la veoté des biens nationaux. Animés par votre exemple, les succès que nous avons obtenus nous servent d'encouragement et sont notre récompense.
« Dans l'espace de 20 jours, nous avons vendu soixante domaines qui, évalués sur les baux à 1,118,927 1.16 s. 8 d, ont été vendus 1,776,455 livres.
« Nous vous prions de mettre ce résultat sous les yeux de 1 Assemblée nationale. Le grand nombre de soumissions que nous avons reçues dans le courant du mois dernier nous met à portée de continuer nos opérations dans ce genre. »
Nos dernières lettres aeNîmes nous apprennent que le calme règne dans cette partie, malgré tous les mouvements qu'on se donne pour y exciter le fanatisme. Les motifs de sagesse, qui ont déterminé l'Assemblée à différer le rapport de la malheureuse affaire de Nîmes, sont malicieusement interprétés par les ennemis du bien public. Nous vous prions de vouloir bien prendre en considération les inquiétudes qui régnent dans ce pays et d'ordonner que vos comités des rapports et des recherches vous fassent le plus incessamment possible le rapport de cette malheureuse affaire.
(L'Assemblée décrète que ses comités des rapports et des recherches lui feront samedi prochain le rapport de l'affaire de Nîmes.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret du comité d'imposition sur les droits d'entrée dans les villes (i),
Il nous a suffi de lire le projet du comité pour en sentir tous les inconvénients. Je demande donc qu'il soit rejeté par la question préalable.
(de Saint-Jean-d'Angèly). Avant de rejeter le projet du comité, il faut le discuter, afin de faire connaître à la France entière que la réflexion et Ja prudence président à nos délibérations,et que c'est par des motifs puissants qu'elle a rejeté ces droits.
Messieurs, votre comité marche en tremblant entre deux écueils également dangereux, celui des impôts indirectes dont la perception semble alarmer la liberté toujours inquiète dans son berceau, et celui des contributions foncières qui menace les propriétaires territoriaux d'une surcharge redoutable.
Votre comité vous propose uu droit à l'entrée des villes ; mais il est injuste au fond puisqu'il porte sur lesdenrées déjà taxées par la contribution foncière : il est injuste dans la forme puisqu'il ne porte que sur 529 villes et qu'il exempte toutes les autres parties du royaume. Il faudrait au moins le répartir avec égalité.
Je me résume et je propose sur cet objet les questions suivantes :
1° Les droits d'entrée des villes seront-ils perçus dans les 529 villes seulement, proposées par le Comité ou bien perçus sur tous les villes et bourgs du royaume ?
2° Tous les objets, énoncés dans le tarif comme exempts des droits
d'entrées,, y seront-ils soumis en exceptant seulement le blé, le
seigle, l'orge, la farine et le pain ?
4° Les droits d'entrée des vins et boissons seront-ils déclarés comme impôts indirects, et comme tels, perçus sur les consommateurs qui s'en approvisionnent sans les avoir recueillis eux-mêmes, et sur les vendeurs de la seconde main qui achètent pour revendre en gros et en détail?
5° Sera-t-il fait un règlement de police de vente pour distinguer, dans la manière de vendre, le revendeur de la seconde main, d'avec le propriétaire qui aura recueilli?
6° Le tarifs des taxes des entrées des villes sera-t-il enfin renvoyé au comité d'imposition, pour y fixer les prix entre toutes les classes d'une manière moins inégale et moins disproportionnée que celui proposé à présent?/
Vous avez besoin d'impôts ; vous en avez supprimé pour 140 millions et vous n'avez pour remplir ce vide que l'impôt du timbre et celui de l'enregistrement qui n'est qu'une augmentation du droit de contrôle; mais je regarde comme dangereux les droits d'entrée des villes. Il faudrait d'abord construire des enceintes dans les villes qui n'en ont pas et je ne vois là qu'une dépense onéreuse et inutile pour l'Etat. Il faudrait de plus une armée de commis pour faire la perception. Un autre inconvénient encore qui la rendrait impossible, c'est l'insurrection des peuples, sous le prétexte des exactions qui peuvent se commettre.
Après vous avoir démontré les inconvénients du projet de votre comité, voici ce que je vous propose pour le remplacer : c'est d'asseoir un droit sur les boissons, les denrées et la vente du vin. Cette imposition était connue dans l'ancienne province du Languedoc sous le nom d'équivalent y la perception en était affermée. Le fermier percevait ce droit par les abonnements qu'il faisait avec les fournisseurs, les aubergistes, les traiteurs, etc. S'il voulait en faire la régie dans quelques villes, il établissait un commis qui pesait les denrées et percevait le droit.
En adoptant le projet dont je viens de vous parler, j'y ai fait quelques changements ; mais comme les articles de détail pourraient vous ennuyer, je me borne quant à présent à demander la question préalable sur le projet du comité et l'adoption de l'impôt que je vous propose sur les boissons, les denrées et la vente du vin.
(1). Messieurs, il vous a suffi de lire le rapport de votre comité d'imposition pour apercevoir les inconvénients sans nombre et les dangers multiples des droits d'entrée des villes.
Les vices de cet impôt sont formellement reconnus par le comité lui-même
presque à chaque page du rapport. Les difficultés desrépartitions, la
complication des moyens de perception, les frais de recettes, l'embarras
du classement des villes, l'inégalité de l'impôt entre elles y sont
clairement énoncés. Le. comité ne vous dissimule pas combien il a été
embarrassé pour
On se demande avec surprise comment des hommes éclairés, dont les intentions pures sont bien connues, après avoir analysé avec tant de sagacité les droits d'entrée, après s'être convaincus des vices de cet impôt, ont pu le proposer à une nation libre comme une des ressources de l'Etat?
Dans toute la suite du rapport on rencontre des principes excellents dont on a tiré les plus étranges conséquences, des réflexions très lumineuses et des résultats qui leur sont .opposés ; on y trouve le contraste frappant de la raison et de la justice appliqué à la théorie des impôts et de la. plus choquante inégalité de répartition entre les citoyens du même empire.
En proposant cet impôt, le comité paraît avoir eu l'intention de ménager les terreurs des propriétaires, qui craignent que les biens-fonds ne soient trop chargés, et cependant les entrées des villes tendent directement à diminuer les consommations, conséquemment à réduire les produits de l'agriculture. Il a voulu, sans doute, aussi composer avec les préjugés des officiers municipaux des villes qui tremblent de perdre leurs octrois et leurs revenus ; et cependant aucun impôt ne peut tarir plus sûrement toutes les sources du revenu et delà richessedes villes, puisque, par l'augmentation des denrées et de la main-d'œuvre, il ne peut manquer'de détruire en peu de temps leur industrie et leurs manufactures.
Je citerai un seul passage qui décèle l'opinion formelle du comité lui-même sur les droits d'entrée. Je pense qu'il suffira seul pour fixer votre jugement sur cette forme d'impositions :
«Votre comité, dit le rapporteur, doit ler-« miner aujourd'hui son rapport, en vous obser-« vant qu'il n'a pas dépendu de lui de faire « que les taxes à l'entrée des villes fussent une « bonne imposition, et qu'il ne dépendît de lui « ni de vous d'empêcher qu'à l'époque actuelle « l'opinion publique ne décide l'établissement « ou plutôt la conservation de ces espèces de « taxes que l'on croit propre à diminuer la « contribution foncière, quoiqu'elles en soient « une véritable et nuisible augmentation. »
Après la lecture de ce passage et du rapport entier, il n'y a pas un de nous qui n'ait dû conclure que le comité désirait sincèrement, et que nous devions tous souhaiter qu'un impôt, qu'il vous déclare lui-même être très mauvais, ne fût pas conservé; mais comme il pourrait encore rester quelques doutes sur la nécessité de le supprimer, je vous prie de me permettre un petit nombre de réflexions qui, j'ose l'espérer, vous détermineront à le proscrire; je vous offrirai ensuite les moyens d'y suppléer.
Le reproche le plus grave à faire aux droits d'entrée des villes est que cet impôt est inégal,
arbitraire, sans régulateur, sans base; conséquemment injuste et inconstitutionnel. En effet, Messieurs, il ne sera supporté que par la moindre partie des habitants du royaume, par 4 millions 500,000 individus sur 25 millions. La répartition entre eux ne sera fondée sur aucune règle, elle se fera sans égard aux facultés très disproportionnées des habitants de chaque ville, d'après la présomption très douteuse de la richesse ou de la population des villes. Ces bases, malgré leur incertitude, serviront pour' fixer le tarif du vin, par exemple : à Paris, à 25 1. 4 s.; dans les villes de la seconde classe, à 16 1. 16 s.; dans celles de la troisième classe, à 14 livres, et ainsi de suite; il en sera de même de tous les autres articles. Ces bases serviront encore à déterminer que, le'droit sera perçu à Paris dans la proportion de 18 livres par tête pour le Trésor public, dans les villes de la seconde classe à raison de 12 livres, et, dans une proportion décroissante, à 10, 8, 6, 4, 2 1. et 1 1. pour les villes des classes inférieures. On cherche en vain à découvrir pour quelle raison': 1° les villes doivent payer un impôt particulier au Trésor national : 2° pourquoi cet impôt est fixé à 18 livres par individu dans les villes de la lro classe, et seulement à 20 eous dans celle de la huitième; 3° pourquoi les denrées sont inégalement tarifées dans les différentes villes; pourquoi, par exemple, le muidde vin doit 25 1. 4 s. dans les villes de la lre classe; 16 V. 16 s. dans celles de la deuxième, et seulement 2 livrés dans celle de la huitième? Il est impossible de se rendre compté des motifs qui ont déterminé ces mesures et ces proportions étrangères. Tant d'arbitraire et de semblables inégalités ne suffisent-elles pas pour faire rejeter cet impôt, lors même qu'il serait exempt de toute autre imperfection? Mais, Messieurs, il y a bien d'autres inconvénients; l'énumération rapide que j'en ferai va vous en convaincre.
Vous avez détruit les droits sur les cuirs, sur les fers, sur les huiles, les péages, les aides, la gabelle et le tabac. Eh bien, Messieurs, tous ces impôts étaient moins funestes à la prospérité du royaume, ils réunissaient moins de vices que les entrées des villes. Les droits d'entrée frappent sur les besoins journaliers beaucoup plus que sur les facultés ; ils provoquent la contrebande; ils nécessitent des perquisitions aux portes de toutes les villes, et quelquefois des visites domiciliaires; ils soumettent un homme libre à l'inspection humiliante d'un agent du fisc; ils exigent un Gode pénal particulier qui doit être nécessairement rigoureux. La perception en est très coûteuse et elle enlève à l'agriculture et à l'industrie une multitude d'hommes qui y seraient plus utilement employés; voilà ce que les droits d'entrée ont de commun avec les impôts que vous avez détruits. Mais voici en quoi ils sont plus défectueux et plus funestes que la gabelle même. Les droits d'entrée exposent les habitants des villes à faire usage de boissons mixtionnées et empoisonnées que la cupidité prépare pour augmenter ses profits et éluder l'impôt. Ils sont nuisibles à l'agriculture en diminuant la consommation des villes. Certainement, Messieurs, si le droit sur les vins n'était pas de 4 à 5 sous par bouteille aux portes de Paris, une multitude d'ouvriers et d'artisans, qui sont forcés de s'en priver plusieurs jours de la semaine, éti feraient un bien plus fréquent usage, et la consommation de Paris serait d'un quart ou d'un tiers plus forte qu'elle ne l'est au-, jourd'hui. Les pays de vignobles des environs qui, à cause de l'élévation du droit, nepeijyent; y
envoyer vendre leurs vins, dont le prix est souvent très inférieur ait droit, y auraient tin très grand débouché si le droit était supprimé. Il en serait de même de toUtes lës autres detirées.
Les entrées ne feotit pas moins préjudiciables à la prospérité dés manufactures qui existent et à l'établissement dë celles qui nous manquent; car, en augmentant le prix des denrées, elles font hausser les (salaires et la main-d'œuVre. Et par exemple si le taux du droit est à Paris de 18 livres par tête pour le Trésor public et delà même somme de 18 liVrës poUr la laie municipale, c'est-à-dire de 36 livres par iidiVldu; s! Cet impôt cumulé porte les salaires à Paris à 10 OU 15 0/0 au-dessus des autres villes, toutes les étoffes et marchandises qui y seront fabriquées, dont le prix est en majeure partie composé de salaires, y seront de 10 à 15 0/0 plùs chères que partout ailleurs. Le mêmë raisonnement peut s'appliquer à toutes les villes, dahsla proportion du taux auquel elles seront tarifées. Vous avez voulu accorder une prbtéctiott spéciale aux manufactures du royaume én établissant des droits très élevés sur les produits des fabriques étrangères; mais, Messieul-S, Vous n*âurez rien fait pour elles et cet encouragement sera nul si vôué adoptez le projet des diiôils d'entréé dans les villes; ces droits sont infconnîis dans tous ïes pays manufacturiers de l'Eurbpe; vous vous exposerez donc à rendre les produits de nos manufactures les plus chers de l'Europe, et vous aurez la douleur dé voir que hôs marchandises seront dans l'impuissance de rivaliser avec celles des fabriques étrangères, tant au dedans qu'au dehors du royaume. L'enteouràgement qui résultera de l'établissement des droits aux frontières peut être éludé par la contrebande, il ne dépend pas de vous dë l'empêcher ; mais celui que Vous pouvez, que vous devez accorder aux fabriqués par la suppression des droits d'entrée dans l'intérieur, suppression qui doit amener la diminution des salaires et le bas prix dë la main-d'œuvre est Entièrement dans vos mains. Si vous ConserVèz les droits d'entrée, nos manufactures resteront dans l'état de longueur qui les fait gémir depuis .si longtemps; èi vous lés supprimez, elles reprendront une nou velle vie et ne redouteront plus la concurrence étrangère.
Il ne Vous échappera certainement pas non jfltis, Messieurs, due 'la c'ôhservàtîoh dès tfrôits d'entrée vous conduira à rétablir œè barrières intérieures, dont la tramée entière aVait demandé l'anéantissement et dont ta destruction avait été reçue àvêc tant de satisfaction. Ces nouvelles barrières entraveront la circulation et gêneront le Commerce, plus ehcoreque lès&ncïèrhfcés, parce qti'eïlès seront plus multipliées; ellëS'ôccasiônneront dés embarras infinis dans lës villes où les boissons sont entreposées, comme à Bordeaux, à La Rochellê, à Nantes, à Auxërre et ailleurs. De quels moyens së servirâ-t-On pour distinguer ttélles qui seront consommées dans chaque vilie, dë celles qui en seront exportées?Les mêmes embarras auront lieu pour les sucres, les ëpices et généralement pour tous les articles imposés. Combien de gênes et de formalités ne faUdrà-t-^ii pas employer pour prévenir la fraude1
Ainsi, Messieurs, noh Seulement les droits d'entrée seraient tne violation de la Constitution et un attentat continuel à la liberté des citoyens, mais ils tariraient à la fois toutes les sources de la prospérité publique; ils seraient une calamité pour 'l'agriculture, les manufactures ët le commerce. Non, Messieurs, voUs ne laisserez pas votre
ouvrage imparfait. Vous venez de supprimer l'impôt du tabac; celui des droits d'entrée est bien plUs onéreux à la UatioU. C'est ie seul qui reste des anciens droits de la ferme générale ; en le supprimant, vous délivrerez pour jamais le royaume de ceux des agents de la fiscalité qui en ont été le plus terrible fléau.
L'abolition des droits d'entrée est d'autant plus juste qu'il vous a été proposé par le comité un projet de licences ou patentes qui frapperont égâ-lement sur les consommations. Les licences ont bien aussi quelques inconvénients, mais ils ne sont nullement comparables aux droits d'entrée des villes. Si vous décrétez en même temps l'uh et l'autre impôt, ils seront accablants pour les villes, et. comme ils sont de même espèce, ils Së nuiront dans leurs produits.
On ne manquera pas de dire que la suppression des entrées des villes fera supporter aux campagnes un nouvel impôt dont cette taxe particulière aux villes les aurait affranchies ; votre comité, Messieurs, a répondu à cette objection, lorsqu'il vous a fait observer que les droits d'entrée frapperont réellement sur les habitants dés villes; alors je demanderai de nouveau s'il est juste, s'il est constitutionnel, que les villes soient chargées d'un impôt particulier envers le Trésor national. Uneparéille proposition Vous paraîtra, comme à moi, absurde et révoltante.
Ce système était tolérable autrefois, parce que les villes étaient presque toutes exemptes de la taille ou de quelque autre impôt dont les campagnes étaient grevées, parce que plusieurs d'entre elles jouissaient de grands privilèges et vivaient des abus, des erreurs et des prodigalités du ministère ; mais il n'en sera pas ainsi à l'avetiir, le temps des abus et des iniquités est passé, les privilèges sont détruits, les villes supporteront l'impôt foncier dans la même proportion que les campagnes, et observez, Messieurs, que la nature de tous les autres impôts est telle qù4iîs Seront presque Uniquement à la Chargë des villes, et, par exemple, 1 impôt mobilier pèsera bien pius sut* elles que sur les campagnes. CaHes revenus étant calculés dàns la proportion des locations, et le prix des locations dans les villes étant triple et quadruple de êelui des campagnes, le revenu présumé des habitants des villes les mettra, à.facultés égaies, dans lè cas de supporter un impôt triple et quadruple de celui des habitants des campagnes^ Le timbre et le droit d'enregistrement seront égâle-mentsupportës dansune proportion bienplus forte par les habitants des villes que par ceux des campagnes, car les transactions de ces derniers Sont rarement écrites.
Il en sera de mêmë dés licences doht le prix, calculé en raison des locations, sera bien plus érevë dâns lës Villes.
On objectera encore quë la Ville dedans deviendra trop considérable et trop peuplée, et que Sa grandeur .nuira à la prospérité des campagnes; mais de lôngtemps Paris n'àUra réparé les pertes immenses qu'elle a faites. Nous Voyons aussi pâr l'exemple de l'Angleterre combien cette terreur est imaginaire ; il n'existe de droits d'entrée ni à Londres, ni dâns aucune autre ville de ce royaume. Si Londres eSt riche, il y a eù Angleterre un grand nombrë d'autres Villes qui le Sont aussi; ies campagnes partagent cette prospérité, leurs habitants sont dans une grande aisânce, et la culture des terres y est portée à Un bien plus haut degré qu'en France.
Je suis député d'un département qui environne Paris de tous côtés; ses habitants savent bien que
si les droits d'entrée sont anéantis, il en résultera pour eux une augmentation d'impôts, mais ils savent aussi qu'ils vendront leurs denrées avec plus d'avantage, et qu'il s'en fera une plus grande consommation. Les habitants des campagnes dans toute la France feront le même raisonnement; ils ne se croiront libres et heureux que lorsque leurs denrées seront affranchies de tout droit aux portes des villes et qu'ils pourront y entrer et en sortir sans essuyer des visites et des perquisitions, qui chuquè jour leur deviendront plus insupportables à mesure qu'ils connaîtront mieux leurs droits et leur dignité. Le vœu formel du département que je représente est que les droits d'entrée soient supprimés.
Et qu'on ne dise pas que la contribution foncière, telle qu'elle a été proposée par le comité, sera trop forte. L'opinion des peuples sur ce point s'est prononcée d'une manière qui n'est pas douteuse» et qui réfute victorieusement toutes les objections. Le projet du comité est public depuis longtemps; on connaît la somme qufil veut faire supporter aux biens-fonds. Si ia charge eût été regardée comme trop lourde» le prix des terres aurait dû diminuer ; le contraire est arrivé. Par les ventes qui se font journellement, vous avez vu que, non seulement le prix des biens-fonds se soutient; mais qu'il augmente tous les jourSi
On dira aussi qu'avant de supprimer les droits d'entrée des villes, il faut trouver à les remplacer par d'autres impôts. Mais* Messieurs, ne serait-il pas bien étrange que la nation française, qui, dans l'esclavage» supportait 7 à 800 millions de charges, ne pût pas, après être devenue libre, pourvoir à un supplément de 24 millions» lorsque ses contributions annuelles seront réduites à 5 ou 600 millions?
Au mois de décembre dernier, le comité d'imposition a présenté à l'Assemblée ie tableau des dépenses publiques, il lui a fait ensuite l'éuu-méràtion des ressources qui serviraient à les acquitter. Il y a compris lés entrées des villes pour 24 millions, parce que sans doute elles étaient établies, et qu'il n'en avait pas encore reconnu tous les inconvénients.
Mais faUdra-t-il laisser subsister le plus mauvais de tous les impôts, parée qu'il a plu au comité de le placer au nombre des taxes à conserver, et sous le vain prétexte qu'avant la suppression, il faut trouver à le remplacer. Le comité avait ausdi compris les aides et le tabac au nombre des ressources publiques, il s'est enliu convaincu que leur conservation chez un peuple libre était impossible ; il vous en a proposé l'abolition et votis l'avez décrétée? Ont-ils été rem* placés ces impôts avant d'être eupprimés? Non, Messieurs, vous avez seulement considéré que la Constitution ne permettait pas dé les laisser subsister : si vous voulez suivre le même guide, si vous êtes fidèles à vos principes, vous en ferez autant, et à bien plus forte raison des droits d'entrée des villes, puisqu'il est démontré qu'ils sont infiniment plus oppressifs^ plus onéreux, plus nuisibles à là prospérité publique, et plus inconstitutionnels que tous ceux que vous avez abolis.
Enfin, Messieurs^ on vous dira (et c'tst l'objection qu'on regardé comme la plus forte) que les classes inférieures du peuple, si les droits d'entrée sont supprimés, ne payeront aucun impôt ; qu'on ne peut les atteindre que par leurs consommations journalières ; que si chaque individu ouvrier, ou artisanMcontrihue annuellement
par les entrées pour 40 ou 50 livres aux dépenses publiques, et que les droits soient supprimés, on lui demandera en vain* en remplacement, une somme beaucoup moindre, parce qu'il ne met rien en réserve. Cet argument, Messieurs, porte en lui-même la preuve la plus claire de l'immoralité et de l'injustice de l'impôt des entrées. Ceux qui le font ne s'aperçoivent pas qu'ils en prononcent eux-mêmes la réprobation ; car tout impôt qui porte sur les besoins et non sur les facultés est essentiellement mauvais. Non, sans doute, vous n'atteindrez pas les classes indigentes et infortunées par ie remplacement qui sera établi; et la raison en est que vous ne devez pas les atteindre. Si tous les. citoyens ne doivent contribuer au^ dépenses de l'État que dans la proportion de leurs moyens, tout homme qui n'a point de moyens, qui n'a point de facultés ne doit pas d'impôt. Il doit à la patrie son bras, et s'il le faut, sa vie pour la défendre,
0 vous, riches des cités et des campagnes, qui craignez de porter des charges plus fortes, si le fardeau du peuple est diminué, considérez que vous ne ferez que semer pour recueillir! Les classes aujourd'hui, indigentes et sans fortune, moins chargées, moins opprimées, augmenteront d'aisance; elles acquerront des facultés ou des propriétés, et alors elles partageront avec vous les contributions dont vous les aurez momentanément soulagées : que dis-je, nos craintes sont mal fondées» votre contribution ancienne ne sera pas augmentée, le pauvrenedevra la diminution qu'il éprouvera qu'à la suppression des frais de régie.
Sans doute il faut des impôt, mais la France avant tout,demande une Constitution juste. Voulez-vous, Messieurs» consolider à jamais la Révolution,.^voulez-vpus que la Constitution soit inébranlable? Conciliez-vous les habitants des villes ; jusqu'à présent vous avez tout fait pour les campagnes, et vous le deviez, parce qu'elles étaient ies plus opprimées. Le nouvel ordre de choses a causé aux habitants des villes des pertes immenses; c'est à force de privations et de sacrifices qu'ils ont conquis la liberté et maintenu la Révolution qui était leur ouvrage. Il esttemps de leur accorder» non pas une faveur, mais une justice en supprimant les droits d'entrée»
Je vais plus loin, Messieurs, je dis que si la Constitution vous est chère, si vous ne voulez pas qu'elle soit exposée à des dangers sahs cesse renaissants, vous devez encore supprimer les droits d'entrée» Cet impôt sera, entre les mains des ennemis de la Révolution» une arme sûre dont ils se serviront pour soulever le peuple des villes contre la Constitution» et pour l'exciter à renverser son propre ouvrage. « Vous payez, lui « diront-ils, des droits énormes sur le vin et sur « les objets de première nécessité, Vous êtes « honteusement fouillés aux portes de toutes les « villes; à quoi donc vous sért votre liberté? « Attachez-vous à nous, nous ferons supprimer « tous les droits d'entrée, et ce sera alors que « vous pourrez vous glorifier d'être véritablement « libres. »
Jè ne vous présente pas ici» Messieurs» de vaines terreurs, des craintes exagérées; si vous doutiez de l'effet de semblables arguments sur le peuple, rappelez-vous qu'ils ont été employés déjà plusieurs fois» et avec succès, à Lyon. Oui» Messieurs, tant qu'il subsistera un seul impôt inégal, injuste, et qui frappera sur les besoins journaliers du peuple, la Constitution sera chancelante, et la Révolution ne sera pas achevée.
Mais je n'aurais pas rempli la tâche entière que je me suis imposée, si je ne vous indiquais pas les moyens de suppléer à cette ressource.
1° Messieurs, je viens de vous parler des droits de licences votre comité ne les avait d'abord évalués qu'à 8 ou 10 millions de produit; mais, par l'extension qui leur a été donnée, ils en produiront au moins 18 ou 20; vous en serez convaincus si vous voulez vous occuper de la discussion de ce projet, comme je crois nécessaire de le faire avant de statuer sur les droits d'entrée.
2° En supprimant le privilège exclusif du tabac, vous avez établi un droit de 25 livres du quintal sur tous les tabacs étrangers. Le produit de ce droit, réuni au bénéfice de la vente, en concurrence avec le commerce libre, a été évalué par le comité de 6 à 8 millions.
3° Le droit d'enregistrement que vous avez établi sur les successions collatérales, est de 1 à 4 0/0, et son produit est estimé à 5 millions; il n'y aurait aucun inconvénient à augmenter ce droit de deux tiers, et de le porter de 3 à 10 0/0, ce qui en élèverait le produit à 13 millions au lieu de 5, et procurerait au Trésor national une augmentation de revenus de 8 millions.
4° Le comité des impositions n'a pas mis les loteries au nombre des ressources. Je sais que ce genre de revenu est immoral, mais il sera très difficile, peut-être impossible, que le peuple renonce au jeu des loteries ; si les loteries publiques sont supprimées, il s'élèvera une multitude de loteries particulières; Le peuple sera la dupe d'un grand nombre de fripons et de gens sans aveu, qui lui vendront des billets de loteries particulières ou de loteries étrangères. On a déjà proposé d'abolir les petits billets ou billets faits, ce sont ceux qui sont le plus communément achetés par les citoyens les moins aisés. Cette suppression rendrait la loterie moins vicieuse, elle en réduirait les profits de3 à 4millions; ses produits seraient alors bornés à 8 ou 9 millions, qui formeraient une nouvelle ressource, du moins pour quelques années. Assurément s'il fallait opter entre la conservation des loteries ou des entrées des villes, votre choix ne serait pas longtemps incertain. En récapitulant les diverses ressources que je viens de vous présenter, vous trouverez 33 à 34 millions, qui compenseront bien au delà les 24 millions des entrées des villes.
5° Enfiu, il est une très grande mesure infiniment utile et désirable, c'est celle du rachat volontaire des rentes viagères, qui sont une des charges les plus accablantes pour la nation. Après avoir fait tant de choses pour les générations futures, ne serait-il pas raisonnable que l'Assemblée nationale songeât aussi à la génération présente? Ces rachats volontaires pourraient s'effectuer soit par un échange en contrats perpétuels à 5 0/0, soit par une conversion en reconnaissances qui seraient reçues pour comptant en payement des biens nationaux. Cette mesure est d'autant plus facile et d'autant plus sûre aujourd'hui que les prix auxquels ces biens sont vendus en feront monter la valeur beaucoup au delà des premières estimations. Si ces rachats se faisaient seulement pour 30 ou 40 millions de rentes viagères, ce serait une diminution de dépenses qui équivaudra t à une augmentation de recette, elle suppléerait encore, et bien au delà, aux 24 millions des droits d'entrée.
A l'égard de la partie des droits d'entrée qui doit être employée à acquitter les dépenses des villes, il n'y a pas lieu de douter que, lorsque
vous aurez renoncé à ce genre d'impôt, les municipalités ne doivent pareillement y renoncer; elles y seraient forcées par l'énormité des frais de régie, qui resteraient en entier a leur charge, et qui seraient sans aucune proportion avec les produits. Mais cette considération n'est pas la seule, les mêmes motifs qui doivent faire proscrire les entrées des villes comme impôt national s'opposent à sa conservation comme impôt municipal; car il n'est pas moins impolitique, inégal, injuste, inconstitutionnel, destructeur de l'agriculture et de l'industrie, sous ce dernier rapport que sous le premier; et si les officiers municipaux des villes étaient assez aveugles sur les intérêts cte leurs concitoyens pour méconr naître ces vérités, ce serait à vous, Mes^eurs, à les éclairer : dirigés par vos principes, ils ne tarderaient pas à revenir de leur erreur.
Il sera donc convenable d'adopter, pour subvenir aux dépenses municipales, un impôt particulier, qui serait acquitté par tous les habitants de chaque ville ou paroisse, sans distinction de propriétaires ou de non-propriétaires.
Cei impôt pourrait être ou une taxe sur les fenêtres ou une contribution en raison de la valeur locative de l'habitation. La taxe sur les fenêtres est établie en Angleterre, elle y est très productive, elle s'y perçoit sans difficultés, sans vexations, et presque sans frais; elle n'a aucun des inconvénients dont on vous a parlé, elle a cependant plusieurs défauts dans sa combinaison, qu'il serait possible de rectifier.
Une taxe sur la valeur locative de l'habitation serait peut-être encore préférable, on se servirait d.s bases adoptées pour l'impôt mobilier ; mais on ne ferait aucune diminution aux propriétaires; car ils sont tenus de contribuer comme tous les autres citoyens, en proportion de leurs facultés, aux dépenses municipales.
Le revenu net foncier est évalué à 1200 millions; le revenu des salaires publics et de l'industrie est estimé à plus d'un milliard ; en supposant que les dépenses de toutes les municipalités du royaume s'élèvent à 30 millions, la taxe municipale ne sera pas de 1 1/2 0/0 sur les facultés.
Je n'aperçois pas un seul inconvénient dans ses arrangements, et j'y vois une multitude d'avantages, j'y vois raffermissement de la Constitution, le soulagement des classes les moins fortunées des citoyens, la diminution des charges publiques par la suppression presque entière des frais de perception qui s'élèvent à 7 ou 8 millions.
L'encouragement de l'agriculture par l'augmentation de ^consommation dans les villes ; la réduction du prix de la main-d'œuvre pour les fabriques et les manufactures; la liberté de la circulation pour le commerce intérieur et extérieur de la France ; enfin la destruction, et pour jamais, des barrières, des entraves et de la fiscalité.
On vousadit, Messieurs,que l'opinion publique n'était pas encore suffisamment foimée puur remplacer les droits d'entrée par d'autres taxes : mais a-t-on oublié que le vœu du peuple s'est manifesté très positivement à cet égard ; d'abord ici, au commencement de la Révolution, ensuite dans un très grand nombre de villes, et notamment à Lyon et à Marseille. On sait que plusieurs villes des ci-devant provinces de Normandie et de Picardie se sont affranchies depuis longtemps de tous droits d'entrée, et qu'on a vainement tenté de les y rétablir. L'événement terrible arrivé il y a peu de se-
maines aux portes de Paris, en vous faisant connaître les dispositions des esprits, doit vous inspirer la [lus juste horreur pour un impôt, dont fa perception ne p -ut être assurée, que par les baïonnettes, et au prix du sang des citoyens. En supposant même que ces scènes affreuses ne se renouvellent jamais, il me paraît impossible que l'Assemblée nationale décrète que des Français, des hommes libres pourrontêtrearrêtés, visités et rançonnés aux portes de toutes les villes du royaume ; qu'ils seront exposés aux caprices, aux violences et à la brutalité de gens sans éducation; qu'ils seront tenus de se soumettre auxdé-cisions arbitraires d'employés ignorants et sans principes, qui n'ont embrassé leur état pour la plupart que par l'incapacité où ils étaient d'en exercer aucun antre ; qu'ils seront enfin jugés et condamnés sur la déposition infidèle de commis subalternes, intéressés à trouver les citoyens en contravention, parce qu'ils savent qu'ils auront une part dans leur dépouille. On supprimera, nous dit-on, toutes ces formes vexatoires. Vaines pr messes, Messieurs, cela ne peut pas être, car sans elle il n'y a pas de perception possible.
Tant de motifs, Messieurs, me persuadent que vous n'hésiterez pas à prononcer l'abolition des droits d'entrée ; mais s'il nous restait encore quelque regret de sacrifier ce revenu, je demande au moins que le projet soit renvoyé au comité, et que vous le chargiez d'examiner les différents moyens de supplément que je viens de vous présenter. Je me persuade qu'il n'aura pas de grands efforts à faire pour trouver une imposition plus conforme à la Constitution, à la liberté et à la justice, surtout moins dangereuse, et moins nuisible à la prospérité générale du royaume que les rentrées des villes.
Je demande, en outre, qu'avant de prononcer sur les droits d'entrée, l'Assemblée s'occupe du projet de licences ou patentes qui lui a été proposé par le comité. Cet impôt est aussi une taxe sur les consommations. S'il en faut adopter une, il est raisonnable de préférer celle qui sera la moins défeftuiju-eet la moins oppressive. J'a déjà observé que le produit des patentes servira en partieà remplacer les droits d'entrée (1), et, comme cette question intéresse spécialement l'agriculture et le commerce, je pense que vous croirez raisonnable que les comités d'agriculture et de commerce soient réunis à celui d'imposition pour l'examiner.
(cte Nemours), rapporteur. Messieurs, votre comité, en vous proposant cet impôt, ne vous a point dissimulé qu'il n'était pas bon. Presque toutes les objections qu'on lui a faites, presque tous les raisonnements et les calculs qu'on lui propose sont puisés ou dans les travaux du comité ou dans ceux connus de ses membres ; mais il s'est arrêté au projet qu'il vous offre, pareeque les 45 millions perçus ci-devant, étant réduits à 24 ou 25, opéreraient un soulagement en masse très considérable.
La question est donc de savoir si l'on peut et si l'on veut supprimer les
taxes à l'entrée des villes, et défendre aux villes d'y percevoir aussi
La question étant ainsi réduite à ses propres termes, c'e-t le jugement que portera l'Assemblée qui déterminera nos travaux ultérieurs. Vous crovez-vous assez éclairés?Le comité vous proposera, pour mesure provisoire, le décret suivant :
« Art. 1er. Au lieu de 70 millions qui se
percevaient à l'entrée des villes dont 45 millions é aient au profit du
Trésor public, il ne sera plus levé que 24 millions par le Trésor public
et 24 millions de plus pour le besoin des villes.
« Art. 2. Cette perception ne sera que provisoire et pour les années 1791 et 1792.
« Art. 3. Les administrations de département feront passer sans délai ou au plus tard avant le 1er mars 1792, à la première législature, leur avis motivé et les renseignements nécessaires ponr mettre le Corps législatif à portée de prononcer sur la modification ou suppression de toutes ou partie desdiies taxes pour l'année 1793. »
J'avais demandé la parole pour faire quelques observations, relativement au projet qui vous est présenté.
Je demande l'ajournement de la délibération, afin que l'Assemblée puisse connaître la situation et les divers intérêts des villes et qu'elle les balance avec l'intérêt de la chose publique.
Messieurs, je n'ai pas à vous présenter des calculs abstraits et des idées métaphysiques; je vous offrirai des vues simples, dictées par la raison et par la justice.
Les impôts perçus à l'entrée des villes sont injustes dans leur principe, improductifs, immoraux et désastreux dans leurs conséquences. C'est au nom des villes et des campagnes que je sollicite l'abolition de ces droits, en lès remplaçant par un impôt plus simple, plus léger, qu'on pourrait ajouter en accessoire à celui sur les maisons, le pauvre ne payerait qu'une légère portion sur son loyer, ou tout autre contribution.
Vous êtes les défenseurs du peupb, il est votre soutien; ce peuple est bon'et confiant, il veut le bien, mais il ne le voit pas toujours ; il ne fait le mal que quand on l'égaré. On l'a calomnié; s'il a quelquefois été cruel, c'est qu'on l'avait provoqué; il a fait la Révolution et il la soutiendra. Ce n'est pas le peuple qui fait des complots contre la Constitution, ce sont les mauvais citoyens, qui cherchent à. l'égarer ou le corrompre; ce peuple est souvent sans pain et sans travail; cependant il donne aux mauvais riches l'exemple de la résignation aux lois et du patriotisme; il était accablé par les droits d'entrée, supprimez-les; rendez l'impôt proportionnel aux facultés, d'après les déclarations des droits, le pauvre ne doit pas payer plus qu'il ne doit.
On l'avait opprimé, on avait calculé sur ses subsistances ; on avait mis un tarifa ses besoins; anéantissez ce fatras d'édits bursaux et scandaleux, cette collection d'iniquités fiscales, enfantées par des financiers avides, des ministres égoïstes et tous les agents vicieux d'une administration corrompue.
Encore une fois, établissez l'impôt d'après les principes de la justice distributive, ou déchirez.
la Déclaration des Droits. (Vifs applaudissements.) Je vous propose de
décréter ; Art. 1er. Qu'il ne sera perçu
aucuns droits et impôts indirects sur les denrées pu marc^an^ dises, à
l'entrée des villes et bpqrgs dans l'intérieur du royaume.
Art. 2. Qu'il sera pourvu à une contribution soit personnelle ou autrement, soit sur les mai^ sons ou les loyers, ou de telle autre manière qui paraîtra plus douce et plus équitable eu remplacement des droits d'entrée*
Art. 3. Que la municipalité de Payis sera autorisée à vendre les bureaux, et muraj]les de l'enceinte de Paris, de la paêqje manière que tes autres biens nationaux,
Art. 4. Qu'il sera pourvu au gort des receveurs, contrôleurs, brigadiers et commis des barrières, pourvu qu'ils aient 25 ans de service Sfiqs interruption.
secrétaire, donne lecture de la lettre suivante adressée à M. le Président de l'Assemblée nationale par l'assemblée électorale du département de Loir-et-Cher :
« Blois, le 14 février 1791.
« Monsieur le Président, « L'assemblée des électeurs du département de Loir-et-Cher nous charge d'avoir l'honneur de vous faire savoir qu'elle a éju pour son évè-que, M. Grégoire, curé d'Emberménil. (Vifs applaudissements.) Ses vertus, ses lumières, soq patriotisme, sont les titres qui lui ont obtenù nos suffrages.
« Veuillez, Monsieur le Président, vous réunir à nous pour forcer sa modestie à accepter..., »
Un membre à droite : Il acceptera. (Applaudis-sements â gauche.)
continuant sa lecture... « à accepter une dignité que ses qualités éminentes rendront encore plus digUe de Qos respects. (Vifs applaudissements.)
« Signé: Les président, secrétaire et scrutateurs de l'Assemblée électorale du département de Loir-et-Cher. »
Un membre de la commune de Haguenau demande, par lettre, â avoir en communication des pièces déposées au comité des recherches, et nécessaires à la justification des députés de cette ville, et à leUr défense, dans le procès qui sé poursuit au tribunal du district établi à Sayerae.
Je demande que l'Assemblée accueille la demande de là commune de Haguenau et que, de même que l'Assemblée l'a toujours entendu, on continue de donner communication à tous les inculpés des pièces qui sont à leur charge.
D'un autre côté, â présent que les tribunaux sont établis, je me joindrai à M. de Macaye pour demander la suppression de tous les comités des recherches du royaume.
Voix à gauche : Pas encore ! A l'ordre du jourl
J'ai l'honneur de vous assurer qu'il n'y a pas de petite ville où l'on n'ait établi de ces comités ; c'est une inquisition horrible.
(L'Assemblée,consultée, décrète qu'il seradonné communication des pièces demandées?)
il reste la motion de M. de Fou-| cault.
Le comité des recherches n'a jamais été plus nécessaire à la chose publique; je demande que l'on passe à l'ordre du
jour-
(L'Assemblée décrète qfu'elje pâsse â l'ordre du jQqfîj
La $scussio,n sqr les droits d'entrée dans tes villes est reprise-
$qus sommes quatre opinants pour le rejet des droits d'e,ntfée; si personne ne se présente pour les. défendre, il me semble inutile de continuer tji discussion.
membre du comité d'imposition. Messieurs, le- comité d'imposition n'a jamais pensé que les droits d'entrée des villes ne fussent pas par euxrmêmes un impôt essentiellement mauvais; mais il croît cependant qqe, dans l'état des besoins dp. Trésor puDlic, dans l'état d'infertilité où la féodajjté a réduit (es terres, il fyut nécessairement rep.pm*jr a qqelques-uns dë ces mauvais inipôts,'
' Lî\ taSQ à l'entrée des villes a paru â votre comité la moins contraire à yos priqcipes. Avant de la décréter néanmoins, je demande que l'Assemblée veuille bien examiner le projet sur le drpit de patente, qui $ été distribué ;' et, dans la discuspîop on examinera Si çe'droit de patente, est sqsceptible d'extepsipn, s'il peut produire au delà de pe que noqs avons espéré, sans entraîner les gênçs d'une inquisition cpmm^ les droits d'entrée des villes.
Au premier cas, si ces droits de patente peuvent être étendus au defô'dç ce qu'a prévu le comité d'imposition, $(ors nous ferons vpiqntïers le sacrifice des droits d'entrée et l'Assemblée supprimera les droits d'efltréè, (Applaudissements,)
En CQnséquence, je demande qu'on fasse le rapport des pateqtès et qu'pn ajoprne après cet examen la questiop sur les droits d'entrée.
(L'Assemblée décrété l'ajournement du décret sur les droits d'entrée des villes jusqu'après le rapport concernant les droits dp patente.)
L'ordre du jour est un rapport du comité des contributions publiques sur les patentes.
rapporteur (1). Messieurs, votre comité des contributions publiques, en vous soumettant son rapport sur le timbre, vous annonça qu'il s'occupait d'un droit de patente.
Nqus devons aujourd'hui vous entretenir des détails relatifs à ce droit, et des motifs qui ont déterminé votre corajté à le mettre au nombre de vos moyens de finance,
La position. Messieurs, dans laquelle vous vous trouvez pour fixer la
somme et la nature des impôts, est singulièrement fâcheuse. Les
dilapidations de l'ancien régime ont plus que doublé les charges
annuelles qu'on ne peut éviter 4e faire supporter à la nation. Car tel
est le malheur du despotisme, qu'il semble, pour ainsi dire, sp survivre
dans ses effets; il atteint, par ses suites désastreuses, Jes
génératiqps poqf lesqueïjës il n'existe plus. Alors les contributions
d'une bonne nature ne
Il faut donc, dans ces circonstances, que le revenu national se compose d'impôts directs et indirects; et quoiqu'il soit vrai que la terre, qui produit tout, paye nécessairement tout, ce dérangement des prix des productions, son avilissement dans les mains des premiers vendeurs, tandis qu'il est néanmoins excessif pour les consommateurs, ces fruits amers du système général de vexations auquel fut livré cet Empire, font que ce n'est pas sans raison qu'on craint de demander aux cultivateurs et aux propriétaires le payement direct de la totalité de l'impôt, et qu'on est porté à demander l'avance d'une partie de cette contribution aux agents de l'industrie, et aux capitalistes qui s'en font rembourser en détail par les propriétaires dans le salaire de leurs services, ou dans le loyer de leurs capitaux : car on ignore encore qu'il n'y a de véritable moyen d'atteindre les capitalistes, que celui de faire baisser le taux de l'argent, et de les conduire ainsi à placer leurs capitaux en terre, ou à les prêter à ceux qui les cultivent.
Vous avez consacré la nécessité des impôts indirects, puisque ce n'est que d'après l'estimation approximative de leurs produits que vous devez fixer la contribution foncière dans une proportion correspondante aux besoins de l'Empire.
Votre comité ne s'est dissimulé aucune des objections qui militent contre les impôts indirects, aucune des entraves qui entourent leur perception.
Il gémit sous la difficulté d'en lier les principes avec ceux d'une Constitution libre; il a dû se pénétrer de ce respect que commande le domicile du citoyen ; il a dû se rappeler l'horreur avec laquelle vous aviez rejeté tout système fnqui-sitorial, et l'anathème dont la liberté avait frappé dès sa naissance la gabelle, les droits d'aides; enfin toutes les formes vexatrices, tout impôt attentatoire à la dignité de l'homme.
Il a dû vous présenter une forme d'impôt exempte de ces reproches; ces considérations lui ont fait écarter du mode qu'il soumet à votre sagesse toute idée d'imposer aucun droit à la fabrication, à la vente en détail. Cependant vous avez décrété u& droit sur les actes, sqr les successions; vous avez imposé le papier sur lequel ces actes doivent être écrits; mais le produit présumé de ces impôts, en y joignant même l'évaluation de ceux que les terres peuvent raisonna, blement supporter, n'est pas encore assez considérable pour atteindre la hauteur de vps besoins. Pressé entre l'extrême nécessité et la difficulté non moins extrême d'imposer, votre comité s'est vu forcé de faire tomber l'avance de l'imposition sur ceux qui débitent les productions ouïes marchandises, et qui se récupèrent toujours de cette avancé avec avantage, avec restitution de leurs fonds et de leurs intérêts, aux dépens des çon-sommateurs ou des premiers vendeurs de productions.
« N'imaginez pas pouvoir faire contribuer les marchands à l'impôt, disait le sage Franklin au parlement d'Angleterre; ils mettent l'impôt dans leurs factures .»
Quand on taxe leur commerce, on les constitue percepteurs à charges d'avances, doqt les derniers acheteurs ou les premiers vendeurs leur font nécessairement la restitution; aussj lé plus grand mal des impôts sur les marchandises est-
il dans la gêne et le raleRtissement qu'il apporte au commerce.
Ce mal est moindre dans une imposition qui n'exigera point d'exercice habituel, et dont le système est ordonné sur les bases les plus simples, combiné de manière que le nécessaire qui ne doit jamais être taxé, n'en soit point altéré, et que le superflu passe par les proportions graduelles d'une taxe dont le fnaximiim sera très modéré.
L'impôt sur les vendeurs peut être rendu léger pour les habitants des villes; en quelque sorte nul, ou du moins insensible pour les habitants des campagnes, qui doivent toujours être l'objet de la sollicitude du législateur.
Substituer ces droits à ceux qui existent, ce sera donc moins exercer un acte de rigueur que de modération ; ce sera moins exiger un impôt qu'en faire la remise. Votre comité a cru qu'il fallait lier l'existence de cet impôt à un grand bien fait pour l'industrie et pqur le commerce, à la suppression des jurandes et maîtrises que votre sagesse doit anéantir par cela seul qu'elles sont des privilèges exclusifs.
La faculté de travailler est un des premiers droits de l'homme. Ce droit est sa propriété, et c'est sans cloute suivant l'expression de ce ministre philosophe qui avait deviné quelques-unes de vos pensées, c'est sans doute la première propriété la plus sacrée, la plus imprescriptible.
Cependant on a vu dans presque toutes les villes du royaume l'exercice des arts et métiers se concentrer dans L s mains d'un petit nombre de maîtres réunis en communautés. Qes maîtres pouvaient seuls, à l'exclusion des autres citoyens, fabriquer ou vendre les objets de commerce particulier dont ils avaient je privilège.
Pour obtenir ce privilège tyrannique, il fallait passer par toutes les épreuves, par toutes les exactions que le génie de la fiscalité et du monopole avait multipliées: la cherté et la longueur de l'apprentissage, la servitude prolongée du compagnonnage, les frais et les formalités de réception épuisaient une partie de la vie du citoyen laborieux et des fonds dont il ayait besoin pour monter son commerce : les frais seuls d'un repas de communauté absorbaient les produits d'une année.
En voyant se combiner avec ces exactions les franchises accordées aux fils de maîtres, l'exclusion donnée aux étrangers, c'est-à-dire aux habitants d'une autre ville, aux forains; enfin la facilité avec laquelle ces corporations pouvaient se liguer pour hausser le prjx des marchandises, et même dps denrées ; on parvient à croire que tous leurs efforts tendaient à établir daqs l'Etat une c^ste exclusivement commerçante.
C'était déjà un mal ppur quelques citoyens ; ce fut aussi un mal pour tous : plus de choix, plus dp concurrence parmi les ouvriers, par conséquent moins de bénéfices ppur l'acheteur qui aurait gagné soit la diminution du prix, soit la perfection du travail. Çe fut un mal pour eux-mêmes: le concours de plusieurs communautés pour un ouvrage, leur rivalité, les prétentions réciproques dont pjfes se fatiguaient, firent naître des procès interminables,
L'esprit de fiscalité, qui voit moins ce qui est en droit que ce qui est en produit, protégea ces abus, dont les communes introduisirent la servitude au moment qu'elles échappaient à celle de la féodalité,
Couverts ^e la poussière des siècles, ces ahus
exercèrent leur funeste activité jusqu'au temps où un Turgot parut. 11 éclaira le roi un moment, el un moment ces abus cessèrent d'être.
Il se rélevèrent bientôt ; le temps n'était pas encore mûr pour ces idées. Les parlements regrettaient les procès, les princes regrettaient le privilège qu'ils avaient de faire échapper, moyennant finances, quelques sujets à la police des jurandes. Ils voulaient l'abus: les uns parce qu'ils jugeaient les contestations qu'il faisait naître, les autres parce qu'ils vendaient l'exemption de l'abus. Un arrêt du conseil, bien mieux approprié aux maximes qui dominaient alors, qu'aux vrais intérêts du commerce, détruisit le fruit d'un des plus beaux édits qui aient honoré le commencement du règne du roi, et rétablit les jurandes, les maîtrises, les communautés d'arts et métiers. On capitula avec la raison, on abandonna une partie bien faible des chaînes du commerce pour conserver le reste, on pallia le mal, on ne le guérit pas. ' Il vous reste, Messieurs, à effacer ces derniers vestiges de la servitude. Votre comité a pressenti les. objections : en les aplanissant devant votre sagesse, il ne fait que hâter l'instant de votre décision.
Parmi les commerçants, il y a deux classes : celle des commerçants en gros et celle des commerçants en petit. Cette dernière classe gagne sans douté à la liberté du commerce : votre comité propose de lui donner la faculté d'en cumuler les différentes branches selon son intelligence et son intérêt. Cette liberté serait-elle donc' nuisible aux commerçants en gros? Non sans doute, les maisons connues le seront toujours. '
11 arrivera de deux choses l'une : ou les concurrents leur seront inférieurs, et alors la rivalité devient nulle; ou les concurrents leur seront supérieurs, et alors la considération de l'avantage public doit l'emporter; c'est dans ce sens que l'intérêt du commerce est distingué de celui du commerçant; dans le cas d'égalité,leùrs avances, leur nom font pencher lâ balance de leur côté.
Mais les maîtres actuels ont acheté un privilège. Les dépouillera-t-on? Non, Messieurs, on leur rendra au contraire des capitaux utiles à leur commerce, en même temps que la liberté de l'étendre a toutes lés parties qui pourront leur convenir selon leur capacité et leurs moyens.
Nous venons d'établir que cette liberté était conforme à l'intérêt du négociant; nous avons oublié une considération sur laquelle nous ne craignons pas d'être démentis, c'est qu'elle est conforme à leur patriotisme.
Dirait-on qu'elle est opposée à l'intérêt du commerce? U'âmedu commerce est l'industrie; l'âme de l'industrie est la liberté; je ne m'arrêterai pas à prouver des vérités aussi généralement reconnues.
Craindrait-on la multiplicité des ouvriers? Mais leur nombre se compose toujours en raison de la population; ou, ce qui revient au même, en raison des besoins et de la consommation.
Craindrait-on d'être exposé aux risqués d'une fabrication incomplète ou frauduléusé? Mais on sait combien sur cet objet la police des jurandes était illusoire; on sait que les ouvriers dés faubourgs et des autres lieux privilégiés ne travaillent pas moins bien que ceux qui sont soumis à l'inspection deâ maîtres; on sait qué, par la rivalité, ils exercent les uns sur les autres une sorte d'inspection bien plus efficace ; cette rivalité élève, perfectionne les talents, qu'une police
despotique décourage et flétrit. D'ailleurs il est une surveillance qui est très à la portée du citoyen, et dès qu'il peut l'exercer, celle de la loi n'a plus lieu : la surveillance de la loi doit commencer là où cesse celle du citoyen. Or, il n'y a que deux professions dont les éléments soient tellement reculés des connaissances du citoyen qu'il ne puisse plus exercer pour lui-même cette surveillance. Ces deux professions sont celles des pharmaciens et des orfèvres, pour lesquels votre comité réclame des règlements particuliers.
D'après ces considérations, votre comité a cru devoir vous proposer que tout homme serait libre d'exercer telle profession, tel commerce, t'el métier, telle cumulation de métiers et de commerce qui leur paraîtront conformes à leurs talents et utiles à leurs affaires: et au lieu des capitaux considérables qu'il fallait débourser pour être admis dans une jurande qui ne donnait ie droit de faire qu'un seul métier, qu'un seul commerce, et qui laissait le maître soumis à la perte entière de ce capital, si son entreprise ne réussissait pas; de n'exiger d'aucun des aspirants que de se faire connaître à leur municipalité, et de payer une redevance annuelle, proportionnée à l'étendue et au succès de leurs spéculations, augmentant, diminuant, cessant avec elles.
La quittance de cette redevance annuelle serait consignée dans une patente, dont le droit serait tarifé dans des proportions tellement modérées, que l'obtention de cette patente serait toujours accessible.
La base proportionnelle de ce droit serait établie d'après la valeur locative de l'habitation, seule mesure approximative de l'importance du commerce que les principes dé votre Constitution vous permettent d'adopter; car l'insulte que ferait à la liberté toute inquisition domestique, doit faire rejeter tout autre moyen. Votre cor» itë cependant a, cru qu'il pouvait être fixé un maximum pour cette sorte ae contribution, et qu'il y avait quelques motifs pour fixer ce maximum à deux cent cinquante livres. Il s'en rapport" à votre sagesse et pour le principe et pour le terme de la limite'à mettre à la valeur des patentes.
Il a pensé qu'il ne fallait chercher dans ce droit qu'une légère compensation des anciennes perceptions, qu'il ne fallait même l'élever que jusqu'à la hauteur d'une somme dont l'imposition devînt inseûsible, par cette considération déjà énoncée, que le négociant n'en faisant que l'avance et se récupérant sur la vente des marchandises, il fallait craindre pour l'intérêt du commercé d'en faire trop hausser le prix.
L'avance de cette taxe inférieure pour le petit négociant et proportionnelle à ses bénéfices serait acquittée d'autant plus aisément qu'il ne payerait plus la jurande; que par le bienfait de la loi, il pourrait employer à commencer son commerce le Capital dont on le privait anciennement pour payer l'admission dans une jurande.
Votre comité, Messieurs, a adopté des baees supérieures pour la fixation .du prix des patentes des marchands de vin, aubergistes, traiteurs et autres qui débitent des boissons.
Ge qui l'a conduit à adopter cette mesure, c'est la nécessité de remplacer de la manière la moins imparfaite, une partie des produits des droits d'aides et de détail que votre sagesse a proscrits, et qui sont incompatibles avec une Constitution libre; Cette taxe qui paraît au premier coup d'œil supérieure à celle des autres, est cependant balancée dans la même exactitude. Si le droit
augmente d'un côté, il décroît de l'autre en proportion .
Si votre comité a cru devoir imposer les riches, les propriétaires, et même les services du commerce, qui présentent des bénéfices considérables, il ne peut jamais perdre de vue ceux qui sont l'objet principal de votre sollicitude, les citoyens des classes indigentes. 11 a évité avec soin tout ce qui aurait pu augmenter le prix des consommations du pauvre : c'est ce qui l'a déterminé à diminuer de moitié le prix des patentas/lorsqu'elles seraient données aux boulangers, et à n'en mettre aucune sur ceux qui vendent les légumes, le poisson, ou qui étalent dans les marchés et dans les rues. Cette règle d'humanité, Messieurs, lui a paru prescrite par les principes de bienfaisance qui vous animent.
Votre comité a pensé qu'il était utile que les citoyens s'adressassent aux municipalités pour prendre cette patente : l'ordre public exigeait que toutes les personnes qui exercent des professions fussent connues : il vous propose d'allouer aux municipalités une partie du produit pour droit de surveillance et pour être employée à leurs dépenses particulières.
Il nous reste à vous présenter une considération d'équité. En supprimant les jurandes, maîtrises et communautés, la justice de l'Assemblée nationale veut que l'Etat se charge de leurs dettes et que les particuliers qui ont acheté des maîtrises soient dédommagés. La mesure que le comité propose est conforme aux règles de la justice.
11 a considéré l'avance de leur capital pour le droit de maîtrise comme un placement viager, et il l'a considéré comme devant profiter pendant 30 ans. Ce terme est plus long que celui de l'estimation habituelle de la durée de la vie d'un homme de l'âge de celui qui est en état d'embrasser une profession, de faire un métier, de se livrer à un commerce; après avoir déterminé une déduction d'un trentième par chaque année de jouissance, il a estimé que cette déduction ne devait plus avoir lieu au-dessus de 20 ans de jouissance, de manière qu'en aucune supposition, le maître d'une communauté actuelle ne pourra pas recevoir moins d'un tiers du capital qu'il aura fourni au gouvernement pour l'acquisition de sa maîtrise.
Votre comité a cru qu'il valait mieux alors courir les risques de rembourser au-dessus de ce qui est dû aux maîtres des communautés actuelles, que de rembourser au-dessous : que s'il fallait qu'il y eût une perte légère, c'était à l'Etat à la supporter, et que le particulier ne devait jamais être lésé; que, dans l'incertitude d'une mesure précise, l'Etat ne pouvait pas engager avec le particulier une guerre de parcimonie.
Vous êtes sans doute frappés de la simplicité de ce plan ; il est une suite de vos principes ; tout est respecté dans ce système, la propriété du citoyen et, surtout, la liberté, la dignité de l'homme ; il suit une marche uniforme dans ses proportions graduelles ; à une multitude de petits privilèges exclusifs qui se croisent et multiplient sans cesse les contestations et les procès, et qui entraînent une stagnation considérable de capitaux, à des droits destructeurs de toute industrie, aussi inconséquents que tyranniques, succédera une liberté générale sous un droit modéré et payé à des époques annuelles et qui seront à la commodité des contribuables.
Le despotisme, qui courbe et flétrit les talents, les fatigue par l'oppression ou par les entraves ;
la liberté, qui les élève et les alimente, ne veut que surveillance, franchise, égalité.
PROJET DE DÉCRET
Pour l'établissement d'un droit de patente, en remplacement des jurandes et maîtrises et d'une patie des droits sur les boissons, proposé par le comité de Vimposition.
Art. 1er (1) : A compter du l,r avril
prochain, les droits perçus sur les boissons, à la vente en détail; ceux
connus sous le nom d'impôts et billots, et devoirs de Bretagne ;
d'équivalents du Languedoc, d Masphaneng en Alsace, le privilège de la
vente exclusive des boissons dans les ci-devant provinces de Flandre,
Artois, Hainaut et Cambrésis ; les inventaires, les droits perçus à
l'enlèvement à la vente et revente en gros, à la circulation ; le droit
de fabrication sur les cartes à jouer; celui des papiers et cartons à
l'entrée des lieux y sujets, et autres droits de même nature, sous
quelque dénomination que ce soit ou puisse être, sont abolis.
Sont exceptés de la présente disposition les droits d'entrée dans les villes, qui continueront d'être acquittés provisoirement, comme par le passé, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur leur nouveau mode de perception ou sur leur remplacement.
Art. 2. A compter de la même époque, les offices de perruquiers, barbiers-étuvistes, les droits de réception de maîtrises et jurandes, ceux du collège de pharmacie et tous privilèges de profession, sous quelque dénomination que ce soit, sont également supprimés.
Art. 3. Les titulaires des offices de perruquiers, barbiers-étuvistes, remettront au commissaire chargé de la liquidation de la dette publique, les provisions de leurs offices, pour être procédé à leur liquidation, laquelle sera faite sur le prix de l'évaluation, à raison du centième denier.
Art. 4. Les particuliers qui ont obtenu des maîtrises et jurandes, ceux qui exercent des professions en vertu de privilèges ou brevets, remettront pareillement au commissaire, chargé de la liquidation de la dette publique, leurs quittances de réception, pour être procédé à la liquidation des indemnités qui leur seront dues; lesquelles indemnités seront réglées sur le pied des fixations de l'édit du mois d'août 1776, et autres subséquents, et à raison des sommes versées au Trésor public sous les déductions ri-après déterminées.
Ceux qui ont obtenu des maîtrises au concours, ou qui les ont gagnées pour prix de leurs talents ou services, conformément aux usages établis, seront traités, pour lesdites indemnités, à l'instar de ceux qui ont payé leurs maîtrises ou jurandes, en justifiant par eux du titre qui leur accorde le droit d'exercer leur profession.
Art. 5. Les citoyens reçus dans les maitriseset jurandes, depuis le 1er avril 1790, seront remboursés de la totalité des sommes versées au Trésor public.
A l'égard de ceux dont la réception est antérieure à l'époque du 1er avril 1790, il leur sera fait déduction d'un trentième par année de jouis-
(1) Nota. Le comité de l'imposition propose l'ajournement de cet article jusqu'à ce que l'Assemblée nationale ait décrété les autres articles et réglé les droits d'entrée dans les villes.
sance. Cette déduction, néanmoins, ne pourra s'étendre au delà des deux tiers du prix total; et ceux qui jouissent depuis 20 ans, et plus, recevront le tiers des sommes fixées par l'édit d'août 1776, et autres subséquents.
Les remboursements ci-dessus énoncés seront faits par la caisse de l'extraordinaire.
Ar|. 6. Les syndics des corps et communautés d'artisans et marchands seront tenus de fournir leurs comptes de gestion aux municipalités, lesquelles les vérifieront et formeront l'état général aqs dettes actives et passives de chaque communauté : ledit état sera envoyé aux directoires (Je districts et départements, qui, après vérification, le ferpnt passer au commissaire du roi chargé de la liquidation de la dette publique.
Art. 7. Les fonds existant dans les caisses des différentes corporations seront versés dans la caisse de l'extraordinaire : les propriétés, soit mobilières, soit immobilières desdites communautés, seront vendues dans la forme prescrite pour 1 aliénation t(es biens nationaux, et le produit desdites ventes sera pareillement versé dans la caisse de l'extraordinaire.
Art. 8. A compter c(u 1er avril prochain, il sera libre à tout citpyen de faire tel commerce, ou d'exercer telle profession, art OÙ métier qu'il trouvera bop, ajRrès s'être pourvu d'une patente et-ep avoir acquitté |é prix, suivant les taux ci-après déterminés.
Art. 9. Tout particulier qui voudra se pourvoir d'une patente, en fera, dans le mojs de décembre de chaque année, à la municipalité du ressort de son domicile, sa déclaration, laquelle sera inscrite sur un registre à souche. Il lui en sera délivré un certificat, qui contiendra son nom et la valeur locative de son habitation : il se présentera ensuite chez le receveur de la contribution mobilière, auquel il payera le prix de la patente, suivant le tan^ ci-après fixé; ce receveur lui eq délivrera quittance au dos 4u certificat; et sur la représentation du certificat et de la quittance, qui sefont déposés et enregistrés aux archives du district, jljui sera délivré, au secrétariat du directoire, la patente pour l'année suivante.
Les déclarations, certificats, quittances et pa-te ; tes seront sur papier timbré et conformes aux modèles annexés au présent décret.
Art. 10. Ceux qui voudront faire le commerce ou exercer une profession, art et métier quelconque pendant la présente année, seront tenqs de se présenter à leurs municipalités avant le 1er avril prochain, et de remplir les formalités prescrites par les articles précédents.
La jouissance des patentes qui .leur seront délivrées commencera au 1er avril prochain, et les prix en seronf fixés au$ trois quarts des patentes qui, dans la suite, seront accordées pour une année.
Art. 11. Les particuliers qui, dans le cqqrant d'une année, désireront se pourvoir de patentés, en auront la (acuité, en remplissant les formalités prescrites par l'article 9 et en acquittant le droit pour le restant de l'année, à compter du premier jour du quartier dans lequel ils anronî démand^ les patentes.
Art. 12. Le prix ejes patentes, annuelles pour tous les commerces, arts, métiers et professions, est fixé, sous les exceptions ci-après, à raison du prix du loyer, ou de la valeur locative dé l'habitation de ceux qui les demanderont» et daus les proportions suivantes i 2 sois poiir livré du prix ^ lQyert
400 livres; 2 s. 6 d. pour livre, depuis400 livres jusqu'à 800 livres, ét 3 sols pour livre au-dessus de 800 livres, sans que le prix des patentes puisse excéder 250 jivres.
Art. 13. Les manufacturiers, fabricants, négociants, banquiers, commissionnaires, agents et courtiers de change, marchands, maîtres artisans, maîtres ouvriers, maîtres de jeu de paume ou de billard, gens tenant hôtel et chambres garnies, perruquiers, coiffeurs, loueurs de chevaux et de carrosses, et généralement toutes personnes faisant le commerce ou exerçant une profession, art ou métier quelconque, seront assujettis à se pourvoir de patentes, et ne pourront, à compter du premier avril prochain, continuer leur poni-merceou profession, sans avoir satisfait aux formalités ci-devant prescrites.
Art. 14. Les boulangers, qui n'auront pas d'autre commerce ou profession, ne payeront que la moitié du prix des patentes, réglé par l'article 12 du présent décret.
Art. 15. Les médecins, chirurgiens, accoucheurs etsages-femmes ne seront point assujettis à se pourvoir de patentes; mais se conformeront aux règles qui pourront être prescrites pour l'exercice de.ieur profession.
Art. 16. Les marchands et marchandes, revendeurs et revendeuses, vendant dans les rues, halles pt marchés publics, ne seront point tenus de se pourvoir de patentes, pourvu qu'ils n'aient ni boutiques, ni échoppes et qu'ifs ne fassent aucun autre commerce, à la charge par eux de se conformer aux règlements de police.
Art. 17. Les particuliers qui voqdropt réunir à leur commercé, métier ou profession, la faculté d'exercer les professions de marchands de vin, brasseurs, limonadiers, distillateurs, vinaigriers, marchands de bière et de cidre, apbergistes, hôteliers donnant à boire et à manger, traiteurs, restaurateurs, ceux même GUi n'exerceraient que
les professions ci-dessus-dépomm^es? acquitteront le prix des patentes sur lé pied ci-après; savoir : 3 sous pour livre du prix du loyer jusqu'à 400 livres; 3 s« 9 d, depuis 400 livres jusqu'à 800 livres; et 4 s. 6 d. au-dessus de 800 livres ; mais le prix de ces patentes ne pourra pas excéder le taux de 300 livres quelque soit le prix de leur loyer ou de la valeur locative de leur habitation, ni être moindre de 15 livres pour'les auberges et cabarets de campagnes, dont le prix du loyer serait au-dessous de 100 livres.
Art. 18. Il sera délivré des patentes à termes, pour un, deux ou trois mois, à ceux qui voudront vendre du yin en détail daPS les bourgs et campagnes pendant un temps limité. Le prix desdites patentes sera de 3 livres par mois : elles ne seront délivrées qu'après les formalités presr crites, et que le prix en aura été acquitté entre les mains du préposé au recouvrement des contributions mobilière et d'habitation; mais ces patentes ne pourront être accordées pour plus de six mois dans le cours de l'année; au delà de ce terme, elles seront réputées patentes annuelles, et seront payées comme telles.
Art. 19. Les particuliers qui exerceront la profession de colporteur dans les villes, campagnes, foires ou marchés, seront tenus de se pourvoir de patentes, après avoir rempli les formalités prescrites. Le prix en sera fixé suivant les proportions de l'article 12; inais il ne pourra être au-de.-sous de 1Q livres pour les marchands portant la balle, et de 50 livres popr ceux qui emploieront à leur commerce un cbpval pu autre bête de somme, pu une voiture* quand m.^me ie
prix de loyer de leur domicile établirait une proportion inférieure, VesdHs cqlporteurs et marchands forains seront tenus, lorsqu'ils en seront reqqis, de justif^r dç leur domicile, et de leur taxe mobilière èV d habitation, même de représenter leurs patates aux qfticiers municipaux des lieux où ils exerceront leur commerce.
Art. 20. Il y aura des patentes particulières pour ceux qui voudront exercer la profession d'apothicaire; elles ne leur seront délivrées qu'a-* près qu'ils auront rempli les formalités prescrites pouf l'exercice de cette profession.
A^t. 21, Ceux qui voudront réunir à leur eom-mérpeles professions d orfèvres, tireurs, batteurs, écaclieurs d'cir et d'argent, bijoutiers, émailleurs, pailionneurs, lapidaires et autres qui emploient les matières d'or et d'argent, recevront égale» ment des patentés particulières, à la charge de pe conformer aux lois pt règlements sur l'exer-ciçe çlp cps professions.
Ar(, 22, Ij sera alloué deqx sous pour livre sur le nrj$ de chaque patente a" profil (Je |a caisse de fô ppmmuqe, ^quelje rétribution sera aft'ep, tpe jflsqu'^ due conpurreqcè à i'ftpquit dé ses dépenses pârtiGulièresT Les officiers municipaux tipnqrpqt |a main à ce qu'aucqn particulier ne s'immisce dans l'exercice des professions assujetties à des patentes par le present décret, sans avoir rempli les formalités cj-çjevant prescrites, et sans ayoir acquitté je droit-.
Art- 23, To^ particulier et colporteur» qui fer i le commerce, ou exercera une profession, art ou métier quelconque, sans avoir rempli le$ formalités prescrites par les articles prépedents et s'être pourvu d'une patente, serç condamné en une amende du quadruple du prix fixé pqur la patente dont il ferait dû se pourvoir, Lesdites amendes sprqnt payées en^e îei mains dù Receveur de la contribqtipn mobilière, lequel en versera moitié dans la caisse de la commune pour être appliquée à ses dépensés personne!tes, et gp chargera en récette de l'autre {po.itiè,. pour en compter aq Trésor public.
Art. 24. L'Assemblée nationale se réserve de statuer sur les formes dans lesquelles seront constatées les contraventions au présent décret, et sur celles dans lesquelles elles seront jugées et poursuivies.
Fait au comité des oontributiqnç publiques, le 14 février 1791.'
Signé : d'Allardb, la Rochefoucauld, De-fermon, Dauchy, Duport et Rcederer.
Les ministres de Henri III ont fait dire à ce prince, dans un édit, que Je droit de travailler était up droit régalien. Je suis tenté de ôioiré crue le cpmité est d'accord avec ces ministres; et cependant il vient de vous dire que la faculté de travailler était un des droits de l'homme les plus essentiels et les plus sacrés. Je ne çofpprénds pas Gomment, d'après cela, il vient vous propgser de taxer la faculté de travailler.
Par la contribution mobilière, l'industrie et les facultés mobilières sont atteintes ; l'imposition nouvelle que vous propose le comité ne tendrait rien moins qu'à ramener ces temps barbares où l'on s'enorgueillissait d'être oisif, où l'on se faisait gloire de vivre sans rien faire, ce qu'on appelait vivre noblement.
S'il y a des patentes à rétablir, c'est sur ceux qui ne travaillent pas, sur ceux qui sont oisifs. (Rires). Je demande donc la question "préalable sur le projet du comité.
Je vois dans un article de votre décret que vqps établissez un droit de patente à raison du IqyeF, d^ sp.rte, Messieurs, qq qn charpentier payera beaupcmp pfqs l§ patpfltç qu'on bijoutier ; et cependant il est évident que l'un fera beaucoup plus bénéfices que l'autre. Je Vftis qu'ug rèvep^^r êV mar-
chés des campagnes payera, tandis que cg\\ii des villes qft payera pas.
Il faut ftqssi classer les patentes et favoriser les états }es plus utiles; la base du comité n'est donc pas juste sous pe rapport.
Siur la question préalable qui a éfé proposée M, Bégûuen, i'qt)^érYe 4 l'Assemblée qu'il faut qu elle se méfie qn peu 'de tqutes ces idées philosophiques, de toutes ces idées mortes que l'on vieqt sans cesse pops présenter sur tpus les' ipipÔts; jl gérait facile pe prouver qu'ils renferment terçis quelque ^mgralité sous certains rapports. On ^rrjverait ainsf successivement à né plus pouvoir rien imposer ; naais ce n'est pas de quoi il s'agit, ç^ il faut des impôts pour soutenir la phpse publique.
M. Bégouen nous a dit que c'était imposer le travail : on lui a répondu, auprès qe tribune, tout ce qu'il y a à lui répondre: Qp lui a dit sur-le-champ aveq graq^e raison que demander 1$ cinquième aux laboureurs, c'était aussi imposer le travail des laboureurs; qu'ainsi, si on ne voulait pas taxer le travail, il qp fijuqrait pas taxéç ; celui du iabouppqr.
Je demande donc, Monsieur le Présic|eqt, que, sans s'arrêter à la question préalable ipyoquée par M. Bégouen..i * &
Plusieurs membres : Elle n'ppt pas appuyée.
, vops mettiez aux voix non pas le projet de décret du comité, mais la question dé savoir s'il y aura ou non des droits de patente. Gela décrété, nous pourrons renvoyer à déuiain la discussion sur les articles de détail,.
Un grand nombre de membres : Aux yojx !
Je ne m'oppose pas $ |a motion princip.de dp M. d'André ; mais je demandé qu'aussitôt qu'on aura décrété cet objet, ia délibération soit ajournée à un jour plus éloigné que demain. (Murmures.)
Je demande aussi que le comité nous fasse connaître la somme qu'on retirera du droit de patente et l'aperçu de ce que coûtera le remboursement des jurandes et maîtrises-
, Il sera très aisé de satisfaire le préopinant : le comité» d'après ses' calculs, compte sans exagération sur un produit d'environ \2 millions. Quant au remboursement des jurandes, il consiste surtout dans celui des charges des perruquiers qui coûtera 22 millions ou enviroq; le reste est de 15 ou 16 millions. Ainsi le remboursement total ne doit pas s'é|ever à 40 millions.
Je mets aux voix la proposi- tion de M. d'André : Y aura-t-il ou non Un droit de patente?
(L'Assemblée décrète qu'il y aura un droit de patente.) . -
(Lasuitedela discussion est ajournée à demain.)
J'ai l'honneur de faire connaître
à l'Assemblée que, dans le département de l'Indre, sur 350 curés fonctionnaires publics, il n'en est pas vingt qui se soient refusés à prêter le serment. (Applaudissements.)
donne lecture d'une lettre du maire de Paris, en date du 14 février, qui fait part de trois adjudications de biens nationaux; la première, d'une maison rue Saint-Dominique, fauDOurg Saint-Germain, estimée 29,415 livres, adjugée 38,300 livres; la deuxième, d'une partie de terrain de 168 toises, rue de Buffon, louée 280 livres, estimée 3,910 livres, adjugée 10,300 livres; la troisième, d'une maison enclos Saint-Martin, louée 400 livres, estimée 5,680 livres, adjugée 10,300 livres.
Plusieurs membres du comité d'aliénation proposent, et l'Assemblée décrète les ventes suivantes au profit des municipalités ci-après, savoir :
Département d'Indre-et-Loire, municipalité de Channay, district de Langeais, pour la somme de............... 30,005 1. 2 s. 5 d.
Département du Loiret, municipalité de Beaugency, district du
même lieu........... 171,956 4 2
Même département, muuicipalité de Saint-Martin-sur-Oncre, district de Gien...........9,366 10 »
Municipalité de
Saint-Marc........... 6,719 » »
Municipalité de Groi-
sille................. 27,827 5
Municipalité de Vendôme ............... 22,826 3 9
Municipalité du Mans. 139,345 » » Municipalité de la
ville d'Auxerre....... 142,899
Département de la Seine-Inférieure, district de Cany, municipalité de Rouen:..... 1,876,640 4 8
A la municipalité de Vervins, département
de l'Aisne............ 241,675 » »
A celle dé Sains et Richaumont, même département ........... 115,045 » »
A celle de Gbevregay, même département... 38,115 * >.
A celle de Boissy-le-Sec, département
d'Eure-et-Loir........ 10,929 2
. A celle de Janville,
même département... 400,502 12 »
A celle de Laon, département de l'Aisne. 554,733 12 *
annonce l'ordre du jour de la séance de ce soir et de celle de demain, et lève la séance à deux heures et demie.
PRÉSIDENCE DE M. DUPORT.
Séance du
La séance est ouverte à six heures, et demie du soir.
Un de MM. les secrétaires faitlecture des adresses suivantes :
Adresse de la société des amis de la Constitution établie à Anduze, qui exprime avec énergie les sentiments d'admiration, de reconnaissance et de dévouement, dont elle est pénétrée, pour l'Assemblée nationale : elle fait une pétition d'armes.
Adresse des administrateurs composant le directoire du district de Belley, qui dénoncent un écrit antipatriotique répandu dans ce district et dans tout le diocèse dé Genève, à la pariie de France, intitulé Lettre pastorale de Monseigneur Vévêque et prince de Genève. Ils apprennent que, malgré les déclarations qui terminent cette lettre, le plus grand nombre des fonctionnaires publics de leur arrondissement a déjà prêté le serment sans réclamation.
Adresse de la société des amis de la Constitution, établie à Vezelise, qui annonce que le curé de la communauté de Marthemont a fait le sacrifice d'une somme de 500 livres qui lui est due par l'Etat, en faveur des habitants de sa paroisse, en arrière à la subvention de 1789, d'une somme de 277 livres.
Adresse de la société des amis de la Constitution, séante à Mont-de-Marsan, aux citoyens du dépàrtemént des Landes, pour leur faire sentir l'excellence et la sublimité de la constitution civile du clergé.
Adresse de la société des amis de la Constitution, séante à Nantes, qui expose que le seul moyen d'assurer le calme intérieur, et de déjouer les ennemis de la nation, est de casser par un décret toute l'armée de ligne, de la recréer aussitôt après le plan d'organisation militaire par l'Assemblée.
Adresse des amis de la Constitution de Lisieux, qui font des observations sur l'organisation mili-litaire.
Adresse de M. Brie-Serrant, qui fait hommage à l'Assemblée de plusieurs projets de ports et de canaux, et lui soumet quelques observations relatives au bien public et à la perfection de la Constitution.
Adresse de 2,316 citoyens de Lyon, qui demandent l'abolition de toutes les maîtrises, jurandes et corporations qui eutravent l'industrie et l'exercice des arts.
Adresse des officiers municipaux de Bonpère, district de la Châteigneraye ; de Bouillon ville, district de Pont-à-Mousson ; de Sainî-Médard-d'Exci-deuil, département delà Dordogne; de Saint-Jean-du-Gard, district, d'Alais; des villes de Cahuzac, de Vertus, d'Avesnes, de Saint-Pourçain, qui envoient les procès-verbaux du serment civique prêté par les curés et fonctionnaires publics de ces différentes paroisses, au milieu des acclamations et des transports de leurs paroissiens. Ces officiers municipaux se répandent en éloges les
plus flatteurs sur le patriotisme et le zèle éclairé de leurs pasteurs.
Adresses des curés de Longueil-Sainte-Marcel de Plassac, près Blaye, de Savance, département des Basses-Pyrénées ; de Saint-Mars-en-Brie, et de Plancher, près Autun, qui expriment «né admiration respectueuse pour la constitution civile du clergé, et s'empressent d'annoncer à l'Assemblée qu'ils ont prêté le serment civique selon les formes prescrites.
Hommage que fait le sieur d'Artaise-Feucher, citoyen de Paris, des recherches qu'il a faites sur les vrais 'principes et les droits de la société. Ce citoyen se félicite de la part que l'Assemblée nationale a prise à ses malheurs, et de tout ce qu'il a fait lui-même pour la liberté publique. « Je n'ai point attendu, dit-il, que le despotisme fût sans cachot, pour l'attaquer ; dès 1786 j'ai eu le courage de lever le voile derrière lequel des femmes et des valets ne rougissaient pas de se partager audacieusement les dépouilles du peuple. »
Adresse des amis de la Constitution de la ville de Perpignan, qui prient l'Assemblée nationale de vouloir bien fixer un traitement aux prêtres de l'arien Roussillon, dont le revenu ne se porte pas à 1,000 livres. Ils sollicitent pour ces pasteurs, dont la position fâcheuse les affecte, le traitement de 700 livres accordé aux religieux mendiants.
Le curé de Saint-Jean-de-Gardoningue, district d'Olan, département du Gard, et le maire de cette ville, également chers à tous les citoyens du canton, quoique divisés en opinions religieuses, ont donné la douce satisfaction de les voir, dans cette circonstance, oubliant la diversité de leur culie, accourir et se confondre dans l'église pour y jouir de l'auguste cérémonie de la prestation du serment civique. Cette heureuse réunion a ménagé au curé et au maire l'occasion de prononcer deux discours où respirent les sentiments les plus purs de religion, de patriotisme et de tolérance.
L'Assemblée, voulant donner à ces deux fonctionnaires publics quelque marque de sa satisfaction de leur conduite dans cette circonstance, ordonne, l'impression du discours qu'ils ont prononcé l'un et l'autre, et une mention honorable dans le procès-verbal.
J'ai l'honneur d'annoncer à l'Assemblée que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics du district de Sézanne ont satisfait à la loi du 26 décembre dernier, en prêtant le serment civique. (Applaudissements.)
Un membre annonce que les fonctionnaires publics ecclésiastiques, au nombre de cinquante-six, dans le district d'Is-sur-Til, département de la Côte-d'Or, ont prêté le serment civique. (Applaudissements.)
L'ordre du jour est un rapport du comité militaire sur les réclamations des lieutenants-colonels de Varmée.
rapporteur (1). Messieurs, je suis chargé par le comité militaire de vous
taire part des réclamations que les lieutenants-colonels de l'armée ont
adressées à l'Assemblée nationale, sur la disposition
Les lieutenants-colonels de l'armée ont observé, pour ceux actuellement en activité dans ce grade, que les anciennes ordonnances, toutes imparfaites qu'elles étaient, avaient cependant pourvu au sort de cette classe utile d'officiers, et leur offraient un avenir certain et avantageux, en ce qu'antérieurement au 17-mars 1788, les lieu-tenants-colonels parvenaient au grade de maré-[ chai de camp, sans avoir passé par celui de colonel; et que même, depuis le 17 mars 1788, l'époque déterminée pour l'obtention du grade de maréchal de camp, était fixée à vingt années de service effectif dans celui de lieutenant-colonel.
Ils représentent que le décret du 23 septembre, qui établit que les lieutenants-colonels ne seront faits maréchaux de camp que lorsque, après avoir pris rang à la suite ne tous les colonels, ils en seront devenus les plus anciens, est sage pour l'aveuir, parce qu'à Taveuir les colonels, parvenus par tous les grades, auront une véritable ancienneté de service et conséquemment un titre de ju4e préférence pour le grade de maréchal de camp; mais ils trouvent ee décret sévère, dans un moment où les colonels n'ont pas encore les titres qu'auront leurs successeurs; dans un moment où, sur la foi des anciennes ordonnances, des lieutenants-colonels n'ont continué à consacrer leur vie à la patrie, avec persévérance, que dans la confiance qu'ils ont dû avoir, que le' grade de colonel, intermédiaire entre celui de maréchal de camp et le leur, ne l'était que pour la subordination militaire et n'olfrait pas uu obstacle à leur avancement; que dans la confiance enfin qu'ils ont dû avoir que, dans un temps donué, ils obtiendraient le titre d'officier général : espoir avec lequel ils ont vécu et prolongé de longs services; espoir dont ils se trouvent déchus, en appliquant les probabilités de la vie humaine, à la nouvelle carrière que les nouveaux décrets offrent à leur avancement, lis sollicitent donc un décret additionnel qui leur conserve le droit dont ils ont joui jusqu'à présent, et vous proposent, en conséquence :
« Que les lieutenants-colonels au service à l'é-« poque du décret uu 23 septembre dernier puis-« sent prendre le rang de leur brevet de lieute-« nant-colonel parmi les colonels, pour être farts « maréchaux de camp, en comptant deux années « de major pour une de lieutenant-colonel. »
Tel est le précis des réclamations des lieutenants-colonels de l'armée, et des motifs sur lesquels ils les fondent.
Voici maintenant, Messieurs, les réflexions de votre comité sur cet objet digne de votre attention, puisqu'il touche une classe précieuse d'officiers, qui a le double avant ge d'être composée d'hommes à la fois vieux militaires et promus par leur mérite et qui, par conséquent offrent à votre intérêt le double titre de l'ancienneté et du talent.
Votre comité militaire a reconnu d'abord que sur le principe qui a servi de base à votre décret sur l'avancement, il n'était pussible de rien objecter; car il ne peut pas être mis en doute si la hiérarchie militaire sera suivie de grade en grade. Une mesure qui favorise les talents et qui mette à même d'arriver au grade supérieur, avant que
l'on y soit porté par Bon tojur numérique, d'ânéiën. neté, est la seule modification qu'il ait été posëible (Le mettre aux titres de 1 ancienneté. Cette Césure utile voua a été proposée et a été adoptée par vous ; mais jà.maig vous n'auriez pu admettre ces erreurs de l'ancien régime, qui ne subordonnait à aucun système la distribution des faveurs; jamais vous n'auriez pu admettre que même les places réservées au choix du roi, C'est-à-dire celles 'destinées au mérite ne fussent pas soumises à l'épreuve successive de tous leé . grades; jamais .donc vous p auriez pu admettre cette possibilité de parvenir du grade dë câpî-taine à celui de colonel, de celui de major ën second à celai de.colonel, de celui d.e liëuténânt-coionel à celui de maréchal de camp, Il fallait donc établir que les lieutenanis-colonels arriveraient, soit par l'ancienneté, soit par le choix, au grade d'ofticier général, après ayoir passé par celui de colonel.
Le principe hiérarchique devait être reconnu et adopté dans toutes ses conséquences : MM. les lieutenants-colonels de l'armée en reconnaissent eux-mêmes la sagesse, et en approuvent l'application pour l'avenir, même d,ans les dispositions qui les concernent ; mais le comité militaire* a sou four^ est forcé de cônyënir que le nouveau mode d'avancement, avantageux à toutes les classes,que la faveûr n'atteignait pas, avantageux aux officiers qui, par la suite, deviendront lieutenants-rci'ionels et même à ceux qui le sont depuis peu de temps, est cependant nuisible à ceux qui, depuis longtemps, exercent les fonctions de ce grade, et particulièrement funëste à ceux qui étaient sur le point d'obtenir le grade de maréehal de camp.
Cette faveur des 20 années, qui rendaient les lieutenants-colonels maréchaux de camp, était un dédommagement qu'on avait trouvé propre à réparer l'injustice qu'on leur faisait» en les soumettant au commandement $ee jeunes chefs. On voulait que les lieutenants-colonels pussent espérer quelque chosie après jeur place ; et Ç pen -dant on ae leur voulait pas donner des régiments, parce que c'eût été priver des places de faveur, et, pour tout concilier, on réparait une injustice par un vice de plus.
Quand vous avez élevé la nouvelle constitution militaire sur des principes qui mettent tous les droits sur la même ligne, vous youe êtes vus 1 forcés d'abolir tout ce qui ppuvjaijt dispenser un officier, d'un grade quelconque, de ne pas passer par le grade qui le précédait immédiatement ; ainsi vous vous êtes vus forcés, en détruii-ant les règlements injustes» d'éloigher de même ceux qui* par d'autres irrégularités^ en avaient înodiqé ou réparé lies inconvénients ; ainsi vous avez, ën rendant aux iieuienants-colonels le droit d'avéir tous des régiments, en empêchant que des jeunes gens d'un grade inférieur les objUnssept à leur détriment^ vous ayez iiû empêcher aussi que des i lieutenants-colonels obtinssent des placés de ma-réchaux de Camp, employés dans la ligne,aù détriment des colonels»
Cependant, Meësieurs, si votre comité n'a pas cru que les lieutenants-colonels dussent concourir avec h s colonels pour être faits maréchaux dè canapi il n'a pas pu s'empêcher de vous soumettre la position de ceux des lieutenants-colonels qui, par leur ancienneté^ étaient près d'atteindre le titre d'officier général, et qui, par les décrets rendus, se trouvent maintenant obligés de percer toute la colonne des ^colonels. Votre comité a réfléchi sur cette position et a cherché, dans des
dispositions générales, uh moyeu de tenir, en quelque façon, l'engagement pris par le gouvernement, dë faire parvenir; les liéUtenânts-colonéls âd grade d'bfficiër géhéi-al, à Uttë époque déter-minéë; ëngagemeuf sur la foi duquel les lieute-hauts-cùlonelé avaiënt pu së résoudre à prolonger là durée dë leUfê ëei'Vicës \ engagement dont les Colonels peuvent aussi réclamer la foi, puisque la même ordonnance les faisâitv de tirôlt, maréchaux de camp, quand ils avaient 16 àns de colonel réVblUs.
Votrë comité à observé, dattë la Éëbherche de cés mesurés, qUe s'il était fait droit aux réclamations dés lîêUiehànts-çoIbrielB, en âCcjuièsÇant à leur demande tellë tjU ellë est fbrin'éë} ée êerait réparet- leuif mal. eh faisant Une injustice aux colonels : Cë êërâU fairë quë les lieutenants-colonels béhefifciéfaient, tout à la fois-, de l'ancien régime ët dd iioUVfeâU ; cë serait ajouter aux avantages dé justice, accordés p£ r leé déCretB;, une faveur rëtl-bactivé, pïbfe grande tjue ïe dédommagement porté dans l'ordonnance de 1788; ce serait en outre donner iieU à beaucoup d'autrës réclamations ; caï daëéiërià capitaines feraient revivre d'âflciehtiës oMbddàncés, qui* après dix anlaéës de Capitaine, faisaient Compter deux années pôui* une d'ofticier ëupét*ieur.
Des majors ëusëcond objecteraient que l'ancien régime leur était plus fâvdrable et demanderaient des régiments avant les lieutenants-colonels. Une foule ae contestations viendraient s'établir entre vos décrets et la prompte application des principes d'avancement dont ton a reconnu la justice et la sagessë.
11 faut donc unë disposition générale qui soit cbnimune âux coldnëls ët aux llëUtettants-colo-nels ; il faut qu'ellé soit cohSidéréë comme mesure tendant à respecter la fbi d'uheordônnânce ancienne, en vertu dé laquelle lës celonels et liëutèhants-colonels ont pu prolonger leur service ; il faut que cettë disposition ne blésse nas les pHncinès qui ont établi la nouvelle hiérarchie militaire, ni CëttX qui bttt Péglé la manière de fournir cette nouvelle carrière^ il ne faut même pas qu'elle en retarde l'application. CëuX de Ces officiera c|Ui préféreraient se retirer ert cé mbment' avec lé gradë de maréchal dé ëàmp,à l'a>surance d'être ëmployésdans ce gradé, d'apïêé lèâ fêgles fixées pàr ië décret du 21 septembre dernier, seront donc nécessairement hors de ligne. Si vous accordez ce choix à ces officiers, c'est-à-dire au*, colonels ayant au moins 10 ans de colonel, aux lietttenants-colo-nels ayant au moins 12 ans de lieUiènanfc-colonel, vous conieryez dans la même proportion là différence qué l'ordbnnànèe de avâit fixée entre ces deux grades, pour les époques de leur admission au grade de maréchal de camp; vous n'augmentiez point le nombre des officiers généraux employés ; vous laissez une porte ouverte à ceux que leur âge ou le changement de régime militaire a pu faire désirer de së retirer; voUs offrez un dédommagement purement honorifique, et vous n'ajouterez rien aux dépensés de l'armée* puisque chacun des colonels ou lieutenants-colo-* nels ne recevra que la retraite dont il est susceptible. ÊUivaht le décret du 3 août dernier^ sans égara au grade de maréchal de càmp»
L'expoée des réclamations qui font l'objet de ce rapport, leé réflexions auxquelles elles ont donné lieu, ont déterminé votre comité militaire à vous soumettre ce projet de décret.
PROJET DE DÉCRET.
Art. 1er. Les colonels en activité effective,
de toutes les armes, qui ont dix années de service dans ce grade et qui,
renonçant à l'activité, préféreraient se retirer en ce moment avec, le
grade de maréchal de camp, à l'assurance d'être employés dans ce grâdë,
ainsi qu'il est accordé aux officiers qui y parviendront, d'après les
règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, sur l'avancement
militaire, obtiendront, en retraite, le grade de maréchal de camp.
Art. 2. Les lieutenants-colonels en activité effective, de toutes les armes, qui ont 12 années de service dans ce grade et qui, renonçant à l'activité, préféreraient se retirer, en ce moment, avec le grade de maréchal dé camp, à l'assurance d'être employés dans ee grade, ainsi qu'il est accordé aux officiers qui y parviendront d'après les règles fixées, par le décret du 21 septembre dernier, sur l'avancement militaire, obtiendront, en retraite, le grade de maréchal de camp.
Art. 3. Ces officiers recevront la retraite dont ils sont susceptibles par leurs années de servicé; suivaut le décret du 3 août dernier, sans égard, au grade de maréchal de camp.
Art. 4. Lés colonels qui auront été majors où lieutenants-colonels compteront dtùx années de major pour une de lieutenant-colonel, et celles de lieutenant-colonel Comme colonel.
Art. 5. Les lieutenants-colonels, qui auront été majors, compteront deux années pour une de lieutenant-colonel.
Art; 6. Les colonels et lieutehaûts-colohels, qiii voudront profiter des dispositions du présent décret, auront deux mois, à compter de la publication, pour en former la demande; son effet ne pouvant avoir lieu que poUr cette fois seulement, et ne pouvant s'étendre au delà du terme fixé ci-dessus.
Ceux desdils officiers qui conserveront leur activité dans les grades de colotiels ét de liètlte-nants-colénelé saivrôht leur avancement aux grades supérieurs, d'après les règles fixées pat le décret dû 21 septembre dèrhier, qui abroge toutes 4es ordonnancés précédemment renduës sur l'avancement militaire.
(La discussion est ouverte sur le projet de décret.)
Je propose de substituer au projet de décret du comité la disposition suivante pour laquelle je demande la priorité :
« Les lieutenants-colonels prendront râng de leur brevet de lieutenant-colonel parmi les colonels, pour être faits maréchaux de camp, en comptant deux années de major pour une de lieutenant-colonel. »
Messieurs, j'étais lieuténant-colonel, par mon rang, à l'âge de 26 ans ; consé-quemment, je sais ce que c'est qu'bn lieutenant-colonel, c'est l'âme duh Corps. Dans lé temps où je l'étais, c'était l'ancienneté qui donnait ce grade ; actuellement, beaucoup Pont été de faveur ; mais j'ose dire que lé choix était éXcellent ; cela n'empêche pas qu'ils n'ont pas traversé tout le cprps pour être lieutenants-colonels.
La nation, en adoptant dans ce moment-ci ie décret qui lui est proposé, se charge de retraites pour favoriser ce corps-là. Si vous adoptez ce que vient de dire le préopinant, vous allez vous
jeter dâns un embarras qui ne finira pas. Les majors en second reviendront, les capitaines reviendront, et vous ne finirez point Cette hiérarchie-là. J'adopte le projet dû Comité. (Applaudissements.)
(L'Assemblée, consultée, accordé là priorité ail projet du comité.)
tjri membre deniande par amendemént à l'article i" que « les lieutenants-colonels, qui seront « nommes colonels, prendront rang parmi ces « derniers, conformément aux ordonnances qui « fixaient l'époque à laquelle ils devaient parti venir au grade de maréchal de camp cohcur-« remment avec les colonels ».
Ùn membre propose par amendement au même article que « les lieutenants-colonels, aeiuellê-« ment servant dans ce grade» rouleront avec les « cojonels pour devenir maréchaux de camp ; « mais ils perdront six années de leur grade de « lieutenants-colonels *y
(Ces deux amendements sont rejetés par la question préalable.)
Il nous a échappé une observation et à moi-m,ême qui ai contribué à ce décret. L^article 6 dit :
« Ceux desdits officiers qui conserveront leur activité dans.les grades.de colonels et de lieutenants-Colonels suivront leur avancement aux grades supérieurs, d'après les ïègles fixées par le décret du 21 septembre dernier, qui abroge toutes les ordonnances précédemment rendues sur ^avancement militaire,. » ,
Or» il est des lieutenants-colonels qui, d'après l'ordonnance dernière, prépaient rang dans la colonne des colonels^ de la date de leur commission de lieutenants-colonels.
Il faut donc ajouter à l'article ces mois.»
« Et néanmoins }e$ colonels actuels en activité effective, qui out été lieutenànls-colo.iels5 conserveront, dans la colonne des colonels, le rang qu'ils tiennent en vertu de?' ordonnances qui existaient lorsqu'ils ont été promus à ce grade,. »
(Cet amendement est décrété.)
Je suis très fâché què le corps très respectable des lieutenants-colonels soit soutenu de cette manière dans l'Assemblée. Si les décrets que vous avez rendus sur l'avancement militaire ont rendu la fortune d'un grand nombre d'individus, surtout de ceux qui ne sont parvenus que par la faveur» les colonels attachés avaient par les ordonnances le droit de parvenir à tous les régiments,.
Qu'a proposé le comité militaire? Que sur 3 régiments, 2 seraient donnés at^x lieutenants-colonels et 1 seulement aux colonels attachés. Ain-i on a frappé sur tous ceux qui avaient ontenu des faveurs et des grâces de l'ancien régime5 on a traité les lieutenants-colonels avec une très grande faveur; presque les deux tiers des régiments leur appartiennent; leurs appointements ont été augmentés; on veut qu'ilâ participent aux bienfaits du nouveau régime et qu'ils conservent les avantages de l'ancien.
Mais les capitaines servaient l'État comme les lïéutenants-colonels ; mais les sous-lieutenants servent l'Etat, les sous-officiers servent l'Etat, tout comme les colonels, et cependant ils n'obtiennent rien. Eh bien, si l'on veut détruire tous les états de l'ancien régime, si l'on veut que les
lois aient un effet entièrement rétroactif, que l'on fasse monter lous les officiers à toutes les places, que l'on ne combatte pas seulement pour les lieutenants-colonels, que l'on détruise la hiérarchie militaire, que l'on détruise l'armée tout entière. (Vifs applaudissements.)
Je demande à M. le rapporteur si, par ce mot générique : de toutes les armes, il a entendu comprendre non seulement les lieutenants-colonels en activité actuellement, mais ceux à qui, par des ordonnances de réforme précédemment rendues, l'activité avait été conservée.
rapporteur. Le lieutenant-colonel en activité dans les régiments de l'armée.
C'est d'après ces observations que je crois qu'il est de la sagesse de l'Assemblée nationale de ne pas perdre de vue qu'il y a un nombre d'individus qui se trouvent réformés, tels que les officiers de gendarmerie. (Murmures.) !J
J'avoue que je suis étonné qu'il s'élève des réclamations sur ce point-là. Je réclame aussi pour les ci-devant officiers aux gardes françaises qui sont encore en activité de service (Murmures); ils ne sont point encore remboursés de leur charge, leurs appointements n'ont point cessé de courir qu'au 1er janvier dernier.
Je demande s'il est de votre justice que ces officiers qui ont 30 ou 40 ans de services, soit mis dehors, du moment que vous décrétez un principe général, qui admet les lieutenants-colonels et les colonels à devenir officiers généraux.
Je demande donc que l'on généralise le décret.
(L'amendement est rejeté.)
A l'article 6, les mots : auront 2 mois, à compter de la publication du présent décret , sont trop vagues (Murmures) ; il faudrait mettre : à compter de la publication, dans les corps dans lesquels ils servent.
rapporteur. J'adopte l'amendement.
Le projet de décret est adopté dans les termes suivants :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité militaire, décrète ce qui suit :
Art. ler.
« Les colonels de toutes les armes qui ont dix années de service dans ce grade, et qui, renonçant à l'activité, préféreraient se retirer en ce moment avec le grade de maréchal de camp, à l'assurance d'être employés dans ce grade * ainsi qu'il est accordé aux officiers qui y parviendraient, d'après les règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, sur l'avancement militaire, obtiendront en retraite le grade de maréchal de camp.
Art. 2.
« Les lieutenants-colonels de toutes les armes en activité effective, qui ont douze années de service dans ce grade et qui, renonçant à l'activité, préféreraient se retirer en ce moment avec le grade de maréchal de camp, à l'assurance d'être employés dans ce grade, ainsi qu'il est accordé aux officiers qui y parviendront, d'après
les règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, sur les avancements militaires, obtiendront en retraite le grade de maréchal de camp.
Art. 3.
« Ces officiers recevront la retraite dont ils sont susceptibles pour leurs années de service, suivant le décret du 3 août dernier, sans égard au grade de maréchal de camp.
Art. 4.
« Les colonels, qui auront été majors ou lieutenants-colonels, compteront deux années de majors pour une de lieutenant-colonel, et celles de lieutenant-colonel, comme colonel.
Art. 5.
« Les lieutenants-colonels, qui auront été majors, compteront deux années pour une de lieutenant-colonel.
Art. 6.
« Les colonels et lieutenants-colonels qui voudront profiter des dispositions du présent décret, auront deux mois, à compter de la publication dans les corps dans lesquels ils servent, pour en former la dèmande, son effet ne pouvant avoir lieu que pour cette fois seulement et ne pourra s'étendre au delà du terme fixé ci-dessus.
« Ceux desdits officiers qui conservent leur activité dans les grades de colonels et de lieutenants-colonels suivront leur avancement aux grades supérieur, d'après les règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, qui abroge toutes les ordonnances précédemment rendues sur l'avancement militaire; et néanmoins les colonels actuels en activité effective, qui ont été lieutenants-colonels, conserveront dans la colon ne des colonels le rang qu'ils tiennent, ea vertu des ordonnances qui existaient lorsqu'ils ont été promus à ce grade. »
Un membre propose un article additionnel dont l'objet est de décréter « que les lieutenants de grenadiers qui ne parvenaient point au grade de capitaine, obtiennent, après trente-deux ans de service en total, dont 20 d'officiers, la retraite de capitainé, et que la même justice soit rendue aux lieutenants de cavalerie pendant l'espace de cinq années. »
(Cet article additionnel est renvoyé au comité militaire, qui est chargé de présenter incessamment ses vues sur cet objet.)
L'ordre du jour est un rapport du comité militaire sur les invalides.
rapporteur, donne lecture de son rapport et du projet de décret du comité (i).
Messieurs, je crois devoir faire observer à l'Assemblée qu'indépendamment de la discussion des articles qui viennent de vous être proposés, il y a une question première et générale dont l'Assemblée doit s'occuper. Ce que j'ai à combattre, c'est la suppression des invalides, c'est le système général de tout le plan du comité.
J'avoue, Messieurs, que je profond respect que j'ai pour une cause aussi
importante, qui a été
La discussion doit s'établir sur des calculs arithmétiques,contenus dans le projet et dont l'exactitude ne me paraît pas démontrée; elle sera fort longue. Elle aura pour objet des considérations politiques que je suis loin d'adopter. Les moyens de remplacement que propose le comité sont inadmissibles. Il faudra examiner les combinaisons selon lesquelles on propose, pour plus grande économie, d'établir dans le royaume 83 hôpitaux en en supprimant un seul ; or, je doute que votre sagesse veuille adopter un tel moyen et que la vente de l'hôtel dns Invalides produise seulement un gain de 500,000 livres.
J'ai surtout remarqué,dans le rapport qui vous a été fait, une invitation très adroite que le rapporteur fait à la municipalité d'acquérir l'hôtel des Invalides pour en faire un hôpital. Mais savez-vous comment la ville de Paris fait des acquisitions, comment elle paye, quel est l'état florissant de ses finances depuis 2 ans? J'en mettrai l'état sous vos yeux. Du reste, je rends moi-même hommage à la sage prévoyauce de la ville de Paris qui veut désormais avoir des hôpitaux très grands ; car cette ville en aura besoin...
Voix à gauche ; Pourquoi cela? (Rires.)
Je propose, Messieurs, non pas d'ajourner la discussion d'une manière indéfinie, non pas d'ajourner à l'une des séances du matin, parce qu'elles appartiennent à de plus grands intérêts ; mais je pense que vous devez accorder un délai de 8 jours et indiquer la séance de mardi, eu écartant toute adresse, pour que la discussion puisse s'ouvrir au commencement de la séance et que vous rendiez un décret infiniment plus éclairé.
Pour mon compte, j'ai l'honneur de vous annoncer qu'en abrégeant beaucoup, je parlerai pendant plus d'une heure et demie. (Murmures et rires.)
Un membre : Je demande d'avance la question préalable sur tout ce que dira M. l'abbé Maury.
Lorsque l'hôtel des Invalides fut établi, il y a 120 ans, od fit contre cet établissement toutes les Objections que vient de répéter M. le rapporteur. On y répondit, il y a 120 ans, par des arguments insolubles, car l'établissement se fit.
Pour prouver à la nation française qu'elle n'a pas eu tort de donner un exemple qui a été suivi par toute l'Europe, car vous avez eu cette gloire que votre établissement des Invalides a été adopté par l'Europe entière, il faudra justi fier la nécessité de cet établissement ; il faudra montrer l'inconvénient des remplacements; il faudra montrer les erreurs des calculs; il faudra montrer la barbarie qu'il y aurait à rejeter dans la société les malheureux qu'on paye à tant par mois, comme si un homme qui a un bras de moins, n'avait besoin que de 100 livres de plus, quand il cesse de vivre en commun.
rapporteur. Je ne m'oppose point à l'ajournement ; mais j'observe que,
dans ce moment, l'hôtel des Invalides est dans un état d'insurrection ; les malveillants ont cherché à y exciter des troubles, en y répandant des principes tout contraires à ceux du rapport de votre comité. Je demande que l'ajournement soit fixé à un terme très prochain.
Je demande l'ajournement à jeudi.
J'ai l'honneur de vous observer que la proposition qui vous est faite sur les invalides n\st point une proposition nouvelle, et que M. l'abbé Maury peut fort bien être prêt a parler jeudi. La preuve de ce que j'avance, c'est que, il y a 4 ans, lorsque M. Breteuil proposa de changer l'hôtel des Invalides en un hôpital, M. Bailly, académicien, aujourd'hui maire de Paris, fit un mémoire extrêmement développé; des écrits multipliés furent publiés sur cette matière, et M. l'abbé Maury en a sans doute eu connaissance.
Je vous assure qu'il n'y est pas dit un mot sur les invalides.
A l'époque où M. Saint-Germain fit un plan militaire extrêmement condamnable, même sur les Invalides, il parut de nouveaux écrits extrêmement instructifs sur cet objet.
Quant à ce qu'a dit M. l'abbé Maury, que la ville de Paris aurait bientôt besoin d'un grand nombre d'hôpitaux, je crois que c'est la vérité ; car on ne permettra certainement plus qu'on mette, comme sous l'ancien régime, six ou huit malades dans un même lit, qui devient pour eux celui de la mort. (Vifs applaudissements.)
J'invite le comité militaire à vouloir bien s'occuper d'une disposition qui lui est échappée, relativement aux officiers reçus aux Invalides et qui sont retirés chez eux avec un traitement de 355 livres sur le Trésor royal, mais qui avaient une pension de 1,200 livres sur les Invalides.
(L'Assemblée ajourne à mardi soir la discussion du projet de décret sur les Invalides.)
La séance est levée à neuf heures et demie.
a la séance de l'assemblée nationale dd
Nota. — Nous insérons ci-dessous une déclaration que M. Duval d'Eprémesnil fit distribuer aux membres de l'Assemblée nationale en réponse à certains libelles publiés contre lui.
Déclaration de M. Duval d'Eprémesnil à l'occasion des libelles qui le poursuivent, accompar gnée de quelques réflexions sur la progression des décrets et sur le club monarchique.
(Véritable édition, conforme à l'exemplaire déposé chez M. Dufouleur, notaire, rue Montmartre.)
Je suis naturellement porté à négliger plutôt
qu'à démentir les ridicules bruits qui se répandent quelquefois sur mon compte. Ma conduite soutenue en est la preuve. Provoqué plus d'une fois par des libelles calomnieux je me suis constamment renfermé dans le silence. Mais il est des occasions qu'aime à saisir un homme de bien pour se montrer à découvert.
La chronique de Paris s'est occupée de moi. On m'a forcé en quelque sorte de lire cet article. Elle a dit, et l'on m'assure que les papiers publics les plus distingués par leur extrême politesse et leur impartialité religieuse ont répété à l'envi, que je tenais tous les jours, chez moi, aristocrate effronté, des assemblées nocturnes; que ma maison était l'asile du club monarchique, le foyer des écrits prétendus incendiaires dont la capitale et le royaume sont, dit-on, inondés. On ajoute que ces détails, sont donnés et garantis par un de mes voisins, lequel se plaint que le bruit des carrosses qui se rendent chez moi tous les soirs, troublent, fort avant dans la nuit, son travail et son repos. Tel est en substance l'article publié par la chronique. Ma première observation portera sur l'auteur. On peut être assuré que ce n'est pas un de mes voisins ; le nom qui le termine est inconnu dans mon quartier; je ne .crois pas avoir un seul voisin qui soit hargneux et menteur. Quoi qu'il eu soit, cet article renferme autant d'erreurs ou d'impostures que de lignes.
En effet, je ne tiens pas d'assemblées chez moi. Gomment y tiendrais-je des assemblées nocturnes ? S'il me plaisait d'en tenir, des assemblées, j'en ai le droit, comme tout citoyen, ce serait en plein1 jour : et j'ose me flatter qu'elles seraient composées de manière à ne craindre ni les pam-
Eblets, ni les poignards. Mais, enfin, voici le fait.
'an passé nous recevions nos amis tous les soirs. La Révolution ayant nui à notre fortune, comme à celle de tant d'autres, nous ne pouvons plus les recevoir que deux fois par semaine. L'amitié qui compte ses jours est plus exacte, et notre famille est très nombreuse. Un des gens de mon fils sait jouer du violon : nos enfants nous demandent quelquefois la permission de danser ensemble. Comment s'y refuser? Les parents et les amis font la conversation; car on ne joue pas chez moi. A minuit, je me retire : une heure après/ au plus tard, et ce sont leB longues veillées, tout le monue en fait autant. Voilà mes assemblées nocturnes. Quel temps! quel pays que celui où l'on est réduit à de pareilles explications 1 Dire que nous ne parlons point de l'Assemblée nationale, on ne me croirait pas; dire que nous la bénissons, on me croirait encore moins; je ne le souffrirais pas, l'hypocrisie me fait horreur. Mais que je lance dans le public des écrits incendiaires, ou seulement qui ne soient pas les miens? Jamais I La liberté n'est pas, où ne sont pas la modération et la franchise. Montrons cette franchise. Je voudrais un écrit qui rendit sensible aux hommes de bonne foi la progression des déprets de l'Assemblée* en rapprochant les résultats des principes. La nation, que dis-je? La majorité même y verrait avec surprise comment, le tiers état, en partant du système inouï, mais limité, de la vérification des pouvoirs en commun , s'est qualifié d'abord les communes de France, sans nul égard au sens manifeste de cette expression évidemment in-compaiible avec l'idée d'un seul ordre, ensuite Assemblée nationale ;
Gomment cette Assemblée, après avoir expressément réservé à la réunion éventuelle des trois
ordres le titre ancien et constitutionnel d'Etats généraux, a détruit par le fait et sans délibération ce même titre, du jour que la réunion fut effectuée ;
Comment de ces décrets que la « France est « une monarchie ; que le roi est partie Intégrante « et nécessaire du pouvoir législatif, chef de l'ar-« mée, administrateur suprême, chef du pouvoir « exécutif, ou plutôt le pouvoir lui-même, et que « la justice se rendrait en son nom, » on est parvenu à ceux-ci « que la sanction du roi ne « pourrait qu'être suspendue et non refusée; « qu'il n'aurait pas le droit de déclarer la guerre ; « que les emplois militaires ne seraient pas tous « à sa nomination; que les assemblées adminis-« tratlves n'auraient besoin de son approbatioa, « ni pour l'expédition des affaires particulières, « ni pour l'exécution des délibérations déjà ap-« prouvées; et qù'enfin, tous les juges, depuis « les tribunaux de district jusqn'à la haute cour nationale, seraient indépendants de son au-« torité, » même ses commissaires, qui 6ont inamovibles, tandis que les juges élus ne le sont pas;
La nation verrait encore, comment de ce décret, qules Mens ecclésiastiques sont à sa disposition sans la surveillance des provinces, décret qui n'a pas été rendu en finance, mais en constitution, ainsi que l'a déclaré M. Thouret son auteur, avec l'approbation de l'Assemblée; décret à l'occasion duquel il fut décidé formellement que le mot disposition serait substitué à celui de propriété, proposé dans l'origine; décret, dont le but apparent, dont l'effet convenu était uniquement de substituer l'inspection de l'Assemblée à celle du roi, sur l'emploi que faisaient des revenus de leurs bénéfices les ecclésiastiques; comment dis-je, de ce décret on est parvenu à dépouiller, non seulement le clergé de tous ses biens, mais encore tous les titulaires de leurs possessions ;
Enfin, la nation verrait comment le respect pour les mandats, lorsqu'il s'agissait de forcer l'opinion par tête, s'est transformé en une défense de s'assembler, soit aux bailliages, soit aux province ;
Comment le respect pour la religion catholique, apostolique et romaine, porté au point.de n'oser pas la déclarer religion dominante et loi de-l'Etat, finira par produire, si l'Assemblée n'y prend garde, l'abolition des droits spirituels du chef de l'Eglise, l'expulsion des pasteurs légitimes, le schisme, l'hérésie, te presbytérianisme et la persécution ;
Gomment le respect pour les propriétés nous à conduit au rachat des réntes foncières, à la suppression des droits féodaux ; le respect pour la liberté, à l'établissement du comité des recherches ; la reconnaissance constitutionnelle de l'existence et des prérogatives d'un ordre de noblesse, à l'abolition de la noblesse héréditaire ; la solennelle déclaration qu'une société où la séparation des pouvoirs n'est jpas déterminée est sans Constitution, à la confusion de tous les pouvoirs dans la main de l'Assemblée ; la demande d'une contribution patriotique volontaire, au décret qui la rend arbitraire et forcée j la foi jurée aux créanciers de l'Etat, à l'invention des assignats, et la promesse dé soulager le peuple, à 700 millions d'impôts par an... Voila l'ouvrage que je désire, voilà le compte, que je dois comme député, que je demande comme citoyen. Je me suis contenté d'en Indiquer les principaux chapitres : si
j'y travaille, je ne le publierai pas sans l'avoir signé et déposé ; mais je répété pour la vingtième fois que tout écrit qui n'est pas signé de moi, ni déposé chez un notaire, n'est pas de moi.
Quant au club monarchique,, je n'en suis pas. J'applaudis à son courage, ses dangers me conviennent, mais ses principes! Non- Ses principes! hélas 1 Les a-t-il déclarés? Les connaît-il bien lui-même? Je rends justice aux intentions de ceux qui le composent: elles sont pures, elles sont nobles ; mais je crains qu'ils ne soient pas dans le secret de leurs destinées.
En général, ou peut juger d'avance .des effets d'une association par 1 esprit de ses fondateurs.
M. Necker a fondé l'Assemblée nationale, et c'est toujours son esprit qui la gouverne. Il a voulu que le royaume fût une grande banque.,, n'a-t-il pas réussi ? Il a voulu que la minorité triomphât, aux notables, à Besancon, à Paris, partout; la minorité a triomphé partout; et ses succès font nos destins. Il a voulu que les deux premiers. ordres fussent détruits par le troisième: les apparences ne sont-elles pas pour lui ? ïj a voulu se venger de la magistrature. Qu est-elle devenue? Il a voulu que les bonnes intentions du parlement fussent trompées, et que l'arrêté du 5 décembre 1788, qui devait sauver l'Etat, fût converti en poison; la déclaration du 23 juin, copiée,' pour ainsi dire, sur cet arrêté mémorable, n'a-t-elle pas, grâce au choix du moment et des formes, aigri nos blessures au lieu de les guérir, irrité les esprits, au lieu de les calmer? Il a voulu que la religion prétendue réformée s'élevât sur les ruines de la foi catholique : un étranger qui nous verrait dans nos églises, nous prendrait-ril, je ne dirai pas pour des protestants, mais pour des chrétiens? Il a mis en avaria première proposition d'un papier-monnaie; nous avons les assignats; il a voulu que les provinces perdissent leurs privilèges, elles ont perdu jusqu'à leur nom; il a voulu rejeter du ministère, sur l'Assemblée,par le moyen de l'Assemblée elle-même, l'odieux des impôts et des dangers de la banqueroute; Quand la mesure des assignats sera comblée; quand l'excès des impositions aura découragé les peuples; quand les rapports du comité des finances auront c^sséde faire illusion; quand la vraie cause de l'augmentation subite des effets royaux sera sentie; quand la caisse de l'extraordinaire, ce brillant fantôme, sera jugée; quand les folies enchères sur les acquisitions insensées ou frauduleuses des biens ecclésiastiques couvriront le royaume; quand on s'apercevra que ce sont les assignats qui nourrissent toutes nos caisses, et composent eu très grande partie nos revenus; quand on reconnaîtra qu'un débiteur ne s'acquitte pas en créant à son gré de la monnaie fictive ; quand on éprouvera toutes les calamités que laisse dans sa suite le numéraire chassé par le papier, et lorsqu'enfin l'Assemblée, ou la puissance qui lui succédera, sera forcée de convenir que la nation est sans liberté, le roi sans pouvoir, le royaume sans police,le Trésor sans argent ; qu'il «st temps derevenir*ursespas,etdu compter avec soi-même, qui est-ce qui s'avisera, pour excuser nos erreurs et nos fautes, de remonter à leur source, et d'imputer aux écrits, aux exemples, aux innovations effrénées de M. Necker dans tous les genres, le bouleversement de nos opinions, de nos finances et de nos lois? Ainsi règne après lui et malgré lui peut-être, car j'aime à croire que M. Necker pleure enfin sur son ouvrage, l'esprit d'un fondateur. Appliquons ce principe au club monarchique. A qui le devons-nous? A MM. de Clermont-Tonnerre et Maloueî. Mais la profession de foi de
ces deux députés n'est-elle pas connue T Plus de clergé, plut de noblesse, plus de parlements : respectons, prenons pour base la constitution monarchique décrétée par l'Assemblée nationale. Telle est leur doctrine.
Eb bien I je leur demande ce que c'est que la constitution monarchique décrétée par l'Assemblée nationale; je leur demande si la France, à lt ur avis, est une monarchie de fait comme de nom; je leur demande ce qu'il» pensent du Trône, avec le refus suspensif et nos décrets, sur le droit de la guerre, sur l'élection des pasteurs et des juges, sur la nomination aux emplois militaires, sur l'organisation de l'armée, sur ses rapports avec les municipalités, sur l'indépendance des assemblées administratives, sur le Trésor public, sur la garde nationale. Qu'ils daignent s'expliquer nettement. Les Jacobins sont-ils donc si redoutables qu'on ne .puisse les attaquer de front? Vous vous plaignez de ce qu'ils régnent malgré la Constitution. Personne ici ne voudrait-il régner à leur place par la Constitution ? Vous dites : Les Jacobins troublent la paix, nous voulons la rétablir; cela ne suffit pas aux fidèles serviteurs de la Couronne. Ajoutes, je vous supplie» et nous serons d'accord, les Jacobins ont renversé le Trône, nous voulonp le relever,
Or, quel est le moyen qu'ont mis en œuvre les Jacobins pour troubler la paix et renverser le Trôné ? Ayez, ayez la forcé de le dire: leur doctrine politique, Il faut donc l'attaquer, cette doctrine, non par la violence, à Dieu ne plaise I mais par la raison aidée du temps, et de ce vrai courage, qui fait attendre, qui n'a besoin ni d'éloges, ni de succès, et qui par cela même obtient, tôt ou tard, des succès inespérés; les ambitieux ne peuvent pas m'entendre. Est-ce là ce qu'on vous dit, citoyens généreux, qui vous croyez amis de la Constitution monarchique? On veut, on espère s'emparer des esprits ! Eh I que nous importe à nous, défenseurs de la monarchie, ce combat d'opinions, si le prix de la victoire est le prix du Trône? Obéir et respecter sont deux choses bien différentes.
Quand M. le régent, après avoir menacé les députés de la Bretagne d'envoyer des troupes dans cette province pour y faire exécuter des lois contraires a ses privilèges, leur demanda : Quel parti prendrez-voutV D'obéir et de haïr, répondirent le8 députés. Point de haine; à la bonne heure : mais au nom de l'honneur et du trône, au nom de la raison et de la liberté, point de respect; j'entends, de ce respect intérieur qui rend les lois durables. La France est une monarchie, je m'en tiens à cette maxime, Elle est antérieure à l'Assemblée nationale, elle est indépendante, c'est ma boussole : c'est la règle des jugements que les Français sont en droit de porter sur les actes législatifs. Tout décret contraire à cette maxime est nul de plein droit.
On m'a dit qu'il fallait savoir ployer sous le joug de la nécessité. Je prie qu'on me démontre cette nécessité qui change tous nos devoirs. On m'a cité de grands exemples ; que Gicéron, appelé le premier,par les Romains, père de la patrie, a composé avec les circonstances. Il est vrai que ce grand homme écrivait à ses amis, qu'il aimait mieux voir la République un peu affaiblie qu'entièrement détruite ; mais .s'agit-il .ici d'un léger affaiblissement, ou d'un. renversement total? Au surplus, les derniers des Romains ne pensaient pas comme lui.
Ge même Giceron ne s'est-il pas félicité depuis d'avoir su Servir avec dignité ? Servir avec di-
gnité ? Et qui, bon Dieu, nous propose-t-on de servir? D'ailleurs, qu'ont produit pour Cicéron, pour sa patrie, sa famille et sa personne, son abaissement devant César,ses complaisances pour Octave? J'opposerai Cicéron à lui-même, ses actions à ses écrits. Il fléchit devant le tyran vainqueur : mais tant qu'il exista deux partis dans la République, il s'attacha (fortement au plus juste, et ne pensa point à lever une armée d impartiaux.
Je conjure les amis de la Constitution monarchique de n'avancer qu'avec précaution sur un terrain qu'ils ne connaissent pas, de s'expliquer avec leurs fondateurs, de ne penser que par eux-mêmes, et de ne pas chercher le salut de l'Etat ailleurs que dans les vieux principes et les vrais appuis de la monarchie.
Signé : Duvàl d'ëprémesnil.
Paris, le
PRÉSIDENCE DE M. DUPORT.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier, au matin, qui est adopté.
Un de MM. les secrétaires annonce à l'Assemblée que M. Rodât d'Olemps, qui avait obtenu, le 2 octobre dernier, un congé, est de retour.
Plusieurs membres du comité d'aliénation proposent différentes ventes de biens nationaux qui sont décrétées comme suit :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait, par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites par les municipalités ci-aprés désignées, en exécution des délibérations prises par le conseil général de leur commune, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir entre autres domaines nationaux ceux dont les états sont annexés à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des estimations et évaluations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décrétée le 31 dudit mois de mai ;
er"> Déclare vendre lesdits biens, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai, et pour les prix ci-après, savoir :
A la municipalité d'Ambérieu, département de
l'Ain..................................99,957 1. 18 s. 8 d.
A celle de Port............10,681
A celle de Cbevillard 22,632 9 6
, AceltedeGeovressiat 13,112 » » A celle de Saint-Mar-
tin-du-Fresne................25,538 4 »
A celle de Conda-
mine-la-Joie....................66,192 10 2
A celle de Charix... 4,823 10 A celle de Vieux-
d'Izenave............. 78,457 2
A celte de Giron.... 1,481 14 »
A celle de Morney... 2,644 8 » A celle du Grand-
Abergement....................14,119 12 »
A celle du Petit-
Abergement. .........7,815 10 >
A celle de Volognat. 3,578 14 »
A celle d'Injoux..........6,253 7 7
A celle de Viller.... 11,611 12 A celle de Saint-Hyp-polite, département du
Doubs..............................69,561
A cellede Battenans. 1,188 »
A celle de Mathay... 16,102 2 A celle de Vesigneux
et Amathay......................3,886 6 »
A celle d'Arbois, département du Jura.... 416,060 10 11 A celle de Saint-Thié-
baud................................3,184 10 »
A celle deMarnoz... 2,409 » »
A celle d'Aresche... 7,260 » A celle de l'Aberge-
ment-lès-Chéry..............1,564 » »
A celle de Castel-
sarrazin, département » »
de la Haute-Garonne.. 12,037 2 6
A celle de Lisle, département du Tarn.... 204,445 8 »
Un membre : J'ai l'honneur de rappeler à l'Assemblée la pétition qui lui a été adressée il y a quelque temps par les solitaires de la Trappe, tendant à se faire maintenir dans la jouissance de leurs biens et la liberté de suivre la règle de leur maison. Le comité ecclésiastique consulté à ce sujet a pensé que leur maison ne devait pas être vendue jusqu à ce que l'Assemblée ait prononcé, parce que c'est un hospice pour les voyageurs.
Aujourd'hui ces religieux s'adressent de nouveau à l'Assemblée et réclament contre les mesures prises par le directoire du lieu de leur maison pour parvenir à la vente de leurs biens. Ils appuient leur demande sur les considérations de l'hospitalité qu'ils donnent aux voyageurs et des secours qu'ils répandent sur les indigents et les malades du lieu ; ils demandent la suspension de toute vente jusqu'à ce que l'Assemblée ait définitivement statué sur leur sort.
Plusieurs membres demandent l'ordre du jour. (L'Assemblée décrète qu'elle passe à l'ordre du jour.)
L'Assemblée vient de décréter qu'elle passerait à l'ordre du jour au sujet de la demande des religieux de la Trappe. J'observe à l'Assemblée que le comité ecclésiastique a donné en cette matière ce qu'il appelle une décision ; que cette décision est formellement contraire à vos décrets ; et qu'il est possible que le directoire s'y conforme.
La maison de la Trappe est isolée dans un lieu inhabité et éloigné des routes passagères ; l'hospitalité n'y est exercée qu'envers des désoeuvrés et des fainéants qui ne s'y rendent que par curiosité ou par partie de plaisir. Il y a plus : si la demande des religieux de la Trappe est accueillie, bientôt les Chartreux, et d'autres encore dont la régie ne manque pas de sévérité, vous en feront de semblables ; et quand vous en aurez favorisé une, comment refuserez-vous les autres? Toutes
les maisons se diront utiles pour le soulagement de l'humanité.
Oui, Messieurs, vous devez écarter une pétition qui ferait échouer et votre belle opération sur les biens nationaux et vos vues sur l'extinction de cette race de mendiants qui se promènent de monastère en monastère. Je demande la question préalable. er">
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la pétition des religieux de la Trappe.)
Je suis chargé par le comité des finances, et autorisé par celui d'agriculture et de commerce, de solliciter de l'Assemblée nationale, pour le sieur Gointereau,
firofesseur d'architecture rurale, un secours qui ui devient absolument nécessaire, tant pour l'entretien de sa famille, que pour continuer l'instruction publique à laquelle il se livre depuis 22 ans. Les nombreux élèves de différents départements, qu'il iostruit. ont reçu constamment 20 sous par jour sur les secours destinés aux ouvriers, et lui n'a encore rien obtenu. Plusieurs départements qui ont reçu son premier cahier le pressent vivement de taire paraître les deux autres, qu'il dit devoir faire le complément de cette instruction.
Avant d'être généreux il faut payer ses dettes. Je demande qu'on passe, à l'ordre du jour.
(L'Assemblée décrète qu'elle passe à l'ordre du jour.)
au nom du comité des finances, propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, considérant que les biens nationaux doivent être assimilés, quant aux recouvrements, aux contributions publiques ; qu'il importe de les soumettre à ce même mode de poursuite et contrainte ; qu'il convient également de faciliter les fermiers a payer le prix de leurs baux eu denrées, ainsi que les débiteurs de rentes de même nature, qui ont été obligés par l'article 30 des décrets des 6 et 11 août dernier, sanctionnés le 25, à ne payer dans les trois mois de l'échéance, que sur l'évaluation faite au greffe de la justice royale des lieux ; qu'il s'est élevé des doutes sur l'évaluation des grains, décrète ce qui suit :
« Article 1". Les poursuites et contraintes à faire contre les fermiers des biens nationaux et contre les débiteurs de la nation seront faites de la même manière, dans les mêmes formes et par les mêmes officiers, ainsi qu'il s'est pratiqué jusqu'à présent pour le recouvrement des impositions directes, sans autres changements- que ceux prescrits par le nouvel ordre de choses, pour les poursuites et contraintes.
« Art. 2. Les fermiers des biens nationaux, dont le prix du bail est en denrées, ainsi que les redevables des rentes de même nature, seront tenus, conformément à l'article du décret des 6 et 11 août dernier, sanctionné le 25 du même mois, de le payer en argent, d'après l'évaluation qui sera faite sur une moyenne, prise dans les évaluations publiques et locales des denrées, pendant les trois mois de délai accordés pour payer, à compter du jour de l'échéance des termes fixés par le bail.
« Art. 3. Les biens nationaux ci-devant possédés par un laïque et par un bénéficier, maison, corps ou communauté ecclésiastiques, et dont le bail
aurait été fait ou renouvelé par anticipation sans fraude, et dans un temps autorisé, soit parle propriétaire laïque seul, soit par les administrateurs seuls desdits biens, soit par tous les deux conjointement, seront exécutés, encore qu'ils n'eussent pas commencé à courir à l'époque du présent décret, à la condition que l'exécution formera une des charges de la vente desdits biens. »
11 me semble qu'on doit agir bien différemment contre les débiteurs de deniers volontaires et contre ceux qui refusent de payer les contributions pour les besoins de l'Etat.
Quant au dernier article, j'observerai à l'Assemblée que cet article a été déjà présenté au comité d'aliénation et rejeté. Oo le représente aujourd'hui; et l'unique différence que j'y trouve, c'est qu'il est infiniment plus mauvais qu'alors.
Je demande la question préalable sur le projet entier.
rapporteur. Messieurs, si vous n'adoptez pas le mesure que nous vous proposons, vous verrez naître autant de procès qu'il y a de baux, parce que les exécutions provisoires n'étant pas assez promptes, donneront lieu à des chicanes et à des contestations.
Quant au dernier article, c'est parce que M. Camus ne s'est pas trouvé au comité, qu'il ignore qu'il y a été adopté depuis.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le premier et sur le troisième article).
L'article 2 est adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
« Les fermiers des biens nationaux, dont le prix du bail est en denrées, ainsi que les redevables des rentes de même nature, seront tenus, conformément à l'article 30 du décret des 6 et 11 août dernier, sanctionné le 25 du même mois, de le payer en argent, d'après l'évaluation qui sera faite sur une moyenne, prise dans les évaluations publiques et locales des denrées, pendant les trois mois de délai accordés pour payer, à compter du jour de l'échéance des termes fixés par le bail. >
Messieurs, on a nommé dans plusieurs cantons, pour juges de paix, des membres de l'Assemblée nationale ; leurs assesseurs ne veulent pas en remplir momentanément les fonctions. Je demande que l'Assemblée veuille bien fixer par un décret le mode de remplacement des juges de jtribunaux de district par leurs suppléants et des juges de paix par leurs assesseurs, en leur assurant le.traitement des,titulaires pendant tout le temps qu'ils en rempliront les fonctions.
Je demande également qu'il soit décrété que le greffier du juge de paix est obligé de résider dans le lieu où le tribunal se trouve établi.
(L'Assemblée renvoie ces deux propositions au comité de Constitution pour donner son avis et présenter demain un projet de décret à l'ouverture de la séance.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur les patentes (1).J
rapporteur. Messieurs, dans son er le comité propose l'aboiltion des droits sur les boissons,
les cartes à jouer, les papiers et cartons; nous vous demandons d'en
ajourner la discussion jusqu'à ce que l'Assemblée ait décrété les autres
articles du projet et statué sur les droits d'entrée des villes.
(L'ajournement de l'article 1«* est ordonné).
rapporteur, donne lecture de l'article 2.
Je demande que l'on supprime la partie de l'article relative à la pharmacie.
Le comité, Messieurs, commence par vous faire supprimer le collège de pharmacie où l'on prend les connaissances si nécessaires pour prévenir les dangers de l'ignorance soit dans la manipulation, soit dans l'application des drogues. La pharmacie est une profession très délicate et une de celles qui exigent le plus de précautions dans l'admission des sujets qui s'y destinent ; un pharmacien est un homme qui vend des drogues à vous, Messieurs, aux chirurgiens de campagne, aux hommes les plus simples : il est essentiel de prendre des mesures pour s'assurer de sa capacité. Avec la liberté que vous voulez accorder, vous aurez demain des charlatan» qui vous vendront do sublimé corrosif pour de la crème de tartre (Rires); cela est très possible.
Je demande que l'article soit ajourné jusqu'à ce que le rapporteur vous ait expliqué quelles sont les formalités auxquelles on soumettra tous eeux qui voudront exercer la profession de pharmacien.
rapporteur. Je réponds & M. Martineau que le comité ne propose point de supprimer le collège de pharmacie, mais de détruire les privilèges qui lui étaient attribués et d'abolir les droits perçus pour être apothicaire.
Il ne s'agit pas seulement ici de médecins, de chirurgiens, mais de toutes les professions qui tiennent à la sûreté publique, comme architectes, maçons, charpentiers, ramoneurs de cheminées. (Rim.) Si vous croyez qu'il doit être permis à tout te monde d'exercer ces professions sans examen préalable en achetant simplement la patente, eh bienj vous risquez à chaque instant d'être incendié et écrasé : voilà ce qui arrivera. L'Assemblée doit déclarer précisément s'il suffit de payer pour exercer ces professions quand même la sûreté publique Serait con-promise.
Je demande l'ajournement de l'article 2 jusqu'à ce qu'il ait été statué sur l'article 8.
Tout ce que vient de dire le préopinant semblerait devoir vous porter à annuler le décret rendu hier. S'il se fût borné à dire qu'il ne devait pas y avoir de patentes pour les maçoDS, vous eussiez eu à décider si les patentes s'appliqueront aux maçons comme aux autres professions. Mais en prétendant se faire un exemple des maçons pour en conclure qu'il ne doit point y avoir de patentes, il me force à croire que sa conséquence n'est ni proposable, ni admissible*
S'il n'est question que de savoir à quelle profession les patentes doivent s'appliquer, c'est une discussion de détail qui doit être soumise à l'Assemblée eh prenant successivement toutes les pro
fessions. Si vous voulez d'ailleurs exiger des preuves, vous pouvez établir qu'elles se feront devant la municipalité qui n'expédiera la patente qu'à ces conditions.
(L'ajournement est repoussé par la question préalable.)
L'article 2 est adopté en ces termes
Art. 2.
A compter de la même,époque, les offices de perruquiers, barbiers-étuvistes; les brevets et lettres dè maîtrise : les droits perçus pour la réception de maîtrisés et jurandes; ceux du collège de pharmacie, et tous privilèges de profession, sous quelque dénomination que ce soit, sont également supprimés. »
rapporteur, donnelecture de l'article 3 relatif au mode et au montant de la liquidation des offices supprimés.
Je crois qu'il est de la justice de l'Assemblée d'accorder aux offices de perruquier la même faveur qu'elle a accordée aux autres officiers supprimés. Vous leur avez accordé le remboursement de la finance et des indemnités. (Murmures).
Je demande, pôUr les perruquiers, le remboursement sur le pied de l'acquisition.
Tout le monde sait que les perruquiers achetaient leurs offices au delà de la finance, de même que les notaires, les procureurs. Pourquoi, aujourd'hui que vous enlevez l'état des perruquiers d'une manière bien plus désastreuse que ne le sera la perle des offices de procureurs, ne pas leur accorder la même faveur? Je demande justice pour eux^ comme on l'a demandée pour les procureurs ; partout où il y a même raison, il doit y avoir même droit. (Murmures.)
Mon amendement tend à ce qte la liquidation des offices de perruquiers se fasse comme celle des autres offices.
rapporteur. Les principes de l'humanité qui déterminent l'Assemblée nationale dans toutes ses Opérations/et ceux que viennent de rappeler les préopinants, sont inapplicables à l'article qui vous est présenté par votre comité. On a pensé qu'il était juste de rembourser les offices sur le pied de l'acquisition, parce qu'pn ôtait leur état aux différents officiers qui les possédaient. Mais ici^ vous n'ôtez point aux perruquiers leur état (Murmures) ; vous détruisez seulement le privilège exclusif qui leur permettait d'exercer leur profession, de préférence à totit autre citoyen qui aurait pu le faire aussi bien qu'eux ; vous ne faites que rendre à tous les hommes le droit qui leur appartient.
Je dis donc qu'en détruisant ce privilège, vous ne leur devez que le remboursement de la charge et du prix de leur office.
M. le rapporteur dit qu'on laisse aux perruquiers leur état, et moi, je démontrerai à l'Assemblée qu'en leur ôtant leur charge, on leur ôte leur état en entier ; c'est le travail ae leurs garçons qui faisait seul le produit de leurs charges.
J'opine donc pour que l'Assemblée nationale soit juste, qu'elle traite les perruquiers comme elle a traité les procureurs. (Applaudissements.)
(L'Assemblée décrète qu'il y a lieu à délibérer sur l'amendement de M. Gastellanet.)
Je demande pour les perruquiers le même mode de remboursement que pour les procureurs.
Je pense qu'il faut, Messieurs, que l'article 3 soit renvoyé au comité. Puisque vous ne voulez pas adopter le mode du comité, il.faut nécessairement que vous en adoptiez un autre. Vous ne pouvez pas adopter précisément celui des procureurs, parce qu'il s'y trouve des règles qui ne peuvent pas s'appliquer aux perruquiers.
Je demande donc que. l'article soit renvoyé aux comités des finances, de liquidation et de judicature, parce que le comité de judicature a déterminé les hases prises pour les offices de judicature.
(L'Assemblée décrète le renvoi de l'article 3 aux comitésdes finances, de liquidation et de judicature réunis.)
rapporteur, donne lecture de l'article 4, concernant ceux qui ont obtenu des maîtrises en vertu de privilèges et brevets ou au concours, ou à qui on les a accordées pour prix de leurs talents et de leurs services.
Un membre : Je ne viens pas combattre l'article du comité; mais il est des mesures nécessaires pour les localités: telles sont Celles de la ville de Strasbourg où on n'avait point introduit le droit de maîtrise par brevet. Je demande & l'Assemblée qu'elle veuille bien charger son comité de lui présenter des dispositions particulières applicables à la ville de Strasbourg et autres villes d'Alsace.
Je demande que le renvoi soit généralisé, car il y a dans la Flandre des villes qui sont dans le même cas.
(Ces deux motions sont renvoyées au comité.)
C'est une très bonne idée que celle de vouloir encourager les talents ou récompenser les services; mais je ne vois pas la raison pour laquelle ceux qui ont exercé une maîtrise ou une jurande quelconque, sans qu'ils aient rien déboursé, seraient reçus & exiger une indemnité.
Je demande, en conséquence, le retranchement du dernier alinéa; mais je demande qu'ils Boient dispensés de payer le droit de patente pour un an seulement.
A la fin du premier alinéa de l'article, il est question des sommes versées au Trésor public.
Je demande que l'indemnité ne soit payée qu'à raison des sommes et que, pour cela, la hn de cet alinéa soit rédigée en ces termes: « ... et à raison seulement des sommes versées dans le Trésor public... »
(L'amendement de M. Gaultier-fiiauzat est décrété.)
Il me parait évident, Messieurs, que la nation ne doit rien à ceux qui n'ont rien donné. On nous dit que les gens qui ont gagné ces patentes les ont obtenues à force de talents; d'abord cela n'est pas trop prouvé, car nous savons tous qu'obtenir jadis des patentes par talent ou par service, c'était les obtenir par faveur ou protection» Mais s'il en est qui doivent réellement
leurs patentes à leurs talents, s'ils ont vraiment droit a une récompense, ils n'ont qu'à s'adresser à la nation; elle sera toujours généreuse à leur égard et leur accordera la récompense qu'ils auront méritée. (Applaudissements.)
Je demande, en conséquence, la question préalable sur la dernière partie de l'article.
Un membre : Je demande le renvoi au comité jusqu'à ce qu'on ait statué sur la constitution médicale du royaume. (Rires.)
rapporteur. Il ne s'agit point ici de éhirùrgiens, puisqu'ils né sont pas compris dans l'article, mais, seulement de citoyens qui ont, aux différentes écoles, et notamment à celle de dessin, obtenu leurs maîtrises pour prix de leurs talents.
J'anpuiè la question préalable sur le 2* alinéa de 1 article; mais je demande qu'une exception soit faite en faveur de ceux qui justifieront avoir acquis gratuitement des maîtrises en se consacrant à l'entretien et à l'éducation desenfauts trouvés, à la décharge du Trésor public.
(L'Assemblée, consultée, rejette par la question préalable la deuxième partie de l'article 4.)
La première partie de l'article du comité est décrétée en ces termes ;
Art. 3 (art. 4 du projet).
« Les particuliers qui ont obtenu des maîtrises et jurandes, ceux qui exercent des professions en vertu de privilèges OU brevets, remettront pareillement au commissaire chargé de la liquidation de la dette publique, leurs titres, brevets et quittances de finance, pour être procédé à la liquidation des indemnités qui leur seront dues: lesquelles indemnités seront réglées sur le pied des fixations de Pédit du mois d'août 1776 et autres subséquents, et & raison seulement des sommes versées au Trésor public, de la manière ci-après déterminée. »»
Je rappelle mon amendement concernant ceux qui ont obtenu des maîtrises pour s'être chargés de l'entretien d'enfants trouvés.
Si l'amendement de M. Dela-vigne se réduisait à dispenser pendant trois ans du droit de patente ceux qui prouveront avoir élevé des enfants trouvés, il trouverait moins d'obstacles dans l'Assemblée.
Je demanderais donc que son amendement fût réduit dans des termes limités et qu'il fût renvoyé au comité,
: (L'Assemblée décrête le renvoi de l'amendement au comité.)
secrétaire. Messieurs, volet une lettre que le président de l'assemblée des électeurs d'Eure-et-Loir a adressée à M. le Président de l'Assemblée nationale :
« Monsieur le Président, j'ai l'honneur de vous faire passer l'adresse des électeurs du département d'Eure-et-Loir ; je vous prie de la mettre sous les yeux de nos augustes représentants. Ouvrage de notre cœur, elle exprime avec franchise le sentiment de reconnaissance et de respect dont nous sommes pénétrés pour les sages législateurs à qui nous devons la régénération de l'Empire.
« Les suffrages pour la nomination à l'évêché se sont réunis sur M. Bonnet, curé de Saint-Michel de Chartres, pasteur septuagénaire, aussi respecté que respectable, et dont les vertus égalent le patriotisme. (Applaudissements.)
«Prévenu de son élection, il s'est présenté à l'assemblée, y a fait des remercîments et a accepté.
« Aussitôt que le procès-verbal de l'assemblée électorale sera imprimé, j'aurai l'honneur de vous en envoyer un exemplaire. Je vous conjure, Monsieur le Président, d avoir la complaisance de mettre sous les yeux de l'Assemblée l'adresse du département.
« Signé : delacroix, président de l'assemblée électorale. »
Plusieurs membres demandent la lecture de l'adresse des électeurs du département.
secrétaire, donne lecture de cette adresse qui est ainsi conçue :
« Messieurs, permettez aux électeurs du département d'Eure-et-Loir de partager avec les bienfaiteurs de la nation, avec ies auteurs de la Constitution qu'ils bénissent chaque jour, les épanchementS de leur joie.
« Ils viennent de remplir la fonction la plus importante», la plus épineuse de.toutes celles que vous avez confiées à leur patriotisme : ils viennent de nommer un évêque.
« Et cet évêque, Messieurs,-il eut dans tous les temps les vertus épiscopales, les mœurs, le désintéressement et la charité; et cet évêque, ami éclairé d'une Constitution qui doit régénérer la religion, comme èlle a déjà régénéré lEmpire (Murmures à droite, applaudissements à gauche.).,. avait prévenu, par ses vœux, les abus qu'elle réforme.; par ses lumières, les principes qu'elle consacre ; et cet évêque, appelé à l'épiscopat par tous les cœurs, forcera au silence, disons mieux, au respect, ceux-là même dont nous n'osons presque plus espérer le retour à la raison et à la vérité.
« Déjà une foule de prêtres timides, que le fanatisme s'efforçait d'égarer,, devenus forts du courage qu'il a su leur inspirer, publient hautement que ce respectable pasteur les a retenus sur le bord de l'abîme, et qu'ils doivent leur salut à ses conseils; heureux d'avoir pu opposer à la séduction qui les entourait, le poids de son autorité y
; « Qu'ils viennent à présent, tous ceux qui prétendent blâmer les élections publiques ; qu'ils viennent, tous ceux qui osent calomnier le choix du peuple 1 qu'ils viennent et nous leur dirons : Voyez ces cheveux blanchis dans l'exercice des vertus ecclésiastiques ; cette tête vénérable, qui n'a jamais fléchi que sous la loi de l'Evangile ; ce curé septuagénaire, dont la charité active a consacré tous les moments d'une longue vie au soin d'un troupeau qu'il aime autant qu'il en est aimé ; voyez, et dites-nous si la cour, si Rome, ont fait souvent de pareils choix I (Applaudissements réitérés à. gauche.),
« Pardonnez-nous, Messieurs, si nous osons devant vous proposer aux ennemis de la Constitution et de l'Etat un défi non moins accablant, non moins désespérant pour eux. Cherchez, leur dirons-nous ayec assurance, cherchez, scrutez l'âme, le cœur, la conscience de chacun des électeurs du département d'Eure-et-Loir, et trouvez-en un seul qui ne soit pas décidé à verser jusqu'à la dernière goutte ae.son sang pour
maintenir la Constitution qu'il a jurée; un seul qui ne soit pas intimement pénétré d'estime, de respect et de reconnaissance pour nos augustes représentants 1 ». (Applaudissements.)
(L'Assemblée ordonne l'impression de cette adresse et son envoi à tous les départements.)
La discussion sur les patentes est reprise.
Je demande par amendement à l'article 5 que la date du 4 août 1789 soit substituée à celle du 1er avril 1790. L'époque du dérangement des maîtrises remonte bien en effet au 4 août 1789 ; c'est de cette époque qu'il faut partir.
(L amendement est adopté.)
L'article est décrété en ces termes : Art. 4 (art. 5 du projet).
« Les citoyens reçus dans les maîtrises et jurandes depuis le 4 août 1789 seront remboursés de la totalité des sommes versées au Trésor public.
« A l'égard de ceux dont la réception est antérieure à l'époque du 4 août 1789, il leur sera fait déduction d'un trentième par année de jouissance. Cette déduction, néanmoins, ne pourra s'étendre au delà des deux tiers du prix total; et ceux qui jouissent depuis vingt ans et pius recevront le tiejrs des sommes fixées par l'édit d'août 1776 et autres subséquents.
« Les remboursements ci-dessus énoncés n'auront lieu que pour ceux qui sont en activité de commerce et seront faits par la caisse de l'extraordinaire. »
rapporteur. À l'article 6 du projet du comité, nous vous proposons d'ajouter que le directeur général de la liquidation se fera remettre les pièces et renseignements nécessaires pour constater l'état actuel des dettes contractées par les communautés ou compagnies.
Je demande que l'article soit réformé et qu'il soit dit que celles des communautés qui n'auraient pas rendu leur compte conformément aux règlements précédents, seront tenues de les rendre aux municipalités et de former l'état des dettes actives et passives de chaque communauté.
Les mots : actives et passives, que l'on trouve dans l'article, n'exprimant pas assez bien, à ce que je crois, toutes les possessions des communautés, je serais d'avis qu'on mît après ces mots : dettes actives et passives, ceux-ci : et biens possédés par les communautés.
rapporteur. On pourrait rédiger comme suit l'article :
Art. 5 (art. 6 du projet).
« Les syndics des corps et communautés d'artisans et marchands seront tenus de représenter ou de rendre leurs comptes de gestion aux municipalités, lesquelles les vérifieront et formeront l'état général des dettes actives et passives et biens de chaque communauté ; ledit état sera envoyé aux directeurs de districts et de dé artements qui, après vérification, le feront passer au commissaire du roi chargé de la liquidation de la dette publique, lequel en
rendra compte au comité des finances, pour en être par lui fait rapport à l'Assemblée nationale. Le commissaire ne pourra néanmoins surseoir à la liquidation des remboursements et offices de chaque individu.,' il se fera remettre les états, titres, pièces et renseignements nécessaires pour constater l'état actuel et achever, s'il y a lieu, la liquidation des dettes contractées antérieurement à 1776 pour les corps ou communautés. »
(Cet article est décrété.)
L'article suivant est adopté en ces termes :
Art. 6 (art. 7 du projet).
« Les fonds existant dans les caisses des différentes corporations seront versés dans la caisse du district, qui en tiendra compte à celle de l'extraordinaire; les propriétés, soit mobilières, soit immobilières desdites communautés, seront vendues dan? la forme prescrite pour l'aliénation des biens nationaux, et le produit desdites ventes sera pareillement versé dans la caisse de l'extraordinaire.
rapporteur^ donne lecture de l'article 8 du projet du comité.
Je demande qu'on termine cet article en disant que ses dispositions ne s'étendront point aux professions d'orfèvre, de serrurier, de tireur d'or, lapidaire et autres, pour lesquelles je propose que l'Assemblée fasse des règlements particuliers.
Votre intention, Messieurs, a été de favoriser l'agriculture; mais il n'a jamais été dans votre intention de favoriser la cupidité ou le discrédit de nos fabriques. Le maintien de la confiance publique nécessite des règlements et des surveillants destinés à garantir le public des surprises auxquelles il n'est que trop souvent exposé, afin que la cupidité ou l'ignorance ne fassent point perdre aux fabriques nationales le haut degré de perfection qu'elles ont acquises par la sagesse de leurs règlements.
Sans ces précautions, ne vous y trompez pas, cette liberté indéfinie sera la cause de la décadence de nos manufactures.
Je conclus donc à ce que l'article soit décrété tel qu'il est, en ajoutant, par amendement : et à la charge de se conformer aux règlements qui pourront être faits.
(L'amendement est décrété.)
L'article 8 comprend toute espèce d'arts et métiers. Je demande que les ouvriers des professions maritimes, enregistrées dans les classes, ne soient soumis à aucune patente.
Vous savez, Messieurs, que ces ouvriers sont déjà soumis à un service public dans les arsenaux et sur les vaisseaux de l'Etat ; il serait injuste et dangereux de leur imposer aucune autre obligation pécuniaire.
Je demande le renvoi de cet amendement aux comités des finances, de l'imposition et de la marine réunis.
Il faut distinguer en cette matière les ouvriers maritimes, travaillant pour la chose publique et ceux qui travaillent pour leur compte.
ment de M. Malouet aux comités des finances, de l'imposition et de la marine réunis.)
Je demande qu'on change le commencement de l'article en ces mots : ... Il sera libre à tout citoyen d'exercer telle profession, art ou métier, etc...
rapporteur. J'observe au préopinant que le comité a pensé qu'il était nécessaire de dénommer les fabriques et manufactures, par la raison qu'il y a plusieurs arrêts du conseil qui défendent ces établissements-là dans certaines villes ; il a donc pensé qu'il était nécessaire de les dénommer.
Un membre : Gela ne nuit pas.
M. d'André. Je demande à soutenir l'amendement de M. Buzot. Une loi doit être générale et oe pas fournir matière à des exceptions particulières.
Où en serions-nous si, lorsque nous avons décrété un article général ; si, lorsque nous avons décrété que tel citoyen pourra exercer la profession et le métier qu'il voudra, on voulait encore opposer des arrêts du conseil ? Certainement il n'est personne qui puisse s'imaginer que des arrêts du conseil puissent aller contre un décret de l'Assemblée nationale sanctionné par le roi.
(L'amendement de M. Buzot est décrété.)
Parmi les cultivateurs, il en est qui, pour l'engrais de leurs terres, achètent des troupeaux de moutons et même de bœufs à une certaine époque de l'année pour les revendre dans une autre. Est-ce là un commerce ?
L'article n'est pas clair à ce sujet ; tout ce que je demande, c'est qu'on s'énonce clairement sur cet objet et qu'on le mette dans ou hors l'article.
rapporteur. Acheter n'est pas faire le commerce pas plus que vendre n'e*t faire le commerce. Faire le commerce, c'est acheter et vendre. Il faut donc, pour qu'il y ait commerce et commerçant, vendre pour acheter et acheter pour vendre ; il faut même que ces deux actes se fassent avec une certaine suite et durée et en vue l'un de l'autre.
Ainsi vendre les denrées que l'on récolte n'est point faire acte de commerçant.
Messieurs, M. le rapporteur vient de dire que les propriétaires qui vendent leurs denrées ne sont pas regardés comme marchands. Je demande donc par amendement qu'on ajoute à l'article ces mots : Ne seront point compris dans l'article les propriétaires qui vendent leurs denrées.
L'intention du comité n'a pas été de regarder comme une profession qui exigeât une patente, le commerce que le laboureur ferait des bestiaux qu'il engraisse sur ses terres. La profession du laboureur est d'être agriculteur; et le comité n'a jamais pensé à assujettir l'agriculteur aux patentes. L opération de l'agriculteur qui achète des bestiaux pour les garder plus ou moins longtemps et les revendre n'en fait pas un commerçant.
Il n'est donc pas possible, sous ce prétexte, de l'assujettir à la patente; il en est de même des achats des grains.
Je propose de soumettre aux patentes les seuls marchands de vins, limonadiers, aubergistes et autres de cette espèce compris en l'article 13 du projet du comité, et de faire payer en outre à ces mêmes personnes ainsi qu'à tous les citoyens de l'Empire qui sont aisés, 2 sols pour livre de leur loyer, jusqu'à 600 livres. (Murmures.)
Vous avez décrété le 27 janvier 1790 que tous les ci-devant privilégiés payeraient leurs boissons au même taux que les autres citoyens; en conséquence, je demande sur cet article la question préalable et le rapport du décret.
On ne doit pas mettre d'imposition sur les boissons ; si on .en met, il faut lès-, mettre sur les gens puissants, au lieu que ce sont les gens de la dernière classe qui payeraient ces impôts; c'est injuste*
Monsieur le Président, je prétends que si les personnes qui réclament ici pour les propriétaires avaient bien réfléchi et bien examiné ce que M. Defermon vous a présenté, elles ne mettraient plus de difficulté à cet article, puis-qu'il est vrai que l'impôt qu'on nous demande n'est autre chose qu'un impôt indirect dont on se prévaudra sur les consommateurs.
Je suis d'un pays où l'on Vend le vin en détail, et je sais que si Vous admettez une exception pour le propriétaire qui vendra en détail, il n'y aura plus de droit; car ce seront toujours des propriétaires qui vendront en détail. Quand un propriétaire aura vendu son vin, il en achètera d'autre et vendra ainsi toute l'année*
Comme vous ne voulez pas, avec grande raison» de visites domiciliaires, il sera impossible de vérifier si c'est toujours son Vin qu'il vend. Un cabaretier achètera 5 à 6 arpents et, sous ce prétexte, il vendra 10,000 pièces de vin.
Ainsi donc, je m'oppose à tous ces amendements; ils ne tendent qu'à détruire l'impôt. D'ailleurs, il n'y a aucun propriétaire qui, au moyen de 3, 6,9 ou 12 livres, ne fasse la vente de son vin.
(La discussion est fermée.)
M. d'Allarde, rapporteur. Le comité propose d'ajouter à l'article ces mots : « Sont exceptés de la présente disposition les cultivateurs qui vendent ou achètent des grains, bestiaux ou fourrages. *
Plusieurs membres réclament la première rédaction.
rapporteur. J'avais pensé que le mot cultivateur comprenait tout; mais on peut, s'il n'y a pas de difficulté, y ajouter celui de propriétaire. On dirait alors : « Les propriétaires et cultivateurs qui vendront des blés, grains, fourrages et bestiaux, ne sont point compris dans cet article. »
Cette rédaction me paraît très vicieuse ; car le rapporteur n'exceptant que les grains, les bestiaux, les fourrages, il en résulterait que le propriétaire ne pourrait pas vendre ses vins en gros, ni ses bois, ni ses autres denrées.
Je demande que l'article soit ainsi terminé: « Et néanmoins ne pourront être soumis au droit de patente tous les propriétaires et cultivateurs
pour la vente de leurs denrées et productions, autres que les vins et boissons vendus eu détail. »
rapporteur. J'adopte la rédaction de M. Malouet.
Je demande que l'Assemblée s'explique clairement; les cultivateurs, chez moi, achètent tous les jours des bestiaux pour manger leurs regains, et puis ils les revendent. Je demande si l'Assemblée exige que ces cultivateurs-là prennent des licences. (Murmures.)
rapporteur. L'article, tel qu'il est rédigé, lève toutes les difficultés; car il exempte les propriétaires et les cultivateurs non seulement sur leurs denrées et productions, mais indéfiniment sur leurs bestiaux. Il n'importe* quelle que soit la cause pour laquelle on leur accorde la franchise, dès qu'on leur permet de vendre en franchise leurs bestiaux, à tel titre qu'ils lés possèdent.
Voici donc l'article tel que je le propose: « Sont exceptés de la disposition de ces articles, les cultivateurs et propriétaires pour la vente de leurs bestiaux, denrées et productions, autres néanmoins que les boissons qui seraient vendues à pinte ou à pot. » . (Cette addition est adoptée.)
L'article est décrété comme suit :
Art. 7 (art. 8 du projet).
« A compter du 1®P avril prochain, il sera libre à tout citoyen d'exercer telle profession, art ou métier qu'il trouvera bon, après s'être pourvu d'une patente, et en avoir acquitté le prix suivant les taux ci-après déterminés, et à la charge de se conformer aux règlements qui pourront être faits. Ne seront assujettis à se pourvoir de patentes, les propriétaires et cultivateurs pour la vente de leurs bestiaux, denrées et productions, excepté le cas où ils vendraient leurs boissons en détail à pinte ou à pot. »
Les articles suivant sont décrétés dans ces termes :
Art. 8 (art. 9 du projet).1
« Tout particulier qui voudra se pourvoir d'une pafr nte, en fera, dans le mois de décembre de chaque année, à la municipalité du ressort de son domicile, sa déclaration, laquelle sera inscrite sur un registre à souche. Il lui en sera délivré un certificat qui contiendra son nom et la valeur locative de son habitation. Il se présentera ensuite chez le receveur de la contribution mobilière, auquel il payera le prix de la patente, suivant le taux ci-après fixé; ce receveur lui en délivrera quittance au dos du certificat; et sur la représentation du certificat et de la quittance, qui seront déposés et enregistrés aux archives du district, il lui sera délivré, au secrétariat du directoire, la patente pour l'année suivante.
« Les déclarations, certificats, quittances et patentes seront sur papier timbré, et conformes aux modèles annexés au présent décret.
Art. 9 (art. 10 du projet).
« Ceux qui voudront exercer une profession, art et métier quelconque pendant la présente année, seront ternis de se présenter à leurs mu-| nicipalités avant le Ie* avril prochain, et de rem-
plir les formalités prescrites par les articles précédents.
« La jouissance des patentes, qui leur seront délivrées, commencera au 1er avril prochain, et les prix en seront fixés aux trois quarts des patentes, qui, dans la suite, seront accordées pour une année.
Art. 10 (art. 11 du projet).
c Les particuliers qui, dans le courant d'une année, désireront se pourvoir de patentes, en auront la faculté en remplissant les formalités prescrites par l'article 8, et en acquittant le droit pour le restant de l'année, à compter du premier jour du quartier dans lequel ils auront demandé les patentes. »
rapporteur, donne lecture de l'article 12 du projet de décret, concernant la fixation du montant des patentes.
Votre comité, Messieurs. élève le produit du droit de patente à 12 millions; mais il est probable qu'il ne l'a pas calculé à sa juste valeur; il a craint de paraître vouloir vous flatter. Moi, qui suis le médecin tant mieux, je crois qu'en cavant au plus bas, il montera à 52 millions.
Je divise les commerçants du royaume en cinq classes, comme les villes ; et, sans fixer aucun maximum, je propose d'amender ainsi l'article 12 t
« Le prix des patentes annuelles pour tous les commerces, arts, métiers et professions est fixé, sous les exceptions ci-après, à raison du prlîc du loyer ou de la valeur locative de l'habitation de ceux qui les demanderont et dans les proportions suivantes :
« Les premiers vingt livres de loyer payeront 5 livres; au-dessus et jusqu'à 400 1. 2 s. par livre; depuis 400 jusqu'à 800 1. 2 s. 6 d.; et, au-dessus de 800 livres jusqu'à telle somme que ce soit, 3 sols par livre. »
Je propose ensuite d'amender ainsi un des articles suivants, le 17 :
« Pour les particuliers qui voudront réunir à leur commerce, métier ou profession la faculté d'exercer les professions de marchand de vin, etc.. le prix des patentes sera fixé :
« Savoir: 15 livres sur les premiers cent livres de loyer, et 3 sols pour livre du prix du loyer excédant jusqu'à 400 livres; 3 s. 6 d., depuis 400 jusqu'à 800 livres; et 4 s. 6 d. au-dessus de 800 livres, à quelque somme que puisse s'élever le prix du loyer. »
D'après ces bases, le droit de patente que vous avez décrété produirait 34 à 35 million», déduction fuite du tiers abandonné aux municipalités. Ainsi vous pouvez abolir à l'instant tous droits à l'entrée des villes.
Je me résume et je demande que lé projet de décret que j'ai éu l'honneur de vous proposer (1) et dont vous avez ordonné l'impression, soit mis à la discussion aussitôt après celui qui vous occupe aujourd'hui.
Si les observations et les calculs du préopinant sont exacts, leur résultat est un de ceux que je cherche à vérifier, et je demanderais d'abord que le comité d'imposition voulût bien s'expliquer sur ces calculs. Je voudrais que
Voyez ci-dessus, séance du 11 février 1791, page
la proportion du prix de loyer fût graduée, ainsi que le propose M. Aubry, suivant les différente» Tilles et les classes dans lesquelles elles ont déjà été fixées.
Mais ensuite je voudrais que la taxe, le droit de patentes fût aussi gradué à raison de la nécessité, de l'utilité ou de la moindre utilité de toutes les professions. Je ne trouve pas juste que l'ouvrier d'une profession de luxe ne supporte pas un droit plus considérable que celui d'une profession nécessaire.
Ce que nous vous proposons remplit absolument lès Vues de M. Aubry, qui ont longtemps occupé le comité et qui ont été prises en considération par lui.
Quant à l'observation de M. Malouet, nous avons cru que des intérêts plus grands devaient céder devant les intérêts qu'il vous présente. Le graud intérêt est celui de dissoudre les corporations d'arts et métiers ; elles présentaient de grands inconvénients politiques et de très grands inconvénients économiques; de grands inconvénients politiques, contraires à l'esprit de la Constitution, en ce que ces corporations tendent à diviser les citoyens, à les opposer les uns aux autres par des intérêts particuliers; des inconvénients économiques, en ce que ces corporations peuvent augmenter le prix des consommations et diminuer le salaire des ouvriers.
En ce qui conperne l'observation de M. Aubry de distinguer le prix des patentes par l'importance et par la populatioa des villes, le comité a pourvu à cet objet en n'imposant que les loyers.
Le comité, au surplus, a cherché à dissoudre lés corporations, à procurer dés travaux à tous les ouvriers et à faire baisser la main-d'œuvre par une concurrence nombreuse.
Je conviens du danger des corporations ; mais j'observe que la graduation des patentes,suivant la plus ou moins grande utilité des professions, n'a rien de commun avec leur destruction.
La graduation du nrix des patentes sur le loyer â l'inconvénient de faire payer au plus pauvre ouvrier autant qu'au plus riche, puisqu'il faut moins de logement à un riche orfèvre qu'à un pauvre charron.
Il est des arts, qui sans donner beaucoup deprofits, exigent cependant des emplacements, des loyers fort chers.
rapporteur. Le comité a pris pour base les 4 millions et demi de citoyens actifs répandus dans le royaume, ce qui donne à peu près 1 million de citoyens actifs non sujets au droit de patente. L'Assemblée pourrait cependant fixér un minimum du droit de patentes de 15 livres par exemple, et fixer le maximum à 500 livres.
Point d e maximum; ce serait encourager à faire des compagnies d'industrie.
appuie l'opinion de M. Aubry.
Je demande qu'on assujettisse à un minimum les ouvriers qui exercent une profession dans un hôtel.
J'observerai que le paysan ouvrier on artisan dans les campagnes ne payait rien sons l'ancien régime,et d'ailleurs les paysans ne travaillent qu'une très petite partie de l'année.
J'appuie l'opinion de M. Malonet; l'Assemblée a contracté l'obligation de délivrer le pauvre de l'oppression. D n'y a que les caba-retiers, les bouchers et les marchands vendant en détail, qui devraient payer dans les campagnes.
appuie l'opinion de M. Garat.
Je demande qne l'impôt des patentes soit payé parmois pour aider le pauvre ouvrier.
Je pense qu'il ne faut ni maximum ni minimum ; il faut que les mêmes principes de justice président à la répartition du droit et c'est le seul moyen d'y parvenir.
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il n'y aura ni maximum ni minimum ; elle décrète également
3u'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'amendement e M. Malouet.)
L'article est adopté dans les termes suivants :
Art. 11. (art. 12 du projet).
« Le prix des patentes annuelles pour tous les commerces, arts, métiers et professions, est fixé, sous les exceptions ci-après, à raison du prix du loyer, ou de la valeur locative de l'habitation, boutiques, magasins et ateliers occupés par ceux qui les demanderont, et dans les proportions suivantes :
« 2 sous pour livre du prix du loyer jusqu'à 400 1.; 2 8. 6 d.pour livre depuis 400 livres jusqu'à 800 livres, et 3 sols pour livre au-dessus de 800 livres. »
(La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.)
indique l'ordre du jour de la séance de demain et lève la séance à trois heures.
présidence de m. duport.
Séance du
secrétaire, donne lecture du pro-cès-verbal de la séance d'hier, qui est adopté.
Un membre fait lecture d'une adresse du sieur Dodun, ingénieur des ponts et chaussées du département du Tarn, qui annonce à l'Assemblée la découverte d'une nouvelle pozzolane factice.
(L'Assemblée renvoie l'adresse et l'examen de cette pozzolane à son comité d'agriculture et de commerce.)
Un membre annonce l'hommage fait à l'Assemblée par la Société de médecine
ae Paris des deux derniers volumes de ses mémoires.
Le roi a donné sa sanction, le 9 de ce mois :
« 1° Au décret de l'Assemblée nationale, du 29 janvier, relatif à la reconnaissance et à la levée des scellés apposés par les commissaires du ci-devant Châtelet de Pans, et parordonnance de justice; ainsi qu'aux biens dont l'adjudication se poursuit en ce siège.
* 2°Et le 11, au décret du 16 décembre dernier, concernant la vente de biens nationaux à la municipalité de Dijon.
c 3° A trois décrets du 17, concernant pareille vente aux municipalités de Sully, Amie os et Montpellier.
4* A deux décrets du 19, concernant pareille vente aux municipalités de Dijon et de Mirebeau.
« 5° A six décrets du 20, concernant pareille vente aux municipalités de Bourg-l'Abbaye, Meung-sur-Loire, Camon, Sermaises, llouen et Orléans.
« 6° A neuf décrets du 21, concernant pareille vente aux municipalités de Montagnac, Versailles, Boinvilliers, Grosrouvres, Lacqui, Cambais, Atrungt, Polher et Etampes.
« 7° Au décret du 29, concernant pareille vente à la municipalité de I aon.
« 8* A quatre décrets du 30, concernant pareille venteauxmunicipalitésde Soisy-au-Bois, Broussy-le-Petit, Broyés et Péas.
« 9° A deux décrets du 31, concernant pareille vente aux municipalités de Roquemaure et Neuilly-Saint-Front.
« 10° A deux décrets du 5 janvier, concernant pareille vente à la municipalité d'Auxerre.
« 11° Au décret du 10, concernant pareille vente à la municipalité de Villeneuve. :
« 12° Au décret du 27, concernant pareille vente à la municipalité de Montierender.
« 13° Au décret du 29, relatif à la confection des inventaires, comptes, partages et liquidations, et aux avoués.
« 14° Au décret du 30, concernant les indemnités accordées aux commandants des bâtiments de l'Etat, lorsqu'ils passeront à leur bord des personnes en vertu d'ordre du roi.
« 15° Au décret du même jour, relatif à la solde des gens de mer, employés sur les vaisseaux au service de l'Etat, et au service des ports.
« 16* Au décret du premier février présent mois, concernant la fixation des masses destinées à l'entretien des différentes parties de l'armée.
« 17° Au décret du même jour, relatif à l'envoi, dans la colonie de Saint-Domingue, de trois commissaires civils pour y maintenir l'ordre et la tranquillité publique ; et de deux autres commissaires civils dans la colonie de Cayenne et de la Guyane.
« 18° Et enfin, au décret des 1er et 2 de ce mois, relatif à la liquidation des offices de judi-cature supprimés.
« Le ministre de la justice transmet à M. le Président les doubles minutes de ces décrets sur chacune desquelles est la sanction du roi. »
« Signé : M.-L.-F. Duport.
Paris, le
Je suis chargé par la municipalité de la ville de Blaye, département de la Gironde, de mettre sous les yeux de l'Assemblée le procès-verbal de la prestation de serment faite
le 16 janvier deroier par M. Siausar, curé de cette ville, et M. Lavergne, ci-devant chanoine, actuellement aumônier de l'hôpital. Ce procès-verbal est accompagné d'un discours prononcé le même jour par M. Siausar, et dans lequel il démontre que la constitution civile du clergé, bien loin d'être en opposition avec la religion chrétienne, en est le triomphe.
M. Lamarque, curé de la ville de Pau, ses vicaires, tous les religieux bénédictins, professeurs du collège de cette ville, le professeur doyen de la faculté de théologie en l'université, les deux aumôniers de» l'hôpital, et plusieurs autres prêtres habitants de la ville de Pau, ont prêté le serment prescrit par le décret du 27 novembre, le 30 janvier, à la grande satisfaction de la ville. M. le curé a fait un discours pour établir que tout prêtre, non seulement peut, mais doit prêter le serment. La majorité des prêtres fonctionnaires publics du district de Pau a suivi ou se dispose a suivre l'exemple du pasteur et du clergé de la ville.
Dans le district de Montmarault, département de l'Allier, sur 60 ecclésiatiques fonctionnaires,^ ou 4 seulement ont refusé le serment.
Un membre annonce que M. Lheureux, curé et maire de Bénarville, dans le district de Mon-tivitliers, département de la Seine-Inférieure, a prêté le serment prescrit par la loi du 26 décembre.
au nom du comité ecclésiastique, propose le projet de décret suivant sur la circonscription des paroisses de Rouen :
« L'Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par son comité ecclésiastique des délibérations prises par le directoire du département de la Seine-Ioférieure,le directoire du district et la municipalité de Rouen, les 24 janvier dernier, 2 et 11 février présent mois, après avoir invité et requis l'évêque du département de concourir aux travaux préparatoires des translations, unions et suppressions ci-après, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« La ville et faubourgs de Rouen sont divisés en 13 paroisses et 5 succursales, dont la dénomination et la circonscription sont indiquées en l'état annexé au présent décret.
Art. 2.
« Toutes les ci-devant paroisses ou succursales de la ville et faubourgs de Rouen, non comprises en l'état, sont supprimées.
Dénomination et arrondissement des paroisses et
succursales de la ville et faubourgs ae Rouen.
PAROISSES DE L'INTÉRIEUR DE LA VILLE.
1. Notre-Dame, paroisse cathédrale.
« Au nord, la rue Ganterie, depuis la rue Perrière jusqu'à la Crosse, et la rue de l'Hôpital jusqu'aux Boucheries-Saint-Ouen.
« Au levant, les rues Pout-de-Robec, d'Amiette, Mal-Palu.
« Au midi, le port, depuis la Porte-Jeao-le-Cœur jusqu'à la Porte-des-Gonsuls.
« Au couchant, les rues de l'Estrade, des Cor-deliers, des Vergetiers, Massacre, le Palais de Justice, la rue Percière.
2. — Saint-Ouen, ci-devant abbaye.
« Au nord, le rempart Beauyoisine, depuis la porte de ce nom jusqu'à la rue de Flandres.
« Au levant, les rues de Flandres, des Deux-Anges, Coignebert, de l'Epée, Pont-de-l'Àrquet, du Ruissel.
« Au midi, la rue Martinville, depuis la rue du Ruissel jusqu'à la rue d'Amiette : en retour, au couchant, les rue d'Amiette, Pout-de-Robec, Boucheries-Saint-Ouen. Encore au midi, la place Saint-Oueu, la rue de l'Hôpital.
« Au couchant, la rue Beauvoisioe, depuis la porte de ce nom jusqu'à la Grosse.
3. — Saint-Godard.
« Au nord, le rempart, depuis la porte Bouvreuil à la porte Beauvoisine.
« Au levant, la rue Beauvoisine, depuis la porte de ce nom jusqu'à la Grosse.
« Au couchant, les rues Bouvreuil et de la Renelle.
« Au midi, la rue Ganterie.
4. — Saint-Patrice.
« Au nord et au couchant, le rempart, depuis la porte Bouvreuil à la porte Cauchoise.
« Au levant, les rues Bouvreuil et de la Renelle.
« Au midi, la rue des Bons-Enfants, depuis la porte Cauchoise jusqu'à la rue de la Renelle.
« Nota.— Cette paroisse a pour succursale Saiut-Romain, faubourg Bouvreuil.
5. — Saint-Jean.
« Au nord, la rue des Bons-Enfants, depuis la porte Cauchoise jusqu'à la rue Percière.
« Au levant, la rue Percière, le Marché-Neuf, la rue Massacre.
« Au midi et au couchant, la rue Cauchoise, le côté nord du Vieux-Marché, la rue du Gros-Horloge, depuis le Vieux-Marché jusqu'au Gros-Horloge.
6. — Saint-Vincent.
« Au nord, la rue du Gros-Horloge, depuis le Vieux-Marché jusqu'au Gros-Horloge.
« Au levant, les rues des Gordeliers et de l'Estrade.
« Au midi, le port, depuis la porte Saint-Eloy jusqu'à celle des Consuls.
« Au couchant, la rue Saint-Eloy jusqu'au passage de la Monnaie, la cour et lepassage de la Monnaie dans son entier, la rue Herbière aussi dans son entier, les trois faces nord, est et sud du Marché-aux-Veaux jusqu'à l'église Saint-Michel.
7. — Saint-Eloy.
« Au nord, la rue Cauchoise, depuis la Porte de ce nom jusqu'à l'église Saint-Michel.
« Au levant, la face à l'ouest du Marché-aux-Veaux, l'entrée de la rue du Petit-Enfer et la rue Saint-Eloy dans leur entier, jusqu'au passage de la Monnaie; delà jusqu'au port : le côté ouest seulement de ladite rue Saiut-Eloy.
« Au raidi, le port, depuis la porté Saint-Eloy jusqu'à la grille du Mont-Riboudet.
« Au couchant, les murs de la ville, depuis la grille du Mont-Riboudet jusqu'à la porte Cauchoise.
8. — Saint-Maclou.
« Au nord, la rue Martinvitle, depuis l'église Saint-Maclou jusqu'à la porte Martinville.
« Au levant, le rempart, depuis la porte Martinville jusqu'à la porte Guillaume-Lyon.
« Au midi, lé port, depuis la porte Guillaume-Lyon jusqu'à la porte Jean-le-Gœur.
« Au couchant, la rue Malpalu,depuis la porte Jean-le-Gœur, jusqu'à l'église Saint-Maclou.
9. — Saint-Vivien.
«, Au nord, la rue Saint-Vivien, denuis la rue Pont-dé-l'Arquét jùsqu'â la Croix-ae-Pierre.
« Au levant, les rues des Verriers, Pichine-des-Près, te rempart jusqu'à la pôrte dèMartinville.
« Au couchant, les rues du Ruissel et Pont-de-l'Arquet.
« Au midi, la rue Martinville, depuis la porte jusqu'à la rue du Ruissel.
10. — Sttinl-Nlcaise.
« Au nord, le rempart, depuis la rue de Flandres jusqu'à la porte des Capucins,
« Au levant, lés rues Coque'rèàumont et des Capucins.
« Au midi, la rue Saint-Vivien^ depuis la Croix-de-Pierre jusqu'à la rue de l'Epée.
« Au couchant, les rues Goignebert, des Deux-Anges et de Flandres.
11. —> Saint-François, précédemment l'église con-o ventuelle des Pénitents.
« Au nord, au levant et au midi, les murs de la ville, depuis la porte des Capucins jusqu'à la porte Martinville.
Au couchant, les rues des Capucins, Coque-reaumont, des Verriers et des Prés, depuis la porte dès Capucins jusqu'à celle de Martinville,
Paroisses et succursales des faubourgs.
12. — Sainte-Magdeleine, précédemment l'église de l'Hôpital, de la Magdeleine.
« Au uord» la rue Saint-Maur, depuis les murs de la ville jusqu'au pied de la côte du Mont-aux-Malades, et le bas de cette même côte.
« Au levant, les murs de la ville, depuis l'alignement de la rue Saint-Maur jusqu'à fa rivière.
« Au midi, la "rivière, depuis la grille du Mont-Riboudet jusqu'au territoire de Déville, fixé, dans cette partie, à l'embranchement de la route de Gaudebec sur celle du Havre.
« Au couchant,, le territoire de Déville, ainsi qu'il sera déterminé.
Saint-Gervais, succursale,
« Au nord, la rue Saint-Maur et le bas de la côte du Mont-aux-Malades.
« Au levant, les murs de la ville, depuis la rue Saint-Maur jusqu'à la porte Cauchoise.
Au midi, la rue du Renard, depuis la porte Cauchoise jusqu'à son embranchement avec la route du Havre.
« Au couchant, le territoire de Déville*
13. — SainUSever.
« Au nordi la rivière de Seine, en ce non compris le port, réputé de la ville, depuis la Grande-Chaussée, servant de borne au territoire du Petit-Quevilly, jusqu'à l'extrémité du grand Cours joignant aux prairies de Sotteville.
« Au levant, le territoire de Sotteville, borné par l'extrémité du grand Cours, le fossé des prairies appartenant au ci-deyant prieuré de Gram-mont, et la place vide nommée l'Allée de Grammont; la croix de Grammont à l'extrémité de la rue Pavée.
« Au midi, depuis la croix de Grammont, le chemin tendant de ladite croix à la rue d'Elbeuf, avec toutes les maisons et jardins étant à l'orient et au midi de ladite rue: la Marc-du-Parc, le Parc appartenant à MM. de l'Essart et de Se-couttes, les maisons et terres voisines jusqu'à la croix SainkYon» . « Au couchant, le territoire du Petit-Quevilly,
Saint-Benoît, précédemment l'église conventuelle des religieux bénédictins de Bonne-Nouvelle, provisoirement succursale, jusqu'à ce que, par la retraite ou l'extinction des religieuses emmurées, leur église se trouvant vacante, on puisse définitivement prononcer laquelle des deux églises mérite la préférence,
« Au nord, le canal de la Seine, depuis la Grande jusqu'à la Petite-Chaussée.
« Au levant, la Petite-Chaussée jusqu'à la rue du Pré; en retour, la rue du Pré jusqu'à la rue Saint-Julien ; la rue SainhJulien jusqu'à la croix de Saint-Yon. « Au midi, en pointe, croix de "Saint-Yon. « Au couchant, le territoire du Petit-Quevilly.
Saint-Paul, succursale de Saint-Maclou.
« Au nord, le bras le plus septentrional de la rivière d'Aubette.
« Au levant le territoire de..... ainsi qu'il sera déterminé.
« Au midi, le cours de la Seine, depuis la porte Guillaume-Lyon jusqu'au territoire de la Mi-Voie, compris les Isles-larManque et Brouilly.
« Au couchant, les murs de la Ville, depuis le bras le plus septentrional d'Aubette, jusqu'à la porte Guillaume-Lyon,
Saint-Hllaire, succursale de Saint-François. « Son territoire comprendra ;
Le faubourg,
Le hameau du faubourg Salnt-Hilaire, -
La vallée du faubourg Saint-Hilaire,
Le boulevard jusqu'au Marché-aux-Chevaux inclusivement,
La petite rue de la Tannevêre,
La petite rue de la Chartreuse,
La vallée de Saint-Gilles,
Le Nid-de-Chien.
Saint-Romain, ci-devant l'église conventuelle des Carmes déchaussés.
« Au nord, le territoire du Mont-aux-Malades et du fiois-Guillaume, ainsi qu'il sera déterminé.
« Au levant, le Marché-aux-Chevaux exclusivement, et de là, par une ligne droite, jusqu'au chemin montant à la côte des Sapins; ledit chemin, jusqu'à la côte exclusivement.
« Au midi, le rempart, depuis le Marché-aux-Ghevaux jusqu'à la rue Saint-Maur.
« Au couchant, le territoire de Saint-Gervais, succursale de Saint-Louis ».
(Ge décret est adopté.)
Plusieurs membres du comité d'aliénation proposent et l'Assemblée décrète les ventes de domaines nationaux à diverses municipalités, dans les termes suivants t
« L'Assemblée nationale, sur les rapports qui lui ont été faits par plusieurs membres du comité d'aliénation, des soumissions faites, suivant les formes prescrit.es, par différentes municipalités ci-après nommées, a déclaré et déclare leur vendre les biens nationaux, dont l'état est annexé aux procès-verbaux respectifs des estimations desdits biens aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, payables de la manière déterminée par le même décret; savoir :
A la municipalité de Montpellier, département de l'Hérault, pour la
somme de............ 288,801 1. » s. » d.
A la municipalité de Montrichard, département de Loii^elrGher.. 27,680 » *
A celle de Ghaumont-sur-Loire, même département............... 48,843 16 10
« Le tout ainsi qu'il est plus au long porté aux décrets et états d'estimations respectif^, annexés à la minute du procès-verbal de ce jour. »
au nom du comité des pensions. Messieurs, l'article 4 de la loi du 14 janvier 1790 porte que tous les fonctionnaires publics absents, excepté Ceux qui le sont eu vertu de mission expresse du gouvernement, seront tenus de rentrer dans le royaume et qu'il ne leur sera payé, même provisoirement, aucunes pensions, dons, gratifications, ni aucuns traitements ni appointements, jusqu'à leur retour. L'article 5 de la loi du 22 décembre de la même année ordonne que tout Français fonctionnaire public ou recevant des pensions ou traitements quelconques de l'Etat, qui ne sera pas présent et résidant dans le royaume, et qui n'aurait pas prêté le serment civique dans le délai d'un mois après la publication dudit décret, sans être retenu au pays étranger par une mission du roi pour affaires de l'Etat, sera, par ce seul fait, déchu de ses grades
et emplois et privé de ses pensions, traitements, appointements ou gratifications.
Le délai est expiré : il est essentiel que l'Assemblée soit instruite de l'exécution de ses lois, parce que quelques-unes des personnes qui n'ont plus droit à aucunes pensions, ont laissé des dettes en France, elles s'embarrassent fort peu que leurs pensions soient ou ne soient pas payées, parce que si elles étaient payées, elles seraient emportées par leurs créanciers. Ainsi elles en sont quittes pour ne pas payer leurs dettes.
En conséquence, je demande qu'il soit rendu compte à l'Assemblée de l'exécution des lois des 14 janvier et 22 décembre 1790; qu'à cet effet le comité des finances, chargé de surveiller l'emploi des deniers publics, soit tenu de présenter, dans le cours de la semaine prochaine, un état de là radiation qui a dû être faite, dans les différents départements, des appointements, traitements et autres fonds, qui se payaient à des Français actuellement en pays étrangers,hors les cas prévus par les lois de i'Btat. l'Assemblée se réservant, sur le vu de l'état de radiation, de prendre les mesures que sa sagesse lui dictera pour le payement des créanciers qui justifieront de droits antérieurs à l'absence desdits Français.
(Cette motion est décrétée.)
au nom du comité d'emplacement des tribunaux et corps administratifs. Le directpire du district de Pontoise, placé provisoirement dans là maison appelée le grand vicariat, demandé de l'acquérir pour s'y établir et y placer le tribunal. Le directoire du département, examen fait de la pétition, l'a trouvée raisonnable et juste, et y a donné son attache.
Votre comité n'a pu qu'applaudir à la sagesse et à la modération des administrateurs de ce district, qui ont été les premiers à demander que l'on séparât de l'acquisition tout l'inutile et l'agréable, et à se renfermer dans les bornes du nécessaire précis. De cette maison dépend un jardin assez vaste, et le directoire, fidèle à vos vues d'éconômie, en a en quelque sorte détourné ses regards, et semble dire comme un patriarche : Pepige fœdus cum oculis meis, ut ne cogita-rem quidem.
Votre comité a la douce espérance que cet exemple ne restera pas sans beaucoup d'imitateurs, et qu'il n'aura plus que de justes éloges à donner aux corps administratifs : ce sera la partie consolante de sou travail. Autant le reproche est amer au cœur, autant la louange est agréable à prodiguer; de tous les tributs c'est le seul peut-être qu'il est heureux d'avoir & payer.
Votre comité vous propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d'emplacement, autorise le directoire du district de Pontoise à acquérir, aux frais des administrés,*la maison appelée le grand vicariat, avec la cour dont elle est entourée, cotée A au plan qui demeurera joint au présent décret, ainsi que le bâtiment qui servait d'auditoire pour rofficialité, coté G au même plan, pour y établir le district et le tribunal, en observant tes formes prescrites par les décrets de l'Assemblée nationale, pour l'aliénation des biens nationaux, et à la charge qu'aucun des administrateurs, juges, greffiers, secrétaires ou archivistes, commis, ne pourront y être logés; excepte de ladite permission d'acquérir, les jardins et autres emplacements dépendant dudit vicariat, lesquels
seront vendus séparément en la manière prescrite et accoutumée. » (Ce décret est adopté.)
rapporteur. Votre comité a encore 600 à 700 rapports de cette taille à vous faire ; rapports qui vous consumeraient un temps
lorsqu'il n'y
(Cette motion est décrétée.)
au nom du comité des finances. Vous avez déterminé par le décret du 30 décembre 1790, les formes à remplir par les propriétaires d'offices supprimés qui voudraient, en conformité des décrets des 30 octobre et 7 novembre précédents, employer provisoirement leur finance jusqu'à concurrence de moitié en acquisition de domaines nationaux.
Pareille faculté a été accordée aux propriétaires de fonds et cautionnements de finance, par l'article 2 du décret du 20 janvier 1791.
Quant aux officiers comptables supprimés, le décret du 7 novembre 1790, ne les admet à acquérir des biens nationaux qu'en rapportant des états au vrai légalement arrêtés, ou qu à la charge de payer l'autre moitié du prix en argent comptant.
Si ce décret était applicable, dans sa rigueur, aux receveurs généraux et particuliers des finances, la faculté qu'il contient serait illusoire, puisque, d'une part.il est peu de fortunes qui réunissent 1a valeur d'un office de receveur général des finances, et une somme égalé en argent comptant; et que, de l'autre, les états au vrai ne pouvant être arrêtés légalement qu'au conseil dont les fonctions bientôt anéanties sont déjà suspendues. Mais les offices de receveurs généraux, de trésoriers généraux et de receveurs particuliers des impositions n'ont été supprimés que par un décret postérieur, et en date du 14 novembre 1790.
L'article 1er porte qu'il sera pourvu incessamment à la liquidation ou remboursement des finances et cautionnements desdits offices et commissions, suivant le mode et la manière décrétés pour la liquidation des ofhcés de judicature, après que les titulaires auront justifié de l'arrêté de leurs comptes et de leur entière libération sur tous ces exercices.
L'article 2 porte même que le payement des intérêts de leur finance cessera en entier, un an après leur dernier exercice, quand même ils n'auraient pas fait procéder à leur liquidation et au remboursement qui en doit être la suite. Il est' donc indispensable de les mettre à portée de pouvoir faire procéder à leur liquidation. Il s'agit donc, non pas d'appliquer à ces officiers comptables la rigueur du décret du 7 novembre, antérieur à leur suppression, mais de leur appliquer le mode et la manière décrétés pour la liquidation des offices de judicature, application prescrite par le décret de leur suppression même.
Cette mesure importe à la justice de la nation; elle tend d'ailleurs à augmenter la concurrence parmi les acquéreurs des biens nationaux, et l'amortissement d'intérêts considérables qui pèsent aujourd'hui sur le Trésor public. Le décret que je suis chargé de vous proposer est destiné à détermioer le mode d'après ce que lesdits titulaires pourront justifier de l'arrêté et de leur libération sur tous les exercices, en conformité
du décret de leur suppression dudit jour 14 novembre dernier. Voici ce projet de décret :
Art. 1er
« L'Assemblée nationale décrète que les officiers comptables, supprimés par le décret des 12 et 14 novembre 1790, sont autorisés à se retirer par-devant l'ordonnateur du Trésor public, pour y faire provisoirement arrêter leurs comptes et constater leur libération.
Art. 2.
« S'il résulte de la vérification de cet état, que l'officier comptable ne doit rieu au Trésor public, ledit ordonnateur lui délivrera une décharge provisoire, sur la remise de laquelle, ainsi que de la quittance de finance et provisions, le commissaire du roi, directeur général de la liquidation, lui remettra, conformément à ce qui est pres-crit à cet égard par le décret du 20 janvier dernier, une ou plusieurs reconnaissances provisoires de finance jusqu'à concurrence de moitié de la finance de leur office, avec cessation d'intérêt de la somme portée aux reconnaissances, à compter de leur date; ces reconnaissances seront reçues en payement de biens nationaux.
Art. 3.
« Les biens nationaux, à l'acquisition desquels ces reconnaissances auront servi, demeureront garants de tout ce qui pourrait être constaté dû par le résultat des comptes définitivement arrêtés, dans la forme qui sera décrétée.
Art. 4.
« Les oppositions formées avant la délivrance desdites reconnaissances auront leur effet lors de la liquidation définitive, et les opposants pourront faire valoir leurs droits sur les domaines acquis par leurs débiteurs après l'épuisement des créances du Trésor public sur les mêmes domaines, s'il y a lieu.
Art. 5.
« Les receveurs généraux des finances et autres comptables qui, pour opérer des compensations sur leurs finances, auraient pris les deniers de leur recette, seront privés de la faculté résultant du présent décret, sans préjudice de plus amples peines, s'il y échet, et ils ne pourront obtenir le remboursement des finances à eux restant dues que lorsque leur comptabilité aura été apurée suivant les formes qui seront prescrites.
Art. 6.
« A l'égard des receveurs particuliers des finances qui ne sont comptables qu'à leurs receveurs généraux respectifs, ils rapporteront audit commissaire du roi, directeur général de la liquidation, les consentement et quitus délivrés par lesdits receveurs généraux, visés par ledit ordonnateur du Trésor public.
Art. 7.
« Ceux des receveurs particuliers des finances dont les comptes des exercices antérieurs à l'année 1771 ne seraient pas encore jugés sont autorisés à se retirer par-devant -l'ordonnateur du Trésor public, pour y faire provisoirement arrêter leurs comptes et constater leur libération, et seront admis à jouir du bénéfice de l'article 2, en apportant le consentement du receveur général. »
(Ce décret est adopté.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur les patentes (1).
rapporteur, donne lecture de l'article 13 du projet du comité.
Je demaDde que l'Assemblée veuille bien s'expliquer sur les deux mots maîtres ouvriers de cet article. Je pense bien qu'elle entend par maîtres ouvriers les ouvriers travaillant pour leur compte et non pour celui d'autres maîtres ; cependant on a parlé hier des tisserands comme devant être assujettis au droit de patente.
J observe qu'il y a deux espèces très différentes de tisserands : l'une est celle des tisserands travaillant à leur compte pour vendre leurs ouvrages à qui ils veulent ; l'autre, non moins nombreuse, est celle dès tisserands ouvriers travaillant pour-lé compte des fabricants qui leur fournissent les matières et les payent à la journée ou à la tâche.
Je crois bien que votre intention n'ést pas d'obliger ces derniers au droit de. patente puisqu'ils travaillent, ainsi que les ouvriers menuisiers, etc., pour des maîtres qui payeront le droit. Je demande donc que, pour plus de clarté, on ajoute après les mots : maîtres et ouvriers, ceux-ci : travaillant pour leur compte, et après les mots : faisant le commerce ou exerçant... ceux-ci ; pour leur compte.
Un membre : Cet amendement donnerait lieu à bien des abus. Il ne faut excepter que les ouvriers travaillant à l'atelier, et les fonctionnaires publics.
Un membre : 11 est impossible d'imposer des ouvriers travaillant chez eux, quoiqu'au compte d'un manufacturier, et qui ont à peine de quoi pourvoir à leur subsistance.
On n'a pas compris dans l'article lés huissiers, les avoués, les chirurgiens et les médecins ; il faut les comprendre nominativement dans cet impôt. Toutes les professions lucratives doivent payer la protection que leur accorde la loi : je ne vois pas pourquoi on nous ôte, nous, médecins, de la classe des citoyens ; nous gagnons de l'argent; pourquoi ne payerions-nous pas comme nos malades?
Je trouve que le texte du comité est défectueux. Il faut une rédaction qui comprenne toutes les professions soumises à l'impôt : ou plutôt, pour éviter la difficulté et la longueur de cette nomenclature, il faut spécifier toutes les professions et tous les genres de travaux qui doivent en être affranchis.
Le comité a prétendu exprimer une certaine quantité, de professions qu'il a détaillées sous les dénominations de manufacturiers, de fabricants, etc... ; il a cru ensuite réparer les omissions qui se sont glissées dans son article, en disant : Et généralement toutes les personnes faisant le commerce ou exerçant une profession ou métier quelconques. ,
Si toutes les professions de l'Etat doivent être soumises au droit, de
patente, on devrait ne Spécifier dans l'article* que i'èxception qui ne
peut tomber que sur les fonctionnaires publics;
L'article, à mon sens, devrait être rédigé ainsi : « Toute personne exerçant pour son compte art ou métier quelconques... » Il y aurait les plus grands inconvénients à adopter l'article tel qu'il nous est proposé, parce qu'eu mettant des clauses générales, les classes dont a parlé M. Lavie prétendraient être exceptées. Elles diraient : Si l'Assemblée avait voulu englober tout le monde dans le droit, elle n'aurait pas mis de détails.
Je conclus donc, Monsieur le Président, que le comité nous présente une rédaction dans laquelle il n'y ait que ces de'ux exceptions, les fonctionnaires publics et les gens qui travaillent comme ouvriers.
appuie la motion de M. d'André*
Je voudrais qu'on ajoutât : « Ne seront exceptés de l'obligation de prendre des patentes que ceux qui, étant ouvriers et travaillant chez d'autres, ne font point un lucre particulier. »
Messieurs, vous appliquez au nouveau système des lois qui ne peuvent être appliquées qu'à l'ancien, si vous distinguez des maîtres ouvriers et des maîtres artisans, lorsqu'il ne sera plus question de maîtrises et de jurandes, mais seulement de patentes.
Je demande que Par* ticle soit rédigé de manière à comprendre les maîtres de poste, les maîtres et directeurs de messageries et les directeurs de spectacles. Ces gens-là doivent assurément être assujettis à des patentes.
Messieurs, vous ne devez pas perdre de vue le principe fondamental de l'institution qui vous est proposée. C'est une imposition sur les consommations prise sur les fabricants ; voilà quelle est la nature de l'impôt. Si elle est telle, il est évident que vous ne pouvez pas en excepter 2,000 ouvriers qui travaillent pour un manufacturier.
Je combats la proposition de M. d'André, ayant pour objet de n'exprimer dans l'article que les exceptions. La loi ne peut jamais soumettre à un droit quelconque, sans désigner les choses et les personnes qui doivent payer ce droit. Il faut que Je comité présente un tableau de toutes les professions qui doivent payer le droit de patente. Il est une foule de travaux que vous ne pouvez pas patenter. Par exemple, la profession des fileuses qui travaillent chez elles, à leur propre compte, et qui ne gagnent pas, dans certaines provinces, 10 sous par jour. Soumettez au droit tous ceux qui ont un atelier, une boutique, un appareil mercantile ; mais ne les désignez pas sous une expression vague ét générale : car il est une infinité de travaux sur lesquels la loi ne peut et ne doit avoir de prise.
Il serait insensé de vouloir interdire le travail et l'usage de ses bras au malheureux qui, n'ayant pas le moyen d'acheter une patente, aurait cependant, plus que toutabtre, besoin de travailler; ce serait mettre un impôt sur la pauvreté laborieuse, donner une prime à l'oisiveté et au vagabondage, et ôter la vie à l'honnête homme indigent. Il faut que les travaux de l'agriculture,
il faut que tous les travaux domestiques soient exemptés. Ët remarquez que la désignation de tous ies genres d'occupations qui doivent être exceptés serait aussi difficile à faire que celle des professions imposables, et que la moindre omission exposerait une foule de malheureux à être poursuivis.
Je demande que le comité fasse la nomenclature de toutes les professions soumises au droit ; cette nomenclature n'est pas si difficile à faire, puisque les anciennes lois l'ont faite, puisqu'on la trouve sur les registres de tous les parlements.
fils. Je propose un sous-amendement qui est que les fonctionnaires publics n'auront pas besoin de patentes pour exercer leurs fonctions, à moins qu'ils n'exercent quelque art ou manufacture particulier.
Il est injuste qu'un homme qui ne peut pas payer la valeur de 3 journées de travail pour obtenir le droit qui lui serait le plus précieux, celui de citoyen actif, soit soumis, pour obtenir la permission de travailler, à prendre une patente de 6 livres ou 9 livres. Cela est évidemment impossible : or, c'est précisément le résultat que vous obtenez, si vous exigez un droit de patente sans exception de toutes les personnes travaillant en leur particulier. Je demande donc, Messieurs, que l'indication soit précise. (Murmures.)
Un membre : Dépêchez-vous !
Permettez-moi, Monsieur le Président. de demander qu'aucun membre n'ait le droit de me dire : Dépêchez-vous I
Je demande, Messieurs, l'indication précise dè toutes les professions soumises au droit de patente, et je demande en outre qu'on excepte formellement tout homme n'ayant pas le moyen de payer la contribution de citoyen actif.
appuie la motion de M. Martineau.
Il est ridicule d'établir des exceptions à une loi, avant de l'avoir généralisée; cette marche serait sujette à toute sorte d'embarras, de réclamations et de prétextes plus ou moins spécieux pour se soustraire à l'esprit de la loi, qui n'est jamais plus juste que lorsqu'elle est générale et s'étend également sur tous, sauf quelques exceptions que la raison et l'équité réclament et commandent. De plus, une nomenclature d'arts et métiers, dont on n'a pas de modèle parfait, laisserait une ouverture trop étendue à la cupidité et à la mauvaise foi, qui ne se croiraient jamais compris sous telle ou telle dénomination. .
Si vous aimez mieux faire la nomenclature de toutes les professions soumises au droit que celle des professions peu nombreuses qui en doivent être exemptes, je soutiens que la loi est impossible. Chaque département a des professions différentes, selon la nature de ses productions et de ses manufactures; chacun donne aux mêmes professions des noms différents; il n'est personne dans cette Assemblée, il n'y a pas un membre uu comité qui puisse en dresser un tableau exact.
Je demande donc qu'on se borne à désigner ies I exceptions; et j'appuie celle qui a été proposée ! par M. Décretot, en faveur des ouvriers n'ayant |
pas le moyeu de travailler à leur compte. Je réponds à ceux qui ont craint que cet amendement ne pût devenir abusif, que perdre une petite partie de l'impôt est un bien moindre mal que celui d'enlever la subsistance du malheureux qui gagne à peine dans sa jouruée de quoi vivre. On peut d'ailleurs se fier à la surveillance des municipalités et des commissaires de police.
Quant à l'amendement de M. Malouet, je remarque que tout homme, ayant un commerce public, doit payer la contribution de citoyen actif.
Toute énumération des professions, arts et métiers qui doivent être soumis au droit de patente serait nécessairement imparfaite ; elle ne distinguerait certainement pas le malheureux qui ne gagnerait presque rien dans sa profession, de celui qui l'exercerait avec succès. Elle laisserait toujours prise à la chicane et aux contestations. 11 suffit de soumettre au droit de patente, par une disposition générale, tous les citoyens exerçant quelque art ou métier, sous des réserves raisonnables et exprimées par la loi.
Quant à l'amendement de M. Décretot, il n'atteint pas ^e but qu on se propose et n'est propre qu'à rendre nul le produit de l'impôt.
Le droit de patente est un véritable impôt indirect, qui pèse indirectement sur le consommateur. Le même motif qui vous engage à diminuer le droit; de patente pour les comestibles, doit vous faire excepter ceux qui ne retirent de leur travail aucun revenu imposable. Vous avez déjà décrété que l'homme qui ne gagne que le dernier salaire pour sa journée de travail, ne sera pas soumis à la contribution mobilière; mais qu'il sera inscrit à la suite du rôle pour être spumis à la surveillance de ses concitoyens, qui sauront si en effet il n'a pas le moyen de payer l'impôt. Toutes les difficultés qui se sont élevées sur 1 article 13, seront écartéest si vous dites que tout homme qui n'est pas soumis à la contribution mobilière sera exempt du droit de patente.
Je retire mon amendement et je me rallie à l'opinion de M, Defermon.
Voiei la nouvelle rédaction que je vous propose :
Art. 12 (art. 13 du projet),
« Toutes personnes faisant le commerce ou exerçant, autrement qu'en qualité d'apprentis oit compagnons, une profession, art ou métier quelconque, seront assujetties à se pourvoir de patente, et ne pourront, à compter du premier avril prochain, continuer leur commerce ou profession sans avoir satisfait aux formalités ci-devant prescrites. Ne seront point assujettis à se pourvoir de patente, les fonctionnaires publics; s'ils exercent d'autres professions étrangères à leurs fonctions, ni ceux qui ne payent pas la taxe de trois journées de travail au rôle de la contribution mobilière. »
(Cet article est décrété.)
Art. 13 (art. 14 du projet)»
* Les boulangers, qui n'auront pas d'autre commerce ou profession, ne payeront que la moitié du prix des patentes, réglé par l'article 11 du présent décret. » (Adopté.)
rapporteur, donne lecture de l'article 15 du projet, portant une exception en faveur des médecins, chirurgiens, accoucheurs et sages-femmes..
Il serait inouï d'assujettir au 'droit de patente cette Classe de citoyens.
appuie l'opinion de M. Boussion.
Un membre observe que cet article est inutile par suite de l'adoption de la dernière disposition de l'article 8 et de la nouvelle rédaction de l'article 12.
(L'article 15 du projet est supprimé.)
Un membre propose que les titulaires de. certains offices existants ne puissent être assujettis à prendre des patentes pour la continuation et l'exercice de leurs fonctions.
(Cette motion est renvoyée à l examen du, comité.)
rapporteur t donne lecture de l'article 16 du projet.
Un membre : Je pense que fe comité a très bien fait de n'imposer aucun droit de patente aux personnes dénommées en l'article ; mais je croîs qu'il est nécessaire d'obliger ces particuliers à prendre des patentes qui leur seront délivrées gratis, et qui contiendront leurs noms et leurs demeures, ainsi que le'sJ lieu* qu'ils se proposent de fréquenter.
Au fond,' cet article est un privilège indirect; mais il est juste de favoriser la classe Indigente qui ne peut subsister que par le produit de sa revente. Seulemeut je propose qu'il leur soit défendu, par la permission gratuite ou patente de pauvreté qu'ils obtiendront de la police, d'embarrasser la voie publique,... (Rires.)... et que la patente ne leur soit accordée que sur le consentement par écrit du propriétaire ou principal locataire de la maison devant laquelle ils voudront se placer.
J'adopte l'avis du comité, et je demande la question préalable sur tous lés amendements, mais j'observe à l'Assemblée qu'il faut ajouter dans l'article encore une exception en faveur des marchands qui vendent des fleurs et une multitude de petits objets, tels qu'allumettes, amadou, etc. Prenons garde, Messieurs, qu'en généralisant tout, et ne spécifiant pas les exceptions pour la classe des nécessiteux, nous n'ouvrions la porte aux vexatiuns.
Je démande qu'on ajoute ces mots : « Vendant des comestibles et vieux habits, fleurs et autres menues denrées sur éventaires. »
Je crois qu'il convient de retrancher de l'article ces mots : les marchands et marchandes, pour ne laisser subsister que ceux-ci : « revendeurs et revendeuses » et j'observe que s'il est important de laisser aux pauvres, qui n'ont pas de capitaux à consacrer à un grand commerce, les moyens de vivre de la revente des comestibles dans les marchés et lieux publics, d'un autre côté, il serait fort contraire aux vrais principes de la concurrence en matière de commerce, de favoriser, sous une forme déguisée, le commerce proprement dit abandonné à toute sorte de personnes inconnues. Ut concurrence du commerce non avoué est destructive de la concurrence utile; en conséquence, on ne peut pas trop la limiter sans cependant aller jusqu au point de détruire la faculté qu'on veut accorder aux pauvres, de faire le commerce de revente des comestibles.
Il est d'autant plus nécessaire de restreindre l'article, que l'article 19 assujettit au droit de patente les colporteurs et autres porteurs de balles dans les bourgs, villes et campagnes.
rapporteur. Nous proposons de rédiger ainsi l'article :
Art. 14 (art. 16 du projet).
« Les revendeurs et revendeuses de fleurs, fruils, légumes, poissons, beurre et œufs, vendant dans les rues, halles et- marchés publics, ne seront point tenus de se pourvoir de patentes, pourvu qu'ils n'aient ni boutiques ni échoppes, et qu'ils ne fassent aucun autre commerce, à la charge par eux de se conformer aux règlements de police. »
. (Cet article est décrété.)
rapporteur, donne, lecture de l'article 17 du projet.
Dans les différents articles du projet de décret, il n'a point du tout été question des maîtres de forges, des maîtres faïenciers, des maîtres de papeteries el de tuileries, en un mot de tous les commerçants qui ont des ateliers considérables. IL s'agit de savoir, Messieurs, si on leur fera payer leurs patentes sur le prix de leur habitation particulière ou sur le prix de leurs baux, parce que si on les faisait payer Sur l'habitation particulière, des gens qui occupent des ouvriers immensément, né payeraient pas, d'une manière proportionnée, les patentes. ( "
Je demande donc que les maîtres de forges et tous ceux qui tiennent des usines en général soient tenus de payer la patente relativement au prix de leurs baux.
Je demande qu'on augmente considérablement les droits à payer par les marchands de vin et aubergistes surtout. Je demande que le droit soit porté à six sols par livre du prix du loyer. (Murmures.)
Rien ne doit tous porter à favoriser les cabarets, surtout dans les campagnes; car ce ne sont point des auberges utiles pour recevoir les passants : c'est le réceptacle où va se corrompre une partie des habitants et qui cause une partie des désordres dont on se plaiut communément. (Applaudissements.)
Je demande que le minimum soit porté pour les cabarets à 30 livres.
Si vous mettez un nouveau droit sur le vin, c'est imposer encore les terres; si avec cêla il était adopté des droits d'entrée aux villes, il y aurait, trois ou quatre impôts territoriaux sur les vignes.
Je demande que l'article soit adopté avec la rédaction du comité.
Voix diverses : Oui I oui) Nonl non!.
Messieurs, vous avez donné deux moyens de taxes sur la valeur locative, des bâtiments : l'un, pour la contribution foncière; l'autre pour la contribution mobilière. Je demande au comité suivant quelle base l'évaluation du loyer se fera pour la perception du droit de patente..
Le comité a prévu cette question et l'a résolue. Vous avez pour base de la contribution mobilière, non pas la totalité du loyer, mais seulement la partie de l'habitation du particulier qui sert à son logement et qui est l'indice de sa richesse.
Mais ici on vous propose un impôt de consommation ; il est juste et nécessaire d'établir une égalité proportionnelle pour cet impôt comme pour les autres. Il suit de là que l'évaluation doit toujours se faire en raison de la valeur locative de tout le logement qu'occupe l'artisan ou le fabricant; sans quoi, l'homme qui n'a qu'une simple boutique payerait autant pour son droit que celui qui a une grande étendue de logement pour son état, ce qui serait souverainement injuste, en mettant le riche débitant à portée de vendre à beaucoup meilleur marché que le débitant d'une fortune médiocre, qui doit retirer de son débit les avances qu'il a faites pour son droit de patente. Il résulterait de là une grande inégalité dans la manière de payer l'impôt.
Il a donc fallu, pour prévenir ces deux inconvénients, régler le prix des patentes. D'après ces explications, je crois que l'article 11, quoique décrété hier, est susceptible d'amendement et qu'il faut ôter le mot habitation qui ne désigne que la partie du logement.
Je propose de mettre : à raison du prix du loyer et de la valeur locative de la maison.
Je propose d'ajouter ensuite les mots : boutiques, magasins et ateliers.
On pourrait dire que le droit de patente sera perçu à raison de la valeur locative des bâtiments, boutiques, magasins et ateliers, et non seulement à raison de son habitation. »
(Cette addition de l'article 11 est décrétée.)
Dans toute la France et surtout dans Paris et Versailles, il existe des personnes qui font le commerce du vin, soit dans les maisons royales, soit dans des maisons particulières, et qui ne sont pas censées payer de loyer. Vous sentez quel tort cela pourrait faire aux autres aubergistes et marchands de vins, qui réellement payent l'impôt. Je demande que le prix de leur loyer soit estimé par comparaison.
J'insiste sur: le premier amendement que j'ai proposé, de dqubler le minimum des patentes des cabaretiers, car j'observe qu'il est très rare que le cultivateur envoie chercher le vin chez le ca-baretier du coin; et de le porter à 30 livres.
(Cet amendement est adopté.)
Messieurs, vous venez de décréter que le minimum du droit pour les cabaretiers sera de 30 livres ; par conséquent, vous avez dit que ceux qui auraient un loyer au-dessous de 200 livres payeraient cependant 30 livres.
Je propose que le décret soit conçu de manière que les contribuables payent : 3 s. 6 d. pour livre du prix du loyer depuis 200v livres; 4 sous depuis 400 livres jusqu'à 600 livres; 4 s. 6 d. depuis 600 livres jusqu'à 800 livres; et 5 sous pour les loyers au-dessus de; 800 livres. Il ne serait pas juste en effet que vous fissiez payer 30 livres pour un loyer moindre de 200 livres et que vous ne fissiez payer que le même droit pour les loyers au-dessous.
(Cet amendement est adopté.).
Messieurs, il y aura de ces droits de patente qui seront très considérables; si vous décrétez que les particuliers qui seront soumis à prendre des patentes, en fassent le déboursé avant que la patente soit délivrée, vous mettez dès ce moment-ci la plupart des particuliers sans pain.
Je dis, Messieurs, qu'il est absolument indispensable que les patentes, lorsqu'elles excéderont une certaine somme, soient payées par portions, soit d'un sixième ou d'un huitième.
Monsieur le Président, l'observation est juste; mais elle ne peut empêcher de décréter l'article, parce que la manière dont on payera, sera l'objet d'un rapport particulier. Il est certain qu'on ne peut pas exiger 4,000livres dans le mois de décembre pour donner la liberté de vendre l'année suivante; il faudra nécessairement avoir des échéances. Le comité vous proposera là-dessus ses vues.
(La motion de M. Moreau est renvoyée au comité.)
met aux voix l'article 15, qui est ainsi conçu :
Art. 15 (art. 17 du projet.)
« Les particuliers qui voudront réunir à leur commerce, métier ou profession, la faculté d'exercer les professions de marchands de vins, brasseurs, limonadiers, distillateurs, vinaigriers, marchands de bière et de cidre, aubergistes, hôteliers donnant à boire et à manger, traiteurs, et restaurateurs ; ceux même qui n'exerceraient que les professions ci-dessus dénommées, acquitteront le prix des patentes sur le pied ci-après; 30 livres pour ceux dont le loyer sera de 200 livres et au-dessous ; 3 s. 6 d. pour livre du prix du loyer au-dessus de 200 livres jusques et compris 400 livres; 4 sous pour livre du loyer, depuis 400 livres jusques et compris 600 livres; 4 s. 6 d. de 600 livres à 800 livres ; et 5 sous pour les loyers au-dessus de 800 livres.
(Cet article est décrété.)
Je viens de recevoir la lettre suivante :
« Doulens, le
« Monsieur le président, je m'empresse de vous annoncer que l'assemblée électorale, du département de l'Allier vient de nommer pour son évêque M. Laurent, curé d'Huilaux, député à l'Assemblée nationale.
t L'Assemblée nationale reconnaîtra, à ce choix, combien ses décrets sont respectés, de nous ; elle s'applaudira de son ouvrage et d'avoir fait des lois qui produisent de si neureux effets. C'est un nouveau bienfait qui la fera combler de bénédictions universelles.
« J'ai l'honneur d'être, etc...
« Signé : Le Président de l'assemblée électorale
du département de l'Allier. »
La discussion sur les patentes est reprise.
rapporteur, donne lecture de l'article 18 du projet.
M. Pierre de Delley. Messieurs, autant j'ai insisté pour que l'impôt passât sur les cabaretiers des campagnes, autant je réclame la justice de l'Assemblée pour les pauvres vignerons qui
souvent sont obligés de vendre un seul muid de vin pour payer leurs impositions. Or, si vous assujettissiez le pauvre vigneron, qui vend son muid de vin pour payer ses charges, à prendre un droit de patente, souvent le droit sera équivalent à ce qu'il le vendra.
Je demande donc que tout propriétaire cultivateur qui vendra le vin de son cru, soit tenu, avant de vendre, d'avertir la municipalité, et qu'au lieu de payer trois livres par mois, le droit soit mis à deux sous par jour.
Je propose par amendement que la faculté de prendre des patentes à terme pour 1, 2, 3 mois, soit exclusivement réservée aux propriétaires pour vendre le vin de leur cru, parce que vous avez des marchands de vin assez habiles pour saisir la saison de l'année où le vin se vend le mieux; ils vendraient pendant 3 ou 4 mois dans l'hiver, quand le vin se vend bien et, dans l'été, ils ne vendraient plus.
Je ne peux admettre que l'on donne à un hominela faculté de payer son vin pour un jour ou pour deux; mais je pense que l'Assemblée pourrait réduire le droit à 30 sols pour ceux qui ne demanderaient cette faculté que pour un mois.
rapporteur. J'adopte la première partie de l'amendement de M. d'André et je propose la rédaction suivante :
Art. 16 (art. 18 du projet).
« Il sera délivré des patentes à termes aux propriétaires et cultivateurs pour 1,2 ou 3 mois et à ceux qui voudront vendre en détail des boissons de leur crû pendant un temps limité. Le prix desdites patentes sera de 3 livres par mois, elles ne seront délivrées qu'après les formalités prescrites, et que le prix en aura été acquitté entre les mains du préposé au recouvrement des contributions mobilières et d'habitation; mais ces patentes ne pourront être accordées pour plus de six mois dans le cours de l'année; au delà de ce terme, elles seront réputées patentes annuelles, et seront payées comme telles.
(Cet article est décrété.}
rapporteur, donne lecture de l'article 19 du projet.
Je désirerais qu'il ne fût pas à la liberté du marchand de ne présenter la patente que quand il en sera requis et que l'article lui imposât l'obligation, avant de pouvoir vendre dans un lieu, de justifier de sa pateate aux officiers municipaux.
Je demande qu'il soit retranché de l'article ces mots : lorsqu'ils en seront requis.
rapporteur. J'adopte l'amendement.
Ce sont les,villes qui veulent se décharger de l'impôt en le faisant porter sur les campagnes. (Murmures.) Je demande qu'on réduise (a taxe des colporteurs dans les campagnes à 20 livres et à 25 livres pour ceux qui ont un cheval.
(L'amendement de M. de Folleville est rejeté par la question préalable.)
Je demande qu'il soit fait une
troisième classe de 80 livres. Tout le monde sait que les colporteurs trompent les gens de campagne, soit sur la qualité, soit sur le prix des marchandises. 11 serait préférable qu'ils restassent dans leurs campagnes à cultiver la terre plutôt que d'aller courir avec de très mauvaises marchandises.
Je demande donc que les colporteurs qui se servent d'une voiture payent une patente de 80 livrés.
rapporteur. J'adopte l'amendement. Voici quel serait le texte dé l'article :
Art. 17 (art. 19 du projet.)
« Les particuliers qui exerceront la profession de colporteurs dans les villes, campagnes, foires ou marchés, seront tenus de se pourvoir de patentes, après avoirremplilesformalitésprescrites. Le prix en sera fixé suivant les proportions de l'article 11 ; mais il ue pourra être au-dessous de 10 livres pour les marchands portant la balle, et de 50 livres pour ceux qui emploieront à leur commerce un cheval ou autre bête de somme, et 80 livres pour ceux qui se serviront d'une voiture, quand même le prix du loyer de leur domicile établirait une proportion inférieure. Lesdits colporteurs et marchands forains seront tenus, lorsqu'ils en seront requis, de justifier de leur domicile, et de leurs taxes mobilière et' d'habitation, même de représenter leur patente aux officiers municipaux des lieux où ils exerceront leur commerce. »
(Cet article est décrété.)
rapporteur. J'observe à l'Assemblée que les articles 20 èt 21 du projet sont inutiles, par suite de l'addition que jous avez faite à l'article '11.'Je passe donc aux articles suivants:
Art. 18 (art. 22 du projet).
« Il sera alloué 2 sous pour livre sur le prix de chaque patente, au profit de la caisse de la commune, laquelle rétribution sera affectée, jusqu'à due concurrence, à l'acquit de ses dépenses particulières. Les officiers municipaux tiendront la main à ce qu'aucun particulier ne s'immisce dans l'exercice des professions assujetties à dès patentes par le présent décret, sans avoir rempli les formalités ci-devant prescrites, et sans avoir acquitté le droit. > (Adopté.)
Art. 19 (art. 23 du projet).
« Tout particulier et colporteur qui fera le commerce, ou exercera une profession, art ou métier quelconque, sans avoir rempli les formalités prescrites par les articles précédents, et s'être pourvu d'une patente, sera condamné en une amende du quadruple du prix fixé pour la patente dont il aurait dû se pourvoir. Lesdites amendes seront payées entre les mains du receveur de la contribution mobilière, lequel en versera moitié dans la caisse de la commune, pour être appliquée à ses dépenses particulières, et se chargera en recette ae l'autre moitié, pour en compter au Trésor public. » (Adopté.)
Art. 20 (art. 24 du projet).
« L'Assemblée nationale charge son comité des pensions de lui faire un rapport sur les secours a accorder aux différents préposés au recouvrement des impôts indirects qui ne pourront être remplacés dans la nouvelle régie. > (Adopté.)
rapprtèur. Nous avions renvoyé le premier article du projet de décret, contenant la suppression des anciens droits, jusqu'à cç que le remplacement eût été décrété. Voici donc le moment de le soumettre à la discussion.
Il y aurait beaucoup d'inçonvénient à supprimer le droit sur les cartes ; je demande, en conséquence, l'ajournement de cette partie de l'article.
li ferait peut-être convenable d'ajourner l'article entier ; cependant j'observerai à l'Assemblée qij'jJ faudrait s'en occuper incessamment, car dans ce moment-ci lès ventes de vins ne ee font pas dans la province dè Bourgogne, parce que e ux. qui ont fait des spéculations sur ce projet ne veulent pas s'assujettir auk droits qui se perçoivent encore.
(L'Assemblée ajourne la partie dé l'article relative à la suppression du droit sur lés cartes.)
Le reste de l'article est décrété comme suit :
Art.1er
« A compter du 1er avril prochain, les droits connus sous lé nom de droits d'aides perçus par inventaire ou l'enlèvement, vente et revente en gros, à la circulation et a la venté eu détail sur les boissons ; ceux connus soijs le nom d'impôts et billots, et devoirs dç Bretagne, d'équivalents du Languedoc, de masphaneng en Alsace ; le privilège de la vente exclusive des boissons dans les lieux qui y étaient sujets, les droits sur les papiers et cartons, et autres droits de même nature, sous quelque dénomination que cesott, sont abolis.
« Sont exceptés de la présente disposition les droits d'entrée dans les villes qui continueront d'être acquitté? provisoirement, comme par le passé. »
Un membre demande le renvoi au comité d'agriculture de ce qui concerne les boucheries, plomb et marque.
(Cette motiou est décrétée,)
Un membre du comité d'agriçiilfyre propose que la question de la propriété des mines, en raison de son Importance, soit agitée dans une séance du matin.
(Cette motion est décrétée,) :
Messieurs, vous venez de supprimer les droits sur'les lioissoné c'est un bien sans doute. Mais la perception dé ces droits employait un grand nombre de personnes,presque tous pères de!famille. (Murmures.)
Je ne demande pas d'exception pour eux, mais vous devez $gouréusemeot aux citoyens qui étaient employés à la perception de ces droits la justice que vous avez accordée A ceux qui étaient attachés aux gabelles et autres impôts que vous avez; déjà, supprimés; vous avez déclaré que la nation s'occuperait de leur sort. Je demande que vous preniez aujourd'hui la même détermination pour un nombre considérable de pères de famille et d'honnêtes citoyens qui ont fait éclater leur patriotisme dans la Révolution.
Ma proposition se borne à un renyoi aux co* mités des impositions et des pensions réunis qui seront chargés de vous présenter leurs vues sur la matière que je soumets A votre justice.
Non! non! cela ne regarde pas le comité de l'imposition.
Il faut replacer ces employés dans les nouvelles impositions. La plupart d'entre eux demandent à travailler.
Je ne m'oppose point du tout à ce qu'on sollicite de voijis en faveur des employés dont les places stmt supprimées; mais ie demande que le comité des pènsions soit seuf chargé de ce travail, , n „ « , M . êfcf*
Pour nous, nous vous présenterons un mode d'organisation des compagnies de finances, et tout pe que nous pouyons faire pour les anciens employés, c'est de vous proposer un article qui dira que ies nouveaux employés nécessaires seront pris dans lès anciennes compagnies.
Le reste nous est étranger; nous vous supplions de faire en sorte que le comité des impositions n'ait aucune influence sur la distribution des emplois.
(La motion de M. Le Chapelier est renvoyée au comité des pensions.)
Il me paraît indispensable que l'Assemblée charge son comité de l'imposition dé lui présenter des vues pour l'extinction des contraintes exercées et des procédures commencées pour le fait des aides,
(Cette motion est renvoyée au comité d'imposition.)
Un de MM. les secrétaires fait lecture de la lettre-suivante adressée à M. le Président de l'Assemblée nationale par MM. de Vaudreuil et de Loynes de La Coudraye:
« Mo risieu r ie Préside nt,nous nous sommes reti rés du comité de marine pour des raisons qui subsistent encore dans toutes les forces. Nos démissions ont été adressées plusieurs fois au comité même; il en a été fait mention dans l'Assemblée, et l'Assemblée a porté un décret pour que les suppléants nous remplaçassent.
« Cependant, M. le Président, nous venons d'apprendre que l'on s'est servi du prétexte que notre démission n'était pas complète pour rejeter l'admission de deux suppléants, et notamment lorsqu'il a été question de la constitution de la marine, pour leur interdire à cet effet de délibérer.
, « Nous avons l'honneur de vous confirmer que nous avons renoncé à siéger dans le comité de marine, pour ne participer à aucune des opinions qu'il a manifestées, et pour né pas servir de prétexte à rejeter deux voix précieuses qui nous Ont remplacés.
i Signé : De Vaudreuil ; « De Loynes de la Coudraye. »
lève la séance à trois heures.
RÉSIDENCE DE M. DUPORT.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du mardi, 15 février, au soir, qui est adopté. -
M. le secrétaire tait ensuite la lecture des adresses suivantes :
Adresse de félicitatioo, adhésion et dévoue-men de la garde nationale d'Evreux ; elle demande que le citoyen soldat ait le choix exclusif de ses officiers.
Adresse de la société des amis de la Constitution établie à Provins, qui expose que la nouvelle du prochain départ de Mesdames, tantes du roi, a jeté l'alarme dans tous les esprits ; elle demande que Sa Majesté soit suppliée de s'opposer à ce départ.
Adresse des officiers formant le tribunal du district de Valence, qui présentent à l'Assemblée nationale le tribut de leur admiration et de leur dévouement.
Adresse des électeurs du département du Jura, contenant le procès-verbal d'élection à l'évêché de ce département, en faveur de M. Guilloz, curé d'Orcbamps, membre de l'Assemblée nationale.
Adresse du directoire du district de Tonnerre qui annonce qu'il a été procédé à l'adjudication d'une partie des biens nationaux de son ressort: qu'il en a déjà été adjugé pour 190,300 livres, et que l'adjudication a excédé l'estimation de 102,054 r. 19 s. ; il ajoute que la majeure partie des ecclésiastiques de son arrondissement a prêté le serment civique.
Adresse du conseil général de la commune de la ville de Biaye,qui annonce que les ecclésiastiques du Blayais, qui avaient fait une déclaration criminelle contre le serment civique, se sont solennellement rétractés entre les mains de l'administration du département de la Gironde, que la plupart ont prêté le serment prescrit, et que les autres se sont engagés à le prêter au plus tôt; ils ajoutent que plusieurs curés et fonctionnaires publics, qui n'avaient pas signé Cette déclaration, se sont empressés de satisfaire à la loi.
Un membre à droite; Nommez-les doncl
M. le secrétaire nomme 15 ou 18 fonctionnaires.
Voix à droite ; C'est assez 1
Voix à gauche: Eh bienl êtes-vous contents?
se dirige vers le bureau des secrétaires pour s'assurer du fait.
Un de MM. les secrétaires : Voyez et touchez.
examine la liasse des adresses et les listes des sermeutaires, et reprend
sa place.
Adresse du principal et des professeurs du collège de Bergues qui énvoieiit à l'Assemblée une lettre de l'évêque d'Ypres, par laquelle il les interdit de leurs fonctions ae prêtre, parce qu'ils ont prêté le serment Civique.
Adresse du maire d'Epioal, qui annonce que le curé, les fonctionnaires publics, et professeurs du collège de cette ville ont prêté le serment prescrit ; it fait hommage d'un discours qu'il a prononcé publiquement sur là légitimité de ce serment.
Adresse des officiers municipaux de Bléré, département d'Indre-et-Loire, contenant le procès-verbal de la prestation du serment civique faite par tous les ronctionnaires publics de cette ville, dont ils louent le zèle éclairé pour le maintien de la Constitution.
Adresse de la société des amis de la Constitution, séante à Morlaix, qui expose qu'un des principaux moyens de rendre vains les efforts des ennemis ae la patrie au dehoîhs et au dedans, est que l'Assemblée, de concert avec le roi, accorde une amnistie générale à tous ceux qui, avant et depuis la Révolution, ont eu le malheur ou la faiblesse d'abandonner leurs drapeaux.
Un membre annonce le serment civique du clergé de Gentilly.
Un membre annonce l'hommage que fait à l'Assemblée M. Lamourette, de divers ouvrages de sa composition.
Un membre annonce le serment civique des ecclésiastiques d'Etampes.
Messieurs, vous avez entendu les détails de quelques mouvements populaires excités dans l'ancienne province de Bretagne.
Des détachements des gardes nationales et des régiments de Lorraine infanterie, et de Toul artillerie, envoyés de Saint-Malo etSaint-Servan, département d Ille-et-Vilaine, sur la réquisition de la municipalité de Dinan, pour rétablir la tranquillité publique, et s'opposer aux dégâts que causaient des bandits attroupés dans quelques paroisses voisines de cette municipalité, se sont acquittés de cette commission avec autant de prudence que de bravoure ; réunis aux gardes nationales de Dinan, ils ont marché contre les bandits, en ont essuyé plusieurs décharges de fusils, sans être sortis des bornes de la modération dont ils s'étaient fait un devoir, et sans répandre de sang, ils ont arrêté 86 des bandits, qu'ils ont conduits aux prisons de Saint-Malo. Aujourd'hui le calme est parfaitement rétabli,
Je demande que le Président de l'Assemblée nationale soit chargé d'écrire une lettre de satisfaction aux gardes nationales etauxdétachements des troupes de ligne, qui ont tenu une conduite si généreuse. (L'Assemblée décrète cette motion.)
Un membre fait hommage à l'Assemblée, de la part du sieur Marie-Adrien Dijon, juge du tribunal du district de Glermônt, d'un ouvrage de sa composition, intitulé : Réponses raisonnées aux objections des ennemis de la Constitution française.
L'ordre du jour est un rapport du comité det recherches sur Vaffaire relative à l'arrestation de Mme de Constable et des sieurs Chaillot et Dauquol.
rapporteur, Messieurs, je suis chargé par votre comité des recherches de vous rendre compte*de la procédure instruite au .tribunal de Beaune pour de prétendus enrôlements d'hommes qui devaient servir les ennemis de la chose publique.
Le directoiré du département du Doubs, instruit vers la fin du mois ue janvier, qu'il y avait dans la ville de Besançon, chef-lieu de ce département, différents particuliers soupçonnés de faire des enrôlements pour les ennemis de la patrie, chargea son procureur général syndic de . les poursuivre; celui-ci crut devoir choisir le tribunal de Beaune ; présenta sa plainte le 28 du mois dernier, contre les fauteurs de ces enrôlements. Le même jour, un juge de ce tribunal a procédé à l'audition des témoins indiqués, et sur le vu de l'information, la dame de Constable, M. Chaillot, capitaine au régiment de Mestre de camp cavalerie, màri de la nièce de cette dame, et un sieur Aubin, beau-père de cette dame, furent décrétés de prise de corps, arrêtés et transférés dans les prisons de Beaune.
Le tribunal de Beaune, après avoir interrogé les trois détenus, a pensé que les faits dont ils sont prévenus étaient de la nature de ceux sur lesquels l'Assemblée nationale se réservait de prononcer ultérieurement. Votre comité en est saisi, tt je suisrhargé de vous en rendrè compte.
Les témoins entendus sont les sieurs Grevet, Monnot, Pierre Lalné et un quatrième, dont je ne parle pas, parce qu'il ne dépose que sur les ouï-dire des autres.
Le sieur Monnot ayant du tabac à vendre est allé chez M. Dauquoi, ci-devant président, où logeait alors Mmo de Constable, pour vendre son tabac. Il dépose qu'après une longue discussion elle lui a acheté et qu'après s'ê're beaucoup plainte de l'Assemblée nationale elle lui avait proposé d'aller thjuver M. Lallemand,qui, à Bâle, engageait au nom des Seigneurs retirés dans les pays étrangers, à l'effet d'opérer une contre-révolution en France; que la dame de Constable lui avait dit qu'il ne s'en repentirait pas, qu'on le récompenserait généreusement ; qu'on donnerait 3 livrés de solde par jour et huit louis d'or comptant pour engagement; que cette dame l'avait chargé d'engager le plus d'hommes possible pour partir avec lui.
Le sieur Pierre Lalné se joint à Monnot et dépose que M. Chaillot lui a proposé de l'engager dans son régiment ; mais Mme de Constable a trouvé plus à propos de le déterminer à aller trouver M. Lallemànd à Bâle pour s'énrôler.
Le sieur Dauquoi ayant rencontré le 24 le sieur Monnot dans la rue, lui dit : « Eh bien, mon ami, quand partirez-vùus pouf la Suisse ? i
Sur l'invitation, de-l'un des dépesants, un jeune homme se rend dans la maison du président et toi jours sous le prétexte de vendre du tabac. Achat fait, M. Dauquoi eut des soupçons et se mit à dire : « Jé n'ai rien à lui proposer » ; mais Mm* de Constable : « Moi j'ai quelque chose à lui proposer, je ne crains rien, j'aime autant mourir que- de rester .comme nous sommes ; allez, mon ami, ne craignez rien, retirez votre roi de l'esclavage, soutenez la noblesse, le clergé et, votre religion. » (Murmures à droite.) .
Messieurs, dans un mémoire présenté à votre comité par l'un des accusés, on a dit qu'en supposant ces faits comme prouvés ils ne constateraient pas un délit, encore moins un crime de lèse-nation, parce qu'il ne s'agit ici que d'un simple conseil, et que, suivant tous les crimina-
listes, celui qui conseille le crime n'est coupable, aux yeux de la loi, que lorsque le crime a été commis, ou qu'au moins on a tenté de le commettre. Or, il n'y a eu en effet ni enrôlement, ni argent donné. Lés particuliers ne sont point partis pour Bâle. Enfin le sieur Lallemand n'a lait aucun enrôlement aux termes d'un certificat du bourgmestre du lieu.
Il serait bien étonnant si Mme de Constable avait chargé Monnot de lui amener des recrues, qu'il n'en eût introduit chez elle qu'en procurant du tabac pour excuse; qu'il n'est pas plus vraisemblable qu'on les ait engagés à partir par Bâle sans leur donner un écu pour faire la route. Il est encore bien invraisemblable que M. Dauquoi, qui est assez prudent, ait arrêté au milieu de la rue, le 27 janvier, devant la porte d'un café, Monnot et Grevet, qu'il n'avait vus qu'une fois quinze jours ou trois semaines auparavant, et leur ait tenu, dans un lieu aussi public, des propos aussi suspects.
On ajoute que Monnot, principal témoin, est dans les liens d'un décret de prise de corps; que Grevet est fils d'une femme enfermée pour crime de vol et maquerellage; qu'il est sans fortune, note à la police et ne méritant aucune foi.
Votre comité, par l'examen de la procédure, a en effet reconnu quelques difficultés dans les dépositions. Votre comité a pensé que, quelle que fût la nature des preuves, la procédure ayant été commencée et suivie à la requête de l'accusateur public dans un tribunal avoué par la loi, et les accusés étant sous le lien d'un décret de prise de corps, il ne vous appartenait plus de prononcer sur le fond de l'accusation; qu'ainsi il était complètement inutile de vous faire perdre des moments précieux à discuter sur la nature des preuves, l'existence du délit ne pouvant être jugé que par un tribunal.
Il s'est cependant élevé une difficulté dont il faut vous rendre compte. On dit qu'il s'agit ici d'un crime de lèse-nation et que, par l'article du décret du 12 octobre, l'Assemblée s'est réservée de prononcer ultérieurement sur les accusations pour crime de lèse-nation attribuées au Châtelet ae Paris;, que, par conséquent, le tribunal de Beaune n'a pu décerner un décret de prise de corps avant que l'Assemblée nationale eût décidé s'il y avait lieu ou non à accusation, i On s'est encore étayé de l'article 4 du décret du 8 de ce mois, qui porte que la haute cour nationale, juge naturel des crimes de lèse-nation, ne connaîtra que des délits dont le Corps législatif jugera nécessaire d'être accusateur; d'où l'on infère que, dans l'hypothèse où il s'agirait d'un crime de lèse-nation, l'Assemblée doit prononcer s'il y a lieu ou non à accusation.
Votre comité à pensé, en effet, que, dans les circonstances actuelles, les enrôlements pour les ennemis de la patrie, tels qu'ils sont dénoncés par la plainte de l'accusateur public, sont un véritable crime de lèse-nation; mais il a observé d'abord que le décret du 8 de ce mois n'est point encore sanctionné; il est d'ailleurs postérieur à la plainte rendue par les juges de Beaune; il a reconnu, par l'examen du décret du 12 octobre, sanctionné le 19 du même mois, que, par l'article 9 de ce décret, l'Assemblée s'est réservée seulement de déterminer un tribunal pour juger définitivement les accusations pour crimes de lèse-nation attribués au Châtelet de Paris; mais elle n'a rien entendu statuer sur la procédure antérieure au jugement, et elle n'a nullement dérogé au décret du 12 janvier 1790 qui porte, en termes formels, que
tous juges ordinaires doivent et peuvent informer et décréter pour tout crime de quelque nature qu'il soit, sauf le renvoi au Châtelet de ceux dont la connaissance lui était provisoirement accordée.
; Nous vous proposons le projet de décret sui-: vant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des recherches, décrète que la procédure commencée au tribunal de Beaune sera continuée et jugée en dernier ressort par le tribunal de Besançon ; à l'effet de quoi les procédures seront transférées au greffe dudit tribunal, les accusés transférés de ladite ville de Beaune au tribunal de Besançon; charge son président de se retirer par devers le roi, pour le prier de donner des ordres nécessaires à l'exécution du présent décret. »
Je n'ai rien à dire sur le fond de l'affaire; mais j'observe que le décret que l'on propose est contraire à tous les principes. Vous avez voulu que la voie de l'appel fût ouverte à tous les accusés; et cependant on vous propose d'autoriser le tribunal du district de Besançon à juger en dernier ressort.
Je demande que le décret soit amendé et que l'affaire soit renvoyée au tribunal de Besançon, en laissant aux accusés la faculté que vous avez donnée à tous les accusés du royaume, lorsqu'ils auront été jugés en premier ressort à Besançon, de se pourvoir par appel à un des sept tribunaux, dans la forme décrétée.
rapporteur. Je ne demande la parole sur l'amendement que pour dire que je l'appuie, parce qu'il paraît conforme aux principes.
J'avais demandé la parole pour faire le même amendement qui vient d'être proposé ; je me borne à l'appuyer. Je suis bien aise de saisir cette occasion de certifier que j'ai servi pendant 8 ans avec M. Chaillot, qui est l'honneur et la raison mêmes.
(L'Assemblée adopte l'amendement de M. d'André.)
Il y a dans les prisons de Paris plusieurs personnes décrétées de prisp de corps pour crimes de lèse-nation : je demande qu'elles soient renvoyées pardevaut les tribunaux de Paris, pour y être jugées.
Le projet de décret est adopté dans ces termes : „ « L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des recherches, relatif à l'arrestation de Mme de Gonstable, et des sieurs Chaillot et Dauquoi, décrète que la procédure commencée au tribunal de Beaune sera continuée et jugée par le tribunal du district de Besançon, sauf l'appel à l'un des sept tribunaux de l'arrondissement, à l'effet de quoi, les procédures seront transportées au greffe audit tribunal, et les accusés transférés dans les prisons de ladite ville de Besançon ;
« Charge son président de se retirer dans le jour par devers le roi, pour le prier de donner les ordres nécessaires a l'exécution du présent décret. »
Une députation de la municipalité de Parts est admise à la barre.
présente la députation et dit :
« Messieurs, l'assemblée du conseil général de la commune de Paris vient avec confiance vous découvrir l'une des sources des maux qui l'affligent davantage. Depuis longtemps elle s en occupe, et quand le législateur profond et éloquent qui vous présidait dernièrement, a cru devoir rappéler à l'une de ses députations cette maladie anticivique, elle avait, pour ainsi dire, épuisé tous ses remèdes ; oui, Messieurs, nous avons épuisé toutes nos ressources ; mais nous avons encore votre secours à attendre, et nous venons le solliciter. Quelque incurable que la plaie des jeux nous paraisse, elle ne pourra pas résister à votre puissance; et vous, qui avez guéri toutes les plaies politiques de rEmpire, les ulcères invétérés qu'avaient causés a la France tous les genres de despotisme, vous guérirèz encore celui-ci. L'orateur de la commune va vous dévoiler tous les détails de la maladie, et nous comptons sur les moyens que votre sagesse vous indiquera pour la vaincre. »
L'orateur de la députation s'exprime ainsi :
« Messieurs, les citoyens de Paris, dont nous sommes les organes, viennent à la source des lois en réclamer une contre les désordres dont les progrès ont menacé trop longtemps la tranquillité de la capitale.
« A mesure que vos lois bienfaisantes nous régénèrent, nous souffrons davantage des restes de nos désordres, et la frénésie des jeux est un des derniers malheurs, auxquels la patrie vous demande d'apporter un prompt remède.
« L'ancien régime nous avait laissé des habitudes odieuses, qu'à la honte des mœurs on l'a vu tolérer : il était permis à des subalternes favorisés de fonder des fortunes immenses sur le produit des jeux ; fortunes scandaleuses et faciles, qui révoltaient à la fois la probité, la délicatesse, le mérite et les talents. Un nouvel ordre de choses succède à cet ancien régime ; mais, pendant qu'il s'établit, la licence effrénée des jeux s'accroît par l'impunité, et vient augmenter le désordre en offrant de tous côtés des appâts trompeurs à la crédule indigence.
« Toutes h s fois que, sans risquer de blesser les droits de l'homme, de violer les asiles, de causer quelques secousses dangereuses, la municipalité provisoire et la municipalité définitive ont pu mettre les ordonnances en vigueur, elles l'ont fait avec une scrupuleuse exactitude ; mais, peu assurées dans une marche qui n'était pas tracée par la Constitution, leurs efforts pour l'exécution des anciennes lois ont presque toujours été impuissants. Alors 3,000 maisons de jeu se sont successivement ouvertes, et des jeux établis sur des places publiques, sur les quais, dans tous les coins de la capitale, tentent la misère, séduisent la faiblesse, et favorisent la mauvaise foi.
Par les jeux, l'oisiveté passagère devient une oisiveté invétérée et criminelle; l'homme demande à la fortune infidèle ce qu'il ne veut plus obtenir du travail ; et nous avons vu avec douleur la misère enfanter le désespoir, le vice conduire au crime, et les ruines multipliées produire des rixes, des vols, des assassinats et des suicides. Pour arrêter ce désordre, pour fermer ces abîmes, où vont s'engloutir les fortunes et les mœurs, vainement nous avons voulu recourir aux lois en vigueur, inapplicables aux circonstances; à côté d'elles nous avons toujours rencontré l'insuffisance et l'inutilité ; tous les règlements nous présentent le jeu comme un
délit; tous les règlements prononcent la punition que ce délit mérite ; mais aucun ne donne les moyens de lé constater, par conséquent de le prévenir.
« Nous savons, Messieurs, que tout est instant dans les travaux qui vous occupent; mais le mal contre lequel nous réclamons le secours de vos lois, est extrême; il gagne toutes les classes de la société, il corrompt la plus nécessiteuse, celle qui a moins de ressources pour revenir au bien. Le vice se propage, les crimes se multiplient, et la source de ces malheurs est sous vos yeux. Les regards des pères de la patrie sont souillés par le spectacle continuel de ces jeux infâmes, établis jusque sur leur passage. Le meilleur des rois, le plus sensible des monarques en a la vue blessée des fenêtres de son palais. Rendez, Messieurs, nous vous en conjurons, rendez le repos à nos familles, la sûreté à tous les citoyens; augmentez, s'il se peut, la gloire dont vous vous êtes couverts aux yeux de tous lès peuples; et dans votre sagesse, dans l'intérêt que vous prenez à la régénération des mœurs d'une grande cité, veuillez, Messieurs, déc étèr une loi qui, prononçant dans quelle classe on doit placer parmi les crimes les jeux défendus, détermine le genre de preuves que les accusateurs publics seront tenus de présenter aux tribunaux, et les moyens qu'ils devront employer pour les acquérir.
« Nous aurons l'honneur de vous remettre, Messieurs, le travail des commissaires que, dans les premiers moments de notre administration, nous avions chargés d'examiner celte matière; non pas que nous ayons l'orgueil de penser que ce travail puisse éclairer votre sagesse, mais parce qu'il sera la preuve de notre zèle et des soins que nous avons pris pour cette partie importante de la police dé la capitale.
« Le génie de la France vous inspire, Messieurs; avec un pareil guide, tous vos pas sont des victoires remportées sur les désordres. Celui que nous vous dénonçons, cédera, comme les autres, & votre zèle et à vos lumières. Heureuse la municipalité, d'avoir des occasions de venir déposer dans le sein de l'Assemblée nationale ses espérances et son dévouement! « {Applaudissements.)
répond : L'Assemblée nationale voit toujours avec satisfaction le zèle et les motifs qui vous portent à venir déposer dans son sein vos inquiétudes et vos demandes. En établissant les lors qui vont régir l'Empire, elle a cherché également à y régénérer les mœurs, Elle voudrait voir déjà tous les hommes de ce pays ornés de toutes les vertus des hommes libres, sans aucun reste, sans mélange des vices et de la corruption de l'esclavage. Tel est le but de ses immenses travaux, telle en serait la plus douce récompense; mais l'Assemblée nationale sait aussi que ce n'est qu'avec l'aide du temps que les meilleures institutions peuvent agir sur les mœurs, les rectifier, les améliorer. Un des plus grands obstacles à leur restauration dans les grandes villes est l'abus que votre vigilance dénonce dans ce moment. C'est dans les maisons de jeux, dans ce gouffre de la cupidité et du vice, que le citoyen qu'on y attire vient perdre cette fleur de délicatesse et d'honnêteté qu on ne retrouve plus, et commencer cette gradation funeste, qui conduit de l'égoïsme ou de l'imprudence à l'immoralité, et de là à la bassesse et souvent au crime par le désespoir; c'est là qu'il s'habitue à moins aimer sa femme, ses enfants,
ses amis, ses concitoyens, qu'il se dégoûte enfin de toutes ces affections et de ces sentiments dbnt se composent les mœurs domestiques et individuelles et forment la base la plus solide du bonheur public. L'Assemblée nationale pèsera âvéc toute là sollicitude qu'elle doit à d'aussi grands intérêts, les moyens, de parer à d'aussi grands désordres. Elle vous accorde les honneurs de la séance. » (Applaudissements. )
(L'Assemblée ordonne le renvoi de cette pétition aux comités de Constitution et de jurisprudence criminelle réunis.)
(L'Assemblée décrète l'impression de l'adresse de la municipalité, de celle de la commune et de la réponse de M. le Président.)
L'ordre du jour est nn rapport du comité colo-niai sur l'affaire de Tobago (1).
rapporteur. Messieurs, lés troubles qui ont eu lieu au Port-Louis de Tabago ont la même origine que ceux que l'on a éprouvés dans nos autres colones; c'est l'effet de la commotion qui s'y est fait sentir lorsqu'on y a appris les événements qui se sont passés en Fr.ince le 14 juillet. D'après ce qui s'était passé en France et d'après ce qui se passait dans les colonies voisines de Tabago, M. Bosque, avocat, invitales Français à se réunir pour former un comité patriotique. Cette assemblée se forma le 23 octobre. MM. Grelier et Guys furent élus l'un présidentet l'autre vice-président. M. Bosque fut élu secrétaire. Elle envoya une députation aUx administrateurs pour les inviter à se joindre à die. afin de travailler de concert au bonheur de la colonie. Cette invitation fut rejetée par M. Jobal, commandant. La société patriotique arrêta qu'il serait fait des représentations à MM. les administrateurs sur les motifs qui avaient donné lieu à la réunion des Français à Tabago; et qu'au cas d'un second désaveu l'assemblée se dissoudrait. La démarche eut clu succès ét le commandant approuva la formation de l'assemblée. Cette association n'a duré que 6 jours et n'a tenu que 7 séances ; ses membres ont été constamment attachés aux principes d'ordre difficiles à conserver dans les premiers moments d'une révolution ; mais bientôt les Citoyens qui étaient à la tête de cette société sont devenus victimes de l'injustice la plus atroce. A Tabago, comme en France, les officiers militaires virent avec peiné se déployer l'énergie de la liberté; ilsdevinrentlesennemisdel'assemblée patriotique aussitôt qu'elle fut formée.
MM. Bosque, Grelier et Guys furent bientôt en butte à la hainetla plus active ; et d'après les dépositions de quelques soldats, reçues par leurs officiers, ils furent dénoncés comme coupables d'avoir tenu une assemblée illégale, dans laquelle, disait-on, ils avaient tramé une espèce de sédition; la dénonciation fut faite le 3 novembre, par M. Dangleberme, membre de la commission, et remise! M. Jobal.
MM. Grelier, Guys et Bosque, craignant pour leurs jours, obtinrent un
congé au commandant de la colonie et s'embarquèrent pour la Martinique.
M. Jobal les fit poursuivre par une goélette, gui les ramena à Tanago.
MM. Guys et Grelier furent mré à terre en liberté, et M. Bosque conduit
en prison et mis aux fers. Le procès fut instruit en 4 jours, sur la
dénonciation de
Pendant l'emprisonnement de M. Bosque, sa maison a été totalement dévastée et ses propriétés vendues à vil prix. M. Bosque prêta, auhout de 6 semainés, serment de ne plus revenir dans l'île, et M. Jobal lui déclara qu'il ne pouvait effectuer sa retraite dans aucune colonie française. Il choisit la Trinité espagnole, et, le lendemain, il fut embarqué avec un meurtrier anglais et déposé à la pointe de Cumana, dans la portion de la Trinité espagnole habitée par des sauvages. Plus de pitié l'attendait chez les Caraïbes, qui le conduisirent, dans une pirogue non pontée, à travers 40 lieues de mer, au port de la Trinité. Quel était le crime de M. Bosque ? D'avoir, d'après les ordres de l'assemblée patriotique, dont il était secrétaire, reçu le serment civique de quelques soldats. Quel était ce serment? D'être fidèle à la nation, à la loi et au roi. Il avait dit que les soldats étaient libres d'aller boire où ils voudraient. Le cantinier, qui jouissait du privilège exclusif de vendre aux soldats du vin et de l'eau-de-vie. les vendait mauvais et plus cher ; mais il avait l'entreprise des tables des officiers, et la considération du privilège exclusif entrait pour beaucoup dans les a toucissements dé leurs pensions. Voilà pourquoi les officiers avaient prié la cour criminelle d'admettre la dénonciation de M. Dangleberme.
Voici un précis des autres événements reiàtîfe à la colonie de Tabago. Le 16 février 1790, les cinq compagnies du régiment de la Guadeloupe furent chez le commandant porter un long mé-moirede plaintes. Cette réclamation fut présentée avec insubordination et avec audace ; mais, à la honte de l'autorité, les plaintes des soldats étaient fondées. On pense bien que le privilège esclnsif du cantinier y tenait un long article. Trop faible pour en imposer aux soldats, M. Jobal leur fit donner quatre barriques de vin. Cette indulgence imprudente apprit aux soldats qu'ils étaient redoutés, les plongea deux jours dans l'ivresse, et occasionna les excès de la journée du 18. Les soldats, ivres depuis deux jours, prirent les armes le matin, se rendirent sur la place, ôtèrent le commandement à leurs officiers, annulèrent des jugements militaires, et se permirent tous les
excès de l'insubordination. Il y avait une coin* pagnie de volontaires formée à Tabago; le trésorier de la colonie, M. Saint-Léger, en était le commandant. A Tabago, comme en France, la plus grande union règne entre la garde nationale et les troupes de ligne ; mais à Tabago, comme en France, cette union déplaisait au commandant et aux officiers. Les volontaires de Tabago partirent le 13 avril pour aller secourir les habitants de Saint-Pierre-la-Martinique. A leur retour, le 29, les soldats qui faisaient l'exercice mirent leurs armes en faisceaux, et coururent au-devànt d'eux. Deux officiers, MM. Dupré et Blosse, rencontrèrent les soldats qui descendaient des casernes, et leur ordonnèrent de retourner au fort. Cet ordre ne fut pas exécuté sahs murmures. Le lendemain, ils se rendirent chez M. Saint+Léger, et lui déclarent qu'ils veulent la tête de M. Blosse. M. Saint-Léger, avec beaucoup de peine, les détourne de cet affreux projet, et les engage à se contenter de demander au commandant le renvoi de cet officier; ils nomment une députation auprès de M. Jobal, qui reçoit ces députés avec hauteur, leur prodigue des injures, et se permet des gestes menaçants. Alors les autres soldats accourent en foule, arrachent M. Blosse du gouvernement où il s'était rèndu, l'accablent de mauvais traitements, lui déchirent ses épaulettes, et s'apprêtent à lui trancher la tête sur la place. Un chasseur, nommé M. Chantaloux, détourne le coup, prend M. Blosse dans ses bras, et, aidédeM. Saint-Léger et de plusieurs citoyens, il entraîne et embarque cet officier. M. Blosse ne veut pas partir sans régler la comptabilité du régiment, et se fait remettre à terre. Ce retour pensa lui coûter la vie, car à peine avait-il réglé 6es comptes, que les soldats se portèrent chez lui, avec fureur pour le massacrer. Les volontaires nationaux le firent évader, et il partit pour la Martinique.
M. Blosse, dans cette fuite, abandonna tout ce qu'il possédait. Ses effets ont été pillés, et ce qui a échappé à la fureur du soldat est devenu la proie des flammes dans l'incendie qui suivit le jour de son départ. Né sans fortune, parvenu par ses services et par ses talents, appartenant à cette classe connue autrefois sous le nom d'officiers de fortune, M. Blosse est ruiné sans ressource. Le comité colonial croit devoir le recommander à la justice de l'Assemblée nationale. Dans la nuit du 2 au 3 mai, le féu a mis le comble aux malheurs de la colonie, en réduisant presque toute la villo du Port-Louis en cendres. Les habitants s'empressèrent de réparer le malheur : ils se réunirent pour engager les soldats à repasser en France. Ils ne s'y déterminèrent que sous la condition que deux de leurs officiers les accompagneraient en otage, que M. Saint-Léger s'embarquerait avec eux, comme garant des promesses qu'on leur faisait. Ce citoyen laissait derrière lui de grands intérêts, il les sacrifia tous; il n'exigea que la conservation de sa place et de celle de son substitut, M. Dufaur, qui lui furent garanties par le commandant et par le comité colonial. Mais à peine parti, M. Jobal a nommé à ces places, a renvoyé son substitut; et démentant les certifia cats honorables et mérités qu'il avait donnés à M. Saint-Léger, il l'a calomnié auprès du ministre. — Homme faible et sans caractère, M. Jobal a occasionné tous les troubles et tous les malheurs de Tabago. Il conciliait la violence du despotisme et la pusillanimité de la faiblesse. Sa dureté a irrité les habitants, son défaut de fermeté à relâché les liens de la discipline militaire. On con* naît les vexations exercées contre M. Bosque ;
mais ce ne soDt pas les seules que se soient permises le commandant de Tabago. Le 10 juillet 1789, il ordonne au trésorier de la colonie de lui remettre une pièce de comptabilité ; ce dernier lui dit qu'il ne peut s'en dessaisir sans l'aveu de l'ordonnateur. Le commandant 1e fait arrêter par ses soldats et l'oblige, avec violence, à lui remettre la pi ère qu'il avait exigée.
Le 6 juillet 1790, M. Jobal destitue de la place de greffier M. Le Borgne, malgré la protestation formelle de l'ordonnateur; tandis que nulle destitution de fonctionnaire public ne peut avoir lieu dans la colonie que sur l'avis des administrateurs réunis. Dans les circonstances difficiles où s'est trouvé le commandant de Tabago, depuis le commencement des troubles, il cédait sans résistance aux différents partis, en se contentant de protester au greffe contre les actes qu'il souscrivait; et pour comble de ridicule, le 6 mai, il proteste non seulement contre tout ce qu'il a fait, mais contre ce qu'il pourra faire.
L'assemblée coloniale de Tabago, ayant, en vertu de votre décret du 8 mars, fixé les bases de la Constitution qu'elle a jugé lui convenir, s'est séparée, en chargeant un comité de la rédaction du plan. Par l'infidélité de quelques co-
Eistes, une expédition du projet est devenue pu-lique et les dispositions qu'elle contenait ont donné lieu à des protestations; le commandant, chef du pouvoir exécutif dans la colonie, et sans la sanction duquel l'assemblée coloniale ne peut rien mettre à exécution, a eu l'imprudence, vraiment inconcevable, de protester contre des arrêtés qui n'étaient encore qu'en projet et de se mettre ainsi, par cette ridicule protestation, dans l'impossibilité de sanctionner les opérations de l'assemblée coloniale. Récemment encore, le caractère intrigant et perfide de M. Jobal a exposé l'Ile de Tabago aux plus grands malheurs. Le roi a fait passer à Tabago une partie du régiment de la Sarre, et M. Jobal a cherché à désunir les habitants et les soldats. Il disait à ceux-ci que les habitants avaient beaucoup d'armes et 15,000 cartouches, et, dans le même temps, il informait l'assemblée coloniale que la garnison menaçait la colonie de pillage si les habitants ne donnaient pas le* sommes nécessaires pour payer le prêt des troupes. Cette coupable ruse jeta l'alarme dans l'assemblée qui cessa de tenir ses séances au Port-Louis. Oo ne tarda pas à s'éclairer, et la conduite de M. Jobal fut dévoilée aux yeux de l'Assemblée et de la garnison. Je pourrais citer beaucoup d'autres faits; je me contenterai d'ajouter que la correspondance de M. Jobal, envoyée au comité par le ministre de la marine, ajoute encore à l'idée peu avantageuse que donne de ce commandant sa conduite publique, comme chef de la colonie. Votre comité a pensé qu'un tel homme n'était pas propre à consoler de leurs malheurs les habitants de Tabago, à rétablir la paix parmi eux et à faire respecter le caractère national dans une colonie qui n'a passé fous la domination française que depuis le dernier traité de paix. En conséquence, votre comité m'a chargé de vous présenter le projet de décret suivant:
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des colonies, déclare :
« l°Queies jugements rendus contre MM. Bos-que, Grelier, Guys et Le Borgne, les 16 novembre 1789 et 6 juillet 1790, n'emportent aucune note ni tache d'infamie et seront regardés comme nuls et non-avenus; « 2° Qu'il n'y a pas lieu à inculpation contre
M. Edmond Saint-Léger, commandant de la garde nationale deTabaeo;
« 3° Décrète qu'il sera réintégré dans les places dont il a été dépouillé, depuis son départ de la colonie, par M. Jobal, et que M. Dufaur, substitut de M. Saint-Léger, sera également rétabli dans ses fonctions;
« 4° Que le roi sera prié de rappeler M. Jobal, commandant de Tabago; ? c5° L'Assemblée nationale renvoie, à l'examen et à la discussion du ministre de la marine, les demandes en payement d'indemnités et d'appointements faits par MM. Blosse, officier au régiment de la Guadeloupe, et Chancel, procureur général d e Tabago. »
La continuité des travaux de l'Assemblée ne permet pas aux membres qui suivent exactement ses séances et ses comités de se livrer à l'examen d'une affaire, lorsque le rapport n'est pas annoncé quelques jours auparavant.
Je n'ai pas lu le mémoire et notamment celui gui a été distribué au nom de M. Jobal; ce que je sais en général sur l'affaire dont il s'agit, c'est qu'il eût été fort à désirer que les mouvements du patriotisme ne se fussent pas manifestés dans les colonies par des insurrections. (Murmures.)
Les plaintes qui vous arrivent dans ce mo-ment-ci contre un gouverneur d'une de vos colonies, peuvent être fondées ; mais au moins, lorsque nous nous rappelons ce qui est résulté des premiers mouvements patriotiques de Tabago, lorsque nous nous rappelons qu'un incendie et qu'un trouble universel ont été les suites de cette première effervescence, il semblerait que le commandant par intérim qui, sans contrarier les effets authentiques de la Révolution, a cru devoir cependant s'opposer à des mouvements violents et dangereux, il semblerait, dis-je, que ce commandant n'a pas dû être accusé légèrement, avant que ses défenses vous eussent été communiquées.
Il s'agit ici d'un jugement rendu par un tribunal; je ne prétends pas justifier ce jugement devant l'Assemblée nationale, sans être en état de le faire; mais ce que je sais bien, c'est que ce n'est pas sur un simple exposé que l'on peut inculper un tribunal ni un gouverneur de colonie.
Je joins, Messieurs, à ces considérations une note qui m'a été remise par M. de Bouillé et qui est signée de lui ; sa conduite irréprochable qui, en plusieurs occasions, a mérilé vos éloges, semble devoir attirer votre attention sur des détails qu'il m'annonce lui avoir été transmis par les officiers de l'île de Tabago.
(M. Malouet fait lecture de cette note, elle renferme des détails sur la conquête de Tabago, la capitulation de cette île et le mode de son gouvernement.)
Plusieurs membres : Passez aux conclusions !
Les voici. La note finit ainsi ; « Quelques personnages auxquels ils croient devoir attribuer leurs malheurs, sont en France, auprès des ministres, auprès de l'Assemblée nationale... (Murmures), ils peuvent inculper les administrateurs de la colonie et ceux qui ont cherché à arrêter les désordres.
« Je demande, dit M. de Bouillé, au nom de la colonie, et plus encore au nom de la jus-
tice, que l'Assemblée nationale ne prononce pas définitivement sur les troubles qui ont régné à Tabago, sur les auteurs de ces désordres, sur les personnes eu général qui peuvent y être compromises, avant qu'on ait pris sur les lieux les informations nécessaires et l'avis de l'assemblée coloniale de cette ville ; que l'on nomme un conseil mi-partie civil et militaire, présidé par un gouverneur des îles du Vent et composé d'officiers militaires et d'officiers civils et municipaux des différentes îles, pour informer sur les causes de l'insurrection parmi les troupes en garnison au Fort-Louis, sur les scènes désastreuses qui en ont résulté et qui ont été suivies de l'incendie de cette ville, ainsi que sur les personnes accusées et compromises.
« D'après ces informations, l'Assemblée pourra prononcer avec assurance, faire punir les coupables et aviser au moyen de rétablir le calme dans la colonie ».
Messieurs, ces conclusions paraissent fort justes ; je les adopte en entier.:
Je ne suis pas monté à cette tribune pour arrêter l'effet de vos bontés envers MM. Le Borgne, Grelier et Guys; je viens solliciter votre justice pour un compatriote, homme d'honneur. Je demande que vous ne le condamniez point sur des assertions qui ne sont pas prouvées avant de l'avoir entendu ; il m'a paru que les chefs d'accusation se contredisaient.
Je demande d'ailleurs si quelque corps administratif, soit le tribunal de Tabago, soit l'assemblée coloniale, exerçant une autorité publique, a accusé M. Jobal, relativement à la chose publique?
Plusieurs voix : Oui I oui I
Oui ?... Si cela est, je veux que l'on me le montre; je passe condamnation, je me retire, je ne défends plus M. Jobal.
Mais ce sont des particuliers qui viennent de 2,000 lieues pour l'accuser. Sa famille a demandé qu'on lui communiquât les pièces et elle n'a pu Fobtenir. Je demame du moins qu'on lui laisse le temps de présenter sa justification.
Par les principes que vous avez vous-mêmes consacrés et que tous les honnêtes gens adoptent, l'homme même qui sera déclaré coupable demain est présumé innocent tant qu'un jugement légal ne l'a point condamné. (Applaudissements.) le demande donc que vous ajourniez ia question relativement à M. Jobal et que vous ordonniez l'impression du rapport de M. Alquier.
Les observations de M. Emmery seraient justes, si l'on pouvait regarder comme une peine le rappel de M. Jobal ; mais ce n'est autre chose qu'une mesure de prudence. Cela signifie qu'à raison des circonstances, l'Assemblée ne pense pas que sa présence puisse être utile à Tabago.
D'après des plaintes, non pas de particuliers, comme l'a dit M. Emmery, mais de l'assemblée coloniale, on accuse M. Jobal de faiblesse. Quant à moi, je l'ai toujours connu pour un bon militaire; mais je dois cependant dire que je le crois incapable, dans les circonstances actuelles, d'être à la tête de la colonie. Il a tellement encouragé les soldats à l'insubordination, qu'ils ont hni par vouloir pendre leurs officiers, et par le menacer lui-même. C'est alors que M. Saint-Léger, inter-
prète du roi et médecin, a tiré de la colonie cette troupe pour la ramener en France. Je l'ai inculpé dans cette Assemblée ; mais depuis, tout s'est éclairci ; et il parait, au conlraire, qu'il a rendu service à la colonie.
L'assemblée coloniale a, par une délibération particulière, augmeuté d'un tiers le salaire de sa place. M. Malouet vous a lu une note de M. deBouillé ; elle n'est autre chose que l'histoire de la guerre dernière : mon nom s'y trouve d'une manière assez peu franche, sôit de la part de M. de Bouillét soit de la part de M. Malouet. J'ai été et je serai toujours l'admirateur dé M. de Bouillé; il m'a écrit qu'il me croyait prévenu contre des gens qui ne le méritaient pas; il veut encore le faire Croire à l'Assemblée. J'ai toujours bien vécu avec M. Jobal ; je n'ai cessé sa correspondance que parce que je n'ai pas voulu prendre part à ses querelles multipliees. M. Emmery a dit que l'assemblée coloniale ne l'accu-ait pas. M. Pétri, qui n'a manqué aucune séance du comité colonial, nous a communiqué les plaintes de la colonie contre lui.
Lorsqu'on fit passer des troupes à Tabago, on n'envoya pas l'expédition du décret; ce fut par une lettre particulière qu'on apprit cet important décret. Je prie l'Assemblée d'observer que ce n'est pas du ministre actuel que vient cette omission. (Applaudissements.) Vous aviez décrété des provisions pour Tabago; elles y sont arrivées dans un bâtiment de Bordeaux, dont le capitaine a dit en arrivant : « J'ai ordre de remettre ces farines à Tabago ; je n'en sais pas davantage. »
M. Jobal n'a pas voulu remettre ces provisions aux habitants, disant qu'il n'avait pas d'ordres officiels ; il n'a pas voulu remettre aux habitants les armes que l'Assemblée nationale avait ordonné qu'il leur distribuât, disant aux soldats du régiment de 1a Sarre qu'il serait dangereux de les remettre aux habitants, faisaot prendre de l'ombrage aux soldats contre les habitants au point que l'assemblée coloniale n'a pas osé s'assembler dans la ville.
Non seulement on n'a pas envoyé de lettre, mais pas un sou d'argent pour subvenir aux frais des troupes; et l'assemblée coloniale , craignant que cela n'occasionnât quelque émeute ou quelque pillage de la part des troupes, emprunta à la Grenade une somme de 2,000 livres sterling pour laquelle elle a fait quatre lettres de change que M. Pétri vient de payer en Angleterre et dont il attend le remboursement du ministre de la marine.
L'assemblée coloniale a envoyé une députation aux soldats du régiment de la Sarre, de qui on a su que le gouverneur leur avait dit qu'ils eussent à se mefier des habitants. La députation a répondu : « Le gouverneur nous a ait que vous vouliez nous piller. » Les uns et les autres ont senti toute la conduite du gouverneur; heureusement ils se sont entendus et se sont raccommodés; De plus, pendant les troubles de la Martinique, le sieur Jobal a armé des gens du Fort-Louis, gens sans propriétés, les a embarqués pour le Fort-Saint-Pierre, les encourageant à se bien battre ; il leur a remis, de son autorité, des armes des magasins du roi.
Vous avez envoyé à Tabago un détachement de 300 hommes ; de l'aveu de M. Jobal, 130 de ces hommes ont décampé de la colonie et se sont réunis dans ce moment à des soldats révoltés à Saint-Pierre... (Interruptions.)
Plusieurs membres}: Donnez des preuves !
On demande des preuves? je ne me rends pas l'accusateur de M. Jobal mais s'il le faut, je déclare que je le ferais pour l'intérêt des habitants de Tabago, qui se sont conduits dans cette affaire avec beaucoup de patriotisme et de modération. M. J. Pétri a communiqué ces faits signés de son frère, président de l'assemblée coloniale. Nous avons aussi reçu du directoire de l'assemblée coloniale la déclaration des principaux habitants de Tabago, qui ont été à là Martinique comme commissaires conciliateurs. Il y est dit que M. Jobal avait mis les armes à la main des troupes, contre la volonté de M. Despérier, premier capitaine. Le fait est donc qu'il est évident que l'assemblée de tabago et les habitants se sont plaints. Il y a des commissaires dans l'escadre partie pour les îles du Vent.
Je conclus à ce que le roi soit prié d'ordonner que M. Jobal se rende à la Martinique auprès des commissaires du roi polir y rendre compte de sa conduite ; et. quant au premier article, il faut que l'Assemblée, se référant à l'esprit de son décret du 8 mars dernier concernant les colonies, déclare qu'il n'y a pas lieu à inculpation.
L'avis que vient de donner mon collègue est celui que je voulais offrir : les faits sont exactement vrais. Je crois qu'il faut que l'Assemblée nationale décide que les commissaires, nommés ën vertu du décret du 27 novembre dernier, seront spécialement chargés de prendre les informations nécessaires sur lies causes et les auteurs des troubles de Tabago ; et je propose que le président se retire par devers le roi pour le prier de donner les ordres nécessaires au gouverneur général des îles du Vent de pourvoir provisoirement, s'il y a lieu, au commandement par intérim de l'île de Tabago.
J'appuie la proposition qui vous est faite et je vous prie de remarquer qu'elle est conforme au résultat des notes que je vous ai lues.
La première partie du décret qui vous est présentée, n'est que la conséquence d'un de vos précédents décrets. Quant à M. Jobal, au moins faut-il prendre les précautions pour pourvoir à son remplacement dans le cas où l'instruction porterait qu'il ne doit pas rester dans les colonies. J'appuie la motion de M. Moreau. (La discussion est fermée.)
rapporteur, propose une nouvelle rédaction de l'article, ainsi conçue :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des colonies, en se référant à son décret du 8 mars dernier, déclare : 1° Que les jugements rendus contre les sieurs Bosque, Gré-lier, Guys et Le Borgne, les 16 novembre 1789 et 6 juillet 1790, n'emportent aucune note ni tache d'infamie, et seront regardés comme nuls et non-avenus;
« 2» Qu'il n'y a pas lieu à inculpation contre le sieur Eimond Saint-Léger, commandant de la garde nationale d'* Tabago ;
« 3° Décrète qu'ii sera réintégré dans les places dont il a été dépouillé depuis son départ de la
colonie, par le sieur Jobal, et que le sieur Du-faur, substitut du sieur Saint-Léger, sera également rétabli dans ses fonctions ;
« 4° Que le roi sera prié d'ordonner au sieur Jobal, commandant de Tabago, de se rendre à la Martinique, pour rendre compte de sa conduite devant les commissaires qui y ont été délégués ; et d'autoriser le commandant général des îles du Vent, à faire remplacer le sieur Jobal, s'il le juge nécessaire pour le bien de la colonie ;
« L'Assemblée nationale renvoie a l'examen et à la discussion du ministre de la marine, les demandes en payement d'indemnités et d'appointements, faites par les sieurs Blosse, officier au régiment de la Guadeloupe, et Ghancel, procureur général de Tabago.» (Ge décret est adopté.)
Un membre du comité d'aliénation propose et l'Assemblée décrète la vente de plusieurs biens nationaux à diverses municipalités dans les termes suivants :.
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité d'aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites suivant les formes prescrites, déclare vendre les biens nationaux, dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, aux charges, clauses et conditions portées par. le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, savoir :
A la municipalité d'Angers, département de Maine-et-Loire..............1,354,000 1.
A celle d'Amilly, département du
Loiret..................................................17,030
A celle de Châtillon-sur-Loire, département du Loiret.............33,835
« Le tout ainsi qu'il est plus au long détaillé dans les décrets de vente et états d'estimation respectifs, annexés à la minute du présent procès-verbal de ce jour. »
lève la séance à neuf heures et demie.
a la séance de l'assemblée nationale du
Mémoire adressé à VAssemblée nationale, contenant les persécutions éprouvées par les Français à Tabago et notamment par le sieur bosque, pour avoir donné des preuves de civisme; et dont l'impression a été ordonnée par la section de la Bibliothèque.
a L'Assemblée nationale.
Messieurs, quelques nouveaux sujets français, nés Ecossais, résidant à Tabago, ont cru, à 1,800 lieues de vous, se soustraire à votre comité des recherches. Ligués avec le sieur Jobal, commandant, et les officiers du second bataillon de la Guadeloupe, alors en garnison dans Cette coldnie, ils se sont crus assurés de l'impunité. Dès lors les voies lés plus obscures, les complots les plus noirs,... tout fut mis en usage pour me persécuter.
Représentez-vous, Messieurs, toutes les horreurs d'un crime combiné, appuyé de la rage effrénée que l'on connaît aux ennemis de la Constitution, et vous aurez une idée, mais faible encore, de ce qu'ont éprouvé les patriotes français à Tabago.
Les détails déduits dans mon mémoire, soutenus de pièces authentiques, prouveront que ces mêmes Ecossais furent tout à la fois mes accusateurs, mes tétnoiuB et mes juges, et osèrent prononcer une condamnation ignominieuse contre moi, qui insulte 25 millions de Français.
Condamnation fondée sur les dépositions de 26 témoins, qui prouvent que mes crimes, aux yeux de mes ennemis, ont été :
1° D'avoir arboré le premier la cocarde national» à Tabago ;
2° D'en avoir fait faire pour eu distribuer à mes concitoyens ;
3° D'avoir convoqué une assemblée, qui reçut le serment civique de plusieurs soldats de la garnison, et qui obtint la sanction des représentants du pouvoir exécutif, et de la masse générale des citoyens de la colonie, assemblés* le 28 octobre dernier, à la ville du Port-Louis;
4° D'avoir proposé qu'il fût nommé un député pour être envoyé à, l'Assemblée nationale, afin de lui soumettre un état de la population, des besoins et des ressources de Tabago ;
5° D'avoir ouvert uue souscription, afin qu'il fût fait une bourse pour être adressée à la capitale, et répartie entre les veuves et les orphelins dont les pères et les mères avaient perdu la vie à la journée mémorable du 14 juillet;
6° D'avoir eu 'e bonheur de voir planter, par la garnison de Tabago, le pavillon national à ma porte.
7° Enfin d'avoir maintenu l'ordre et la paix.
Ce fut sur de pareilles dépositions que des juges prévaricateurs donnèrent lieu à ce que tout mon mobilier fût pillé* en me faisant arrêter, ainsi que mes nègres, et laissant ma maison ouverte, sans garde, sans scellés, et à l'abandon pendant 15 jours, temps auquel ils nommèrent extrajudiciairement des séquestres, qui s'emparèrent alors de tout ce que je possédais... Ce n'était rien encore; un jugement ignominieux couronna mon civisme; et pour ensevelir dans le secret de tels crimes, et m'enlever les moyens de me faire entendre aux représentants de l'Empire, ils m'obligèrent de prêter un serment qui me bannissait à perpétuité de cette colonie, et me firent jeter dans une île étraugère, au milieu des sauvages; lieu désert, dont aucun bâtiment n'approchait.
Augustes députés, justice, voilà mon mot; vous ne pouvez me la refuser, sans y comprendre vos commettants et vous-mêmes, de qui j'ai suivi les principes.
J'accuse, je me plains, mais je prouve; or, le doute même, de ma part, de ne pas obtenir une réparation brève et entière, serait un outrage.
J'ai l'honneur d'être, avec le plus profond respect, Messieurs, de la nation, de la loi et du roi, le très fidèle sujet.
G. Bosque.
Mémoire adressé à l'Assemblée nationale, par le
sieur Charles Bosque, avocat à Tabago, actuellement à Paris.
contee : 1° m. de Jobal, commandant à Ta-
bago, en l'absence de M. DilloN; gouverneur ; 2° les sieurs Gilbert Petrie, Thomas Wilson, Nathaniel Stewart, membres de l'ancien comité intermédiaire de l'assemblée coloniale de ladite île, tous les trois accusateurs et juges du sieur Bosque; 3® le sieur William Smith, membre du-dit comité, prévôt maréchal de ladite île, accusateur, et un des témoins entendus contre le plaignant ; 4° les sieurs Thomas Curie , Robert Palerson, membres dudit comité, accusateurs; 5° le sieur Danglbberme, juge de paix, agissant, en cette cause, comme l'agent des officiers du deuxième bataillon de la Guadeloupe, alors en garnison en Tabago, faux dénonciateur; tous résidants, domiciliés ou habitants de l'île de Tabago.
Et demande en cassation d'un jugement de la Cour d'Oyer et Terminer de ladite lle^ rendu le 16 novembre 1789, contre ledit sieur Bosque, pour avoir reçu le serment civique de plusieurs soldats, d'après le vœu de la première assemblée patriotique de Tabago, de laquelle il était secrétaire.
Messieurs, que ne puis-je m'exempter de faire un tableau des persécutions que j'ai souffertes, des machinations odieuses qui se sont tramées ; d'une condamnation qui influe sur les principes adoptés par 25 millions de Français, et par de sages représentants?
Dans quelques endroits dè l'empire* l'on a vu les ennemis de la Constitution, de tout genre, fomenter des troubles, des divisions, et partout être déçus. Tabago* au contraire, nous en offre d'une nouvelle espèce.
Ils se sont permis de condamner, par un jugement, comme criminels, des hommes qui, connaissant leurs droits, que vous aviez décrétés, ont osé les réclamer.
Le perfide qui, pour se venger de son ennemi, lui enfonce un poignard dans le sein, est, j'ose le dire, moins coupable que ceux qui, sous le manteau de la loi, cherchent à assouvir leur vengeance sur l'innocent qu'ils détestent.
Voilà ce qui se rencontre, cependant, dans les plaintes contenues dans ce mémoire, que je soumets à l'Assemblée nationale, comme le seul tribunal compétent pour connaître d'un fait dont les annales les plus reculées ne nous ont jamais fourni d'exemple, et dont les ennemis de la Constitution pouvaient seuls être capables.
FAITS.
Le mémoire que j'ai eu l'honneur de présenter à l'Assemblée nationale aura prouvé combien les Français étaient victimes de l'arbitraire à Tabago: nul d'entre eux qui osât se plaindre, nul d'eutre eux qui ne frémit au seul nom de leur commandant.
Ce fut sous un esclavage aussi cruel, que parvinrent, dans cette colonie, les nouvelles de la régénération française.
Jugez, Messieurs, l'effet que dut produire, sur les âmes de ces Français, le décret qui déclare les droits de l'homme.
La cocarde nationale fut le premier sigae duquel ils osèrent vouloir se décorer : mais, ne connaissant que trop les dangers auxquels ils s'exposaient, leur patriotisme gémissaiten silence, et tous se disaient à l'oreille.....
Nous ne sommes malheureusement que peu de
bons Français ; si la troupe se déclare contre nous, nous serons victimes de notre zèle; les nouveaux sujets (1) qui, jusqu'à présent, ont conservé la prédominance sur nous, par la faveur du gouvernement, ne verront pas sans jalousie l'égalité adoptée par le nouveau système. Non, leur dis-je, et je me trompai. Les nouveaux sujets sont tous Ecossais, accoutumés à vivre sous les auspices de la liberté, ils se joindront à nous, n'en doutons pas ; le soldat sera français ; notre commandant, forcé de se soumettre aux lois, n'osera plus les enfreindre ; nous oublierons toutes les persécutions éprouvées, et nous ne serops désormais qu'une peuplade de frères. Ces sentiments prévalurent; je fus chargé de faire travailler à des cocardes nationales et d'en porter aux administrateurs de Tabago, et à M. le procureur général.
J'en présentai une à M. l'ordonnateur, qui la reçut, en donnant des marques les plus positives de sa satisfaction; je m'acquittais aussi de ma mission auprès de l'homme du roi, et j'en fus bien accueilli. Mais j'avoue que, par déférence, je n'eus pas le courage d'en présenter une à M. de Jobal, et je me contentai d'en charger le sieur Testu, avocat dans cette colonie, que je croyais aimé de ce commandant.
Le lendemain, 18 octobre 1789, j'arborai ce signe si cher aux Français. Plusieurs personnes suivirent mon exemple, mais tout à coup, je vois tous les chapeaux privés de leurs nouvelles parures... — Surpris de ce changement, je cherche quelqu'un de ma connaissance pour savoir les raisons qui l'avaient opéré, lorsque lè sieur Saint-Aubin, hôqueton de l'intendance^ m'accoste, et de la part de messieurs les administrateurs de la colonie, me prie d'ôter ma cocarde.
Je réponds que les représentants de la nation, le roi, généralement tous les Français, la portaient et que je ne prévoyais pas quelle fut la raison qu'a Tabago exclusivement l'on dût être privé d'arborer le gage de la régénération française ; que j'avais toujours eu une entière déférence aux ordres des chefs de la colonie, mais que, dans cette circonstau.ce, je croirais manquer aux devoirs des Français, si j'acquiesçais à leurs désirs.
Les nouvelles parvenues à Tabago, de l'île Sainte-Lucie, nous apprirent quelques jours après que de bons citoyens s'étaient assemblés à la ville de Gastries, à l'effet d'adresser à l'Assemblée nationale leurs témoignages d'une vive reconnaissance, sur le nouveau régime français, de prêter le serment civique, et d'adresser une bourse pour être distribuée aux pauvres veuves et orphelins dont les maris et les pères avaient perdu la vie à la journée mémorable du 14 juillet.
Les bons Français de Tabago ne cessaient de se plaindre d'être les seuls privés de ce bonheur. Messieurs, leur dis-je, je ne doute pas que toute la colonie ne pense comme nous ; mais il faut que ceux qui la composent se réunissent pour cet effet; plusieurs personnes présentes à cette assertion me chargèrent unanimement d'inviter tous les habitauts.
Je m'empressai, le 22 octobre 1789, d'écrire une lettre èn français, que je fis traduire en anglais, au nom de plusieurs citoyens, et je l'adressai aux anciens et nouveaux sujets français de
Tabago, par laquelle je les invitais à se réunir le lendemain 23, 10 heures du matin, pour coopérer au bonheur général de la colonie (1).
Cette lettre était à peine entre les mains de 2 personnes qui la faisaient circuler, que je reçus un exploit, connu sous la dénomination de warrant en Angleterre, que me signifia l'huissier Bigé, de la part de M. Chancel, procureur général à Tabago, qui par des vues de prudence, avait cru devoir le décerner.
Ge warrant défend la tenue de l'assemblée projetée et m'ordonne les arrêts dans ma maison, pendant toute la journée du lendemain 23 octobre, et charge la maréchaussée de son exécution (2).
Le lendemain 23 octobre, sur les 11 heures du matin, plusieurs Français vinrent me trouver, et m'annoncèrent impérativement qu'un concours de citoyens étant déjà rassemblés au lieu désigné par ma lettre d'invitation, il était instant que je me rendisse à l'assemblée. ; Je leur représentai qu'étant aux arrêts par l'ordre du procureur général, il m'était impossible de sortir, à moins que de transgresser l'obéissance due à un supérieur et de faire dégéuérer la liberté en licence..
Les uns se rendirent, les autres exaltés n'écoutaient que leur enthousiasme ; et ce fut au milieu de leurs débats que je reçus une lettre de M. le commandant, qui me donnait avis que lui, M. de Jobal, s'étant entendu avec M. de Saint-Laurent et M. de Chancel, me relève des arrêts, et m'engage de rester tranquille, en mé disant que mon patriotisme m'égarait (3).
Ayant pris lecture de cette lettre, je représentai aux citoyens qui se trouvaient chez moi, que les personnes rassemblées ne pouvaient former que la minorité des Français de l'île ; que je ne croyais pas qu'ils pussent opérer légalement. Alors une voix s'élève : « Invitons MM. Grelier, Guys, Fremin et Favaux, ils ne pourront s'y refuser ; et dès l'instant que les habitants verront des personnes attachées à l'administration se joindre à l'assemblée, tous les citoyens, qui vraisemblablement ne désirent que cela, se réuniront. »
Cette motion arrêtée, on écrivit à ces personnes et la lettre fut signée de MM. Ruthie, Chapp (4), La Fond et Bosque (5).
Première séance
De rassemblée patriotique de la ville de Port-Louis de Tabago.
MM. Grelier» Fremin et Favaux s'étant rendus au lieu de convocation le 23 octobre, à trois heures de relevée, ils furent suivis d'un concours nom-, breux de Français : ma première motion tendit à ne point confondre la licence avec la liberté, et je proposai, à cet effet, de procéder immédiatement à l'élection d'un président qui, provisoi-
rement, prescrirait les règles auxquelles les membres de l'Assemblée seraient tenus de se conformer. La proposition ayant été unanimement applaudie t les voix passées par le scrutin, M. Grelier fut élu président par la majorité et prit séance en cette qualité.
M. le président proposa d'élire un vice-président et un secrétaire.
M. Fremin fut élu vice-président et j'eus l'honneur d'être nommé secrétaire, avec voix délibérative.
L'assemblée se constitua ensuite en assemblée patriotique de Tabago ; sur lés représentations de son président, elle arrêta qu'on adresserait une invitation, signée de tous les membres de l'assemblée, à MM. les administrateurs, afin de les prier de se joindre à l'assemblée, et que MM. Fremin, Favaux, Ringlel, Dufresnoy et Fou-quet seraient députés vers eux à cet effet (1).
Ces députés ayant rendu compte que M. de Jobal improuvait l'assemblée et qu'il refusait de se rendre à ses vœux, il l'ut mis en délibération et arrêté qu'il serait fait d'itératives représentations à MM. les administrateurs, sur les motifs qui avaient donné lieu à la réunion des Français à Tabago ; et, au cas d'un second désaveu de leur part, l'assemblée serait dissoute, comme une marque non équivoque du respect des citoyens pour la loi (2).
MM. Fremin, Favaux, Ringlet, Bouteille, Jamet et Dufresnoy protestèrent alors contre tout ce qui se faisait à l'assemblée (3).
M. Fremin, qui, immédiatement après ces protestations, avait été rendre compte à M. le commandant de l'arrêté de l'assemblée, y revint dix minutes après et annonça que MM. les administrateurs se proposaient de donner une fête publique, où la troupe, en garnison dans l'île, prêterait le serment civique. L'assemblée vota alors des remerciements pour MM. les administrateurs et déclara qu'elle ne se considérait légale que d'après leur sanction ; que tout ce qui avait été fait subsisterait néanmoins jusqu'à ce qu'il eu eût été autrement ordonné (4) -, et que la copie dudit arrêté serait présentée à MM. les administrateurs de Tabago,par ies sieurs Le Maire, Wyait et Guenon. ,
L'assemblée s'ajourna au 30 du même mois d'octobre.
Deuxième séance.
L'assemblée patriotique de la ville du Port-Louis de Tabago s'étaut réunie extraordinaire-ment sur la convocation de son président, le 25e jour du mois d'octobre 1789, à 4 heures de l'après-midi,
M. le président annonça que la convocation de cette assemblée n'avait été faite que d'après la demande des dépuiés vers MM. les administrateurs, lesquels allaient rendre compte à l'assemblée du résultat de leurs missions.
MM. Le Maire, Wyalt et Guenon instruisirent « l'assemblée que M. le commandant de Tabago « la priait de s occuper d'un règlement provisoire « concernant les geus de couleur libres et les
« esclaves de la colonie, et remirent sur le bu-« reau leur procès-verbal, qui expliquait les « objets sur lesquels elle était priée de déli-« bérer(l) ».
Plusieurs Français ayant augmenté le nombre des membres de l'assemblée, M. Le Borgne demanda si elle était légale ; la motion, soutenue par le sieur Fadeuilhe, mise en délibération et passée au scrutin, la légalité de l'assemblée fut déclarée à la majorité de 43 voix contre 27 (2).
Je ne dois pas passer sous silence que cette motion attira au sieur Fadeuilhe des propos désagréables de la part du sieur Pacaud : mais le président ayant ordonné le silence, il ramena tout à l'ordre.
M. Guys fut ensuite élu vice-président, en remplacement de M. Fremin, qui, d'après ses protestations, avait renoncé à sa place.
Je prononçai un discours (3) à la suite duquev je fis plusieurs motions, dont deux furent unanimement approuvées, et les autres renvoyées à l'assemblée générale de la colonie, annoncée par MM. les administrateurs.
M. le président ayant représenté à l'assemblée que la compagnie des chasseurs, en garnison à Tabago, désirait se joindre à nous le jour de'la fête annoncée par MM. les administrateurs, l'assemblée députa deux membres vers M. le commandant pour lui demander, au. nom de l'assemblée patriotique, la faveur sollicitée, ce qui fut accordé par M. de Jobal.
M. deChancel le jeune, de présent àParis, ayant demandé que l'assemblée s'occupât de sa police, il fut arrêté qu'elle nommait à cet effet MM. de Chancel le jeune, Guys de Sainte-Hélène, Gauthier et Flocker qui soumettraient leurs opérations à l'assemblée pour être statué ce qu'il appartiendra.
. Sur une motion de M. Le Borgne, l'assemblée arrêta qu'il serait nommé un comité composé de 19 membres, y compris le président,. le vice-président et le secrétaire, à l'effet dé rédiger les différentes opérations qui devaient être adressées à l'Assemblée mtionale, concernant la colonie, lequel comité serait tenu de rendre compte à l'assemblée patriotique pour être statué en définitif.
Sur une motion du sieur Cocker, nouveau sujet, le sieur Mounier fut nommé interprète anglais de l'assemblée patriotique.
Ensuite l'assemblée arrêta qu'il serait de nouveau écrit aux habitants de la colonie, afin de les inviter à se joindre à l'assemblée, patriotique du Port-Louis, qui s'ajourna au lendemain 26, 10 heures du matin.
Troisième séance.
Le lendemain 26, à l'heure désignée, l'assem-
blée tenant sa séance, M. le président l'instruisit « que la compagnie de M. Cordelier, du régiment « de la Guadeloupe et oa9ernée en ville, était au « moment de monter au fort; que les soldats « murmuraient d'être obligés de céder leur place « à la compagnie des chasseurs, et qu'il couve-« nait de demander que la faveur accordée par « M. le commandant aux chasseurs ne s'étendit « que sur 25 soldats de chaque compagnie « des 5, en garnison à Tabago ; de prier néan-« moins M. le commandant d'en augmenter le « nombre, s'il le jugeait convenable; ce que
l'assemblée arrêta (1). »
Les sieurs Le Borgne et Fadeuilhe, qui avaient été députés vers M. le commandant la veille* furent de nouveau ohoisi9 pour remplir cette mission et, à leur retour, ils instruisirent l'assemblée que M. le commandant avait insulté le sieur Le Borgne» un des députés (2).
L'assemblée arrêta qu'elle prenait en considération l'exposé de ses membres; qu'expédition serait remise» à son comité, de leur procès-verbal pour, sur le rapport qui en serait fait, être statué, a l'assemblée générale de la colonie, ce qu'il appartiendrait ; mais l'objet de la députation requérant célérité, elle nomma le sieur La Fond pour remplacer le sieur Le Borgne, afin que l'ar-rêté de l'assemblée concernant les militaires eût son exécution.
Les députés ayant fendu compte que M. le commandant approuvait la demande de l'assemblée, M. le président annonça qu'il était chargé, de la part de MM. les administrateurs, d'exprimer à l'assemblée qu'ils désiraient ajouter une prière particulière au bas de la lettre d'invitation qui devait être envoyée aux habitants de la colonie ; mais que,avant de mettre l'objet en délibération, il allait leur faire lecture du projet d'une lettre que son comité avait rédigée à ce sujet. Cette lettre était Conçue en ces termes : « Mes-
Sieurs, en conséquence de l'arrêté de l'assem-« blée patriotique» tenue le jour d'hier» en la « tille au Port-Louis, MM. les anciens et nou-« veaux sujets français sont invités, de la part « et selon le Vœu de tou9 les membres de ladite
assemblée, à se trouver» vendredi prochain, « 30 du courant (3), à 10 heures du matin, en la « nouvelle salle du palais» pour, et avec les « citoyens déjà réunis et constitués en assem-« blée, ne former qu'un seul et même Corps» et
tous, ensemble manifester leur joie de la régé-« nération française. Au Port-Louis, le 26 octo-« bre 1769. » Ce projet de lettre et la demande de MM. les administrateurs furent unanimement approuvés, et l'assemblée députa, auprès des chefs de la colonie, le sieur Fadeuilhe, qui remit la lettre à laquelle était joint le « post-scriptum suivant : « MM. les administrateurs se joi-« gnent à l'invitation de l'assemblée du Portai Louis et invitent toute la colonie de s'y trou-« ver pour contribuer tous ensemble au bien « général. »
Signé : le chevalier de Jobal, et Roume de Saint-Laurent (4).
L'assemblée arrêta que ladite lettre serait imprimée en anglais et en français, pour être adressée à tous les habitants de nie de Tabago ; elle procéda ensuite au règlement provisoire concernant les gens de couleur libres et les esclaves (1), et termina la séance ea s'ajournant au lendemain 27.
Quatrième séance.
Le même jour 26» 6 heures du soir, les membres de l'assemblée s'étant extraordinairement réunis, ils furent instruits» par leur président, que le sieur Burhet, chargé de l'impression de la lettre d'invitation adressée à MM. les administrateurs de la colonie, n'avait pas mis sous presse ladite lettre, sous le prétexte que M. le commandant lui avait fait défense de l'imprimer, et M. le président ajoute qu'il né pouvait présumer que le commandant, après avoir paru donner des preuves de son patriotisme, se trouvât tout à coup d'un sentiment aussi contraire à ses démarches.
L'objet mis en délibération, il fut arrêté que M. le commandant serait prié de vouloir révoquer la défense qu'il avait faite à cet imprimeur, au cas qu'il se fût vraiment opposé à l'impression de la lettre, afin que l'arrêté de l'assemblée patriotique eût son exécution, et MM. de Chancel le jeune» Fadeuihle, Gauthier,La Fond, Birabin et Wyath, furent chargés de faire connaître le vœu de l'assemblée à M/le Commandant*
Ces députés ayant rendu compte, par leur prô-éès-verbal, que M. le commandant désapprouvait l'assemblée* qu'il la considérait Illégale, n'étant composée que de personnes dont la majeure partie n'avait pas de propriété terrienne dans l'Ile.
Ce rapport porta la consternation dans le cœur de quelques membres, réveilla l'enthousiasme dans celui des autres, et j'avoue que M. le président eut besoin de toute sa prudence pour ramener le calme et ia tranquillité.
L'assemblée, d'après une motioîi de son tice* président, arrêta que tous ceux qui la composaient prêteraient ie serment Vè[T& fidèles à la nation, au toi et à la loi, et que celui qui abandonnerait l'assemblée, serait indigne de porter le nom français ; elle arrêta aussi que MM. de Chancel le jeune, Gauthier et Fadeuilhe, seraient chargés de rédigër d'itératives représentations pour être présentées à M. le commandant.
Les président» vice-président et secrétaire ayant prêté le serment, la feuille fut remise à M. de Chancel le jeune, un des membres de l'assemblée, pour recueillir les signatures de ceux qui prêteraient le serment civique» Occupé à ce travail, M. de Chancel l'interrompit pour prévenir l'assemblée qu'un jeune homme en habit bourgeois, qu'il avait reconnu pour être un mili* taire, se présentait pour prêter le serment civique et en signer la feuille; il demanda si la demande de ce militaire devait être reçue.
L'assemblée arrêta que les militaires, étant des hommes et Français, devaient être admis à prêter le serment civique*
M. de Chancel le jeune, ayant fait lecture des itératives représentations adressées à M. le commandant, l'assemblée nomma MM. Fadeuilhe, Gauthier, Birabin et le chevalier Duclos, pour les lui présenter.
L'assemblée s'ajourna au lendemain à 8 heures du matin*
cinquième séance.
Le lendemain, 27 octobre, m'étant rendu à l'assemblée, je fus instruit que les soldats de la garnison avaient arboré le pavillon national sur ma maison; un instant après, plusieurs militaires se présentèrent à l'assemblée patriotique, pour prêter le serment civique. D'après l'arrêté pris dans l'assemblée la veille, je reçus en présence de M. le président et plusieurs autres membres, leur serment; je meprêlaisd'autantmieuxàcetle démarche qu'en refusant le serment de ces militaires, sous le prétexte que M. de Jobaldésap-prouvait l'assemblée, c'eût été exposer ce commandant à la fureur des soldats, qui, animés par des sentiments patriotiques, n'eussent pas mandé, dans le premier effet de leur enthousiasme, e rendre ce commandant victime de ses inconséquences.
Qui l'eût dit, qu'une conduite aussi prudente dût produire les armes dont se serviraient les officiers du second bataillon de la Guadeloupe, en garnison à Tabago, l'ancien comité colonial, et le sieur Dangleberme, mes accusateurs et mes juges pour m'enlever mon honneur, mes biens, et pour m'expatrier, au milieu des sauvages, à la Trinité espagnole, oû M. le commandant de Tabago eut la barbarie de me faire reléguer pour m'ôter les moyens de faire parvenir mes doléances à l'Assemblée nationale r
Rien n'est cependant plus Vrai et, parmi toutes lés preuves fournies à mes juges, je n'aurais besoin que des dépositions prises contre moi, à la cotir criminelle de Tabago, le 13 novembre 1789, et du jugement prononcé le 16 du même mois, pour démontrer que 8 juges ont eu la ridicule et atroce frénésie de rendre une condamn ation flétrissante contre moi, parce que j'avais suivi les principes de 25 millions de mes concitoyens.
Le sieur Fadeuilhe étant entré à l'assemblée, fit Une sortie des plus vives contre la démarche des patriotes, sur la réception du Serment civique des militaires; je m'opposai à cette motion; mais M. le président, après avoir pris l'avis de l'assemblée, déchifa les feuilles sur lesquelles le serment et les signatures se trouvaient inscrits»
M. le président observa alors que des gens mal intentionnés ne cessaient de rendre notre conduite suspecte à MM. les administrateurs; qu'il convenait, pour leur prouver la pureté de nos intentions, de délibérer sur les droits de l'assemblée, aflil de lui en donner communication. Cette motion ayant été mise en délibération, il fut arrêté unanimement que l'assemblée patriotique de Tabago n'avait aucuns pouvoirs exécutifs ni législatifs; que ses préientions se bornaient à la seule voie de représentation j et MM. les députés,élus pour présenter les itératives représentations, furent nommés pour faire connaître le vœu de l'assemblée à MM. les administrateurs.
Les députés, de retour, remirent à l'assemblée leur procès-verbal (1), qui constatait l'accueil agréable qu'ils avaient reçu de MM. les administrateurs; et un instant apfè3 la lecture de leur rapport, il arriva à l'assemblée une lettre conçue en- ces termes (2) : « Messieurs, -je ne saurais
« trop vous témoigner mon contentement sur la « manière patriotique et honnête avec laquelle « vous avez terminée votre assemblée, pour vous joindre à celle générale de l'île; j'approuve avec « Je plus grand plaisir tout ce que vous désirez, « et vous prie, Messieurs, d'en recevoir mes sin-« cères remerciements ; et pour preuve de ma « satisfaction, j'invite M. Grelier à se rapprocher « de moi, et l'engage de nouveau à concourir à « la réunion générale que MM. les administra-« teurs se sont empressés d'offrir à tous les ci-« toyens du gouvernement.
« Recevez, Messieurs, les assurances du sin-« cére attachement avec lequel j'ai l'honneur « d'être, Messieurs, votre très humble et très « obéissant serviteur.
« Signé t Le Ghevalier de Jobal. *
Sur la lecture de cette lettré, l'assemblée arrêta que ses président et vice-pfésident se retireraient vers MM. les administrateurs pouf leur témoigner la Vive reconnaissance de l'assemblée.
La séance fut ajournée à quatre heures après midi.
septième et dernière séance.
M. le président lit part à l'assemblée de l'accueil honnête qu'ils avaient reçu des administrateurs, et l'on nomma des députés pour qu'il plût à M. le commandant de leur désigner l'heure et l'endroit où l'assemblée générale de la colonie devait tenir sa séance.
Ces députés rendirent compte que l'assemblée générale des habitants aurait lieu le lendemain, 10 heures du matin, à l'hôtel du gouvernement; et l'assemblée patriotique termina ses séances et s'ajourna pour iesdits lieu et heure.
première et dernière séance de l'assemblée générale et patriotique des habitants ne tabago, tenue à 'hôtel du gouvernement de ladite Me, le 28 octobre 1789*
L'assemblée patriotique de la Ville du Port-Louis de Tabago, à laquelle s'étaient réunis tous les citoyens de la colonie, d'après l'Invitation de ladite assemblée et la convocation de MM. les administrateurs, ayant pris séance en l'hôtel du gouvernement, avec Iesdits administrateurs de Tabago, M. le commandant prononça un discours à la suite duquel M. l'ordonnateur fit lecture du sien (1).
M. Grelier, président de l'assemblée patriotique, prononça aussi Uh discours, à la suite duquel il dit :
« Messieurs, l'assemblée patriotique du Port-« Louis que j'ai l'honneur de présider encore, n'ayant jamais eu pour but que le bien gt'né-« ral et particulier, vous fait avec le plus grand « plaisir le sacrifice de son existence et de tout « ce qu'elle a fait, en vous manifestant son etn-« prestement de se réunir avec tous les Citoyens « pour he former qu'un seul et même corps, et « en vous donnant, par cette marque de con-« fiance, des preuves de son amour pour la paix; a elle juge à propos de vous faire connaître, par « là lecture de Son arrêté du jour d'hier, qu'elle
« a été la base de sa conduite et les motifs qui « l'ont dirigée. »
M. le président fit ensuite la lecture de cet arrêté, après lequel l'assemblée générale témoigna hautement son approbation à l'assemblée patriotique ; et M. Robley, l'un des membres de l'assemblée coloniale de Tabago, dit qu'il était glorieux, pour l'assemblée patriotique du Port-Louis, d'avoir pris pour base des principes aussi sages, et qu'il proposait de sanctionner les opérations de l'assemblée patriotique; ce qui fut arrêté par acclamation.
M. le commandant proposa à l'assemblée de choisir un comité composé de 14 personnes, y compris un président et le vice-président. Toutes les voix parurent alors se réunir en faveur de M. Grelier, qui représenta que ses occupations pourraient l'empêcher de s'acquitter des obligations de cette place; qu'étant le premier officier d'administration après M. l'ordonnateur, il pouvait, par des cas imprévus, être obligé de le remplacer. La pluralité l'ayant choisi malgré ses représentations, il demanda une seconde fois qu'on passât au scrutin.
Chaque membre, derechef, inscrivit son nom sur une feuille de papier et, sur la même ligne, le nom de celui qu'il désignait.
Cette opération achevée, l'assemblée nomma, pour la vérification des voix, MM. de Chancel le jeube, Lindzai, Fadeuilhe et Ërusse, qui présentèrent à l'assemblée .le recensement suivant :
RECENSEMENT.
Voix.
Pour M. Grelier ................... 57
Pour M. Dangleberme............ 51
Pour M. Robley.................. 47
Pour M. Pétrie................... 34
Pour M. Wilson.................. 9
Pour M. Maurville................ 4
Pour M. Bellew .................. 2
Pour M. Chancel le jeune......... 1
Pour M. de Saint-Léger .......... 1
dans lesquelles s'y trouvaient celles des officiers de la garnison, qui avaient tous signé pour lui.
Ce recensement ayant été lu et certifié-par les 4 commissaires, l'assemblée proclama, pour son président, M. Grelier.
M. Fadeuilhe proposa que le membre qui avait le plus de voix après le président, fût élu vice-président, ce qui fut arrêté; alors M. Dangleberme, qui avait 51 voix, fut proclamé.
M. Robley demanda que ceux qui avaient eu des voix pour la présidence fussent nommés membres du comité.
M. Grelier ayant les noms des différentes personnes qui avaient eu des voix, l'assemblée proclama MM. Robley, Petrie, Wilson, Maurville, Bellew, Chancel et Saint Léger. Mais le nombre des élus n'étant que de 9, au lieu de 14, l'assemblée allait s'occuper du choix des cinq autres lorsqu'elle fut interrompue par une scène orageuse.
« MM. Dangleberme, Thibeaux, Delisle, Favaux « et Ringlet sautèrent au cou de MM. La Coste, « Jourdain, le baron deWiterspach, et deux autres « officiers du deuxième bataillon du régiment de « la Guadeloupe, en garnison à Tabago, en leur « disant : Permettez-vous que Grelier soit prési-c dent? Ces officiers crient, au milieu de l'assem-« blée, qu'ils ne veulent pas que M. Grelier soit « président : l'assemblée répond unanimement « qu'il le sera; et au même instant entre M. de
« Roger, capitaine, commandant le deuxième ba-« taillon, qui, s'approchant de M. de Jobal, lui « observa que M. Grelier n'ayant point de posses-« sion dans la colonie et étant officier d'adminis-« tration, n'avait pu être agréé par l'assemblée. « M. de Jobal fit faire silence ; et, s'adressant à « l'assemblée, prononça ces mots : Reconnaissez-« vous M. Grelier pour votre président? Il s'éleva « une voix unanime qui proclama de nouveau « M. Grelier président de l'assemblée. »
M. Roger s'étant retiré, on entendit une rumeur à la porte de l'assemblée, M. de Jobal sortit, et quelques moments après. M. l'ordonnateur le suivit, et fut accompagné d un si grand nombre de personnes, que rassemblée fut interrompue.
Je mepermettrai ici d'interrompre la narration des faits passés à cette séance, pour instruire l'Assemblée nationale de ce qui se passa hors de l'assemblée générale et patriotique de Tabago.
Les officiers de la troupe, rangés en bataille sur la place d'armes, refusèrent de faire prêter à leurs soldats le serment civique, en présence du président de l'assemblée générale; il y eut beaucoup de mouvements dans la troupe; mais M. de Jobal, se servant du prétexte de cette explosion, feignit d'être forcé par les circonstances, « et fit prêter « le serment aux officiers et aux soldats en pré-« sence des membres de l'ancien comité » de l'assemblée ministérielle c de Tabago ».
« Après cette opération, l'on revint à l'Assem-« blée, où M. le commandant annonça que la « troupe avait prêté le serment en présence de « MM. les membres de l'ancien comité intermé-« diaire de l'assemblée coloniale de Tabago. »
M. le président ayant demandé à M. Dangleberme s'il acceptait la place de vice-président, et celui-ci l'ayant refusée, l'assemblée décida que M. Robley, étant celui qui avait eu le plus de voix, après M. Dangleberme, pour être président, devait être substitué à la place de M. Dangleberme.
M. Rpbley prit séance en cette qualité, et l'as semblée procéda ensuite à la nomination des six autres députés, et MM. Fadeuilhe, Paterson, Thomas Cuirie, Irvine, docteur Campbell et Stewart furent élus à la majorité des voix, et prirent séance.
Ensuite le comité élut pour son secrétaire M. Le Borgne, et ledit comité s'ajourna au 3 novembre suivant (1).
Le 29 octobre 1789, le Te Deum fut chanté au gouvernement; après lequel l'on se rendit à des tables que MM. les administrateurs avaient fait préparer. Il sera aisé de se persuader que la troupe n'assista pas au banquet, mais ce qui est hors ae toute croyance, c'est que l'on eût choisi ce même moment, où la joie devait être générale, pour exécuter un perfide complot contre tous les citoyens français; c'est ce qui arriva le soir, au sortir des tables et à l'ouverture du bal.
Les Français, enthousiasmés, ne cessaient de crier : Vive la nation 1 vive l'Assemblée nationale! vive le roi I vive les administrateurs.
Je sors du gouvernement, et passant devant la troupe, M. de Beuze, brave officier, qui la commandait, vient à moi et me dit : Monsieur Bosque, faites retirer les citoyens, ils sont en danger; l'on bat la générale.
Je me multiplie partout, je les supplie de se retirer, ce qu'ils font. J'entre dans la salle de bal,
M. de Jobal vient à moi, m'embrasse, me témoigne combien il est satisfait de ce que j'ai eu le courage de travailler au bien général ; qu'il avouait avoir été trompé sur mon compte. Je lui réponds laconiquement que la suitele convaincrait mieux de mes vues, et je me retirai. Mais à peine avais-ie fait deux pas en arrière, que le sieur Fontal-lard, assisté ae plusieurs autres personnes, m'assaillissent, me frappent; je lève ma canne pour me défendre : plusieurs bous citoyens viennent me dégager, et je suis assez heureux pour m'es-quiver. Pendant la durée de la fête, on ne voyait que des sabres nus voltigeant sur les têtes des citoyens ; mais ces braves soldats n'exécutèrent pas les ordres qu'ils avaient vraisemblablement reçus.
Je passerai sous silence tout ce qui se passa depuis cette époque jusqu'au 2 novembre, ayant tout ce temps rè?té chez moi, d'après des informations que j'avais eues, qu'on avait gagné des soldats pour m'assassiner ; et même j'en ai vu, pendant plusieurs nuits, trois ou quatre devant ma porte, qui n'en sortaient que le matin.
Ce jour, M. Grelier m'avertit que M. le commandant me conseillait de partir de la colonie, parce que mes jours étaient en danger.
J'envoyai le sieur Blondel, mon clerc, chez M. le commandant, pour lui demander si vraiment il était instruit que l'on en voulait à ma vie : M. de Jobal répond que celle de MM. Grelier et Guys est aussi menacée, et qu'il ne pouvait répondre du bataillon; ne voulant être la cause d'aucun trouble dans la colonie, je l'envoyai de nouveau vers M. le commandant, pour avoir un congé, qu'il lui délivra (1).
Dès l'instant que j'eus ie congé, j'engageai le sieur Pacaud, navigateur, de me donner passage pour la Martinique, et je m'embarquai sur son bateau le 2 novembre 1789, à dix heures du soir; MM. Grelier et Guys ayant engagé le sieur Pacaud d'attendre jusqu'au lendemain, afin qu'ils pussent
{>rotiter de cette occasion pour partir de la co-onie, nous ne mîmes à la voile que le 3 du même mois, à dix heures du matin, et nous arborâmes le pavillon national... A peine avions-nous franchi la rade du Port-Louis de Tabago, que nous aperçûmes « une goélette anglaise sous son pavillon « avec plusieurs soldats à bord, qui nous don-« nait chasse. Nous dirigeâmes alors noire route « sur la Trinité espagnole, ne sachant pas ce que « cette goélette nous voulait, et ayant tout à « craindre du parti aristocratique, qui avait pris « le dessus par ses cabales :1a goélette, meilleure « voilière que nous, ne tarda pas à nous attein- dre; elle assure son pavillon par un coup de « mousquet. Des anglais, sabre à la main, sautent « à l'abordage, nous constituent prisonniers, et « nous conduisent à la baie de Sandi-Point de « Tabago (2) ».
MM. Grelier et Guys descendent à terre. Seul je reste à bord jusqu'au soir, où M. le commandant envoya ordre de m'amener à la ville du Port-Louis. Je suis conduit par huit soldats et le sieur de Witerspach, officier : à l'entrée de la ville, cinquante ou soixante soldats se joignent au huit qui formaient mon escorte, le prévôt Marshal me
fit lecture d'un warrant, décerné sur les dépositions de quelques soldats, prises « par leurs offi-« ciers, dans lequel je suis accusé :
« 1° D'avoir dit à un soldat qu'il pouvait aller « boire où il voudrait;
« 2° Que j'avais dit avoir la compagnie de « M. Gordelier à mes ordres (1) ;
« 3° D'avoir reçu, comme secrétaire de l'as-« semblée patriotique, le serment de plusieurs « soldats (2). » Apres cette lecture, je suis conduit en prison, où, couché sur le plancher, l'on me met aux pieds une barre de fer de cent livres pesant.
Ce fut donc sur des dépositions des soldats que je fus arrêté. Ces dépositions, comparées avec celles qui furent reçues par le comité colonial, et par deux juges ue paix, ne présenteront qu'un tableau d'horreurs et de contradictions. Heureusement ces pièces, revêtues de toute l'authenticité nécessaire, sont en ma possession ; c'est le Ciel qui m'a protégé, j'03e le aire; et vous en serez convaincus, Messieurs, lorsque vous saurez toutes les peines que j'ai eues, et les périls que j'ai courus avant de me rendre à la capitale.
Que l'on me permette ici d'expliquer les motifs qui donnèrent lieu aux persécutions contre moi. L'on se souvient qu'ayant été celui qui paraissait avoir convoqué la nouvelle assemblée, laquelle, par la sanction des représentants du pouvoir exécutif, se trouvait la seule légale à Tabago, l'ancienne assemblée devenait alors inactive.
Les membres de l'ancien comité de cette assemblée ministérielle ne virent pas avec plaisir l'anéantissement de leurs pouvoirs. Le serment de la garnison, prêté en leur présence, et la réunion des officiers avec eux, leur firent projeter, n'osant m'assassiner ouvertement, de le faire sous le manteau de la loi. Dès l'instant, l'intrigue, la cabale, tous les moyens les plus iniques sont mis en usage. Je suis représenté aux soldats et aux habitants comme un scélérat qui a voulu envahir toutes les propriétés terriennes : l'on me prête les prétentions les plus absurdes, les plus ridicules;et peu s'en est fallu qu'ils n'aient allégué que je voulais métamorphoser là colonie de Tabago en une monarchie, pour me faire couronner.
Les premiers qui paraissent sur l'arène, comme mes accusateurs, sont MM. Gilbert Pétrie, Thomas Wilson.William Smith,Thomas Gurrie, Nathaniel Steward et Robert Paterson, tous membres de l'ancien comité colonial.
M. Gilbert Pétrie, ayant convoqué le comité le 3 novembre, d'après le vœu unanime de ses collègues, « observe que l'objet le plus essentiel de « là séance était de prendre en considération des « rapports d'une nature très alarmante, relative « ment à la sûreté de la colonie, sur les moyens les plus efficaces pour la conservation de la paix « et la sûreté de l'île, d'après ce qui serait mis « sous les yeux du comité, et requiert que, si « quelqu'un pouvait donner des informations « concernant le danger dout il a couru le bruit c que la colonie est menacée, il les communique « au comité ».
Après la réquisition de M. Pétrie, M. Dangle-berme fait à ce comité la dénonciation la plus fausse et la plus criminelle, dans laquelle il enveloppe les personnes dont il s'est déclaré l'en-
nemi. Voïci sês termes : « Ma motion a tendu à « mettre sous les yeux tu comité les justes mo-« tifs de crain'e du danger où toute l'île a été par « une assemblée illégale et illicite, convoquée « par un certain Bosque, Grelier, Guys de Sainte-« Hélène, et Pierre-Joseph Le Borgne. »
Je prouve que cette première accusation 'est fausse. G'est moi seul, et je m'en honore, qui ai convoqué l'assemblée, d'après le vœu de mes concitoyens. Mais,pour servir entièrement les projets de M, de Jobal, il falla it qu'il supposât des crimes à ceux qui avaient les plus justes plaintes à porter contre ce commandant. Le sieur Dangleberme, visant à des emplois lucratifs, se ménageait encore, par ce moyen, le comité et MM. les officiers.
Au soutien de ma motion, poursuit le sieur Dangleberme, « j'ai remis sur le Bureau le nombre « des dépositions des différents soldats en gar-« nison en cette île fi), ayant été prié par « MM. les officiers de faire la présente motion en « leurs noms, et comme-ayant été la cause légi-« time du refus qu'eux etleurs troupes ont fait « de prêter le serment entre les mains du sieur « Grelier, nommé tumultueusement, et sans ap-« probation du plus grand nombre de citoyens».
M. Dangleberme n'est pas plus vrai dans cette assertion, contre M. Grelier, que dans sa première contre moi; M. Grelier a été nommé pendant trois fois,par la majorité des suffrages del'assembléegénérale, composée de tous les habitants de Tabago. Assez de personnes, qui se trouvaient à la séance où M. Grelier fut élu président, sont actuellement à Paris, et pourront attester combien cette accusation est fausse, absurde et inique.
Qu'avoue néanmoins M. Dangleberme, dans ce chef d'accusation ? Que les officiers militaires se sont rendus coupables envers les officiers municipaux choisis par les citoyens; que ces officiers ont désobéi à leur commandant, et que la haine contre les patriotes leur a suggéré de capter des dépositions de leurs soldats, afin que ces soldats, avant déjà déposé devant eux, par la crainte du châtiment, ne pussent ensuite se dédire de leur témoignage: mais la vérité est une. elle ne peut se cacher; ces témoins, captés ou intimidés, n'ont pu soutenir leurs rôles devant les juges, lorsqu'ils m'ont été confrontés, malgré que les officiers fussent présents ^ leurs dépositions.
Je ne me permettrai pas de suivre la motion de M. Dangleberme dans tous les chefs d'accusation qui me sont indirects; j'observerai néanmoins que partout elle offre des faussetés et des contradictions ridicules.
« M. Dangleberme m'accuse aussi d'avoir se-« condé une motion tendant à faire venir M. le « commandant devant l'assemblée, pour y rendre « compte des motifs qui l'avaient porté à insulter « un député de notre assemblée. »
Les opinions sont libres, et j'éiisse pu seconder cette motion sans être coupable; j'avais voix dé-libérative à l'assemblée ; il m'était donc permis de donner mon avis si les opinions eussent été enchaînées, ce n'aurait été qu'une assemblée d'es-claves. L'accusation est encore fausse ; jamais il n'y a eu une pareille motion de faite à l'assemblée; pas un témoin qui en dépose, pas même le sieur Fadeuilbe, qui ne laisse aucun doute dans sa dé-
claration, qu'il ne fût venu pour exprimer ce qui se disait et se f .isait à l'assemblée.
Le dernier chef d'accusation du sieur Dangleberme est aussi contradictoire et aussi faux que les autres. « Il accuse le sieur Pacaud d'avoir c voulu assassiner le sieur Fadeuilhe, le jour que « celui-ci fit la motion de ne point recevoir le « serment civique des militaires, et ce jour était « le matin du 27 octobre 1789. »
Le sieur Fadeuilhe, qui est l'homme cité par le sieur Dangleberme, dépose « que lui, Fadeuilhe, « ayant fait une motion tendant à déclarer l'as-« semblée illégale, elle fut opposée par moi, et « que mon opposition fut si bien souVnue de la c plus grande partie dé l'assemblée, qu'une voix « quasi générale s'éleva pour le mettre dehors, « et que le nommé Pacaud se jeta sur liji, et n'aq-« rait pas manqué de le mutiler, sans qu'il s'en « doutât, sï le sieur Bouteille n'eût empêché le « sieur Pacaud; mais enfin que tout s'apaisa? et « l'on fut aux voix. » Mais le jour qu'il fut délibéré sur la légalité de l'assemblée « était le « 25 octobre 1789 après midi ». Voici le fait : le sieur Fadeuilhe niait la légalité de l'assemblée j le sieur Pacaud opinait pour le contraire; les esprits s'échauffent; le sieur Pacaud, près du sieur Fadeuilhe, joint des menaces à ces arguments; le président ramène tout à l'ordre, et l'on est tranquille.
« ici M. Dangleberme prie le comité ministériel, « au nom de MM- les officiers et au sien, de sta-« tuer ce qu'il appartiendrait, sur sa déposition « et celle des soldats. » Mais quel droit avajt M. Dangleberme de provoquer l'instruction de mon procès? Et quel droit pnfinavaient Messieurs de l'ancien comité ministériel de l'instruire? Aucun assurément.
Le juge de paix, d'après une ou plusieurs dé* positions faîtes devant lui sous serment, a le droit, suivant les lois anglaises, de provoquer l'intervention du procureur du roi, pour la vindicte publique ; alors celui-ci demande, si le cas le requiert, la proclamation d'une cour criminelle,
Quoique le sieur Dangleberme fût juge de pg.ix, il n'en prit point la qualité dans sa dénonciation, et n'a agi que comme l'agent des officiers qui l'avaient chargé de me dénoncer à Messieurs du comité, sur des dépositions prises dans l'ombre du mystère; mais le comité n'avait pas pins de droit d'informer que mes premiers accusateurs. L'assemblée ministérielle de Tabago, de qui le comité tient ses pouvoirs, n'a que le droit,, d'après l'ordonnance du 21 octobre 1789, qui la constitue, d'asseoir, de recouvrer et répartir l'imposition de la colonie de Tabago, sous le mode qu'elle jugera convenable, d'après |a fixation qui en est déjà faite par Sa Majesté.
Après la dénonciation de M. Dangleberme, le comité reçoit des déclarations sigi}éçs des personnes, et il est ordonné de les déposer.
C'est sur des dépositions de cette nature que ce comité demande à M. le commandant, soqs le prétexte que la colonie courait des Rangers, que ia garde fût doublée; et c'est sur cette demande que M. lecommandant, qui paraissait avoir donné lieu A mon départ de la colonie, pour me sauver des fureurs de la cabale, se porte à donner des ordres contre moi»
Voilà donc ce que voulait M. de Jobal; voilà ce que tramaient 1rs officiers et les membres de 1 ancien comité de l'assemblée ministérielle de Tabago, depuis le 28 octobre jusqu'au 3 novembre; voilà donc enfin ia conduite de ce commandant
qui se dévoile : tantôt sanctionner l'assemblée patriotique et la désapprouver; tantôt jouer le citoyen et conduire tout avec perfidie. C'est au moment que la colonie paraît une, où les têtes calmées annoncent la paix, que les officiers de la garnison refusent d'obéir à leur commandant; c'est ainsi que, paraissant céder à la force, il consent que les troupes prêtent le serment entre les mains de ceux qui sont intéressés au maintien de l'ancienne Constitution; il ne borne pas lèses cruels desseins; les fêtes sont l'appât trompeur préparé à d'honnêtes citoyens qui, s'ils n'ont pas été immolés à la fureur aristocratique, ne doivent leur vie, j'ose le dire, qu'aux soldats de la garnison.
Les cartouches distribuées, la générale battue, les sabres suspendus sur la tête des Français, tout n'annonçait-il pas des ordres inhumains?
Le zèle patriotique et l'honnêteté des soldats ne secondèrent pas la bassesse des forcenés qui les excitaient.
Quelques âmes viles sont plus faciles à corrompre ou à intimider qu'une garnison.
Le 3 novembre est le jour qu'ils croient pouvoir exécuter leurs complots; et c'est le jour que M. le commandant signe une lettre de recommandation (1), qu'il joint à un congé qu'il m'a déjà délivré (2); et c'est ce même jour que, secondant la réquisition du comité ministériel, il lui fait réponse t que lorsqu'il lui fera de pareilles demandes, il sera obéi à la minute (3); et c'est ce jour qu'il donne ordre à un bâtiment anglais de nous arrêter. Celui-ci, assuré de l'impunité, ne respecte ni le pavillon national, ni le droit des nations, arbore son pavillon, l'assure par un coup de feu, et les forcenés anglais qui s'y trouvent sautent à l'abordage, sabre & la main, et se mettent en posture d'assassiner des hommes qui n'ont, pour toute défense, qu'un courage vertueux, soutenu par leur patriotisme.
Après toutés ces opérations, les membres du comité se ravisent; ils voient qu'ils ont agi illégalement; mais,munis des déclarations qu'ils ont captées, ils se croient sûrs dé l'exécution de leurs projets; ils s'adressent à deux juges de paix, qui sont MM. Irvine et Saint-Léger, et deviennent mes accusateurs auprès de ces deux magistrats qui, s'étant rendus au comité ministériel, commencèrent l'instruction de mon procès.
Le 4 novembre 1789, je fus conduit devant le comité; et iô, le sieur Irvine me demanda si je n'avais rien & dire pour ma décharge : lui ayant répondu que mon accusation me paraissait si frivole, qu'il était inutile de faire de réponse, je fus conduit de nouveau en prison. Cette fois-ci mes
fers me sont ôtés; mais trois sentinelles et six assassins, sabre à la main,'un sergent et un officier à leur tête, font la garde d'honneur que j'ai à toutes les visites qui se font d'heures à autres dans ma prison. *
Les sieurs Irvine et Saint-Léger trouvèrent, d'après les déclarations de différents particuliers, et dépositions, qu'il y avait un chef d'accusation suffisant pour décerner contre moi un décret de prise de corps, comme accusé de mépris contre la personne du roi et du gouvernement (t).
Les autres séances de ce comité ne vous présentent qu'un tableau effrayant çontre MM. Grelier et GUys; ils captent des déclarations des soldats, les envoient a MM, Irvine, Saint-Léger et Chancel. Ces magistrats font venir devant eux les témoins désignés et leurs dépositions leur paraissent si contraires à leurs déclarations, que ces magistrats, guidés par leurs devoirs, malgré les vives réclamations au comité, ne peuvent décerner contre ces citoyens aucuns décrets.
J'observe que ces déclarations et dépositions présentent néanmoins une contradiction si évidente, que je ne puis me dispenser de supplier mes juges de vouloir bien en faire la comparaison avec celles qui furent faites à la cour crimi-minelle,lorsque ces témoins me furent confrontés.
J'observe aussi que les déclarations reçues par le comité, sont extrajudiciaires, que les dénonciations eu forme de dépositions, faites contre moi devant les deux juges de paix, ne peuvent servir ni â ma charge ni a ma décharge.
Les dépositions sous serment, reçues par des juges de paix en Angleterre, ne donnent lieu qu'à décerner un warrant ou décret de prise de corps contre un accusé, à moins qu'un des témoins ne vînt à décéder avant la tenue de la cour; alors cette déposition est lue, et les juges y ont égard ou non : mais,si ces cas ne se rencontrent pas, il n'y a que les dépositions faites devant la cour criminelle anglaise, où se trouvent les jureurs et et l'accusé, auxquelles on défère.
Le 5 novembre, M. de Jobal proclama une oour criminelle pour le 12 du môme mois (2).
Voilà encore des fruits du patriotisme de ee commandant. Il est témoin des trames des ennemis de la Constitution ; il me sait en prison, puisqu'il a donné ordre de m'arrêter, il sait que mes accusateurs vont devenir mes juges, et il favorise l'exécution de leijrs perfidies : il est donc plus coupable que ceux qui s'appuient de leur autorité.
Le 12 du même mois, la cour criminelle prit séance (3); et de qui fut-elle composée? Vous frémirez, Messieurs, quand vous saurez que ce même comité, qui m'avait dénoncé à deux juges de paix, qui avait provoqué avec tant d'ardeur l'instruction de mon procès, qui avait capté des dépositions; que le sieur Smith, un d'entre eux, se trouve, à la fois, mon accusateur prévôt-maréchal, et par conséquent l'être qui choisit les grands et petits jureurs; ce comité, dis-je, fut le même qui osa se présenter pour me juger. A l'exception de MM. Roume de Saint-Laurent et Irvine, tous étaient mes ennemis ou mes dénonciateurs.
J'ose dire mes ennemis ; car l'on verrai par les dépositions qui furent reçues par cette cour, le sieurFagan, un des juges, récuserun témoin après qu'il a été entendu, parce que ce témoin venait de déposer la vérité.
M. de Saint-Laurent qui avait été instruit, par la clameur publique, que le parti de mes ennemis était décidé à me faire pendre; qu'il avait été même dit par les officiers, que si je ne l'étais pas, ils sauraient se rendre justice; que les jours de cet administrateurétaient aussi menacés ; M. de Saint-Laurent eut assez de courage, en leur donnant des louanges que la force nécessitait, de prononcer un discours, où il leur représente « la « honte de laquelle ils vont se couvrir, en jugeant, « d'après les lois anglaises, des accusations qui « ne pouvaient être considérées que comme une « des choses indispensables à la régénération de « la France; de leur dire qu'il ne leur appaite- « nait pas de s'ériger en juges d'un fait exécuté « par 25 millions de Français (1) ».
Tout cela ne peut arrêter leurs fureurs ; ils en veulent à mon honneur et à ma vie.
Les grands jureurs donnent leur verdict, dans lequel je suis accusé:
« 1° D'avoir affaibli le gouvernement de Sa « Majesté, et porté atteinte à la discipline mili- taire, en disant au soldat Garrot que les soldats « devaient aller boire où ils voudraient; . «2°D'avoirdit à plusieurs personnes que j'avais à
« mes ordres la compagnie de Cordelier ; . « 3° Que le 27 octobre, dans une assemblée « illégale, j'avais reçu le serment de plusieurs « soldats (2) n.
Je réponds en deux mots au premier chef d'accusation, que, quand même j'eusse dit à des soldats qu'ils pouvaient aller boireoùils voudraient, sans autre autorité quela mienne, je ne leurdonnais aucuns pouvoirs de le faire; qu'indépendamment de cette raison, peu m'importait que les soldats fussent boireàla cantine du régimentou ailleurs, puisque, n'étant ni marchand ne vin, ni agent de ces marchands, je devais considérer l' objet comme m'élant tout à fait indifférent ; fait pour lequel on ne pouvait me supposer un crime, puisqu'il ne présente aucun dessein prémédité, et qui n'est qu'un allégué mis en avant, au hasard.
Comment 24 grands jureurs, sur une délation aussi peu fondée, ont-Us pu m'accuser d'avoir voulu affaiblir le gouvernement de Sa Majesté?
C'était d'après les lois anglaises qu'ils devaient porter leur verdict, puisqu'ils ne voulaient prendre aucune part à la nouvelle Constitution française. Examinons donc quel est le cas, selon le3 lois anglaises, où l'on peut établir ce chef d'accusation. « Si oh écrit contre eux, dit la loi, en « parlant des souverains, si on les maudit, si on « leur souhaite du mal, si on rapporte des histoi-« res scandaleuses, auxquelles ils sont intéressés, « et qui peuvent tendre à affaiblir le zèle des « sujets, nuire au gouvernement, ou exciter « contre le souverain la jalousie et la méfiance de « ses peuples. »
Voilà les cas, suivant là loi anglaise, où l'on peut être accusé de ce crime. Mais un de ces cas existe-t-il, en disant à un soldat que la troupe pouvait boire où elle voudrait ?
Je ne pouvais donc, sous le prononcé de la loi, être accusé de ce crime, et le grand juré se permet ce prononcé, et ose avancer que j'ai voulu méchamment et calomnieusement affaiblir le gouvernement de Sa Majesté. 0 esprit de parti 1 0 indignité !
Le deuxième chef d'accusation porte que j'avais
dit avoir la Compagnie de Cordelier à mes ordres.
Pourquoi euessé-je ditavoir cette compagnie à mes ordres ! Par quels motifs ? Expliquez-vous, jureurs? Vous voulez que je l'aie dit, hé bien I quel mal y aurait-il t Que supposez-vous de cette phrase qui ne renferme aucun sens? Que j'ai excité des séditions;du trouble? Si je l'ai fait, c'est, sans doute, un crime ; mais alors il y aura eu entre les soldats et moi quelques complots nuisibles à la tranquillité publique. « D'ailleurs, « la garnison de Tabago était composée de cinq compagnies, dont quatre étaient au fort Castries. « Cette forteresse domine la ville du Port-Louis, « à une portée de mousquet, et la compagnie de « Cordellier était casernée en ville. Or, comment « y aurait-il pu avoir un complot avec unecom-* pagnie isolée, laquelle, composée d'environ « 100 hommes, en avait 400 à combattre, « qui, par l'avantage de leurs positions, en va- « laient 10,000 ? Peut-être ai-je voulu, sui-« vant ces dépositions, gagner toute la garnison ; « mais alors, il y aura eu de l'argent distribué, « des armes données on promises des munitions, « un signal pour former le ralliement, au mo-« ment et à l'instant que l'exécution du complot « devait produire son effet. »
Non, rien de tout cela, serez-vous obligés de dire : les déclarations qu'on nous a remises ne parlent que vaguement de la compagnie de Cordelier, et ne donnent pas même à présumer qu'il y eût aucun dessein de formé avec cette compagnie. lié quoi I vous vous permettez, sur des dé-.positions aussi dénuées de vraisemblance, d'eu former un chef d'accusation au criminel ! vous, grands jureurs I vous, les gardiens de l'honneur du citoyen, vous osez le compromettre si légèrement I Quelles réflexions votre conduite ne fait-elle pas naître ! Ou vous êtes gagnés par les membres du comité ministériel, ou vous êtes effrayés des propos menaçants qui se tiennent depuis mon emprisonnement : c'est l'un ou l'autre de ces cas.
Le troisième chef d'accusation porte que le 27 octobre, dans une assemblée illégale, j'avais reçu le serment de plusieurs soldats.
Je réponds que notre assemblée était sanctionnée par les administrateurs de Tabago, et constituée en assemblée patriotique. Mais, qu'à supposer qu'elle n'eût pas été légale, alors la sanction que vous et tous les habitants de la colonie donnâtes avec les représentants du pouvoirexécu-tif, le26octobre 1789, à toutes les opérations, lui donnait toute la légalité requise. Or,en m'accusant, ne vous comprenez-vouspasdans cette accusation, puisque vous avez sanctionné en entier ce qu'elle avait fait? D'ailleurs, j'étais secrétaire de cette assemblée, et ce n'était que d'après son arrêté que j'avais reçu le serment civique des soldats qui se présentaient pour le prêter : instrument des volontés de l'assemblée, je m'en glorifie.
C'est donc là mon plus grand crime, c'est celui qui est prouvé, c'est celui que j'avoue; c'est enfin le titre le plus cher à mes vœux, que d'avoir exécuté, comme secrétaire, les volontés d'une assemblée de bons patriotes français.
Le 13 du même mois de novembre, je suis conduit devant mes accusateurs et mes juges; il m'est fait lecture des accusations contre moi, ensuite on nomme des petits jureurs, et les témoins sont entendus.
Le sieur Favt aux Ringlet, premier témoin, « dit « que j'ai déclaré avoir, quand je voudrais, la « compagnie de Cordelier à mes ordres, mais
« qu'il ne sait pas pourquoi ; qu'il protesta contre « la légalité de notre assemblée, à moins qu'elle « ne fut sanctionnée par MM. les administra- « teurs »>.
J'observe, sur la déposition de ce témoin, que ce fut un de ceux qui protestèrent contre l'assemblée; mais quelle loi la cour pouvait-elle ajouter à la déposition d'un témoin qui déclare avoir protesté Contre l'assemblée patriotique de Tabago, et qui par conséquent s'était déclaré, ouvertement l'ennemi de tous ceux qui la composaient? Que dit ce témoin? Que j'ai déclaré avoir la compagoie de Cordelier à mes ordres. Cette déposition est aussi isolée que le deuxième chef d'accusation contre moi : point d'assertion, pas un mot qui conduise à savoir pourquoi j'avais cette compagnie à mes ordres.
Le sieur Dufresnoy, deuxième témoin, dépose du même fait que le précèdent. Ce témoin est eucore un des cinq qui protestèrent contre la légalité de notre assemblée; il sera donc inutile de rien ajouter à la réfutation précédente.
Le sieur Thèbe, troisième témoin, « dépose du « même fait, et ajoute que je lui avais dit que les « soldats de la compagnie de Cordelier auraient « arboré des cocardes sans la permission du « commandant, et que je leur avais déjà, donné « des rubans pour en faire. Ce témoin dit en « outre qu'il seconda une motion contre la léga- « lité de notre assemblée, à moins qu'elle ne fût « sanctionnée par les administrateurs».
Voilà donc mon crime, suivant ce témoin; c'est d'avoir donné des rubans pour faire des cocardes nationales à des soldats : ce témoin avoue aussi qu'il désapprouvait l'assemblée, à moins qu'elle ne fût sanctionnée par les administrateurs. L'assemblée patriotique a cependant été approuvée par les signatures du commandant et de l'ordonnateur; néanmoins le sieur Thèbe ne s'y est plus montré. Gomment ce témoin peut-il avancer une pareille assertion, sans démontrer que des vues d'intérêts l'obligeaient à se déclarer mon ennemi, pour faire sa cour âmes juges?
Le sieur Bertrand Fadeuilhe, quatrième témoin, dit « qu'étant venu à l'assemblée patriotique, « il y trouva des soldats qui signèrent un ser- « ment en présence du président, du vice-prési- « dent et du secrétaire ; que ce serment portait « d'être fidèle à la nation, au roi et à la loi; qu'il « attendit que les soldats fussent sortis avant de « faire sa motion,tendant à empêcher ce serment, « et que je m'opposai à cette motion ; mais que « M. Greiier, président, donna son opinion, et « ordonna que le papier sur lequel les soldats et « les autres avaient souscrit, fût déchiré, ce qui
* fut approuvé ».
Immédiatement après cette déposition, le sieur Fadeuilhe en fait une tout à fait contraire, « et il « observe que les soldats ont signé sous ma di-« rection, sans la connaissance du président et « du vice-président. Il dit aussi qu il désaprouva « l'assemblée, etc. Et que tous ceux qui avaient « été présents à la séance précédente furent » obligés de signer le serment, soit qu'ils le vou-
lussent ou non ».
Les contradictions qui se trouvent dans cette déposition suffiraient pour prouver que le sieur Fadeuilhe est un faussaire; mais, pour plus grande preuve, je supplie mes juges d'examiner la déclaration du sieur Fadeuilhe, devant les membres de l'ancien comité ministériel de Tabago; on y verra ce même témoin dire que M. de Chancel le jeune, ayant été chargé de faire signer le serment civique par tous ceux qui compo-
saient l'assemblée, un militaire s'étant présenté pour le signer », M. de Chancel demanda s'il fallait recevoir sa signature, et « qu'il s'éleva alors « un cri général, oui ». On verra aussi ce même témoin dire, dans cette déclaration, qu'après son opposition par la récep'ion du serment civique, « M. le président, M. de Chancel, et M. Guys « dirent que les soldats étaient des citoyens ». Or, d'après sa première déclaration, c'est d'après le vœu de mes concitoyens que j'ai reçu le serment des soldats, puisqu'etant le secrétaire de l'assemblée patriotique j'étais obligé de suivre ses ordres.
Le commencement de sa déposition à la cour criminelle avoue que « ce fut en présence des « président et vice-président que j'avais reçu le « serment des soldats » ; mais, étant placé directement à leurs côtés, pouvais-je recevoir ce serment sans qu'ils en eussent connaissance ? Et ce même témoin ose dire, quelques instants après, « que je reçus ce serment sans la connaissance « aes président et vice-président ».
Est-ce les juges qui ont mal entendu ? Est-ce le faux témoin qui a manqué de mémoire ? L'alternative est facile à décider.
Cette déposition dit aus-i « que je me suis « opposé à ce que l'on déchirât le serment (1) », Assurément, je m'y opposai, parce que les minutes de notre assemblée devaient toujours rester in statu quo, afin de prouver la légitimité de nos opérations. Aussi, lorsque ie fus jugé à Cette cour inique, « je ne cessais de demander les mi-« nutes de notre assemblée, pour prouver la « conduite des patriotes à Tabago ; mais les ju-« ges s'opposèrent à ma demande (2) ».
Le sieur Fadeuilhe dit aussi « qu'il fit plusieurs « motions tendant à déclarer rassemblée illé-« gale, etc., etc., etc. » Les mêmes moyens déduits contre les témoins
Précédents se présentent contre le sieur Fa-euilhe.
Le sieur Fadeuilhe dépose, et c'est l'unique témoin qui parle de ce fait, « que l'on força ceux « qui étaient à l'assemblée de signer le serment » ; et c'est ce même Fadeuilhe, qui, le 3 novembre, en parlant de l'admission au serment des militaires ou non à l'assemblée, a dit « qu'il s'éleva « un cri général, oui ». D'ailleurs, le sieur Fadeuilhe, ou ceux qui avaient été, suivant lui, forcés de prêter le serment, pourquoi n'ont-ils pas été faire leurs déclarations au greffe public de l'Ile de Tabago ? A coup sûr, le sieur Fadeuilhe, qui est nomme de loi| n'eût pas manqué cette occasion pour seconder les maximes des ennemis de la Constitution. Quoi! le soir, le sieur Fadeuilhe est forcé de prêter un serment, et le lendemain, suivant sa déposition, il se permet de venir désapprouver toutes les opérations de l'assemblée $ On l'écoute et sa demande est allouée. Quelles contradictions I N'est-ce pas ici le lieu de lui dire qu'un faux témoin doit avoir bonne mémoire ?
La déposition du sieur Garnaud,cinqu ème témoin, ne sera point réfutée, d'autant qu'elle m'est indirecte.
Le sixième témoin, c'est le sieur Perrein, can-tinier de la troupe à Tabago, qui, s'il eût été vrai que j'eusse dit aux soldats d'aller boire où ils
voudraient, n'aurait pas manqué, étant animé par des sentiments de vengeance, de me charger ; et c'est cet homme que les juges reçoivent en témoignage contre moi. Hommes abominables ! rien ne vous arrête : vous voulez venir à votre but ; vous n'y parviendrez cependant pas : ce témoin est honnête ; l'inimitié du commandant, la menace des officiers, vos soUicitations même, ne lui feront rien dire contre la vérité ; et sa déposition, écrite par un de mes accusateurs, mon ennemi et mon juge, quoique affaiblie sur deux faits qui sont avantageux aux Français de Tabago,sera une de celles qui vous fera rougir de honte, s'il est possible que vous en soyiez susceptibles ! Oui, voilà votre condamnation ; lisez f
Traduction p'une des dépositions en anglais, prises le 3 novembre 1789, par le sieur wilson, un dgs juges.
« Sixième témoin, Pierre Perrein, cantinier « de la troupe, déclare que le 23 octobre 1789, « il se trouva à l'assemblée patriotique ; qu'il a . « signé un papier sur lequel étaient plusieurs « signatures 1 qu'il répugnait beaucoup à cela, « la première lois, comme il ne voyait pas le « nom de M. Dangleberme ou quelqu autre qu'il « régardait comme les principaux de la ville ; « que M. Bosque, le prisonnier, était là, et dit, ». en qualité de secrétaire de l'assemblée, que la « deuxième fois qu'il se trouva à cette assem- « blée, une motion fut faite si elle était légale > ou illégale, et qu'elle fut déclarée légale par « 43 voix contre 27; qu'il y a paru un soldat « qui portait une veste Dlancne, qui se présenta « pour signer le serment, et que M. de Chan- « cel le jeune se leva, et demanda si on devait « permettre à cet homme de signer le serment « ou non : on y consentit, et il fut permis « au soldat de signer le serment. Qu'en addi-er"> tion à ce serment, autant que le déposant « peut se rappeler, les anciennes lois doivent être observées jusqu'après l'assemblée de toute l'île, qui devait être convoquée le jeudi sui-
« vant; et que ceux qui manqueraient rece-«1 vraient une punition corporelle, par leur dé-« sobéissance ; que le serment fut dressé parle « président, le vice-président, et le prisonnier, « comme secrétaire, et était d'être fidèle à la « nation, au roi, à la loi et à l'assemblée paît triotique, et que ceux qui abandonneraient « ladite assemblée patriotique, seraient regardés « comme des poltrons. Le déposant fut rencontré « par M. La Coste, officier du régiment de la « Guadeloupe, qui lui demanda s'il était encore f résolu de se tenir au serment qu'il avait pris h dans cette assemblée de poltrons, auquel il « répondit : certainement ; maiB s'il y avait des « poltrons dans l'assemblée, ils doivent être « pnnis, et que lui et les autres membres hon-« nêtçs doivent être distingués. Le déposant fut « interrogé s'il n'avait pas dit à M. La Goste « qu'il serait fâcheux qu on le tuât ; à quoi il a « répondu que c'était la première fois qu'il en- tendait un pareil discours. »
Sur le dernier chcf de cette déposition, M. de Chance!, procureur général, requit que ty. La Goste fût mandé à la barre; mais le sieur ta Çoste. qui se trouvait présent, ayant fait signe qu'il ne se souciait pas d'être entendu, on oe fit plus mentipn de lui.
^Joici le fait: Le sieur I^a Goste ayait dit, dans
toute la ville du Port-Louis, que ce témoin l'ayant rencontré, le regarda avec compassion, et lui dit que ce serait bien dommage qu'un si bel homme fût tué. Ce témoin, interrogé sur ce fait, dit qu'il n'a jamais entendu un pareil propos. L'homme du roi veut connaître les motifs qui ont animé les auteurs d'un complot aussi affreux qu'abominable; mais les juges refusent tacitement d'avoir égard à la réquisition du ministère public.
Un seul mot suffit pour conduire à la conviction du crime, et une accusation de cette importance est ensevelie sous le silence. Quelles peines des juges aussi prévaricateurs ne doivent-ils pas subir ? Oseront-ils lever les yeux devant ceux qu'ils appellent leurs concitoyens, après avoir outragé l'innocence et la cause publique, qu'ils étaient obligés de venger? Et ces pervers osent encore s'assembler comme représentants de la colonie de Tabago?
Augustes députés de l'Empire français, n'écoutez pas ces imposteurs 5 élus au mois de janvier 1788, ils ont été anéantis le 28 octobre 1789, par les suffrages de toute la colonie de Tabago, d'après la sanction des représentants du pouvoir exécutif. Mais de bons citoyens ne savent employer la force que lorsqu'il est question de venger la cause générale de l'Empire; ils ont mieux aimé voir usurper leurs droits, que d'occasionner des troublés. Â cette raison se joint celle que plusieurs de ceux qui composent le comité constitutionnel de l'assemblée générale de Tabago de 1789 avaient été élus, au mois de janvier 1788, membres du comité de l'assemblée ministérielle de celte colonie; leur intérêt était de maintenir cette assemblée sous l'ancien régime, qui les dispensait de rendre des comptes à leurs concitoyens; compte qu'ils étaient obligés de fournir à certaines époques par le mode adopté à l'assemblée générale des habitants, en 1789, qui seule pouvait sanctionner les opérations de son comité ou les désapprouver.
J'observe encore que,dans la déposition reçue par le sieur Wilson que je viens de rapporter, a il est dit que le sieur Perrein a déclaré que « les anciennes lois devaient être observées jus-« qu'après l'assemblée de toute l'Ile, et que ceux « qui y manqueraient, subiraient une punition « corporelle ». Mais le sieur Wilson ne parle pas de l'établissement des quatre commissaires pour la police intérieure de l'assemblée; néanmoins les dépositions reçues par M. Roume de Saint-Laurent, président, et certifiées par M. de Ghan-cel,procureur générai, les sieurs Irvine, Pitrre-Autoine Dufaur et Edmond SaintrLéger, juges de paix en cette cour, portent que ce témoin dit
i que Ton suivrait les lois établies dans l'Ile. » jusqu'à ce que ia France en donnât d'autres, i et que ceux qui y manqueraient seraient pu-« nis par l'assemblée générale de la colonie, et « que l'on ne manquerait ni aux chefs, ni a pcr-« sonne. Que la légalité de cette assemblée « fut prononcée par une majorité de 43 voix « contre 27 ; que M. de Ghanoel le cadet pro-« posa d'établir quatre commissaires, pôur « empêcher que là liberté ne se changeât en « licence, et, loin d'y avoir eu de mauvais « projets, le président avait recommandé de re-« jeter toutes les motions contraires au bien « public ».
Pourquoi donc M. Wilson a-t-ll affaibli cette déposition et commis celle réticence? Intéressés à me trouver des crimes, il fallait bien trangreB-ser les dépositions pour me rendre coupable.
Cela seul doit faire connaître l'esprit de parti qui dominait mes juges.
Le nommé Garrot, septième témoin : « Bosque « lui a dit qu'il n'y aurait point de cantine, et que les soldats pouvaient aller boire où ils « voudraient. Bosque lui a dit avoir fait signer « d'autres soldats au même effet. Bosque lui a « dit qu'il se préparait à donner un dîner à la « compagnie de M. Gordelier, pour avoir mis « un pavillon à sa porte. Bosque n'a proposé ni « à d'autres, à sa connaissance, de venir à l'as- « semblée. Le déposant ayant été une fois à « l'assemblée, on ne lui proposa point de signer « le sprment. »
Quel est donc mon crime, suivant ce témoin ? « D avoir dit que les soldats n'auraient plus «de cantine, et pourraient boire où ils vou- « draient. » Le soldat, qui n'a que 5 sols par jour, doit-il nourrir son officier qui en a 30 ? C'est cependant ce que présente la cantine a Tabago: depuis très longtemps, les gouverneurs des colonies ont été chargés de connaître les causes d'une mortalité désastreuse aux îles du vent sur les militaires.
Les gouverneurs ont porté partout leur vigi-lance, et partout leurs remèdes n'ont été qu'un palliatif infructueux, parce que leurs recherches ne se sontjamais arrêtées sur un établissement que les officiers étaient intéressés à conserver.
Le cantinier à Tabago, pour avoir le droit exclusif de vendre aux soldats, est obligé de nourrir les officiers à un prix infiniment au-des-sous de son déboursé. Cet homme, pour réparer la perte qu'il fait sur la nourriture des officiers, au lieu de vendre du bon vin ou de la bonne eau-de-vie, y substitue de l'eau et autres drogues qui tuent les soldats ; ceux-ci vont à l'hôpital, ils y meurent. Mais l'officier est nourri, qu'importe?
Hé bien 1 supposons que ce témoin a dit vrai, qu'en résulte-t-il? Que je présumais cju'uo établissement aussi abominable serait aboli.
Je suis forcé, pour ne laisser aucune ambiguïté sur cette déposition, de rapporter une conversation que j eus avec des soldats de la compagnie de Cordèlier, au sujet du dîner. Ces soldats avaient arboré un pavillon national à ma porte, comme étant celui qui avait donné le premier, à Tabago, des preuves de patriotisme.
« Je suis infiniment flatté, Messieurs, leur dis- « je, des marques d'attachement que vous me « donnez, et je le serai encore plus, si je vois « tous les braves militaires et mes concitoyens « ne faire qu'un même corps de frères, le jour « de la fête projetée par MM. les administrateurs. « J'oserais même vous prier, avant la réjouis- « sance générale, de me permettre de donner « à dîner à votre compagnie. » Ces soldat» s'écrièrent que ce dîner paraîtrait n'être qu'une récompense servile; que s'ils avaient arboré au devant de ma maison le pavillon national, ce n'était qu'une juste rétribution qui m'était acquise depuis bien longtemps, par ma persévérance à faire le bien, et à me sacrifier pour mes concitoyens.
Voilà donc mes crimes; c'est celui d'avoir dit vaguement à, un soldat qu'il fallait espérer qu'il n'y aurait plus de cantine, et de vouloir régaler de bons mditaires qui m'avaient donné des marques de leur attachement.
Potrinot, huitième témoin, « il a mis sa marque « ordinaire au bas d'un papier, où on lui disait c qu'il s'agissait d'être fidèle à la nation, au ¥ roi et à la lof i le lendemain, voyant que
« c'était une bévue, il en rendit compte à son « capitaine. On ne lui a point parlé d'être fidèle « à l'assemblée ».
Oui, j'ai recule serment civique de plusieurs militaires, devant l'assemblée patriotique de la ville du Port-Louis de Tabago, de son vœu et en présence de ses président et vice-président; si c'est un crime, tous les Français de Tabago sont coupables, puisque c'est leur volonté que j'ai exécutée en leur présence; si c'est un crime, toutes les provinces de l'Empire français l'ont commis, en se fédérant avec les troupes de ligne; 1a capitale, l'Assemblée nationale même, qui a décrété la fédération, n'eu sont pas. exemptes i L'on dira que cette fédération de Tabago précédait de plusieurs mois le décret de l'Assemblée nationale. Hé bienl dignes représentants de notre nation, votre décret sur les Droits de l'homme, le3 circonstances locales, la position de la colonie, les faux principes du commandant, des officiers de la garnison et des membres de l'ancien comité ministériel, tous ennemis de la Constitution; le peu de Français existants à Tabago, l'inaction du ministre de la marine à envoyer vos décrets ; tout cela, dis-je, ne deman-dait-il pas une union des plus intimes entre tous ceux qui étaient Français, ou qui en avaient le cœur, afin que vos décrets eussent leur entière exécution?Malheureusement l'intrigue et l'esprit despotique ont renversé les projets les plus prudents, les mieux conçus : j'ai été la première victime du ressentiment des ennemis du bien public. Que de maux ces pervers ne se sont-ils pas préparés! Ceux qui pouvaient, par leur sagesse, ramener le calme dans la colonie, au lieu de recevoir des éloges justement mérités, ont été forcés d'abandonner leurs foyers, après avoir souffert les persécutions les plus cruelles. Que s'en est-il suivi ? Après leur départ de la colonie, insubordination des troupes, incendies, châtiments de tous genres ; voilà la première punition qu'ils ont subie, et qui a vengé les patriotes innocents qu'ils ont immolés à leurs fureurs.
Depuis le neuvième témoin jusqu'au quatorzième inclusivement, pas un qui dépose autre chose, sinon « qu'ils ont prêté le serment à « la nation, aù roi et à la loi, à l'assemblée patriotique, entre mes mains, et en présence « des président, vice-président et autres mem-« bres ».
Morin, le onzième témoin, qui avait déposé devant les officiers et les juges de paix : « Que c'était moi, Pacaud et Tourtier qui l'avaient engagé à venir à l'assemblée », déclare devant la cour criminelle, lorsqu'il me fut confronté : « Qu'il n'avait jamais eu de communication avec moi, avant la prestation du serment ».
Beauvais, le douzième témoin, dit, dans sa déposition devant les officiers et juges de paix : « Qu'il avait été sollicité par moi à prêter le « serment, et n'en parle pas, lorsqu'il m'e3t a confronté ».
Deveaux, le treizième témoin, « en avait dit autant devant les officiers et juges de paix, et n'en dit pas un mot à la confrontation ».
D'après ces contradictions, serait-il possible de ne pas s'apercevoir que tous ces témoins ont été gagnés ou intimidés par leurs officiers, et qu'ils n'ont pas eu assez de courage pour persister dans de fausses dépositions qu'on leur avait arrachées?
M. le baron de Widerspach, un de mes accusateurs et le quinzième témoin entendu contre moi, « dépose que le soldat Garrot lâchai des
propos chez M. Thibeaux, entr'autres que les soldats de la compagnie de M. Gordelier se proposaient de demander leur liberté le jour de ma fête ».
Sur cette déposition, le nommé Garrot, qui avait déjà été entendu , reparaît et dénose, « que ce que vient de dire M. te baron Widers- « pach est vrai, mais que ce n'est point à « mon instigation, que c'était d'après ce qu'ils « avaient ouï dire de ce qui s'était passé en « France ».
Damelet, dix-septième témoin , dépose que je lui ai dit qu'ils seraient libres d aller où ils voudraient, sans lui parler de boire; « qu'il « signa un papier entre mes mains, où il pro- « mettait d'être fidèle à la nation, au roi et « à la loi, de ne point abandonner leurs dra-er">t> peaux ni le roi, et qu'il fut invité par des « bourgeois ».
Le commencement de cette déposition est faux, et offre une contradiction avec la suite. Gomment aurais-je pu dire vaguement à ce soldat : vous pouvez aller où vous voudrez, et ensuite lui faire promettre , sous serment, de ne pas abandonner ses drapeaux, ni le roi, et d'être fidèle à la nation, au roi et à la loi?
Disons donc que le commencement de cette déposition avait été dicté par mes ennemis ; mais que ce soldat me voyant à côté de lui, et reteuu par l'aspect d'un auditoire nombreux, n'a pu faire autrement que de finir par dire la vérité, en laissant des doutes sur le principe de cette déposition qui ne renfermait aucun sens.
Ghapp, tailleur au Port-Louis, le dix-huitième témoin, dit « que je lui proposais de faire une « souscription, à l'effet de donner des rubans « pour faire des cocardes, et une fête à la « troupe ; que mon intention était de régaler la « compagnie de Cordelier la première, et qu'il y « aurait bonne intelligence entre les bourgeois « et le militaire; que je chargeais ledit témoin « de faire un drapeau national ; que le serment m de l'assemblée patriotique était de contenir le
bon ordre dans l'assemblée, le bien public, et « que celui qui y manquerait serait indigne « d'être Français ; que la cocarde serait pré- sentée à Messieurs les chefs; qu'on devait in- « viter les habitants, mais que le commandant « défendit d'imprimer les invitations; quel'as- « semblée patriotique devait adresser des re-
merciements à l'Assemblée nationale, et une « bourse pour les veuves et les orphelins ; que « les habitants devaient être invités au dîner; « qu'il y avait eu des imprimés envoyés à ce « sujet, et que l'on se proposait d'offrir des « cocardes aux chefs et aux officiers ».
C'est donc là mes crimes et ceux des patriotes de Tabago. Mais continuons la déposition de ce témoin.
M. Pétrie, l'un de mes persécuteurs, lui demanda s'il avait été question de nommer des commissaires dans l'assemblée : Oui, répond-il, quatre pour la police de rassemblée.
La cour entend ce témoin, présenté par le procureur général, sans aucune objection. Le sieur Pétrie l'interroge ; et après sa déposition, croiriez-vous, Messieurs, que le sieur Fagan, un de ces juges abominables, se permet de le récuser,. sans donner aucunes raisons valables, et de prier les petits jureurs de n'avoir aucun égard à cette déposition? Le sieur Wilson a si bien reconnu l'insuffisance de celte récusation que, dans les dépositions qu'il reçut en qualité de juge
à cette cour, il n'en fit aucune mention. Néanmoins le petit juré suivit les ordres de la cour.
Ici, Monsieur le commandant, qui avait paru se déclarer mon protecteur et celui des patriotes, envoie un billet au sieur Fagan, dans lequel il me dénonce, comme ayant mis à prix la tête de M. de Ghancel. Mais, aucun témoin n'ayant déposé de ce fait, le billet est enseveli sous le silence. Quoi! une dénonciation aussi grave n'est pas approfondie 1 Vous, mes persécuteurs, qui vouliez me trouver de3 crimes, vous n'osez les rechercher, lorsque des indices se présentent 1 Mais M. de Jobal eût été la victime de cette fausseté ; il aurait été reconnu, et l'on était intéressé à cacher de pareils méfaits. Monsieur le procureur général de Tabago a rendu compte de cette accusation au ministre.
Les dix-neuf et vingtième témoins « déposent
avoir prêté serment à l'assemblée patriotique, « et entre mes mains, à la nation, au roi et a la « loi ».
Beaulieu, soldat au même bataillon, le vingt et unième témoin, dit qu'étant en présence de M. Smith,Bosque lui dit : vous voyez ce que nous venons de faire pour vous, vous ferez la même chose pour nous.
Le sieur Smith, vingt-deuxième témoin, un de mes accusateurs, prévôt-maréchal, dépose que je dis à Beaulieu : vous savez ce que nous venons de faire pour vous, j'espère que, « dans l'occa-
sion, vous ne nous manquerez pas ».
Quelle différence de déposition de celui à qui j'ai parlé à celui qui était présent à l'assertion ! L'un dit la vérité, l'autre l'altère. Mais que présente la déposition de Beaulieu ? Que les Français, ayant considéré les soldats comme des frères, espéraient que cette fraternité serait réciproque (1).
Tourtier, le septième témoin entendu contre MM. Grelier et Guys, déposa le 14 novembre, à la cour criminelle, « qu'il avait dîné chez moi; que « je lui avais fait lecture d'un écrit sur les Garaï- « bes ; que, quelques jours après, je lui lus la « gazette de Sainte-Lucie, en lui faisant valoir « la générosité des habitants de cette île, et lui « proposai de signer une souscription en faveur « des veuves et des orphelins de ceux qui « avaient été tués en France; qu'il copia deux « lettres d'invitation pour engager le public à « s'assembler ; mais que, ne les ayant pas trou-
vées bien écrites, je les déchirai*; qu'il fut une « fois à l'assemblée patriotique; qu'il y vit une « grande cohue de bourgeois et de militaires ; « que mon commis lui présenta un papier pour « signer, et qu'il s'y refusa ; qu'étant un soir « chez moi., je lui proposai de faire prendre la « cocarde à la compagnie de Cordelier, et qu'ex- « cepté la proposition de prendre la cocarde, je « ne lui avais jamais rien dit qui fût mal (2) ».
Le sieur Wyatt, premier témoin entendu à ma réquisition, dépose beaucoup de faits avantageux à tous les bous patriotes de Tabago, et en outre dit que j'ai fait plusieurs motions, tendant au maintien de la paix et du bon ordre, et qu'il n'a jamais rien vu qui ne fût décent et honnête dans ma conduite.
Le sieur Lafond, deuxième témoin, fait la même déposition.
Le sieur Blanchard, troisième témoin, après différentes choses honorables pour tous ceux qui composaient rassemblée patriotique, dit qu'il n'a jamais entendu dire que leur intention fût de s'arroger quelque autorité législative, ni de changer les lois existant dans la colonie.
Le sieur Sauveur, quatrième témoin, dépose des mêmes faits (1).
Avant de résumer ces dépositions, il n'est pas inutile d'observer qu'après que ces quatre témoins furent ouïs, j'offris d'en faire entemire encore plus de cinquante ; mais l'on me répondit que c'était inutile : je demandai alors avec véhémence les minutes de notre assemblée ; les juges dirent ouvertement qu'ils n'en avaient que faire ; et je n'ai jamais su depuis ce qu'elles étaient devenues.
, J'observe aussi que les petits jureurs s'avancèrent pour faire des représentations ; mais M. Pétrie, prenant un air sévère, leur dit : Jurés, votre charge est de rapporter seulement si le prisonnier est coupable des faits dont il est accusé, ou non.
C'est à la cour à prononcer sur le reste. Pourquoi M. Pétrie donna-t-il cette charge aux jurés? Parce que les accusations n'étant pas fondées, les petits jureurs auraient rapporté qu'ils ne pouvaient trouver des crimes dans des accusations aussi spécieuses, et dont celui qui m'était reproché faisait ma plus grande gloire. Aussi le petit juré, obligé de n'entrer dans aucune explication, fut obligé de rapporter que j'étais coupable des faits dont on m'accusait : et quels étaient ces faits ? Résumons les dépositions en tout ce qui n'est point vague, qui se trouve déterminé, et qui par conséquent est prouvé par ces témoins.
Il sera constaté : « 1° Que j'ai donné des « rubans pour faire des cocardes nationales à « des soldats; encore ce témoin, qui est l'unique « (le sieur Thèbe), ne l'est point de visu;
2° Que j'ai reçu le serment de plusieurs sol- « dats à l'assemÉlée patriotique de la ville du « Port-Louis de Tabago en présence des prési- « dent, vice-président et plusieurs autrês mem- « bres, d'après le vœu de mes concitoyens ; que « ce serment portait d'être fidèle à la nation, au « roi et à la loi ; et Damelet, dix-septième
« témoin, dit que je lui ai recommandé de ne « pas abandonner ses drapeaux ni le roi ;
« 3° Que j'ai voulu donner un dîner à la com- « pagnie de Cordelier, pour avoir mis le pavillon « national à ma porte ;
« 4° Que j'avais ouvert une souscription à « l'effet de faire faire des cocardes et un dra- « peau national, d'en présenter à tous les chefs « des corps, de donner une fête dans la colonie, « de faire une bourse pour être répartie entre « les veuves et les orphelins de la capitale, dont « les pères et les maris avaient perdu la vie à la « journée mémorable du 14 juillet.
« 5° D'avoir voulu maintenir le bon ordre et la « paix ;
6° D'inviter tous les habitants à concourir à cette œuvre méritoire :
Voilà les crimes prouvés par ces dépositions.
Examinons maintenant quelle a été la récompense d'une conduite aussi louable. C'est ici l'endroit où le cœur du lecteur va se serrer, où son âme va frémir d'indignation contre mes oppresseurs. Armez-vous de courage, je vous en supplie; donnez-moi encore quelques-uns de vos instants ; mon honneur l'exige, et j'ose dire celui de mes concitoyens, de qui j'ai suivi les principes.
Le 16 novembre 1789, cette cour osa prononcer un jugement « par lequel elle me con- « damne à six mois d'emprisonnement, et à être « exposé, à la fin des six mois, depuis midi « jusqu'à une heure, au carcan, à moins, dit le « jugement, qu'après avoir gardé la prison pen- « dant six semaines, je fasse ma soumission ( sous serment, devant deux juges de paix, que « je consente à partir de l'île pour n'y revenir « jamais (1)
Français I eussiez-vous jamais pu présumer qu'un pareil traitement dût être la récompense de mon patriotisme? C'est cependant ce qui se trouve consigné dans lé§ minutes d'une cour souveraine. C'est le comble de l'aveuglement, de l'ineptie, d'une frénésie inouïe, mais ce crime, dont l'histoire de tous les peuples ne peut fournir d'exemple, existe dans les registres à Tabago.
Jamais l'Anglais n'eût commis une pareille atrocité, il est trop ami de la liberté ; il était réservé à quelques Ecossais, et à Dieu ne plaise que je comprenne dans mes accusations tou3 ceux qui existent à Tabago ; je suis persuadé, au contraire, qu'ils désavoueraient autbenlique-ment la conduite de ces juges iniques, s'ils étaient appelés en témoignage. Mais qu'ai-je besoin de témoins ? Toutes les preuves, au soutien de mes doléances, ne seront-elles pas remises à l'Assemblée nationale ou rapportées à la suite de ce mémoire, si elle juge devoir en faire en endre? Plusieurs citoyens de Tabago sont actuellement à Paris, et tous ces témoins, dont les noms se trouveront à la fin du présent mémoire, étaient à Tabago lors de cette effervescence inconstitutionnelle.
Il me reste néanmoins à expliquer pourquoi l'alternative d'opter dans ce jugement me fut laissée. Il s'agissait de me bannir de la colonie de Tabago, ou de garder la prison pendant six mois et de rester au carcan pendant une heure. De ces deux maux, disaient-ils, sans doute, le moindre est celui qu'acceptera la victime que nous voulons immoler. Son serment le
liera» ses biens seront perdus, et jamais il ne nous fera rendre aucun compte de nos prévarications. Hé! qui nous jugera? Nul tribunal ne peut ie faire» à l'exception de l'Assemblée|natio-nale, qui, étant au-dessus de la Chambre des pairs en Angleterre, est la seule qui puisse la représenter. Comment notre victime pourra-t-elle s'y faire entendre? Nous lui ôterons tous les moyens pour y parvenir; nous le reléguerons, s'il ie faut, dans des contrées isolées, où le seul parti qui lui restera sera celui de gémir en silence, et d'adresser ses plaintes aux forêts et aux échos. Oui, monstres, voilà le projet que vous aviez conçu. Mais le maître de l'univers, qui dispose de tout, les sauvages, parmi lesquels m'a fait jeter le commandant de Tabago, votre complice, ont été indignés de vos perfidies ; ils m'ont porté les secours que des hommes doivent à des hommes, et se sont exposés les premiers à périr pour me conduire parmi ceux qui pouvaient me fournir les moyens de faire parvenir mes doléances à la capitale de l'Empire français.
Depuis 1e 3 novembre 1789, jour de mon emprisonnement, mes nègres avaient été mis à la geôle; ma maison, mon mobilier étaient restés à l'abandon, au pillage 1 et ce ne fut que le 16 novembre; jour de mon jugement, que le sieur Fadeuilhe se présente, comme soi-disant muni des pouvoirs de mes créanciers, sans aucunes formes judiciaires, se fait nommer séquestre de mes biens par ia cour de la chancellerie (i), et conjointement avec le sieur Gauthier, s'empare de mon immeuble et du mobilier qui m appartient; il n'e-t fait légalement aucun inventaire; l'on ne trouve que ce que l'on veut bien trouver ; l'on vend à des prix infiniment au-dessous du quart de leur valeur mes effets, disent-ils, ont été expoliés ; ma bibliothèque, de cinq cents volumes» est un Objet trop peu considérable pour en parler, ainsi que les matériaux propres à construire une nouvelle maison, consistant en planches, madrier?, essentes. ferrures, etc., qui se trouvaient dans la cour, à côté de mon jardin. Mes cinq nègres, dont le plus vieux avait 21 aos et le plus jeune 11, ne sont tous vendus que 2,100 livres tournois, tandis que leur moindre valeur était celle de 1,600 livres chacun»
Le sieur Gauthier vient me trouver en prison, m'oblige à lui donner mon consentement À la vente de mes biens ; je le lui donne, et muni de cette autorisation, que la force avait extorquée, il se croit fondé à s'emparer de ce qui est échappé à Ja fureur de mes ennemis»
Le 28 décembre 1789, sur une requête présentée à deux juges de paix, je fus conduit de* vant eux* et là on me fait faire serment que je partirai de l'Ile de Tabago avant le 7 janvier 1790, et que je n'y reviendrai jamais. Après ce serment, et suivant le jugement rendu contre moi, le 16 noverobre, je ne me trouvais plus sous la verge de la loi; je devai3 done 6tre mis en liberie. Non, I'on me remet encore en pri- son. Le lendemain 29, je suis conduit devant les soi-disant sequestres de mes biens, qui me monirent arbitrairement des comptes, ^valuent ma maison au huitieme de sa valeur; je veux faire quelques representations; I'on me repond : Conseniez a tout ou I'on vous empechera de partir. Le sieur Wigthmao, nouveau sujet frangais, a
l'indignité d'exiger de moi, dans ce moment, une quittance finale. J'observe que j'étais son créancier d'environ 6,000 livres. (Jrai rendu compte et fourni la preuve de ce fait dans mon premier mémoire adressé à l'Assemblée natio-tionale.) Donnez-la moi, ou vous ne,partirez pas : telle est sa réponse. Hé! pourquoi, me dira-t-on, donûer cette quittance, et consentir aux demandes des séquestres? La fureur de mes ennemis n'était pas assouvie par deux mois de prison et un jugement infâmant rendu contre moi; ils voulaient me faire rester en prison jusqu'au 8 de janvier, afin de me poursuivre ensuite comme faussaire. Dignes représentants de l'Empire français, dans quelles histoires, dans quelles annales trouvera-t-on jamais de pareilles iniquités ? Tabago était fait pour renfermer dans son sein des monstres capables de les commettre.
Je suis conduit ensuite devant M. le commandant qui me dit : Monsieur, vous ne pouvez partir pour une colonie française : choisissez la Nouvelle-Angleterre ou la Barbade. Je lui représente que j'ai été volé, pillé ; que je suis dépourvu de tout ; qu'expatrié dans une contrée étrangère, sans amis, sans connaissances, je ne pourrais que mourir d'inanition et de misère. Le voyant inexorable, je lui demande de me faire partir au moins pour la Trinité espagnole ; il me l'accorde. 0 ciel! croirait-on que cette grâce apparente lui faciliterait le moyen d'exécuter une nouvelle barbarie? Conduit de nouveau en prison, l'on ne m'en fait sortir que le lendemain 30 décembre 1789, où une garde m'escorte jusqu'à bord d'un bâtiment français, commandé par le sieur Marchand, qui, ayant mis à ia voile immédiatement après mon arrivée à son bord, va me déposer, avec un meurtrier anglais qu'on m'avait donné pour compagnon de voyage, à la pointe de la galère de la Trinité espagnole, parmi les sauvages. Là, dans les forêts, sans connaissances, au milieu d'êtres inconnus, parlant un langage que j'ignorais, dans un lieu dont aucun bâtiment n'approche, je me trouve exilé sans espoir de parvenir jamais à ceux qui auraient pu m'entendre ; mes malheurs, ma position, en un mot, mes besoins, me font implorer ies sauvages par des signes. Je trouve des hommes compatissants; ils me soignent, me caressent; quelques-uns, parlant un mauvais français, s'accostent de moi. Le récit abrégé de mes aventures les attendrit, et au tout de nuit jours de résidence parmi eux, ils s'exposent à traverser quarante lieues de mer affreuse* dans une petite pirogue non pontée, où la mort se présente à chaque instant; et après quarante-huit heures d'un danger inouï, ils ont le bonheur de me mettre au port d'Ëspagne de la Trinité, où M. Ghacon, le gouverneur, indigné d'un pareil traitement, t&cne, par srs bontés, et les fôtes auxquelles il m'ad-uet, de me faire oublier, si cela eut ele possible, les atrocites que mes en- nemis ai'avait nt fait subir.
Les administraleurs de Sainte-Lucie. lorsque j'y passai, en ont fait autant, ainsi que lesFraa- gais de cette colonie, et celle de la Martinique.
C'est & vous, Messieurs, qu'il est reserve de venger l'bonneur d'un bon Francais. Oui, Mes- sieuis, c'est dans voire sein que j espfere irouver ce qu'attendent tous les colons des lies du Vent, lous les Franjais qui connais enl dans ce mo- ment mes griefs et les persecutions que j'ai essuyees; c'est aussicequi me faitconclure avec assurance :
1° A l'intervention de M. de Chancel, procureur général de Tabago;
2° A ce que le jugement de la cour d'Oïer et Terminer, en date du 16 novembre 1789, qui condamne injustement le sieur Bosque d'être « emprisonné pendant six mois, d'être mis et de 4 rester depuis midi jusqu'à une heure au car- « can, le seizième jour du mois de mai 1790, à « moins qu'à l'expiration des six semaines à « dater dudit jour 16 novembre 1789, il ne sigoi- « fie à deux juges quelconques de ladite cour, « qu'il est consentant de partir de ladite colonie « et n'y jamais revenir, et ce sous serment; au- « quel cas, lesdits deux juges feront enregistrer « ledit serment et ladite requête sur les registres « de cette cour, et demanderont à M. le comman- « dant en chef la permission pour que ledit Bos- « que parte, sans préjudicier à ses créanciers » ; que ledit jugement, dis-je; soit déclaré injuste et attentatoire à la Constitution française ; qu'il sera lacéré et biffé par l'exécuteur des hautes oeuvres de Tabago, ou par le prévôt-maréchal de ladite lie, à l'issue d'une messe paroissiale célébrée Ua jour de dimanche ou de fête, ën la ville du Port-Louis de Tabago; mention préalablement faite, en marge dudit jugement, sur les registres de ladite çour d'Oïer et Terminer, du décret à intervenir de l'Assemblée nationale ;
3° Que les actes et serment que le sieur Bosque a signés ou prêtés depuis le 3 novembre 1789, jusqu'au 30 décembre même année* seront déclarés nuls et non avenus, comme actes injustes et extorqués pendant l'emprisonnement et les persécutions éprouvés par le sieur Bosque.
4° A ce que la maison et terrain, situés en la ville du Port-Louis de Tabago, ayant face aux rues des Prêtres et Jobal de ladite ville, soient remis avec leurs dépendances, au sieur Bosque, à qui ils appartiennent. Et en outre, attendu que le mobilier du sieur Bosque, consistant en nègres, bois à bâtir, essenles, meubles» livres, linge, etc., a été expolié ; que ledit sieur Busqué a été détenu deux mois en prison, ensuite exilé à la pointe de la galèrë de la Trinité espagnole, parmi la peuplade des sauvages de Cumana, et obligé de se rendre à Paris, ou il est arrivé après six mois de route, ainsi que pour son séjour, retour, déplacement et autres indemnités, couiamn r les sieurs Jobal, Gilbert Pétrie, Thomas Wilaon, Nathaniel Slewart, William Smith, Thomas Currie, Robert Paterson et Dangleberme, en leurs qualités respectives, et- solidairement l'un pour l'autre, un d'eux seul pour le tout, à payer audit sieur Bosque, ainsi que pour tous dépens, dommages et intérêts, et pour lui tenir lieu de répa-tions civiles, la somme de deux cent mille livres tournois, sauf à l'Assemblée nationale à prononcer, pour la vindicte des Français, telle peine qu'elle avisera contre les accusés.
C. Bosque.
Paris, le
Noms des personnes qui se trouvaient à Tabago lors de la révolution, et qui sont actuellement à Paris :
M. Roume de Saint-Laurënt, ordonnateur de Tabago, demeurant rue de Richelieu, hôtel Calais.
M. de Chancel, procureur général de Tabago,' demeurant rue Hautefeuille, hôtel d'Angleterre.
M. Grelier, président de l'assemblée patriotique de Tabago, rue des Deux-Ëcus, hôtel Cum-berland.
M. Guts, vice-président de ladite assemblée,
rue Bourg-l'Abbé, passage de l'Ancre-royale.chez M. Marion, au premier.
M. de Saint-Léger, commandant la garde nationale de Tabago, rue Petit-Bourbon, hôtel de Châtillon.
M. de Chancel le jeune, commissaire de la commission établie pour la liquidation des dettes des habitants de Tabago, rue de Richelieu, hôtel de la Chine.
M. le Borgne, secrétaire du gouvernement de Tabago, idém,
M. DulaG, sergent-major de !â garde nationale de Tabago, rue Favart, n® 4, près les Italiens.
M. Tombarelly, capitaine de navire marchand, rtle du Mail, hôtél.
M. Michon, fourrier au régiment de la Guadeloupe, alors sergent au second bataillon dudit régiment, rue du Chantre.
M. ToURTtËR, sergent-major, alors ad second bataillon dudit régiment, faubourg du Temple, chez M. Azor, épicier.
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
Liasse N° Ièr. Tabago.
Port-Louis, le
Messieurs, dans un temps où la nation française se régénère et prend ua nouvel être* où les colonies, a l'exémplë de là métropole, prennent une Constitution qui les rapproche de leur mère patrie, tabago exclusivement sera-t-il privé de ce bonheur?
Toûs les bons citoyens français de la ville de Port-Louis, désirant se modeler sur la capitale de l'Empire et y adresser leur témoignage d'une vive reCûhdaiSs&hce aux représentants de la nation* m'ont chargé, Messieurs, de vous inviter à vous réunir à eux, demain 23 de Ce mois, ÏÔ heures du matin, en la maison de feu M. Langoueran, pour y établir provisoirement. sur une base solide,' mais sage et prudente, les demandes sur lesquelles doit maintenant reposer le bonheur général des colons et des Antilles.
Je ne doute pas, Messieurs, que votre travail ne soit Unanimement adressé a l'Assemblée nationale, pour la mettre à même de connaître les besoins, les ressources et la population de la colonie ; cet espoir, soutenu par le patriotisme qui règne dans le cœur de touâ ceux qui sont Français,ou qui le sont devenus par leur sermentj me fera toujours dire, avec respect, que j'ai l'honneur d'être. Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur,
G. Bosque.
Paraphé ne varietUr, le 23 dCtobre de relevée 1789, l'assemblée tenante.
Grelier, président,
A Messieurs les anciens et nouveaux sujets français de cette colonie.
Warrant pour empêcher la tenuê de l'Assemblée patriotique.
Les règlements prescrivant qu'il ne sera tenu aucune assemblée par des particuliers, sans qu'ils y soient légalement autorisés, et nous, conseiller, juge de paix du quorum de cette île, étant instruit que M. Bosque eu a convoqué une pour demain 23 du courant, dans la maison du sieur Langoueran, en cette ville du Port-Louis, nous lui défendons, de la part du roi, par le présent warrant, de tenir ladite assemblée, et de sortir de sa maison, pendant tout ledit jour de demain.
Nous ne doutons pas de la pureté des inten -tions de M. Bosque, ni de ceux qui ont formé avec lui le projet de cette assemblée; nous sommes assurés qu'ils n'ont d'autres vues que de faire éclater les sentiments de leur allégresse et de leur reconnaissance envers un souverain et une métropole qui s'oc upent du bonheur commun et des moyens d'assurer la liberté sous la sauvegarde des lois. Mais ces motifs pourraient être méconnus et mal interprétés ; ils ne légitimeraient point une assemblée contre laquelle s'élèvent les règlements, sans l'observation desquels la liberté dégénérerait en licence. Tei est le moiif, qui nous fait décerner le présent warrant, de l'exécution duquel nous chargeons te sieur Bigé, huissier, qui, après l'avoir signifié par copie en forme à M. Bosque, en donnera connaissance à MM. les administrateurs, et nous certifiera, dans trente-six heures, de l'exécution de notre ordre.
Au Port-Louis de Tabago, le
Signé : De Chancel, procureur général et juge de paix.
A la réquisition du sieur Bigé, le brigadier de maréchaussée donnera main forte, pour que le Warrant ci-dessus soit exécuté.
Au Port-Louis, le
Signé : De chancel.
J'ai reçu de M. le procureur général un warrant conforme à celui ci-dessus, et des autres parts, au sieur Bosque, pour lui être signifié par moi, huissier soussigné.
Cejourd'hui,
Signé : Bigé.
Pour copie collationnée :
Signé : Wightman, greffier.
Nous, commissaire général ordonnateur de l'île de Tabago et dépendances, certifions à tous ceux qu'il appartiendra, que le sieur Charles "Wightman, qui a signé la présente copie, est réellement greffier, et que foi doit être ajoutée à sa signature, tant en jugement que hors.
Donné sous le sceau de nos armes et le contreseing de notre secrétaire, à Tabago, le 23 janvier 1790.
Signé : Roume de Saint-Laurent.
Par M. l'ordonnateur :
Signé : WYATT.
A Monsieur Bosque, en sa maison à Tabago..
Je me suis entendu, Monsieur, avec M. de
Saint-Laurent et M. de Chancel, pour vous relever des arrêts ; en conséquence, ces messieurs et moi nous vous mettons en liberté, et vous engageons à la tranquillité que tous les citoyens honnêtes doivent observer dans la colonie. Je suis assuré que l'intérêt que j'ai pris à votre élargissement, fixé pour aujourd'hui, vous prouvera combien j'approuve la liberté qui est si désirable à la nation.
Restez donc tranquille^ je vous y engage par l'intérêt que je prends a toute la colonie, et à vous qui vous égarez pour ce moment.
Ce 23 octobre 1789.
Signé : Le chevalier de Jobal.
Port-Louis, le
Messieurs, plusieurs personnes, au nombre de quarante-cinq, se trouvaient déjà réunies en la maison de M. Langoueran ; elles espéraient que vous eussiez voulu vous réunir à elles sans aucune difficulté; votre retard à nous procurer cette satisfaction, que nous avons tous si à cœur, nous empêche dans l'exécution d'un si beau projet, et que vous approuviez. Nous vous adressons le présent, pour vous faire nos instances et vous engager à ne pas nous abandonner dans un instant aussi précieux; nous sommes députés choisis par le nombre des citoyens qui sont déjà rassemblés, et nous nous proposions de vous aller voir; mais un du nombre ayant donné l'avis, qui a été approuvé par l'unanimité, de vous écrire la présente au nom de la nation, et de renvoyer la tenue de notre assemblée à trois heures après midi, nous nous sommes empressés de remplir leurs vues, et de vous supplier de ne pas nous refuser notre demande.
Nous avons l'honneur d'être, Messieurs, vos très humbles serviteurs.
Signé : Le chevalier de Ruthie;
Antoine Chapp;
e. Lafond;
G. Bosque.
A Messieurs Guys de Sainte-Hélène, Grelier, Fremin et Favaux.
A Messieurs (1) les administrateurs de l'île de Tabago et dépendances.
Les citoveiis de la ville de Port-Louis, ivres de joie, et partageant, avec 1a métropole et les colonies françaises, l'enthousiasme et les sentiments de reconnaissance dus « à Louis XVI, le restau- « rateur de la liberté française ; à messieurs les « députés, les régénérateurs de notre Cunstitu- « tion, et à ces braves défenseurs de la patrie », ont formé le projet de s'assembler ce jourd'hui, dix heures du matin, en la maison de feu M. Langoueran, située en cette ville du Port-Louis, alin d'adresser à l'Assemblée natiouale les
marques de leur reconnaissance, considérant qu'ils ne peuvent mieux exécuter un projet aussi satisfaisant, que sous les yeux des deux administrateurs qui se sont distingués par leur patriotisme, ils les supplient de vouloir se joindre à eux, afin de coopérer à ce grand œuvre.
Signé : Chevalier de Rhutie, Yrignault, Grelier, Ricard, Charles Fiot, Le Maire, A. Chapp, Jean Forés, C. Bosque, Lafond, Stofbacb, Henri Bourdel, Blanchard, Guenon, Darrass, Sauveur, E. Colomban, E. Blondel, Dumont, Vrignault jeune, P. Mallebay, David, Bouteille, J. Chapp, Melix aîné, Fouquet, B.-D. Thèbe, Cokeraîné, Fremin, Favaux Ringlet, Savidge, Chapory, J. Castelin, Wyatt, Bigé, J. Mignac, Mounier, F. Têtard, F. Birabin, Léonard Bayeux, Mazurie, P. Goût, Dufresnoy, Balade, Testu, J. Jamet, Marchand, Saint-Aubin, J. Barthélémy, Perrin, Monvel.
Port-Louis, 23 octobre 1789.
Nous, soussignés, protestons contre tout ce qui a été fait ci-devant, et ce qui pourrait être fait ultérieurement, jusqu'à ce qu'une nouvelle assemblée ait été approuvée par MM. les administrateurs en chef; protestons même contre notre signature. Ce 23 novembre 1789, Frémin, Favaux Ringlet, Bouteille, J. Jamet et Dufresnoy.
Sur le rapport qui a été fait à l'assemblée par les quatre députés envoyés à MM. les administrateurs, à l'effet de les inviter, au nom de tous les bons Français, de venir prendre part à la joie commune, et" sur leur refus à y acquiescer, elle a arrêté qu'il serait fait des remontrances aux chefs de cette colonie expositives que, dans toutes les colonies françaises, des députés ont été nommés pour engager leur chef à venir prendre part à l'allégresse commune-, que cette démarche supposait un concours de plusieurs personnes qui n'a pas été désavoué; en conséquence, les membres de ladite assemblée ont décidé qu'il serait fait d'itératives représentations pour, sur l'aveu et de l'agrément des chefs, être continuée, n'ayant pour but que de se conformer à ce qui a été pratiqué dans toutes ies colonies françaises; et sur leur désaveu, ladite Assemblée être dissoute, ce qui est une marque non équivoque de leurs respects pour la loi.
Port-Louis, Tabago, le 23 octobre 1789, cinq heures de relevée.
Grelier, président.
C. Bosque, secrétaire.
Et, sur un nouveau rapport qui nous a été fait par M. Fremin, élu vice-président à l'assemblée, que MM. les administrateurs se proposaient de donner, jeudi prochain, l'agréable spectacle d'une fête publique, où la troupe prêterait serment de fidélité à la nation, à la loi et au roi, l'assemblée a arrêté unanimement que MM. les administrateurs seraient félicités de leurs sentiments patrio-
tiques, « et que toute opération demeurerait suspendue, jusqu'à ce qu'il en ait été par eux autrement décidé ; et l'assemblée a arrêté, sur les représentations de M. le Président, que toute assemblée ne pourrait être légale, qu'autant qu'elle serait autorisée par les chefs ; qu'il fallait attendre leur consentement pour la continuation de ses opérations; sur quoi l'assemblée a décidé que tout ce qui a été fait subsisterait, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement délibéré, et que copie du présent serait adressée à MM. les administrateurs de Tabago.
E. Lafond, Le Maire, Grelier, Wyatt, Mignac, Guenon, Jean Castelin, Sauveur, François Têtard, Monvel, Perrein, Rowland, Sand Coker, Bayeux, Monier, Chapory, Savidge, Ricard, Blondel, Henri Bourdel, Mazurie, Blanchard, Stofbach, Sauveur^ Pierre Mallebay, Antoine Chapp, Jean Chapp,Goutte, Bigé, Jean-Barthélemy David, Gilson, Balade, Darrass, Simon Birabin, G. Bosque.
Discours prononcé par le sieur bosque, le 25 octobre 1789, à l'assemblée patriotique de Tabago.
Messieurs, si jamais Tabago eut un jour heureux, c'est celui où une grande partie de ses colons se rassemblent pour témoigner leur gratitude à l'Assemblée nationale, où les cœurs, ivres de joie, ravissent à l'organe le plaisir d'exprimer leur enthousiasme à des héros, à des hommes députés d'une nation dont la richesse consiste en l'union de ses concitoyens, et en des vertus que nul peuple n'a pu ni ne pourra balancer.
Dans le temps même où le trône, environné d'un despotisme affreux, suscité par des ministres et des courtisans égoïstes; où la France, livrée à des malheurs inexprimables, gémissait sous l'oppression la plus cruelle ; dans ce temps, dis-je, où tous les cœurs devaient être blasés, où notre marine et nos possessions d'outre-mer, livrées à la cupidité d'une ennemie intérieure, et plus à craindre que celui qu'il nous fallait combattre; dans ce temps, le Français se distinguait par son patriotisme.
Son sang, sa vaisselle, ses bijoux étaient sacrifiés, et tous allaient au-devant de la faulx qui devait terminer l'existence de la France.,.. Que dis-je, terminer l'existence de la France! Une nation, composée de 26 millions de Français, pouvait-elle s'anéantir où la cruelle aristocratie, qui s'abreuvait du sang de nos concitoyens, n'a jamais pu épuiser ni notre zèle, ni notre activité, ni nos richesses?
Le peuple français a toujours chéri et adoré son roi ; notre fidélité lui a élevé un temple dans nos cœurs, et nos fortunes n'ont jamais été épuisées, lorsqu'il a .été question de les sacrifier pour la patrie ; mais nos âmes brûlaient de rentrer en possession des droits de nos aïeux et de la liberté que l'origine des Gaules avait perpétuée dans nos cœurs. Cette liberté devait assurer les droits de l'homme et de ses propriétés, devait fixer sur une base constante nos anciens titres, et faire revivre ces temps heureux de notre institution.
Louis XVI se rendit à des vœux que nous faisions depuis longtemps; la convocation des Etats généraux fut le gage que nous donna ce monarque, de son amour, et de la continuité de sa bienfaisance.
Les représentants d'une nation puissante et
respectable, ces députés sublimes ont justifié le choix de la nation : leur sagesse, leur prudence, leur activité, leurs lumières, et la fermeté avec laquelle ils ont régénéré notre Empire; les droits de l'homme, de sa liberté individuelle, de sa propriété qu'ils ont fixée à jamais ; le travail immense qui a suivi leurs premiers décrets, et qui s'est toujours soutenu par les mêmes principes, leur assurent à jamais la gratitude de tous les cœurs ; la métropole - leur a témoigné combien elle est pénétrée d'admiration et de reconnaissance.
Les colonies se sont empressées de leur adresser leurs hommages et leurs remerciements ; elles ont senti tout le prix du sacrifice des vertueux députés, ainsi que des bons patriotes qui avaient versé leur sang à la journée mémorable du 14 Juillet.
Sainte-Lucie, surtout, s'est distinguée en faisant une bourse pour être adressée aux veuves et aux orphelins de cés généreux défenseurs de la patrie.
Cette colonie, moins à portée que les autres de communiquer avec la métropole, n'est instruite que depuis quelques jours de cette heureuse révolution ; à peine ses habitants ont été à
ortée de connaître ce renouvellement de notre
onstitution, qu'ils se sont empressés de se réunir, afin de pouvoir participer à la joie de la France et des autres colonies. Combien cette réunion, Messieurs, fondée sur d'aussi beaux motifs, doit avoir d'attraits ! Ne perdons donc pas de moments aussi précieux : 1° Que nos premiers mouvements ne tendent qu'à adresser nos remerciements à MM. les députés, qui ont opéré, par leur patriotisme, leurs vertus et leur fermeté, la régénération de l'Empire, ainsi qu'à Louis XVI, le restaurateur de la liberté française ; qu'il soit nommé, à cet effet, un comité pour en faire la rédaction, et exprimer nos sentiments à l'Assemblée nationale et à Sa Majesté;
2° Que chaque citoyen de la ville de Port-Louis portera la cocarde blanche, bleue et rouge, comme le gage assuré de la prospérité française;
3° Qu'il soit fait une bourse pour être adressée à l'Assemblée nationale, afin que la distribution en soit répartie aux veuves et orphelins des défenseurs de notre liberté, et des soutiens de notre régénération;
4° Que tous les habitants de Tabago soient invités de participer à une œuvre aussi satisfaisante ; et à se réunir à nous, mercredi 28 du présent mois, 8 heures du matin, temps auquel la présente assemblée sera convoquée, afin de coopérer ensemble au bonheur de la colonie.
Port-Louis, le 25 octobre 1789.
G. Bosque.
Les deux premières motions passées unanimement ledit jour de relevée 1789.
C. Bosque.
Paraphé ne varietur le discours du sieur Èosque. prononcé ce jourd'hui de relevée 1789, l'assemblée patriotique de la ville du Port-Louis tenant sa séance, pour icelui être déposé parmi Bes minutes.
Grelier, président,
Gurs de Sainte-Hélène, vice-
sident, G. Bosque, secrétaire.
Messieurs, en conséquence de l'arrêté de l'assemblée patriotique, tenue le jour d'hier en la ville du Port-Louis, MM. les anciens et nouveaux sujets français de cette colonie sont invités, de la part et selon le vœu de tous les membres de ladite assemblée, à se trouver mercredi prochain, 28 du courant, à 10 heures du matin, en la nouvelle salle du palais, pour, et avec les citoyens déjà réunis et constitués en assemblée, ne former qu'un seul et même corps, et tous ensemble manifester leur joie de la régénération française.
Au Port-Louis, Tabago, le
Signé : Grelier, président,
Guys de Sainte-Helène, vice-
président, Charles Bosque, secrétaire.
MM. les administrateurs se joignent à l'invitation de l'assemblée du Port-Louis, et invitent toute la colonie de s'y trouver, pour contribuer tous ensemble au bien général.
Signé : Le chevalier de Jobal,
Roume De Saint-Laurent.
A Messieurs de Vassemblée patriotique du Port-Louis de Tabago.
Au Port-Louis, le chevalier de Jobal.
Messieurs, je ne saurais vous témoigner monj contentement sur la manière patriotique et honnête avec laquelle vous avez termine votre assemblée, pour vous joindre à celle générale de l'île. J'approuve avec le plus grand plaisir tout ce que vous désirez, et vous prie, Messieurs, d'en recevoir mes sincères remerciements, et pour preuve de ma satisfaction, j'invite M. Grelier à se rapprocher de moi, et l'engage de nouveau à concourir à la réunion générale que MM. les administrateurs se sont empressés d'offrir à tous les citoyens de leur gouvernement.
Recevez, Messieurs, les assurances du sincère et respectueux attachement, avec lequel j'ai l'honneur d'être, Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur.
Signé : Le chevalier de Jobal.
A Messieurs de l'assemblée patriotique du Port-Louis.
Pour copie collationnée sur les originaux, déposés au greffe public de cette île,
Wightman, greffier.
Nous, commissaire général et ordonnateur de l'île de Tabago et dépendances,
Certifions à tous ceux qu'il appartiendra que le sieur C. Wightman, qui a signé ci-dessus, est greffier en cette île ; que foi doit être ajoutée à tout ce qu'il signe en cette qualité, tant en jugement que hors. Donné au Port-Louis de Tabago,
sous le sceau de nos armes et le contreseing de notre secrétaire, le 23 janvier 1790.
Roume de Saint-Laurent.
Par M. l'ordonnateur :
Wyatt.
Extrait des minutes à l'assemblée patriotique du 26 octobre 1789.
M. le président ayant mis en question :
1° S'il était à propos que les gens de couleur, libres, portassent la cocarde, qui est le signal de la liberté,
L'assemblée arrêta qu'ils la porteraient.
2° Si ces mêmes gens de couleur, libres, pouvaient participer à la fête qui se donnera jeudi prochain, c'est-à-dire s'ils pouvaient s'assembler pour manifester, par leur réjouissance, la part qu'ils prennent à la régénération de la nation.
Il fut arrêté unanimement que les mulâtres seulement partageraient la joie commune, cedit jour, attendu qu ils se sont toujours montrés très attachés aux blancs, et que cette privation pourrait aliéner leur esprit, ce qu'en bonne politique il était essentiel de prévenir ; mais que les nègres libres, sur lesquels on ne peut .compter, et que l'on pourrait plutôt regarder comme des ennemis secrets, et des agents de leur nation, que comme des sujets français, ils devaient, à la vérité, puisqu'ils sont libres, arborer le signal de la liberté ; mais qu'étant important de veilleç sur leurs démarches, l'assemblée croyait qu'il était de sa prudence de leur assigner un jour différent de celui que M. le commandant a choisi pour célébrer la fête de la colonie.
Grelier, président.
Guts de Sainte-Hélène, vice-président.
G. Bosque, secrétaire.
Aujourd'hui 27 du mois d'octobre 1789, en vertu de notre mission, en date de ce jour, à nous donnée par l'assemblée patriotique de cette lie de Tabago, nous Fadeuilhe et Lafond, nous nous sommes transportés chez M. le commandant en chef de rotte colonie, pour lui donner communication de notre arrêté de la séance de cedit jour, tenue à 10 heures du matin.
Lequel nous a reçus de la manière la plus honnête, et nous a dit qu'il allait faire assembler tous les habitants de cette île, pour se joindre à l'assemblée générale, qui sera convoquée mercredi prochain, 28 du présent mois, et qu'au sujet de notre arrêté, il avait déjà donné des ordres
Eour que toute la troupe fût libre. Fait au Port-
ouis, l'assemblée tenante, lesdits jours et an que dessus.
E. Lafond. B. Fadeuilhe.
Liasse N° II.
Cette pièce a été soumise à MM. les commis-
saires des sections, ainsi que toutes celles qui sont citées ou imprimées. Voyez la note n° 1.
tabago.
Congé pour la Martinique.
Il est permis à MM. Blondel et Bosque, habitants de la ville du Port-Louis de Tabago, de passer à la Martinique avec M11* Pal ly, ainsi que 2 petites négrites, à elle appartenant, et un nègre domestique. Donné à Tabago, le 2 novembre 1789.
Bon pour jours.
Signé : Le chevalier de Jobal.
Collationné sur le congé original, remis de suite à M. Bosque, qui l'a rendu à Pacaud, maître de bateau.
E. Laïond, notaire royal.
Nous, Philippe-Rose Roume de Saint-Laurent, commissaire général ordonnateur de l'île Tabago et dépendances, certifions et attestons à tous qu'il appartiendra, que M9 Lafond, qui a signé ci-dessus, est notaire en cette île, au seing duquel foi doit être ajoutée, tant en jugement que hors; en témoin de quoi nous avons signé les présentes, contresignées par notre secrétaire, et à icelles fait apposer le sceau de nos armes. Donné en notre hôtel, le 1èr janvier 1790; en la ville du Port-Louis Tabago.
Roume de Saint-Laurent.
Par M. l'ordonnateur :
Wtatt.
Extrait de la séante du comité tenue au Port-Louis, depuis le 3 novembre 1789, jusqu'au 7 du-dit mois.
Présents : MM. Pétrie, doyen ; Thomas Wilson, William Smith, Thomas Gurrie, Nathaniel Stewart, Robert Paterson. Les minutes de la dernière séance furent lues. Le doyen observa alors que l'objet le plus essentiel de la séance actuelle du comité intermédiaire était de prendre eD considération des rapports d'une nature très alarmante, relativement à la sûreté de cette colonie, et de délibérer sur les moyens les plus efficaces pour la conservation de la paix et la sûreté de cette île, d'après les informations qui pourraient être mises sous ses yeux. La susdite minute ayant été lue devant un auditoire nombreux, le doyen requit que si quelqu'un pouvait donner des informations concernant le danger, dont il a couru le bruit que la colonie est menacée, il les communique au comité. - "
Sur quoi M. Dangleberme, l'un des juges de la cour de commission, déposa sur le bureau la déclaration suivante :
« Ma motion a tendu à mettre sous les yeux du comité, ici assemblé, les justes motifs de crainte du danger où toute l'île a été, par une
sous le sceau de nos armes et le contreseing de notre secrétaire, le 23 janvier 1790.
ROUME DE SAINT-LAURENT. Par M. l'ordonnateur : WYÀTT.
Extrait des minutes à rassemblée patriotique du 26 octobre 1789.
M. le président ayant mis en question : 1° S'il était à propos que les gens de couleur, libres, portassent la cocarde, qui est le signal de la liberté,
L'assemblée arrêta qu'ils la porteraient. 2° Si ces mêmes gens de couleur, libres, pouvaient participer à la fête qui se donnera jeudi prochain, c'est-à-dire s'ils pouvaient s'assembler pour manifester, -par leur réjouissance, la part qu'ils prennent à la régénération de la nation.
Il fut arrêté unanimement que les mulâtres seulement partageraient la joie commune, cedit jour, attendu qu'ils se sont toujours montrés très attachés aux blancs, et que cette privation pourrait aliéner leur esprit, ce qu'en bonne politique il était essentiel de prévenir ; mais que les nègres libres, sur lesquels on ne peut compter, et que l'on pourrait plutôt regarder comme des ennemi? secrets, et des agents de leur nation, que comme des sujets français, ils devaient, à la vérité, puisqu'ils sont libres, arborer le signal de la liberté ; mais qu'étant important de veiller sur leurs démarches, l'assemblée croyait qu'il était de sa prudence de leur assigner ua jour différent de celui que M. le commandant a choisi pour célébrer la fête de la colonie*
GRELIER, président. GUYS DE SAINTE-HÉLÈNE, vice-président. G. BOSQUE, secrétaire.
Aujourd'hui 27 du mois d'octobre 1789, en vertu de notre mission, en date de ce jour, à nous donnée par l'assemblée patriotique de cette lie de Tabago, nous Fadeuilhe et Lafond, nous nous sommes transportés chez M. le commandant en chef de c^tte colonie, pour lui donner communication de notre arrêté de la séance de cedit jour, tenue à 10 heures du matin.
Lequel nous a reçus de la manière la plus honnête, et nous a dit qu'il allait faire assembler tous les habitants de cette île, pour se joindre à l'assemblée générale, qui sera convoquée mercredi prochain, 28 du présent mois, et qu'au sujet de notre arrêté, il avait déjà donné des ordres Eour que toute la troupe fût libre. Fait au Portouis, l'assemblée tenante, Iesdits jours et an que dessus.
£ . LAFOND. B. FADEUILHE.
Liasse N° II.
Gette pièce a été soumise à MM. les commissaires
commissaires des sections, ainsi que toutes celles qui sont citées ou imprimées. Voyez la note n° 1.
TABAGO.
Congé pour la Martinique.
Il est permis à MM. Blondel et Bosque, habitants de la ville du Port-Louis de Tabago, de passer à la Martinique avec M11* Pally, ainsi que 2 petites négrites, a elle appartenant, et un nègre domestique. Donné à Tabago, le 2 novembre 1789.>
Bon pour jours.
Signé : Le chevalier DE JOBAL.
Gollationné sur le congé original, remis de suite à M. Bosque, qui l'a rendu à Pacaud, maître de bateau.
E. LAÏOND, notaire royal.
Nous, Philippe-Rose Roume de Saint-Laurent, commissaire général ordonnateur de l'île Tabago et dépendances, certifions et attestons à tous qu'il appartiendra , que M® Lafond , qui a signé cidessus, est notaire en cette île, au seing duquel foi doit être ajoutée, tant en jugement que hors; en témoin de quoi nous avons signé les présentes, contresignées par notre secrétaire, et à icelles fait apposer le sceau de nos armes. Donné en notre hôtel, le 1* janvier 1790; en la ville du Port-Louis Tabago.
ROUME DE SAINT-LAURENT. Par M. l'ordonnateur ; WTATT.
Extrait de la séante du comité tenue au Port- Louis, depuis le 3 novembre 1789, jusqu'au 7 dudit moi».
Présents : MM. Pétrie, doyen; Thomas Wilson, William Smith, Thomas Gurrie,Nathaniel Stewart, Robert Paterson.
Les minutes de la dernière séance furent lues.
Le doyen observa alors que l'objet le plus essentiel de la séance actuelle du comité intermédiaire était de prendre en considération des rapports d'une nature très alarmante, relativement à la sûreté de cette colonie, et de délibérer sur les moyens les plus efficaces pour la conservation de la paix et la sûreté de cette île, d'après les informations qui pourraient être mises sous ses yeux. La susdite minute ayant été lue devant un auditoire nombreux, le doyen requit que si quelqu'un pouvait donner des informations concernant le danger, dont il a couru le bruit que la colonie est menacée, il les communique au comité.
Sur quoi M. Dangleberme, l'un des juges de la cour de commission, déposa sur le bureau la déclaration suivante :
« Ma motion a tendu à mettre sous les yeux du comité, ici assemblé, les justes motifs de crainte du danger où toute l'île a été, par une
assemblée illégale et illicite, convoquée par un certain Bosque, Grelier et Guys de Sainte-Hélène, Pierre-Josepn Le Borgne, au soutien de laquelle motion « j'ai remis sur le bureau nombre de dé-
positions des différents soldats en garnison en « cette île, ayant été prié par MM. les officiers « de faire la présente motion en leurs noms, et
comme ayant été la cause légitime du refus « qu'eux et leurs troupes ont mit (1) de prêter
serment entre les mains du sieur Grelier, nommé « tumultueusement, et sans approbation du plus « grand nombre des citoyens (2) », qui avaient été comme eux convaincus de l'espèce de sédition qui se tramait dans l'assemblée où ledit
.sieur Grelier prenait indécemment la qualité de président.
Cette prétendue assemblée, croyant avoir la plus grande partie des troupes à sa dévotion, se croyait tout permis; elle envoya vers M. le commandant en chef, M. Le Borgne, son greffier, en qualité de député (3); mori ait sieur le commandant ayant mal reçu la députation, le sieur Le Borgne revint à l'assemblée, se plaignit beaucoup, et fit une motion, par laquelle il priait MM. de l'assemblée de prendre en considération les affaires avec le commandant, « qu'il la priait « de faire à ce sujet un mémoire, pour être en- « voyé à l'Assemblée nationale à Paris, et de-« mander justice (4) ».
Le même jour, ou le lendemain, l'Assemblée envoya M. de, Chancel le jeune en députation vers M. le commandant; il fut mal reçu; et, revenu à l'assemblée, il fit son rapport; alors M. Guys de Sainte-Hélène, commissaire de guerre, fit une motion, par laquelle il proposa de mander mon dit sieur le commandant devant l'assemblée, pour rendre compte des motifs qui l'avaient porté à recevoir durement un membre de leur assemblée, et il y eut des opposants à cette, motion ; et contre l'avis des sieurs Grelier et Bosque la motion n'eut pas lieu.
M. Fadeuilhe, membre de l'assemblée, ayant représenté combien ils seraient réprébensibles en recevant le serment des soldats, qui, ayant vendu leur liberté au roi et à la nation, en s'en-gageant, ne pouvaient plus le prêter une seconde fois, à moins qu'ils ne fussent relevés de leur serment par la nation en France (5).
Cette motion attira au sieur Fadeuilhe les plus vifs reproches par ses chefs. Il y eut même un nommé Pacaud, maître de bàteau, qui pensa l'assassiner devant toute l'assemblée ; cependant on fit droit sur la motion, et le cahier où les soldats avaient signé fut déchiré.
Je prie ce respectable comité de prendre en considération ces présentes, ainsi que les diffé-
rentes dépositions des soldats, que j'ai mises sur le bureau, de la part de MM. les officiers du régiment de la Guadeloupe, pour, par vous, Messieurs, statuer ce qu'il appartiendra, tant contre ledit Bosque, que contre' ses complices, fauteurs ou adhérents.
Au Port-Louis-Tabago, ce 3 novembre 1789.
Signé : Dangleberme.
Des délibérations, signées par des personnes, furent aUssi mises sous les yeux du comité, et ordonné qu'elles seraient déposées.
Le comité arrêta que la lettre suivante serait envoyée à M. le commandant en chef:
« Monsieur, en conséquence des informations « authentiques, et sous serment, qui nous ont été « données, etc. (1).
Le secrétaire, ayant eu ordre de remettre la susdite lettre, rapporta pour réponse que M. le commandant faisait dire au doyen que toutes les fois que le comité ferait des demandes semblables, il serait obéi à la minute.
M. Fadeuilhe, avocat, remit au comilé une déclaration sous serment, en conséquence de laquelle la lettre suivante fut envoyée à M. le commandant (2).
« Monsieur, etc., etc.
Le comité, en conséquence, arrêta d'envoyer la lettre suivante à, MM. Irvine et Saint-Léger, juges de paix.
Le comité de l'assemblée coloniale ayant reçu des dépositions et autres informations relatives à la conduite criminelle de Charles Bosque et autres personnes, il croit qu'il est de son devoir de mettre sous vos yeux les pièces suivantes, que contient cette information ; et il vous prie, en votre qualité de magistrat, de les prendre en considération immédiatement, et d'employer les voies.de la loi pour administrer la justice, et assurer la paix et la tranquillité publiques.
Peu de temps après, ces Messieurs parurent, et commencèrent leur enquête ou procédure. Sur quoi, etc., etc. (3).
Pour copie conforme, certifiée par moi secrétaire de l'assemblée coloniale.
wlghtman.
Tabago, Mitimus contre Bosque.
Edmond Saint-Léger et Christophe-Guillaume Irvine, juge de paix de l'île de Tabago, susdite, nommés pour la conservation de la paix du roi dans ladite île.
Au prévôt-maréchal de ladite île.
Nous vous délivrons, avec ces présentes, le corps de Charles Bosque, ci-devant pratiquant la loi dans ladite île, accusé de mépris, ou mépris-sion coDtre le gouvernement et la personne du roi, en tâchant de séduire ses soldats de leur devoir; c'est pourquoi, de la part du roi, nous vous ordonnons que vous receviez ledit Charles Bosque immédiatement, et que vous le gardiez en sûreté dans votre geôle, jusqu'à ce qu'il en soit délivré par ie cours de la loi, et vous ne manquerez pas, à votre risque et péril.
Donné sous nos signatures et sceaux, au Port-Louis de Tabago, susdit, ce 4 novembre 1789.
Signé : D. Edmond de Saint-Léger et G.-G. Irvine.
Pour copie véritable : W. Smith, prévôt-maréchal.
Nous, commissaire général ordonnateur de l'île de Tabago et dépendances, certifions que le sieur William Smith, qui a signé la présente copie, est réellement prévôt-maréchal, et que foi doit être ajoutée à sa signature, tant en jugement que hors.
Donné sous le sceau de nos armes et le contreseing de notre secrétaire, à Tabago, le 23 janvier 1790.
Roume de Saint-Laurent.
Par M. l'ordonnateur : Wyatt.
Indictement contre Bosque.
Les jurés de notre seigneur le roi de France et de Navarre présentent, sous leur serment, que Charles Bosque, ci-devant pratiquant la loi dans la ville du Port-Louis, île susdite, du 20 au 28e jour d'octobre de l'année de notre seigneur Jésus-Christ 1789, dans la ville et île susdite, méchamment, malicieusement et contre son devoir, comme sujet de notre souverain seigneur le roi, d'affaiblir le gouvernement de ladite Majesté en cette île, en portant atteinte à la discipline des troupes de ladite Majesté, et avec cette même intention, déclara les même jour, an, et à l'endroit susdit, méchamment et malicieusement, à Garrot, soldat, « que les soldats doivent être libres d'al-« 1er boire où ils voudraient, qu'il en avait fait « signer à cet effet plusieurs, et proposa dé faire « chez lui un dîner pour la compagnie de M. Cor-« delier. ». Ce que ledit Charles Bosque a fait méchamment et malicieusement à l'insu des officiers commissionnés par ladite Majesté, pour le maintien et soutien de la discipline parmi les soldats.
Les jurés, pour notre Seigneur le roi, présentent de plus, sous leur serment, que ledit Charles Bosque déclara du 22 au 28 octobre de l'année de notre Seigneur Jésus-Christ 1789, dans la ville et île susdite, méchamment, malicieusement et contre son devoir, étant sujet de notre seigneur le roi, à plusieurs personnes aussi sujettes de sa majesté, « que la compagnie de M. Cordelier était « à ses ordres, et qu'il pouvait en disposer quand « bon lui semblerait », ladite compagnie de soldats appartenant au régiment de la Guadeloupe,
étant alors, comme elle est encore en cette île, au service et à la solde de ladite Majesté.
Les jurés, pour notre seigneur le roi, présentent de plus, sous leur serment, que ledit Charles Bosque, le 27 du mois d'octobre de l'année de notre seigneur Jésus-Christ 1789, étant, avec beaucoup d'autres personnes inconnues aux jurés, dans une assemblée illégale, qui fut tenue dans cette ville du Port-Louis de Tabago, méchamment, malicieusement et contre son devoir, étant sujet de Sa Majesté, « écouta deux soldats, qui étant entrés au lieu où se tenait ladite assemblée, « vinrent lui parler à l'oreille, et leur fit signer « un serment ». Lesdits soldats étant alors dans ladite île à la solde et au service de Sa Majesté. Et ledit Charles Bosque n'ayant aucune autorité légale pour faire prêter ledit serment.
Et les jurés de notre seigneur le roi disent, sous leur serment, que les. faits susdits sont au détriment de la discipline militaire des troupes de Sa Majesté, et qu'ils ont été commis par ledit Charles Bosque, les jour, an et lieux susdits, méchamment, malicieusement et illégalement contre la paix de notredit seigneur le roi actuel, sa couronne et dignité. Signé à l'original, déposé au greffe, de Chancel, procureur général.
Pour copie collationnée sur celle déposée en ce greffe, et délivrée à monsieur l'ordonnateur, ce jourd'hui 3 décembre 1789.
C. Wightman, secrétaire de la Couronne.
Nous, commissaire général ordonnateur de l'île de Tabago et dépendances, certifions, à tous ceux qui! appartiendra, que le sieur Charles WightmaD, qui a signé la présente copie , est réellement secrétaire de la Couronne, et que foi doit être ajoutée à sa signature, tant en jugement que hors. Donné sous le sceau de nos armes, le contreseing de notre secrétaire, à Tabago, le 23 janvier 1790.
Roume de Saint-Laurent.
Par M. l'Ordonnateur : Wyatt.
Indictement.
A. True bill, John Hamil- Vrai bill, signé Jean Ha-
ton With his felfows. We milton et ses compagnons,
find the prisonner guilti of Nous trouvons le prison,
the faets within mentio- nier coupable des faits ci
ned, Archd, Moore Lyon iessus mentionnés,
with his fellows. Signé . Archd> Moore
Lton et ses compagnons.
Pour copie : G. Wightman, secrétaire de la Couronne.
Substance des dépositions qui ont été entendues, contre le sieur Charles Bosque, à la séance de la cour d'Oïer et Terminer, tenue à la ville du Port-Louis de Tabago, le vendredi 13 novembre 1789, et certifiées par M. Roume de Saint-Laurént, ordonnateur; M. de Chancel, procureur général et MM. W. Irvine, P. A. 0u-faur, et Saint-Léger, juges de paix, siégeant à cette cour.
Premier témoin. Favaux Ringlet, directeur général du domaine
par intérim. Il a entendu dire au sieur Bosque, dans le bureau du domaine, qu'il avait à ses ordres la compagnie de M. Cordelier, et qu'il
Eouvait en disposer quand il voudrait. Le sieur
osque lui dit ces choses deux ou trois jours avant la première tenue de l'assemblée patriotique, et cela en pariant de l'assemblée qui devait se tenir quelques jours après : le sieur Bosque ne lui a pas dit pourquoi la compagnie de Cordelier était à ses ordres; Bosque pariait de Sang-froid; le! déposant ne se rappelle point si c'était le matin ou le soir.
Deuxième témoin,
Dufresnoy, visiteur du domaine. Il a entendu dire au bureau, par le sieur Bosque, que ledit Bosque avait à ses ordres Ja compagnie de M. Gor-delier, et qu'il pouvait en disposer quand il voudrait; cela trois ou quatre jours avant la première assemblée patriotique ; c'était vers les dix heures du matin, et Bosque paraissait de sang-froid. Le déposant a été une fois à l'assemblée patriotique; il y a vu le sieur Bosque, et n'y a point vu des soldats.
Troisième témoin,
Thèbe, négociant. Le sieur Bosque a dit, dans son magasin, qu'il avait la compagnie de M. Gor-del-ieç; que si le chevalier de Jobal n'avait pas pris la cocarde, la compagnie de M,'Cordelier l'avait prise, que cela ferait voir à un tas de lâches, qu'ils avaient tprt de ne pas revenir à l'assemblée patriotique : Bosque 4it en outre au déposant qU il avait fourni des faveurs pour faire les cocardes.
Quatrième témoin.
Bertrand Fadeuilhe, notaire royal. Il a vu, le 27, à l'assemblée patriotique, deux soldats qui, ayant parlé à l'oreille de Bosque, prirent un serment qui avait été rédigé la veille : Bosque lut le serment et les soldats le signèrent. « Le serment portait d'être fidèle à la nation, au roi et à la loi », et d'être traître, si on trahissait l'assemblée, Le déposant, après que les Soldats fussent sortis, observa à M. Grelier (président de l'assemblée). l'impropriété cJe cette inconduite, et qu'il paraissait que la troupe était attirée : le président répondit que l'on avait pris, la veille, le serment d'un Soldat, après quelques débats; le sermént fut déchiré. Si le déposant ne fit pas la même observation la veille, e est parce qu'il ne s'y trouvait point en sûreté ta nuit, après avoir été menacé d'être jeté par la fenêtre. Les soldats s'adressèrent à Bosque, qui les fit signer, sans même en avoir prévenu le président. Il n'a été question de la compagnie de M. Cordelier, dans rassemblée patriotique, que pour demander à M. le commandant de ne pas faire monter cette compagnie au fort.
Ce que le déposant observa de plus mal dans l'assemblée, c est le serment, et deux hommes qui gardaient la porte pour empêcher de sortir. Un jeûné homme fut ramené dans l'assemblée à coups de poing : le 'serment fut pris par MM. Grelier, président, Guys, vice-président, et Rosque, secrétaire? en. levant la main, et l'on convint qu'il suffirait pour les autres de le signer»
Cinquième témoin.
Garnaud, négociant (l'un des membres du petit juré). Le déposant n'est allé qu'une fois à l'assemblée patriotique, le lendemain du jour qu'il arriva. Il fit quelques observations relatives à l'assemblée de la Martinique. On ne voulut pas les suivre; il se retira. Le sieur Le Borgne voulut proposer que les délibérations auraient force de loi; mais le sieur Fadeuilhe lui ayant fait entendre que cela n'était pas bien, le sieur Le Borgne ne fit pas la motion.
Sixième témoin,
Perrein, cantinier dès troupes (le 23 octobre 1789 au soir). Il se trouva à l'assemblée patriotique; il ne voulait pas signer, parce qu'il ne voyait que les' noms de M. Dangleberme et des administrateurs; mais on l'engagea de le faire; il le fit. La deuxième fois qu'il se rendit à rassemblée, l'on en discuta la légalité. Il y vit entrer, le soir, un militaire en veste blanche, qui signa le serment. « Ce serinent portait d'être fidèle & « la nation, au roi et à la loi ; que l'on suivrait « les lois établies dans l'île jusqu'à ce que la « France én donnât d'autres ét que ceux qui « y manqueraient seraient punis par l'assemblée « générale de la colonie, et que l'on ne'manque-« rait ni aux chefs, ni à personne. La légalité de « cette assemblée fut prononcée par une majo-« rité de 43 contre 27.
« M. de Chan'Cël tle cadet) proposa d'établir 4 com-« missaires pour empêcher que la liberté ne « se changeât en licence. Loin d'y avoir fait de « mauvais projets, le président avait recom-« mandé de rejeter toutes les motions contraires « au bien public. » Les président, vice-président et secrétaire firent serment, et les autres le signèrent. Ge serment portait que celui qui abandonnerait l'assemblée serait indigne d'être Français. Bosque écrivit le serment par lé désir dé l'assemblée; le déposant n'a point dit à M. La Goste que ce serait dommage qu'il fût tué; et il n'en a jamais entendu parler.
Septième témoin.
Garrot, soldat du second bataillon de la Guadeloupe. Bosque lui a dit qu'il n'y aurait point de icantine et que les soldats pourraient boire où ils voudraient, Bosque lui a dit avoir fait signer beaucoup d'autres soldats au même effet; Bosque lui a dit qu'il se préparait à donner un dîner à la compagnie de M. Cordelier pour avoir mis un pavillon à sa porte. Bosque n'a proposé ni à lui, ni à d'autres, à sa connaissance, de venir à l'assemblée. Le déposant est allé une fois à l'assemblée; on ne lui proposa point de signer le serment. N. B. Le même témoin reparaîtra sous le n° 16,
Huitième témoin.
Potrinot, soldat du même bataillon. Il a mis sa marque ordinaire au bas d'un papier où on lui disait qu'il, s'agissait d'être e fidèle à la nation « au roi et à la loi ». Le lendemain, voyant que p c'était une bévue », il rendit compte à son
capitaine; on ne lui a point parlé d'être fidèle à l'assemblée.
Neuvième témoin.
Galinier, idem. Il se rendit à l'assemblée avec trois chasseurs, et Bosque mit leurs marques ordinaires au bas d'un papier qu'on lui lut et dont il ne se rappelle pas; le lendemain, il en avertit son commandant; « ce n'est pas Bosque « qui l'a invité; il y fut, ainsi que trois autres « chasseurs, de lui-même ; il n'avait jamais auparavant parlé à Bosque. »
Dixième témoin.
Gilbert Dupont, idem. Il descendait du fort, rencontra deux bourgeois qu'il ne connaît pas et qui l'engagèrent d'aller dans une maison où ses camarades avaient été. Il y alla; Bosque lui lut un papier où il s'agissait « d'être fidèle à la nation, au roi et à la loi » ; Bosque lui dit qu'il serait libre, « mais ne lui dit pas que cela le dispensait de ses obligations ».
Onzième témoin.
Morin, soldat du second bataillon de la Guadeloupe. Il n'a « jamais eu de communication avec Bosque ». 11 alla, le 27 octobre 1789, à l'assemblée patriotique où il signa un serment à peu près semblable à celui qui fut prêté le 28 (le lendemain); il s'agissait c d'être fidèle à la nation, au roi et à la loi ». Le déposant, ayant ensuite eu peur d'avoir mal fait, en avertit son capitaine.
Douzième témoin.
Beauvais, idem. Il signa un papier où il s'agissait d'être « fidèle à la nation, à la loi », et d'autres mots bien placés, dont il ne se rappelle pas, et fidèle au roi ; on l'invita d'engager ses camarades à venir ; on lui dit qu'il était question de la liberté.
Treizième témoin.
Le Moine, idem. Un bourgeois l'engagea de venir à l'assemblée nationale (patriotique), lui dit qu'il serait libre, qu'il n'y aurait plus de cantine; il signa Un papier, qui portait d'être « fidèle à la nation, au roi et à la loi ». Le bourgeois qui l'a invité se nomme Balade, et est tailleur.
Quatorzième témoin.
Devaux, idem. Bosque lui lut un papier qu'il n'a pas trop compris, lui dit que c'était pour sa liberté, pour la sienne et pour celle de la nation; Bosque luij dit que l'on pourrait signer aussi bien le papier chez lui qu'à l'assemblée.
Quinzième témoin.
M. le baron de Widerspach, officier au régiment de la Guadeloupe. Le soldat Garrot lâcha des propos chez M- Tibeaux, entre autres que les
soldats de la compagnie de M. Cordelier se proposaient de demander leur liberté le jour de la fête.
Seizième témoin.
Garrot (le même qui avait paru sous le n° 7.)
Il a dit ce que vient de déposer M. le baron. « Mais ce n'est point à l'instigation de Bosque, « et c'était d'après ce qu'ils avaient ouï dire qui « s'était passé en France* »
. Dix-septième témoin.
Damelet, soldat au second bataillon de la Guadeloupe. Bosque lui a dit que les soldats seraient libres d'aller où ils voudraient, sans lui parler de boire. Le déposant signa un papier à l'assemblée patriotique, entre les. mains de Bosque, où il promettait d'être « fidèle à la nation, au roi et à la loi », de ne point « abandonner leurs drapeaux, ni le roi ». Il fut invité par des bourgeois, et Bosque lui donna la plume pour signer.
Dix-huitième témoin.
Chapp, tailleur, au Port-Louis. « Bosque lui « proposa de faire une souscription à l'effet de « donner des rubans pour faire des cocardes et « une fête à la troupe, avec 4 barriques de vin « et un bal. Bosque voulait régaler la compagnie « de M. Cordelier, la première. Il dit qu'il y aurait bonne intelligence entre les bourgeois « et le militaire. Il chargea le déposant de faire « un drapeau national. Le serment de l'assem-« blée patriotique était de contenir le bon ordre « dans l'assemblée, le bien public, et que celui « qui y manquerait serait indigne d'être Français.
« Demandé par l'accusé Bosque s'il ne lui c avait pas dit « que la cocarde se présenterait « d'abord à MM. les chefs ? » Oui.
« N'a-t-on pas agité dans l'assemblée d'envoyer « les invitations aux habitauts? Oui; mais il « fut défendu, par M. le commandant, de les * imprimer.
« L'intention de l'assemblée patriotique n'était-elle pas d'adresser des remerciements à l'Assemblée nationale, et une bourse pour les veuves et les orphelins? » Oui.
« Les habitants devaient-ils être invités au « dîner? » Oui.
« Ya-t-ileudes imprimés envoyés à ce sujet?» Oui.
« Demandé par M. Pétrie, l'un des juges ; « A-t* il été question de nommer des commissaires dans l'assemblée patriotique ? » Oui, 4 pour la police de l'assemblée.
N.-B. M. le major Fagan, l'un des juges, récusa le témoignage de Chapp, par des raisons qu'il déduisit; de sorte que ce témoignage a été annulé et que MM. du petit juré ont été requis de n'y avoir aucun égard.
Dix-neuvième témoin.
Bonnafond, soldat au second bataillon de la Guadeloupe. Il signa un serment à l'assemblée patriotique dont il ne se rappelle pas en entier, mais qui portait d'être fidèle « à la nation, au roi et a la loi ».
Vingtième témoin.
Chinsot, soldat au second bataillon de la Guadeloupe. Il entra par curiosité à rassemblée patriotique, n'y resta que quelques minutes. Quelques jours après, il revint, engagé par deux bourgeois, et invité par le petit homme de la maréchaussée; il signa un papier qui portait que « tout bon Français devait être fidèle à la « nation, au roi et à la loi », et que c'était pour la liberté des uns comme des autres.
Vingt et unième témoin.
Beaulieu, soldat au même bataillon. IL n'a fait
u'entrer une fois dans l'assemblée patriotique,
ont il ressortit au bout de dix minutes ; étant en présence de M. Smith, Bosque lui dit : « Vous voyez ce que nous venons de faire pour vous; vous ferez la même chose pour nous. » Le déposant lui répondit que oui, si c'était à propos.
Vingt-deuxième témoin.
M. Smith, prévôt-maréchal. Le soldat Beaulieu, qui est perruquier, le peignait; Bosque entra d'un air riant et dit à Beaulieu : « Ha ça, vous savez ce que nous venons de faire pour vous ; j'espère que dans l'occasion vous ne nous manquerez pas. »
Les 22 témoins qui précèdent, ayant été présentés et entendus contre l'accusé Bosque, celui-ci fit entendre en sa faveur les sieurs Wyatt, Lafond, Blanchard et Sauveur, qui expliquèrent différentes particularités, mais qui ne dirent rien de contraire aux faits rapportés par les témoins contre l'accusé.
Nous, commissaire général ordonnateur et président des cours ayan t juridiction criminelle àTabago, certifions que les substances des dépositions ci-dessus sont conformes aux notes que j'ai prises à la cour d'Oïer et Terminer, le 13 de ce mois, et que ie lus au petit juré, en lui donnant ma charge sur l'accusation contre Charles Bosque.
Fait au Port-Louis-Tabago, le 18 novembre 1789.
Roume de Saint-Laurent.
Nous soussigné, chevalier, conseiller du roi, son procureur général aux cours ayant juridiction en l'île de Tabago, certifions, autant que notre mémoire peut nous Te permettre, que l'extrait ci-dessus transcrit, renferme la substance des dépositions qui ont été reçues le 13 novembre 1789, à la coUr d'Oïer et Terminer, contre le sieur Charles Bosque, accusé. Nous pouvons d'autant mieux certifier la fidélité de cet extrait, qu'en notre qualité de procureur général nous avons traduit ledit Bosque devant la cour d'Oïer et Terminer, à laquelle nous avons présenté les témoins ci-dessus dénommés, lesquels nous avons interrogés publiquement sur les faits expliqués en leurs dépositions. Nous certifions aussi que, par un usage que nous ne pouvons approuver, les cours d'Oïer et Terminer ne font pas rédiger légalement, par écrit, les. dépositions des témoins qu'elles entendent. Les juges attentifs et scrupuleux en prennent ordinairement des notes, mais qui, n'ayant rien de légal, présentent peu de sûreté à l'ordre public et à l'accusé.
Au Port-Louis de Tabago, le 28 janvier 1790.
De Ghancel, procureur général.
Je soussigné, l'un des juges de la cour d'Oïer et Terminer, certifie que les dépositions ci-dessus sont la substance de celles faites devant la cour.
p.-a. Dufaur.
Je soussigné, certifie, autant que ma mémoire peut me le permettre, que les dépositions ci-dessus sont telles qu'elles furent faites devant la cour.
W. IRVINE.
Je soussigné, l'un des juges de paix du quorum de cette île, et interprète général, ayant rempli les fonctions de cette dernière place à la cour d'Oïer et Terminer, certifie que les dépositions ci-dessus sont la substance et conformes à celles faites devant ladite cour.
Au Port-Louis-Tabago, le 5 février 1790.
Edmond Saint-Léger.
H.
Traduction littérale des mêmes dépositions, rédigées en anglais et certifiées par le sieur Thomas
Wilson, un des juges de paix et accusateur.
Premier témoin.
Favaux du Ringlet, directeur du domaine par intérim, dit que le prisonnier avait déclaré dans son bureau, en présence de M. Dufresnoy, qu'il avait la compagnie de M. Cordelier à ses ordres, toutes les fois qu'il en voudrait faire usage; que cela se passa trois jours avant la tenue de l'assemblée patriotique du 23 octobre 1789, où ledit déposant se trouva, et que ledit déposant protesta contre la légalité, à moins qu'elle ne fût sanctionnée par MM. les administrateurs.
Deuxième témoin.
Dufresnoy, un des visiteurs du domaine, a entendu le prisonnier faire là même déclaration, en ce qui concerne la compagnie de M. Cordelier, comme le précédent témoin ; que cela se passà vers les dix heures du matin et que le prisonnier paraissait de sang-froid et réfléchi ; que le déposant ne lui a pas entendu dire pourquoi il avait à ses ordres la compagnie de Cordelier; que le déposant s'est trouvé une fois à l'assemblée patriotique, mais qu'il ne s'y passa rien dans le temps qu'il y fut, si ce n'est l'élection du président, du vice-président et du secrétaire.
Troisième témoin.
M. Thèbe, marchand au Port-Louis, a entendu le prisonnier déclarer, dans sa boutique, qu'il avait la compagnie du capitaine Cordelier à ses ordres et que, si le commandant n'avait pas pris la cocarde dans le temps, la compagnie de Cordelier l'aurait prise sans sa permission; et que tous ceux qui ne voudraient pas devenir membres de l'assemblée patriotique seraient regardés comme des poltrons, et que lui, Bosque, avait fourni des rubans à la compagnie du sieur Cordelier, pour faire des cocardes.
Que le déposant fut deux fois à l'assemblée patriotique; la première, « lorsque les députés fu-
« rent envoyés vers les administrateurs pour les e requérir de légaliser leurs séances, et la se- « conde fois, lorsqu'il se joignit à la motion pour « déclarer leur séance illégale, à moins qu'ils c n'eussent obtenu ia sanction de MM. les aami- « nistrateurs ».
Quatrième témoin.
Bertrand Fadeuilhe, notaire public, dit que le mardi 27 octobre, à midi, ayant appris que les soldats avaient été admis aux séances de l'assemblée patriotique, il s'y transporta avec MM. Gauthier, avocat, et Sornet.
Qu'à son arrivée, il y « trouva plusieurs sol- « dats, qui signèrent un serment en présence du « président, du vice-président et du secrétaire ; « que ce serment portait d'être fidèle à la nation « au roi et à la loi (1) »; qu'il attendit que les soldats fussent sortis avant de faire sa motion, portant que l'assemblée n'avait pas de pouvoir de recevoir le serment des troupes sans la permission de MM. les administrateurs ; « que M. Bos- « que fit une grande opposition à sa motion ; » mais que M. Grelier, président, immédiatement après, donna son opinion et ordonna que le papier sur lequel les soldats et les autres avaient souscrit fut déchiré, ce qui fut approuvé.
Le déposant observe « que les soldats ont signé « sous la direction de M. Bosque, sans la con- « naissance du président et du vice-président », et qu'il seconda la motion pour que toutes les séances de la présente assemblée fussent réputées illégales, n'étant pas sanctionnées par les administrateurs.
Le déposant déclare qu'à la séance précédente tous ceux qui étaient présents furent obligés de signer le serment, soit qu'ils le voulussent ou non, et qu'il ne fût permis à personne de sortir sans l'avoir fait.
« Le prisonnier a demandé au déposant s'il « n'avait pas secondé la motion qu'il avait faite « pour faire déchirer le papier sur lequel était « écrit le serment. Le déposant a répondu que « non. »
Cinquième témoin.
Garnaud, marchand dans la ville du Port-Louis et un des petits jurés, déclare qu'il est allé une fois seulement à l'assemblée, avec MM. Gauthier, Fadeuilhe et Saint-Léger; qu'il ne faisait que d'arriver à la Martinique, et qu'il proposa quelques motions semblables à celles qui avaient passé à la Martinique, lesquelles furent rejetées; qu'une motioa fut faite par M. Le Borgne, portant que toutes les délibérations qui étaient passées et qui passeraient dans la suite, seraient regardées comme lois du pays; que lui, déposant, argumenta avec force contre cette motion, ce qui fit qu'elle fut rejetée.
Sixième témoin.
Pierre Perrein, cantinier de la troupe, déclare que, le 23 octobre 1789, il se trouva à l'assemblée patriotique; qu'il a signé un papier sur lequel étaient plusieurs signatures ; qu'il répu-
gnait beaucoup à cela, la première fois, comme il ne voyait pas le nom de M. Dangleberme ou quelques autres qu'il regardait comme les principaux de la ville; que M. Bosque, le prisonnier, était là et était dit en qualité de secrétaire de l'assemblée; que, la deuxième fois qu'il se trouva à cette assemblée, une motion fut faite si elle était légale ou illégale, « et qu'elle fut déclarée « légale par 47 voix contre 23: qu'il y a paru un « soldat qui portait une veste blanche, qui se pré- « senta pour signer le serment, et que M. de « Chance! le jeune se leva et demanda si on devait « permettre à cet homme de signer le serment « ou non; on consentit, et il fut permis au soldat « de signer le serment; qu'en addition à ce ser- « ment, autant que le déposant peut se rappeler, « les anciennes lois doivent être observées jus- « qu'après l'assemblée de toute l'île, qui devait « être convoquée le jeudi suivant », et que ceux qui manqueraient, recevraient une punition corporelle pour leur désobéissance;«que le serment « fut dressé par le président, le vice-président « et le prisonnier, comme secrétaire, et était « d'être fidèle à la nation, au roi, à la loi et à « l'assemblée patriotique, et que ceux qui aban- « donneraient ladite assemblée patriotique, se- « raient regardés comme des poltrons. Le dépo- « sant fut rencontré par M. La Coste, officier du « régiment de. la Guadeloupe, qui lui demanda « s'il était encore résolu de se tenir au serment « qu'il avait pris dans cette, assemblée; ils doivent « être punis, et que lui et les autres membres « honnêtes devaient être distingués. Le déposant fut interrogé s'il n'avait pas dit à M. La Goste « qu'il serait bien fâcheux qu'on le tuât ; à quoi « il a répondu que c'était la première fois qu'il « entendait un pareil discours. »
Septième témoin.
Garrot, barbier et soldat, déclare que le prisonnier Bosque lui dit qu'il n'y aurait plus de cantine; que les soldats seraient maintenant libres d'aller boire où il leur plairait, et qu'il payerait un dîner pour les soldats de la compagnie de Gordelier, pour les peines qu'ils avaient prises en plantant un mât de pavillon pour élever la couleur patriotique devant sa maison; qu'il est allé à l'assemblée patriotique, mais qu'il n'a signé ni papier, ni pris le serment.
Nota. —Le sieur Wilson rapporte, immédiatement après cette déposition, celle que fit le vingtième témoin. Pour ne laisser aucune ambi-uité sur cette transposition, nous la rapporterons ans son ordre naturel.
Huitième témoin.
Jean-François Potrinot, soldat du régiment de la Guadeloupe, déclare qu'en passant dans la rue, M. Bosque, le prisonnier, lui fit signe de monter à l'assemblée patriotique; qu'il fit sa marque à un serment qu'il lui lut, et qui était d'être « fidèle à la nation, au roi et à la loi ».
Neuvième témoin»
Louis Galinier, soldat dito, déclare que lui et trois de ses camarades, se trouvant à l'assemblée patriotique, et M. Bosque, le prisonnier, leur présenta le serment pour signer, ce qu'ils firent, et
que lorsqu'ils s'en furent, quelques membres leur dirent de faire leurs efforts pour engager le plus de leurs camarades à venir signer le serment.
Dixième témoin.
Gilbert Dupont, soldat dito, déclare qu'il a été rencontré, dans les rues de Port-Louis, par quelques citoyens, qui lui demandèrent s'il n'irait pas à une certaine maison où ses camarades étaient, et ne ferait pas ce qu'ils avaient fait, et que conformément à cela, il vint à l'assemblée, et on lui dit de signer un papier, qui était d'être fidèle à la nation, & la loi et au roi » ; à quoi il voulut faire quelques objections; mais que M. Bosque, le prisonnier, lui dit qu'il n'y avait rien de mal là pour lui, qu'il était maintenant libre, et pourrait faire ce qui lui plairait ; d'après quoi il fut décidé à signer le serment, il ajouta qu'il n'avait jamais entendu parler du repas que le prisonnier avait intention de donner à la compagnie de Gordelier.
Onzième témoin»
Morin, soldat dans le même régiment, déclare que jamais il n'a entendu parler du repas que M. Bosque se proposait de donner aux soldats: qu'il fut à l'assemblée patriotique, où il vit M. Bosque, et signa le serment « d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi » : qu'il n'y fut point engagé par quelqu'un et qu'il n'a point entendu M, Bosque inviter quelqu'un de ses camarades.
Douzième témoin.
Beauvais, soldat au même régiment, dit que lui et plusieurs de ses camarades furent invités par un citoyen de le suivre à la comédie (1), signifiant l'assemblée patriotique ; qu'ils y virent M. Bosque, M. Guys et le président, qui leur dirent designer un papier, ou un serment était écrit « d'être fidèle à la nation et à la loi », et quelques autres mots avec, dont il ne se rappelle pas, mais qu'il pense que c'était « d'être fidèle aussi au roi »; qu'ils leur dirent qu'ils seraient maintenantlibres, et d'engager le plus de leurs camarades qu'ils pourraient à venir signer le même serment; qu'il n'y avait rien de mal là, car ils étaient une assemblée d'hommes libres.
Treizième, témoin.
Le Moine, soldat du même régiment, déclare que M. Bosque lui avait dit que les soldats étaient maintenantlibres et pouvaient aller boire où il leur plairait; qu'il a été engagé par un Citoyen nommé Balade, tailleur, d'aller à l'assemblée pa-* triotique, où il se trouva avec plusieurs de ses camarades; que M. Bosque lui présenta à signer un papier, çq présence du président et du vice-: président, qui portait d'être « fidèle à la nation, au roi et à la loi ».
Quatorzième témoin.
Devaux, soldat du même régiment, déclare que M. Bosque lui dit que le papier, qu'on lui faisait signer, était pour lui donner sa liberté, et en même temps pour assurer la liberté de tous les citoyens, et qu'il lui dit de le signer, ce qu'il fit, et M. Bosque lui dit alors s'il trouvait quelqu'un qui voulût signer le même papier, il le trouverait à sa maison.
Quinzième témoin.
M. le baron de Widerspach, officier dans le même régiment, déclare qu'un soldat de la compagnie de Cordelier, nommé Garrot, disait, dans la maison de M. Tibeaux, et en sa présence, que M. Bosque avait dit à ses camarades qu'ils étaient libres, et qu'ils se proposaient d'aller un beau jour Chez le commandant pour lui demander leur congé. Que le déposant dit alors à ce soldat de ne pas croire de telles folies, car ils seraient certainement punis, s'ils le faisaient.
Garrot, septième témoin, fut alors appelé; « que ce n'était pas M. Bosque qui leur avait « suggéré de demander leur liberté, mais que c cette idée leur venait de ce qu'ils avaient « entendu dire ce qui s'était passé en France. »
Seizième témoin.
Damelet, soldat dans le même régiment, déclare que M. Bosque lui a dit que les soldats étaient maintenant libres d'aller où 11 leur plairait; que,, passant devant la maison où l'assemblée,patriotique se tenait, il fut appelé pour signer un papier qui lui fut présenté par M. Bosque, ce qu'il fit, et jura « d'être fidèle à la nation, au roi et à loi » et de ne jamais abandonner son roi ni ses drapeaux.
Dix-septième témoin.
Chapp, tailleur dans la ville de Port-Louis, déclare que le prisonnier, M. Bosque, vint à lui avec un papier « contenant une liste de plusieurs * personnes, et dit qu'ils étaient peu de Français. « qu'ils devaient se soutenir » ; qu'il désirerait faire une bourse, afin d'acheter des rubaus pour la troupe, et qu il désirait donner un dîner et quatre barriques de vin pour la compagnie de Gordelier, et un bal le soir, et qu'il devait y avoir un pavillon national et parades dans les rues avec cela. Le déposant, ayant été interrogé s'il connaissait le serment, oit ; « qu'il était d'ob-« server un bon ordre dans rassemblée, et la « sûreté publique de la nation et de l'assemblée « patriotique; il dit aussi que les cocardes de-« vaient d'abord être présentées aux chefs de « l'administration, et demander leur consente-« ment pour donner la fête; qu'ils devaient « encore faire une bourse pour l'envoyer pour « soulager les veuves et les enfants de ceux qui « étaient morts en défendant la glorieuse cause « de la liberté; qu'ils devaient aussi faire une « lettre de remerciements à l'Assemblée natio-« nale, par leursdéputés, auquel emploi M. Bosque « espérait d'être nommé ; que l'intention del'as-« semblée patriotique était d'inviter tous les « habitants 4c cette île à cette fôte, et de nommer
« quatre commissaires de police pour ia ville « de Port-Louis, afin de maintenir le bon ordre « dans l'assemblée. >
Dix-huitième témoin.
Bonnafond, soldat dans le même régiment, déclare qu'il s'est trouvé, avec quelques-uns de ses camarades, à l'assemblée patriotique, où un papier lui fut présenté à signer, ce qu'il fit, et Jura o d'être fidèle à la nation, au roi et à la loi ».
Dix-neuvième témoin.
Beaulieu (1), soldat dans le même régiment, déclare qu'il n'a jamais eu aucune conversation avec M. Bosque, et que la première fois qu'il se trouva à l'assemblée patriotique, il y vit un grand nombre de personnes, et que, comme il avait plus de faim que de curiosité, il s'en fut souper; et qu'une autre fois qu'il s'y trouva, il vit plusieurs citoyens arrêtés dans la rue, qui lui demandèrent s'il n'avait pas signé le serment; il leur répondit que non : que, passant la maison, le petit homme de la maréchaussée lui fit signe, de la fenêtre, de venir, et qu'étant là, on lui présenta un papier, qui était sa liberté pour lui et toute la nation, lequel il signa, et jura « d'être fidèle à la nation, au. roi et à la loi (2) ».
Gh déposant fut appelé une seconde fois, après le dix-neuvième témoin, et dit qu'il ne connaissait rien de ce que le prisonnier Bosque a dit aux soldats; qu'il s'est trouvé une fois à l'assemblée patriotique environ dix minutes, mais qu'il n'a jamais signé de papier ni prêté serment; mais que M. Bosque lui dit : Vous voyez ce que nous avons fait pour vous, et nous espérons que vous en ferez autant pour nous.
N. B. Ce témoin n'a paru qu'une fois.
Vingtième témoin,
William Smith, prévôt-maréchal, déclare qu'un jour étant dans la galerie de M. Fullerton, à se faire peigner par un nommé Gauthier, soldat dans le régiment de la Guadeloupe, il entendit M. Bosque dire à ce soldat : Vous savez ce que nous avons fait pour vous, j'espère que, dans l'occasion, vous ne nous manquerez pas.
Total des témoins entendus contre le prisonnier.
EXTRAIT des dépositions prises contre MM. Grelier
et Guys, le 14 novembre 1789, et certifiées par
MM. Roume de Saint-Laurent, de Chancel,
P.-A. Dufaur, W. Ivrine et Edmond Saint-Léger.
Septième témoin.
Tourtier, de la compagnie de M. Cordelier. Il y a cinq semaines qu'il dîna chez Bosque, Bosque lui fit la lecture d'un écrit sur les Caraïbes. Quelques jours après, le sieur Bosque lui-lut la
gazette de Sainte-Lucie, « lui fit valoir la géné- « rosité des habitants dè cette lie, et lui proposa « de signer une souscription en faveur des « veuves et des orphelins de ceux qui ont été « tués en France ». Le déposant répondit qu'il ne pouvait le faire, étant subordonné à ses officiers; mais qu'il contribuerait à cette bonne œuvre, autant qu'il en aurait le moyen. Le sieur Bosque « lui proposa de copier deux lettres cir- « culaires d invitation, pour engager le public k « s'assembler », il les copia. Bosque, ne lés trouvant pas assez bien écrites, les déchira. Le déposant fut une foi3 à l'assemblée patriotique ; il y vit une grande cohue de bourgeois et de mili* taires. Le commis du sieur Bosque lui présenta un papier pour signer, ce qu'il refusa. Etant un soir chez le sieur Bosque, celui-ci lui proposa de faire prendrè la cocarde à la compagnie de Cordelier, ce qu'il refusa, comme étant contraire à ses devoirs, et cessa d'avoir ensuite des communications avec le sieur Bosque... M. le maire lui ayant dit que M. Bosque s'était vanté d'avoir la compagnie de M. Cordelier à ses ordres, il fut en prévenir son capitaine, qui traita cela comme une gazette. Excepté la proposition de prendre la coqarde, Bosque ne lui a jamais rien proposé qui fut mal.
Témoignage pris de la part du prisonnier Bosque.
Premier témoin,
M. Wyatt, commis dans le bureau de l'ordonnateur, déclare qu'il a connaissance d'une « lettre circulaire, invitant tous les habitants de « l'Ile à se trouver un certain jour à la maison « de Langouëran, pour former une assemblée patriotique, laquelle était Bignée par Charles « Bosque » ; mais s'ils la reçurent ou non, il n'en « sait rien.
Un jour, après dîner, il se trouva « à la maison « du prisonnier, où étaient plusieurs personnes, « et M. Bosque lui dit que le matin il avait été « mis aux arrêts par le procureur général, mais « qu'il -en avait été relevé par M. le comman- « dant ». Que le déposant se trouva le soir avec le prisonnier et une autre personne à l'assemblée, où il vit plusieurs personnes, comme MM. Grelier, Fremin ; qu'il ne se passa rien, si ce n'est le choix du président, vice-président et du secrétaire. « Qu'ils signèrent une demande « à MM. les administrateurs d'approuver l'as-- semblée et de la protéger. Que « M- Bosque fit « plusieurs motions à l'assemblée, toutes ten -« dant au maintien de la paix et du bon ordre, « et au bien général «î Quatre membres furent « nommés pour présenter leur demande à M^. les « administrateurs, qui, étant de retour, décla- « rèrentque le commandant avait refusé de les « voir ». « Qu'on fit une motion de faire imprimer « une lettre circulaire, pour envoyer aux habite tants de la colonie, pour les inviter de se « joindre à l'assemblée ; qu'il a été présent à « plusieurs de leurs assemblées, et qu'il n'a ja- « mais rien vu qui ne fût décent et honnête « dans la conduite de M. Bosque. >
Deuxième témoin,
M. Lafond, commis-greffier de l'amirauté, « fit la même déposition que M. Wyatt ».
Troisième témoin.
M. Blanchard, marchand de rhum, par permission du gouvernement, déclare que la première fois qu'il entendit parler de l'assemblée patriotique, M. Bosque, le prisonnier, lui dit qu'il avait intention d'assembler les citoyens du Port-Louis, de la mauière qu'ils l'avaient été dans l'île de Sainte-Lucie, et qu'il n'y avait pas d'autres intentions. Qu'il n'a jamais entendu dire que leur inteotion était de s'arroger quelques autorités législatives et de changer les lois existant dans la colonie.
Quatrième témoin.
M. Sauveur, dito, déclare la même chose que le témoin précédent, et que M. Fadeuilhe désap-
Î)rouva que l'on eût permis aux soldats de signer e serment, mais qu'il ne se rappelle pas si M. Bosque seconda M. Fadeuilhe ou non.
Je certifie que les minutes ci-dessus étaient prises par moi, un des juges du banc du roi.
Tho : Wilson.
Jugement contre le sieur Bosque.
Extrait de la séance de la cour d'Oïer et Terminer, tenue au Port-Louis-Tabago, le 16 novembre 1789.
Présents : MM. Roume de Saint-Laurent, Hue de Fagan, Thomas Wilson, Gilbert Pétrie, Paul-Antoine Dufaur, Christophe W. Irvine, Natha-niel Stewai t. La cour ayant été proclamée, etc., etc. Ledit Charles Bosque ayant été amené à la barre, la cour a prononcé jugement contre lui, que ledit Charles Bosque, ayant été trouvé coupable des faits énonces dans le susdit indicte-ment, « sera emprisonné pendant l'espace de « six mois de ce jour, sera mis et restera au « carcan depuis midi jusqu'à une heure, le 16 du mois de mai prochain; à moins qu'à « l'expiration des six semaines, à dater de ce « jour, il ne signifie, à deux juges quelconques « de cette cour, qu'il est consentant de partir de « cette colonie et dé n'y jamais revenir; et ce « sous son serment; auquel cas », lesdits juges feront enregistrer ledit serment et ladite requête sur les registres de cetté cour, et ils demanderont à M. le commandant en chef la permission pour gue ledit Bosque parte, sans préjudicier à ses créanciers. Collationné par moi, secrétaire de la Couronne.
G. Wightman.
Tabago.
De la séance de la cour de chancellerie, tenue le 16 novembre, en a été extrait ce qui suit :
Présents : MM. le chevalier de Jobal,- commandant eu chef, Roume de Saint-Laurent, com-
missaire général ordonnateur; Gilbert Pétrie, conseiller.
La cour ayant pris séance,
M® Fadeuilhe, avocat, au nom de plusieurs de ses clients,créanciers du sieur Charles Bosque, prie la cour, pour la conservation des biens dudit sieur Bosque et pour la sûreté de ses créanciers, de nommer pour séquestre à ses biens, meubles et immeubles, telle personne qu'elle jugera capable.
La cour, prenant en considération la demande, a nommé M. Gauthier, avocat en cette cour, séquestre des biens dudit sieur Bosque.
La cour fut ajournée à mardi 24 du présent mois (1).
Certifié par Charles Wightman, secrétaire, pour copie conforme.
C. Wightman, secrétaire de chancellerie.
Saint-Pierre-Martinique, le
Nous, les soussignés volontaires de la colonie de Tabago, actuellement en cette île,
Déclarons et attestons, par ces présentes, que le sieur Charles Bosque, avocat en l'Ile de Tabago, s'y est conduit avec intégrité, désintéressement et zèle pour ses clients, en sa qualité d'homme public; et qu'en qualité de citoyen français, il y a donné les plus grands exemples de son patriotisme et de l'empressement avec lequel il s'est employé pour former, à Tabago, une assemblée patriotique.
Nous déclarons, en outre, que plusieurs d'entre nous avons été membres de ladite assemblée, ou y avons assisté, et qu'il ne s'y est rien passé qui ne fasse honneur aux citoyens français de Tabago.
En foi de quoi nous avons signé :
Segain, E. Lafond, Bigé, J. Cbapp, Dumont, Cocquenet, Blanchard, Laneau, Foulimé, Marchand, porte-drapeau ; Stofbach, Barbin, Guenon, Fouquet, Perrein, Baïeu, Auguste Fiot, Jean Mignac, G. Audibert, Têtard, Gaspard, Roedelberg, Vrignault' aîné.
N'étant pas à Tabago dans le temps où M. Bosque y a exercé les fonctions d'avocat, je ne puis cependant m'empêcher de dire que l'on me l'a toujours cité comme un galant et parfait honnête homme.
Saint-Pierre-Martinique, cp
Mont-Louis, lieutenant.
Nous, commissaires nommés par l'assemblée générale, section de la bibliothèque (ci-devant des filles Saint-Thomas), à l'effet de collatiùnmr les pièces justificatives ci-dessus et des autres parts, certifions qu'elles sont conformes aux originaux qui nous ont été présentés par le sieur Bosque.
A Paris, le
J. Hugou, J. C. Magol, Lavallée, Vitry, notable adjoint, L. Milly.
a la séance de l'assemblée nationale du
adresse présentée à VAssemblée nationale par la majorité des sections de Paris.
Le drapeau de la liberté n'est point encore arboré sur tous les murs français; il est des villes, au delà des mers, qui tiennent à cet Empire, qui renferment des esclaves et des tyrans ; et quand des millions d'hommes sentent déjà l'heureuse influence de vos décrets, quelques malheureux, épars dans nos colonies, restent encore opprimés eous la verge infatigable du despotisme.
Le sieur Jobal, commandant de l'île de Tabago en l'absence de M. de Dillon qui en est le gouverneur, est un de ces hommes que nous pourrions dénoncer comme effrayés du cri qui proclama la liberté, de ce cri qui demanda avec tant de force qu'il n'y eût plus de maître que la loi... et c'est aussi lui que nous vous dénonçons. Il a proscrit de Tabago tous les citoyens qui, en admirant votre sagesse, puisaient leur conduite dans vos décrets. Nous avons trouvé la preuve des délits graves, des délits publics qui ont compromis l'honneur de la nation française, insulté l'étendard de la liberté et attaqué dans ses fondements la Constitution.
La colonie de Tabago, depuis sa conquête, est restée sous le régime des lois anglaises et soumise à nos principes d'administration. Oubliée par le ministre, elle aurait ignoré vos décrets si les nouvelles de différents ports des îles voisines ne lui eussent appris ce qui se passait en France.
Le sieur Jobal commandait alors dans cette île pour faire exécuter la loi, et chaque jour il l'enfreignait; il opposait sa seule volonté aux lois qu'il ne devait pas même interpréter; la justice parvenait quelquefois à dicter ses arrêts, mais bientôt il en suspendait l'exécution;, 2 officiers publics sont emprisonnés pour l'avoir invoquée en faveur d'un opprimé; un arpenteur, accusé du crime de faux et interdit légalement par les tribunaux, est rétabli par l'autorité de ce commandant, pour donner lieu à un nouveau crime. Ne respectant pas même les bienséances, il se transporte chez le trésorier de la colonie, à la tête de 4 fusiliers, et lui enlève une pièce de comptabilité qui appartient exclusivement à son collègue l'ordonnateur. Il ne souffre pas qu'un homme condamné par les premiers juges en appelle aux seconds, c'est-à-dire qu'il veut des juges et qu'il n'en veut pas ; ainsi, par cet acte de despotisme le plus insensé, il prouve lui-même que les premiers juges étaient à sa dévotion. Il commande pour protéger les citoyens, pour assurer à tous leur état et leur propriété, il est le premier à les leur enlever, et lorsqu'un homme de loi réclame contre une pareille tyrannie, il lui défend d'exercer ses fonctions, sous prétexte qu'il ne doit compte de sa conduite qu'au roi, c'est-à-dire au ministre.
7 familles indiennes sont dépouillées du terrain dont il avait lui-même confirmé la propriété sous la protection spéciale du roi ; d'un terrain qu'elles avaient défriché, sur lequel elles avaient construit leurs habitations; d'un terrain dont elles étaient en possession avant que l'îje de Tabago fut réunie à la France.
Tel est l'empire qu'exerce le sieur Jobal, de-
puis qu'il a entre les mains les rênes du gouvernement.
Au moment que des citoyens de Tabago, animés du même esprit qui transportait et électri-sait toute la France, se forment en assemblée patriotique, c'est un crime aux yeux du sieur Jobal de porter des cocardes, de recevoir, pour la nation, pour la loi et pour le roi, le serment des citoyens et des soldats; ceux qui excitent le plus son indignation sont les président, vice-président et secrétaire de cette assemblée.
Nous ne dous arrêterons pas, Messieurs, à vous faire ici une peinture circonstanciée des crimes détaillés dans les mémoires du sieur Bosque, présentés à l'Assemblée nationale, et dans le rapport des commissaires de la section de la bibliothèque, et que nous avons vérifié sur le3 originaux; mais quand le sieur Jobal, ayant fait condamner par un tribunal de sa création le sieur Bosque à 6 mois de prison, à une heure de carcan, le lire de son cachot, au bout de 6 semaines, pour lui donner l'option du carcan ou de l'exil, vous attendez-vous que, refusant de le laisser passer dans une colonie française, par un raffinement de cruauté, il le fera jeter a la pointe de la Trinité espagnole, sur une plage déserte, où il n'a d'autre compagnon qu'un meurtrier anglais et la triste perspective d'habiter parmi les sauvages de cette contrée.
Nous devons, Messieurs, vous montrer ces sauvages embarqués dans un frêle canot, bravant les flots orageux, pour conduire au port un infortuné. Ces sauvages,qui transportent ainsi l'opprimé pour l'opposeraujourd'huià son oppresseur, nous semblent tellement conduits par la Providence que nous croyons devoir nous arrêter sur ce tableau.
Cette même Providence, qui ne laisse rien d'impuni, amène encore sur cette terre éclairée des rayons de la liberté, les président, vice président de l'assemblée patriotique de Tabago, et autres victimes de l'autorité arbitraire du sieur Jobal, pour réclamer la justice que tous les Français ont droit d'attendre de l'Assemblée nationalè.
La majorité des sections de Paris vous supplie, en conséquence, Messieurs, d'ordonner :
1° Le renvoi de cette affaire devant les commissaires pris dans votre sein, pour, sur les mémoires et pièces qui leur seront fournis, vous en faire leur rapport, et vous mettre en état, dans le plus court délai, d'ordonner et de décréter ce qu'il appartiendra, en ce qui intéresse la nation ;
2° De décréter que le roi sera supplié d'envoyer un autre officier à Tabago, pour remplacer le sieur Jobal, lequel sera mandé pour rendre compte de sa conduite ;
3° D'indiquer à quel tribunal le sieur Bosque, les président, vice-président {de l'assemblée patriotique de Tabago, et tous les autres habitants de cette île, s'adresseront pour faire statuer et prononcer sur ce qui leur est personnel et obtenir prompte et brève justice.
Signé : M. A. Bourdon-Vatry, commissaire de la section du faubourg Saint-Denis.
J. B. Laffite, commissaire de la section de l'Observatoire.
Alletz le jeune, commissaire de la section Grange-Batelière.
Bonvalet, commissaire de la section des Lombards.
Ghappion, président et commissaire de la section des Termes de Julien.
La Rivière Semur, commissaire de la section de la Bibliothèque.
Roland-Huguet, commissaire de la section des Gobelins.
Bourderelle, commissaire de la section de la Place royale.
Quiret, commissaire de la section des Quatre-Nations.
Adam, commissaire de la section de Popincourt.
Leroy, commissaire de la section de Pile Saint-Louis.
Gardon, commissaire de la section Poissonnière.
Fauché, commissaire de la section des Gravil-liers.
L. Lanelle du Mesnii, commissaire de la section du Temple.
Desvieux, commissaire de la section (des Postes.
Petit de La Fosse, commissaire de la section du Louvre.
De La Poize, commissaire de la section Mau-conseil.
. Cauthion, commissaire de la section des Quinze-Vingts.
Sauhier, commissaire de la section du faubourg Montmartre.
ViJlain d'Aubigni, commissaire de la section des Tuileries.
Léger, commissaire de ia section de l'Oratoire, i Le Monnier, commissaire de la section de l'Hôtel de Ville.
Eynaud, commissaire de la section.
Gnevallerie, commissaire de la section des Champs-Elysées.
Bayard, commissaire de la section de Sainte-Geneviève.
Bourgeois, commissaire de la section de Montmorency.
D'Àuxon, président.
Meunier Descloseaux, commissaire de la section de l'Arsenal et secrétaire.
N. J. Hugou ( de Bassville), commissaire rapporteur de la section de la Bibliothèque.
présidence de m. duport. Séance du
La séance est ouverte à dix heures du matin.
Un de MM. les secrétaires donné lecture des procès-verbaux des deux séances d'hier au matin et au soir, qui sont adoptés.
Dans l'article 16 du décret que vous avez rendu hier concernant le droit de patente, le mot comestibles me paraît trop vague et susceptible d'amener dans la suite, suivant l'interprétation qu'on en voudra donner, une diminution du revenu de l'impôt que vous avez établi; il èst à craindre, en effet, qu'un grand nombre d'objets que l'Assemblée n'a pas prétendu exempter du droit, ne soient soustraits à la perception. Pour prévenir toute difficulté, la loi devrait renfermer une nomenclature exacte de tous les objets qui pourront être vendus sans que
les vendeurs soient tenus de payer le droit d patente.
Je propose, en conséquence, qu'au mot trop énergique de comestibles, on substitue ceux de fruits, légumes, poissons, beurre, œufs, etc.
(de Saint-Jean-d'Angély). J'appuie l'opinion de M. Bouche; il est important d'indiquer au peuple les objets qui ne seront pas atteints par l'impôt. J'observerai de plus qu'il se vend dans les rues des objets uniquement destinés à la table des riches, tels que certains poissons qui valent quelquefois jusqu'à 50 écus la pièce; il faut que ces poissons-là soientimposés.
Il faut enfin faire connaître au peuple que la Révolution est particulièrement faite pour lui et tend à son soulagement.
Je demande le renvoi au comité en le chargeant de nous présenter ses vues dans le plus court délai.
L'Assemblée n'a entendu par 1er que des menus comestibles.
On pourra aussi mettre un bœuf dans la classe des menus comestibles en le vendant par morceaux. J'insiste sur ma proposition.
(L'Assemblée renvoie ia motion au comité d'imposition pour présenter ses vues et un décret déterminant les objets qu'on pourra vendre ou revendre dans les nalles, places et marchés publics.)
Un membre : Je demande que le comité soit aussi chargé de vous présenter une disposition particulière pour les patentes des maîtres d'bô-tels garnis. Les limonadiers, les traiteurs ne font que des avances qu'ils recouvrent avec le temps sur les particuliers sur lesquels seuls cet impôt tombe; mais il n'en est pas ainsi des loueurs d'hôtels garnis dont les logements sont vides la moitié de l'année et qui n'auront jamais le moyen de récupérer les avances qu'ils auront faites pour leurs patentes.
D'autre part, les hôtels garnis sont, dans les mains de ceux qui les exploitent, ce qu'est la marchandise entre les mains des marchands. Vous ne faites payer le marchand qu'en raison de son loyer ; serait-il juste d'adopter pour le maître d'hôtel garni une autre mesure et de le faire payer à raison de toute la valeur qu'il èxploite? (Murmures.)
(de Saint-Jean-d*Angély). Avec de pareilles réclamations, tous les décrets finiraient par n'avoir plus aucune consistance; l'Assemblée ne peut pas ainsi revenir légèrement sur une disposition qu'elle a adoptée. D'ailleurs, à l'égard de l'article dont il s'agit, les hôteliers et aubergistes ne manqueront pas de répartir le montant de leur impôt sur le prix de leurs différents loyers, et de cette façon le droit se trouvera toujours à la charge d> s étrangers qu'on ne peut saisir d'une autre manière. (L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
donne lecture à l'Assemblée d'une lettre de M. Bouchotte, député, qui demande, pour raison de santé, un congé de deux mois.
(Ce congé est accordé.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture de la note suivante adressée par le ministre de la justice à M. le président de l'Assemblée :
« Le roi a donné, le 11 de ce mois, son acceptation ou sa sanction:
« 1° Au décret de l'Assemblée nationale, du 27 juin dernier, relatif aux arrérages des pensions échues au 31 décembre 1789, et à la prorogation de la suspension ordonnée par le décret des 4 et 5 janvier 1790, du payement de toutes pensions, traitements conservés, dons et gratifications annuels ;
« 2° Au décret du 3 février présent mois, concernant les matelots et autres gens de mer qui, au désarmement des vaisseaux de l'Etat, voyageront pour retourner dans leurs quartiers;
« 3° Au décret du même jour, relatif aux dispenses de mariages aux degrés prohibés ;
« 4° Au décret du même jour, concernant les bois d'Avesnes ou Gratte-Sac,situés dans le département de la Sarthe ;
« 5° Au décret du même jour, concernant le principal et les professeurs du collège de Poitiers ;
« 6° Au décret du même jour, relatif à l'imposition de 452,513 livres ordonnée par arrêt du conseil en remplacement des corvées, dans les départements de la Charente-Inférieure et des Deux-Sèvres ;
« 7° Au décret du 4, relatif à la circonscription des paroisses de Paris ;
« 8° Au décret du même jour, concernant la suspension, à l'égard des commis actuellement en fonctions, de l'exécution du décret du 7 août sur l'administration générale des départements du ministère ;
« 9° Au décret du même jour, relatif à la nomination de juges de paix, à l'établissement de tribunaux de commerce dans différentes villes et à la distraction et union de plusieurs communes;
« 10° Au décret du même jour, relatif à la circonscription des paroisses de la ville de Poitiers;
« 11° Au décret du 5, relatif à la décoration militaire à donner aux officiers de la marine et aux officiers militaires des corps des colonies dépendant de ce département ;
« 12* Au décret du même jour, relatif à la durée des baux que pourront faire les corps, maisons, communautés et établissements publics, tant ecclésiastiques que laïcs, conservés ;
« 13° Au décret du même jour, relatif à la justification de M. Claude-Ambroise Régnier, député à l'Assemblée nationale ;
«14° Au décret du 6, relatif à la suppression de la signature et émission des assignats de 2,000 livres lorsque la quantité de 150,000 desdits assignats, formant la somme de 300 millions, sera complète;
« 15° Au décret du même joui*, relatif au payement d'indemnités aux porteurs y désignés de brevets de retenue j
« 16° Au décret du même jour, concernant la remise à faire au commissaire de la liquidation des états de gages, traitements et appointements des différents départements, arrêtés au conseil ;
« 17° Au décret du 7, relatif au compte que les corps administratifs seront tenus de rendre à l'Assemblée nationale, de la manière dont ils ont formé leur établissement ;
« Et à quelques emprunts et impositions qui pourraient être faits et établis par eux sur les administrés ;
« 18° Au décret du même jour, concernant le timbre ;
« 19° Et le 13, au décret du 11, relatif aux événements qui ont eu lieu dans les départements
du Haut et du Bas-Rhin, à la conduite des administrateurs de ce dernier département et à la dénonciation qu'ils ont faite contre les commissaires du roi envoyés dans ces départements ;
« 20° Et enfin au décret du 19 décembre dernier, concernant la vente de biens nationaux à la municipalité de Dye.
« Le ministre de la justice transmet à M. le Président les doubles minutes de ces décrets, sur chacune desquelles est l'acceptation ou la sanction du roi.
Signé : M.-L.-F.DUPORT.
« A Paris, le
M. le garde des sceaux m'a écrit une lettre relativement à une difficulté sur la sanction d'un de vos décrets. La voici :
Monsieur le Président, sur la proposition que j'ai faite au roi de sanctionner le décret de 6a liste civile du 10 juin 1790, présenté le 21 janvier dernier, Sa Majesté m'a chargé d'observer à l'Assemblée natiouale que le décret, se référant aux dispositions et demandes renfermées en sa lettre du 9, ne contient pas de dispositions ; et qu'il serait peut-être convenable d'ordonner l'insertion de la lettre dans le décret même pour donner à la loi son complément et sa perfection. Je vous prie, Monsieur le Président, de vouloir bien proposer à l'Assemblée nationale cette observation de Sa Majesté.
« Je suis avec respect, etc.
« Signé : M.-L.-F. DUPORT. »
Toute prononciation du Corps législatif est un décret qui doit être accepté ou sanctionné ; la liste civile est un objet de si grand intérêt pour tous les Français, qu'il faut qu'elle paraisse aux yeux de tous avec les caractères les plus augustes de la loi.
Une lettre du roi antérieure au décret de l'Assemblée ne peut pas donner à celui-ci le caractère de loi.
J'observe en second lieu que le décret que nous avons rendu ne contient pas de dispositif et il lui en faut un. L'Assemblée peut se rappeler la manière dont la liste civile a été adoptée; on a lu la lettre du roi du 9 juin et on en a accepté sur-le-champ les propositions ; mais il n'y a pas eu de rédaction de décret. Or, cette rédaction est nécessaire ; car il faut spécifier que la somme votée sera pour tels et tels objets.
Je demande donc que la lettre de M. le garde des sceaux soit renvoyée aux comités de Constitution et des finances pour présenter le plus tôt possible leurs vues et un projet de décret sur cet objet.
(La motion de M. Camus est décrétée.)
J'ai reçu une lettre des sous-fermiers de la messagerie de Genève, qui se plaignent qu'ayant expédié 16 coupes formant ensemble la somme de 31,171 livres, objets en retour de marchandises et pour rentes viagères dues en Suisse, le conducteur a été arrêté et retenu au bureau de Saint-Geois. Le commis de ce bureau, se fondant sur un ordre du ministre du 30 septembre 1783, renouvelé en 1789, n'a pas voulu se départir de sa saisie.
La messagerie de Genève demande que l'Assemblée nationale veuille bien ordonner la remise des espèces, ou pour leur destination, ou pour Lyon, d'où elles ont été expédiées, et de
statuer à ce que le public et les messageries, qui sont leurs agents de confiance, ne soient point exposés à de pareilles arrestations.
L'Assemblée a déjà rendu des décrets sur cette matière; c'est le cas de renvoyer l'affaire au pouvoir exécutif.
Plusieurs membres appuient cette motion.
(Le renvoi au pouvoir exécutif est décrété.)
au nom du comité des finances. Je suis chargé par le comité des finances d'informer l'Assemblée que la pétition de Paris qui lui a été renvoyée hier sera retardée de- quelques jours par la raison que, quelque instante et quelque grave que puisse être cette demande, comme le département est formé, nous avons cru devoir suivre la règle ordinaire, qui était avant tout d'avoir l'avis du département.
au nom du comité daliénation. D'après l'erreur commise par les experts qui ont estimé les cens et rentes dues à la maison prieu-rale de Saint-Martin-de-Brive, au-dessus du taux auquel vous en avez fixé le rachat, je vous proposé le décret suivant :
« Sur la représentation qui a été faite à l'Assemblée nationale d'une erreur commise par les experts qui ont fait l'estimation des biens aliénés à la municipalité de Brive, dans l'évaluation de la maison prieurale de Saint-Martin-de-Brive et des cens et rentes, à un prix au-dessus des bases posées par les décrets de l'Assemblée, et pour lesdits cens et rentes au-dessus du taux auquel l'Assemblée a fixé le rachat : vu l'opinion du directoire de district de Brive et l'avis du directoire de département de la Gorrèze, et ouï le rapport Lde son comité d'aliénation, l'Assemblée nationale décrète qu'il sera incessamment procédé à une nouvelle estimation desdits cens et rentes, et de ladite maison, par experts que nommera le directoire du district, et conformément aux règles établies par les décrets, pour, d'après ladite nouvelle estimation, être rendu en faveur de la municipalité de Brive, un nouveau décret d'aliénation de ladite maison et drsdits cens et rentes; le surplus du décret rendu le 23 janvier 1791, ayant son plein et entier effet. »
(Ge décret est adopté.)
au nom du comité daliénation, présente le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites suivant les formes prescrites, déclare vendre les biens nationaux dont l'état est annexé aux pro-cès-verbaux respectifs des évaluations ou estimations desdits biens, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, payables de la manière déterminée par le même décret, savoir :
Département du Puy-de-Dôme.
A la municipalité de Riom, pour la somme de 749,436 1. 12 s. » d.
A celle de Combroude, pour celle de.......... 126,545 10 »
A celle de Volvic, pour celle de............... 15,187 16 »
A celle de Beauregard-
Vendon, pour celle de .. 5,040 1. » s. »
A celle de Charbonières-
les-Vieilles, pour celle de 9,424 10 »
A celle de Ghapde, pour 31,530
celle de................ 4 »
A celle de Thiers, pour
celle de................ 193,176 > »
A celle de Laps, pour 8,711
celle de............... 12 »
A celle de Dallet, pour
celle de............... 19,489 16 2
A celle d'Ambert, pour
celle de............... 536,309 16 6
A celle d'Issoire, pour
celle de............... 284,162 » »
A celle d'Aigueperse,
pour celle de........... 32,541 11 »
A celle de Puiguillau-
me, pour celle de...... 189,755 1 »
Département de la Gironde
A la municipalité de
Blaye, pour celle de .... 293,078 » »
A celle de Bourg, pour
celle de..............................584,675 » »
« Le tout ainsi qu'il est plus au long détaillé dans les décrets de vente et états d'estimations respectifs, annexés à la minute du procès-verbal de ce jour. »
(Ge décret est adopté.)
au nom du comité d'aliénation. Il s'est élevé une contestation entre la municipalité de Romaniac et celle de Glermont-Ferrand sur ce qu'elles ont toutes deux fait des soumissions pour 1 aliénation des mêmes, biens. Sur cette affaire, le comité pense que le décret obtenu par la municipalité de Glermont-Ferrand doit subsister comme il a été rendu, et qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur les réclamations de celle de Romaniac.
Je suis surpris que l'on cherche à éluder celte question fort importante. La municipalité de Romaniac, dès le 8 septembre, avait fait sa soumission à notre comité avec désignation pour acquérir les biens y compris; vous devez, Messieurs, lui accorder la priorité, puisque sa soumission est antérieure.
Je demande, en conséquence, que les articles compris dans cette soumission et dans le procès-verbal d'estimation soient rayés du décret d'aliénation qui a été rendu en faveur de la municipalité de Glermont et que le décret d'aliénation soit expédié à la municipalité de Romaniac.
Je demande la parole.
Un grand nombre de membres: Aux voixl
L'Assemblée adopte la motion de M. Armand, et décrète ce qui suit :
« L'Assemblée nationale décrète que la priorité est acquise à la municipalité de Romaniac, pour l'acquisition des domaines nationaux situés dans son territoire, désignés dans la soumission de ladite municipalité, du 8 septembre dernier, reçue au comité le 14 du môme mois, et dans le procès-verbal d'estimations du 28 décembre suivant; décrète, en conséquence, que les objets dont il
s'agit seront rayés du décret rendu pour ladite municipalité de Glermont-Ferrand, le 30 janvier dernier, et que la vente en sera faite en faveur de ladite municipalité de Romaniac. »
L'ordre du jour est la discussion d'un projet de décret du comité des finances, concernant la fixation de la totalité des sommes à lever pour la totalité des dépenses de Vannée 1791.
rapporteur du comité des finances. Messieurs, ce n'est point un nouveau rapport que je vais vous faire. J'ai déjà eu l'honneur de vous rendre compte, au nom du comité des finances, des dépenses qui devaient être faites en 1791, et de la manière dont le comité était d'avis qu'elles fussent divisées. Ce rapport, suivi d'un état détaillé des dépenses, a été imprimé et distribué (1) ; et je suis ici plutôt pour répondre aux objections qui pourront être faites que pour ajouter de nouveaux développements aux dispositions que nous avolis présentées et que nous avons eu l'honneur de vous remettre.
Si l'Assemblée veut rendre un décret pour que le comité de l'imposition lui présente son travail d'après les calculs et bases que nous avons soumis à l'Assemblée, j'aurai l'honneur de lui présenter un projet à cet égard. Cependant, si l'Assemblée veut entendre les objections que l'on peut faire aux calculs présentés par le comité des finances, j'invite ceux qui en ont à les présenter.
Si personne ne se présente pour combattre les calculs du comité, je vais lire le projet de décret
3ui contient en masse les objets de dépenses ont je vous ai présenté le détail : « Art. 1er. Il sera fait fonds au Trésor public en 1791, tant par les revenus ordinaires de l'Etat que par les impositions générales et communes : 1° d'une somme de 280 millions de livres pour acquitter toutes les dépenses attribuées au culte, à la liste civile, aux apanagistes, aux départements des affaires étrangères, de la guerre, y compris les auxiliaires et la gendarmerie nationale, de la marine et des colonies, des ponts et chaussées, aux ministres et au conseil, aux bureaux et frais d'administration du Trésor public, de la caisse de l'extraordinaire, de la liquidation générale et de la comptabilité, aux primes et encouragements pour le commerce, à l'école des menus et aux dépôts publics, au jardin et à la bibliothèque du roi, aux universités, académies et travaux littéraires, aux Invalides et aux Q jinze-Yingts, aux frais de l'Assemblée nationale, de la haute cour nationale et du tribunal de cassation; 2° d'une somme de 302 millions de livres pour acquitter le traitement des ecclésiastiques et religieux des deux sexes, supprimés, le secours accordé aux apanagistes en faveur de leurs créanciers ou pour indemnité, les pensions de l'Etat, celles accordées aux Hollandais et Aca-diens, et les intérêts de la dette publique, tant perpétuelle que viagère constituée ou non constituée, lesquelles deux sommes réunies montent à 582 millions.
Art. 2. La caisse de l'extraordinaire devant, en exécution du décret du 6
décembre dernier, verser au Trésor public 60 millions sur les revenus
des domaines nationaux, qu'elle est chargée de recevoir, le comité de
l'imposition présentera à l'Assemblée les moyens de fournir au
« Art. 3. Indépendamment des sommes ci-dessus, il sera pourvu à un fonds particulier de 59 millions, pour acquitter les dépenses de l'administration de la justice et des frais de prisonniers, des corps administratifs, des grands chemins, des entretiens de bâtiments publics, de la perception des impôts, et des secours accordés aux hôpitaux, aux enfants trouvés et aux dépôts de mendicité.
c Art. 4. La caisse de l'extraordinaire fera les avances nécessaires pour acquitter en 1791:1° la somme accordée par le décret du 16 décembre 1790 pour être distribuée à titre de secours aux 83 départements; 2° celle qui sera décrétée par les travaux extraordinaires dans les ports maritimes; 3° celle des ateliers entretenus à Paris; 4° les frais attachés à la prolongation ou au renouvellement de l'Assemblée nationale; 5° les fonds d'équipement des auxiliaires; 6° la dépense d'augmentation de l'armée et des approvisionnements y relatifs; 7° les 3 millions qui restent à acquitter pour réparer nos forteresses; 8° l'expédition extraordinaire décrétée pour les îles d'Amérique, le 11 février 1791; 9° une réserve de 20 millions pour suppléée aux dépenses résultant de l'apurement de tous les comptes; le tout conformément aux différents décrets qui seront rendus par l'Assemblée nationale. »
J'observe à l'Assemblée que, dans son rapport* le comité a mis pour mémoire les dettes des ci-devant provinces des pays d'Etats. Avant de se déterminer sur les besoins de 1791, il faut examiner quel sera le parti de l'Assemblée sur cet objet; à mon sens, les dettes des provinces doivent être à la charge du Trésor public.
Il y a à cet égard un travail préparé par un membre du comité des finances et par plusieurs comités réunis; je demande que la proposition actuelle de M. de Montesquiou soit ajournée jusqu'au rapport, qui doit être fait incessamment, sur les dettes des ci-devant provinces des pays d'Etats.
rapporteur. Ces dettes font en effet l'objet d'un rapport particulier qui I vous sera fait par M. Garesché; ce rapport n'a pas encore été présenté au comité; mais les conclusions du rapporteur sont que ces dettes doivent être à la charge de la nation; elles forment un capital de 150 à 160 millions ; les intérêts ne sont que de 5 à 6 millions. Cet objet ne doit pas retarder le travail du comité des impositions. 11 suffit que vous donniez à la fixation des dépénses, assez de latitude pour qu'elle puisse comprendre les objets de dépense qui ne sont pas encore déterminés. Mais il est important que cette fixation soit faite pour que le comité des impositions puisse terminer son travail.
Je demande que les bases du comité desfinances soient adoptées pour diriger le travail du comité de l'imposition, et qu'on leur donne une extension d'environ 10 millions pour les objets de dépenses non encore déterminés. Le projet de décret que nous vous proposons n'a pour but que de fixer les dépenses d'une manière approximative, pour qu'on puisse les imposer...
Quant aux dettes qui n'ont point été faites pour le gouvernement, aux dettes particulières des villes, dont les droits d'entrée servaient à payer les intérêts, il est possible que le remplacement des droits d'entrée dont on vous a si sagement
proposé la suppression, ne suffise point pour en payer les intérêts. Il faudra que vous preniez cet objet en considération; mais ce ne doit pas être un motif pour retarder l'imposition.
L'Assemblée peut ajouter au décret qu'elle se réserve de statuer sur les dettes particulières aux provinces, et sur les fonds qui doivent y être appliqués.
D'après Ces observations, je retire ma demande d'ajournement.
(L'Assemblée adopte l'addition proposée par M. de Montesquieu:)
(de Saint-Jean-d'Angély). Avant d'adopter le décret qui vous est soumis, on devrait mettre à la discussion, l'un après l'autre, chacun des articles de l'état présenté par le comité des finances.
J'appuie la motion du préopinant. Il y a dans cet état des articles que nous ne connaissons point, et que nous devons examiner : par exemple, je trouve dans un endroit ces mots : « pour la maison du roi, de la reine et des princes, 52 millions; » et je vois plus bas que les intérêts sont à la charge de la liste civile. Il me semble qu'en rapprochant ces deux articles, nous ne pouvons devoir les capitaux d'une partie des charges de la maison du roi, tandis que nous n'en payerons pas les intérêts. Je crois que uous ne devons ni intérêt, ni capital.
Je prie M. le rapporteur de nous expliquer pourquoi il porte les charges des maisons du roi, de la reine et des princes à 52 millions, et pourquoi il suppose qu'une partie des capitaux de ces charges est pour le compte de la nation.
rapporteur. Le mode de discussion proposé entraînerait des longueurs et des pertes de temps; il.s'agit non pas, pour le moment, d'examiner en détail Chacun des objets de dépense, mais de donner au comité d'imposition une base sur laquelle il puisse asseoir un système et une masse générale d impôts. L'Assemblée est pressée d'arriver à des moyens de perception et de les mettre au plus tôt en activité; il est urgent pour la chose publique d'accélérer la délibération de l'Assemblée sur le rapport que doit lui faire le comité des contributionspubliques concernant les moyens de fournir aux dépenses dé l'année 1791.
Voici maintenant ce qui concerne les charges de là maison du roi. Lorsque le roi a écrit à l'Assemblée, à l'époque de la demande de la liste civile, sa lettre contient expressément la demande du remboursement des charges de sa maison comme de celles de ses frères. L'Assemblée, par acclamation, a décrété la lettre xlu roi. (Ce sont ses termes.) Ainsi, jusqu'à ce que l'Assemblée ait notifié d'une autre manière ses intentions, ses membres ne peuvent connaître le téxte de ses décrets : en conséquence, nous avons dû regarder le capital des charges de ces maisons, dont le roi a demandé le remboursement, comme une des dettes de la nation; quant aux intérêts de la finance de Ces charges, il est évident qu'ils ne font point partie des objets que nous avons à payer en 1791 ; ainsi, l'observation de M. Camus ne porte point du tout sur le projet de décret, qui ne tend qu'à fixer à peu près là somme dont on aura besoin, afin que dès à présent bu puisse s'occuper des moyens de l'imposer.
le jeune Le procédé de discus-
sion proposé par MM. Regnaud et Camus ne permettrait jamais de savoir à quoi se portent les besoins de l'Etat; ce serait un moyen sûr pour que le comité des impositions ne finisse jamais son travail. L'opération actuelle n'est qu'un aperçu général et en masse qui ne préjuge rien; les détails ne pourront être discutés que sur les rapports des comités respectifs.
(de Saint-Jean-d'Angély.) J'insiste sur ma motion. Il faut^que les ebjets soient discutés en détail.
Je demande qu'au moins il y ait dans le décret un article portant que la dépense à faire dans l'année 1791 n'emportera l'approbation d'aucune dépense particulière, aucune dépense sur les fonds publics ne pouvant être faite et allouée que d'après les décrets de l'Assemblée, rendus ou à rendre.
rapporteur. J'adopte cet article qui deviendrait le dernier du projet.
(L'Assemblée décrète la disposition additionnelle de M. Camus.)
rapporteur, donne une nouvelle lecture de l'article premier.
Je demande que l'on comprenne dans cet article les secours qui concernent les enfants trouvés et les dépôts de mendicité; c'est là un objet de 2,700,000 livres aux dépens du Trésor public.
Dans plusieurs ci-devant provinces, leshôpitaux consacrés aux enfants trouvés n'ont jamais été à charge aux Trésor public; il ne serait pas juste aujourd'hui, pour l'avantage de 38 ou 40 hôpitaux, de charger ceux des départements qui n'employaient jamais les fonds nationaux à l'entretien des leurs.
Je crois qu'on devrait discuter préliminairement s'il est utile que les enfants trouvés soient à la charge du Trésor public ou des départements.
Il ne s'agit aue d'une mesure provisoire pour subvenir aux besoins de ces hospices de charité pendant l'année 1791, et qui doit entrer dans la dépense du Trésor public jusqu'à ce que l'Assemblée ait statué définitivement sur cet objet.
appuie la motion de M. de Liancourt.
rapporteur. J'accepte l'amendement, mais je demande alors que l'article soit augmenté de pareille somme à prendre sur l'article 3. (L'Assemblée adopte ce changement.)
L'article premier est décrété comme suit : « L'Assemblée nationale décrète :
Art 1er
« Il sera fait fonds au Trésor public en 1791, tant par les revenus ordinaires de l'État que par les impositions générales et communes : 1° d'une somme de 282,700,000 livres pour acquitter toutes les dépensés attribuées au culte, à la liste civile, aux apanagistes, aux départements des affaires étrangères, delà guerre, y compris les auxiliaires et la gendarmerie nationale, de la marine et des
colonies, des ponts et chaussées, aux ministres et au conseil, aux bureaux et frais d'administration du Trésor public, de la caisse de l'extraordinaire, de la liquidation générale et de la comptabilité, aux primes et encouragements pour le commerce, à l'école des menus et aux dépôts publics, au jardin et à la bibliothèque du roi, aux universités, académies et travaux littéraires, aux Invalides et aux Quinze-vingts, aux enfants trouvés, aux dépôts de mendicité, aux frais de l'Assemblée nationale, delà haute cour nationale et du tribunal de cassation; 2° d'une somme de 302 millions pour acquitter le traitement des ecclésiastiques et religieux des deux sexes, supprimés, le secours accordé aux apanagistes en faveur de leurs créanciers ou pour indemnité, les pensions de l'Etat, celles accordées aux Hollandais et Acadiens, et les intérêts de la dette publique, tant perpétuelle que viagère, constituée ou non constituée, lesquelles deux sommes réunies montent à 584,700,000 livres ; se réservant l'Assemblée nationale de statuer sur les dettes particulières aux provinces, ci-devant pays d'Etats, et sur les fonds qui pourraient leur être appliqués. »
Je désirerais qu'il fût fourni quelques explications sur les dettes des ci-devant pays d'Etat, et que l'on fît connaître si le Trésor public en sera ou non chargé.
Le rapport sur cet objet est prêt ; il serait déjà imprimé si le Cambrésis et l'Artois avaient envoyé l'état de leurs dettes.
rapporteur, donne lecture de l'article 2 qui est ainsi conçu ;
Art. 2. ' ;
« La caisse de l'extraordinaire devant, en exécution du décret du 6 décembre dernier, verser au Trésor public 60 millions sur les revenus des domaines nationaux, qu'elle est chargée de recevoir, le comité de l'imposition présentera à l'Assemblée les moyens de fournir au Trésor publics, en 1791, la somme de 524,700,000 livres, pour compléter celle nécessaire aux dépenses ci-dessus. »
(Cet article est décrété.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 3.
demande à nouveau des explications sur les dettes des pays d'Etats ; il voudrait que les fonds de ces dettes fussent faits pour assurer le payement des créanciers et que l'Assemblée décidât par qui il serait fait.
, rapporteur. Je crois qu'il ne doit pas être question de cet objet dans ce moment, pour ne rien préjuger sur une décision ultérieure de l'Assemblée.
Mon amendement porte sur ces mots que je lis dans l'état imprimé : Un atelier de 27 à 28,000 hommes est payé par le Trésor public; c'est un objet d'environ 7 millions. Cette dépense est peut-être indispensable pour les mois d'hiver, mais pour toute l'année elle serait impolitique etinjuste.
Je demande à l'Assemblée si son intention est de conserver toute l'année, dans une ville telle que Paris, un rassemblement de 28,000 hommes qu'on paye pour ne rien faire, et dont on vole
les bras à la campagne qui en manque. Je demanderais donc que la municipalité de Paris s'occupât d'exécuter le décret du 30 mai dernier pour renvoyer chacun de ces hommes valides dans leurs départements.
Le malheur des temps et le peu de force publique Ont empêché, de mettre ce décret à exécution. Au demeurant, ce que la municipalité n'a pas pu faire jusqu'à présent appartient au département. Averti par l'opinion publique du danger qui résulterait, tant pour le Trésor public que pour la capitale même, de cette réunion d'ateliers* ne doutez pas qu'il ne prenne les moyens les plus puissants pour y mettre ordre.
, rapporteur. Il est certain que c'est un grand abus que d'entretenir, un atelier de 28,000 hommes qu'il faut solder sans travail ; il est certain aussi que tant qu'on sera forcé de les conserver, il faudra les pay^r ; mais il ne s'agit ici que de savoir sur quoi on prendra les fonds nécessaires. r *
(L'Assemblée décrète le renvoi de la motion de M. Andrieu aux comités des finances et de mendicité réunis.)
Les articles 3 et 4 sont décrétés comme suit :
Art. 3. :
« Indépendamment des sommes ci-dessus, il sera pourvu à un fonds particulier de 56,300,000 livres, pour acquitter les dépenses de l'administration de la justice et des frais de prisonniers, des corps administratifs, des grands chemins, des entretiens de bâtiments publics, de la perception des impôts, et des secours accordés aux hôpitaux.
Art. 4.
« La caisse de l'extraordinaire fera les avances nécessaires pour acquitter en 1791: 1° la somme accordée par le décret du 16 décembre 1790, pour être distribuée à titre de secours aux 83 départements ; 2° celle qui sera, décrétée pour les travaux extraordinaires dans les ports maritimes ; 3° celle des ateliers entretenus à Paris ; 4° les frais attachés à la prolongation ou au renouvellement de l'Assemblée nationale ; 5° les fonds d'équipement des auxiliaires ; 6° la dépense d'augmentation de l'armée et des approvisionnements y relatifs ; 7° les -3 millions qui restent à acquitter pour réparer nos forteresses ; 8° l'expédition extraordinaire décrétée pour les îles d'Amérique, le 11 février 1791 ; 9° une réserve de 20 millions pour suppléer aux dépenses résultant de l'apurement de tous les comptes ; le tout conformément aux différents" décrets qui seront rendus par l'Assemblée nationale.)»
, rapporteur. La disposition additionnelle présentée par M. Camus au commencement de cette discussion pourrait former un dernier article ainsi conçu :
Art. 5.
« Le décret prononcé sur la dépense à faire dans l'année 1791 n'emportera l'approbation d'aucun article de dépense particulière, aucune dépense sur les fonds publics ne pouvant être faite et allouée que d'après les décrets de l'Assemblée,rendus ou à rendre sur chaque article.»
(Cet article est adopté.)
J'ai reçu des électeurs du département de la Côte-d'Or la lettre suivante : « Monsieur le Président, l'assemblée électorale du département de la Côte-d'Or, convoquée à Dijon, le 13 de ce mois, pour l'élection de l'évêque de ce département, me charge de vous prier d'annoncer à l'Assemblée nationale que cette élection vient d'être consommée, et que M. Volfius, prêtre, professeur d'éloquence du collège de Dijon, a réuni au premier scrutin une très grande majorité de suffrages. En se donnant pour premier pasteur le frère d'un de vos plus estimables collègues, les électeurs se félicitent d'avoir couronné les vertus et les talents. (Applaudissements.)
« Signé : Le Président de l'assemblée électorale du département de la Côte-d'Or. »
J'ai également reçu des administrateurs du directoire du département de la Côte-d'Or la lettre suivante :
« Dijon, le
« Monsieur le Président, nous avons reçu par le dernier courrier une lettre de M. de Lessart, miistre de l'intérieur, en date du 9 de ce mois, qui nous annonce le passage très prochain de Mesdames, tantes du roi. Nous vous adressons copie de cette lettre et de la réponse que nous venons de faire au ministre.
« Vous ne serez pas Siins doute étonnés, Monsieur, de l'inquiétude que les peuples ont conçue sur les motifs qui ont déterminé Mesdames à insister auprès de Sa Majesté pour l'exécution de leur voyage dans un moment où les circonstances semblaient exiger d'elles d'en faire le sacrifice.
« Nous avons cru devoir vous prier, Monsieur, de mettre sous les yeux de l'Assemblée nationale le tableau de ces inquiétudes que nous savons ne pas être bornées à ce département. Peut-être ju-gera-t-elle de sa prudence de faire intervenir ses sollicitations auprès de Sa Majesté, pour obtenir de Mesdames la remise de leur voyage à un temps où la tranquillité du royaume n'en sera pas troublée.
« Signé : Les administrateurs composant le directoire du département de la Côte-d'Or.»
Copie de la lettre du ministre de l'intérieur au directoire du département de la Côte-d'Or.
Paris, le
« Messieurs, Mesdames, tantes du roi, ayant formé le projet de faire un voyage en Italie et ayant insisté auprès du roi pour l'exécution de ce projet, Sa Majesté me charge de vous prévenir, afin de vous mettre à portée de prendre les mesures convenables et de donner les ordres nécessaires pour leur faire trouver toutes facilités dont elles pourront avoir besoin.
c Le départ de Mesdames est fixé du 15 au 25 de ce mois; et elles iront par la route de l'ancienne province de Bourgogne d'où elles se rendront en Italie par le Pont-de-Beauvoisin ou par Genève.
« J'ai l'honneur de vous envoyer une liste des personnes de leur suite :
« Madame Adélaïde, madame de Narbonne, M. de Narbonne,
« 4 valets de chambre ; 4 femmes de chambre; 2 valets de pied.
« Madame Victoire, madame de Chatelux, M. de Chuteiux.
« 4 femmes de chambre ; 2 valets de chambre ; 2 valets de pied ; 2 médecins et 2 écuyers.
« Je suis très parfaitement, etc.
« Signé : de lessart. »
Copie de la réponse du directoire de la Côte-d'Or au ministre de l'intérieur.
« Dijon, le
« Monsieur, nous avons reçu votre lettre en date du 9 de ce mois, par laquelle vous nous annoncez le passage par la route de l'ancienne province de Bourgogne de Mesdames, tantes du roi, dont le départ de Paris doit avoir lieu du 15 au 25.
« Nous ne devons pas vous dissimuler, Monsieur, que la nouvelle de ce départ qui était, parvenue d'avance dans ce département, avait déjà excité dans les esprits des inquiétudes justifiées par les circonstances dans lesquelles nous nous trouvons.
« Le projet formé par des personnes qui touchent de si près à celle du roi de quitter la France dans un moment où l'Assemblée nationale et le roi ont jugé nécessaire de développer de grands moyens de défense devait donner plus de confiance aux bruits qui menacent la tranquillité du royaume.
« Dans cette circonstance, nous n'avons j)as cru devoir prendre des mesures extraordinaires dont vous ne nous tracez pas la marche et que nous avons jugées d'ailleurs pouvoir être plus propres à exciter des troubles qu'à les prévenir. Au surplus, nous venons d'adresser copie de la lettre que vous nous avez fait l'honneur de nous écrire aux directoirés des districts de la route que vous nous indiquez, avec recommandation d'en donner connaissance aUx municipalités des lieux où le passage de Mesdames est annoncé, afin de les mettre a portée de faire les dispositions que les circonstances leur feraient juger nécessaires dans le cas où le voyage aurait lieu.
« Nous sommes, etc.....
Signé : Les administrateurs composant le directoire du département de la Côte-d'Or. »
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
J'ai reçu de M. le ministre des finances la lettre suivante, relative à l'adjudication du bail des messageries :
« Monsieur le Président, j'ai eu l'honneur de rendre compte à l'Assemblée nationale, le 14 de ce mois, du résultat de la séance tenue le 12 pour l'adjudication à l'enchère du bail des messageries, et à laquelle j'ai été chargé de procéder par le décret du 20 décembre dernier.
« Ayant annoncé, à cette séance du 12, qu'en conséquence d'un, décret rendu le 10, ceux qui voulaient concourir, devaient avoir, indépendamment du cautionnement de 2 millions en immeubles, une somme effective de 3 millions pour sûreté du remboursement comptant des effets d'exploitation, je fus obligé d'accorder un nouveau délai pour donner le temps de réaliser cette somme de 3 millions, et je remis l'adjudication au mercredi 16 de ce mois. Hier étant le jour annoncé et indiqué par lesafliches, la séance a été ouverte publiquement.
« La compagnie de M. Choiseau et celle de M. Jean-François Lequoux, qni sont ies seules
qui se soient présentées,ont offert toutes deux le cautionnement de 2 millions en immeubles, et ont justifié, chacune de leur côté, de la somme de 5 millions, que j'avais demandée dans la séance du 12 pour sûreté de payement comptant des effets appartenant aux fermiers et sous-fermiers.
« Toutes ces conditions se trouvant remplies de part et d'autre, il ne restait plus qu'à, procéder à la réception des enchères et de suite a l'adjudication définitive. J'ai effectivement annoncé que j'étais prêt de recevoir les enchères : alors un des associés de M. Choiséau, parlant au nom de cette compagnie, a déclaré que la compagnie de J.-F. Lequeux étant la seule en concurrence, et cette compagnie n'étant autre que celle des maîtres de poste coalisés, comme il offrait de le
Srouver, c'était évidemment éluder le décret du
> août dernier, et rendre la concurrence illusoire, puisqu'aucune compagnie; ne pouvait concourir avec celle des maîtres de poste, sous tel nom qu'elle pût se présenter : en conséquence la compagnie Gboiseau a déclaré se retirer, protestant en tant que de besoin contre tout ce qui pourrait être fait, et s'en référant toujours à son dire porté au procès-verbal de la dernière séance.
« M. Dubut de Longchamp a dit, pour la compagnie de M. Lequeux, qu'il portait ses offres au prix de 300,000 livres, exprimé dans sa soumission réelle imprimée; et il a déclaré qu'attendu la concurrence réelle des enchères insérée dans le procès-verbal du samedi 12, il couvrait de la somme de 100 livres toute enchère qui aurait été régulièrement faite. lia Requis l'adjudication définitive sans avoir égard à la prétendue fin de non-recevoir exprimée par la compagnie Ghoi-seau, ni à sa retraite, qui ne pouvait pas exister, attendu qu'elle, s'était présentée librement à la concurrence, et que c'était pour faire césser cette concurrence qu'elle se retirait.
« Ces déclarations sont consignées dans le procès-verbal dont j'ai l'honneur d'adresser une expédition à l'Assemblée nationale.
« La compagnie Ghoiseau s'étant retirée, j'ai annoncé que je ne pouvais pas prendre sur moi de prononcer l'adjudication réclamée par la compagnie de M. Lequeux, attendu que l'adjudication exige nécessairement une concurrence, et qu'il n'y a point de concurrence là où il n'y a qu'une seule enchère. (Murmures.) J'ai donc déclaré que je me croyais obligé d'en référer à l'Assemblée nationale, et j'ai observé que les choses restant entières, cette détermination de ma part ne pourrait porter préjudice au droit des parties.
« Dans une pareille position, il n'y a que l'Assemblée nationale qui puisse mettre un terme à l'indécision où cette affaire se trouve malheureusement livrée; et je la supplie de considérer qu'après les vicissitudes qu'a subies cette affaire, et le dernier état où elle a été amenée, il n'est plus en mon pouvoir de faire un choix, ni de rien prononcer.
. « Maintenant que je viens de rendre compte à l'Assemblée de ce qui concerne les messageries, qu'il me soit permis d'appeler un moment son attention sur la situation actuelle de la direction des postes. Ces deux objets ont tant d'analogie, que je crois devoir en parler en ce moment à l'Assemblée.
« Par son décret du 26 août dernier, elle a mis l'administration des postes sous l'inspection d'un directoire composé de 5 personnes qui ne doivent pas être intéressées dans le produit ; elle a or-
donné en même temps la réforme du tarif de 1759, et qu'il serait pourvu aux nouveaux établissements que la division actuelle du royaume et le besoin du commerce sollicitent; enfin aux améliorations et économies possibles, pour le tout être soumis cette année à l'examen du Corps législatif, et avoir lieu à compter du 1er janvier 1792.
« Je ne puis m'empêcher de représenter à l'Assemblée nationale qu'il me paraît impossibleque les 5 personnes suffisent à ces objets, malgré le zèle dont je les crois capables ; je dois encore représenter à l'Assemblée, comme un inconvénient préjudiciable au revenu des postes, le défaut d'intérêt des administrateurs dans le produit. Je suis obligé de.le dire : telle confiance que l'on donne à ceux qui sont chargés d'une perception quelconque, le réveil de l'intérêt peut seul faire résister aux sollicitations, aux abus. Le revenu des postes, qui sera désormais un des impôts indirects le plus.précieux, demande plus qu'aucun autre une administration intéressée.
« Si l'Assemblée est comme moi frappée de ces considérations, si elle juge en conséquence à propos de se faire .rendre compte de la situation de l'administration des postes, je m'empresserai de communiquer au comité qu'elle en chargera tous [es renseignements et les observations propres à éclairer sa décision, sinon elle peut être persuadée que je ferai tous mes efforts pour seconder cette administration, et que je donnerai tous me3 soins au succès des opérations dont je suis chargé ; mais je veux remplir une obligation indispensable en avertissant l'Assemblée des secours et des besoins que les grands changements qu'elle a ordonnés dans toutes les parties du service des postes sollicitent ; et je me verrais avec regret obligé dé lui soumettre les embarras et les obstacles contre lesquels l'administration actuelle se trouverait dans l'impossibilité de réunir assez de moyens.
« Je suis avec respect, Monsieur le Président, etc.
« Signé : DE LESSART. »
Voici maintenant la pétition du sieur Lequeux à l'Assemblée nationale;
« Messieurs, depuis trois mois, la ferme des messageries occupe l'Assemblée nationale au sujet de l'adjudication du bail ; les décrets ont été éludés. Enfin, dans la dernière séance, les deux compagnies soumissionnaires, la compagnie Cboiseau et la mienne étant en règle, rien ne pouvait empêcher de procéder à l'enchère.
« Une multitude de gens apostés, des financiers, des sous-financiers, prétendant être les organes de l'opinion publique, firent cependant retarder l'adjudication. La compagnie Choiseau> sentant son infériorité, se retire en déclarant qu'elle ne peut concourir avec moi, à cause de ma trop grande richesse. Effectivement, Messieurs, mon cautionnement est bien supérieur: j'ai déposé 2,800,000 livres en immeubles, au lieu de 2 millions qui étaient demandés, indépendamment de la somme de 3 millions que j'ai déposée en écus pour la sûreté des effets des sous-fermiers. C'est bien là ce que vous désiriez: sûreté de service et solidité ; mais là n'est pas le mot de l'énigme.
« Les financiers, abusant du mot enchère, disent : pour une enchère, il faut une concurrence, donc il faut deux compagnies ; nous nous retirons, il n'en reste plus qu'une ; donc il n'y a plus d'enchère ; donc le pouvoir exécutif ne peut
plus adjuger; donc, nous, financiers", restons en possession en dépit deS décrets.
« J ai l'honneur de soutenir à l'Assemblée nationale que le ministre des finances pouvait adjuger le bail, malgré la retraite de la compagnie CboiseaU et que, dans la rigueur de la loi, il le devait. J'ai requis l'adjudication auprès du ministre ; j'ai l'honneur de la requérir auprès de vous, Messieurs: on chérche à gagner du temps pour vous demande^ ensuite de renvoyer à l'an-néel792 pour n'avoir plus decoucUrrence à soutenir. Je suis prêt à le démontrer. J'ose vous supplier de détourner le piège ; il est tendu pour écraser une compagnie, pour détruire toute concurrence : car les financiers étant coalisés, si vous accordez le bail à une de leurs compagnies quelconques, ils y sont tous, soit comme locataires, soit comme sous-locataires.
« J'ai l'honneur de prier l'Assemblée d'ordonner sur-le-champ l'adjudication du bail à ma compagnie pour le prix qu'elle a offert. On ne dépose pas 5 millions sans se charger de gros intérêts ; en retardant l'adjudication, l'intérêt public et l'intérêt particulier se trouveraient compromis,
Signé; J.-F. Lequeux, »
Plusieurs membres demandent que l'offre de la compagnie Lequeux soit acceptée sur-le-champ.
Je ne suis pas étonné d'entendre plusieurs membres demander que l'adjudication Boit faite à l'instant à la compagnie Lequeux ; il est Certain qtte le ministre peut et doit passer outre à l'adjudication. Il n'était pas raisonnable,de la part de la compagnie Ghoiseau, de prétendre qu'en se retirant, elle mettait le ministre dans l'impossibilité d'adjuger : car s'il en était ainsi, il n'est pas d'adjudication qui ne pût être arrêtée de cette manière. Dès qu'un enchérisseur verrait que son concurrent l'emporte, il déclarerait, qu'il se retire et il rendrait l'opération illusoiie. La retraite, dans la rigueur du principe, n'est autre chose que l'aveu qu'on ne peut couvrir l'enchère de son concurrent.
Je ne suis donc point étonné de voir des honorables ihembres demander que l'Assemblée accepte à l'instant la soumission de la compagnie Lequeux ; mais je crois que pour le bien de la nation, qui est que les enchères se fassent au plus haut prix possible, vous ne devez point rendre un semblable décret qui vous priverait de l'avantage de la chaleur des enchères. Il n'est pas d'ailleurs de la compétence de l'Assemblée de prononcer une adjudication.
On oppose, d'autre part, que la compagnie Lequeux n est autre chose que les maîtres de poste; cela se peut. Mais toujours est-il vrai qu'ils ne paraissent point et que ce ne peut être un motif d'exclusion pour Jean-François Lequeux.
Je demande que l'affaire soit renvoyée au pouvoir exécutif pour faire l'adjudication.
Il serait facile de prouver l'absurdité de la compagnie Ghoiseau; il serait également facile de prouver qu'il vaut mieux adjuger à la chaleur d'une nouvelle enchère, que d'adjuger sur-le-champ; mais ce n'est pas là l'objet de la difficulté. La compagnie Ghoiseau observe que la compagnie Lequeux, n'est autre chose 3 e la coalition de3 .maîtres de poste, et un décret porte que l'exploitation du service des postes et celle du service des messageries ne
Eourront être réunies dans les mêmeB mains.
es maîtres de poste prétendent que l'Assem-
hlée peut dérogpr sans danger à un décret purement réglementaire; mais je me souviens que le comité des finances fut chargé à cette époque de vous faire un rapport sur la pétition de plusieurs maîtres de poste, qui présentaient des motifs spécieux pour prouver que leur demande était avantageuse au service public. Ces motifs furent tous repoussés par le comité des finances: le rapporteur démontra les dangers de réunir ilans les mêmes mains deux services destinés à se secourir mutuellement, et à concourir ensemble.
Ce n'est pas que je pense que cet article soit un obstacle invincible; mais ]ë crois que la matière serait mieux éclaircie, si l'Assemblée renvoyait l'affaire à son comité (Murmures.)... pour qu'il lui fît le rapport des raisons qui l'avaient déterminé et qui avaient déterminé l'Assemblée nationale elle-même {Murmures.)-, car elle a rendu un décret qui sépare l'exploitation des postes de celle des messageries.
Plusieurs membres : Non I non !
On me dit que ce décret n'existe pas l J'atteste à l'Assemblée que ce décret a été rendu au rapport de M. de Birpa et j'en demande ta lecture^
Je ne m'oppose pas d'ailleurs à ce que ce décret soit abrogé,, s'il est inutile ou vicieux ; mais pour que l'Assemblée soit conséquente à elle-même, je conclus au renvoi au comité, qui vous fera un rapport particulier Sur cet objet.
Voici le texte de l'article Ier du décret en question :
« Les postes aux lettres, les postes aux chevaux et les messageries continueront à être séparées, quant à l'exploitation, etc... »
, évêque de Lydda. Sur toutes les observations relatives à la compagnie Lequeux, je remarquerai seulement que l'AsSemblée n'est pas encore assez instruite de l'utilité de la chose, soit par rapport au Trésor national, soit par rapport au service public, soit par rapport au service de l'armée; j'ose assurer que les pièces qu'on vient de lire ne donnent point la suffisance de lumières nécessaire pour juger.
Je crains même que la pétition qui vient d'être lue à l'Assemblée ne contienne une surprise à sa religion; et j'ai d'autant plus de raisons de le croire qu'hier, il m'est tombé entre les mains un imprimé qui a circulé dans cette capitale : il m'a paru porter la teinte de cette surprise, attendu qu'il he tend à rleh moins qu'à imprimer au public une opinion capable d'influencer la détermination de l'Assemblée.
Gomme l'affaire est de la dernière conséquence sous tous les rapports, je demande qu'il soit sursis aujourd'hui et que l'Assemblée veuille ajourner l'examen et la discussion de cette affaire à huitaine, ou bien renvoyer à son comité: pour lui être, sur cette affaire, rendu un compte très fidèle et très exact.
Je demande la question préalable sur le renvoi au comité et sur l'ajournement. Le mois d'avril arrivera; le bail ne sera pas adjugé, et vous vous verrez-obligés de renvoyer l'adjudication à l'année 1792. Voilà ce qu'on espère; voilà ce qu'on déaire. (Applaudissements.)
On s'appuie sur le décret que M. le Président vient de lire et sur le prétexte que la compagnie
Lequeux n'est autre chose que les maîtres de poste coalisés. Mais je demande si l'on contreviendrait au décret en adjugeant le bail à la compagnie Lequeux. Cette compagnie exploitera les messageries, et les maîtres de poste exploiteront les postes. Autrefois, qui est-ce qui exploitait les messageries si ce n'étaient les maîtres de poste? (Applaudissements.) Si on prenait le décrét dans le sens judaïque,on dirait qu'on pe pourrait se servir des mêmes chevaux. Vous avez dit que les postes aux chevaux et les messageries continueront. Vous les considériez donc dans l'ordre où elles se trouvaient comme séparées quant à l'exploitation. La lettre du décret est donc remplie; je suis donc en droit d'insister sur la question préalable.
Si la compagnie Lequeux n'est pas composée des maîtres de poste, il est évident que j'ai tort. Dans le cas contraire, il est évident que M. Martineau n'a répondu à aucune de mes raisons. Il faut savoir s il y a des inconvénients à la réunion gu'on vous propose, et c'est pour cela que je désire que vous réunissiez les lumières de vos comités. On a parfaitement tort quand on prétend que je veux gagner du temps, puisque îe demande que le rapport soit fait lundi, et mardi l'adjudication.
(L'ajournement est repoussé par la question préalable.)
Voici la nouvelle rédaction du décret qu'on vous propose :
« L'Assemblée nationale décrète que l'affaire sera renvoyée au pouvoir exécutif pour faire l'adjudication du bail des messageries sur l'enchère déjà reçue ou sur telle autre qui pourra survenir. *
(Ce fléoret est adopté.)
Il y a un second objet dans la lettre du ministre; il consiste dans la proposition de vous soumettre quelques observations sur l'insuffisance du nombre des administrateurs chargés du service des postes.
(L'Assemblée renvoie cet objet à son comité des finances.)
Je demande que l'Assemblée charge son comité de lui présenter les conditions auxquelles on pourra être maître de poste : car si le service des messageries occupe les chevaux de poste, les gens qui voudront partir à heure indiquée ne trouveront plus de chevaux de poste.
Je demande donc qu'il soit ordonné à votre comité de vous présenter des moyens pour assurer le service des postes et en même temps pour examiner si la somme de 1,200,000 livres que vous donnez tous les ans sera encore donnée après l'anéantissement total du service des postes. (Murmures.)
Plusieurs membres : L'ordre du jeur !
(L'ordre du.jour est décrété sur cette motion.)
annonce l'ordre du jour de la séance de demain.
La séance est levée à trois heures.
PRÉSIDENCE DE M- DUPORT .
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Le sieur Lardé, mécanicien, propose à l'Assemblée nationale un çarrosse, dont il est l'inventeur et dorit le mécahisme offre nue marche d'autant plus curieuse qu'on peut, sans chevaux, se servir de ce carrosse chargé de B personnes, pour parcourir Paris et voyager sur les grandes routes.
Le sieur Lardé ajoute à sa proposition celle de faire jouir l'Assemblée de la curiosité que prér sente son invention et demandé qu'il lui soit accordé là récompense attribuée au®x inventeurs de découvertes utiles par votre déeret du 30 décembre dernier.
(L'Assemblée ordonne qu'il sOit fait mention honorable dans son procès-verbal des propositions du sieur Lardé et renvoie la demande de récompense à son comité de commerce çt d'agriculture.)
Le sieUr Bellepèche, bota-nisté, dans une pétition qu'il adresse à l'Assemblée, offre de faire des expériences sur des malades attaqués d'épilepsie, maladie qu'il assure pouvoir guérir.
(Cette pétition est renvoyée au comité de salubrité.) ;
Le sieur Jansen fait hommage à l'Assemblée de deux brochures : la première, sur la culture du tabac en France, suivie d'un plan sur l'établissement d'une caisse de prévoyance, destinée à diminuer la mendicité; la seconde,d'un projet tendant à conserver les arts en France, en immortalisant les événements patriotiques et les hommes illustres.
(L'Assembléç ordonne qu'il soit fait mention honorable de cet hommage dans le procès-verbal).
Le sieur Brun de Condamine fait part ârAssemblée d'Une découverte utile aux agriculteurs, pour battre lés blés ; 1'invënteur assure que eet instrument épargnerait la moitié des frais de battage, et réunirait l'avantage de battre mieux les gerbes. .
(L'Assemblée décrète le renvoi dé la lettre de M. Brun de Condamine au comité d'agriculture et de commerce.)
Un de MM. les secrétaires fait lecture du prO-cès-verbal de. la séance d'hier, qui esi ad opté. ,
Messieurs, j'ai.aussi à vous présenter une pétition qui me regarde peronnel-lement.
Il y a déjà 3 ou 4 mois que M. Leblanc-Gily, qui est un peu fou, mais un
fou méchant, a envoyé à l'Assemblée nationale une dénonciation pleine
d'injures Contre moi. Sur la demande que j'en fis alors, vous avez eu.
la bonté de la renvoyer au comité des rapports. J'ai sollicité long-
Dans cet intervalle, je gardais cependant le silence; M. Leblanc-Gily, croyant que mon silence n'était que l'effet de la peur ou la preuve authentique de l'exactitude des accusations dirigées contre moi, a fait paraître une foule d'écrits et dénonciations, de lettres, en un mot de libellés si multipliés et si nombreux, qu'il me serait même impossible de les porter au comité.
Tant que j'ai su que toutes les horreurs publiées contre moi ne partaient que de cette source, j'ai cru les devoir mépriser et ne pas m'en plaindre. Mais aujourd'hui qu'une société,qui se dit amie de la Constitution, adhère à ces écrits, en en signant un, ceux-ci prennent un caractère plus authentique. J'aime à croire que les signatures dont est revêtue cette approbation sont apocryphes et qu'elle n'est pas, tout au moins, l'ouvrage de toute la société; mais, quoi qu'il en soit, il importe à moi, non pas comme simple individu, mais comme membre de l'Assemblée, comme représentant de la nation, d'être enfin jugé là-dessus.
S'il est reconnu que je suis un contre-révolutionnaire, il faut que je sois renvoyé devaht les tribùnàux pour que mon procès me soit fait; mais si ienesuis pas contre-révolutionnaire, M. Leblanc-Gily doit être puni comme calomniateur.
En conséquence, je vous prie d'ordonner le renvoi au comité des rapports qui doit être prêt (car il y a trois mois qu'il est saisi de. ces pièces), avec ordre d'en faire son rapport dans la semaine prochaine, afin que je sois tranquille' sur ma situation et que l'Assemblée sache si elle a ou non dans son sein un contre-révolutionnaire. (Applaudissements.):
(L'Assemblée décrète le renvoi au comité des rapports pour rendre compte de l'affaire jeudi soir.)
, secrétaire, donne lecture de la lettre suivante adressée à M. le Président par le sieur Joubert, iuge de paix du canton de l'île de Noirmoutiers (Vendée) :
« De l'île de Noirmoutiers, le 8 février 1791.
« Monsieur le Président, jê prends la liberté de Vous donner avis, que j'ai été choisi, le 1er janvier dernier, par mes concitoyens, pour être leur juge dè paix dans l'étendue du canton de l'île de Noirmoutiers, département de la Vendée et district de Chalans.
« Dans le courant dudit mois de janvier, 44 affaires ont été présentées devant moi ;sjé n'ai rendu qu'un seul jugement et.deux ont été terminés devaht le district; les 41 autres ont été terminées par la Voie de la conciliation et je me félicite du,bonheur que j'ai eu d'y réussir. Ces 44 affaires n'ont pas coûté toutes ensemble une somme de 15 livres^ parce que mon but est d'éviter à mes concitoyens, le plus que je pourrai, les frais de citation.
V Ce sont l!à les heureux effets que produisent Tes sages décrets de nos augustes législateurs ; I en effet, quel bonheur pour les peuples I ces 44 af- I faires auraient coûté aux parties, en première l
instance seulement, plus de 1,500 livres, somme exorbitante pour la plupart des pauvres gens qui habitent cette île; je veux dire suivant l'ancien régime. Quelques entêtés d'entré eux eussent sûrement appelé à Poitiers où nous allions par appel à 50 lieues ; d'autres encore, au parlement de Paris, à 120 lieues de notre île, et se seraient ruinés.
« L'Assemblée nationale a prévu tout cela dans sa sagesse et elle a fait en cette partie essentielle, comme en toutes les autres, le bonheur des Français qui la bénissent et qui l'admirent. J'ai été trente ans dans les affaires; je ne suis cependant ni avocat, ni n'ai jamais étudié les lois; la confiance que j'ai acquise de mes concitoyens me sert de code et de coutume, et je n'aurai jamais à me reprocher d'avoir jugé contre ma conscience. - , " . I
« Je me suis cru obligé de rendre compte à l'Assemblée auguste que vous présidez d'un aussi heureux succès.
« Signé ; Joubert, juge de paix. »
(L'Assemblée ordonne qu'il soit fait mention honorable de cette lettre dans le procès-verbal.)
Sur 220 causes, le juge de paix du canton de Belfort en a arrangé 200 à l'amiable et sans frais. Cette justice domiciliaire soulage les campagues des frais dont elles étaient accablées par l'ancienne procédure; elle seule suffirait pour faire bénir la Révolution. Les habitants de mon district la regardent comme un don du ciel, comme le chef-d'œuvre de l'Assemblée nationale.
J'ai reçu un mémoire et une lettre du sieur Jean-Jacques Russeau, de Neveux, près Nevers, adressés à l'Assemblée nationale en forme de pétition, tendant à ce que Chàteau-Chinon, capitale du Morden, soit réuni au domaine.
(L'Assemblée ordonne le renvoi de la lettre et du mémoire à son comité des domaines.)
Plusieurs membres annoncent diverses prestations de serment faites dans plusieurs districts et villes par des ecclésiastiques fonctionnaires publics, et remettent sur le bureau les lettres, adresses et procès-verbaux qui les constatent. , Ces prestations de serment ont été faites: 1° Par les ecclésiastiques fonctionnaires publics de la ville d'Issoudun, département de Oindre, les 23 et 30 janvier;
2° Par ceux de Savignac et Gazouls-lès-Béziers ;
3° Par ceux du district de Samoins, département du Cher, par 10 ecclésiastiques fonctionnaires publics de la ville de Dun-le-Roi, où est établi le tribunal de district ; ; : ; ;;
4° Par tous ceux du district du Gasse, département des Hautes-Pyrénées ;
5° Par tous ceux du district de Montluçon, département de l'Allier ;
6° Par tous ceux (excepté trois) du district de Saint-Claude, département du Jura.
7° Par les curés et vicaires du district de Gussy, département de l'Allier;
8° Par tous ceux du district de Ghérilly, même département..
(L'Assemblée décrète qu'il sera fait mention dans son procès-verbal de ces diverses prestations de serment.)
Je demande que l'on s'occupe
du sort des vicaires des paroisses supprimées et que le comité ecclésiastique nous fasse sans tarder son rapport sur les secours à leur accorder.
, au nom du comité ecclésiastique. Notre travail est prêt ; demain on vous fera ce rapport.
, au nom du comité des finances, présente un projet de décret en six articles sur Vadministration des haras.
demande , par amendement à l'article 2, que les receveurs de district soient tenus de justifier des frais de nourriture et de subsistance des étalons nationaux réunis dans des dépôts.
(Get amendement est décrété.)
Le projet de décret est adopté comme suit :
« L'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
Art. Ier.
« Il ne pourra être payé par le Trésor public aucune dépense relative à l'administration des haras, postérieure au dernier décembre 1790.
Art. 2.
« Les seules dépenses justifiées qui auront pu être faites, à compter du 1er janvier 1791, jusqu'au moment de la vente, pour nourriture et subsistance des étalons nationaux réunis dans des dépôts, seront acquittées d'après le règlement qui en sera fait par les directoires de département, sur le produit de la vente de ces étalons; de sorte que les receveurs de district n'auront à verser à la caisse de l'extraordinaire le produit de la vente de ces étalons, que déduction faite des frais.
Art. 3.
« Il sera de même prélevé ; en vertu des mandats du directoire du département, sur le produit de la vente des étalons placés chez des gardes, une somme de 50 livres par étalon, au profit de chaque garde, pour chacune des années dont se trouvera trop faible le nombre d'années nécessaire pour absorber, à raison de 50 livres par an, le montant de la plus-value que le garde justifiera avoir payée.
Art. 4.
« Pour indemniser les gardes de la non-jouis-sance des privilèges, pendant l'année 1790, dans les pays de taille personnelle, il sera accordé à chacun d'eux, par les directoires de département, sur les fonds libres étant à leur disposition, une gratification de 120 livres.
Art. 5.
« Dans les provinces où la jouissance des privilèges était remplacée par des gratifications, les directoires de département feront acquitter, sur les fonds libres étant à leur disposition, celles qui resteraient encore dues à quelques gardes-étalons pour l'année 1790 ; de manière cependant que la somme qu'un garde aurait encore à répéter ne puisse, avec celles qu'il aura déjà touchées pour la même année 1790, excéder-la somme de 120 livres.
Art. 6.
« Les poulinières, dont il a été fait don sur les
fonds de la précédente administration des haras à. des nourriciers pour parvenir à l'amélioration des espèces, appartiendront en pleine propriété à, ceux qui les ont reçues, à la charge par eux de remplir les conditions qu'ils ont contractées par leurs soumissions, lesquelles seront déposées aux archives des administrations de département, que l'Assemblée nationale met aux droits de l'ancienne administration des haras pour les excercer au profit de leurs départements respectifs. »
donne lecture d'une lettre du maire de Paris, qui fait part à l'Assemblée de la vente de biens nationaux ; savoir :
1° D'une maison rue Bordét, louée 1,000 livres, estimée 17,688 livres, adjugée'24,200 livres;
2° D'une maison rue Bordet, louée 330 livres, estimée 5,067 livres, adjugée 8,250 livres ;
3° D'un terrain rue St-Hippolyte, loué 600 livres, estimé 8,089 livres, adjugé 18,000 livres.
J'ai reçu du président et procureur syndic du département de la Haute-Vienne, la lettre suivante :
« Monsieur le Président, j'ai l'honneur de vous prévenirque j'ai convoquéles électeurs du département de la Haute-Vienne pour se rendre à Limoges à l'effet de procéder au remplacement du ci-devant évêque de Limoges qui n'a point prêté le serment exigé par le décret du 27 novembre.
« Les électeurs s'y sont rendus; on a procédé à la nomination, et M. Gay-de-Vernon, curé de Compregnac, ayant obtenu, au troisième scrutin, la majorité, des suffrages, a été proclamé évêque de Limoges ce matin à dix heures. Il a de suite accepté, prêté le serment en présence des électeurs du conseil général de la commune et de la municipalité de la ville de Limoges et un grand concours de peuple ; la garde nationale et plusieurs ecclésiastiques ornaient cette fête civique, qui a été suivie d'une messe solennelle et d'un Te Deum chanté en musique. (Applaudissements.)
« Signé : Dumas, président et procureur syndic du département de la Haute-Vienne. »
Le procureur général syndic du département de l'Aude m'a fait parvenir une lettre à laquelle est joint un extrait du registre des délibérations du directoire du département, relative au numéraire et aux assignats.
(L'Assemblée renvoie ces pièces aux comités des finances, de commerce et d'agriculture réunis.)
Un de MM. les secrétaire$ fait lecture d'une let-, tre du sieur Jauffret, président de l'assemblée électorale du département de l'Allier, qui annonce la nomination, pour la formation du tribunal de cassation, de M. Giraudet de Boudemange, homme de loi, et ci-devant procureur du roi en la maîtrise des eaux et forêts à Moulins, et pour suppléant, M. Hennequin, aussi homme de loi, maire de la ville de Gannat.
, au nom du comité diplomatique Messieurs, un commis de laBanque publique de Vienne et le teneur de livres de cette Banque se sont évadés en Suisse ; étant sur le point d'être arrêtés sur la réquisition de l'envoyé de Vienne, résidant à Bâle, ils se sont réfugiés à Huningue, où le même ministre les a dénoncés à la municipalité de cette ville, comme prévenus d'avoir
cootrefait des billets de la Banque autrichienne pour des sommes considérables. Il en a réclamé arrestation et l'extradition en vertu des conventions et usages constamment suivis entre la France et les Etats germaniques. La municipalité s'est contentée de les faire transférer de leur logement dans une auberge, où ils sont détenus sous une sûre garde ; enfin elle a mis les scellés sur leurs papiers et effets.
Le ministre de l'intérieur, à qui la municipalité d'Huningue a rendu compte de cette réclamation et de cette arrestation, après avoir fait vérifier, par le ministre des affaires étrangères, l'existence non interrompue des conventions entre le gouvernement français et l'Empiré germanique sur la.délivrance des criminéls, conventions jusqu'à ce jour fidèlement exécutées de part et d'autre, a cru pouvoir adresser à la municipalité d'Huningue les ordres du roi pour l'extradition des deux, prisonniers.
Dans cet intervalle, les détenus ont fait présenter requête, au tribunal de district dans le ressort duquel la ville d'Huningue se trouve, tendant à obtenir leur élargissement; sur la réquisition du commissaire du roi, le tribunal a prononcé que lesdits particuliers resteraient dans l'état d'arrestation et que la question d'extradi-j tion, étant du ressort du droit public, devait être soumise à la déeisien de l'Assemblée natio-nate à laquelle les pièces relatives à cette affaire seraient incessamment adressées, ainsi qu'à M. le garde des sceaux.
Depuis ce temps, Je tribunal ayant eu avis, par un membre du comité des rapports, que cette affaire avait été renvoyée à votre comité diplomatique, a rendu un second jugement par lequel, sans s'arrêter à l'ordre envoyé à la municipalité d'Huningue au nom du roi, et persistant dans son premier arrêté, il a fait défendre à ladite municipalité d'obtempérer et de permettre aucune poursuite contre les prévenus.
En conséquence, toutes les démarches du résident impérial sont devenues inutiles; il les a cependant réitérées de la maniéré la plus pressante et a annoncé une lettre de l'empereur à son ministre en France. En effet, le chargé d'affaires de la cour impériale; en l'absence de l'ambassadeur, n'a pas tardé à faire auprès du ministre du roi les mêmes réclamations ; il a représenté, non sans fondement, combien le crime dont les sieurs Heniii et Scfrvyartz se sont rendus coupables intéressait la sûreté publiqu!e de toutes les nations et particulièrement la nation française, dans la circonstance où elle vient de donner le cours le plus étendu à un nouveau numéraire, et combien elle aurait à regretter si, par des lenteurs et des difficultés, dans cette circonstance particulière, elle autorisait en quelque sorte, par son exemple, les Etats voisins, et en particulier ceux du Corps germanique, à accorder le même asile et là même impunité à ceux qui pourraient entreprendre la contrefaçon de son papier national; il a rappelé que, dans des circonstances analogues, le gouvernement des Pays-Bas s'était prêté avec empressement à faire arrêter des particuliers prévenus d'avoir fabriqué des billets de la Caisse d'escompte, quoique cette banque ne fût qu'un établissement particulier, protégé seulement par le gouvernement français, tandis que la Banque devienne est devenue depuis longtemps la Banque nationale autrichienne et la cheville ouvrière de toutes les Opérations dé ce gouvernement, eu sorte que le
délit fait contre cette Banque est intimement lié avec celui de l'Etat.
Votre comité diplomatique a examiné cette question de droit public sous ses différents rapports, et nous avons pensé qu'un usage conventionnel, appuyé d'une réciprocité constante, devait être aussi sacré que des traités positifs. Or, nous pouvons vous assurer que la restitution réciproque des criminels ou des prévenus de crimes publics a toujours été constamment observée entre la France, l'empereur et les Etats d'Allemagne. Nous nous sommes d'ailleurs déterminés, moins par des considérations de circonstance,que par les principes du droit public, par ceux de l'intérêt général et particulier, par les lois du bon voisinage et de l'éternelle justice^
Il est un principe constant et plus sacré que toutes les conventions et les usages, c'est que les crimes qui intéressent la société en général, qui blessent la bonne foi publique, ne doivent trouver nulle part ni protection ni asile, et ce seul motif suffit pour} engager l'Assemblée nationale à ne point s'écarter des règles et des procédés qui sont établis par l'usage le moins interrompu et le plus immémorial entre la France et les puissances voisines, et en particulier entre tous les Etats d'Allemagne.
Nous croyons donc -devoir vous inviter à consacrer ce principe salutaire dans le projet de décret que nous vous proposons et dont vpici le texte :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité diplomatique sur l'arrestation faite d'après la réquisition du ministre impérial, résidant à Bâle, des sieurs Henin et Scnwartz, comme fugitifs et prévenus du crime d'avoir fabriqué de faux billets de la Banque publique de Vienne, décrète que le roi sera prié de donner les ordres nécessaires pour l'extradition des deux personnes détenues à Huningue et réclamées ministériellement par la cour de Vienne, et pour faire cesser tout délai et toute opposition ultérieure à ladite extradition. »
(de Saint-Jean-d'Angè\y). Messieurs, la proposition qui vous est faite touche à une des plus grandes questions du droit public. (Murmures.)
Plusieurs membres : Aux voix !
(de Saint-Jean-d' Angêly). Je ne m'oppose point au décret, mais je crois que vous devriez entendre quelques observations.
Plusieurs membres : Aux voix !
(de Saint-Jean-d'Angêly). Mon observation est extrêmement courte et simple.
Messieurs, je désire que le crime soit puni, je désire que les scélérats ne trouvent pas d'asile en France ; mais je désire aussi que l'arbitraire ne vienne pas s'immiscer pour faire emprisonner un citoyen.
Je crois qu'en principe il est vrai qu'une nation doit toujours rendre les criminels transfuges d'une puissance étrangère qui les réclame; mais ce ne doit pas être sur une simple réquisition d'un ministre, sur une réquisition arbitraire. Il faut que les personnes arrêtées ne soient rendues que lorsque les formes légales auront été observées ççntre elles dans leur pays, que lorsque le ministre de la puissance réclamante présentera un décret dp prise de corps
légalement rendu par un tribunal : sans cela, tous les d spotes des Etats voisins, et vous en êtes environnés, feraient réclamer par leurs ministres tous les amis de l'humanité, toutes les personnes qui n'auraient d'autre crime que d'avoir prêché la liberté.
Plusieurs membres : Il a raison.
(de Saint-Jean-d'Angéty). On vous propose en ce moment de rendre des hommes que je suppose, que je crois coupables; mais avez-vous des preuves que ce ne sont pas des hommes persécutés par l'autorité arbitraire? Si vous rendez ceux-ci sans observer aucune formalité, il n'y a pas de motif pour que vous refusiez de livrer entre les mains des puissances étrangères, sans aucune forme quelconque, tous les amis de la liberté.
Les Anglais, ce peuple jaloux de la liberté, ont toujours conservé la prérogative de leur territoire. Ne connaissez-vous donc pas l'usage de cette nation libre et fière dont vous aimez à suivre et à surpasser les exemples ? Ne voyez-vous pas au milieu d'elle des hommes contre lesquels les réclamations les plus vives, les plus générales, se sont élevées du sein de la France qu'ils ont opprimée ? Ne les voyez-vous pas, tout couverts du mépris de la nation anglaise, jouir cependant d'un refuge assuré, tant elle est jalouse de conserver les droits sacrés de la liberté ?
Je supplie donc l'Assemblée de considérer que ce n'est pas dans le moment où la France peut devenir l'asile de tous les amis de la liberté, qu'elle doit accéder, sans aucune forme, sans aucun examen, à la demande qui lui est faite ; qu'elle doit violer, même en la personne des plus grands scélérats, ce droit d'asile, jusqu'à ce que le crime de ces hommes ait été prouvé et établi jusqu'à l'évidence. J'établis la présomption évidente d'un délit sur un décret de prise de corps légalement rendu ; ici vous n'avez qu'une réclamation d'un ministre, qui n'est appuyée d'aucun titre, d'aucune ordonnance de justice ; tout ce que je désire, c'est que vous exigiez du ministre, et certes ce n'est pas injuste, la preuve qu'ils sont décrétés. Si vous n'admettez pas ma proposition, je puis me tromper, mais je crois que vous violez les droits de la liberté universelle.
Je demande donc que les étrangers arrêtés à Huningue ne soient rendus que lorsqu'on vous présentera un décret de prise de corps rendu contre eux.
11 ne vous est certainement pas échappé que le rapporteur lui-même a été forcé de convénir qu'il ^existait aucun traité qui obii-geât les deux nations à s'extrader mutuèllement les criminels sur une simple réquisition ministérielle; un pareil traité ne pourrait exister. On vous a parlé d'usages conventionnels et on ne vous donne pas la preuve que ces usages existent, et moi je nie qu'ils aient jamais existé.
L'usage qui n'existe que de ministre à ministre estun usage despotique. Je suis d'un département voisin de l'Allemagne lorsqu'une réquisition semblable à ce Ile* ci était faite, On envoyait, dé tribunaux à tribunaux, l'instruction, la procédure et le décret : ce n'était que sur la présentation de l'instruction et du décret que les criminels étaient extradés. Ici on n'a envoyé que des émis? saires en poste, qui venaient sans aucun titre» sans décret, pour s'emparer des personnes déte-
nues et, qui ont même avoué depuis qu'ils avaient voulu tenter les juges.
le demande que ces personnes continuent d'être en état d'arrestation; mais qu'elles ne puissent être extradées sans la présentation d'un décret judiciaire.
, J'appuie la motion de MM. RegnaUd et Rewbell; vous n'avez aucune prévention acquise contre^ les particuliers accusés.
Le cothité diplomatique ne s'est pas dissimulé les principes qu'on vient d'exposer, il les connaissait; mais il n'a pas vu qu'ils fussent applicables aux circonstances, ét leùr application rigoureuse serait contraire aux opinions de ceux mêmes qui s'en sont montrés les défenseurs : car si les personnes en question ne doivent pas être réputées coupables sans un décret de prise de corps, il est vrai aussi qu elles ne doivent pas être arrêtées sans un décret de prisq de Corps; et personne n'a demandé qu'elles fus^ sent mises en liberté. Il est contraire à vos principes, il est contraire aux grands principes de la liberté, que des personnes soient emprisonnées sur la simple dénonciation d'un ministre étranger.
On a cherché à exciter la sensibilité et l'humanité de l'Assemblée ; on lui a dit que la France doit être un asile sacré pour tous les amis de la liberté. Eh bien, que l'on sache qu'on s'est plusieurs fois adressé au comité diplomatique pour demander l'extradition de plusieurs défenseurs de la liberté, réfugiés en France,, et que jamais il n'a voulu se charger de vous présenter une pareille pétition. Mais il s'agit ici d'un crime d'Etat, crime dont la punition intéresse la nation même; il s'agit de la falsification, non pas seulement de lettres de change particulières, mais de lettres de change dé la banque de Vienne.
Vous avez émis pour 1,200,000 livres d'assignats; si des Français établissaient une fabrique d'assignats à Bâle, vous enverriez demander les coupables; si, pour les arrêter, on attendait qu'il fût fait une procédure, qu'il fût lancé un décret de prise de corps, Combien ce délai ne pourrait-ii pas vous devenir funeste ?
L'observation de M. d'André porte à faux, puisque, sur la simple réquisition du ministre, les transfuges ont été arrêtés; ils sont gardés à vue; ils ne peuvent plus être nuisibles.
Je demande que le roi soit prié de les faire extrader, mais sur la présentation d'un décret judiciaire.
Voici un fait : Un nommé Foucault, orfèvre français, récemment accusé d'avoir fait de faux louis, s'est réfugié A Bruxelles. Le tribunal du district de Charîeville a commencé son procès et demandé à la cour dé Bruxelles que le fugitif lui fût ramené ; mais la cour de Bruxelles a refusé de le rendre, en disant qu'elle consentait cependant à continuer le procès, si l'on voulait envoyer les témoins à Bruxelles.
Il résulte donc de cette affaire qu'il n'y a pas de réciprocité entre les deux nations, ce dont je ne doute pas. Je demande, par conséquent, qu'on ajourne le projet de décret proposé par le comité diplomatique, jusqu'à ce que la cour de Bruxelles ait fait une réponse satisfaisante,
D'après le fait qui vient d'être allégué par le préopinant, je demande que le projet de décret soit renvoyé au comité diplomatique, parce que nous prendrons connaissance de ce fait-là.
(La discussion est fermée.)
Le décret suivant est rendu :
« L'Assemblée décrète que le comité de Constitution se réunira incessamment au comité diplomatique, pour proposer une loi sur l'extradition réciproque des prévenus de certains crimes, entre la France et les autres nations de l'Europe, et qu'en attendant, le roi sera supplié de donner les-ordres les plus précis pour que les deux prisonniers détenus à Huningue, sur la réquisition et la dénonciation du ministre impérial, y soient soigneusement gardés, et que les scellés restent apposés sur leurs effets, et que toutes précautions soient prises contre le divertissement des-dils effets, et contre l'évasion desdits détenus; se réservant l'Assemblée nationale de prononcer ultérieurement, tant sur la question en général, que sur ce fait particulier. »
Voici une lettre adressée à l'Assemblée nationale par la municipalité de Vannes, département du Morbihan :
« Messieurs et très chers concitoyens, nous vous adressons une copie des procès-verbaux qui constatent les fatigues et les chagrins cuisants que nous avons essuyés dans la terrible journée du 13 de ce mois.
« Nos cœurs sont encore déchirés d'avoir vu couler le sang de plusieurs malheureux citoyens séduits et trompes par ceux qui devaient les éclairer. Le fanatisme de nos prêtres est à son comble ; il leur faut des flots de sang et leurs vœux sont en partie exaucés; leurs menées sont exécrables. Nous avons épuisé tous les genres de sollicitations : rien n'a pu les émouvoir. Ce sont en général des cœurs de bronze ; l'humanité n'est rien pour eux, et leur seul désir est de nous plonger dans les horreurs d'une guerre civile.
« Il serait trop long, Messieurs, de vous détailler tous les perfides moyens dont ils se servent pour abuser et égarer nos bons paysans. Entre toutes les noirceurs de ces horribles factieux, un prêtre furieux a renouvelé le forfait du cardinal de Lorraine,prêchant au nom d'un pieu de paix le meurtre et Je carnage aux ligueurs qu'il envoyait pour assassiner l'amiral de Coligny. Dans une des paroisses révoltées, ce monstre a dit la messe avant le jour èt a donné ensuite le crucifix à baiser à tous ces pauvres gens, qui partaient l'instant d'après pour venir nous égorger. (Mouvement prolongé.)
« Il persuadait à ce peuple égaré qu'il devait, en toute confiance, partir pour Vannes et venger par l'effusion de notre sang le ciel offensé, leur assurant qu'il pouvait nous assassiner sans péché. Heureusement que le zèle des bons citoyens a fait échouer cette tentative.
'« On procède actuellement à l'information de toutes ces atrocités; vous voyez qu'on voulait nous préparer à Vannes une seconde Saint-Barthélémy. Nous apprenons avec plaisir que le ministre de la guerre s'est enfin déterminé à envoyer des troupes dans noire département.
« Nous devons des témoignages de reconnaissance au courage et à la bonne conduite de 150 soldats du régiment de Walsch et de leur respectable commandant, qui, après avoir sauvé de la mort les administrateurs de notre dépar-
tement, ont encore beaucoup contribué, dans la triste journée du 13, à préserver la ville d'une dévastation générale. Nous devons notre salut à ces généreux Irlandais et à 600 hommes de la garde nationale de Lorient, que le département avait eu la prudence de garder ici.
« Nous sommes, avec un éternel attachement, Messieurs et cbers concitoyens, les membres du corps municipal de Vannes,
« Signé : Duvodàn, maire ; blanchat; etc... ».
Messieurs, je demande et je supplie l'Assemblée, au nom de tous les députés de la ci-devant province de Bretagne, et particulièrement au nom du département du Morbihan, que M. le Président soit chargé d'écrire aux gardes nationales de Vannes et de Lorient, ainsi qu'au sieur Oriordan, commandant les deux compagnies du régiment irlandais de Walsch, en quartier à Vannes, pour témoigner à tous ces braves et généreux citoyens la satisfaction et les justes éloges qu'ils méritent pour avoir sauvé la ville de Vannes d'une dévastation générale, par leur bonne conduite, leur courage et leur patriotisme.
(Cette motion est décrétée à l'unanimité.)
Messieurs, M. de Bonnal, membre de cette Assemblée, ci-devant évêque de Clermont, avait fait répandre dans tout le département du Puy-de-Dôme, notamment dans les auberges de la ville de Clermont, l'assemblée des électeurs devant se faire dans celte ville, une lettre imprimée qui ne tendait à autre chose qu'à ce qu'on vient ae vous annoncer de la part d'un autre département (1) ; mais heureusement elle n'a pas eu d'effet.
Plusieurs membres à droite) Ce n'est pas vrai !
Cette lettre est imprimée ; elle s'est vendue à votre porte:
Le patriotisme de tout ce département ne s'est pas démenti. Les électeurs, indignés des procédés de leur ci-devant évêque, ayant reçu dans une de leurs séances un paquet venant de lui, ont délibéré d'abord de ne pas le décacheter, et ont ensuite procédé à l'élection d'un autre évêque, qui est M. Perrier, prêtre de l'Oratoire, qui a été professeur de théologie pendant vingt ans, qui était actuellement supérieur de la maison d'EtQat, homme digne, par ses vertus, de remplacer celui qui avait voulu causer des malheurs à son diocèse. (Vifs applaudissements à gauche. Rumeurs à droite.)
Je demande que la lettre de M. de Bonnal, ancien évêque de Clermont, soit lue; si elle contient les faits que vient d'annoncer M. Biauzat, sans doute elle est punissable; mais s'ils ne s'y trouvent pas,ïl est juste que celui qui les avance dans cette Assemblée soit puni aussi.
Je prie l'Assemblée de Considérer combien il est attentatoire à la réputation dé M. l'évêque de Clermont de...
* Voix nombreuses à gauche : L'ordre du jour! (Rumeurs violentes à droite.)
(L'Assemblée décrète qu'elle passe â l'ordre du jour.)
C'est l'usage reçu, quand on calomnie quelqu'un, de passer immédiatement après à l'ordre du jour ; il n'est pas surprenant que cela arrive pour un homme autant au-dessus de la calomnie de M. Biauzat que l'est M. l'évêque de Clermont.
Je somme en mon nom M. de Biauzat de lire cette lettre, parce qu'il est impossible qu'un pareil fait reste impuni.
L'écrit que M. Biauzat vient de dénoncer se distribue aux portes de cette salle. L'Assemblée n'a pas besoin d'en entendre la lecture pour savoir quelles sont le3 intentions qui l'ont dicté : elle connaît très bien M. de Bonnal.
Les propos de M. Biauzat n'ont pour but que d'exciter les esprits.
Depuis assez longtemps la calomnie a infecté cette Assemblée; le demande la lecture de la lettre de M. de Bonnal.
Elle est connue; on la distribue à la porte de la salle.
J'en demande la lecture.
Je vais la chercher.
L'Assemblée ne doit pas souiller ses séances de la lecture de ces libelles; elle a décrété que l'on passerait à l'ordre du jour : on doit y passer.
rapporte un' exemplaire de la lettre et la dépose sur le bureau.
Plusieurs membres à droite : 11 n'ose pas la lirel
(L'incident est clos.)
L'ordre du jour est la discussion sur les moyens de pourvoir aux dépenses de 1791.
, rapporteur du comité des contributions publiques. Messieurs, votre comité des contributions publiques vous a déjà présenté, le 6 décembre dernier, le tableau des moyens par lesquels il vous proposait de pourvoir aux besoins de l'année 1791; celui des dépenses que vous avez maintenant sous les yeux, et dont vous avez adopté ies basés, apportera peu de changements aux mesures qui vous avaient été soumises ; mais voire comité va vous parler avec plus d'assurance, puisqu'il partira de points déterminés par vous-mêmes.
Depuis son premier rapport, vous avez décrété le tarif des douanes, le timbre et les patentes, vous avez déclaré que vous ne vouliez point établir de taxe sur le cru, l'enlèvement ni la circulation des vins et autres boissons, vous avez rendu libres la culture du tabac, la fabrication et le débit du tabac, et l'examen du rapport et des états du comité des finances l'a mis à portée de diriger ses combinaisons, de manière à vous présenter des ressources proportionnées à la somme des besoin^ devenue un peu plus forte
que les premiers calculs ne l'avaient donnée; il a donc revu tout son travail, et si le comité des finances a eu l'attention de porter les besoins à leur plus grande hauteur, le comité des contributions publiques au contraire vous présente les ressources sans exagération.
Il a tâché de les réduire au moindre nombre possible, persuadé qu'en fait de contributions comme en toute autre matière, le système le moins compliqué est toujours préférable, et que la multiplicité des taxes produit encore peut-être plus de vexations que leur quotité. D'ailleurs, toujours pénétré de vos principes, il n'a point oublié que si vous avez supprimé la gabelle et les aides, si vous avez renoncé au produit qUe fournissait sous l'ancien régime le droit sur les cuirs, les fers et le tabac, ce n'a pas été pour substituer à ces impositions désastreuses des contributions ou des taxes qui exigeassent les mêmes moyens de perception. Il a fallu cependant en chercher d'indirectes, car l'immensité de vos besoins ne vous permettrait pas d'obtenir immédiatement des contribuables les sommes nécessaires pour y subvenir.
Le régime vicieux auquel nous succédons avait accumulé les dépenses et tari les sources véritables des revenus : le temps seul, aidé d'un meilleur ordre, pourra faire renaître les richesses, et,rétablissant leur cours naturel, rendra possible la simplification du système des contributions; c'est à vos successeurs, plus heureux que vous, qu'il appartiendra d'exécuter ce que vous ne pouvez pas faire aujourd'hui.
Mais le choix de vos ressources est très borné, car presque toutes les impositions indirectes ont besoin, pour leur perception, des visites domiciliaires, et vous les avez proscrites; vous avez voulu que la demeure des citoyens fût un sanctuaire impénétrable aux agents du fisc; et quoique la tâche que vous avez imposée à votre comité en soit devenue plus pénible, il applaudit avec, joie aux décrets salutaires qui ont aboli toutes les inventions funestes du régime financier. Il a seulement cru nécessaire de vous rappeler vos principes, avant de vous soumettre le dernier résultat de ses travaux.
Le décret que vous avez rendu hier a fixé les dépenses du Trésor public pour la présente année à 584,700,000 livres, et celles des départements à 56,300,000 livres, ce qui forme un total de 641 millions de livres.Mais,par un décret an térieur, vous avez ordonné que la caisse de l'extraordinaire fournirait au Trésor public 60 millions de livres pour tenir lieu des revenus des domaines nationaux qu'elle percevra : c'est donc seulement 581 millions de livres pour lesquels votre comité des contributions publiques doit vous fournir des moyens (1). Il ne vous proposera pas encore la distinction des parties de contributions qui seront affectées aux dépenses des départements; elle se fera très facilement; lorsque vous aurez arrêté l'ensemble.
Mais avant de vous mettre sous les yeux ce qui doit résulter des perceptions, il commencera par vous présenter :
1° Le produit des forêts domaniales qu'il avait évalué trop haut à 20
millions de livres dans son premier rapport, mais qu'il porte sans
crainîe
Yous ue trouverez pas celte fixation exagérée, lorsque vous remarquerez que, indépendamment des bois de l'ancien do-* mai ne de la Couronne, les fo-rôts domaniales comprennent aujourd'hui tous les bois ci-devant ecclésiastiques, et tous ceux qui étaient possédés par les apanagistes;
2° Uu revenu des salins et satines appartenant à la nation, et môme ce revenu éprouvera cette année une augmentation, par un arrangement qui vient d'être fait avec le canton de Berne.de................... 3,000,000
3° Par la vente de vos magasins de sel et de tabae, dont les premiers vendus à 1 s. 6 d., et les autres à 24 sols la livrer vous produiront encore une somme pareille en 1792...... 20,500,000
4° Rentrée maintenant très assurée de la partdes Américains, du,d«c des Deux-Ponts, etc... 4,000,000
Ces quatre articles forment une somme de.............. 42,500,000 liv.
qui, déduits de.............. 581,500,000
laissent celle de............. 538,000,000 liv.
à fournir par le moyen des perceptions dont voici le tableau :
1° Contribution patriotique, dont vous avez décrété que la caisse de l'extraordinaire tiendrait compte au Trésor public....... 34,562,000 liv.
Elle est comptée, dans les états du comité des finances pour 35 millions de livres; mais votre comité des contributions publiques ne vous présente ici que le produit net, dégagé des frais de perception ;
2° Contribution foncière..... 287,000,000 liv.
Elle s'élèvera en total à 300 millions de livres en y comprenant 6 millions de livres pour les fonds de non-valeurs, et 7 millions de livres pour les frais de perception, et votre comité se réserve de vous présenter, lorsque vous discuterez cette fixation, la proportion dans laquelle il pense qu'est cette somme avec le produit net des revenus fonciers du royaume, afin que vous déterminiez une quotité au delà de laquelle les contribuables qui prouveraient qu'ils ont été surtaxés auraient droit à une décharge.
3° Contribution mobilière .... 60,000,000 liv.
Votre comité vous a observé, dans son premier rapport, que vous ne pourriez pas l'élever plus haut sans la reudre fort onéreuse ;
4° Le droit d'enregistrement, tel que vous l'avez décrété, est évalué à........ 41,625,000 liv.
5° Celui sur les hypothèques, dont le travaillait de concert avec le comité, de Constitution, vous sera soumis très incessamment, est estimé à 5,375,000 livres, parce qu'en étendant l'usage et l'utilité des hypothèques il produira un revenu plus considérable, sans être une charge incommode.
6° Le timbré fournira....... 22,000,000 liv.
7° Et les patentes........... 18,000,000
8° Les douanes vous ont toujours été présentées comme un objet de....*................. 20,000,000
et vous pouvez l'espérer, d'après la taxe sur l'importation du tabac, et surtout si vous baissez le taux sur celle des toiles dont la contrebande vous occasionnerait un déficit considérable.
9° Les postes et messageries. 12,000,000 liv.
10° Les poudres et salpêtres. 800,000
11° Et les affinages, la marque d'or et d'argent, etc., elc...... 1,200,000
12° Les taxes à l'entrée des villes, qui, d'après le rapport qui vous a été fait, doivent produire 24,882,000 livres. Votre comité n'ignore pas le vice de cette espèce de taxe, l'une des moins vexatoires pourtant des impositions indirectes; il ne s'était dissimulé aucune des objections qui se sont élevées, lors de la proposition qu'il vous en a faite, et cependant il n'avait pas cru devoir abandonner cette perception, mais bien lui faire subir une diminution considérable, et en combiner les tarifs, de manière que les consommations du pauvre fussent exemptes presque en totalité, et que la circulation des marchandises ne fût soumise à aucun droit ; il ne croit même pas encore devoir la rayer du tableau de vos ressources ; et c'est à vous seuls, Messieurs, qu'il appartient de décider si vous voulez et si vous pouvez renoncer à un produit de 49 millions de . livres, dont la moitié fournirait aux besoins de toutes les Villes qui, sans cela, n'auront de recours que sur un accroissement très onéreux peut-être de la contribution mobilière à laquelle on avait aussi fait, dans son temps, des reproches très amers.
13° Enfin il vous reste les loteries, qui sont un impôt bien véritable et certainement le plus immoral de tous, mais que vous ne pourrez guère peut-être vous dispenser de laisser subsister encore, et votre comité rougira moins de vous le proposer, parce que vous pourrez l'abolir d'un moment à l'autre, aussitôt que la situation des finances sera moins gênée, ci. 10,000,000 liv.
Le résultat de ces treize articles de perceptions fournit
une somme de ..................537,444,000 liv.
qui, jointe à celle de..........42,500,000
produite par les autres revenus détaillés ci-dessus, compose un total de............. 579,944,000
C'est à................ 581,000,000 liv.
que votre comité des finances a fixé le montant des besoins, niais il a compris dans les dépenses
des départements............. 8,000,000 liv.
pour les frais de perception des contributions indirectes, et ces 8 millions de livres OBt été portés hors ligne dans notre tahleau; ainsi
les................................581,000,000 liv.
se trouvant réduits par cette
déduction à................. 573,000,000 liv.
les revenus se trouveront
excéder les besoins de...... 6,944,000 liv.
Alors si vous conserviez les taxes à l'entrée des villes, vous pourriez : 1° en exempter toutes celles au-dessous de 10,000 âmes; 2° diminuer la taxe d'un quart sur toutes les autres, car vous le savez, Messieurs, une baisse considérable dans la quotité des droits, n'en diminue pas le résultat dans la même proportion; ainsi, par exemple, après avoir déjà supprimé pour Paris, dans le projet de tarif imprimé, les droits qui existaient dahs l'ancien sur les œufs, les fromages, le riz, les légumes farineux, le poissoû de mer sec et salé, les charbons de terre et la tourbe, vous
pourriez supprimer encore ceux sur le porc et sur le mouton, et diminuer d'un tiers les droits sur les boissons, qui, l'étant déjà d'un cinquième par le nouveau tarif proposé, éprouveraient une diminution totale des sept quinzièmes; alors le pauvre pourrait effectivement se nourrir, et se bien nourrir, sans payer d'autre taxe que celle sur le vin, devenue beaucoup pins légère.
Voilà, Messieurs, le tableau des moyens que votre comité vous présente pour 1791; si pourtant vous vous décidiez à supprimer les taxes à l'entrée des villes, il y aurait alors un déficit de 17 à 18 millions dans le tableau des revenus qui vous est actuellement soumis; peUt-être de nouveaux calculs sur le droit d'enregistrement, et sur les taxes du timbre et des patentes que l'opinion publique élève fort au-dessus de nos fixations, mettront-ils votre comtté à portée de vous assurer que leur produit serâ réellement pius Considérable ; alors la recherche de moyens nouveaux deviendrait moins difficile pour la partie rqui regarde le Trésor public, mais non moins'péaible pour subvenir aux besoins municipaux : ce n'est point à votre comité qu'il appartient de trancher une aussi grande question, il attendra vos ordres avec respect, et se livrera au nouveau travail que vous lui imposerez avec le zèle qui l'animera toujours pour remplir vos vues. Il vous demandera quelques jours pour vous faire un nouveau rapport, et presser ensuite la fin de votre travail sur la partie si importante des contributions publiques.
Les moyens que vous aurez arrêtés pour 1791 resteront les mêmes pour 1792, et seront alors supérieurs aux besoins; car indépendamment des économies qui auront certainement lieu, tant dans l'administration générale que dans celle des départements, il y aura d'un côté une diminution très réelle de besoins, résultant de l'extinction annuelle des rentes viagères, et de la vente des domaines nationaux dont la valeur, peu connue jusqu'à présent, offrira des ressources beaucoup plus considérables qu'on ne pouvait le présumer, et d'un autre côté quelques branches de revenus recevront déjà, dès l'année prochaine, un accroissement sensible.
fît pour 1793, en ne supposant même aucune économie extraordinaire, voici la perspective que nous pouvons vous présenter : Diminution sur les rentes viagères ........................ 8,000,000 liv.
Accroissement sur le droit d'enregistrement, le timbre et les
patentes...................... 10,000,000
Postes...............................3,000,000
Douanes......'......2,000,000
Forêts domaniales........... 5,000,000
Et le produit de la régie nationale pour le tabac.......... 3,000,000'
Total...31,000,000 liv.
Qui, déduits de....... 55,000,000
que produiront, en 1792 et 1793, la contribution patriotique et la vente des magasins de tabac et de sel, laisseront une perception de 24 millions de livres à substituer à la contribution patriotique qui coùte^'35 millions de livres, et dans un temps où l'accroissement dés richesses et le perfectionnement de la répartition rendront cette opération facile et point onéreuse.
Si maintenant, Messieurs, vous comparez le tableau des perceptions anciennes, que votre comité-a joint à son rapport du,6 décembre, vous
trouverez que les peuples supportaient sous l'ancien régime une charge de. 766,764,000 liv.
Et que dans la présente
année elle ne s'élèvera qu'à. 670,000,000 liv. (1)
Ce sera donc pour là na- -—
tion en masse un soulagement de....................................196,764,000
Et comme la contribution des privilégiés s'est élevée
à. ...........................36,000,000
Il en résulte que le sou la --—
gement véritable de ceux qui ne jouissaient d'aucun privilège sera dans la proportion de.......................232,764,000 liv.
Tels sont et seront. Messieurs, les effets de la Révolution et de vos lois. (Applaudissements.\
Il est nécessaire, pour que lé comité puisse continuer son travail et vous le présenter complet, que l'Assemblée pfenné une détermination sur la conservation ou la suppression des taxes à l'entrée des Villes; je propose donc, monsieur le Président, d'ouvrir cette discussion dès à présent ou de la mettre à l'ordre du jour pour demain.
L'Assemblée nationale, en ajournant les taxes à l'entrée des villes, a dit qu'elle ne s'occuperait de cet objet qu'après qu'elle aurait décrété tous les articles relatifs à l'imposition.
Je demande donc que l'on s'occupe immédia-» tement de la taxe sur les terres.
le jeune. Nous voici à peu près avec tous les éléments que le comité d'imposition pouvait nous fournir; et j'observe avec satisfaction, d'après les personnes instruites dans la partie des impôts, que les droits d'enregistrement, de timbre et de patente produiront 50 millions au dessus de l'évaluation du comité.
Je crois donc, ainsi que M. le rapporteur, que l'Assemblée doit passer à la question des entrées des villes; et qu'en les supprimant... (.Applaudis-sementsi),... elle servira autant les campagnes que les villes: car c'est diminuer les productions que de mettre des entraves à leur débouché.
Je conclus donc à cette suppression et au recours à de nouveaux impôts indirects; au cas seulement où l'on ne pourrait en créer aucun, on ajouterait à l'impôt sur les terres.
Vous avez dû remarquer, dans le rapport qui vient de vous être fait, que le comité a eu pour objet de multiplier les impôts le moins qu'il sera possible. Les produits vous en ont été présentés par aperçu* et personne ne doute qu'ils ne soient tous susceptibles d'augmentation. Il sera facile de remplacer les droits d'entrée perçus au profit du Trésor public ; mais il est impossible de les supprimer, sans supprimer aussi ies droits perçus au profit des villes. (Applaudissements.) .
En effet, votre intention doit être, en les sup* primant, de donner un
débouché à l'indu3trie, et de dégager le commerce de toute entrave. Il
deviendra donc nécessaire que les villes, qu'au moins les grandes villes
soient entendues sur la
L'Assemblée nationale a décrété qu'il serait imposé 584 millions pour les dépenses de 1791 ; et il ne lui a pas été observé que, dans cet état, elle sera obligée de prendre 96 millions sur les capitaux, d'après le propre calcul de M. de Montesquiou, savoir : 76 millions pour les dépenses extraordinaires, et 20 millions de la vente des tabacs et sels. Il ne lui est pas échappé que l'année prochaine elle serait donc obligée, pour couvrir le déficit, d'augmenter la quotité des impositions du royaume. Cependant pour parveuir à payer 584 millions d'impôt, somme qui paraît insuffisante pouf les besoins de l'Etat, il faut, d'après l'aperçu même du comité, faire porter 300 millions d'impôts sur les terres et 60 millions sur les personnes; à ces 560 millions, il faut joindre 60 millions pour les dépenses des départements; il est impossible que ces 60 millions soient payés, à moins que vous ne rétablissiez,comme sous l'ancien régime, des barrières dans l'intérieur. 360 millions et.60 millions font 420 millions. Encore pendani trois années les propriétaires seront obligés de payer la contribution patriotique, qui se monte à 35 millions. 420 millions et 35 font 455 millions; et cette masse d'impôts est assez effrayante pour que l'Assemblée ne se détermine pas légèrement à détruire les impôts qui pourront lui donner la facilité de soulager les propriétaires.
L'Assemblée ne doit pas ignorer qu'il ne suffit pas que la recette soit au niveau de la dépense, il faut encore qu'il y ait possibilité d'établir un impôt pour faire face aux dépenses extraordinaires qui pourraient se présenter, car je ne pense pas que l'Assemblée nationale veuille avoir récours aux emprunts, elle doit être extrêmement dégoûtée de .ce régime ; il me semble que lés maux que la France a éprouvés pour s'être livrée à cette manière d'être doivent l'en avoir tout à fait dégoûtée.
Or, si, dans ce moment-ci, par l'impôt direct, vous forcez les propriétaires de payer tout ce qu'il est physiquement possible de payer, je vous demande quelle sera votre ressource dans un cas de guerre, dans le cas d'un accident. Il ne faut pas imaginer qu'à cette époque vous puissiez augmenter les impôts indirects. Toutes les fois qu il y a guerre dans le royaume, les impôts indirects sont très difficiles à percevoir. D'ailleurs, l'impôt indirect par sa nature ne peut jamais être augmenté. Avant d'augmenter un impôt indirect, il faut faire diverses combinaisons toutes plus difficiles les unes que les autres. Vous savez qu'en matière d'impôt indirect 2 et 2 ne font pas 4, et qu'en croyant augmenter le tarif on diminue la perception, soit par le défaut de perception, soit par l'attrait donné à la contrebande, soit enfin par la diminution qui s'opère dans la consommation.
D'après cela il est absolument nécessaire que non seulement l'Assemblée nationale n'exige pas des propriétaires tout ce qu'ils peuvent, mais qu'elle mette le plus de mesure qu'elle pourra dans le soulagement qu'elle doit leur accorder cette année où ils ont éprouvé de très grandes pertes. Vous n'ignorez pas qu'une portion des propriétés deuet empire a été ébranlée, qu'il
reste encore des inquiétudes dans l'âme de ceux qui ont les propriétés les plus considérables. Je demande donc qu'il soit mis à l'ordre du jour quelle sera la somme imposée sur les terres, parce qu'alors nous verrons la mesure possible; et une fois que cette mesure aura été connue, nous traiterons les autres questions. (Applaudissements.)
Je suis de l'avis du préopinant; et ie m'autorise également du principe posé par M. de Crillon, à savoir que les terres ne doivent être imposées qu'autant que la ressource des impôts indirects est épuisée.
Je demande qu'on fixe le maximum de la con-, tribution foncière; qu'on décide si les terres supporteront une taxe du tiers, du quart ou du cinquième de leur rapport.
Je m'attends que l'on me répondra que la somme de la contribution sera de 300 millions ; mais j'observe qu'il sera ensuitè infiniment difficile de faire la répartition d'un semblable impôt. Aujourd'hui la population, la richesse, les .facultés mobilières, toutes les bases sont encore inconnues et je prévois que chaque département sera occupé de faire de grands efforts pour se soustraire à la taxe qui lui sera imposée et pour rejeter sur le département voisin ce qu'il croira de trop chez lui; je prévois que l'assiette des impôts aura de la peine à se faire.
Ayant, comme vous l'avez, la faculté de puiser des secours abondants dans la caisse de l'extraordinaire, vous devez à la nation de décréter promptement le maximum au delà duquel la contribution foncière serait un fardeau insupportable.
le jeune. Il me paraît bien plus naturel de commencer par épuiser tous les impôts indirects dont le revenu est incertain et n'est pas susceptible d'une évaluation précise, avant d'avoir recours à la base la plus solide de l'impôt, la contribution foncière, dont le revenu est fixe et invariable.
Je réponds à M. de Cazalès que je ne crois pas notre situation aussi fâcheuse qu'il nous l'a annoncée. Je crois que si nous étions forcés à des dépenses extraordinaires, une nation qui doit 275 millions, et qui est dans un état de prospérité, peut bien diminuer considérablement ses charges en offrant un remboursement forcé aux propriétaires de rentes perpétuelles et un remboursement volontaire aux propriétaires dé rentes viagères; ce remboursement sera toujours facile à effectuer tant que les assignats auront une valeur inférieure aux'dofnaiii'es nationaux et par la baisse qui s'est déjà opérée dans l'intérêt de l'argent.
L'impôt par excellence, c'est l'impôt sur les terres, parce qu'il est le seul qu'on puisse répartir avec égalité et lever avec économie d'argent et d'hômmés; s'il était possible, il n'en faudrait aucun autre. Examinons donc d'abord avec précision cef que les terres peuvent supporter, et nous recourrons aux impôts indirects lorsque nous aurons découvert de combien l'impôt foncier est insuffisant.
Je demande à M. Lavenue si c'est bien sérieusement qu'il nous a dit que l'impôt sur les terres pouvait s'étendre et se diminuer à volonté; quant à moi, je crois que cet impôt, comme tous les autres, a une mesure après laquelle on ne doit plus compter sur cette ressource.
Quant au raisonnement de M. de Grillon, cela se rapporte à ce que disait un jour Fox au parlement d'Angleterre, où l'on exagérait la mauvaise situation de nos finances; il répondit avec beaucoup de vigueur et d'énergie : eh ! comptez-vous our rien la ressource qu'a la France de faire anqueroute". (Murmures.) Peut-être jusqu'ici n'ai-je pas entendu le français : mais jusqu'ici j'ai appelé faire banqueroute ou ne pas remplir sés engagements exactement ou en diminuer la quotité. Une diminution sur les intérêts dus est une banqueroute partielle.
Ainsidoncje regardel'impôtsur les terrescomme le plus mauvais des impôts, malgré l'opinion de M. Lavertuqui pense que c'est l'impôt par excellence; et je regarderais comme parfaitement bien administré un royaume qui pourrait s'en passer. Il «era facile de prouver que l'impôt sur les terres n'a qu'un seul avantage, celui de se percevoir à peu de frais; mais il a le désavantage de peser d'une manière plus dirécte sur les contribuables, le désavantage de demander à un contribuable, lorsqu'il ne peut pas payer, le désavantage lorsqu'il est excessif de rendre absolument nuls les impôts indirects, car, lorsque le propriétaire est ruiné par l'impôt direct, il ne consomme plus, et l'impôt indirect ne se perçoit plus : de manière que ces deux espèces d'impôts ont entre eux une liaison intime et que la proportion à établir entre eux est peut-être la question la plus difficile'qui ait pu être traitée dans cette Assemblée et qui ne l'ait pas été.
Il suit de ces différents raisonnements que c'est une question extrêmement importante que de savoir si l'impôt direct n'est pas plus fâcheux que l'impôt indirect. L'impôt direct porte sur les objets de première nécessité, au lieu quel'impôt indirect porte sur les objets de luxe. Je crois qu'en dernière analyse cette grande question peut se réduire là.
e- Lorsque M. de Sully prit l'administration des finances, elles étaient très dérangées; pour les établir, il commença par diminuer l'impôt direct. On crut qu'il faisait une mauvaise opération : il prouva le contraire ; car les propriétaires ayant réacquis de l'aisance, consommèrent davantage : les impôts indirects augmentèrent ; et, par l'ordre qu'il mit dans l'administration^ il parvint à combler le déficit d'alors. Je suis bien aise de citer à l'Assemblée cet exemple, parce qu'il pourra faire quelque impression sur elle. Que ferez-vous quand vous aurez ôté tous les impôts indirects? On aura beau vous dire dans cette tribude que l'impôt direct est un impôt odieux, que l'impôt direct ne peut plus être perçu ; vous répondrez : que voulez-vous que nous fassions? Les impôts indirects sont abolis, il faut faire face aux dépenses.
Si l'Assemblée veut procéder avec franchise à l'établissement de l'impôt, si elle veut que la discussion soit éclairée, elle doit dire quelle est la somme que doivent supporter les terres, et non pas la fixer au quart ou au cinquième et dans toutes ces proportions qûi laissent une ressource étendue à la mauvaise roi de ceux qui ne veulent pas payer; car chaque département lâchera de payer le mbins possible : le patriotisme s'efface b aucoup lorsqu'il s'agit de payer; et d'ailleurs je n'ai vu jusqu'ici que l'intérêt personnel allumer le patriotisme.(Rires à gauche.) Autrement vous éprouverez des pertes qui, jointes aux 600 millions que vous avez mangés ceue année, vous jetteront dans un énorme embarras. Je persiste à demander que l'on mette à l'ordre
du jour la quéstion de savoir quelle sera la masse de l'imposition fouciêre.
le jeune. Je n'entrerai pas dans le détail de l'impôt direct et de l'impôt indirect; je ne demanderai pas au préopinant si les droits sur le timbre, sur les hypothèques, sur l'enregistrement sout des impôts indirects et s'il préférerait l'impôt sur les aides, sur la gabelle. (Mw-mures à droite; applaudissements à gauche.)
Je veux seulement dire qu'il est utile et juste de forcer les rentiers perpétuels à recevoir des remboursements ou à consentir à la réduction de leurs intérêts. (Applaudissements.)
Mon opinion relative à cette question est franche; elle est digne de la loyauté de l'Assemblée et, j'qse le dire, de la mienne.
Le comité des finances vous a présenté le tableau des dépenses de l'année. Le premier chapitre monte à 281 millions, le second à 301 millions, le troisième chapitre qui concerne la dépense des départements s'élève à
59 millions. Ces trois chapitres additionnés présentent un total de 641 millions. Vous avez ordonné que la caisse de l'extraordinaire fournirait sur le révenu des domaines nationaux une somme de 60 millions; ôtez 60 millions du total qui vient de vous être présenté, reste 581 millions. Mon calcul n'est donc pas très forcé quand je dis 600 millions.
, rapporteur, fait le rapprochement des calculs du comité des finances et de ceux du comité d'imposition, et montre que celui-ci n'a fait que défalquer
60 millions qui doivent être pris sur la caisse de l'extraordinaire.
Dans cette discussion, pour parvenir à un résultat certain, il faut bien poser les faits. Je confirme l'état qui vient de vous être présenté par,M. La Rochefoucauld, président du comité des finances, et j'entre dans les détails. L'Assemblée a décrété que la caisse de l'extraordinaire verserait dans le Trésor public une somme de 60 millions en compensation du revenu des domaines nationaux. Ges 60 millions sont la représentation de l'intérêt delà dette non constituée. Les domaines nationaux représentent le capital de la dette non constituée; ainsi il faut écarter dorénavant de nos dépenses le capital et l'intérêt de la dette non constituée. Reste 581 millions compris les 59 qui composent la dé-pe n se des départemen ts.
M. de: Gazaiès a dit que nous avions déjà mangé 600 millions d'assignats, c'est un fait incontestable; mais il ne faut pas dire qu'ils ont été absorbés par les besoins du Trésor public; il n'y a pas plus de cent millions employés à subvenir aux besoins du Trésor public; car il y a un an qu'on a commencé à émettre les assignats, du moins pour les premiers. Vous avez payé 170 millions à la caisse d'escompte, et vous ne lui devez plus rien; vous lui deviez les. intérêts, c'est encore un capital remboursé avec un capital.
Vous deviez 130 millions d'anticipations* c'est-à-dire qu'avant vous on avait mangé votre revenu direct : au premier avril, Messieurs, vous n'allez plus devoir d'anticipations ; elles ont été remboursées, depuis un an, de mois en mois ; c'est encore 130 millions remboursés en capitaux, car on payait l'intérêt des anticipations. Voilà donc 300 millions de capitaux remboursés, sur lesquels on a gagné 15 millions de rente.
J'ai encore une ob?ervation importaitè à vous faire, c'est qu'à cette époque l'Ëtat était arriéré sur lès rentes viagères et perpétuelles, et en général les charge? dé l'Etat; éiaiënt arriérées de 18 à 20 mois. 'Tout le monde sait encore que l'on paye maintenant les rentes à leur échéance. Lorsque vous ppyëz up arriéré, vous remboursez un capital. Car, Jprsque vous devez un écu, et qup vous le pavez, yous vous déchargez d'iifte somme dont vous deviez l'intéiêt, à la rigueur. L'arriéré a absorbé près de onze cents millions. Il y a donc eu pour 500 millions de capitaux employés à des remboursements de capitaux. Voilà des faits constants. (Applaudissements.Y
En fait de calculs, Il faut entendre le pour çt Je ^oqtre. On a prétendu...
Je demande la parole après M. Cazalès, et je m'epgage a RF°i|¥Pr que M. Anson a fait un conte de Peàij-d'àne.
On a prétendu que j'avais avancé un fait iiiexaçj;, en disant qu'on avait mangé pour 600 millions d'assignats. Il est vrai que ces 600 millions n'ont pas mangés en pure perte...
Un membre à gauche : Ah I il en convient donc 1
, Il çst vrai qu'une partie de ces assignats, mais c'est la moindre, a servi à rembourser une detfô existante ; mais le calcul de I\f. Anson n'pn est pas moins inexact,
600 millions ont été versés par la caisse de l'extraordinaire dans le Trésor publie, 72 millions y ont été versés récemment, ce qu^ porte la somme à 672 millions. A ces 672 millions, si vous ajoutez 40 millions d'emprunt national, cela fera 712 millions de capital qui ont déjà été consommés. Sur ces 712 millions, vous avez remboursé 130 millions d'anticipations, et 170mil-lions à la caisse dVscompte, formant 800 millions. Je vous prielie vouloir bien observer cependant que sur ces 170 millions dus à la caisse d'escompte, une partie de cette propre dt^e a été employée pour les besoins de l'année avant la circulation des assignats ; éâr nous ne devions 170 millions à la caisse d'éscomptç; que parce que nous lui avious emprunté 70 ou 80 millions. Il résultera évidemment de ce calcul qu'il y a environ 500 millions de mangés effectivement en capital ; et si l'Assemblée à des doutes, elfè n'a qu'à jeter les yeux sur les tableaux de recette et de dépense qu'on lui distribue tous les mois, et elle verra que la plus forte partie des sommes lui est fournie par la caisse dé l'extraordinaire; ce qui prouve que vous mangez votre capital.
Le comité des finances a établi qu'il était nécessaire d'avoir 582 millions pour la 'dépêtrée commune de l'année t il a étabji qu'il étâit nécessaire d'imposer 59 ou 60 millions pour les dépenses locales des départements, ee qui fait une somme de 642 millions; Il a établi qu'il était nécessaire d'imposer 67 millions en dépenses, qu'il lui plaît d'appeler extraordinaires,' et qué, quant à moi, je regarde comme très ordinaires, car vous conviendrez que 15 piillions, distribués en ateliers de chanté, sont une dépense très ordinaire; que oette dépensé est une compensation du tiers du patrimoine de l'Eglise, qui appar-» tient actuellement à la nation. (Murmures.)
Je regarde également comme très Ordinaires
les dépenses pour l'armée auxiliaire, pour les travaux1 de Cherbourg, qui ne finiront pas cette année, les suppléments à donner départements de la guerre et de la marine ppur faire face à l'augmentation 4e solde des troupes de . terre et de mer.
Il est enpore certain que lè comité des finariqes ne vbùs a parlé d'aucune somme pour les dépenses imprévues; et il n'y a rien au monije de si certain, qu'il y aura des dépenses imprévue-. Dans un grand Empire, c'est la chose du iponde qui doit être la p(us prévue.
On prétend d aptre par{ quç les revenus de^ biens, ecclésiastiques produiront 6Q millions, moi je les réduis à 40. Ils rie voient que 60 million? lorsqu'ils étaient pntre les mains de leurs propriétaires, ce Qe sera pas trop donner aux dilapidations et aux infidélités des municipalités que dç lés diminuer d'un fiers. (Murm}ires à, gauche„)
Cela est si vrai, qu'au mois çle janvier ils n'ont produit que 26,0OQ livres; mais, en accordant encore au comité, çé revenu de 60 pplliops, je lui observe qji'ii a omis les frais de perception, où dû mpins qu'il les a portés à un taux infinimeut trop léger, eq ne les portant qu'à 8 millions. Selon M. Necter, iïsi montent à 10 «t 1/4 0/0, D'après vos rèfprmeSt je les réduis à 6 0/0t et je les porte à 31 milliofjs; ce n'est certainement pas trop.
Je reviens $ l'fi question. Votre .comité a fait valoir lé soulagement que les propriétaires éprou-? veraient par la suppression de la dîme. Cette considération,, qui est jus^e en elle-même, ne l' st pjjs pour qette 3nti£é, par les impftfjs, en 1791, né peuvent être acquits qpè i par réçqùq de 1790 ; la dîme a été payée pendant pette an bée. Ainsi il né faut pas compter sur la diminution de la dîme.
J'ai été obligé d'entrer dans tous ces détails porçr établir, qu'il fapt, ftv^qt. d'aUer plus av^pt, décréter Quelle sera quotité, la mesure, le taux de l'imppsi^op directe.
Je p'^i qu'une simple observation à faire 4 rAsspmblé^ Elle a entendu tqut comme m pi l'é|rauge ^sseftiop de M. Anson ; je vous déclaré que ie prends l'engagement de démontrer pa^ des chiffres incontestables qu'il a été pris 800 miluçnf et plus en assignats et que sur ces 8Q0 millions, 330 ont été employés à l'acquit de jft fljitjopalg et le reste pour Je Tfésôr publiç,
Le comité a o,ybljé fie conn. prendre pprmi les qépenses, qui pécessairement porteront sur les propriétaire^ qe fonds, la mendicité; il est impossible qu'après vous êtpe> emparés des jiieps du clergé, vous ne yfips chargiez pas fie l'eptretfep fies pauvres, On a bien porté 15 tpiiliphs en pompée; mais cette somme ne peut swlJi'Ç. En Angleterre la dépense relative à la mendicité s'élève à 60 millions : plip ne sera pas pioindre en Francef Quapd vous aurez déter-mine limppsjtipQ qqj portera sur les terres, vous serez bien plus à portée de décréter quelles seront les uppo^tioôs indirectes qu'il faudra établir.
Je demande donc qu'on fixe, non seulement l'impôt direct, mais même Je maximum de cet impôt,
Je nn répondrai pas aux assen-tion^ que vous avez entendues et aux calculs que vous a présentés [jn des préopinants; on
p'aurait pas plus.de pon fi an ce dans mes raisonnements que dan^ siens-, ma mémoirp pourra^ m£ tromper et qp abuserait de mes èrreqrs involontiirés^
Mais je'vous ^nnçnc^ due la section du Trésor puj)!ic vient d'Hchfé^erl^iat jéréc.épé et de la dépeqsé totâjes de |79Q et wfteâidés assignats pendant cette aqpée. tableau pst prêt à mettre sous yps y» ux * il répondra à tout, Je propose à l'Assemblée de le faire imprimer \iqces-samment. .
Un membre ; Aujp^rd'bui.
, Ce .tftfrièau est as$ez volumineux, mais 1 entrait, sur une feuille* peuf être impritoe d'ici à demain. 1
Par qui sera signé cet état? ' ; ^ «
Par le çpmité des finances.
Ife demandé qU'fi le Soit pa]* M. Dufresne, agent responsable.
Ce travail n'est pas celui dé M, Dqf espe, mais celui qu comité: et, comme il esj^Jp' résultat des opérations de M. Dulresne* if né peut ëtrè signé dè celuirçi, pjjisaue c'est le cojpité qqi le cop]tr$left qu'il ui'pef^ §jgùei: èê qui es$ Je çpt/Jrôfé dp ses opérations.
Comme o'est la verite que nous cherchons ious, j'ai eie bien aise d'entejjdre dire a M. de Rochebrune qu'jl allait faire un travail particuiier. Je Tinvite a impnmer ses calculs; le coiuite des tinances fera de sod cote nuprimer son travail et Ton jugera.
Je ne veux qu'ajouter un seul mof. Comme faits qué l'oh.di|;1à ç^tte tribune sont souvent répétés dan^ le,s jourp$u$ d'uaq cpànlèreinexacte et qu'il , importe dé ne pas laisser propage;* la pïus'pe'tite erreur pendant sgjjlep^pt 2$ heures, quand elle intéressé là nation, jé relèverai, sans réflexions», upe Q/reur qujyj;pj; 4'éph.apper à M. de,|Gà?alés. ^ux ppO mÏÏlions dçnt j'ai parlé. M. de (^îzaj.ès .ajoute les 72 inillipnf accordés il y a 8 jQur.ii,or l| n^jjjp.ps: ne Xçnt pas employés,]' puisqu'il n'y à que 8 joiirs qu ils sçnt accordés etfbbsérvérài même qtfe, sur les oOO u.114 Imn^l^.on 24 ,fie sont uas e^icyr^ consommas.
Jeiiirai de plus a M. deGizaies, qui toujoursnous represent cette ^vance de 12 in 1 -lions j'aifce par lacaissede ['extraordinairepour 1791 commeune somipe mangee eq capitaux, qu'il v a puur (aire face a cette somme a s rentr^es du revenu de 1790 et que pous avons lieu de croire que ces 72 millions seront rernplaetfs, ou au moins en grapde partie, par des recouvremeats de Tarriere de 1790.
, rapporteur. Je m'engage à r^qjjetire dftùs ime Mure $ l'impressiq^ des assignats livret au Trésor public et de rèçà-pjoi que |'pu eu.a..fait* Pem^in matin, à Fouvpr-ture de ,Ja séance, pn vpqs e.fat.
Malgré les, dissidences qui peuy^qt exiâier qanse^ffî Assemblée, nous sommes d'accord,^pé jaifi^is iqous départ^» d^ ,1$ pé.Qieuse fe^p9ps^bi|itê! Je demande qu'o^ j^dppte le préçieux amendement de M. Roehebrune, ou que du moins l'état qu'on vous
présentera ?oit signé d'un député qui renoncerait a son inviolabilité.
S'jf s'agissaif dérégler les comptes du Trésor public, rien rie serait pîù§ simple que de demander la signature de l'ordonnateur; mais s'il s'agit d'ét,ablirle(9.imflôt^d§rann^e prpchaipe, il ne ffm pour c^ft ay'un compta du comité des finances.
On yous donnera des comptes dp Peau-d^ne, je vous T^i déjà dit.
Et qui répondra qu'on ne trompe pas l'Assemblée?
Il faut passer à l'ordre du joqr pour terminer un débat aussi ridicule et aussi scandaleux qjie PAMernWée^n^ouffetf t mjp trop longtemps. ' ' '
(L'Assemblée décrète qu'elle passe à l'ordre du jour.)
La question en discussion est d# say>W si on e^aqunera d'abord la taxe sur Fenirpè des vilie^s ou bien quel sera le taqx de là pontribqtipn foncière ? "'
Plusieurs membres deraandent la priorite pour l'avis du comite qui propose l'examen en pre- mier lieu des taxes sur rentr6e des villes.
La priorite doit, a mon avis, etre accoidee au comii6; roais je crois de- voir cependant proposer un amendement.
Nous devons d'abord discuter s'il y aura ou non des entrées daqs les villes; ou plutdt nous devons, ce me sémble, supprimer les entrées des villes. Je propose ,de les supprimer aujourd'hui poq]- déjj^ faipo^s'la 'première! c'f»st qu'il est impossible, ijàfiifyienant que vojjs avez établi un droit de patente, il est impossible d'imposer la inême p^pse dp .deux m^yi^res différentes: et quapd votis ayez dit au cabaretier qu'il payera un droit pour son pommer.ce, vous ne pouvez pas lui dire qu il payera'un droit sur les boissons (Applaudissements)-, ainsi il me paraît démontré que droit d'eutréq^e peut pl.qs subsister.
Voici la double raison qui me déterminé à de-r mander que les droits Centrée'soient sùpprimés plqtôt aujoqrd'liiii qqe demain ; d'.^rjdparce que, des qu'il £St évident que le droit ne peut plus subsister, je ne sais pas pourqiïoi' On te laisserait; en secoua lieu, m qu'il ^trèm^ment éifrayant, pour les gens qui ne suivent pus vos pppratiqg^, de vqi^ de§ impôts succéder à des impôts et les anciens menacés de rester.
La matière la plus délicate que nous ayons à traiter pour le^s peuples dont sommes les représentants, c'est l'impôt.C'est parla mauvaise orgpni^atioq . l'imi ÔL c'est par Je^ a^Jarmes du on pourrait répamaré datfs le puolic, que les ennemis de la Cpn^itution pourraient Réussir davantage. '
Or, quand on va voir que vous avez établi le dppit de timbre, d'enregistrement, d,e patente, et que le droit 4'enjrée spbbiâte toujours, cela peuf dpnnér extrémçment d'inqqiéiuue. Afnsi s'il esj démgqtré à toûi le monde cpmmé à moi qu'avec le" droit p itente ilr ne pput plus y avo|f de droit 'd'entre^ je demande que le droit d'entrée dans les villes soit supprimé, ypici ujQn projet de décret :
« L'Assemblée nationale décrète que tous les
impôts perçus à l'entrée des villes, bourgs et villages seront supprimés, à compter du 1er avril prochain.
Voix diverses : Au 1ermail au 15 avril!... Laissez établir le droit de patente !
On m'observe qu'il faudrait reculer davantage l'époque et la mettre au
1er rend="superscript" mai ou au 15
avril, afin que le droit sur les patentes, qui remplacera en partie les
droits d'entrée aux villes, soit établi et en pleine perception, quand
ceux d'entrée cesseront. L'Assemblée doit donc déterminer l'une de ces
deux époques.
Plusieurs membres à gauche : A compter du 1er mail
Soit 1 j'accepte lé 1er mai ; voici donc mon projet de décret :
« L'Assemblée nationale décrète que tous les impôts perçus à l'entrée des villes, bourgs et villages seront supprimés, à compter du 1er mai prochain; v r
« Charge son comité des impositions de lui présenter, sous 8 jours au plus tard, les projets d'impositions qui compléteront le remplacement des impôts supprimés, et qui étaient perçus au profit delà nution, de- hôpitaux ou des vill. s, de manière à assurer les fonds nécessaires pour faire face aux dépenses publiques de l'année 1791. »
MM. de Cazalès, l'abbé Maury et de Foucault demandent la parole.
Plusieurs membres demandent qu'on aille aux voix sur la question de priorité.
La priorité naturelle appartient à la question de savoir si on déterminera d'abord la quotité de la contribution foncière.
Un membre : On se souvient qu'il y a longtemps que M. l'abbé Maury lui-même a demandé la suppression des droits qui se perçoivent àl'eutrée de la ville de Paris.
Je demande qu'on réponde à ce qu'a dit M. Le Chapelier.
s'avance près du bureau et pronouce des paroles qui se perdent dans le bruit.
Un grand nombre de membres : Aux voix 1 aux voix !
(L'Assemblée décrète que la discussion est fermée.)
Il est incontestable...
Un grand nombre de membres : Aux voix I aux voix !
( L'Assemblée accorde la priorité au projet de déciet de M. Le Chapelier).
Je demande que l'époque de la suppression soit reculée au 1er juin, afin que les marchands qui ont beaucoup de marchandises en dépôt chez eux, et pour lesquelles ils ont payé des droits, aient le temps de les débiter et ne viennent pas vous fatiguer par des demandes continuelles. J'ai un second ' àinendement ; vous avez
décrété que les droits d'octroi de la ville de Paris seraient versés au Trésor public, qui fournirait à ses dépenses. Je demande que, dès le moment que les octrois de la ville de Paris cesseront d'être perçus et versés au Trésor publie, toutes les dépenses de la ville de Paris, qui étaient acquittées par le Trésor public, soient laissées sur son compte et que le Trésor public en soit déchargé à compter du môme jour.
Ces dépenses sont plus considérables qu'on ne pensé.
Je demande que le délai pour la suppression des entrées soit porté au 1er juillet.
(L'Assemblée décrété qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur les amendements tendant à reporter au mois de juin ou de juillet la suppression des entrées.)
Je demande le renvoi au comité d'imposition de l'amendement de M. de Lachèze tendant à décharger le Trésor public d> s dépenses de Ja ville de Paris. (Ce renvoi est décrété.)
Puisque l'Assemblée est déterminée à détruire les droits d'entrée dans les villes, ce qui ceriainement n'est pas mon opinion, il faut que son décret ait le meilleur effet possible. C'est pour Cela que jè demande que cette suppression ait lieu dès demain.
Je n'ai pas besoin de développer beaucoup cetté idée; l'Assemblée se souvient encore de la funeste expérience qu'elle a faite en ce genre au sujet de >a gabelle. Si vous donnez une espérance d'un elfet trop éloigné, les incendies, les actes de violence se multiplieront. Les profils du fisc seront très minces et les inconvénients très grands.
D'après cette considération, qui devrait trouver plus de faveur dans une assemblée qui se pique d'humanité et qui devrait savoir que jamais le législateur ne doit Occasionner l'insurrection contre la loi, je demande que par le décret les droits qui se perçoivent a l'entrée des villes soient supprimés dès demain.
Comme député de la ville de Paris, je crois devoir demander la ques-tion préalable sur l'amendement de M. de Cazalès qui parait craindre que, le droit étant supprimé, la perception ne soit arrêtée de fait.
J'ose prendre ici l'engagement contraire... (Murmures à droite ; applaudissements répétés à gauche et dans les tribunes)... au nom de la ville de Paris dont j'ai l'bonneur d'être ie représentant; et je puis assurer que si la ville de Paris a donné, dans la Révolution, l'exemple d'une sainte insurrection contre le despotisme, elle donnera certainement aussi l'exemple d'un respect religieux pour la loi. (Applaudissements répétés à gauche et dans les tribunes.)
Tous les membres du côté gauche se lèvent et demandent la question préalable sur l'amendement de M. de Cazalès.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'amendement de M. de Cazalès.)
Je vais donner lecture à l'Assemblée du projet de décret sur lequel elle est appelée à statuer :
« L'Assemblée nationale décrète que tous les impôts perçus à l'entrée des villes, bourgs et vil-
Jages seront supprimés, à compter du l*r mai prochain;
«. Charge son comité des impositions de lui présenter, sous 8 jours au plus tard, les projets d'impositions qui compléteront le remplacement des impôts supprimés, et qui étaient perçus au profit de la nation, des hôpitaux ou des villes, de manière à assurer les fonds nécessaires pour faire face aux dépenses publiques de l'année 1791. »
(Ce décret est adopté.)
annonce l'ordre du jour de la séance de ce soir.
La séance est levée à trois heures et demie.
A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU
Lettre de M. l'évêque de Clermont à MM. les électeurs du département du Puy-de-Dôme.
Messieurs, si je pouvais cesser d'être votre pasteur et votre père en Jésus-Christ, j'en conserverais toujours dans mon cœur tous les sentiments; et quand même, ne voulant plus être rien pour moi, vous me réduiriez à n'être plus rien pour vous, je vous dirais, comme Samuel aux Hébreux, lorsqu'ils le repoussèrent : « A Dieu ne plaise que je cesse jamais de vous avoir présents à mon « cœur devant lui, et de solliciter pour vous ses m grâces I »
Dans d'autres temps, et dans celui-ci même, si le sacrifice d'un nomme pouvait devenir le salut du peuple, je me dévouerais avec empressement; et je m'estimerais trop heureux que mon naufrage personnel pût, comme celui de Jonas, apaiser la tempête qui agite si cruellement l'Eglise de France.
A l'exemple de saint Grégoire de Nazianze, je demanderais un successeur, je le solliciterais avec instance; je saluerais ma chère église, j'adresserais aux fidèles qui la composent une dernière exhortation, pour les engager à vivre dans la fidélité à la loi du Seigneur et à marcher dans des voies toujours meilleures; je supplierais les anges du ciel, à qui elle est confiée, de redoubler pour elle de zele et de charité, et je m'occuperais du choix d'une retraite où je pusse oublier les agitations du monde, expier mes fautes, et jouir, avec Dieu seul, de cette paix qu'on ne peut plus espérer de trouver au milieu des hommes.
Voilà, Messieurs, quelles seraient mou inclination et ma conduite, dans des circonstances où il ne s'agirait pas de voire salut et du mien, mais seulement de notre tranquillité commune.
Mais, dans le moment où le vaisseau de l'Église de France est plus violemment agité par la tempête qu'il ne le fut depuis plus de 14 siècles, le devoir des évêques est de tenir plus que jamais la main au gouvernail. Ils ont été établis premières sentinelles dans Israël, pour veiller sur lui le jour et la nuit. Ils l'ont été bien plus pour le moment de l'orage que pour celui du calme; et quand même les habitants, faussement rassurés, s'obstineraient à croire qu'ils ne courent aucun danger, ces sentinelles devraient toujours crier et ne cesser de se faire entendre.
Ah ! Messieurs, si l'éniscopat pouvait n'être envisagé que dans l'ordre hu nain ; s'il m'était permis d'oublier un instant que c'est pour vous, et non pour moi, que je sui-* évêque, qu'est-ce qui pourrait me tenir désormais attaché à mes fonctions? Une sensibilité bien permise me ferait, sans doute, éviter la douleur amère que me promet le premier regard que je porterai sur mon diocèse. Je suis effrayé, quand je considère la différence que je trouverai entre l'état où sera mon église, et celui où elle était lorsque je l'ai quittée ; j'y trouverai la maison de Dieu, la maison du silence et de la prière, ne retentissant plus du chant des saints cantiques, mais du tumulte bruyant des assemblées politiques ; le service divin interrompu; les pieuses fondations de vos pères, délaissées ; les vierges consacrées à Dieu, dans la désolation ; le jeune clergé déconcerté dans les premières voies de sa vocation ; les pierres du sanctuaire, les membres du sénat épiscopal, arrachés de leur place et dispersés. J'y serai reçu par un troupeau, dont une portion verra en moi un ennemi, au lieu d'y voir un père, tandis que l'auire portion, affligée, redoublera d'attendris ement à ma première vue, et en se hâtant de venir me rendre dépositaire de sa douleur, et témoin de ses larmes, rendra les miennes plus abondantes et plus amères.
C'est pour les temps difficiles que l'esprit de conseil et de force a été mis par la sagesse divine au nombre des dons sacrés qu'elle répand sur un évêque; et il en faut, Messieurs, de la force, pour soutenir l'épreuve que votre as-embiée semble me prénarer. Des sentiments réciproques d'affection et de confiance nous avaient unis jusqu'à ces derniers temps, et sans que je sois devenu coupable q >e de la seule volonté de ne pas l'être aux yeux de Di»u, vous allez travailler à vous donner un autre évêque !
Ici, Messieurs, se présente à moi le devoir le plus impérieux de vous instruire. Préposé à votre conduite spirituelle, chargé de répondre de vos âmes à celui par qui j'ai été établi votre pontife — car ce n'est, vous dirai-je, comme saint Paul, et au même titre que lui : « Ni au nom des « hommes, ni par un homme que je suis consti-« tué apôtre, mais par Jésus-Christ et par Dieu « son père qui l'a ressuscité des morts (1) » — je ne puis me dispenser de vous représenter que vous allez entreprendre sur les droits sacrés du pontife éternel et de son Eglise; porter un coup mortel à la religion, établir un schisme des plus déplorables, vous préparer les regrets et les remords les plus accablants. Je dois vous inviter à considérer que nous ne sommes pas seulement, vous et moi, citoyens et sujets de César, mais que nous sommes marqués d'un autre sceau plus glorieux encore, d'un sceau que nous ne laisserons pas ici-bas avec celui de ciloyen, mais qui nous suivra au tribunal du souverain j* ge, du sceau du christianisme. Nous avons, outre la puissance et les lois civiles, unn autre puissance à reconnaître, celle de Jésus-Christ et de l'Eglise, et leurs lois à remplir.
En vertu de l'autorité de Jésus-Christ et de l'Eglise, je suis devenu votre premier pasteur ; l'Eglise, par le ministère de son chef visible, m^a donné ma mission : elle a établi, par l'organe de mes prédécesseurs ou par le mien, les pasteurs secondaires de mon diocèse; eux et moi, nous sommes entrés dans le bercail par la port*- ; notre mission ne peut être contestée ; nous som-
mes aussi légitimement envoyés que Jésus-Christ l'a été par son père.
L'institution épiscopale a établi, entre mon diocèse et mei, un lien sacré, un,lien semblable à celui qui unit le. fils de Dieu à l'Eglise universelle; comme ce divin sauveur est appelé, dans les Ecritures, l'époux de celle-ci, l'évêque est appelé, dans les conciles et par les saints docteurs, l'époux de son église; et vous n'ignorez pas, Messieurs, que la vacance du siège épisco-pal est regardée, par les saints canons, comme une viduité.
Ce lien, qui est , entre vous et mol, n'est ni votre ouvrage ni le mien; c'est l'ouvrage de Jésus-Christ. Quand nous étions encore séparés, il ne dépendait pas de nous de nous unir ; aujourd'hui il n'est pas en notre pouvoir de nous séparer. Si ce lien doit être rompu, c'est à l'Eglise seule, dépositaire des droits et des pouvoirs sacrés de Jésus-Christ, qu'il appartient dé le rompre ; jusqu'à ce qu'elle l'ait fait, il existera* même indépendant ent de notre volonté ; et, puisqu'elle n'a point parlé, mon titre et mes devoirs de votre pasteur, vos devoirs de mes brebis et de mes enfants spirituels sont entiers.
Votre refus même d'écouter ma voix ne me dispenserait donc pas de chercher tous les moyens de vous la faire entendre, et votre volonté de vous séparer de moi ne Vous rendrait pas libres. Vos efforts, pour ouvrir à un autre la porte de la bergerie, ne m'imposeraient d'autre loi que celle de ranimer mon courage pour vous exprimer, même malgré vous* mon inviolable fidélité et pour dire avec énergie, à celui que vous auriez choisi, qu'il n'ëst qu'un étranger; qu'il pourra sans doute occuper ma place* par la force ; mais que, envoyé par les hommes et non par Jésus-Christ, il sera sans mission* sans juridiction et sans pouvoir pour en remplir les fonctions et les devoirs; que tous les actes qu'il fera, dans ce genre, seront autant de crimes:
Le fait seul de mon union* toujours existante avec mon église, résiste de lui-même à toutes les entreprises contraires. Quand je ne parlerais pas, quand je laisserais procéder* sans réclamation, a l'élection d'un autie évêque* cet évêque ne pourrait être le vôtre par cette seule raison que je n'aurais pas cessé de l'être; il ne serait pas le successeur des Austremaines, des Sidoines et de tous les saints pontifes qui oi t oceupé la chaire sur laquelle l'Eglise m'a placé ; il ne serait pas le successeur des apôtres* parbe t|ue la succession ne peut être établie que lorsque le siège est vacant.
Ce sera un homme marqué* sans douté* du caractère épiscopal, parce que le sacrement* s'il trouve quelqu'un qui, au mépris de toutes les règles de l'Eglise et de tous ses principes, ose le lui conférer, imprime nécessairement un caractère; mais ce sera un .évêque isolé, sans aucun lien avec la succession apostolique i un étranger introduit dans le berçait* pour la ruine des brebis qui le composent ; cé sera Un faux dépositaire de la juridiction spirituelle, qui* n'en étant pas investi lui-même, trompera lâ religion des peuples, ne communiquera pas aux pasteurs in-fé ieurs l'autorisation nécessaire pour rendre leur ministère valide. Ce prétendu premier pasteur ne sera dès lors qu'Un homme entreprenant et téméraire, que je pourrais caractériser des noms odieux que l'Evangile donne aux pasteurs qui n'entrent point par la porte.
Vous vous tromperiez, Messieurs, si vous regardiez le refus que j'ai fait de prêter le ser-
ment que l'on a exigé de moi, sans les réserves expresses que ma conscience me dictait, comme un renoncement Volontaire à mon siège. J'ai déclaré à l'Assemblée nationale, en y réitérant la profession plus solennelle comme la plus sincère, de ma fidélité à la nation, à la loi et au roi, que je ne pourrais* d'après la seule loi de la puissance civile, me reconnaître Comme légitimement déchu d'une place que toutes les lois canoniques m'assurent.
La puissance civile peut, sans doute, cesser de proléger mon ministère; ma, destinée pour tout ce qui est temporel est entre ses main*. Je n'aurai que la patience et la résignation à opposer aux rigueurs qu'elle croira pouvoir se permettre à mon égard, dans ce genre; mais je continuerai à être le pasteur de vos âmes : sans jugement compétent* je ne puis être exclu, malgré moi, des fonctions que ce caractère m'at'ribue, des devoirs qu'il m'impose, ei vous vous abuseriez étrangement. Messieurs, si vous pensiez différemment. Et où est donc la sentence de'ma déposition1?Ou sont donc les crimes qui Pont provoquée? L'Eglise, qui m'a placé sur le siège de Clerlnortt, m'en regardéra-t-eile comme t'échu, tant qu'elle ri'aut4» seulement pris été Consultée sur ma déposition? Pouvez-vous penser qu'elle me rejette pouh être resté fidèle à ses principes, à ses lois et à ma coriscience, au prix de ma fortune et de mon repos, et aux risqués de la persécution?
Si donc vous établissiez un autre évêqhe, il y en aurriit deux dahs le même diocèse; l'un que l'Eglise ^ a placé, qu'elle n'a pas révoqué, qui né s'est pas* démis et ne se démettra pas, qui est par conséquent encore, et qui continuera d'être votre évêque, au nom et comme légitime envoyé de Jésus-Chri-t* parle ministère de son Eglise; l'autre, que l'EiiliSe n'aura pas appelé, dont elle n'aura ni approuvé l'élection, ni autorisé l'institution et le sacre, ni reconnu la mission j qui serri établi en vertu de la sèule loi civilet Cet évêque sera l'envoyé, le représentàntde ceux qui l'aurobt choisis Je ne cesserai d'être l'envoyé, le ministre, le représentant de Jé-us-Christ; il moissonnéra leâ richesses temporelles de l'autel; il sera revêtu de la décoratioh extérieure del'épiscapat; il sera protégé par la loi ; il aura tout ce que la puissance humaine peut donner à un évêque; lés âmes, les consciences, la juridiction spirituelle, héritage invisible et sacré qde iésus-Christ seul peut dispenser, me resteront.
Ah 1 Messieurs* avec les sentiments dont vous êtes animés, et les connaissances tjue vous avez de votre religion; lorsque vous voudrez, un jour, vous assurer de mourir dans la priix du Seigneur, et dans la vraie communion de l'Eglise, vos âmes s'élèveront au-dessus de l'effervescence du préjugé, de la séduction et de la nouveauté; albrs vous souhaiterez d'être déliés par dès ministres, dont les pouvoirs ne soient pas équivoque?* ét vous ne balancerez pas pour vous décider* entré les deux évêques, (tour distinguer celui dont la communion sera celle de l'Eglise catholique, apostolique et romaine.
La nécessité de cette communion est reconnue et enseignée par cette même constitution du clergé à laquelle j'ai cru* avec presque tous les évêques et la pius grande partie du presbytère de Frànce, ne pouvoir p-ts me soumettre. Cette constitution avoue que toutes les églises doivent se rapparier et s'unir à l'Eglise mère, comme à leur centre, et lorsqu'elle prescrit aux évéqués élus d'écrire, après leur consécration, une lettre au souverain
pontife, en signe d'unité et de communion, c'est parce qu'elle né se dissimule pas que l'évèque est l'intermédiaire nécessaire, par qui les autres pasteurs et les fidèles de Soh diocèse en communion immédiate avec lui, le sont aussi avec l'église de Rome.
Vous attendez-vous, Messieurs, que le chef de l'Eglise qui, en m'établissant votre premier pasteur, a accepté ma communion, et la vôtre dans la mienne, me désavouera comme intermédiaire entre vous et lui; que, ne pouvant reconnaître deux chefs, deux évêques du même diocèse, je serai celui qu'il repoussera, pour transporter sa communion et la vôtre à celui dont l'institution aura fait Violence à tollteS leâ lois ecclésiastiques? Non, il ne le fera pas, et il ne pourrait le faire, A quelle extrémité ne vous compro-mettez-vous pas dès lors, en vous donnant un autre évêque? Comment vous proposez-vous de conserver la communion aveG la chaire de saint Pierre?
Vous n'auriez jamais connu mon caractère, Messieurs, ni mes principes, ni mon amour pour la religion, bon plus que mon dévouement à vos intérêts spirituels, si vous pouviez croire qu'il est des sacrifices, autres que celui de la conscience, auxquels je jiusse me refuser, pour prévenir Un schisme capable d'entraîner tant d'âmes dans l'abîmé, et de les perdre à jamais. Dieu m'est té-mpin crue, dans une circonstance aussi grave» sa loi seule est ma loi, et que je me jugerais très coupable, si j'éCoutais et si je suivais une autre volonté que la sienne.^Oui, je.regrette très sincèrement de ne pouvoir imiter l'exemple de ces évêques, catholiques d'Afrique qui, pour rétablir 1 unité, en faisant cesser un schisme, offrirent à des évêques donatistes et usurpateurs, de leur résigner leurs sièges, ou de les partager avec eux, après leur conversion.
Je ferais d'avantagé, Messieurs, je préviendrais par ma retraite, comme j'ai déjà eu l'honneur de vous le dire, l'époque lamentable qui va diviser l'église de France et je m'empresserais de vous annoncer, aujourd'hui même* ma démission ; mais ce qui fut, de la part de ces évêques, une générosité et un bienfait qU'ils offrirent à l'Eg'ise, ne serait, de la mienne, qu'une lâcheté et une trahison. Ce fut, sous les yeux d'un concile, qu'ils voulurent se démettre, c'est-à-dire sous les yeux de l'Eglise même, qui aurait accepté ou légitimé leur démarche, et qui aurait transporté à leurs successeurs la mission et la juridiction spirituelles; les diocèses auraient changé de premiers pasteurs ; mais ils n'auraient pas cessé d'en avoir de légitimer
Au contraire, par une fatalité propre aux cruelles circonstances où nous sommes, la démission serait, ou inutile, ou criminelle* et la raison m^éme du schisme, dont nous sommes menacés, fait a un ëvêqué un devoir étroit de se maintenir dans son siiège, et de publier sa résolution.
La démission »st autant une dispense, qu'on demande des obligations, dont on est chargé, qu'une remise des pouvoirs qu'on avait rçwis. Je tiens me;s pouvoirs de Jésus-Christ étde l'feiglise; ils m'ont été transmis p$r le saint siège apostolique; je me suis engagé, envers Jésus-Ghrist, à tous les devoirs de la.sollicitdde épiscopale,' c'est dans les 'mains dè celui qui èst son vicaiie sur la terre, que j'ai déposé mon engagement; c'est à lui à me dispenser ; c'ést à lui à me décharger^
Cependant, ( autorité du siège apostolique, méconnue daus la démission des évêques, puisqu'elle l'est dans leur institution, ne peut même
être invoquée* d'après la constitution civile du clergé, qui ne permet de s'adresser à Rome sous aucun prétexte. Rome ne pourrait donc accepter ma démission, ou cette acceptation manifestée me rendrait coupable* d'après la Constitution elle-mêmei
Je ne puis m'adresser au métropolitain. Je re-*-connais, sans doute, en lui, un représentant de l'Eglise et un dépositaire de ses pouvoirs, dan3 toute l'ëlëndue qu'elle leur a donnée; mais, sans discuter ici si celm d'accepter la démission d'un évêque en fait partie ou non* je me borne à vous dire que ,le métropolitain, auquel la constitution du clergé assujettit mon siège, n'est pas celui auquel l'Eglise l'avait soumis^ Il ne peut* par conséquent, dans aucun cas, nie décharger légitimement de mes engagements àù nom de l'Eglise, ni roùlpre le lien spirituel qUi "rb'ehit à la mienne.
Led âàsémblées électorales formèe's par le peuple, ët qui ëont étàbliéà pour le choix deé administrateurs civils de la chose jmbliciue, sont étrangères ail gouvernement dli royaumé de Jésus-Christ. Vous adresser, Mëssieurs, ma démission, ce serait reconnaître, éfi Vous, Un pouvoir q ue vous ne vobâ attribhere^ sûrement jamais ; celui d'ôter la juridiction tjui suppose celui de la donner.
Si l'on me disait, d'après une idée peu juste et Une opinion vUlgaire, que léS évèqûe^donnaient ci-devâttt leur démission ehtre les mains du roi, je répondrais qde le roi ne recevait les. démissions que pôhr leâ proposer au dhef de" l'Ëglise, qui, seul, les acceptait; et qu'un évêque a toujours conservé sa juridiction jusqu'au moment de l'acceptation du souverain pontife,
Que produirait donc auiobrd hui môn désistement? Nul autre effet que les Calamités spirituelles les plus déplorables pour mon diocèse, et dont je me rendrais participant. Une pareille démission paillerait, à Vos veux, Sans la détruire. la funeste entreprise d'établir un évêque sur Un siège ëttcoré rempli; elle voilerait, à ceux des fidèles peu instruits, tous ies Vices dë la nomination et de l'institution du prétendu SUCceSsédr que vous me donneriez; elle aplanirait la voie au renversement de la hiérarchie ecclésiastique; elle favoriserait* âu lieu d'Utt ministère dont je resterais toujours Chargé, devant Dieû, pour le salut de me3 diocésaifls, un ministère de ruine et de perdition. Jë; coopérerais, et à l'invalidité dë tOusleà actes de juridictioh. du hduvel éVêqhe, ët à l'illégitimité de tbutes les fonctions de son ordre; je me rendrait dOUpàble d'un grand crime, puisque je jetterais les peuples dans une erreur des plus funestes; j'aurais à répondre* au jour du jugement* de la nullité des pouvoirs transmis, par Un pontife sans juridiction, aux ministres inférieurs* de la nullité, par conséquent, de toutes les absolutions prononcées par ces ministres, dans lé sacré tribunal* hors les cas de nécessité; de la nullité des mariages, par le défaut de la qualité de propres pasteurs; enfin, de tous les péchés qui seraient les suites nécessairës, pour cet évêque, pour les prêtrës, et pour les peuples* d'un ministère sans mission, d'Un ministère schis-matique.
Non, Messieurs, nulle considération humaine ne pourra me déterminer à une autre conduite qu'à celle du bon pasteur, qui, pût-il sans crainte d'encourir la censure des hommes, abandonne? son trou peau* ne l'abandonne jamais aU moment du danger. Il est toujours prêt à donner sâ Vlfr pour le salut de ses brebis, et c'est dans le péril qu'il doit surtout faire éclater sa fidélité. . La paiXf pour laquelle on pourrait désirër ma
démission, 11e serait qu'une fausse paix; elle consommerait le schisme au lieu de l'empêcher; elle le rendrait presque incurable, par la sécurité dans laquelle elle endormirait les âmes. Ah ! elle serait à un trop haut prix, s'il fallait ainsi lui sacrifier les fruits inestimables de la Rédemption divine 1
Réfléchissez donc, Messieurs, je vous en conjure au nom de Jésus-Christ, de son Église, au nom de votre salut, sur la démarche que vous allez faire. Ce n'est pas une affaire seulement terrestre que vous allez traiter ; ce n'est pas un administrateur de la chose civile qu'on vous propose de nommer. Commencez par peser, à la balance du sanctuaire, la légitimité de vos titres, pour vous donner un évêque.
Le peuple vousr a-t-il constitués pour lui donner un premier pasteur? Etait-il même instruit, lorsque, par un juste sentiment de confiance, il vous commit ses destinées temporelles, en vous chargeant de lui nommer des administrateurs que vous seriez dans le cas de vous occuper d un choix d'un tout autre genre, d'un choix qui a un rapport essentiel à son salut, d'un choix qui peut décider du sort éternel de la plus grande partie des individus qui le composent? Il ne pouvait pas le prévoir, Messieurs ; et, dès lors, comment pouvez-vous vous croire ses représentants pour un objet d'un aussi grand intérêt? Le peuple aurait-il même pu vous commettre pour le remplir? Aurait-il exercé un droit qui fût le sien? On n'a cessé de le dire, et l'on vous a trompés, puisque tous les monuments de l'histoire de l'Eglise déposent contre cette assertion.
La forme des élections des ministres de l'Eglise catholique dut toujours être approuvée par elle. Si, dans sa sagesse, elle a autorisé des variations, cette sagesse doit être invoquée lorsqu'il s'agit de changements nouveaux; son autorité doit les consacrer. Jusque-là, au vice essentiel de la nomination à un siège occupé, se joindrait celui du défaut de qualité dans ceux qui y procéderaient.
Il faut vous le dire, Messieurs, les principes qui attribuent au peuple le droit d'élire ses pasteurs, comme celui de les déposer à son gré, sont ceux des hérétiques des derniers siècles. Les trop fameux' ministres, Claude et Jurieu, les ont consacrés ; l'immortel Bossuet (1) a. com-baîtu cette doctrine avec le zèle qu'exigeaient d'un évêque l'amour de la vérité et l'attachement à la sainte; Eglise catholique, apostolique et romaine.
On vous tromperait encore si on vous disait, comme on s'est permis de l'avancer et de le répéter plusieurs fois, que les évêques de France tiennent obstinément à la forme de nomination établie par le concordat. Non, Messieurs, les évêques de France n'ont d'autres vues que celles du plus grand bien de la religion, ni d'autre désir que celui de voir établir un ordre canonique, qui concilie les intérêts du peuple avec les principes de l'Eglise catholique. Ce serait les calomnier que de leur attribuer d'autres sentiments.
Je finis, Messieurs, en vous assurant-que nul Sentiment d'intérêt personnel n'a influé dans la démarche que je fais;- Je crois la devoir à mon zèle pour mon diocèse et à ma conscience; ainsi qu'à votre religion que je suis obligé d'éclairer: J'ai délivré mon âme; je vous exhorte à délivrer la vôtre.
Je suis avec respect, Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur.
Signé : f François, évêque de Clermont.
Paris, le 1" février 1791.
présidence de m. duport.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Un de MM. les secrétaires fait lecture des adresses suivantes :
Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de la société des amis de la Constitution d'Agen : elle demande que les séances des corps administratifs soient rendues publiques.
Adresse des officiers municipaux de la ville d'Épernay, qui expriment à l'Assemblée leur vive reconnaissance sur la suppression des aides.
Adresse des administrateurs composant le directoire du district de Loudun, contenant une déclaration de M. Branchen, prieur-curé de Notre-Dame des Trois-Moutiers, portant que, pour faciliter la vente de son prieuré-cure, et en augmenter le prix à partir du premier janvier prochain, il vuidera de corps et de biens sa maison prieuràle et son jardin; objets que les décrets l'autorisaient à conserver.
Adresse des officiers du tribunal du district de Toulon, qui consacrent les premiers moments de leur existence à présenter à l'Assemblée nationale le tribut de leur admiration et de leur dévouement.
Adresse du sieur Naoux, prêtre dans le district d'Uzès, qui prête entre les mains de l'Assemblée nationale le serment-civique.
Adresse d'un officier de la garde nationale du canton de Villette, district de Vienne, qui présente à l'Assemblée le discours patriotique prononcé par M. Beauraih, ci-devant chanoine et archidiacre delà ville de Vienne,dans l'église paroissiale du dit Villette, lors de la prestation de son serment civique.
Adresse des officiers municipaux d'Issoudun, qui annoncent que tous les ecclésiastiques fonc^-tionnaires publics de cette ville ont prêté le serment civique selon les formes prescrites.
Adresse du maire de la ville de Serre, contenant le discours patriotique prononcé parle sieur Girarde, vicaire, lors de la prestation de son serment civique, dont la commune a ordonné l'impression.
Adresse de M. Poutié, curé de S. Géry, paroisse de Gahors, qui fait hommage à l'Assemblée du discours qu'il a prononcé lors de la prestation de son -serment civique, dans lequel il a fait éclater les sentiments d'une piété éclairée et du patriotisme le plus pur.
Adresse du procureur général syndic du district de Lectoure.
Lettré et adresse de la société des amis de la Constitution de Lille, département du Nord.
Adresse delà municipalité de Bréville, qui, faisant part du serment civique de son curé, a assuré l'Assemblée de son dévouement à la Constitution. Le procès-verbal est joint à cette adresse.
Lettre et extrait des registres de la municipalité del'Avanfranche, district de Boussac, département de la Creuse, qui fait part que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics prêtent le serment.
Lettre de M. Forel, de l'Oratoire, qui demande à l'Assemblée de s'occuper d'une loi qui ordonne que l'office du culte se fasse en français.
Lettre des officiers municipaux de Pontpoint, département de l'Oise, canton de Pout-Sainte-Maxence, avec l'extrait des registres de la municipalité, qui annonce le serment des ecclésiastiques de cette municipalité.
Procès-verbal de la prestation du serment, décrété i>ar l'Assemblée nationale le 27 novembre dernier, par les ecclésiastiques fonctionnaires publics dans la paroisse épiscopale de Cahors.
Lettre de la municipalité et garde nationale de Savigny-sur-Orge et Grand-Vaux, des curé et vicaire réellement aimés et chéris de leurs paroissiens.
Lettre de M. le procureur général syndic du département de l'Aisne, contenant le procès-ver-bal de l'élection de M. Boyer, curé de Chavanes, membre de l'Assemblée nationale, à l'évêché de ce département, vacant par la mort de l'évêque de Bellev.
(L'Assemblée ordonne une mention honorable de ces différentes lettres et adresses dans le procès-verbal).
,secrétaire, donne lecture de la lettre suivante adressée à M. le Président de l'Assemblée par le commissaire do roi au district de Vannes, département du Morbihan :
« Monsieur le Président, un commissaire du roi, citoyen, croit devoir s'adresser directement à l'Assemblée, pour lui faire part des événements malheureux arrivés sous nos murs. Le sang de nos frères a coulé. Il crie vengeance contre nos ennemis. Les malheureux habitants des campagnes ne le sont pas. Ils ne sont que des instruments qu'on fait mouvoir, et les tristes victimes de leur insurrection. Il n'est peut-être pas un canton de la France où le paysan ayant un idiome séparé du langage vulgaire, est aussi simple, aussi facile à conduire, et où par conséquent les prêtres et tous les ennemis de la Révolution aient plus d'influence.
« Une lettre circulaire de notre évêque à ses curés, des prônes qui l'avaient suivie, et des assemblées tumultueuses, où l'on s'était permis d'adopter des pétitions, qui ne tendaient rien moins qu'à tout renverser, avaient poussé l'effervescence à son eomble.
« Nos frères de Lorient, à qui nous avions communiqué nos inquiétudes, nous avaient envoyé des secours puissants, leur présence en avait-im-posé ; et, croyant que le calme allait renaître, nous avions remercié un grand nombre de nos militaires citoyens, et de citoyens militaires de la ville patriote. Ils partirent samedi matin, après avoir reçu des témoignages de notre reconnaissance. Il uous resta quatre pièces d'artillerie, une compagnie d'artilleurs, la compagnie de dragons, et un corps de jeunes volontaires.
« Les recteurs ou curés de notre ville, ayant enfin consenti à lire à leurs prônes l'instruction de l'Assemblée, au sujet du fatal serment des prê-
très, nous croyions voir renaître la paix parmi nous, quand ce même jour, dimanche 13 du courant, une patrouille composée de cinq dragons, fut fusillée vers le midi; quatre furent blessés, dont un assez grièvement; les cinq chevaux et leurs harnais furent couverts de dragées, et aucuns de nos braves frères de Lorient n'en seraient revenus, si les fusils au lieu d'être chargés à plomb l'avaient été à balle; leur rentrée dans la ville y répandit l'alarme. L'on battit la générale, les différents corps et tous les bons citoyens prirent les armes, le drapeau rouge et les officiers munici paux marchèrent a la tête de l'armée. Les attroupés, que les rapports avaient accusés être d'abord de 15 à 1,600, ne lâchèrent pas tous le pied ; on assure qu'il en resta un parti d'environ quatre cents, qui attendirent de pied fermé nos braves dragons de Lorient qui formaient l'avant-garde, et qui ont montré dans toute l'action la plus grande intrépidité. Les attroupés.firent plusieurs d charges ; on fond sur eux lé s ibre à la main, et l'on parvient à les dissiper. Plusieurs attroupés sont restés sur le carreau. Le nombre des morts sera toujours un mystère, sûreme-1 deux, peut-être quatre, peut-être dix, ont été tués, les mutins n'ayant pas tardé à enlever les corps morts. Le nombre des prisonniers est de vingt-neur, dont quatre blessés de coups de sabre, et blessés à la ligure ou au-devant du corps.
« Sur les lieux l'armée avait demandé qu'au moins doux des attroupés, fussent pendus. L'aumônier et le bourreau suivaient l'armée. Les officiers municipaux se refusèrent à cette demande, et répondirent de l'empressement que mettraient messieurs les juges du tribunal à faire punir les coupables avèc le glaive de la loi.
« Nos prisons étant peu sûres, le danger étant pressant, nous supplions nos législateurs de vouloir bien envisager un moment notre triste position. Le châtiment manqué son but quand il ne suit pas de près la faute. Nous abhorrons le sang, mais il faut ici une juste sévérité. Veuillez nous indiquer les moyens d'intimider les campag les, en faisant punir les plus coupables, en rendant les autres à leur famille éplorée. Je vous écris bien précipitamment, Monsieur; me^ lettrés à M. le garde des sceaux, dont il ne vous refusera sûrement point la communication, sont beaucoup plus détaillées. Obligé par état de correspondre avec ce ministre, je ne lui ai, jusqu'à présent, rien laissé ignorpr de ce qui concernait notre position, et de ce qui faisait le sujet de nos inquiétudes ; maintenant qu'elles se sont changées en réalité, j'ai cru qu'il était de mon devoir, et je regarde comme unesuitedemonsermentd'en faire aussi part de votre personne à l'Assemblée législative.
« J'espère qu'en me faisant l'honneur d'une réponse, vous voudrez bien nous indiquer le moyen de terminer, le plus promptement possible, cette affaire. La sûreié du canton en dépend par une prompte justice. Otons à nos ennemis le temps d'ourdir de nouvelles trames; je ne vois pas qu'aucun décret de l'Assemblée nationale ait supprimé le dernier ressort, et ôte aux premiers juges le droit de condamner, sans appel, des gens pris en flagrant délit avec attroupement à port d'armes.
« Fidèles observateurs de la loi, nous sommes trop humains pour demander la mort de person-ne.nous sommes même convaincus que lès plus coupables, les auteurs de tous nos maux ne sont pas renfermés dans nos prisons; ils se cachent, les traîtres! mais mollir dans cette occasion, mais
admettre deux degrés de juridiction, si la loi ne les presc jt pas formellement, cVst en compro1-meitarii la tranquillité de tout uu Canton, tnan-quer absolument le Bpt des supplices.
Je suis, Monsieur lè Président, Votre très humble, etc. »
« Signé : Antoine lauzer, commissaire du roi, près le tribunal du district de Vannes. »
Messieurs,.un de m^ côllêguéa, M. Dusers, vous a donné connaissance ce matin d'une, lettre particuljérè sûr révéhément malheureux du 13 février* à Vannes; jç. vohs demandé la permission ue mettre soùs vos yeux les propès-verbaux de tout ce qui s'est passé depuis lje 8 jusqu'au 14 inclusivement, procès-verbaux dressés par les citoyens composant le directoire du département du Morbihan.
donne lecture de ces documents qui confirment les faits déjà énoncés a l'Assemblée. On y lit dé plus :
,« Les particuliers déposent d'une manière unifornte que les prêtres ont porté les séditieux à s'armer, en les engageant à aller délivrer M. l'évêque quils leur ont dit prisonnier dans son palais. Le directoire du dépariemet a député M. le procureur général syndic vers les juges du tribunal de district pour les engager à interroger sur-le-champ les prisonniers. De retour, ri a rapporté que ces messieurs devaient s'en occuper pendant la nuit ; la sûreté de la ville a été prise eh considération.
Une députation des corp3 administratifs est allée à l évêçbé, portant des paroles, de paix, au nom du département, pour engager l'évêque à réparer tout lé mal qu'a opéré la lettre qu'il à abondamment répandue il y a un mois et demi. Ses domestiques ont répondu qu'il était absent. La députation y a retourné et a reçu la même réponse. On a renvoyé une troisième députation à dix heures ; l'absence de l'évêque a été de nouveau confirmée. On a arrêté que deux adminis-r tratéurs, un du district, et deux officiers municipaux, se réuniront en conseil à. la municipalité pour y passer la nuit, afin de donner au. besoin les ordres que les circonstances pourraient exiger, et que le cons il subsistera jusqu'à ce que le calme soit entièrement rétabli.
« Les administrateurs he veulent pas clore le procès-verbal sans payer un juste tribut d'éloge au courage et, au patriotisme des troupes de ligne et de la garde nationale, des volontaires nationaux , et des maréchaussées ; ils doivent faire particulièrement une mention honorable de ce dernier corps,,de M. Fatre* lieutenant de la maréchaussé", qui s'est mis dans les rangs de dragons, a combattu avec eux, et .de leur commandant, M. Deysser qui, .se, multipliant en raison du danger, s'est, trouvé partout à ia fois ft ne doit son salut qu'au casque qui a paré la balle qui l'a frappé à la tête. »
Si ces pièces, Messieurs, n'offrent que des ob,ets affligeants, j'ai aussi à vous faire part de; choses consolantes.
Le curé ou vicaire de la ville; dp Pontivy; le recteur de Noyac-Pontivy et son très nombreux clergé ; clui de Lorient et son clergé, égaie-mont très nombreux, à l'exception de deux de ses membres ; le recteur de Plouay-le-Gardien ; le vicaire des capucins d'Hennebond; et le sieur Duquesne, directeur de l'abbaye de la Joie, de la même ville, ainsi que le clergé du Port-Louis,
ont prêté, le serment exigé par le décret du il ndvetnbré dénier.:Et dans lecàntpri même où sè sont passes tant de désordres, lin curé a déclaré en chdire que si ses paroissiens prennent quelque part à la sédition, il serait le premier à les dénonçer. (.Applaudissements.)
D'àillëurs, lés élogeë et les témoignages de sa-tisfactidn donnés ce malin par l'Assemblée aux lardes hàtidnàles de Lofiént et de Vannes, et aul ofâtlefs ét soldaté du régiment de Walsh, pont également, dus aux. ipunicipalités et gardes patioîiaiës de 'î)ô.nt,ivy, Ploêifoer, aux municipalités 'de OuestemDçëtj.Loriépt et Vannes, aux municipalités et gardas natiôaalëé du Port-Louié, d'Hennëbond et d'Aurây, aux officiers et soldats d£ l'artillerie et duJ}ataillôn auxiliaire des colo* piësj'et. eti particulier, s'il était possible de faire dés aîsudétidiîs,J àûx braves dragons nationaux, tant officiers et soldats, de là ville de Lorient ; ati siënr Deysôer,'leur major* et . aux directoires du diétMt ét du département de Vannes, qui tous, par leurs offres où de t'ait, ont çbntripjié à |a sùrétê de là Ville de Vannes, et a dissiper ràtlrp'upement des gens de campagne, qui la menaçaient.
Jë dëmande, ën conséquence, que l'Assemblée, étendant son décret de ce matin,: y fasse çaéijfion honorable d.é tous les corps et peçsonnës que je vieps de citer.
(L'Assemblée décrété cette motion ét renvoie aux, éomités réunis dés rapports et des recherches 1£ lettre du commissaire du roi ét les procès* verbaux du directoire du département du Morbihan).
donne lecture d'tiné lettre des.Invalides de l'Hôtej nui s'adressent de nouveau à 1 Assemblée, pour lui dénoncer un arrêt de la cqpr des aides qu ils considèrent comme inconstitutionnel et contraire à tous les principes. Ils s'étaient pourvus à l'élection de Paris contre l'adjudication des fermes qui leur faisait payer le tabac de cantine 24 sols la livre, quo/que.to.utes les ordonnances en eussent fixé le prix à 12 sols pour les troupes ae ligne; une sentence,avait condamné, l'adjudicataire a le leur livrer à raison dé 12 sols et à leur restituer une^ somme de 120,000 livres pour l'excédent du prix exigé depuis lé commencement de son .bail; m$is un arrêt de là cour dés aides,',4a mais de janvier 1790, renvoie les invalides pardevèr6 le roi.
Çét.arrét leur a pard un déni de j u^tice et contraire aux décrets de l'Assemblée. Il y a un mois qiriîs ont rédige à ce sujet line adresse à l'As-serrblée nationale et qu'|l§ .. pnt chargé leurs fondes dë. pouvoirs d'e/i remettre fune à M. l'abbé Grégoire, l'autre à M. Mirabeau. N'obtenant point de réponse, les invalides dé l'Hôtel ont cru que c était par la négligence de lëurs agents, çt ceux-ci ont failli être la victime ae ce soupçon ; on à même été obligé de mettre l'un .d'eux en prison pour le soustraire à la fureur de ses camarades.
Lës invalides ..demandent que^ l'Assemblée prenne en considération leur pétition,avec d'autant plus de. célérité que l'hôtel est dans ce moment eu insurrection,
(L'Assemblée ordonne le renvoi de cette affairé au comité des finances.)
,j'ai reçu du président de rassemblée, éleetorajp du département du Puy-de-Dôme ,la lettre suivante ;
« Monsieur le président, yous fais prompte-
ment cette lettre officielle pour apprendre à l'Assemblée que lés électeurs du Puy-de-Dôme sor tent à l'instant de là messe, après la proclamation de l'évêque.
« Le temps riè me permet pas de vous envoyer le prôcés-verbal ; j'aurai l'honneur dé vous l'adresser le plus tôt possible.
« Je suis, etc. »
J'ai êgaîemént reçu du président, de l'assemblée électoral^ du département de $aôné-et-Loiré là lettré suivante :
« Monsieur le Président, j âi l'honneiir de vous annoncer la nomination de M. l'abbé Gouttes* membre aéJ'Assembleé nationale, à l'évêché de Saône-et-Loire. (Vifs applaudissements).
« Le corps électoral que j'ai eu l'honneur de présider, a cru donner par cette élection une preuve distinguée dit désir qu'il à et qu'il aura constamment dé sè conformer à la sagesse des vues de l'Assemblée nationale.
« Ju joins à ma. lettre le procès-verbal de l'élection dë.cé prêtre respectante,par ses vertus morales, chrétiennes et patriotiques. »
L'ordre du jour est un rapport, des comités des rapports et des recherches sur l'affaire de Nîmes.
,rapporteur (i). Messieurs, les événements, qui se Sont passés à Nîmes ont, depuis longtemps, ijxé les regards de l^Assemblee natiouale.
Les deux partis qui divisent la vR'e de Nîmes ont répandu, ayéç une profusion qu ils ont cru vraisemblablement utile à leur défense, une roule de mémoires, de récits, de lettres, dejcposés et d'adresses, ;où la véri e, il le faut avouer, est res.que toujours défigurée par les préventions de a haine, et où chaque parti accumule des accusations gravés et terribles, dont on cherche à justifier la vraisemblance, soit en les liant à des événements passés et consacrés par l'bistpipe, soit eu lés rapprochant du tableau des événements présents.
Màis en admettant, si l'on veut, beaucoup d'exagération de part et d'autre, dans ces répits, il rëst'ra toujdtirs cette affligeante vérité, tjue nulle villê éans éicëjitiori, ddng le fàyàume, n'a éprouvé, depuis la Rëvbliïtioti, ni de si grands, iit de si longs malheurs.
Ce sorti les détails dé ces malheurs que je Vién3 vous présenter âtt lljm .dë vdfc cbniités des rëcher^ ches et des rapports.
J'âi donc à développer la càUse ued troubles dë Nîmes ; et c'est avec regret qu'en remontant à leur source* je me verrai forcé d'examiner si, comme on l'a publié* ils doivent en effet leur origine à cette haine cachée, mais toujours aigrie, qui* survivant aux guerres de religion, n'attendait, dit-on* pour édater, que de- cii constances favorables* soit à l'ambition* soit fanatisme d'un parti* dont les lois dé l'État avaient toujours déconcerté les projets et réprimé la violence. — C'est avec regrèt, je Je répète» qu'obligé de suivre l'un des partis dans son plan de défense, je me verrai forcé dë nommer les catholiques,, les protestants, et de rappeler ainsi ces distinctions odieuses que vos décrets onfcsi sagement abolies.
J'aurai aussi à examiner si, comme l'avance le parti contraire^ le ièle
de là rèligion n'a été qu'un prétexte employé avec art par les ennemis
du
C'est au milieu de ces assertions également graves, et soutenues avec une égale chaleur, que j'ai à découvrir la vérité. — Mais, pour vous conduire à 1 éviqençe. qui peut seule, et qui doit seule déterminer votre décision, une longue discussion sera nécessaire ; et, peut-être, je dois d'avancé justifier la trop grande étendue que l'on pourra me reprocher Savoir donnee à paonrapport* en Vous prévénant .que vos comités n'ont point ëncore été'ofcrupës dë l'examen d'une affaire aussi chargée défaits, et aussi compliquée v qu'il y a 7Ô0, tant dépositions, que déclarations ; des procès-verbaux immenses ; près de 100 interrogatoires ; que des volumes énormes d'écriture ont été produits^ et qu ij a fallu lire et souvenli extraire un nombre considérable d'ouvrages imprimés.
Je vais donc présenter à l'Assemblée nationale : 1° le récit desiévénements qui se sont passés à Nîmes depuis,l'époque des premiers troubles ;
2° Rechercher les causes et les auteurs de ces troubles;
3° Eqfin,jlui rapporter l'avis de ses comitési
Les. divisions survenues dans la garde nationale de Nîmes ayant été la cause ou leprétexe des premiers troubles, je dois vous parler de l'organisation de ce corps et de l'époque de sa formation.
Le 19 juillet 1789, les citoyens de çe qu'on appelait a'ors les jtrois ordres se réunirent en présence des officiers municipaux* et arrêtèrent de,former une milipe bourgeoise.
12 commissaires furent chargé de la rédaction d'un pian q'organisatioy et de régime»
Le lendemain, le plan présenté par les commissaires fut adopté par l'apsemb^ée générale, et la nouvelle milice* ; composée de î,34§ hommes répartis en 24 compagnies, prit le nom de légion nïmoise.
Le plan d organisation était sage, et on y avait prévu tout ce qui pouvait assqrer la, tranquillité publique dans là ville, et le bon ordre dans la légion.
La seule distinction admise pour les légionnaires, consistait, aux termes de l'aride 16 du règlement* dans une cocarde bleue et blanche.
Au mois d'octobre, il se forma quelques compagnies composées entièrement de citoyens catholiques; le sieur Froment, avocat et receveur du chapitre, était un des chefcs : trois de: ces nouvelles compagnies se présentèrent le 15 o§tobre au comité permanent, pour être admises à la prestation du serment; le comité.voulut remettre a*i lendemain cette cérémonie, mais ^proposition de ce délai fut rejetée avec violence ; Froment fît fermer les portes de l'hôtel de ville, et ie cqmité, intimidé par cette audace, admit les compagnies à la prestation du serment.
II existait dès lors à Nîmes une fermentation sourde que rendirent bientôt plus apparente et plus active quelques écrits qu'on répandit avec profusion*.
Il est impossible de ne pas reconnaître des intentions, coupables .dans les auteurs de ces ouvrages, et ils avaient incontestablement pour but dp diviser les catholiques et les protestants* eu montrant
ceux-ci comme redoutables, par des projets de domination, et en les accusant d'avoir tout préparé pour exécuter des attentats énormes. Les cruautés commises dans les guerres de religion, sont retracées avec une affectation perfide, dans un ouvrage intitulé : Pierre Romain aux catholiques de Nîmes.
Il faut vous citer quelques passages de cet écrit :
« Fermez aux protestants la porte des charges et des honneurs civils et militaires; qu'un tribunal puissant, établi dans Nîmes, veille jour et nuit à l'observance de ces importants articles, et vous les verrez bientôt abandonner le protestantisme.
« Ils vous demandent de participer aux avantages dont vous jouissez, mais vous ne les y aurez pas plutôt associés, qu'ils ne penseront plus qu'à vous en dépouiller, et bientôt ils y réussiront.
« Vipères ingrates que l'engourdissement de leurs forces mettait hors d'éiat de vous nuire, réchauffées par vos bienfaits, elles ne revivent que pour vous donner la mort.
« Ce sont vos ennemis nés ; vos pères ont échappé, comme par miracle, de leurs mains sanguinaires; ne vous ont-ils pas raconté les excès de cruauté qu'ils ont exercés contre vos aïeux ? C'était peu pour eux de leur donner la mort, s'ils ne la leur eussent donnée par les tourments les plus inouïs. Tels ils ont été, tels ils sont encore. »
Tel est, Messieurs, l'esprit qui règne dans cette lettre de Pierre Romain aux catholiques de Nîmes; bientôt d'autres ouvrages suivirent celui-ci, et répandirent le même poison.
Dans une lettre écrite à Pierre Romain, l'auteur, sous le nom de Charles Sincère, examine s'il serait avantageux d'expulser les protestants du royaume, et il se décide pour l'affirmative.
« Il prédit que si l'Assemblée nationale leur accorde le droit de parvenir aux charges, elle donnera naissance à des divisions, à des troubles éternels, à une Révolution peut-être.
« En conséquence, l'auteur conseille aux habitants du Languedoc de révoquer les députés protestants, et notamment M. Rabaut; de désarmer les capitaines et les soldats protestants; de doubler la milice bourgeoise, et de se lier avec toutes les communautés catholiques circonvoi-sines. »
J'ai cru devoir fixer votre attention sur ces ouvrages; peut-être jugerez-vous, par la suite de mon rapport, qu'il était indispensable de vous les faire connaître, et qu'ils ne sont pas étrangers aux événements dont je doi3 vous rendre compte.
Le temps approchait où l'on devait élire à Nîmes une nouvelle municipalité, d'après le mode constitutionnel, et l'intrigue ne resta pas oisive.
Les deux partis s'accusent mutuellement d'avoir employé des séductions de tout genre pour dominer dans les élections, et pour former rhacun à son gré le nouveau corps municipal. Je reviendrai sur cette imputation ; ce n'est pas ici que je dois vous donner les lumières que j'ai puisées dans l'information : je reprends la suite des faits.
La nouvelle municipalité fut élue, et M. Marguerites, nommé maire, obtint, le 13 mars, de PAssemblée nationale, un congé pour se rendre à Nîmes, où sa présence était nécessaire; ce sont les termes du congé.
Le dimanche 28 mars, la municipalité fut ins-
tallée en présence de tous les corps de la ville, invités à cette cérémonie. M. Marguerites prononça un discours, et je dois rendre ce témoignage, qu'il est impossible de parler de la Constitution avrc plus de noblesse, plus d'énergie, j'ai presque dit avec plus d'enthousiasme; ce discours respire le patriotisme le plus pur, et recommande, dans les termes les plus pressants, l'union entre les citoyens, et la soumission à vos décrets.
Vous savez déjà qu'il existait à Nîmes une garde nationale formée le 20 juillet 178 ». L'admission des nouvelles compagnies, accordée par le comité permanent, ou plutôt extorquée par la violence de Froment, l'un de leurs chefs, avait excité des mécontentements dans la légion. Le colonel proposa un nouveau projet de règlement qui fut rejpté par la majorité des volontaires.
Le 13 avril, la municipalité, aiir le réquisitoire du procureur de la commune, fit aussi un règlement provisoire. Toutes les comp agnies y adhérèrent quelques jours après; mais cette adhésion fut rétractée lorsqu'on s'occupa de la nomination d'un état-major, qui, aux termes de l'article 3 du règlement, devait être faite par le conseil général de la commune et par les officiers de la légion. Une partie des officiers s'opposait à ce qu'on procédât à l'élection ; d'autres l'exigeaient. D'après cette contrariété d'opinions, la municipalité arrêta qu'elle rendrait compte à l'Assemblée nationale,.et qu'on attendrait ses ordres.
Il y eut dès iors une division ouverte dans la garde nationale ; l'un des partis s'attacha à la municipalité, et en fut protégé; l'autre lui a été constamment opposé.
Je n'examinerai pas en détail le règlement fait par les officiers municipaux, j'observerai seulement qu'ils avaient outrepassé la limite de leurs pouvoirs, qu'ils exigeaient un serment qui n'était pas le serment constitutionnel, et que quelques-unes des dispositions qu'ils arrêtèrent, ont contribué à propager les troubles, en favorisant la réunion, dans les mêtaes compagnies, des gens exagérés ou malintentionnés de l'un des deux partis.
Ce règlement excita les réclamations d'un grand nombre de citoyens formant à Nîmes une société nommée par eux Club des amis de la Constitution.
Gette soci6t6 presents, le 16 avril, á la muni- cipality, une petition pour obtenir un sursis a I'exccution de la totality du reglement,, jusqu'au moment oil l'AssembiSe aurait prononce sur sa vnlidité.
Le 17, elle vous dénonça ce même règlement comme une violation de vos décrets.
Trois jours après, les amis de la Constitution devinrent eux-mêmes l'objet d'une pétition adressée à la municipalité par un grand nombre de citoyens actifs réunis dans l'église des pénitents blancs. Les pétitionnaires demandaient la suppression de la société, et que les portes du lieu de ses séances fussent incessamment fermées, à cause, est-il dit dans la pétition, de l'insubordination scandaleuse des membres de ce club.
Le même jour, les mêmes personnes, dans cette même église de pénitents blancs, prirent cette fameuse délibération, si connue depuis en France sous le titre de délibération des catholiques de la ville de Nîmes.
Des alarmes très vives sur les dangers qui menaçaient, dit-on, la religion et la monarchie, sur les changements annoncés dans le régime ecclé-
siastique, et sur le séjour du roi à Paris, paraissent avoir dicté cette délibération.
Eu conséquence, les délibérants demandent que la religion catholique, apostolique et romaine soit déclarée religion de l'Etat; qu'il ne soitjien innové dans la hiérarchie ecclésiastique, sans le concours d'un concile; que le pouvoir exécutif soit rendu au roi dans toute son étendue, et que le roi discute dans sa sagesse tous les décrets qu'il a sanctionnés depuis le. 19 septembre, et qu'il les sanctionne de nouveau, s'il le juge nécessaire.
On rédigea aussi une adresse au roi, et on énonça que la délibération avait été signée par 3,127 personnes, parmi lesquelles se trouve, ob-serve-t-on, un très grand nombre de légionnaires, et que 1,560 autres personnes avaient déclaré y adhérer.
Le 22, la municipalité démentit, et réprouva par une délibération rendue publique, un libelle vendu alors dans les rues de Pans, ayant pour titre : Complot découvert.
Le 27, le club des amis de la Constitution adresse aux officiers municipaux une pétition signée de 162 citoyens actifs. « Nous croyons, disent-ils, de notre devoir de citoyens de ramener sur des libelles qui infestent nus foyers votre attention fixée sur une brochure publiée à Paris. Les cœurs sont divisés, les esprits sont aigris, les troubles se fomentent.....Des qualifications contraires désignent les enfants d'uiie même patrie, les adorateurs d'un même Dieu, des Français, des chrétiens. »
En conséquence, la société dénonce plusieurs ouvrages anonymes et incendiaires, parmi lesquels se trouvent ceux que je vous ai cités.
Les ouvrages dénoncés s» nt ceux que je vais nommer : Pierre Romain aux catholiques de Nîmes; 'Charles Sincère à Pierre Romain; Réponse à la lettre de M. le duc de Met fort; François, réveillez-vous ; Paul Romain à Pierre Romain; et enfin Avis important à l'armée française, qu'on répandait chaque jour avec profusion parmi les soldats du régiment de Guyenne.
« Egarés dans leurs principes et dans leurs intentions, disent encore les membres du club, quelques légionnaires se permettent de substituer a la cocarde nationale un nouveau signe de ralliement. »
Le samedi, 1er jour du mois de mai, des
citoyens connus à Nîmes sous le nom de Cebets, ou Travailleurs de terre,
et soldats de la compagnie Froment, se rendent vers les 9 heures du soir
à la porte de M. Marguerites, et y plantent un mai. Cet hommage est
suivi d'une sérénade qui dura une partie de la nuit.
Le lendemain, les mêmes légionnaires prennent les armes, et se réunissent en grand nombre pour faire la garde du mai qu'ils avaient planté la veille.
Ils avaient des cocardes blanches, et paraissaient eu fête.
On les vit souvent entrer dans la maison pour boire et pour manger ; on les vit aussi manger à la porte, et aller prendre du vin dans une es-fièce de remise qui appartient au maire, et dans aquelle, à cette époque, il en faisait vendre eu détail.
Ces légionnaires criaient souvent; Vive le roi! Vive la croix!A bas là nation! Ils tenaient des propos incendiaires et relatifs à la religion ; les cocardes blanches ne devaient être laissées, disaient-ils, que lorsqu'elles seraient rougies du sang des protestants.
Et ce n'est pas à cette occasion seulement que ces clameurs ont été entendues; les témoins déposent que, dans plusieurs autres circonstances, quelques compagnies passant en armes sous les fenêtres du maire, criaient : « Vive le « roi! Vive la croix 1 A bas les noirsI Vivent les « blancs! A bas la nation !»
La cocarde blanche arborée par les volontaires qui étaient à la porte dh maire, donna lieu à d'autres faits dont je dois vous rendre compte.
Des légionnaires avaient été, dès le matin, au quartier du régiment de Guyenne, pour demander au tambour-major de permettre qu'un tambour vînt avec eux, et les précédât jusqu'au village de Bouillargues.
Cette demande fut accordée.
Peu de temps après, le sieur Ramond, sergent-major de la compagnie à laquelle ce tambour était attaché, dit que ceux qui l'avaient demandé étaient de mauvais citoyens, puisqu'ils portaient la cocarde blanche.
Le tambour-major qui n'avait pas remarqué cette distinction, court après les légionnaires, les rejoint à peu de distance de la ville, et ramène le tambour, sous prétexte qu'il était rappelé par son service à la compagnie.
Sept légionnaires à cocarde blanche se présentent avec un officier à la porte des casernes, le sergent de garde les arrête, et leur demande pourquoi ils portent une cocarde qui n'est pas la cocarde nationale : C'est la royale, dit l'officier; le sergent répond que ce n'est pas celle que porte le roi, et qu'il a fait prendre aux troupes, et renvoie les légionnaires.
Plusieurs autres sont expulsés des bâtiments et de la place des casernes, sur le même motif.
A midi, une sentinelle placée à ia porte de l'église Saint-Charles, où se célébrait la messe du régiment, refuse l'entrée à des 1 gionnaires qui avaient la cocarde blanche, et leur dit : « Vous n'entrerez pas avec la cocarde biauche, c'est le signe de la révolte. »
Ces paroles sont entendues par un fourrier qui approuve la sentinelle, et qui ajoute : « Le moment est arrivé où les ennemis de la Constitution exécutent leur plan. »
Ramond, sergent-major, dit à haute voix : » Nous ne voulons pas laisser entreries cocardes blanches, » et il promet qu'il les ôtera dans le jour; un de ses camarades répond : Oui, nous les ôterons.
Le soir, entre 5 et 6 heures, Ramond et quatre autres sous->»fliciers vont à la promenade du cours, où les citoyens s'étaient aussi rendus en grand nombre.
Ramond aperçoit un homme portant la cocarde blanche, il lui dit de la laisser, et sur son refus, il la lui arrache : cet exemple est à l'instant suivi par les quatre autres sous-officiers, par quelques soldats qui étaient à la promenade, et plusieurs cocardes blanches sont arrachées avec violence.
A l'instant les légionnaires se réunirent, prirent des pierres, et attaquèrent les sous-ofticiers et soldats : ceux-ci mirent le sabre à la main pour écarter la foule ; plusieurs volontaires à cocarde nationale se réunirent à eux ; mais ne pouvant résister à une grêle de pierres dont on les accablait, les soldats gagnèrent la citadelle.
Quelque temps après ils virent entrer au cours des volontaires à cocarde nationale, et les joignirent, pour qu'ils protégeassent leur retour aux casernes; mais ils furent eucore charges avec tant de violence, qu'ils entrèrent précipi-
tamment dans onè maison voisine, et s'y barricadèrent. '
La maison fut attaquée à coups de pierre, et les portes en auraient bientôt été prisées, si le maire et quelques officiers municipaux! qu'on avait éié avertir dès" té commeheemept dé la querelle, ne fussent parvenus, par leurs exhortations et leurs efforts; à calmer et à éloigner lés assaillants.
Un légionnaire était entraîné par plusieurs autres tiôs animés, et' il allait périr, jorsqUè le maire parvint à l'arracher de leurs mains, et à lui sauver la v;e.
On place une garde à la maison où les soldats s'étaient réfugiés, et pour rendre cette précaution plus imposante, do y laissa un officier municipal- er">
Enfin le tumulte se dissipa, et les officiers municipaux Se retirèrent à l*hôiël de ville. *
Une nouvelle compagnie y arriva'pouV renforcer la garde, Je mairp la passa éri revue, et ayant aperçu un homme qui portait une cocaWé blanche, il la lui fit lasser ; dans leitiémë moment, un autre légionnaire ôta aussi de son chapeau une cocarde blanche, et la mil dans sa poche.
Le lieutenant-colonel du régiment avait fait battre la générale, et les er"> officiers municipaux attestent que, dans moins dë dix minutés,'presque tout le régiment se trouva rassèmblé avec une subordination incroyable f ce sont léurs ei-pfe sious ; la retraite fut battue, et lés soldats rentrèrent dans leur quartier.
Les patrouilles fuient redpublêes, et on renforça les corps de gai de ; les officiers municipaux parcoururent les uiliérentsquartiersdç la ville, et ia nuit fut tranquille.
Le 3, une fermentation très vive se manifesta; dès le matin il y eut des attroupements dans plusieurs quartiers de ty ville!
Dés homtne's ai més, les uns de haches, de sabres, d'autres defbaluUueites et d'épées, parcoururent les rues.
Us paraissaient très animés contre lps protestants, et plusieurs citoyens ué cétte classe furent insultés, poursuivis et gi ièvemenj. fjfegsésV
Des travailleurs i|e terre traînaiént:ulie cbr^è, et cpiaïent : « C'est pour pendre li s protestan t s -, » ils soupçonnèrent que quelques-Un* ^'étaient réfugies duns une maison, ils attaquèrent la maison à coups dé pierre;
A midi, la pl^ce, les .CQqrs le^ escaliers et quelques salleS dç rhôtel de yille étaient"remplis d Une foule considérable" île trçvàijïeitrs dè' terre. Deux ieuriès geîis s'y étaient rentlns poUf voir donner l'ordre; on les reconnut p^r protestants : il, turent iiijuriès et maltraites/1
Un soldat passa devant le^ ïenètreS 4e l'h^ej de ville, il fut attaqué f>àr: les légionnaires» deux de leurs officiers lui sauvèrent |a vié : le maire parut êt âpàisa le dé-orurë.
L'àttrou, énient déviât si "considérable e$.pi. tumultueux, que les boutiques furent"fefjjçéfes dans les rues voisines de l'a maison çp&j^qùè. t Ç qu'on fut obligé d'aller à la Salamandre, pour prendre l'ordre uuf se donnait chaque jour à rh0ièi de ville. * ÎOT ' b ' îVtooSf ,»
Le maire parcourut différente? : l'animo-sité'deq tràvail éùrs déTerp jétàil'viq|énte, et it eut beaucoup ue peine à se faire oj^if^ lorsqu'il leur ordonna de se retirer.
Les soldats du regiipent de Guyenne étaient aussi l'objet de la fureur iie ces legiQ^uajres.
Uu soluat fut blessé d'uu coup de sabre, en revenant de foire son service. '
Un' grenadier, nommé Langier, fut assassiné d'un coup de fusil, par Mathieu Froment, et m0'u-rut quelques joqrs après de sa blessure.
La ville était alors divisée éri deux partis : on se réunissait; oh marchait en grancF Sombre; les ùns criaient : Vive le roi! à'bas la nation! les autres : Vivent le rOi ët là wafton.ret c^s différentes ai dlamatiouS, répétées et soutenues fveè opiniâtreté, çccàsibdijaient toujours dés rixes, ^èt souvent'dés viulepées.
A 6 heures, dés soldats se promenaient au bours : des iégionnaire-î passent devant eux, s'arrêtent, et crient : Vive le roi! lés soldait Répondent : Vivent le foi et la nptifa!—Vive lë roi Aréprêîinent les travailleurs, la nation ne te fait peu manger, c'est (e roi ; ils ajoutent : Au diable Ja nation, atiâqùên't les soldats à coups ne pierrfe, et lés obligent à fuir du côté des casernes.
ïies soldâts' dq régiqaent de' Guyen'ne, irrités enfin dé .céS' oulra^eà'réitérés et dés violences è&ei'ëéës cbutre°plusieUrs d'entre eux , prennent les arpies et viennent en^grand nptobee fcu -cours aveç la gàrdé du quartier, pour vepger leurs carfia-radés ; ils se font ouvrir de force que maison où on leur atfait dit que les agresseurs s'étaient retirés, mais -bien tôt ils rêntrent îjux casernes, au p'regujér ordre de leurs chefs.
Ail milïèu M ces déspiWës. la municipalité fit publierv une ^propfàmâtion. «priant défense de s'attrqujjgr et (le sortrr avec des-armes.
iPendant fa 'nuli/'il n'y ejitpoint d'attroupe-nréi)t,f maïs on entendit (îfes mêmes clameurs dbnjt je vous ai parlé.
Le ville ^tait tranquille ; la loi martiale fuf p(ro!jée,et Iç soirij y eut une récorfclliatidn générale èntr§ lés soldais du régim'èi.t de Giiyeqnp et la partie des citoyens qui "tétaient armés cbntreeÙx.
Le il, M.'{Marguerite^, quf avait demandé une prôlon^ation dé pongé, et qui n'avait reçu aucune réponse; de If^'èè i^'f^â^ati^b aie; - parlir iiiç"'Nl oaes pour venir reprendre ses.îoncftuns djé député.
Lemêihè jouf'j v'dus, iî/'iriandië'kà la b^rre pour y reudrç compte dq Sâ éwlà'tre la
municin dite."
Lë lf? la'société d|Ç amis de la Constitution dénonça a^^ officiers (uiie fa^ica|i(Hi considérabl® de fourches'qtfel'frn trans^Oriaii èn gràufl nom4 bre et.eu ylei^ jpur.
Le là mpiiicipaJilé ordonna à'tous les officiers et Volonijairès f}p 'à légion, M faire rapport ter daps, ^ heiir.es, ap ^utés (es foqrclies destinées ,à !p'ur sejrvif*.
"Ëe |2i fa niunii^pal|té ari'êfô d^^^ faïré sa soumission pour acqùéfir leç biéus nàtioïiaiix sitpës dans son terfitpife; glWq^térïninà qan^ ia m^eptie séàncp'dë fà}ré, .?c^|er et ^istri^ûér ^ës.'coçàrdrs ndiiona^s aux mem^rés de ra' légion qijii n'en portaient aùcurie dépuis rinterdicliondës cp par des blanches; cett^ délibération fut exécutée, et on distribua 94'douzaines dè coéardés paticinàlgs.
Lés ^iyjs^ns qui fégn^iienf, entier (es ^i}ovpn3 ^eyëpaiei^t jçjiagùe jour pius ^(^fmantesî énliq elles éclat^énÇ ouvért^ment, et il fi^t 'si tjijbq Jëfl90«tré.'|n§aie pour villes, ypipiiii^, qu'il y avjitt à N)mes un l^rti cbp|r^içe gq 'jpign ppbftc1, et prêt à déployer loutes les ressources du farter t^meet. dtt la révq|te, ^QUr^éfen^re des intérêts gai qup te ai^lr^cx de ^ùpiîni.êres arrêta,
lé 25 m^i, de proppser aqx autres districts du cfénaTtgaiepjt, (jîjj rqroQ(çç. .pçur.'^rQT
tegel-'^ ^tretf eÇ. la f^ra ue§ ^IÇctpuis^ du département du Gard, qui devaient sè réunir à Nimes ; le quartier général devait être établi a
Boissière, pt les troupes cantonnées dans les villages voisins.
La municipalité, par $a délibération du 31 mai, rejeta la proposition du district dp Sommières, et détendit à tous ceux qui faisaient partie du camp dp Boissière, de paraître armés et attroupés sur jp territoire de Nîmes, sous peine d'être poursuivis comme perturbateurs dq repos public,
L,es événements qpi s'étaient p^sés ^ Nîmes, dans les journées du 2 et du 3 mai, étaient trop graves pour ne pas exëtfer fôvigitaqve du ministère public, gt, le tP, le procureur du roi, au présidai, présenta plainte au lieutenant criminel.
Le même jour il fit assignerTes témoins; l'in-r formation çomm^nçjSL d^s 1§ lendemain et fut suivie sans interruption.
Les plflcieps municipaux s'étaient aussi occupés de repiiejUif des renseignements et ils avaient déjà entendu un grand nombre de témoins, lorsque, le 13 mai, le conseil général chargea le ppqr cureur de la commune de faire sa dénonciation au procureur du roi.
Cette dénonciation fut faite par un acte, en forme légale, en date dû 15 mai.,
Le procureur du foi, d'après l'usage constant de son siège, exigea que le procureur de la commune se rendit garant des faits,
Cette garantie , fui refusée et le procureur du roi consulta le garde des sceaux.
Ce ministre répondit le 2g qu'aux termes de
l'article 7 du titre ÏIl 4q l'ordonnance (je l ^70,
la garantie était de droit et qu'il était inutile de j'établir par une stipulation particulière.
D'après cette décision, le procureur de la commune renouvela sa dénonciation le 7 juin.
Le procureur dp r.oj la reçuf, pt, le iflêçfie jpur, il rendit pjainte.
Le 8? ,1e prqcqreûjç de la qpmm^ne présenta une liste de 21 tégipins ; ils furent assignés le 10 à la requête du procureur du rojir Le même jour, m lieuîenaut'.f'fiipinel cotpm^oça ''Viflforpçt^'ôn et deux témoins furent 'eutendus. .Lttufprmaiion devait être continuée le 11, lorsqpele procureur du i ôi apprît qué le 9 les offièjers: municipaux avaient arrêté, par une 'délibêrâtion, qù'ils bavaient jamais éhtendu devenir plaignais et pour-Suivants dans cette affaire, mais seùfgiqerit aider le ministère public à découvrir les auteurs et adhérents des troubles.
Lé procureur du roi demanda au lieutenant criminel 4é suspendre l'audition dès témoins ; il écrivit le il au garde des scpapix, l'informa de la nouvelle délibération dë )a municipalité et demanda dés ordres!
J'ai dû vbus fairé!çonnaître ce qui s'était passé entre le procureur du roi et la municipalité, parce que, dans les mémoires publiés par les officiers municipaux, ce magistrat est accusé d'avoir constamment refusé ue faire entendre les témoins présentés par le procureur de la commune.
Vous voyez que cette accusation n'est pas fondée, que la dénonciation a été reçue d'après la décision du garde des sceaux ; qué les témoins administrés ont été assignés ; que deux ont été entendus* et que si l'audition dés autres n'a pas eu lieu, c?est que, d'après la délibération prise le 9 jiqin par la municipalité, le procureur du roi ne pouvait pas prudemment ne pas rendre compte 4e ce nouvel incident, et ne pas consulter le ministre de la justice.
Observez, d'ailleurs, que le zèle du ministère public avait même devancé la vigilance de la
municipalité, puisque lg plainte, rendue d'of|jçe par le procureur du roi, est antérieure de cinq jours à la ugnomiation du procureur dp la commune qqe l'information se suivait àvqc rapidité.
Déjà 96 témoins avaient été entendus, lorsque votrçrcoqgifé des recherche?, informé des ïajts relatifs aux troubles dé Nimes, ypuà représenta que l'ordre public exigeait que la prguy$ dp ces faits fut acquise;.en conséquence vous rendîtes, ie j7 jqin, un décret, par lequel vous ordppnàtes que votre président se retirerait par devers le ro|, pour le prier d'ordonner qu'il lut informé dé ces faits, circonstances et dépeuncs, devant le nrésidial de, Nîmes.
D'après ce décret, le garde des sceaux n'avait plus à s'expliqiier sur l'arrêté pris le 9 juin par les officiers municipaux ; il adressa au nrocurpur du roi l'état des {ails présentés par comité des recherches sur lesquels devait pqrtqr l'info rmation»
La proclamation du roi fut enregistrée le 6 au présidtai, pt le ? in procureur du roi présenta sa pl ijnte en addition.
Je crois, Messieurs, devoir interrompra ici le récit des antres événements que présentera cette affaire et l'arrêter à l'époque du l?f juin.
La nécessité d'être clair, si toutefois il est possible de l'être dans un rapport aussi chargé de faits, me prescfit ceUe marche.
En vous parlant des troubles qui put eu lieu, à Nîmes, dans les journées du 3 et du 3 mai, je me suis attaché fi yous faire connaître les principaux détails ; je dois maintenant fixer votrp attention sur la première époque de cette grande affaire. smi'ii lUari
Je vous ai dit qu'il y avait deux partis à Nîmes, et sans doute vous avez suivi leaf marche à travers les faits que je viens d'établir. Il est temps de tous les f.iire connaître d'une manière plus précise et d'assigner à chacun d'eux son carac-r tère distiuctif, afin qu'ils ne se confondent pas dans la foule; des événements et qu'ils n'échapr pent pas à votre attention, que pourrait rebuter ou distraire la multiplicité des détails.
On yous a dénoncé la municipalité de Nîmes; elle est accuse d'avoir été liée d'opinions et de projets avec ceux qui voulaient, dit-on, opqrer une contre-révolution dans le midi déjà France.
L'élection de cette municipalité est même attaquée comme ayant été l'effet de l'intrigue et de la corruption. ;
D'après lus faits rapportés le 11 m^ti pair votre eomilé des recherches, yous avez regardé les officjers municipaux comme suspects, et même comme répréhensibles, puisque vous avez mandé à la barre M. Marguerites, maire de Niipes et l'un de vos collègues, pour rendre compte de sa conduite et de celle de la municipalité.
Il faut donc remonter à l'origine de cette municipalité, examiner quelle a été sa formation, connaître ea condui'e avant les troubles et pendant les troubles* enfin observer ses rapports avec ceux qui avaient, dit-on, le projet d'opérer une contre-révolution.
La population de la ville de Nîmes s'élève à 54,000 habitants, parmi lesquels on compte à peu près 12,000 protestants.
Il semble iqu'une infériorité de nombre aussi marquée ne devait pas rendre les citoyens de cette classe très redoutables dans les élections. Mais la situation des protestants à Nîmes leur assurait une consistance publique propre à contrebalancer les avantages de cette majorité qu'ils
n'avaient pas, et à déterminer peut-être pour quelques-uns d'entre eux le choix ou la faveur des électeurs.
Les protestants forment à Nîmes la classe la plus riche ; ils sont à la tête du commerce : les manufactures sont dans leurs mains; ils font vivre près de 30,000 ouvriers répandus dans un nombre infini d'ateliers, et il n'était pas difficile dë prévoir quelle prépondérance ils trouveraient dans la nature et l'étendue de ces relations, et dans cette dépendance à jamais irrémédiable de celui qui est payé à celui qui
m fallait donc, pour anéantir ces avantages politiques,employer des moyens extraordinaires, et ils lurent mis en usage avec une activité qui vous ferarjuger de l'importance qu'on attachait à réussir.
L'élection des officiers municipaux commença au mois de janvier. Dès le mois de décembre, on s'était préparé, dans des assemblées tenues secrètement, à influencer les nominations.
L'abbé de Rochemaure, grand vicaire du diocèse et grand archidiacre de la cathédrale, fut invité par l'abbé Clémenceau, curé de Saint-Castor, à assister à l'entrée de la nuit à une assemblée de catholiques, pour prendre des arrangements sur la formation de la municipalité.
Le 8 décembre il reçut du même curé une nouvelle invitation : cette fois, l'assemblée était irés nombreuse ; elle se tint dans l'église des pénitents. Le curé montait en chaire, proposait des sujets pour chaque place et disait : « Qui voulez-vous pour président, pour secrétaires, pour scrutateur s des différentes sections?
On proposa l'abbé de Rochemaure pour président d'une section ; l'assemblée applaudit; mais cet ecclésiastique fit prudemment cesser les applaudissements, parce que, observa-t'il, on pouvait être entendu de la rue.
ie dois cependant rendre ce témoignage à l'abbé de Rocnemaure, qu'il votait pour que l'on composât indistinctement la nouvelle municipalité de catholiques et de protestants.
Mais ou était bien éloigné d'adopter une opinion aussi sage et aussi modérée ; on voulait opiniâtrement exclure les protestants, et l'exclusiou s'étendait même jusqu'aux catholiques que leur état ou leurs liaisons particulières rapprochaient des citoyens de celte classe.
Daus une des assemblées tenues aux pénitents, on porte à la présidence d une section le sieur Lévêque, chirurgien; un médecin nommé Razoux s'oppose à sa nomination : on insiste sur ce que le sieur Lévêque est catholique. Il est chirurgien de l'hôpital des protestants, dit Razoux ; il faut n'avoir rien de commun avec ces gens-là : Lévêque ne fut pas élu, mais Razoux est officier municipal.
L'information {trouve que des prêtres surtout excitaient cet acharnement terrible contre les protestants; et l'abbé Rragouse, curé de Saint-Paul, est désigné comme un des principaux auteurs de ces fuuestes divisions.
Di-s ecclésiastiques se réunissaient publiquement pour concerter la nomination des catholiques.
Chez l'abbé Cabanel, l'abbé Mitier et l'abbé Gervais emploient six copistes, pendant deux jours, à faire des listes, et l'abbé Cabauel est élu membre du conseil de la commune.
L'abbé Clavières faisait et distribuait des listes : ou lui représente qu'il serait prudent de donner le tiers des places aux protestants. Nous
n'en voulons point, répondit-il. Mais, ajouta-t-on, cela occasionnera peut-être des malheurs ; cela fera une révolution. Il faut qu'il y en ait une de toute nécessité, reprend l'abbé Clavières ; cela ne peut pas être autrement.
Quairas, chantre de la cathédrale, fait des listes par ordre de Laurent, procureur : cette précaution ne suffit pas au zèle de Laurent; il envoie ses clercs dans différentes maisons pour copier des listes : Laurent est officier municipal.
Le sieur Vidal assistait à des assemblées tenues pour ies élections chez l'abbé Clémenceau; le sieur Vidal est procureur de la commune.
Mais le chef de cette vile intrigue, l'instigateur le plus ardent de ces honteuses manœuvres, c'est l'abbé La Pierre, théologal de la cathédrale.
Il parcourt les campagnes du territoire de Nîmes ; il excite le zèle des curés par des exhortations insidieuses, et leur représente que le bon ordre exige que les catholiques seuls soient élus.
Dociles à ses insinuations* les curés s'empressent de favoriser ses projets.
C'est au nom de la religion que le curé de Rodilhan exhorte ses paroissiens à suivre les dispositions f .ites par l'abbé La Pierre.
Il monte en chaire pour leur recommander de se conformer exactement aux listes qui ont été distribuées.
Le curédeBouillargues, le curé de Courbessac deviennent aussi les agents du théologal, et le vicaire de Bouillargues fait circuler les listes que lui a données le nommé Gas, revendeur de vin à Nîmes;
L'information m'apprend que quelques citoyens annoncèrent des scrupules, et refusèrent de se prêter à ces honteuses cabales. Ou s'aperçut alors de l'insulfisance des ressources qu'on avait employées, et l'intrigue changea de manœuvre : ce qui manquait au fanatisme pour abuser, l'art de la corruption le suppléa, et l'argent fut répandu avec profusion;
C'est encore l'abbé La Pierre qui le distribue.
Il porte lui-même cet argent aux différents curés, et pour que ses intentions ne soient pas déçues, il recommande très expressément de ne le donuer q /aux citoyens actifs.
Le curé de Bouillargues se charge même, outre le soin de sa distribution particulière,, de faire part des sommes qu'il recevait, à son collègue le curé de Garons, et de lui en indiquer l'emploi. . Le curé de Courbessac, importuné par des répartitions journalières, se débarrasse de ce soin sur le nommé Berihezêne, son neveu, et Berthezène paye les votants de la paroisse.
Le prix était fait, et chaque paysan recevait 24 sous de sa journée pour le payement lorsqu'il avait été porter son suffrage à la ville.
Ces faits sont évidemment démontrés par l'information, et rien' n'égale la franchise avec laquelle ks curés avouent qu'ils ont réparti l'argent de l'abbé La Pierre, si ce n'est la loyauté que mettent les électeurs à reconnaître que cet argent leur a été en effet distribué.
Cependant l'abbé La Pierre ne se reposait pas tellement sur le zèle des curés qu'il n employât au^si des exhortations particulières. Ne manquez pas de venir, disait-il aux gens de la campagne lorsqu'il les rencontrait ; soyez tranquilles, disait-il aux autres, vous serez payés, l'argent ne manquera pas; et en effet les électeurs s'adressaient
souvent à lui, et ils attestent qu'ils ne Tout jamais vu infidèle à sa promesse.
Si le théologal de Nîmes employait tant de soins et tant d*activité pour réussir dans ses projets, de même son parti ne négligeait aucun moyen.,Outre les di?tnbutions dout je vous ai parlé, on se réunissait dans différentes maisons, et notamment, le soir après souper, chez le sieur Michel, conseiller au présidial ; on y faisait des listes qui étaient ensuite répandues dans le public par le sieur Velut, capitaine de la garde nationale.
Le nombre des agents était immense, et quelques dames de Nîmes ne dédaignèrent pas même de favoriser Ie3 élections ; on prévit que quelques omissions avaient pu échapper au zèle de l'abbé La Pierre : on eut soin, aux jours destinés pour les élections, de placer aux portes de la ville, dans les rues, sur les places, dans les cabarets, des hommes sûrs, qui donnaient des listes aux électeurs, et la cour du palais fut le poste confié à l'abbé Despérandieu.
Le nommé Gas, revendeur de vin, était l'un des plus ardents distributeurs ; son zèle et l'accès facile que trouvait ce citoyen auprès d'un grand nombre d'électeurs qui venaient boire chez lui, fixèrent l'attention des sieurs Gaujoux, greffier du présidial, et Blachier, avocat ; ils remirent à Gas des listes mi-partie de catholiques et de protestants, et le prièrent de les répandre : Gas promit, mais il ne tint pas parole, et 'ne ht circuler que les listes qui devaient assurer la nomination exclusive des catholiques
Tant de soins ue pouvaient pas être infructueux, et à l'exception d'un seul protestant, la nouvelle municipalité fut telle que le voulaient l'abbé La Pierre et son parti, et telle qu'elle existe aujourd'hui.
L'abbé La Pierre fut nommé membre du conseil de la commune.
Vous connaissez, Messieurs, la formation du corps municipal : voyons quelle a été sa conduite.
La municipalité est installée le 28 mars. La Compagnie du sieur Froment, receveur du chapitre, et avocat, paraît, armée de fourches, à , la cérémonie.
Le sieur du Gaylard, lieutenant de roi de la place et commandant de la garde nationale, fait des représentations au capitaine sur cet étrange armement, et; refuse d'admettre la compagnie dans la ligne.
Ce refus excite une grande rumeur, Froment tient des propos injurieux ; et, sans égard pour les ordres de son chef, fait rester sa compagnie.
Le sieur du Gaylard, outré de cette insubordination, charge un officier major de prévenir là municipalité qu'il donne sa démission. Cependant, à la sollicitation du maire, la démission est retirée.
On avait été effrayé de l'appareil des fourches ; le lendemain quelques légionnaires cherchent querelle à un travailleur dé terre, que la veille ils avaient vu armé d'une fourche. . Un tonnelier nommé Allien crie, à la lanterne. Le eoir une foule de travailleurs de terre se réunissent devant la maison d'Àllien, cherchent à enfoncer sa porte en criant qu'ils veulent le pendre à la poutre de sa maison.
On s'était en effet muni de cordes, et les témoins déposent qu'on avait eu soin de les enduire de savon.
La maison allait être forcée, lorsqu'une patrouille parut, et divisa l'attroupement.
L'homme qui portait les cordes, et qui paraissait le plus déterminé à en faire usage, fut arrêté par la garde ; le sieur Laurent, officier municipal, le fit relâcher.
Ce ne fut pas seulement contre Allien qu'éclata la fureur des travailleurs de terre; le nommé Porcher, simple spectateur, et qui n'était pour rien dans la querelle, fut grièvement blessé, et courut risque de perdre la vie.
Allien et Porcher étaient protestants : ceux qui les attaquèrent n'annoncèrent que trop que cette qualité ajoutait à leur animosité, et ils ne dissimulèrent pas leurs projets contre les non catholiques, que d'après la dénomination vulgaire du pays, ils appelaient gorges-noires.
Les fourches portées la veille à l'installation du maire avaient inquiété le peuple et causé l'émeute dont je vous ai parlé;
Une municipalité sage et soigneuse de maintenir la paix se fut hâtée de proscrire cette arme pour jamais, et d'ôter au moins ce prétexte à la méfiance et à l'aigreur qui se manifestaient.
La municipalité garda le silence, les fourches furent tolérées, une fabrication énorme s'ensuivit, et ce ne fût qu'un mois et demi après que leur proscription fut enfin décidée.
Une municipalité, sage et soigneuse de rétablir l'union entre lés citoyens, aurait mis toute sa sollicitude à étouffer le germe des divisions, et à repousser tout ce qui pouvait alimenter la haine.
Il semble, au contraire, que la municipalité de Nîmes se fût étudiée à Conserver le rôle le plus impassible au milieu des circonstances les plus alarmantes, et qu'elle eût intérêt de laisser une pleine sécurité aux mauvais citoyens qui s'efforçaient de troubler l'ordre public.
Nîmes était infecté de libelles, et les officiers municipaux ne l'ignoraient pas. On répandait avec une impunité vraiment scandaleuse des écrits incendiaires, où la nécessité de la guerre civile était mise en maximes, où le fanatisme promulguait des exhortations sanguinaires, où les soldats étaient excités contre les gardes nationales, où les citoyens étaient appelés au meurtre, et où tous les genres de forfaits étaient recommandés et justifiés d'avance, s'rls avaient pour but de venger le clergé et de renverser la Constitution.
C'est ainsi qu'on vendait, qu'on distribuait publiquement la lettre de Paul Romain à Pierre Romain ; VAdresse aux Languedociens ; l'Adresse aux représentants de Nîmes; les Républiques fédé-ratives ; le Comité des finances dévoilé; l'Adresse aux Assemblées de Châlons ; la Feuille des Erreurs et de la Vérité: les Nouvelles de Paris, aux Soldats, par un Soldat ; Français, réveillez-vous ; Avis important à la véritable Armée française, et tant d'autres libelles, tous faits pour entraîner aux crimes.
L|information ne laisse pas de douté sur le lieu choisi pour être l'arsenal de ces infâmes productions; c'était la maison des capucins.
Le frère Modeste en était le plus zélé distributeur. On l'a vu sortir de son couvent chargé de ces feuilles affreuses, les donnant aux passants dans la rue, les portant de maison en maison ; il en tenait bureau public, et pour en obtenir, il suffisait d'envoyer aux capucins un domestique, ou même un inconnu , et ce scandale public était I toléré par la municipalitél |
On jugerait mai de l'importance de ce délit, si on voulait justifier l'indifférence des officiers municipaux par le dédain que l'Assem-
blée témoigne pour lés libelles qui se vendeht et se reproduisent chaque joUr bbx portes dé Cette enceinte. On conçoit sans peine que des hommes dont le patriotisme est éprouvé par tous les genres de courage, souffrent fen paix d'être poursuivis et calomniés dans une foule de journaux et de gazettes qui s'amortissent et s'éteignent bientôt dans la honte et dans l'oubli ; mais il n'en était pas ainsi des libelles répandus à Nîmes : la municipalité n'a pu se méprendre sur l'intention de leurs auteurs, ni Se dissimuler les succès qu'ils avaient déjà obt mus. La plupart de ces feuilles, présentées àu peuple de Nîmes* étaient préparées pbur lui : les circonstances locales,- lèfe événements historiques du pays, proprés à exciter ses ressentiments, y étaient rappelés ; les massacres commis pendant les guerres de religion dans le Languedoc étaient retracés à Son souvenir et offerts à sa vengeance, et rien n'était omis de 6e qui pdUvâit ranimer la haine des catholiques contre les protestants.
Rien ne peut justifier la coupable tolérance dés officiers municipaux; car ils ne s'excuseront pas en vous présentant leur insignifiante et trop tardive proclamation du 4 mai, qui ehCore, arrachée à leur indifférence par là pétition des amis delà Constitution, réunissait, par un bizarre assemblage, la défense de la chàsée dans les terres ensemencées, la prohibition des qualifications injurieuses, des libelles et des cocardes blanches.
Il est d'autres délits dont je dois aussi convaincre les officiers municipaux.
Ce n'est plus par des ouvrages faits dans les ténèbres, que les ennemis du bien public Suivront leurs projets, ils Vont se montrer ad grand jour ; et c'est à front découvert que dés factieux Vont, sous les auspices de la municipalité de Nîmes, appeler hautement les peuples à la révolte.
Vous pressentez, Messieurs, que je veux parler delà trop fameuse délibération prise le 20 avril dans l'église des pénitents blancs, par des citoyens qui se disaient 16s Catholiques de Nîmes.
Cet acte fit enfin éclater des Complots depuis longtemps ourdis, et ddnt je vous âi fait constamment suivre la trace.
Des assemblées tenues Secrètement précéderont cette délibération.
A l'une de ces assemblées, tentiè, pendant la nuit, dans une église où l'on s'introduisait par la cour du chapitre, vinrent en grand nombre dès travailleurs de terre avec M. DescombiêS, membre du cônséil de la commune.
L'orateur chargé de porter là pârôlé promettait aux auditeurs que la délibération produirait le plus grand effet.
« Les Parisiens, disait-il, sont bien ledrs maîtres, ma:s ils ne le Sont pas de nous, fout gît dans le premier pàs; Si nous le faisons, toutes les communautés sont prêtés à nous imiter t il faut le faire. -
On eut recours, pour fâlré signer là délibération prise par les catholiques, aux mêmes agents et aux mêmes moyens qui avaient été mis en usage pour faire élire là municipalité.
Les curés des environs de Nîmes montrèrent le même empressement ; leur zèle parut même plus actif encore.
Ils ne s'en tenaient pas seulement a des exhortations particulières.
Le cure de Courhessàc montait en chaire : C'était, disait-il à ses pàrÔtSSieâs, Un devoir sacré de signer la délibération.
Le curé dë Sodilban assemblait les siens au son dè là cloche, et Ieé faisait signer.
Le curé de Bouillargues employait aussi ses soins avec succès, et il était secondé par le sieur Henri, chirurgien de Son Village;
Des hommes inconnus parcouraient les campagnes, sollicitaient et recevaient des signatures. Des femmes étaient employées à distribuer la délibération.
Mais c'était à Nîmes que le fanatisme et la sédition s'agitaient avec plus d'activité; c'était surtout dans là classe des artisans, et notamment dans celle des travailleurs de terre, que la séduction avait un effet plus sûr et plus prompt.
On s'invitait mutuellement à aller signer la délibération; les ouvriers se rendaient ëtt foule à l'église des pénitents ! un grand nombre ne savait pas signer, mais des gens àpostés exprès signaient pour eui;
Un homme venàit, et signait pour les gens de sa connaissance; un autre, pour toute la famille.
La minute fut écrite par Vlala, commis de Froment, et on allait signer dans son bureau.
Presque tous les signataires déclarent qu'ils ignoraient ce qu'on leur faisait souscrire, et qu'on ne leur en donnait pàs lecture.
D'autres déposent qu'ils ont signé, parce qu'on leur a dit qu'on Voulait supprimer la religion catholique; que lè roi était en captivité; que tout ce qu'il sanctionnait était nul, et qu'il fallait une autre Constitution.
Ce fut par ces moyens Infâmes qu'on parvint à obtenir plus de 3,000 signatures.
On se hâta de donner la plus grande publicité à cette délibération, et des commissaires l'adressèrent. aux municipalités. Voici la lettre qui accompagnait l'envoi (1).
La plupart des municipalités repoussèrent avec mépris la délibération incendiaire qui leur avait été adressée, et elles se hâtèrent de Vous la dénoncer. Il serait trop long de citer ici les villes qui ont donné en cette occasion une preuve de leur patriotisme et de la juste indignation que leur inspira la conduite de ces soi-disant catholiques.
La municipalité de NîmeS fut plus calme, et elle vit avec indifférence éclater le projèt des factieux.
On avait exprimé, dans la délibération, qu'on était persuadé que le 2èle du conseil général de la Commune pour la religion, et son amour pour le roi, lé porteraient à y adherer, et des Commissaires avaient été nommés pour en adresser copie à la municipalité.
La délibération y fut présentée le Ie* mai, avec demande d'y adhèrér.
Le sieur Vincent VàlZ, officier municipal, a déposé qUe la municipalité tint à ce sujet Un comité. particulier; qu'il en témoigna son indignation; que M. Marguerites était à Ce comité, mais qu'on y prit aucun arrêté, et que l'affaire fut portée au conseil général.
Un autre témoin dépose que plusieurs officiers municipaux et notamment l'abbé de Bélmond étaient d'avis d'adhérer à là délibération, mais que le maire s'y Opposa.
Rien ne prouve que lës ôffîciérs municipaux aient donné, par un acte
public, l'adhésion qu'on lëur demandait: mais leur silence n'était-il
pas une adhésion formelle, et ne déVàiênt-ifs pas s'empresser de
proscrire hautement cette délibération séditieuse qui teudait à troubler
les consciences, à calomnier les intentions de l'As-
Mais, surtout, comment M. Marguerites, averti, et par les obligations qui lui sont imposées comme maire, et par les devoirs les plus pressants encore attachés à son titre de député à l'Assemblée nationale» ne s'st-il pas élevé, de toute la force de l'autorité et de la raison, contre cette entreprise audacieuse?
Pourquoi n'a-t-il pas repoussé des assertions mensongères sur les projets supposés à l'Assemblée nationale? pourquoi, enfin, lui, qui avait été témoin de cette séance mémorable du mois de février, où le roi vint parmi nous, e'a-tM&l pas dissipé les alarmes qu'on voulait faire naître Bur la liberté du monarque?
Si les officiers municipaux, sescollègues*étaient assez mauvais citoyens pour applaudir à des fae-tieux, seul 11 devait élever la voix pour défendre la Constitution qu'on attaquait, et qu'il avait juré de maintenir; iï devait vous dénoncer la municipalité: c'était lui, c'était le maire de Nîmes, c'était le député à l'Assemblée nationale, qui, le premier* devait invoquer votre sévérité contre cette coupable délibération* répandue dans toute la France pour tenter la fidélité des municipalités, et que le cri de l'exécration publique vous a dénoncée de toutes les parties de l'Empire*
Et quelle sera votre ju^te indignation, lorsque voua saurez qu'un officier municipal a osé s'an-nonôer comme le principal promuIgâteur de cet acte incendiaire!
Le Bieur Boyer* substitut du procureur de la commune de Mme-, est propriétaire et rédacteur d'un journal : le 29 avril* il y inséra la délibéra* tion* et Cette publicité scandaleuse eut ainsi pour agent L>n homme à qui ses fondions imposaient le devoir de la réprimer*
Ge n'était pas la première fois que eet offleiet* municipal détendit complicedesmauvais citoyens intéressés à troubler 1 ordre public : dan^ Son journal dtt 15 du même mois» il avuit apporté un prétendu fragment d'un eerihon prêche à Marseille,- le % mars, dans l'église de Saint-Ferréol, par le père Bouchon* jacobin.
Gette Citation calomnieuse Servit de prétexte à une déclamation incendiaire que des motifs rein gieux devaient rendre plus persuasive et plus funeste encore : le père Boucbon a démenti,dans un écrit signé de lai* le fragme. t qu'on loi attribuait, et les officiers municipaux ont toléré ces délits du substitut dû procureur de la cOmmuûe.
Les maximes dé la révolte avaient été hautement annoncées à Nîmes; il ne restait plus aux factieux qu'à arborer le signe de la contre-révolution, et ce dernier excès tut encore toléré par la municipalité.
La cocarde blanche avait été la cause de Té-meute du 2 ët du 3 mai.
On reproche aux ofttciéïs municipaux d'avoir permis qu'ou arboiàt le signe d'iusunection : ils attèsum que la cocarde blanche a toujours été portée à NlmeS jusqu'à l'époque du 2 et du 3 mai, et citent* à l'appui de leur assertion, un certificat signe par 60 otficièrs ét sous-officiers de la légion, dont Voici la teneur :
« Nous soussignés, capitaines, lieutenants et bas-officiers de h légion nimoise, déclarons, à qui il
appartiendra* qhe les légionnaires, jusqu'à l'épo-ué du 2 et du 3 du présent mois ont porté in-îstinctement-laeocarde blanche et la cocarde aux trois couleurs, sans croire, jusqu'à ladre époque, que cette distinction entre les légionnaires pût tirer à conséquence* personne fie l'avant jamais ira prouvée. Fait à Nîmes, le 28 mai 1790. Signé : Froment* Velut, Melqulondj etc. »
Voilà une déclaration bien précise qui établit que les légiohûaireS n'ont pas cru que la distinction des cocardes pût tirer à conséquence, et que personne ne l'a jftmals improUvée.
J'ai peine à concilier cette assertion avec celle de M. Marguerites; il nie que les légionnaires qui étaient chez lui le 2 mai portassent la cocarde blatiohe quoique la preuve àe ce fait soit de toute évidence, et voici la raison sur laquélle il fonde sa dénégation i
« Les légionnaires* dit-il, page 8 de son exposé sommaire* savaient que le maire ne soilffrâit pas chez lui des cocardes de cette sorte, et que du moment de Bon installation, il n'avait cessé de déclarer hautement que la nation et le roi ne faisaient qu'un* et étaient inséparables, et que le roi lui«même ne portait que des Cocardes aux couleurs de la nation ».
D'après une déclaration si positive du Chef de la municipalité, comment les officiers de la légion ont-ils pà erOiré que la cocarde blanche ne tirait pas à conséquence* et comment n'en obt-ils pas vu la désapprobation la plus formelle dans le refus constant que faisait te maire d'en recevoir chez lui de eette sorte? — Mais plutôt, comment le maire toléràit-il qu'on portât dans la légion; qu'en arborât dans lrt ville une cocarde qu'il ne voulait pas souffrir chez lui ? L'exemple du roi qu'il citait hautement, dit-il, ne devait-il donc être rappelé que pouf imposer lë devoir de periefr dans une maison privée une distinction devenue parmi tious, ët 1 attribut de la liberté, et un des gages de la tranquillité publique? Et le poids de ce grând exemule du roi était-il si indifférent au maintien de l'Ordre, qu'il ne dût pas eicitef la surveillante du maire et dêS officiers municipaux; et leur faire proscrire dn Signe de division réprouvé par le roi même ?
Le maire né souffrait pas* dit-il, la cocarde blanche chez lui; mais il là tolérait dans l'intérieur de l'hôtel de ville, d'où, sans dôtite aussi, l'exemple et l'autorité du roi auraient dû la faire bannir.
Le sien* VitiCenf Valfc* Officié* rildniCipal, témoigne . au fflaifë qu'il est sdrp'ftë de voir dàtis l'hôtel de Ville une foute de légionnaires à cocardes blanches; le maire répond que Cèià ûe tire pas à conséqilencè.
J'ai rapproche la déclamation dës officiers de la légion de Celle du maire, et, je lë dis nettement: il y a ifci contradiction, au moins.
On avait afbërê & Nîmes la dbcàfde blanche, la municipalité l'a toléfêë; les légionnaires qui, le 2 rnai, se rendirent chez le maire, là portaient. GeS fai'S Sont démontrés, et on explique difficile-ffient commeht M. Màrguërites, que dë grands et de douloureux souvenirs devaient éclairer Sur le danger d'une telle distinction, a négligé ce que son devoir et la prudence exigeaient de 1 ui, et corn ment il a toléré qu on ait, audacieusemëttt, adopté Sous Ses yeux uh signe de ralliement et de révolte, qui devait nécessairement Conduire à un éclat funeste pour la tranquillité publique.
On conçoit difficilement encore Coiûmeht M. Marguerites n'a pas profité, pour pfêtenir les troubles, d'uû avertissement qui lui a été adonné.
Chevalier, procureur du présidial, lui écrit qu'il sait que des troubles vont avoir lieu; que Froment a chez lui un amas de fourches, et que la presse de l'imprimeur Baume est un foyer qui recèle et qui produit drs monstruosités : ce sont les termes de la déposition. D'après cet avertissement, nulle précaution n'est prise; mais dès le lendemain Froment est instruit que Chevalier a écrit à M. Marguerites, et il s'exhale en injures et en menaces contre l'auteur de la lettre : ce qui surprit d'autant plus Chevalier, a-t-il dit dans sa déposition, qu'en confiant cet avis à M. le maire, il ne se serait pas attendu que la connaissance en parvînt jamais à Fi ornent.
M. Marguerites convient avoir reçu la lettre de Chevalier, qu'il l'a remise aux officiers municipaux, et qu'il ignore ce qui a été fait à ce sujet.
Vous jugez que cette réponse n'est pas satisfaisante, et que le maire de Aimes est repréhensible pour n'avoir pas pris des mesures propres à empêcher les troubles, quand il a été prévenu qu'on idevait en exciter; pour n'avoir pas vérifié un amas d'armes prohibées qu'on lui dénonçait; enfin pour n'avoir pas recherché des libelles incendiaires dont on lui indiquait la source et le dépôt.
La municipalité avait donné lieu aux troubles, en tolérant la distinction qui les fit naître, et on l'accuse avec raison de n'avoir pas mis en usage, pour les faire cesser, tous les moyens que la Constitution lui confie.
La nuit qui succéda aux événements du 2 mai fut tranquille, mais le 3 l'émeute recommença dès le matin. Les officiers municipaux parcoururent assez inutilement plusieurs quartiers delà ville: que ne faisaieut-ils publier la loi martiale?
Ils prétendent que les circonstances n'étaient pas favorables, et que le régiment de Guyenne, qui devait être appelé à cette proclamation, était lui-même en insurrection.
Cette allégation n'est pas exacte: les officiers municipaux annoncent eux-même dans leur procès-verbal, que le 2, à huit heures du soir, le régiment ayant entendu battre la générale, rentra au quartier en moins de dix minutes, avec une subordination incroyable. Le lendemain la troupe fut consignée jusqu'à cinq heures du soir, et les soldats ne se portèrent à des violences que vers sèpt heures, lorsqu'ils apprirent les voies de fait exercées contre plusieurs d'entre eux, et l'assassinat d'un de leurs camarades ; encore leur ressentiment céda-t-il à la subordination, ét rentrèrent-ils aux casernes, au premier ordre de leurs officiers.
Si, comme le devait; si, comme le pouvait faire la municipalité, la loi martiale eût été publiée dès le matin, plusieurs citoyens n'auraient pas été attaqués, poursuivis et grièvement blessés; un soldat n'eût pas été frappé avec son sabre qu'on lui arracha; d'autres n'auraient pas été assaillis à coups de pierre ; un grenadier n'eût pas été assassiné, dans l'après-midi, d'un coup de fusil, dont il est mort trois jours après ; enfin on aurait prévenu, entre une partie des citoyens et la garnison, une animosité qui pouvait devenir funeste, sans l'excellent esprit qui règne au régiment de Guyenne.
Quelques-unes des déclarations reçues par les officiers municipaux tendent à prouver que les sous-officiers du régiment de Guyenne avaient été payés par les protestants pour arracher la cocarde blanche.
J'avoue qu'ayant sous les yeux une informa-
tion légale, je n'ai pas cherché la vérité dans les déclarations produites par la municipalité : trop de raisons ont dû me les faire rejeter.
La forme y est incomplète et abusive, et le défaut des interpellations d'usage dans une information me fait douter si les déclarants ne sont pas intéressés personnellement dans les faits, ou liés de parenté ou de domesticité, soit avec les plaignants, soit avec les coupables.
D'ailleurs, l'information fait juger qu'on'doit être en garde contre ces déclarations; le secrétaire de la municipalité dépose de la partialité du procureur de la commune, et de la sollicitude qu'il a mise à inculper les soldats du régiment de Guyenne et à prouver qu'ils avaient été corrompus par l'argent des protestants.
Il existe, à l'appui de cette déposition, un fait consigné dans un procès-verbal de la municipalité.
Le 16 mai, le procureur de la commune, le ci-devant baron de La Baulme, autre officier municipal, accompagnés du secrétaire greffier, précédés du capitaine du guet et de trois valets de ville, se transportèrent chez la demoiselle Benoît, qui, leur avait-on dit, menait une vie scandaleuse avec le sieur Ramond, sergent-major au régiment de Guyenne; après quelques interpellations assez insignifiantes, on fait sommation à la fille Benoît d'ouvrir une armoire; on y trouve un portefeuille qu'elle déclare appartenir au sieur Ramond : c'était très vraisemblablement ce que cherchaient les d ux o f fi ciers munici pa u x ; e t sans aucu m i roi t, contre toutes les règles de la justiceetde la raison, les papiers renfermés dans le portefeuille sont lus, examinés et parafés. Il y avait entre autres papiers,dans le portefeuille, la minute d'une lettre signée Ramond, écrite à un président de l'Assemblée nationale, apparemment M. Rabaut, pour le féliciter sur son élection à la place de président; Jalettre contenait aussi quelquesdétailssurl'avan-cement militaire, et l'assurance positive de n'avoir jamais contribué à exciter des troubles soit dans la ville, soit dans le régiment, et ce qui était fort étranger au prétendu scandale qui avait motivé la visite des officiers municipaux chez la fille Benoît, la lettre fut insérée dans le procès-verbal.
On aperçait, dans le détail où je viens d'entrer, la confirmation du témoignage du secrétaire-greffier contre le procureur de la commune, et on juge facilement que le transport des officiers municipaux avait moins pour objet de constater et de réprimer le scandale que de s'emparer d'une correspondance qu'on croyait réceler des faits importants, et qu'on disait exister entre M. Ramond et M. Rabaut.
Un homme qui ne doit pas être suspect aux officiers municipaux, le sieur Froment, avoue,dans son mémoire, que la municipalité avait le système (ce sont ses termes) de faire des notes et de réunir des preuves contre les protestauts et le régiment de Guyenne.
Vos comités ont donc été fondés à se défier des déclarations produites par la municipalité, et ils n'ont cherché de preuves que dans une information légale faite par lé lieutenant criminel, au présidial, d'après différentes plaintès du procureur du roi.
Au reste, il est inutile de réfuter les calomnies publiées, par la municipalité contre lé régiment de Guyenne et de chercher bien loin les motifs des querelles suscitées pour la cocarde blanche : elles ont pris leur source dans l'indignation tiès énergique qu'ont éprouvée lès soldais en voyant arborer impunément à Nîmes une distinction de-
venue odieuse parmi nous depuis la Révolution, et qui devait leur paraître d'autant plus alarmante que, d'après les ordres du roi, ils portaient la cocarde aux couleurs de la nation.
Je viens de citer le nom du sieur Vidal, procureur de la commune. L'information le désigne Comme le protecteur le plus zélé des auteurs des troubles qui ont affligé la ville de Nîmes.
La municipalité avait fait proclamer, le 3 mai, une défense de s'attrouper. Plusieurs dépositions prouvent que, dans la nuit du 5 au 6, le procureur de la commune, sans respect pour son titre, qui lui imposait le devoir de donner l'exemple; sans respect pour le règlement rendu sur son réquisitoire, tint dans sa maison une assemblée nombreuse, où prè3 de 80 personnes se rendirent armées, et où l'on s'introduisit avec des précautions qui semblaient présager les manœuvres criminelles qui s'y tramaient.
Cet officier municipal était le détracteur le plus ardent des décrets de l'Assemblée' nationale, et, ne gardant aucune mesure, il ne rougissait pas d'associer à ses déclamations incendiaires le nommé Rabanis, concierge de la prison, dont les propos violents n'ont pas peu contribué à entretenir, dans la classe des artisans, l'animoëité de quelques catholiques contre tes protestants.
Rien n'égale l'indécente fureur avec laquelle le procureur de la commune, l'abbé de Bélmond, grand vicaire et officier municipal, et le sieur Descombiès, notable, se déchaînaient contre la Constitution, qu'ils avaient juré de maintenir; c'était à la municipalité même, dans leurs fonctions et en présence des subalternes attachés à leur administration, qu'ils Se permettaient cette scandaleuse conduite; cè fut à l'hôtel de ville que l'abbé de Belmond dit publiquement que l'Assemblée nationale voulait exciter la guerre civile.
Lés dépositions de plusieurs témoins , ne permettent _pas de douter que l'acharnement des sieurs Vidal, Bel uond et Descombiès crintre les protestants n'ait fortement contribué à faire éclater les divisions et les malheurs qui ont fait périr tant de citoyens à Nîmes.
Leur animosité contre les non catholiques était si fortement prononcée, qu'elle obligeait à des ménagements particuliers,les citoyens que leurs fonctions mettaient dans la dépendance des officiers municipaux, et que le secrétaire greffier crut que son intérêt particulier exigeait qu'il renvoyât du greffe un commis qui y travaillait depuis, trois ans, et par cela seul que ce commis était protestant.
Ces trois officiers municipaux accueillaient, au contraire, avec une faveur particulière les légionnaires connus sous le nom de travailleurs de terre, tous catholiques, et que leur ignorance et leur pauvreté rendaient plus propres à être séduits et à seconder des projets.dont on leur cachait la perfidie sous le voile de la religion.
Ils venaient souvent à l'hôtel de.ville, et, sûrs d'être agréables à leurs protecteurs, ils faisaient entendre les cris de : Vive le roi! Vive la eroix! A bas la nation! Ët les mêmes acclamations se répétaient lorsque quelque événement particulier obligeait les compagnies à se réunir.
Ces légionnaires étaient du nombre de ceux à qui l'on avait fait prendre la cocarde blanche, et ils faisaient difficulté de la laisser, même après la proclamation des officiers munici paux : « Faites-le pour le bien de la paix, leur dit le président de la commune, vous n'en aurez pas moins dans
le cœur la même façon de penser. — Oh I oui, pour la vie, » répondirent les légionnaires.
Il était essentiel, pour les chefs du parti, que ces trop dociles soldats, en laissant la cocarde blanchë, adoptassent une autre di3tjnCtion; aussi; à la distribution des cocardes, faite par ordre de la municipalité, Descombiès et Froment leur recommandèrent-ils expressément de porter un pouf rouge. Ce signe devint, dans quelques compagnies de la légion, le signe de la catholicité et le rallieme it de la faction d^ la cocarde blanche.
Les sieurs Descombiès, Vidal et Belmond, continuèrent de donner à ces légionnaires des marques de prédilection, dont les particularités devenaient frappantes pour ceux qui en étaient témoinsl Le sieur Descombiès, surtout, ne tarissait point sur leur éloge; il vantait continuellement leur courage, il les appelait les compagnies de confiance, et disait qu'il les regardait comme très propres à un coup de main.
La préférence donnée par cés trois officiers municipaux aux compagnies à pouf rouge devint si exclusive, qu'un commis de la municipalité s'abstint, craignânt de perdre sa place, de faire son service dans la compagnie n° 13, qui n'avait pas adopté cette distinction.
Je dois déclarer à l'Assemblée nationale que deux témoins, attachés par des fonctions publiques à la municipalité, déposent que M. Marguerites parlait toujours avec prudence et avèc respect des décréta-de l'Assemblée nationale, et qu'ils n'ont vu en lui que beaucoup de zèle pour l'exécution des lois et pour les affaires de la commune.
J'ai discuté les dénonciations faites contre les officiers municipaux* et je vous ai exposé quelle avait été leur conduite.
Vous les avez vus permettant l'armement, et tolérant pendant pins d'un mois la fabrication des fourches qui avaient occasiunné l'émeute du 31 mars, et qui inspiraient à Une partie des citoyens les plus vives alarmes.
Vous les avez vus négligeant les moyens de rétablir la paix dans une ville où tout annonçait qu'un parti semait la division :
Laissant imprimer, vendre et distribuer publiquement des écrits incendiaires, sourcé de tous les malheurs de Nîmes :
Recevant des mains des commissaires la délibération des catholiques, la discutant en conseil général, et ne proscrivant pas cet acte séditieux, quoique avertis par le cri de l'indignation publique.
Vous les avez vus ne réprimant pas ces clameurs du fanatisme et de la révolte : Vive la croix! a bas la nation! dont la ville entière a souvent retenti :
Permettant qu'une partie de la légion arborât la cocarde blanche qui a causé l'émeute du 2 et du 3 mai :
Ne faisant pas publier la loi martiale dans la journée du 3, quoique les troubles eussent éclaté dès le matin, et occasionnant par cette négligence les voies de fait exercées contre des citoyens et des soldats, et la ihort d'un grenadier assassiné d'un coup de fusil.
Vous avez vu que M. Marguerites à qui son titre de chef de la commune, de député à l'Assemblée nationale, recomman lait plus de zèle et plus d'exactitude, n'a pas fait ce que la prudence exigeait de lui pour prévenir les troubles; qu'il a notamment toléré la cocarde blanche, signe de division, et que sa conduite vraiment répréhen-
sible justifie je décret du 11 mai, qui le mande à la barre.
Vous avez remarqué de combien d'infractions à l'ordre publ'C et aux devoirs attachés à sou titre s?eat rendu coupable le procureur de U commune ; qu'il a souffert chez lui, dans la nuit du & au 6, une assemblée très nombreuse de gens armés; qu'il a favorisé les troubles ; qu'il a tenu publiquement et fréquemment des propos séditieux, et que l'information vous le désigne toujours comme excitant ou protégeant les factieux; enfin, en rapprochant la conduite du corps municipal des manœuvres pratiquées pour sa formation, vous avez jugé qu'il est devenu l'instrument ou le complice du parti dont il était l'ouvrage, et qu'une si honteuse élection présageait bien tous les maux qu'a produit, et qu'on voulait que produisît eu effet cette détestable municipalité,
Pour me livrer à l'examen des accusations intentées contre les officiers municipaux, j'avais arrêté le récit des faits à. l'époque du juin; je vais en reprendre le cours. J'ai encore à vous présenter des détails fort étendus ; ils paraîtront peut-être pénibles à votre attention, mais ils sont indispensables pour vo're justice.
Jl était difficile qu'avec une municipalité telle que celle dont j'ai développé la conduite, Nîmes pût jouir longtemps du calme apparent qui y régnait depuis le 3 mai ; bientôt le fanatisme ranima ses efforts, caro'était toujours la religion qu'on feignait de vouloir défendre.
Le frère Modeste continuait la distribution des libelles, et une foule de témoins attestent que le gardien des capucins, le père Alexandre et le père Saturnin déclamaient publiquement et avec violence contre les nouvelles lois ; dans leurs assertions les opinions politiques dévenaient des cas de conscienee; et c'était, disaient-ils, être impie ou mauvais oatliolique que d'approuver les décrets de l'Assemblée nationale.
L'abbé Tempié dissuadait les citoyens de payer la contribution patriotique; et, armé de tobte l'influence que lui donnait le oaractôre sacré dont il est revêtu, il se livrait même, dans les saintes fonctions du sacerdoce, aux déclamations'les plus séditieuses. C'est lui qui, monté sur le marchepied de l'autel dans la chapelle du saint-sacrement à la cathédrale, faisant, un dimanche après vêpres, une exhortation à des congréga-nistes et à d'autres personnes rassemblées en grand nombre, prêchait que i'épître du jeur annonçait aux catholiques qu'ils doivent se.aoqte* nir jusqu'à la dernière goutte de leur sang,, et qui, après avoir ainsi égaré l'esprit de ses auditeurs par cette coupable prpfanafiun de la morale des apôtres, donna lecture d'une délibéra*? tion tendant à réclamer la iib$?té du roii et proposa de la signer,
Cette exhortation eut tout le succès que l'orateur s'était promis; plusieurs personnes donnèrent leur signature, et la précaution ordinaire de faire 'sîgner çeux qui savaient écrire, pour ceux qui ne le savaient pas, fut encore mise en Usage,
Cet ecclésiastique est. Messieurs, membre au conseil général aë la commune.
Les soi-disant catholiques de Nîmes n'avaient point été rebutés par la réclamation générale qui s'était élevée contre leur délibération du 20 avril; et le premier juin, dans l'église des Jacobins, ils en prirent une nouvelle, eonfirmative de la première.
Tout ee que des intentions perfides peuvent suggérer d'amertume et de calomnie éclate dans
pet ouvrage ; les séditieux ne manquèrent pas de se rallier à une espèce de protestation contre un de vos décrets, laite, diti-on, par la minorité de cette Assemblée ; ils arrêtèrent aussi d'adhérer aux délibérations prises par les villes d'Albi, d'Uzês et de Montauban.
Cette coalition parut agrandir les espérances des factieux, si j'en juge du moins par leur audace et par l'activité qu'ils mirent à répandre dans le royaume leurs nouvelles maximes d'insurrection.
Les signatures obtenues par la délibération du Ie" juin furent encore les fruit* honteux des mêmes manœuvres qui avaient été pratiquées pour la délibération du 20 avril, mais l«s moyens d'en assurer la publicité et la circulation dans les départements furent préparés avec plus d'artifice.
L'horreur qu'avaient témoignée les municipalités par la délibération du 20avril, laissait peu d'apparence de succès pour une nouvelle tentative. Les agents des soi-disant catholiques crurent qu'ils assureraient l'effet de leurs complets, s'ils cherchaient des complices dans la classe la moins instruire de la nation, et la plus étrangère en apparence aux principes de l'ordre public ; aussi, dans les principales villes du royaume, et même dans les campagnes, 1 s maîtres maçons, serruriers, charpentiers, tailleur, cordonniers, enfin les ouvriers de toute classe, reçurent-»ils {'envoi de la délibération du 1er juin, avec demande d'y adhérer,
Mais là où les ennemis de la Constitution fondaient leurs espérances sur l'ignorance et crédulité, ils trouvèrent cet excelle nt esprit public, cette raison innée, ce Seus exquis du neuple, qu'on n'abuse jamais ni sur ses vrais intérêts, ni sur ses vrais amis : partout, les citoyens de la classe estimable et prépieuse des artisans ou déférèrent à leurs municipalités, ou dénoncèrent à l'Assemblée le coupable écrit qui leur avait été adresse ; et je regrette que la trop grande étendue de ce rapport ne me permette' pas de vous faire connaître avec quelle énergie s'exprimait 'eor patriotisme, et combien leur attaçhéqieni invincible à la Constitution les rend dignes en effet d'être heureux et libres.
De toutes les parties de la France on vous dénonçait les soi-disant catholiques de Nîmes ; leurs excès ne pouvaient plus rester impuni*, et votre juste sévérité éclata enfin t : vous mandâtes à la barre, le 17 juin: ceqx qui avaient signé, comme président et commissaires, la délibération du 20 avril et cëllë cju l*r juin.
L'assemblée électorale du département du Gard s'était formée le 4 à Nîmes. Le même jour, deux électeurs, se retirant |e soir à leur logement, furent attaqués par un légionnaire à pouf reuge : cet homme avait le sabre à la main ; il poursuivit longtemps les deux électeurs, tes menaça de son sabre, en disant que des étrangers n'étaient pes faits pour venir gouverner la ville, et qu'on était fâché de n'avoir pas été au-devant d'eux pour les tuer.
Ainsi se justifièrent, dès l'ouverture de l'assemblée électorale, les alarmes et-la prévoyance du district de Sommiènes, qui avait proposé de former un camp sur les limites du territoire de Nîmes, pour protéger la sûreté des électeurs: proposition sage qui pouvait prévenir de grands malheurs, et qui lut rejetée par la municipalité avec les expressions qu'on emploierait pour réprimer une sédition.
L'attentat commis contre deux éleoteurs, détermina les commissaires du roi à demander aux
officiers municipaux de prendre les plus grandes précautions pour la sûreté de l'assemblée électorale. Ën conséquence, on ordonna des détachements nombreux du régiment de Guyenne, et des patrouilles à cheval d'une' compagnie de dragons qui faisait partie de la légion. Des attroupements considérables de légionnaires à pouf rouge se formaient chaque jour au palais où était réunie l'assemblée électorale, et chaque jour ils étaient dispersés par les patrouilles de dragons.
Ces dragons, je dois vous le faire observer, étaient, dans la garde nationale, du parti opposé aux légionnaires à i cruf rouge, c'est-à-dire au parti de la municipalité.
Quelques-unes des compagnies, que je désigne par la distinction du pouf rouge, s étaient considérablement accrues par la réunion de la presque totalité des portefaix et des travailleurs de terre. Le sieur François Froment avait même fait, pour celle dont il était capitaine, des dépenses très considérables, qui parurent disproportionnées à sa fortune: il acheta une très grande quantité de sabres, de baudriers et de fusils, et on fut frappé à Nîmes de l'affectation qu'il mit à donner à ses volontaires des habits verts doublés de rouge, quoique le bleu et le blane fussent les couleurs uniformes de la légion.
Les travailleurs de terre étaient, de tous les légionnaires à pouf rouge, les plus animés contre le parti contraire de la garde nationale, et leur acharnement redoubla parla contrariété que leur causaient les patrouilles à cheval en dissipant les attroupements qui se formaient aux portes de l'assemblée électorale.
Le dessein fut pris d'insulter les dragons et de tourner leur service en ridicule. Les travailleurs de terre convinrent de se réunir en grand nombre, de monter sur des âne?, et le sabre au poing, de faire aussi des patrouilles par la ville.
Cette cavalcade fut annoncée au son du tambour; la municipalité eut beaucoup de peine à empêcher l'exécution du projet, et l'aigreur augmenta entre les deux partis.
Enfin les murmures éclatèrent dans la classe du peuple à laquelle tenaient les légionnaires : quelques personnes annoncèrent que les chevaux les avaient effrayées; d'autres qu'elles avaient été blessées, et le U les patrouilles à cheval f irent interdites; on établit seulement à l'évêché un poste de vingt dragons chargés de fournir une ordonnance placée à la porte de l'assemblée électorale.
Le dimanche 13 juin, il y eut une assemblée de légionnaires à pouf rouge dans l'église des Jacobins; on y prononça un discours, après lequel on reçut des signatures pour la délibération des eatholiques.
A cinq heures1, un homme à potif rouge se présente à l'évêché, et demande au portier de le laisser entrer et de faire sortir les dragons*
Sur le refus du portier, cet homme se retiré en jurant. Il revient un quart d'heure après accompagné de deux autres légionnaires, et présente au portier un Billet qu'il lui recommandé de remettre au commandant des dragons.
Ce billet remis au sieur Paris, lieutenant, commandant le poste, était ainsi conçu « Le suisse de l'évêché est averti de ne plus laisser entrer aucun dragon à pied ni à cheval, passé ce soir, sous peine de la vie. — Ce 13 juin 1790- »
Le lieutenant fit au porteur de ce billet quelques représentations sages, et l'engagea à s'éloigner. «L'évêché, répond le légionnaire n'est pas fait pouf servir de corps de gardé. »
Alors l'offiGier demanda au porteur du billet de venir avec lui devant la municipalité; ils étaient en chemin pour s'y rendre, lorsqu'ayant entendu un grand bruit sur la place de l'évêché, le lieutenant retourna sur ses pas et revint avec le légionnaire.
Les dragons étaient encore à la porte de l'évêché, et il y avait dès lors sur la place un attroupement de légionnaires à houpe reuge, d'autres du même parti arrivaient successivement armés les uns de sabres, de pierres, d'autres de fusils. Ils firent dès menaces aux dragons et leur lancèrent des pierres; les dragons ne répondirent point et se tinrent tranquilles. Des vingt hommes dont le poste était composé, douze seulement se trouvaient au corps de garde. L'offteier ordonna au trompette de sonner pour rassembler ceux qui étaient épars.
Le nommé Enaud s'avança pour exécuter cet ordre jusqu'au coin dit « des portefaix » ,au cqm-menoement de la rue qui conduit au cours, il est saisi par des. légionnaires qui lui arrachent sa trompette et la brisent. Dans le même moment, deux de ces hommes à houpe rouge tirent cha^-cun un coup de fusil aux dragons ; d'autres s'ar-vançaient le sabre à la main, et lançant des pierres, lorsqu'un dragon nommé Consiant tira un coup de mousqueton qui fut suivi de la décharge entière du piquet ët du feu que donnèrent et reçurent également les deux partis.
Le commandant du poste avait envoyé un dragon à l'hôtel de ville pour avertir la municipalité ; deux officiers lie tardèrent pas à paraître. Le eombat était déjà très opiniâtre;' il y avait plusieurs blessés ; les portes et les fenêtres des maisons situées sur la place étaient fermées, et les coups de fusil partaient des trois rues qui sont vis-a-vis de l'évêché.
Les deux officiers municipaux firent tous leurs efforts pour faire cesser le feu, et ils parvinrent à faire rentrer les dragons dans l'évêché; mais craignant que quelques-uns des leurs ne fussent restés sur la place, exposés à la furie des agresseurs, ces volontaires "rouvrirënt la porte, et à l'instant les coups de fusil recommencèrent et furent dirigés contre eUx. Alors le commandant se détermina à aller rejoindre lé pôsie de l'hôtel de vil le} U s'y rendit à la tête d'un piquet et avec un des officiers municipaux; pendant leur rer traite, ils furent poursuivis à coups de pierre et à coups de fusil j ils ripostèrent et tuèrept un homme.
Lorsque les deux officiers Municipaux étaient venus à l'évêché, ils avaient été escortés par un détachement de la compagnie: n» 1, de garde à l'hôtel de Ville, et du parti contraire aux légionnaires à pouf rôugë; Ce détachement occupa 10 poste que lés dragons venaient de laisser et se porta sur la place; il lut attaqué à coups de fusil ; mais malgré le feu dés légionnaires, auquel il répondit vivement,- il s'empara des avenues, après avoir eu un homme tué et un autre blessé.
Lepartiçontraire perdit aussi quelques hommes.
L'officier municipal pârtit de l'évêché avec les dragonstrouva en arrivant à l'hôtel de ville, à la tête de plusieurs légionnaires qui étaient venus se réunir à la compagnie de gardé, le sieur de Saint-Pons, major de la légion ; cet officier dit en l'apercevant, et voulant parier des officiers municipaux : « Vous l'avez voulu, vous ét"s cause de tout, f...... vous marcherez, vous ne nous quitterez pas, il y en aura pour jfetti le mbnd^. » . Èn effet, cet officier donna ordrëaux troupes dë le suivre sur la place où il voulait porter du se-
cours, et le sieur Ferrand, c'etait I'offlcier muni- cipal, fut oblige de marcher; raais la troupe ne £ut pas conduite & la place comme l'avait resolu Je major, et elle rentra bienlOt avec lui a I'hOiel de ville.
Les troubles les plus violents avaient 6clat6 dans difterents quartiers.
Un legionnaire k pouf rouge, aprfcs avoir blesse au bras, revint dans le canlon des Jacobins.
A la vue de sa blessure, ceuxde son parti cou- rurent aux armes; les uns prirerit des fusils, des sabres, d'autres des fourche-, dont il y avait un amas si considerable chez Froment.
lis s'empar&rent de dilferents postes, notam- ment des approcbes de Ja place des Carmes, de la maisor. Froment, et de la partie des remparts sur laquelle cette maison est ouverte, et qui do- mine le quartier appel6 les Calquifcres.
Tandis que les legionnaires a pouf rouge s'oc- cupaient de ces pr6paratifs alarmants, les dra- gons qui s'6taient retires k l'hotel de villeavaient requis que le drapeau rouge f£it deployé.
Une 6raeute qui s'annongait avec tabt de furie rendait trop urgentes les dispositions propres a la calmer, pour qu'il ftit possible de suivreexac- tement toules les formalins prescrites pour Ja publication de la loi inartiale, et I'abbe de Belmond fut press6 de sortir avec le drapeau, sans qu'on etit dresse de proclamation.
II opposa qui lque resistance, et alI6gua son caractere; on lui r^pondit que d'apr&s ce carac- t&re mfime il £iait, plus qu'un autre, fait pour en imposeraux malveillants, et on le for^a de sortir avec une escorle compos£e de quelques legion- naires, de qnaire dragons, et dune palrouille du regiment de Guyenne.
L'officier municipal observe que ce n'^tait pas & lui a porter le drapeau rouge; ce n'etait gu6re le temps de s'occuper d'une vaine formalite, et la marehe fut continue.
On sortit par la porte de la Couroone, et le cor- tege, augments d'un d^lachement du regiment de Guyenne, passait sur les Galqnitres, iorsquede la parlie des remparts qui touche la maison Fro- ment, ei d'une tour qui I'avoisine, des horarms & houpe rouge, dont quelques-uns avaient J'uni- forme vert, tireot feu sur l'escorte.
on riposta, mats le feu de la tour el des rem - parts etant plus vif et plus soutenu, l'escorte fut dissipee.
Alors des hommes á houpe rouge, armes de fourches et de fusils s'avancerent : I'abbe de Belmond alia au-devant d'eux, le drapeau rouge á la main; il les conjura de se retirer; je me jetai mdme a leurs genoux, dit-il dans son proc£s- verbal, mais ils Teniratn^rent par la porte des Carmes, enlevfcrent le drapeau, le porterent chez Froment, et conduisirent I'abbe de Belmond dans une maiaon voisine.
Des teraoins d^posent que le sieur Descombtes etait avec les tegionuaires qui vinrent enlever le drapeau rouge.
Un des dragons qui accompagnait I'officier mu- nicipal fut saisi par des legionnaires; ils luidon- nferent plusieurs coups de fourcbe, lui arra- cherent son epee, et croyant I'avoir tu£, ils le jeterentdans un fosse.
M. Laurent, membre de la municipality et qui s'etait reuni & l'escorte, fut bles$6 a Ja main, en detournant un coup de sabre dirig6 contre M. Paris, lieutenant des dragons, et ii se mit a genoux pour sauver la vie a eel officier, que quatre hommes a houpe rouge voulaient massa- crer.
Nlmes prentait alors le spectacle le plus ter- rible. Des hommes arm£s parcouraient la ville, s'embusquaient au coin des rues, et faisaient feu sur ceux qui passaient: on s'attaquait a coups de sabre et coups de fourche.et dans les deux partis la fureur etait sans borne.
Un citoven nomine Astrvc, revenant de la porte de la Couronne, est poursuivi par des legionnaires k houpe rouge, et regoit un coup de fourche dans le dos et plusieurs coups de sabre : il passe, en fuyant, aupres d'un aqueiuc, il y est precipii6; on I'y a3somme a coup de pierre, et un legion- naire,portant Puniforme vert, lui tire un coup de fusil.
La maison de Jaiaberc est enioncee, n en est arrach6 par une quinzaine d'hommes h. houpe rouge, et regoit une blessure dont il meurt quel- ques jours apres.
Bovdon, volontaire de la compngnie de dra- gons, suivait, pr6s la porto de la Couronne, une patrouille du regiment de Guyenne : il fut atta- qu6 par des legionnaires a pouf rouge; I'un en- leve son casque, I'autre loi arracbe son mous- queton, et le coucbe en joue h quatre doigts de la l£te : le coup ne part pas. Descombifcs fait les plus grands efforts pour lui sauver la vie, et pour le faire entrer dans les raogs de la patrouille du regiment de Guyenne, qui s'etait approchee pour le gar,.ntir, mai's elfraye du danger qu'il venait de courir, Boudon s'elance et prend la fuite; il est poursuivi par les legionnaires, regoit deux coups de bai'onnette dans le dos, tombe et est massacre a coups de sabre; son corps est jete dans I'aqueduc, oil elait deja le cadavre d'Astruc, et ses armes sont portees chez Froment par des legionnaires qui les tuontrent comme un trophee, en disant : Voyez le sabre, voyez le casque, voyez le fusil du dragon. Quelqu« s heures apr&s, ils vinrent fouiller ses habits, volfcrent son argent, ses montres, et une puire d'eperons d'argent : le proces-verbal de verification du cadavre porte au'ils lui counerent un doigt.
Un jeune homrne de 17 ans, nomm£ Bouchon, regardait par une fen£tre de la maison de Durand, papetier, on le lue d'un coup de fusil. Deux hommes, portant le pouf rouge, dont les noms me sout inconnus, furent massacres dans les rues.
Trois membres de l'assembtee 6lectorale furent frappes & coups de pierre et de baionnette, et Tun d'eux regut quatre coups de sabre, don I il fut dangereusement blesse.
Les comriiissaires da roi pour le d£partement s'eiaient rendus k Thdtel de ville, oft ils avaient arr6te, avec MM. Ferrand et Pontier, les seuls ofticiers muoicipaux qui fussent alors á leurs fonctions. que la loi martialu serait proclamee.
La requisition pour la troupe de Ugne etait re- digee, et on allait l'adresser au commandant de la place, lorsqu'on amena un homrae, accuse, par ceux qui le conduisaient, d'etre du nombre des agresseurs.
Les officiers tnunicipaux se hat^rentde lefaire entrer, pour l'envoyer eu prison et lui sauver la vie, mais fortement presses, par la foule des volontaires, de sortir avec le drapeau rouge, ils ne purent rnettre cet homme en sCirete : il fut 6gorg6 dans la salle du conseil, et son corps, truine dans Tesralier, fut laiss^ dans la cour.
Les deux ofliciers muoicipaux el Je sieur Griolrt, commissaire du roi, escorts par des le- gionnaires que reuforga une nouvelle compagnie s'etaient mis en marche, faisant porter le dra- peau rouge par uu des valets de ville.
Ils prirent la même route qu'avaient suivie l'abbé de Belmond sortant par la porte de la Couronne : ils arrivaient aux Calquières, drapeau déployé et trompette sonnante, lorsqu'il partit un coup de fusil de ces mêmes remparts d'où les légionnaires à pouf rouge avaient déjà fait feu sur le cortège du premier drapeau porté par l'abbé de Belmond.
L'escorte riposta, malgré les instances des officiers municipaux, mais il partit delà tour une décharge de mousqueterie si vive qu'elle fit faire un mouvement rétrograde aux légionnaires de l'escorte. L'un d'eux fut grièvement blessé. Alors MM. Poniier et Griolet marchèrent avec précipitation vers les casernes où devait se rendre le détachement afin de se joindre à la troupe de ligne pour la publication de la loi martiale.
Le valet de ville qui portait le drapeau les suivit, mais à la porte des Carmes, il fut arrêté par des légionnaires à houpe rouge, qui le saisirent et lui arrachèrent le drapeau qu'ils emportèrent encore chez Froment. Un de ces légionnaires dit au valet de ville, en lui montrant le corps d'un dragon qui était dans le fossé : Vois, comme il boit.
M. Ferrand, resté seul en face de la tour d'où le feu était parti, faisait des exhortations aux rebelles (c'est le mot consacré dans le procès-verbal de la municipalité), enfin, se voyant abandonné, il prit le chemin des casernes et fut aussi arrêté à la porte des Carmes par les mêmes légionnaires qui avaient enlevé le drapeau rouge. Il les pressa inutilement de mettre bas les armes : ils l'entraîuèrent de force sur le rempart, et de là, par un petit pont de bois, dans la maison Froment. M. Ferrand demanda avec instance qu'on se soumît, qu'on mît bas les armes et fit de vifs reproches à Froment et à Descombiès de ce qu'ils se trouvaient réunis en si grand nombre.
« Désespéré, dit-il, dans son procès-verbal, de « se trouver dans cette maison, M. Ferrand veut « absolument en sortir, on s'y oppose ; des sen-« tinetles sont placées aux portes et un légioh-« naire se saisit des clefs. Les efforts redoublés « de M. Ferrand, et le mécontentement qu'il témoi-« gne, avec force, de cette odieuse conduite, pa-« raissent convaincre les uns, mais irritent les « autres au point qu'il est menacé de coups de « sabre.
« Froment, dans un moment de rage, prend « son chapeau, le jette avec violence sur la table, et dit en jurant : F......si la municipalité en« avait agi autrement avec nous, si elle ne les « avait pas autant ménagés, si elle nous avait « armés comme ils le sont et que nous devrions « l'être, nous ne serions pas exposés à périr; il « ajouta que les officiers municipaux étaient tous « des J... F.....»
M. Ferrand indigné de se voir parmi les rebelles, éérività M. Portier qu'il était retenu chez Froment avec le drapeau rouge et qu'il deman-. dait avec instance qu'on, l'en retirât. Enfin, après beaucoup de temps, il obtint la liberté de sortir, mais on retint le drapeau.
Le commissaire du roi et l'officier municipal qui s'étaient rendus aux casernes après avoir été abandonnés par le détachement, demandèrent que la troupe prit les armes : l'ordre lui en tut donné à l'instant, et elle se mit en bataille avec six compagnies de la légion; mais le feu des remparts ayant cessé au bruit des tambours du régiment de Guyenne, et le calme paraissant se rétablir, la troupe rentra dans les casernes et les
compagnies de la légion se retirèrent peu de temps après.
Les légionnaires qui occupaient la tour de la partie des remparts contiguë à la maison Froment, et qui avaient enlevé les deux drapeaux rouges, n'appartenaient: qu'à trois compagnies connues sous le nom des compagnies de travailleurs de terre : les chefs qui la commandaient étaient François Froment, avocat et receveur du chapitre; Pierre Froment, son frère; Folacher, leur beau-frère et Descombiès membre du conseil de la commune et capitaine delà légion.
15 autres compagnies, portant aussi le pouf rouge, ne prirent aucune part à l'action et ne contribuèrent en rien aux crimes de cette journée et à ceux qui la suivirent.
45 hommes passèrent la nuit chez Froment, mais un bien plus grand nombre avait tiré de la tour et des remparts.
Froment, d'après lé conseil de Descombiès, plaça des sentinelles pendant la nuit, et les deux chefs travaillèrent ensuite à fortifier leur parti, et à se procurer des secours pour le lendemain.
Ils s'adressèrent à M. de Bouzol, commandant en second dans le département et qui était alors à Montpellier.
Voici les lettres qu'ils lui écrivirent (1).
Ces dépêches portées par deux volontaires, munis d'un certificat dans lequel on énonçait qu'ils allaient remettre une lettre à M. le commandant pour les affaires du roi et de l'Etat, furent interceptées par la garde nationale d'Uchaud et portées à l'assemblée électorale. Voici les termes dans lesquels cette assemblée constata dans son procès-verbal la remise de ces lettres :
« L'Assemblée a vu avec indignation que ces « hommes (Descombiès et Froment), privés de « tout caractère, rejetaient sur les victimes de « leur agression, et sur celles de leurs compli-« ces, le coupable projet d'insurrection dont ils « sont eux-mêmes les auteurs, et que, d'après un exposé aussi infidèle, ils osaient solliciter l'un et « l'autre le secours du régiment de dragons en « garnison à Sommières. »
On sollicita aussi des secours dans les campagnes voisines. Des légionnaires à houpe rouge et armés, présentèrent à minuit au curé de Cour-bessac, une lettre décachetée qui portait qu'on avait tué un capucin, qu'il fallait donner du secours, et en réclamer d'ailleurs : on voulut exiger que le curé signât la lettre pour la porter dans les paroisses voisines, mais il refusa.
L'ordre fut donné à la garde nationale de Cais-sargue d'arriver à Nîmes à la pointe du jour, d'entrer par la porte des Carmes, et de se rendre à la tour : le maître d'école empêcha l'exécution de cet ordre.
A Boissiêres, des hommes inconnus vinrent à minuit demander un renfort ; la générale battit, et le village prit les armes.
Dans l'intérieur de la ville, la nuit ne fut pas tranquille : les légionnaires de garde à la maison commune reçurent quelques fusillades, et d'une terrasse attenant la maison Froment on fit plusieurs décharges.
A 4 heures du matin une partie de la légion se porta à l'esplanade, et se mit en bataille. Les gardes nationales des environs de Nîmes arrivèrent successivement, et prirent leur rang.
« Ces troupes, dirent les électeurs dans leur procès-verbal,
manifestaient hautement l'ardeur de venger le sang des citoyens versé la
veille, de
Pendant la nuit, 6 officiers municipaux, qui la veille avaient été dès le matin à la campagne, se rendirent à la municipalité.
Au point du jour, un drapeau rouge qui venait d'être fait d'après l'enlèvement de ceux de la veille, fut arboré à l'hôtel de Ville.
Le peupla se rassembla en foule, et annonça par ses cris l'arrivée des troupes auxiliaires.
Un comité, nommé par l'assemblée électorale, se concerta avec les officiers municipaux pour assurer la subsistance des gardes nationales étran-gères; il fut aussi décidé qu'op engagerait les troupes, qui venaient à Nîmes, à s'arrêter aux approches de la ville, et deux membres ds la municipalité se rendirent à l'esplanade pour prévenir les chefs.
Cette démarche faillit leur coûter la vie à peina ils parurent, qu'ils furent entourés et pressés de toute part t quelques officiers eurent beaucoup de peine à les retirer du milieu de la foule, et à les conduire dans la maison du sieur Mazel; mais ils furent bientôt obligés d'en sortir. Ge citoyen leur représenta qu'il ne répondait pas d'eux, parce qurà l'instant, et malgré ses efforts, le nommé Bataille venait d'être égorgé sous ses yeux dans cette même maison où il s'était aussi réfugié. Les deux officiers municipaux se sauvèrent dans la campagne, après avoir escaladé les murs de plusieurs jardina.
La tour et les remparts n'avaient pas été désemparés par Descombiès, les frères Froment et Folacher. Dès le matin, à 5 heures^ d'autres lé* gionnaires du même parti vinrent se joindre à eeux qui y avaient passé la nuit, et le nombre s'augmenta successivement par tes renforts que Froment envoya réclamer auprès de son frère, capitaine au canton des Bourgades, et par la réunion de quelques hommes de la compagnie Lamy. Ce capitaine avait distribué des cartouches à des légionnaires qui passèrent la nuit dans sa maison.
D'autres apportèrent des fusils dans la tour, et on reprit les postes occupés la veille à la porte des Garnies et en deçà du pont,
Descombiès, qui avait aussi passé ]a nuit chez Froment, était à la pointe du jour sur les remparts; l'habit uniforme gênait son activité; il prit une veste blanche et fit toutes les dispositions nécessaires pour l'attaque et la défense.
On l'entendait crier'» sentinelles à vos postes! puis s'adressant à des légionnaires qui buvaient i modérez-vous, leur disait-il, réserve%-vous pour quand il faudra faire feu.
D'autres prépapatifs se faisaient chez Froment s on fondait des balles, on faisait des cartouches ; et poup n'en pas manquer, Froment en envoya chercher chez Descombiès.
Des légionnaires s'écartaient dans la ville pour attaque? les gens qui n'étaient pas de 4eUr parti. Souvent aussi ils étaient attagués, ef ies rencontres étaient toujours suivies de4 coups de fusil, lorsqu'on était distingué par le pouf rouge ou la cocarde nationale.
On s'embusquait au coin des rues; on tira des fenêtres de quelques maisons, et ceS différentes agressions, souvent répétées, coûtèrent la vie à plusieurs citoyens.
Mercier, l'un des meurtriers du jeune BoudoH, eut la tête coupée.
La plus grande fermentation régnait dans les villages voisins. Le vicaire de Bouillargues avait répandu l'alarme à Rodilhan ; de toute part on sonnait le tocsin; on battait la générale; les habitants de Manduel, de Redessans et de Marguerites formèrent une troupe très nombreuse, armée de fusils, de fourches et de faux : le sieur de Montval, maire de Manduel, fut ehoisi pour chef} il annonça qu'il fallait porter la paix à Nîmes, et non y faire la guerre. La troupe campa au pont de Quart ; mais elle oublia bientôt les exhortations de son commandant, et elle se livra aux plus affreux excès.
A 7 heures du matin le procureur du roi fit constater l'état et le nombre des cadavres qui étaient alors dans différantes rues. Le lieutenant criminel avait déjà fait 4 vérifications, lorsque les soldats du régiment de Guyenne, qui servaient d'escorte, lui annoncèrent qu'on tirait des coups de fusil dans les rues voisines ; le péril devint si imminent, que ce magistrat fut forcé d'interrompre son opération et de se retirer sans vérifier le nombre, déjà considérable, des cadavres.
D'après le procès-verbal, le procureur du roi rendit plainte.
Le nombre des gardes nationales étrangers, campés & l'esplanade, avait considérablement augmenté : M. de Saint-Pons, major de là légion nimoise, qui les commandait, fit visiter le couvent des capucins qui dominait l'esplanade.
Cette visite se fit avec décence et tranquillité, et l'officier qui en fut chargé ne remarqua rien d'alarmant.
Les arènes, que l'on pouvait occuper avec avantage, furent aussi visitées.
Les troupes étaient toujours en bataille vis-à-vis les capucins, lorsque; vers une heure, elles furent assaillies de plusieurs coups de fusil.
Le quatrième témoin, jardinier des capucins, dépose qu'étant dans l'église^ il entendit 4 coups de fusil qui lui paraissaient partir du couvent, qu'il monta dans les corridors, et ne découvrit personne.
Le quatorzième, que des coups de fusil furent tirés des fenêtres des capucins»
Le quarante-troisième voit, d'une fenêtre de la maison du sieur Gourbler, l'éclat d'une armé à feu dans un corridor des capucins, donnant sur l'esplanade, et en même temps il entend plusieurs autres coups de fusil, qu'ij juge partjr de ce corridor.
Le soixante-troisième, major de la légion, voit faire feu du couvent des-capucins.
Le trentième vojt à ses eôtés un sapeur blessé par un coup de fusil, qu'on lui dit à l'instant même avoir été tiré des capucins.
Le quarante-quatrième Vit;^de la fenêtre du dernier-étage d'Une maison située rue Notre-Dame, vis-à-vis l'auberge du Luxembourg, un homme sans chapeau, et ayant un fusil à la main, dans le clocher des capucins î il voit aussi un autre fusil, et ne peut pas apercevoir l'homme qui le tenait.
Là quarante-cinquième voit, de la fenêtre du second étage de la maison du sieur Nougarèdey rue Notre-Dame, un homme armé d'un fusil dans le clocher des capucins.
Le cinquante-sixième volt deux coups de fusil partant du clocher des capucins : un officier municipal étranger est tué de l'un de ces coups de fusil.
Enfin le eu ré de Boissière, cent dixième té-moini» dépose que les troupes furent assaillies de plusieurs coups de fusil, mais que la frayeur
qu'il éprouva, et le soleil qui donnait à plomb, l'empêchèrent d'apercevoir d'où provenait le feu.
je me sui§ attaché aux détails de ce fait, et j'ai cru important de mettre dans tout son jour la preuve,que du couvent des capucins on avait tiré sur les troupes campées à l'esplanade, parce que cet événement est un de ceux que les instigateurs, soit connus, soit eacbés, des troubles de Nîmes, ont présenté, de la manière la plus fausse et la plus perfide,, pour échauffer l'imagination du peuple, et pour rendre vraisemblable, pan des crimes commis d ms un premier mouvement de rage, le projet insensé du massacre général des prêtres et des oatholiques, qu'ils feignent d'attribuer aux protestants.
Lorsque les troupes furent revenues de la sur* prise que leur oau-a cette attaque imprévue, elles coururent avec fureur vers le couvent des capucins, et la porte fut attaquée à coups de hache.
Le père vicaire parut à la fenêtre qui est au-dessus de cette porte, et fort imprudemment il traita les assaillants de canaille, et leur demanda ce qu'ils voulaient du couvent : : nous voulons l'abattre, r pondirenuik ; alors le père vicaire ordonna de sonner la cloche.
La purte céda bientôt sous les coups de hache, et on se précipita dans le oouvent.
Cinq capucins, les seuls qui ne se fussent pas évadés ou cachés, furent impitoyablement massacrés ainsi que 3 laies que l'on trouva dans le couvent.
Après ce crime affreux vous croirez sans peine aux plus grands excès. La maison fut entièrement décantée, les portes et les meubles brisés, la bibliothèque, la pharmacie ravagées : on enfonça les armoires et les placards de la sacristie; les ornements furent bouleversés, et d^ux ostensoirs fracassés; il parait même que quelques vases ont été enlevés; l'église seule fut respectée, on n'y commit pas le plus léger dégât t le procès-.verbal du lieutenant criminel les dépositions des témoins et notamment eelie de l abbé Glémenceau démentent à cet égard les imposteurs qui, pour exciter les ressentiments du peuple, ont osé dénoncer de prétendues profanations qui n'ont pas eu lieu.
Un témoin dépose que, lorsqu'on frappait à-coun de hache à la porte des eapucins, il vit un homme à houpe rouge se sauver par les toits en se baissant, pour être moins aperçu.
Un de ceux qui avaient travaille à enfoncer la porte, entre dans le jardin; on lui tire un coup de fusil d'une fenêtre du couvent, et dans le moment il voit descendre un homme qui fuit & travers le jardin ayant un fusil à la main. Get homme jette son fusil et gagne le mur qu'il escalade; un autre homme qui le poursuit ramasse ie fusil et veut le tirer; le fusil ne se trouve pas chargé, et le témoin croit avec vraisemblance, que c'était celui dont le coup l'avait touché.
Pendant que ces scènes d'horreur et de vengeance (dont vous n'auriez à pas gémir, si la veille on n'avait pas enlevé deux fois le drapeau rouge; si deux fois on n'eût pas émpêohé, à coups de fusil, la proclamation delà loi martiale); pendant, dis«*je, que ces scènes d'horreur et de vengeance se passaient aux capucins, les l' gionnain g, commandés par les frères Froment, Descombiès et Folacher, faisaient un feu continuel des remparts qu'ils occupaient.
Pour mieux diriger leurs coups, il firent démolir une communication anciennement murée
qui donnait de la tour du Poids4e4a-Farine dans celle dus Jacobins,
Descombiès, à la tête de 30 hommes, se présenta à la porte du monastère qui touche aux fortifications, et demanda la clef d'une autre porte pour gagner la partie des remparts située vis-à-vis la place des Carmes, où des gardes nationales étaient pqstées.
Les religieux observèrent que ce qu'on exigeait d'eux les exposait à être égorgés ; malgré leurs instances, la porte fut ouverte ; Froment accompagna Descombiès, qui plaça chacun à son poste, et le feu fut dirigé sur la place du quartier.
Descombiès recommanda aux légionnaires de mettre leurs chapeaux à houpe rouge sur '6 b°r(i de la muraille, pour y attirer les coups de fusil, et da se tenir à côté pour tirer après les décharges : dans cette position, disait-il, vous pour-vez en tuer 400,
Un des Froment avertissait qu'if fallait tirer bas.
Un légionnaire tira un coup de fusil à quelqu'un qui était placé à une fenêtre de l'île de l'Orange.
Un autre ajusta un homme aussi placé à une fenêtre, et un des témoins croit qu'il l'atteignit, car les légionnaires dirent, après le coup : u l'a touché, il doit être mort dans sa maison.
Froment s'était occupé d'avoir du secours s il envoya deux fois chez te sieur Michel,, capitaine à pouf rouge; 3 hommes seulement de sa compagnie se présentèrent et ne restèrent pas longtemps. Il s'adressa aussi à un de ses parents, capitaine d'une compagnie des bourgades ; la lettre qu'il lui écrivit fut pontée par le domestique de Descombiès, qui la cacha dans son soulier. Le capitaine proposa à ses légionnaires d'en-voyerdeshommeSdebonne volonté; une vingtaine se rendit au rempart t il en vint aussi trois autres de la compagnie de Descombiès; et de l'aveu de François Froment, le nombre des hommes retranchés dans la tour et sur les remparts, s'élevait au moins à 120.
Les troupes postées près du quartier répondaient au feu de la tour et des remparts : un se battait à la place de la Comédie; on tirait des fenêtres, on s'attaquait, on se poursuivait dans les rues; ceux que l'on arrêtait étaient, ou égorgés, ou conduits à la municipalité, accablés des plus mauvais traitements.
Les maisons des citoyens n'étaient même pas un refuge contre ces horribles excès : plusieurs furent forcées, celle du sieur Chalvidan, capitaine à pouf rouae, fut dévastée. Le nommé Aberlême Voit enfoncer sa porte, il se sauve sur les toits, et y e-t tué d'un coup de fusil. Les assassins passent par la maison voisine, dont ils obligent le propriétaire à donner la clef, vont chercher le corps d'Arbelème, et le pendent en l'attachant avec un clou. La femme d'Arbelème s'était évanouie de frayeur en voyant enfoncer sa porte. On pille la maison pendant son évanouissement : le lendemain on lui montre le cadavre de son mari encore suspendu ; elle de détache; et aidée par une de ses voisines, elle l'emporte chez elle;
A 4 heures, Froment envoya le domestique de Descombiès porter une lettre à l'officier de garde du régiment de Guyenne,qui commandait le poste de la porte de la Couronne, et lui remit un mouchoir blanc, en lui donnant l'ordre de le faire Voltiger chemin faisant en signe de paix.
Voioi la lettre écrite par Froment (1).
A 5 heures, M. du Roure, membre de la municipalité, fut requis de conduire aux casernes 200 hommes de la garde nationale, pour renforcer le détachement commandé par M. Aubry, capitaine au corps royal de l'artillerie, et pour protéger la sortie des canons.
L'officier municipal requit le lieutenant colonel du régiment de faire mettre sa troupe en bataille pendant que la garde nationale se rangerait à sa droite; cet ordre fut donné.
M. Aubry'était alors occupé dans l'arsenal à faire préparer 6 pièces de canon pour faire évacuer les postes où les légionnaires, commandés par les Froment, Folacher etDescombiès, étaient retranchés, et d'où ils tiraient à couvert et avec le plus grand avantage sur des troupes que rien ne garantissait.
Vers 6 heures, le canon fut amené; il fut mis en batterie sous le feu le pins vif de la tour et des remparts, et on battit eu brèche.
Ge fut alors que des commissaires de l'assemblée électorale, précédés d'un drapeau blanc et du trompetté de la ville, marchèrent vers la rue du Collège, et firent avertir François Froment et Descombiès de venir leur parler. Ces rebelles eurent l'audace de faire dire aux commissaires-conciliateurs de se rendre dans la maison Froment ; cettre offre fut rejeiée, et on exigea que les chefs s'avançassent dans la rue.
Ils parurent enfin, consentirent de mettre bas les armes, de les faire porter au palais, et.de se rendre à l'assemblée électorale, pour se mettre sous sa sauvegarde.
Les commissaires retournèrent aux casernes pour faire part de ces propositions ; elles furent rejetées par les troupes, et on demanda la tête des chefs.
Cependant, du consentement des uns, et contre le gré des autres, on arrêta que les conciliateurs se joindraient à M. du Roure, et qu'ils iraient de nouveau proposer la capitulation.
Ils repartent, précédés du drapeau blanc, et font avertir, par le trompette, Froment et Descombiès : M. du Roure presse en particulier Descombiès de se rendre à l'instant à l'assemblée électorale ; Descombiès s'excuse sur son costume, qui était une veste et une gibecière de chasse : M. du Roure insiste, et lui observe qu'il n'a pas un instant à perdre.
Les propositions sont acceptées, et l'un des commissaires retourne aux casernes, fait voltiger le drapeau blanc, et annonce la paix.
Froment et Descombiès se disposaient à exécuter les conditions et à se rendre à l'assemblée électorale, lorsque des coups de fusil, partis des remparts, firent évanouir tous les projets de conciliation.
Descombiès n'avait poiut donné l'ordre de tirer, il le défendit même expressément : après avoir entendu le premier coup, il cria que la paix était faite, et dit à un garçon boulanger qui venait de tirer, qu'il le ferait pendre, s'il en était le maître.
Au premier coup de fusil tiré de la tour, le feu de l'artillerie avait recommencé avec plus de furie : le;peuple redemande à grands cris les chefs et leurs légionnaires; les troupes s'avancèrent pour investir la maison de Froment ; des écht lies furent dressées et les tours furent emportées d'assaut ; les assiégés se dispersèrent et furent poursuivis : on massacra tous ceux que
l'on put joindre, et Pierre Froment fut précipité du haut des remparts après avoir été égorgé.
La maison fut entièrement dévastée.
Le couvent des Jacobins communiquait aux remparts d'où le feu était parti, on crut que les rebelles s'y étaient réfugiés, et on les y chercha. Le couvent fut mis au pillage, la bibliothèque, les caves, les appartements furent ravagés : on respecta l'église, la sacristie, un Christ dans l'intérieur de la maison, et même quelques estampes représentant des sujets pieux.
Les fuyards furent aussi poursuivis dans le collège, où,à l'insu du recteur, ils avaient pénétré par les remparts.
3 hommes que l'on y trouva furent massacrés, le recteur lui-même courut risque de la vie : des légionnaires étrangers l'accusaient d'avoir favorisé la fuite des rebelles : et il ne dut son salut qu'à l'intrépidité de M. du Roure ; mais cet officier municipal ne put empêcher qu'on n'égorgeât 3 autres hommes arrêtés à la porte du collège.
Enfin, il fut jugé convenable pour ramener le calme, est-il dit, dans les procès-verbaux de la municipalité, d'enjoindre à tous les capitaines à poufs rouges qui n'avaient pas pris part à l'action, de remettre les fusils qu'ils avaient chez eux : M. du Roure en fit la réquisition et les armes furent mises en dépôt.
La journée du lendemain fut plus affreuse encore, et il me serait impossible de recueillir les détails de toutes les atrocités que fit commettre la vengeance, et dont se souilla le parti vainqueur.
Dès le matin, l'assemblée électorale, précédée d'un drapeau blanc, se rendit sur la place, où les troupes nationales étaient en bataille; elle les exhorta à la paix, recommanda d'arrêter les séditieux, et les conjura de s'abstenir de toute effusion de sang ; mais ces recommandations furent bientôt oubliées.
De tous côtés il arrivait à Nîmes des troupes de légionnaires érangers. Ge furent quelques-uns de ces légionnaires qui se livrèrent aux plus grands excès. Cette vérité est également attestée, et par les procès-verbaux de la municipalité et par l'information.
Les citoyens soupçonnés d'avoir pris parti la veille avec les légionnaires à pouf rouge étaient recherchés et massacrés. Sous prétexte de fouiller les maisons suspectes pour enlever les armes, on pillait, on dévastait ; ce qui ne pouvait être enlevé était brisé. :
Quelques maisons furent totalement démeublées ; celles du sieur Carrayon, ancien négociant ; de l'abbé Rragouze, curé de Saint-Paul ; de l'abbé Cabanel, notable, éprouvèrent les plus grands dommages ; les registres de l'hôpital général, trouvés chez ce dernier, furent ou déchirés ou emportés.
Le bruit se répandit que des hommes à pouf rouge étaient cachés dans le collège : quelques officiers municipaux s'y transportèrent, et à chaque fois, malgré leurs instances, les pillages et les dévastations se renouvelèrent.
Plusieurs fuyards s'y étaient en effet réfugiés ; quelques-uns furent égorgés, d'autres se sauvèrent sur les toits, et s'y voyant poursuivis et menacés d'une mort certaine, ils sautèrent sur les maisons voisines, en franchissant une rue assez large.
Le nommé Gas, revendeur de vin, fut égorgé dans la cour du palais : les sieurs Laurent, officier municipal, et Vidal, procureur de la com-
mune, s'étaient d'abord réfugiés chez lui ; mais Vanimosité qui éclatait contre Gas, ne leur faisant pas juger cette retraite a^sez sûre, ils sortirent par une fenêtre, et allèrent se cacher dans une maison in habitée, .près les arènes.
Ils y furent découverts dans un grenier, par le sieur Marc-Antoine Ribot, capitaine de la légion nîmoise : cet officier cacha soigneusement aux légionnaires de son détachement les noms des deux oflficiers municipaux, et après avoir fait travestir le procureur de la commune, il le conduisit, ainsi que Laurent, à l'assemblée électorale, où il déclara qu'il les mettait sous la sauvegarde de la loi : la nuit suivante ils s'évadèrent.
Les meurtres et les pillages continuaient, et les citoyens qui échappaient à la mort, étaient traînés sanglants à l'hôtel de ville et entassés dans les prisons, lorsque la garde nationale de Montpellier arriva.
« M. de Serres qui la commandait se rendit à l'assemblée électorale; il annonça que la ville de Montpellier, alarmée sur les événements fâcheux arrivés à Nîmes, les avait envoyés au secours du corps électoral et des bons patriotes; que sa légion était déterminée à verser son sang pour soutenir les défenseurs de la cause publique, à repousser les mal intentionnés, à combattre ét à mourir pour le soutien de la Constitution. »
Gette troupe, bien mieux disciplinée que les autres légionnaires étrangers, fit cesser les dévastations et les meurtres.
Il y avait alors près de 15,000 hommes de troupes à Nîmes ; le mercredi 16 au matin, on tint un conseil de guerre ; M. Aubry, capitaine au corps royal d'artillerie, fut nommé commandant général, et l'armée, en,présence de l'assemblée électorale, prêta un serment civique et fédératif.
Les troupes forent congédiées, et on ne garda à Nîmes que 3,000 hommes d'infanterie, en y comprenant la légion nîmoise et 400 hommes de cavalerie.
La nuit fut parfaitement calme : le lendemain le corps électoral et la municipalité firent publier une proclamation, pour annoncer que la religion et la diversité des opinions religieuses n'avaient pas occasioané les tioubles qui avaient agité la ville, et que ces troubles avaient été causés par une querelle entre les compagnies de la légion. Cette proclamation, signée par les commissaires de l'assemblée électorale, et par cinq officiers municipaux, arrêta la marche d'un corps nombreux de troupes dont on ignorait les projets, et dont l'approche avait alarmé la ville entière.
Pendant que les habitants de Nîmes étaient livrés aux horreurs dont je vous ai présenté le tableau, des crimes plus atroces encore se com-! mettaient dans les campagnes voisines.
A Nîmes du moins des agressions multipliées avaient provoqué la fureur, et des crimes avaient fait commettre d'autres crimes.
Mais dans les campagnes, où le peuple était trompé sur la vraie cause des troubles de la ville ; où des insinuations perfides lui annon-çaientque la religion catholique était eu danger; où il croyait devoir la venger en versant le sang des protestants, des forfaits exécrables furent commis avec un sang-froid qui glace d'épouvante. ; .
Je vous ai dit que dans la nuit du 13 au 14 on avait sonné le tocsin dans les campagnes, et que
les habitants s'étaient réunis au pont de Quart, sous les ordres du sieur Montval, maire de Man-due.
Plusieurs citoyens qui fuyaient Nîmes furent arrêtés par les patrouilles de celle troupe, répandues sur les différentes routes, et à chaque fois il fallait, pour sauver leur vie, qu'ils fissent preuves de catholicité.
Les sieurs Barnier et Buchet, arrêtés par une patrouille, ne durent leur salut qu'au zèle et à l'humanité du sieur Montval.
On chercha le sieur Rat pour le tuer; heureusement on ne le trouva pas, mais sa maison fut pillée.
Le nommé Hugues, commis de la maison Maigre, fut tué auprès de Manduel.
M. et Mme Noguier étaient à leur métairie de
Courbessac; on en brise les portes, et ils sont massacrés dans leur
appartement : la maison est dévastée.
Un vieillard de 70 ans, le sieur Blancher, est reconnu pour être protestant, il est massacré à coups de faux, malgré les efforts et les supplications de M. Montval.
Le jeune Peyre, âgé de 15 ans, portait à manger à son père, il passe devant une troupe postée au pont des îles; un homme lui demande : Êtes-vous catholique ou protestant? Le jeune homme répond : Je suis protestant. Aussitôt un homme lui tire, à quinze pas, un coup de fusil, et l'enfant tombe mort. Il aurait autant valu tuer un agneau, s'écrie un des compagnons du meurtrier. J'ai promis de tuer quatre protestants pour ma part, répond-il, et celui-là comptera pour un.
Le sieur Maigre, homme vénérable, âgé de 8? ans, fuit de sa maison de Trois-Fontaines, ayant dans sa voiture son fils, la femme de son fils, et deux de leurs enfants; deux servantes accompagnaient cette famille, et la voiture suivait le chemin de Beaucaire, lorsqu'elle fut arrêtée par une patrouille sur la route de Mon-frio : Maigre exhibe un passeport qui est trouvé en règle. Deux postillons revenaient de Beaucaire, l'un crie à la patrouille :quoi! vous laissez pister ces gens-là? ils sont protestants; l'autre ait : Monsieur Maigre, si vous ne vous êtes pas confessé, vous pouvez le faire, car votre vie sera courte.
A l'instant la voiture fut arrêtée et entourée d'une foule de paysans des villages dé la Foux, de Gromps, de Saruhac et de Jouquières. Il faut les tuer parce qu'ils sont protestants, crrait-on, et que les protestants ont fait tuer les capucins et les catholiques ; dans ce moment, Maigre découvre, au milieu de la foule, André Castan, qui a été domestique au service de sa famille. Quoi, lui dit-il, André, tu ne me reconnais pas ? tu ne t'intéresses pas pour moi? Alors c'était un autre temps, répond André, aujourd'hui c'en est un autre, et il porte un coup terrible à ce vieillard.
Comment, vous ne les avez pas encore tués? s'écrie alors un des pôsfillons; eu même temps il se jette à bas de son cheval, passe un licol au cou de la plus jeune des demoiselles Maigre, et veut l'étrangler; Catheriue Galafrès court au secours de sa maîtresse, et devient, par cet acte de courage, l'objet de la fureur de ce monstre ; il lui passe le licol, et fait les plus grands efforts pour la pendre a un arbre; le licol se trouve heuréusement trop court.
On se décide à aller à Remoulins, et à y conduire les prisonniers ; en arrivant au village de
la Fobx, ils sont accablés d'ittjufes, de menaces et d imprëêfetlons cofiire les protestants:
Maigre, le tils, sa femme et ses tilles aperçoivent un c&pubin i elles S'approchent, et lui demandent avec instance de parler ett leur faveur, et de leur sauver la vie : le capucin répond qu'il les connaît bien} toaiSil refuse d'intercéder pour eux, et se renferme dans Uhé maison voisine.
On fait approcher là barque pdur passer à Re-moulifis; on y poussé; on y précipite là famille Maigre : Jetez-les à l'eau, érieiit cëtix qui Spnt sur lé bord de la rivière, il fôttt leS noyer.- Les témoins déposent ^h'iliultetidirètit alors ces in-*-fortunés s'écrier : Nous sommes tous perdus,- il faut nous embrasser, et qu'ils les tirent ee serrer mutuellement et s'embrasser tous.
Un homme saisit Maigre, père, au travers du corps, et le jette dans l'eau : ce vieillard nagea vers le rivage, mais il en fut repoussé à Coups de pierre; et ayant bientôt perdu ses forces, il se noya. . .. ... , , er"> [-. .
Son fils, plys vigoureux, fit plus de résistance; d'une main il saisit un des paysans, et de l'autre il se cramponna au mât d.e ia barque : pour le vaincre on feignit de vouloir lui lasser la vie ; il crut à cet e pfomësse, et lâcha prise ; mais à l'instant On lé jèta à la renverse : il tomba dans là rivière,: ët se sauvant à là n ige, il prit tërrë. Lë sièlir Edouard Serre courut à Son ?eèours, lui donna la màrn pour l'aider à sortir dé l'eau, ët s'empressa d'étâncner lé sang d'une de sés blessures.
tlii hoînme s'approche, un fusil à là màin, et coudhe Maigre en joue. « Épargnez cët honnête homme, dit Edouard Serre, il n'est pas Coupable des CFimes dont on lâccuse: VOuS rendrez Un Service èssentiél à toute ia contrée. — Oui, reprit Maigre, nous sommes d'honnêtes gens, qui n'avons fait que du bien à tout le monde; nbus différons en fuçon de penser, mais cela doit-il voUs pôrtër à nuus arracher la vie : monsieur me connaît, demandez-lui. Sërrë, dont je copié ici la déposition, appuya avec chaleur ce qui venait d'être dit, et ajouta que cette famille avait 1 estime généralè. — il faut que Vous soyejj un des siens, pour prendre ainsi son parti, dit lë paysan. — Non, je suis catholique romain ; et pour vous ie prouver, voilà mes fieûreé ét uiiè petite croix qui appartient à ma tille*-—Eh bien, marchez en prison tous les deux, .ajouta le paysan : alors Maigre, prenant la main d'Edouard, lui dit : Mon Dieu ! à quoi vous vous exposez en pienant ain-i mon parti. Et ils marcnàienj, ensemble pour ailt r en prisuri, lorsqu'un jeUuë homme, armé d'un fusil à deux coups, qui appartenait à Maigie, s'avance en criant: Garé!que je le tue. Serre se précipite sur le fusil, tandis que Toussaint Manon couvre généreusement né son corps le malheureux dont les jours étaient menacés. serre était aux genoux du jettne homme, il lui baisait les mains, et demandait la vie pour Maigre : mais cet homme atroce le repoussa avec férocité, êu lui disant : Reftrei-vûUs H vûlxè foe vouleï pas ftté je voué en fasse ÛUtattt% et il lé couché en jotté. Unë femme ëliràyeé des dangers oti Serré s'ëtpOsàit âvëts tant de cottrage, 1 entraîna dè force, et il t ouhiit, appelant du second, lorsque Maigre fut a.sâsiflê irUtf ôoup dè wsil, et jeié dans uû rUisséàU â CÔtê UU Village.
Ûn moissonneur le fetiïa de l'ëaU âvéc sa fàu*, lUi prit Son argent, sà tabatière, sa montre et repoussa le cadavre dans la rivière.
L'épouse et leS Biles dé cet infortuné s'étaient réfugiées dâtts Ulie auberge ; lës meurtriers y
coururent ët annoncèrent à grands érfs qu'ils voulaiëritles massacfefj ét cette résolution bar-* bare eût été exécutée si l'aubergiste n'eût assuré; avec sèrment, que les damés Maigre s'étaient évadées ëâttS la campagne ét si ces furieux ne s'étaiëbt à l'instant dispersés poUMes y Chercher; enfin deB cavaliers de mftrècnaufeSêe; qui survinrent,- mirent en sûreté ees femmes trop malheureuses, et les arrachèrent aux assassins de leur époux et de lëur père»
Tël est, Messieurs, le tableau trop étendu* mais trop vrai, des malheurs de Nîmes { beaucoup d'autres crtrties sans doute èht été COmtilis; d'eSt unë vérité ijtt'ott entrevoit avec effroi ; et lés horreurs que je vous ai retracées ne rendent que trop vraisemblables tous lés genres de forfaits:
Je crois Vous avoir démontre, dans la ptetniêre partie de mon rapport, que la division qUi régnait à Nîmes, qUe les troubles des î et 3 mai étaient l'effet des insinuations SuggéréeS par UU parti dé factieux, qui, en alarmant le peuple Sur l'anéantissement nu culte catholique et SU? la prétendue Captivité du roi, avaient pour but de soulever l'Opinion publique contre lës lois qui nuisaient à tettr intérêt personnel.
Les événements qui oUt suivi, èt dûnt le§ ré* sultats ont été si douloureux, ont ëtteore la même cause ; en effet, dans l'histoire des malheurs de Nîmes, VOUS retrouvez partout les traces du fanati-me et de la révolte.
ÀU milieu des mouvements inséparables d'une grande révolution, NîttieS avait JOUI de lâ plus parfaite tranquillité ; toUies les opinions, tous les intérêts S étaient rapprochés à Une époque que je ne ferai que rappeler, la convocation dés Etats généraux; les cahiers d la province avaient été rédigés en Commun ; OU be s'était Occupé des protestants que pour adoUCir leur sort ; ils étaient alofs Si pèu sUspëcts qUë plusieurs d'entre eux furent députés, et il semblait que rien nè pût aitéfer la pàii, dâUS un pays où toutes les Opinions, sOit politiques, soit religieuses, s'étalent confOudtiëS aâûs le fête du bien public. Ce n'èst qu'au mois de novembre et, il faut le dire, Ce n'est du*à l'époqUe de vos décrets sur leS biens du ètargé, que la fermentation Se manifeste dans Nîmes; alors pàraisf-èni deS écrits Incendiairesi âlofs on alarme le peuple sur lè sort de la religion; ou excite sa fureur Contre les protestants, èt sons le Voile des alarmes religieuses, des projets sinistres se manifestent \ tie tels desseins veulent êtfë protégés dans leur accroissement ; il ne Faut PAS que dâtts léttrs premiers développements ils éprouvent des Cbtttrarié.tës. La municipalité Va être formée, sa Surveiilittce pourrait être funeste, il est important que des opinions contraires à celles des factieux n'y dominent pas, tét des ptêtïëS S'empafëttt des élections. lié empfûîéht la religidn f)Otir abUsër et l'argent pour corrompre vils îormëht à leur gré le corps muttitîpal êt, forts de l'âutottté de ïeUrS
créatures, ils ne mettent piu£ dè borne a letir âu-dacè $ elle è^accroît bientôt pâr lëé troublés qu'occasionne, dans la ïégloit. uh règfemëti't de la municipalité. Des assemblées nocturnes dans les églises, fciûe délibération diiiéuSë UH sont point fépnmêes ; des hioloêâ colportent pubîi-quemuui, impunément, des écrits affreux qui ap* pëitëut la guerre ëiviie ; tout annoncé nés préparatifs, les protestants Sont menacés, des armes prohibées sont fàljriquêës 6fi grand riombfe i la ville retentit des cris de ; Vivfi la croix à bai là nallonlLâ cÔCàfde blàniihë ést arborée, elle occasionne une émeute ; la cocarde blanche èst
laissée, mais on lui substitue une distinction particulière à laquelle se rallie le parti des factieux, parti ouvertement favorisé par trois mu* nidpaux dont lés discours et la conduite né laissent pas de doutes sur les motifs de cette protection, Une nouvelle délibération du 1* juin oenflrme celle du 20 avril j plus coupable encore elle annonce une coalisation déjà formée* et la municipalité n'agit pas ! la distinction de pouf rouge entrelient l'animosité dans la légion; elle éclate le 13 juin, les dragons protestants sont attaqués* les chefs des factieux, se retranchent dans les fortifications, ils tirent sur les officiers municipaux. Deux fois ils enlèvent le drapeau rouge, deux fois ils «'opposent à la publication de la loi martialê qui eût fait Cesser le désordre, et donnent ainsi lieu à tous les forfaits qui se commettent* soit dans la ville, soit dans les Campagnes voisines.
Voilà» je le répète, l'ouvrage du fanatisme et de la révolte* Voilà ce qu'auraient pu prévenir la sagesse, le zèle et le patriotisme des officiers municipaux, voilà Ce qu'a produit leur faiblesse ou leur complicité.'
Rapprochez du tableau que je tiens de vous présenter les événements qui, à la même épo-' que, se passèrent dans quelques autres villes de la même contrée, vous verrez partout les mêmes agents* les mêmes moyens* là même marche
fiartdut les délibérations des soi-disant Catho-iques deviennent les manifestes de la guerre civile* et la cocarde blanche, le signe de l'iu&ur-reetidh ; rappêle^-vouS encore les troubles que dans le même temps on fomentait à Toulouse, ceux que l'on craigtiuit à Paris pour le mois de mai* et VoUs jugefèZ que les événements qùi se sont passés à Nîmes tenaient à des projets plus vastes que la surveillance des corps administratifs et le courage des gardes nationales ont heu* reusement déconcertés.
Oti a publié que les protestants avaient excité les troubles de Nîmes, et Cette as-ertion S'est répétée dans 20 libelles; pour donner quelque vraisemblance aux projets que l'on a feint d'attribuer aux noh-CaiholiqtiëS, on a rappelé dêS faits atroces, CoUSâcféS par l'histoire des guerres de religion, et C'est par cé rapprochement perfide qu'on est parvenu à persuader au peuple que les protestants devaient égorger tous les Ca* tholiques, établir des républiques fédératives eh France et placer à Nîmes le centre des relations politiques et religieuses du calvinisme.
Il est, je crois, parfaitement inutile de répondre à ces absurdes accusations; je me contenterai de dire qu'il est faux que les protestants aient excité les troubles de Nîmes.
Ils ont été en butte à la haine d'un parti, aussi' tôt qU'Uti parti s'est formé contre la Constitution, à l'époque de Vos premiers décrets sur les biens du clergé; et, devenus l'objet d'un vil ramas de calomnies artificieusement pratiquées contre eux pour exciter des troubles et faire éclater une contre-révolutidb dans le midi de la France, ils n'ont eu d'autres ennemis que les ennemis de la Révolution même.
Il est faux qu'ils aient été les agresseurs, dans la journée du 13.
Les 20 dragonS postés à l'évêché étaient tous protestants, 12 Seulement étaient alors au poste lorsqu'ils furent provoqués par un billet, et attaqués par des hottlmës à houppe ' ro» gë. Ce furent les dragons qui réclamèrent la proclamation de la .ioi martiale, et qui contraignireht même les officiers municipaux à sortir avec le
drapeau rouge; cette marche, il faut l'avouer, n'est pas celle des agresseurs.
On les accuse d'uvoir expédié des courriers dans la nuit du 13 au 14 pour se procurer des secours j'ignore si le fait est vrai, mais il est vraisemblable* car les mêttes précautions furent prises par le parti contraire. Froment et Descombiès écrivirent à M. de fiouzol pour obtenir des troupes; on fit sonner le tocsin dans les villages voisins, on publia même* et c'était alors une insigne fausseté, que des capucins avalent été égorgés; et à la demande de plusieurs hommes à hoUppe rouge, envoyés de Nîmes, les habitants prirent les armes.
Il n'est donc pas vrai que les protestants aient excité les troubles de Nîmes et qu'ils àietit été les agresseurs : cela n'est même pas vraisemblable. Je ne vous rappellerai pas l'infériorité de ledr nombre, qui* comparativement à celui des catholiques» est, pour la Ville de Nîmes, comme 1 est à 3, et pour le Surplus du département, comme 1 est à 8 j mais je demanderai quel intérêt avaient les protestants à exciter des troùbles : qu'avaient-ils à regretter? que perdaient-ils? Ce n'était point aux protestants que la Révolution enlevait des privilèges flatteurs, des dignités éminentés, un rang éclatant dans la contrée, des richesses immenses : ils gagnent tout à la Révolution ; ils devaient la béhir car ils étaient privés de tout sotts l'ancien régime; ils recouvraient la plénitude des droits ciVits et,- voués aux manufactures et au commerce,- ils devaient désirer la tranquillité publique et voir avec transport s'établir parmi nous un gouvernement libre* dont l'heureuse influence devait ajouter à leur fortune én favorisant leur industrie et en agrandissant leurs relations commerciales : de tels hommes n'ont point excité les troubles de Nîmes, et Cependant ils ont été accusés d'avoir prémédité les plus affrëUX attentats; et les crimës commis pendant la guerre qui a duré quatre jours à Niihes ont été annoncés à la France entière comme le fruit d'un projet longtemps réfléchi.
En vous parlant des libellés faits pouf exciter le peuple contre les protestants, jè dois vous rappeler l'adresse qui Vous a été présentée par la veuve Gas
Cette femme mère d'une très nombreuse fa-mille, a perdu son mari dans les massacres de Nîmes; elle a déposé le 13 juillet devant le lieutenant criminel ; elle parle des liè'es distribuées pour la formatioh de la municipalité, du refus que fit Son mari de se charge de leur distribution, des menaces qu'il éprouva au sujet du sieur Blachier, avocat de Nîmes ; et elle ajoute qu'elle attribue à ce refus obstiné le meurtre de son mari : voilà en substance sa déposition.
Mais elle ne retrace aucun de « es détails atroces contenus dans son adresse^ elle ue représente point son père et ses frères comme témoins et comme complices du meurtre dé son mari* et la punissant, par cettë barbarie, de son abjuration du calvinisme; elle ne bàfle point de cet homme qu'elle VùuS a peint, lavaht. ses mains dans le sang du malheureux Gas. AUX éclaircissements demandés sUr Cette différence, vraiment frappante, entre l'adresse et la dépoSilioû, la veUvë Gas répond que le juge fr'a pas voulu écrire tout ce qu'elle lui disâh. il est difficile dë croire qu'un juge, assisté de deux adjoints et d'un greffier, se soit permis d'altérer la déposition d'une femfne qui dépose du meurtre de sOu époux, et d'en retrancher dès faits aussi graves ; je suis bien loin
de vouloir affaiblir la commisération due à celte femme infortunée, mais tout annonce que des imposteurs se soBt empâtés de sa cause.
L'adresse de la veuve Gas, dont il y a au moins quatre éditions, a été répandue avec profusion parmi le peuple de Paris; des émissaires l'ont portée furtivement dans les ateliers et dans les boutiques, et vous devez vous rappeler que cette adresse était un des ouvrages distribués à Lyon pour y exciter le peuple à la contre-révolution, dont le projet a été si heureusement découvert.
Enfin, Messieurs, vos comités ont été convaincus jusqu'à l'évidence, que les troubles de Nîmes, excités par un parti opposé à la Révolution, ont pris leur source dans la différence des intérêts et des opinions politiques, et nullement dans la diversité des opinions religieuses.
Vous êt s sans doute touchés, comme ils l'ont été, des malheurs de ce peuple qu'on a égaré; vous plaignez surtout ces hommes utiles et vraiment estimables, ces artisans, ces travailleurs de terre qui, plus faciles à séduire et dévoués avec plus d'ardeur à servir des projets dont on leur cachait la perfidie, ont éprouvé tant de pertes et tant de malheurs dans les fatales journées des troubles du mois de juin ; enfin, vous sentez qu'il est temps de rétablir la paix dans Nîmes et dans les départements voisins; que toutes les mesures qui pourraient développer avec force le sentiment encore vif de leurs maux, dans les habitants de cette malheureuse contrée, doivent être repoussées comme une calamité puldique.
M. de Marguerites demande, au nom de la municipalité, q ie la procédure soit continuée, el il offre la preuve d'un long amas de crimes commis, dit-il, par les protestants et dont il vous a distribué le tableau et les détails.
Vos comités ont pensé qu'une telle mesure produirait l'effet le plus funeste, qu'elle réveillerait des partis et des haiues que le temps a peut-être amortis.
Si des crimes sans nombre ont été commis à Nîmes pendant la guerre qui y a duré quatre jours, il y a eu aussi des milliers de coupables. Les étrangers venus à Nîmes sont ceux dont la violence et dont la rage ont été les plus funestes; ces étrangers sont maintenant répandus dans différentes municipalités,dans différents districts; l'information couvrirait un teriiioire immense et répandrait de toute part l'inquiétude et la terreur.
D ailleurs, que pourrait attendre la justice d'une information où la vérité n'aurait d'autre organe que celui des coupables ou des victimes ? Doutez-vous que le parti qui demande à grands cris qu'on suive la procédure, ne soit pas préparé à cette nouvelle guerre, et que la vengeance n'ait pas déjà désigné ses victimes? Epargnons aux habitants de Nîmes, el de nouveaux malheurs, et de nouvaux crimes peut-être : déjà trop de sang et trop de larmes ont coulé; ensevelissons dans l'oubli le souvenir de ces désastreuses journées, invitons les habitants de Nîmes à se réunir, à confondre leurs sentiments et leurs vœux, à chercher dans les douceurs de l'union la plus inaltérable, et dans la tranquillité publique, la consolation des malheurs dont ils ont été victime.
Cependant vos comités ont cru devoir fixer vos regards et votre sévérité sur quelques coupables qui leur paraissaient devoir être responsables à la France entière des événements déplorables arrivés les 14, 15 et 16 juin.
Vous vous rappelez l'enlèvement des drapeaux rouges, les violences exercées pour empêcher la proclamation de la loi martiale, les coups de fu-
sil tirés sur l'escorte des officiers municipaux ; cet attentat a seul occasionné les meurtres nombreux commis pendant 4 jours; il a coûté la vie à plus de 300 citoyens, et vos comités l'ont regardé comme impardonnable. Il n'y a plus de sûreté, plus de force publique, si la loi martiale est repoussée par la violence et si ce crime, qu'on devrait regarder comme crime de lèse-nation, peut jamais être soustrait à la vengeance des lois.
D'après ces considérations, vos comités m'ont chargé de vous présenter le projet du décret suivant :
projet de décret.
L'Assemblée nationale, après avoir entendu ses comités des recherches et des rapports,
Considérant que l'élection de la municipalité a été l'effet de l'intrigue
et de différentes distributions d'argent; que cette municipalité a
favorisé les troubles en permettant qu'on arborât la cocarde blauche, en
ne réprimant pas les projets séditieux manifestés par les délibérations
des 10 avril et 1er juin;
Que les événements désastreux qui se sont passés à Nîmes les 29 mars, 2 el 3 mai, 13, 14, 15 et 16 juin 1790 ont été l'effet des séductions employées par les ennemis du bien public pour égarer le peuple et troubler la pa xdu royaume;
Considérant que la plus grande partie de ces malheurs n'auraient pas eu lieu si la proclamation de la loi martiale n'avait pas été arrêtée le dimanche 13 juin; que ceux qui ont provoqué ou ordonné de& violences contre les officiers municipaux qui la proclamaient, sont seuls responsables de tous les délits qui ont suivi et doivent en être considérés comme les auteurs, a décrété :
Artl.er. Qu'il sera procédé à l'élection
d'une nouvelle municipalité; que le roi s^ra prié de donner à cet effet
les ordres nécessaires au procureur-syndic du district et de faire
passer à Nî nés des forces suffisantes pour assurer la liberté et la
tranquillité des élections.
Art. 2. Qu'il sera informé devant le tribunal de Montpellier, et à la requête de l'accusateur public, contre ceux qui, le dimanche 13 juin, ont donné l'ordre de tirer sur les officiers munici-daux, d'enlever à deux fois différentes les drapeaux rouges, d'entraîner et de retenir de force dans une maison, un des officiers municipaux chargés de la proclamation.
Art. 3. Que la procédure commencée sur les autres événements des 13, 14, 15 et 16 juin, ainsi que celles qui sont relatives aux journées des 29 mars, 2 et 3 mai, cesseront d'être suivies et seront regardées comme non-avenues; en conséquence,, que les accusés actuellement détenus seront incessamment remis en liberté.
Art. 4. Enfin, l'Assemblée nationale, profondément touchée des événements désastreux dont elle a entendu le récit, invite les citoyens de Nîmes à se p émunir contre les suggestions qu'on pourrait employer encore pour les désunir et pour les plonger dans de nouveaux troubles ; elle les exhorte à sacrifier, pour le bien de la paix, le souvenir et le ressentiment de leurs maux, et à chercher, dans l'union la plus durable et dans la tranquillité publique, la consolation et l'oubli des malheurs qu'ils ont éprouvés pour avoir ajouté foi aux perfides insinuations de quelques hommes mal intentionnés.
Pièces dont il est fait mention dans le rapport, et dont le renvoi est annoncé en note.
Lettre qui accompagnait l'envoi aux municipalités de la délibération prise, le 20 avril, dans l'église des Pénitents-Blancs, par les soi-disant catholiques de Nîmes.
Messieurs, les vœux d'un très grand nombre de nos concitoyens catholiques et Dons Français sont exprimés dans la délibération que nous avons l'honneur de vous adresser; ils ont cru nécessaire de la prendre dans les circonstances actuelles; et si,:Comme ils n'en doutent point, votre patriotisme, votre zèle pour la religion et votre amour pour notre auguste souverain, vous portent à y adhérer, elle pourra concourir au bonheur de la France, au maintien de la religion, et à faire rendre au roi son autorité légitimé.
Nous sommes avec respect, Messieurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs, les président et commissaires de l'assemblée des catholiques de la ville de Nîmes.
Froment, commissaire ; Lapiërre, président ; Folacher, commissaire ; Fernel, commissaire; L. Velut, commissaire ; Faure, Robin, commissaires; Michel, commissaire; Melquiond, commissaire; Vigne, commissaire.
Lettre du sieur Descombiès à M. de Bouzzols, commandant en second dans la province du Languedoc.
M......les dragons protestants ont attaqué sur les 6 heures du soir les catholiques, plusieurs ont été tués et beaucoup de blessés ; le désordre est affreux ; l'alarme est générale; le drapeau rouge aété repoussé et arrachédes mains du municipal, et la municipalité est dispersée. Vainement ai-je cherché avec un d'eux. Ils se sont retirés, après avoir fait ce qu'on peut attendre de magistrats patriotes et généreux.
Il est cependant absolument nécessaire de ramener l'ordre dans la ville, et le seul moyen qu'il y ait, c'est de nous donner un secours assez fort pour en imposer aux ennemis de la paix, quels qu'ils soient.
Je vous prie donc. Monsieur, en ma qualité de notable de la municipalité, et vu les circonstances, de vouloir envoyer, sans perdre un seul moment, un ordre au régiment du roi, dragons, pour se rendre en cette ville.
Je m'oblige de faire approuver ma réquisition par toute la municipalité, et comme citoyen et comme bon Français. J'ai l'honneur de vous assurer, Monsieur, que la présence de ce régiment ramènera tous les esprits à la paix, et fera finir tous les malheurs arrivés et prêts à se renouveler, desquels je ne puis avoir l'houneur de vous donnerencore un détail circonstancié. Je suis,etc., Descombiès, ancien page du roi, notable, électeur.
Lettre du sieur Froment à M. de Bouzzols.
M......vainement j'ai réclamé jusqu'à
ce jour l'armement des compagnies catholiques, malgré Tordre que vous aviiz bien voulu m'ac-coriier; les officiers municipaux ont cru qu'i
était de la prudence de retarder la livraison des fusils, jusqu'après l'assemblée électorale; aujourd'hui les dragons protestants ont attaqué et tué plusieurs de nos catholiques désarmés ; vous pouvez juger du désordre et de l'alarme qui régnent dans la ville ; je vous supplie, en ma qualité de citoyen et de bon Français, d'envoyer de suite un ordre au régiment du roi, dragons, pour venir mettre le bon ordre dans la ville, et en imposer aux ennemis de la paix. La municipalité est dispersée; personne n'ose sortir des maisons ; et si elle ne vous fait aucune réquisition dans le moment, c'est que chacun de ses membres tremble pour ses jours et n'ose se montrer. On a sorti deux drapeaux rouges, et les officiers municipaux, sans gardes, ont été obligés de se réfugier chez de bons patriotes. Quoique simple citoyen, je me permets de réclamer auprès de vous, parce que je pense que les protestants ont déjà envoyé dans la Vaunage et la Gardon neuque, pour demander des secours, et que l'arrivée des fanatiques de ces contrées exposerait tous ies bons Français à être égorgés; daignez avoir égard à ma demande, je l'attends de votre bonté et de votre justice. Je suis, etc. Froment, capitaine de la compagnie n° 39. Ge 13 juin 1790, à 11 heures du soir.
Lettre adressée par le sieur Froment au commandant du poste de la porte de la Couronne.
Monsieur, on vient de me dire que vous proposez la paix. Nous l'avons toujours désirée, et jamais nous ne l'avons troublée. Si ceux qui sont la cause des désordres affreux qui régnent dans la ville, veulent mettre tin à leur coupable conduite, nous offrons d'oublier le passé et de vivre en frères.
Nous sommes avec toute la franchise et la loyauté de bons patriotes et de vrais Français, vos très humbles et très obéissants serviteurs, les capitaines de la légion ntmoise, commandant Les tours du château.
Nîmes, le
Au dos est écrit : à M. le commandant des troupes de ligne, pour communiquer aux légionnaires campés a l'esplanade. Signé (ne varietur) : Vigier Sarrasin, président de l'assemblée électorale ; Gi-taudy, secrétaire, ne varietur, ce 16 juin 1790. Signe : Auvellier, greffier, ne varietur, ce 30 juin 1790. Signé : Fazon, L.-G.-C. Froment.
Lettre des officiers municipaux de Nîmes au président de l'Assemblée nationale, en lui annonçant les événements du mois de juin.
Monsieur le Président, la division qui régnait entre les différentes compagnies de notre légion, au moment qu'elle avait à se nommer des chefs, nous faisant appréhender les plus grands malheurs, si elle formait deux corps distincts, l'un indépendant el l'autre soumis à l'exécution du règlement provisoire fait pour elle, nous crûmes très instant de vous peindre notre affligeante po-' sition par un courrier extraordinaire, et d'obtenir de l'auguste Assemblée, qui ne cesse de s'occuper du bonheur des Français, une décision prompte, quelle qu'elle fût, pour sortir de l'anarchie où nous étions.
Nos craintes étaient d'autant plus fondées que, depuis dimanche, du 13 courant, notre ville est le
théâtre affreux des scènes les plus sanglantes, par la suite de la désunion de nos légionnaires.
Occupés essentiellement de tout ce qui pouvait le plus contribuer à la sûrt té de l'assemblée électorale tenue pour la formation du dôpartemtnt du Gard, nous avions pris pour bases de nos réquisitions auprès du major de la place, celles que MM. les commissaires du roi nous avaient faites; nous avions fixé, dans la cour de l'évêché, le point de ralliement des dragons chargés de faire des patrouilles à cheval, ne prévoyant pas alors qu'elles deviendraient funestes. Elles déplurent infiniment aux volontaires de quelques compagnies qui portaient des poufs rouges.Leurs murmures, leur projet de les narguer par des cavalcades, montés sur des bourriques; les peines qne nous avions eues de les en empêcher, sur la place des Récollets; la fermentation du peuple à ce sujet, et ses plaintes relatives aux effrois que ces patrouilles à cheval lui causaient, nous décidèrent, après en avoir conféré avec MM. les commissaires du roi, à les faire cesser, à laisser les dragons en aciivité dans leurs postes, pour les cas de besoin ; à placer un dragon de garde à la porte du palais, aux ordres du président de rassemblée électorale, et à ajouter au service une nouvelle patrouille des-soldats de Guyenne.
Tel était l'état des choses le dimanche 13 du co.urapt, quand Jrpis d'entre nous, occupés à des comptes dans )a maison CQjpmunç, fumes instruits d'une émeute formée à l'évêché, à raison d'un billet portant que si les dragous ne quittaient l'évêché, ils y seraient attaqués. Deux de nous s'y rendirent, suivis d'un piquet de la compagnie de garde; peu après, l'abbé de Belmond, municipal, lût contraint par les autres légionnaires de proclamer la loi partiale. Il reçut des mauvais traitements pendant sa course; son drapeau fut même enlevé par des légionnaires à pouf rouge. N'ayant pu rétablir le calme entre les dragons et les légionnaires, ni obtenir des premiers qu'ils se tinssent renfermés dans la cour de l'évêché, nous revînmes dans la maisoq commune, au péril de nos vies. Peu après, M. Ferrand fut forcé, par la même compagnie de garile, d'en sortir sans attendre, pour la proclamation de la loi martiale, le régiment de Guyenne, alors au quartier deç casernes, sqms les armes. Le long des remparts et d'une tour ep dépendant, il s y trouva des gens retranchés, qui animés par un coup de fusil tiré, devinrent le signal d'un feu respectif soutenu, pendant iequel le drapeau fut enlevé au valet de ville qui en était le porteur.
Le lendemain, lundi, jour à jamais fatal, l'eût encore bien été pour M. le baron de La Baulme, municipal, rendu sur l'esplanade, eu vue de la paix, si un brave légionnaire ne l'eût garanti ; des coups que des volontaires étrangers voulurent lui porter.
L'après-midi, ceux de la légion à pouf rouge cédèrent au canon qui tira sup eux, la plupart prirent la fuite ou se cachèrent; il en périt plusieurs; d'autres, poursuivis partout, pendant les jours suivants, ont été ou immolés pendant leur marche, ou mis en prison ; d'autres courent les champs; plusieurs des membres de la municipalité, menacés et craignant pour leur vie, se sont vus obligés de se cacher, ou de s'éloigner de la ville, ou de se mettre sous la sauvegarde de l'assemblée électorale dont ils étaient membres. Dès lors, le poids des affaires est retombé sur un petit nombre d'entre nous; il a fallu passer les
jours et les nuits entiers dans la maison commune, pour suffire à tout, et pourvoir au logement des troupes étrangères arrivées sans réquisition, dès le lundi 14, de très grand matin, et accrues au nombre d'environ 20,000 hommes.
Plongés dans une mer d'amertume, et à la vue des massacres multipliés dans tous les quartiers de cette ville, y succombant malgré les suins que MM. les commissaires du roi tt de l'assemblée électorale partageaient avec nous, nous avons été dans l'impossibilité absolue de présenter plus tôt aux augustes représentants de la nation le tableau de nos désastres et nos craintes. Quoique la paix ait été publiée par ordre du département, notre ville court toujours plus à sa perte, par fait de la grande misère et de la stagnation du commerce; ses habitants la désertent; elle a lait des pertçs énormes dàns ses propriétés, dans ses citoyens, devenus coupables, qui ont péri; dans des innocents qui ont été immolés; dans la suite de ceux que la misère conduit au brigandage, en un temps où les moissons demandent des bras; dans la perte de notre collège, du couvent des capucins, dont il a péri cinq religieux, du couvent des jacobins, rendu (Jesert, Qt dp plusieurs objets préciepx.
Jamais position plus affreuse pour nous j elle a conduit M, Laurent, municipal, à nous envoyer sa démission; elle ne permet pius au petit nombre d'officiers, qui tiennent encore aux fonctions de la municipalité, de supporter le poids énorme des affaires communes. Daignez donc, Monsieur le Président, nous permettre de vous offrir, et à l'auguste Assemblée nationale, la démission de nos places dans cette municipalité, en exécution des décrets qui nous y autorisent. Nos vies sont en danger, surtout depuis que nous avons éprouvé ce que la calomnie a de plqs déchirant pour des citoyens vrais patriotes, amis de la Constitution, ce qui nous conduit à désirer notre prompt remplacement.
Nous sommes aven un profond respect, Monsieur le Président, vos très humbles et très obéissants serviteurs,
Les officiers municipaux de ville de Nîmes,
La Baulme, du Roure* Ferrand de Missol, Gail- liard l'aîné, Gas, Llentier, former, Razoux, Pontier, Murjas.
(L'Assemblée ordonne l'impression de ce rapport et en renvoie la discussion à la séance de mardi.)
lève la séance à dix heures et demie.
a la séance de l'assemblée nationale du
Nota. Nous insérons ici diverses pièces relatives à l'affaire de Nîmes, qui servent dé complément au rapport de M. Alquier. — Ce- pièces ayant été imprimées,distribuées et renvoyées au^comité de« rapports, font partie des documents parlementaires de l'Assemblée nationale constituante.
Exposé sommaire pe? événements arrivés a Nîmes jle$ 2, 3 et 4 mai et joijrs suivants» 1790,
Ou a publié aveo tant d'affectation que la cocarde blanche substituée à la cocarde nationale avait été la cause de l'émeute arrivée à Nîmes les 2 et 3 mai dernier, qu'il est essentiel de corn-mencer par réfuter invinciblement cette fausse allégation.
En novembre 1788, la ooearde blanche fut arborée à Nîmes comme le signe du patriotisme et de la liberté.
En août 1789, époque de la formation de ia légion nîmoise, les volontaires prirent la même cocarde, et plusieurs compagnies de la légion ne l'ont jamais quittée depuis ce moment.
C'est un fait notoire et positif, consigné dans une délibération du conseil général de la commune, ainsi que dans un procès-verbal, qui sont sous les yeux de l'Assemblée.
20,000 témoins attesteraient ce fait s'il était nécessaire; ils ajouteraient qu'il était assez indifférent, dans Nîmes, de porter uue cocarde ou de n'en pas porter, de la porter blanche ou aux couleurs de la nation: on n'y mettait aucune im-por ance, parce que les unes* et les autres étaient également dans Nîmes le signal du patriotisme et de la liberté : ils ajouteraient encore que les membres du oonseil permanent (dont plusieurs sont membre, du club dénonciateur, et ont signé l'adresse), ont vu pendant plusieurs mois, lorsqu'on montait la garde en leur présence, plusieurs compagnies de la légion porter la cocarde blanche sans "faire aucune observation. Ce fait est attesté par 60 officiel s ou sous-of licier s légionnaires qui attestent que jusqu'au 2 ou 3 mai les légionnaires pot taie indistinctement la cocarde blanche et la cocarde aux trois couleurs. Le certificat original avec les $0 signatures est déposé entre les mains du comité.
Il est donc bien évideut qu'il ne faut pas attribuer aux cocardes blanches l'émeute arrivée à Nîmes les 2 et 3 mai, puisqu'on les portait depuis longtemps sans aucune contradiction.
Quelle a donc été la cause de cette émeute ? L'agression de quelques membres du régiment de Guyenne et de quelques légionnaires, qui ont donné des coups de sabre à des citoyens sans armes. Ce fait est prouvé.
Qui les a excités? La réponse à cette question se trouve consignée dans les procès-verbaux et dans les déclarations d'environ 100 témoins qui y sont relatés. Mais il ne faut pas anticiper sur les événements, ni sur le rapport du comité des recherches quand toutes les pièces lui seront parvenues.
Le mai, planté le 1" mai à la porte du maire par des citoyens et des légionnaires, n'a pas donné lieu à l'insurrection : 1° parce que leslégîon-naires qui l'ont planté ne portaient pas la cocarde blanche; en effet ils savaient que le maire n'en souffrait pas chez lui de cet:é sorte, et que, du moment de son installation, il n'avait cessé de déclarer hautement que le roi et la nation ne faisaient qu'un, et étaient inséparables, et que le roi lui-même ne portait que des cocardes aux couleurs de là nation; ?» parce que le mai était orné de rubans et de festons aux couleurs de la nation ; 3° parce qu'aucun de ceux qui élevèrent
le mai ne prit part à l'émeute; 4* parce qu'il n'est pas exact que le maire ait donné un déjeqqer ni même de l'argent pour pe régaler, aux citoyens qui ont planté le mai.
Fidèle à ces principes il leur dit que l'amour et l'attachement ne se payaient dignemept que par l'amour; que dans un moment de calamité, il ne fallait ni repas ni réjouissances, et il promit de doter deux filles d'agriculteurs pauvres et vertueuses, choisies à la pluralité des voix, par ceux qui avaient planté le mai; et voilà le prétendu déjeuner annoncé dans l'adresse et répété avec tant de complaisance par tous les journaux.
Il est encore un autre fait qui manque d'exac-titu le; il est relatif au congé obtenu par le maire de Nîmes. M. de Marguerites, dit-on, demanda un cungé de six semaines; c'était le 6 mars; il aurait dû être de retour le 18 avril; mais il écrivit à l'Assamblée nationale pour demander une prolongation de trois semaines. Elle ne l'accorda pas; c'était un refais et M. le maire y est encore. Que d'inexactitudes! Ce n'est que le 13 mars et nqn le 6 que le congéa été signé ; le maire neput partir que le 14. {1 a demandé le 16 avril une prolongation de trois semaines; il a reçu le l*r mai réponse de M. le présid nt; il s'est rendu sur-le-champ à l'hôtel de ville; et il a remis sur le bureau le dire qui a donné lieu à la délibération suivante du conseil général de la commune du 2 mai et s'est retiré.
Voici le terme de la délibération :
« Du dimanche deuxième mois mil sept cent « quatre-vingt-dix, heures de 3 après-midi, le « conseil général de la commune, assemblé « dans la salle de l'hôtel de ville, et présidé par » M. Murgeas, premier officier municipal, en l'absence de M. le maire. »
« Présents et opérants MM.....
« M. Murgeas à dit?
« Messieurs, en exécution du renvoi fait par c votre délibération d'hier, vous allez procéder « à la lecture du dire remis sur le bureau par « M. le baron de Marguerittes, maire, et à l'ar-« rêté qui doit en être la suite; ce dire est conçu « en ces termes :
« Vous savez, Messieurs, quel triste ^spectacle « s'est offert à nos regards à l'entrée de notre « carrière municipale.
« Des magasins presque dépourvus de grains ; « la caisse de la ville entièrement épuisée : la « stagnation des fabriques augmentant chaque « jour la détresse de 10,000 de nos conci-« toyens, l'impossibilité, faute de moyens et de « numéraire, de continuer les ateliers de cha-« rité et de prolonger les secours pécuniaires « accordés chaque jour aux chefs de famille, qui « ne vivent que du produit de leur industrie, a Tel était l'état déplorable où se trouvait la commune, quand la nouvelle municipalité est entrée en fonctions. Quel heureux changement « q'avez-vous pas opéré? Quelles ressources n'a-« vez-vous pas trouvées dans l'aetivité de votre t zèle? 20,000 quintaux de blé achetés par vos « soins ne laissent plus aucune crainte Sur les « subsistances d'une population nombreuse, et « sur la certitude de tenir le pain du pauvre au « plus bas prix possible. Une quête faite par vous a procuré lès fonds nécessaires pour con-« tinuer les distributions du comité de bienfai-« sauce jusqu'au 20 mai, temps auquel les bras « ne suffiront pas même aux travaux de la
« campagne. Malgré la rareté du numéraire, le « payement des ouvriers employés aux ateliers t de charité assuré jusqu'à la même époque, par « des fonds appartenant à la ville, et dont vous « av z fait rentrer une partie. Tels sont les tra-t vaux utiles et imporiants qui ont exigé une « vigilance continuelle depuis l'instant où vous « avez pris les rênes de l'administration.
« J'ai été assez heureux pour concourir avec « vous à ces opérations vraiment paternelles ; et « je n'ai pas dû résister aux sollicitations réité-« rées des représentants de la commune, pour « demander aux représentants de la nation une « prolongation de congé de 3 semaines, délai « que vous avi. z jugé nécessaire pour achever « plusieurs opérations déjà commencées, telles « que la coéquation, la faction du compoix ca-« baliste et l'imposition des biens ci-devant pri-« vilégiés.
« Je me suis adressé suivant l'usage à M. le « président de l'Assemblée nationale pour obie-« nir cette prolongation, qui ne m'a été ni re-« fusée ni accordée; ce silence m'impose le de-« voir d'aller reprendre, sans délai, Je poste « honorable que je n'ai quitté que pour me rendre « à vos devoirs.
« Je ne dois pas vous dissimuler, Messieurs, « que ma conduite et mes principes ont été ca-« lomniésd'uue manière atroce auprès du Sénat « augusie qui préside au destin de l'empire; « divers avis me l'annoncent : le croiriez-vous? La profession de foi que j'ai faite publiquement « et dans toutes les occasions, de mon attache-« ment inviolable à la Constitution, mon exaeti-« tude scrupuleuse à la faire observer, la con-« formité constante de ma conduite avec mes « discours, n'ont pu me garantir d'une imputa-« tion qui cesse d'être dangereuse à force d'être « maladroite. Le chef de cette municipalité se » doit à lui comme à vous, de vous dénoncer « cette noirceur qui ne l'intimide ni ne l'étonné, « j'ai maintenu la paix parmi mes concitoyens, « malgré les entreprises les plus répréhensibles; « c'était mon devoir, c'était le vœu le plus cher « de mon cœur, c'était l'unique but de mon « voyage et de mes efforts.
« L'honnête homme, le bon citoyen, le sujet « fioèie peut être à l'abri de la médisance, et « non delà calomnie. Qui l'a éprouvé plus que « moi dans une carrière uniquement consacrée « à l'utilité et à l'avantage de ceux-là même qui « ont osé m'inculper injustement?
« Je ne me permettrai plus aucune réflexion ; « je remets mon dire sur le bureau, et je me retire, « pour laisser aux représentants de la commune, « témoins de ma conduite, le libre exercice du « droit qu'ils ont de la condamner ou de la jus-« tifier aux yeux de la France entière.
« Sur quoi le conseil, pénétré de douleur du .« départ annoncé par M. le maire ; justement in- digné de la cause qui, malgré le vœu du peu-« pie et le désir ardent de la municipalité, le « nécessite; se repliant sur lui-même, pour dé-« couvrir dans la conduite de i'admiuistraiion et « du digne chef avec lequel elle est identifiée, « la cause des calomnies qui le portent à se ren-« dre à l'Assemblée nationale ; ne voyant dans « sa propre conduite que des actes de patriotisme « et d'amour de l'ordre, une soumission entière « aux décrets de l'Assemblée nationale, une sur-« veillance assidue à la sûreté et à la tranquil-« li;é publique, une sollicitude continuelle à « pourvoir auxbesions du peuple, voyant encore « dans M. le baron de Marguerittes, qui dirigeait
« tous ses travaux, le sacrifice généreux du « soin de sa santé, de sa fortune et de son repos, « pour ne s'occuper que de remédier au déla-« brement de la chose publique; les caisses vides « et les besoins accrus par l'inertie du commerce ; " la misère toujours renai-sante, et la généro-« sité déjà épuisée; les subsistances augmentant « de prix, et la consommation se multipliant par « l'affluerice des étrangers, qu'attirait le taux du « pain, soutenu le même dans Nîmes, malgré « l'augmentation sur les grains; la tranquillité, « la sûreté publique raffermies, malgré l'effer-« vesc nce si souvent excitée par les passions, « transformées en opinions, plus ou moins « dangereuses i enfin, une police tout à la fois « indulgente et sévère, qui a su prévenir lescri-« mes, au point qu'aucun meurtre, aucun incen-« die, aucun vol, aucun désastre public n'ont « souillé l'époque de l'administration et la durée « du séjour de ce chef, qui mérite à si juste ti-« tre l'amour et la confiance que le peuple a « manifestés.
« La municipalité considérant néanmoins que, « puisqu'une pareille conduite, constamment « soutenue, n'a pas mis son chef et conséquem-« ment elle-même à l'abri de la calomnie, ce « n'était point dans cette conduite irréprochable « qu'il fallait en chercher la cause première ; et « c'est avec douleur que, saisissant le fil que lui « a donné une foule d'indices frappants, elle a « découvert que le mécontentement de quelques « individus dont l'ambition avait été déçue, et « l'effervescence de l'opinion religieuse dans un « petit nombre d'autres, en étaient le foyer uni-« que et le mobile de tous les mouvements; mais « elle a vu en même temps avec satisfaction que « la masse des citoyens, toujours dirigée par son « devoir, toujours soumise aux lois, toujours « estimable par sa modération, quelle que fût « celte même opinion, n'avait aucune part ni à « leurs erreurs, ni à leurs excès.
« Considérant, enfin, qu'il suffira sans doute « aux individus égarés de leur faire connaître * l'ènormité et le danger de leur faute pour leur « en inspirer une juste horreur et pour les ra-« mener à cet esprit de paix et de tolérance au-« quel la municipalité les exhorte; esprit qui, « quelle que soit leur opinion, est si nécessaire « pour établir solidement les bases de la Consti-« iution; qui leur suffira encore, pour éteindre « toute arumosité, d'observer que c'est se décla-« i er véritablem nt ennemi de et lté Constitution « que d'abuser, pour introduire l'insubordination « et l'anarchie, des mêmes formes qu'elle a éta-« blies pour conserver à l'homme ses droits, au « peuple sa liberté; que la municipalité est non « seulement composée d'hommes librement choi-« sis par le peuple, mais encore qu'elle est re~ « vêtue de l'autorité de la loi qu'on doit respecter.
« Le conseil, se bornant à l'objet immédiat du « dire de M. de Marguerittes, a unaniniement « délibéré de manifester et de consacrer les sen-« timents d'estime et de reconnaissance que lui « ont inspirés les vertus et les talents de M. le « maire dout l'absence, néces.-itée par les cir-« constances, lui font encore plus sentir l'étendue « de lui témoigner le regret d'autant plus vif « d'être privé de ses lumières, que les efforts « des méchants pour l'arracher à sa patrie, lui « font pressentir des temps encore plus difficiles « et plus orageux. Mais tandis que ces égards « pour les vertus de son chef obligent le conseil .« de retenir les élans du peuple qui ne le voit « partir qu'avec la plus grande peine, il a encore
« unanimement délibéré de supplier l'Assemblée « nationale d'accorder à M. le maire un nouveau « congé essentiel pour achever l'ouvrage de la « conservation de la chose publique et pour « consolider la paix et la tranquillité dans une « ville où sa vigilance infatigable les a mainte-« nues jusqu'à ce jour.
« Délibéré, de plus, que la présente délibéra-« tion sera imprimée, si besoin est; qu'un extrait « e i sera adressé à M. le Président de l'Assem-« blée nationale, et qu'un autre extrait en sera « remis à M. le maire. »
(Extrait des registres de Vhôtel de ville de Nîmes et collationnê sur l'original.)
Signé : Berdincq, secrétaire-greffier.
Au moment où l'on signait cette délibération, prise en l'absence du maire, et sans doute pour que la paix ne fût pas de plus longue durée, quelques soldats et sous-officiers du régiment de Guyenne, qui avaient été trompés, régalés et provoqués par des liqueurs, insultèrent à la promenade et maltraitèrent des citoyens paisibles, sous prétexte qu'ils portaient des cocardes blanches, que l'on avait toujours portées sans trouble et sans inconvénient, ils fondirent, à coups de sabre, conjointement avec quelques légionnaires des compagnies nos 1 et 17, sur des hommes désarmés, et non seulement sur ceux qui avaient des cocardes blanches, mais sur ceux qui n'en portaient pas, mais sur ceux-là même qui en portaient aux couleurs de la nation : fait attesté dans un procès-verbal par plusieurs témoins. Ce qui prouve que les cocardes blanches n'ont servi que de prétexte aux malveillants. En un instant l'alarme devient générale; on annonce qu'il y a une émeute sur le grand cours. A peine le maire en est-il i struit, qu'il se rend à l'hôtel de vil le ; il y trouve le nommé Roger, le tils, ensanglanté et blessé d'un coup de sabre à la tête, et déclarant à MM. les officiers municipaux « qué sur le cours, « une partie du peuple était dans une émotion « extraordinaire contre des soldats de la gar-« nison, l'un desquels lui a asséné le coup dont « il a été frappé. »
Sur-le-champ MM. les officiers municipaux requièrent la compagnie de la légion nîmoise, n° 25, qui montait la garde de jour à l'hôtel de ville, de les suivre. MM. Razo:s, Pontier, l'abbé de Bel-mont, de Cabrières et Fornier restent pour tenir le bureau ; le maire, MM. Murgeas, Du Roure, Gaillard et autres officiers municipaux, et Vidal et BoyLr, procureur de la commune et substitut, revêtus' de leurs écharpes, se rendent à pas redoublés sur la promenade; ils trouvent un peuple immense, depuis le bas du petit cours jusqu'à l'extrémiié du grand, et plusieurs femmes en pleurs, qui criaient que l'on assassinait leurs frères, leurs maris, leurs enfants.
Le premier soin du maire, en entrant dans la foule, fut d'exhorter les citoyens, au nom de la loi et du roi, de se retirer paisiblement, ce que plusieurs exécutèrent. D'autres entouraient MM. les officiers municipaux et demandaient justice. Le maire, devançant ses collègues, parvint le premier à 100 pas de la maison de M. de La Cost négociant; il aperçoit plusieurs citoyens ensanglantés, et le peuple extrêmement irrité contre des sous-officiers ou soldats du régiment de Guyenne et contre quelques volontaires de la légion, compagnies n08 1 et 17. Il aperçoit des soldats poursuivant, le sabre à la main, le peuple qui se défendait à coups de pierre, et dont le
nombre, grossissant successivement, les poursui" vit bientôt à son tonr. L'instant était décisif; le maire s'élance du haut du cours dans la rue Basse; il fend la foule; il se précipite, sans hésiter, au milieu des soldats de Guyenne et des volontaires; il les couvre de son corps; il parvient heureusement, par cet acte courageux, à contenir dans le premier moment la fureur populaire et à suspendre une giêle de pierres, dont les agresseurs allaient être les victimes. Cependant MM. les officiers municipaux travaillaient à calmer les esprits, et, répandus dans la foule, engageaient, au nom de la loi, les citoyens à se retirer; mais le peuple acharné demandait à grands cris « vengeance des coups de sabre donnés à des citoyens paisibles et désarmés »; il voulait que ses assassins (telles furent ses expressions) lui fussent livrés. Le maire, fidèle à son poste, étendant les bras, leur faisait un bouclier de son corps et parvint à faire entrer dans la maison de M. de La Coste, successivement et sains et saufs, tant les soldats que les légionnaires agresseurs; il fit aussitôt fermer la porte et plaça 12 volontaires, avec M. Gaillard-Malarte, capitaine et un officier municipal, pour défendre l'entrée de la maison qui n'essuya d'autres dégâts qu'une vingtaine de carreaux de vitre cassés. Il annonça au peuple que cette maison el ceux qu'elle renfermait étaient sous la sauvegarde de la loi. Au même instant, le maire et le substitut du procureur de la commune aperçoivent un volontaire de la compagnie La Coste, n° 17, qu'on traînait par les cheveux dans la boue, et que la multitude voulait assommer parce qu'il avait donné, disait-on, des coups de sabre à plusieurs citoyens. Le maire et le substitut volent à son secours, parviennent à lui et le sauvent en promettant au peuple que justice lui serait rendue, mais en lui observant que la loi défendait de se la faire à soi-même.
Le procureur de la commune rendit le même service au nommé Barry, volontaire de la compagnie n° 1, un des premiers agresseurs : il le dépose lui-même. Cependant, MM. les officiers municipaux se dispersent au milieu de cette foule immense et, tandis que les uns se ren ient vers la fontaine, au-devant de quelques compagnies armées (1) pour arrêter leur marche ou la diriger suivant le besoin, les autres dirigent leurs pas vers les casernes pour contenir les soldats et leur annoncer que leurs camarades étaient en lieu de sûreté.
Cette précaution était d'autant plus instante, qu'un honorable membre du club excitait les soldats de Guyenne, qui des casernes s'avançaient paisiblement vers le cours, en leur disant que le peuple égorgeait leurs camarades et ajoutant: « Courage? mes amis; allez, frappez fort, nous vous soutiendrons. »
Ce fait est attesté par plusieurs témoins, notamment par les 20 23, capitaine et officier de la légion, et par le 41, dont la déposition mérite d'être rapportée.
« S'est présenté M. de Salignac de Fénelon, « lieutenant de la compagnie de la Garlière du « régiment de la Guyenne, après serment...... « sur les interpellations......
« A déclaré que dimanche dernier il était à « la comédie; que, sur le bruit qu'il entendit du « côié du cours à environ six heures du soir, il
en sortit avac MM. lës officiers dë Guyënnë « qui s'y trouvaient aussi; qu'arrivés & l'eictré-(» mité ae la salle dé Spefetàclé du c ôté du nord, « il Vit quelqUés bourgeois qu'il ne cônnaît pas, « exciter le hOmmé Dubois, sergent de la coni-« pagnie de Chartiperon du régiment dë Guyenne, k a se pbrtèr sur le grand cours, Itii disant que « le jiëbple égorgeait ses camarades; qu'à l'ins^ « tant ledit sërgërtt. mettant le sabre à la maint « s'écria : A moi, Guyenne ! Qu'aussitôt environ « 20 chasseurs du même régiment accoururent « le sabre à la màin et se disposèrent à Courir « dans l'ëndroit dhe lesditS bourgeois dési^ « gnaient; que ledit sieUt* de Salignac courut « sur lëdit DubOis, Sergent, ët le prenant par le « cdllèt; ltii dit i Malhéàtêux! au allez-vous faire?Vous devriez contenir lês « soldats, èt vous êtes «( le premier à les exèitet du àarndge? Que ledit è Sous-officier jdit à l'instant sou Sabre dans le « fourreau et ai la ledit sieur déclarant à con-« tenir lës chàsseurs et â leur faire reméttrë letti* « sabre dans le fourreau ; que les susdits bout-« geois, au nombre dè 5 bu 6, répétèrent âu dé-« clarâUt qU'cn égorgéàit dés soldats de Guyenne i sur le grand cdurS; que Cë dernier, adressant « la parole auxdits sergeut ët chasseurs : Vbilâ m tes pueux, en désignant lesdits bourgeois (1), « qu'il faudrait punir patte qu'ils vous tromperit « et qu'ils veulent vous fuite donner dans lè « piège i qu'ayant vu arriver M. le procii-« reur de la commune, avec ud officier inuni-« cipal, exhorter lë pëuplë à se retirer, en ad-« nonçant que tout étâif calmé, ledit sieur « déclarant se retira aù quartier 6û l'on bàtlàit « la générale; qu'en se retirant Un bourgeois, « s'apprOi hâut de lui, le prit par lè bras et lui « di;t Vous faites bieh de faite tetiter Hotte k ttoupe; que ce propos ayant été entendu de « 2 autres bourgeois qui marchaient après le « sieur déclarant, l'un d'eux répondit : N'ècoutèi « pas ce guéux, il est atistocrate, il mérite d'être « pendu : que ledit Sieur de Salinac-Féueioh « répliqua, que s'il était afistocrate, il devait « l'être aussi, puisqu'il portait les soldats â la paix, tandis qu'il les excitait au Carnage.
« Ajoutant que le régiment de Guyenne n'a « point trempé dans ce complot; qu'ail contraire, « il demandé connaissance du procès-verbal « tenu par MM. les officiers municipaux pour « punir ceux de leur Corps qui se trouveront y « avoir trempe. »
, Cependant le maire, étant monté sur le parapet du cours, fit signe de la main et parvint â se faire entendret II représenta avec foroe, que sous l'empire de la loi on ne devait obéir qu'à la loi, que tout acte de violence était défendu et serait Sévèrement réprimé; que les coupables seraient connus; que certainement justice serait rendue et qu'il leur en donnait sa parole d'honuëùr. (Ici des applaudissements i)Mais que la maison de M. de LaGoste,et ceux qui s'y étaient renfermés, étaient sous la sauvegarde de là loi, et qu'il exhortait les bons citoyens, au nom dè la loi et du roi, à se retirer.
Alors lës cris réitérés l Vite le roi ! vive la nation ! vivent les officiers municipaux ! se font entendre, et le peuplé commence à se calmer et à se diviser.
Il était cependant trèS essentiel d'éloigner la
foule dé la mnison dë M. dë La Coste : lé ihâirè ët quelques Officiers municipaux se rëhdëht verè le milied du cours; Un gratin nombre dë citoyénS de tout âgé; de tout sexè, s'empresse dë leè suivre ; les CtiS dé : Vive le toi ! vtvè la nation ! annonçaient a Sèz que le moment dé l'effervescence générale était passé. Peu de temps àprèS, ët Vers le petit cours* 30 Soldats armés se présentèrent pour venir ail sècours de lëurS camarades; les officiers municipaux vont à eux, lés tranquillisent ën leur aniionçànt que leurs camarades sont en sûreté. QUelquè temps avant, le maire avait fait prier, par un officier-major de la place, M. le lieutenant-colonei du régiment de Guyenne, de faire battre sur-le-champ la générale pour ràSsemblér les soldats Sur la place des casernes, et de suite la retraite, pour faire rentrer Sans délai lés soldats dans leur quartier.
Dans moins de 10 minutes presque tout lé régiment fut rassemblé, avec Unë subordination mcro^ahle. Les dffîciëbs municipaux, prèvOVàht quô plusieurs soldais pouvàiëdt être trop eloi* gués des casernes pour entendre la générale, OU pour s'y rBndré aussi promptemënt. Crurent devoir leur ëri fournir les moyens ; ils continuèrent à calmer lë peuple Jlàr leUr présërtCe', IIS écoutèrent pendant unë héUré les plàintes diverses, promirent juStiCe, ët invitêrëfit les CitoVens à Se retirer tranquillement. En effet, sûr les o heures, la multitude tut ëntiêrëthéht diS-ijiêe; Une pro* clamatio i enjoignit à Chacun d'éclairer leS fehê-tr S de sa maison, ét lës officiers municipaux se rendirent de Suite à là maison Commune pour rédiger lë procès - tërbal, ayant lâissé M. Gaillard, officier muhiCipal, à là. tête du détachement qui gardait 11 porte de M. de Là Costé et ayant chargé Spécialement M. Murgeas, autre officier municipal, et M. Vidal, procureur dë là Commune, dé veiller sur la Sûreté dës soldats ët dës légionnaires qui s'étaient renfermés dans cettë maison:
Sur les 9 heures, MM, Murgeas et Vidai sé rendirent chez M. de La Coste, trouvèrent le détachement de la légion et lé capitainë sur la porte, et dans le vestibule, dés sousofficiers et un musicien du régiment de Guyenne; ils prirent ceux-ci sous leur sauvegarde, et ies ayant couverts de divers manteaux pour plus grande sh-reté, ils les conduisirent aux casernes par ie cours (dans toute l'étendue duquel ils n aperçurent qu'environ 40 personnes très paisibles). Ils remirent les sous-officiers et le musicien entre les mains du capitaine de police, et se rendirent ensuite, sur les 11 heures, à l'hôtel de ville, pour détailler les faits ci-dessus et ies joindre au procès-verbal qui fut clôturé à minuit sonné.
Les patrouilles avaient été redoublées ; les compagnies de garde avaient été renforcées j le maire, quelques olticiers municipaux et le procureur de la commune ne cessèrent de parcourir ies différents quartiers de la ville et des faubourgs, et la nuit fut parfaitement tranquille.
Du lundi 3 mai.
Plusieurs de MM. les Officiérs municipaux sé rendirent de grand matin à l'hôtel de ville. Bientôt lés inquiétudes recommencèrent, parce que là plUié retenant les cultiVateUrs dans la ville, ou craignit qu'un reste de res:ëutimëut ne les portât à là vengeance. Cependant, malgré unë pluie très abondante, M. le maire, accompagné
de deux valets de ville, parcourut dans la matinée la ville et les faubourgs, en exhortant les habitants à la paix èt à là Tfcimuillité. Il dissipa, par sa seule présence, quelques attroupements, peu nombreux, de gens sans armes. Pendant cet id-tervalle, le§ citoyens auxquels on avait promis justice allèrent en foule à l'hôtel de ville porter plâinte des excès commis cohtrë eux. Messieurs les officiers municipaux les calmaient, les ëcoii-1 taient et les invitaient successivement à le Retirer par petits pëlôtons.
Le maire fut ipstruit, dans sa tournée, qu'un particulier venait de commander au sieur Pé-ret, ferblantier, 200 eartouches en fer-blanc, au bout desquelles il faisait souder une grosse balle, et qu'il avait exigé qu'elles fussent prêtes pour quatre heures du soir. Un pareil avis n'était pas à négliger. Le maire chargea M. Aigon, officier municipal, de veiller, avec le capit iine de santé et quatre valets de ville, sur la boutique du sieur Péret. A â heures environ, l'officier municipal vit entrer dans cette boutique ie nommé Joseph Larnac, fils aîné; il attend encore quelque temps pour se portér chez le sieur Péret. Il trouva ce dernier fabriquant les cartouches commandées Êarle siéur Larnac, présent à ladite fabrication, elui-ci était déjà nanti de trois cartouches. A l'instant M. AigOn fit saisir et arrêter lesdits sieurs Péret et Larnac, et les cartouches que ce dernier avait dans ses mains, et celles qui étaient dans l'atelier, au nombre qe 5 avec les balles soudées à 1 un des bouts de chacune desdites cartouches, et auxquelles les balles n'étaient pas encore attachées, Il ht également saisir les balles du même calibre qui étaient sur l'atelier, au nombre de 7. De suite il lit traduire lesdits Larnac et Péret dans l'hôtel de ville* A peine le bruit de cet événement fut-il répandu» que les alarmes recommencèrent Les citoyens se portèrent en foule vers rhôtel de ville, en criant qu'il y avait quelque trahison et qu'on voulait sans doute les massacr r. Le maire arrive, leur parle avec bonté et fermeté, leur promet justice et vigilance continuelle, ët parvient à les tranquilliser et à les dissiper parla proclamation ci-après;
« Il est défendu à tous les citoyens dé s'attrouper « sous quëlque prétexte que ce puisse être. Il leur « estenjdintdeseretireràvantlanuit chacun dans « sa maison, à peine d'être arrêtés comme per-« turbateurs du repos public* si bu les trouve u dans les rues, et sans lumière, après la retraite « sonnée.
« Il est également défendu à tous citoyens, « Volontaires de la légion ou autres, dë sortir « armés, avec quelque arme que ce soit, à peine « d'être arrêtés et poursuivis suivant la riguéur « des lois.
» Défenses sont faites à tous les capitaines de « la légion de dbnner des armes à aucun volon-« taire, excepté à Ceux qui seront commandés « pour le service; et de laisser ou faire assembler « ieur compagnie avec armés ou sans armes, à « peine de demeurer personnellement responsa-« bles de tous les événements.
« Il est ordohné au fermier des réverbères cte « les faire allumer jusqu'à nouvel ordre, ët les « citoyens siisés ftorit invités à éclairer pendant « la nuit bné fenêtre de leur maison.
« Enfin tous les citoyens sont exhortés à se « regarder comme frères, à contribuer de tous « leurs moyens au maintien de là paix et à at-« tendre dé la vigilânéé dëé bfficiérs municipaux,
« sûreté, tranquillité et surtout une justice im-« partiale.«
Fait à Nîmes, le
Signt: Le bnron de MorgueritWS, maire. Grelleau, Gas, officiers municipaux. Yidal, procureur dela commune. Bover, substitut.
Collationnt: Berdincq, sccrdtaire-greffier.
C'est dans cet intervalle et près de l'hôtel de ville que le maire l'étièontra quélcjnes officiers et dfàgonS dë la légion. IfS ldl demandèrent de pouvoir së rallier en corps dans les ëasérnes. Le maire leur bbserva que la prudence në permettait pas d'àCceder à cetté demande, dans un moment où lë beUple, irrité Contre certains soldats et sous-orficlers au régiment de Guyëtthe, pôUrrait faire mille suppositions et concevoir des, inquiétudes, en voyant lés dragons së réunir dâhà les casernes à Ceux contre lesquels les Citoyens Croyaient avoir des griefs fortdês. On a envenimé et dénaturé ce refiJS sage èt motivé pour indisposer les Soldats du régiment de Guyenne côutrë les officiers municipaux. Le maire ajouta: « que si Messieurs « les dragons voulaient Se rassembler, ils pbur-« raient le faire (comme Cela s'était pratiqué) dans « la coUr de l'évêché, sur la place Saint-Charles « et dans d'autres endroits plus spacieux encore ; « que d'ailleurs ils devaient demander là permis-« sion au colonel de la légion* auquel il allait de « ce pas communiquer lés motifs de son refus. » Ces motifs furent approuvés par le colonel de la légion et surtout pat le chef du régiment de Guyenne. 11 était réservé aux seuls membres du club d'en faire un des articles de leur dénonciation. Que l'on se rappelle tous les malheurs arrivés à là compagnie de dtagôtts de Montauban, pour avoir VoulU demeurer rassemblés dans ua moment d'éffefvesceoce générale, malgré l'invitation amicale et l'ordre positif des officiers mu-nicipaut de Montabban dé së retirer ; et que l'on apprécie la sage prévoyance du maire de Nîmes.
Cependant on rédigeait le prôcès-yerbâl relatif aUx Cartouches, ën présènce des élurs Larnac et Pé^et. Il résulte dé l'âveu du sieur Larnac, qu'il avait commandé 12 cartouchës pour soa usage, ët qu'étant volontaire dans la compagnie n° U),. il était biën aisé d'avoir cès cartouches pout lés jours dë ,service, et à l'effet de charger et décharger pltis facilement son fusil. Il résulte du même procès-verbal que le sieur Larnac avait commande 200 cartouches pareilles au modèle du'il présentait,, et avait dit, chez le ferblantier : « qu'il attendrait qUé M. deMargue-« rittes, maire, entretiendrait la paix dans la ville; « qu'autrement ies cartouches qu'il commandait u perceraient plus d'Un ventrë ». Enfin il résulte du même protès-verbal que la meré du sieur Péret s'étant renutife ëhéfc ledit Làrnac pour lui dire de venir voir si son ftfs exécutait lesdites cartouches à son gré, ledit Larnac répondit ; « qu'il he pouvait pas quitter dans ce moment-là, attendu qu'il était occupé à fondre des balles. » Gettë partie du procès*verbal Contient d'autres aveu* très Importants. (Il est déposé, ainsi qué toutes les pièces CitêëS, au comité des recherches). Les cartouches et les balles saisies, reconnues par les sieurs Péret et Larnac pour être les mêm fabriquées, ont été eo leur présence enveloppées et Scellées* puis déposées âu greffe de l'hôtel de ville dë Nîmes, en attendant que M. le procureur du ft)i du pitësidial fâSsë entendre les témoins. MM. les officiers municipaux font
sortir, avec précaution, lesdits Larnac et Péret et les renvoient chez eux en chargeant le capitaine de santé de veiller à ce qu'il ne léur arrivât rien.
Gependant la nouvelle de cet événement fut promptement répandue. La vue des balles et cartouches échauffa les esprits, et sur les 6 heures du soir il survint une rixe ontre quelques personnes vers le cours Balainvilljers. Bientôt ce cours, la place des Récollets et les rues cir-convoisines furent couvertes de monde. Le maire s'y rend seul; il parle à la multitude; au nom de la loi et du roi, il promet justice; il recommande la paix et l'union plus que jamais, et parvient à dissiper la multitude qui le comble de bénédictions. Il rentre à l'hôtel de ville et trouve MM. les officiers municipaux occupés à recevoir les plaintes sur les excès commis le dimanche.
Ge fut à cette époque que le corps municipal fit afficher une proclamation (délibérée antérieurement et communiquée ensuite au conseil général de la commune, ce qui en avait retardé l'impression) à l'effet de faire cesser les dommages occasionnés dans le taillable de Nîmes par l'indiscrétion d'un grand nombre de chasseurs qui dévastaient la campagne et compromettaient la recette prochaine, unique espoir du cultivateur.
Le corps municipal avait cru devoir insérer dans cette proclamation un avis paternel relatif aux écrits incendiaires, aux qualifications contraires et aux distinctions qui pourraient tendre à séparer des citoyens soldats, que tant de puissantes raisons devaient réunir dans les mêmes sentiments.
La proclamation commence par annoncer que le corps municipal est également occupé d'assurer les subsistances, de faire respecter les personnes et les propriétés, et de maintenir surtout la paix et l'union entre concitoyens, etc...
Cette proclamation est terpninée comme il suit :
« Et en attendant que l'Assemblée nationale ait « pesé dans sa sagesse les avantages ou les in-« convénients d'une liberté illimitée de la presse, « le corps't municipal improuve hautement tout « ouvrage incendiaire capable de troubler l'ordre « public et de détruire l'harmonie qui doit régner « entre le* membres d'une même famille; défend « toutes les distinctions, et très expressément (1) les cocardes qui ne sont pas aux couleurs de « la nation, et toutes qualifications contraires « qui tendraient à faire naître des défiances res-« pectives et des intérêts opposés, qui tendraient « encore à différencier les citoyens entre eux, « et principalement cette classe utile et respec-« table qui s'est plus spécialement dévouée « pour le maintien de la Constitution et de la « tranquillité publique. «
Sur les sept heures le peuples aperçoit cer-
tains légionnaires de ceux qui, la veille, avaient été du parti de quelque sous-officiers du régiment de Guyenne, lorsqu'ils maltraitaient des citoyens paisibles. L'attroupement recommence vers les arènes. Le maire en est instruit, il prie deux de messieurs les officiers municipaux de s'y rendre, avec les valets de ville, le peuple se calme en les voyant, mais il'témoigne quelques inquiétudes sur des troupes étrangères qui devaient, dit-il, arriver pendant la nuit. Messieurs les officiers municipaux s'efforçaient à dissioer ces fausses alarmes, et parvenaient à faire retirer le peuple, lorsqué deux coups de pistolet, tirés près au groupe où ils étaient, mettent le peuple en fureur. Il est sourd à la voix des officiers municipaux; on le fait retirer par une rue, il rentre par une autre; il veut avoir vengeance de l'attentat qui vient d'être commis; menaces, prières, rien ne peut le contenir, cette nouvelle à peine répandue, les attroupements, les coups de pierre, les coups de sabre, recommencent en divers endroits. Messieurs les officiers municipaux reviennent à la maison commune. D'après leur rapport, il fut résolu de publier aussitôt la loi martiale, malgré les puissantes considérations qui pouvaient en empêcher. Déjà des ordres étaient donnés pour rassembler des compagnies de la légion ; déjà l'on rédigeait la proclamation de la loi martiale, lorsque les valets de ville viennent annoncer M. de Bonnes-Lesdignières, lieutenant-colonel du régiment de Guyenne, et de La Millaochère. officier.
On a osé imprimer, annoncer à l'Assemblée nationale, et faire publier dans tous les journaux, que ce n'était qu'après trois jours, et grâce à la vigueur et à la sollicitation insistante du chef du régiment de Guyenne, « qui ne pou-* vait plus contenir l'indignation de ses soldats « que la loi martiale avait été enfin publiée. » Et d'après cette fausse allégation, on s'est permis d'accuser les officiers municipaux d'inaction, même d'une indifférence coupable.
Pour toute réponse, on copie la déclaration de M. de Bonnes et autres officiers du régiment :
« Nous soussignés, lieutenant-colonel et nous « lieutenant en premier au régiment de Guyenne, « certifions, par amour pour la vérité, que étant « rendus le lundi 3 mai, sur les sept heures, à « l'hôtel de ville, nous fîmes part à MM. les offi-« ciers municipaux de l'accident arrivé à un c grenadier du régiment de Guyenne, qui ve-« nait d'être blessé dangereusement d'un coup « de fusil au bras, par un quidam qu'il n'a pu re-« connaître ; nous ajoutâmes que d'autres soldats « avaient reçu des blessures moins considérables ; « que, dans ces circonstances et pour éviter de « plus grands malheurs, il paraissait convenable « de prendre les précautions nécessaires pour « calmer les esprits, et empêcher que les attrou-« pements ne vinssent à recommencer, que M. le « maire nous répondit, que MM. les officiers « municipaux, après avoir fait tout ce qui était « en leur pouvoir pour faire cesser ces rixes par-« ticulières, sans être assez heureux pour y « parvenir, étaient occupés à rédiger une pro-« clamation de la loi martiale, pour la faire pu- biier sans délai, quoique les circonstances leur « parussent critiques et dangereuses, vu que les er"> membres de la légion et les soldats du ré-« giment de Guyenne, qui devaient faire exécu-« ter la loi martiale, étaient ceux contre les-« quels il fallait la proclamer; que cette même « considération les avaient arrêtés la veille, « mais qu'il était impossible de renvoyer à un
« plus long terme. Sur quoi, nous officiers, crû-« mes devoir faire observer à MM. les officiers « municipaux que les soldats étaient rentrés « dans leurs quartiers, et que vu les circo.ns- tances et l'approche de la nuit, on pouvait at-« tendre jusqu'au lendemain ; que d'ailleurs « nous ne venions pas réclamer la proclamation « de la loi martiale, mais seulement nous con-« certer sur les moyens les plus propres à calmer « l'effervescence générale, et nous étions les pre-« miers à demander que si certains de nos sol-« dats ou sous-officiers avaient été la cause de « l'émeute de dimanche, ils fussent punis : après « quoi, nous nous retirâmes; et étant au bas de « l'escalier de l'hôtel de ville, M. de La Millan-« chère remonta pour réitérer de nouveau à « MM. les officiers municipaux, que loin de « réclamer la proclamation de la loi martiale, « nous les prions d'attendre les événements du « lendemain; à quoi MM. les officiers muni-cipaux consentirent, sur la promesse respec-« tive, que de grand matin tous les officiers du « régiment de Guyenne se rendraient aux ca-« sernes et que MM. les officiers municipaux « redoubleraient pendant la nuit les patrouilles, « dont l'ordre fut donné devant nous à deux « compagnies de la légion, par M. le maire.
« A Nîmes, le
Le chevalier oe Bonnes-Lesoignières, chevalier oe Là Millanchère.
« Pour rendre hommage à la vérité, les offi-« ciers du régiment de Guyenne certifient que « M. le maire et MM. les officiers municipaux se sont portés, avec zèle et la plus grande ac-« tivité, partout où leur présence était néces-« saire, pour mettre ie bon ordre, le calme et la « paix, n'ayant pas craint de s'exposer au « danger qui paraissait imminent pour eux.
Ont signé : Duperron, guérouth, Janet, de car" voisin, Thierriat de Millerelle, Gover de Villers, chevalier de Fontenay, Salignac-Fé-nelon, Deplas, baron de Savigna, de Costa, lé chevalier de L'Enferna, Peineau. de La Desneraye, de Perrault, La Garlière fils, chevalier Taffin, chevalier de Goyer fils.
Dans l'intervalle de la nuit, le mauvais temps, et surtout l'éloignement de ceux contre lesquels on portait des plaintes, engagèrent le peuple à se retirer. On vint l'annoncer à l'hôtel de ville ; 4 compagnies de la légion, commandées pour prêter main-forte furent chargées de faire des patrouilles fréquentes. Les compagnies 25, 26 et 27 ayant été employées le dimanche, le colonel de la légion, suivant l'usage, commanda les compagnies 28, 29, 30 et 31, et par conséquent la compagnie n° 31 ne fut pas choisie par le maire de préférence, comme on a osé l'avancer.
Outre l'officier municipal, qui fut constamment de garde à l'hôtel de ville, le maire parcourut lui-même pendant la nuit, et à la tête des patrouilles, les différents quartiers.
Cette nuit fut également calme et tranquille.
Du mardi 4 mai.
A six heures du matin, le maire traverse la ville ; il parcourt les marchés ; il inspecte tout par lui-même; il se rend à la maison commune et de là aux casernes. Tout était paisible. ïl trouve MM. les officiers de Guyenne rassem-
blés, et les prie de vouloir bien faire venir deux sous-officiers de chaque compagnie.
L'ordre donné fut promptement exécuté; Le maire après avoir rappelé la concorde, qui n'avait jamais cessé de régler, depuis plusieurs années, entre le brave régiment de Guyenne et les citoyensde Nîmes, témoigne ses justes regrets sur ce qui s'était passé les deux derniers jours, et notamment sur le coup de feu reçu la veille par un grenadier. Il se félicite « de ce qu'aucun autre membre du régiment de Guyenne n'était blessé dangereusement » et il ajoute : « qu'aucun « citoyen n'avait reçu de blessures mortelles ; « qu'il était vrai que quelques soldats avaient « été égarés et trompés pour commencer la que-« relié »:;ïci plusieurs voix s'élevèrernt et dirent :
« Monsieur le maire, nous voulons les connaître « pour en faire jùstice nous-mêmes, et nous vous « prions de nous communiquer cette partie de la « procédure quand elle sera en règle (1). »
Le maire leur dit : « que dans ces circonstances « il fallait oublier réciproquement tout sujet de « plainte, vivre en frères comme de bons mili-« taires citoyens et de bons citoyens militaires. » « Enfin, ajouta-t-il, le raccommodement doit être * l'ouvrage de MM. les sous-officiers du régi-« ment de Guyenne et de la légion, et leur « exemple, toujours si puissant sur leurs cama-« rades, sera le signal le plus certain de la Con-« corde et de la paix. Jè vous le demande, braves « militaires, en reconnaissance de toutes les « preuves d'estime, d'attachement, de prévenance « et de zèle que j'ai été assez heureux de donner « au régiment de Guyenne depuis plusieurs « années, et surtout dans cette dernière circons-« tance. »
Le maire se sépara alors de ces braves militaires, qui lui donnèrent des marques de leur attachement et de leur reconnaissance, ét dit à MM. les officiers présents : « Il n'y a plus ris-« que à proclamer la loi martiale ; le régiment « me paraît parfaitement disposé : je vais à « l'hôtel de ville; au premier attroupement je « proclame la loi martiale ; et si j'ai besoin de « renfort pour la faire exécuter, je compte sur « vous et je réclamerai votre secours. »
Le maire aperçoit en revenant à l'hôtel de ville quelques groupes de citoyens sans armes ; il les prie de se séparer; on obéit sur-le-champ. Bientôt il apprenti que les inquiétudes recommencent, qu'il se forme quelques nouveaux attroupements dans les faubourgs. Il convoque aussitôt le conseil général de la commune. Il lait avertir le colonel de la légion de lui envoyer la compagnie n° 25, dont le capitaine est logé près de l'hôtel de ville; Ge digne Citoyen et tous les membres de sa compagnie, avaient bien secondé le dimanche par leur zèle, leur prudence et leur activité, les mesures circonspectes de MM. les officiers municipaux.
Le corps municipal, d'après le réquisitoire du procureur de la commune, décide unanimement qu'il y a lieu de proclamer la loi martiale.
En conséquence, le drapeau rouge est déployé sur le balcon de l'hôtel de Ville, et l'on publie à haute voix, dans toutes les rues, carrefours et sur toutes les places de la ville et de ses faubourgs, la proclamation suivante :
« Sur le réquisitoire de M. Vidal) procureur de « la commune* qui a exposé que la tranquillité « publique était en péril;
« Le corps municipal déclare que la loi martiale « est en vigueur; que la force militaire va être « déployée, qu'à l'instant le drapeau rouge sers » exposé à la principale fenêtré de l'hôtel de « Ville; et porté dans tontes les rues et Carrefours « de la ville, pour donner avis que la loi martiale t est proclamée, que tous àttroupemehts sont a criminels, et que tous les bons citoyens aient « à se retirer tranquillement chez eux.
« Délibéré à Nîmes le 4 mai 1790* & dix heures avant midi»
« Ont signé : le baron de Marguerittes, maire ; Murgeas, Gas, Former, Aigon, Carrières, Lieùtier, Laporte, Razoux, Gaillard, officiers municipaux ; Vidal, procureur de ta commune ; Boyer, substitut, Berdincq, secrétaire-greffier.
« Gollationné; Berdincq, secrétaire-greffier « »
Le maire, avant chaque proclamation, adressait aux citoyens une exhortation touchante et paternelle; la voit de la raison et dé l'humanité, toujours si puissantès, quand les premiers instants de l'effervescence générale sont passés, l'affliction peinte sur les visages des officiers municipaux, leur vive sensibilité, et sdrtout le souvenjr de ( ancienne union, produisirent le plus grand effet.; les attroupements cessèrent; les citoyens rendus à eux-mêmes éprouvèrent les regrets les plus vifs, et chacun versa des larmes sur ce c[ui s était passé.
MM. les officiers municipaux n'avaient négligé aucun moyen,pour réconcilier ensemble les citoyens et les soldats du régiment de Guyenne. Dès le matin ils avaient invité quelques capitaines èt d'anciens militaires, retirés du service, et sous-officiers dans la légion, à porter des paroles de paix, et à concerter avec les sous-offi-ciers du régimént de Guyenne les moyens: de faire rénaître l'union et la fraternité.
Leurs soiiis ne furent pas infructueux; après quelques détharcbes amicales de part et d'au're les officiers et soldats de Guyenne, les officiers et volontaires de la légion, les citoyens de toutes, les classes, mêles les uns avec.lës autres devant* les casernes, s^embrassèrent fraternellement, et se tenant par la main, au nombre de 4,000 au moins, et successivement au nombre de 10 à 12,000, ils dirigèrent, en dansant et au son des instruments, leur marche vers l'hôtel du maire,, qu'ils allèrent tous remercier de ses soins infatigables pour ramener la paix et la concorde ; celui-ci descendit en faisant la chaîne avec eux, Il embrassa M. le lieutenant-colonel t plusieurs soldats, sous-oificiers et citoyens, au bruit des applaudissements d'une multitude immense, et des cris multiplié» de yive le roi! Vive la nation ! Vive la loi ! Vive le maire! Vive le régiment de Guyenne! Vive l'union!
Le maire, après avoir suivi en dansant cette troupe joyeuse, jusque sous la fontaine, reçut en s'en séparant des preuves non équivoques de l'amour et de la reconnaissance publique ; il se rendit sur-le-champ à l'hôtel de ville, et trouva MM. les officiers municipaux à dresser ie procès-verbal suivant :
Du
« Nous" officiers municipaux soussignés étant
« encore assemblés à 3 heures après-midi, dans l'hôtel de ville, poUr recevoir les plaintes des « différente citoyens, et écrire à M. le président « de l'Asseihblée nationale ët aux ministres, sur « ce qui s'était passé la Veillé et dans lé courant « de la journée, on éât Venu nous annoncer fc qu'tirte fbule immense de citoyens réUnig sur « la place dés éasei-nés, Venaient de se réconcilier « ëvec les soldats et sous-officiefs du régitnent « de Guyenne. Enchantés de la paik qu'ils ve-« fiaient dé sê jurer èntre eux, lié s'embrassaient, a dânsaierit,et lësCris de : vive le roi, viveid nation, « ViVé là loi, vive le maire, vive le régiment de « Guyenne* vive l'union, ëitrêmetoent multipliés, « S'élevaient dans les airs. Alors, nous, maire, a acCOmpà^né de MM. les officiers municipaux, « du substitut du procureur de la Communë de M. ie lieutenant-colonel du régiment de «i Guyenne et de plusieurs officiers de ce irégi-« ment, âVbhS fàit enlever le drapeau rouge, « auquel fidtis avons fait substituer aussitôt lé « drapeau blàhc. Le peuple, en le voyant a poussét des crié de joie, et a renouvelé les acclamations « de : Vive le roi, vive Id rtàtion, et il a demandé « une illumination générale, qui a été proclamée « sur-le-champ.
« Ensuite nods avons Clbë les lettrés ci-dessus « mentionnées, et av.ons du tout ci-dessus dressé « le présent procès-verbal, que nous avons signé : « Lé baron bE Marguerittes, thâifë ; Murgeas, « PontiER, Bëlmont, grands officiers munici- paux; Gabrières, officier municipal; Fornier, Officier municipal; GaS, officier municipal; « LiEtiïiN, Officier municipal; BOyEr, Substitut; « BerDiNcQ, sëcrétàiré-greffier.
Extrait des registres de l'hûtél commun de la ville de Nîmes et collationné sur l'original.
BërdïNcq, secrétaire-greffier.
Il résulte de ce procès-verbal que, le 4 mai, lës officiers municipaux étaient occupés à rendre compte, à M. ie président de l'Assemblée et aux ministres (comme ils l'avaient fait la veille), des événements arrivés à Nimes les 2, 3 ët 4 mai.
Il résulte dés Cotes mises dans les bureaux de l'Assemblée, qUe Ces détails sont parvenus exactement à leur adresse les 9 et 10 mai, puisqu'on voit eu tête : Reçu le 9, reçu le 10; à lire.
Et cependant, par quelle fatalité ces pièces inté-ressantes,ainsi cotées, adressées à M* le président de l'AsSembiéë, n'ont-elles pas été mises sous les yeux des représentants de la nation avant le décret du 11 au soir, qui mande le maire de Nîmes à la barre pour rendre corhpte de sa conduite et de celle de la municipalité!
Par quelle futalité n'a-t-on lu,le 11,que l'adresse du club dénonciateur dd 4 mai, qui ne parle pas de la réconciliation, et laisse-t-on de côté les détails, envoyés lë même jour, 4 mai, par les officiers municipaux qui annonçaient à l'Assemblée que le calme était rétabli par les Soins infatigables du maire !
Ge n'était pas, sans doute, potlr donner occa^-sion à un honorable membre de dire : «Comment « qualifier l'insouciance de la municipalité, au « moment où il se passe de pareils événements? « Nous les apprenons, non par le maire, mais par « un club patriotique. Je demande si le courrier « de la municipalité n'aurait pas dû précéder « tous les autres? Je demande, dis-je, comment « les amis de la paix peuvent excuser une pa-« réille conduite?
« Je conclus én disânt qtië l'AsseiHbléë a lë
» droit Hé mander à la barre le maire de Nîmes, « et qu'il y a preuve suffisante pour lui ordonner « de rendre compte de sa conduite, «
L'avis fut adopté..... Une dénonciation, sans pièces justificatives* sans légalisation, sans aucune tnarqUe d'authenticité, a done paru une preuve suffisante pour mander à la barre un représentant de la nation, le maire d'ùne cité importante, la huitième ville du royaume, sans ordonner préalablement la lecture des faits justificatifs adressés par ce même maire, courrier par courrier, et parvenus, deux jours avant le décret, à M. le Président de l'Assemblée nationale,
Il est essentiel d'observer (jue le club dé Nîmes, gui dénonce à l'Assemblée des faits qui n'Ont jamais existé, tels que la substitution de la cocarde blanche à ia cocarde nationale (1), Utt déjeuner donné par le maire (2), les domestiques ilU maire poursuivant à coups de pierre lés braves soldats du régiment de Guyehne (3)» ne parle pa^ de lâ réconciliation faite à trois heures après midi, quoique le courrier ne parte qu'à si* heures du soir.
Le club s'e?t contents d'envoyer le lendemain, 5 inai, deux pieces que 1'on avuit, dit-il, oubli£ d'insen-r la veille, etdont 1'une est une leitre rion diit^e, sign£e par le president et par les secre- taires, dans laquellesetrouventcesaveuxfernar- quables: « Que Ton avait vu avec beaucoup de « surprise des soldats de Guyenne, deslegion- « nales de plusieurs COnipfigriie3 et un grand « nombre de citoye s dansint ensemble. Nous « avons entendu les cris de : tfive le roi et de vive « la nation! M. de Bonnes et M. le maire les pr6- « cediaient. Nous ne pouvons vou^ donner aucune « notion sur les causes de ct lte reuuiun subile.»
0n croit sans peitie que certaines personnes qui avaient erovoqueeti xcite lesfioldatt dfeGnyenne ii nialtraiter leu re conritoyen?, otit vu avec bean- coup de surprise la reunion amicale des soldals de Guvenne, des legionnaires et des citoyens.
Mais pourquoi ne pas convenir qUe la Visite faite le matin, par lé maire, et soh discours aux sOUs-officierS ont été la principale CaUSe du raccommodement ? Le fait était notoire et public.
La soirée fut employée tout entière à danser; à se réjouir : là ville fut illuminé1, l'on fit des feux de joie dans la plupart des rues, on chanta des couplets à la louange du maire, des officiers municipaux et du régiment de Guyenne. Ghactin se félicitait, on s'embrassait, et cette journée fut l'époque heuréuSë de la réconciliation. .
Cependant les patrôuijles furént doublées pén-darit la nuit, et lés officiers municipaux parcoururent à leur tête leâ divers quartiers de la ville pour empêcher que les transports même de la joie ne devinssent dangereux: tout së passa dans l'ordre et l'allégresse.
Du mercrèûi 5 niai.
Le premier soin des officiers municipaux fut d'aller visiter et recommander à l'hôtel-Dieu le grenadier du régiment de Guyenne, blessé au ras d'un coup de feu. Le maire lui offrit de sa maison tout ce qui pourrait hâter sa convalescence, et l'assura que si, par malheui4, il lui restait quelque difficulté à se servir de son bras, la commune se l'attacherait à perpétuité. Le grenadier et ses camarades présents furent Sensibles à cette démarche. Malheureusement la plaie prit ensuite une mauvaise tournure; une humeur àcre augmenta le danger, et l'infortuné périt le septième jour, malgré les soins les plus actifs et les plu s éclairés. Il a été la seule victime que l'humanité ait eu â regretter à cette époque, et malgré l'appareil effrayant des plaies occasionnées par les coups de^ sabre ou par les coups de pierre, aucun autre individu n'a été blessé ni mortellement ni dangereusement.
Le même îour, MM. ies sous-officiers du ré-: giment de Guyenne et de la légion, vinrent au son des instruments faire visite h MM. les officiers municipaux4 Le cortège étant trop nombreux pour contenir dans les salles de l'hôtel de ville, le maire parut sur le balcon, et le sieur Ramond, sergent-major du régiment de Guyenne, portant la parole au nom de tous, dans la place publique, remercia spécialement le maire de ses soins actifs et vigilants, pour le retour de la paix et de là concorde:
Le même jour, le conseil générai de la commune, pour cimenter de plus en plus l'union, décerna une médaille civique au nommé Gava-non, soMat du rêgimeht de Guyenne, qui avait sâuvé un enfânt prêt à se noyer. Les officiers municipaux le menèrent dans leur lOgé à la comédie, avec le jeune citoyen dont il avait conservé les jours. On représentait une comédie nouvelle, en vaudeville, intitulée : les Fêtes n\-moises, OU l'Heureuse RécouCili itibn; dans laquelle on ne cesse de faire l'éloge des magistrats, du régiment de Guyenne, de son respectable chef, et du maire. Le couplet qui termine la pièce fait allusion à l'action courageuse du sieUr Gavanon, et l'actrice ayant présenté une couronne au maire, celui-ci la plaça sur la tête du sieur Gavanon.
Cette pièce a été redemandée généralement, et représentée une secondé fois, à lâ même époque où le décret de l'Assemblée nationale mandait le maire de Nîmes à la barré.
Du jeudi 6 mai.
Là tranquillité étant rétablie, et la paix con-^ solidéé, lë maire annonce à ses collègues son
départ très prochain pour la capitale, où il va reprendre son poste dans l'Assemblée des représentants de la nation.
Le conseil général de la commune prend la délibération suivante :
« Du jeudi, sixième mai 1790, heure de trois « après midi, le conseil général de la commune, «assemblé dans la salle de l'hôtel de ville, et c présidé par M. Murgeas, premier officier mu-« nicipal, en l'absence de M. le maire.
« M. Murgeas, président, a dit : « La situation « très fâcheuse où la ville s'est trouvée dimanche, « lundi et mardi dernier; le courage et la sa-« gesse avec lesquels, unissant la modération à « la fermeté, M. le baron de Marguerittes, maire, « est parvenu à ramener la tranquillité; les « craintes que plusieurs indices pourraient ins-« pirer sur sa durée, sont autant de motifs pres-« sants pour engager le conseil général de la « commune à faire différer le départ de M. le « maire, puisque le salut des citoyens peut en * dépendre^ le peuple paraissant d'ailleurs dé-« terminé à s'y opposer; requérant qu'il en soit « délibéré.
« M. le procureur de la commune entendu, le « conseil général considérant que ce n'est qu'à « la conduite sage et mesurée de M. le maire « que les citoyens de cette ville doivent le re-« tour de la paix et la sécurité dont ils jouis-« sent; que rien ne peut les affermir davantage « que la présence de ce digne chef, dont les «vertus les ont produites; persuadé que l'As-« semblée nationale verra avec ce vît intérêt « qu'elle prend à la conservation du peuple, un « retard qui l'a uniquement pour motif, le vœu « de ce même peuple étant toujours à considérer; « il a de nouveau, et plus fort, unanimement « délibéré de supplier l'Assemblée nationale d'ac-« corder un second congé à M. le maire; et, « néanmoins, de l'engager par tous les motifs « de patriotisme qu'il a manifestés avec tant « d'éne gie et de succès, de vouloir bien se « rendre aux vœux du peuple et du conseil gé-« néral, en différant son départ jusques à la ré-« ponse de l'Assemblée nationale.
« Délibéré, de plus, qu'extrait de la présente « délibération sera adressé à M. le Président de « l'Assemblée nationale, et qu'un autre extrait « en sera présenté à M. le maire. »
Extrait des registres de Vhôtel commun de la ville de Nîmes, et collationné sur Voriginal, par nous secrétaire-greffier de la municipalité, soussigné .
Berdincq.
Le lendemain, 7, était le jour indiqué pour les assemblées primaires des 13 sections de la ville et de sa banlieue.
MM. les commissaires du roi au département du Gard engagèrent le maire à ne pas s'absenter de la ville pendant la nomination des électeurs, et lui écrivirent en lui faisant part de quelques difficultés survenues dans la section ii° 2, pour le prier de rapporter sa vigilance auprès de cette assemblée.
Ënlin, la nomination des 43 élections fut achevée sans trouble le dimanche 9; 15 membres du conseil réunirent la très grande pluralité des voix; ce qui prouve invinciblement le vœu du plus grand nombre des citoyens actifs de Nîmes, et qu'ils rerident anx officiers municipaux la justice qui leur est due. Ce qui prouve que les allégations hasardées par le membre du club à
l'époque des assemblées primaires, n'ont pas produit (d u moins a Nîmes où les faits sont connus) l'effet qu'ils en attendaient ;ce qui prouve enfin, d'une manière irrésistible, que la cause véritable des divisions qui ont agité la ville de Nîmes, est la prétention du plus petit nombre de parvenir par toutes sortes de moyens, à faire la loi au plus grand; ce qui serait un peu contraire à la Constitution et aux décrets de l'Assemblée.
Le maire instruit des vœux du peuple et du conseil général de la commune pour que son départ fût différé jusqu'à la réponse de l'Assemblée nationale, mais empressé de reprendre son poste dans la capitale, fit partir secrètement et dans la nuit du 10, une voiture qu'il avait louée pour mieux cacher son départ; elle fut arrêtée par deux patrouilles qui la laissèrent passer, ne la reconnaissant pas pour appartenir au maire: d'un antre côté le peuple observait les pas de celui qu'il croyait utile d sa conservation (ce sont ses propres expressions) (1). Pour se dérober à cet amour et à cet empressement, le maire sort de son hôtel de grand matin, le 11, jour de marché. Il visite successivement et suivant son usage, les étaux de boucherie, les poids des revendeurs, les différentes qualités de pain, plusieurs marchés. Il traverse, en remplissant les fonctions municipales, la ville et le faubourg de Richelieu, qui aboutit au chemin de Lyon. Il joint à pied une de ses voitures qui le conduit à 4 lieues. Il prend la poste et se rend en diligence dans la capitale. .
Le maire avait laissé en partant une lettre (2) pour le conseil général de la commune, dans laquelle il prévenait MM. ses collègues de son départ, et des motifs qui l'avaient contraint d'en faire un mystère à tout le monde.
La lecture de cette lettre donna lieu à une nouvelle délibération dans laquelle le conseil général de la commune réitéra ses regrets sur l'absence du maire, et la demande d'un nouveau congé pour lui.
Enfin, le 14 mai, les citoyens actifs composant le club de Nîmes, ont dénoncé à la municipalité, par une pétition signée d'un grand nombre de membres, qu'il se fabriquait depuis plusieurs semaines, chez le sieur Goeffé, serrurier,et ailleurs, des fourches, armes perfides et prohibées, qui se transportent en pleiu jour par centaines, lis ont dénoncé également que malgré l'ordonnance des officiers municipaux, qui interdit tout autre cocarde que la nationale, il s'en prépare un grand nombre de noires, surmontées de croix blanches.
Ils ajoutent : « Nous vous dénonçons cet événement qui ne peut que faire présumer de coupables desseins, et qui est une infraction manifeste à la loi. »
Lecture faite de cette pétition en présence de MM. d'Arlhac et Salles, députés du club et sur le réquisitoire du procureur de la commune, le corps municipal a interpellé MM. les députés de lui déclarer qui a fait les cocardes noires énoncées dans la pétition, ou qui les a portées, ou a qui on lésa vues, ou de qui ils liennent qu'il existe de pareilles cocardes.
Ces messieurs déclarèrent qu'ayant rempli leur mission, ils demandaient une demi-heure pour s'informer des membres composant l'A3semblée, des renseignéments sur des interpellations qui leur étaient faites..;.
Ces messieurs, sortis et rentrés un quart d'heure après, ont déclaré que les citoyens qui avaient signé la pétition s'en référaient à son contenu, et qu'ils n'étaient pas chargés de dire autre chose. Ils ont signé, de ce requis, après avoir demandé un extrait.
Il est essentiel de faire observer que M.Aubary, fabricant d'étolïes et membre du club, est un des signataires dans la pétition sur la cocarde noire.
Le corps municipal a délibéré sur-le-champ que la pétition et le procès-verbal seraient imprimés; que messieurs les officiers municipaux se transporteraient de suite chez le sieur Goeflé pour constater les faits dénoncés dans la pétition. Il a sommé tous les citoyens qui avaient connaissance qu'il eût été fait des cocardes noires surmontées d'une croix blanche, de venir déclarer au corps municipal, qui les a faites, par qui elles ont été portées, §t de qui ils tiennent qu'il en ait été lait ou porté.
Enfin les défenses portées dans la proclamation du 27 avril, concernant les cocardes qui ne sont pas aux couleurs de la nation, sont renouvelées.
Il résulte de ce procès-verbal, fait le 15, qu'en exécution de la délibération de la veille, pour découvrir s'il existe des cocardes noires surmontées d'une croix blanche, qui les a faites, commandées ou portées.
Un officier municipal et le procureur de la commune se transportèrent dans la boutique du sieur Vessière, fabricant de bas,.quiinterpellé de déclarer s'il a connaissance des cocardes énoncées dans la p tition, déclare : « qu'hier 14 « (date de la pétition), à 9 heures du matin, le « commis du sieur Aubary, fabricant de bou-« rettes, vis-à-vis le grand cou veut, membre du « club établi dans l'ancienne salle de spectacle « de Nîmes, lui commanda, de l'ordre de ce uer-« nier, de lui faire une cocarde noire surmontée » d'une croix de basin blanc ; que ledit commis « attendit que la cocarde fut faite, laquelle lui « fut remise moyennant 10 s. 6 d. »
Le mè ne jour, à 5 heures du soir, le sieur Avy, commis chez le sieur Aubary, mandé venir à la maison commune, interpellé de déclarer si, hier matin, il ne commanda pas au sieur Vessière une cocarde surmontée d'une croix de basin blanc, a déclaré : « qu'hier, à environ 9 heure $ « du matin, il fut dema der une cocarde audit « Vessière, qui lui en présenta de plusieurs coupleurs, emre autres une noire ; que ledit sieur « Avy lui dit qu'il ne voulait pas de celle-là, et « lui montrant par signe sur le plat de la main « une croix ; que ledit Vessière lui répondit qu'il « attacherait la croix blanche sur la cocarde « noire ; ce qu'il fit à l'instant et lui délivra « ladite cocarde pour laquelle Avy lui paya « 10 sols 1/2. »
Le procès-verbal,"la pétition et la délibération du corps municipal ont été adressés à M. le président de l'As, emblée nationale, avec une délibération et une adresse du conseil gé iéral de la commune, du 17 mai dernier, et toutes ces pièces sont remises depuis longtemps au comité des recherches. Mais on n'a lu jusqu'à présent que les déuonciatious du club, et non les délibérations et adresses du conseil général de la commune.
Il résulte des pièces susdites, qu'en même temps que les membres du cliib dénonçaientà la municipalité l'existence des cocardes noires surmontées d'une croix branche, un membre du club avait fait comman 1er, retirer et payer la seule
de ces cocardes dont on ait pu avoir connaissance.
L'existence avérée de ce fait, prouve quelle croyance on doit ajouter aux placards et antres plaintes et accusations qui ne sont appuyées d'aucune preuve légale.
Tels sont les faits, tel a été l'ordre de choses sur ce qui touche personnellement le maire (1) et la municipalité de Nîmes jusqu'au 18 mai.
Les pièces probantes sont déposées au comité des recherches, et ne pourront laisser aucun doute sur la justification des officiers municipaux.
ADRESSE DU CLUB DES AMIS DE LA CONSTITUTION DE NÎMES A L'ASSEMBLÉE NATIONALE.
Du
Messieurs, le club des amis de la Constitution, composé de 400 citoyens actifs, chez qui la diversité des opiuions religieuses se confond dans le plus pur patriotisme, a eu l'honneur de vous prés uter, le 27 avril dernier, une adresse sur le règlement du conseil général de commune pour la légion nimoise. Nous en attendons l'effet avec une inquiète impatience.
Les événements n'ont que trop justifié nos craintes. Notre ville est depuis deux jours dans un soulèvement géuéral. Déjà ie sang coule et les bous cioyeus sont à la merci des complots des malveillants. Nous allons vous faire l'exposé simple et vrai de tout ce qui s'est passé depuis le 17 avril jusqu'à ce jour.
La majorité de MM. les officiers de la légion ne reconnaissant pas la légalité du règlement municipal, s'y soumit cependant provisoirement et sans protestation, ainsi que le porte le mémoire qu'elle vous a adressé.
Cet acte ue prudence semblait devoir maintenir la paix dans la milice bourgeoise et parmi les ha-bilauts. Vaine etpérance 1 Depuis la publication dece règlement, la division n'a cesse de s'accroître de légionnaire à légionnaire et de citoyen à citoyen .
Les cris indécents contre la nation, que nous vous avons dénoncés, furent le signai d'une entreprise condamnable de la part de quelques lé-giounaires. Dés le lendemain ils substituèrent à la cocarde nationale la cocarde blaucne, et interprétant criumiellemeut, par leurs discours, celte nurqued'uu ralliement particulier, ils cherchaient à mettre en opposition, dans l'esprit du peuple, l'Assemblée uatiouale etle rui. Notre municipalité, léuioiu^comiue nousuecet acte séditieux, et ne pouvant en ignorer tout le danger, au lieu d'arrêter le mai ouus sa source, s est occupée d'uue délibération qu'elle a portee, le 22 du mois
d'avril, relative à une feuille imprimée à Paris. Nous avons l'honneur de vous l'envoyer, Messieurs, et vous y verrez qu'affectant de ne pas croire des faits publiquement connus ici, elle les désavoue, pour n'être pa« oblig e de sévir contre eux.
Etonné de cetie conduite, le club des amis de la Constitution se hâta dé lui présenter la pétition ci-jointe.
Nous y mettions sous ses Veux combien il était insuffisant de former vœjii pour la paix, et déplacé de fixer son attention sur un écrit fait au loin, tandis que» dans nos pi opres foyers, des libelles de toute espèce, une lëuille infâme, sous le titre dMi/is important à l'armée française, des qualifications dangereuses, signal d'une division certaine, troublaient la tranquillité publique, çt çi nous r|i>qs contentâmes d'y indiquer la diversité des Cocarde?, ce fut par ménagement pour des magistrats que nous Vjoql.ipup rappeler Vtjw devoir instant; et pssgrtf îel, sans eh trop marquer l'intention, 'et en 'effet leur vigilance aurait dû sans doute prévenir un désordre que leur aitforjté seule pouvait alors empêcher de devenir funeste.
Cependant, depuis le 17 avril au 3 mai, dans l'espace de six jours, aucun acte du corps muni" cipal n'a répondu à ii* demande de ces citoyens,
Pendant une inaction aussi condamnable, les eogardes blanches se sont multipliées. Enfin, dimanche 2, dès Je matin, quelques légionnaires conduits par leurs capitaines, et portant cette nouvelle cocarde, allèrent aux ca?erne.s demander au régiment de Guyenne des tambours et ies baudriers, pour une promenade en campagne.
Le sergent à qui ils s'adressèrent leur observa qu'il pe pouvait pas leg rt connaître cojnme gardes nationales, puisqu'ils portaient une marque qui n'était pas celle pe la nation, Ç'est celle du roi, répondirent-ils... Le roi, répljqu^ le bas* officier, porte et ordonne à tous les unitaires de sou royaume de porter la cocarde aux trois couleurs; vous n^tegdQQG P^s de la légion nùpoigp, Retirez-vous.
Dans le même moment se passait phez le maire une scè ie encore plus scandaleuse. La veille, deux compagnie*, où les gens séduits et égarés sont en grand nombre, avaient élevé un mai devant sa porte, et le maire les avait ras* semblés chez lui, à déjeuner, le dimanche.
Quelques-uns arrivent >û cocardes blanches,et le sentiment de la reconnaissance l'emportant sur celui de son devoir, il souffrit que ce signe antipirjotique fût gardé sous ses yeux, en se contentant de le désapprouver vaguement. Les cocardes lestèrent; élit g reparurent à la promenade du cours, rendea«vcus de tout le peuple eu cette saison.
Un soldat de Guyenne rencontre uq de ceux qui la portaient, l'invite & la quitter] il insiste : Non, je sqis aristocrate, Jui répondit-on. A ces mots, le soldat' indigné arrache la cocarde et la fouie aux pieds.
Des légionnaires du quartier de la Bourgade se rassemblent; le soldat appelle ses camarades à son secours: ie combat s'engage, les sabres sont levés. I§s pierres Vplefl ; pu Yoit d^s soldats de la même légion se battre les uus contre (es autres; l'alarme se répand dans la ville! On court eu hâte avertir le corps municipal ; il était à signer la délibération sur les cocardes blanches, et une proclamation prochaine pour les interdire fut annoncée. Cependant il se rend sur les lieux, et, témoin de ce triste spectacle, il a peine à
séparer les combattants et à dissiper cette multitude acharnée.
La nuit était Burvenue il fallait veiller à la sûreté des citoyens; les ordres furent donnés, les patrouilles doublées; mais, au milieu de ces soins relatifs au bou ordre tt à la paix, on vit avec surprise que la compagnie n» 31, la même dont le capitaine et quelques légionnaires étaient allés le matin aux casernes avec des cocardes blanches, et l'une de celles qui avaient planté le mai, fut choisie par le maire pour aider à la garde de la nuit, quoique ce ne fût pas son tour de service; il y eufmême sur les 10 heures du soir une trentaine d'hommes à cocardes blanches qui vinrent narguer et insulter les sçntinelles à la porte de la maisop communeeelle du maire est gardée on ce moment jour et nuit par ces compagnies malveillante* ; ce sont ses suppôts ordinaires; ses kdou estiqûes mêmes se mêlent ayee eux : on en a vu poursuivre avec des pierres les braves soldats du régiment de Guyenne; jl semble autoriser leurs démarches les piuS dangereuses. La nuit, des hommes en grand nombre, éclaifés par des torches, sans chef, sans ordre, se permettent de courir les nies, armés de piques, de bâtons, de fusils, jle sabres, de haches, et présentent plutôt l'aspect d'une bande de brigand^ que d'une troupe de soldais citoyens. Voici le troisième jour que cet affreux désordre duré, et la proclamation si longtemps méditée n'a été affichée que èe matjn 4 mai, quoique datée du 29 avril; les troupes n'ont point été requises, leuriseryiee même a été refusé par le maire, et la loi martiale n'a point été publiée. Cependant il a vu autour de lui immoler des citoyens, tirer des coups de fusil ; 2 soldats du régiment de Guyenne ont é|é blessés, l'un deux a le bras fracasse: consignés dans leurs casernés par la prudence de M. de Bonnes-Lesdignièies, leur chef, aussi digne citoyen que respectable militaire, ils ne peuvent plus contenir leur indignation; leur patriotisme fait lp désespoir et la rage de nos 'fanatiques aristocrates qui voudraient présenter comme un crime l'intimité qui règne entre ces bravés soldats et nos bons citoyens. Ce n'est m'â la sollicitation instante du chef du régiment dé Guyenne que la loi martiale vient enfin d'être publiée.
La compagnie de dragons volontaires offrant leurs services aux officiers municipaux et leur demandant un puiut de ralliement aux casernes, qu'ils ne pourraient trbpver ans nos s étroites j M, le maire a répondu : Point de voisinage ayeè le régiment de Guyenne. Ce sont de braves gens dont le voisinage ne saurait être à craindre, réplique le diagop... H ne fay,t rien avoir à faire avec eux, ce ipt le dernier mot du maire.
Il né paraît pas douteux que le dimanche ! 2 mai fut le jour fixé à l'avance pour causer un | grand désordre dans la ville ; lé bruit en courait | Sourdement; on se le disait à l'oreille, et chàêuni attendant de moment en moment rprdpnuaqce demandée â la municipalité, craiguait d'exciter par une démarche nouvelle le troubhe qu'il désirait de voir prévenir. Le but des maJinieptîonhès n'est pas moins évident que Igïirs moyens odieux"! La ville est en proie aux efforts de 2 aristocraties, religieuse et politique, hautement déclarées par les uns. et bassement fljssimulées par les autres ; la délibération prise api Pénitent^ en est une preuve. Quelques prêtres', très dignes de seconder le véèu des 'malveillants, abusant de Ta çrédulué aveugle de cetté classe aussi respectable par ses travaux, que dangereuse par son ignorance, ne
croient pas acheter trop cher la conservation de leurs biens par des meurtres et des ravages.
Vous seuls, Messieurs, pouvez en arrêter le cours et ramener l'ordre dans notre patrie; il tient essentiellement à l'exercice du pouvoir municipal dans le moment même; il tient au séjour du régiment de Guyenne, qu'à force de manœuvres et d'impostures on voudrait éloigner de nous. Nous avons l'honneur de vous envoyer la proclamation du corps municipal, datée du 29 avril, et publiée le 4 mai. Vous y verrez, dans la réunion de plusieurs objets étrangers, le peu d'importance qu'il attache à ceux qui font le malheur de notre ville,
Nous ne ferons qu'une observation sur tous ces faits; c'est qu'ils se sput passés à la veille de nos assemblées primaires des corps administratifs et des départements.
Signé : Yigiêr Sarrasin, président, et plus de deux cents signatures.
Adresse a l'assemblée nationale faite au nom de Jl/itf. Du Roure, Razoux, Ferrand-Demissol, Pontier,Fornier et Grelleau,officiers municipaux, et Boyer, substitut de la commune de Nîmes.
Messieurs, les soussignés officiers municipaux de Nîmes, douloureusement affecté> des malheurs qui ont affligé leur patrie et des bruits calom-nieuxqu'on a répandus sur Jeur compte, supplient l'Assemblée nationale de vouloir bien écouter leurs justes réclamations.
Toujours religieux observateurs de leurs serments, toujours inviolablemeut attachés à la Constitution, avec quelle inquiétude n'ont-ils pas dû voir qu'un cherchait à les rendre odieux à la France entière 1 Cependant leur conduite patriotique semblait les mettre à l'abri de tuute imputation injurieuse; mais que ne peuvent pas l'intrigue, la vengeance et l'ambition déçue !
Vainement ils ont fait observer avec une scrupuleuse exactitude, et dès l'instant qu'ils ont paru, tous les décrets de l'Assemblée nationale; vainement ils ont offert une forte contribution patriotique ; ils ont fait une soumission de 3 millions (l) pour l'acquisition des bi> ns nationaux; vainement ils ont voulu favoriser par un nouvel établissement (2) la circulation des assignats; vainement ils sont parvenus à exécuter sans aucun trouble, malgré les efforts de quelques malveillants, l'inventaire des maisons religieuses en grand nombre à Nîmes (3). Rien n'a pu fermer la bouche à leurs détracteurs, qui, bravant jusqu'à la honte que doit faire naître un démenti fondé sur des faits et des pièces authentiques, n'ont pas craint de publier que des sentiments antipatriotiques animaient la municipalité de Nîmes, tandis qu'elle donnait les plus fortes preuves du patriotisme le plus pur.
A peine cette municipalité fut-elle installée, qu'on vit s'établir une société dont les chefs
irrités de n'avoir pu parvenir, malgré leurs intrigues, aux charges municipales, publiaient de tuus côtés que le but de leur institution était non seulement de surveiller, mais encore de contrarier les opérations des représentants de la commune : en effet ils n'oublient rien pour les inquiéter. Us faisaient pétitions sur pétitions; ils tenaient en sentinelle, depuis le matin jusqu'au soir, deux commissaires, dans le greffe de la commune, lesquels s'emparant des registres ou pour les compulser ou pour en faire des extraits, mettaient souvent les officiers municipaux dans le cas de les attendre.
Ce n'est pas tout encore; on les décriait, mais inutilement, auprès du peuple dont on ne faisait par là qu'accroîire la confiance; on les calomniait auprès des soldais; on suscitait contre eux des cabales et des émeutes: et lorsque dans celle du mois de mai, certains malveillants excitaient les soldats à vercer le sang de leurs concitoyens, un autre criait près de 1 hôtel de ville : « C'est le moment de couper la tête à M. le baron de Margue-rittes, maire (1) » ; ils répandaient t?u province, et surtout à Paris, des libelles incendiaires contre la municipalité (2); ils disaient, ils publiaient qu'ils ne seraient contents que quand elle serait destituée, et ils employaient contre elle des intrigues, des machinations affreuses. Ainsi on la calomniait sourdement dans une correspondance avec les clubs du royaume; ainsi on faisait arracher la cocarde blanche à des gens qui n'en avaient jamais porté d'autres, parce que cette cocarde avait été dès le principe, eu novembre 1788, le signal du p. triotisme et de la liberté (fait attesté par 60 officiers de la légion) ; ainsi un membre du club inventait et fai.-ait fabriquer des cocardes noires surmontées d'une croix blanche (3), pour avoir lieu d'accuser les catholiques de youloir renouveler les croisades; ainsi on déclamait avec fureur contre un capitaine de la légion qui avait donné quelques fourches aux soldats de sa compagnie dépourvus d'armes, tandis que, d'un autre côté, on en commandait par centaines, de même que de longues cartouches de fer-blanc au bout desquelles étaient soudées des halles meurtrières (4); ainsi, lors de l'assemblée électorale, on circonvint les électeurs, on calomnia auprès d'eux les représentants de la coin m une, parce qu'ils avaient prévu et prévenu de funestes complots, et on poussa l'animosité jusqu'au point de les insulter en pleine assemblée; aimi on engagea ie district de Sommières à former un camp lors de la
tenue de cette assemblée (1); ainsi les dragons i de la garde nationale, piesque tous membres du club, répondirent à quelques propos inconsidérés par une décharge,et c'est par là que commencèrent les scènes de sang, de carnage et d'horreur du mois de juin dernier.
Cet acharnement, ces excès réitérés avaient fait naître depuis longtemps les plaintes des amis de la paix ; ils voyai nt avec douleur qu'on cherchait à la troubler. Un grand nombre de citoyens actifs (2) s'étaient assemblés le 20 avril, selon la forme prescrite par les décrets; ils avaient mis sous les yeux de la municipalité une pétition dans laquelle les membres du club étaient dénoncés comme des hommes qui, n'ayant que l'hypocrisie du patriotisme, ne tendaient à rien moins qu'à allumer le flambeau de la discorde et peut-être même celui de la GUERRE CIVILE.
Des cris d'indignation se firent alors entendre de toute part contre une association si fatale pour la tranquillité publique. On demandait instamment la suppression au moins provisoire de ce club perturbateur, et le peuple indigné se serait porté en foule pour empêcher ses assemblées," sans la vigilance continuelle des officiers municipaux qui préservèrent cette société de désagréments auxquels fut exposée dans la capitale et presque à la même époque une assemblée de citoyens, quoiqu'elle eût eu la précaution de se munir de l'approbation de la municipalité de Paris.
Si le club n'avait fait que calomnier le corps municipal, les magistrats intègres qui le composent auraient fermé les yeux sur des excès aussi impuissants que répréhentibles; mais la conduite de plui?ieurs(3) membres du club, lorsdes émeutes des premiers jours de roai, desconlre-patrouil.es faites de nuit avec des armes chargées, des coups de pistolet (4) tirés sur des groupes au milieu desquels les officiers municipaux s efforçaient de mettre la paix, et tant u'autres démarches (5) insubordonnées, dont on trouve les preuves dans les procès-verbaux dressés à cette époque, et depuis longtemps déposés au comité des recherches, forcèrent enfin, Je 27 mai, le corps municipal à dénoncer ces perturbateurs du repos public à l'Assemblée nationale.
Depuis longtemps ils avaient intéressé à leur cause le procureur au roi au présidial de Nîmes. Celui-ci s'était empressé de porter plainte, d'après la simple dénonciation de certaines personnes avec lesquelles il a des liaisons intimés, sur de prétendus délits commis dans le mois d'avril. 11 en lit autant sur une autre dénonciation récri-minatoire, relative aux troubles du mois de mai; et lorsque la municipalité lui indiqua, par l'en-
tremise du procureur de la commune, une foule de faits plus graves les uns que les autres; lorsque celui-ci lui communiqua un extrait de la délibération (1) prise à ce sujet par le conseil général de la commune, il n'y eut aucun égard.
Ce conseil craignant que si l'on négligeait de poursuivre cette procédure, les auteurs des émeutes du mois de mai ne demeurassent impunis, et qu'il l'en résultât de grands malheurs, chargea le procureur de la commune de faire un acte (2) au procureur du roi, pour le sommer de recevoir la dénonciation et lui indiquer les premiers témoins à entendre.
Le croirait-on,? Cet acte signifié le quinze mai (3) ne produisit aucun effet. Quel parti prendre en des circonstances si critiques? Réclamer la justice et l'autorité du roi, et c'est ce que firent h s représentants de la commune. M. le garde des sceaux, après avoir mis cette affaire sous les yeux du conseil (4), enjoignit au procureur du roi de recevoir la dénonciation, et manda au corps municipal : « Vous m'avez envoyé la déli-« bération du 17 de ce mois, qui a pour objet de. « vous plaindre du refus que vous fait le procu-« reur du roi d'instruire une procédure sur la « dénonciation du corps municipal. Je crois en « effet que ses motifs de résistance ne sont pas « très solides. Il ne me semble pas qu'il puisse « demander l'autorisation formelle du commis-« saire départi dans la province, ni insister dans « les circonstances présentes, sur l'application « d'un règlement purement fiscal. »
Nouvelle réclamation de la municipalité au commencement du mois de juin. Le procureur du roi feint d'obéir : mais sur 100 témoins, il n'en fait entendre que deux, et retire sa plainte.
Le motif secret de cette conduite se trouve peut-être expliqué par le procès-verbal, où plusieurs témoins déclarent que ce fut dans un jardin (5), que le procureur du roi garde pour son amusement, que s'assemblèrent en partie ceux qui causèrent les émeutes du mois de mai.
On sait qu'à cette époque la vigilance active du maire et des officiers municipaux rendit inutiles les efforts des malveillants, et par-
vint à rapprocher par une heureuse réconciliation les partis opposés (1).
Les seuls membres du club ne purent (2) dissimuler le mécontentement que leur ^ausa cette r éunion subite. Insr uits du procès-verbal dressé par les ofticiers municipaux, et des déclarations multipliées qui mettaient leur complot à découvert, ils s'assemblèrent, et résolurent de dénoncer à l'Assemblée nationale la conduite des magistrats dont la prévoyante fermeté avait fait avorter leur dessein favori, de dominer par la terreur dans les assemblées primaires qui devaient avoir lieu peu de jours après (3).
Les témoignages éclatants de l'allégresse publique et de la reconnaissance des citoyens envers les officiers municipaux, ne tirent qu'accroître les ressentiments des prétendus amis de la Constilutio i. Ils préparèrent dans le silence des moyens de maîtriser l'assemblée électorale et leur unique espoir fut de se dédommager,dans la formation du département et du district, de la prépondérance qu'ils n'avaient pu obtenir lors de l'élection des ofticiers municipaux.
Pour parvenir à ces fins, ils conçurent le projet de les fatiguer chaque jour par de nouvelles pétitions ; de les distraire de leurs importants travaux par des entreprises répréhensibles ; de les désunir s'il était possible et de les éloigner de la maison commune.
Les cruels événements du mois de juin, combinés d'avance, servirent parfaitement leur haine contre une municipalité dont l'aspect les importunait et qu'ils avaient fait vœu d'anéantir par toute sorte de moyens.
En effet, dès le 13 au soir, c'est-à-dire dès le commencement de la rixe survenue entre quelques légionnaires, les officiers municipaux furent proscrits et poursuivis : ils n'échappèrent à la mort que par des hasards miraculeux. On les empêcha de se réunir pour concerter leurs opérations ; on fit éprouver les plus affreux traitements à ceux qui, après la sortie de leurs collègues, étaient demeurés dans la maison commune pour la vérification des comptes.
L'un (4) d'entre eux, ministre des autels, fut contraint, par une foule de volontaires, de publier seul la loi martiale. Le drapeau fatal est mis entre ses mains; on le force de le porter lui-même; on l'insulte, on le frappe, on l'excède de coups, au point de lui faire vomir le sang. L'autre (5), traîné dans les rues comme un criminel, est menacé, maltraité ; un des gardes nationaux, touché de son sort, pare, heureusement pour lui, plusieurs coups de sabre et de baïonnette qui lui sont portés. Celui-ci (6) doit la vie à la maréchaussée qui vient à son secours. Celui-là (7) reçoit sur la main un coup de sabre dont il sera peut-être estropié toute sa vie. Un autre (8) est sur le point de subir le dernier supplice clans 1 hôtel de ville. Le procureur de la commune (9) échappe à mille dangers et voit plusieurs fois le
poignard levé sur son sein. Son substitut (1), jaloux de le remplacer, est poursuivi pendant plusieurs jours, il essuie huit coups de fusil à diverses reprises ; il tombe au milieu des cadavres et il ne doit son salut qu'à cette heureuse chute. M. de La Baulme, portant des paroles de paix aux étrangers arrivés en foule à l'esplanade, est chargé d'imprécations, les sabres et les baïonnettes sont tournés contre lui, et il ne peut se sauver qu'en rejoignant un collègue (2) qu'on s'efforçait de séparer de lui. M. Du Roure, voulant s'opposer au pillage du collège et protéger les jours du recteur, est sur le point d'être assassiné ; il ne cesse d'essuyer les menaces d'un légionnaire qui lui vante la beauté et la bonté de son sabre bien propre à faire sauter des têtes. On massacre sous ses yeux six infortunés, et ses instantes sollicitations ne peuvent leur épargner la mort. En un mot, toute la municipalité court les plus grands risques pendant cinq jours (3). Plusieurs de ses membres ne trouvent point d'asile. On va les chercher jusque dan3 leurs propres foyers, et l'on menace du pillage ceux qui pourraient vouloir les soustraire à la fureur de leurs ennemis. Ainsi s'exécuta le projet depuis longtemps arrêté de disperser le corps municipal pour s'emparer de son autorité et des rênes de l'administration.
On force les officiers municipaux à faire des réquisitions à chaque instant; on les consigne dans la maison commune; on leur promet que s'il survient de nouveaux troubles, ils seront mis en avant et seront les premières victimes ; on assassine leurs concitoyens sous les plus légers prétextes ; on en immole jusque dans les salles où ils se sont assemblés; on en désarme à leurs noms ; on en précipite un grand nombre dans des cachots. La raison a beau crier qu'il n'y a point de criminels; la vengeance veut des victimes. Que de massacres 1 que de pillages, que d'atrocités (4) ils virent commettre sans pouvoir les empêcher !
Des églises, des couvents, des maisons sont livrés au pillage, saccagés, détruits, et les maisons pillées n'appartiennent qu'à des catholiques I Cette remarque ne fait point ouvrir les yeux. On avait eu la perfide précaution de publier que les citoyens proscrits étaient des antipatriotes contre lequels les amis de la liberté ne pouvaient trop rigoureusement sévir.
Les brigands qui avaient suivi les troupes nationales commirent vraisemblablement tous ces désordres , et furent dirigés par des hommes qui n'échapperont pas sans doute à la rigueur des lois. La plupart des gardes nationaux étrangers, maintenant détrompés, voient avec une profonde douleur que leur préférence a pu autoriser des crimes prémédités, et ils s'aperçoivent, mais trop tard, que la proscription n'a enveloppé que ceux dont le sacrifice était réservé pour ces jours de vengeance; que ceux qui avaient dé- posé sur les émeutes du mois de mai; que ceux qu'on avait intérêt de détruire pour faire perdre la trace d'un procès trop fameux; que ceux qu'il
allait éloigner pour s'arroger tous les pouvoirs; que ceux en lin qu'on devait dispenser pour maîtriser les élections du département et du district. Telles sont les causes uniques du massacre du mois de juin. L'anti patriotisme en fut le prétexte (1) ; le désir de dominer, le motif, et la calomnie et le crime, les moyens dont on se servit pour parvenir à ces fins détestables.
Ainsi donc, d'après le refus du procureur du roi de faire entendre les témoins indiqués parles représentants de la commune; d'après la partialité qu'il a montrée dans celte procédure; d'après les assassinats et les proscriptions qui ont eu lieu contre ceux qui avaient fait connaître les auteurs des troubles du mois de mai; d'après les excès récemment eommis contre MM. Descombiès et Vigne, détenus prisonniers ; d'après l'inquisition exercée à Nîmes contre tout ce qui n'est pas dévoué au club, il est bien évident qu'il est impossible de rien statuer sur l'information faite dans celte ville.
D'ailleurs l'esprit de parti qui a désigné les tê^ moins, l'esprit de prévention ou de crainte qui a dirigé les magistrats, et surtout la nécessité que tout témoin puisse déposer avec sûreté pour sa personne, exigent que l'information soit recommencée dans une ville, si l'on veut peu éloignée de Nîmes, mais hors de son département, et dont les habitants et les gardes nationales aient donné l'exemple de la plus parfaite impar? tialité.
Amis de l'innocence opprimée et de la vérité, les représentants de la nation française rendront à nos infortunés concitoyens une justice écla^ tante. Ils daigneront accorder une puissante protection à ceux à qui la terreur ferme encore la bouche. Livrés depuis plusieurs mois à fa merci d'un parti puissant, ils sont trop effrayés pour oser faire entendre leurs voix tre nblantes et leurs réclamations. En vain ils se représentent quo têt ou tard la vérité triomphera, que tôt ou tard ils obtiendront justice, rien ne les rassure.
L'opprimé, contraint de courber son front humilié sous le sceptre de fer de .l'oppresseur, attend avec autant de droit que d'impatience qu'on lui présente enfin «ne main secourable. L'Assemblée nationale sera leur appui, nous osons le leur prédire; ils touchent au terme de leurs malheurs, et b.enlôt elle daignera déclarer que les informations commencées devaut les juges de Nîmes, concernant les troubles des mois de mai et de juin, demeureront comme non avenues.
Jïhl animent peut-on avoir fait et pourrait-on continuer ces informations dans une ville où un parti s'est rendu redoutable en usurpant toute l'autorité, en s'emparant de toutes les armes, de toutes les munitions; dans une ville où le pro-curturdu roi refuse de faire entendre des témoins, malgré les démarches réitérées et les ordres de M. le garde des sceaux; dans use ville
où le procureur du roi rejette les plaintes de la plupart des veuves (1) dont on a massacré les maris; dans une ville où l'on force les portes des prisons, ces asiles sacrés du malheur pour maltraiter un infortuné prévenu qu'on est sur le point de sacrifier; dans une ville où l'avocat de oe prévenu est menacé de la fatale lanterne s'il continue à le défendre; dans une vide où un malheureux est durement frappé par un fanatique pour avoir dit que ce prévenu est qn honnête homme, et où ce prétendu crime le fait mettre en prison sans autre forme de piocès, ainsi qu'y ont été mis avant lui 160 citoyens; dans une ville où l'on dicte des lois aux juges, et où leurs jours sont menacés pour avoir accordé l'élargissement d'un prisonnier légèrement ac-; cusé; dans une ville où cet accusé est obligé de se travestir pour échapper à la rage de ceux qui l'avaient fait priver de sa liberté; dans une ville, enfin, où le pouvoir arbitraire et la tyrannie, devancés parla terreur et cachés sous le masque du patriotisme, vont, le crime à la main, frapper tous COUX qu'ils croient contraires à leurs desseins pernicieux?
Dans Ges circonstances, et d'après ces considérations, les soussignés supplient l'Assemblée nationale de mettre un terme à ces excès ; ils la supplient d'ordonner, conformément aux décrets rendus pour Montauban le 26 juillet et Sctieies-tadt le 14 août, que l'information commencée devant les juges de Nimes, relativement aux troubles qui ont eu lieu dans cette ville pendant les mois de mai et de juin, demeure comme non avenue, et qu'il sera informé devant les juges de Monipellier ou autres, étrangers au départem ni du Gard, et à la diligence de la partie publique, de tous les événements arrivés à Nîmes les 2, 3, 4 mai, 13, 14, 16, 17 juin, ainsi que de tous ceux qui y sont relatifs, tant antérieurs que postérieurs^ auxdites époques, circonstances et dépendances ; à l'effet de quoi les pièces déposées au comité des recherches seront incessamment adressées à ladite partie publique.
Signé : BPyER, substitut du procureur de la commune, tant pour moi que pour mes collègues qui ont signé Ip ppqvoir ci-après dont l'original est entre mçs mains?
Nous soussignés, officiers municipaux de Nîmes, instruits que la calomnie ne cesse de nous déchirer auprès dfe l'Assemblée nationale ; qu'on n'a pas craint de noircir nos démarches les plus innocentes et même les plus louables ; qu'on a été jusqu'à supposer qye nous adhérons aux délibérations pr.ses par des catholiques assemblés dans les églises des Pénitents et des Jacobins, tandis que nous n'y avons eu aucune part, que nous les avons blâmées et que le silence que nous avons gardé à ce sujet n'a eu pour cause que la crainte bien fondée u'exeite? dés troubles dans une ville où régnait déjà une grande désu-
nipn entre différentes compagnies de la garde nationale. Intéressés à connaître toutes les inculpations clandestinement dirigées contre nous ; à nous justifier aux yeux de la nation et de ses augustes représentants, à dénoncer la pureté de nos principes, la loyauté de notre conduite, et à prouver que, fidèles à nos serments, nous nous sommes empressés d'exécuter et de faire exécuter les décrets de l'Assemhlie constituante, sanctionnés ou acceptés par le roi, nops officiers rpupicipaux, nommons et députons M. Boyér, notre collègue, substitut du procure r. de la commune, à l'effet de se rendre de suite à Pans, de nous y soutenir et défendre en corps ou en particulier auprès des députés de Nîmes à l'Assemblée nationale, de rendre compte dp notre franche adhésion à tous les décrets de cette auguste diète; des dangers que nous avons courus dans L ur exécution, de ceux auxquels nous somm* s exposés dans l'exercice continuel dp nos péoibles fondions pour lesquelles nous avons saciitié jusquUt nos plus chers intérêts, et en conséquence de faire tous manifestes, mémoires, adresses et tous autres écrits que M. Boyer jugera convenables et nécessaires pour mett e en évidence nos vrais principes, notre attaclr ment inviolable à la Constitution, nos vœux et notre patriotisme; enfui, de p'éseuier un tableau exact des iruubles qui ont agité notre ville, en remontant à leurs véritables causes.
Fait à Nlipes, le
Signé: Du Roure, Razoux, D. M. Former, Fen-rand-Demisaul, Pontier, Grelleau, officiers municipaux.
Extrait de l'acte signifié le 15 mai 17Q0 à la requête du proçureur de la camfnune de Nîmes à M. Brunei de La Bruyère, procureur du roi, en la, sénéchaussée et prèsidial de Nîmes.
A été exposé à M. le procureur du roi, qu'il ne pept Ignorer que le sièur Vidal "se 'présenta chez lui, h er 14 mai, à environ 9 heures du soir, pour lui remettre un pxtraft ep ïo'rmè de là délibération prise par le cùhsèirgéiiéral dé ia 'côoimune de Nîmes le 13 du mêuie mois, èt que sur son refus et l'insistance du procureur1 de la commune, ce dernier lui dit qu'il voyait avéc douleur que, dans une affaire aussi majeure, dés actes, d'huissier fussent provoqués, qu'il priait de nouveau M. le proçpreùr du roi de 'dresser procès-verbal" dé Cij gui venait de sç passer, sous son offre de le signer et de rapporter lé tout au cpnséif général dp la''commiiue : que M. le' procureur du ' roi à insisté en ajoutant que ledit sieur procureur de'la communié pouvait faire ce rapport verbâlemént ; aup ce 'dernier est sorti'dans cet état â environ midi èt demi ; et comme il désire de cprjstaièr tous lés faits Ci-dessus rappelés,' et de remplir ses fonctions avec autant d'exactitude" que dè zèle, à là requête dudit sièùr procureur de là cqîn-mpue, î af offert à "M." le procureur du ' roi lin extrait en forme'de la ^tjsdite dénonciation, àvèc"dfeiâVatioiiq'ii'ifTui qépoqçe fès faits cpn tenus en îcelj'e, 'qui sont YQue de? factieux projetèrent vers fin du papis derrjijèr d'exciter une querelle entre des citqyéMS, dés bas-officiers ét soldats du régiment de' Guyenne," sois' prétexte d'arracher à des volontaires1 des cocardes 'blanches qu'ils avaient toujours portées depuis la création de la légion.'
« Que quelques bas-officiers et soldats de ce régiment,'malheureusement séduits, furent disposés par des liqueurs fortes à se livrer, le sabre à la main, à celte violence, ce qui eut lieu le dimanche, deuxième mai, sur le grand cours,vers les six heures du soir.'
« Qu'au moment où l'action fut engagée, on tâcha d'attirer le régiment dans la querelle, en invitant les soldats àr sortir dès casernes et de la citadelle pour voler au secours de leurs camarades, et de les' rendre ainsi complices, à leur insu, du massacre projeté.
« Que des conspirateurs, postés dans les environs et armés, attendaient l'instant favorable pour se mêler parmi eux, et envelopper dans le massacre tous ceux dont ils voulaient se défaire.
« Que comptant sur des secours étrangers, sollicités et promis, ils auraient sans doute porté leuis excès plus loin, si la vigilance des offl iers municipaux, la fermeté et la prudence de MM. les officiers du régiment de Guyenne n'avaient pas arrêté les progrès de l'insurrection, et si le corps du régiment,'loin de se laisser entraîner, n'avait témoigne son indignation, et n'avait proinis avec serment* de livref les coupables.
« Que le 3 mai 'courant, une nouvelle émeute éclata sur la place dés Recollets, alarma dé nouveau les citoyens, et que les officiers municipaux s'y étant transportés pbur faire cesser le désordre, un particulier tira deux coups de pistolet sur le groupe où ils étalent.
« Qu'enfin pendant ces deux jours, des particuliers priaient dans les rues que c'était le mô-ment de couper la'tête au maire, et de la promener par là Ville au bo /t* d'uqp baïonnette. »
Sommant M. le procureur du roi de remplir les devoirs d^ sa chargé, et à cet effet dé faire administrer en témoins Wi. Lacoste père, négociant ; Henri Lacoste; de Guéydon, capitaine de vaisseau ; Vampèje, greffier au bureau dès hypothèques;" Turin, commis' au 'greffe'de la sénéchaussée; Ghabàqd, commis au contrôle ; le sièur Gastah, officier dé la légion nîinoisé; lés sieurs Mèlquiqnd l'aîné, négociant;' Gelse, négociant ; Charles, le (ils. négociant; offrant de faire administrer d?autres témoins lorsque ceux-là auront été eiitendus ; offrant encore de se transporter chez M.'lè procureur du roi po ir signer là susdite dénonciatiop, à telle héure qui lui sera indiquée; et eu' refus où défaut, par M. lè procureur du rôi, de fjiire lè devoir de sa pharge, if' lui est protesté de tout ce que dé droit, et'lui ai baillé copie de" cet exploit |oq'Ê aû long en lui offrant extrait en formé de la susditp'dejipérafibn ; ledit Me Vidal ayant signé àvèc nous rorïgiqal e| la copie, èn parlant à la. personne de M> 4e Brunei, trouvé dans son hôtel audit Nîmes.
Eu foi de ce, etc.
Verites historioues sur les evenements arri-ves a nimes le 13 juin et les jours sui-vants, publiees par le club des amis de la Cons-titution.
Les événements qui ont affligé la ville de Nîmes le 2 de mai ont pour époque la publication du décret qui met dans les mains du district l'administration des biens ecclésiastiques.' Les mal-
heurs dont nous entreprenons le récit, et qui, le 13 de juin, remplirent cette ville de carnage et de deuil, ont commencé le jour même où l'on y apprit la suppression des chapitres et des abbayes.
Dans l'intervalle de ces deux funestes époques, le fanatisme, le principal moyen des factieux, avait fait de nouveaux progrès, ou du moins s'était montré avec une nouvelle audace. Une délibération prise aux Dominicains, par les mêmes catholiques qui avaient signé celle desPénitenls Blancs, annonçait la n ême disposition dans les esprits, et cette persévérance dans d» s principes odieux à tous les bons citoyens ne présageait pas une paix de longue durée.
Les troubles qui s'étaient élevés au moment de la tenue des assemblées primaires faisaient craindre de nouveaux désordres pour celle de l'assemblée électorale, et malheureusement la municipalité, déjà suspecte de connivence avec les ennemis du bien public, venait de donner plus de fondement à ces soupçons. Le 4 de mai, elle avait concédé aux sieurs François Froment et Folacher un terrain inculte, sous la seule condition d'en payer les charges; et c'est par eette concession que ces deux hommes, connus pour être les chefs du parti antipatriotique, les commissaires les plus actifs des assemb'ées ténébreuses des pénitents et des jacobins, devinrent citoyens éligibles. Ils furent élus.
Lès commissaires du roi ayant demandé aux officiers municipaux un local propre à l'assemblée électorale, ils furent très surpris de voir préparer l'église des Dominicains dominée par deux tours, d'où l'on communique à la maison du sieur Froment. Mais les commissaires du roi ayant réclamé la grande salle du p ilais, ils l'obtinrent par leur fermeté, et l'assemblée électorale s'ouvrit le 4 de juin.
Le choix de l'église des Dominicains n'est pas le seul reproche qu'on eût pu faire aux officiers municipaux. Ils s'étaient opposés à la formation d'un camp que le di^tiict de Sommières voulait assembler sur son territoire, hors de celui de Nîmes, pour protéger l'assemblée des électeurs et la secourir au besoin. Une délibération de notre municipalité, qui prenait les électeurs sous sa sauvegarde et répondait de leur sûreté, empêcha cette salutaire précaution, et livra l'assemblée électorale à la fureur d'un peuple égaré (1).
Dès la première séance, les électeurs virent le piège qui leur était tendu. On cherchait à les fatiguer par de longs débats, à les intimider par des menaces, en un mot, à les mettre en fuite et à les forcer d'abandonner à un petit nombre de malveillants la nomination des administrateurs du département. Pour cet effet, dans l'intérieur, des querelles interminables, une opposition tumultueuse, faisant perdre un temps précieux, et munnurer une grande partie de l'assemblée. Au dehors, des gens armés de sabres, quoiqu'il fût ' défendu de l'être hors du temps de service, et
portant à leurs chapeaux des houppes rouges qu'ils avaient substituées à la cocarde blanche, lorsqu'enfin elle fut proscrite, entouraient sans cesse le palais, en embarrassaient les avenues, et excitaient des rixes dont le moindre inconvénient était de troubler l'assemblée. Un cabaret voisin, où ils étaient défrayés et où le sieur Descombiés, un de leurs chefs, allait fréquemment attiser leur fureur par des récits infidèles et par des gémissements hypocrites sur le sort de leur religion, qui ne courait aucun danger, leur offrait un asile agréable qui ne contribuait pas peu à les attirer et à les retenir.
Au milieu des justes craintes que causait leur attroupement, un sentiment de confiance dans les mesures prises par les commissaires du roi, empêchait les réclamations des électeurs. Ils savaient que des patrouilles considérables du régiment de Guyenne avaient été demandées, et ils voyaient qu'un détachement des dragons volontaires faisait le service à cheval, et dissipait, par sa seule approche, cette foule de mutins soudoyés.
Cependant on apprit que les patrouilles des troupes réglées n'avaient pas lieu, que les officiers municipauxn'avaientrequisque des piquets placés à la citadelle et aux casernes, prêts à marcher au besoin, et pendant que les dragons se portaient dans d'autres quartiers de la ville pour y maintenir le bon ordre, les électeurs, d'abord insultés par des propos menaçants, le fureni enfin par des voies de fait. Plusieurs se virent poursuivis par des hommes à poufs rouges, et eurent beaucoup de peine à éviter les coups de sabre qui leur étaient portés.
Sur leurs plaintes à l'assemblée électorale, le sieur Laurens, officier municipal, et le sieur Vidal, procureur de la commune, se récrièrent et prétendirent que l'on voulait jeter des soupçons sur des gens innocents. Vainement les sieurs Grouset et Vésion, électeurs du canton d'Aimar-gues, et bien d'autres, attestaient par écrit que leur vie avait été en danger, rien ne pouvait décider ces magistrats à croire à des excès dont ils avaient été cent fois les témoins, et qu'ils n'avaient jamais réprimés, en répétant qu'ils répondaient sur leurs têtes de la sûreté de l'assemblée électorale : ils espéraient calmer l'agitation qui éclatait dans tous les esprits, prévenir la translation de ce corps qu'on parlait déjà de transporter à Beaucaire, et surtout établir entre lui et la municipalité 1a correspoo ance que les électeurs réunis ne voulurent jamais avoir qu'avec les commissaires du roi. Mais l'indignation générale fut le prix de ces perfides efforts; et ce sentiment se manifesta principalement contre le sieur Vidal, lorsqu'un membre de l'assemblée électorale se plaignant d'avoir été insulté et menacé, le procureur de la commune lui répondit : qu'il ne l'avait été qu'en qualité de particulier, et non en qualité d'électeur.
Cependant, les justes soupçons que la correspondance des commissaires du roi avec les officiers municipaux communiquée par les premiers à l'assemblée électorale avait fait naître, fortifièrent les plaintes contre ces magistrats, et les réquisitions multipliées des agents du pouvoir exécutif écartèrent des environs du palais la foule importune et dangereuse qui l'assi"geait : elles mirent enfin en activité les patrouilles, qui jusqu'alors avaient été enfermées ; mais ce calme ne devait durer qu'un instant.
Les vils suppôts des ennemis du bien public, ces légionnaires, distingués par la houppe rouge,
font publier au son du tambour que tous les gens «te leur parti aient à se rendre, montés sur des ânes, dans une place désignée. Cette ridicule parodie au service des dragons allait en effet avoir lieu ; et déjà un grand nombre de ceux qui devaient en être les acteurs étaient au rendez-vous, lorsque le procureur de la commune et Quelques olficiers municipaux s'y transportent, s calmèrent, à la vérité, cette scandaleuse effervescence; mais, loin d'en punir les auteurs, ils prièrent MM. les commissaires du roi de changer leur réquisition à l'égard des dragons, et de demander que cette troupe se bornât à se tenir à l'évêché, prête à se porter partout où besoin serait. Sur leur r« fus, quoique l'assemblée électorale eût, à plus d'une reprise, témoigné sa satisfaction du service des dragons, la municipalité ordonna de son pur mouvement que ces volontaires à cheval ne feraient plus de patrouilles, qu'ils fourniraient seulement un poste de 20 hommes au palais épiscopal, et même qu'ils ne marcheraient que sur la réquisition expresse des officiers municipaux. 0 i leur imputa des imprudences imaginaires, on supposa des plaintes qui n'avaient jamais existé, et l'on chercha par les moyens les plus répréhensibles à les rendre odieux à la populace. Ils vinrent demander au corps électoral si les plaintes sur lesquelles les officiers municipaux fondaient leurs nouveaux ordres partaient de son sein, et ils en rapportèrent un gage honorable et mérité de la satisfaction et même de la reconnaissance de l'assemblée. Mais, par esprit de modération et de paix, elle céda aux instances réitérées du procureur de la commune, électeur, qui renouvela ses protestations sur la sûreté du corps électoral et sur celle de tous les citoyens, et invoqua la médiation des électeurs, pour rapprocher les deux partis qui divisaient les habitants de Nîmes ; comme s'il pouvait y avoir de traité entre les bons et les bons mauvais principes, et de conciliation entre le patriotisme et l'aristocratie. Le corps électoral se contenta d'exiger que le poste des dragons fut rapproché du lieu de ses séances, et un dragon d'ordonnance placé toujours à la portede l'assemblée. Vaine précaution ! Cet ordre,donné à la municipalité le 10 de juin, n'était pas encore exécuté le 13; et ce jour était marqué pour l'insurrection et la guerre civile.
En effet, dès le matin du dimanche 13, quelques compagnies à houppes rouges, sous prétexte d'aller à la messe, s'armèrent chacune de son côté, et traversèrent la ville dans le plus formidable appareil. Sur les six heures du soir, un de leurs volontaires se présente au suisse de l'évêché, où les dragons étaient paisibles, et lui ordonne de balayer la cour, disant que les volontaires à houppes rouges vont venir donner le bal. Il se retire, et bientôt reparaît avec un billet audacieux, par lequel il est enjoint au portier de l'évêque de chasser les dragons et de n'en plus recevoir sous peine de la vie. Ce singulier écrit est remis au lieutenant des dragons; il veut en conduire le porteur à la municipalité; mais, prêt à sortir avec quelques-uns des volontaires à ses ordres, il trouve sur la place plus de 200 hommes à houppes rouges, qui les assaillent d'une grêle de pierres et les attaquent à coups de pistolet. 10 dragons poursuivent cette multitude ennemie, et font sur elle une décharge de mousquets. Les gens à houppes fuient, les dragons renforcés par 25 légionnaires, principalement de la compagnie n° 1, de garde à l'hôtel de ville, que leur amène l'intrépide M. de Saint-Pons,
major de la garde nationale, de Nîmes, les chassent jusqu'à la place de la Bslle-Croix. Un volontaire de cette compagnie est tué en passant devant la maison curiale. Ils trouvent sur la place une compagnie antipatriotique en bataille, et il s'engage un véritable combat. Dans le même moment, la place des Récollets, le Cours, la place des Carmes, la Grand'rue, la rue de Notre-Dame et l'Esplanade étaient occupés par des volontaires à houppes rouges qui, armés de sabres, de lourches et de fusils, fondaient sur les passants et tiraient sur tous les citoyens qu'ils soupçonnaient ne pas être de leur parti. A la Madeleine on enfonce la maison du sieur Jalabert, il est assassiné, et son corps traîné dans la rue. Les malveillants s'étaient surtout soigneusement empâtés de tou-^ les dominicains qui font partie de l'ancien château royal, l'éternel refuge des rebelle-; de tous les temps; de ces tours qui d'un côte communiquent à la maison du sieur Fi ornent, et de l'autre, dominent la porte de cette même église des Jacobins, dans laquelle la municipalité s'était, obstinée à vouloir placer l'assemblée des électeurs. C'est de là que les sieurs Froment, Folacher et Descombiès,avec300 de leurs volontaires, faisaient feu sur le quai desColquières et sur le perron de la salle des spectacles.
Ces dispositions ne sauraient être un effet du hasard : elles portent le caractère d'une combinaison longtemps réfléchie, et la rapidité avec laquelle toutes les avenues de cette forteresse furent gardées par une double ligne de légionnaires à houppes rouges, le soin qu'on avait eu de placer des troupes de ce parti près du corps des casernes où le parc d'artillerie était renfermé; enfin la compagnie qui barrait le chemin de la citadelle, le seul lieu où les patriotes pussent se procurer des munitions, tout autorise à penser que ces mesures étaient prises de très bonne heure, et que le plan avait été arrêté avant le jour de l'action.
On doit observer que ce plan, qui semble n'être pas défensif, leur présentait le double avantage d'attaquer sans beaucoup de danger, et de laisser croire qu'ils avaient été attaqués; mais personne ne fut la dupede cet artifice, et ces furieux avaient déjà immolé plusieurs victimes, que les vrais citoyens n'étaient pas encore armés. Une partie de la garde à pied de la légion nîmoise, et dix dragons volontaires, résistèrent seuls pendant pLus d'une heure aux efforts de ces scélérats.
Cependant l'alarme s'était répandue dans toute la ville ; et sur le premier bruit des désordres, les commissaires du roi avaient requis la publication de la loi martiale; elle fut. publiée vers .les sept heures du soir par deux officiers municipaux, M.V1. Ferrand-Demissol et l'abbé de Belmont, qu'on força de marcher. Un autre officier de la légion nîmoise s'était rendu à cet effet à la maison commune; il voulait engager MM. les officiers municipaux à requérir le régiment de Guyenne. Il ne trouva aucun d'eux, mais, après bien des recherches, il en découvrit un, caché derrière le lit d'un valet de ville, ces messieurs se rendirent devant les tours où commandaient Froment, Folacher et Descombiès, mais le drapeau rouge, loin d'être respecté, fut enlevé par des gens de la forteresse. Le sieur Boudon, jeune citoyen actif, dragon courageux et zélé, l'unique espoir d'une famille honorable, qui marchait en tête de l'escorte, mourut cruellement assassiné à coup de fourche et de baïonnette. Il fut dépouillé de sa montre, de ses bijoux, et de tous les effets précieux qu'il avait sur lui. On lui coupa même un doigt pour s'emparer d'une bague, et peut-
être découvrira-t-on que les, chefs, de ces scélérats leur avaient promis le pillage de la ville pour les retenir sous leurs drapeaux;
Un, second drapeau rouge eut le même sort que ,1e premier* et les officiers municipaux qui ie faisaient marcher devant eux, .entre autres le sieur Pontier* ci-devant syndic du diocèse, se retirèrent aux casernes, où ils furent vainement requis par les commissaires du roi de faire sortir le brave et généreux régiment de Guyenne* déjà en bataille, et impatient de défendre les bons citoyens.
La nuit suspendit le combat; mais les brigands profitèrent de ce mordant de trêve pour faire des dispositions hostiles., té 14$ à la pbihte du jour* on eu ressentit l'et'f t. Alors tous les patriotes prirent les armes, le sang recommença àcoulerj et si l'énergie des bons Citoyens avait pris un*1 nouvelle activité, la fureur de leurs ennemis portait tout le caractère de, la rage;
En vain ils voyaient l'Esplanade se couvrir de troupes auxiliaires* arrivées de toutes les contrées voisines; en vain, toutes les compagnies patriotes de la légion nîmoise gardaient avec activité l'intérieur de la ville* et veillaient à ce que les compagnies à pouf rbuge ne s'en rendissent pas maîtresses, ils opposaient partdut Une vigoureuse résistance; L'espoir d'un prompt secours et d'un renfort considérable soutenait leur audace; ils avaient envoyé .à M. de Bouzzols les nommés Dupré et Lieutaud, deux de leurs plus dignes satellites, avec les lettres du sieur Froment et du sieur Descombiès, par lesquelles l'un, en sa qualiité de citoyen, l'autre* comme notable et promettant de faire ratifier sa réquisition par toute la municipalité* demandaient au commandant de la province de faire avancer le régiment du roi, dragons* en garnison à Lunel et à Sommières; et ils osaient diré, les malheureux, que c'était pour empêcher les dragons protestants d'égorger les citoyens catholiques ; tandis qu'il est de fait que le poste de 10 dragons, mi-parti comme toute la compagnie* fut attaqué par plus de 200 travailleurs catholiques. Mais ces lettres ne parvinrent pas à leur destination ; la municipalité dUchan en lit arrêter les porteurs, et envoya sur-le-champ des troupes eontl-e ceux qui les avaient écrites (1). G'est à l'aide de ces soldats citoyens et de bien d'autres, animés de la même ardeur* qu'on parvint à détruire todtes les bandes extérieures des rebelles, et qu'à 3 heures apiès midi bn h'avait plus guère à combattre que les gens retranchés dans les tours des dominicains.
Toutes les gardes nationales du département^ à la distance de 18 lieues, étaient accourues ah pecours des patriotes, et ne se distinguaient pas moins par leur intrépidité; que par lès |Jlus tendres témoignages d'atiachementauxbons citoyens. 'On vit même des gardes nationales du département de l'Hérault, telles que celles de Montpellier de Ganges et de Massilârgues, accourir eri foule ; preuve touchante de l'union qui règne entre tous les Français depuis la nouvelle division du royaume.
Près de 1,500 hommes Offraient leur secours, et les lésions des pays catholiques, indignées qu'où eût voulu mêler la religion dans une querelle dont l'intérêt personnel, l'attachement àux abus les plus oppressifs et le fanatisme le plus barbare étaient les seules càtises, signalaient principale-
ment leur zèle. Elles attendaient avec ihipatiênce qu'ori les employât* lor-qu'une décharge de mous-queterie partit à l'impmviste iu couvent des ca-pufcins* blessa un grand notnbreiie ces étranyë'S, tua le sieur Ma3sip, officier municipal de Saint-Gosme* et mit un moment l'arthée ën dé-ordre.
Son ralliement fut pénible,, parce qu'e le était encore sans chef : le seul qu'elle put alots reconnaître était le major de la légion nîmo'sei,car il était le seul officier supérieur qui restait à cette troupe, et depuis longtemps les amis dd trbUblë et dë l'anarchie avaient l'ait tous leurs efforts pour empêcher la formation d'uh nouvel état-mâjor. Ils avaient malheureusement réussl;et M.de Saint-Pons qui, dès le premier momeht de l'insUrreCtinh, avait, ainsi que le sieur Jourdan, son aide-major, manifesté une activité infatigable, et qui veillait à travers tous les dangers à la sûreté intérieure de la ville, et à l'emploi des troupes au dehors, ne se trouva point à l'Esplariade* au mottiërtt dé cette attaque soudaine qui occasionné nhè espèce de déroute. Elle ces-a pourtant* et le pre er"> ier effort de« corps des volontaires réunis se porta sur II1 s capucins; On demanda à fouiller la maison de ces religieux* mais sous prétexte qu'elle avait été visitée le rtiatin, ils refdsèrent de l'ouvrir., Letir porte fut enfoncée. On trouva chez eux des gens armés* des armes, dés habits de fërtime, un gi a- d nombre de libelles incendiaires dodt ils étaient depuis longtemps soupçonnés d'être les colporteurs, et une foule d'autres objets qui portèrent au comble la fureur, déjà très grande des volontaires dont on avait blessé les compagnons. Les cellules flïrent dévastées* la pliarmacife brisée, la sacristie saccagée, et la mort donnée à 5 capucins et à 4 scéléhats réfugiés chez eux. Mais le grenier d'abondance de la ville* piâcé dans le cloître* fut respecte, la manufacture de draps est iritàrte* la bibliothèque né fut pas touchée, l'on n'entra pas dans l'église, et le prbrès-vetbal dressé par M. le curé de Salnt-Gastor, prouve invinciblement qu'oïl ne s'est rendu boupablé d'au-cbne profanation.
Un ciboire seul, enlevé de lâ sacristie par un brigand venu à la suite des généreux patriotes de Sommtères, lui ftit repris par eux, remis aii grelfb criminel dé Nîmes* et le Vûleui* livré à toute la rigueur des lois.
Il est un autre fait qui ne doit pas être omis : qhand on vit que la maisdn des capuciHs allait être attaquée, on jeta des fenêtres de l'argent au pedple in ligné, dans l'efepbir eans doute que la cupidité prévaudrait sur la colère ; mais ce nouvel attentat ne servit qu'à faire éclater le désintërës-semeht et l'honneur d'un tambour du régiment de Gtiyenrié; il ramassil 12 livrés, et vint les déposer sur le bureau de l'assemblée électorale cbmMê un argent impur qui ne devait pas souiller ses mains.
Pendant l'expédition faite aux capucins, la même tâuse produisait ailleurs lé mè ne eflët: des coups de fusil tirés dans la ville et dans lëà faubourgs, avant blessé ou tué de bons Cltbyehs, les maisons d'où ces coups étaient partis furent livrées au pillage malgré lâ résistance dés officiers* et l'on y détruisit plus qùë l'on n'y vbla. G'est ainsi entre autres que furent ravagées les maisons de M. l'abbé Gabanel, notable, etcellë de M. l'âbbë Bragouze, Curé de la paroisse de Saint-Paul, chez lequel on trouva, dans un puits, des fourches* des fusils et des Sabres.
Toutes ces scènes d'horreur lie se passèrent pas sans effusion de sang. On massabrait tous les coupables qui tombaient sous la main; mais aucun
deS Cliefs tie snbit albr$ la poirte qu'il 'm'etitait; « lies tr'. is principaux enFermes dartS lies toiirs dfes domihicain^ f&isalent tolijobrS bonne cdtitenance, et l'on se persuada entin que le canon pourrait seul les reduire. Des gardes nationales furent dohc cbrtiniahd6es jiour le service de 1'artiHerie ; msiis pdur arriver au pare qui la renfermait, il fall,lit vaidCre une troupe enhertiie qui en defeil- flait r&fortoche. Uti dmchetriettt dtes diverges 16- giona etrangSres, tiifclees avec celle de Nii'nes, Soutint bourageusement fori f'eii, et la knit biehtot en fuitfe. Le cari'oh fut aldrs bisque contre les tours ; raais,avant d'employer ctie a'die tbr'rible, on regut de AIM. Frdihent, Folabher et Desmonlbies, une lettre adressee au cbmmadldant du regiment de Guyenne pour la communique r anx volOntaires en angers, dans laquelle ils s'intitbl'eill: les capi- taines de la ttgion nlmdise, comfc&ndant les tours du Chateaii, et du Ton crut rmarqu r a travels rinsoietiee de lelirs jlrbp'ositib'ns quelqueehvie de capiliiler; d'aprfe^ cette idee-, bf leur porta des paroles de i aix: line pareilje demarche ne lbs emp^cha point de continubr le feu de ieuh tiious- (JUeterie, ce ijdi riehdit impossible le sticc6s de la negociation.
11 falllit bien effiplbyet- 1'efFort dtt cation; il le fat avec shccfcs pur les soins de M. d'Aubrv, cd- pitaino au corps froyul d'artillerie, qiii. ilbs le grand rhatln, s'etait porte dans .tods lies lieUx ou il y avail du danger; qui, dlaigrg le feu conti- nual deS tours dont le service des batteries etdit fort Ihcoliitbudgjet par lfequel b.eaueou|i de m'ddde etalt mis hors de bbtiibat, et didlgrg ribexjie- rience dbs pei-sbiihes tjui furent employe,*s a, la mantEuVre des piebed, apr^S avoir remjili tout a la rois les fonctions dangereuSes d'oflicier et de Simple banodnier, pabvint eiitin h deldirtr le§ re- belled de la Forteressb qu'ilS dccupaient, les Obii- gea & se retriihcher dans la maison du sipdb FYo- raetit, et inerita, jiar cb sehvicd important, d'etre nomine le lendemain colonel particulier de la le- gion titrbbise; et coliitiiandant genial deS gardes flatidtlales confederiees.
Les malhebreux qd'ii aVail chiissSsdelfeur poste, et qui s'etaient reiugi6s dans leur derhi^r iisile, dfemahdStdbt btentota capitUler. On ri'feiigea d'eux que la restitution de tddtes lout's iibmes, fet letirs chefs en otage, en leur promettdnt m8me de les riuttre soils lii s&uve garde de la ldi. Ges conditions tie plurebt phs sang dodtb a ces tlMs idsfenSes; car un secbhd refu$ de leur patt fut le Setit frbit de cette secohde negociatioti. C'eSt alors que UUelqdes legiotindires de divers ran- tons, s'6tant t6udis sous les ordres du sifedr Ri- chatd de GlarenSac, tthent tine brfcehe ali rempart auqdel est adbs^eb la malSon du sitiir Froment, et la prirent par escaldde, malgrfe la ireslsiiitibe ties afefii^g' S. Ils en tiK iit un grand carnage; mais Frometit, Foldcbfcr ljt Descombies fechapfjereht a lii mdrt et & la recherche de leurs tainquetftg. La mai^dh du premier (tit fJillee, fet Ton y tf-odva des preuves multiplies du plus horriule des cbmplots : des libellds, des armes, dbs mtitlitidns, des tablbs dd proscriptiori, dfes fagots destin&i, suivant I'aveli de pldsieurs prieonnlerg, a iricen- diei> le fcluB dds ami§ dd la Constitution. Voilti ce que rfcccdslit le Principal repaire dd ceS brigands.
Par cette prise impurtante se termina la fundste jodrnSedd 14; celleuu lendi'malnnefiit,pourainsi dire, consacree qd,;i la vengeanc e, mais son regne iut trop prulonge, et les lois et I'liumanite y furent trop souvent outragees. Gependant, avan't la fin du jour, le sang avait cesse de couler, et les pri- sons commengaient a se retflplih BfeaUcouf) d'in-
fortunes, sMbits frar des chefs crirtiihels, y ont trduvd lenr silltit; diais II fU'iit espgrer qu'uii cha- titneht juridiqde y 'attend les coupables.
Qu'ou se pfeigne, au milibu de lant de desor- dres, la situation douldurbusb de l'assemblee elec- torate; elle .edt besdid d'dn gfaftd 'courage : on ya voir elle sut bd Montrer.
La seance venait d'Gir'e levee; le dimanche, Uart'd l'&larme Se rgjtahdit. Les electeurs Staient ispei'ses, et beauroup furent exposds aux dan- gers lies plus immitients; }ilUsiedrs m6me furent griSvement blesses; et hresque nUfcun ne put rentret- d'ahs si ttiaisdri. Mats qiiadd le lUndi ma- tid le Resident fit publish, a sbn de trompe, que t'asst'tnbl6e allait se tetiir, les deux tiers de ses rherlibres £e reunirent au palais, et leUr premier devoir fdt tie inreh de ne point se separer que tbutdS les operations lie fusserit terminees.
Li plus important^ let la plus pressante, sans doute, etait d'lrlfeefr une autorite dans utile ville sans adthihistratbtits : la municipaliteetaitcomme aneihtie; k jibinb pahtit-il 2 life ses ofGciers. Le procureer de Id Co nmUne avait disparu des ie commencement de la edferre, et sod substitut depuis lbrigtdmps n'osdlt pas mbtbe Se montrer. L'drmee n'avait point de chef; il fallut podndir a la sub^istanee db 15,000 Hdmmes, a la defense de la cite et a I'attaqUe ties enneidis; la confusion etait k redouter fllus que leidr futeur meur'ribre; et si l'aSsemblbe 6lectdbtle n'avait salsi le tiinon dads be moment d'orage, e'en 6tait peut-btre fait de la ville de NimeS.
Un comiig diilitaire et de subsistence futnom- rtib |>ar le corps de3 blecteurs; les membreS en furedt pris dads son sein, {idrttil Ids cito^ens les plus recomrnandables pat- Mr sagesseet par leur bxperlbnte. Oq v joignit M. d'AUbry, ljs per- soriues qui testaient de la muiiibipalite; et MM. les cominissaires dil.roi; M. de Chabaud-Latour, elec- teUr de la Ville db Nimes, lieutenant-colonel au corps royal db gbdie, tnilitaire cuttsortirae par plus de 45 ans de service, employs darts l'Etat pour les commissiohs lt*8 plus deiicates,et ciloyen distihiue pdr son amour eclaire pbur la Goi.sti- tutioii; fut nomrab president de ce cons* il. D£s ce moment, I'ordrb setflbla prbt a renaitre.
Ce comite S'ddipressa d'abbrd de pourvoir a la subsistancb de I'armbe : deS sentinelles furent placees chez fcliaijue boulanger, pour les obliger a faire 8 fbbrhees par jour; on s'assura; par de seniblables precautions, de l'activit6 continuelle ties moulihs et de l'apprdVisiomiementde la bou- cherie. De leUr cflte, tous les citoyens sefaisaient un ddvoir dd fotirnir adx troupes etrang^res les vivres et les rafraichisseiiiedts qu'ils pouvaient avoit* dads ledr idaison. Eiifindes cdtnmunautes voisines, cidles de Sairit-Qilles et de Massillar- gues, envoySrent des cohvdis de pain et d'antres munitions tie bbiiche, qui prbvinrent toutes les iilaHhes sur la substance des citoyens et de leurs nbttibreilx defenseurs.
En meme temps, tdus leg othciers de i'armee s'assemblaient podr nomfider dri dtat-major ge- neral et ud etat-rtlajOt' paKiculidf de la Ibgidn nimoise (1). Un f%lement Sage fut al-rbte, et la discipline tout S Cout) iiitroddite par in i les vo- lontaires. On pourvdt aussi a lellr logfcffidnt. On dbcida que 3,000 fctratigers seraient gardes jus-
qu'à la fin du mois de juin; que la légion nîmoise serait réformée sur l'ancien plan, réduite à 24 compagnies, purgée de tous les factieux qui y étaient entrés par violence, et que leurs armes leur seraient enlevées.
Ces dernières dispositions furent arrêtées après la victoire, et la dernière fut exécutée sur-le-champ. On fouilla paisiblement, par l'ordre des officiers municipaux, chez les capitaines des compagnies à houppes rouges. On s'empara des armes, des munitions, et l'on en fit autant dans plusieurs autres maisons suspectes. La précaution ne fut point vaine : de la poudre et des balles furent trouvées chez bien des gens, depuis longtemps soupçonnés d'en recéler, et surtout chez le nommé Gas, ce cabaretier dont il a été fait mention, et l'un des plus vils suppôts de cette horde de scélérats, dans la cave duquel on trouva un baril de poudre. Il voulut opposer quelque résistance à ceux qui fouillaient sa maison; mais il fut massacré et cinq de ses compagnons, qui, des toits de son logis, tiraient sur les sentinelles de l'assemblée électorale, subirent la même destinée.
L'assemblée électorale adopta avec empressement la proposition qui lui fut faite le mardi matin, par l'un de ses membres, de sortir en corps au milieu d'un détachement du régiment de Guyenne précédé par un drapeau blanc, et d'aller recommander à toutes les troupes assemblées, la modération, la clémence et l'humanité. Cette démarche éclatante eut un grand succès, et la promesse de livrer à la justice des coupables dont toute l'armée demandait la tête, commença à calmer la fureur des soldats, et sauva la vie à beaucoup de misérables.
Fidèle à son serment, l'assemblée électorale ne discontinua jamais ses travaux. Grossie à chaque instant par beaucoup de ses membres qui la rejoignaient, le lundi elle ne quitta pas la salle de ses séances, et les électeurs ne vécurent que de pain et d'eau.
Le mardi, plus calme, l'assemblée presque complète, vit arriver dans son sein les sieurs Laurens, officier municipal, et Vidal, procureur de la commune, ce dernier déguisé en soldat; tous les deux étaient cachés depuis le dimanche dan s la maison du sieur Gas, cantinier de l'armée à houppes ronges; et découverts ensuite dans une maison inhabitée, ils furent sauvés par le courage et la générosité d'un capitaine de la légion nîmoise, et mis par lui sous la sauvegarde du' corps électoraL 11 les prit sous sa protection; mais, se croyant sans doute trop voisins des prisons, ils s'échappèrent.
Le mercredi 16, tous les esprits étaient calmés, et chacun se préparait avec joie à la grande fédération qui devait avoir lieu. C'était, sans doute, un beau spectacle de voir 12,000 hommes sous les armes, rangés avec le plus grand ordre, et animés des mêmes sentiments. Ce fut surtout un beau moment que celui où le serment civique fut prêté, où des chants d'allégresse et de victoire se firent entendre, et où le corps électoral, ombragé des drapeaux du régiment de Guyenne et de ceux de chaque légion, joignit l'expression de ses vœux et de ses engagements, à celle de tant de généreux défenseurs de la patrie, jurant de mourir pour la Constitution et pour leur roi. Pourquoi le souvenir du passé vint-il empoisonner celte fête? Pourquoi de nouvelles alarmes en virent-elles troubler les douceurs?
Des coupables avaient pris la fuite, et, jusque dans leur désastre, fidèles à leur système, ils
répandirent dans les campagnes, dès longlemps préparées à recevoir défaussés impressions, que les protestants de Nîmes y avaient égorgé les catholiques ; qu'on avait ravagé tous les couvents, profané toutes les églises, immolé tous les prêtres, et foulé aux pieds les choses les plus saintes. Les complices d'une aussi absurde imposture la propagèrent de tout leur pouvoir; et, presque au même instant, tous les villas* s qui s'étendent à l'est de la ville vers le Rhône et vers le Gardon, furent armés pour secourir leurs frères qu'on leur disait massacrés, et leur religion qu'on leur assurait perdue.
Plusieurs personnes connues ont, dans cette circonstance, signalé leur zèle fanatique; on en a vu à Bouiilargues, village de la banlieue, soulever les habitants dont on aigrissait depuis longtemps les esprits. Le lundi, on en a vu à Man-duel, autre village voisin de la ville, exciter au meurtre des paysans crédules et superstitieux; on en a vu, sur le chemin d'Arles, intercepter la lettre par laquelle la municipalité de cette ville offrait pour celle de Nîmes, au club des amis de la Constitution des secours d'hommes, de munitions et de vivres (1).
Par une suite de ces perfides manœuvres, il se commit de grands excès dans les campagnes; plusieurs personnes y furent massacrées, sans d'autres forma ités que cette question : étes-vous protestant? Sur l'affirmative on était égorgé, et c'est ainsi que périrent, et le sieur Hugues, près le village de Manduel devant lequel il passait, et le sieur Peyre, jeune homme qui lavait tranquillement de la laine à une lieue de la ville, et le sieur et la dame Noguier, tués dans leur propre maison à Courbessac, et le sieur Blan-cher, jardinier, âgé de près de 70 ans, qui allait faucher son fourrage ; tous citoyens paisibles et désarmés, et victimes du fanatisme le plus barbare. Mais la rage des assassins se tourna principalement contre une famille respectable (2) et nombreuse de la ville de Nîmes, quia de grandes propriétés dans cette contrée, et qui, depuis près d'un siècle, nourrit une grande partie de ses habitants. Elle était alors presque entièrement réunie à la campagne; elle fut avertie qu'elle allait être poursuivie; elle prit la fuite; mais bintôt elle se vit attaquée par une troupe effrénée de villageois en armes. Un vieillard de plus de 80 ans et son fils aîné, furent assassinés sans pitié sous les yeux de l'épouse et des deux filles ae ce dernier; et ces femmes infortunées ne dureiit l^ur salut qu'à un hasard presque miraculeux. Un autre vieillard de 75 ans, frère de celui qui venait d'être massacré, ses trois filles, deux de leurs parentes ou amies, quatre enfants, dont le plus âgé n'a que 6 ans, et quatre femmes qui les servaient n'échappèreut non plus à la mort, que par un de ces coups imprévus de la destinée, qui confond quelquefois la méchanceté des hommes, et déconcerte leurs coupables projets.
Cependant l'alarme s'était déjà répandue au loin, et la ville de Nîmes était menacée de l'irruption d'un grand nombre de paysans, connus par leur attachement à la Constitution, mais cruellement trompés sur les intérêts de leur religion. Tout concourait à les entretenir dans leur erreur, et les avis des fuyards, et les instigations des mal intentionnés, et l'exagération des récits,
et les pleurs de quelques religieux fugitifs, et les alarmes de leurs curés.
" Et contre qui venaient combattre ces malheureux que le fanatisme et l'hypocrisie osaient tromper aussi grossièrement? Contre une multitude de bons catholiques de Nîmes qui avaient travaillé, de concert avec les protestants, à l'avancement de la Constitution ; contre la légion de Montpellier, troupe généreuse et sensible, qui a volé au secours des bons citoyens sans s'informer de leur culte ; contre les volontaires catholiques de Sommières, d'Aimargues, de Saint-Gill- s, du Vigan et de tant d'autres lieux, où, confondus avec des protestants, ils vivent en amis et en frères, parce qu'ils aiment également la loi de l'Etat et la personne sacrée de leur roi, et que, s'ils ont des opinions religieuses différentes, ils suivent une morale .commune, contre ces fermes appuis de la cause publique descendus de leurs montagnes, ou venus de la Gardonenque pour combattre les ennemis de la Constitution; enfin contre ces braves ecclésiastiques qui n'ont pas craint de partager les périls des généreux légionnaires de leurs cantons (1).
Détrompez-vous, peuples aveuglés; consultez les électeurs que vous honorâtes de votre confiance, ils vous diront que la religion n'est pour rien dans nos troubles; ils vous diront que, dans l'assemblée électorale, composée de 526 membres, une majorité de plus de 400, dont plus de la moitié est catholique, a toujours été opposée à une centaine de miÏYeWlanU, parmi lesquels mêmeilse trouvait des protestants. Ils vous diront que les vrais catholiques demandaient qu'on flétrît, par une adresse .rigoureuse, ces délibérations des soi-disant catholiques de Nîmes, d'Uzès et d'Alais, qui ont excité l'indignation de toute la France.
Et vous, prudents et généreux habitants de Beaucaire, vous qui avez retenu cette foule qui courait à sa perte pour un intérêt imaginaire, et qui avez épargné à la ville de Nîmes de nouveaux massacres et de nouvelles douleurs; vous aussi, sage vicaire de Bellegarde, qui dessillâtes les yeux de vos ouailles un moment aveuglées, qui les désarmâtes par vos instances et les contîntes par votre courage; vous tous enfin, dont la foi ne saurait être suspecte, parlez, dites à vos voisins ce que vous pensez de l'origine de nos malheurs; et qu'ils apprennent, par votre exemple, à ne s'armer que pour la Constitution, qui est la plus sûre sauvegarde de la religion-
Enfin, que les ennemis de la Bévolution, que ceux qu'on lui suscite, que ceux qu'on égare, viennent voir parmi nous l'un des plus beaux effets du patriotisme et de la liberté; qu'ils viennent au club des amis de la Constitution, dans cette société patriotique, où les hommes de toutes les religions sont indistinctement admis, ils y verront les familles des malheureux que nos désordres ont plongés dans la misère(2), amis ou ennemis, catholiques et protestants, tous également secourus, également appelés au partage des bienfaits de l'assemblée patriotique de Marseille et des amis de la Constitution de Nîmes ; 50 charges de bié.envoyéesendon par ces généreux Provençaux
pour le soulagement des infortunés de notre ville; plus de 6,000 livres déjà destinées au même usage: voilà ce qu'a produit la conformité des principes et des sentiments, parmi des hommes qui n'ont pas les mêmes opinions religieuses. La bienfaisance et le patriotisme doivent désormais nous rapprocher, et il n'est personne sans doute qui ne regarde comme son frère, le citoyen, quel que soit d'ailleurs son culte, qui exerce ces deux vertus.
Nous venons de présenter le récit fidèle des faits principaux qui ont acquis la notoriété publique; la procédure commencée à la requête au ministère public portera jusqu'à l'évidence la vérité de ces détails historiques. Nous pouvons même avancer que les trames odieuses et les complots perfides des ennemis de la Constitution seront dévoilés. Attendons avec confiance les résultats des informations juridiques.Les magistrats qui en sont chargés y apportent le zèle le plus empressé, la vigilance la plus exacte, la justice la plus sévère. Déjà nous les avons vus affronter le3 plus grands périls, voler avec courage et avec ardeur sur tous les lieux où les crimes multipliés rendaient le danger plus imminent, constater les corps de délit et consacrer tes instants du sommeil à éclairer leur justice. Ils ont acquis des droits à notre reconnaissance, ces magistrats vertueux, et les noms de MM. Fajon et Brunei de La Bruyère, seront cités avec ceux des juges les plus digne s de l'estime publique.
L'heureux succès de la Révolution qui s'est opé rée dans la ville de Nîmes prépare à ses habitant des jours fortunés. Notre garde nationale, sou les auspices de ses nouveaux chefs, et soumise un nouveau régime, veillera à la sûreté de se concitoyens : des administrateurs vertueux e honorés entretiendront dans nos murs la paix e la concorde; et nos généreux voisins, toujours prêts à nous secourir, seront l'effroi des ennemis de la Constitution, s'il en existe encore dans nos contrées.
La garde nationale ayant paru désirer une manifestation publique de son respect pour la religion, son conseil d'administration adoptant la proposition de M. d'Aubry, colonel,a délibéré qu'il sera célébré, les dimanches et fêtes, une messe pour la garde nationale, qui sera dite dans l'église des Carmes, par M. Boucarut, prêtre vraiment patriote, que ce conseil a choisi pour aumônier de la garde nationale.
Enfin, le club des amis de la Constitution a délibéré, dans sa séance du 27 de ce-mois, qu'il serait célébré le jeudi suivant, dans la même église, un service solennel pour ceux qui ont péri dans cette révolution.
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
Copie de la lettre de M. Descombiès à M .de Bouzzols.
I.
adresse.
A Monsieur le marquis de Bouzzols, commandant de la province de Languedoc, chez M. d'Eyga-liers, à la Qrand'Rue, à Montpellier.
Monsieur, les dragons protestants ont attaqué,
sur les 6 heiires du soir, les catliolityues; plii- sieurs ont 6te togs et b^aucdtip de bles^ies^ le desordre est affreufc, ralahmb est gSneralfe; le drapeau rouge a et6 r&pou?s6 et arrache des mains du municipal* et la ttttinicip&'ite est dis- persed. Vainement ai-jb cherthe h cOntieHer avec un d'eux ; ils se sont retires apres avoir fait ce qu'on peutattendrede magisttets patrlotes et genereux.
lI est cependant absolument necessaire de ra- mener I'ordre dans la Tille; et le seul moyen qu'il y ait, e'ie«tde nous dorinei* utl secoufs assfez fort poiK en irttposer aax ermettiia de la paix, quels qu'ils soient.
Je vous prie done, Monsieur, etl m& quaufe de notable de la municipality et vu les circonstances, de vouloir envoyer, sans pgrdre un skill mbttietit, un ordtt aii regiment tlti roi, dragons, pour sle rendre en b» tte ville. Je m'oblii-ie de DiiFB 4(3- prouver ma requisition fcar toute la municipa- lity; et comme citoyeii et bon Frdtigais, j'ai Thondour de vous assurer, Monsieilr, qde la pre- sence de ce regiment ramfinera tdug Ids esprits k la paix et fera firtir tous les malhturs arbives et pr6ts a reridUveler, deequels jB ne pliis avbit* Thuntieur de vous donrier encore dh detail cir- corlstaiicie.
Je suis avec respect, etc.
Signé Descombies,ancien pâgë dû roi, notable et électeur.
II
Copie d'une lettre au siëûr Froments capitaine de la compagnie n° 39;
Èwprèft
adressé
A Monsieur, Monsieur le marquis iïê Èùkfâzftli, ëoiHhi'aMÂht eh èébdHd de là pNi)M6ë lié Mn-jgûedbé^ â Môntpëlllier.
Monsieur, vaibeniènt ]'ài réclâiflê iiifetjii'à êë jôur l'àrmedlent des compagnies bàthollqdêâ, maierê l'Ordre qUe vous aVez biëti Vbulù m'IAfo-côrder; lëS officier S ndbriiëlpàdi 8bt CrU qùil était dë laprudénbe dë retardé? la litfl-àiSpri iiPS fusils iusqp'apiès l'a&Bëhibiëe élëbtofâlë. Àuitiilt-d'hui lés dragons protestants ont attaqué et,tué plbSieiirs dë nos cdtholitjbës désàHthéi. VbliS poUVëz juget5 du dëkbhdrë ët dë l'âiârfhë qiii re-gttënt âaris la villëi Je VOUS sùjablië, eh mà qiia-lité de citoyen et de bbtt Prâbçaiâ, d'eHtfb^er fle suite un ordre au régiment du roi, dragons, pour venir mettre le bon ordre dans la ville et en imposer aux ennemis delà paix. La municipalité est dispersée} personne n'ose sortir des maisons, et si elle ne Voué fâlt âiiciine rêdtllSition dans le moment, c'est que chacun de ses membres tremblé pour Ses jours ët ti'oSë éë rflëHfcrer. On a sorti deux drapeau* rbu^fesj et les officiers municipaux, sans gardes, ont été obligés de se réfugier chez de bons patriotes. Quoique simple citoyen, je me permets de réclamer auprès de vous, parce que je pëhSe qhe les protestants ont déjà envoyé dans le Yaunage et laGardonnenque bëlir deiflaildër des feecbtira, ët hué 1 arrivée aës fahaiiiiuës de , ces ëbhtfeëS extjdsëftiit tous les bons Français à êtfë ê^brgës. DâlgheÊ àVoir égard à ma demande, je l'attends de votre bonté et de Vbiré justice.
Jè stils iàVeè rëspéct, Môhiîéùr; VbWè très humble et très obéissant sëhvitëur.
signè :Froment,
Capitaine dé la comps^nie 39.
III
copie d'un certificat.
^.NouS, soussignés notable de la muniçipaiité lie Nipi.es et électeur, prions tous, ceux qui sont à nrieiv dà |ai-ser, lii)rement passer les nommés iJupre et Lieutaud, habitants dç la ville de Nîmes, pë'ur âiler porter une lettre à, M. le commandant uejâ province., pour les,affaires du roi et de 1 Etat. En foi de quoi neùë avons signé le présent.
A Nimes, ce
Descombiès, notable et électeur.
. Jë çertifle que lesdits buprê et Lieiitaui .sont habiiants et légionnaires de Nîmes. En tbi de quoi lèur ai délivre le présënt.
Froment, capitaine de la legion nimoise.
IV.
A Monsieur le êommanaant. ,aes troupes de ligne, pqur comfnunifuer auk légionnaires campés à l'Esplanade,
Mohsieur, on vient de nous dire que vous proposez la paix. Nous l'avons toujours désirée; et jamais nous ne l'âvoh3 troublée. Si eeux qui sont la cause des désordres affreux qui régnent dans la ville veulent mettre fin à lëdr coupable qon-duitëi bous offrons d'oublier le paslé et de vivre en frèreS.
Nous sommes, avec toute la franchise et la loyauté de bons patriotes et de vrais Franfais, vos très humbles serviteurs.
Lescapitaines de la legion nimoise, commandant les tiyrs dy chateay
Nîmes, le
V
râpport.. fait par M: Magnan, Un des vabsts.de la. ville d'Arles, du message qui lui émit été donné par M, le mairè de la méme villa
Jë Soussigné André MaghaH; valet de Tille au BërVieë de labdmrtiunë d'APiesf btrtuië que hier, à 8 heures du soir, je fus bbnihiândê pàr M. le maire de la vilië d^Aries, d'alieb à Nîmes portër une lettre à L'adresse des membres du club, des amis de la Constitution ; qu'étant parti tout de Biiitë à bHëvdl, j'ahrifâi a flëllëgâraeà lO^éUres , ïbbihs 1/4, OÛ jë déBcènulB â I auBèr^ë du Libn d,àri sbupai et rést^i jusqu'à a.neUrës dli nidlib, époque à laquëll,e jè poursuivis ma rpiitë; qu è-tant arrivé au devant du château de. Yendar-gués, je trouvai uh posté d'environ iO hommes armes de différentes piêçëgi qui më demandèrent qui j'étais, où j'àllâiS; à qtlbl jë Sàtistis
avec vérité. Le commandant de ce posté me demanda,ensuite si je ne portais point de papiers, je réponai- que j'é'ais muni d'un pa sei ort de ia municipalité d'Aria:.queje lui montrai, et sur ce que j'y étais qualifié d? valet dé ville, ils observèrent que vraisemblablement j'étais porteur d'autres papiers qu'ils m'obligèrent de représenter : à quoi je souscrivis en livrant mon port f uilie dans lequel se trouvait la lettre à l'adresse du club; dont ils s'emparèrent ; én me disant qu'il fallait que j'allasse à un château peu éloigo?j qtie j'appris bientôt être Celui delà Coste dit Belle-Vue,où se trouvait M. dé La Baulnie, officier municipal deNîme-. Arrivé à cechàteali, je trouvai un autre po.-te d'environ 40 horhmes, qualifié, Sflon ce que j'enteniis; de Posté du Pont d'Arles. Le commandant dé. ce poste m'ordonna d'attendre que M. de La B mime lut levé. Une demi-heure après së présenta uh plrêite qu'on me dit être le curé de Boullargues, qui me demandii de lui remettre la lettre dont j'é-t iis portelîr et qu'on m'avait rendue dails la rou'e. Je lui observai qu'on m'avait promis de me faire parlera M; de lia Baulme pour la lui montrer; et, sur cette observation* ce prêtre nie dit Ue monter avec lui à sbn apparteniënt. Arrive au premier paiier de l'escalier» je troUvai Mm4 de La Baulme qui m'ehlevâ la lettre, aprèà m'avoir ordonné de la lui faire voir; et m'ordonna d'at-tendre.23 minutes après parut Mi de la Baiiltnë, en m'invitant d'entrer dans un .r abinet, et ,me disant qu'on allait adresser à M: lë chevaliér d'Antonelle, maire d'Arl s, uneréponsë à la lettre dont j'étaià porteur ; que cette réponse serait faite par le capitaine du poste ; ils éntrèrenfi alors dans un sécond cabinet et me dirent de dë** cendre; Quelque leuipS après on nie fit remonter et on me lut la lettre adressée à M. le chevalier d'Antonelle; et pendant qu'on 'a lisait» j'aperçus sur un bureau la lettre adressée ad club des amis de la Constitution, ouverte et dépliée au point que je lus distinctement la signature de Mi le che^ vaiiér d'Antonelle. Je descendis albrB pour retotii-her à Arles j et au moment où j'allais prendre mon cheval, l'oflicier commandant me relemihda lu lettre adre^ée à M. le chevalier d'Anionellej en mb disant qu'od avait oublié d'y insérer qdelque ehose; j'attendis quelque temilé et bientôt se présentèrent M. de La Baulme j lé même officier; trois oh quatre abbés et plusieurs personnes armées; et âyarit prié l'officier de me rendre la lettre adressée à Mi le chevalier d'Antoneilé; M. de La Baulme répondit que cela n'était pas nécessaire; mais sur ma représentation que je serais exposé à des reprobhes on me donna le certificat dont la teneur suit :
« Je certifie que le porieur de la lettre de « M. le chevalier d'Antonelle a été arrêté par la ir troupe qui était de gardé au Pont d'Arles; çt « que cette lëttré sera envoyée à NI nies par l'ol-« licier de garde; et que le porteur a été invité « de rëtdtirner à Arles. Le quinze juin mil sept « cent quatre-vingt-dix. #
Signé: LaBÂULmE.
Après quoi, je fus prendre mort cheval et m'éh fetournài en cette Ville d'Arlës, où je suis arrivé à midi et demi et où j'ai tout de suite dtessé le préSeht procès-verbal, auquel restera annexé le susdit certificat, pour lë todt'servir et valoir ce quë dë raison. En foi de quoi, à Arles, le quinze juin bail sept cent quatre-vingt-dix.
Magnan, valet de ville à Arles.
Nous soussigné^, maire et officiers municipaux de Cette ville d'Arles; certifions et attestons qiië le nommé André Mai,rnan, valet de ville au service dë la commune de cette ville; a dicté en notre présence le procës-ferbal ci-dessus au secrétaire greffier qui l'a rédigé sous sa dictée, et qu'il l'a signé tout de suite, après l'avoir lu et relu; et y avoir persisté; En foi dé quoi, à Arles; lë quinée juin mil sept cent quatre-vingt dix.
Signé:, lé ,cnëVâlier, d'AHlohellë, maire; Mmihy ;. Irhbert; Maure! ; Rousêet;. Br?t; Rleyer; BaudessëaU; officiers mùnir-iriaux; (jàutheaume, substitilt subrogé duP. D. .L.Ç. Frâht ôny,major dé là garde nâjiona.lè d'Allés, lémiiiii nu récit;,,BoUloùVâM? capitaine des dragops d'Arles, Btfïractiiti, témoin au récit audit Maghâh ; Mâgftàn, v. let de ville à Arles; Constant, seciétairè-grëi'fier.
Par le club des amis de la Qdnstitutidn :
ÀiittRY, président,
CotJRBis,
VINCENT ÊLAtCktlT,
J. Pieyre le lils, Hébert le bis, sècHtdifès.
Déclaration de quelques députés de la ci-devant sénéchaussée de nimes . (Soustelie, Chamboil, Vouiland)i relative a un libelle intitulé : mémoire du massacre des catholiques de nimes.
Nous ébussignés, députés de la ci-devant séné-ehausséë de Nîmes, aujourd'hui déparlement du Sâ^d; à l'Assemblée nationale^ ayant appris tju'oh avait imprimé et distribué à Lyon un ébrlt incendiaire et calomnieux intitulé: Mémoire du massacre des cdtholiques de Nlines et signé Frdment, nous déclarons et avertissons le public:
Que l'auteur de Ce mémoire; aujourd'hui réfugié à Turin, a été décrété au corps comme l'Un de§ auteurs et instigateurs des trdubles excités ù Nîmes ; qu'à une violente haine contré la Constitution, à un fanatisme effré é, il joignait des motifs de vengeancë contre les négociants de Nîmes* la plupart protestants, sur la plainte desquels son père avait été décrété de prise de corps par la cour îles aides pour fait de falsification des registres des impositions ;
Que la première de ses déuiarches fut dë se lier à d'autres particuliers pour former des compagnies entièrement composées de catholiques, première source des maux de la ville de Nimes, mesure perfide dont le but était d'échauffer les esprits, sous prétexte de religion (1);
Qu'au mois de mars, et sept jours après la fameuse motion dë Dom Gerle* les capitaines de. ces compagnies ét d'autres ennemis de la Révolution ou séduits par eux signèrent les délibérations
qui ont excité l'indignation de toute la France; et que ces compagnies protégées par la municipalité, qui était leur ouvrage, n'ont cessé d'inquiéter les patriotes par des procédés ét des excès dont les détails, crmls pour ceux qui les éprouvaient, seraient ennuyeux pour le public. .
Que la composition de ces compagnies, toutes catholiques, parut aux ennemis de la Révolution l'utile foyer d'une guerre civile; qu'en conséquence ils inondèrent le Languedoc ae brochures incendiaires où l'on disait que la religion était perdue; où l'on confondait, dans les mêmes inculpations, l'Assemblée nationale et lés protestants; et où l'on invitait les catholiques à porter sur ceux-ci des coups qu'ils ne pouvaient porter plus haut; que le premier fruit de ces coupables manœuvres fut l'assassinat de trois protestants;
Qu'au mois de mai, dans le même îemps qu'à Castres et àMontauban, ces compagnies arborèrent la cocarde blanche et trois d'entre elles annoncèrent qu'elles ne la quitteraient que teinte du sang des protestants; et que les braves soldats du régiment de Guyenne ayant arraché quel-
3ues-unes de ces cocardes, il en résulta des désor-res et des excès qui durèrent pendant deux jotrs;
Qu'au mois de juin, le roi ayant défendu la cocarde blanche, les capitaines de ces compagnies distribuèrent à leurs soldats des houppes rouges pour les distinguer;
Que le corps électoral s'étant assemblé le 4 juin pour former l'administration du département, les houppes rouges entourèrent la salie d'assemblée, armés de sabres et menaçant les citoyens, en sorte que les électeurs furent obligés de demander une garde aux commissaires du roi, et furent gardés par le régiment de Guyenne et les dragons nationaux ;
Que d'excès en excès, et voyant que l'administration du département se formait de bons citoyens, ils prirent le parti de tenter de les dissiper; que le 13 juin au matin, ils annoncèrent leurs intentions hostiles ; qu'ils se munirent de provisions de guerre et de bouche; qu'ils s'emparèrent de plusieurs postes, et en particulier des tours du vieux château, attenantes à la maison de Froment; qu'ainsi préparés, le,soir, 13 juin, ils menacèrent le club dont l'assemblée se dissipa ; ils attaquèrent des électeurs catholiques et les blessèrent; ils insultèrent un poste de dragons de dix hommes; et se répandant dans la ville, ils assassinèrent et massacrèrent des citoyens, choisissant de préférence les protestants, afin de mieux persuader que cette guerre contre-révolutionnaire était une guerre de religion;
Que la nouvelle en ayant été répandue par les fugitifs, les gardes nationales voisines accoururent au secours des patriotes opprimés, en sorte que, le 14 au matin, il en arriva de deux, de quatre lieues, et les deux jours suivants 4e six, de dix et de douze lieues, lesquelles se réunissaient à l'Esplanade ;
Que ces gardes nationales n'étaient pas seulement des protestants, ainsi que le disent Froment et les municipaux, mais des protestants et des catholiques réunis, c'est-à-dire les patriotes du département ; qui- plusieurs bandes furent conduites par leurs propres, curés qu'indignait la profanation hypocrite que faisaient les ligueurs du saint nom de la religion ; que, dès longtemps les villes toutes catholiques d'Arles,
de Beaucaire, et un département entier de Provence, prévoyant les maux qu'on préparait aux palriotes, leur avaient offert des secours;
Que cependant ces gardes nationales étant ainsi confusément ras-emblées, et n'ayant point encore de chef, les houppes rouges s'étant introduites dans le couvent des capucins, tirèrent sur cette multitude, tuèrent un maire de village et dispersèrent sa troupe;
Qu'elle se rallia, demanda l'ouverture du couvent, et sur le refus, força la porte; que, dans cette irruption, plusieurs ligueurs furent tués, ainsi que de- capucins mêlés avec eux, ce que l'on ajoute sur la notoriété publique, car le procès-verbal ne constate rien de visu ;
Qu'en même temps Froment et d'autres capitaines ligueurs fusillaient du haut de leurs tours; que les patriotes ayant demandé la publication de la loi martiale, les municipaux se cachèrent ; qu'un seul osa prendre le draneau rouge et le porta sous les tours d'où les ligueurs tirèrent sur l'escorte, la dissipèrent et enlevèrent le magistrat et le drapeau; qu'un autre magis'rat et un autre drapeau furent également enlevés; et que les ligueurs continuant leurs violences, après des. offres de capitulation que leurs insultes rendirent inutiles, le canon fut amené contre leurs tours; elles furent forcées, les hounpes rouges dispersées ou tuées et qu'alors la scène changea;
Que les légionnaires de tout le pays, aigris depuis si longtemps des violences des compagnies des ligueurs, se vengèrent sur les houppes rouges avec un excès que nous déplorons avec amertume, et que ne peuvent justifier les attentats commis sur la personne sacrée des électeurs; mais que cependant le nombre des morts a été exagéié par les municipaux et par les vaincus, ainsi qu'il conste du compte rendu et du verbal du lieutenant criminel ;
Que plusieurs maisons, soupçonnées de receler des armes, furent visitées par ordre des officiers municipaux ; qu'on trouva en effet des armes dans plusieurs, et que ces maisons furent dévastées ;
Que les pillages et les profanations des églises sont des mensonges impudents démentis par les certificats de MM. les curés, par ceux des supérieurs et supérieures de toutes les maisons religieuses; par le procès-verbal de descente chez les capucins, qui relate d'ailleurs la découverte, dans cette maison, d'une foule de brochures antirévolutionnaires (1) ; .
Que les municipaux eux-mêmes, quand l'ordre a été rétabli, ont rendu hommage à la vérité, le jour de la fédérationj en blâmant les vaincus, dont la chute, disaient-ils, avait été méritée;
Que maintenant on voudrait recommencer la querelle. Rien n'a été épargné pour séduire et échauffer les cantons voisins de Nîmes, en s'ef-forçant de leur persuader que les protestants avaient eu le projet d'égorger les catholiques ; ces tentatives ayant été inutiles, on a été souffler le fanatisme dans le Vivarais; le rassemblement d'un camp de fédération à Jalès n'avait d'autre objet que d'exciter les fédérés et les habitants de ce pays à aller massacrer les protestants de Nîmes, et faire une invasion à Avignon.....
Cette affectation de publier hors du pays que les protestants ont voulu massacrer les catholiques
a tous les caractères d'un projet de justifier les nouveaux crimes que l'on prépare, afin de persuader que l'on n'aura fait qu'user de représailles ;
Que Froment, réfugié à TuriD, ajoute à ses fureurs précédentes le mensonge impudent de promettre aux ligueurs le secours d'un prince expatrié, circonstance en laquelle il s'accorde, ainsi qu'en plusieurs autres, avec M. de Galonné, qui, jadis ennemi déclaré du clergé, ne parle maintenant que de religion, et invite ce prince à en prendre la défense; qui justifie les délibérations incendiaires de Nîmes et d'Uzès, que toute la France a détestées et dénoncées; et qui, après avoir lâché son verbeux commentaire des Actes des apôtres, s'est rendu à Turin.
Nous avons exposé les circonstances précises des faits; nous déclarons que le détail en est appuyé sur des preuves légales qui sont aux comités des recherches et des rapports. Froment a construit un roman incendiaire, tiré de son cœur vindicatif et ulcéré. Et son mémoire, qui accuse formellement l'Assemblée nationale d'avoir excité les protestants de Nîmes à massacrer les catholiques, a prouvé aux moins clairvoyants que les protestants n'étaient qu'un prétexte pour arriver à une guerre civile.
Les municipaux de Nîmes accusés, mandés à labarredans la personne du sieur de Marguerittes, leur maire, susp> ndus de la fonction de requérir la force publiq e, n'accumulent leurs inculpations que sur les procès-verbaux qu'eux-mêmes ont faits et qu'ils ont toujours refusé de communiquer aux intéressés. Ils citent les témoins qu'eux-mêmes ont fournis; ces témoins sont les houppes rouges, les capitaines ligueurs, les conspirateurs décrétés.
Pour nous, nous n'attestons rien que sur des pièces authentiques, sur les procédures et sur cette information tant redoutée, des municipaux, parce qu'elle doit mettre au jour des vérités importantes.^
Des romans justificatifs ont été répandus dans toute la France; les libelles calomnieux sont venus au secours; mais la calomnie n'a qu'un terme, et il faut que Ja vérité paraisse dans tout son jour.
Le comble du forfait, mais heureusement aussi de l'absurdité, a été d'attribuer aux protestants les manœuvres abominables qui ont produit tant de malheurs, et dont ils étaient eux-mêmes destinés à être les victimes; les protestants qui ne forment que le plus petit nombre; les protestants qui attendent tout de la paix et qui perdaient tout dans la guerre; les protestants qui ne demandent rien, car,en obtenant le droit de cité et en participant à la déclaration des droits, ils ont tout obtenu; les protestants dont la patience est la vertu coutumière et à laquelle ils out été façonnés par une longue habitude.
Mais nous déclarons formellement, et sur les preuves que nous en avons reçues, que les gardes nationales, qui ont battu Froment et ses satellites agresseurs, ne sont pas des protestants seulement, mais les catholiques et les protestants du pays, mais les patriotes; ,
Que le club des amis de la Constitution, vigoureux antagoniste de la municipalité, le club composé de cinq cents citoyens, l'élite de la ville, est composé de catholiques et de protestants;
Que les gardes nationales étaient également mixtes; qu'elles le sont encore, malgré tout ce qu'on tente pour eu détacher journellement des catholiques ;
Que l'état-major de la garde nationale, est catholique;
Que le procureur du roi qui a porté plainte, que les juges qui l'ont reçue sont tous catholiques; que les directoires, les municipalités qui ont dénoncé ou blâmé les ligueurs et les municipaux sont, pour la plus grande partie, catholiques ;
Qu'en un mot, les catholiques du Languedoc ne le cèdent ën patriotisme à aucun des autres citoyens et hommes libres du royaume; qu'ils ont de quoi s'indigner de l'outrage qui leur est fait dans toute la France par une troupe de ligueurs dont l'hypocrisie ne sert qu'à couvrir les regrets vindicatifs de l'aristocratie au désespoir\
Qu'ils cessent d'espérer, ceux qui voulaient une guerre religieuse ! les Français connaissent leurs pièges ; deux ans d'exercice les ont prodigieusement éclairés. Non, les Français du dix-huitième siècle n'auront pas la folie de s'égorger pour des intérêts particuliers et d'exposer leur Constitution au choc d'une guerre civile. Le comble de la scélératesse est d'en avoir formé l'abominable complot ; le comble de la démence est de penser qu'ils nous feront rétrograder avec eux au seizième siècle.
Jean-François-Mathieu Soustelle, citoyen d'Alais; Jean-Michel Chambon, citoyen d'Uzès; Jean-Henry Voulland, citoyen d'Uzès, députés du département du Gard.
RÉPONSE GÉNÉRALE A TOUS LES FAUX-FUYANTS DE LA MUNICIPALITÉ DE NIMES, par Chambon, Voulland, Soustelle, Meynier, députés du Gard.
AVERTISSEMENT.
La municipalité de Nîmes, instruite que la procédure ordonnée par le décret de l'Assemblée nationale du 17 juin est concluante contre la municipalité et contre les auteurs des malheureux désordres commis dans cette ville, a fait répandre « que l'information demeure comme non avenue et qu'elle soit renvoyée à un tribunal hors du département », moyen peu usité, mais qui lui offre l'espoir d'obscurcir les lumières qu'on trouverait trop aisément sur les lieux.
Après avoir récusé les juges « que l'esprit de prévention ou de crainte a dirigés», elle inculpe le procureur du roi, dont le ministère l'incommode; elle l'accuse de partialité.
Le comité des recherches est prêt à faire son rapport; elle demande « que les pièces déposées au comité des recherches soient incessamment adressées à la partie pub ique d'un tribunal hors du département ».
Le club patriotique de Nîmes l'a dénoncée à l'Assemblée nationale; elle dit que c'est par haine de sa religion, quoique le club soit composé de catholiques et de protestants, elle «u b-titue toujours le mot protestants au mot patriotes.
Les électeurs du département, assemblés pour la nomination des membres de l'administration, ne lui ont pas rendu des témoignages favorables : elle dit qu'on les a circonvenus, qu'on l'a calomniée auprès, d'eux.
Le directoire se plaint à I'AVsemblée nationale
que la municipalité l'arrête dans ses opérations; un roman anonyme, que sa clandestinité condamne fui mépris, t1 qu'on répand actuellement dans le public, inculpa le directoire.
Les commissaires du roi oni rendu à la municipalité des témoignages peu"avantageux; "lé roman Inculpe les commissaires du roi i il dit que de trois, il y en a deux protestants, et cependant il n'y en a qu'un. ~
Il e|| prouvé, par |a prop^d^rp, qqe fjes hypocrites, jq ||i le 'fjpj ont égaré une partie' du peuplé catholique, et; Pon^ngagé'^' 3 pi'fagr co. litre ejleditaue les protestants ont forme èi exeguie le projet de i^assjtcrer (es catholique?. '
Une fpûle témoins opt déposé d'une manière effrayante ppuç éllé; e^e çjit duç l'e$,p,yit de par ti les a $éssigrilM ; el^ qnpp^éla pro,ôe4pr£ juridique r|hfq|;ijqaj,ioq qu $lle assure ayuir |ait elle-ipême, ei qui est éyiq^iqpjppt én sa tyyeur.
Airjsi, topt le monde ci^omuie cette municipalité ;'cjtoy qs, 'Hfocuieqr'du foi, ipmoins, admipistr^t'eu4, ëlecleur§, cpiq|||js*$aires du rui, m«Vfliç|bàjUè3* ypjsipp§,' gaffes nâfionàles. tqus sont ses ennemis, tous sont prévenus, aftïi-uent son innocence. Cependant, on nous presse e répondre à s s romans : riou's n'y ferons pas d'autre réponse que de publier ùii exirâit des informations laiteà à raison des troubles survenus à Nîmes, et nous observerons qu'il y aurait encore près de 200 témoins à entendre, ce qui lait peut-être une des craintes de la municipalité, et qui lui fait demander naïvement que la procédure demeure comme non avenue.
Signé : Jean-Michel Ghambon ; Jean-Henri Voul-land, citoyens d'Uzès: Soustelle, citoyen d'Alais'f ?Jeah-Pa'pl Raïàut"; Ë'tienne Méynier, citoyens "de îfimeg, c|épujésdu département du Gard.
RÉPONSE puisée dans les différentes informations faites à raison des troubles survenus à Nîmes.
Sommaire des événements arrivés à Nîmes, depuis le décret de l'Assembié j nationale du 2novembre 17K9, qui decl re les biens ecclésiasiiqut s à la disposition de la nation ; extrait des preuyes écrites, notamment des informations faites à la requête dp procureur du roi au sénéchal de Nîmes, à la guite des plaintes par lui portées les 31 mars, 10 mai it 7 juillet 1790, et encore des informations sur les événements du mois de juin.
Le 8 décembre 1789, assemblée nocturne dans l'église des pénitents; M. Clémenceau, vicaire général de Mr. l'évêque de Nîmes, et curé de la paroisse Saint-Gasior," munie en chaire, et lait convenir les personnes assemblées, de celles à nommer pour présidents, secrétaires et scrutateurs dans les prochaines assemblées, pour la formation de la municipalité (1).
Dana le courant du muis de décembre, autre assemblée nocturne chez M. le curé Clemenceau; elle est formée, entrevu très, des sieurs Froment,
Folaoher, Vidal (procureur de la commune), Vigne, Michel, conseiller (commissaires de là délibération du 20 avril) Duran l', Pouîlhache, Gam-bacérès, l'abbé Lapierre, théologiil (notables)', et l'abbé de Rophemaure. Il y estconvenu des moyens à prendra pour composer la municipalité, et "d'en exclure les non-calholique3 (1).
Qès je moment de l'avis de la convocation des citoyens pour 'procéder à la nomination de la munii'-ralité,' il se forma divèis comités, pour fabriquer des listes, chez l'abbé Gabanel, l'abbé Lapierre et Michel,conseiller. Les curés dé Bouillargues, Rodj la Y et Qourbêssac '(ce sont trois paroissés dépendantes de là municipalité de Nîmes) piontent eu chaire exhqrieqf leurs Rtjr roissiens à se rendre a Nîmes pour voter dcjjns leur section i et y mettre les' listes qu'ofl Jeùr remettra,"en leur payant leurs journées. Ces listes'sonf. en élfet aistriDuéès avec le sàlaire de chaque votant, par'Mfyl.' Matlori, curé de Bouil-r largues; Bo'yer, curé «le R>»di lan ; Capiepre, t|iéQ; logâl ; V'ierne, fermier dé Ml La Baïïlme (élu of-liciçr'municipal), Bërtljëzèné dé Bouillargiies, et Ga^j',' rèvendënr île vin à Niipes (Ip fils de 'îc'-'Gàé était clerc che? Vidal, procureur, élu Rroçvirgu.r de la commune) (2).v
Di}n§ Ig tefpps qu'on propèdp à la forpaatipn de |a!tq'|!p.icip^litë, le nomrqé Gpàyil qe ^pmb larges, parlât^ l'intérêt de là feligioo, ait ;
faut $$ po.igmrder, dijç, ans v\e, ou
f^a^w ne sont riçvi (y*
yaq(ip Plavjéré, vifiîklïl d® M- di-
gapt qu'il faut exc|ure îps protestants de tpqte àq'qjin1stratip$, pq lui obseryp qqe cela oppitëiftq-péif| cjes rpalheurg et uqp févoluiiqq çlaqs la ville; ij rei qnçl U la faut\ \l en faut \ffle r&voHtiQn, çeta rie, pey^t êtve çiutyemeiii (2). ' l^r tircfre de tfroipeqt, capitaine 4'UPP equi-pagnie aiHi'M^iQti'qMé, ef, pepeY^f 4H CRapitffâ, le nommé'Çqesgt, ^Bf.uFiep, fabrique dé$ l'QUP-ehpstdes hàclips pour tjes gapeurs, rtdes pbres, riçjîij, le do§ spie; cetfà t&hçifi^tiqsi. est
faite avant, pendant et après la furcpalion de. la municipalité (3).
Le 28 mars, jour de dimanche, la légion se rendit à la place de l'Esplanade, où devaient prêter serment les officiers municipaux. La compagnie Froment y i arut armée en partie de fourches; M. du Gailar, commandant de la place'et de la légion, qui avait défendu les fourches, voulut les faire poser; il fut insulté et donna sa démission : le maire lui parla en particulier, et ce chef reprit à l'instant ses lonctipns (4).
Le lendemain, lundi 29 mars, les sergents de la légion, rendus à l'nôtel de ville pour y prendre l'ordre, suivant l'usage, le nommé Guidon, Pierre Yernet, sergpot ne la compagnie, armés,la veille, de fourches (il a été décrété au "corps à raison des événements arrivés en juin) est interpellé pourquoi ces fourches avaient été arborées. Il rénorid qua c'est par ordre du maire. On le conduit devant le maire : là il se rétracte, en disant qu'il a avanéé le fait pour se garantir de toute insulte. M- de Mqrguerittes,maire, le eôndananè à être mis eu pnsou dans l'hôtelue ville; il y est conduit, et dbux minutes après, le maire le fait élargir (5;.
Le soir du même jour. 29 mars, le sergent à fourches forme un attroupement à la place des l^écollets; on menace 4e peudre À'ilïens, toppe-Ijer et protestant, parcèau'à midi il s'est Trouvé du nombre de ceux qui !avaièqt'conduit le sergent çhez Je pîairé. Le sieur Jburâanj majop de la légion, instruit de cet attrqupemépt, se repd chez le pommandant; celui-ci le criarg ' d'aller en informer le maire. Arriyé chez lui, la porie' est rèf'usée âq sieur Jourdan; il insisté, è| M. le maire le fait entrer. Le" major annoncé rattroupenieqt, et offre la force de la légion pour le'dissiper. M. le maire"luji dit : Qu'il n'est pas nécessaire: qu'il sait ce que c'est, qu'on ne sp battra point (6). - Cependant i'aitroupémént attaque les'er">"non-ca!-thuliques qui surviennent, en qualité de gorges-
ngirççi Pqyrçftgr, {Ij^es ej LjM'pafi sppt
excèdes : PoûrCher reçoit trois Çftijgg PB Qglîr t^au (7),
La patrquille puevient, elle dissipe ^attroupement, et fait, prisonnier celui qui portait les cordes pour pendre le tonnelier; on le conduisait en prison, mais le sieur Laurens, oflicier municipal, le lit mittre en liberté (1). "
Le lundi de Pâques, 4 avrjl, le gardien des capucins et le père Saturnin, capucin, étant sur le perron du couvent, disaient publiquement què î'Assemhlée nationale faisait beaucoup de mal; que les membres la composant étaient, pour la plus grande partie, des malheureux, di s coquins; ijois personnes cathuliques qui ies entendaient, eh^epvèrent q ilaû contraire l'Assemblée nationale lits faisait que du bien. Le père Saturnin leur dit : 1 Vous devriez soutenir votre religion, et non cette Assenqblée; vous êtes des coquins; ne venez plus dans notre église : nous serions obligés de faire brûler les lieux où vous mettriez les pieds (2). »
Le 13 avril, la municipalité, dans la vue de meitte le trouble parmi la légion, fait un règlement de discipline; le 16, le club des Amis d£ la Constitution lui fait une pétition pour demandér de surseoir à l'exécution de ce règlement, jusqu'à ce que l'Assémbïé nationale aura prononcé. Hun seulement cette pétition est méprisée; mais le sieur Vidal, procureur de la 'commune', dit publiquement que le règlement attaqué est'son ouvrage, # qu'il le sou tiendra, quand même la flamme serait sous ses pieds » (3)'.
Le 15 ayiil, le sieur Boyer-Brun, substitut du procureur de la commune," rédacteur du Journal de Nîmes, y inséra |e fragment d'un sermon inpeu-diaite, en l?attiibuant faussemèntâu père Bouchon, jacobin, qui avait prêché à Marseille. Ce journal et le règlement de la municipalité furent dértqn-cés par une adresse des amis dë la Constitution à l'Assemblée nationale, Je 17 du même mois d'avril (4).
Les vexations de la municipalité,exercées con tre les patriotes, s'étant répandues, et son refusr, par délibération d'autoriser lalégion nîmoised'en vo^er un détachement au camp fédératif de Saint-Hinpo-lyte, ayant indisposé cette fédération^ lie envoya un dragon d'ordonnance, avec une 'Ipltre, pour témoigner son mécontentement, et offrir "Su,000 hommes pour donner du secours aux opprimés, quels qu'ils fussent. La municipalité de Nîmes répondit que le bon ordre et^a fraternité régnaient dans la cité, que s'il survenait du trouble, elle comptait sur les secours dé £es yoi-sins, et surtout de la ville d'Arles et de celles de la côte du Rhône; ce q i signifiait qu'on opposerait les catholiques aux Cévenols, la plupart protestants. Ainsi la municipalité de Nîiùes se lierait au doux espoir d!une guerre de'religion (5). '
Dans le même mome it, il'se tenait des assemblées secrètes dans l'église des Péi}iten|s; à l'une il fut dit par l'orateur : « Les Parisiens sont lès maîires de disposer de leurs biens' et d^leurs corps, mais non pas des nôtres;'il est convenu qug nous devons faire (les catholiques de $imes)
le premier pas; qu'aussitôt les principales villes du royaume eo ieroot de même. » Ce premier pas ue pouvait être que la teniative d'une contre-révolution (1).
Le 20 avril, nouvelle assemblée dans l'église des Pénitents; les (citoyens sont sollicités de s'y rendre, pour y signer une délibération devenue fameuse; les curé3 de Bouillargues, Rodillan et Courbessac montent en chaire, pour exhorter leurs paroissiens à signer cette délibération (2).
Un dimanche du mois d'avril, l'abbé Tempié, notable, momé sur le marchepied de l'autel de la chapelle du Saint-Sacrement, dans l'église cathédrale, exhorte vivement les cnngréganistes, assemblés, de signer la délibération des Pénitents, observant qu'elle avait pour but de procurer au roi sa liberté, et ajoutant ces mots incendiaires : « L'Epitre du jour annonce aux catholiques qu'ils doivent se soutenir jusqu'à la dernière goutte de leur sang (3). »
Les commissaires nommés par cette délibération la présentent à la municipalité, pour qu'elle y donne son adhésion; ce qui allait être fait, sans les vives représentations du sieur Vincent Vais, officier municipal ;il l'a lui-même déposée ainsi que l'un des secrétaires-greffiers; ils sont les 95* et 167° témoins de l'information sur la plainte du 7 juillet.
Des cris de : vivent le roi et la croix ! à bas la notion ! se font entendre dans toutes les rues ; les protestants y sont publiquement qualifiés de gorges-noires ; des écrits incendiaires sont distribués, des placards menaçants affichés ; les catholiques antipatriotes arborent une cocarde blanche: tjoot cela est autorisé parle silence de la municipalité, qui prend une délibération le 22 aviil, par laquelle elle assure quQ les citoyens n'ont pas cessé de vivre en fières, tandis que le sang avait coulé, que le vengeur public en avait rendu plainte et fait informer depuis le 31 mars.
Le 27 avril, le club des Amis de la Constitution dénonce à la municipalité le3 dangers qui mena' c nt les bons citoyens; ils lui remettent une foule d'éciits incendiaires, notamment celui intitulé: Avis à l'armée française ; i s lui demandent une prorlamation pour éclairer le peuple, lui faire conuaîire les bienfaits de l'Assemblée nationale, faire cesser toute distinction et qualificaiion odieuses, et prévenir de nouveaux malheurs. Cette pétition fut remise à la municipalité, qui déclara n'y avoir pas lieu à délibérer (4).
Sur la fin d'avril, M® Chevalier, procureur, ayant occasion d'aller chez Froment, receveur du chapitre, il y voit des fourches, et que Froment fournissait des habits, des armes et de l'argent pour sa compagnie, et pour d'autres. Me Chevalier en fait part à M. le maire, par une lettre, ainsi que des ouvrages incendiaires qui s'imprimaient chez Baume. Le maire a la lâcheté de remettre cette lettre à Froment, qui dès lors menace Me Chevalier de lui ravir la vie (5).
La municipalité autorise expressément, pour signe de ralliement, la cocarde blanche. Le sieur Vincent Vais, officier municipal, propose au maire de les prohiber ; il répond que cela n'est pas nécessaire; et s'adressant à des gens qui étaient décorés, et qui étaient dans la grande salle de l'hôtel de ville, il leur dit, en présence de plusieurs officiers municipaux: « Mes amis, c'est vous qui nous avez mis en place, il faut nous soutenir, car nous vous soutiendrons,» elles travailleurs crient: vive M. le maire (1)1
Le samedi, 1er mai, des légionnaires à cocarde blanche élèvent un mai devant la porte du maire (2).
Le dimanche 2 mai, au matin, un officier et plusieurs volontaires en cocarde blanche vont aux casernes pour emprunter du régiment de Guyenne des sabres et baudriers; ils leur sont refusés, parce qu'ils sont en cocarde blanche. L'officier dit que c'est la cocarde royale : un sergent de Guyenne répond, « que le roi porte la cocarde nationale, qu'il l'a prescrite à toutes les troupes de ligne, qu'il ne peut y avoir que de mauvais citoyens qui arborent la cocarde blanche», et le refus d'adhérer à la demande des légionnaires est confirmé (3).
Le même jour dimanche 2,mai, au matin, les légionnaires à cocarde blanche, qui la veille avaient planté le mai, vont déjeuner chez le maire; ils s'y rendent en armes et décorés de la cocarde blanche; après le déjeuner ils sortent en criant tantôt : vivent le roi et la croix! à bas les gorges-noiresy à bas la nation, nous y chions dessus ; tantôt: qui nous fera quitter la cocarde blanche? Nous ne la quitterons que lorsqu'elle sera rougie du sang des protestants. Sur le soir ils attaquent les protestants, et les soldats de Guyenne qui passent devant la maison du maire; un soldat est arrêté, traîné et maltraité ; Saint-Louis, cocher du maire, est l'un de ceux qui se livrent aux excès (4).
Encore le même jour dimanche 2 mai, des légionnaires en cocarde blanch répandus sur le cours,provoquent les sous-officiers,soldats et grenadiers du régiment de Guyenne. Un bas-oflicier, s'adressant au nommé Vampère, lui dit honnêtement de quitter .la cocarde blanche, Vampère répond : « Je ne la quitterai pas, je suis aristocrate.» Le bas-oflicier la lui arrache, il est applaudi (5).
Les sous-officiers, soldats et grenadiers de Guyenne arrachent encore quelques cocardes blanches ; mais bientôt, tous ceux qui l'ont ar-
borée, s'attroupent;plusieurs étant armés de fusils et de sabres, ils attaquent les sous-officiers et soldats de Guyenne, qui pour se défendre mettent le sabre à la main ; mais ils sont poursuivis à coups de pierre, et' dispersés ; des légionnaires patriotes surviennent, ils sont attaqués, plusieurs blessés et obligés de s'enfermer dans la maison du sieur Lacoste : aussitôt la maison est attaquée à coups de pierre, les fenêtres brisées, et la porte allait être enfoncée lorsqu'il arriva une patrouille de la compagnie n° 25 qui était en garde à l'hôtel de ville; elle arrêta l'attaque de la maison Lacoste (1).
Dans le moment de l'attroupement de3 gens à cocarde blanche, deux ecclésiastiques furent vus sur le cours, les excitant par ces mots : zou, zou (2) 1
Parmi les attroupés jetant des pierres sont reconnus le domestique de l'abbé de Belmont, vicaire général et officier municipal, et celui du curé Ciémenceau, jetant des pierres et distribuant de l'argent (3).
Le maire, le procureur de la commune, plusieurs officiers municipaux et Descombiés, notables, surviennent enfin, escortés des légionnaires de la compagnie n° 25, qui était de garde à l'hôtel de ville, le maire harangua le peuple avec une extrême douceur; le sieur Fleury, légionnaire patriote, attaqué et excédé en leur présence, un homme à cocarde blanche ayant cassé, en le frappant, la crosse de son fusil, Fleury est couché par terre, le maire le relève, le livre aux valets de ville et leur ordonne de le conduire en prison: les assaillants sont laissés tranquilles; ils veulent faire la garde du maire, qui y consent et ils l'accompagnent (4).
15 ou 20 bas-officiers, grenadiers ou soldats de Guyenne, mis en fuite, vont se réfugier chez Roux, savonnier ; ils y trouvent 20 hommes armés de fusils, 7 à 8 les couchent en joue, les autres les désarment de leurs sabres, et ils ne parviennent à s'échapper qu'à force de prières ; ils virent sur une table de la poudre et des balles en quantité (5).
Le soir du même jour 2 mai, le maire requit la compagnie n° 31, capitaine Celse Melquiond, pour faire des patrouilles pendant la nuit; cette compagnie composée des travailleurs en cocarde blanche, qui avaient planté le mai, déjeuné chez le maire, attaqué les pas-ants devant la maison de celui-ci, et formé la majeure partie de l'attroupement sur le cours (6).
Le iendemain 3 mai, au matin, Descombiés, notable, capitaine d'une compagnie de soldats de la Croix (il est maintenant prisonnier et décrété au corps), arriva avec sa compagnie sur la place du Puits de la grand'table ; il lui proposa de faire serment de fidélité, au roi et à la croix, ajoutant merde à la nation, et chaque volontaire répéta ce serment et le jura par acclamation (1).
Le même jour, au matin, dans l'église cathédrale, dés prêtres disaient : « Hier ce coquin de Barry excitait à crier vive la nation, il mériterait d'être rompu ; il faut s'assembler ce soir et tomber sur les protestants en commençant par les mauvais catholiques, et les mauvais prêtres. » Ces propos furent entendus par l'abbé Boucarut au moment même où il se préparait pour aller dire la messe ; il l'a ainsi déposé : il est le 71° témoin de l'information sur la plainte du 10 mai.
Le même jour, 3 mai au matin, il se forma dans l'hôtel de ville et sur la place un attroupement de gens à cocarde blanche : la municipalité était assemblée, et recevait les dépositions de ces attroupés sur les événements de la veille ; les protestants qui y surviennent ainsi que les soldats de Guyenne, sont hautement qualifiés de gorges-noires, excédés, poursuivis et mis dehors de l'hôtel de ville ; le maire, les officiers municipaux, le procureur de la commune, le voient ou l'entendent et ne disent rien ; et tandis que l'attroupement le plus dangereux subsiste dans l'hôtel de ville, ils font proclamer une défense aux citoyens de s'attrouper ; à midi on fait fermer les boutiques (2).
Dans l'hôtel de ville, et en présence du maire, les attroupements crient : vivent le roi et la croix (3).
Sur la place, un travailleur, disant : faisons-nous feu? une femme l'entendit, et dit: vous devriez avoir au moins du respect pour M. le maire qui vous entend : aussitôt celui-ci se tourna vers elle et dit : Faites retirer cette femme, ce qui fut exécuté à l'instant (4).
Sur les deux heures l'après-midi, les officiers de Ja légion devaient s'assembler au collège ; ils en furent empêchés par les patriotes qui passaient ; le sieur Agier fut poursuivi à coups de pierre, s'étant réfugié dans la maison où habite M® Valadier, avocat, qui le fit évader par le toit, tandis que les mêmes travailleurs fouillaient la maison et voulaient même enfoncer les armoires (5).
Sur le soir, à six heures, un autre attroupement se forma sur le cours, les soldats de Guyenne venant à passer sont arrêtés ; on veut leur faire crier : Vivent le roi et la croix ! à bas la nation ; les soldats patriotes crient : Vivent la nation et le roi ! Aussitôt ils sont poursuivis et excédés à coups de pierre, obligés de fuir : un grenadier du régiment de Guyenne fut tué d'un coup de fusil, tiré par un Froment, surnommé Tapage,
frère du receveur du chapitre, aujourd'hui retiré à Turin (i).
A la même heure, un autre attroupement se forma sur la place des Récollets ; les attroupés étaient en cocarde blanche et plusieurs avec des fusils, des pistolets et des sabres ; Chalvidan, les Talagrand et Durand étaient les chefs de cet attroupement ; tous ceux qui paraissaient, reconnus pour être non catholiques,étaient excédés; des coups de lusil furent même tirés ; le sieur Arnassan fut arrêté par Chalvidan, qui lui mit le pistolet sur l'estomac, appela la troupe et le fit mutiler à coups de pierre, de sabre et de baïonnette; il eut le poignet coupé, et il ne dut son salut qu'à la fuite (2).
Le même jonr 3 mai, sur le soir, le sieur La-porte, ofticier municipal, en écharpe, fut rencontré dans la rue, escorté de 7 ou 8 travailleurs, le sabre nu à la main ; des patriotes lui demandèrent s'il n'y avait pas du danger à passer, il répondit brusquement :je n'en sais rien(3).
Dans toutes les rues, places et carrefours, il existait des groupes d'hommes à cocarde blanche, armés; les bons citoyens et les soldats de Guyenne étaient attaqués s'ils paraissaient; plus de 20 personnes furent poursuivies à coups de pierre et blessées; certains furent même couchés en joue (4).
Le lendemain 4 mai, au matin, la tranquillité régnait dans la ville et M. le maire publia la loi martiale.
Le même jour la municipalité passa bail d'un terrain vacant à Proment et à Folacher, chefs des complots, à l'effet de les rendre éligibles pour le département.
Ledit jour 4 mai, sur les 8 à 9 heures du soir, le maire étant chez le juge Mage, on parla des événements arrivés le dimanche, on témoigne au maire les craintes qu'on avait eues pour lui,
il répond : Si j'avais reçu la moindre êgratignure, 100 des plus riches et des plus notables de la ville auraient été tués. On répond que (taus une guerre générale, il pouvait en périr 1,000 comme 2,000; et il réplique, non, 100 des plus riches (1).
Le mercredi 5 mai, au matin, la municipalité devait se transporter au couvent des capucins, pour faire l'inventaire du mobilier; pour l'éviter il fut formé un attroupement de femmes, devant la porte de ce couvent, et l'inventaire ne fut pas fait (2).
Le même jour, le maire et le sieur Descombiès, notable, font une descente chez Marignan, vendeur de vin, inculpé d'avoir des armes; on fouilla sa maison, rien n'est trouvé; Marignan veut se plaindre de ce que la veille on lui avait tiré un coup de fusil, on lui impose silence, et le lendemain le sieur Descombiès lui fait défense de vendre du vin (3).
Sur les 10 à 11 heures du soir dudit jour 5 mai, le sieur Vidal, procureur de la commune, introduisit furtivement dans sa maison un nombre considérable de gens armés de fusils et de sabres ; ils y passèrent la nuit (4).
Ce même Vidal, procureur de la commune, cherche à exciter le peuple contre les opérations de l'Assemblée nationale; il dit que les milices nationales avaient été formées pour repousser les brigands; que c'était un prétexte de l'Assemblée nationale pour faire soutenir ses décrets « que les vrais brigands sont les représentants de la nation» ; il dit aux huissiers, dans leur bureau, afin qu'ils le répètent dans les lieux où leur ministère les appelle, « que l'Assemblée nationale fait beaucoup de mal, que tout le monde perdra dans la Révolution ».
Rabanis, concierge, créancier de M. Vidal, oncle du nommé Gas, son clerc, dit à qui veut l'entendre, que MM. Necker et S. Etienne, sont des monstres, qu'ils mériteraient d'être écartelés; que la majorité de l'Assemblée nationale est une troupe de brigands; que, s'il y avait 1,000 hommes comme lui» ils iraient les massacrer tous; que les protestants les soutiennent; mais que bientôt ils en seront dupes, qu'il n'en échappera pas un seul; que cela fait, l'Assemblée nationale sera dissipée (5).
Le dimanche 9 mai, un frère capucin (nommé Modeste) distribuait, au sortir de la messe, un imprimé : deux particuliers de Redessan lui en demandèrent un, il le leur donna, il a été joint à la procédure. Cet imprimé intitulé : Nouvelles de Paris, est incendiaire; les membres dé l'Assemblée nationale y sont désignés, un repaire de brigands. MM. Necker et La Fayette y sont diffamés (6).
Il se forma, à la même époque, une société
dans la maison et jardin du sieur Cabrit. Les associés étaient entre autres, MM. Teiesier de Marguerittes, maire; Vidal, procureur de la com mune; Boyer Brun, substitut; Fërrand Demissol, de La Baulme, Du Doure, Lieutier, Ferrand, Aigon, Laure srGrelleau, l'abbé de Belmont, etc., etc., officiers municipaux; Descombiès, Durand, Pouil-lache, l'abbé Cabaoel, Soubeiran, etc., notables; Lasaumès, chanoine; La pierre, théologal; La-pierre, président; Michel, Folacher, Froment, Melquion et Goussard, avocat, commissaires de la délibération du 20 avril et capitaines des compagnies à cocarde blanche, et ensuite à pouf rouge; Lami, Bazile, Ravel, Bosquier, etc., etc., autres capitaines à pouf rouge (l)i.
Instruite que ie procureur uu roi a porté plainte en raison des attroupements des 2 et 3 mai, voulant y faire diversion, la municipalité informe; des bas officiers, ou soldats de Guyenne, sont administrés en témoins, le procureur de la commune etie sieur de La Baulme les interrogent, et veulent leur faire déclarer qu'ils avaient reçu de l'argent pour arracher les cocardes blanches; ils dénient le fait, on les menace de la prison; ils persistent, et on les renvoie, sans recevoir leur déposition. Le sieur Salaville, fils, est aussi appelé en témoin; il dépose contre le désir du procureur de la commune, qui lui dit, vous êtes partial, et le renvoie sans écrire sa déposition (2).
Sans doute que cette forme iDquisitoriale ne fut pas heureuse. Le procureur de la commune assembla le conseil général le 13 mai; il fit un exposé artificieux* inculpant les bons c+toyens de Nîmes, et les bas officiers et soldats de Guyenne, de séduction, et d'être les auteurs des événements arrivés les 2 et 3 mai; et, sur cet exposé, le conseil général délibéra de dénoncer l'accusation au procureur du roi. fin conséquence, le sieur Vidal se présenta chez ee magistrat, pour faire recevoir la dénoncé; elle fut couchée dans son registre; mais le sieur Vidât refusa de la signer, parce qu'elle contenait promesse de garantie : il en lut écrit à M. le garde des sceaux, qui décida que la dénonce devait être admise,1 et que les dénonciateurs étaient garants de droit, quoique non soumis. D'après cette décision, la dénonce fut reçue, et la plainte portée le T juin, les témoins administrés par le procureur de la commune, assignés pour déposer le 9; et ee jour même le sieur Vidal, craignant avec raison la sui e de sa dénonce, fit prendre une délibération, par laquelle le conseil général de la cotpînune déclare qu'il n'a jamais entendu s'ériger en ptei* gnant, mais seoletnent faire connaître au ministère public tm délit; Le procureur du roi, instruit de cette1 démarché, et la considérant comme un désistement de ta dénonce, fit discontinuer l'information*; il y avait déjà deux témoins d'ouïs (3).
La proclamation du roi du 26 mai, concernant la cocarde nationale, ayant été publiée, la municipalité en donna une à chacun des Cebets qui avaient ci4evant arboré la cocarde blanche; ils allèrent la prendre à l'hôtel de ville. Vidal, procureur de la commune, Descombiès, notable, et Froment, receveur du chapitre, les distribuaient, Froment recommandant à chacun de prendre un pouf rouge chez leurs capitaines, chargés de leur en remettre. Le lendemain de cette distribution, le pouf rouge fut arboré par les compagnies de la Crois, et l'on voyait à chaque heure du jour de cessoldatset officiers antipatriotiques dans l'hôtel de ville, s'y renfermant même avec les municipaux (1).
De« conciliabules se tiennent au jardin de Cabrit; le sieur de La Baulme y parle de moyens de conciliation avec le club des amis de la Constitution : Folacher déclare qu'il faut la guerre, et l'officier municipal répond : « Si vous la voulez, « soit ; je vous promets que je remplirai mon « rôle comme le plus vaillant Cebet. * Ce fait est établi par la déposition du sieur Canonge, électeur, l'un des associés au jardin de Cabrit, il est le cent soixante et onzième témoin.
Froment cherche à augmenter sa compagnie; il fait sollicUer et offrir à ceux qui voudraient y entrer, un habit complet, des armes et de l'argent. Pierre Froment, son frère, et Folacher, son beau-frère, disent que leurs compagnies brûlent de se battre; que chacun de leurs volontaires est dans la meilleure disposition (2).
Le 4 juin est le premier jour de l'assemblée électorale; les gens à pouf rouge, armés de sabres, s'attroupent en entourant les avenues du palais où se tenait l'assemblée : des patriotes en sont inquiets ; ils vont en prévenir la municipalité : le sieur Ferrand Demissol, l'un des membres, leur dit que cela ne les regarde point (3).
Sur la réquisition de MM. les commissaires du roi pour la formation du département du Gard* des patrouilles du régiment de Guyenne et de dragons nationenx furent faites, et tes attroupements dissipés; les Cebets à pouf rouge, dignes soutiens de la municipalité, dociles à leurs réclamations, oMonna que les dragons ne feraient plus de patrouilles; cela résulte du procès-verbal du corps électoral, séance du 41 juin, portant des éloges au service des dragons, et réquisition à la municipalité d'en placer un piquet près du palais, pour être employé en cas de besoin; malgré cette réquisition, le piquet ne fut peint ordonné : il resta toujours au poste de févêché.
Dans l'intervalle des séanees dn corps électoral, il y eut plusieurs soupers de personnes formant la société du jardin -de Cabrit ; il y fut admis des gens à pouf ronge (4).
Le dimanche 13 juin, i! y eut assemblée à deux heures après midi, dans l'église des Jacobins ; «lie étaît formée des légionnaires à pouf ronge : on y prononça un discours contenant l'éloge de M. de Marguerittes, maire. A l'issue de eette assemblée, Pierre Froment, ayant auprès de lui une dame^ jeanne de vin, versait t boire aux Cebets; ensuite il leur prescrivit d'aller de trois en trois
dans la ville, et de désarmer les dragons qu'ils rencontreront hors de leur poste. Trois dragons en uniforme, sabre tt baudrier, allant à la comédie, furent arrêtés par on homme à pouf rouge, qui leur demanda s'ils étaient de service; ils ré-pondiieut : Oui. L'homme à pouf rouge répliqua : Vous n'avez pas le droit de porter vos sabres, nous vous les ferons bientôt quitter (1).
Le même jour 13 juin, sur les 4 à 5 heures après-midi, le sieur Pélatan, ancien procureur, interdit pour crime de faux et prévarication, était au milieu d'un groupe de Gebets à houppe rouge, sur la place de l'esplanade, près la salle du club des amis de la Constitution, qui éiaient alors assemblés, et où étaient plus de 200 électeurs : Pélatan disait aux Gebets : « Mes amis, c'est au club par où il faut commencer, et ne pas laisser échapper un de ceux qui y sont. » Ce propos lut entendu; le club fut instruit, et sa séance levée (2).
A peu près au même instant, un membre de la société du jardin de Gabrit ordonna au concierge d'enfermer laporte de bonneheure;5ou6hommes à pouf rouge y étant survenus, restèrent environ trois quarts d'heure : étant sortis avec Thomas Froment, le nommé grand Delon, Cebet à pouf rouge, tenait un papier roulé dans la main, marchant avec précipitation; Froment lui disait de ne pas al!er si vite, c'est ce qu'a déposé le cinquantième témoin de lauite information, ajout int qu'un moment a rès un dragon parut, criant qu'on attaquait les dragons : il parla d'une lettre qu'on leur avait portée, le témoin ayant cru que c'était le papier qu'il avait vu entre les mains du grand Delon.
Et en effet, environ les 5 à 6 heures du soir, un volontaire à pouf rouge se présenta à la porte de l'évêché ; il demauda d'entrer, ou qu'on fit sortir les dragons ; le portier refusa : le volontaire se retira, et revint 2 minutes après, avec 2 camarades à pouf rouge ; il remit au suisse un billet qui fut porté au sieur Paris, aîné, lieutenant de- dragons; ce billet était ainsi conçu : « Le suisse de l'évêché est averti de ne plus « laisser entrer aucun dragon à pied ni à cheval, « passé ce soir, sous peine de la vie, ce 13 juin »...
Le lieutenant des dragons s'approcha du porteur de ce billet, lui fit des représentations pour le faire éloigner, ou l'engager à se rendre à la municipalité. Dans l'intervalle, le nombre des houppes rouges s'accrut; les dragons les invitèrent à la paix ; mais en vain : les gens à pouf rouge jettent des pierres, ils crient aux armes : d'autres, qui étaient postés dans les rues voisines, arrivent sur la place de l'évêché, armés de fusils et de sabres ; il n'y avait dans ce moment que 12 dragons. Le lieutenant commande au trompette de sonner pour rassembler ceux qui s'étaient éloignés du poste ; les légionnaires à pouf rouge enlèvent la trompette et la mettent eu pièces : des coups de fusils sont par eux tirés aux dragons; l'un d'eux riposte par un coup de mousquet; le feu devient respectif, le combat s'engage : un dragon est envoyé à l'hôtel de ville pour aviser les officiers municipaux ; ceux-ci sont immobiles, et bientôt ils vont se cacher (3).
M. Saint-Pons, major de la légion, instruit qu'on assassine les dragons à l'évêché, ramasse 12 ou 15 volontaires patriotes sans armes; il rencontre le sieur Vidal, procureur de la commune, le prie et le presse de se joindre à lui pour l'aider à dissiper les assassins; Vidal se rend avec répugnance à l'hôtel de ville, d'où il disparaît : c'est ce qu'a déposé le major ; il est le soixante-troi-sième témoin.
M. Saint-Pons et autres ayant trouvé 2 officiers municipaux, les engagèrent de se rendre à la place de l'évêché, escortés d'un détachement de la compagnie n° 1, de garde à l'hôtel de ville ; chemin faisant, ou tira sur eux. Arrivés à la p!ace, les Cebets firent une décharge sur cette escorte ; personne ne fut atteint : les houppes rouges se rendaient en foule à la place, par les 3 rues qui y aboutissent; la compagnie n° 1 les repoussa, s'empara des avenues, eu recevant et rendant le feu. Uu volontaire de celte compagnie fut tué d'un coup de fusil tiré d'une fenêtre de la cure ; plusieurs furent blessés (1).
Un Cebet à pouf rouge, blessé au bras dans le premier moment du combat, s'était rendu au quartier général (les tours du château, près la maison de Froment et le couvent des jacobins), et avait donné avis de ce qui se passait à la place. Les Froment, Folacher et Descombiés, capitaines et chefs du complot, avaient disposé leurs volontaires, et s'étaient emparés de divers postes, notamment de la porte des Carmes, attenant à l'église des jacobins, de la maUon de Froment, de la partie des remparts sur lesquels cette maison communique, et des tours du château, dominant sur les Galquières, et où l'on arrivait de la maison de Froment (2).
Pendant ces entrefaites, l'alarme, la désolation et la terreur étaient répandues dans toute la ville; aux Galquières, le nommé Anci, maçon, volontaire de la compagnie Lami, à pouf rouge, coucha en joue un légionnaire de la compagnie n° 1, déjà blessé à la première action ; on l'empêcha de tirer (3).
Trois autres volontaires de la compagnie Lami tirèrent chacun un coup de fusil à un légionnaire sans'pouf et sans armes (4).
A la rue Notre-Dame, près les Galquières, d'autres volontaires de la même compagnie Lami assiégèrent la maison du sieur Alison, capitaine d'une compagnie patriote ; des coups de fusil fureut tirés : le sieur Alison fut privé de sortir, et ses volontaires ne purent se rendre chez lui pour s'armer (5).
A la porte de la Madeleine, la porte d'entrée de la maison du sieur Jalabert, droguiste, père de famille, septuagénaire et protestant, est enfoncée ; on l'arrache de sa maisou; on le traîne à la rue; 15 hommes à pouf rouge le mutilent à coups de sabre : il mourut 2 jours après de ses blessures (6).
Un autre vieillard, nommé Astruc, les cheveux blancs et courbé sous le poids des années, marchant de la porte de la Couronne à celle des Carmes, reconnu pour être non catholique, reçoit
divers coups de fourches fabriquées par Cœsset : les Cébets à pouf rouge ie jettent dans les fosses, le massacrent a coups de pierre; ils finissent par lui tirer un coup de fusil, et il meurt (1).
Trois électeurs, les sieurs Massador, du district de Beaucaire, le sieur Viala, du canton de la Salle, et le sieur Puech, du môme canton, furent assassinés par des gens à pouf rouge, et grièvement blessés en se retirant chez eux : cela résulte du verbal du corps électoral du 14 juin au matin.
Le capitaine qui avait commandé le détachement de garde à l'assemblée électorale, se retirant avec un sergent et 3 volontaires de sa compagnie, arrivé sur le petit cours, Froment, dit Damblay, frère du capitaine, receveur du cha-
fùtre, les arrête ; et s'adressant au capitaine, en ui mettant le pistolet sur l'estomac, lui dit : Halte là coquin, rends les armes : des Cébets à pouf rouge saisissent le capitaine par les cheveux, le font culbuter eu arrière. Froment lui tire le coup de pistolet et le manque; il est désarmé de son épée, et blessé de celle de Froment : il sort un pistolet de-ea poche, écarte les assassins, tire sur Froment et le manque ; l'un de ses volontaires est blessé et désarmé (2).
Une patrouille du régiment de Guyenne, à la suite de laquelle était le sieur Boudon, dragon, passait aux Calquières ; le sieur Boudon est attaqué par une troupe de gens à pouf rouge ; on lui enlève son casqueetson mousquet, plusieurs coups de fusil lui sont tirés ; ils ratent, et il reço t deux coups de.baïonnette : la patrouille l'enveloppe pour le sauver, mais, doué d'un caractère impétueux et rempli de bravoure, le sieur Boudon s'élance pour reprendre son mousquet; il est à l'instant massacré par les Gebets ; on lui coupe le doigt pour avoir un diamant dont il était orné; on le dépouille de ses montres, et on le jette dans le fossé (3).
Le drapeau rouge qui, dès le premier instant de l'avis donné aux officiers municipaux, aurait dû sortir, est vivement réclamé; on presse, on force même l'abbé de Belmont, chanoine, vicaire général et officier municipal,à le porter, « comme le plus propre, par son caractère, àen imposer aux malveillants : » il accepte; le drapeau rouge est par lui pris; il sort enfin, escorté d'une patrouille de Guyenne, de quelques.légionnaires, et de trois ou quatre dragons; arrivés aux Calquières, les assiégeants, qui étaient postés aux remparts et aux tours, font une décharge sur l'escorte, qui rétrograde à l'instant; l'abbé de Belmont s'avance seul avec le drapeau rouge; les assaillants,ayant à leur tête Descombiès, courent à lui et l'enlèvent avec le drapeau,^).
Le sieur Paris, lieutenant de dragons, était réuni à l'escorte du drapeau rouge : s'élant arrêté avec le sieur Laurens, officier municipal, qui venait de la société Cabrit, il fut arrêté par quatre Cebets a pouf rouge ; trois le couchèrent en joue; le quatrième le pointa avec sa fourche; le sieur Laurens le sauva par. ses prières, et fut lui-même blessé d'un.coup de sabre à la main. Un instant après le sieur Dupontet, dragon, passant à pied, Descombiès cria : les fourches à Dupontet : aussitôt quatre de ses volontaires le pointèrent, l'excèdèrent de coups, et le jetèrent dans le fossé, lecroyaut mort (5).
Dansletempsqueledrapeaurouge avait été porté par l'abbé de Belmont, les autres officiers municipaux avaient été sollicités de se rendre aux casernes pour réquérir le régiment de Guyenne. MM. de Glansonrtette, Griolet et Meynier, commissaires du roi, et Pontier,officiërrmànicipal,s'étant concertésaveC lé lieutenant-colonel et le major, il fut déterminé que MM. Griolet et Pontiers se rendraient à l'hôtel de ville pour conférer avec les autres officiers municipaux : arrivés, il fut déterminé, forcément de la part des officiers municipaux, que la loi martiale serait publiée (1) ; en ; conséquence M. Ferrand Demissol dressa la proclamation, et prit un autre drapeau rouge; et, suivi d'une escorte considérable, il prit la même route que son confrère l'abbé de Belmont. Arrivé aux Calquières, les gens îà pouf rouge qui n'avaient pus désemparé des tours et des remparts, firent une nouvelle décharge sur ce cortège; uù légionnaire reçut un coup de feu à la cuisse;" l'escorte rétrogada encore; et M. Ferrand s'étant avancé, ainsi que l'abbé de Belmont, vers la porte des Carmes, les légionnaires à pouf rouge l'enlevèrent avec le drapeau, et le conduisirent à la tour où ils étaient reiranchés(2). g,
Détenu dans la tour, le sieur Ferrand fit des représentations aux chefs des rebelles; Froment, l'und'eux, jetant son chapeauavecirâge, se plaignit de ce que la municipalité ne leur avait pas livré la cidadelle (3). tiïi ; o ;
La troupe, qui avait été forcée d'abandonner le second drapeau rouge, se rendit par un chemin détourné aux casernes ; le régiment de Guyenne était en ordre de bataille;; mais M. de Bonne, lieutenant-colonel, ne voulut jamais le mettre en marche, sans une réquisition de la municipalité; en vain les commissaires du roi sollicitèrent le sieur Pontier, officier .municipal, de faire cette réquisition; un vieux caporal indigné, cria : Braves soldats de Guyenne, la patrie étant en. danger, nous ne devons pas attendre plus longtemps pour remplir notre devoir; à ces parolés, le lieutenant-colonel commanda la marche; les légionnaires patriotes se réunirent au régiment : le calme fut ramené; le régiment rentra aux casernes, et les légionnaires allèrent passer la nuit dans un enclos sur le chemin de Montpellier (4).
Les rebelles continuèréntd'occuper les remparts et les tours; Froment, avocat, receveur du chapitre, Folacher, son beau-frère et Descombiès, notable, tous les trois capitaines, et chefs assiégeants, prirent des précautions pour avoir des secours à 11 heures au soir; il dépêchèrent deux exprès à M. de Bouzzols, commandant en second de la province du Languedoc, chargés de deux lettres, écrite l'une par Descombiès, l'autre par Froment. (Elles sont à la suite des vérités historiques.)
Du pr é et Lieutaud furent chargés de ces deux lettres, Descomniës et Froment lès ayant munis d'un passeport, comme chargés d'affaires du roi et de l'Etat. (Ils sont imprimés à la suite des vérités historiques.)
D'autres légionnaires à pouf rouge vont parcourir les villages voisins ; réunis à minuit à plusieurs habitants de Courbessac (lieu où Descombiès a une maison de campagne}, ils présen-
tent au ctiré une lettre décachetée, portant qu'on avait tué un capucin; qu'il fallait donner du se* cours, et en réclamer; ils voulaient que ly curé signât cette lettre, pour la produire ailleurs; U s'y refusa. Cela résulte de sa déposition (1)» .
Le lundi matin, le vicaire de Bouillargues disait publiquement au curé de Kodillon, qu'il y avait une révolté à Nîmes, ajoutant : nous sommes tous perdus* Le sieur Jaufrès> praticien, beau-frère du sieur Grelleau, procureur et officier mu-nicipal, capitaine à poui roUge de la compagnie de Gaissarguesj écrivit au sergent de cette compagnie d'arriver promptement chez Froment, par la porte des Carmes (2). j
Le sieur Vignes, négociant, capitaine d'une autre compagnie à pouf rouge, étant à Bouillargues dè8 le grand matin du lundi» répandit le bruit que les protestants massacraient les catholiques à Nîmes; les mêmes propos furent tenus à Manduel; le tocsin sonna; les habitants de ces deux villages Se rendirent armés sur le chemin de Beaucaire à Nîmes, au Pont du Quart; ceux de Redessan et Marguerittes se joignirent à eux ; lé sieur Vignesy allaaussi; cette troupe catholique arrêtait les passants, et les interrogeait; s'ils étaient protestants, ils étaient massacrés: Blan-cher, Hugues, Peyre et trois étrangers élevant des vers à soie dans une campagne voisine furent tués (3)i
Descombiès,Froment et Folacher, chefs des rebelles, n'avaient pas désemparé de la tour et des remparts; dès le matin, leur troupe fut augmentée; Descombiès et Froment enfoncèrent une porte de la maison de Therond, pour entrer chez les Jacobins, et de là à la tour attenant au couvent} ce qui fut exécuté i ils établirent divers postes, notamment à l'embouchure de la rue du Collège, allant chez Froment, à la porte des Carmes, et en delà du pont pour aller aux Colquiè-1 res. De Ces divers postes, oh tirait sur des cl» toyens isolés et sans armes (4).
Tandis que les rebelles s'étaient ainsi disposés, les patriotes des villes et villages voisins arri-> vèrent et formèrent un corpi d'armée sur la place de l'Esplanade; lès légion nan\ s patriotes de Nîmes s'y réunirent. M. Saitit-Pons, major, dès le matin, se rendit avec une compagnie danB lè couvent des capucins, dont les fenêtres dominent sur la place où. était l'armée; la visite fut faite avec tranquillité et décence t cela résulte de la disposition du major, il est le SOixanlé-trbiëiéme téa mOiri; et encore du certificat des capUcinS; Les arêneS furent également Visitées* et rien n'y fut trouvé de suspect. *
Au lieu d'être à leurs fonctions, les officiers municipaux disparurent dé l'hôtel de Ville; les commissaires du roi en informèrent le corps élec* toral, qui nomma de suite un comité militaire et de Subsistance, chargé de pourvoir, conjointement avec les commissaires du roi et les officiers municipaux qui restaient, au rétablissement dé l'ordré; ée fait résulte du procès-verbal de la séance du lundi matin, 14 juin.
Dans le temps c(ue l'armée et le côrps électoral s'occupaient de là sûrété générale, le procureur du roi et le lieutenant criminel visitaient les cadavres; 4 étaient vérifiés* et un cinquième
al'ait l'être, lorsqu'une troupe de révoltés à houppe rouge fit une déchargé sur ces magistrats et leur escorte; cela résulte de leur procès-Verbal.
Toujours dans la matinée du lundi, les gardes nationales d'Aiguevives, Vauvert et plusieurs de Nîmes, défilaient dans la rue de Lespiç, criant i Vivent la nation, la loi et le roi 1 Ce cri de joie fut bientôt changé en cri de douleur : de la fenêtre d'une maison, au coin de la rue de l'Horloge, on tira sur ces patriotes; le tambour de la garde nationale d'Aiguevives fut tué, et son cadavre porté à la maison commune 0).
Dans le même instant, la compagnie Lami s'introduisit par, une porte de derrière dans le couvent des capucihs ; des coups de fusil furent tir és du couvent, ou des fenêtres, sur l'armée qui était à l'Esplanade; un officier municipal de Saint» Côme, en écharpe, et à la tête des gardes nation nalesdece lieu, fut tué, un sapeur blessé à mort, 25 autres gardes nationales blessés; on tira encore des arènes sur l'armée; ce signal de carnage irrita ces troupes; çlles se. portèrent au couvent des capucins; au lieu de leur ouvrir la porte, on sonne le tocsiu, la porte fut enfoncée; 5 capucins et plusieurs houppes rouges tués, le3 autres prennent la fuite : L s capucins qui sont épargnés, se réfugient chez Paulhan, non catholique (cela résulte dé leur certificat): le couvent est dévasté; mais l'église est respectée; un ciboire trouvé dans la sacristie, est volé par un brigand de 8ommières> qui s'était mêlé dans la troupe ; il fut arrêté et mis en prison (2).
Le feu lé plus soutenu et le plus opiniâtre fut fait en même temps par les gens qui occupaient les remparts et la tour, vis-à-vis la maison de Froment, et des deux autres tourS, attenant à la maison des Jacobins» desquelles Folacher, Descombiès et Froment s'étaient emparés; Ce feu, qui commença à 10 heures du matin, continua jusqu'à 4 heures après-midi ; il fallut mettre du canon en usage pour assiéger les tours et les remparts^
A 4 heures, les scélérats Dêscombiés, Folacher et Froment, se qualifiant de capitaines commandant les tours du chàtéau, écrivirent la lettre sui-* vante : « à Monsieur le bomîmhdant des troupes « de ligne, pour communiquer aux légionnaires « campes à l'Esplanade. Monsieur,h. on vient de « nous dire que vous proposez la paix. Nous l'a1* »vons toujours désirée, et jamais nous ne l'a-« vons troublée Si ceux qui sont la cause des « désordres affreux qui régnent dans la ville, « veulent mettre fin a leur coupable conduite, « nous offrons d'oublier le passé, et de vivre en « frères. Nous sommes avec toute la franchise et la loyauté de bons patriotes et dé vrais Fran-« Çais, vos très humbles serviteurs, les capitaines « de la légion nîmoise, comman dant les touis du « château. Nîmes, le 14 juin 1790, à 4 heures du « soir. » Cette lettre fut portée par le valet de Descombiès; il est le cent quarante-septième témoin de l'information.
D'après cëttè lettre, le trompette de la ville fut envoyé aux tours pour offrir adx rebellés ufie capitulation. Leurs chefs se présentèrent pour parler aux commissaires du Cbrps électoral ; ils étaient armés et suivis d'un grand nombre d* légionnaires aussi armés, couchant en' joue les électeurs. Malgré cette conduiter on proposa aux
trois Chefs, Descombiès, Froment et Folaeher/de \ se rendre et se mettre sons la sauvegarde de l'assemblée électorale} ils s'y refusèrent; le public en fut Indigné : les commissaires électeurs se retirèrent, et les rebelles rentrèrent dans leurs retranchements.
Ces faits sont établis par les témoignages déjà rappelés ; ils le feront encore par ceux de M, Gha* baud, vice-président du département ; dë M. de Jonquier du Saint-Esprit, et M. Le Grand, qui étaient les commissaires du corps électoral.
Le feu continua de part et d'autre; lë canott tira; le9 rebelles abandonnèrent les tours et lès remparts, ils prirent la faite; certains furent se réfugier à la maison des Jacobins, d'autres à celle du collège, attenant atix remparts; les assiégeants les poursuivirent; 4 ou 5 furent tués; Pierre Froment fut du nombre; la maison de Froment livrée au pillage : oh soupçonna les Jacobins d'avoir favorisé l'entrée dâns leurs tours; des dégâts sont commis à leur maison; mais l'église est respectée, ainsi que celle du collège; cela résulte des mômes preuves rapportées ci-devant, et des certificats imprimés, donnés par ces deux maisons religieuses.
Le lendemain mardi, le sieur Vidal, procureur de la commune^ travesti en soldat, et Lau-renS, officier municipal, cachés depuis le dimanche dans la maison de Gas, cant^nier des gehs à pouf rouge, furent trouvés caèhês dans une autre maison inhabitée; on voulait les conduire à: la lanterne : le SîfeUr Ri bot, non catholique ët capitaine d'une Compagnie, les SauVa, eûles conduisant an palais, pour les mettre sous la sauvegarde du corps électoral, qui les reçut; mais dans la nuit'ils disparurent, et depuis lors le sieur Vidal ëst réfugié dans le Vivarais. Ces fàjlts notoires sont établis par la procédure, notamment par la déposition oU cent vingt-quatrième témoin.
Ce même jour* lé Sieur Vignës, capitaine à pouf rouge, était avec des gens armés sur le chemin d'Arles; se disant Commandant de poste; il arrêta Un valët de Ville envoyé par la municipalité d'Arles, chargé d'une lëttre pour ié club des amis de la Constitution ; il le força de se rendre au château dë La Coste,dit Bëllevfië, intercepta la lettre, empêcha le message dé se rendre à Nîmes, le fit rétrograder, ayant fait la mintite d'une lettre remise dans la procédure, conçue en ces termes '. « Ce 15 juin 1790... Monsieur, dans la « situation où se trouve la ville de Nîmes, j'ai « eu ordre d'intercepter toute correspondance, « et de prendre connaissance de tout événement ; « en conséquence votre lettre a été ouverte... » La lettre fut déchirée; ët la ftartiëqui contient ces mots remise par M; de La Baufme,cent quinzième témoin de l'information; il a déposé avëc étëttdbe sur tolls les détails, desquels il résulte qde le sieur Vignes était sur le chemin cômme chef d'une troupe ; ce qui est encore établi par le rapport du valet dë villë d'Arles et qui doit l'être . par les témoignages du curé de Bouillargues et du vicaire de Bellegardo, indiqués par le sieur de La Baulme.
Après cette expédition^ le sieur Vignes, à la têle de sa troupe armée, se porta dans plusieurs campagnes voisines, et faisait forcer les.personnes qui y êtàlënt de se, réunir & la troupê. Cela est prouvé par les témoins déjà indiqués sur les faits les concernant, du lundi malin.
Le même jour, 15 juin, le corps électoral s'oc* cupa de rendre la tranquillité dans la ville lie lendemain 16, la paix tut publiée : Tes circon-
stances qui ont précédé et suivi, sont rendues en détail dans un récit adressé par les COEunissai-res du roi à l'ASseniblée qàtîonale,
La paix était ramenée dans la ville, tandis qu'au dehors il se commettait de nouveaux crimes. Un verbal des commandant et officiers de la garde nationale dé ïloquémaure a donné lé détail de ce qui S'eSt passé à Remoufin, Lafoux, Saim-Bonhet etBeztousse ; on y remarque que des Gebets à pouf rouge de la ville de Nîmes et un capucin, excitaient la rage de? soldats catholiques contré les protestants ; et il résulte des interrogatoires des nommés Rihlères frères, fugitifs de Nîmes, décrétés de prise cfe corps, ..que le çuré de Saint-Bonnet donna la bénédiction aux soldats nationaux, en les exhortant de se rendre à Nîmes.
Une procédare particulière, faite à là requête du sieur Maigre, établit avec évidence que le si^ur Maigre, son père, âgé de 80 ans^ et son frère aîné furent assassiné sur le terroir dudit lieu de Saint-Bonnet, et jetés daqS la rivière du Gardon ; ils étalent protestants.
Le 17, le procureur du roi et ie lieutenant crifpinel s*êtant transportés dans, ie cqqvent. des capttcins pour en constater l'état, ils y trouvèrent une quantité considérable de brochures incendiaires, relatives à la Révolution. Gela est établi par le procès-verbal joint à l'information. Ce procès-verbal dément tous les récits faits par les officiers municipaux sur les prétendus désordres commis dans l'église.
Nouvelle adresse de là municipalité de nimes présentée à l'Assemblée nationale par M. de Marguerittes, député du département du Gard et maire de Nîmes* et par M. Bayer, substitut du procureur de la commune de la même ville ; en réponse à 1 adresse du directoire du département du Gard du 25 septembre dernier, et d'un avertissement signé par MM. Chambon, Voulland, Soustelle, Rabaut et Meynier.
Messieurs, les officiers municipaux de Nîmes, calomnieusement inculpés aux yeux de la France entière, ont crû devoir user avec courage du droit de publier leur justification. On leur oppose des procédures Consommées a la hâte, une information dirigée par les membres du club et dans laquelle le procureur du roi n'a voulu faire entendre aucun des nombreux témoins qui devaient constater les assassinats commis, avec autant de sang-froid que d'atrocité, sUr plus de 200 pères de famille, dont 133 sont connus. Mais une publiée à Paris au no n des officiers municipaux, dont M. Boyer, substitut du procur reur de la commune, avait les pouvoirs, et réimprimée à Nîmes au nom de tous, a démontré la partialité de ces procédures et la nécessité d'ordonner, Conformément aux décrets, rendus pouf Moutauban le 26 juillet et pour Schelestàdt le 14 aoUt, que l'information commencée devant les juges de Nîmes, relativement aux troubles quiont eu lieu dans Cette ville pendaut les mois de mai et de juin, demeurera comme non-avenue et qu'il sera informé devant les juges de Montpellier, ou autres étrangers au dépâ'rtçirtênt du Gard et à la diligence de là partie pUbliqUë, de tous les évé-
nements arrivés à Nîmes, les 2, 3, 4 mai, 13,14, 15, 16, 17 juiD, ainsi que de tous ceux qui y sont relatifs, tant antérieurs que postérieurs auxdites époques, circonstances et dépendances.
La justice de cette pétition du corps municipal tient à des développements et à des détails affligeants, dont rimiispensable révélation ne doit épouvanter que ceux qui ont commis les crimes ou qui les ont conseillés.
Dans une adresse que le directoire du département du Gard vient de publier, il a cru que cette révélation n'était propre « qu'à réveiller les haines et qu'à exciter la fermentation des esprits ; qu'à contrarier ses bonnes intentions et qu'à traverser ses mesures.
Ces intentions et ces mesures, manifestées dans une précédente adresse des directoires réunis du département et du district, sont de jeter un voile sur les atrocités commises, d'en solliciter le pardon et d'empêcher,par là, qu'on en fasse la preuve et qu'on en dévoile les véritables auteurs.
Le directoire du département aurait pu considérer d'abord que l'adresse de la municipalité, publiée à Paris le 15 août, ne pouvait pas avoir pour objet de contrarier une adresse publiée à Nîmes, le 25 septembre suivant.
Il aurait pu considérer ensuite qu'il est grand sans doute d'user de clémence; que ce vœu doii réjouir les coupables; que c'est à eux de bénir les bouches qui proposent l'oubli du passé; mais que si la grâce est offerte à des citoyens opprimés et sans reproches, ce n'est alors qu'une atrocité de plus. Il n'en est aucun qui ne rejette avec fierté un pardon qui serait une flétrissure (1) : ce ne sera qu'après la conviction, que ce pardon pourra être un acte de bienfaisance.
Le directoire pense que les désordres de Nîmes sont « le crime des ennemis de la Constitution ; que la preuve de ces attentats est suffisamment acquise; que la cause du patriotisme est justifiée. »
Il est trop instruit pour croire qu'une preuve soit suffisamment acquise par de simples informations surtout lorsque dans ses information s l'esprit de parti, pour ne rien dire de plus, a dirigé la plupart des témoins, membres ou affidés du club; surtout lorsque le procureur du roi,sommé à diverses reprises, a refusé constamment, pendant cinq mois,de faire entendre les témoins indiqués par l'assemblée des représentants de la commune; surtout lorsqu'il a inhumainement rejeté les plaintes de plus de 60 veuves ou orphelins quf voulaient constater les assassinat? commis en la personne de leurs maris et de leurs pères ; surtout, lorsque les dégâts et les dévastations faits à main armée, et qui montent à plus de 700,000 livres ont été faits sous les yeux de 15,000 gardes nationales étrangers ou de la ville qui ne s'y sont point opposés et dont plusieurs y ont parti-ticipé.
Les officiers municipaux ont rétabli les faits dans leur adresse; ils ont publié un tableau qui dévoile des crimes affreux et des complots depuis longtemps ourdis, dont ils offrent et feront la preuve quand des juges impartiaux ne refuseront pas d'entendre les témoins des uns en admettant ceux des autres.
Il est certain que ces faits contrarient ceux qui ont été rapportés dans plusieurs relations, où tout çst dénaturé et où les plus grandes atrocités sont palliées et passées sous silence. Le directoire adopte l'une d'elles, et soutient que « tous les faits qui y sont consignés furent scrupuleusement examinés, et que chaque phrase et chaque mot fuient sévèrement discutés ».
Cette relation n'étant pas signée, il a été permis de la contredire et de la ranger parmi les libelles répandus contre la municipalité ; et puisqu'il y est dit qu'elle ne jouit pas de la confiance -publique, le directoire n'a pas pu exiger que ce ré il fût regardé comme une pièce probante, d'autant qu'il renferme plusieurs laits controuvés, tels que celui des coups de fusil tirés du couvent des Capucins dans lequel on n'a pu découvrir ni armes, ni munitions, ni légionnaires.
Cette légère contradiction a néanmoins excité son animadversion, et a été traitée d'audace; ses membres ont déclaré qu'ils « n'avaient pas voulu user des moyens que les lois leur confient pour rappeler à leur devoir des magistrats qui s'en sont si étrangement écartés. »
Heureusement, nous vivons sous des lois qui ne permettent rien d'arbitraire; et bientôt l'intérêt commun élèvera des digues contre la licence, contre l'anarchie, et posera des bornes que l'oppression ne pourra point franchir.
Les officiers municipaux n'ont éprouvé que
des vexations depuis qu'ils sont en place; s'ils devaient être encore exposés à de nouvelles violences de la part du club, ou des administrateurs du département et du district, membres de ce même club, ne devraient-ils pas se flatter d'obtenir «ne juste réparation en vertu de lois protectrices des droits de l'homme?
Ils doutent qu'aucune loi donne aux directoires des départements le droit d'outrager impunément des magistrats, et d'anticiper sur le jugement qui sera rendu par des tribunaux compétents et impartiaux.
Cependant le directoire du département dépeint, dans son adresse, les officiers municipaux se débattant sous la main de la loi; il leur reproche d'avoir emprunté le masque trompeur du patriotisme; il emploie le terme de mépris; il y témoigne l'aversion qu'éprouvent « des corps administratifs d'avoir des rapports nécessaires et journaliers avec des magistrats qu'ils ne peuvent traiter comme coupables » (certes ils savent bien qu'ils ne le sont), « ni regarder comme innocents ». Avant le succès de leur adresse calomnieuse, n'étaient-ils pas forcés de leur rendre à cet égard la justice éclatante que 40,000 de leurs concitoyens ne cessent de leur rendre? Mais ce sont là des outrages gratuitement prodigués, dont il sera permis de tirer une vengeance éclatante; non cette vengeance que peuvent exercer, dans ces temps malheureux, et qu'exercent, dans toute l'étendue du royaume, ceux qui ont à leur solde et à leur disposition des hordes de brigands, et qui savent diriger les poignards de la multitude, mais cette vengeance, taruive quelquefois et toujours injuste, que les lois promettentet assurent à tout honnête homme, à tout citoyen, à tout magistrat, odieusement inculpés et outragés.
Les officiers municipaux sont moins prompts à accuser; ils n'anticipent pas sur l'avenir; mais i!s ont droit d'attendre que des procédures faites avec impartialité et dans une ville étrangère à tout esprit de parti, manifesteront de quel côté sont la justice et la vérité.
Alors ceux qui redoutent cette accablante vérité, qui fuient à son approche et qui voudraient l'étouffer par une amnistie, se débattront à leur tour, sous la main de la loi; alors les masques tomberont et découvriront des âmes atroces; alors le terme de mépris sera trop doux, et celui d'exécration ne sera pas même assez fort; alors les coupables seront connus, et on saura dans quelles vues, sous quels prétextes, sur quelles réquisitions, des brigands fanatiques, attirés dans la cité* ont rempli leur sacrilège mission de massacrer des prêtres et des catholiques, de dévaster les couvents et les maisons, et d'exercer toutes sortes d'atrocités ; alors on jugera sur qui doit retomber le poids des réparations de tant de désordres et des indemnités dues à tant de citoyens et à tant de veuves et d'orphelins. La manifestation de ces vérités sera terrible; mais elle est nécessaire. Les officiers municipaux la doivent à l'honneur de la cité et à la dignité des fonctions dont la confiance publique les a investis.
Il leur tarde, sans doute, de déposer ces fonctions qui n'ont été pour eux qu'une source d'amertumes : inquiétés et poursuivis avec acharnement, accusés et calomniés avec au lace, enfin échappés comme par miracle au glaive des assassins, ils ont offert depuis longtemps la démission de ces fatales fonctions ; mais tant qu'ils en seront revêtus ils les rempliront avec fermeté ; ils n'ont que trop cédé à la violence ; mais résolus
de ne se laisser rebuter ni par les menaces, ni par la terreur, et prêts à faire s'il le faut le sacrifice de leur fortune et de leur vie, ils ne feront jamais celui de leur honneur.
Le directoire prétend que la vérité est consignée dans le récit fait au nom des électeurs; mais il n'est pas un seul fait, de ce récit, sur lequel les électeurs n'aient été trompés et qui puisse soutenir une discussion sérieuse.
Us ont été trompés, comme on l'a déjà dit, sur les coups de fiisil qu'on prétend être partis du cloître des Capucins ; toute la contrée attestera le contraire.
Ils ont été trompés sur le massacre de ces religieux, sur les honteuses atrocités exercées sur leurs cadavres, sur les sacrilèges et les profanations, et sur les dévastations, dont ils n ont pas trouvé à propos de parler.
Ils ont été trompés sur les coups de fusil qu'on dit être partis des arènes et de la maison de l'infortuné Gas, et sur le prétendu dépôt de poudre qu'elle recélait.
Ils ont été trompés sur la capitulation qu'ils disent avoir été vainement offerte à 45 malheureux réfugiés dans les tours, et sur les conférences sans succès avec eux.
Ils ont été trompés sur la violation du droit des gens envers ces malheureux, dont on ne ce^sa de foudroyer l'asile avec du canon, tandis qu'on les amusait par des paroles de paix.
Ils ont été trompés enhn sur les coups de fusil qu'on dit savoir été tirés le mardi des fenêtres des maisons ; fausseté insigne, qui n'a été imaginée nue pour justifier les atrocités de cette journée, où la rage unie au sang-froid outragèrent horriblement l'humanité.
Faut-il rapnelerque, après le désarmement général des catholiques qui ne s'étaient pas même mis en état de défense, une infinité ae citoyens furent arrachés de leurs retraites et conduits comme des agneaux qu'on mène à la boucherie, à l'Esplanade, au Cours neuf, et dans d'autres places où ils furent fusillés, massacrés, pendus, où on les hachait vivants avec le sabre et la faux; où on leur coupait les pieds, le nez, les oreilles, le menton ; où on leur ouvrait le ventre et on leur arrachait les entrailles pour leur en battre le visage (1); où l'on exerçait sur eux en un mot les horreurs les plus exécrables ? Et sur les plaintes réitérées faites par les veuv» s et les orphelins, aucune démarche de la part du procureur du roi; aucune information, aucun témoin entendu 1 Tandis qu'on a la perfide complaisance d'en administrer un grand nombre pour empoisonner les discours les plus simples et les plus indifférents.
Et après une pareille conduite, après une partialité aussi révoltante, ose-t-on se flatter que l'Assemblée nationale aura deux poids et deux mesures (2), et qu'elle adoptera et Souffrira
même qu'on lut mette sous les yeux l'inique information faite à Nîmes, tandis qu'elle a repoussé, sans vouloir en entendre la lecture, celle qui fut faite à Montauban, en vertu d'ordres supérieurs? Et qu\'on ne dise pas que les atrocités commises n'étaient pas connues; car eux-mêmes qui sont les pins intéressés à les nier sont forcés d'en convenir (1).
Le récit des électeurs ee tait sur tous ces faits, de même que sur les excès auxquels les officiers municipaux furent en butte; de même que sur les pillages et dévastations du collège, du séminaire, du couvent des Récollets, de celui des Jacobins, de F Hôpital général, des maisons de M. Bra-gouse, curé; de M. Cabanel, prêtre; de la mé tai-rie de MM. les abbés PaUlian, et de tant d'autre?; la maison de campagne de M. Desponchès,archidiacre, et de plus de 100 maisons de citoyens catholiques. Mais les électeurs ont encore été trompés sur cela, de même qu'un très grand nombre défaits qu'il serait trop long de rapporter.
Le directoire conviendra que s'il n'est pas permis de contrarier un récit « où chaque phrase et chaque mot furent sévèrement discutés », il doit l'être de relever avec moins d'art et d'apprêt, si l'on veut, ce qu'il a sans doute mis à dessein.
11 s'est contenté de dire que « des maisons suspectes furent fouillées, et que les perquisitions que l'on fit devinrent pour quelques bandits une occasion de pillage ».
Mais ces bandits avaient des listeé, des guides, des chefs, et il est du devoir et de l'honneur du département, du district, de la municipalité et des magistrats de réunir leurs soinS et leurs efforts pour parvenir à les connaître. Nous ne poussons pas plus loin cette discussion ; ce serait engager une querelle de plume qui deviendrait inépuisable.
La vérité ne peut être que d'un cèté ; pour terminer tons ces débats», il faut donc qu'une procédure faite devant des juges libres et impartiaux, composée de témoins catholiques et protestants, pris indistinctement dans tous les lieux de la contrée, fasse connaître de quel côté l'agression est partie, et surtout l'époque du rassemblement et du départ des troupes arrivées avec armes et bagages, dans un court intervalle, et presque à la même heure, d'une très grande distance; sur quelles réquisitions elles sont venues; quels sont les électeurs qui crurent pouvoir rester sans danger, et ceux qu'on réussit à disperser (2). Cette procédure doit porter non seule-
ment sur les troubles des mois de mai et de juin, mais encore sur les causes qui les ont produits, sur la conduite respective des protestants et des catholiques avant ces émeutes, depuis l'époque des délibérations, manifestant les mêmes vœux pour la réformation dés abus de l'ancien régime, et prises de concert dans les mois de novembre et de décembre 1788, jusqu'à ces derniers temps; et elle doit embrasser le détail de ce qui s'est passé dàns le conseil permanent, des manœuvres et des provocations de toute espèce qui ont aigri et divisé les citoyens, et amené les malheurs de Nîmes.
C'est l'unique moyen de parvenir à la découverte de la vérité et à la conviction des vrais coupables qui, s'ils échappent au glaive des lois, ne doivent pas échapper a l'opprobre.1
Après cette conviction, il sera permis de parler d'amnistie, d'abolition et d'oubli du passé; mais ce n'est qu'alors qu'on pourra, comme les directoires du département et du district, solliciter la grâce des coupables.
Une amnistie, quelque générale qu'elle puisse être, ne pouvant pas abolir les réclamations de ceux qui ont des indemnités à prétendre, et les directoires du département et du district ayant cru pouvoir les rejeter sur la ville, et même personnellement sur les officiers municipaux de l'un desquels on a fait saisir et déplacer les meubles, dont même on a annoncé la vente, il est de l'intérêt de la ville et de ces magistrats de constater, par des preuves,quels sont les véritables auteurs des maux de la patrie, afin que si les coupables ne payent pas de leur tête, ils soient forcés de payer de leur fortune les dévastations et les pillages dont ils seront prouvés les auteurs.
On a beau présumer que la manifestation delà vérité n'est propre qu'à réveiller les haines, et qu'à exciter Ja fermentation des esprits sur des événements dont on voudrait anéantir jusqu'à la mémoire.
Mais quoi déplus propre à aigrir les esprits que de masquer continuellement la vérité, que de rejeter sur une ville opprimée et sur ses officiers municipaux , des pertes causées par des étrangers et par leurs conducteurs qu'il est essentiel de connaître et de rechercher?
Quoi de plus propre à exciter l'indignation, que d'offrir un pardon à des opprimés qui ont droit aux vengeances de la loi?
Quoi de plus propre à réveiller les ressentiments que d'imposer silence à la justice, après avoir voué à l'exécration publique des citoyens assassinés, et des magistrats intègres qu'on a maltraités et excédés de coups et qu'on n'a cessé de
diffamer dans mille journaux vendus à l'iniquité, et de soustraire à cet'e même exécration ceux qui> sous le voile du patriotisme, se sont souillés de mille abominations préméditées et réfléchies, dont le tableau, si redouté et qu'ou voudraitanéan-tir, effr.iyera l'Europe?
Quoi de plus propre à entretenir les dissensions et les haines que de retenir dans les cachots des prisonniers qu'on a décrété avec aussi peu de justice que de raison, et de refuser constamment de les admettre à leurs faits justificatifs, malgré les actes de déni de justice qu'il faut donner (t) ?
Quoi de plus propre à armer le citoyen que de s'obstiner à vouloir traiter en criminels ceux qui ont toujours été opprimés et n'ont jamais été coupables ?
Vainement on s'est flatté d'anéantir des faits graves et d'en arrêter plus longtems la preuve (2) Croit-on en imposer, en avançant que « la municipalité oppose à la procédure juridique l'information qu'elle assure avoir faite elle-même^ » tandis que toutes les demandes de cette môme municipalité ne tendent depuis six mois qu'à faire informer par-devant tels juges qu'il plaira à l'Assemblée nationale d'indiquer? tandis que, depuis le 15 mai, le procureur du roi au présidial n'a voulu faire entendre que des membres du club et le s témoins indiqués par des clubistes ; qu'il a constamment refusé d'administrer ceux qui lui ont été désignés par les représentants de la commdne, et qu*il a eu la barbarie de repousser le grand nombre de veuves et d'orphelins qui portaient plaintes de l'assassinat de leurs maris et de leurs pères ; fait assez décisif pour que l'Assemblée nationale ordonne une nouvelle information.
Croit-on en imposer par ce rassemblement affecté (3) de mots : citoyens, procureur du roi, juges, témoins, administrateur s, électeurs, commissaires du roi, municipalités voisines, gardes nationales, tous sont les ennemis des officiers municipaux de Nîmes? Une simple observation sur chacun de ces mots en fera Connaître la juste valeur;
Et d'abord, citoyens ! N'y a-t-ll donc à Nîmes que les membres au club et leurs adhérents? ne sait-on pas que 40,000 habitants de Nîmes ?ont justement indignés contre les calomniateurs de la municipalité? Ne sait-on pas qu'après avoir dé* sarmé les catholiques (4), on a étouffé par la
terreur leurs nombreuses réclamations, et qu'on a cherohê même à détruire leur créait et leur fortune (1).
Procureur du roi! La conduite qu'il a teûue depuis le commencement de cette affaire sans égard pour les ordres du chef de là justice, dispense de toute réflexion.
Juges! N'ont-ilS pafl été menacés? La vie du lieutenant criminel n'a-t-elle pas été en danger pour avoir rendu la liberté au sieur Vigne, négociant et Capitiine d'une compagnie catholique, contre lequel il n'y avait aucune preuve? Ge magistrat ne vient-il pas de déclarer qu'il s abstient et cesse d'être juge dans l'affaire du sieur Descombiès au moment de l'admettre à ses faits justificatifs?
Témoins! Un grand nombre est membreduclub et a signé l'adresse du 4 mal ; en sorte que ces Messieurs sont à la fois dénonciateurs et témoins.
Administrateurs, électeurs, commissaires du roi! Ignore-t-on que les directoires du département et du district de Nimes sont en grande partie formés de membres du club? Ignore-t-on que le c'ub qu'on dit composé de catholiques et de protestants, sur 417 membres, compte seulement 63 catholiques? Ignore-t-on que les électeurs avaient été circonvenus à l'avance, et que les commissaires du roi se sont toujours concertés avec le club?
Municipalités voisines! Ne devaient-elles pas s'opposer au départ de leurs gardes nationales, puisqu il n'existait aucune réquisition de la municipalité de Nîmes? Cet oubli de leur devoir ne les rend-elles pas parties dans cette affaire et, dès, lors, comment peut-on s'appuyer de leur témoignage ?
Gardes nationales! A l'exception de Celle de Montpellier, qui s'est couverte de gloire en arrêtant, dès son arrivée, le massacre et les atrocités,
que de regrets doivent avoir la plupart des autres, témoins et tranquilles spectatrices des excès que leur devoir était d'empêcher; et combien de reproches ont à se faire celles qui, non contentes d'avoir coopéré au pillage, se sont encore enrichies des dépouilles des infortunées qu'elles devaient protéger et secourir?
Les officiers municipaux,persistant dans leur adresse, supplient donc l'Assemblée nationale et tous les gens de bien de ne se décider ni sur des récits pleins d'erreurs, ni sur des informations dont la suspicion est sensible et a été démontrée; mais de suspendre leur jugemeut jusqu'au moment où le temps, la vérité, l'impartialité auront rassemblé et mis au jour toutes les preuves dans des informations dignes de foi.Us supplieut en outre l'Assemblée nationale de prononcer sur la démission qu'ils ne cessent d'offrir de leurs fonctions, et de ne pas perdre de vue que M. Viellard, rapporteur de l'affaire de Montauban, lui disait : « En remettant trop légè-« rement certains délits, il peut résulter de leur « impunité l'ébranlement de la Constitution. Il « est facile, sans doute, à des vainqueurs de « dire : Nous sommes en paix quand leurs enne-« mis chassés ne peuvent revenir chez eux que« pour y subir la loi qui leur est imposée.....>« Ce n'est pas dans une ville où l'esprit de parti « s'est si violemment manifesté qu'on peut se « flatter que les informations ont été faites avec« impartialité.....Dans ces circonstances, votre« comité des rapports a l'honneur de vous « proposer le décret suivant. (Ce décret fut « adopté.) »
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu « son comité des rapports, déclare que l'infor-« mation commencée devant les juges de Mon-« tauban relativement aux événements arrivés « dans cette ville Je 10 mai, demeure comme« non-avenue..... L'Assemblée nationale décrète« qu'il sera informé devant les officiers munici-« paux, juges ordinaires en matière criminelle, « a Toulouse, à la diligence de la partie pu-« bli iue, de tous les événements arrivés à Mon-« tauban, tant antérieurs que postérieurs à ladite « époque,circonstances et dépendances; à l'effet « de quoi les pièces déposées au comité des « rapports seront incessamment adressés à la « partie publique, etc. »
Dans des circonstances semblables et d'après ces considérations, les soussignés ont l'honneur de représenter à l'Assemblée nationale que les officiers municipaux de Nîmes ont demandé, pour lè plus grand nombre, leur démission a plusieurs reprises; qu'ils sont chaque jour inquiètes dans des fouctions qu'il est au-dessus de leurs forces de continuer; que plusieurs ^l'entre eux se trouvent absents par une suite des vexations qu'ils Ont éprouvées, et que d'ailleurs le renouvellement d'une partie de la municipalité doit avoir lieu à l'époque présente; c'est pourquoi l'Assemblée nationale est suppliée de vouloir bien ordonner que, vu la démission d'une partie des officiers municipaux çt l'absence des autres, la commune de Nîmes sera incessamment convoquée, et qu'il sera procédé à la nomination et renouvellement de la municipalité de" Nîmes ; et comme il importe à ces magistrats de 'constater par des preuves et une inlormàtion juridique et impartiale, quels sont les véritables auteurs des assassinats, pillages et dévastations commises à Nîmes,ils supplient de nouveau l'Assemblée nationale d'ordonner, conformément aux décrets rendus pour Montauban le 26 juil-
let, et Schelestadt le 14 août dernier, « que l'information commencée devant lés juges de Nîmes relativement aux troubles qui ont eu lieu dans cette ville, pendant les mois de mai et de juin, demeure comme non-avenue, et qu'il sera informé devant les juges » de Montpellier ou autres, étrangers au département du Gard, et « à ia diligence de la partie publique, de tous les événements arrivés à Nîmes » les 2, 3, 4 mai, 13, 14, 15, 16, 17 juin, « ainsi que tous ceux qui y sont relatifs, tant antérieurs que postérieurs » auxdites époques, et notamment de ceux contenus dans les « détails circonstanciés; à l'effet de quoi les pièces déposées au comité des recherches seront incessamment adressées à ladite partie publique ». Ils la supplient enfin de décréter que toutes les armes de la légion nîmoise, même celles des compagnies qui ont été désarmées, seront habituellement déposées dans la maison commune et dans une salle disposée à cet effet ; et sans s'arrêter aux changements survenus dans ladite légion, pendant et depuis les troubles, ordonner que les légionnaires , conformément aux décrets de l'Assemblée nationale, seront exclusivement pris parmi les citoyens actifs qui se sont faits inscrire, défendant à tous autres de se réunir en troupes armées et de porter l'uniforme national.
Signés : Teissier-Marguerittes, maire ;
Boyer, substitut du procureur de la commune.
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
Acte de déni de justice, signifié au nom de M. Descombiés.
L'an 1790 et le 20* jour du mois d'octobre; par moi Adrien-François Vimont, avocat du sieur Descombiés, détenu prisonnier, dans l'impossibilité d'exploiter lui-même, et nul huissier n'ayant osé lui prêter son ministèrej assisté de Pierre Fournier et Jean Boissier, journaliers agriculteurs, tous trois habitants de la ville de Nîmes, soussignés, à la requête du sieur Jacques-Frauçois Descombiés, citoyen de Nîmes, capitaine de la légion nîmoise, notable et électeur du département du Gard, prisonnier ès prisons de la sénéchaussée de ladite ville, est exposé à M. le lieutenant-criminel en ladite sénéchaussée et à tous MM. les officiers de la cour prési-diale, que le sieur requérant fut décrété de prise de corps le 9 du mois de juillet dernier à la suite de plusieurs plaintes successivement portées par M. le procureur du roi en la sénéchaussée ; que le 21 dudit mois et les trois jo »rS suivants il subit interrogatoire; que le 12 du.mois d'août il rendit public, par la voie de l'impression, tant ledit interrogatoire que les prétendues pièces de conviction qui lui furent alors représentées avec des extraits des dépositions; qu'il résulte de l'ensemble que jamais décret ne. fut plus injuste que celui dont il s'agit; que l'imprimé est terminé par l'exposition des faits justificatifs dudit sieur accusé, pages 54, 55, 56, 57 et 58; qu'à suite de cette exposition, il fil requête ledit jour à M. le sénéchal de Nîmes, ou son lieutenant général criminel, pour demander à être admis à La preuve desdits faits, tant par actes que par témoins produits
par lai accusé ou par M. le procureur du roi, à son choix, sans préjudice de la proposition des reproches contre les témoins déjà entendus, et des moyens de nullité et cassation de la procédure; que celte requête signée, et par lui accusé et par M* Vimont sou conseil, ayant été présentée à M. Fajon, lieutenant criminel, ledit jour 12 août, et le sieur requérant ayant envoyé le 13 pour la réitérer avec l'ordonnance, ce magistrat répondit qu'il n'avait pas eu le temps de s'en occuper; que le 16, M. Vimont, avocat, y fut lui-même, et qu'il lui répondit qu'il avait écrit à Paris pour se faire décharger de cette procédure; que vainement son conseil représenta que la justification marchait d'un pas égal avec l accusation; que la raison, l'humanité et l'équité exigeaient le succès de cette requête, qu'il ne put rien obtenir ; que le 17 dudit mois, M. Vimont fut à la chambre du conseil, et en présence des magistrats y assemblés, réitéra ses représentations, ses instances, ses prières, et ne pouvant rien obtenir, déclara qu'il en viendrait aux actes de déni de justice et que, s'il le fallait, il se ferait un honneur et un devoir de les exploiter lui-même pour et au nom de son malheureux client. Quelque temps après il fut encore à la salle du palais où M. le lieutenant criminel prenait l'interrogatoire d'un coaccusé dudit sieur Descombiès, pour le prier et supplier de répondre, ladite requête de telle ordonnance qu'il lui plaiiait; qu'une put rien obtenir de ce magistrat, qui déclara que « personne n'ignorait que les juges dans cette affaire n'étaient pas libres ; qu'il savait ce qui avait suivi de l'élargissement » prononcé de M. Vignes, autre coaccusé, et l'assura de nouveau avuir écrit pour qu'un autre tribunal eu eût la connaissance, et qu'il l'engagea à attendre la réponse ; que jusqu'à ce jour, cette réponse n'est point arrivée, et que néanmoins la justice est suspendue précisément pour ce qui te id à justifier ledit sieur Descombiès, tandis qu'elle a été si active pour le jeter dans les liens et l'exposer à des événements incroyables qu'il est inutile de narrer ici. C'est pourquoi en dénonçant tout ce dessus audit m. Fajon, lieutenant criminel, et à tous les autres magistrats exerçant successivement sou dévolu, ils demeurent priés, et en taut que de besoin, par le présent acte de déni de justice, sommés et requis de par le jour, répondre ladite requête de telle ordo nnance qu'il leur plaira et eu refus leur est déclaré que ledit sieur Descombiès entend les rendre responsables de tous les événements fâcheux que leur refus ou autre délai peut lui faire éprouver, et de tous ses dommages et intérêts ; et j'ai remis copie du présent et un exemplaire timbré dudit imprimé, a la suite duquel est ladite requête auxdits magistrats, en parlant pour tous à l'épouse du sieur Auvelier, greffier-commis, trouve en domicile en cette ville ; en foi de ce, etc., le sieur requérant signé avec nous, de ce requis.
Signé : Descombiès, Vimont, Fournier, Boissier.
Contrôlé à Nîmes, le
Reçu 12 s. 9 d. Signé : Chabaud.
Procès-verbal de comparution au greffe, concernant la récusation de M. Fajon, lieutenant
criminel.
Cejourd'hui 21 octobre 1790, l'heure de neuf
heures du matin, s'est présenté aU greffe de la sénéchaussée et siège présidial de Nitries, Monsieur Fajon, lieutenant général criminel aux dites cours supprimées, qui, en continuant ses fonctions, en conformité des décrets de l'Assemblée nationale, jusqu'à ce que les juges élus seront en activité, qui a exposé, pour servir de réponse pour ce qui le concerne à l'acte que le sieur Descombiès fit signifier le jour d'hier par le ministère de Me Vimont avocat, tant à lui qu'aux autres magistrats exerçant successivement son dévolu, copie duquel acte lui a été communiquée par le sieur Auvelier, commis au greffe, a là femme duquel elle fut laissée par ledit sieur Vimont ; qu'il ne désavoue point que la requête mentionnée audit acte ne lui ait été présentée, ne se rappelant quel jour, qu alors il en avait une sur soo buretu de M. le procureur du roi, portant qU'il avait beaucoup de témoins à faire entendre que ceux ouïs aux informations sur lesquelles étaient intervenus les décrets, et tendant à ce que la continuation d'enquis fût ordonnée; qu'il ne dissimula pas au sieur Viinout que par les mêmes raisons qui t'avaient fait différer de répondre la requête de M. le procureur du roi, il ne répondrait pas la sienne ; une de ces raisons était qu'il avait formé un vœu auprès de l'Assemblée nationale, pour que la procédure fût renvoyée à un autre tribunal qu'à celui de Nîmes. M. Vimont n'approuva ni ne désapprouva le refus. 11 est pourtant vrai que, par occasion, il a dit quelquefois à M. Fajon, que la requête de sou client devait être répondue ; mais enfin il la fit retirer sans qu'elle le fût, soit qu'il cédât aux raisons donnees, soit par tout autre motif, celui qui vint la retirer l'ayant demandée sans explication aucune; qu'il y a à peu près un mois de ce retireuieot ; que depuis elle n'a pas été reproduite ; hier seulement, environ deux heiires après-midi, mondit sieur Fajon,étant sur la porte d'entrée de sa maison, fut accosté parle sieur Seguin, qui lui dit que s il ne voulait pas signer la requête du sieur Descombiès, celui-ci était conseillé de faire signifier les actes de déni de justice et qu'il voudrait bien lui donner un ordre à un huissier pour les lui signifier ; qu'il répondit que jamais il n'avait mis et ne mettra obstacle à ce que les parties, et surtout les accusés, croiraient convenir à leurs défenses; il ne crut pas devoir donner plus d'éteudue à sa réponse vis-à-vis d'un particulier auquel il ne connaissait aucun rapport avec les affaires du palais. Ce fut sans doute peu à près que, sans que ladite requête fût apportée à M. Fajon, sans qu'on lui eût demandé aucun ordre pour l'huissier, pour le cas où ils aient refusé, M. Vimont remit la copie dudit acte à la fem ue dudit sieur Auvelier, qui l'apporta chez M. Fajon à sept heures du soir avec ladite requête; qu'au surplus, aux raisons qu'il avait eues de ne pas répondre dans le temps, et la requête de M. le procureur du roi en continuation d'enquis, et celle dont s'agit du sieur Descombiès, se joigaent les demandes pendantes à l'Assemblée natioaale, soit de la part du directoire du département, soit au nom des accusés eux-mêmes ou d'autres, à ce que la procédure soit jugée ailleurs que dans Nîmes, et la certitude que donnent les papiers publics que l'Assemblée est au moment de prononcer, si elle ne l'a déjà fait ; que les raisons de suspension sont devenues,par ces raisons nouvelles et plusieurs autres, des motifs d'austentiou ; qu'en conséquence, il déclare, pour ce qui le concerne et sans entendre influer sur l'opinion des magistrats dévolutaires, qu'il s'abs-
tient et cesse d'être juge dans l'affaire dont s'agit, remettant lit requête dudit sieur Descombiès, ensemble la copie dudit acte signifié par M. Yi-mont, protestant de nullité de toutes autres significations y et a requis que nous, greffier en chef, en fassions donner connaissance audit Sieur Descombiès, et qu'il lui soit donné acte de ce que dessus, ce que lui avons octroyé; et a,signé avec nous. Signé ; Fajqn, Gaujoux, greffier en chef.
Nous, greffier en chef de la sénéchaussée et siège présidial de cette ville, nous sommes trans-
Îorté dans les prisons où est détenu le sieur lescombiés pour lui donner connaissance du procès-verbal ci-derrière, dont nous lui avons fait lecture, et lui avons offert de lui en donner une copie s'il la lequérait; et ledit sieur Descombiès l'ayant requise, nous avons déclaré qu'il y serait travaillé de suite ^ et nous sommes signé, ledit sieur Descombies n'ayant voulu le faire, de ce requis, à cause de l'absence de son conseil.
Signé : Gaujoux, greffier en chef.
Côllationnê : ÎURlON.
Extrait de la seùonde adresse du sieur Folacher, avocat, électeur de la ville de NîmeS, à f Assemblée nationale, sur l'amnistie des crimes Commis à Ni mes dans le mois de juin dernier, sollicitée par le directoire du département du Gard.
.» . .. » Ah I s'il eût existé quelque projet de porter atteinte à la Constitution, comme les assassins ont Voulu le faire croire, avec quelle affectation, avec quels transports de joie» n'eussent-ils pas fait retentir la France et PEmope entière au b' Uit des pieuv* s qu'ils auraient rassemblées 1 Quel enchantement c'eût été po .r eux de pouvoir confondre Jeur cause avec celle du patriotisme I Eh I qui les connaît assez mai, pour croire que dans ce cas ils eussent fait solliciter une amnistie.
Heureusement, ce Dieu qu'on a tant outragé dans la ville de Nîmes préparait un triomphe à l'innocence, au mumeut même où il semblait l'abandonner aux effets de la calomnie. If n'a pas permis que les lâches, qui dans leur pensée criminelle avaient préparé dès longtemps les malheurs de leur patrie, pu sent réussir à donner même ievs apparences de la réalité à un complot qui n'exista jamais. Leurs soins à composer une preuve qui justifiât leurs brigandages ont été inutiles."Les meurtriers ne #ont pius aujourd'hui des patriotes ; et leurs malheureuses victimes, des eunemis de la Constitution. En un m d, la vérité a repris son emppre, vt chaque joue elle le fait sentir à nos persécuteurs d'une manière humiliante.
P. r quelle fatalité le directoire du département du Gara veut-il donc flétrir la mémoire de ceux qui ont misérablement péri > el déshonorer ceux qui ont échappé au massacre, tandis que la France entière depfore leur tort et conapàut à leur malheur? De quel droit d'ailleurs ont-ils imprimé que les mie et les autres étaient des factieux ? Sur quelle preuve unt-ils rendu pu-biiiue une accusât on aussi giave? Comment enfin ont-ils pu oublier qu'un accusé est piésumé innucent, jusqu à ce qu'un j ugement l'ait déclaré coupable?
Si leurs intentions sont pures, il n'«û est pas moins vrai qu'ils ont contribué, par l'impression de leur adresse, à accréditer des calomnies dont
j'éprouve, depuis plus de 4 mois, les funestes effets.
Pour moi, à qui l'honneur est plus cher que la vie, je proteste de nouveau que je n'accepterai jamais d'amnistie, et que je poursuivrai jusqu'à mon dernier soupir les réparations auxquelles j'ai droit de prétendre. Malheur à ceux qui ont intérêt à cacher la vérité si, en me justifiant, je puis contribuer à la faire paraître dans tout son éclat I
Daignez, Monsieur le Président, recevoir mes protestations et les mettre sous les yeux de nos augustes représentants.
Je suis avec le plus profond respect, etc...
Des prisons de Villeneuve-de-Berg, ce 31 octobre 1790,
Pour copie i Folacher
présidence de m. duport.
Séance du
La séance est ouverte à onze heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires donne lecture des procès-verbaux des séances d'hier au matin et au soir, qui sont adoptés.
donne lecture d'une lettre du procureur général syndic du département de la Gôte-d'Or, qui dénonce une lettre incendiaire du ci-devant évêque de Dijon, adressée àux électeurs dudit département, assemblés pour procéder à la nomination d'un autre évêque.
(L'Assemblée, après avoir pris en considération cette dénonciation, en ordonne le renvoi au comité des recherches.)
Le sieur Charles Delavaud, méde in-ehirurgien, ancien chirurgien-major des armées navales, fait hommage à f Assemblé d'un manuscrit ayam pour litre : « Mémoire instructif touchant les officiers de santé de la marine militaire, avec un plan nouveau pour la Composition, l'organisation elle régime de ce corps ».
(L'Assemblée ordonne lé renvoi de cet ouvrage aux comités de marine et de salubrité réunis.)
L'ordre do jour est Un rapport des comités militaire et des pensions réunis, sur les gouvernements militaires.
, rapporteur. Messieurs, je Suis chargé de vous présenter un projet de décret relatif à la suppression des gouvemewients militaires suppression depuis longtemps prononcée par l'opinion publique, et qui est une conséquence indispensable de vos décrets.
On «ait m que l'on entend en général par les gouvernements militait es.
Ce ne sont pus t-eule-ment desoftices ou commissions de gouverneurs pour
te «roi, dans 1eS places et uang Tes ci-devant provinces"; ce èont aussi
des oflices ou commissions de lieutenants généraux, lieutenants de
Toute place sans fonctions est inutile, et par cela même vicieuse dans une sage Constitution. Toute place qui a des appointements et point dé fonctions renferme dans son existence une double iojusticé, en ce que l'on donne à Celui
3uine mérite pas, et qu'il ne .reste plus de quoi onner à celui qui mérite. Enfin, des émoluments de diverse nature, ajouté» à des appointements déjà plus que suffisants, ne sont pas seulement une superfluité qu'une sage économie né saurait souffrir ; c'est unesourceinépuisablede vexations et de déprédations* parce que cesémolumeuts,.par leur:diversité et par la manière dont la plupart se sont établis, sont susceptibles en eux-mêmes d'une extension presque sans bornes, et, relativement aux personnes sur lesquelles on les perçoit, susceptibles d'une inquisition, d'une persécution continuelles.
U faut dônè supprimer les gouvernements, lieu» lenatiCes générales, lieutènances de roi des places et des ci-devant provinces, qui n'exigeaient aucune résidence. Cette conséquence découle si naturellement de principes incontestables* qu'èlfe ûe saurait faire le sujet d'une question.
Mais le fait de la suppression posé, il naît dé ee fait même plusieurs questions accessoires. Jus-qu'à quelle époque doit-on payer les appointements et autres attributions accordées à ces places? Doit-on payer Sans dhlinciien tous les appointements et attributions? Est-il dû quelque indemnité aux titulaires des gouvernements f Quelle pourrait être l'indemnité si elle était due ?
Les lois n'ont point d'effet rétroactif. On ne saurait mettre trop d'activité à supprimer les abus; mais jusqu'à ce que la réforme soit pronom ée le silencé du législateur couvre d'un voile la possession paisible des fruits attachés à des titres qui n'étaient pas encore anéantis» Une ligne, fortement exprimée, doit séparer la profusion de l'ancien régime, de la juste dispensation du nouveau régime, mais tant que cette ligne n'est
fias tracée, il faut souffrir des profusions dont es circonstances n'avaient pas encore marqué ie terme.
Cette conduite a été celle de l'Assemblée, relativement aux pensions. La loi qui les a anéanties a prononcé, avant cette extinction générale qui devait dater du l*r janvier 1790, que toutes les pensions qui subsistaient antérieurement seraient payées jusqu'au 31 décembre 1789.
Il doit en être de même des gouvernements et autreB titres du même genre. L'Assemblée va prononcer lettr suppression; l'effet de celte suppression doit dater du commencement de l'année où elle sera décrétée, de l'époque à laquelle les fruits de chaque anhée commencent à courir ; mais les fonds qui avaient été faits pour l'an-
née 1790, ou pour ies années antérieures, doivent être payés à ceux à qui ils ont été destinés. Les titulaires y ont acquis un droit, pat cela même qu'on a laissé subsister leur titre.
Les appointements et gages des gouverneurs, lieutenants généraux et lieutenants de roi doivent donc leur être payés jusqu'au 31 décembre 1790.
Nous disons appointements et gages; mais nous ne disons pas, sans aucune distinction, appointements, attributions et émoluments»
Les appointements portés sur les rôles, soit du Trésor public,soit dés ci-devant pays d'États, soit des autres^ provinces, étaient les {gages attachés par l'autorité publique au titre qui subsistait* il n'en était pas de même des émoluments, (l'étaient des profits que les gouverneurs et les lieute-r nants s'etaieutattribuéssuus différents prétextes; par exemple, une bûche sur le bois qui entrait dans la ville, parce qu'il fallait que la porte fût ouverte pour le passage des vouurçs, et que la porte était çensée ouverte par l'ordre du gouverneur; d'autres prélèvements semblables sur diverses denrées; des présents que la géaéro-sité ou ia crainte avaient offerts dans le principe et qui, par la suite dos temps, avaient été convertis en exactions.
Les gou verneurs et les lieutenants ne sauraient prétendre être payés de ces émoluments. S ils voulaient l'exiger, on répondrait à leur demande par une autre demande beaucoup plus raisonnable; qu'ils eussent à découvrir les bases de leur prétention ; et comme il leur serait impossible de les fonder sur aucun acte émaaè de l'autorité publique, on en conclurait avec justice l'impossibilité de prononcer, au nom de la loi., l'obligation de faire ce qu'aucune loi n'aurait or* donné,
. D'ailleurs, des profits du genre de ceux dont il s'agit, ne s'arréragent point ; il est impossible de les demander lorsqu'on a laissé passer l'instant de les percevoir. Ils consistent en choses qui se consument par l'usage que l'on en fait, et dès qu'on ne les a pas recueillis avant que celui qui avait droit d'en user, en fit usage, il t esse d'être possible de les rappeler parmi les choses existantes pour s'en ressaisir. Le6 peuples, sur lesquels on levait ces exactions de fait, s'en Sont trouvés libérés par le fait î c'est un avantage qu'il est impossible de leur envier» Il n'est pas besoin d'un» décharge légale pour être affranchi d'une dette que la loi n'impose paB; et l'on ne saurait trouver mauvais que ie propriétaire n'ait pas partagé ses denrées, ses comestibles avec des personnes qui n'avaient aucun droit d'en diminuer l'intégrité.
Ne parlons donc point d'attributions et d'émoluments; ne nommons que ce qui était fondé eu titre, des appointemeats et des gages.
Passons à la tioisième question : les gouverneurs et les lieutenants ont-ils le droit, de pré" tendre à une indemnité â «ison de la perte quQ leur causera la suppression des titres qui reposaient sur leur tête?
Pour décider cette question, il faut examiner ce qui pouvait leur appartenir relativement aux titres dont il s'agit. Les officiers de gouverneurs et lieutenants n'étaient pas des offices vénaux et hérédiiain s , que l'on possédât co.time propriétaire et aveo la faculté de les transmettre à sou gré. Il n'y avait pas de finance proprement dite, qui fût attaché à ces offices, et dont on tût libre de disposer. Rien donc, rie i dans ces offices ne pouvait former le sujet d'une propriété, en prenant Ce mot dans le sens exact; rien a'au-
torise les gouverneurs et lieutenants à se plaindre que quand on supprime les gouvernements et lieutenances, on anéantit leur chose, et qu'on est obligé de leur restituer la valeur de ce qu'on leur ôte.
Dans deux cas seulement, les titulaires de gouvernements et de lieutenances ont droit de prétendre à une indemnité.
Le premier est celui où les gouvernements et lieutenances avaient été accordés comme une récompense de grandes actions, ou comme une retraite après un long service. La récompense ordinaire était une pension ; une récompensé plus distinguée était la promotion à un gouvernement ou à une lieutenance, parce qu'on joignait alors un titre honorable à un revenu pécuniaire. Il ne serait pas juste qu'aujourd'hui que les gouvernements vont être supprimés on fût privé de sa récompense, précisément par la raison qu'on a été gratifié d'une récompense plus honorable que les autres. Mais de même que parmi les pensions, il en est de justes et d'abusives, il est aussi parmi les promotions aux gouvernements, des nominations données au mérite, des nominations obtenues par faveur, des nominations arrachées par l'intrigue et le crédit : et c'est pourquoi Ion ne doit pas accorder une indemnité à toute personne, sans distinction, qui se trouve posséder un gouvernement ou une lieutenance ; il faut faire un choix éclairé; il faut, comme il a été décrété à l'égard des pensionnaires, que chacun de ceux qui peut se rendre témoignage à lui-même que la concession dont il va cesser de jouir a été une justice rendue à de grands services ou à de longs services, ait la faculté dé présenter son mémoire; et de demander conformément aux règles décrétées par l'Assemblée nationale, une nouvelle récompense en remplacement'de celle dont il se trouvera privé.
C'est même ici le cas d'accorder aux titulaires de gouvernements et de lieutenances, la même grâce qu'on a faite, tant aux pensionnaires qui avaient obtenu des récompenses avant la promulgation des lois édictées par l'Assemblée,qu'aux officiers généraux qui n'ont été récompensés qu'après des services effectifs, quoique moins prolongés .qu'ils le seront à l'aveuir. Les gouverneurs et lieutenants doivent être traités pour la récompense qui sera rétablie en leur faveur, de la même manière que les pensionnaires l'ont été par le titre III de la loi du 23 août ; et comme on a décrété, par l'article 5 de ce titre, le rétablissement d uue pension en faveur des officiers généraux qui auraieut fait deux campagnes de guerre avant d'être promus à ce grade, parce que. cessant leur promotion, il est à croire qu'ils eussent continué leur service habituel; on doit accorder ausri aux lieutenants et gouverneurs, le rétablissement de la récompense qu'ils avaient avait reçue après deux campagnes de guerre, parce que si 1> ur service a ce«sé à cause de la récompense qu'on s'est trop empressé de leur donner, il n'est pas possible cependant de diie qu'ils ne fussent dignes d'aucune récompense. Ils auraient continué leur service, si la récompense se présentant en quelque manière uVlle-même, au-devant d'eux, ne les eût pas engagés à se retirer avant le temps.
Un second cas dans lequel les titulaires de gouvernements ont droit ae prétendre à une indemnité, c'est celui où ils sont porteurs de bre-vêts de menue* accordés dans les ^circonstances et pour les causes que la loi du 1" décembre dernier a spécifiées. Leur titre étant supprimé,
l'indemnité de ce qu'ils ont déboursé pour l'obtenir, leur est acquise; et elle doit leur être payée.
Il est un auire cas qui a fixé l'attention des deux comités, et auquel ils àuraient proposé à l'Assemblée de pourvoir, si elle ne s'en était pas déjà occupée. Les gouvernements étaient divisés en plusieurs classes. Ceux quel'on appelait grands gouvernements, et dont les appointements se portaient à 60,000 livrés, étaient affectés aux princes et aux maréchaux de France. Il né doit pas être ici question des princes dont le titre ne subsiste plus ; mais on doit s'occuper des maréchaux de France dont le grade est conservé comme supérieur dans la constitution militaire. Le traitement des maréchaux de France était médiocre dans l'état ancien ; il avait été fixé autrefois à la somme de 13,522 livres, et au lieu de l'augmenter progressivement àiusi que les convenances l'exigeaient, on avait mieux aimé leur accorder des grâces de toute espèce, qui laissaient un cours libre à la faveur, trop ordinairement préférée à la justice. Les gages des grands gouverm ments étaient ainsi devenus une partie du traitement des maréchaux de France ; et cette partie en étant retranchée, il est dé justice ou d'indemniser les maréchaux de France, ou d'augmenter leur traitement : justice d'autant plus rigoureuse que, les lois de l'Etat ne permettant plus de cumuler un traitement avec des pensions, les maréchaux de France se trouveraient réduits [tour tous appointements à la omme de 13,522 livres.
L'Assemblée a déjà pris ces objets en considération!; elle a énoncé son intention d'augmenter le traitement des maréchaux de France,. et dès lors ce p'fcst plus le cas de leur accorder une indemnité.
D'après ces différentes observations, tant sur la question principale de la suppression des gouvernements, que sur les questions accessoires que cette suppression lait naitre, les deux comités réunis, proposent le décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète :
« Art. 1er. Les gouvernements de provinces et
de places de toutes les classes, les lieutenances générales, les
lieutenances de roi des ci-devant provinces, places et gouvernements qui
n'obligeaient point à résidence, sont supprimés à compter du 1er janvier
de la présente année 1791.
« Art;2. Les gouveméurs, lieutenants généraux et lieutenants ae roi qui étaient en possession des places supprimées parle précédent article, seront payés sur les fonds qui avaient été à ce destinés, des appointements, gages et supplémentsde gages pour lesquels ils étaient employés dans les états du Trésor public, dans les états de la guerre, et dans ceux des dépenses des ci-devant provinces, pour tout ce qui peut leur en être dû jusqurau 31 décembre 1790. Ils ne pourront, sous aucun prétexte, percevoir rien au delà des sommes portées dans lesdits états.
« Art. 3. Les gouverneurs, lieutenants généraux, lieutenants de roi, supprimés par le premier article, qui étaient porteurs de brevets de retenue, susceptibles d'indemnité aux termes de la loi du l*r décembre dernier, présenteront leurs brevets et mémoires, tn la forme prescrite par la loi du 19 janvier dernier, à l'effet de faire liquider l'indemnité qui peut leur être due.
« Art. 4. A compter du 1er janvier 1791, les appointements, gages et suppléments de gages attribués aux offices supprimés par l'article 1er, seront rayés de tous états où ils avaient été em-
ployé3 jusqu'à ce jour, et ne pourront être employés dans aucun autre.
« Art. 5. Les secrétaires des gouvernements, qui n'avaient pas encore été supprimés, le seront à compter du lM*janvier 1791, et ils seront payés de leurs gages seulement, jusqu'au 31 décembre 179u.
« Art. 6. Les gouverneurs, lieutenants généraux, lieutenants de roi, majors supprimés, auxquels leurs places avaient été données en récompense de leur service, présenteront leurs mémoires au comité des pensions, qui les fera remettre au directeur de la liquidation, à l'effet d'être établi en leur faveur, s'il y a lieu, aux termes de la loi du 23 août, des pensions. Lesdits gouverneurs et lieutenants seront considérés à cet effet comme les personnes qui étaient pensionnées à l'époque du 1er janvier 1790; et ceux d'entre eux qui justifieront de deux campagnes de guerre, seront traités de la manière qui a été réglée pour les officiers généraux, par l'article 5 du titre III de la loi du 23 août 1790. »
Plusieurs membres proposent quelques modifications aux divers articles du projet.
, rapporteur, adopte ces changements.
Les articles 1 et 2 sont décrétés comme suit :
» L'Assemblée nationale décrète ce qui &uit :
Art. 11er.
« Les gouvernements de provinces et de places de toutes les classes; les lieutenances générales, les lieutenances du roi, les majorités, qui n'obligeaient point à résidènce et dont on était pourvu soit par breveis, soit par. provisions, sont supprimés à compter du l6rjanvieçde la présente année 1791.
Art. 2.
« Les gouverneurs, lieutenants généraux et lieutenants de roi, qui étaient en possession des places supprimées par le précédent article, seront payés sur les fonds qui avaient été à ce destinés, des appointements, gages et suppléments de gages pour lesquels ils étaient employés dans les états du Trésor public, dans les états de la guerre et dans ceux des dépenses des ci-devant provinces, et même du fermage des objets qui avaient été par eux affermés, pour tout ce qui peut leur en être dû jusqu'au 31 décembre 1790. Ils ne pourront, sous aucun prétexte, percevoir rien au .delà des sommes portées dans lesdits états, notamment à titre de logement et ustensiles, lorsqu'ils n'auront pas été résiliés de fait. »
Un membre demande que le comité des domaines soit chargé de présenter un projet de décret relativement à l'administration des terres, prés, étangs, loués au profit des gouverneurs, lieutenants de roi et majors supprimés.
(L'Assemblée ordonne le renvoi de cette demande à son comité des domaines.)
Les articles 3,4 et 5 sont décrétés en ces termes ;
Art. 3.
« Les gouverneurs, lieutenants généraux, lieutenants de roi, majors, supprimés par le premier article, qui étaient porteurs de brevets de retenue, susceptibles d'indemnité aux termes de la
loi du 1er décembre dernier, présenteront leurs brevets et mémoires, en la forme prescrite par la loi du 19 janvier dernier, à l'effet de faire liquider l'indemnité qui peut leur être due; ceux qui avaient été pourvus en finances continueront à être payés des rentes qui leur ont été assignées, à raison de ladite finance.
Art. 4.
« A compter du 1er janvier 1791, le3 appointements, gages et suppléments de gages attribués aux offices supprimés par l'article premier, seront rayés de tous états où ils avaient été employés jusqu'à ce jour, et ne pourront être employés dans aucun autre.
Art. 5.
« Les secrétaires des gouvernements qui n'avaient pas encore été supprimés, le seront à compter du 1er janvier 1791, et ils seront payés de leurs gages seulement jusqu'au 31 décembre 1790. »
(Une discussion s'engage sur l'article 6.)
Cet article me paraît louche; car le préambule promet aux maréchaux de France un dédommagement et le décret n'en parle pas. Outre cela, ces gouvernements étaient également affectés par l'ordonnance de 1776 aux princes du sang : MM. d'Orléans, de Gonti, de Gondé, de Bourbon eu sont pourvus. Ces gouvernements faisaient partie des traitements que le roi leur assignait comme membres de la dynastie j royale.
Plusieurs membres : Non ! non !
Puisque nous avons substitué ce mot à celui de prince du sang, les membres de la dynastie avaient, indépendamment de ces grands gouvernements, une pension affectée , à leur rang. Si cette pension, qui n'est pas comprise dans la liste civile, leur est retranchée, si le gouvernement leur est ôté et qu'ils soient considérés comme officiers généraux ayant fait deux campagnes, il en résultera qu'au lieu d'un gouvernement de 60,000 livres, ils auront un traitement de 2, 3 ou 4,000 livres.
Il me semble donc qu'il est de la justice de l'Assemblée nationale ae charger son comité militaire (Murmures)... de lui présenter ses vues à ce sujet.
Il faut, dit-on, un traitement aux membres de la dynastie. Et pour quelle raison ? — Il faut, dit-on encore, en charger le comité militaire. G'est-à-dire que l'on veut faire du gouvernement français un gouvernement militaire.
Je demande la question préalable.
Je demande, pour les membres de la dynastie, le même traitement que celui qui sera accordé aux maréchaux de France.
D'après l'observation de M. Goupil, qui m'a éclairé, je demande le renvoi au comité de Constitution.
(L'Assemblée rejette les amendements.)
L'article 6 est décrété comme suit :
Art. 6.
« Les gouverneurs, lieutenants généraux,lieu-
tenants de roi, majors supprimés, auxquels leurs places avaient été données en récompense de leurs services, présenteront leurs mémoires au comité des pensions; qui les fera remettre au directeur de la liquidation, à l'effet d'être établi en leur faveur, s'il y a lieu, aux termes de la loi du 23 août, des pensions. Lesdits gouverneurs et lieutenants seront considérés à cet effet comme les personnes qui étaient pensionnées à l'époque du 1er janvier 1790; et ceux d'entre eux qui justifieront de deux campagnes de guerre, seront traités de la manière qui a été réglée pour les officiers généraux, par l'article Y du titre III de la loi du 23 août 1790. »
(Le projet de décret est adopté.)
J'ai rèçu de M. le Président de l'assemblée électorale du département des Landes la lettre suivante :
« Monsieur le Président,
« M. Laneuville, ci-devant évêque de Dax, ayant refusé .de prêter le serment ordonné aux fonctionnaires publics par la loi du 27 novembre dernier, M. le procureur général syndic du département des Landes s'est "empressé, conformément à lamêmeloiyde convoquer les électeurs du-département.
« L'assemblée électorale a eu lieu le 13 de ce mois et je m'empresse de vous prévenir que le vœu général, a élevé à l'épiscopat du département M. l'abbé Saurine, membre de l'Assemblée nationale, député du département des Basses-Pyrénées. ( Vifs applaudissements.)
« Ce choix qui n'honore pas moins l'assemblée électorale que M. l'abbé Saurine, sera sans doute agréable à l'Assemblée nationale.
« Veuillez, Monsieur le Président, nous servir d'organe auprès d'elle pour lui annoncer cette élection et lui renouveler les assurances de notre inviolable attachement à la Constitution.
Signé : Lacorte, président de l'assemblée électorale du département des Landes. »
J'ai également reçu le procès-verbal de nomination et de proclamation de M. l'abbé Perrier, oratorien, à l'évêché de Gler-mont-Ferrand, département du Puy-de-Dôme.
Ce procès-verbal fait en outre mention du renvoi par l'assemblée électorale du curé de Gha-nouat et du sieur Rochette, après avoir été rayés de la liste des électeurs, pour n'avoir pas voulu prêter leur serment civique, sauf à les réintégrer lors de leur soumission à la loi.
L'ordre du jour est un rapport , du comité des pènsions sur les secours à accorder aux personnes qui jouissent de pensions et de gratifications annuelles et dont l état n'est pas. encore fixé.
, rapporteur. L'Assemblée nationale, par son décret du Ier février, présent mois, « -s'est réservé de prononcer., dans le plus bref délai* sur les secours à accorder aux personnes dont les pensions ont été supprimées et ne sont pas encore en état d'être rétablies; elle a ordonné à son comité de lui préseuter incessamment un projet de décret pour fixer ces secours ».
Les besoins urgents, dont le comité des pensions reçoit chaque jour l'exposition touchante, l'ont déterminé à provoquer ce décret : l'humanité a décidé l'Assemblée nationale à le prononcer. Une sollicitude toujours active pour les malheureux, sentiment que la justice sévère n'éteint
pas, mais perfectionne, presse le comité de satisfaire au décret, et de présenter à l'Assemblée ses observations, avec un plan pour procurer des secours.
Les pensions et gratifications annuelles, qui existaient avant la loi du 23 août 1790, étaient de différents genres.
Les premières étaient établies sur le Trésor public par des brevets. Elles étaient accordées dans les divers départements de la guerre, de la marine, de la maison du roi, etc... Le brevet portait la mention du département dans lequel la pension avait été accordée. Quelquefois un brevet qui ne portait que le nom d'un seul département renfermait des grâces accordées dans plusieurs; mais le département, écrit sur le brevet, indiquait celui dans lequel la principale grâce avait été accordée. Quelquefois aussi le nom du département,; où l'on était parvenu à obtenir la grâce qu'on avait sollicitée, ne correspondait pas com-plètemeot au genre des services qu'on avait rendus. Cependant on peut dire qu'en général le nom du département dont le brevet était timbré annonçait la nature des services qui avaient conduira la i ension. Voilà ce qui avait lieu pour les pensions établies sur le Trésor public.
Une seconde classe de pensions comprend celles qui étaient payées sur des caisses ou sur des fonds distincts de ceux du Trésor public : par exemple, sur les postes, sur les messageries, sur les ci-devant pays d'Etats, sur les fonds destinés aux administrations de tout genre.
La troisième classe des pensions ne portait cette dénomination qu'en la prenant dans sa plus grande latitude; c'était des gratifications, des secours accordés à l'indigence, et répartis, d'après les états annuels, sur des fonds destinés à ces actes de bienfaisance. Ils étaient pris sur trois objets principaux; savoir: sur le produit de la loterie royale, pour environ 150,000 livres; sur le produit des fermes générales, pour environ 19,000 livres. ' '
Les fonds qui fournissaient aux pensions et aux secours ont éprouvé, depuis l'année 1790, divers changements. Ceux du Trésor public subsistent ; mais l'Assemblée a distrait, des fonds de la dépense publique, ceux qui sont destinés au payement et à la récompense des services rendus a la personne du roi. La liste civile doit payer non seulement, les gages actuels des personnes employées dans la maison du roi, mais aussi les pensions accordées pour récompense de ces services : c'est la disposition littérale de l'article 13 du titre Ier de la loi du 23 août.
Parmi les caisses, autres que celles du Trésor public, qui étaient chargées de3 dépenses communes à l'Etat entier, ou à certaines administrations particulières, les unes sont supprimées, les autres subsistent encore. Par exemple, la caisse des'économats, celle du clergé, sont entièrement fondues dans le Trésor public ; au contraire, les caisses des municipalités subsistent.
Les fonds qui fournissaient aux secours ne subsistent plus comme tels. La totalité des revenus sur lesquels ils étaient prélevés, est aujourd'hui versée dans le Trésor public. D'ailleurs, la forme dans laquelle ces secours étaient distribués, fait naître un embarras particulier Les personnes qui en jouissaient n'avaient pas de brevet pour leur en assurer la perpétuité pendant leur vie ; elles étaient employées sur des états qui se dressaient chaque année ; et quoiqu'ordi-nairement on fût conservé sur ces états?>lorsqu'on y avait été admis d'abord, jil. n'était pas
impossible qu'on en fût retranché. La somme pour laquelle on y était porté était susceptible d'augmentation ou de diminution. 11 devient donc indispensable de dresser un nouvel état des personnes auxquelles on voudra continuer ces secours.
En considérant les pensions et gratifications annuelles du côté des personnes qui les re çoivent, on est toujours frappé de cette vue, que les plus grands besoins sont dans la partie où les sommes accordées précédemment sont Ces plus faibles, et par conséquent que c'est là où l'on d oit porter la plus grande masse de secours. Ces petit s rétributions de 84 livres à 150 livres, qui s'acquittaient sur la caisse des économats ou sur celle du clergé et dont l'Assemblée nationale a ordonné le payement, écartent nés malheureux qui les reçoivent le besoin journalier du pain. Les secours de 100 livres jusqu'à 3 et 400 livres soutienne nt des familles, et préservent d'une mort cruelle des,personnes auxquelles la faiblesse de leur tempérament ou leurs infirmités ne permettent pas de gagner leur vie par le travail. Des sommes un peu plus considérables sont nécessaires à des familles plusnombr. uses, à des vit illards, à des personnes auxquelles leur genre de vie habituel a donné malheureusement un grand nombre de besoins.
Une sorte d'aisance accompagne peut-être quelquefois les sommes qui excèdent 500 livres ; mais ce ne sont plus de simples secours que l'on paye par cette somme : ce sont des services rendus: et la récompense ne doit pas être renfermée dans des bornes aussi étroites que les secours dus à la seule nécessité du besoin. On peut donefaccor-der a:oi'3 plus de 500 livres de provision ; mais il ne faut pas non plus excéder de justes bornes, et lorsqu'on a reçu, par provision, jusqu'à la somme de 100 louis, il pourrait être injuste de se plaindre.
En descendant de ces vues générales aux vues particulières ; en combinant les principes avec l'état a -tuel des pensions et des secours, voici les conséquences que le comité en a tirées et qui serviront de base au projet de décret qu'il proposera.
D'abord, on doit faire une distinction entre les diverses pensions qui se payent au Trésor public. Les porteurs de brevets accordés sur la maison du roi ne doivent pas être, en ce moment, à la charge de l'Etat. Il leur a été payé 600 livres de provision pour l'année 1790 ; toutes les dépenses de la maison du roi sont, depuis le 1er juillet 1790, à la charge de la liste civile: c'est donc à l'intendant de la liste civile que ces porteurs de b evets doivent recourir, soit qu'ils sollicitent quelque augmentation à leur provision pour l'année 1790, soit qu'ils prétendent conserver leur pension pour les années suivantes.
Il est vrai que, dans le nombre de ces brevets, timbrés du nom de la maison du roi, il peut exister des grâces accordées à des services rendus dans d'autres départements ; mais une présomption résulte du brevet ; elle établit, jusqu'à un examen plus particulier, que les personnes récompensées l'ont été pour services dans la maison du roi, et qu'ainsi elles ne doivent pas, au moins dans ce moment, partager les secours dus aux pensionnaires de l'Etat.
En second lieu, les porteurs de brevets ayant déjà reçu, au Trésor public, chacun la somme de 600 livres pour l'année 1790, il ne s'agit pas en ce moment de venir au secours que de ceux qui ont plus de 600 livres de pension ; or, au delà de
cette somme il a paru qu'on devait établir une distinction marquée entre ceux qui ont 100 pis-toles et ceux dont la pension est plus forte. La somme de 100 pistoles peut, dans ta position de beaucoup de personnes, ne satisfaire qu'à des besoins. Le comité a donc pensé qu'il fallait porter le secours de l'année 1790 jusqu'à 100 pis-tuies pour tous ceux dont la pension était de cette valeur : Bien entendu que dans ce cas, et dans tous les autres, on précomptera le secours de 600 livres qui a été précédemment accordé.
Au delà de 100 livres, il peut être accordé quelque augmentation encore aux personnes qui avaient une pension plus forte ; mais ce ne doit être qu'avec beaucoup de réserve. Le comité propose trois conditions: la première, que l'augmentation ne soit accordée qu'aux personnes âgées de 50 ans ; c'est l'âge déterminé par la loi du 23 août, pour jouir d'une pension; la seconde, que l'augmentation soit seulement du quart de ce que l'on avait au-dessus de 1,000 livres; la troisième, que toute augmentation cesse lorsque le secours sera arrivé à la somme de 2,40,0 livres : de sorte qu'on ne puisse, quelle que fût la valeur de la pension ancienne, obtenir sur l'année 1790, une provision au delà de 100 louis.
Les mêmes règles s'appliqueront aux pensions qui s'acquittaient sur d'autres caisses que le Trésor public. Il n'est besoin d'en faire une mention spéciale, que pour ordonner que les payements qui se feraient à ces caisses, si elles subsistaient, se feront au Trésor public, et qu'ils ne continueront provisoirement ailleurs qu'autant que les caisses qui en sont chargées, et qui doivent être regardées sous certains points de vue (les caisses des municipalités, par exemple), comme des caisses particulères, subsisteront.
Passons au troisième objet, les secours proprement dits : les subsistances annuelles accordées sur les états de la loterie royale, sur le Port-Louis, sur les fermes. Il est indispensable de voir tous ces étais et leurs suppléments, afin de les refondre ; d'examiner si les mêmes personnes ne seraient pas employées sur plusieurs; de retrancher celles qui sont mortes, celles qui auraient d'autres traitements, ou une aisance suffisante, pour laisser aux personnes réellement indigentes des secours qui appartiennent à elles seules.
Les éiats anciennement dressés et leurs suppléments sont au département de la finance avec les mémoires et les notes qui ont servi à les former. Il faut examiner ces pièces ; mais ce n'est ni à l'Assemblée nationale à le faire, parce que ses grandes occupations ne le lui permettent pas; ni au comité des pensions, parce qu'il ne présenterait aucune responsabilité. On doit livrer ce travail au directeur de la liquidation, déjà chargé de l'examen de tous les faits d'après lesquels le comité des pen-ions est chargé de présenter à l'Assemblée nationale ses rapports.
Les fonds qui fourniront a ces secours sont faciles à désigner. L'Assemblée nationale a décrété une somme de 2 millions de livres destinée à procurer des secours aux personnes qui, ayant obtenu par le passé des pensions ou des gratifications sans avoir droit à les conserver, se trouveraient destituées de toutes ressources. C'est ce fonds .qui doit fournir aux secours actuels.
La masse nécessaire à ce moment peut être fixée à 150,000 livres. Les fonds destinés à des actes de bienfaisance étaient, sur la loterie royale, " de 150,000 livres environ ; sur le Port-Louis, de 30,000 livres; sur les fermes, de 19,000; mais
le retranchement à faire de personnes employées pour des sommes trop considérables, celui des personnes qui ont des traitements d'ailleurs, qui sont mortes, qui, par telle cause que ce soit, n'ont aucun droit à ces secours, persuade au comité que la somme de 150,000 livrés formera un fonds suffisant pour l'année 1790.
Le montant des secours individuels doit aussi être fixé. Dans une liste de personnes qui'toutes auront des besoins, il est difficile d'établir' dès parts moindrès de 150 livres; quand on ne donne qu'au besoin le plus urgent, ce peut être assez de donner 500 livres : le comité proposera donc qu'aucune des personnes à employer dans l'Etat ne puisse recevoir moins de 150 livres, ni plus de 500 livres.
Les autres dispositions du décret, dont le comité présentera le plan, sont relatives à la forme, à l'ordre, au mode des payements ; elles ont été concertées avec les principaux agents du Trésor public.
Mais, avant de transcrire son projet, le comité demande encore un instant d'attention sur l'état actuel des pensionnaires, pour mettre l'Assemblée et le public à portée d'apprécier des plaintes auxquelles il faudrait avoirégard, sielles étaient fondées sur quelque base ; mais dont on ne doit pas s'inquiéter .si elles sont dénuées de toute justice.
Dans un temps où un grand nombre de personnes se plaignent des pertes que leur fait éprouver le changement de l'ancien régime, on ne saurait être surpris de trouver, parmi ceux qui se plaignent, une multitude de pensionnaires qui vivaient à leur aise aux dépens de l'Etat. Leur conscience avait dû les prévenir qu'il serait impossible de conserver ces trésors amassés tantôt par l'avarice, tantôt par le désir de satisfaire à des profusions immodérées, toujours par l'intrigue, toujours aux dépens des peuples-.mais le moment où on les en dépouille est nécessairement sensible; ils font un grand bruit des pertes qu'ils éprouvent, mais ces pertes sont justes et leurs plaintes sont injustes.
Dès qu'une classe considérable de pensionnaires forme des plaintes, on doit s'attendre que beaucoup d'autres en formeront. 11 est si commun de se plaindre avant d'avoir examiné de sang-froid le résultat des opérations que l'on condamnel La crainte excite si souvent de plus grandes clameurs que le mal qu'on redoute n'en exciterait I Nous ne dirons pas de ces plaintes comme des premières, qu'elles sont injustes, parce qu'on ne perd que ce qu'on doit perdre ; celles-ci sont injustes, parce que les pensionnaires qui ont des droits fondés aux récompenses de l'Etat, eux-mêmes qui n'ont que leurs besoins pour titres, sont traités plus favorablement qu'ils ne l'ont été dans aucun autre temps. Pour s'en convaincre, il suffit de parcourir ce que l'Assemblée nationale a fait, relativement aux pensions, depuis le mois de janvier 1790, époqué à laquelle elle a commencé à s'occuper sérieusement de cet objet.
Le décret du 4 janvier 1790 ordonne l'examen de tous les titres de pensions, dons et gratifications. Sans doute, on ne prétendra pas que cet examen ne fût pas devenu d'une indispensable nécessité; et l'on ne niera pas non plus qu'il entraînait une suspension quelconque des payements. Cependant le même décret autorise à payer jusqu'à 3,000 livres à chacun des pensionnaires, et jusqu'à 12,000 livres aux septuagénaires, sur les arrérages de 1789. Les arrérages de
l'année courante sont suspendus jusqu'au 1er juillet : certainement ce n'était pas une injustice, car les pensions ne sont pas payables d'avance.
Le comité des pensions, qui fut établi alors, n'eut pas plutôt pris connaissance des secours affectés à des personnes indigentes, sur la loterie royale, qu'il proposa de les payer et l'assemblée en décréta le payement les 26 mars et 7 avril 1790. Lè second de ce3 deux décrets éteudit la provision de 600 livres aux personnes employées sur lés états du Port-Louis, des fermes et autres dressés pour l'année 1788. Le même décret assura aux gens de mer, invalides ou infirmes, le payement de leur demi-solde. Par le même décret encore, le roi fut prié d'accélérer le payement des penSioqs des militaires, de ceux surtout à qui les arrérages de 1788 étaient dus.
Un décret du 20 avril, rendu sur le rapport du comité des pensions, ordonna le payement des pensions dues aux officiers suisses résidant en Suisse; aux gendarmes de la garde et aux autres personnes attachées à ce corps.
Un autre décret, du 19 mai, ordonna le payement des pensions sur les économats, jusqu'à la somme de 600 livres.
Le travail du comité des pensions se prolongeant par la multitude de détails à l'examen desquels il avait fallu se livrer, l'Assemblée nationale décréta sur sa proposition, le 27 juin, que la suspension des payements des arrérages de 1790, qui devait expirer au 1er juillet serait continuée; mais en même temps elle décréta que tous les arrérages échus depuis le 1er décembre 1789 seraient payés sans retard; elle excepta de la surséance les pensions sur les économats, celles des ci-devant jésuites, celles des nouveaux convertis, etc. Un décret au 7 août, donné en interprétation de celui-ci, a voulu que le total des arrérages des pensions de 1789 se trouvât payé au 31 décembre 1790.
Ce fut un grand avantage accordé aux pensionnaires, que cette assurance que tous leurs arrérages, jusqu'au 31 décembre 1789, leur seraient payés dans le courant de 1790. Il ne faut qu'avoir, parcouru les états des dépenses du Trésor public, pour, savoir que les pensions furent souvent arriérées comme les rentes et souvent arriérées plus que les rentes. Tout pensionnaire qui l'est depuis 20 ans, sait que son brevet est chargé de décomptes anciens, qu'attestent des retards de payements de 2, 3 et 4 années : c'était donc leur rendre un service essentiel que de mettre les pensions à jour.
Dans le mois de juillet, l'Assemblée nationale a prononcé les différents décrets, dont la réunion forme la loi du 13 août*sur les pensions. Il est permis à ceux qui vivaient d'abus, de regarder cette loi comme rigoureuse, mais les personnes impartiales y verront partout dés preuves de la générosité et de l'humanité des Français. On y assure des récompenses à tous les services rendus à l'Etat; un fonds de 10 millions est ordonné pourle payement des pensions; un fonds de2mil-lions est ordonné pour les gratifications. Outre ces fonds ordinaires, il est décrété que le3 pensions anciennes, dont le rétablissement sera accordé à la faveur due à l'âge, ou d'après quelques exceptions portées dans le décret, seront prises sur un fonds à part, .et qu'il y aura une somme de 2 millions affectée à des secours. Le payement de toute pension de 600 livres et au-dessous, pour l'année, a été, alors.aussi, confirmé et étendu aux pensions existantes sur quelque caisse que ce fût:tout pensionnaire, quel que
fût le montant de sa pension, a été autorisé à recevoir pour l'année î790, une provision de 600 livres. Le payement des arrérages arriérés, tant ceux qui avaient été convertis en rente viagère, que ceux qui avaient été simplement suspendus, aété assuré, quél que dût être endefinitive le sort de la pension, soit qu'elle fût conservée ou supprimée.
Le 29 août, l'Assemblée a ordonné le payement, aux officiers des Invalides, de gratifications qu'ils étaient dans l'usage de recevoir, et aux personnes portées sur l'état des gratifications aunuelles de la loterie royale, le payement complet de ces gratifications,même au-dessus de 600 livres pour Pannée 1789:
Dans le mois de décembre 1790, un décret du
19 accorda aux braves citoyens blessés ou estropiés au siège de la Bastille, et aux veuves dé ceux qui y avaient été tués, des gratifications et des pensions. Un autre décret du 21 accorda 1,200 livres de pension à la veuve de Jean-Jacques Rousseau.
Un décret du 10 du même mois dé décembre avait autorisé les porteurs de brevets sur lesquels étaiènt énoncés des décomptes d'arrérages dont le payement avait été suspendu, à remettre leurs brevets aux bureaux de liquidation, qui seraient établis, pour y recevoir des reconnaissances payables à la caisse de l'extraordinaire, aux époques qui seraient incessamment déterminées. Cette disposition contenait un premier avantage pour les pensionnaires, en ce que, leur assurant le payement prochain des décomptes, qui, selon l'usage introduit précédemment, n'était payable qu'après leur mort, il leur donnait la facilité de s'en aider, en les négociant : et l'Assemblée ne tarda pas à leur donner, sur le même objet, d'autres avantages plus considérables. Un décret du 9 janvier 1791 Ordonna que les décomptes seraient payés à la caisse de l'extraordinaire, par ordre d'âge, à commencer au mois de février 1791 ; que tous le seraient dans le courant de la présente année ; et qu'en attendant le terme de leur échéance, quel qu'il fût, ils pourraient être employés soit en acquisition de biens nationaux, soit au payement de la contribution patriotique.'
Un décret du même jour, 9 janvier, a prononcé en faveur des officiers, ci-devant appelés de fortune, que la pension de tous ceux d'entre eux qui avaient 70 ans, ou au-dessus, et plus de
20 années de services effectifs, serait portée au moins à 600 livres; il a prononcé en faveur des pensionnaires sur la caisse des économats et sur celle du clergé, pour des sommes de 600 livres et au-dessous, qu'ils seraient payés sur le Trésor- public.-
Le 11 "janvier, urt nouveau décret, demandé par le comité des pensions, a ordonné que, par provision, il serait payé aux ecclésiastiques détenus dans des maisons de sûreté ou de charité, pour démence ou autre cause légitime, ainsi qu'aux ecclésiastiques infirmes ou âgés de plus de 70 ans, lesquels jouissaient de pensions ou secours sur lés caisses de décimes, un semestre de la pensiori ou Secours annuel qu'ils recevaient.
Le 14 janvier, l'Assemblée nationale a ordonné, sur le rapport du comité des finances, que M. La Grange, savant distingué, continuerait de jouir, pendant sa vie; d'un traitement annuel de 6,000 livres, qui lui avait été accordé par un brevet de 1787.
Enfin, le lw février, l'Assemblée a décrété, en
faveur de 432 pensionnaires âgés de 76 ans et au delà, un secours de 919,712 livres pour chacune des années 1790 et 1791, à répartir entre eux, selon les proportions énoncées au décret.
^ Voilà ce que l'Assemblée nationale a fait depuis 13 mois pour les pensionnaires, et il en est résulté que, tandis qu'on se plaignait, d'un côté, que les pensionnaires étaient traités avec une rigueur désespérante, les administrateurs du Trésor public mettaient au rang dès dépenses, qui exigeaient des augmentations 'de'-fonds;les sommes considérables payées aux pensionnaires. Cette dernière observation est ëxa'ctëj'on peut la vérifier par le calcul ; et il * en'réédite *que, dans le cours des 13 mois qui viënnén'trdé s'écouler, il a été répandu plus d'argent entre les pensionnaires que dans tout autre espà&Tde temps semblable. Ils ont donc été secourus dans ,des temps fort difficiles. Sous l'ancien régime,; ëii pareille position, on suspendait les payements. Les pensionnaires ont été secourus abondamment; Sous l'ancien régime, quand on avait suspendu les arrérages, on les déclarait payables après la mort du pensionnaire. L'Assemblée a retranché lës déprédations, etrl est vrai que, cela, on ne le faisait pas dans l'ancien régime. Elle a été sévère, mais elle a été juste. Elle a été économe, mais elle a été compatissante aux besoius de tous les malheureux qui étaient inscrits sur le rôle des pensionnaires; et sans doute en adoptant le nouveau décret qui lui est proposé, l'Assemblée va donner de nouvelles preuves de sa justice et de sa bienfaisance.
Voici le projet de décret que nous vous présentons.
«L'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
Art. ler.
« Les pensionnaires non compris dans les états nominatifs de secours, qui ont été ou seront décrétés par l'Assemblée nationale, et qui jouissaient de pensions au-dessous de 600 livres éta» blies par brevets sur le Trésor public, timbrés du nom d'autres départements que celui de la maison du roi, jouiront pour l'année 1790, au delà de la somme de 600 livres qui leur a été accor-r dée par l'article 2 du titre III de ladite loi, d'un nouveau secours déterminé par les articles suir vants. (Adopté.)
Art. 2.
« Les ci-devant pensionnaires dont les pensions se portaient de 600 livres à 1,000 livres inclusivement, recevront un secours égal à la totalité de la somme à laquelle montait leur pension, précompte fait de la somme de 600 livres ou autre qu'ils auraient précédemment reçue pbur l'année 1790. » (Adopté.)
Art. 3.
« A l'égard de ceux qui ont actuellement plus de 50 ans d'âge, et dont la pension était de plus de 1,000 livres, il leur sera accordé d'âbord la somme de 400 livres faisant, avec celle de 600 livres qu'ils ont reçue ou dû recevoir, la somme de 1,000livres; plus, le quart du restant de leur ancienne pension, sans néanmoins que lesdites sommes réunies puissent excéder la somme totale de 2,400 livres, en aucun cas et quel que fût le montant de la pension supprimée. »
Cet article présente une contradiction avec les articles précédents. Je demande que M» le rapporteur nous explique à quelle es-
pèce de pensions s'applique la réduction dont le maximum est de 2,400 livres; et si, par exemple, un maréchal de camp, un colonel qui a une pension de 3,000 livres et qui se trouverait dans fa proportion d'années de service que vous avez déjà jugée susceptible d'une retraite plus considérable, si, dis-je, il se trouvait réduit à 2,400 livres, pourquoi cela arriverait?
, rapporteur. J'observe au préopinant qu'à compter du 1er janvier 1790, toutes les pensions ayant été supprimées, il n'en existe plus et qu'elles doivent être recréées suivant les bases établies par le décret ; mais ce travail est long. Nous avons pensé que l'humanité ne permettait pas qu'on continuât de laisser ces pensionnaires sans secours.
L'Assemblée nationale a décrété que tout officier qui aurait 30 ans de service et 50 ans d'âge, jouirait du quart de ses appointements. La nouvelle organisation militaire va avoir son exécution; le ministre de la guerre a informé les régiments que ceux qui se trouveraient dans ce cas, et qui voudraient prendre leur retraite, seraient ainsi traités.
Je demande s'il est juste que, parce qu'ils se retirent 2 ans après la Révolution, ces officiers soient mieux traités que les officiers qui, avec autant ou plus de services et dé campagnes qu'eux, se sont retirés avant la Révolution.
Messieurs, par l'article que vous propose le comité, il me semble que vous manquez à un engagement bien sacré, celui que la nation a pris vis-à-vis de tous ceux qui l'ont bien servie.
Sous l'ancien régime, s'il existait de grands abus dans la distribution des pensions, il y en avait aussi de bien méritées. Pensez, Mes-ieurs, que ceux qui ont bien servi la patrie et qui ont compté sur une récompense méritée, se trouvent vraiment désespérés de voir que dans ces circonstances vous leur donniez des secours aussi minces.
Si l'Assemblée nationale veut retrancher les pensions illégitimes arrachées à la faveur et obtenues sous un ministère aveugle, elle peut tout concilier en disant que les pensionnaires au-dessus de 50 ans jouiront provisoirement d'une pension, d'abord de 1,000 livres, et, en second lieu, du reste de leur pension jusqu'à un maximum de 6,000 livres.
(L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur les amendements et décrète l'article 3.)
Messieurs, j'ai reçu une lettre du roi, dont je vais donner connaissance à l'Assemblée :
« Je vous prie, monsieur le Président, de faire part à l'Assemblée nationale de la note ci-jointe.
« Messieurs, ayant appris que l'Assemblée nationale a donné à examiner au comité de Constitution une question qui s'est élevée à l'occasion du voyage de mes tantes, je ci ois à propos d'informer l'Assemblée que j'ai appris ce matin qu'elles étaient parties hier au soir à 10 heures. Comme je suis persuadé qu'elles ne pouvaient être privées de la liberté.qut appartient à chacun d'aller où il veut, j'ai cru ne devoir ni ne pouvoir mettre aucun obstacle à leur départ, quoique je ne visse qu'avec regret leur séparation d'avec moi.
« Signé : LOUIS.
« Le
Je demande que, conformément aux lois de l'Etat, la liste civile soit diminuée en raison du traitement que la nation faisait à Mesdames, tantes du roi, pendant tout le temps de 1 eur absence. (Applaudissements à gauche; murmures à droite.)
Voix diverses : Aux voixl L'ordre du jourl (Mouvement prolongé.)
La proposition du préopinant n'est coiiformeni àla dignité de cette Assemblée... (Murmures à gauche.)
Je répète : La proposition du préopinant n'est conforme ni à la dignité de cette Assemblée, ni à sa justice et je n'ai qu'un mot à dire pour vous la faire écarter. C'est que le décret du 3 septembre dernier qui règle la li-te civile, !a règle définitivement pour tout le temps du règne de Louis XVI. (Murmures à gauche.)
S'il existe un doute sur ce que j'avance, je demande la représentation du décret,
Voudriez-vous vous mettre en contradiction avec vos décrets et avec la grandeur et la générosité tant de fois manifestées de la nation?
Je fais la motion qu'on passe à l'ordre du jour. (.Murmures. )
(L'Assemblée décrète, à une grande majorité, qu'elle passe à l'ordre du jour.)
Je demande le renvoi au comité de Constitution.
Je demande que le membre quia fait cette motion soit rappelé à l'ordre. (Murmures.)
(La discussion du projet de décret du comité des pensions est reprise.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 4 qui est ainsi conçu :
Art. 4.
« Les sommes accordées aux ci-devant pensionnaires désignés dans les articles piécédents, leur seront payées au Trésor public dans l'ordre du mois dont les brevets sont timbrés, et sur une seule et même quittance, avec le secours de 600 livres précédemment accordé, s'ils ne l'ont pa^ encore reçu, soit en tout, soit en partie. » (Adopté.)
rapporteur , donne lecture de l'article 5 :
« Dans le cas où la même personne aurait joui précédemment de plusieurs pensions, elles seront réunies, pour déterminer, d'après leur montant total, le secours accordé au ci-devant pensionnaire ».
Je vais avoir l'honneur de vous parler des pensions sur l'ordre de Saint-Louis, qui n'ont jamais été comprises avec les autres.
Il a été tenu, et j'en fais la réclamation de la part de l'armée, 4 deniers pour livre sur sa solde afin de former un fonds pour p iyer les pensions de Saint-Louis. Comme militaire et comme citoyen, ce dont je me fais gloi e, je prétends qu'il e t essentiel de la conserver. Personne n'ignore que l'honneur de servir la nation n'ait contribué à conquérir des provinc s qui convenaient a l'arrondissement de ce va-le Empire (Rires). Si vous ôtez cette émulation, je craindrais que l'insouciance ne gaguât les troupes.
En conservant ces pensions sur l'ancien pied, ce sera 3 ou 4,000 livres par an qu'il en coûtera à la nation; et pour qui ai-je l'honneur de vous faire cette demande? C'est pour vos enfants, c'est pour vos neveux, et certainement pour la gloire des Français.
Je me résume en demandant que vous confirmiez les pensions de Saint-Louis telles qu'elles existent; que les fonds soient toujours séparés de ceux du Trésor; et que les pensionnaires, lors de leur retraite, en jouissent en sus de celles d'officier.
M. d'Ambly vient de plaider devant vous la cause des pensionnaires de l'ordre de Saint-Louis. Je vais vous exposer les motifs qui doivent vous déterminer à ne pas priver les officiers de marine des pensions qu'ils ont aussi sur cet ordre.
Vous savez, Messieurs, que les marins ne parviennent au commandement qu'après avoir passé par tous les grades ; cette règle a toujours été observée parmi eux et les exceptions ont été fort rares. Ainsi les officiers généraux dé la marine ne parviennent à ce grade que dans un âge avancé.
En second lieu, le service de la marine étant, de sa nature, dur et pénible, peu de personnes nées riches s'y consacraient; elles préféraient le service de terre. De là vient que les officiers généraux de la marine sont presque tous peu partagés du côté de la fortune.
Les pensions des grands-croix et des commandeurs de l'ordre de Saint-Louis étaient données aux officiers qui s'étaient distingués «ians la marine. Voûs connaissez les services de M. d'Or-villiers le plus grand manœuvrier de la marine française aprè3 Tourville, de M. Duchaffaut, âgés tous deux de 80 ans, de M. de la Motte-Piquet...
(On interrompt l'opinant en lui observant qu'il n'est pas à l'ordre du jour.)
Il est généralement reconnu que les fonds qui avaient été versés dans le Trésor public pour un objet quelconque ne devaient' pas en être distraits sans que les personnes qui avaient souffert de ces réductions ne fussent dans le cas d'une réclamation quelconque.
L'aFmée a souffert la réduction de 4 deniers pour livre, pour donner des pensions à l'ordre de Saint-Louis; dès lors, les pensionnaires qui jouissent de ces pensions ne sont pas dans le cas des autres, puisqu'ils jouissent d'une libéralité qui n'a rien de commun avec le Trésor public.
Je vous observe en outre.qu'en général les pensions sur l'ordre de Saint-Louis sont très modiques et qu'elles portent sur les officiers qui ont par devers eux les plus longs services.
Je demande que l'article soit renvoyé au comité qui, d'après un nouvel examen des représentations que l'on vient de vous faire, vous proposera un nouvel article. ;
, rapporteur. J'observe qu'on ne peut pas dans ce moment statuer sur lé fond des pensions de l'ordre de Saint-Louis, puisque, par plusieurs décrets, vous avez renvoyé tout ce-qui-concerne cet ordre à l'examen dë vos comités. Mais voici ce qu'on peut faire : il faut, comme voulait le dire M. de Vaudreuit, que les pensionnaires sur l'ordre de Saint-Louis'' puissent provisoirement toucher leurs pensions, sous la condition qu'ils n'en toucheront pas d'autres.
Voici comment je rédigerais l'article :
Art, 5.
« Dans le cas'où la même personne aurait joui précédemment de plusieurs pensions ou secours annuels,, elles seront réunies pour déterminer, d'après leur montant total, le secours accordé au ci-devant pensionnaire.
« A l'égard des pensions accordées à des militaires sur l'ordre de Saint-Louis, ceux qui en jouissent les conserveront provisoirement pour les années 1790 et 1791, et ils auront la faculté de les préférer aux secours accordés par les articles 2 et 3 ci-dessus. (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture des articles suivants :
Art. 6.
« Dans le total des pensions mentionnées au précédent article, ne sont point comprises les rentes viagères créées pour arrérages suspendus, dont le payement a été ordonné séparément des pensions par l'article 9 du titre III de la loi du 23 août, et qui seront acquittées en la forme sui-~ vante., (Adopté.)
Art. 7. "
t Les porteurs de brevets de pensions, qui comprenaient, outre les pensions supprimées/ lesdites rentes viagères, rémettront leur brevet, en original, au directeur général de la liquidation ; le directeur, après avoir vérifié que la rente, provenue des anciens arrérages, subsiste, fera délivrer aux porteurs des brevets une reconnaissance du montant annuel de la rente viagère y énoncée, laquelle leur servira de titre pour être payés des arrérages échus et à échoir.
« Le directeur de la liquidation fera mention de la remise de la reconnaissance, sur l'original du brevet, et il tiendra registre des reconnaissances qu'il aura fournies.
« Les arrérages seront acquittés parles payeurs des rentes dues par l'Etat. » (Adopté.)
Art. 8. *
« Lesci-devant pensionnaires dont les pensions supprimées étaient établies sur d'autres caisses que le Trésor public et étaient au-dessus de 600 livres recevront pareillement, à titre de secours pour l'année 1790, l'excédent du montant de leurs pensious au-dessus de la somme de 600 livres jusqu'à la somme de 1,000 livres. Au delà de ladite somme, il sera, payé à ceux d'entre eux qui Seront âgés de plus de 50 àns, un quart de leur pension, sans que le total puisse excéder 2,400 livres, ainsi qu'il est dit en l'article 3 ci-dessus. » (Adopté.)
Art. 9.
« Le payement des secours énoncés en l'article précé ient sera fait au Trésor public, à l'exception er">de ceux qui sont accordés à des personnes dont les pensions étaient établies sur les caisses : des municipalités, ou sur celles d'administrations encore subsistantes. Dans ce cas, les secours accordés par l'article pFécédent, seront à la charge desdiles caisses et payés par elles. » (Adopté.)
' Art. .10.
«. Les secours accordés'par les précédents articles ne seront, conformément à l'article 10 du titre 1er de la loi du 23 août, payés qu'autant que
ceux qui y prétendront n'auront aucun traitement d'activité. » (Adopté.)
Art. 11.
« Il sera pris, sur le fonds de 2 millions de secours annuel, décrété par l'article 15 du titre III delà loidu 23 août dernier, la somme de 150,000livres pour être distribuée aux personnes précédemment comprises dans les états et suppléments d'états des secours affectés sur la loterie royale, sur le Port-Louis et sur les fermes générales. » (Adopté.)
Art. 12.
« Les états et suppléments d'états desdits secours, qui ont été précédemment dressés dans les départements de la finance, seront remis entre les mains du directeur général de la liquidation, avec les observations qui pourront s'y trouver jointes. Il dressera, sur le tout, un nouvel état unique, portant la répartition de la somme de 150,000 livres de manière qu'aucune des portions de distribution ne soit au-dessous de 150 livres, ni aucune au-dessus de 500 livres. Le directeur général fera au comité des pensions le rapport audit état pour être ensuite, sur le compte qui en sera rendu à l'Assemblé, décrété par elle ril y alieu, et après la sanction du roi, être payé au Trésor public, à bureau ouvert, en la forme ordinaire. » (Adopté.)
Art. 13.
Il ne pourra être compris dans ledit état de 150,000 livres aucune personne jouissant de pension ou de traitement sur quelque caisse que ce soit, à l'effet de quoi ledit état sera notifié aux différents trésoriers. » (Adopté).
( Le projet de décret est adopté.)
Messieurs, vous savez qu'il reste encore pour 50 millions d'assignats à fabriquer. La fabrication du papier est prête de finir; le fabricant demande qu'on lui rende la liberté de sa fabrique.
Vous avez, décrété que celte fabrication resterait en suspens pour savoir si on ferait de petits assignats. Je propose à l'Assemblée d'ordonner que les £0 millions seront employés de la manière suivante, savoir : 20 millions d'assignats de 100 livres, 20 millions d'assignats de 60 livres et 10 millions d'assignats de 5(F livres.
Cela n'entraîne pas du tout l'impossibilité de faire par la suite de petits assignats, si on le juge à propos.
L'Assemblée a renvoyé cet objet
au comité des finances; de tous côtés, on demande dans les départements de petits assignats. Je demande que cette question soit renvoyée à demain midi.
(Ce renvoi est décrété).
Je finis en annonçant à l'Assemblée qu'il sera brûlé vendredi prochain pour 4 millions des premiers assignats, au lieu et en la manière accoutumée.
L'ordre du travail de la présente semaine est le suivant :
Séances du matin.
r Discussion sur les différents moyens de parvenir à la dépense de 1791.
Premier article du rapport des mines et minières.
Décrets additionnels sur l'ordre judiciaire.
Rapport sur le respect dû à la loi.
Loi des successions.
Séances du soir.
Suite du rapport sur l'affaire de Nîmes.
Suite du rapport sur les engagements et dégagements.
Discussion du rapport sur les Invalides.
Rapport sur les dîmes inféodées.
Rapport sur l'affaire du Clermontois.
, au nom du comité des finances. Messieurs, vous vous rappelez les épisodes d'hier et la controverse qui a eu lieu dans l'Assemblée sur la somme -de capitaux qui, depuis le commencement de la Révolution, a été employée aux dépenses de l'Etat; vous avez vu comment chacun voulait faire plier les calculs à son système particulier. Cependant sur un point comme celui-là, il n'y a que des faits à alléguer et à citer.
Je suis très loin d'accuser de mauvaise foi ceux qui exagèrent nos malheurs; mais au moins puis-je les accuser de légèreté, lorsque, par leurs déclamations, ils cherchent à compromettre la considération qui est due aux travaux de l'Assemblée nationale. (Applaudissements.)
J'ai eu l'honneur de vous promettre qu'il serait remis aujourd'hui un état imprimé de toutes les dépenses extraordinaires qui ont été versées au Trésor depuis le 1er mai 1789; l'engagement a été rempli. Voici cet état :
ÉTAT des fonds extraordinaires provenant de Vemprunt national de septembre 1789, ou fournis au Trésor public, tant en billets de la caisse d'escompte qu'en promesses d'assignats et en assignats, depuis le 1er mai 1789; et emploi de ces mêmes fonds.
Septembre 1789 et mois subséquents. — Emprunt de 80 millions, moitié en argent, moitié en effets au porteur, fermé en octobre 1790 à 52 millions, dont la moitié seulement doit faire partie du présent état.................................................... 26,000,000 liv»
Billets de caisse, ou promesses d'assignats.
Fin de 1789 et premiers mois de 1790. Avril 1790. —Fourni par la caisse
d escompte, en bill ets qui sont remboursés en assignats.................................170,000,000 liv.]
Fourni en promesses d'assignats, remboursés de même en assignats.... 20,000,000
Mai 1790..........................................22,000,000
Juin 1790.............................................45,0 0,000 » Ann ^
Juillet 1790......................................48,000,000 / «W»«W,WU
Août 1790...............................................40,000,000
Septembre 1790.........................................40,000,000
29 octobre 1790................................15,000,000
Assignats.
30 octobre 1190. — Fourni par la caisse de l'extraordinaire............ 31,095,000
Novembre 1790...................................................... 48,000,000
Décembre 1790...................................................... 45,000,000
Sur la demande de M. Dufresne, l'Assemblée nationale a décrété, au mois de janvier 1791, un versement de fonds à faire au Trésor public par la
caisse de l'extraordinaire, de........................................... 60,521,000
Et, au mois de février, un autre versement de........................ 72,000,000
La demande de ces fonds était faite d'après un aperçu de M. Dufresne, des besoins de 1791, dans lequel étaient cumulés, avec les dépenses de cette année, les restes de l'année 1790, et le dernier semestre arriéré des rentes et intérêts dus par l'Etat, dont l'Assemblée a ordonné le payement par son décret du 7 novembre 1790.
L'Assemblée, voulant faire cesser cette confusion, a décrété, le 27 janvier dernier, que l'aperçu des dépenses de 1791 lui serait présenté par le directeur du Trésor public, en en séparant tous les objets antérieurs ou étrangers à ladite année. Les nouveaux étals lui seront incessamment remis, conformément au décret du 27 janvier; et le semestre arriéré des rentes, ainsi que les restes de 1790, seront, suivant ses intentions, des articles séparés des dépenses de la présente année. Ces deux articles compléteront tous les payements faits et à faire avant le 1er janvier 1791. En leur appliquant, comme le bon ordre l'exige, les 132.521,000 livres de fonds décrétés dans les mois ae janvier et février de cette année, on aura l'universalité des dépenses et l'emploi total des fonds extraordinaires de 1789 et de 1790. Le semestre arriéré des rentes dont le payement extraordinaire a été décrété le 7 novembre
1790 est de.......................................... 90,030,000 liv.
Les restes de 1790, dont l'état sera mis incessamment sous les yeux de l'Assemblée, montent à.................................. 48,000,000
Total............................................ 138,000,000
Les fonds versés au Trésor public en janvier et février 1790 montent, suivant l'article ci-dessus, à............................................ 132,521,000
Ainsi il reste à lui fournir, pour compléter tous les payements des années antérieures à 1791.................................................5,479,000
5,479,000
Total des fonds extraordinaires fournis et à fournir an Trésor public pour compléter tous les payements jusqu'au 1er janvier 1791....... ............................ 688,095,000
Emploi des fonds ci-dessus.
Les anticipations, suivant le compte de M. Necker, du 1er mai 1789, page 100, montaient à................................................. 271,500,000 liv.
Il n'en restait plus, au 1" janvier, que pour........................... 35,500,000
Ainsi il en a été remboursé pour..................................... 236,000,000 '
Deux semestres arriérés des rentes sont acquittés, et les rentes sont mises 416,000,000
à Jour. Ces deux semestres montent à................................... 180,000,000
Ainsi, pour remplacer le déficit, pour faire face à toutes les dépenses extraordinaires, nommément aux achats de grains, et pour suppléer au défaut de perception pendant les deux
années 1789 et 1790, il a été pris sur les capitaux..............................................................272,095,000
Nota. — Les sommes produites par les emprunts de Languedoc, de Provence, de Bretagne et d'Artois sont plus que compensées par les remboursements faits dans ces mêmes provinces, à Gênes et en Hollande.
Rien au monde n'est plus affligeant que les exagérations dans cette matière; il serait douloureux même d'avoir raison. Cependant l'Assemblée veut savoir la vérité; et moi je veux défendre du soupçon d'une exagération trop forte mon honorable ami M. de Cazales. (Rires).
Or, je dis, Messieurs, que nous ne pouvons pas nous en rapporter à ce que vient de dire M. de Montesquiou sans un examen ultérieur. Pour abréger, M. de Montesquiou vous compte deux semestres de rentes payées, et ii ne devait en compter qu'un. Il vous présente ces semestres comme un objet de 90 millions; c'est donc 90 millions à retrancher de son compte. Dans un précédent compte, il a porté la totalité des renies de l'Etat à 170 millions et il les porte dans celui-ci à 180; c'est donc encore une exagération de 10 millions et, au total, une erreur de 100 millions.
Quant à l'exactitude des payements, comme ils sont consignés dans le journal de vos décrets, il n'y a point d'équivoque. Quant au reproche que les payements des rentes ne sont pas tels que je viens de vous le dire, j'aurai l'honneur de répondre que, dans l'année 1790, on a payé un semestre de rentes
extraordinaire ; que, dans ce moment actuel, on paye trois semestres ensemble, c'est-à-dire les deux de 1790 et le premier de 1791 qui doit être acquitté dans l'année où nous sommes. Ainsi trois semestres donnent certainement un semestre extraordinaire.
J'ai donc raison, en joignant à ce semestre-là celui qu'on a déjà payé extraordinairement l'année dernière, de dire qu'il y a deux semestres extraordinaires de payés, et, sur cela, il n'y a pas d'équivoque; c'est un point sur lequel les rentiers de l'Etat nous mettraient bientôt d'accord. (Applaudissements.)
lève la séance à trois heures.
présidence de m. duport."
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du pro-cès-verbal de la séance d'hier, qui est adopté.
Plusieurs membres élèvent des réclamations sur l'article 5 du décret rendu hier et relatif aux pensions des gouverneurs et lieutenants de roi.
, rapporteur, fournit quelques explications à ce sujet.
(L'Assemblée décrète qu'elle maintient la rédaction de l'article).
(de Saint-Jean-d'Angélu). Des citoyens tvcommandables par leurs services ne savent quelle marche suivre pour obtenir les récompenses qui leur sont dues. Je crois qu'on devrait rédiger le décret relatif aux pensions, de manière que tous les individus qui, pendant la fin de l'année 1790, ont at'eint la fin de leur carrière au service public et ont, suivant les règles prescrites par l'Assemblée nationale, mérité une pension, puissent l'obtenir.
, au nom du comité des pensions. J'applaudis aux vues de justice qui ont dicté cette re marque : le comité des. pensions- s'assemble aujourd'hui et je présenterai très incessamment un projet de décret à l'Assemblée à cet égard.
fait part à l'Assemblée d'un mémoire présenté par le sieur Magenthier, dans son affaire contre le sieur Magon dé La Balue, et d'une pétition appuyée par la section de Bondy, tendant à accélérer la décision de cette affaire.
(L'Assemblée renvoie ces documents à son comité des rapports.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse du district de Bouhar, qui annonce que tous les curés de ce district, sans exception, ont prêté le serment civique.
(L'Assemblée oi donne qu'il sera fait mention de cette adresse dans le procès-verbal.)
donne lecture d'une lettre de M. Duporlail, ministre de la guerre, qui transmet à l'Assemblée une réclamation présentée par les administrateurs des biens de la fondation des écoles militaires, au sujet des biens de la ci-devant abbaye de Saint-Jean-de-Laon, ordre de Saint-Benoît, congrégation de Saint-Maur.
(L'Assemblée renvoie cette réclamation à ses comités d'aliénation, militaire et ecclésiastique, réunis.)
Un. membre présente une adresse des citoyens de Lyon ; ils demandent
qu'aucun plomb de transit ne soit établi dans cette ville, ni dans
l'intérieur de la France, et que l'on prenne les mesures les plus
efficaces pour empêcher la sortie des soies teintes et ourdées.
Un membre présente une adresse des pêcheurs et des habitants de la côte maritime du Languedoc, qui demandent le réiablissementdela pêche aux bœufs sur la côte de cette ci-devant province...
(L'Assemblée renvoie cette adresse à ses comités de marine et d'agriculture réunis.)
La parole est à M. de La Réveillère-Lépeaux pour un rapport au nom du comité des pensions sur les secours accordés aux Acadiens et Canadiens.
, au nom du comité des pensions. Messieurs, le comité des pensions vient invoquer votre justice en faveur de citoyens que l'ancien régime n'a récompensés de leur tendre attachement à la mère patrie, qu'en les traitant avec la dernière barbarie.
Tout le monde se rappelle que la guerre sanglante que les rois d'Angleterre et de France se firent depuis 1757 jusqu'en 1763, ne fut pas favorable à ce dernièr, et que le gouvernement anglais exigea pour prix de ses succès la cession de toutes nos possessions dans le nord de l'Amérique septentrionale, à l'éxception de quelques établissements pour la pêche de la morue. En conséquence, tous les officiers, tant civils q ie militaires èmployés en Canada, en Âcadie, et à Saint-Pierre-de-Miquelon, furent transférés en France avec leurs familles, et débarquèrent à Rochefort. On leur assigna, tant à eux qu'aux individus de leurs familles, de3 secours annuels, sous le titre de pensions sur les fonds de la marine ; ils sont modiques. D'après l'état nominatif que nous avons reçu de l'ex-ministre, M. La Luzerne, deux ou trois de ces pensions seulement sont de 600 livres; et la plupart de 200 livres," de 50 écus, et même de moins.
D'un autre côté, un très grand nombre des ha-.bitants de ces contrées, et particulièrement les Acadiens, peuple extrêmement estimable par la simplicité de ses mœurs, ref sèrent de se soumettre aux lois d'une nation étrangère. Simples comme la nature, ils en avaient l'énergie, et sentaient que si le gouvernement français pouvait les abandonner, au moins n'avait-il pas le droit de donner leur pays et leurs personnes comme une métairie et ses troupeaux, ni les Anglais celui de s'en emparer. La ferme résolution fut prise de repousser les oppresseurs ; mais leur force ne put seconder leur courage : nouvelles vic!imes des querelles des rois, ils furent obligés de céder à une masse irrésistible de puissance.
Cependant ces généreux colons, plutôt que de se laisser avilir, quittèrent le pays qui les avait vu naître, le pays où jusqu'alors ils avaient coulé des jours heureux au sein de l'aisance et de la paix; ils abandonnèrent, en un mot, toute leur fortune, tout ce qu'ils possédaient, pnur venir se jeter dans le sein de la mère patrie. La majeure partie débarqua dans les ports de Cherbourg et de Morlaix. Plusieurs familles se sont établies dans d'autres villes du royaume. 11 leur fut accordé à chacun une solde de 6 sous par jour, payable sur les fonds de la marine, ainsi que les pensions des oflici rs dont nous avons déjà parlé; un très petit nombre d'entre eux, très infirmes ou très âgés, obtinrent quelque chose de plus.
Il est à observer que plusieurs soldes et pensions ne furent pas données à vie, mais jusqu'à un
age determine, soil de 18 an?, soit de 20 ans : le comite vous proposera de conserver cette dis- position.
fju.'iiior. e ramisire ae ia marine, sons pretexte que son department 6t it surcharge de depenses, lit renvoyer le payement de la solde des habi- tants acadiens au Tr6sor royal; ct il obtint un fonds de 50,000 livres pour conlinuer le payement des ofliciers civils et militaires, et celui de leurs families. Ces derniers ont toujours 616 exactement paves, ou du moins il n'est parvenu k votre co- mfte aucunc plainte a cet egard. II on est bien autrernent a regard des malheureux habitants.
D'abord, des 1773, M. Peyrcuse-Descars ayant propose au gouvernement de de (richer les landes du Poilou, et fait esperer des mervcilles de a tie entrepri-e, l'abbe Terray lui livra, j'oserai le dire ainsi, plusicurs centaiues d'entre eux, pour les transplanter sur le sol le plus ingrat et le plus sterile, lorsqn'il elait atteste au contraire que le rainistre de France a Londres leur avait promis des etablissements dans les mei Hours terrains du pays. Et il est facile de juger eombibn cette con- duits etait airoce. En effer, est-ceii un a.'e avance qu'on peutentreprendre de fagonnerau plus rude de tous li s travaux, liabiluer a la nourriture la plus grossiere et la plus mesquine, des hommes qui tons etaient accoutumes a la vie pastorale, et dout plusieurs etaient nes riches? Mais les gouvernemi'nts ne se soul-ils pas fait dans tous Jes temps un jeu cruel de tromper les hoinrnes? Quoi qu'il en so t, cette barbare entreprise echoua apies avoir route la vie a la majeure partie des Acadiens qui y perirent d>3 faim et de fatigue. II en restait neanmoins encore un assez grand nom- bre; ce!a elait genanl. Quelque dure que soil Tame des despotes, si le cri du malheur ne la touche pas, au moins il l'importune. Le ministre d'alors chercha done le mnyi n, non pas de Spa- rer ses injustices passees, mais dese delivrer des plaintes et des tableaux aifligeants qui pouvaient quelquefois troubler son repos. II prit un parli simple; ce fut d'en rejeter les objets dans le nou- veau monde. Les Acadiens qui n'avaient pas peri dans le Poilou furent transposes a la Louisiane, et presque lous y trouverent entiii le dernier terme a leur misfire, la mortl
On i eut juger jusqu'a quel point ces tristes jouets d(3 la fortune furent indignement traites, puisque de 300 qui debarqu&rent a Cherbourg il n'y en existe plus que 23. MalgrG cette extreme diminution la modicite de leur paye parut encore, a un gouveruement dissipateur, une charge trop forte pour le Tr&sor public. On l'ouyrait rareimnt da is ces jours de scandale pour faire d s a« tes d'liuraaniie et de justice. On jugea tout a fait inconvenable de d.minueren lien quece flit les sommes distinees a alimenler le luxe effre ;e des courlisans pour fournir du pain a des malheureux jui n'avaient apport6 qu'un seul tresor avee eux, je veux dire le mo- dule de tuutes les vertus domestiques, seule base des moeu s pub iq es etde la felicity des nation?, tresor le plus precieux sans doute aux veux de laliberte, mais de nulle valeur a ceux d'un gou- vernement corrorapu et chez un peuple ou la servitude avait tout denature. Ainsi d^nc alors mSrne qu'un plus avarice aurait pu solliciter une augmentation de secours en favour des Aea- dicns, leur solde fut redui.e, e:i 1777, a 3 sous par jour pour quelques-uns et a rion pour les autre-. En vain ces infortunes ont fait retail til- de leurs reclamations les bureaux des ministres pour faire valoir leurs jusies droits, ils n'on rien
obtenu, a l'exception d'un secours d'une exces- sive modicite dans l'affreux hiver de 1789.
II n'est peul-fit'e pas indifferent d'obs Tver en passant que ceux-la seals y participant, que 1'on appeiait alors nobles; le peuple n'e it rien; et lorsqu'on pressait M. ile Calonne en faveur des Acadiens, il repondait froiiement : les fonds destines aux families acadiennes sont employes; qunnd il y en aura de disponibles, on verra s'il sera possible a'y faire participer les plus ages.
Les fonds sont employes! Peut-on v >ir sats la plus douloureusi! in ignation, ce depredatenr in- signo, refuser ainsi le pain a des infortun£s qui n'avaient de crime & se reprocher que celui u'avoir trop aim6 leur patrie, lorsqu'il p'-odi- gnait le sang des peuples, A qui? Vous le savez, 5 des homm'es pervers! a des femuies perdues!
La societe des amis dela Constitution de Cher- bourg, et ensuile la municipalite du m6me lieu, voyant qu'enfin 1'idole de la faveur etait brisee, etque le regne de la jusiice commengait, (irent passer vers le milieu de l'ete, soil au comite des pensions, soit a I'Assemblee nationale, qui les lui a renvoy6s, dfferents memoireset pieces sur cet objet. II en est egalemeat parvenu de la ville de Morlaix! Ces pieces sont accompagnees de reiat nGminatif des Acadiens residant'i Cher- bourg, qui les porte & 23, et d'un autre dc Mor- laix, qui 6lfive a 70 environ le nombre de ccux qui v habitant.
I (Test d'apres ces pi&~es et differcnts rensei- gnements nris ft cet £gard, que nous vous de- mandons de reparer de lonjjucs injustices, en retublissant en faveur des Acadiens les secours dont ils ont prce lemment joui.
Nous vous proposerons de les leur accorder & co'nmenf.pr du 1or janvier 1730; leurs reclama- tions etant parvenues vers le milieu de cette meme annge, et les details immenses dont le comit6, et surtout I'AssemMee, sont charts, avant emp&che qu'on ne put les faire valoir & cette tribune avant cet instant, il nous a semble que les Acadiens n'en devaient pas souffrir.
Nous avons crti devoir en m me temps pre- snter, par l'article 4 du projet de d6cret, les dispositions n6cessaires po ir constater les droits de ceux d;s habitants qui pretendront au bien- fait de la loi; car nous avons hi n, romme je l'ai annonce, un etat signe des ordonnaleurs du port de Rochefort, et un double signe de M. de La Luzerne, des pensions assignees aux officiers civils et militaires, a leurs remmes et ii leurs enfanls; mais les malheureux habitants etaient traites avec une telle indifference, qu'on n'a pu en trouver un etat nominatif dans les bureaux du contrflle, et que vraisemblablement il n'en existe que des etats partiels disperses dans les diflerents bureaux d'intendance des generality ou ils resident.
Nous avons aussi pense que, conformemcnt aux principes que vous avez aloptes de faire payer toutes les pensions sur la m6me eaisse, vous deviez decreler que les fonds verses chaque ann6e dans la caisse de la marine nour payer les pensions des officiers civils et rnililaires cana- diens, et a leurs families, resteraient desormais au Tresor public qui serait charge dVn faire 1'em- ploi. Par un dernier article, nous vous proposons de declarer qu'aucun de ces secouis ne pourra £tre recrSe a Tavcnir en favour de qui que ce soit; car il faut savoir raetlre de justes homes aux Jiberaliies nationals pour ne pas retombcr dans les anciens abus. T1
imiin, nous nnirons par vous ooserver quen
rendant aux Acadiens ce qui leur est dû, vous grèverez peu le Trésor, et vous n'ordonnerez point une nouvelle dépensé. J'ai déjà dit que les fonds étaient faits au département de la marine pour les officiers civils et militaires, et j'ajoute qu'on yous a porté en dépense pour 1791, dans le tableau présenté par le comité des finances, une somme de 816,000 livres pour les secours accordés, tant aux Hollandais réfugiés qu'aux Acadiens. La dépense pour ceux de Morlaix et de Cherbourg ne s'élèvera pas à 11,000 livres, et nous avons'tout lieu de penser qu'ils composent la majorité de ceux qui sont maintenant dans le royaume.
Tels sont les faits et les motifs sur lesquels se fonde le décret que je viens vous soumettre au nom du comité des pensions.
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité des pensions sur l'état où se trouvent les habitants de l'Acadie et du Canada, passés en France lors de la cession de ces pays aux Anglais, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Les secours accordés aux officiers tant civils que militaires acadiens et canadiens, et à leurs familles, dont l'état nominatif est annexé au présent décret, continueront d'être payés comme par le passé, par le Trésor public, à l'effet de quoi le fonds de 50,000 livres fourni précédemment au département de la marine pour cet effet, cessera de lui être fait, à compter du 1er janvier 1791.
Art. 2.
« La solde accordée aux habitants de ces mêmes contrées* qui sont passés en France à la paix de 1763, sera cohtinuéé à tous ceux qui en jouissent ou qui en ont joui, dans les proportions suivantes ; savoir : 8 sols par jour aux sexagénaires, 6 sols par jour aux pères et mères de famille et aux veuves, et 4 sols aux enfants et or-' phelins, jusqu'à l'âge de 20 ans seulement ; ces secours commenceront à courir du. 1er janvier 1790, sauf à imputer à compte les sommes que chacun d'eux aura reçues du Trésor public dans le courant de ladite année.
Art. 3.
« Chacun des secours accordés par les deux précédents articles sera éteint à la mort de chacun de ceux qui les auront obtenus, sans qu'ils puissent être recréés ou portés en augmentation en faveur de qui que ce soit.
Art. 4.
« Les personnes qui préfendront avoir droit aux secours mentionnés dans l'article 2 du présent décret, se présenteront à la municipalité du lieu de leur résidence, qui en dressera l'état : cet état sera envoyé au directoire du district ; il en vérifiera les faits, et l'enverra ensuite au directoire du département, qui le fera passer à l'Assemblée nationale avec les observations qtf il jugera convenables. »
(Ce décret est adopté.)
état nominatif des secours tant civils que militaires, accordés aux Acadiens et Canadiens (annexé au décret du 21 février 1791).
officiers d'épée.
Boisseau de La Galernerie (Louise-Elisabeth), fille d'un capitaine de vaisseau, née le 2 décembre 1756, résidente à Rochefort..... 200 liv. Boisseau de La Galernerie (Sophie), sa sœur, le 1er octobre 1759, à Saint-
Cyr......................................200
B noit (Anne), fille d'un capitaine des troupes de Hlè royale, le 22 septembre 1728, à Charente, à vie......... 300
Benoît (Emilie-Jeanne), sa sœur, 4 novembre 1739, idem, à vie.......... 200
Benoît (Jeanne-Gervaise), sa sœur, 29 août 1744, idem, à vie ............. 200
Bourdon (Adélaïde), fille d'un , lieutenant des troupes de l'île royale, 27 octobre 1757, Rochefort, à vie...... 250,
Bourdon (Henriette-Magdeleine), sasœUr,
12 juin 1767, idem, à vie.v.. ... . ... 200 ; Bourdon (Gabriel-Pierre-Bonaventure), leur frère (volontaire), 29 décern- , ,-,.u bre 1770, idem, jusqu'à 18 et 20 ans. 108
Chalmet (Marie-Anne), 3 mai 1754, Blois, -à vie............................. 150
Dorfotitaine (Angélique Le Neuf de la Vallière), épouse.d'un capitaine réformé des troupes nationales, 19 septembre 1759,Taillebourg, à vie.. »... 300 Duchambon (Marie-Anne) Roma, veuve d'un capitaine au régiment de Bourbonnais, 4 février 1736, Fontenay-le- Comte, à vie...................... 200
D'Ailleboust de Saint-Vilmé (Louise-Marguerite)* fille d'un ancien officier du Canada, 14 novembre 1728, Loches, à vie...................... 200
De Bonnaventure (Louise-Denis) de La Ronde, veuve d'un lieutenant de roi, à Louisbourg, Rochefort, à vie...... 400
De Bonnaventure (Marie-Louise), sa fille, 7 août 1758, idem, à vie.....1..... 400
De Saint-Ours, (Thérèse), fille d'un ancien officier du Canada, épouse du sieur Câtineau, Saintes, à vie....... 300
De Saint-Ours son frère, sous-lieutenant au régiment de la Martinique, jusqu'à ' ce qu'il soit capitaine en second, sui- vànt une décision dii ministre, jusqu'à 18 et 20 ans...........................200
Denis de La Ronde, ancien officier du Canada, Paris, à vie............... 200
Denis (Màrie-Jeanne) d'Accaret, veuve d'un capitaine ci-devant major de l'île royale, épouse de M. de Pomme-roy, 21 juin 172Ô, Saintes, à vie.... 200
Denis (Marie-Charlotte), sa fille, 27 octobre 1755, Rochelle, ù vie........ 300
Dangeac de Merville (Marie-Marguerite), 19 août 1752, Rochefort, à vie...... 300 liv.
Dangeac de Merville (Geneviève-Antoinette), sa sœiir,26 octobre 1756, Saint-Jean-d'Angély, à vie...... ,...... 300
D'Eutremont ' (Marguerite), tille d'un officier servant à l'Acadie, 5 novembre 1724-, Fontcnay-le-Gomte, à vie.. 250 Dupont du Gh imbon de Méz llac (Henriette), 15 mai 1763, Paris, à vie.... 200 Dupont du Chambon de Mézillac (Mar-guerite-Félicité-Honorine), sa sœur, 27 février 1772, Saint-Jean-d'Angély, à vie...................:.......... 200
Dupont du Chambon de Mézillac (Anne-Ëléonore-Gharlotte), sa sœur, 2 mai 1776, idem, à vie.................. 200
Dupont du Chambon dé Mézillac (Marie-Adélaïde-Sophie), autre sœur, idem, à vie.........................................200
Dupont du Chambon de Mézillac (François), leur frère, 15 juillet 1768, sous-lieutenant au régiment du Boulonnais, doit jouir jusqu'à ce qu'il soit capitaine en second, jusqu'à 18 et 20 ans............../.............. 200
Dupont du Chambon de Mézillac, autre frère, 30 novembre 1769, idem,' doit jouir jusqu'à 18 ou 20 ans.......... 200
Decoux (Jeanne-Anne), fille d'un capitaine des troupes- de 4'île royale, 10 mai 1741, Exideuil, à vié........ 200
Dubois-Berthelot(Anne-Sartigue), veuve d'un officier du Canada, 28 décembre 1734, Saintes, à jrie............ 400
Dubois-B' rthelot (Marie), sà fille, 23 ans, idem, à vie................,.;..,. '300
Duchambon (Jeanne-Françoise^, fille d'un capitaine des troupes de l'Ile royale, 7 mars 1751, Gompiègne, à vie..... 400
De Gannes (Marie-Charlotte), fille d'un ancien major de l'île royale, 23 juin 1738, Loches, à vie. ;...;......-.... 300
De Gannes (Julie), sa sœur, belle-sœur de M. de La Galernerie, 4 mars 1740, Rochefort, àvie................... 400
De Gannes (Marie-Françoisé) de Goignes, veuve d'un capitaine aide-major du Canada, Loches, à vie:...... i...... . 200
DôGannes (Charlotte-Françoise), sa fille, 20 octobre 1755, idem, a vie.... «. ;. 300
D'AUard dë Sainte-Marié (Anriè-Françùi-' se),fille d'un capitaine d'artillerie servant à Saint-Domingue, 24 avril 1741, Tonnât-Poutonhe, a Vie ........... 300
D'AUard de Sainte-Marie (Thérèse-Françoise), sa sœur, 20 ans, Tonnat-Pou-tonne, à vie........... . 300
D'AUard de Sainte-Marie, autre sœur,
idem, à vif/.'.____............. . . .... er">- 250 .
De Ghauvelin (Marie-Joseph) Chassin de Thierry, veuve d'un, capitaine du régiment de Bourgogne, le 9 décembre 1737, Poitiers, à vie...................400
De Chauvelin (Marie-Julie), sâ fille, -10 janvier 1759, Saint-Gyr, à vie.... 200
De Vildodné (Louise-Mar«uerite-Ghar-lotte), fille d'un capitaine réformé dés troupes de l'île royale, 18 août 1751, Orléans. à vie............;.... 200
De Saint-Rigne (Louise-Marie-Gharlotte) de Lopinot, veuve d'un major des troupes de l'île royale, 24 septembre 1735, Bordeaux, à vie.......... 600
De Saint-Rigne (Marie-Marguerite), sa fi lie, 19 août. 1759, idem............ 200 liv.
D'EstimauvillefLouise-Marguerite-Ghar-lotte), fille d'un capitaine réformé des troupes de l'île royale,.4; septembre 1751 i Palaiseau près Paris, à vie. 250 D'Estimauville (Louise), sa sœur, 28 juin 1752. idem, à vie.................. 250
D'Ailleboust de Cery (Marie-MadeleineV, tille d'un .capitaine, des troupes de Louisboprg, Tours, à vie........... 200
Dupain de Bellugard (Marguerite-Antoinette), fille d'un commissaire d'artillerie en Canada, 29 mai 1729, Saint- r jj ;; Jean-d'Angély,.à.vie,..,...,........... . 400
De Gâilly (Marie-Ann'jj, fille d'un lieutenant-colonel du régiment de Karrer, 29 mai 1736, idem, à vie........... 200
D'Ailleboust (Françoise-Charlotte), fille d'un lieutenant de vaisseau péri sur la Baïonnaise 23 février 1765, Saint-Aignan, à vie... v,. ....,.... , 200 D'Ailleboust, son frère, lieutenant dans lés troupes de Cayenne, repassé en , , France pour cause de démence, à vie. 200 De Saint-Vincent (Thérèse-Achille), fille d'un capitaine des troupes du Canada, 15 janvier. 1724, la Rochelle, à vie... 300 De Coigne, (Louise), fille d'un lieutenant de roi à Saiut-Marc, mariée à M. Mo-reâu, 24 novembre.1766, Saint-Domingue, à vie............................ 250
De Coigne (Catherine-Rosalie), sa scéur,' * .
7 novembre 1771,' idem, à vie,..,. . . 250 Dupont du Chambon, ondoyé» fils d'un capitaine au régiment de Foix, sous-, lieutenant au régiment de Gambrésis, doit jouir jusqu'à ce qu'il soit capitaine en second, jusqu'à 18 et 20 ans. 200 Dupont du Chambon (Louis), son frère, sous-lieutenant en second au régiment de Touraine, doit jouir, idem, jusqu'à 18 et 20 ans............... 200
Dupont du Chambon,ondoyé, son frèrç» sous-lieutenant au régiment d'An-goumois, doit jouir, idem, jusqu'à 18 et 20 ans........................, 200
De Coigne (Louise-Garliè>), veuve d'un officier servant au Canada, 20 août 1716, la Rochelle, à vie............. 200
D'Ugues ( Marguerite - Madeleine de Voyelle), veuve d'un capitaine du Canada, remariée à M. de Soupas, Loches, à vie........................ 300
De Maccarty (Marie-Angélique), fil le d'un capitaine de vaisseau, 26 avril 1740, Saint-Jean d'Angély, à vie.......... 250
De Maccarty ( Thérèse - Charlotte), sa sœur, 19 juin 1750, idemi à vie..... 250
De Noyelle (Marguerite-Charlotte), fille d'un capitaine de troupes, mort à Gorée, mariée à M. Dufresnoy, 22 juillet 1745, Loches, à vie............. 200
De Noyelle (Jeanne-Magdelei ne) ,sasœur, 15 janvier. 1755, Saint-Domingue, à vie.........................?..... 200
De Verteuil (Marie-Joseph Dupont Duvi-vier), épouse d'un capitaine des troupes de l'île royale, 16 septembre 1737, Ile-Dieu, à vie............... 200
De Verteuil (Victoire), sa fille, 18 février 1756,. Rochefort, à vie,....... 300
De Verteuil (Anne-Joseph), sa sœur, 3 août 1758, Ile-Dieu, à vie......... 200;
De Verteuil.(Louise),[autre sœur, 27 décembre 1763, idem,- à vie.....;..... 200 liv.
De Verteûtt (Marie-victoire-Adélaïde), autre sœur, 24 mars 1767, Rochelle, à vie......................__________ 200
De Verteuil (Mathieu ), leur frère, 22ayril ï'765, sous-lieutenant au régiment de Languedocydoit jouir jusqu'à ce qu'il soit fait capitaine en second, jusqu'à 18 et 20 ans............... 200
De Verteuil (Jacques-François), idem, 24 août 1766, élève de la première classe, jouira Jusqu'à ce qu'il soit lieutenant de vaisseau, jusqu'à 18 et 30 ans............................. 200
De Verteuil (Michel), autre frère, 25 septembre 1773, Ile-Dieu; jusqu'à 18 et 20 ans..;........................ 108
De Gourville (Anne), fille d'un capitaine de l'île royale^et épouse du sieur de Fourerny, 3 lévrier 1744, Poissy, àVie................................ 200
De Bailleul (François Odel de Pie), fils d'un ancien chevalier de Saint-Louis, jusqu'à ce qu'il soit placé, jusqu'à 18 et 20ans....................... 300
D'Aine (Françoise), veuve du sieur Ma- jesse, Blois, à vie.................. 200
Damour (Marié-Rose), veuve Tassicot, Nantes, à vie,............... . .it.. 108
De Sainte-HélèneVincelette, Parie, à vie. 150 De Ligneries (Marie-Thérèse Marchand), fille d'un capitaine des troupes de l'île royale, 21 février 1750, Loches, à vie...;:......................... 150
De la Morandière, fils d'un capitaine du régiment dû Cap, sous-lieutenant, doit jouir jusqu'à ce qu'il soit capitaine en second, jusqu'à 18 et 20 ans. 300. De l'Espérance, fille du baron du nom, à vie............................. 450
De l'Espérance, sa sœur, à vie...... .. 150
De Salignac de Fénelon (fils du sieur), à vie............................. 100
De Salignac de Fénelon (idem), à vie.. 100
Eury de la Péri-Ile (Charlotte-Marguerite), fille d'un capitaine au dépôt des recrues des colonies, 20 janvier 1766,
Martinique, à vie.................. 200
Eury de la- Pérille-(Marie-Adélaïde), sa sœur, 9 février 1767, idem, à vie.,.. 200
Eury de la Pérille (Joséphine), autre sœur, 9 février 1767, idem, à vie... 200
Le Poupet de ia Boularderie (Eléonore-Jeanne), veuve d'un- ancieni capitaine des troupes de l'île royale, 6 octobre 1733, Tours, à vie...-----.......... 500
Le Coudre de Bourville- (Marie-Angélique-Françoise), fille d'un ancien lieutenant du roi, à idem, 15 juillet 1731, Saint-Germain-en-Laye, à vie....... 200
Le Coudre de Bourville (Anne-Marguerite), sa sœur, le 19 août 1735, idem, àvie.............................. 200
Le Neuf de la Vallière (Marguerite), fille d'un major des troupes de l'île royale, 15 juillet 17|5, Rochelle, à vie....... 300 liv.
Le Neuf deBosneuf (Elisabeth), fille d'un chevalier de Saint-Louis, ci-devant capitaine des troupes de Cayenne, 15 février 1769, Rochefort, à vie.... 308 Le Neuf de Beaubassin, filie d'un capitaine des troupes de Cayenne, à Lo- rient, à vi.e........................ 200
Le Neuf de Beaubassin, sa sœur, idem, àvie.............................. 2Q0
Le Neuf de Beaubassin (Jacques-Philippe), spn frère, 26 novembre 1776, Bordeaux, à vie.................... 200
Le Neuf de Beaubassin- (Joseph-Marie)r u '3 son frère, 1777, idem, à vie......... 290
Mézièfes de l'Espervanche (Louise-Françoise), fille d'un ancien officier du Canada, née en 1763, Cbâteau-Gontier, àvie............................. 300
Potier de Pommeroy (Marie-Anne-Julie), fille d'un capitaine des troupes nationales de'Cayenne, 20 février 1770,. Cormes royales, à vie ...... .......-. 200
Potier de Pommeroy (Jean-Baptiste), son frère, 8 septembre 1766, jusqu'à ce qu'il soit capitaine en fécond, jusqu'à 18 et 20 ans................... 208
Potier de Pommeroy tLouis-Réné), autre frère, 8 juin 1767, idem, jusqu'à 18 et 20 ans...',:..:.',;.».,..,;.'............ 208
Poulain de CoUrval (Louis), fils d'un ancien lieutenant de vaisseau, 6mai 1769, sous-lieutenant au régiment de la Martinique, Gharente, jusqu'à 18 et 20 ans............................ 108
Rousseau de Villejoipt (Adélaïde), fille d'un major, à. la Désirade, 46 novembre 1764, Riochefort, à vie.......... 400
Rambeau de Bara.lon (Marie^Catherine du SabiéJ, épouse d'un capitaine ci-devant des troupes du Canada, née en 1742, Poitiers, àvie................. 600
Rochard (Françoise) veuve d'un ancien aide-major de place, Rochefort, à vie. 3ÔQ Rodrigue (Olive-Antoinette), Bordeaux, à yie............................. 150
Varielle de la Bregeonnière (Marie-Françoise), fille d'un capitaine réformé des troupes nationales, 2 janvier 1765,
Poitiers, à vie ,..,................. 300
Varielle de la Bregeonnière (Marie-Jo- sèphe), sa sœur, idem, à vie......... 300
Varielle de la Bregeonnière (Magdeleine), autre sœur,, idem, à vie............. 300
Officiers d'administration et de justice.
Bertin (Marje^Anne-Bertrand)., veuve d'un chirurgien-major à l'île royale, 4 mars 1720. Bordeaux, à vie.............. 250 liv.
GarerOt (Renée-Marie), fille- d'un écrivain de la marine à l'Ile royale, 2 juin -1738, Rochelle,- à vie.... . ..... 300
Chapelin (Jéronime-Françoise), fille d'un commis aux écritures, 3 mai 1754, Rochefort, à vie..,................. 150
Ghesnay (Louise le Breton), veuve d'un ancien greffier du conseil supérieur, 28février 1718, Avranches, à vie.... 200
Delord (Angélique), tille d'un - conseiller à l'île royale, épouse du sieur de Grès, 13 mars 1755, Saint-Jean-d'An- " gély, à vie........................- 250
LeVasseurdeSaint-Laurent (Marie-Anne), fille d'un lieutenant général de l'amirauté de l'île royale, 30 juillet 1745, Agde, â vie........................ 250
Le Picard (Françoise); fille d'un ancien ? chéf des bureaux de la marine au Canada, Paris, à vie................ 350
Large (Catherine-Elisabeth), fille d'un ancien écrivain du roi, 19 décembre 1746, Rochefort, à vie....;......... 200
Large (Elisabeth), fille d'un ancien écrivain du roi, 12 janvier 1758, Rochefort, à vîë... ;...................... 200
Le Jfeuf de Beaubassin (Marie d'Acca-rétte), veuve d'un conseiller, 18 mai .1724, Charente, à vie.-.w............ 200
Le Neuf de Beaubassin (Anne-Julié), sa fille, épouse de M. Biofseldj idem, à vie..,,,......................... 200
Martissans, (Marie-Anne),, fille d.'un conseiller du roi, 17 janvier 1739, Rochelle, à vie...................... 300
Martissans (Marie-Charlotte), sa sœur, 17 septembre 1740, idem, à vie...... 300
Morin (Marie-Charlotte), fille d'un garde-magasin et commissaire aux classes, 27 septembre 1759, Angers, à vie... 300 MillytLouise),' fille d'un juge de Saint-Pierre et Mique'lon, Rochelle, à vie.. 168
Pertuis (Louise-Ursule), fille d'un procureur du rçi de l'amirauté de Québec, née en 1752, Loches, â vie..... :200
Anselme (Marie-Jeanne), yeuve d'un ser-" gent canbnriièr, tué au siégé dé File ' Boyale, 15 ! janvier 1719, Rochefort, ; à vie.........,.,........,... 108 liv.
Amiot (Marguerite)* fille d'un habitant, 27 septembre. 1744, Rochelle, à vie. . 108 Aubin (Marie) ' veuve " de* François Be-nard, 1722, Bordeaux, à vie.....,.. 54
Amien (Geneviève)^ Leblanc, Rochefort, à vie...,..*.,..;.........................m
Audirac (Marguerite Dumesnil), veuve d'un habitant kau Canada, Rochelle, à, vie......54
Berbudeau (Marie-Anne), fille d'un ancien chirurgien, 24 mai 1750, Ro- : chelle, à.vi.e........ .. . ... ............. 160,
Branet (Marguerite Normandeau), épouse d'u n chirurgien, 20 juil- -let 1720, Romegoux, a vie......... 108
Breau (Marguerite), Guedry, veuve d'un habitant tué au §iè.ge de Québec,
27 septembre 1724, Rochefort, a vie. 108 Beaudoin DuclusejiuA. (M.arie-M?igde- leine), fille d'un habitant, 7 avril 1732, j . i ,v Bordeaux, à vie—..............150
Barbier Duplessis (Anne), fille d'un chirurgien, 21 avril 1737* Rochefort, à , vie,.....,I,..,,:.,,,,,,,.,..... 108 Barbier Duplessis (Gilette), sa soeur, 28 juillet-1744, idem...........,... 108
Barré (Anne) le Manquet, veuve d'un capitaine de navire, 1712, le Havre, à vie............................. 200
Besençon (Mari2-Agathe),-fille d'un ancien habitant, 1759, Rochelle, à-vie, 108 Blacquier .(Barbe), fille d'un sergent des troupes de Miquelon, 1773, idem, à vie........... ....... .54
Blacquier ((Mârie-Ànne), sa sœur, 1771, idem............................. 54
Beaumoncel. .(Marguerite) .La Iiande, , ; veuve, 1758, le Havre, à vie...----- 54
Bornic (Jeanne)^ à, vie................ 54
Nota. Employée, à. compter du. premier janvier 1783, par décision du premier août suivant, et n'a jusqu'à ce jour fait aucune réclamation.
Brichet (Marie-Agnès et .Marier-Françoise) , à vie /.. t : . ........... 54
Nota; Employées à compter du premier janvier 1785, sans réclamation.- l
Bornic (Marie), à vie................. 54
Nota. Employée.4.compter du. ppe- ., mier janvier 1783, n'a point réclamé.
Bertrand (Reine), yeuve l'Hermitte, Ro- chelle, a vie..................... 168
; Bourgeois (Françoise), fille d'un habitant de Saint-Pierre et Miqqelon, 1744, idem, jusqu'à. 18 et'2Ô ans......... 72
Brunet (Elisabeth), ci-devant habitante desdîtes îles, idem, à vie..i........ 108,
Glaparet (Louise-Angélique) Foueheu, veuve d'un négociant, 1739, Rochelle, à vie.............................. 150 liv.
Claparède (Renée), fille d'un négociant, Viols-le-Fort, près Montpellier, à vie. 250 Castaing (ieanne-Elisabetn), fille d'un habitant, 28 mai 1753, Rochefort, à vie............................... 200
Garbonnèle (Marie-Marguerite), fillejd'un capitaine marchand, 24 septembre 1765, Charente, à vie............... 150
Corperon (Aune-Madeleine), fille d'un habitant, 27 octobre 1753, Rochefort, à vie............................. 108
Chaton (Louise), fille d'un arpenteur, 17 septembre 1754, Toulouse, à vie.. 108 Ghailloux (Marié), veuve d'un habitant, . 1735, Rochefort, à vie. >.. ........ 54
Clermond (Pierre-Augustin), ancien habitant, 1734, Cherbourg, à vie...... 108
Ghalois (Françoise) Guérard, veuve, Saint-Malo, à vie... ........... 108
Gœttret (Angélique), fille d'un garde-magasin à l'île royale, 1752, Viols-le-Fort, près Montpellier, à vie..... 108 Camus (Marie), femme de Louis Devaux, \ Paris, à vie....................... 108
Chapuis, veuve d'un pêcheur de Louis-Jbourg, à vie...................... 54
Nota. Employées du 1er janvier 1738, par décision du 1er août suivant, n'ont point réclamé. Gourlel (Anne), veuve Gentil, 1734, le
Havre, à vie. ô. 108
Conard (Marguerite), femme de Louis Harel, ancien habitant de Saint-Pierré. et-Miquelon, 1756, Rochelle, à vie.. 144
Dutraque (Marie-Anne), fille d'un négociant, 2 novembre 1718, Rochefort, à vie.............-.. .....200
DeCovignac (Jeanne), fille d'un habitant, 1er mai 1749, Saint-Thomas-des-Bois, à vie............................. 300
Dumoncel (Geneviève), Glermont, veuve d'un négociant, 19 mars 1719, Rochelle, à vie...................... 200
Dumoncel (Geneviève), sa fille, 21 décembre 1737, idem, à vie.......... 150
Dumoncel (Barbe-Françoise-Jacuueline), idem, 28 janvier 1751, idem, a vie... 150 Dumoncel (Marie), autre idem, 21 avril 1747, idem, à vie.................. 150
Dumoncel (Jeanne-Louise), autre idem, 30 avril 1756, idem, à vie......... 150
Didion (Marie-Jeanne), Lessêne, veuve d'un habitant, 20 juillet 1727, idem, à vie.............................150
Decheneau (Joséphine), fille d'un habitant tué au siège ae Québec, 1748, -Rochefort, à vie..................' 108
David (Jacques), soldat blessé au siège de rile royale, 5 avril 1785, Rochefort, à vie........................ 108
David (Marie Landert), sa femme, 23 octobre 1718, idem, à vie........ 108
De Rudder (Julienne), fille.d'un habitant, 15 juin 1750, idem, à vie...........108
Dominique (Geneyiève Groult), fille d'un gardien des magasins du roi, 19 décembre 1741,1a Tremblade,à vie____
Dupont (Marie-Catherine Auvrai), veuve d'un officier marinier et créole, 1er janvier 1726, Bayonne, à vie...........108
Dupont (Françoise), fille d'un habitant, 4 août 1729, idem, à vie.......150
De Laforest (Jeanrié Làfargue), veuve d'un ancien pilote, 13 décembre 1728, Rochefort, à vie.................108
De Laforest (Jeanne), sa fille, 28*décembre 1762, idem, à vie..............108
De Laforêt (Marie-Catherine), 9 mai 1735,
Nantes, à vie.....................108
D'Accaret (Renée), filie d'un habitant,
Bordeaux, à vie...................150
Dugué (Cécile de Pinet), femme d'un sergent des troupes de l'île royale, 2 décembre 1782, Taillebourg, à vie. Doyer (Jacquemine!, veuve Gantier,
59 ans, Saint-Malo, à vie..... 150
Duplex Silvain (Marie-Geneviève), fille d'un juge royal de Saint-Pierre et Miquelon, 16 octobre 1723, Vannes, à vie................... .. . . ......150
Daguerre (Angélique), 28 août 1729, à
vie...............................108
Nota. Employée depuis 1783 par décision du 1er août de ladite année, et n'a point fait jusqu'à ce jour de réclamation.
Fixel (Marie-Françoise), fille d'un habitant de Louisbourg, 1764, Bordeaux,
à vie.............................54
Fixel (Joséphine-Cécile), sa sœur, 1759,
idem, à'vié........................54
Fixel (Barbe-Louise), autre idem, 1762,
idem, à vie........................54
Fautoux (Màrie-Jeanne), fille d'un négociant, 25 mai 1744, la Rochelle, à vie.300
Fieury (Olive), femme de Jean Maran-del, 1750, Saint-Malo, à vie.........108
Gautier (Marie), fille d'un habitant, 14 octobre 1759, la Rochelle, à vie...... 108
Grandbois (Jeanne-Elisabeth), Pilon, 1723, le Havre, à vie...........f... 54
Guyot (Marguerite), Paimbœuf, à vie.. 54
Gaudet (Anastasie Doré), veuve Boudrot, le Havre, à vie. ................... 54
Hiriard (Cécile), fille d'un habitant,
22 novembre 1741, la Rochelle, à vie. 200 Herpain (Jeanne-Marie), fille d'un habitant, 11 septembre 1744, idem...... 108
Herpain (Marie-Périne), fille d'un habitant, 21 octobre 1751, idem......... 108
Hébert (Marie-Athalie, veuve), 1752, le v Havre, à vie....................... 54
Hébert (Louise-Félicité), fille de Jean, habitant de Saint-Pierre et Miquelon, 1782............................. 72
Nota. Jusqu'à dix-sept ans.
Imbert, veuve d'an négociant, 1723, Bordeaux, à vie...................... 150 liv.
Jourdan (Agnès), Rochelle............ 108
Jouet (Charles), ancien habitant, Mique-lon......................................200
Lartigue (Marguerite Hertel Gourvoisier), épouse d'un négociant, 23 septembre 1727, Ile de France, à vie... 250 Lessène (Marie-Madeleine), fille d'un habitant, 24 août 1733, la Rochelle, à vie............................... 150
Lessène (Catherine-Maurin), veuve, 1730, la Rochelle, à vie.................. 108
Lessène (Marie-Madeleine), fille de la précédente, 1768, idem...'......... 108
Labroucbe (Jeanne-Madeleine), fille d'un habitant, 7 septembre 1738, Paris, à vie......................................150
Lièvre (Thérèse), fille d'un pouilleur de Québec, mort à Cayenne, 1er septembre 1746, Rochefort, à vie...... 108
Lagonnaire (Jeanne-Marie), fille de Biaise, habitant, 28 mai 1729, Bordeaux, à vie................................ 108
Lagonnaire (Catherine), sœur de la précédente, 23 avril 1740, idem........ 108
Lagonnaire (Marie), fi I le de Gyprien,[autre habitant, 1741, idem............... 108
Lagonnaire (Catherine), sœur de la précédente, 20 septembre 1743, idem... 108 Lagonnaire (Marguerite), autre sœur, 21 septembre 1747, idem........... 108
Lagonnaire (Glaire), idem, 22 octobre 1749, idém........................ 108
Lelièvre {Jeanne), fille d'un habitant, 1741, Miquelort, à vie.............. 54
Lelièvre (Jeanne), femme d'un habitant, 1736, Saint-Malo, à vie............. 72
Lapieire (Rosalie Hébert), veuve de Joseph), 1745, le Havre, à vie....... 54
Landry (Anne), fille de Pierre et femme de Jean Melauson, le Havre, à vie... 54 LeMoyne(Franç-dse), fille d'un habitant, Saint-Pierre-et-Miquelon, à vie...... 108
Le Moyne (Jeanne), veuve Loustalet, idem ......................r...... 108
Lefour (Mauristette), veuve de Gilles Ruaud, 1720, Rochefort, à vie...... 60
Le François (Anne), veuve Martin, 1721, la Rochelle, à vie.................. 100
Lavergne (Marguerite), femme Doucet, Le Havre, à vie.................... 54
Lavergne (Ovide), idem.............. 54
Le Bjrgne (Jeanne), habitante, 1782, la Rochelle.....:...............................72
Nota. Jusqu'à 17 ans. Legros (Louise), femme d'un habitant, 1748, à vie........................ 72
Letourneur, ancien habitant......... 120
Nota. Employé du 1er janvier 1787 par décision du 6 mai suivant, n'a pas réclamé.
Maurin (Elisabeth Gautier), veuve d'un capitaine marchand, 12 janvier 1727, Bessac près Marmande, à vie....... 200
Milly (Louise), fille d'un habitant, 4 août 1723, la Rochellé, à vie..... 150
Milly ^Françoise), fille- d'un habitant, 11 avril 1719, la Rochelle,kh vie.... 150
Milly (Marie-Jeanne),idem, 2-2 mai 1739, idem...........>1.»........ 150
Morel (Marie-Reine-Paris), veuve d'un
négociant, 16 mars 1716, idem.... 150 Martin (Marie), fille d'un sergent, 22 janvier 1765, Rochefort, à vie.......... 150
Malguerie (Marguerite-Saux), femme d'un habitant, 1747, la Rochelle, à vie...................,........;... 200
Mukin (Christine), orpheline émigrée de Cayenne, Rochefort, à vie....... 108
Milly la Groixdu Trouy (Anne-Françoise), iiïle d'un capitaine marchand, Paris, à vie.....i.......I..... i *..,v... 108
Poujet (Anne), fille d'un habitant, 20 août 1747, la Rochelle, à vie..... 108
Poujet (Judith), veuve Josse, ci-devant habitante, 1721, idem, à vie........ - 54
Porcher (Madeleine), fille d'un char- r ' pentier, entretenu en cette -qualité-à er"> la Martinique, 12 octobre 1766, Rochefort,à vie........................ 54
Phélippot (Marie-Anne), fille d'un soldat et cr un habitant pêcheur, 9 septembre 1715, Saint-Malo, à vie............. 54
Portés (Marie-Gaiherine-Martel), femme d'un habitant, 1725, la Rochelle, à vie.....................tV........ 162
Portés (Angélique), fille du précédent, 1756, la Rochelle, à vie............. 54
Portés (Françoise-Thérèse), sa sœur, 28 février 1767, idem, à vie........ 54
Portés (Marie-Catherine), idem, 14 août 1766, idem, à vie..............- 54
Portés (Geneviève), idem, 8 septembre 1768, idem, à vie.................. 54
Picheau (René), ancien habitant, 1723,Saint-Malo, à vie.................. 54
Plock (Marie-Madeleine), fille d'un habitant, 1737, idem, à vie............. 54
Pichaud (Thérèse), fille d'un habitant-pêcheur, 20 février 1741, la Rochelle, à vie............................. 108
Perrin (Marie), veuve de Jacques, habitant, Rochefort, à vie.....................54
Querton (Jeanne-Barbe-Grénard), veuve d'un habitant, 8 janvièr 1722, Rochefort, à vie.................................108
Raux (Angélique-Allaire), veuve, Saint-
Malo, à vie........................ 108
Rambourg (Jérôme), charpentier, 1745,
la Rochelle, à vie.................. 108 liv.
Rambourg (Marguerite Groussain), femme du précédent, 1744, idem, à vie............................... 54
Robion (Marguerite), veuve Gril, 1732, Toulouse, à vie -. v............... 108
Radoux(Yiç1;qirç},femme de Jean Begaud, 1750, la Rochelle, à vie............ 144
Radoux (Marie), femme de Jean Joly, 1757, idem, à vie.................. 144
Rayer (Thérèse), veuve Hemingré, 1753, idem, à vie........................ 144
Rosse, ancien habitant, idçm, à vie.... 12Çt Nota. Employé du 1M janvier 1787,' par décision du 6 mai suivant, n'a point réclamé.
Saint-Martin (Geneviève), fille d'un habitant, 3 janvier J72£, Angers, à vie... 200 Sémer (Elisabeth), Saulnier, 1729, le
Havre, à vie,...............................54
Saumier (Marguerite), qr.phçUfie, . idem, a vie....................... 54
Tranchard (Françoise), veuve Goupil, ancien habitant de Saint-Pierre-et-Mi-
quelon, 1752, Saint-Malo, à vie...... 144
Thérèse, sauvage de nation, la Rochelle............................. 108
Yagnier (Valenlin)4 Allemand, devenu aveugle à Cayenne, 1745, Rochefort,
à vie.............................. 108
Yrignaud (Louise), .fille, du. sieur Iger,
Bordeaux, à vie.................... 150
Vrignaud, sa soeur, idem, à vie,.....,. 150 Yicette (Marie), femme de Pierre Gbau-faud, ancien habitant des îles Saint-Pierre-et-Miquelon, 1756, la Rochelle, à vie....,.-........................ 72
Yon (Marie), veuve Jehume, ci-devant habitant de^dit.es îles, la Rochelle, à vie............................. 168
Zémard, fille du premier mariage de Mme Milly, épouse d'un juge de Saint-Pierre-et-Miquelon, la Rochelle, à vie. 168
Total........... 45,696 liv.
Rochefort, le 17 septembre 1790.
Signé : BERGEVIN DE QUÉSMAUD. Yu par nous, Intendant de la Marine.
Signé:Q.'QKlïibQ%.
, au nom du comité des pensions, présente un projet de décret sur les indemnités dues aux porteurs de brevets de retenue, en conformité de l'article 3 de la loi du 1er décembre 1790.
Ce projet de décret est ainsi conçu :
« L Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des pensions, qui a rendu compte des vérifications faites par ie directeur général de la liquidation, décrète qu'en conformité de l'article 3 de la loi dli 1èr décembre 1790, il sera payé aux porteurs de brevets de retenue dont les noms vont Suivre,' lès indemnités qui seront pareillement désignées, avec les intérêts, à compter du jour de la remise et enregistrement de leurs mémoires et pièces, conformément à l'article 4 de la loi du 9 janvier dernier, savoir;:
« A Jacques-Hubert Boschery de Plain ville, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, avec les intérêts de cette somme, à compter du 8 du présent mois de février ;
« 4ux héritiers et représentants du sieur Antoine Raymond, Charles} de Gausan, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, avec les intérêts de cette somme,'à compter du 27 janvier dernier;
« A Jean-Jacques Chapponet, commissaire des guerres, 70,000 livres d indemnité, avec les intérêts, à compter du 1 1 janvier dernier ;
« Aux héritiers de Dominique Louis-Ethis de Gorny, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, et les intérêts de cette somme, à compter du\19 janvier, dernier ;
« À Emmanuel-Richard Jarry, commissaire des guerres,' pareille sohame de 70,000 livres d'indemnité, avec les intérêts, à compter du 3 du présent mois de février ;
« A Joseph-Louis de La Berge, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, et les intérêts de cette somme, à compter du 8 du présent;
« A Jean-Frédéric de la Tour-du-Pin, ci-devant secrétaire d'Etat, 5Q0,000 livres d'indemnité, avec les intérêts de ladite somme, à compter dudit jour 8 février;
« A Pierre-Philippe Mazières de Jouy, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, avec les intérêts, depuis le 8 du présent mois de février;
« A Louis-Alexandre Mouette, commissaire des guerres, la somme de 70,000 livres d'indemnité, avec les intérêts, à compter du 27 janvier dernier; . '.— ' ' 1
« A Denis de Senneville, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, et les intérêts de cette somme, à compter dudit jour 27 janvier dernier;
« A Benoît-Joseph de Tarté, commissaire des guerres, 20,000 livres d'indemnité, ayec les intérêts, à compter du premier février présent mois ;
« A Joseph-Vèyret DeValagnon, commissaire des guerres, pareille Somme ae 20,000 livres d'indemnité, avec les intérêts, à compter du 8 du présent mois;
« A Jean-Honoré-Marc Viang, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, avec les intérêts de cette somme, à Compter dudit jour 8 février;
« A la charge, par chacun des dénommés ci-dessus, de se" conformer aiix lois de l'Etat, pour obtenir sa Reconnaissance de liquidation et le payement dès. sommes qui y seront portées. »
(Ge décret est adopté.)
, rapporteur. J'observe à l'Assemblée que tous les commissaires des guerres dénommés dans le décret, ne sont plus en activité; mais que plusieurs autr s commissaires en plein exercice prétendent aussi à une indemnité, attendu, disent-ils, que l'Assemblée n'a pas déclaré que les commissaires des guerres ne recevraient leur indemnité que lorsqu'ils ne seraient plus eu activité.
Un membre du comité militaire : J'observe à l'Assemblée que le comité militaire s'occupe d'un plan d'organisation sur l'état futur des commissaires des guerres.
(L'Assemblée prononce l'ajournement de ce qui concerne les commissaires des guerres et décrète que le remboursement des indemnités dues à ceux qui sont en activité, sera suspendu, quand bien même ils se trouveraient compris dans les précédents décrets sur ledit remboursement.)
La parole est à M. l'abbé Gouttes pour un rapport au nom du comité de liquidation sur Vexamen et Vapurement des dépenses relatives aux bâtiments du roi.
, au nom du comité de liquidation. Messieurs, le comité de liquidation, pour accélérer vos opérations, a l'honneur de vous présenter un projet de décret : il s'agit de faire payer un grand nombre de pères de famille, entrepreneurs de bâtiments du roi.
De très grands retards ont été apportés dans la remise des mémoires relatifs aux fournisseurs de la maison du roi et aux ouvriers employés aux carrières. On croit encore, Messieurs, aux revenants, et on nous repousse, depuis le t mps que nous sommes créés, sans vouloir nous donner les pièces nécessaires à l'appui des comptes des malheureux fournisseurs qui réclament leur payement et que l'on tient depuis si longtemps dans l'incertitude.
Voici notre projet de décret :
« Art. 1er. Le directeur général des
bâtiments du roi sera tenu de faire vérifier dans deux mois tous les
mémoires des bâtiments du roi jusqu'au l3r juillet 1790; ils seront
adressés par lui au commissaire général de la liquidation, et le
directeur général des bâtiments du roi sera responsable, tant de
l'exécution du présent décret que du résultat de ladite vérification.
« Art. 2. Passé le terme de deux mois, le commissaire général de la liquidation s^ra autorisé à nommer deux vérificateurs pour tous les mémoires d'ouvriers et entrepreneurs de bâtiments du roi dont la vérification n'aurait pas pu être faite; sera ladite vérification exécutée aux frais et sous la responsabilité du directeur général des bâtiments du roi.
« Art. 3. Le sieur Guiltomot, intendant des bâtiments du roi, chargé de l'administration des carrières sous Paris- et des environs, remettra pareillement dans un mois, à compter de la sanction du présent décret, les pièces nécessaires à l'appui des comptes par lui fournis, et le commissaire générai de liquidation nommera deux vérificateurs pour régler les comptes de ses travaux. »
Je demande que le directeur gé léral soit responsable, ainsi que vous l'avez ordonné, non pas du montant des mémoires, mais de leur règlement.
Je vous prie de me dire le vœu du comité, car l'article n'est pas clair.
, rapporteur. Le vœu du comité a été d'obliger M. d'Angevilliers à suivre les règles observées dans les bâtiments; âne pas confondre, comme il l'a fait jusqu'ici, les ouvrages faits depuis longtemps avec les nouveaux; à faire une distinction de tout ce qui regardait et de ce qui ne regardait que ses prédécesseurs : car il nous apporte des objets de temps immémorial, sans nous envoyer rien de tout ce qui est nécessaire pour faire la vérification. (Murmures.)
Je saisis très bien pourquoi l'on ne veut pas apporter la lumière dans cette partie de la dépense de la maison du roi; mais il faut imprimer, par les dispositions les plus coactives, la crainte à ceux dont on peut arguer la mauvaise volonté.
Je demande que l'idée du comité, que j'adopte, soit traduite, de manière que tout le monde l'entende.
On donne deux mois au directeur des bâtiments du roi pour remplir le devoir de sa charge. Si le sieur d'Angevilliers qui, à ce que je crois, n'a aucun titre spécial à la confiance de la nation, ne juge pas à propos de remplir une partie de ses fonctions dans les deux mois, il est parfaitement juste et régulier de le rendre responsable.
Cependant, si l'on ne trouve pas la rédaction de l'article assez claire, je demande pour cet effet le renvoi au comité.
(de Saint - Jean - d'Angély). Je crois qu'on peut terminer sur-le-champ. D'abord, je pense que M. d'Angevilliers ne peut devenir responsable qu'à cause de l'arriéré des bâtiments; car du reste il est attaché uniquement au roi, Il suffit de changer les expressions du décret et de mettre qu'il sera responsable de la réalité des ouvrages et de la vérité des mémoires.
Voilà les deux seuls objets dont il doit répondre et je propose de rédiger le décret en conséquence.
(L'Assemblée renvoie le décret au comité et ordonne qu'il lui en sera fait un nouveau rapport demain.)
La parole est à M. Barnave pour Une motion d'ordre relative au projet de départ de Mesdames, tantes du roi.
J'ai demandé la parole pour une simple motion d'ordre, mais dans la circonstance où nous sommes, elle est d'une grande importance.
Instruite du projet de départ de Mesdames, tantes du roi, l'Assemblée a chargé le comité de Constitution de lui proposer une foi sur les obligations particulières des membres de la famille royale. Ce décret était un ajournement, et de plus il laissait subsister jusqu'à la loi nouvelle, l'usage ancien, suivant lequel les membres de cette .famille ne pouvaient sortir du royaume sans la permission expresse du roi. Cependant il n'a pu les retenir, et les conseils coupables, qui ont eu le crédit d'égarer leurs opinions, sont aussi parvenus à les soustraire à un devoir positif et prescrit par les lois.
Je ne m'arrête point sur ce fait, mais du moins
est-il important d'en prévenir de semblables. Un bruit déjà répandu annonce qu'une autre personne, dont la conduite entraînerait de plus graves conséquences, se dispose à suivre leur exemple. Quelle que soit la réalité de ces bruits, les citoyens en sont alarmés, la tranquillité publique en peut êlre troublée; il faut que la loi fixe les esprits en déclarant ce qu'elle autorise et ce qu'elle défend.
Certes, il est permis de s'étonner que dans un moment de crise où la nation, éprouvée par une Révolution qui la régénère, appelle à son secours tous ceux qui ont intérêt à maintenir sa gloire et sa prospérité, les membres d'une famille qu'elle a comblée de biens abandonnent presque tous la chose publique, et vous autorisent à les compter parmi les adversaires les plus dangereux de la Constitution qu'elle s'est donnée. Vainement le chef de la famille royale a-t-il employé sur eux les ressources de la persuasion et delà sensibilité. La loi doit parler à son tour.
Il est temps de déclarer les devoirs de ceux dont nous n'avons jusqu'ici d'claré que les honneurs et les émoluments. Il faut savoir enfin quels engagements doivent répondre à celui qui consacre dans une famille les suprêmes honneurs, et la seule magistrature héréditaire, et si notre dénûment intérieur, si l'expoliation de notre numéraire au moment du plus pressant besoin, si les inquiétudes fomentées, entretenues parmi les citoyens, si l'enco ragement des ennemis publics et la prolongation de leur résistance, seront à jamais leur ouvrage, et ie seul témoignage de reconnaissance que nous puissions en obtenir.
D'après ces considérations, qui sont dignes de votre intérêt par leur importance et par les circonstances où nous nous trouvons, je demande que le comité de Constitution soit tenu de présenter après demain un projet de loi précis sur les obligations et les devoirs des membres de la la famille royale. (Vifs applaudissements à gauche et dans les tribunes.)
J'appuie là motion qui vient de vous être faite ; et je l'appuie d'autant plus que votre comité diplomatique tient de la bouche des ministres eux-mêmes, qu'il ne faut point espérer de paix eu France, tant qu'on verra des princes, honorés du nom de Bourbon, réunir autour d'eux sur les frontières du royaume des enrôlements et des hommes ulcérés contre la Révolution et auxquels il est impassible que le peuple suppose des intentions pures. (Applaudissements.)
Messieurs,sans doute, aux termes de la déclaration des droits de l'homme, il est permis à chacun de sortir du royaume et d'y rentrer. Mais je crois qu'il est essentiel d'apporter des modifications à ce principe : je ne crois pas que, dans un temps de malheur public, les citoyens puissent indifféremment s'absenter du royaume. (.Interruptions.)
C'est mon opinion ; elle peut être erronée et je ne demande pas autre chose, sinon que le comité de Constitution soit tenu de nous présenter en même temps une loi sur les émisants.
Ils payent sans doute la contribution foncière, mais ils évitent celle que vous avez imposée en décharge sur les personnes. 11 y a plus : tous les habitants de la France remplissent un devoir sacré, en qualité de gardes nationales; ils défendent au prix de leur temps, de leur fortune, de
leur vit*, la liberté des personnes et la sûreté des propriétés. Peut-on, en s'abstenant, se décharger ainsi d'une portion essentielle des devoirs attachés à la qualité de citoyens?
Je demm ie donc que le comité de Constitution soit chargé d'examiner cette question et de nous présenter une loi affirmative ou négative. (Applaudissements.)
L'Assemblée doit en effet rendre une loi qui renferme non seulement les membres delà dynastie régnante, mais encore l«s autres individus composant la société: je m'appuie sur ce principe de morale que, dans une société, il n'est pas indifféremment loisible à ceux qui la composent de la dissoudre, surtout dans un temps où les circonstances sollicitent l'union la plus parfaite. C'est, M ssieurs, le droit établi, je ne dirai pas seulement en Allemagne, pays ue féodalité, de distinction de classes et de servitude, mais encore en Angleterre, chez nos aînés et nos prédécesseurs dans la science de la liberté.
Je demande que le comité de Constitution soit chargé d'examiner expressément l'importante question de savoir si, dans e cas où la législature aura déclaré que la sûreté nationale est menacée, il ne peut pas être, en conséquence de ce décret, donne des défenses de sortir du royaume et si ceux qui en sont sortis ne peuvent pas, en pareil cas, être rappelés.
Je fais un amendement. Mon respect p mr la Constitution me défend d'appuyer la proposition qui vous est faite; mais si l'Assemblée décide qu'elle déchirera l'article le plus précieux de la déclaration des droits, je demande qu'au moins le comité nous propose aussi une mesure pour assurer l'exécution des 1 us.
D'où vient la principale cau^e de l'émigration? De ce que la tranquillité publique n'est rétablie ni dans les villes, m dans les campagnes, de ce que la prop- iété dés citoyens ne leur est pas assurée. E i effet, qui est-ce qui attache un citoyen à la patrie? C'est la jouissance des revenus qui lui sont légitimement acquis.
Tant que la tranquillité publique ne sera point établie....
Plusieurs membres à gauche : C'est vous qui la troublez.
.. tant que les dècr ts ne seront pas exécuiés, cette jouissance ne sera pas assurée; et, par conséquent, vous au-ez beau faire des lois, vous n'empêcherez pas les émigrations.
E11 effet, la t ranquil-li té publique est souvent troublée; mais ces troubles sont produits par la révolte constante de la minorité contre la majorité... (Vifs applaudissements à gauche.)
Plusieurs membres à droite se lèvent en tumulte. (Bruit prolongé.)
menace du geste le président et l'orateur.
Monsieur Malouet, laissez parier.
Ces troubles sont
produits par la révolte constante de la minorité contre la majorité. J'insiste sur ce mot et voici comment je l'explique.
Dans toute assemblée délibérante, il y a nécessairement un parti de minorité ; mais, lorsque la loi est rendue, que l'on élève des protestations contre cette loi, qu'on se met en insurrection contre elle-, qu'on va contre les décrets, voi!à ce que j'appelle la révolte de la minorité contre la majorité. (Vifs applaudissements à gauche; murmures prolongés à droite.)
La tranquillité publique se trouble encore par les écrits incendiaires dont on infecte la Fra ce. Par ces écrits, on égare le peuple; au nom de la religion, on lui fait adopter les maximes les plus coupables, les maximes dont vous avez vu des effets si terribles dans l'affaire de Nîmes, et si récemment en Bretagne, où il faut espère' néanmoins que les suites n'auront plus des dé-astres aussi c.'U' Is, attendu que le peuple, meux éclairé sur ses véritables intérêts, ne tombera plus dans les pièges qu'on lui tend.
Que vous propose-t-on? Le prochain rapport d'une loi que vous avez déjà renvoyé ' à votre comité. Il n'est nersonrie dans cette Assemblée qui ait hasardé d'attaquer les véritables principes de la liberté. On a parlé des exceptions aux principes les plus sacrés : il est question desavoir si, dans des moments d'oraue, la loi peut être suspendue.
La loi qu'on sollicite n'est ras nouvelle; on pourrait à ce sujet vous citer l'exemple des nations voisines. On pourrait vous dire que, chez l'une d'elles, il est des cas où la puissance de la loi est suspendue; on pourrait vous dir er"> que chez cette même nation, lorsque la loi martiale se publie, alors on dépose momentanément, mais arbitrairement, entre les mains du chef de l'Empire, la puissance la plus illimitée et la plus absolue; on pourrait dire que les Romains avaient leur dictateur; on pourrait dire que, chez toutes les Républiques, dans un moment de cri e, il y a eu des exceptions, mais nous n'en avons pas encore.
Enfin, Messieurs, lorsqu'on vous présentera ce décret, vous l'examinerez; vous verrez s'il viole les principes immuables de la liberté et si ceux qui proposent cette loi en ce moment ne sont pas ceux qui ont le moins servi à venger les droits de l'homme.
Il est donc inutile de se répandre en vaines déclamations sur un projet de loi que nous n'avons pas encore sous les yeux ; il n'est question aujourd'hui qued'ordonner à votre comité e remplir au plus tôt un devoir qui lui a été imposé. Or, je ne crois p;is qu'aucun bon citoyen puisse s'opposer à ce qu'on lui présente un proj-1 de décret qu'il pourra discuter. (Vifs applaudissements.)
Ce n'est pas à la majorité que je m'en prends, c'est à M. Pétion ; et un jour, lui et moi, nous serons jugés par l'opinion publique. (Rires.)
Puisqu'on ose appeler, dans l'Assemblée, révolte de la minorité, les représentations que chacun de nous a non seulement le droit, mais l'obligation de faire... ((Murmures prolongés.)
Voix à gauche : Ce n'est pas cela I
.. Ce qui vient d'être dit par le préopinant n'a été que trop souvent manifesté
par des signes de malveillance, par des murmures outrageants contre les opinions qui ont contrarié la majorité. Or, ces opinions n'étaient pas des protestations : ces opinions étaient des contradictions libres, légitimes.
Voix à gauche : Il ne s'agit pas de cela !
Je dis, Messieurs, qu'il a fallu au moins ie ma part, et je parle ici en mon nom, un zèle irrésistible (Rires), pour m'exposer aussi souvent à d'outrageantes improbations. Mais puisqu'enfîn une telle contradiction est signalée comme une révolte.....
Chaque protestation est une révolte quand les décrets sont rendus.
Messieurs, je prends le discours du préopinant pour ce qu'il est, ses expressions pour ce qu'elles sont.il n'y a rien de si positif que le reproche de révolte fait à la minorité contre la majorité.
Voix à gauche : Non, non ! c'est contre la loi, contre les décrets rendus.
J'avance, moi, sans épouser toutes les opinions qui ont pu être soutenues par la minorité ; j'avance, et la France en est bien convaincue, qu'il n'y a pas d'exemple où la minorité d'une assemblée délibérante ait eu autant de peine à obtenir la parole et à faire ses représentations.
Voix à gauche : Cela n'est pas vrail
Je ne connais pas de protestations faites par la minorité en corps : je ne connais pas de protestation individuelle qui puisse être imputée à ce que vous appelez la minorité. Je suis très Sûr, moi personnellement, de n'en avoir pas fait, quoique j'aie souvent ré-isté dans la discussion à plusieurs des décrets qui ont été portés, quoique j'eusse résisté beaucoup plus, si j'avais eu la liberté de m'exprimer.
Comme l'expression et l'allégation de M. Pétion viennent à la suite de la représentation qui vous a été faite par M. de Foucault, représentation que j'aciopte beaucoup sur les effets malheureux des désordres publics qui influent actuellement sur l'opinion publique ; comme c'est à la suite d'une telle représentation qu'on ose imputer ces troubles, ces désord es à la minorité, qui en est absolument la victime de toute manière, je déclare que, pour faire cesser de pareilles inculpations, je m'abstiens à tout jamais de prononcer une seule paiole dans cette Assemblée. (Rires.)
Un membre à gauche : Tant mieux!
Comme je suis persuadé que l'Assemblée n'a nul besoin ni de mes lumières ni de mes raisons, je donnerai très librement mon suffrage pour ou contre les décrets, et rien absolument au delà. (Murmures.) Mais, Messieurs, croyez qu'il a fallu désirer passionnément de remplir ses devoirs pour vous demander la parole, repoussé si souvent d'une manière oflen-sante. Croyez, Messieurs, que ce sacrifice-là a été fait au caractère respectable dont nous sommes revêtus, aux obligations saintes qui nous étaient imposées : elles sont calomniées, j'en suis affranchi.
Je demande, Monsieur le Président, que la discussion soit renfermée dans les propositions qui vous sont faites. Si M- Pétion avait dit que les troubles venaient de la résistance de la minorité de l'Assemblée nationale contre la majorité, je me serais élevé moi-même le premier, pour demander qu'il fût rappelé à l'ordre consacré, et soumis à toutes les peines que peut infliger l'Assemblée nationale, parce que je suis loin d'attribuer aucun désordre à la résistance de la minorité de l'Assémblée nationale (Applaudissements)r qui a le droit, et j'ose même dire le devoir, de s opposer constamment à ce qu'elle croit mauvais. Non seulement je regarde cela comme un principe rigoureux, mais je le regarde comme le plus sacré de tous les principes, puisqu'il établit la liberté des délibérations ; et nous serons tous ici à réclamer sans cesse pour la liberté des opinions. (Applaudissements.) Ainsi donc si M. Pétion avait dit ce qu'on supfiose qu'il a dit, il aurait été unanimement rappelé à l'ordre. Mais voici ce que M. Pétion a nu et a voulu dire, je pense.; c'est qu'il est possible que tous les désordres ou quelques désordres arrivent par la résistance de la minorité de la nation à la majorité de la nation.(M«r-mures.) Et certainement tout le monde est d'avis que, lorsque la volonté de la nation a été exprimée par une loi, la minorité de la nation doit s'y soumettre.
"D'après cela, j'en viens à la motion d'ordre. (Murmures à droite. Applaudissements à gauche.) M. Barnave a fait, une motion qui ne peut pas souffrir de difficulté, parce que. c'est un renvoi au comité, un renvoi déjà opéré dont on demande le rapport, lorsque la Loi sera faite. Alors nous débattrons la loi en liberté ; la loi sera adoptée ou rejetée.. Ainsi je demande que la motion de M. Barnave soit mise aux voix.
(L'Assemblée décrète que le comité de Constitution lui présentera mercredi matin un projet de loi sur les obligations et les devoirs des membres de la dynastie et qu'il lui exposera ses vues pour savoir s'il y a lieu, ou non, à une loi sur les citoyens émigrants, et quelle doit être cette loi.)
La parole est à M. de La Galissonnière pour présenter plusieurs articles additionnels au décret du 5 février 1791, concernant la décoration militaire (1).
,au nom des comités de la marine et des colonies. Messieurs, voici quatre articles additionnels que je Vous propose d'insérer après les deux articles déjà décrétés dans la séance du 5 février courant, sur la décoration militaire. Je vous les présente au nom du comité de la marine; qui s'est concerté à ce sujet avec le comité colonial; ils sont ainsi conçus :
« L'Assemblée nationale décrète, pour être exécutés provisoirement, et jusqu'à l'organisation «tes régiments coloniaux, les articles suivants, additionnels au décret du 5 février 1791, concernant la décoration militaire.
Art. 3.
« Pour déterminer le temps nécessaire aux officiers des régiments
coloniaux pour obtenir la décoration militaire, chaque année de service
dans les colonies sera comptée pour 18 mois.» (Adopté.)
« Dans le cas où la colonie serait attaquée et dans celui où les régiments seraient employés pendant la guerre dans une expédition hors la colonie, chaque année de service sera comptée pour deux. » (Adopté.)
Art. 5.
« Les officiers des milices des colonies qui auront, à l'époque de la publication du présent décret provisoire, les années de service ou de commission d'officiers r quises par l'ordonnance du 1er janvier 1787 concernant les milices des colonies, ou qui auront pris leur retraite, avant le temps de service prescrit, sans avoir obtenu la décoration militaire, pourront en former la demande, et sont déclarés susceptibles de l'obtenir sans néanmoins rien préjuger sur l'existence des milices coloniales; l'Assemblée nationale abrogea1 t la disposiiion de l'article 43 de la susdite ordonnance, qui limite le nombre des croix d>e Saint-Louis à accorder par année dans chaque colonie. »
Je demande que la différence qui existe entre les troupes de ligne et les milices soit effacée, et cela avec d.'auiant plus dé raison que les milices étant prêtes à être abolies, ceux de ces mêmes officiers qui n'auraient pas le t mps nécessaire se trouveraient en très grand nombre et n'obtiendraient jamais la croix.
L'article 43 auquel je renvoie dit textuellement que chaque campagne de guerre sera comptée pour deux ans aux officiers des milices des colonies qui auront été à la guerre, ou lorsque les colonies auront été attaquées.
Ma proposition, qui avait été admis.- par le comité, est que les années de service des officiers de milice, indépendamment de toutes incorporations dans les troupes de ligne, leur soient comptées pour deux ans et qu'il soit ajouté à l'article 5 ces mots : « en comptant chaque année de guerre pour deux ».
(Cet amendement est décrété.)
L'article 5 est adopté comme suit :
Art. 5.
« Les officiers, des milices des colonies qui auront, à l'époque de la publication du présent décret provisoire, les années de service ou de commission d'officiers requi>es par l'ordonnance du leB janvier 1787, .concernant les milices des colonies, en comptant chaque année de guerre pour deux, ou qui auront pris leur retraite avant le temps prescrit sans avoir obtenu la décoration m litaiie, pourront en former la demande, et sont déclaré* susceptibles de l'obtenir, sans néanmoins rien préjuger sur l'existence des milices eoio* niales ; l'Assemblée nationale abrogeant la disposition de l'article 43 de la susdite ordonnance, qui limite ie nombre des croix de Saint-Louis à accorder par année dans chaque colonie.
, rapporteur, donne lecture du dernier article, ainsi conçu :
Art. 6.
c Le temps pendant lequel ces officiers auront été employés dans les troupes de ligne ou dans
les régim°nts coloniaux leur sera Compté conformément à ce qui a été prescrit pour ces différents corps. » (Adopté.)
, au nom du comité des finances. Messiëurs, vous avez ordonn é qu'il sêMt distrait des assignats de 2,000 livres, la quantité de 100 millions pour être fabriqués d'une autre manière que par assignats de 2,000 livres. De ces 100 millions, il y en a déjà 50 dont la Coupure a été exécutée, comme vous l'avez ordonné, en assignats de 50 et 100 livres ; mais il reste encore 50 millions. Il est donc question de savoîr, Messieurs, en quelle nature ces assignats seront fabriqués.
Ge ne sera certainement pas en assignats de 2,000 livres, dont l'Incommodité sé fait sèntir journellement; ce sera en assignats de moindre valeur, de 100 livres par exemple, de 50 livrés, ou même de sommes moindres, si vous le jugez à propos.
D'après les observations qui furent faites hier, je propose de couper ainsi les 50 millions : de faiïe 30 millions d'assignats de 100 liftes et 20 millions de 50 livres.
lè jeune. L'empressement âvéc lequel le public a reçu lés premiers petits assignats qui ont été fabriqués et le soulagement qu'ils ont apporté dans le commerce petofent vaincre la répugnance que l'on a à employer celte mesure et a l'étendre encore.
J'ai souvent entendu affirmer que les assignats d'une valeur inférieure à 50 livres auraient l'inconvénient de rendre l'argent plus rare; mais jamais je n'en ai entendu donner de preuves; je suis d'une opinion contraire, et voici mes raisons.
L'argent devient plus rare, parce qu'il passe à l'étranger, ce qui peut arriver, soit par les émigrations, ce qui est toujours d'un effet borné, soit par la balance désavantageuse du commerce ; enfin l'argent resserré par la méfiance peut disparaître de la circulation.
Je ne crois pas qu'on puisse attribuer aucun de ces effets aux assignats de 30 et de 25 livres que j'aurai l'honneur ae vous proposer.
Il me paraît évident que la circulation d'assignats d'une valeur moindre sera plus facile, et qu'ainsi, loin de nuire aux fabriques et à Pagrâ-cutture, elle ne pourra que servir ces deux grandes sources de productions, et pair là, favoriser notre balance de commerce.
On ne peut pas non plus objecter qu'ils pourraient inspirer de la méfiance ; ce n'est pas Une nouvelle émission, ce n'est çfu'une division plus adaptée aux besoins journaliers de la société, et comme la valeur des domaines nationaux est incontestablement supérieure de plusieurs centaines de millions aux assignats décrétés, on ne peut j)as avoir la moindre inquiétude.
J'ajouterai que la coupe d'assignats de 30 et de 25 livres diminuera le besoin des écus; car par leur moyen on potirra payer 5 livres, et leur fabrication ne faisant point sortir de numéraire, il deviendra moins cher; l'exemple des assignats de 50 livres le prouve suffisamment tout le monde sait que tandis qu'on trotive à ïes échau* ger contre des écus à 2, 2 1/2 0/0, il en coûte 5 0/0 lorsqu'on veut échanger contre des écus les assignats de 200 et 300 livres.
Je conclus, Messieurs, en vous proposant de décréter que les 50 millions de nouveaux assignats soient divisés ainsi :
25 millions d'assignats de 30 livres*,
25 millions d'assignats de 25 livres.
Je m'oppose à l'amendement du préopinant. Si vous adoptez des assignats au-dessous de 50 livres, vous ferez totalement disparaître le numéraire du royaume.
Je sais bien que le principal avantage dii fabricant, de l'entrepreneur, des gens qui emploient beaucoup de monde, serait d'aYoir dè petits billets ; je le sais, puisqu'ils sont obligés de faire chercher de l'argent pour payer leurs ouvriers et leurs travaux : et c'est la ce qui fait eiicore Circuler de l'argent. Mais il n'est pas douteux que vous feriez le malheur de la classe indigente, de celle qtli n'a pas 25 livres à sa disposition.
Je donne un exemple : je suppose un ouvrier qui gagne 25 livres par semaine;. 1e fabricant lui donnera un assignat de 25 livres. Je vous démande comment cet ouvrier ira chercher du pain' le dimanche; il faudra qu'il change sùn assignat et qu'il perde pour cela 10 ou 12 sous. Il est évident que par là vous feriez un préjudice énorme à la classe des pauvres.
L'argent renchérira par les besoins de ceux-ci; il deviendra chaque jour plus rare. On dira : qu'importe à la société, pourvu qu'il y ait des assignats en circulation? J'en conviendrais, si vous pouviez et si vous osiez Créer des assignats de 2 liards. Les billets de 50 livres servent à acquitter des sommes de 10 livres lorsque l'on donne un assignat de 60 livres pouY un assignat de 50 livres. Cet échange ne peut se faire qu'outré des personnes aisées, et c'est justement ce qu'il faut ; car la circulation des assignats, dans res classes les pins pauvres du peuplé, ne peut jamais avoir que les plus grands inconvénients.
Je demande la question préalable contre l'amendement de M. dé Grillon et l'adoption de la proposition du comité.
. C'est favoriser la classe des riches.
Il est facile de répondre aux objections de M. d'André, car il est évident que si l'Assemblée adoptait la proposition de ne pas faire d'assignats de 30 et de 25 livres, elle favoriserait par là la seule classe des hommes fortunés et les vendeurs d'argent.
L'amendement que propose M. de Grillon, et dont j'avais fait moi-même la proposition à l'Assemblée, me paraît le plus utile à adopter, attendu que l'Assemblée ayant décrété la fabrication d'une monnaie de billon et de la menue monnaie d'argent, il serait alors facile de changer les assignats de 30 et de 25 livres, et de favoriser par ce moyen la classe la plus nombreuse, qui réclame de petits assignats, et Surtout les habitants des départements qui n'en ont pas encore reçu.
En adoptant l'amendement de M. de Grillon, je demande que l'Assemblée ordonné à son comité des monnaies de lui soumettre, sans délai. le modèle d'empreinte de la monnaie qui doit être frappée.
Un membre : Le pauvre se trouverait exposé, en possédant un assignat qu'il pourrait facilement égarer, déchirer, ou qui pourrait lui être dérobé.
Plusieurs membres démandent l'ajournement.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la demande d'ajournement.;
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
Si l'on veut fermer la discussion, je demande qu'une question très simple et très essentielle soit mise à l'ordre du jour : peut-il y avoir contre les petits assignats un autre intérêt que celui des vendeurs d'argent ?
Et moi je demande qu'on mette à l'ordre du jour cette question : peut-il y avoir, en faveur des petits assignats, un autre intérêt que celui des fabricants contre la nation ?
Je demande" qu'on mette à l'ordre du jour si l'Assemblée peut discuter de nouveau ce qu'elle a formellement jugé déjà; elle a décrété expressément qu'il ne serait point fabriqué d'assignats au-dessous de 50 livres.
Je porte le défi de me citer ce décret.
Voici ce décret ; il est du 8 octobre 1790.
L'article 1er est ainsi conçu : « Les nouveaux assignats créés par le décret du 29 septembre dernier seront de 2,000,500,100,90,80,70,60,50 livres et non au-dessous. »
(L'Assemblée ferme la discussion et accorde la priorité à l'avis du comité.)
Je propose, par amendement à l'avis du comité, de décréter que la totalité des 50 millions sera faite en assignats de 50 livres ; et je Vous prie de considérer que si notre plus forte pièce de monnaie a été de 48 livres, la différence de là à 50 livres n'est pas considérable.
Je demande à M. le rapporteur si, parmi les assignats qu'on brûle et qui vont l'etre incessamment, il. en existe un seul de 50 livres.
, rapporteur,. Oui, Monsieur, il en existe; je n'en sais pas le nombre, mais comme le registre a été remis à la Bourse, vous verrez qu'il y en a de 50 livres.
Le plus grand ennemi de l'Etat c'est l'agiotage. Il est reconnu qu'on accapare les assignats de 50 livres; c'est une vérité constante. Le meilleur moyen de déjouer les accaparements, c'est de faire un grand nombre de billets de 50 livres.
J'appuie l'amendement de M. Long; on ne doit pas balancer à le décréter.
(L'Assemblée adopte l'amendement de M. Long.)
, rapporteur. D'après le décret que vous venez de rendre, nous demandons l'adjonction de 6 nouveaux signataires pour accélerer la fabrication.
(Cette motion est décrétée.)
Le décret suivant est rendu :
« L'Assemblée nationale décrète que les assignats qui restent à fabriquer pour la somme de 50 millions, sur les 1,200 millions décrétés le 20 septembre dernier, seront fabriqués en assignats de
50 livres et que, pour accélerer ladite fabrication, il sera nommé 6 nouveaux signataires. »
, rapporteur. Il serait nécessaire, je crois, pour suivre et éclairer la marche de ïa comptabilité, que le directeur du Trésor public fût tenu de remettre toutes les semaines au comité des finances un état du numéraire et des différentes valeurs d'assignats qu'il aura délivrés. Je crois que c'est le moyen de le mettre à couvert de toute sollicitation et de toute inculpation.
(Cette motion est adoptée.)
L'Assemblée rend le décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète quele directeur du Trésor public sera tenu de remettre chaque semaine, au comité des finances, qui en rendra compte à l'Assemblée, l'état des pensions et distributions des sommes qui auront été faites dans la semaine, tant en numéraire qu'en assignats de différentes coupures. »
donne lecture : 1° d'une lettre du maire de Paris, en date du 21 février, qui annonce l'adjudication de deux maisons; la première sise rue de Bourgogne, louée 2,60Q livres, estimée 26,700livres, adjugée 59,300 livres; la seconde, sise quai Saint-Bernard, louée 1,900 livres, estimée 27,400 livres, adjugée 56,300 livres.
2° D'une lettre de M. Montmorin, qui fait passer à l'Assemblée deux prestations de serment : l'une de M. Genet, chargé des affaires du roi auprès de l'impératrice de Russie, et l'antre de M. Ménageot, directeur de l'Académie de France à Rome.
L'ordre du jour est un projet d'articles additionnels au décret sur la contribution foncière, présentés par le comité des contributions publiques.
, au nom du comité des contributions publiques, donne lecture des articles additionnels suivants :
Art. 1er.
« Les droits de péages et autres de même nature, non supprimés par l'article 13 du titre II du décret concernant les droits féodaux, en date du 24 mai 1790, seront soumis à la contribution foncière à raison de leur revenu net. » (Adopté.)
«Art. 2.
Le revenu net des canaux sera de même soumis à la contribution foncière. »
Un membre demande par amendement qu'on ajoute après le mot : canaux, ceux-ci : de navigation, et qu'on rédige ainsi l'article :
Art. 2.
« Le revenu net des canaux de navigation sera de même soumis à la contribution foncière. » (Adopté.)
Art. 3.
« L'évaluation du revenu des canaux qui traversent le territoire de plusieurs communautés d'un même district sera faite par le directoire, et la contribution sera fixée par le même directoire, au taux moyen de celle qui sera supportée par les autres propriétés du district. Cette fixation sera faite en même temps que la répartition de la contribution foncière entre les diverses communautés. » (Adopté.)
Art. 4.
« Le revenu des canaux qui traversent plusieurs districts d'un même département sera évalué par le directoire du département, et divisé par chaque district, en proportion de la longueur du canal sur le territoire de chacun. » (Adopté.)
Art. 5.
« Quant aux canaux qui traversent plusieurs départements, chaque directoire de département évaluera les revenus et les charges du canal sur son territoire. Les directoires se communiqueront le résultat de leurs évaluations, et le total du revenu imposable sera réparti en proportion de la longueur du canal sur le territoire de chacun des districts. » [Adopté.)
« Art. 6. Seront compris, dans l'évaluation des revenus et "des charges du canal, lés ouvrages d'art, les réserves d'eau, les chemins de hallage et les berges qui ne produisent aucuns fruits. »
Un membre demande qu'après les mots : les berges, on ajoute ceux-ci : et francs-bords, et qu'on rédige ainsi l'article :
Art. 6.
« Seront compris, dans l'évaluation des revenus et des charges du canal, les ouvrages d'art, les réserves d'eau, les chemins de hallage, les berges et francs-bords qui ne produisent aucuns fruits. » (Adopté.)
« Art. 7. Les moulins et autres usines, construits sur les canaux, les plantations et autres natures de biens qui avoisinent ies canaux et appartiennent aux mêmes propriétaires, ne seront point compris dans l'évaluation générale du revenu du canal, mais seront soumis à toutes les règles fixées pour les autres biens-fonds. »
Un membre propose par amendement d'ajouter après les mots : usines, ceux-ci : et fabriques, et de rédiger comme suit l'article :
Art. 7.
« Les moulins, usines et fabriques, construits sur les canaux, ies plantations et autres natures de biens qui avoisinent les canaux, et appartiennent aux mêmes propriétaires, ne seront point compris dans l'évaluation générale du revenu du canal, mais seront soumis à toutes les règles fixées pour les autres biens-fonds. i>(Adopté.)
Art.. 8.
« Les propriétaires de canaux seront tenus, dans le délai de quinze jours après la publication du présent décret, de faire aux secrétariats de dictrict ou de département, qui devront faire les évaluations, une déclaration détaillée de la totalité des revenus et charges de leur canal.[Adopté.)
Art. 9.
« Les directoires de département décideront, en dernier ressort, des contestations relatives à l'évaluation faite par les directoires de district. » (Adopté.)
Art. 10.
Les conseils généraux de département décideront également, en dernier ressort, des contestations relatives aux évaluations faites par les directoires de département. Dans ce cas , les membres du directoire n'assisteront point à la délibération, (Adopté.)
Art. 11.
t La contribution foncière, supportée par les canaux, dans chaque district, sera payée directement au trésorier du district. » (Adopté.)
Messieurs, la discussion va s'ouvrir sur la contribution foncière d'après la direction que le comité voudra lui donner.
, rapporteur. J'observe à l'Assemblée que le travail du comité sur les nouveaux impôts indirects et le mode de remplacement du droit à l'entrée des villes n'est pas encore prêt et ne le sera même pas demain.
Messieurs,la totalité desrevenus publics et impôts indirects décrétés ou à décréter, peu vent être évalués à 165 millions. En voici le détail :
Droits d'enregistrement......... 35 millions.
Timbre........................ 25 —
Patentes....... «,..;iv.......... 25 —
Douanes augmentées des droits
sur le tabac................. 20 —
Les revenus nationaux sur les
forêts....................... 12 —
Les salinesV.................... 3 —
Vous pourrez porter les postes
* aux lettres à................. 15 —
La vente du sel et du tabac en
concurrence, à................ 5 —
Vous pourrez porter un décret sur les hypothèques, qui produira
sur ces droits.........................5 —
Les loteries,les droits sur les affinages et marque d'or, les messageries, poudres et salpêtres, et autres revenus peu importants. 15 — Vous pourriez sans inconvénients, et avec beaucoup de justice, décréter un droit à payer par les voitures à toutes les postes, pour l'entretien des grandes
routes, produisant............ 5 —
Total des revenus nationaux
indirects, décrétés ou sus---—
ceptibles de l'être........ 165 millions.
La contribution mobilière ne saurait excéder 60 millions, déduction faite des frais de régie et non-valeur.
La contribution foncière ne peut être portée à plus de 250 millions, sans les frais de perception et les non-valeurs; et l'on ne peut, sans de majeurs inconvénients, la porter plus haut.
Le total des revenus publics que l'on peut se flatter d'obtenir, sans employer des moyens forcés, n'est donc que de 475 millions.
Cependant les dépenses exigent, d'après le rapport de vos comités, 581 millions, outre ce qui sera fourni par la caisse extraordinaire ; donc il existe une différence de 106 millions entre les revenus probables et les dépenses arrêtées.
Votre comité, dans les calculs qu'il vous a présentés,, couvrirait et même obtiendrait un excédent sur ce que je considère comme un déficit : 1° En portant la contribution foncière à 37 millions de plus que je ne vous propose de la décréter;
2° En comptant les ventes de sel et de tabac, en magasin, à 20,500,000 livres pour cette année ;
3° En comptant les produits effectifs de la contribution patriotique pour 34,500,000 livres;
4° En comptant pour 1791 les dettes des Américains et'du duc des Deux-Ponts, pour 4 millions;
5° En se proposant de vous présenter, un remplacement au droit d'entrée des villes pour une somme de 24 millions.
Ce remplacement des entrées des villes devient d'une impossibilité morale, si vous ne voulez "admettre que de3 impôts conformes aux principes d'équité et de liberté que vous avez consacrés ; ainsi ce remplacement de 24 millions doit être abandonné.
A l'égard des véritables capitaux que le comité vous propose de faire concourir à l'acquittement de. la dépense publique, je ne vous répéterai pas ici, Messieurs, ce que j ai déjà eu l'honneur de vous dire sur l'inconvenance de cette mesure; mais comme les circonstances où nous nous trouvons, sollicitent votre équité de ne point écraser les contribuables, .actuels,, pour des dépenses de leurs prédécesseurs, et uniquement pour favoriser leurs descendants; je viens, Messieurs, vous proposer un moyen qui conciliera avec votre dignité et le crédit public, les ménagements dus à la génération qui a.déjà fait, au bonheur de nos neveux, de si éclatants sacrifices. . '
Le déficit de j.06 millions, que je viens d'avoir l'honneur de présenter, s'éteindra d'ici à 20 ans graduellement, .par plusieurs causes :
1° Le remboursement de la dette, par la vente des biens nationaux, amortira plus d'intérêts que ces biens ne produisent actuellement; et si, comme nous devons raisonnablement le présumer, la vente des domaines nationaux monte au plus bas minimum, à 2 milliards, d'ici à 20 ans, ces biens qui. ne rapportent pas aujourd'hui 60 millions, éteindront 100 millions d'intérêts, et diminueront le déficit de 40 millions ;
2° Les améliorations dans quelques parties des revenus publics, et la diminution de dépense dont on doit se tlatter d'ici à vingt ans, par une plus grande perfection dans l'administration, doivent concourir encore à la diminution de ce déficit, d'une somme de 18 millions.
3° L'extinction des rentes viagères, dans l'espace de vingt ans, doit encore assurer, d'après les probabilités de la vie humaine, une diminution de 48 millions.
Tous ces objets doivent atténuer le déficit de 106 millions d'ici à 20 ans.
Après 20 ans, il continuera d'y avoir des extinctions de rentes viagères jusqu'à leur entier anéantissment, et ces extinctions seront alors des excédents susceptibles de fournir à une caisse d'amortissement.
Nous devons donc regarder notre position à venir, comme extrêmement satisfaisante,' puisque la dette exigible sera liquidée ; une caisse d'amortissement sera établie; et les impôts nese-ront portés qu'à la somme assez modéiée (d'après l'étendue de nos resscurces) de 475 millions dont nous venons de faire l'ênumération.
Nous conviendrons que le seul but que nous avons à nous proposer est de ne point arriver à cette heureuse époque sur les ruines de la génération présente, et qu'un moyen qui nous y conduirait, sans écraser les contribuables actuels, devrait être saisi ; c'est ce moyen que je vais essayer de rencontrer.
Nous venons de regarder le déficit de 106 millions que nous éprouverons pour 1791 comme
devant successivement diminuer, pour disparaître entièrement dans 20 ans, c'est-à-dire en 1812, et l'on peut même conjecturer que la gradation dans laquelle ce déficit s'éteindra, sera, à peu de chose près, ainsi qu'il suit, savoir :
En 1792, il ne sera plus que de.. 90,000,000
En 1793, de.................................74,000,000
En 1794, de.........%...:..............62,000,000
En 1795, de...,......................50,000,000
En 1796, de................................42,000,000
En 1797, de..........................35,000,000
En 1798, de...................... 30,000,000
En 1799, de..........................................26,000,000
En 1800, de............. .............23,000,000
En 1801, de...................... 20,000,000
En 1802, de...............................18,000,000
En 1803, de..........................16,000,000
En 1804, de.............................14,000,000
En 1805, de..................................... 12,000,000
En.1806, de................................10,500,000
En 1807, de..........................................9,000,000
En 1808, de.....................................7,500,000
En 1809, de.-.............................6,000,000
En 1810, de............................4,500,000
En 1811, de..............................3,000,000
En 1812, de..................................1,500,000
En 1813, il n'y aura plus de déficit.
Regardons ces déficits annuels ainsi décroissants comme autant de dettes déjà faites, exigibles d'année en année, et supposons que le créancier consente, au lieu de receveir à chaque échéance fixe, d'année en année, la totalité du déficit échue cette an iée ; ce créancier nous accorde, pour chaque capital échu, la facilité de payer en annuités à 8 0/0, annuités qui éteignent en vingt ans les intérêts et le capital ; c'est-à-dire que le déficit de 1791, qui est estimé 106 millions, ne sera point couvert cette année ; mais il sera extraordinairement imposé, en 1791 et pendant les vingt années suivantes, une somme de 8,480,000 livres pour l'acquittement de ces 106 millions en vingt annuités à 8 0/0.
Le déficit de 1792 sera de 90 millions ; eh bien 1 à cette époque, il sera extraordinairementimposé, pour 1792 et les vingt années suivantes, une somme de 7,200,000 livres pour l'acquittement de ces 90 millions en vingt annuités à 8 0/0.
Le déficit de 1793 sera de 74 millions ; eh bien ! à cette époque, il sera extraordinairement imposé, pour 1793 et les vingt années suivantes» une somme de 5,920,000 livres; ainsi des autres années; de manière que. dans quarante années, les capitaux et intérêts des déficits décroissants des vingt années prochaines se trouveraient soldés sans aucune imposition écrasante, et la caisse de l'extraordinaire ferait, pendant, ces quarante années, les avances de fonds nécessaires, en retirant tous les ans le produit des annuités im-1-posées extraordinairement.
Si vous admettiez Ce plan, voici le tableau de ce que supporterait en impositions extraordinaires chacune des quarante années nécessaires à l'entier acquittement des annuités :
1791 serait extraordinairement imposé^ pour une annuité de 8,480,000 livres, et n'aurait que cette charge ;
1792, outre ces 8,480,000 livres, serait imposé, pour son déficit de 90 millions, à 7,200,(000 livres, iaqueUe somme réunie à la première donne, en impositions extraordinaires, 15,680,000 livres ;
1793, outre ces 15,680>,000 livreè, serait imposé pour son déficit de 74 millions, à 5,920,000 li-
vres; ce qui donne, pour l'imposition de 1793, 21,600,000 livres;
1794 sera en outre imposé, pour son déficit de 62 millions, à 4,960,000 livres; ce qui donne, pour l'imposition de 1795, 26,560^000 livres;
1795 sera en outre imposé, pour son déficit de 50 millions, à 4 millions, ce qui donne, pour l'imposition de 1795, 30,560,000 livres;
1796 sera en outre imposé, pour son déficit de 42 millions, à 3,360,000 livres; e* qui donnera, pour l'imposition de 1796, 33,920,000 livres ;
1797 sera en outre imposé, pour son déficit, de 35 minions, à 2,800,000 livres ; ce qui donnera, pour l'imposition de 1797, 36,720,000 livres ;
1798 sera en outre imposé, pour son déficit de 30 millions, à 2,400,000 livres ; ce oui donnera, pour l'imposition de 1798, 39,120,000 livres;
1799 sera en outre imposé, pour son déficit de 26 millions, à 2,080,000 livres ; ce qui donnera, pour l'imposition de 1799,;41,200,000 livres ;
1800 sera en outre imposé, pour son déficit de 23 millions, à 1,840,000 livres; ce qui donnera, pour l'imposition de 1800, 43,040,000 livres ;
1801 sera en outre imposé, pour son déficit de 20 millions, à 1,600,000 livres; ce qui donnera, pour l'imposition de 1801, 44,640,000 livres;
1802 sera en outr& imposé^ pour son déficit de 18 millions, à 1,440,009 livres; ce qui donnera, pour l'imposition de 1802, 46,080,000 livres ;
1803 sera en outre imposé, pour son déficit de 16 millions, à 1,280,000 livres; ce qui donnera, pour l'imposition de 1803, 47,360,000 livres ;
1804 sera en outre imposé, pour son déficit de 14 millions, à 1,120,000 livres; ce qui donnera, pour l'imiposition de 1804, 48,480,000 livres ;
.. 1805 sera en outre imposé, pour son déficit de 12 millions, à 960,000 livres"; ce qui donnera, pour l'imposition de 1805, 49,440,000 livres ; ' 1806 sera en outre imposé, pour son déficit de 10 millions çt demi, à 840,000 livres; ce qui donnera, pour l'imposition de 1806, 50,2$0,000 livres: V
1807 sera en outre imposé, pour son déficit de 9 millions, à, 720,000 livres ; ce qui donnera, pour l'imposition de 1807, 51,000,000 livres ;
1808 sera en outre imposé, pour son déficit de 7 millions et demi, à 600,000 l-ivres ; ce qui donnera, pour l'imposition de 1808, 51,600,000. (b vres; Jfe» .
1809 sera en outre imposé, pour son déficit de 6 millions, à 480,000 livres ; ce qui donnera, pour l'imposition de 1809, 52,080,000 livres j
1810 sera en outre imposé» pour son déficit de 4 millions et demi, à 360,000 livres ; ce qui donnera, pour l'imposition de 1810,62,440,000 livres ;
1811 sera en outre imposé, pour son déficit de 3 millions, à 240,000 livres ; ce qui donnera, pour l'imposition de 1811, 52,680,000 livres ;
1812 sera en. outre imposé, çour son déficit de 1 million et demi, à 120,000 livres ; ce qui donnera, pour l'imposition de 1812,. 52,800,000 livres.
L'année 1812 serait la plus chargée de toute?. Son imposition extraordinaire serait de.52,800,000 livres ; mais, arrivé à cette époque, toutes les années suivantes verraient diminuer l'imposition d'une des annuités éteintes.
Ainsi, par exemple, 1813 n'aurait plus à payer l'annuité de 8,480,000 livres imposée en 1791 pour le déficit de 106 millions de cette année, et 1813 ne supporterait que 43,320,000 livres.
1814 verrait diminuer l'annuité de 7,200,000 livres créée pour le déficit de 1792 de 90 millions. Ainsi 1814 ne supporterait plus que 36,120,000 livres et ainsi de suite jusqu'en 1832, époque à
laquelle toutes les annuités se trouveraient éteintes, et l'équilibre rétabli entre la recette et la dépense, sans taxes forcées.
Je demande lé renvoi au comité des contributions publiques. Je demande de plus l'impression du plan de M. de Delley ; alors tout le monde pourra le comprendre, car il est difficile de saisir des calculs à une seule lecture.
, rapporteur. Dans tous les calculs de M. de Delley, il voit 287 millions de contributions foncières pour l'Etat, tandis qu'il y a dans cette somme 60 millions pour les départements : il ne faut pas laisser accréditer l'idée que nous sommes à 106 millions au-dessous de nos ressources.
Je ne l'ai jamais entendu autrement. Je n'ai pu m'expliquer clairement, parce que je n'ai pas voulu abuser de votre temps ; si l'Assemblée ordonne l'impression...
Voix diverses : Non ! non! oUil oui l
Je m'oppose au renvoi au comité. Ce plan a pour objet de rembourser les créanciers en annuités...
Plusieurs voix ; Ce n'est pas cèla.
Je demande la question préalable sur ce renvoi.
J'ai l'honneur d'observer que toutes les fois qu'une question de droit public éprouve de l'opposition dans cette Assemblée, il faut que le comité auquel on renvoie cette question soit composé de manière à l'examiner contradictoirement ; car s'il ne renferme pas l'opinion contraire, la question ne sera pas envisagée sôus toutes les faces. Je demande donc que M. de Delley soit adjoint au comité auquel on renverra le plan dont il est l'auteur.
Je m'y oppose formellement.
Il faut, avec M. de Delley, nommer trois autres membres ; car nous avons lieu de croire, et l'on nous a assez prouvé qu'un esprit départi ou de système dirige- toutes les opérations du comité des contributions publiques. Je demande de plus l'impression du plan de M. de Delley.
L'Assemblée ne peut mettre tant d'importance à un plan que l'auteur n'a pas eu le temps de méditer; car il n'a pas eu celui môme de le recopier. Ce plan pose sur des bases évidemment fausses, il est étahli"sur des erreurs de calculs très remarquables. On a relevé celle des 60 millions pour les départements : sans doute on a aussi été frappé d'une diminution très singulière dans l'estimation du produit des différents impôts, et le comité est chargé de faire de nouveau le calcul de ce produit; mais toute l'Assemblée ne doute pas de la faiblesse de son estimation provisoire.
Je pense donc que- ce serait donner de la consistance aux détails d'un semblable plan, que d'en ordonner l'impression, ou de le renvoyer à un comité.
Je demande à répondre.
Les calculs de M. de Delley fussent-ils justes, notre situation fût-elle aussi fâcheuse que ses calculs sembleraient l'annoncer, il faudrait du moiDS que le plan nous présentât un remède. Or, comme celui-ci n'est autre chose qu'une véritable banqueroute, je ne crois pas que l'Assemblée doivent donner créance à un aussi triste aperçu. Le point véritable où nous en sommes, c'e.-t qu'il faut trouver encore 16 ou 17 millions. Le comité doit assurer ses estimations, et nous présenter de nouvelles ressources.
Ne nous jetons pas dans des calculs qui ne seraient en ce moment qu'une mer sans fond et sans rives ; ne protégeons pas des erreurs qui ne serviraient qu'à répandre de fausses défiances sur nos ressources.
On a dit queje n'avais pas eu le temps de mûrir mon opinion, puisque je n'avais pas eu celui de la recopier. Elle était depuis longtemps dans ma tète, je l'avais profondément réfléchie ; mais je ne prévoyais pas que l'Assemblée s'occuperait aujourd'hui de cette matière.
Jamais on n'a pu me reprocher des calculs faux, peut-être en ai-je présenté quelquefois d'hypothétiques. J'ai demandé si les 60 millions des départements étaient au-dessus de la contribution foncière. M. ie président du comité et M. Dauchy m'ont assuré la négative, et je suis
Sarti de cette donnée. En voyant comprendre
ans les fonds de cette année 35 millions et demi pour la contribution patriotique, ainsi que les dettes des Américains et du duc des Deux-Ponts, j'ai cru reconnaître un déficit, parce que ces objets sont des capitaux et non des revenus. Quant au droit d'enregistrement, par des calculs très exacts faits par de bons administrateurs, il ne doit point produire plus de 35 millions; j'en appelle à l'année prochaine.
Le comité fait manger des capitaux, et moi non. Cependant je fais jouir à l'instant le cultivateur et le pauvre des bienfaits de la Révolution. Voilà en deux mots le plan que je propose. On donnera à l'Europe une bien plus grande idée de notre puissance en l'adoptant, qu'en mangeant nos capitaux, et en ne nous reservant aucune ressource d'ici à deux ans.'
Je crois les vues de M. de Delley utiles. Je crois que le comité en prendra communication avec intérêt; mais il est impossible que l'Assemblée autorise pour ainsi dire ce plan en en ordonnant l'impression. Il faut donc passer à l'ordre du jour sur la demande de l'impression.
L'amendement de M. l'abbé Maury ne peut être mis en délibération sans jeter de la défiance sur le comité des -contributions publiques que l'on accuse sans cesse de suivre le système des économistes ; cependant ce même comité vous a fait décréter pour plus de 200 millions d'impôts indirects. Je lui dois une autre justice, c'est que tous les projets d'impositions qu'il vous a présentés portent sur les gens riches, et que ton-jours il a ménagé la classe pauvre de la société. VApplaudissements.)
(La discussion est fermée.)
Je mets aux voix la question de savoir si l'Assemblée passera à l'ordre du jour
sur la demande d'impression du plan de M. de-Delley.
(Après deux épreuves douteuses, l'Assemblée décide qu'elle passe à l'ordre du jour sur cette motion.)
Je mets maintenant aux voix la motion du renvoi du plan de M. de Delley au comité de l'imposition.
(L'Assemblée décrète ce renvoi.)
, au nom du comité ecclésiastique. Messieurs, le comité ecclésiastique vient d'être convoqué à l'instant et m'a chargé de vous représenter la nécessité de réparer une erreur qui s'est glissée dans l'impression du procès-verbal du 27 janvier.
Cette erreur consiste dans l'omission de la dernière partie de l'article 4 du décret sur le rern-placement des fonctionnaires publics ecclésiastiques qui n'ont pas prêté le serment, partie dans laquelle il est dit que la consécration se fera sans être tenu de demander la permission à l'évêque du lieu.
Je propose en conséquence le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par le comité ecclésiastique, décrète :
« Que, dans la rédaction de l'article 4 du décret du 27 janvier dernier, concernant l'exécution de celui du 27 novembre précédent, sur le serment des prêtres par les fonctionnaires publics ecclésiastiques, il sera rétabli la disposition suivante :
« Que la consécration de l'évêque élu se fera par un évêque de France, sans être tenu de demander la permission à l'évêque du lieu. »
Je mets aux voix le projet de décret du comité ecclésiastique.
Plusieurs membres à droite : Point de voix 1 Point de voix I
(L'Assemblée, consultée, adopte le projet de décret.)
, député de Chartres, demande un congé de quinze jours.
(Le congé est accordé.)
annonce l'ordre du jour de demain.
La séance est levée à trois heures.
PRÉSIDENCE DE M. DUPORT.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier, qui est
adopté.
J'ai reçu de M. Bonne-Savardin la lettre suivante :
« Monsieur le Président,
« J'ai l'honneur de vous adresser une pétition dont je vous prie de faire part à l'Assemblée nationale le plus tôt qu'il sera possible. Je ne dois pas douter de l'intérêt et de 1 empressement que vous y apporterez, lorsque vous verrez que c'est celle d'un prisonnier depuis dix-huit mois, qui demande des juges.
« Je suis avec un très profond respect, etc....
« Signé : Bonne-Savardin. »
La pétition est très courte; si vous désirez l'entendre...
(de Saint-Jean-d'Angély). Dans cette pétition, M. Bonne-Savardin demande à être jugé. Il faut ou créer un tribunal provisoire pour juger les accusés de crime de lèse-nation, ou ordonner qu'ils attendront la formation prochaine de Ja haute cour nationale.
Pour moi, mon opinion est qu'il soit formé un tribunal provisoire,en laissant toutefois aux accusés la faculté d'attendre ou de ne pas attendre l'organisation de la haute cour nationale.
Plusieurs membres demandent à plusieurs reprises l'ordre du jour.
Je prie les membres qui demandent l'ordre du jour de se mettre à la place des accusés qui gémissent dnpuis six moi3 dans les prisons, de se mettre à la place de leurs familles, ae leurs amis, et je les prie de considérer si l'Assemblée peut refuser un jugement à ces accusés.
Il y a déjà cinq semaines que le comité de Constitution a été chargé de présenter un projet de décret pour l'établissement d'un tribunal provisoire. La pétition de M. Bonne-Savardm n'est autre chose que la demande de la présentation de ce rapport. Vous t.e pouvez passer à l'ordre du jour sans manquer à votre propre décret. Je demande que le rapport soit fait incessamment.
Incessamment est un mot trop vague; si nous étions en prison, je vous demande si nous serions contents du mot incessamment.
Plusieurs membres : Samedi!
(L'A-semblée, consultée, charge son comité de Constitution de lui présenter samedi prochain un projetée décret relatif à l'établissement d'un tribunal provisoire pour le jugement des ctimes de lèse-nation.)
, au nom du comité des finances, demande le renvoi, aux comités des d >maines et d'imposition réunis, de l'examen de toutes les questions relatives aux salines de Franche-Comté et de Lorraine.
(Ce renvoi est décrété.)
Un membre demande que l'Assemblée charge
sou comité d'aliénation de lui présenter demain un projet d'instruction motivée, qui facilite aux receveurs de district et aux acquéreurs des domaines nationaux la fixation des annuités:
(Cette motion est décrétée.)
, secrétaire, donne lecture d'une adresse des membres du comité de commerce de la ville de Strasbourg.
Gette adresse est ainsi conçue :
« Strasbourg, le
« Messieurs, le décret émané de votre sagesse, le 12 de ce mois, assure la liberté de la culture et de la fabrication du tabac dans toute l'étendue de notre Empire; c'est un nouveau bienfait que nous devons à votre sollicitude paternelle.
« Les vrais patriotes, pénétrés de la reconnaissance la plus vive, voient, dans ce décret, un gage sûr du rétablissement prochain de la tranquillité et de l'ordre dans les départements du Rhin. Les ennemis de notre sainte Constitution y voient Pécueil de leurs manœuvres coupables, et le tombeau de l'espoir insensé qu'ils avaient conçu d'opérer une contre-révolution. Leurs projets iniques sont déconcertés, leurs ressources s'évanouissent, il ne leur reste plus que la honte et le dépit.
« Vous avez, pères de la patrie, affermi pour toujours le courage des uns, et terrassé l'audace des autres. Les bons citoyens de la ville de Strasbourg savent apprécier ce nouveau triomphe de la liberté.
« Vous la consolidez par les lois sages que vous dictez aux Français : ces lois protègent nos droits. Nous serons soumis à la loi jusqu'à notre dernier soupir; nous donnerons à la patrie jusqu'à la dernière goutte de notre sang pour la défense de la liberté. (.Applaudissements.)
« Nous sommes, etc....
Je suis chargé par plusieurs militaires de demander à l'Assemblée jusqu'à quel âge on est tenu de faire 1e service dans la garde nationale.
A Uôle, on a contraint à monter la garde un officier qui a servi 48 ans, qui a fait douze campagnes de guerre, qui a 76 ans, qui est sourd et que ses services et ses infirmités mettent hors d'état de servir.
Je demande que l'Assemblée détermine l'âge après lequel les citoyens ne sont plus tenus ae servir.
Le comité de Constitution fera sous peu son rapport sur l'organisation des gardes nationales. En attendant, il est peut-être utile de décréter provisoirement que, passé l'âge de 60 ans, on ne sera pas obligé au service per-sonnel.
(L'Assemblée, consultée, renvoie au comité de Constitution l'exameu de la question de savoir jusqu'à quel âge on peut être obligé au service dans la garde nationale.)
La parole est à M. Prugnon pour présenter, au nom du comité de l'emplacement, un projet de décret concernant le directoire et le tribunal de district du département de UAriège.
, au nom du comité de remplacement des tribunaux et corps administratifs. Le département de l'Ariège demande à être autorisé
à acquérir la maison de l'abbaye du ci-devant chapitre de Saint-Voluzien, pour y fixer sou établissement, et y placer eu même temps le.tribunal de district. Il se détache de tout ce qui est luxe, et se renferme dans les termes de vos décrets, dictés par une sévère, mais indispensable économie. Il observe même qu'une parue de ce bâtiment lui devient inutile, et qu'elle pourra être achetée par la municipalité, attendu que la maison commune cesse d'être habitable, et de lui convenir.
Ainsi, dans une circonstance locale, le rapport finirait là; mais les administrateurs proposent de loger leur imprimeur, et annoncent même que déjà il est établi dans ce bâtiment. Leurs motifs sont que cela est plus commode pour le service, et que l'appartement occupé par l'imprimeur ne leur est point extrêmement nécessaire.
Votre comité pense que le principe doit être inexorable, et qu'en ce genre surtout, il faut être avare de transactions, parce qu'elles mènent toujours où l'on ne croit et où l'on ne veut pas aller. Vous avez décrété, contre le vœu de votre comité, que les secrétaires même \ ne seraient pas logés; pourquoi un imprimeur le serait-il?
Les principes sont fcomme les ressorts d'une machine, on ne peut leur donner trop d'élasticité et d'énergie en les formant, parce que le temps finit toujours par les affaiblir et par les détruire. Le calcul de la commodité doit disparaître : et c'est en tout sens qu'il faut donner une éducation un peu dure à la liberté, si l'on veut qu'elle ait un jour une santé d'athlète. Enfin, il vaut mieux qu'un appartement soit vide, qu'un principe violé: et il faut tenir à cette vérité-là avec une espèce de superstition,
Quand donc cet imprimeur serait un Elzévir, un Barbou, un Didot, encore votre comité serait-il d'avis qu'il faut l'inviter à retourner chez lui: et comme l'économie de,s paroles est aussi une de celles que votre comité professera et tâchera de pratiquer toujours, il se hâte de vous soumettre son projet de décret :
«L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité de l'emplacement des tribunaux et corps administratifs, autorise les administrateurs du département de l'Ariège â acquérir, aux frais des administrés, la maison de l'abbaye de Saint-Vo-luziqn, pour y placer taptle directoire de l'administration du département que le tribunal de district, en observant les formalités prescrites par les décrets de l'Assemblée ^nationale, pour l'aliénation des biens nationaux.
« L'Assemblée nationale décrète qu'aucun des administrateurs, juges, greffiers, archivistes, ingénieurs,, sous-ingénieurs, secrétaires ou commis, ni imprimeurs, ne pourront y être logés : excepte de l'acquisition ci-dessus permise, les potagers, jardins et autres terrains, lesquels seront vendus Séparément en la manière prescrite et accoutumée ; excepte, en outre, l'emplacement destiné pour la maison commune, lequel pourra être acquis par la municipalité, en observant aussi les formes exigées par les décrets. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité des pensions. Messieurs, vous chargeâtes hier votre comité, des pensions de vous présenter ce malin un projet de décret relativement aux personnes qui ont de nouveaux mémoires à présenter pour obtenir des pensions.
Voici en conséquence notre projet de décret: « L'Assemblée nationale décrète :
« 1° Les personnes qui, étant dans les cas prévus par la loi du 23 août dernier, pour des services rendus à l'Etat antérieurement à l'époque du 1er janvier 1790, n'auraient pas éié-récom- . pensées, remettront, si fait n'a été, leurs mémoires au comité des pensions, conformément à l'article 16 du titre III de ladite loi. - « 2° A l'égard de ceux qui prétendraient avoir droit à des pensions ou gratifications pour des-actions faites postérieurement au lar janvier 1790, ou à raison de leur-rétraite postérieure à la même époque, ils se pourvoiront dans la forme prescrite par les articles 22, 23, 24 et 25 du titre Ier de ladite loi, La liste nominative, qui doit être dressée aux termes des mêmes articles, sera présentée à l'Assemblée au mois d'avril prochain, pour, sur le rapport qui lui en sera fait, être décrété, à cette époque, ce qu'il appartiendra.
3° Les personnes blessées devant Nancy, les veuves et enfants de ceux qui ont été tués dans cette action, et autres, dont l'Assemblée nationale, par son décret du 16 janvier dernier, a renvoyé les demandes à son comité pour qu'il lui en fît incessamment son rapport, demeurent exceptés de l'article précédent.
(Ce décret est adopté.)
L'ordre du jour est la 3® suite des articles proposés par le comité féodal sur la suppression des droits féodaux (l).
, au nom du comité féodal, donne lecture des articles proposés par le comité
Art. 22.
(Â intercaler entre les articles 5 et 6.)
« Dans les pays et lés lieux où les dots sont aliénables du consentement des femmes, si le rachat des droits ci-devant seigneuriaux ou fonciers dus à une femme mariée, n'est point fait en sa présence ou de son consentement, le mari ne pourra le recevoir qu'en la forme et au taux prescrit par le décret dû 3 mai 1790, et à la charge d'en employer le prix. Le redevable qui ne voudra point demeurer garant du remploi, pourra consigner le prix du rachat, lequel ne pourra être délivré au mari qu'en vertu d'une ordonnance du tribunal de district, rendue sur les conclusions du coiûmissairedu roi, auquel il sera justifié du remploi. » (Adopté.)
Art. 23.
« Tous les droits honorifiques et toutes les distinctions, ci-devant
attachés tant à- la qualité de seigneur justicier qu'à celle de patron,
devant cesser respectivement par la suppression des justices
seigneuriales, prononcée le 4 août 1789, et par la constitution civile
du clergé, décrétée le 12 juillet 1790, les ci-devant seigneurs
justiciers et' patrons seront tenus, dans les deux mois de la
publication du présent décret,. et chacun en ce qui le concerne : 1® de
faire retirer des chœurs des églises et chapelles publiques les bancs
ci-devant patronaux et seigneuriaux qui peuvent s'y trouver; 2° de faire
supprimer les litres et ceintures funèbres, tant à l'intérieur qu'à
l'extérieur des églises et des chapelles publiques; 3° de faire démolir
les fourches patibulaires et piloris ci-devant érigés à titre de
justices seigneuriales. »
(Cet amendement est écarté par la question préalable.)
(L'article 23 est décrété,),
« Art. 24. Dans la huitaine qui suivra l'expiration du délai de 2 mois indiqué par l'article précédent, le maire de chaque municipalité sera tenu de donner avis au commissaire du roi du tribunal de district de l'exécution ou non-exécution du contenu audit article, ;et, en cas de no n.-exécution, le commissaire du roi sera tenu de requérir, dans la huitaine suivante, une ordonnance du tribunal pour autoriser la municipalité à effectuer les suppressions, et démolitions ci-dessus prescrites. »
Pourquoi multiplier ainsi les formes ? I/article proposé entraînera la nécessité d'obtenir des sentences. Certes, Messieurs» ces longueurs ne conviennent pas aux principes du gouvernement et de la Constitution.
Je demande qu'il soit dit que, suivant l'ancien droit indiqué par l'article précédant, « la municipalité pourra faire exécuter et les suppressions et les démolitions ci-dessus prescrites. »
, rapporteur. Les principes du préopinant sont rigoureusement justes; mais comme plusieurs municipalités ont commis des voies dé fait en enlevant d'autorité privée les bancs des églises, votre comité a cru devoir prendre cette précaution afin d'imprimer au ci-toyéo, dans une circonstance aussi rèmarquabl.e> le respect qu'il doit à la loi, et afin qu'il s'abstienne de toute voie de fait.
(L'amendement de M. Lanjuinais n'est pas adopté,)
Il faut autoriser les municipalités à disposer des matériaux des démolitions, qui seraient faites à leurs frais.
, rapporteur. J'adopte *, on pourrait alors rédiger l'article comme suit :
Art. 24.
« Dans la huitaine qui suivra l'expiration du délai de deux mois indiqué par l'article précédent, le maire de chaque municipalité sera tenu dé donner avis au commissaire du roi, du; tribunal de district de l'exécution ou non-exécution du contenu audit article ; et en cas de non-exécution, le commissaire du roi sera tenu de requérir, dans la huitaine suivante, une ordonnance du tribunal pour autoriser la municipalité à effectuer les suppressions et démolitions ci-dessus prescrites, et ce, aux frais de la commune qui demeurera propriétaire des matériaux en prove^ nant. » (Adopté.)
Art. 25, Les dispositions des. deux articles précédents, relatives aux bancs placés dans les chœurs par les ci-devant seigneurs justiciers et patrons, sont communes aux bancs qui ont pu être placés dans, les nefs par droit de fief, de justice seigneuriale, de patronage ou par tout autre privilège, sauf aux ci-devant seigneurs patrons ou privilégiés à suivre les anciens règlements et usages concernant les bancs occupés par des particuliers, et auxquels il n'est rien innové quant à présent.
Un membre propose, par amendement, Rajouter
à l'article ces mots : « et sans que, sous prétexte de l'exécution desdits articles, il soit permis d'enlever les armoiries des tombeaux et êpitaphes étant dans lesdites églises, à l'effet de quoi le décret du 10 juin 17Ô0 continuera d'être exécuté. »
, rapporteur. Cette disposition se trouve déjà insérée dans les précédents décrets.
(L'amendement est écarté par la question préalable*)
Un membre demande qu'où fasse suivre les mots : dam les nefs de ceux-ci : et chapelles collatérales.
, rapporteur. J'adopte l'amendement ; vqici quelle serait la rédaction de l'article :
Art. 25.
«Les dispositions des deux articles précédents, relatives ^ux h^ncs placés dans les chœurs par les ci-devant seigneurs justiciers et patrons, sont communes aux bancs qui ont pu être placés dans les nefs et chapelles collatérales par droit de fief, de justice seigneuriale, de patronage, ou par tout autre privilège; sauf aux çi-de.vant seigneurs, patrons ou privilégiés à suivre les anciens règlements et usages concernant les bancs occupés par des particuliers, et auxquels il n'est rien innové quant à présent. » (Adopté.)
Ûn membre demande l'ajournement sur les ar-» ticles 26 et 27 ainsi conçus :
« Art. 26. Les ci-rdevant seigneurs sont et demeurent déchus, à compter de la publication des décrets du 4 août 1789, des droits de déshérence, d'aubaine, de bâtardise, d'épaves et de trésor trouvé.
« Art. 27. Ils demeurent pareillement déchus, à compter de la même époque^ du droit de s'apr proprier les terres vaines et vagues, landes, biens vacants, garrigues, flégards et wareschaix. »
(L'ajournement est repoussé par la question préalable.)
,rapporteur. On. pourrait fondre ces deux articles en un seul et dire :
Art. 26 (art. 26 et 27 du projet).
« Les droits de déshérence, d'aubaine, de bâtardise, d'épaves, de trésor trouvé et celui de s'approprier les terres vaines et vagues ou gastes, landes, biens hermes ou vacants, garrigues, flégards et wareschaix n'auront plus lieu, en faveur des ci-devant seigneurs, à compter de la publication des décrets du 4 août, 1789; les ci-devant seigneurs demeurant, à compter de la même époque, déchargés de l'entretien des enfants trouvés ». (Adopté.)
Art. 27 (art. 28 du projet).
« Et néanmoins les terres vaines et vagues ou gastes, landes, biens vacants, garrigues, flégards et wareschaix, dont les ci-devant seigneurs ont pris publiquement possession avant la publication des décrets du 4 août 1789, en vertu des lois, coutumes, statuts ou usages locaux lors existant,, leur demeurent irrévocablement acquis sous les réservés ci-après. V (Adopté.)
Art. 29. Les ci-devant seigneurs justiciers seront censés avoir pris publiquement possession desdits terrains à l'époque désignée par l'article précédent* lorsque avant cette époque ils les auront, soit inféodés, accensés ou arrentés, soit clos de murs, de baies onde fossés, soit cultivés
ou fait cultiver, plantés ou fait planter, soit mis à profit de toute autre manière.
Un membre propose .d'ajouter à l'article ces mots :
« ... Pourvu qu'elle ait été exclusive, à titre de propriété, ou à l'égard de3 biens abandonnés par les anciens propriétaires, lorsqu'ils auront fait les publications et rempli les formalités requises par les coutumes pour la prise de possession de ces sortes de biens. »
, rapporteur. J'adopte et je donne lecture de l'article ainsi amendé :
Art. 28 (art. 29 du projet).
« Les ci-devant seigneurs justiciers seront censés avoir pris publiquement possession desdits terrains, à l'époque d-signée par l'article précédent, lorsque, avant cette époque, ils les auront soit inféodés, accensés ou arrentés, soit clos de murs, de haies ou de fossés, soit cultivés ou fait cultiver, plantés ou fait planter, soit mis à profit de toute autre manière, pourvu qu'elle ait été exclusive, à litre de propriété, ou à l'égard des biens abandonnés par les anciens propriétaires lorsqu'ils auront fait les publications et rempli les formalités requises par les coutumes pour la prise de possession de ces sortes de biens. » (Adopté.)
« Art. 30. Ceux desdits terrains dont il n'a pasété pris possession par les ci-devant seigi eurs justiciers, ainsi qu'il vient d'être dit, et avant l'époque déterminée par l'article précédent, sont déclarés biens nationaux et peuvent être vendus comme tels. »
Cet article renferme deux questions distinctes : La première question se réduit au besoiit de savoir quel sera le sort de ces terrains-là qui n'appartiennent àpersonne et dont le seigneur n'a point fait sa propriété privée; et c'est sous ce point de vue-là que le comité vous a présenté la question de savoir si ces terrains seront déclarés nationaux ou s'ils seront donnés aux communautés. Or,on a confondu avec cette question-là la question de savoir dans quel cas les communautés peuventètre réputées propriétaires des terrains vains et vagues, et celle ue savoir s'il est avantageux de donner ces biens aux communautés. C'est une question très intéressante, et je vous proposerai en conséquence sur cet objet de renvoyer à vos comités de Constitution, des domaines et d'agriculture, pour examiner si ces terres vaines et vagues appartiendront aux communes ou seront déclarées biens nationaux.
A l'égard de la seconde question, je crois qu'il est intéressant de déterminer en quel cas les communautés d'habitants étaient propriétaires de ce qu'elles appelaient leurs communes, et dans quel cas elles ne l'étaient pas. (Murmures.) Je crois fort important que l'Assemblée nationale fasse un règlement clair et précis pour déterminer à l'avenir, et même pour le passé, à quel caractère les communautés pourront établir leur propriété.
Je propose en conséquence de renvoyer l'article 30 au comité de Constitution, des domaines et d'agriculture réunis.
(Ce "renvoi est décrété.)
Art. 29 (art. 31 du projet).
« Il n'est préjudicié.par les deux articles précédents, à aucun des dronsde propriétés ou d'usage que les communautés d'habitants peuvent avoir
sur les terrains y mentionnés; et toutes actions leur demeurent réservées à cet égard par l'Assemblée nationale, chargeant les comités de Constitution, des domaines et d'agriculture de lui présenter incessamment leurs vues sur la nature des preuves d'après lesquelles doivent être fixés ces droits. »
Un membre propose, par amendement, d'ajouter avant ces mots : à aucun des droits de propriétés ou d'usage que les communautés d'habitants peuvent avoir sur les terrains y mentionnés,ceux-ci : à aucun des décrets sur la législation domaniale.
, rapporteur. J'observe que l'amendement est inutile, car l'intention de l'Assemblée est de conserver aux communautés les droits qu'elles peuvent avoir sur les places, marchés, fossés et mUrs des villes, dont les ci-devant seigneurs s'étaient emparés depuis moins de 40 ans, ou qui avaient fait des concessions depuis cette époque. Il suffit d'exprimer, dans le procès-ver-bal de ce jour, l'intention de l'Assemblée à cet égard.
(L'Assemblée ordonne que cette observation sera insérée dans son procès-verbal.)
(L'article 29 est décrété.)
Art. 30 (art. 32 du projet).
« Sont également réservés, sur lesdits terrains, tous les droits de propriété et autres qui peuvent appartenir, soit à de ci-devant seigneurs de fiefs, en vertu de titres indépendants de la justice seigneuriale, soit à tous autres particuliers.» (Adopté.)
donne lecture d'une lettre par laquelle le maire de Paris annonce qu'il a été vendu trois maisons nationales, ainsi qu'il suit :
La première, quai Saint-Bernard, louée 1,810 livres, estimée 26,920 livres, adjugée 62,700 livres.
La deuxième, rue Cassette, louée 4,500 livres, estimée 52?000 livres, adjugée 85,100 livres.
Et la troisième, rue Coquillière, louée 6,100 lires, estimée 90,000 livres, adjugée 139,100 livres.
J'ai reçu une lettre des députés de la ville de Carpentras, ainsi conçue :
« Monsieur le Président, la municipalité de la ville de Carpentras a eu l'honneur de vous adresser, le 23 janvier dernier, une expédition de la délibération du 14, prise par tous les citoyens actifs de Carpentras, par laquelle ils ont unanimement émis le vœu d'être réunis à l'Empire français.
* Députés le 22 janvier vers l'auguste Assemblée que vous présidez, pour lui présenter ce vœu, et empressés de remplir notre mission, nous avons l'honneur de vous en prévenir; nous vous prions de nous accorder un moment d'audience ou de nous prescrire si nous devons nou3 adresser à l'Assemblée nationale ou à tel de ses comités qu'il lui plaise d'indiquer.
« Nous sommes, avec respect, etc... »
(L'Assemblée décrète que les députés de Carpentras seront admis et entendus à la barre.)
Voici une lettre de M. le ministre des finances'relative à l'adjudication du bail des messageries :
« Paris, le
« Monsieur le Président, j'ai l'honneur d'annoncer à l'Assemblée qu'en exécution de son dé-
cret du 18 de ce mois, j'ai fait annoncer, par de , nouvelles affiches, que l'adjudication définitive | du bail des messageries serait faite aujourd'hui 21.
« Deux compagnies se sont trouvées.en pré- j sence : celle de M. Lequèux, et celle de M. Ma-card, qui s'est présentée avec un cautionnement eh règle, én prenant la place de la compagnie Choiseau qui s'était retirée. t
« Les enchères sur celle.de 300,000 livres, faite à la dernière séance par la compagnie de M. Le-queux, ont été successivement couvertes et por- ; tées par cette dernière compagnié jusqu'à la J somme de 600,500 livres. (.Applaudissements.) La com agnie de M. Macard n'ayant pas couvert cette enchère, j'ai prononce l'adjudication en faveur de la compagnie de M. Lequeux,,pour ladite somme de 600,500 livres. %
« J'ai l'honneur d'envoyer à l'Assemblée copie du procès-verba^ de cette adjudication j- j'attends qu'elle veuille bien la ratifier, ainsi qu'elle js'est réservé de le faire par son décret du 20 décembre dernier. Aussitôt que cette ratification me sera connue,, je ferai passel* le bail à la compagnie adjudicataire. « Je suis, etc....
« Signé.: de Lessart. »
(L'Assemblée charge son comité des finances de lui présenter demain matin un projet de décret à ce sujet,)
Les maîtres de poste m'ont fait parvenir à l'occasion du bail des messageries l'adresse suivante :
« Messieurs, vous venez de rendre la vie à 600 familles utiles, à 600 familles répandues dans le royaume, sur la surface de la France. Pénétrées de respect pour vos décrets, pénétrées d'amour pour la Constitution, elles jurent par mon organe d'être les sentinelles toujours actives de cette Constitution ; elles ajoutent à, leur serment civique; qu'elles renouvellent en ce moment l'engagement sacré de veiller, dans toutes les localités, sur les mouvements qui pourraient vous être contraires et.de servir avec un zèle égal et le public et la patrie.
« Nous vous demandons protection, nous vous jurons fidélité. (Applaudissements prolongés.)1
* Signé : Dubuc-Lonchamp. »
donne lecture d'une lettre des administrateurs du directôire du district de Bayeux, ainsi conçue :
« Monsieur lé Président, M. l'abbé de Launay, vicaire de la paroisse de Saint-Sauveur de Bayeux depuis le lerjanvier dernier, ne s'est pas contenté de prêter avec son curé le serment qui le lie à la patrie, il vient encore de déposer sur son autel le don d'un assignat de 200 livres qu'il a reçu d'elle pour le dernier quartier de sa pension. Nous le joignons ici.
« C'est une tendre mère qui m'ouvre son sein, « disait-il avec enthousiasmé, et je n'ai rien en-« core fait pour elle 1 Je lui dois * au moins les « prémices de ses bienfaits.
« Avec quelle sensibilité n'avons-nous pas recueilli ces vertueuses paroles et combien nous en éprouvons encore à vous les transmettre I
« N'oublions pas de vous dire que cet estimable ecclésiastique avait un frère,, jeune peintre de la plus grande espérance» et qui a péri à la suite des affaires des 13 et 14 juillet. « Il est doux pour nous d'avoir de pareils
traits à vous annoncer.» (Applaudissements à gauche; murmures à droite.)
Il faut le faire évêque.
Un membre à gauche : Ce trait de générosité ne montre pas qu'il spif indigne de l'être.
(L'Assemblée ordonne qu'il soit fait mention de cette lettre' dans le procès-verbal.) ,
J'ai reçu des administrateurs du district de Saint-Far-geau la:lettre suivante:
« Nous vous prions d'annoncer le plus tôt possible à l'Assemblée nationale que tous les fonctionnaires publics ecclésiastiques du district de Saint-Fargeau ont prêté le serment prescrit sur la constitution civile du clergé et d'en demander une mention honorable dans le procès-verbal., v « Cet hommage est dû à tous nos.ecclésiasti-ques, et nous ne le sollicitons que comme une justice que nous leur croyons due. Nous nous félicitons de cette heureuse harmonie et de leur soumission aux lois nationales ».
(L'Assemblée ordonne qu'il en sera fait mention honorable dans le procès-verbal.)
Je dois vous faire part, Messieurs, d'un fait qui ne vous sera pas indifférent.
Un curé, voisin dé Paris, dont je connais le nom et la demeure, mais qui ne veut pas être nommé, avait refusé son serment ; le lendemain il reçut un assignat de 300, livres, que lui envoyait une dame, sans doute très respectable, en lui disant qu'elle croyait devoir le dédommager du sacrifice glorieux de sa fortune. Au même instant le curé a été prêter son serment, et a fait don de son assignat aux pauvres. (Applaudissements.)
L'évêque de Viviers dans le département de l'Ardèche, ce prélat qui a toujours suivi la loi de la résidence,...
Il a perdu la tête.
ce prélat bienfaisant et charitable, dont les moeurs et la piété rappelaient les mœurs des premiers évêques, a prêté solennellement, et aux acclamations du peuple, le serment exigé des fonctionnaires ecclésiastiques; il l'a fait précéder d'un discours où il a prouvé que ia religion lui faisait un devoir de se conformer à cette loi. (Violents murmures à droite.) , Il a développé de la manière la plus énergique la sagesse des dispositions du décret s,tir la constitution civile du clergé. Cet exemple a été imité par ia; très grande majorité des ecclésiastiques de son diocèse : il n'y a eu que quelques réfractaires, séduits par les écrits incendiaires, que les émissaires des fanatiques de Nîmes et d'Uzès ont répandus dans ce département. (Vifs applaudissements.)
La suite des articles sur les droits féodaux est reprises
, rapporteur, donne lecture des articles suivants :
Art. 31 (art. 33 du projet).
« Tout ci-devant seigneur qui, tout à la fois,
justifiera qu'à une époque remontant au delà de 40 ans, il a planté ou fait planter, et que depuis il a possédé des arbres dans des marais, prés et autres biens appartenant â une communauté d'habitants, conserve la propriété et libre disposition de ces arbres ; sauf à cette communauté à les racheter sur le pied de leur valeur actuelle, à la forme du décret du 26 juillet 1790; ce qui aura pareillement lieu à l'égard des arbres plantés et possédés par le ci-devant seigneur, depuis un espace de temps au-dessous de 40 ans, par remplacement d'arbres qu'il justifiera avoir été antérieurement à 40 ans, plantés et tout à la fois possédés par lui ou ses auteurs. » (Adopté.)
Art. 32 (art. 34 du projet).
« Quant aux arbres plantés par un ci-devant seigneur sur des [biens communaux, depuis un espace de temps au-dessous de 40 an s, sans qu'ils l'aient été par remplacement, ainsi qu'il vient d'être dit, ils appartiennent à la communauté, en remboursant par elle les frais de plantation, et à la charge de se conformer à l'article 10 du décret du 26 juillet 1790. (Adopté.)
Art. 33 (art. 35 du projet).
« Sont abolis sans indemnité, les droits de rupt du bâton, de course sur les bestiaux dans les terres vagues, de canal, dë vétée, de vif herbage, de mort herbage, ainsi que les redevances et servitudes qui en seraient représentatives, et généralement.tous les droits ci-devant dépendant de la justice et policé seigneuriale* (Adopté.) *
Art. 34 (art. 36 du projet).
« Ceux qui ont acquis du roi des justices seigneuriales, soit par engagement, soit par vente pure et simple, sans mélange d'autres biens ni d'autres droits encore existants, seront remboursés par la caisse de l'extraordinaire, des sommes Versées par eux ou par leurs auteurs, au Trésor publjc; à l'effet de quoi, ils remettront leurs mémoires, titres et pièces justificatives, à l'administration des domaines, qui, après les avoir vérifiés, les fera passer avec son avis, préalablement examiné, et, s'il y a lieu, approuvé par les directoires de district et de département des chefs lieux desdites justices, au bureau de la direction générale de liquidation ». (Adopté.)
demande le renvoi des articles 37 et 38 du projet à l'examen du comité des domaines réuni au comité féodal.
Ces articles sont ainsi conçus :
« Art. 37. Ceux qui ont acquis du roi des justices seigneuriales, sans mélange d'autres biens ni d'autres droits existants, par la voie d'échange, seront admis à rentrer dans les domaines qu'ils ont donnés en contre-échange; et ceux qui les ont acquises par bail à rente, sont déchargés envers le Trésor public, à compter de la publication des décrets du 4 août 1789, de toutes rentes et redevancés çi-devant dues par eux pour raison desdites acquisitions.
« Art. 38. Il ne sera fait aucune restitution, soit de deniers versés au Trésor public, soit de domaines donnés en contre-échange, ni aucune diminution sur les rentes et redevances, pour raison de droits de justice seigneuriale, ou autres compris dans le titre second du décret du 15 mars 1790, qui ont été engagés, vendus, échangés ou arrentés par le roi, conjointement avec d'autres biens qudroitsencore existants; et pourront seu lement, s'ils l'aiment mieux, les engagistes,
acheteurs, échangistes Ou arrentaires, résilier leurs engagements, achats, échanges ou baux à rente. »
(Le renvoi est ordonné.)
Messieurs, un courrier extraordinaire envoyé par les administrateurs du département du Gard, le 19 de ce mois, vient de remettre à l'instant les lettres suivantes, adressées à l'Assemblée nationale, et qui concernent les troubles de la ville d'Uzès :
lro lettre «
« Messieurs, « Le département du Gard est dans une crise qui exige les plus prompts secours. Les troubles d'Uzès, que le zèle de nos commissaires avait apaisés, ont donné lieu à une explosion effrayante. Les gardes nationales de Perias, de Ja-lès, de Banne et autres lieux du département de l'Ardèche, se sont réunis, et déjà notre territoire est violé. Deux citoyens envoyés en Vivarais pour y éclairer le peuple sur les désordres et la situation d'Uzès, MM. Chalmeton, procureur syndic du district, et le respectable abbé d'Autun, sont détenus prisonniers à Périas. 11 a été fait une incursion dans la ville de Saint-Ambroise, qui n'a pu résister et qui est occupée par 1,700 hommes qui ont désarmé les citoyens. 30,000 hommes menacent le département. Nous avons ordonné le rassemblement de nos gardes nationales ; nous allons déployer nos forces et requérir les troupes de ligne qui sont près de nous. Nous vous prions de donner des ordres pour que l'on fasse passer des forces dans le département. Nous demandons des .troupes, des armes et des munitions pour nous mettre en état d'arrêter une guerre civile déjà commencée, et à laquelle tous les ennemis de la Révolution travaillent depuis si longtemps. Nous avons surtout besoin d'une brigade d'artillerie. M. d'Albignac est à Uzès, au milieu des besoins et des dangers et pour nous sauver, il faut tout son patriotisme, sa tête et son courage.
« La religion, le catholicisme, le protestantisme sont les armes des malveillants, les prétextes par lesquels ils cherchent à rendre les amis de la Constitution odieux. Les troupes de ligne, les citoyéns, ies gardes nationales résisteront avec vigueur, et l'ordre pourra être établi, si les secours que nous vous demandons sont prpmpte-ment accordés. « Nous sommes avec respect, etc... *
2® lettre.
« Messieurs, « Nous avons l'honneur de vous envoyer copie de la lettre du direotoire d'Uzès, qui vous rend compte des troubles excités dans cette ville par ies ennemis de la Révolution. Quoique les craintes que nous ont causées les premiers avis des mouvements qui ont eu lieu à Uzès, soient beaucoup diminuées, nous ne laissons pas d'avoir quelques inquiétudes sur les suites.
« Les premières nouvelles des troubles d'Uzès sont parvenues la nuit dernière au directoire. Il a sur-le-champ requis M. d'Albignac d'y envoyer des troupes ; 230 hommes du régiment de Dau-phiné, et 30 dragons de Lorraine sont aussitôt partis, et la nouvelle que nous avons Ultérieurement reçue de leur arrivée à Uzès nous a beaucoup tranquillisés. La garde nationale de Nîmes,
instruite de ce qui se passait chez ses voisins, a montré le plus grand désir de voler à leur secour . Le directo.re a jugé convenable de requérir 150 hommes de ce corps de se rendre à Saint-Nicolas, distant d'Uzès d'une lieue et demie, pour y attendre dé nouveaux ordres, Les nouvelles rassurantes arriyées depuis lors ont suspendu le départ des gardes nationales.
« Enfin le directoire a cru devoir envoyer à Usé-, deux de ses membres (MM. David et Ménard; avec commission de s'informer des faits, et de tâcher de connaître les perturbateurs; nous aurons l'honneur de vous envoyer des détails circonstanciés au retour de nos commissaires.
« Ce qui vient de se passer à Uzès, et les mouvements qui ne cessent de se réitérer dans le département, nous engagent à vous supplier de nouveau d'agir par vos bons offices auprès de Sa Majesté, pour l'engager à accorder un renfort de troupes de ligne au dérart'mtni du Gard, la tranquillité de la contrée sollicite ce secours de la manière la plus pressante. »
Voici la copie de la lettre écrite, par le directoire du district d'Uzès, au directoire du département ;
v Messieurs,
« Nous avons été toute la nuit dans les plus vives alarmes, à la suite d'une querelle de cabaret, dont on ne peut pas bien connaître l'origine; une partie des citoyens s'est portée sur la place de la cathédrale en armes, et quelques hommes sont montés au clocher pour sonner le tocsin, dans le moment, M. le procureur-syndic s'est rendu aux casernes pour porter une réquisition du directoire au commandant de la garnison, pour faire monter toutes les troupes à cheval, la municipalité a dans le moment fait publier la loi martiale, qui a produit peu d'effet. Les attroupements se dissipaient à son approche, pour se rassembler après son passage. Les dragons ayant couru ù leurs écuries pour prendre leurs chevaux, en conséquence de la réquisition du directoire, ceux doQt ies chevaux étaient dans les écuries de i'évèché ont été assaillis ; deux ont été blessés, l'un d'un coup de feu à l'épaule, l'autre ni'un coup de baïonnette dans les entrailles, on espère qu'aucune de ces deux blessures ne sera dangereuse ; l'insuffisance de la garnison a déterminé le directoire à requérir le commandant de Ja garde nationale, de la rassembler sur l'esplanade et d'envoyer des réquisitions aux villages voisins, pour demander des secouis. Les gardes nationales requises sont arrivées successivement pendant la nuit et se sont mises en ordre de bataille sur l'esplanade; leur nombre, joint à la garde nationale, a été bientôt supérieur à celui des citoyens rassemblés devant la cathédrale: ia connaissance de cette supériorité à intimidé ces derniers qui se sont évadés, et ont pris en grand nombre le chemin de Jalès.
» Plusieurs citoyens ont instruit le directoire, qu'ils avaient entendu plusieurs des fuyards annoncer leur retour prochain avec des intentions hostiles. Nous allons nous eoaformer aux désirs du directoire, et prendre des m» sures pour renvoyer les gardes nationales des environs ; mais nous avons l'honneur de vous observer que ie grand nombre des émigrants, les menaces de revenir avec des renforts, nous ont fait paraître insuffisant le secours que vous nous avez envoyé, et il nous paraîtrait essentiel de le renforcer pour prévenir toute attaque extérieure;
nous n'avons actuellement aucune crainte pour l'intérieur, nous nous flattions que la grande supériorité des forces préviendrait toute autre effusion de sang; il en est malheureusement arrivé autrement. Un nommé Gollin, armurier, ayant tiré un coup de fusil sur une sentinelle, a reçu, dans l'instant, deux ou trois coups de fusil, et a expiré au corps de garde. Le moment d'après, ce funeste événement a causé une fermentation qui nous a fort alarmés, mais que les chefs sont parvenus à calmer ; le directoire ne s'est point séparé de toute la nuit, et il restera assemblé jusqu'à ce que la tranquillité publique soit bien assurée. Il va travailler à faire partir les gardes nationales étrangères, et il vous prie, Messieurs, d'envoyer un commissaire qui puisse juger de notre situation, et pourvoir aux moyens d'arrêter une incursion étrangère, qui est le seul sujet de crainte qui nous reste aujourd'hui.
« Ont signé : Les membres composant le directoire du district d'Uzès :
Folcheri, président, Balthazard, vice-président, j. p. Serdier, Guiraud, Chalmeton, et Gide, secrétaire.
« P. S, — Nous avons oublié de vous dire que, hier au soir, la compagnie n° 19, qui était de garde, tira plusieurs coups de fusil à des passants, et notamment à M. Voulland, colonel, qui heureusement firent faux feu.
« Nous écrivons une lettre circulaire aux municipalités qui sont sur la route de Jalès, pour les prévenir du dessein des émigrants, les inviter à les surveiller et à nous donner avis de tout ce qui se passera autour d'eux à ce sujet.
Collationné à l'original, Riqal, secrétaire général. »
Lorsque nous vous annonçâmes que notre département du Gard jouissait de la plus grande tranquillité, nous ne pensions pas qu'elle dût être aussi promiitement troublée. Les écrits incendiaires partis de Paris et un surtout d'un membre mêmede cette assemblée, M. de Béthizy,ci-devant évêque d'Uzès, avaient échauffé les têtes et ré veillé le fanatisme.
Plusieurs membres demandent la lecture de la lettre de M. de Béthizy.
Voici cette lettre ;
« Paris, le
« Le jour d'hier sera fameux dans les fastes du clergé de France; c'est le premier où j'aie reçu quelque consolation. Si nous avions combattu pour la gloire, nous pourrions dire que nous n'avons rien à désirer; mais un intérêt d'un ordre bien supérieur était confié à notre courage. Je ne suis pas sans espoir que cette journée ne sauve la religion «n France, mais je suis sûr au moins qu'elle l'a glorifiée. L'heure fatale était arrivée; l'expiration du délai nous a été annoncée ; on a délibéré de nous interpeller pour prêter le serment; la fermeté la plus calme était notre contenance. L'évêque d'Agen, appelé Je premier, a dit trois phrases d'une noblesse simple, franche et touchante, qui ont produit le plus grand effet. Un de ses curéSj M. Fournêse, appelé après lui, a fait aussi une de ces réponses qui enfoncent la crainte dans l'âme des pervers, et la honte dans celle des faibles.
% Yous voulez, dit-il, nous rappeler à la discipline des premiers siècles de l'Eglise : eh bien,
Messieurs, avec la simplicité qui leur convient, je vous dirai que je me fais gloire de suivre l'exemple que vient de me donner mon évêque et de marcher sur ses traces comme Laurent sur celles de Sixte jusqu'au martyre. »
« Alors l'effroi a gagné nos ennemis, la confusion s'est mise au milieu d'eux; ils ne savaient quel parti prendre, ils essayaient de plates et ridicules séductions, en annonçant que l'intention de l'Assemblée n'a pas été de toucher au spirituel. Nous demandons que Cette explication soit convertie en décret, et la mauvaise foi se démasque par un refus.
« Le tumulte et l'indécision de ces Messieurs allongent la séance, et aucun ecclésiastique ne montre ni faiblesse, ni inquiétude; alors ils abandonnent la forme d'appel individuel, qui leur aurait allongé le tourment d'être témoins du triomphe de la vérité, Ils ont ordonné une interpellation générale à ceux qui n'avaient pas encore prêté le serment; elle a été faite, et personne ne s'est présenté. Enfin notre immuable fermeté les a forcés, à leur grand regret, de décréter contre nous, et nous sommes sortis fiers de notre glorieuse pauvreté. (Applaudissements à droite. — Murmures à gauche.)
« Les 2 ou 300 brigands employés dans ces occasions majeures entouraient la salle et y faisaient même retentir le cri : A la lanterne.'.... »
Plusieurs membres à droite; C'est vrai!
« .... Nuus y avons souri dédaigneusement, et demandé qu'on ne s'occupât pas de ces vaines clameurs. Point de vrai et bon peuple autour de la salle, pas le moindre mouvement dans Paris contre nous, et l'estime publique nous a suivis dans nos retraites. »
Plusieurs membres à gauche ; Ce n'est pas vrai I
« Le roi est prié de faire nommer à nos places. Il est curieux d'observer que ce décret fait pour introduire le schisme en France, s'il est exécuté, a été rendu sous la présidence du fils d'un juif et sur la motion d'un protestant. »
Plusieurs membres à droite : C'est vrai l
« ....Jenepuis vousrendre mille détails qui seraient mtéiessants, mais le temps me manque; voilà l'essentiel. Nous avons soutenu la première attaque d'une manière digne du devoir que nous avions à remplir ; nous soutiendrons de même toutes les épreuves jusqu'à ia dernière, si l'on ose y aller. Ce n'est pas de notre côté qu'est la crainte et l'embarras : nous les laissons à ceux qui n'écoutent pas leur conscience, et qui ne suivent pus les principes. Nous pleurons sur 98 de nos confrères trompés ou entrai.iés ; c'est beaucoup sur 268 que nous sommes; mais une grande majorité nuus reste. L'évêque d'Autun est seul, nous ne comptons pas l'évêque deLydda, éiran-ger, et qui a mis des restrictions qu'on a laissé passer, parce qu'il siège du côté gauche. (Rires à droite.)
« .... Vous pouvezmontrer ma lettre, je necrains jamais quand j'écris, parce que la vérité est mon guide, et il est essentiel qu'elle soit connue sur cette fameuse séance.
« P. S. J'apprends dans le moment que 12 ou 15 ecclésiastiques de l'Assemblée ont retiré leur serment, et on assure que plusiéurs auires suivront cet exemple.
Signé : H. de Béthizy, évêque d'Uzès. »
Des rixes avaient été le résultat de ces écrits.
Ces rixes avaient été selon le plan que le maire de Nîmes a cherché à accréditer, présentées comme l'effet de la haine des protestants contre les catholiques et elles occasionnèrent lundi 14 du courant, un rassemblement non de catholiques, mais d'une grande partie des citoyens égarés et connus par leur opposition à la Constitution qui se forma sur la place de l'évêché ; les patriotes menacés se rassemblèrent sur la place de l'esplanade ; l'e-cadron des dragons de Lorraine, en garnison à Uzès, fut requis de monter à cheval pour faire cesser les attroupements dangereux. Les chevaux d'une partie de cette troupe étaient renfermés dans les écuries de l'évêché ; les dragons y accoururent pour les prendre; mais les factieux postés dans cette maison ou sur la place, s'y op-posèient et tirèrent sur les dragons; un coup de teu cassa l'épaule à l'un d'eux, et un autre reçut dans les entrailles un coup de baïonnette qui mit sa vie en danger. Des lettres particulières disent qu'il est mort; les mutins qui s'étaient emparés des tours de la cathédrale et de la place de l'évêché, montèrent au clocher et sonnèrent le tocsin, les gardes nationales oes villages voisins accoururent, la loi martiale fut publiée, elle ne produisit aucun effet; mais le district ayant réussi à faire un rassemblement de forces capables d'en imposer, les séditieux se voyant inférieurs en nombre, abandonnèrent les 'postes où ils s'étaient portés, en publiant qu'ils allaient au-devant d'un secours qui leur arrivait du camp de Jalès.
Cependant on avait expédié des courriers au directeur du département séant à Nîmes et à M. d'Albignac, commandant pour le roi dans le département au Gard. Ils firent marcher tout de suite 232 hommes du régiment de ûauphiné et 30 dragons de celui de Lorraine.
La garde nationale de Nîmes offrit son secours avec tant de zèle, qu'il eût été difficile de la contenir, sans la bonue discipline et l'esprit de subordination qui règne dans cette troupe de citoyens soldats, ils déclarèrent qu'ils étaient tous prêts à partir lorsqu'ils en seraient légalement requis. D'après ces offres généreuses, le directoire du département arrêta de requérir 150 hommes pour se rendre, s'il en était besoin, au pont Saint-Nicolas, distant d'Uzès d'une lieue, et d'y attendre des ordres pour agir, et délibéra d'y taire partir deux commissaires pour prendre tous les renseignements nécessaires à l'effet de découvrir les auteurs et les instigations de tant de désordres qui se renouvellent si souvent.
Les nouvelles qu'on reçut, suspendirent le départ des gardes nationales de Nîmes.
Nous vous observons, Messieurs, que le courrier d'Uzès qui devait nous apporter dimanche et lundi des lettres n'est point arrivé, que c'est par celui de Nîmes que nous avons reçu ces premiers avis; mais ils n'en sont pas moins certains, puisque nous avons des lettres du département du Gard, et copie d'une lettre du district d'Uzès écrite à ce corps administratif. Nous ignorons encore le nombre des blessés, la lettre du directoire du district d'Uzès fait mention d'un homme tué, nous avons lieu de croire que le nombre n'est pas plus considérable.
La réunion de tous les citoyens d'Uzès, sans distinction de religion contre les factieux, a arrêté l'effusion du sang, et nous regar Jerions cette affaire comme terminée sans les espérances que les mal intentionnés ont montrées de recevoir un secours du camp de Jalès. Un renfort de troupes dans le département est nécessaire pour faire
évanouir ce criminel espoir et pour rassurer entièrement les bous citoyens. Geite mesure vous est indiquée dans le projet de décret que vos comités des rapports et des recherchas vous ont présenté à la suite du compte qu'ils vous ont rendu des troubles de Nîmes. Le délai prudent qi e vous avez cru devoir mettre au rapport de l'affaire de Nîmes adonné de l'audace aux factieux. Le jugement que vous prononcerez va la leur faire perdre. Leurs tentatives impuissantes les auraient déjà découragés sans les instigations perfides qu'ils reçoivent d'ici môme et auxquelles votre décret va sans doute ôter tout crédit.
Je demande, Monsieur le président, que ces différentes pièces soient renvoyées aux comités des rapports et des recherches réunis pour en faire le rapport demain à l'ouverture de la séance.
(de Saint-Jean-d'Angèly), Je vous prie de considérer, Messieurs, que dans un moment où les mouvements sont violents, la seule nouvelle de l'envoi d'une force imposante dans le département du Gard peut empêcher les funestes effets des rassemblements qui ont lieu dans ce pays. Le moindre retard peut occasionner les plus grands malheurs; une heure perdue peut coûter la vie à plusieurs de nos frères et de nos concitoyens.
Je demande que M. le président soit chargé de se retirer sur-le-champ par devers le roi, pour le prier de donner des ordres nécessaires pour faire passer dans le département du Gard lés troupes nécessaires pour rétablir l'ordre.
(L'Assemblée décrète la motion de M. Regnaud et ordonne le renvoi aux comités des rapports et des recherchés réunis, pour en faire le rapport demain, des pièces déposées par M. Youiland.)
lève la séance à 3 heures.
PRÉSIDENCE DE M. DUPORT.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Un de MM. les secrétaires donne lecture des adresses suivantes :
Adresses contenant la prestation du serment civique prêté par des fonctionnaires publics ecclésiastiques.
Adresses de gardes nationales qui se sont engagées avec serment de se porter sur les frontières, du moment qu'elles seront informées qu'elles sont menacées de quelque invasion.
Adresse des juges du tribunal du- district de Saint-Pons, départementde l'Hérault, qui, dès les premiers moments de leur installation, présentent à l'Assemblée nationale l'hommage d'une respectueuse reconnaissance et d'un dévouement absolu.
Adresse du directoire de Dijon, contenant une délibération de la huitième compagnie du second bataillon de la garde nationale de Dijon, par laquelle elle offre des services extraordinaires pour remplacer les volontaires, qui, dévoués au main-
tien de la Constitution, ont renouvelé leur serment de voler sur les frontières au-devant de nos ennemis, dans le cas où ils tenteraient une contre-révolution.
Adresse de la société des amis de la Constitution établie à Autun, qui expose que le principal moyen de dissiper tous les orages qui se forment autour de nous, serait de supplier le roi de faire connaître, par le manifeste le plus authentique, aux puissances voisines, ses véritables sentiments.
Adresse de la commune de Plassac en Blayai-s, qui annonce que sou curé n'a pris aucune part à la déclaration de plusieurs ecclésiastiques du Blayais, contre le serment civique, et qu'il s'est empressé de prêter le serment selon les formes prescrites.
Adresse de la municipalité de Châtillon-sur-Seine, qui annonce que tous les fonctionnaires publics de cette ville ont prêté le serment civique; elle fait hommage à l'Assemblée d'une délibération imprimée, qu'elle a faite pour repousser un écrit incendiaire répandu sous le nom de l'évêque de Langres.
Adresses des curés et vicaires du canton d'As-pres-les-Vignes, district de Serre, département des Hautes-Alpes, du curé de Notre-Dame-des-Trois-Moutiers, au district de Loudun, qui expriment une admiration respectueuse pour la Constitution civile du clergé, et qui se sont empressés de prêter le serment civique.
Adresse du maire de Ghampeuil, département de Seine-et-Oise, qui fait hommage à l'Assemblée du discours imprimé, prononcé par le curé de cette paroisse, lors de la bénédiction du drapeau de la garde nationale.
Adresse du maire de Vergigny, près Saint-Florentin, qui présente le discours imprimé, prononcé par le curé de la paroisse, lors de la prestation de son serment.
donne lecture à l'Assemblée d'une lettre des administrateurs du département du Doubs, par laquelle ils font part de l'élection faite, le 14 de Ce mois, de la personne de M. Seguin, ci-devant chanoine de l'église métropolitaine de Besançon, et président au département du Doubs, à l'évêché métropolitain de ce département. (.Applaudissements.)
fait part à l'Assemblée que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics, et autres non fonctionnaires, ont prêté le serment civique dans le district de Ëriançon, département des Hautes-Alpes.
Avant de passer à l'ordre du jour, je dois rendre compte à l'Assemblée que, conformément aux ordres qu'elle m'a donnés, je me suis transporté chez le roi; je lui ai mis sous les yeux la lettre des administrateurs du département du Gard et le décret que l'Assemblée a rendu ce matin.
Le roi m'a fait connaître qu'il allait, en conséquence du décret de l'Assemblée, donner les ordres nécessaires pour faire passer dans le département du Gara des forces suffisantes capables de réprimer les efforts des malveillants.
L'ordre du jour est la discussion de l'affaire de Mines (1).
La discussion va s'ouvrir sur l'affaire de Nîmes. J'observerai, à cet égard, que, par un décret en date du 11 mai 1790, l'Assemblée nationale a mandé M. de Marguerittes à la barre pour rendre compte de sa conduite et de celle de la municipalité.
Toutefois, pour ne pas suspendre l'exercice du droit qu'a chaque représentant de la nation d'en stipuler les intérêts dans l'Assemblée, l'Assemblée décréta, le 17 du même mois, qu'elle autorisait M. de Marguerittes à reprendre sa place, sauf, au moment où elle s'occuperait du rapport du comité des recherches sur l'affaire de Nîmes/à l'appeler de nouveau à la barre pour répondre aux demandes qui pourraient lui être faites au bom de l'Assemblée.
Aux termes de ce décret, je demande à M. de Marguerittes, maire de Nîmes et membre de l'Assemblée nationale, qui a demandé le premier la parole, de déclarer s'il entend opiner comme député ou parler comme maire de Nîmes
C'est comme maire de Nîmes que je demande la parole, non pour me justifier ni trois de mes collègues, mais pour mettre sous les yeux des représentants de la nation de grandes et de terribles vérités et défendre mes concitoyens opprimés.
Dans ces conditions, j'invite M. de Marguerittes à se rendre à la barre.
(1), à la barre. Messieurs, là municipalité de Nîmes a été inculpée dans le rapport de vos comités; je dois la justifier à vos yeux et me justifier moi-même; ces deux devoirs sont également sacrés pour moi. J'ai contracté cet engagement solennel mais pénible, puisqu'il me contraint à divulguer les torts de plusieurs de mes concitoyens. Cependant, je ne perdrai pas de vue que les officiers municipaux sont les pères communs et que, ioin d'aggraver les fautes, ils doivent chercher à les pallier, à les excuser même, sans nuire toutefois à ce qu'ils doivent à la justice et à la vérité.
Je dirai tout ce que je croirai nécessaire pour repousser les
inculpations que l'on s'est permises contre des magistrats intègres. Je
réparerai le silence de M. le rapporteur sur 32 pièces essentielles dont
il n'a pas cru devoir faire mention. Je tâcherai de faire connaître ce
qui a produit les excès incroyables et les atrocités commises dans la
ville de Nîmes, Je mettrai l'Assemblée dans le cas de discerner le degré
de conliance que méritent quelques citoyens avides de domination, qui se
sont décorés desputiquement du titre d'amis de la Constitution, comme si
tous ceux qui ne sont pas compris dans leur agrégation doivent être
regardés comme les ennemis de cette même Con titution. Forts d'une
approbation surprise, enorgueillis du décret qui a mandé le maire de
Nimtsà la barre, fiers de leur impunité et d'une information dans
laquelle On n'a pas Voulu faire entendre aucun des nombreux témoins qui
doivent constater les entreprises très répréhensibles du mois de mai et
les assassinats, pillages et dévastations du mois de juin; ils osent
appeler indifféremment crime ou vertu, trahison ou patriotisme, tout ce
qui blesse eu favorise leurs intérêts. Us osent proposer de traiter en
coupables, et des magistrats qu'ils ont
Ah 1 sans doute, lorsqu'une grande puissance intervient au nom de la Constitution et de la liberté, ce ne doit être que pour calmer les esprits, désarmer les oppresseurs, rendre la paix, la vie et la liberté aux oppripaés, prévenir en un mot tous les malheurs, et non pour... Mais n'anticipons pas sur le récit des cruels événements qui ont déshonoré et obscurci l'aurore de là liberté dans ma patrie.
Quant à moi, Messieurs, que des folliculaires ont traduit aux yeux de la France entière comme l'auteur des excès que je n'ai cessé de prévenir par ma présence ou d'arrêter en exposant mes jours, je trouverai sans peine la réponse, à tant de calomnies, dans le simple exposé des faits, appuyé de pièces justificatives. Les preuves réitérées de 1 amour et de la reconnaissance de 40,000 de mes concitoyens, la paix et la concorde que j'avais rétablies dans ma patrie, la réconciliation des soldats de Guyenne et des habitants : voilà des faits positifs contre lesquels viendront se brjser 1 s efforts des malveillants et des calomniateurs.
Quant à mes principes, ils ont été et seront toujours les mêmes. Donner, comme citoyen, comme représentant de la nation, l'exemple de l'obéissance à la loi ; comme magistrat, la faire exécuter ponctuellement : telle est ma profession de foi. J'ai toujours pensé qu'on pouvait être à la fois sage, conciliant et bon patriote ;. ennemi de la licence qui se permet tout et ami de celte liberté précieuse qui ne peut, dans une grande monarchie, subsister sans ordre, sans pouvoir exécutif suprême, investi de la plus grande autorité, sans respect pour la loi et sans subordination; j'ai pensé que l'on pouvait être partisan de la juStiGH et d'une égalité bienfaisante en faveur du mérite et des talents, mais foitement opposé aux intrigues, aux insurrections et à tous ces moyens imaginés pour tromper sut ses véritables intérêts un peuple franc, sensible, bon et généreux, aujourd'hui l'instrument des factieux, demain leur victime.
Obligé de mettre de l'ordre dans cette discussion, je diviserai mon opinion en quatre parties.
Je démontrerai d'abord la partialité de l'information et la nécessité de renvoyer la cause à un tribunal étranger au département du Gard.
J'établirai ensuite la fausseté de certains faits
allégués contre le maire et les officiers municipaux de Nîmes; je tâcherai d'êtré précis; mais, souvent, pouf repousser une calomnie de quelques lignes, il faut de longs détails (1) et une discussion fort étendue.
J'exposerai en troisième lieu tout ce qui a précédé et accompagné les événements du mois de mai, les seuls qui puissent me concerner.
Enfin je retracerai les horreurs des fatales journées des 13, 14, 15 et 16 juin, et je prouverai, par le résumé des faits, où l'on doit chercher les vrais coupables.
PREMIÈRE PARTIE.
Sur l'information et le remoi à un tribunal étranger aù département du Gard*
Il est, Messieurs, Un reproche général que j'ai à faire contre le rapport de vos comités\ ses assertions né sont fondées que sur un commencement d'information qui n'a pas été communiqué aux accusés, qui ne porte aucun caractère certain aux yeux de la justice puisqu'elle ne .contient que les dispositions d'un Seul parti; d'ailleurs, d'acres l'ancien et Iè nouvel ordre de choses, utië information est incomplète, et improbante jusqu'après le récoléirient des témoins et leur confrontation aux accusés, qui doivent les connaître pour pouvoir léS récuser. Il est constant, aussi, qué plusieurs membres du club ont été à la fois dénonciateurs (2.)'et témoins; et Ce reproche est bien autrement important que celui fait aux procès-verbaux i envoyés par la municipalité de ne pas contenir les interpellations d'usage. Cet Oubli a paru sufBsant à M. le rapporteur pour mettre de côté tous ces procès-verbaux, et cependant on sait que les officiers municipaux né peuvent pa§ procéder sous d'autres formés et qu'un verbal à toujours suffi eu justice pour constater un fait. Ainsi, si d'un côté les verbaux sont regardés Comme non-aVer nus, de l'autre, le rapport n'a d'autre fonde-rhent qu'une procédure informe et incomplète, et dès lors, ce qui est avaqcé par lé comité ou par la municipalité, ne doit être regardé que comme un plaidoyer respectif et ne peut fournir matière a un jugement qui doit avoir pour base des preuves complètes et des pièces légales. Il faut donc renvoyer à un autre tribunal.
L'Assemblée l'a déjà préjugé ainsi en refusant la lecture de l'information faite à Montauban, par la raison, disait M. Viellard, rapporteur: « que ce n'estjpas dans une ville où l'esprit de « parti s'est si violemment manifesté, qu'on « peut se flatter que les informations aient été « faites avec impartialité. » Il fut en conséquence décrété, malgré les efforts de M. de Ca-zalès, que l'information commencée devant les juges de Montauban relativement aux troubles arrivés dans cette ville, demeurerait comme non-avenue, et qu'il n'ep serait pas même fait lecture à l'Assemblée.
Il est une observation, plus décisive encore relativement à l'information
faite a Nîmes.
Le 13, le procureur de la commune est chargé par le conseil général de dénoncer au procureur dil roi : « que des factieux projetèrent, vers la « fin d'avril, d'exciter une querelle entre des « citoyens, des bas officiers et soldats du régi» « ment de Guyenne, sous prétexte d'arracher à « dés volontaires des cocardes blanches qu'ils, « avaient toujours portées depuis la formation de * la légion. »
« Que quelques bas officiers et soldats de ce ré-« giment, malheureusement séduits, se livrèrent, « le sabre à la maio, ce qui eut lieu le dimanche « 1- mai, sur Je grand cours, vers les 6 heures « du soir;
« Qu'au moment où l'action fut engagée on « tâcha d'attirer le régiment dans la querelle en « invitant les soldats à sortir des casernes et de « la citadelle pour voler au secours de leurs « camarades et de les rendre ainsi complices, a « leur insu, du massacre projeté;
« Que de3 conspirateurs, postés dans les envi-« rons et arihés, attendaient l'instant favorable « pour se mêler parmi eux et envelopper, dans « le massacre, tous ceux dont ils voulaient se « défaire;
« Que, comptant sur^ des secours étrangers, « sollicités et promis, ils auraient, sans doute, « porté leurs excès plus loin, si la vigilance des « officiers municipaux, la fermeté et la prudence « de MM. les officiers du régiment de Guyenne « n'avaient pas arrêté les progrès de l'insurrec-« tion et si le corps du régiment, loin de se « laisser entraîner, n'avait témoigné son iadi-« gnation et n'avait promist avec serment, de « livrer les coupables ;
« Que le .,3 maii une nquvelle émeute éclata « sur la place des Récollefs, alarma de nouveau les citoyens et que les officiers municipaux « s'y étant transportés pqur faire oesser le dé-« sordre, un particulier tira, deux coups de pis-c toi et sur le groupe où ils étaient;
« Que, pendant ces deux jours, des particuliers « criaient dans les rues que c'était le moment « de couper la tête du maire §t de la promener « par la ville au bout d'une baïonnette;
« A cet effet,.M. le procureur de la commune « est chargé de se retirer devers M. le proçu-« reur du roi ep la sénéchaussée et siège prési-« dial de Nîmes pour lui remettre un extrait de « la présente dénonciation, de le requérir d'ad-« ministrer en témoins toutes les personnes qui « pourront avoir connaissance des faits ci-des-« sus, circonstances et dépendances, lesquelles « personnes lui seront indiquée* par ledit pro-« cureur de la commune. Ce dernier est chargé « encore de lui fournir toutes les pièces et mé-« moires nécessaires pour la conviction des cou-« pables;
«Délibéré, en outre, que la présente sera im-« primée, que des extraits en seront envoyés à « : l'Assemblée nationale et au roi. »
Il semblait que le devoir du procureur du roi était d'accueillir, avec l'impartialité (lé son ministère* la dénonciation du conseil général ; mais il demande d'abord line autorisation du commissaire départi, en exécution de la déclaration du î octobre 1703; il veut, de plus, que le procureur de la commune se soumette formellement
à la garantie : l'unique but de ces difficultés était d'écarter la plainte. D'après ce refus, on lui fait signifier un acte; il réitère les mêmes difficultés. Ori s'adresse de part et d'autre à M. le garde des sceaux; la réponse du chef de la justice détruit les minutieuses objections du procureur du roi ; on y trouve ces paroles remarquables : « Il « est des occasions, rares à la vérité, où il vaut « mieux fermer les yeux sur les désordres que « de risquer d'accroître le mal en travaillant à « ie réprimer; peut-être eût-il été désirable de « n'entamer aucune procédure; ces considéra-« tions ne vous ont sûrement pas échappé; vous « aviez balancé les avantages et les inconvé-« nients d'une information lorsque vous avez « rendu votre première plainte, et je vois, par « votre dernière lettre, que vous venez d'en « rendre une nouvelle : l'existence de ces deux « plaintes, l'instruction à laquelle elles vont « donner lieu, paraissent exiger que vous sui-« viez également, et avec l'impartialité de votre « ministère, sur la dénonciation des officiers « municipaux, etc. »
Forcé dans ses derniers retranchements, le procureur du roi fait assigner 21 témoins; 2 seulement sont entendus. D'après le délai qui s'était écoulé, d'après la considération importante que le conseil général de la commune n avait jamais entendu s'ériger en poursuivant, ni devenir partie contre des concitoyens, mais seulement indiquer au ministère public un délit royal et patent, et l'aider à connaître les auteurs, fauteurs et participes, conformément à l'usage observé dans tous les temps par le bureau de police de Nîmes, relativement aux délits qui venaient à sa connaissance et qui se trouvaient de la compétence du présidial, le conseil général de la commune délibère en conséquence le 9 juin et adresse un extrait de sa délibération à M. le garde des sceaux.
Instruit de cette délibération, le procureur du roi fait suspendre l'audition des témoins indiqués par la municipalité et continue avec zèle l'information contraire. Les tristes événements du mois de juin ayant occasionné, le 17 du même mois, un décret qui charge le présidial de Nîmes d'informer sur les troubles des mois de mai et juin, circonstances et dépendances, ie procureur du roi laisse toujours de côté ies excès et les témoins indiqués par le conseil général et ne fait entendre que ceux du parti contraire et leurs adhérents; cependant, ils faisaient partie des circonstances et dépendances. Il est résulté de cette partialité que 14 catholiques ont été décrétés de prise de corps, tandis qu'il n'y a pas eu un témoin d'entendu, pas une information de faite contre aucun des protestants qui ont assassiné 300 catholiques ; bien plus, malgré des actes réitérés depuis 7 mois, des accusés n'ont pu être admis à leurs faits justificatifs; d'autres à prêter leur premier interrogatoire (1); des veuves et des orphelins n'ont pu faire accueillir leurs plaintes; les actes de déni de justice adressés à l'Assemblée sont déposés depuis plusieurs mois au comité des recherches qui n'a donné aucun ordre relatif, et M. le rapporteur n'a pas cru devoir en faire mention.
Cependant, les sieurs Folacher, Descombiès et
Mais qu'elle soit partiale ou non, n'est-il pas au moins évident que,
plus les charges obtenues contre les accusés étaient graves, plus ils
avaient intérêt de les affaiblir, plus la justice devait, pomme servir
des expressions de vos comités de constitution militaire parlant par
l'organe de M. Rabaud, s'incliner pour accueillir l'infortuné et tendre
la main aux opprimés, plus la justice devait leur prêter son secours
pour établir et assurer leurs moyens de défense. Cependant, le sieur
Folacher est détenu depuis plus de cinq mois dans une prison empruntée
hors du déparlement ; il n'a pas prêté encore son premier
interroga-loire, malgré deux actes signifiés à M. le procureur du roi,
pour qu'il eût à le faire traduire dans les prisons de Nîmes (1). Le
sieur Descombiès languit depuis plus de six mois dans les fers, et quand
la plus grande célérité a été apportée dans les moyens d'amener sa
détention, il ne peut obtenir depuis le 23 août d'être écouté, lorsqu'il
travaille à recouvrer sa liberté; les suppôts de la justice intimidés ou
menacés ont refusé de signifier aux magistrats les actes de déni de
justice. Le sieur Vimont, avocat de l'accusé, a bravé pour défendre son
client les fureurs des factieux; il a fait lui-même (2) les fonctions
d'huissier et a pris sur lui de presser judiciairement la lenteur
partiale des magistrats, le désistement de quelques-uns et un peu plus
de liberté pour les huissiers; voilà tout le fruit de cet acte de
persévérance; en sorte que ce qui a été fait pour l'accusé a précisément
tourné contre lui; cependant, que demandait-il? l'exécution de la loi,
de la plus sage de vos lois, de cette loi, l'objet de votre empressement
et de vos plus chères espérances, de cette loi bienfaisante qui,
réformant ce que notre ancien Gode avait de révoltant, a voulu que la
justification de l'accusé marchât de pair avec son accusation. Que
demandait le sieur Descombiès? La permission de prouver son innocence;
et cette permission, il n'a pu l'obtenir, et cette demande a été rendue
inutile par une coupable morosité; et quand on s'est trouvé forcé de
prononcer ou d'agir, on l'a rendue sans effet par des désistements
successifs et par de3 chicanes de forme, et cependant la captivité des
prisonniers s'est toujours prolongée, et cependant on a toujours entendu
des témoins administrés par le parti dominant, en même temps que l'on
rejetait les plaintes des opprimés. Eh! comment a-t-on pu continuer les
informations dans une ville où un parti s'est rendu redoutable en
usurpant toute l'autorité, en s'emparant de toutes les armes, de toutes
les munitions, en faisant fondre (3) plus de 500,000 balles et ayant
80,000 cartouches à sa disposition? dans une ville où le procureur du
roi a rejeté les plaintes des veuves Gas, Deymond, Bouzanquetet Guiraud,
et de tant d'autres dont on a massacré les maris, de tant de fils
infortunés dont on a massacré les pères ; dans une ville où l'on a forcé
les portes des prisons, ces asiles sacrés du malheur, pour maltraiter un
La raison le veut : car dans une ville où subsistent deux partis aigris, où celui qui est opprimé est contraint de courber son front humilié sous le sceptre de fer de l'oppresseur, les témoins entendus, les juges qui les entendent partagent presque nécessairement la prévention, ou la haine, ou la crainte.
Les opprimés se plaignent qu'on n'a voulu appeler en témoignage que les membres du club ou les personnes qui lui sont attachées.
Les oppresseurs trouvent le plus grand danger (pour eux sans doute) que l'on fasse déposer aucun de ceux qui ont signé les délibérations des catholiques, c'est-à-dire le plus grand nombre des citoyens actifs.
La justice veut pourtant que lorsqu'il s'agit de suivre les traces du crime, et surtout de ces crimes atroces et multipliés dont la ville de Nîmes a été le théâtre, ceux-là soient appelés en témoignage qui sont appelés à jeter du jour sur les faits, et ceux-là (quelle que soit à leur égard l'opinion du moment) sont témoins nécessaires. Il faut donc qu'ils puissent être entendus ; ils doivent l'être à la diligence de l'officier chargé de l'accusation publique; mais peuvent-ils être entendus au milieu des troubles et des menaces, sous les yeux de gens intéressés à leur fermer la bouche, parce qu'ils ont constamment refusé d'accueillir leurs plaintes, quoique la justice et le décret du 17 juin leur en fissent un devoir impérieux? Ce décret ordonne d'informer sur les troubles arrivés à Nîmes, LES CIRCONSTANCES ET DÉPENDANCES. Peuvent-ils être entendus par des juges qui, devenus en quelque sorte parties intéressées dans l'affaire par leur déni de justice, ne peuvent voir qu'à travers le nuage de la prévention ?
D'ailleurs, dans le choc d'opinions, n'est-il pas à craindre que des
témoins alarmés ne s'éloignent ou ne se taisent, et, ce qui serait plus
fâcheux encore, que d'autres ne se laissent arracher, par fai-
N'est-il pas à craindre que les juges, froissés entre les deux partis, ou cèdent à celui qui domine, ou regardent comme un grand effort de courage l'abdication de leurs fonctions ?
Et voilà précisément ce qui vient d'arriver à Nîmes.
Plusieurs magistrats du nouveau tribunal, placés entre l'alternative de violer leurs devoirs ou de s'exposer aux fureurs des factieux, ont fini par délaisser l'instruction et par déclarer qu'ils s'abstenaient ; d'autres ont paru ne chercher des preuves que d'un côté, et ont repoussé, par de vaines chicanes, celles qui étaient offertes et indiquées par l'autre.
Cependant la justice veut essentiellement que les accusés aient le droit de se défendre, elle veut que leur sûreté soit complète, leur tranquillité absolue, pendant le cours de l'instruction qui doit faire éclater leur innocence ou manifester leurs crimes.
Jusqu'au jugement, ils sont citoyens ; la détention qui enchaîne leur liberté n'est-elle pas déjà un mal assez grand? Faut-il qu'elle devienne le prétexte d'une nouvelle vexation, ou le moyen d'intercepter leurs cris, et de les réduire à l'impossibilité de se défendre?
Ces vérités sont sensibles; elles sont dans le cœur de tous les membres de cette Assemblée ; c'est sur elle que se fonde la demande des prisonniers, des veuves, des orphelins et des officiers municipaux de Ntmes. Je parle à des législateurs, et ils ne souffriront pas que la loi sacrée qui protège l'accusé, méconnue à Nîmes depuis six mois, soit plus longtemps, soit impunémeut outragée.
Je parle à des hommes et ils ne seront pas insensibles aux cris déchirants des veuves et des orphelins.
Hélas 1 depuis huit mois, ces infortunés n'ont pu faire constater encore, ni la perte de leurs médiocres propriétés, ni faire décréter les assassins de leurs pères et de leurs époux, ni obtenir, . au moins, que si les barbares ne payent pas de leurs têtes, ils payent au moins de leurs fortunes les dévastations et les pillages dont ils seront prouvés les auteurs. Pour épargner de nouveaux crimes, ces familles honnêtes se sont expatriées ; elles gémissent moins des cruautés inouïes dont elles ont été l'objet que des calomnies répandues sur leur compte. Après avoir fait périr plus de 200 citoyens, qui n'avaient pris aucune part aux troubles, ni aux combats, on les poursuit avec acharnement jusque dans le sein des tombeaux; on voudrait massacrer leur honneur comme on a massacré leur corps ; on leur prête des projets de contre-révolution et de guerre civile; on intercepte tous leurs moyens de justification, «t le directoire du département du Gard annonce tranquillement que la cause du patriotisme est justifiée et que la preuve des attentats est suffisamment acquise. Et cependant, le sieur Fajon, ancien lieutenant criminel, lui qui a fait l'information incomplète que l'on oppose aux opprimés, et dans laquelle on ne découvre pas la moindrre trace des vols, des assassinats commis à main armée par des soi-disant patriotes sur plus de quatre cents catholiques, le sieur Fajon est forcé lui-môme de rendre hommage à la vérité, dans le discours qu'il a prononcé comme président du nouveau tribunal.
« Le patriotisme, dit-il. a ses excès ; il a son « fanatisme comme la religion ; ils peuvent l'un « et l'autre porter à des violences, à des attentats,
« à des meurtres : ah ! cetle idée me rappelle les « malheurs de notre ville. »
Le sieur Fajon déclare bien authentiquement que ceux qu'on np elle dans Nimes patriotes se sont portés à des violences, à des attentats, à des meurtres ; et cependant, depuis huit moin, aucun témoin d'en te n au, aucune information pour connaître les patriotes auteurs de ces violences, dé ces attentats, de ces meurtres. Non, Messieurs, non, vous ne souffrirez pas qu'une pareille injustice souille plus longtemps le règne de la liberté, de cette liberté, objet de vos vœux et de vos espérances. Quoi donc! La liberté, cette plante vivace et bienfaisante que les soins et les travaux des Français ont si heureusement fécondée dans le nouveau monde, ne serait-elle pour les habitants de Nîmes qu'une plante fatalequi n'y pût croître qu'au milieu des tombeaux, sur des monceaux de cendres, arrosée du sang de m« s infortunés c.mcitoyens et abreuvée des larmes des veuves et des rphelins rédoits à la misère, aux larmes, au désespoir et au silehce? Car, on voudrait leur enlever la dernière consolation du malheureux, le triste droit d'élever une voix plaintive, et de# réclamer auprès des représentants de la nation, avec une confiance qui ne sera pas trompée, sans douie, la justice et l'impartialité qu'on leur a constamment refusées dans leur patrie.
Oserait-on mettre en avant, pour justifier tant d'atrocité, le prétexte imposant de servir une Constitution qu'on déshonore? M. Thouret vous l'a annoncé, la Constitution est déshonorée, si le rétablissement de Vordre n'est pas son propre ouvrage. Présentez donc au peuple ce grand bienfait. On a dit souvent, et avec raison, que son salut était la suprême loi. 11 est temps de lui apprendre, pour son propre intérêt, que la tranquil-liié put lique, fruit de la justice, mais d'une justice sévère, est le suprême bien. Que le grand nombre des coupables ne soit donc pas un motif toujours efficace pour leur assurer l'impunité: car autrement, on multiplierait les forfaits, on entasserait les victimes, pour arracher une amnistie. Cette impunité dont on jouirait augmenterait l'audace des factieux et finirait par épuiser la patience des opprimés, car c'est un terme à toutes 1 s vertus.
L'intérêt de la Constitution qui ne peut s'achever qu'au sein de la justice et de la paix, exige donc impérieusement qu'une fausse pitié, une clémence mal entendue ne suspende pas plus longtemps le glaive de la loi. Ne souffrez pas gue des attentats aussi atroces que multipliés aient souillé impunément cette Révolution, l'objet de votre amour et de votre vénération. Ah 1 Messieurs, voilà ce que des législateurs doivent appeler unanimement le plus saint des devoirs.
J'ajoute encore : lors même que les victimes auraient été coupables, leurs assassins n'en seraient pas moins criminels; ils ont violé à la fois la justice, vos décrets et l'humanité.
Hâtez-vous, Messieurs, de confier à des juges libres et impartiaux et de fixer dans une ville désintéressée, l'instruction de tous les délits sans aucune exception dont il importe à la société qu'on acquière la preuve. La procédure déjà commencée éclairera ce tribunal de votre choix, les témoins, loin des cris de la haine» t delà prévention, parleront librement le langage de la vérité; ils déclareront ce qu'ils ont vu ; ils seront confrontés avec les accusés qui, sûrs d'être écoutés dans leur défense, jetteront, par la discussion, un nouveau jour sur les preuves; les injustices
que l'intrigue, les circonstances, l'aigreur des esprits ont amenées seront réparées, les auteurs des crimes seront connus et le jugement qui interviendra sera d'autant plus imposant que votre sagesse aura écarté d'avance toutes les objections que l'animosité aurait formées de part et d'autre contre lui, dans le foyer de la division. En voilà sans doute assez pour établir la nécessité d'un renvoi à un autre tribunal et pour prouver le degré de confiance que les législateurs doivent à une information incomplète et partiale (1).
SECONDE PARTIE.
Réponse aux reproches faits à la municipalité, soit dans le rapport, soit dans Vadresse du club.
Le plus important de tous est la substitution de la cocarde blanche à la cocarde nationale, faite suivant le club, le 18 avril, tandis que le contraire résulte de la notoriété publique, delà déposition d'une foule de témoins, du témoignage unanime des représentants de la commune, mais surtout du certificat original de 60 officiers de la légion qui attestent que la cocarde blanche n'a donné lieu à aucune réclamation jusqu'au
2 mai, qu'elle n'avait jamais excité ni plaintes ni murmures et que l'on portait indistinctement la cocarde blanche ou la cocarde aux trois couleurs. Il est donc bien évident que les cocardes blanches qui ont servi de prétexte aux malveillants n'ont pas été la cause des mouvements excités les 2 et
3 mai, puisque cette cocarde a été arborée à Nlrhes, en novembre 1788,
comme le signal du patrio-tisme et de la liberté; puisqu'en août 1789,
époque de la formation de la légion, des volontaires arborèrent la
cocarde blanche, puisque les dragons l'ont portée assez longtemps et
puisque
L'Ass* mblée a ferâarqdé sans doute la perfidie du mot substituèrent, qui semble indiquer que' réellement quelques légionnaires ôtèrent là cocarde nationale pour prendre une cocarde blàti-che; mais il est avéré que plusieurs compagnies de la légion n'ont jamais poiHé que des Cocardes b'anches depuis leur formation; et j'ajoute que plusieurs membres du élu.b, qui composaient l'anGien conseil permanen t et avaient en cette qualité la direction de la légion, OBt tolérépendant plusieurs mois, lorsqu'on montait la garde. en leur présence à Vhôtel d.é ville, qUe ces mômeé compagnies portassent la cocarde blanche, et ce fait esf positif. Qu'eh conclure ? Rien de contraire au zèle patriotique des membres du conseil permanent, parce qu'il était assez indifférent dans Nîmes de porter une cocarde bu dé n'en pas porter, de la porter blanche OU aux couleurs de la nation, parce que les Unes et les autres étaient également le Signal des patriotes, parce qu'on ne faisait aucune distinction, le me garderai donc bien d'appliquer au éonseil permanent la réflexion qui suit ce paragraphe calomnieux.
Notre municipalité (dit le club) témoin Comme nous (ils l'avaient ïoul'fert pendant Six mois) de cet acte séditieux et ne pourtant en ignorer tout le danger, au lieu d'arrêter le mal dans sa source...
L'Assamblée n'a pas oublié, sans douté, tjuë la source des cocarlës blanches remontait ënr 00-vembre 1788, ënsuité au mois d'août 1789, c'est-à-dire huit mois avant la formation dè la nouvelle municipalité et sous le règne du conseil permanent.
Il ne doit rester aux esprits impartiaux, d'après cette explication, aucun doute sur la conduite ne la municipalité, que M. le rapporteur Vous à annoncée comme répréhensible d'avoir laissé arborer à Nîmes la cocarde blanche, et sur les intentions pures des citoyens de Nîmes qui la portaient.
Mais, vous a dit M. le rapporteur, les officiers municipaux sont au moins répréhensibles de ûe l'avoir pas défendu plus tôt. M. le rapporteur a oublié, sans doute, que là proclamation du roij qui défend la cocarde blanche, est postérieure d'un mois à Ct lie de la municipalité. J'avoue que ce n'est pas sans surprise que j'ai entendu vous proposer, au nom de vos comités, une disposition contraire à la déclaration des droits,
Il est dit, articles cinq et huit:
« Tout ce qui n'est pas défendu par la loi, ne « peut être empêché, et nul ne peut être con-« traint à faire ce qu'elle n'ordonne pas. »
« Nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi « établie et promulguée antérieurement. »
C'est un fait positif que la proclamation du roi, qui interdit les cocardes blanches, n'a eu lieu a Paris que le 28 mai, et n'a été affichée au Languedoc que le 13 juin.
On pouvait donc porter, à cette époque, des cocardes blattéhës, sans être répréhensihle'; la loi qui les à défendues est donc postérieure de 6 semaines à la proclamation de la municipà-litë du 29 aVril, qui défend toutes les distinction? èt très exptesiêment Jes cocardes qui ne sotit pas auît àoyleur's de la fïatioil.
Là proclamât ion du roi est enànre postérieure de 1$ jônrs à la distribution de 94 douzaines dè cocardes atlx couleurs de ta nation, faite par la municipalité: dôhc la municipalité ne peut êtrè répréhi nsibte aux yeUX défc législateurs,pour n'avoit1 pas déféré à une loi qui n'existait pai encore: donc le rèproche fait bar M. le rapportent eât anéanti, dôhc la phrase insérée dans le préambule du décret relativement à la cocarde blan» chë, ne petit plus (1) subsister.
Le mai, planté devant ia porte de la mairie à donné lieu à Une secoiidé calorariié ; je prié l'Assemblée de se rapneler les faits que j'ài éU l'honneur de lui affirmer en arrivait du Languedoc, et dès le moment.que j'ai eu cbnnaissàncedu décret qui demandait le maire de Nîmes à la barre.
J4ai dit, ét j'affirme sur mon honneur qUë Ce mai était orné de rubàhs aux couleurs de la nation, fait attesté par u île foule de témoins et qui n'a pu être contredit par aUcun, malgré tous les soins qù'on à pris à Cet égàrd, Ce fait essentiel répond à la calomnie suivante, insérée dans l'adresse du club :
« Dans cé moment, il Se passait chez le maire « une scène encore plus scandaleuse : la veille, « 2 compagnies, où les gens séduits ou égarés « sont en grand nombre, avaient éleVê un mai « devant Sa porte ef je maire les âvait (2) ras-« semblés énéz lui, le dinanchë,'à Hejeùrier; « quelques-uns vinrent eu cocardes blanches, et « le sentiqtient de larecbnnaissancê ^éhiporfant « sur celui de son dëvoir, il souffrit que ce signe a antipatriotique fût gardé sous ses yeux, eu se « contentant de le désavouer vaguement ; les « cocardes restèrent. »
Autant de mots, autant de calomnies ; ét d'abord jë n'ai jamais Souffert
chez moi de cocardes blanches : dès l- lendemain de mon installation, je
n'ai cessé de dire hautement"qu'il ne fallait pas de distinction entre
légionnaires ; que la cocarde nationale que je portais était la seule
qui fût portée à Paris, la seule que le toi lui-même eût adoptée, « en
déclarant que le roi et, la nation ne faisaient qu'un et
etaientinsèparables » et qu'enfin ma qualité de maire de Nîmes et surtou
t de représentant de la nation ne me permettait pas d'en souffrir
d'autres en ma présence.II est encore une vérité qui frappera les
représentants de la nation, c'est que successivement le nombre des
cocardes blanches avait tellement diminué dans Nîmes (au lieu
d'augmentercomme on rafaussementavancé), que le dimanche 2 mai, sur la
promenade du cours, qui est le rendez-vous des citoyens, ij'n'y avait
pas en tout 50 cocardes blanches; en sorte que, faute de trouver à
maltraiter des ,porteurs de cocardes, on sabra les citoyens qui n'en
avaient point ou qui en avaient aux couleurs de la nation . fait
essentiel, attesté par une foule de témoins, notamment par les 14, 15;
17, 20, 21, 28, 38 et 56.
Le club ose appeler scène scandaleuse la plantation d'un mai en face de l'hôtel du maire, mais cet usage est général en Languedoc ; il est d'usage encore de présenter dans un plat un bouquet et un gâteau; en prenant le bouquet et un morceau de gâteau on donne ordinairement une somme suffisante pour indemniser des frais et payer les réjouissances. Certainement, f-n me conformant à l'usage, en donnant de l'argent, je n'aurais fait qu'une chose toute simple, poi' t ré-préhensible, et dans aucun cas je ne pouvais être responsable de la somme donnée ; heureusement pour moi, dès la' veille de mon installation, j'avais suivi, conjointement avec mes collègues, des principes qui ne nous permettaient pas d'encourager des réjouissances dans le moment où la stagnation du commerce et des fabriques augmentait chaque jour la détresse de 10,000 de nos Concitoyens; nous supprimâmes les repas de société, même d'étiquette, à l'installation des officiers municipaux, nous voulûmes consacrer ce jour par un acte de bienfaisance; nous voulûmes que, au lieu de fêtes et de réjouissances qui semblent insulter à la misère du pauvre, il recouvrât dans le même instant les vêtements dont le besoin impérieux de la faim l'avait fait se dépouiller, pour assurer sa subsistance et celle de sa famille En effet, les officiers municipaux et les noiables ont remboursé les avances du mont-de-piété et ont fait rendre, par MM. les curé>, et les membres do consistoire protestait, à la fois et sans distinction d'opinions religieuses, les nombreux gages qui y étaient déposés pour les prêts de 5 livres et au-dessous (1).
Fidèle à mes principes qui ne me permettaient
M. le rapporteur, convaincu que l'invitation chez le maire et le déjeuner prétendu donné étaient dénués de preuves, n'a fait aucune mention de cette inculpation; mais il a eu soin de rapporter quelques dépositions qui annoncent qu'on a vu, le dimanche, des légionnaires boire et manger à la porte du maire. La réponse est simple. A mon arrivée à Nîmes, on établit un corps de garde dans une salle basse de mon hôtel pour contenir l'affluence d'-s citoyens. Le mai ayant attiré beaucoup de monde, les volontaires qui le gardaient restèrent 24 heures de suite, et burent et mangèrent dans le corps de garde qui donne sur la rue, mais ce fut à leurs dépens. On a vu que j" m'étais contenté de promettre la dot de deux filles.
C'est encore une fausseté d'annoncer que la maison du maire est gardée en ce moment (et la date de l'adresse est du 4 mai), jour et nuit, par les compagnies malveillantes ; ce sont ses suppôts ordinaires.
J'affirme que ce fait est faux et que ni la nuit du 2 au 3 mai, ni le 4
mai, jour où l'adresse fut rédigée et envoyée, ni les jours suivants,
personne n'a monfé la garde chez moi. J'ajoute qu'un homme fort riche de
la ville et membre au club, s'étant oublié le 2 mai jusqu'à dire
hautement dans la rue « qu'il fallait couper la tête du maire et la
porter au bout d'une baïonnette », fait dénoncé le 13 mai par le
procureur de la commune au procureur du roi au prési-dial, « qui n'a pas
daigné en informer »,mais dont la preuve est acquise par la déclaration
solennelle de « 4 témoins », consignée dans les procès-verbaux remis aux
comités des recherches, les citoyens indignés voulaient l'aire justice
de ce propos incendiaire si le maire, lui-même, n'avait représenté comme
un insensé celui qui était capable de tenir un pareil discours.
Cependant, ce propos s'étant répandu, un grand nombre de citoyens de
toutes les classes vinrent m'offrir de m'accompagner partout et de
monter la garde jour et nuit dans ma maison. J'ai refusé constamment
cette nouvelle marque d'intérêt et d'attachement. Je dirai plus, la
prudence exigeait certaines précautions; on parlait d'étrangers arrivés
secrètement dans la ville; des troupes armées (1) se présentaient de
nuit dans les faubourgs ; l'inquiétude était générale et cependant je ne
me suis reposé sur personne du soin de veiller et d'assurer la
tranquillité publique. Fier et fort du témoignage d'une conscience
irréprochable, ferme et tranquille, malgré Ie9 manœuvres, les menaces et
les propos incendiaires des malveillants, je parcourais, la nuit, les
différents faubourgs de la ville, accompagné de deux hommes seulement;
on a souvent regardé
Il est essentiel de repousser victorieusement une autre assertion calomnieuse, dont les suites pourraient être d autant plus dangereuses qu'elle a été répandue dans le royaume avec une pro4-fusion incroyable et distribuée à tous les membres de l'Assemblée, à leur domicile. On y lit : « Les troubles qui s'étaient élevés au moment de la tenue des assemblées primaires faisaient craindre de nouveaux désordres pour celle de l'assemblée électorale, et malheureusement la municipalité, « déjà suspecte de connivence avec les ennemis du bien public », venait de donner plus de fondement à ces soupçons. Le 4 mai, elle avait concédé aux sieurs François Froment et Folacher un terrain inculte, sous la seule condition d'en payer les charges ; et c'est par cette concession que ces 2 hommes, connus pour être les chefs du parti antipatriotique, furent dans le cas d'être élus. »
Si l'envie de nuire n'avait pas aveuglé les commissaires du club, en compulsant les registres de la maison commune, ils n'auraient pas osé présenter comme un acte de connivence ce qui n'était qu'un acte de justice, ce qui n'était que l'exécutioa des déclarations du roi et des arrêts de la cour des aides, ce qui était enfin l'ouvrage de l'ancienne municipalité et le complément d'une adjudication faite les 2 et 3 décembre 1789 et 2 janvier 1790, à 34 citoyens, parmi lesquels se trouvaient Folacher et Promeut, c'est-à-dire quatre mois avant l'installation des nouveaux officiers municipaux.
Les baux passés, et qui ont été compulsés par le club, contiennent le narré très long de toutes les formalités qui ont été observées, des renvois faits par les nouveaux officiers municipaux, et établissent que « personne autre n'a fait de condition meilleure ». Enfin, ce qui prouve la noirceur de la calomnie, c'est que sans cette adjudication même, le sieur Folacher payait depuis longtemps plus de charges qu'il ne fallait pour être citoyen actif. Les certificats les plus authentiques, ensemble l'extrait du bail passé, sont remis au comité des recherches et démontrent la noire perfidie des dénonciateurs. C'est cependant d'après une simple adresse rédigée par eux, par eux les ennemis connus de la municipalité, que son chef a été mandé à la barre pour rendre compte de sa conduite et de celle de la muuicipalité, sans avoir été entendu, sans avoir au moins daigné lire les procès-verbaux qu'il avait adressés à M. le Président de l'Assemblée et qui étaient arrivés deux jours avant ie décret; car il résulte des cotes, mises dans les bureaux de l'Assemblée, que les procès-verbaux rédigés par les officiers muuicipaux les 2, 3 et 4 mai, sont parvenus exactement à leur adresse le 9 et 10 mai, puisqu'on voit en tête : R. le9, R. le 10 a lire. Et cependuu t, par quelle fatalité ces pi èces î utéressa n tes, ain si co tées, ad ressées à M. le Président de l'Assemblée, n'ont-elles pas été mises sous les yeux des représentants de la nation, avant de rendre le décret du 11 ?
Par quelle fatalité n'a-t-on lu le 11 que l'adresse calomnieuse du club
dénonciateur du 4 mai, qui ne parle pas de ia réconciliation (1) et de
la réu-
Ce n'était pas sans doute pour donner occasion à un honorable membre de dire :
« Comment qualifier (1) l'insouciance de la mu-« cipalité? Au moment où il se passe de pareils évé-« nements; nous les apprenons, nonpar le maire, « mais par un club patriotique. Je demande si le « courrier de la municipalité n'aurait pas dû « précéder tous les autres ; je demande, dis-je, « comment les amis de la paix peuvent excuser « une pareille conduite ; et je conclus en disant « que l'Assemblée a le droit de mander-à la barre « le maire de Nîmes, et qu'il y a preuve suffi-» santé pour lui ordonner de rendre compte de « sa conduite. »
Si l'Assemblée n'avait pas adopté l'avis de cet honorable membre,ije lui dirais à mon tour : Eh I quoi, vous, représentant de la nation, vous, par-tisant zélé de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, vous oui vous êtes montré l'apôtre de la liberté individuelle de chaque Français, vous osez déclarer qu'une dénonciation sans pièces justificatives, sans légalisation, sans aucune marque d'authenticité, vous paraît une preuve suffisante pour mander à la barre le chef d'une commune importante, à l'effet par lui, de venir rendre compte de sa conduite et de celle de la municipalité 1 Mais le décret qui le prononce n'est-il pas déjà une inculpation publique? N'est-ce pas compromettre avec légèreté l'autorité et le nom du chef d'une municipalité, que de le forcer à la nécessité d'une justification ? Un maire n'a-t-il pas « sa force dans l'opinion publique, sa « principale dignité daus le respect et l'amour de « ses concitoyens ? Et n'est-ce pas surtout dans « les circonstances critiques qu'il est essentiel « de lui conserver ces deux titres si puissants « pour opérer le bien » ?
Je lui dirais : Vous qui avez conclus pour mander à la barre le maire de Nîmes, le 11 mai, sur la simple dénonciation d'un club composé de malveillants, qui voulaient se soustraire à l'autorité légitime et cherchaient à dominer sur le pouvoir administratif, ou plutôt à l'envahir par toutes sortes de moyens; vous qui ne vous êtes pas informé préalablement s'il n'existait pas daus les archives de l'Assemblée un compte-rendu par la municipalité de Nîmes, vous concluez, le 11, à mander son maire à la barre, et, le lendemain 12, vous faites déclarer par un autre décret de l'Assemblée que des ofticiers municipaux, mis en prévention, pour les faits les plus graves, tels que l'assassinat u'un officier respectable, consommé sous leurs yeux, et presque entre leurs bras, tels que i'invasion à main armée d'une citadelle * -sont inviolables, et que des officiers pu-« blics ne doivent point être provisoirement hu-« miliês sur une simple dénonciation, avant - « d'être entendus, et qu'il ne fallait pas surtout « enlever des administrateurs à une commune « qui avait besoin de leur présence » 1
Quel contraste entre vos principes de la veille et ceux du lendemain 1
Que de fatales consé-
On lit encore dans l'adresse, et ce reproche a été adopté par M. le rapporteur:
« Malgré le désordre affreux qui règne depuis « trois jours, les troupes n'ont point été requises, « leur service même a été refusé par le maire, « et la loi martiale n'a point été publiée... Ge « n'est qu'à la sollicitation du chef du régiment « de Guyenne, aussi digne citoyen que respec-« taltle militaire, que la loi martiale vient enfin « d'être publiée. »
La réponse à cette fausse allégation qui ne tend à rien moins qu'à inculper le maire et les ol'ticiers municipaux de Nîmes, d'une négligence coupable, se trouve consignée dans la déclaration de M. de Bonne lui-même et de tous les officiers du régiment, en date du 6 mai, et par conséquent antérieure au décret du 11, déposée depuis longtemps au comité des recherches et passee sous silence par M. le rapporteur.
« Nous soussignés, lieutenant-colonel et nous « lieutena t en premier au régiment de Guyenne, « ceitilions par amour pour la vérité que, nous « étant rendus lundi 3 mai sur les 7 heu es, « à l'hôtel de ville, nous fi m s part à MM. les « oflh iers municipaux de l'accident arrivé à un « grenadier du régiment de Guyenne, qui venait « d être blessé dangereusement d'un coup de « fusil au bras, par un quidam qu'il n'a pu re-« connaître; nous ajoutâmes que d'autres sol-« dats avaient reçu oes blessures moins consi-« derables; que, dans ces circonstanc s, et pour « éviter de grands malheurs, il paraissait conve-« nable de prendre les précautions nécessaires « pour ca'mer les esprits et. empêcher que les « attroupements ne vinssent à recommencer.
« Que M. le maire nous répondit que MM. les j « officiers municipaux, après avoir fait tout ce ! « qui était en leur pouvoir pour faire cesser ces « rixes particulières, sans être assez heureux « pour y parvenir, étaient occupés à rédiger une « proclamation de la loi martiale, pour la faire-« publier sans délai, quoique les circonstances « leur parussent critiques et dangereuses, vu que « les membres de la légion et les soldats du régi-« ment de Guyenne qui devaient faire EXÉCUTER la « loi martiale étaient ceux contre lesquels il fal-« lait la proclamer', que cette même considé- ration les avait art êtès la veille, mais qu'il était « impassible de renvoyer à un pius long terme. « Sur quoi, nous, officiers, ciûmes devoir observer « à MM. lesofliciers municipaux que les soldats « étaient rentrés dans leur quartier, et que « vu |
« les circonstances » et l'approche de la nuit, on «pouvait attendre jusquau lendemain; que e. d'ailleurs nous ne venions pas réclamer la pro-« cla nation de la loi martiale, mais seulement « nous concerter sur les moyens les plus propres « à calmer l'effervescence générale et que nous « étions les premiers à demander que si quel-« qu'un de nos soldats ou sous-officiers avau été
la cause de l'émeute de dimanche, ils fussent «punis;après quoi nous nous retirâmes; et « étant au bas de l'e-calier de l'hôtel de ville, « M. de Lamilliaiichère remonta pour réitérer à « MM. les officiers municipaux que, loin de récla-« mer la proclamation de la loi martiale, nous » les priions d'attendre les événements du len-« demain; à quoi MM. les officiers municipaux « consentirent, sur la promise respective que, « de grand matin, tous les officiers du régiment « de Guyenne se rendraient aux casernes et que « MM. les officiers municipaux doubleraient pen-« dant la nuit les patrouilles, dont l'ordre fut
donné devant nous à deux compagnies de la « légion, par M. le maire.
« A Nîmes ce 6 mai 1790, signé : Le chevalier de Bonne-Lesdiguiôre, chevalier de Lamil-lianchère.
« Pour rendre hommage à la vérité, les offi-« ciers du régiment de Guyenne certifient que « M. le maire et MM. les officiers municipaux se « sont portés avec zèle, et avec la plus grande « activité, partout où leur présence était néces-« !«airet pour mettre le bon ordre, le calme et « la paix, n'ayant pas craint de s'exposer au « danger qui paraissait imminent pour eux. »> Suivent les signatures.
D'après cette pièce authentique, comment qua-lilier l'audace de 1 auteur du Pré is historique envoyé à domicile, qui ose dire page 15 : « que « le lieutenant-colonel vint à I hôtel dft ville « signifier au maire que s'il ne faisait pas inces-« samment proclamer la loi martiale, il ne ré-« pondait ni de son régiment, ni des suites? Il « exigea même, ose-t-on ajouter, que le maire se « fît accompagner de deux compagnies de Bonne « et non pas de celles de la Croix. Cet acte de « rigueur et de patriotisme de M. de Bonne, ,« décida le retour de l'ordre. »
Ou ne se permet aucune réflexion, même sur ce propos prêté faussement (1)
à M. de Lesdi-guière, ainsi que sur la mauvaise plaisanterie relative
aux compagnies de la Croix. D'ailleurs est-il fondé, le repioche fait
aux officiers municipaux de Nimes, de n'avoir pas puliié le lundi matin
la loi martiale, et de n'avoir pas employé les moyens de rigueur qui
étaient en leur pouvoir pour dissiper un attroupement de quelques
cultivateurs qui se dispersèrent par le chemin, à la première injonction
du maire, sans avoir commis aucun dégât, ni d'autres excès que de courir
après un garde national qui, la veille, leur avait donné des coups de
sabre? Eh 1 qui leur fait ce reproche? Les mêmes membres vous ont dit :
« La loi devient sans force lorsque ceux « qui sont chargés de la faire
exécuter n'ont pas « la confiance du peuple; dans une ville surtout, «
où deux partis s'entrechoquent, des officiera « municipaux dont la
principale puissance con-« siste d .ns la considération personnelle
qu'ils « inspirent, ne peuvent espérer la tranquillité,
Qui leur fait ce reproche? Ceux-là même qui, instruits du pillage de l'hôtel de Gastries, n'ont pas même songé à demander à M. le maire de Paris, pourquoi dans un attentat aussi contraire aux décrets de l'Assemblée et au respect qui est dû à des législateurs suprêmes dans le lieu de leur résidence et à la déclaration des droits de l'homme et du c toyen, la loi martiale n'avait pas été publiée ? Ce qui a rendu inutile et par conséquent dangereuse, la présence de l'infatigable garde nationale parisienne.
Qui leur fait ce reproche? Getix qui ont reproché « aux corps administratifs de Nancy de ne « s'être pas servi de leur ascendant sur les « troupes pour les ramener à Pobéissance et « d'avoir consenti à faire battre la générale dans « la matinée du 31 ».
Ainsi, des principes contradictoires sont mis en avant et sont proposés pour servir de base aux décrets de l'Assemblée suivantque leur application est favorable ou nuisible à tel ou tel parti.
Loin du théâtre des insurrections et des troubles, qu'il est aisé de dire : à Toulon, M. d'Albert a montré une fermeté trop inflexible; à Marseille, M. de Beausset était attaché à l'ancien système, à Nancy, les officiers municipaux ont montré une coupable inertie dans les moments périlleux; à Nîmes, le maire a trop compté, au mois de mai, sur les moyens de persuasion et de confiance, et en juin, les officiers municipaux se sont cachés» ont pris la fuite, tandis que huit d'entre eux, frappés, injuriés, excédés de coups pendant t-rois jours, ont échappé, comme par miracle au fer et au feu des assassins ; ainsi, suivant qu'un homme en place peut être soupçonné de regretter intérieurement quelques parties de l'ancien système, il est également dangereux pour lui d'employer les moyens de la rigueur ou de la conciliation. Loin de vous, Messieurs, le dangereux exemple de souffrir qu'on ose Scruter les intentions pour calomnier jusqu'aux actes de bienfaisance; nul n'est à l'abri des accusations qui s'attachent à la pensée; les discours publics, les seules actions d'un homme en place appartiennent à l'examen et à ta justice des hommes. Ehl n'est-il pas encore trop facile à des ennemis cachés, certains de l'impunité, d'envenimer les actions les plus innocentes, je dirai même tes plus prudentes et les plus sages? Que fera doue un homme en place ? Ce qu'il fera 1... 11 se pénétrera bien de l'étendue de ses devoirs : convaincu que les moyens doux, justes, légaux sont préférables en géuéral aux moyens violents, à ces remèdes extrêmes qui sont, aux yeux des gens de bien, le plus grand des malheurs, il s'exposera aux traits de la calomnie, mais il emploiera dans le principe les voies de la persuasion, pour maintenir le bon ordre et terminer tous les débats en rapprochant tous les esprits. Environné d'écueils cachés, un bon pilote municipal prend conseil des circonstances; il n'écoute que sa conscience et ses lumières ; contrarié par les bourrasques des factions contraires, il dirige constamment la marche du vaisseau politique vers le port de la concorde ; il poursuit sa route invariablement, il maintient là paix et l'équilibre par une vigilance continuelle, ou les fait renaître par des soins assidus et une stricte impartialité, loin de lui le désir d'une gloire aussi fausse qu'instantanée, plus loin encore tout triomphe éclatant et sanguinaire ; il ne veut devoir qu'à
la prudence mêlée de fermeté, qu'à l'esprit de con-* ciiliation mêlé de sagesse, le calme et le bonheur de sa patrie ; satisfait de ravoir préservé des plus grands malheurs, il ne calcule pas les dangers personnels qu'il a courus, ni ceux que lui -pré-pareut la calomnie et les factieux dont il a déjoué les projets. Prêt à faire le sacrifice de sa fortune et de sa vie, il ne fait jamais celui de son honneur; et comme il n'aspire qu'au suffrage de sa conscience, la plus douce récompense des bonnes actions, il sait se contenter de sa propre estime et du jugement impartial du plus grand nombre de ses concitoyens. Ainsi faire le bien sans intérêt, empêcher l'explosion des deux volcans alimentés par la haine et par la jalousie de diverses compagnies de la garde nationale, prévenir, au mois de mai, par son activité et son dévouement patriotique, le carnage et les pillages qui ont eu lieu au mois de juin, voilà un des crimes du maire de Nîmes, qui vous a été dénoncé par M. le rapporteur. Vous verrez bientôt, Messieurs, dans le précis des événements du mois de mai, combien la circonspection était nécessaire avant la publication de la loi martiale, et vous donnerez.peut-être des éloges à celui-là même que vous avez cru devoir mander à la barre p jur rendre compte de sa conduite. Il paraît superflu de relever également plusieurs fausses allégations.
C'est par cette raison qu'on ne s'arrête pas à la dénonciation faite par le club, de certains libelles qu'il a même adressés au comité des recherches; mais la plupart de ces ouvrages avaient été imprimés et repanduB en novembre et décembre, pendant le régime du conseil permanent et trois mois avant l'installation de la nouvelle municipalité, ils ne circulaient même plus à cette dernière époque; quant aux placards et auires feuilles infâmes, on affirme qu'elles n'ont point été imprimées à Nîmes; on a fait chez les libraires et chez les imprimeurs des recherches aussi multipliées qu'infructueuses ; on a employé vainement tous les moyens pour en découviir les colporteurs : serait-il donc impossible que cet écrit fût venu du dehors, comme tant d'autres que l'on fait circuler dans le royaume, que dis-je? Sous les yeux et même dans le sanctuaire de l'Assemblée nationale.
Quant aux placards manuscrits, malgré les perquisitions les plus exactes, le procureur de la commune n'a rien pu découvrir à ce sujet ; et n'en sera-t-ïl pas de cette allégation comme des prétendues cocardes noires surmontées d'une croix blanche? Qn ne peut se dispenser de dire que, le vendredi 14 mai, les sieurs Louis Salies et Marc-Antoine Darlac, notaire, se présentèrent au corps municipal et lui remirent, aûx noms des citoyens actifs composant le club des amis de la Constitution, une pétition portant que, malgré l'ordonnance qui interdit toute autre cocarde que la nationale, il s'en prépare un grand nombre de noires surmontées d'une croix blanche, ce qui ne peut que faire présumer de coupables dçsseins:
Les officiers municipaux font des recherches pour découvrir ces cocardes
noires, surmontées d'une croix blanche, cocardes que Von accusait les
catholiques de faire fabriquer pour indiquer une nouvelle croisade. Il
est résulté des informations, qu'en même temps que le même jour où le
club dénonçait à la municipalité et à la France entière, par ses
folliculaires (1) stipendiés, ces nouvelles
Cette manœuvre employée par les ennemis de la municipalité, et dont M. le rapporteur n'a (1) fait aucune mention, jette un grand jour sur les prétendus placards, sur les cris indécents contre la nation, qui n'ont été entendus que du club et de ses adhérents : et certes, qui peut se flatter d'éviter toujours de pareils pièges et d'échapper aux entreprises des calomniateurs, et aux filets adroits qu'ils ne cessent de tendre autour des magistrats intègres ?
Il est encore un reproche fait au maire de Nîmes par M. le rapporteur, auquel il sera facile de répondre, en remettant sous les yeux de l'Assemblée les propres paroles prononcées par M. de Mar-guerittes, « et consignées dans le procès-verbal « coté n° t. »
Voici le reproche fait par M. Alquier :
Pourquoi M. de Marguerittes averti, et par les obligations qui lui sont imposées, comme maire, et par les devoirs plus pressants encore attachés à son titre de député à l'Assemblée nationale, « n'a-t-il pas dissipé les alarmes que l'on voulait « faire naître sur la liberté du monarque, lui qui « avait été témoin de la séance mémorable du « mois de février »?
M. le rapporteur ajoute, quelque temps après :
* Le maire de Nîmes n'a pas fait ce que la
Voici la réponse extraite d'un discours, inséré en entier dans le procès-verbal ci-devant mentionné, remis au comité et prononcé par M. le maire de Nîmes devant les citoyens rassemblés : ce passage fut interrompu plusieurs fois (dit le journal de Nîmes n° 26, également joint aux pièces) par des applaudissements réitérés et des cris de vive le roi, plus souvent réitérés encore.
« Membre de l'Assemblée nationale, j'ai été, « citoyens, l'heureux témoin de cette scène inté-« ressante. J'ai vu le meilleur des rois venir de « lui-même, sans faste, sans appareil, s'unir avec « les représentants de la nation de la manière la « plus intime, et manifester le désir le plus ardent « de ne professer avec tous ses sujets qu'une seule « opinion, qu'un seul intérêt, qu'une seule vo-« lonté.
« J'entends encore retentir à mon cœur ces « expressions sincères de l'amour d'un bon prince, « uniquement occupé des moyens de rétablir le « calme et l'union, et d'assurer la félicité de son « peuple, de ce peuple qui lui est si cher et dont « on lui dit qu'il est aimé quand on veut le con-« soler de ses peines. »
Quoi ! M. le rapporteur avait entre ses mains le procès-verbal ; il en a fait mention dans son rapport, et il a pu se permettre un pareil reproche I il a pu.....
Ce simple exposé justifie complètement le maire de Nimes, et le dispenserait de toutes réflexions sur les autres inexactitudes qui se trouvent dans le rapport : en voici encore une bien frappante : Le 4 mai, dit M. le rapporteur, la ville était tranquille, la loi martiale fut publiée.
Ici, Messieurs, la prévention se montre au grand jour : je somme, je défie M. le rapporteur de citer aucune preuve de cette prétendue tranquillité. Il ne peut la mettre en avant, que pour inculper la municipalité en lui prêtant le tort de n'avoir pas publié la loi martiale le lundi soir, quand il y avait du trouble, et de l'avoir publiée ensuite le lendemain 4 mai, quand tout était tranquille.
Je crois avoir démontré, Messieurs, l'impossibilité et le danger de publier la loi martiule, avant le mardi matin (2).
Mais tout était-il tranquille le mardi (comme le dit M. le rapporteur),
quand on a publié la loi martiale? La négative est prouvée et les
procès-verbaux qui constatent divers attroupements séditieux, notamment
dans les faubourgs, et par les déclarations qui constatent l'envoi de
certains émissaires dans l'Avaunage et la Gardo-nenque; enfin il est
prouvé qu'il y avait du désordre le mardi matin, par l'adresse même du
club dénonciateur. Cette autorité ne paraîtra pas suspecte de favoriser
la municipalité; elle est signée Rabaud-Dupui, et c'est d après cette
pièce unique que le maire de Nîmes a été mandé à la barre. On lit dans
cette pièce datée du 4 mai : Voici le troisième jour que le désordre
dure. Tout n'était donc pas tranquille le mardi; les troubles avaient
commencé le dimanche 2 mai à 6 heures
Mais où M. le rapporteur a-t-il puisé cette inculpation ? Où, Messieurs? Dans un précis imprimé chez fiaudouiu et distribué à domicile par lessoinsde MM. Rabaud et Voulland. Voilà l'unique source du fait inexact avancé par M. le rapporteur, qui a cru cependant devoir passer sous silence un très grand nombre de procès-verbaux ou de délibération du conseil général de la commune, parce que trop de raison (dit-il) ont dû les lui faire rejeter. Il avait sans doute des raisons contraires pour admettre le précis de M. Rabaud.
Certains procès-verbaux de la municipalité,cependant, ont trouvé grâce devant M. le rapporteur; le premier renfermait quelques détails dont il a fait usage pour aggraver les torts de quelques prisonniers à pouf rouge, tandis qu'ofr ne trouve aucune mention, dans le rapport, des autres faits contenus dans le même verbal, qui établissent les excès commis à main armée par plusieurs soi-disant patriotes à pouf blanc. Contre certains officiers municipaux qui ont failli succomber sous leurs coups.
Le second verbal est relatif à une descente faite par la municipalité chez une demoiselle soupçonnée (dit-on) de mener une joyeuse vie avec un des auteurs désignés des troubles de mai.
« Sans aucun droit (dit à ce sujet M. le rap-« porteur), contre toutes les règles de la justice « et de la raison, les papiers renfermés dans le « portefeuille sont lus, examinés et paraphés, par « l'officier municipal », qui du moins a laissé en paix et n'a pas même fait déplacer ni mander à l'hôtel de ville la personne chez laquelle on a fait la visite. Je l'avouerai, Messieurs, c'est avec le plus grand étonnement que j'ai entendu un pareil reproche fait à la municipalité et consigné dans un rapport fait au nom de vos comités des rapports et des recherches réunis ; nous savons tous, et il est notoire, que, d'après un ordre signé par 2 ou 3 membres de ce dernier comité, M M. d'Auteuil et Le Maintier ont été arrêtés à quarante lieues de la capitale; reconduits à Paris sous forte escorte, gardés à vue, jusqu'à ce qu'ils aient été interrogés par quelques membres au comité des recheches, leurs papiers lus et examinés, leurs effets visités ; lorsque nous savons tous enfin que ces braves militaires n'ont été rendus à eux-mêmes et à leurs amis qu'après les perquisitions les plus exactes et le> plus infructueuses, pour leur trouver des torts ou des papiers suspects.
Un des membres de la municipalité, le plus inculpé dans le rapport, est le sieur Vidal, procureur de la commune, que l'on dit avoir tenu fré-
guemment et publiquement des propos séditieux.
ependant, parmi les pièces remises au comité,on trouve une délibération du conseil général de la commune de Valabrègue, en date du 30 mai 1790, et adressée à M. le Président de l'Assemblée nationale, qui atteste que lè sieur Vidal, « loin « d'avoir manifesté aucun principe anticonstitu-« tionnel, a manifesté au contraire un saint res-« pect pour les décrets de l'Assemblée nationale « et un grand attachement, à la Constitution, et « qu'il jouit de la confiance et de la considéra-« tioD dues à ses lumières et à son patriotisme » .
Après avoir accusé les officiers municipaux d'antipatriotisme et de contre-révolution; après avoir annoncé à la France entière qu'ils étaient de connivence avec de prétendus ennemis du
bien public; après leur avoir fait attendre pendant 6 mois une décision dont la lenteur a exposé et leur personne et leurs propriétés à des actes répréhensibles; après les avoir rendus témoins impuissants d'attentats multipliés contre la liberté individuelle; après que ces mêmes officiers municipaux, calomniés sans cesse, poursuivis avec acharnement dans des libelles et des placards séditieux ou incendiaires, ont cru devoir prolongér, pour le mantien de la tranquillité générale et au delà du terme fixé par la Constitution, des fonctions pénibles que leurs démissions réitérées et l'esprit de la loi leur permettaient de cesser au plus tard en novembre dernier; enfin, dans l'impuissance d'excuser les innombrables atrocités commises à Nîmes par de prétendus patriotes et de donner les apparences de la réalité à un complot de contre-révolution qui n'exista jamais, on a fixé les regards des représentants ae la nation sur une distribution de listes antérieure à l'installation de la municipalité de Nîmes et qui ne saurait, en aucun cas, être imputée aux membres qui la composent, ni servir de prétexte à la destitution proposée par votre comité des rapports, qui ne refuse d'accepter la démission si souvent offerte par la municipalité que pour rendre complet le triomphe de ses calomniateurs.
Peut-on faire un crime à la municipalité de Nîmes de ce qu'avant sa formation, et sàns sa participation (fait prouvé par l'information), il a été distribué des listes? Si c'est un crime de distribuer des listes, combien n'y a-t-il pas de criminels, même dans cette capitale ? Vous me dispensez, Messieurs, d'en citer des exemples (1).
La distribution des listes n'a jamais été un moyen de cassation*, mais, quand cela serait, la municipalité de Nîmes n'étaiit pas encore formée, on ne pourrait la rendre responsable du fait d'autrui, et je dois faire observer que, même dans l'information partiale sur laquelle on voudrait s'âppuyer, on ne trouve aucun officier municipal inculpé à ce sujet. J'entends dire autour de moi : Passe pour les listes, mais l'argent donné ! A cela je réponds :
Loin qu'il soit établi que les officiers municipaux ont distribué de l'argent, la procédure dit seulement qu'il a été payé quelques journées au prix de vingt-quatre"sous, et que MM. les curés des villages de la banlieue, qui s'étaient chargés de l'application de cette charité, n'y ont fait participer que ceux à qui le produit de leur journée et de leur travail était nécessaire pour sustenter (2) leurs familles.
Consultons encore cette information et elle nous apprendra que ce moyen
ne fut mis en usagé que pour la nomination des sèpt derniers officiers
municipaux ; et cette observation décisivè a écihappé à l'impartialité
connue de M. le rapporteur. C'est pourquoi je le prie de lire à
l'Assemblée la déposition du nommé Pierre Philip-pon, cotée n° 1773, qui
a déposé le 9 juillet et à déclaré que MM. de Belmont, Cabrières,
Laporte, Bonafoux, Aigon, étaient les noms inscrits sur là liste. Or, si
ce moyen n'a été effectivement employé que pour les 7 derniers officiers
municipaux, comment M. le rapporteur ne l'a-t-il paà annoncé à
l'Assemblée? Par quelle fatalité, au contraire, a-t-il affecté d'étendre
ce prétendu
Que vous semble-t-il, Messieurs, de l'inculpa-tiou au moyen de laquelle on voudrait vous porter à destituer la municipalité, parce que des particuliers, étrangers aux officiers municipaux, ont chargé MM. les curés dê faire payer quelques journées aux pauvres citoyens actifs des villages de la banlieue dont le travail ou le prix de la journée était nécessaire pour alimenter leur fa-mille ?
C'est ici le lieu de représenter à l'Assemblée qu'on lui propose de faire les fonctions de juges, et je n'ai pas besoin de lui rappeler ce qui a été dit cent fois, et notamment contre un projet de décret proposé le 21 janvier par M. Rabaud (1), relativement à la discussion survenue entre la demoiselle Montansier et lps entrepreneurs du théâtre de Monsieur. On dit qu'il était dangereux et loin de l'intention de l'Assemblée de réunir tous les pouvoirs et surtout celui de juger, qu'èjle s'est constamment interdit; mais sii était possible que i Assemblée nationale, cédant à l'impulsion de son comité des rapports, voulût dans cette circonstance descendre jusqu'au pouvoir judiciaire, il me resterait encore un moyen invincible aux yeux de la loi, et par conséquent aux yeux des magistrats, pour repousser et faire rejeter la destitution proposée. '
En effet^ tout étant consommé à l'égard de l'élection des officiers
municipaux de Nîmes ; ces officiers étant en possession absolue de leur
état depuis près d'une année, ayant prêté le serment sans aucune
opposition ni réclamation, ayant exercé constamment leurs fonctions ;
l'ancienne municipalité, le comité permanent (2), composé des mêmes
adversaires qui sont à la tête du club, ayant sollicité et obtenu de
l'Assemblée un congé pour M. de Marguefittes, nommé maire, en disant que
sa présence était absolument nécessaire dans sa patrie; cet officier
municipal s'y étant rendu pour se lettre ep possession, tous les
officiers municipaux ayant fait acte de leurs fonctions, tous , y étant
maintenus par le vœu de leurs concitoyens, l'Assemblée les ay ant
reconnus comme tels: tout est consommé et il n'est plus au pouvoir de
qui que ce soit de faire revivre un prétendu vice, couvert d'ailleurs
par un exercice et une possession d'état authentique et non constatée.
Ainsi» puisque je parle devant* des magistrats* je dois me servir des
termes du barreau, et je dis à l'Assemblée qu'il s'élève, contre
Je me reprocherais, Mes-ieurs, d'abuser plus longtemps des moments précieux de l'Assemblée pour réfuter d'autres faussetés insérées dans l'adresse du club et dans le précis historique. S'il peut rester le moindre doute dans l'esprit de quelques représentants de la nation, si quelques' membres désirent des éclaircissements, qu'ils les demandent, je suis prêt à répondre; il de doit rester aucune incertitude sur la bonne conduite du maire et des officiers municipaux de Nîmes; il ne doit rester aucune incertitude sur la noirceur des calomnies que l'on s'est permises à leur égard pour prévenir l'opinion publique, surprendre la religion de l'Assemblée, et faire regarder comme patriotes zélés les fauteurs, instigateurs des divisions qui ont agité la ville de Nîmes.
Ici, Messieurs, commence la tâche la plus pénible à remplir; certes il n'est pas difficile à des magistrats intègres de repousser victorieusement la calomnie en lui opposant des pièces authentiques, une vie sans reproche, une administration sans tache et cette noble assurance qui ne peut être la compagne que de la vertu.
Mais quand il s'agit de manifester les torts de plusieurs de ses concitoyens, quand il faut remonter jusqu'aux sources empoisonnées de la discorde, du carnage et de la destruction ; quand il faut déchirer le voile qui a dénbé jusqu'à présent à l'indignation de tous les Français ceux qui n'ont pas craint de déshonorer la Constitution, dont ils se disent les amis, pour satisfaire une méprisable ambition et dominer, par la terreur, dans une ville où ils ne pourront jamais dominer par l'amour (car il est des sentiments que l'on ne peut ni commander, ni retenir), alors, sans doute, ii est permis de gémir sursa situation, d'être épouvanté des vérités cruelles qu'il faut j révéler; mais alors aussi, on sait s'armer de courage, remplir avec fermeté un ministère rigou-| reux, un devoir impérieux et sacré ; et c'est ce qui me reste à faire, sans haine comme sans partialité, dans ma double qualité de maire de Nîmes et de représentant de la nation.
TROISIÈME PARTIE.
Origine et 'causes des troubles de Nîmes. Conduite
du maire et des, officiers municipaux au mois de
mai.
Les habitants de la ville de Nîmes ont donné successivement de grands et de terribles exemples à la France entière : c'est du sein de cette an-^ cienne colonie romaine que partit le premier cri de liberté, et c'est dans cette ville infortunée que l'on a commis des atrocités qui feront gémir l'humanité.
Dès le mois de novembre 1788, la cocarde blanche fut arborée à Nîmes, comme le signal du patriotisme ; ce fut alors que tous les citoyens demandèrent la suppression de divers abus et portèrent en triomphe le buste de Louis XVI en faisant retentir les airs des cris de : vive le roi!
A l'époque de la convocation des Etats généraux, à celle de leur ouverture, depuis la Révolution,
i'uniqn plus désirable régnait entre tous les habitats. iJ'ôû sont nées, tout à coup, pafipi des concitoyens, ces querelles jntpstinps,' ces riyaliiés fatales, pes gaines eqvenimèes, ces ngms dé papriptes op de rehpllqs, psyrpes où prodigués ayec audace par nq ' cjes de^x partis et qu fjne rigueur exagérée a semblé vouloir'Irër | la cause générale de i'Klpt et de la" Constitution'? Vpilà ce ! qu'il est important de rechercher, et cp n'est que par la connaissance px^cte des causes, des effets, des maux, et surtout des remèdes propres à guérir une plaie vive et sanglante qu'on peut en mesurer la profondeur et la solder avec ménagement.
En juillet 1789, à cette époque mémorable où ; 4'un bout du royaume à l'autre des émissaires soudoyés répandent à ia fois dans la même journée, dans chaque cite, dans chaque hameau, la terreur et la nouvelle effrayante d'une foule de brigands prêts à tout ravager ; à cette époque, les habitants de Nîmes s'armèrent ayec promptitude tt formèrent une légion. Plus actifs sans doute, ou mieux instruits, les protestants se ; firent inscrire en plus grand nombre; la légion ne fut d'abord composée que dfs citoyens de la classe la plus aisée, et dans cette classe se trouvent en grande partie les négociants et les non-catholiques. .
Le peuple pauvre, et qui forme à Nîmes les trois cinquièmes de la population, ne fut pas compris dans cette première conscription ; il se trouvait même exclus par le fait de la compagnie des dragons, uniquement formée de jeuhès gens a^sez riches pour se fournir un cheval et un équipement complet.
Assez longtemps, ces milliers de citoyens
Sauvres et laborieux virent, sans alarmes et hors e leurs mains, toute la forcée mili^ire d'une ville dont leurs travàux et Iç^r industrie entretiennent l'opulence et la prospérité ; mais ils s'aperçure.nt que lès protestants, abusant de la supériorité dii nombre dans là jiè'gibn' (quoique l'o î compte au pus lo,Ô0D protestants contre 40,000 catholiques^ n'avaient nommé que des chefs choisis nâruii éyx, çolonèl et l^e.utenaot-
polouel ; ils ^aperçurent que le couseil permanent n'agi^àit .gué uar leur innuencg, et divers abus d'autorité .éveillèrent leurs praintés èt leurs soupçons ; e^fin qùefquqs .bravades, dont iï ,ést difficile à (tes hommes armés de'jse défendije,, r^ppeererii à la .^asse" laborieuse que, quoique' les moins riçlms, ^l.s etaiéot jles j^tus nomprehx; qu'ils ^taiept Arbres §t, d'a,près ta déclaration (Les \dro,its dçVhprfime, qu'ils étaient égaux en (Irdïts qux putres çfyoyens ; ils demandèrent, .çp qqnst que^ce, au ça$is ' d'octobre, d'être Jpsçf,its pour" forp[ie|r^oiJkYe]|^ compagnies ;jusqu'.|icé|te époque QU ;Qie 4i^tihgUçiit pas dans Nîmes les çfttholiuues ;ét .(es non-catho-liques; ils vivaient ensepablp qomwe pep frètes et, ne considérant que jfLyeriu et laj|)ienfaisa,hçé, ils laissaiènt à l'Etro suprême ,1e soin de juger le culte; pourquoi faut-il que rapib|t\Ô9 de min^r, un aésir ardei$ ,e,t ,in\ipo$éré dp Maîtriser, en s',assurant ,ç|e la plu^ grande portion de la force àçmée et (la principale influence dans le conseil permanent, aieqt fait succéder des jours de trouble^ (çt de haine à des jours purs et sereins, marqués p,ar la cpncprc^e ,et là fraternité I
Lor-s de la formation de la légion, le conseil permanent avait fixé le nombre des compagnies à 24. Il avait /dérogé à ce règlement en rece-
vant successivement 8 à 10 autres compagnies, composées principalement de non-catholiques.
Quand' les' 5 compagnies 'nouvelle:? se présentèrent, if eut l'injustice fié Tés refuser et de leur opposer ce règlement, qu'il ayait enfreint déjà pour 15 compagnies, puiscpie cèlle de Froment n'jest que la 39e ; il eût été prudent sans douté d'admettre ces nouveaux légionnaires/cultivateurs et artisans, gens forts, robustes, et qui avaient passé au service huit où seize années ; on pouvait du moiUs les incorporer dans les anciennes compagnies ; inâis les nouvelles n'étaient presque Composées que de Catholiques, mais on ne voulait pas jès ârmër; on persévéra donc dans un refus humiliant pour d'anciens militaires, sous le faux prétexté dé ne pas faire perdre un temps précieux à des journaliers et à des artisans.
Le pèle patriotique s'était emparé de tous les esprits. Geé'nombreux et utiles citoyens veulent êtrë enrôlés ; ils proposent à plusieûrs protestant? de se mettra à léjur tête ; premier refus ; alors, il jettent lés'yeux sur quelques cathodiques.
Les ,5 compagnies viennent à la fois à la maison pommons, ^essuient un nouveau refus et se faijit recevoir en' èmplbyanl inconsidérément aes reproches mêles a quelques menaces.
Le g^eur Froment, ayôcajt, fils d'un ancien gr$$,er M |ffifSf.de' ville, était un des capitaines dé qes pouy(ëll^ comp^^niès. A la formation des gardes .natio^ali'i, (il avait été reçu dans les dragons, jpiais ceux-ci délibérèrent ensuite, lé 10 novembre 1789,, iè l'exclure. Çette démarche, peu conformé à resjpi'it fde la Constitution, a con-trjfryé puissamment àenflàmmer de nouveau un caractère ulcéré ,depuis longtemps. Le sieur Froment ay^intioué un gfand rQle dans les journées Bes 13. Jf et 15 Mn, il ,çst essentiel de faire connaîtra à l'assemblée les' raisons et les motifs d'amiposité personnelle qui avaient porté les dragons àTexcl^r^, les prOiestànts àsé montrer Ouvertement contré lui, ainsi que les sentiments dé bajgàie qui \ oUjVaient animer le sieur Froment.
Le chef ^è cette famille, greffier de l'hôtel de viffe depuis 30 années fut dénoncé à la cour des ^ides, ,conwe prévaricateur, par quelques négociants pov,r avoir susyi, dans là ^confection ^es jçôy pp^ion, .une méthode vicieuse em-ployép'do «tempslrnmémorial dans l'hôtel de ville aë ^îi^s. Dççr$é de pjnsè, de çpfps, poursuivi ayec^^memeht, il sè .déroba par la fuite aux mjùstiçes duprgflùer çqonqeot et .rendit à Avigpop, "
Àprèp 5 années d'exi.1, il vint s? remettre en prisoh ; la vérité §tjat connue. Le décret de nrise.dp^iRS fpt jannulé, sps 'dénpnciatfiurs lui lurent ipdiqués ils1 sont membres .dji' club ; From^ntle itils se .flatte ailors çlë réparer le vide iypmeq8e ocp^sionné dans la fortune de son père par ,40mpéages jjrppprtioygries. î| annonce hautemejqt cet^espoir. '
Les Ornières compagnies reçues, dont lui et sqs parents étaient lps.chefs, partagent sa satisfaction, tandis que lja. compagnie de dragons, composée presque en entier des adversaires des siéùrs grqpiept,-ne peqt dissimuler son mécontentement. Cette malheureuse contestation, qui durait tdeipis Plus^urs années, a été une des sources des maux qui ont affligé la ville de Nl(neS ; et guoiacron ne puisse pas dire que la dgt^en^desMimonsrengi^usès ait été la cause uniqu.êides dissensions ejt des troubles, la vérité est que^. âifflrejipéJ djés.&ii}$§s §.tgi|e|ipeot influé
dans les divers événements arrivés depuis à Nîmes, qu'aux yeux dé la multitude une querelle personnelle, pour ainsi dire, une rixe particulière, survenue entre quelques compagnies à pied de la légion et celle des dragons à cheval, est dégénérée malheureusement en guerre civile. La conduite du conseil permanent et de l'étal-major de la légion acheva d'aigrir des esprits qui n'y étaient que trop disposés; bientôt la garde nationale se trouva naturellement divisée en deux factions. On voyàit, d'un côté, partie des anciennes compagnies, presque toutes composées de citoyens aisés, bien habillés el bien armés, soit qu'ils le fussent à ]eurs dépens, soit qu'ils eussent reçu leurs armes des magasins ou arsenaux publics. De l'autre côté, on voyait quelques anciennes compagnies et les nouvelles, composées de légionnaires pauvres, excepté les officiers qu'ils s'étaient choisis, n'ayant pour tout uniforme qu'un gilet, pour armes que les instruments de iêur travail, des piques ou des fourches (1).
Un pareil contraste d'armes et d'habillement devait produire naturellement entre les portions d'un même corps des rivalités, des bravades et souvent des querelles, surtout lorsque le courage, l'enthousiasme de l'égalité, de cette égalité établie par la Constitution, l'énergie et l'amour de la liberté étaient absolument les mêmes.
Les nouvelles compagnies, composées en partie de vétérans, demandèrent, non des uniformes, mais des armes. Après quelques pourparlers, on leur fournit 40 fusils par compagnie, en en prenant 5 dans chacune des anciennes. Quoique les fusils donnés ne fussent pas des meilleurs, quoique, au delà des quarante fusils destinés à chaque compagnie, les volontaires riches des anciennes s'en fussent procuré d'autres (ce qui rendait la force des compagnies bien inégale), les nouvelles ne marquèrent aucun mécontentement ; mais les anciennes affectèrent de ne nommer pour chefs que des protestants; on donna quelques désagréments à un certain nombre de volontaires pour les engager à se retirer. Ce projet se manifesta d'une manière plus frappante lorsque, en conformité du règlement, il fallut procéder à la nomination d'un nouvel état-major. D'après l'article 8, le colonel, le lieutenant-colonel, le major, l'aide-major et l'adjudant doivent être nommés jpar le conseil permanent et les capitaines. Il ne faut pas se dissimuler que tous les capitaines devant concourir, d'après le règlement, à la nomination de l'état-major, le parti dominant dans la légion n'avait pas vu avec plaisir s'augmenter le nombre des capitaines caiholiquts, incapables d'avoir aucune influence sur les nominations.
Lorsqu'il fallut procéder à la formation du nouvel état-major, le conseil
permanent, le plus grand nombre des capitaines des anciennes compagnies
proposèrent, au mépris du règlement qui exige que le chef soit pris dans
la légion, de nommer, pour remplacer M. de Baguet, colonel et
protestant, M. Dazémard, protestant, qui n'était pas même légionnaire;
ils voulurent aussi conserver pour lieutenant-colonel M; de La coste,
protestant, qui a gardé ce poste depuis la formation, en juillet 1789,
jusqu'en avril 1790. Ils conservèrent également le major, marié avec une
protestante, et ce dernier n'a pas encore cessé d'exercer" les mêmes
fonctions. Le plus grand
La nomination du nouvel état-major, l'obstination à ne vouloir pour chefs dé la légion que des protestants, fut sur le point d'occasionner 1 s plus grands malheurs; les volontaires catholiques consentirent cependant à laisser les lieute-nant-côlonel, major et aide-^major, mais ils insistèrent pour qu'une fois au moins, le colonel fût catholique; ils proposèrent en conséquence de nommer M. de La fiaume, colonel à la suite de la cavalerie. Refus obstiné du parti dominant. Déclaration des autres volontaires qu'ils ne peuvent point, d'après le règlement, reconnaître M. Dazémard, qui n'était pas même légionnaire. Trois semaines se passent dans ce conflit d'opinions, qui occasionne de temps en temps des rixes entre volontaires et ces rixes sont toujours jugées dans le sens du parti dominant.
Enfin, des citoyens pleins de sagesse et d'expérience proposèrent pour un bien de paix de ne nommer ni M. Dazémard ni M. de La Baume, mais d'engager M. Ducaylar (lieutenant du roi, commandant pour Sa Majesté à Nîmes; officier de mérite, généralement aimé et estimé), d'accepter la place de colonel de la légion. Une proposition aussi convenable fut reçue avec empressement. M. Ducaylar se rendit aux vœux des habitants de Nîmes. Instruit de divers abus, jaloux de maintenir l'ordre et la discipline, « il proposa « au corps municipal et à la légion de déposer
« les armes dans une des salles de la maison « commune ou du collège, et il déclara qu'il re-« gardait ce moyen comme le seul capable de « conserver la paix et l'union da s la ville. » La municipalité, plusieurs capitaines des dernières compagnies s'empressèrent d'adhérer à cette proposition; mais ceux qui étaient accoutumés à dominer ne voulurent pas s'y soumettre, parce qu'ils désiraient pouvoir s'armer à volonté, quel parti peut donc être soupçonné de complot? Sera-ce celui qui consent à déposer ses armes à la maison commune ou celui qui s'y refuse?
Ce refus fit naître des alarmes qui augmentèrent encore en apprenant bientôt, par les nouvelles publiques» les tentatives faites, dans différents endroits du royaume, pour s'emparer des citadelles et des forts; la citadelle de Nîmes se trouvait comprise dans cette liste; les nouvelles compagnies, armées tant bien que mal, de fourches, de faux et de mauvais fusils, déclarent, que « sans un ordre exprès de Sa Majesté », elles ne souffriront pas que l'on s'empare du fort qui domine plus particulièrement leurs habitations; l'exécution du projet fut suspendue ; mais, dès lors, on prodigua à ces compagnies, « toutes composées de catholiques, » les apostrophes usées de fanatiques, d'agents de l'aristocratie, armés etsouuovés pour renverser la Constitution.
Dans le même temps, on se permit quelques railleries amères contre les ecclésiastiques. Les journaux rendirent compte d'une motion pour accorder aux non-catholiques la liberté, la publicité de leur culte et des temples; il n'en fallut pas davantage pour exalter la tête de quelques fanatiques protestants.Déjà ils désignent du doigt les églises qui leur serviront de temple, notamment celle des capucins; cet éclat indiscret de quelques particuliers, joint aux placards incendiaires, fit craindre à des catholiques (trop faciles à s'alarmer sans doute,) de voir incessamment une autre église s'élever sur les débris de {a religion de leurs pères. La multitude, toujours crédule, ne vit que des ennemis de la religion caiholique, dans ceux qui se réjouissaient des opérations contie le clergé, de la suppression des moines et des monastères, qui soulageaient àNimes un giand nombre de malheureux, intéressés à leur conservation.
C'est dans ces circonstances critiques, c'est au milieu de cette fermentation générale et de cette défiance respective, que l'on procéda à la formation de la nouvelle municipalité. Les catholiques n'oublièrent pas assez l'injuste partialité avec laquelle le parti dominant s'était emparé de toutes les charges de la légion, et le despotisme avec lequel il primait dans le conseil permanent.
On apprit en même temps que, dans les villes, bourgs et villages circonvoisins, les protestants étaient en plus grand nombre, ils s'étaient emparé de presque toutes les places d'officiers municipaux ; on résolut donc de ne pas les laisser envahir àNîmes,et d'accorder seulement aux non-catholiques, un nombre de places proportionné à leur population. Ceux-ci, au contraire, qui comptaient à leur tête les plus riches négociants, forts de leur industrie et de leur utilité, demandèrent la moitié des charges municipales, et désignèrent impérieusement le citoyen qu'ils voulaient élever à la place de maire. Cette prétention despotique du plus petit nombre, accompagnée de menaces, indigna le plus grand, et il fut aisé de prévoir les funestes effets de la division qui allait s'élever entre concitoyens.
Dans ce conflit bien étranger à la Révolution,
puisqu'il ne s'agissait que du nombre de catholiques ou de protestants, qui seraient appelés aux charges municipales, on ne peut s'accorder; bientôt les deux partis sont visiblement séparés; ils s'observent, ils calculent leurs forces; la ligne de démarcation se fortifie chaque jour davantage, elle n'est réellement qu'entre catnohques et quelques familles riches et protestantes, jalouses de dominer; car, Messieurs, à Nîmes comme ailleurs, l'esprit de rivalité, d'orgueil et d'ambition a été le grand mobile des divisions et des malheurs; eh! combien de soi-disant patriotes n'ont vu dans la Révolution qu'une occasion favorable pour s'élever à des places importantes. Mais pour colorer aux yeux des gens séduits le ridicule de certaines prétentions exagérées, on affecta de répondre qu'il n'y avait de division à Nîmes qu'entre les patriotes et les antipatriotes ; on représenta comme ennemis de la Constitution ceux qui y gagnaient le plus et qui, désirant sincèrement la réforme des abus, n'ont jamais blâmé que les moyens violents qu'on osait employer en son nom; ah i sans doute,il doit être permis à Nîmes d'être révolté des atrocités et des massacres qui ont déshonoré les prémices de la liberté, et l'ont fait dégénérer en licence sanguinaire 1
Les assemblées primaires se formèrent en treize sections, y compris celle de la banlieue qui s'assembla au palais; les sept huitièmes de celle-ci, composés de citoyens actifs catholiques, ne voulurent pas se laisser maîtriser par un très petit nombre de cultivateurs protestants, fiers parce qu'ils étaient les plus riches; les esprits s'échauffèrent ; de légères voies de fait furent la seule suite de cette querelle. La violence de quelques dragons contenue par la fermeté courageuse des villageois, pouvait occasionner un violent incendie : tout fut apaisé par les soins du président de la section et des ofliciers municipaux; mais les gens sensés prévirent dès lors l'effet inévitable de ces rixe;* particulières, de ces germes de haine et de rivalité qui ne pouvaient que troubler à la longue la tranquillité publique et occasionner les plus granis malheurs.
Après les opérations préliminaires, on commença les scrutins dès le
premier tour, en son absence (I), et malgré son refus annoncé d'avance,
M. de Marguerittes fut nommé maire à une très grande majorité. Il faut
convenir que l'on était bien notoirement partagé pour les élections (2),
puisqu'il n'y avait que deux sortes de listes; la preuve se trouve dans
le résultat du dépouillement des scrutins ; à l'exception de quelques
voix perdues, on ne voit que deux candidats pour la mairie, et l'on ne
croira jamais que, dans une ville de plus de cinquante raille âmes, deux
citoyens aient réuni exclusivement, et dès le premier scrutin, les
suffrages, par l'effet du hasard ou de leur mérite, et sans que les
votants, pour l'un et pour l'autre, se soient entendus. La très grande
majorité, obtenue par M. de Marguerittes, apprit au parti qui avait
dominé jusqu'alors, que son règne était passé; il chercha donc à
négocier; on tint des comités à cet effet, dans lesquels il fut arrêté
que les protestants auraient cinq officiers municipaux, savoir : un au
premier scrutin, le huitième : le
Fidèles au traité, les catholiques portèrent au premier scrutin M. Vincens- Vais, protestant ; il fu élu; mais on s'aperçnt au dépouillement des scrutins qu'on avait abusé des listes doubles et que le parti le moins nombreux, en portant les mêmes protestants dans toutes leurs sections, n'avaient inséré des catholiques que comme des plastrons, ou en telle diversité dans chaque section, qu'aucun ne pouvait réunir un aesez grand nombre de voix. On se plaignit de cette supercherie, et au lieu de la réi arer, on répondit, « que chacun ferait de sod côté ce qu'il jugerait convenable. »
Dès lors, malgré tous les moyens employés par le petit nombre pour obtenir la supériorité. M. Vincens-Vals fut « le seul non-catholique » qui obtint la majorité requise pour être officier municipal»
« Ce fut un malheur, je dirai plus, ce fut un tort » ; car,malgré l'inexactitude des protestants à observer les conventions, la justice voulait que les catholiques usassent avec modération de la supériorité de leur nombre, parmi tant de protestants dignes de leur estime, par leur sagesse, leur mérite et leur expérience; il fallait en choisir dans la proportion de la population ; je l'ai toujours pensé, et je n'ai cessé de réclamer avec force six places dans la municipalité pour les non-catholiques. Je ferai observer, cependant, que 1a nomination d'un seul reconnaissait et conservait le droit que l'élection faite dans quelques villes voisines, où le nombre des protestants domioe et où on n'avait point ou presque point nommé de catholiques, était une sorte d'excuse; je dirai qu'en novembre, à la prochaine élection où la moitié delà municipalité devait être changée, en Un dans des moments plus calmes et moins orageux, ce tort aurait été sans doute senti et réparé et que la générosité même aurait pris la place de la justice.
Au lieu de ces sages réflexions, et d'une conduite analogue, quelques catholiques dont l'ambition avait été trompée se joignirent à ceux des non-catholiques qui étaient tourmentés des mêmes sentiments d'envie et de rivalité. La haine s'empara de leurs âmes et» dès lors, l'amour de cette liberté, si souvent préconisée, se changea en désir de dominer, en besoin de contredire, d'inquiéter la nouvelle municipalité, de croiser ses opérations les plus utiles, de décrier les plus sages et même de réduire les officiers municipaux à l'impuissance de faire le bien; peu de temps avant leur installation» le nombre des ouvriers employés aux ateliers de charité avait été porté à 1750; c'était engager la commune dans des dépenses au-dessus de ses forces; aussi les fonds de la caisse furent-ils promptement absorbés. Ce n'est pas tout ; on négligea l'approvisionnement des grains* et les nouveaux administrateurs n'en trouvèrent que neuf cents mesures dans les greniers d'une ville dont la consommation est de cent à cent vingt. Enfin, on distribuait par semaine quelque argent aux pauvres honteux et aux chefs de famille qui n'étaient alimentés que par les travaux d'une industrie réduite à la stagnation; on annonce que sous peu de jours les fonds de cette cêuvre de bienfaisance seront épuisés. Tel fut, Messieurs, le tableau affligeant qui frappa mes regards, en arrivant dans ma patrie. Appelé depuis plusieurs
années par le choix libre et la confiance de mes concitoyens à la tête du conseil de l'administration de là commune, assez heuteux pour avoir introduit un ordre et une police inconnue depuis longtemps, et pour avoir efficacement contribué à d'utiles établissements, je côonaissais à fond lçs ressources et les besoins de la ville; vivement frappé du triste état où je trouvai les subsistances, je sentis qu'il n'y avait pas un moment à perdre, Je sentis que le moindre délai pourrait être fatal ; sans attendre le moment de l'installation de la nquvelîe municipalité, qui n'eut lieu que six jours après, je priai deux citoyens honnêtes et bienfaisants d'acheter sur-le-champ à LUnel, pour soixante mille livres de blé; je répondis dé tous les événements sur ma fortune personnelle. Le premier soin de la municipalité fut d'approuver mes, opérations et de compléter l'approvisionnement nécessaire jusqu'à laTéColie. Les achats des grains furent portés sUcCeSsivèment à 280,000 livres ; on parvint ainsi à assurer les subsistances « et à prjeureraux pauvres pour 27 deniers, la livre de pain dé pur froment », preniière qualité; et. cela sans aucun secours du gouvernement et sans emprunt ; les marchands qe Marseille sé contentèrent de lettres de change payables à 3 mois ; la rareté du numéraire, la prudence, et Surtout l'avantage du commercé ne permettant pas dè dépouiller entièrement ^espèces une ville de fabrique, la vente des grains faisait rentrer journellement des fonds qui étaient remis sur-le-champ d.ms la circulation pour l'entretien des manufactures et le payement des Ouvriers. Il résultait encore un grand avantage de cette opération ; c'est que le blé était plus cher dans tous les environs) la commune fournissait du grain à tous les boulangers, et faisait un sàcrifice de 50 Sols par mesure, sous la condition que lé pain du pauvre n'augmenterait jamais : en effet il est reste constamment au même taux» et l'augmentation në tombait que sur le pain des riches. Cette sage opération faite avec intelligence n'a coûté en six mois que 25,000 livres pour une population de 53t000 âmes, c'est-à-dire moins de 10 sols par ch ique individu.
Les ateliers de charité excitèrent aussi leur prompte vigilance. Le règlement fait à ce sujet, le 2 avril,doit d'autant plus enorgueillir les officiers municipaux dë Nîmes, qu'ils ont deviné et employé d'avance les sages précautions qui ont été proposées à l'Assemblée nationale par Son comité de mendicité. L'effet Salutaire de ce règlement fut de faire sortir en huit jours de la ville plus de six cents étrangers ou vagabonds, qui absorbaient une grande partie des secours destinés aux pauvres citoyens et suscitaient des insurrections dans les ateliers; quels désordres n'auraient-ils pas occasionnés postérieurement sans la précaution qu'on avait eue de les éloigner! On parvint aingia supprimer de grands abus, à utiliser les dépenses, en raison de leur importance, et à réduire successivement, sans troubles, sans convulsion, à 600, 500, 400, 300, et .finalement à zéro, le nombre des ouvriers.
Enfin, il fallait pourvoir à la distribution en argent pour les pères de famille honteux, ou hors d'état de travailler à la terre. Les caisses étaient vides, la générosité déjà épuisée; une quête solenn lie, faite par le maire et ses collègues, procure les secours nécessaires.
Si les officiers municipaux de Nimes avaient été tels qu'on a osé les dépeindre, si le patriotisme le plus pur, si l'amour de la tranquillité
n'avaient pa? dirigé toutes leurs démarches, ils pouvaient se venger de leurs envieux d'une manière bien éclatante; au lieu de sacrifier leur temps, leur fortune, leur repos, pour assurer les subsistances, pour prolonger les ateliers de charité, et les Secours pécuniaires, destinés aux. pauvres honteux, ils n'avaient qu'à constater par un Verbal, rendu public, la pénurie des fonds dans la caisse .de la commune, la disette des grains dans les magasins de la ville, ët l'état de délabrement où ils trouvaient la chose publique; par là, ils se seraient riais à couvert dès suites fatales de la nonchalance de ceux c[ui dominaient avant eux dans la ville ; par là ils faisaient retomber le danger et la honte a'uhe famine prochaine et d'un défaut total de secours pour les infortunés sur ceux qu'un misérable acpour-propre avait déterminés à se venger de d'avoir pas été admis dans l'administration municipale; mais un sentiment plus pur, l'amour de la paix, animait les officiers, municipaux; ils voient les dangers qui les menacent sans en être intimides; environnés dé pièges, ils savent les,démêler, entourés d'abîmes, ils savent les combler par leur prudence ou les franchir par leur courage; rien ne peut lés arrêter ni lës intimider et les obstacles île font qu'accroître leur activité.
Eh bien 1 Messieurs, Cë fut cependant ce lté Conduite paternelle et bienfaisante qui a enflammé le mécontentement de quelqUesindiVidus ennemis de la tranquillité et du bon ordre; ils s'étaient Jlattés d'avoir mis les nouveaux administrateurs dans l'impuissànce de soulager les malheureux, d'assurer tes subsistances, et de fournir aux dépenses des ateliers de charité; ils s'étaient flattés île pouvoir ainsi les décrier auprès de ce même peuple qui les avait Choisis, ët d'exciter, pâr le besoin impérieux de la faim, et la cessation des secours, dës mouvements sédit eux impossibles à calmer; leur attenté fut trompée; |avigilance assidue, la sollicitude continuelle des pères de la patrie, mais surtout l'amour et là confiance méritée de la masse dés citoyens, toujours dirigée par son devoir, toujours soumise aux lois, toujours estimable par sa modération, firent avorter ces mesures antipatriotiques; il fallut donc recourir à d'autres moyens.
Deux cents mécontents se confédérèrent sous lë titre imposant « d'à mis de la Constitution ». Le club de Nîmes se forme; les principaux chefs, sont ces mêmes citoyens qui avaient le plus notoirement concouru pour les placés (1) de la municipalité. Sans doute,les mêmes motifs de haine n'ont pas réuni tous les membres; des hommes de bonne foi ont pu être sédUitspàr le mot; mais un certain nombre ne s'est-il pas rassemblé dans le dessein formé d'inquiéter la municipalité; et d'entretenir à Nîmes un foyer de division qui offrît les moyens de recouvrer une domination passée, objet ae tant de regrets. En effet, le premier soin des agents principaux de cetté ligue anti-municipale fut dë s'assurer des dispositions dë certaines compagnies de la légion dont les capitaines étaient membres du club. Leur suocèe ne fut pas complet, quelques anciennes compagnies et toutes les nouvelles restèrent soumises à qui elles devaient l'être par la loi, c'est-à-dire à la munir cipalitéj qu'avec le plus grand nombre des citoyens elles avaient contribué à former; sur quarante-cinq compagnies, le nombre1 de celles entièrement dévouées au club des mécontents n'a jamais excédé seize ou dix-sept ; cependant cette
division alarma les bons citoyens, parceque ces dispositions d'esprit, ces oppositions fâcheuses, quoique ét rapgères en elles- mêmes aux idées religieuses étaient, cependant (il faut l'observer), presq uë en e n tier e t à quelques exceptions près, en tre les catholiques d'une part et les non-catholiques de l'autre; mais c'était encore d'une manière sourde; ce n'était pas une querelle de religion, les dogrhes, le culte, n'y entraient pour rien, mais c était l'inquiétude dés catholiques d'avoir vu la forœ armée entre les tnains d'un petit nombre de citoyens, dont plusde la moitié étaient proh testants/G était le mécontentement des protestants de n'avoir p^seu,dans l'élection des officiers municipaux ? là part qu'ils pouvaient y. prétendre-; C'était surtout (et il est impossible d'en douter) l'ambitiori trompée de quelques hommes, « plus amis de la domination que de la liberté* » qui aspiraifent aux places du district et du département, et qui, pour satisfaire le désir de dominer, commencèrent à faire jouer îeâ ressorts politiques et religieux, et jètèrent entre fe^ citoyens de Nîmes ces semênces de haiiré et d'animosilé qui pnt germé avec une rapidité inconcevable, ^tdont ils ,ont su profiter si habileinéqtpoijr parvenir à leur but.
Cë tableau pfrélflnimùre tje la disposition des eépçits et des véritables ciju$es des troubles survenus à Nîmes était essentiel pour prouver aux représentants delà nation et à la France entière, que les soi-disant, « amis de la Conâitution » dans Nîines n'étaient pas toujours les amis » de l'ordre ét de la tranquillité uttbUquë ; » et que l'époque de l'établissement au éiub a été l'époque fatale des entreprises lës plus réprénehsibles. En effet, c'est depuis ce moinetit qu'on a vu se manifester urie ihiiub'>Minàtionprèsque complète dans la légion, uiie division fatalè entre lès vo-loiltairéSi C'est depuis èë nïoajént que l'on n'a cessé d'emp'over toutes sorte» de manœuvres pbur corrompre qùelquës soldàts et sbus-ofliciers du régiment de Guyenhe, et léUr persuader que la municipalité, lés prêtres, les nobles, lës gatholiques, étaient Rebelles àdx décrets dé l'Assemblée nationale, et que les ànciëns privilégiés surtout étaient1 la cause que * l'augmentation de paye » ordonnée par les décrets dé l'Assemblée nationale, « n'était pas êncorë efrectiiéë (1) ». C'est ainsi que l'on a préparé les fnoUVements dangereux du mois de mai, apatèéS pal4 là férrrieté et le courage des officifers municipaux, èt les scènes sanglantes dd môisf de Jtiih.
En effet, Une partfé des attclenhes cbmnagnies, soutenues par le club, et dont les capitaines se trouvaient membres de cette association, affectèrent une espèce d'indépendance debfficierS municipaux, et commencèrent à soutenir hautement que conseil permanent subsistait encore, et qUé c'était lui seul qui avait droit de dirigér la lésion. Vainement les décrets de l'Assemblée avaient supprimé tous les * conseils permanents électoraux et autres, sous quelque dénomination que ce puisse être h. C'était bien évidemment vouloir déclarer les gardes nationales indépendantes deâ municipalitésj tandis que les décrets db l'Assemblée ont toujours consacré le principe de leut* subordination.
On ne s'en tint pas à dës prêteàtiohs aussi exagérées; on se periliif biëntôt les entreprise^ les olus répréhensibke; l'état-major dei la légion indiquait, chaque jour, à l'ordre, la compagnie qui devait faire lés patrouilles de nuit et se
(1) Circonstance décisive.
Le maire, instruit d'un acte d'insubordination aussi contraire à la tranquillité publique, et ne voulant pas donner trop d'éclat à une démarche des plus répréhensibles, se contenta de marcher toute la nuit avec deux de. ses collègues, à la tête des patrouilles faites par la compagnie qui était de garde; il était averti, par des émissaires de la marche de la contre-patrouille, et après s'être séparé de ses collègues, et avoir fait retourner à l'hôtel de ville la compagnie de garde, il alla trouver la compagnie réfractaire; le capitaine était à la tête ; quelques sages et prudentes réflexions lui firent comprendre le danger et les suites funestes de son entreprise. II convint de ses torts, et le maire crut, pour un bien de paix, ne devoir point dresser de procès-verbal. Le colonel de la légion, instruit par le maire de tout ce qui s'était passé, annonça hautement la nécessité d'un règlement capable de maintenir la police et la subordination ; ce règlement ne pouvait être que provisoire et ne devait avoir d'effet que iusques après l'organisation des gardes nationales annoncée par 1 Assemblée.
Les officiers municipaux se concertèrent avec plusieurs officiers de la légion et, le 13 avril, on publia le règlement dont quelques articles ont été improuvés dans le rapport. Vainement les rédacteurs de l'adresse du club avancent que, depuis la publication du règlement pour la légion, ia division n'a cessé de s'accroître de légionnaire à légionnaire, et de citoyen à citoyen ; il est certain au contraire que, dès le mois d'août, septembre et octobre 1/89, il s'éleva plusieurs différends parmi les membres de la légion, et le règlement n'a été fait qu'en avril dernier; il est certain que ces différends ont occasionné des divisions, une insubordination qui plusieurs fois a contraint les colonels à donner leur démission; il est certain encore que ces divisions ont toujours été le fruit de l'ambition du parti le moins nombreux qui voulait dominer en choisissant exclusivement dans son sein les chefs de la légion comme il avait désiré de dominer dans la municipalité, comme il a cherché à dominer dans le district et le département. Dans le directoire du département, sur neuf membres, on compte six protestants.
. Ici, Messieurs, se présente une obervation importante: tant que le plus petit nombre a vu ses affidés diriger la légion et le conseil permanent, tànt qu'il a maîtrise la ville, on a joui de quelque tranquillité, parce que le plus grand nombre ne voulait que la paix, sans s embarrasser d'une domination dont il était peu jaloux; ce ne fut que d'après les abus multipliés d'un pouvoir despotique qu'il voulut balancer l'influence de la force armée, et partager au moins l'autorité; cette juste prétention fut bientôt le signal de la division et des entreprises les plus répréhensibles rie la part de ceux qui voyaient avec peine échapper de leurs mains une autorité, objet unique de leur ambition démesurée.
Eh! comment pouvaient-ils se plaindre d'un règlement nécessaire pour empêcher une scission entre légionnaires, d'un règlement prodamé par quelques olficiers de la légion et le
colonel; l'état-major n'avait-il pas proposé lui-même, au mois de mars, un règlement qui n'avait eu l'approbation que de quinze compagnies, sur quarante-cinq, et qui, par conséquent, avait été rejeté par une très grande majorité; le conseil général de la commune, pour ramener l'ordre, la discipline et l'uniformité de principes, si nécessaires dans un corps spécialement destiné à maintenir la tranquillité publique, crut devoir déférer aux demandes réitérées a'un grand nombre de légionnaires qui sollicitaient un règlement capable de rappeler l'entière légion aux principes et aux lois de l'obéissance. Telles sont les raisons qui déterminèrent le conseil général de la commune à faire un règlement provisoire qui fut préalablement communiqué par le procureur de la commune au commandant de la légion et à plusieurs officiers et capitaines.
Ce règlement provisoire fut agréé sur-le-^hamp par la majorité de la légion ; les anciennes compagnies, qui avaient paru d'abord vouloir le rejeter, s'y soumirent ensuite, mais ce fut un nouveau sujet de ressentiment. Quelques jours après, un sous-officier, membre du club, ayant manqué à la discipline, le jugement de sa faute fut déféré unanimement,et en exécution du règlement, au conseil générai de la commune, réuni à MM. les officiers de l'état-major de la légion, et à MM. les capitaines. Il est donc évident que ce «n'est pas le règlement provisoire qui a occasionné les troubles survenus a Nîmes, puisque son exécution a été réciaméë par les officiers dissidents eux-mêmes, et membres du club, « comme le seul' « moyen de maintenir la discipline et la subordi-« nation ».
Cependant, on avait engagé les villes circon-voisines à écrire à la municipalité de Nîmes, comme à un corps composé d'antipatriotes. Le nom d'omis de la Constitution, pris par les membres du club, ne devait-il pas donner lieu de penser que, si ceux qui contrôlaient ouvertement toutes les opérations de la municipalité étaient appelés les amis de la Constitution, il fallait bien que cette municipalité ne comptât parmi ses membres que des ennemis de cette Constitution, et de là, tous les malheurs qui ont affligé la ville de Nîmes ; en effet, Saint-flyppolite, Alais, Vezeno-bres, écrivent des lettres pleines de menaces, une entre autres du 15 avril, où l'on annonçait la venue de 12,000 Cévenols, bien robustes et bien armés; on menaçait des ennemis de la Constitution qui n'existaient que dans les libelles des calomniateurs, et il est essentiel de remarquer que les délibérations des catholiques de Nîmes sont postérieures à ces lettres peu fraternelles.
A cette même époque, et le 13 avril, on avait répandu dans la capitale un libelle incendiaire, dans lequel ou attribuait faussement aux catholiques de Nîmes un infâme placard et l'assassinat de quatre protestants frits le jour même où l'on avait appris la nomination de M. de Saint-Etienne à la présidence.
On affecta de répandre dans Nimes et dans ses environs une quantité prodigieuse de ce pamphlet, et, pendant que les officiers municipaux s'occupaient des moyens de repousser cette calomnie atroce, un grand nombre de citoyens actifs s'assemblèrent dans l'église des Pénitents et prirent cette délibération devenue depuis trop fameuse.
Les commissaires des délibérants suspendirent, pendant onze jours, la communication qui devait
être faite au corps municipal. Elle n'eut lieu (1) que le 1er mai, en l'absence du maire, et la veille du jour fixé pour son départ. Cette circonstance sufht pour répondre à tout ce qu'on a débité con tre lui à ce sujet
Que si l'on demande pourquoi les officiers municipaux de Nîmes,après le départ du maire,n'ont pas manifesté,par quelque acte authentique, combien ils improuvaient cette délibération, je répondrai qu'après avoir pris le 22 avril une délibération « tendant à rappeler les habitants de « Nîmes à cet esprit de fraternité qui seul peut « affermir la prospérité publique, à les inviter « à jouir en paix des bienfaits delà Constitution, » ils renvoyèrent à l'Assemblée nationale, ainsi qu'à toutes les municipalités du royaume. Je répondrai que la municipalité de Nîmes n'avait pas cru devoir exposer son autorité à être méconnue en improuvant hautement un acte fait par plus de 3,000 citoyens actifs représentant la plus grande
{>artie de la commune; je répondrai, enfin,que oin de blâmer cette prudente circonspection, suggérée par amour de la tranquillité, on devrait peut-être donner des éloges à la sage prévoyance qui a fait tenir à la municipalité de Nîmes, au mois de mars, et par les mêmes motifs qui ont déterminé les décrets de l'Assemblée nationale des 1er et 14 juin, une conduite absolumentsemblable, dans une circonstance aussi critique; j'aurai l'honneur de rappeler à l'Assemblée que, d'après l'avis de son comité de Constitution, elle avait rendu, le 1er juin, un décret pour casser les élections faites dans les assemblées primaires tenues à Colmar, et en ordonner de nouvelles, en se conformant à l'exécution littérale des décrets. Cependant, l'exécution de celui du 1er juin ayant occasionné quelques mécontentements dans le pays, et même du trouble dans l'assemblée des électeurs dù Haut-Rhin, séant à Belfort, les électeurs envoyèrent, par un courrier extraordinaire^ l'Assemblée une adresse contenant le tableau des inconvénients qui pouvaient résulter de l'exécution du décret du 1er juin; sur quoi l'Assemblée nationale, convaincue que la paix et la tranquillité étaieut préférables à tout, a rendu, le 14 juin, un décret qui autorise les électeurs du département du Haut-Rhin, à continuer leurs opérations « sans pouvoir être arrêtés par les « dispositions du décret du 1er juin, relatif aux « assemblées primaires de la ville de Colmar ».
La municipalité de Nîmes ayant suivi cet exemple, je me garderai bien d'ajouter aucune autre réflexion et, sans m'arrêter à quelques autres faits de peu d'importance, je passe aux événements du mois de mai.
Ici commence le récit des circonstances les plus critiques où se puisse trouver un ofticier municipal. Je réclame toute l'attention de l'Assemblée, à laquelle j'affirme sur mon honneur que je ne vais avancer aucun lait dont je n'aie été le témoin ou le principal acteur.
Le dimanche 2 mai, sur les 6 heures du soir, 5 soldats et sous-officiers
du régimentde Guyenne et quelques légionnaires des compagnies n°® 1 et
17 insultèrent à la promenade et maltraitèrent des citoyens paisibles;
ils fondirent à coups de sabre sur des hommes désarmés, et non seulement
sur ceux qui avaient des cocardes blanches, mais sur ceux qui n'en
portaient aucune, mais sur ceux qui en portaient aux couleurs de la
nation, ce qui prouve que les cocardes
Il est échappé au rédacteur de l'adresse du club un aveu bien important. « Il ne paraît pas douteux, dit-il, que le dimanche 2 mai fut le iour fixé à l'avance pour causer un grand désordre dans la ville; le bruit eu courait sourdement, on se le disait à l'oreille. »
Eh 1 oui, sans doute, le jour était fixé. Mais par qui ? Le procès-verbal ne permet pas d'en douter ; il suffit de lire les déclarations des 5,18, 21, 22, 24,25, 32, 51 et surtout des 17,18, 19 et 20e témoins.
Le simple exposé des faits ne laissera d'ailleurs aucune incertitude à cet égard.
Les premiers coups de sabre donnés, l'alarme devient générale ; on court à l'hôtel du maire l'avertir qu'il y a Une émeute sur le grand cours, il se rend à l'hôtel de ville, il y trouve le nommé Roger le fils, ensanglanté d'un coup de sabre à la tête, et déclarant à MM. les officiers muni-nicipaux « que sur le cours une partie du peuple était dans une émotion extraordinaire contre des soldats de la garnison, l'un desquels lui a asséné le coup dont il a été frappé. »
Sur-le-champ, le maire requiert 1a compagnie de garde de le suivre ; il laisse une partie des officiers municipaux à l'hôtel de ville pour donner des ordres, il se rend avec quelques-uns de ses collègues sur la promenade; ils y trouvent un peuple immense et plusieurs femmes en pleurs qui criaient : qu'on assassinait leurs frères, leurs maris, leurs enfants*
Le premier soin du maire, en entrant dans ta foule, fut d'exhorter les
citoyens au nom de la loi et du roi de se retirer paisiblement ; ce que
plusieurs exécutèrent; d'autres entouraient les officiers municipaux;
des femmes surtout demandaient justice avec une fureur incroyable. On
sait que l'imagination vive, le caractère impétueux des peuples
méridionaux donnent à leurs passions un degré d'énergie inconnue dans
les autres parties du royaume. Le maire devançait ses collègues ; il
parvint seul à cent pas de la maison au sieur La Coste, négociant; il
aperçoit plusieurs citoyens ensanglantés et le peuple extrêmement irrité
contre des sous-officiers et soldats du régiment de Guyenne et contre
quelques volontaires ; il aperçoit ceux-ci poursuivant, le sabre à la
main, le peuple qui se défendait à coups de pierre, et dont le nombre
gros-
Le procureur de la commune (2) rend le même service au nommé Barri; cependant les officiers municipaux se dispersent au milieu de cette foule immense et, tandis que les uns se rendent vers la fontaine au-devant de quelques compagnies armées pour arrêter" leur marche ou la diriger suivant le besoin, les autres tournent leurs pas vers les casernes pour annoncer aux soldats de Guyenne que leurs camarades étaient en lieu de sûreté.
Celte précaution était d'autant plus pressante qu'un membre du club
excitait dans cet instant les soldats de Guyenne à massacrer les
citoyens, en leur disant : que le peuple égorgeait leurs camarades, et
ajoutant : Courage, mes amis ; allez, frappez fort; nous vous
soutiendrons. Ce fait est prouvé d'une manière irrésistible (3),
Cependant les patrouilles avaient été redoublées, et les compagnies de garde renforcées ; le maire parcourut lui-même les différents quartiers de la ville et des faubourgs; la nuit fut tranquille*
Le lendemain 3 mai, la pluie retenant lès cultivateurs dans la ville, on craignit qu'un reste de ressentiment ne les portât à la vengeance.; en conséquence/le maire ne cessa de parcourir la ville en exhortant les habitants à la paix et à la tranquillité, et en leur promettant une prompte justice.
Le lendemain, le maire fut instruit qu'un particulier avait commandé au sieur Péret, ferblantier, 200 cartouches en fer blanc, au bout desquelles il faisait souder une grosse balle; il avait exigé qu'elles fussent prêtes pour 4 heures du soir; un pareil avis, dans de pareilles circonstances, n'était pas à négliger. Le maire chargea M. Àigon, officier muiiicipal, de veiller, avec le capitaine de santé et deux valets de ville, sur la boutique du sieur Péret. A 3 heures environ, l'officier municipal voit entrer le nommé Joseph Larnac, fils aîné, volontaire de la compagnie n 10. Il attend quelque temps pour faire la descente ; il trouve l'ouvrier fabriquant les cartouches ; le sieur Larnac était déjà nanti de plusieurs; à l'instant M. Aigon fait saisir, arrêter et conduire à l'hôtel de ville les sieurs Péret et Larnac; l'exactitude du sieur Aigon dans cette circonstance a été la cause de sa proscription au mois de juin ; à peine le bruit de cet événement fut répandu,que les alarmes commencèrent : les citoyens se portèrent en foule vers l'hôtel de ville, en criant qu'il y avait quelque trahison et qu'on voulait sans doute les massacrer. Le maire arrive, leur parle avec fermeté et les fait retirer. Ce ne fut que le lundi trois mai, après midi.que e sieur Chevalier, procureur, écrivit au maire jour le prévenir que des troubles devaient avoir lieu, et le même jour, à six heures, le maire lit publier une proclamation pour défendre aux citoyens de s'attrouper et aux volontaires de la légion ou antres de sortir armés avec quelque arme que ce soit, etc. M. le rapporteur laisse de côté la proclamation pour avoir lieu d'inculper le mnire de négligence : on iit, page 34 du rapport : D'après l'avertissement de Chevalier, nulle précaution n'est prise (1).
Cependant on rédigeait le procès-verbal relatif aux cartouches, en présence des sieurs Larnac et Péret; il résulte de leur aveu que Larnac, protestant et volontaire de la compagnie n° 10 (aont plusieurs membres avaient occasionné l'émeute de la veille), avait com mandé 200 cartouches pareilles au modèle et avait dit, chez le ferblantier : qu'il entendait que H. le maire entretiendrait la paix dans la ville; qu'autrement les cartouches qu'il commandait perceraient plus d'un ventre.
Ge verbal contient des aveux très importants. Les balles et les
cartouches saisies furent enveloppées et scellées en présence dudit
Larnac, puis déposées au greffe de l'hôtel de ville en attendant que ie
procureur du roi du présidial
L aveu dë Larnac Qu'il était occupé à fondre dès balles, la Vuë de ces balles et des cartouches échauffent promptëment les esprits.
Sur les 6 heures du soir, il survient utië tixè entre quelques personnes vers le cours Bal-lainvUliers ; bientôt ce cours, la place des Récol* lets et les rues circonvoisines sont couvertes de monde; le maire s'y rend en diligence, il parle à la multitude au nom de la loi et du roi et par-Vient à la dissiper; il rentre à l'hôtel de ville où les officiers municipaux doivent être ocodnês à recevoir les plaintes sur leS excès commis le dimanche.
Sur les 7 heures, la Vue de quelques légion^-naires, qui avaient maltraité des citoyens paisibles, occasionne uti nouvel attroupement. Lé maire prie 2 officiers municipaux dé s'y rendre4, le peuple se calme en les voyant; mais il témoigne quelque inquiétude sur des trou tes étrangères qui devaient arriver, dit*il, pendant la nuit. Les officiels municipaux s'efforçaient de dissiper ces fausses alarmes lorsque deux coups de. pistolet tirés par un protestant, près du groupe où ils étaient, mettent le peuple en fureur ; il est sourd à la voix des officiers municipmx; on le fait retirer par Une rue, il rentre par une autre; il veut avoir vengeance de l'attentat qui vient d'être commis; menaces, prières, rien ne peut le contenir ; les attroupements, lés coups;de pierre et de sabre recommencent en divers endroits. Les 2 officiers municipaux reviennent à la maison commune ; d'après leur rapport, il fut ré? solu aussitôt de proclamer la loi martiale, malgré les puissantes considérations qui pouVaieht en empêcher ; déjà les ordres étaient donnés pour rassembler lés compagnies dé la légiôh i'déjà l'on rédigeait la proclamation de la loi martiale, lorsque le lieutenant-colonel et un officier du régiment de Guyenne se font annoncer et prient, vu les circonstancês, les officiers m unicipaux de suspendre la proclamation de la loi martiale.
J'ai déjà fait lecture à l'Assemblée de la déclaration dé MM. les officiers du régiment de Guyenne.
J'ajoute seulement que ces messieurs voulurent bien, pour le maintien dû bôn ordre et d'après l'invitation dU maire, passer la nuit aux casernes, avec les Soldats.
Voici une des raisons. Le maire venait d'apprendre qde des lettres-circulaires avaient été envoyées dans La Gardonnengue, on lui avait offert d'arrêter les exprès et les dépêches, il avait rejeté ceS propositions contraires à l'inviolabilité du5 secret des lettres ; mais il avait pris en même temps les précautions suggérées par la prudence, il avait fait placer sur plusieurs routes des vedettes, dé distances en distances, qui devaient s'avertir respectivement au premier bruit et donner prompteraenl les avis convenables.
Cependant, le ma i vais temps, la nuit et l'éloi-gnement des agresseurs avaient ramené le calme ; le câpltaiiié de santé vint l'annoncer à l'hôtel de ville. Le maire commanda quatre compagnies de la légion pour faire la nuit des patrouilles renforcées; il parcourut lui-même, à la tête de ces patrouilles, les différents quartiers, laissant un officier municipal constamment de garde à l'hôtel de ville.
Cette nuit fut également calme et tranquille; le mardi 4 mai, jour de marché, le maire se rend à la maison commune et de là aux caserhes en traversant la ville, ; tout était paisible, il trouve
MM. lès officiers de Guyenne rassemblés ; il les prie de voiildit bien faire venir deux sou$-officièri de chaque'compagnie; l'ordre doiiné fut prompte^ ment exécuté. Lè maire commence par rappeler la concorde qui avait toujmrSr gné entré lè brave régiment de Guyennê et leS citoyens de Nîmes ; « Titéâôigne Ses regrets sur le coup de feu reçu f là Veille par Uh grenadièr; il se félicite de « Ce qu'dUCun autre membre du régiment de « Guyenne n'était blessé dangereusement; il « ajoute'ipi'aucun citoyen n'avait reçu de blesSure « mortellé; qu'il était vrai que quelques soldats « avaient été trompés pouf comtheflcer la que-« rellepêl ptuietirs voix s'élevèrent et dirent : « Nous voulons les connaître pout eû faire justice « nous-mêmes. »
Postérieurement les grenadiers et chasseurs ont dénoncé (1) eux-mêmes à leurs supérieurs trois sotiSi-officiers et trois soldats qu'ils avaient vus la veille se porter à de grands excès contre les citoyens;
Lë maire leur dit : « que dans cette circott-« stance; il fallait oublier réciproquement tout « sujet de plainte, vivre en paix comme de « bons militaires citoyens et de bons citoyens « militaires ; ce raccommodement doit être l'ou* « vrage de MM. lés Sous^bfficiers du régiment de « Gtivenne et de la légion; leur exemple, tou-* « jours si puissant sur leurs camarades, Sôra le «, signai le plus certain de la concorde et de „la « paix. Je vous le demande, braves militaires, « en reconnaissance de toutes les preuves d'es-« time, d'attachement et de prévenance que j'ai « été assez heureux de donner au régiment, de * Guyenne, depuis plusieurs années, et surtout « dins cette dernière circonstance.
« Comptez sur nous, Monsieur le Maire, nous « n'oublierons jamais qu'à diverses reprises « vous avez exposé vos jours pour sauver ceux « de nos camarddés. »
Le maire se sépare alors de ces braves militaires qui lui donnèrent des marques de leur reconnaissance; il dit à M. le_lieutenant-colonel et aux autres officiers présents ;,« Le régir « ment me paraît bien disposé, il n'y a plus de « risque â proclamer la loi martiale au premier « attroupement. Si j'ai besoin de renfort, je « compte sur vous et je réclamerai votre se-« cours. »
' Le maire aperçoit en revenant à l'hôtel de ville quelques groupes de citoyens sans armes dont plusieurs lui déclarent qu'ort avait envoyé des exprès dans la Gardonnengue et dans l'Avaunage pour faire venir.des troupes étrangères. Le maire leur représente qu'aucune troupe armée ne peut entrer sur le territoire d'une municipalité, saas une permission expresse des officiers municipaux. « Séparez-vous, leur dit-il, je réponds de tout et je veillerai pour vous. »
On obéit sur-le-champ. Quelque temps après, les inquiétudes recommencèrent dans les faubourgs par où les troupes étrangères devaient arriver ; les femmes surtout répandirent l'alarme, et il se forma de nouveaux attroupements (2).
" Le conseil général de la commune est aussitôt convoqué et le colonel de
la légion, averti d'en-
Leurs soins ne furent point infructueux; après quelques démarches amicales de part et d'autre, le* officiers et soldats de Guyenne, ayant à leur tète le major et le lieutenant-colonel, des officiers et volontaires de la légion, des citoyens de toutes classes, mêlés les uns avec les autn-s devant les casernes, s'embrassent fraternellement ; ils se prennent par la main, en signe de réjouissance , au nombre de 4,000 d'abord, et successivement au nombre de 12,000; ils dirigent, en dansant à la mode du pays et au son des instruments, leur marche vers l'hôtel du maire, qu'ils viennent remercier de ses soins infatigables (1) pour ramener la paix.
Le maire descendit avec eux en faisant ]a chaîne et, parcourant successivement les rangs, il reçut les embrassements de M. le lieutenant-colonel, des soldats» des sous-officiers du régiment de Guyenne, de la légion et des citoyens, aubruit des applaudissements d'une multitude qui fondait en larmes et qui ne cessait de crier : Vive le roi! vive la nation! vive notre maire! vive V union!
Depuis cet instant,et jusqu'au moment de son départ, il n'a pu se montrer dans les rues ni dans aucun lieu public sans recevoir les preuves les plus touchantes de l'amouret de la reconnaissance générale.
Voilà, Messieursj un fait positif qui répond à toutes les câ'omnies insensées dans l'adresse du club, et contre lequel ne prévaudront jamais les efforts et les dépositions des malveillants.
Ils ont osé le révoquer en doute, puisqu'ils déclarent dans leur (2) lettre à M. le président de l'Assemblée : « qu'ils ont vu avec beaucoup de sur-« prise des soldats de Guyenne, des légionnaires « de plusieurs compagnies et un grand nombre « de citoyens dansant ensemble : Nous avons en-« tendu des cris de : Vive le roi! vive la nation! « M. de Bonne (c'est le lieutenant-colonel du ré-« giment) et M. le maire les précédaient ; nous « ne pouvons vous donner aucune notion sur « cette réunion subite. »
On croira sans peine que ceux qu i avaièntexcité des soldais du régiment
de Guyenne et maltraité les habita uts ont vu avec beaucoup de surprise
la réunion amicale des soldais de Guyenne, des légionnaires et des
citoyens; ou croira sans peine que cette réconciliation a déconcerté les
projets de ceux qui avaient envoyé des exprès pour rassembler et faire
venir à Nîmes un grand nombre de gens armés.
On doit avoir fait une observation bien importante : c'est que l'adresse du club, signée le 4 mai, n'a pu partir le même jour qu'à 6 heures du soir; c'est que la paix était faite avant trois heures; c'est que, par conséquent, au iieud'éoV voyer une adresse pleine de calomnies et propre à alarmer les représentants de la nation sur la tranquillité de la ville de Nîmes, les membres du club auraient dû faire partir la lettre contenant Vannonce du retour de la paix; mais ils eurent grand soin de ne la faire partir que le lendemain (1), et leur aveu est précis à cet égard : « Nous joi-« gnans, disent-ils, dans leur lettre du 5 mai, « 2 pièces que nous avons oublié d'insérer la « veille, et qui annonçait que tout était calme et « tranquille. »
Comment les soi-disant amis de la Constitution ont-ils pu se permettre cette misérable subtilité, digne d'un praticien? Comment avaient-ils pu deviner à Nîmes que la lecture de leur adresse suffirait- pour obtenir un décret qui manderait à la barre le naaire de Nîmes, et qu on ne voudrait pas même lire le verbal des officiers municipaux, envoyé en même temps que l'adresse du club à M. le Président de l'Assemblée nationale? le voici, car M. le rapporteur l'a passé Sous silence.
« Du
« Nous officiers municipaux soussignés, étant « encore assemblés à 3
heures après midi, dans « llhôtel de ville pour recevoir les plaintes
des dif-« férents citoyen s etécrireàM. lePrésidehtde l'As-« semblée
nationale et aux ministres, sur ce qui « s'était passé la veille et dans
le courant de la « journée, on est venu nous annoncer qu'une « foule
immense de citoyens réunis sur la place « dés casernes venaient le se
réconcilier avec les « soldats et bas officiers du régiment de Guyenne ;
« enchantés de la paix qu'ils venaient de Se jurer « entreeux.ils
s'embrassaient,dansaient, criaient : « Vive le roi! vive la nation! et
allaient bras à « bras, à l'hôtel de M. le maire, pour le remercier « de
ses soins infatigables. Bientôt M. le maire, « précédé par M. Aigou,
officier municipal, est « entré dans la salle et à confirmé cette
heureuse « nouvelle. Dans cet instant le bruit des tambours « et des
instrumentsa annoncé le cortège; il était « nombreux, immense, eties
cris de : Vive le roi! « vive la nation ! vive la loi! vive le maire!
vive le « régiment de Guyenne '.vive l'union!, extrêmement « multipliés,
s'élevaient dans les airs. Alors nous, « maire, accompagné de MM. les
officiers munici-« paux, dtt substitut du procureur delà commune, « de
M. le lieutenant-colonel du régiment de « Guyenne et de plusieurs
officiers de ce régiment, « avons fait enlever le drapeau rouge auquel «
nous avons fait substituer aussitôt le drapeau « blanc; le peuple, en le
voyant, a poussé des cris « de joie et a renouvelé lès acclamations de :
Vive v le roi! vive la nation ! e't il a demandé une illu-
Pendant que la calomnie circulait en poste et inculpait les officiers municipaux de Nîmes dans tout le royaume, la soirée fut employée dans Nîmes à danser et à se réjouir. La ville fut illuminée, excepté les maisons de la plupart des membres du club qui n'avaient pas eu sans doute encore le temps de revenir de leur grande surprise; on fit des feux dé joie dans les rues, on chanta des couplets à la louange du maire, des officiers municipaux et du régiment de Guyenne ; on se félicitait, on s'embrassait, et cette journée fut l'époque heureuse de la réconciliation.
Cepeudant, les patrouilles furent doublées pendant la nuit. Le maire et les officiers municipaux parcoururent, à leur tête, les divers quartiers de la ville, pour empêcher que les transports mêmes de la joie ne devinssent dangereux; tout se passa dans l'ordre et l'allégresse.
Le mercredi 5 mai, le premier soin du maire et des officiers municipaux fut d'aller visiter et recommander à l'Hôtel-Dieu le grenadier du régiment de Guyenne, blessé au bras d'un coup de feu ; un accident étranger à cette plaie a fait périr cet infortuné, le septième jour ; il a été la seule victime que l'humanité ait eu à regretter à cette époque, et malgré l'appareil effrayant des plaies occasionnées par les coups de sabre, aucun autre individu n'a été blessé ni mortellement, ni dangereusement ; aucune maison n'a été ni pillée ni dévastée, aucun citoyen n'a été obligé de s'expatrier, parce que les officiers municipaux avalent quelque autorité ; que si l'on compare ensuite les dévastations, les pillages, les massacres du mois de juin, peut-on contenir son indignation contre ceux qui, à cette dernière époque, ont commencé par maltraiter et proscrire les officiers municipaux, pour méconnaître et envahir leur autorité ?
Deux autres circonstances font mieux ressortir encore l'injustice du club, et la reconnaissance générale, pour les soins paternels des officiers municipaux, auxquels le régiment de Guyenne et 40,000 habitants publiaient hautement que l'on devait la tranquillité publique.
Les sous-ofhciers du régiment de Guyenne et de la légion vinrent encore, au son des instruments, faire visite aux officiers municipaux et les remercier de leurs soins vigilants et de l'heureuse réconciliation qui était leur ouvrage.
Le cortège étant trop nombreux pour contenir dans les salles de l'hôtel de ville, le maire parut sur le balcon, et le sieur Ramond (1), sergent-major, portant la parole au nom de tous, dans la place publique, remercia spécialement le maire de ses soins actifs pour le maintien de la concorde.
Le même jour, le conseil général de la commune, pour cimenter de plus en
plus l'union, décerna une médaille civique au nommé Gavanon, soldat du
régiment de Guyenne, pour avoir sauvé un enfant prêt à se noyer. Les
officiers municipaux le menèrent dans leur loge à la comédie, avec le
jeune citoyen dont il avait conservé les jours ; l'affiuence était
considérable ; on représentait une pièce nouvelle en vaudeville,
intitulée : L heureuse réconciliation, dans laquelle on ne cesse de
laire l'éloge des officiers municipaux, du régiment de Guyenne, de son
respectable chef et du maire, auquel i'actrice présenta une cou-
Cette pièce a été redemandée généralement, et représentée de nouveau, à la même époque, où, par un décret,l'Assemblée nationale a convoqué le maire de Nîmes à la barre; c'est encore un de ces faits contre lesquels les efforts des factieux viendront se briser, et qui répond péremptoirement à toutes les calomnies.
Dans la journée, le bruit de l'arrivée de quel-crues troupes armées s'était répandu de nouveau; 1 affluence d'étrangers habillés en gardes nationales, augmente les alarmes (1).
Outre les précautions ordinaires, le maire écrit au commandant de la maréchaussée le billet suivant :
« J'apprends, dans l'instant, Monsieur, que le ^ peuple est alarmé sur l'arrivée prochaine d'un « grand nombre de gens armés venant des Cè-« vennes et de la Gardonnengue; veuillez bien « faire partir, sur-le-champ, des personnes pru-« dentes sur les routes d'Alais et d'Anduse et « concourir avec moi à tranquilliser les citoyens, « en employant lès moyens que vous croirez les « plus convenables pour découvrir la vérité et « prévenir les malheurs qui pourraient en résul* « ter. » Nîmes, le 5 mai.
« Marguerittes, maire. »
Les ordres sont donnée et ponctuellement exécutés. An retour des cavaliers, M. Duprat s'empresse d'écrire la lettre suivante à M. le maire et de lui communiquer le rapport fait par ses cavaliers :
« Les sieurs Pastre et Blanc, étant partis cette « nuit, d'après votre réquisition, n'ont rien ren-« contré sur les routes d'Alais et d'Anduse; ren-« dus au village de la Galmette, ils ont pris des c informations dans ce lieu, près de M. le maire « relativement à la descente que l'on craignait, à « Nîmes, de la part des habitants des Gévennes « et de la Gardonnengue. Ge dernier leur a ré-« pondu qu'il avait effectivement ouï dire que « le trois et le quatre du présent mois, il avait « pasé des gens qui avaient déclaré s'en aller « dans les Gévennes (2) pour faire descendre du « monde dans la ville de Nîmes, etc., etc. »
Copie de cette lettre importante a été remise sous cote n° 17. M. le rapporteur n'en a fait aucune mention, il n'a pas jugé à propos, non plus, de lire à l'Assemblée les déclarations faites par 2 habitants de Saint-Florent, qui prouvent, invinciblement, le projet, déjà formé au mois de mai, de faire arriver à Nîmes des étrangers armés, projet déjoué à cette époque par la prévoyance du maire ; je dois réparer cette omission importante.
Extrait du verbal du jeudi 6 mai 1790.
« Sur ce qu'un grand nombre de citoyens se
* présentèrent hier soir (Jeyant le corps munici-« pal, dijms l'hôtel de ville, pour annoncer qu'il « était arrivé plus de 800 gardes nationales « du côté de la Gardonnengue ou de l'Avaunage, « les uns avec des fusils, les autres avec des « sabres, les uns à pied, les autres à cheval, et « que l'alarme s'était répandue dans la ville; « nous nous sommes transportés successivement « dans les diverses auberges de Nîmes et, après « les interpellations faites aux maîtres auber-« gistes, ceux-ci nous ont déclaré, en effet, qu'ils « a\aient vu,à la couphée, plusieurs gardes natio-« nales étrangers au l'élit Saint-Jean, dont un a « été reconnu être de Saint-Florent, et icelui, « mandé venir. »
S'est présenté M. Rivière, lequel, aprjès serment, par lui fait, de dire la vérité, a déclaré, de ce interpellé, s'appeler Jean-Louis Rivière, bourgeois du litu et paroisse Saint-Florent, diocèse d'Uzès, âgé d'environ 39 ans.
Interpellé, etc., interpellé, etc.
Interpellé de déclarer si, dans la route, il n'a pas vu des gens attroupés et armés, et s'il en connaît les causes :
« A répondu et déclaré qu'arrivé à Boucoiran, : à l'auberge où pend pour enseigne la Cpoix-« Blanche, sur J'iwure de 11 heures du matin, « accompagné du sieur .Honoré Sugier, hôte du-« djt lieu de Saint-Florent, il demanda à se ra-« fraîchir ; qu'environ une demi-heure après il « entra dans l'auberge une douzaine de bourgeois « mis décemment ; que, d'un air foyt ému, l'un « d'eux fit à hante voix, dans la cuisiné, lec-« ture de 2 lettres qu'il dit ayoir reçues de « Nîmes; que ces lettres parlaient en détail de « | émeutes arrivées à Nîmes les' dimanche « et lundi derniers; de la proclamation dé la loi « martiale et de la paix qui l'avait suivie de « près; qu'elles portaient encore que la muniçi-« palitê était soupçonnée d'avoir pris part à Vé-« meute-, qu'à la lecture de ces lettres, ces mes-« sieurs paraissaient §' chauffer; ils délibérèrent « qu'il ne fallait pas en rester là; qu'il fallait au « contraire se réunir, s'ai.mer et se disposer à « partir au piemier mouv ment; qu'il ne fallait « pas s'intimider; celui qui lisait ces let.tres as-« surant qu'il aurait 10,000 hommes à sa dispo-« sition, mais que,n'étaut pas tous armés, il faf-« lait que les communautés se procurassent des « armes, de la poudre et des baltes; que si les « communautés s'y refusaient, il (allait que tous « les gens aisés contribuassent à cette dépense.
« Interpellé de déclarer s'il connaît ces mes-« sieurs, a déclaré qu'il n'en connaît aucun : « niais qu'il avait demandé au nommé Roustan « dit Privai, natif de Sai&t-Florent, yaiet d'écurie « de l'auberge, nui étaient ces mes.-ieurs, et,s'ils « étaient catholiques ou protestants, et quelle « était la religion de l'aubergiste, ledit Roustan « répondit que celui qui avait fait la lecture « des 2 lettres était M. Labarège, colonel de la « garde nationale du lieu de Vtzenobres ; qu'il y
avait le maire de Ners; qu'ils étaient tops des « environs de Boucoiran, qu'ils étaient tous pro-« testants, ainsi que l'aubergiste; qu'après cette « délibération ces messieurs s'étaient retirés dans « un salon, tout psès de la.cuisine.
« Qu'après s'être rafraîchi, et au moment de « son départ, «ledit -sieur Rivièie »a.vui,t vu arriver « à cheval 4 messieurs?, dont il recoini! t ie sieur « Encontre, ministre de'la religion réformée, et « le sieur Saint-Germain ton lits, aussi ministre; f que tous quatre mireut pied à terre dans l'é-
curie de .l'&usberge et qu'avant de sortir de lar
« dite écurie ils délibérèrent entre en* qu'il fal-« lait faire partir de suite des exprès et pans « débrider; qu'ayant demandé audit Roustan, « valet d'écurie, qui étaient les 2 autres mes-« sieurs, que lui, Rivière, ne connaissait pas, ce-« lui-ci répondit : Ce sont 4 ministres; que ledit « sieur Rivière monta à cheval dans l'écurie, ou « il laissa ces 4 messieurs, et partit avec ledit « Sugier pour se rendre-en ville.»
Interpellé, etc.
« Lecture faite au sieur Rivière, a déclaré qu'il « y persiste; ajoutant que, lorsqu'on fit lecture « de.$ 2 lettres ci-dessus mentionnées» il y « avait un monsieur qui écoutait ladite lecture « et qui se dit être marchand de soie de Nîmes, « et revenir d'Alais; et ci-dessus contenir vérité.» Et a signé : Rivière, etc.
« Du même jour a comparu Noël Sugier, « aubergiste du lieu de Saint-Florent, p
Sa déclaration est conforme à la précédente. Il est donc inutile de la répéter.
La tranquillité étant rétablie le 6 mai, et la paix 0e trouvant consolidée, le maire annonce à ses collègues son prochain départ pour la capitale. Le conseil général de la commune prend, en son absence, la délibération, suivante :
(C est encore une des pièces oubliées par M. le rapporteur.)
« M. Mufgeas, président, a dit la situation « très fâcheuse où la ville s'fst trouvée dimanche, « lundi et mardi derniers; le courage -e,t la sa-« gesse avec lesquels, unissant la modération à « la fermeté, M. ie baron de Margueritteg, maire., « est parvenu à ramener la tranquillité, les « craintes que plusieurs indices pourraient ins» « pirer sur sa durée, sont autant de motifs pres-« sauts pour engager le conseil général de la « commune à faire différer le départ de M- île « maire, puisque le salut des citoyens peut en « dépendre; le peuple paraissant d'ailleurs dé-« terminé à s'y opposer, requérant qu'il en soit « délibéré.
« M. le procureur de la commune entendu, le « conseil général considérant que ce n'est qu'à « la même (Conduite sage, et m1 smée de M. le « maire, que les citoyens doivent de retour de « la paix et ila sécurié dont ils jouissent; que « rien -ne peut les affermir davantage que la « présence 4e ce digne chef dont les vertus les « ont .produites: persuadé que l'Assamblée na-« tionale verra, avec .ce vif intérêt quelle prend « à la conservation, du peuple, un retard qui l'a « uniquement pour motif, ,le vœu de ce même « peuple étant toujours à considérer; il a de « nouveau -et.de t lus fort unanimement délibéré « de supplier l'Assemblée national^ d'accorder « nn second congé à M. le mai e et néanmoins « de rengager, par tou3 les motifs de patrio-« tisme qu'il a manifestés avec tant d'énergie et « de succès, de vouloir bien se .rendre au vœu « du peuple et du conseil général, en différant « son départ jusques à,la réponse de l'Assemblée « nationale. »
« Délibéré de plus, qu'extrait de la présente « (délibération sera adressé à M. le .président de « l'Assemblée nationale, ed; qu'un autre extrait « en sera présenté à M. le maire. »
Le lendemain 7 était le jour indiqué pour îles assemblées primaires des d3 sections de la ville et de sa banlieue; MM. les commissaires du roi au département du Gard .m'engagèrent à ne pas m'absen-ter de la vrlle -pendant la nomination des électeurs, et m'écrivirent ipour ;me prier de rapporter ma vigilance auprès de xedte assemblée.
Je me rendis à leur désir, et mon départ fut conséquemment retardé de quelques jours.
La nomination de 43 électeurs fut achevée sans trouble le dimanche 9; 12 non-catbo-liques (1) furent choisis; quinze membres du conseil réunirent la très gr.mds pluralité des voix, ce qui prouve invinciblement le vœu du plus grand nombre des citoyens actifs de Nîmes.; ce qui prouve qu'ils rendent aux officiers municipaux la justice qui leur est due; ce qui prouve que les allégations hasardées par les membres du club, à l'époque des assemblées primaires, n'ont pas produit (du moins à Nîmes où les factieux sont connus) l'effet qu'ils en attendaient; ce qui prouve enhn, d'une manière irrésistible, que la cause véritable des divisions qui pnt agité la ville de Nîmes est la prétention du plus petit nombre de parvenir, par toutes sortes de moyens» à faire la loi au plus grand, ce qui serait un peu contraire à la Constitution et aux décrets de l'Assemblée.
Instruit des vœux du peuple et du conseil général de la commune, pour que mon départ fût différé jusqu'à la réponse des représentants de la nation ; mais empressé de reprendre mon poste, et interprétant le silence de l'Assemblée sur la prolongation de congéque j'avais demandée, je fis partir secrètement, dans la nuit du 10, une voiture que je pris à loyer pour mieux cacher mon départ; elle fut arrêtée par deux patrouilles qui la laissèrent passer, ne laconnaissantpas pour m'appartenir. D'un autre côté le peuple observait les pas de celui qu'il croyait utile à sa conservation (ce sont ses propres expressions).
Pour me dérober à cette vigilance et à cet empressement, je sortis dès le grand matin, le 11, jour de marché ; je visitai successivement et suivant mon usage les étaux de boucherie, les poids des revendeurs, les différentes qualités de pain ; je traversai, en remplissant les fonctions municipales, la ville et le faubourg de Richelieu, qui aboutit au chemin de Lyon, je joignis à pied une de mes voitures qui me conduisit à quatre lieues et je pris la poste pour me rendre (2) en diligence dans la capitale.
En partant, j'avais laissé une lettre pour le conseil général de la commune, dans laquelle je prévenais mes collègues de mou départ, et des motifs qui m'avaient contraint d'en faire un mystère à tout le monde.
Cette lettre donna lieu à une prompte convocation du conseil général de
la commune, qui délibéra de nouveau de demander un congé pour le maire
dont l'absence affligeait les bons citoyens, et surtout la classe
infortunée. - Cependant la calomnie avait devancé mes pas. Des lettres
circulaires, des adresses calomnieuses, qui inculpaient la municipalité,
avaient été répandues mec profusion dans les provinces cir-couvoisines.
J'échappai comme par miracle aux pièges qui m'attendaient sur la route,
et plusieurs membres de cette Assemblée en ont été personnellement
instruits. Je ne m'arrête pas au danger que j'ai couru de perdre la vie;
je venais de
Ici, Messieurs, se termine le compte que j'avais à rendre à l'A-sernblée des événements du mois de mai, et de ma conduite en qualité de maire de Nîmes. Il résulte de ces faits multipliés (et les faits doivent toujours l'emporter sur 1 s raisonnements et les réticences}, que le maire de Nîmes, avant son départ avait rétabli la paix dans sa patrie; que les citoyens étaient réunis et les soldats égarés revenus de leurs préventions, et qu'à la sollicitation du maire, les ministres des deux religions avaient prêché, la veille,laçoncorde entre concitoyens. Je ne me permets aucune réfi xion, et je passe aux scènes d'insubordination, de carnage et de dévastation du moi» de juin, dont le souvenir affligera longtemps les âmes sensibles.
(L'Assemblée décrète qu'il y aura, demain soir mercredi, une séance extraordinaire et renvoie à cette séance la suite du discours de M. de Marguerittes.)
(La séance est levée à dix heures.)
présidence de m. duport. Séance du mercredi
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier au matin, qui est adopté.
Un de MM. les secrétaires fait lecture des adressés suivantes :
Adresse de M. de Bebinière, inventeur d'une nouvelle pompe contre les incendies, qui a obtenu les suffrages de l'Académiè. Il a donné son secret gratis à la nation; mais, à l'mstant de partir pour Brest, par ordre du ministre, il demande une somme de 30,000 Lyres.
Adresse des employés aux fermes à Paris, qui supplient l'Assemblée nationale de prendre en considération leur Service et leur position actuelle.
Adresse dés élèves du chef-lieu du département de la Corrèze, qui annoncent leur désir de contribuer au succès de la Révolution et qui assurent rAssemblée qu'au moment où leurs pères seront appelés à la aefense de la patrie, ils marcheront sur leurs pas et sacrifieront leur vie pour le maintien de la Constitution.
J'ai reçu de la marine et du commerce de la ville d'Arles une pétition très importante, appuyée par la municipalité de cette ville; elle est relative au mauvais état dans lequel se trouvent les embouchures du Rhône, aux obstacles qu'y rencontre journellement la navigation et a la nécessité d y apporter des améliorations.
A cette pétition est joint un mémoire d'ingénieur accompagné de pièces.
MM. les députés du département des Bouches-du-Rhône demandent le renvoi de la pétition au comité de commerce et d'agriculture et l'impression du mémoire.
La réflexion que vous venez de faire, Monsieur le Président, me donne lifeu d'en faire une autre. En 1722, en vertu de lettres patentes aéceptées par les fermiers généraux, 1* ferme générale s'engagea à employer le produ t de 5 sols par minot de sel, imposés sur les provinces ae petite gabelle, à la réparation des embouchures du Rhône. Malgré cela* les fermiers généraux n'sont pas employé une fois 5 sols.
En 1788, après des plaintes répétées, le gouvernement envoya un ingénieur en Provence ; cet ingénieur lit son rapport, et c'est précisément ce rapport que l'administration du département nous envoie et dont elle demande l'impression.
Il faut donc savoir ce que les fermiers généraux ont fait des 5 sols par minot qu'ils devaient employer aux réparations dont il s'agit.
Je demande qu'ils soient tenus de rendre compte au comité des finances, les députés du département présents, de l'emploi de ces sommes.
Les fonds étaient toujours rendis au gouvernement qui se chargeait des dépenses, les faisait ou ne les faisait pas.
Mais les fermiers généraux le diront.
Je demande que le comité des finances soit autorisé à faire rendre compte aux fermiers généraux de leur administration.
La motion de M. l'abbé Gouttes est très sage, mais elle est prématurée. On avait proposé de former une commission pour la reddition des comptes des anciennes administrations ; et, en effet, le comité des finances est déjà trop occupé par ses travaux ordinaires pour qu'il puisse s'occuper encore d'un compte qui durerait peut-être six mois.
Voici le projet de décret que je propose :
Art. Ier.
« L'Assemblée nationale renvoie à son comité de commerce et d'agriculture, la pétition de la marine, du commerce et de la municipalité d'Arles pour faire son rapport sur cet objet le plus tôt possible.
Art. 2.
« Elle ordonne que le rapport de l'ingénieur envoyé, en 1788, aux
embouchures du Rhône par le gouvernement, sera imprimé et distribué aux
membres de l'Assemblée nationale (1).
« Le comité des finances se fera rendre compte ar l'administration des fermes générales, les éputés du département dès Bouches-du-Rbône ouïs, de l'emploi qui a été fait du produit de 5 sous par minot ae sel, imposés sur les provinces de petite gabelle par lettres patentes du mois de juillet 1722, ledit produit destiné aux réparations et travaux des embouchures du Rhône, pour, le rapport fait incessamment sur cet objet par le comité des finances, être statué par l'Assemblée nationale ce qu'il appartiendra. » (Ce décret est adopté.)
Messieurs, tes députés de la Charente-Inférieure ont reçu- de la municipalité de Saint-Jean-d'Angély une pétition dan> laquelle elle expose qu'elle a été trop légèrement inculpée dans Crtte Assemblée et que plusieurs pièces essentielles n'ont pas été remises ,au comité des rapports; elle demande la revision de l'affaire qui lui a été suscitée.
Nous avons jugé que cette pétition était fondée et nous vous demandons d'en ordonner le renvoi au coaiité des rapports. (Ce renvoi est décrété.)
J'ai reçu de la municipalité de Moret le procès-verbal du passage de Mesdames,, tantes du m, dans cette localité.
Plusieurs membres : L'ordre du jour l
Un grand nombre de membres : Lisez I lisez 1 (La lecture du procès-verbal est ordonnée.)
, secrétaire, lisant :
« Moret, le
« Monsieur le Président, « Nous avons l'honneur de vous faire parvenir ci-inclus le procès-verbal que nous avons dressé à l'occasion du passage de Mesdames, tantes du roi, dans notre ville, ce matin entre 6 et 7 heures ; vous en ferez tel usage que vous-croirez convenable.
« Nous sommes avec les sentiments les plus respectueux, etc.
« Signé : Les officiers municipaux de la ville et du canton de Moret. » 1
Procès-verbal. {
« Cejourd'hui 20 février 1791, à 7 heures du matin, la municipalité de Moret, instruite par le cri public du passage de Mesdames, tantes du roi, dans cette ville, instruite par la voix publique des oppositions diverses qu'avaient apportées à leur départ leurs frères et concitoyens les habitants de Paris; instruite encore que leur arrivée dans cette ville avait plutôt l'air d'une fuite que d'un voyage libre, a requis la garde nationale de s'opposer à ce qu'elles passent outre sans avoir au préalable fait viser leurs passeports.?
« lin vertu de laquelle réquisition un membre de la garde nationale a sur-le-champ ordonné la clôture des portes de ladite Ville; quoi voyant, un particulier, décoré du cordon de l'ordre de Saint-Louis, s'est transporté chez le. procureur de la commune à l'effet d'y faire viser les passeports de Mesdames. De son côté, le membre de la garde nationale qui au préalable avait obtenu de l'olW
ficier commandant un détachement de3 chasseurs de Lorraine, après avoir déclaré qu'il ne serait fait nulle violence et que le visa de la municipalité serait attendu, s'est transporté chez le maire, et de là s'est rendu, accompagné d'icelui maire chez le susdit procureur de la commune, où il a trouvé le particulier susdésigné, qui leur a fait voir des passeports signés du roi, contresignés de M. Montmorin, ministre, lesquels passeports sont pour Mesdames, tautes du roi, allant à Rome. t « A en outre représenté le susdit particulier, se disant homme d'honneur, pour accompagner Mesdames, un avis de la municipalité de Paris, signé de M. Dejoly, secrétaire-greffier, qui dit que le3 lois autorisant chaque particulier de voyager dans tel endroit du royaume qui lui plaît, en conséquence elle n'a pas cru devoir donner un pouvoir sur une chose qu'elle n'avait pas droit d'empêcher.
« Sur quoi réfléchissant, la m inicipalité de Moret avait remarqué une contrariété frappante : c'est que les passeports du r oi étaient pour Rome et l'avis de la municipalité donné sur la liberté de voyager dans le royaume; en conséquence, elle avait déterminé d'interrompre le voyage de Mesdames jusqu'à ce qu'elle ait pu faire passer à l'Assemblée nationale le présent procès-verbal et connaître si elle devait, ou non, laisser passer outre Mesdames, tantes du roi.
« Pendant laquelle explication, des chasseurs du Lorraine, au nombre de 100 environ, renforcés des gens de la maison de M. Montmorin, gouverneur et maire de Fontainebleau, arrivèrent en courant à toute bride, les armes en mains, pour forcer l'ouverture des portes ; ce qui eut lieu par la terreur que porta dans la ville cette espèce d'armée, arrivant sans ordre, sans pouvoir et sans avoir consulté même la municipalité, qui se disposait dans cette circonstance à remplir son devoir, conformément aux lois; que d'ailleurs l'heure de l'arrivée de Mesdames en cette ville, qui était entre 6 et t heures du matin, leur donnait à soupçonner qu'elles avaient marché une partie de la nuit; que par conséquent elles fuyaient plutôt qu'elles ne voyageaient; qu'en outre, ayant été fait usage de ia force armée, sans réquisitoire de la municipalité et des ruses pour tromper tant les habitants de celte ville que les officiers municipaux, ils ont cru à propos de dresser et rédiger le présent procès-verbal, qui sera envoyé sans délai à M. le Président de l'Assemblée nationale pour servir et valoir ce que de raison. « Signé sur la minute des procédures, etc.
« Signé : Hutteau, secrétaire-greffier. »
Je remarque dans ce procès-verbal deux circonstances frappantes et très essentielles.
La première est que le passeport d ? Mesdames est contresigné du ministre des affaires étrangères. Ce ministre ne pouvait assurément pas ignorer qu'une pétition de la municipalité de Paris, relative aux devoirs des membres de la dynastie, avait été renvoyée par l'Assemblée à son comité de Constitution qui devait nous en faire le rapport; il paraît bien étrange qu'il ait cru devoir se permettre de contresigner ce passeport avant que l'Assemblée eût pris un parti sur cette pétition. Je soutiens qu'il ne pouvait pas te faire. (Murmures et applaudissements.)
J'observe qu'il est bien extraordinaire que des dames qui, dans leur jeunesse, n'ont jamais voyagé que de Paris à Versailles et de Versailles à Paris... {Rires.)
Plusieurs membres : Et à Plombières.
Si le préopinant et l'Assemblée croient devoir entrer dans la confidence d'une conversation particulière, je demande à l'entretenir à mon tour : une pétition n'est pas une loi.
Rien n'est si facile que de trouver un orate ir ridicule lorsqu'on l'interrompt au milieu d'une plrase.
Je dis que le ministre savait bien que Mesdames ne pouvaient aller de Versailles à Paris sans une autorisation du roi, alors législateur. Cette loi, par laquelle aucun membre de la dynastie ne pouvait s'absenter sans un passeport du chef de la nation, n'a pas été annulée et il est surprenant que M. de Ciermont-Tonnerre ne la connaisse pas.
Un membre à gauche : Il la connaît !
Mais je remarqua dans le procès-verbal de la municipalité de Moret la dénonciation d'un autre fa t beaucoup plus grave, parce qu'il tend à mettre la Constitution en danger.
Cent chasseurs, sans réquisition d'aucun pouvoir civil, forcent lus portes de la ville, attaquent les citoyens et les gardes nationales et font sauver Mesdames.
Dj quel droit ces chasseurs ont-il forcé les portes de la ville de Moret et violé son territoire? Le sang aurait coulé si les citoyens de cette ville eussent fait quelque résistance. La Constitution a été oatragée, les lois de l'Etat mises en oubli et les pouvoirs confondus.
Si vous souffrez que des troupes de ligne puissent, sans réquisition, prendre les armes, attaquer les citoyens et agir dans un se is contraire à la loi, vou n'avez, Messieurs, qu'à déchirer vot«e Constitution ; car vous n'êtes plus libres. (Vifs applaudissements à gauche et dans les tribunes.)
Sans donner ni tort ni raison à qui que ce soit, je conclus à ce que le procès-verbal qui vient de vous être lu soit renvoyé aux comités militaire, des rapports et des recherches réunis. Les faits qu'il dénonce méritent toute l'attention de ces trois comités, puisque tous les pouvoirs sont compromis.
(de Saint-Jean-d'Angély). Je crois, avec M. Rewbell, qu'il est impossible que l'Assemblée ne porte une trop sévère attention sur une violation manifeste des lois constitutionnelles de l'Etat, qui attribuent exclusivement aux municipalités et aux corps administratifs le droit de requérir la force militaire. La mesure du renvoi de cette dénonciation au comité des recherches est très importante; mais je pense qu'il faut y ajouter celle de faire vériher promptement les faits contenus au procès-verbal pour que le comité des recherch s puisse en rendre incessamment un compte exact et détaillé. Il faut que le département envoie des commissaires pour vérifier ces faits. (Murmures.)
Un membre ; Le département ne peut pas informer.
(de Saint-Jean-d1 Angély). Oj me dit que le département ne peut pas informer ; je le sa s : mais le devoir spécial des administrations de département est de surveiller l'exécution de
la loi ; c'est au procureur général syndic à faire vérifier par des commissaires les violations qui lui sont dénoncées* et lorsque les départements ne sont pas dans leut devoiit, c?eat ai* Corps législatif à les y rappeler.
Quant à la violation du territoire de la municipalité de Moret, je crois que dans aucun cas, dans aucun temps, dans aucune circonstance, voiM ne devez. laisser porter la plus légère atteinte aux. lois protectrices delà liberté.
Je demande que le roi soit prié de faire donner des ordres au directoire du département de Seine^etrMarne, pour qu'il fasse vérifier par des commissaires les faits contenus dans le procès-veubali de la; municipalité de Moret et pour qu'il en rende compte directement à l'Assemblée nationale.
J'adopte totalement les opinions de MM. Rewbell et Regnaud; mais je propose qu'on ajoute ceci : que- les comités réunis seront chargés de demander au ministre de la guerre par quela ordres les. chasseurs de- Lorraine ont agi.
St c'est le ministre de la. gueirre qui a donné des ordres,, il me paraît responsable d'un grand délit (.Applaudissements), du plus grand de tous les délits, celui d'avoir confondu tous les pouvoirs ft d'avoir porté une atteinte véritable à la Constitution-. (Applaudissements.}
(L'Assemblée ordonne le renvoi du procès-verbal de la municipalité de Moret.aux comités militaire, des rapports et des recherches rétanisi,et décrète qu'il sera demandé au ministre de la guerre par quel, ordre lest chasseurs du régiment de Lorraine ont agi.)
L'ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur la résidence des fonctionnaires publics'
, rapporteur. Messieurs, vous avez renvoyé à votre comité de Constitution la pétition de la commune de Paris, sur l'état et les obligations! de la famille du roi, dans le gouverneraient français.
"Vouiavezydonc voulu;une loi constitutionnelle, et nom un décret du moment, qui laisserait en arrière une loi importante du royaume, et n'en serait que l'ajournement.
Nous partageons les vues de votre sagesse; nous pensons* après un: examen très réfléchi, que, le coFps constituant doit faire, le plus rarement ;qu'il est possible, des décrets de circonstance^. Ainsi c'e^t une loi constitutionnelle que nous vous apportons.
Nous n'avons point à craindre que les événements actuels portent leur influence sur votre décision ; ce ne sont ni les alarmes qu'on se plaît à répandre, ni les agitations qu'on cherche à exciter^ ni un départ qui peut blesser les convenances, mais qui n'enfreint pas les lois* qui peuvent vous occuper : vous ne porterez" votre attention que: sur la; Constitution décrétée par vous, et acceptée par le roi, et vous chercherez, pour la confection de la loi que vous allez discuter, quelles sont les conséquences de cette Constitution dont toutes les parties doivent être d'accord, et sortir du même principe.
Le travail que nous vous soumettons aujourd'hui n'est cependant qu'une
portion de celui
Sous f«rfc peu de jours, nous vous apporterons ces projets de l©is et, plus promptement encore, nous vous soumettrons uh projet de décret sur' les émigrants.
Cette dernière loi est aussi nécessaire qne leg; astres, et l'& liberté ne s'en alarmera pas. Il faut distinguer le droit qui appartient à l'homme en société, d'atller, de venir, ae partir, de rester, dei fixer sot domicile où bon lui semble, et le délit qu'il commet quand, pour exciter, ou pour fuir lâchement les troubles de sa patrie, il en abandonne1 le» sol ; l'ordre ordinaire est alors dérangé, les lois qui lui conviennent ne sont plus les lois applicables,,et comme dans un moment d'émeute la force publique prend la pPace de la toi civile, ainsi, dans les cas d'émigration, la nation prend des mesures sévères contre ces déserteurs coupables1 qui ne peuvent plus prétendre ni à ses bienfaits pour leurs personnes, ni à sa protection pour leurs propriétés.
Nous sentons el la justice^et l'urgence de cette loi; nous n'en ferons? pasi attendre le projet; ce sera encore une loi constitutionnelle, mais qui, comme la loi martiale, ne sera applicable qu'à ces moments de désordre et d'incivisme qui en soltticiteront l'application.
Aujourd'hui, c'est- un décret sfur la résidence des fonctionnaires publics; ceux quà soal,à des titres' différents, chargés du gouvernement de l'Empire sont certainement obligés de résider. Mais ce n'est aussi qu'à ceux-là que la loi de la résidence doit être imposée. Tohs lesi autre» citoyens ne peuvent être dans leurs voiyages, dians la/ fixation de leur domicile, ni aperçus parla, société, ni atteints çar une loi, à moins que ce ne soit plus ni leur liberté dont ils fassent usage, ni leurs droits qu'ils exercent, mais uue émigration dont ils se rendent coupables.
Outre le roi qui est le premier fonctionnaire de l'Etat, il est des membres de sa famiille qui,, sans être encoïe fonctionnaires publics en/ activité, sont si prochainement appelés à la suppléance héréditaire que la Constitution leur défère, qu'ils doivent être assujettis à la résidence. L'héritier présomptif, quand celui-ci est en minorité ; celui de ses parents majeur qui est le-plus près de la succession au trône, doivent résider dans le royaume ; et un devoir de famille, sur l'observation duquel la nation doit veiller, assujettit à cette résidence la mère de l'héritier présomptif mineur.
C'est là que doit s'arrêter la loi, parce que, quoique tous les mâles de la famiille du roi1 soient par la Constitution appelés à la succès--sion du trône, par droit de primogéniture, la libre disposition des personnes ne peut pas être étendue au delà de ce qui est strictement exigé par l'utilité publique.
Ce sera déjà une fiction que celle qui placera dans la classe des fonctionnaires public^ en activité continue, les membres de la famille du roi qui, venant immédiatement après lui, sont ses premiers suppléants au trône; un double danger résulterait de la loi gui, prolongeant la fiction jusqu'au dernier individu de cette famille,
les astreindrait' à la résidence'. Leur liberté serait attaquée sans qu'ils eussent accepté aucunes fonctions publiques' qui les assujettissent à aucuns devoirs. La famille du roi serait, sans avantage pour elle, frappée d'un esclavage politique, dans lequel chacun de ceux qui la composeraient, n'étant nifonctionnaires publics, ni citoyens, désapprendraient les devoirs de ceux-ci, sans avoir ni intérêt ni occasion dé* s'instruire des obliga* tiohs de ceux-là.
Ensuite ce serait une familIe1 pn vitégiée, jusqu'à son dernier rejeton, et qui, pouvant s'accroître à l'infini par ses' ramifications diverses, menacerait l'égalité' politique, sauvegarde de là liberté et base de la Constitution;.
Que" les premiers membres d!e la famille du roi soient considérés' comme fonctionnaires publics, parce qu'ils peuventà chaque moment le devenir, mais que les autres- soient libres comme tous les citoyens ; qu'ils en exercent les droits, et qu'ils jouissent du bénéfice de* toutes les lois socialesv en conservant toujours les titres à la suppléance héréditaire qu'ils tiennent de la Constitution et de leur naissance?:'voïl&lercon-' séquences les plus'pures de la Constitution française.
projet de loi.
Art. 1er. Les fonctionnaires'publics', dont l'activité" est contînuer ne pourront quitter les lieux1 où'ils-exercent les fonctions qui leur sont déléguées, s'ils n'y sont autorisés;
Art. 2; Ceux dés fonctionnaires publics dont l'activité n'ést pas continue seront tenus de se rendre aux lieux de leur résidences politique, pour le temps où ils doivent reprendre l'exercice-de leurs fonctions, s'ifs' n'en sont dispensés.
Art. 3. L'autorisation ou la dispense ne pourront être accordées aux fonctionnaires publies que par le corps dont ils sont membres, ou par leurs supérieurs.
Art. 4. Le roi, premier fonctionnaire public, doit avoir sa résidence à portée de l'Assemblée nationale, lorsqu'elle est réunie ; et; lorsqu'elle est séparée, le roi peut résider dans toute' autre partie du royaume;
Art. 5. L'héritier présomptif de la couronne étant, en cette qualité; le premier suppléant du roi, est tenu de résider auprès de' sa personne. La permission du roi fui suffira- pour voyager dans l'intérieur de la France; mais il ne pourra sortir du royaume sans y être autorisé par un décret de l'Assemblée nationale, sanctionné par le i*oi.
Art. 6. Si l'héritier présomptif' est mineur, le suppléant majeur qui sera le plus prés' dë succéder à la couronne, d'après la loi constitutionnelle .de l'Etat, sera assujetti à la résidenee, confbrmé* ment au précédent article, sans que, par la. présente disposition; l'Assemblée nationale entende rien préjuger sur la loi dé l'a régence.
Art. 7.Tant que l'héritier présomptif sera mineur, sa mère sera tenue à lamêrne résidence. L'Assemblée nationale n'entend rien préjuger sur ce qui concerne l'éducation de l'héritier présomptif ou d'un roi mineur.
Art. 8. Les autres membres dë la famille du roi ne sont point compris dans les dispositions du présent décret ; ils ne sont soumis qu'aux lois communes aux autres citoyens.
Art. 9. Tout fonctionnaire public, qui contreviendra aux dispositions du présent décret, sera
censé avoir renoncé* sans retour, à ses fonoticms; et les-,membres de la famille du roi seront censésf de même^en cas» de contravention, avoir renoncé personnellement et> sans retour à- la.' succession au trône; (Vifs applaudissements\)
(L'Assemblée ordonne l'impression de ce rapport et du projet de décret; et en ajourne la discussion^ à la séance de v-emir edi prochain*)
, au nom du comité féoèal.W s'est, glissé' dans l'impression' faite à l'Imprimerie: royale du décret du 23 décembre, deroier deun; erreurs.
La première consiste ence qpe, dans le, préambule de. la; loi,, un décret antérieur s'y( trouve-rappelé soua la date du. 10 du, même 'mois* au lieu de celle du-18.;,la,seconde), en, ce que, dans l'article 3. du décret du 23. décembre, on avait imprimé deux fois, au lieu du» mot pariugft celui de pacage.La premièreerreur se trouve aussi dans la minute du, procès-verbal, mais, la seconde n'est qu'une faute d'impression* dans l'édition de T.îm-primerie royale.),
Il yauraitlieu. de faire opérer deux rectifications.
Œ'Assemblée ordonne que là date du 18 sera substituée dans la minute du procès-verbal'à celle du 19, et que M. le Président donnera des ordresvnécessaires- pour réimprimer-l'édition de-rimprimerie royale.)
, au nom du comité féodal. Messieurs, je- suis chargé par'votre comité' féodal de ; vous présenter un rapport mr plusieurs questions relatives au rachat descentes seignewrialès, qui s&. sont élevées en exécution dw décret'' du 3 mai" 1790 (si).
Bien que lie» articles* que je1 croiis avoir l'honneur de vous proposer ne soient! que des articles additionnels à ceux qui ont été déjà proposés par M. Merlin, pour n'en faire qu'un seul même aé^-cret, votre comité a cru cependant devoir en faire l'objet d'un rapport particulier.
Messieurs, la difficulté de combiner plusieurs anciens principes du régime féodal avec le rachat des droits ci-devant féodaux, et avec les règles que le décret du 3 mai a prescrites pour ce rachat, a fait naître plusieurs questions importantes, qu'il est nécessaire et urgent de résoudre.
Une première classe de ces- questions appartient au point de savoir quelle peut être l'influence des; anciens principes concernant le jeu de fief dans l'exécution du rachat des droits féodaux, qui a été permis par le décret du 3 mai.
L'Assemblée nationale a pris pour base générale de ses décisions» dans cette matière, que la-suppression de ia féodalité: ne devait rien changer;, jusqu'au rachat, aux. droits de propriété utiles desi ci-devant seigneurs ; en sorte que*, jusqu'à l'extinction totale des effets de la féodalité par un rachat, les ci-devant seigneurs devaient . conserver tous les droits1 utiles et non honorifiques qui en résultaient, et les; exercer avec la même plénitude*.
Les règles, que-nos couteme3 ou la jurisprudence avaient établies sut la
matière du jeu de fief, avaient pour objet la conservation des droits
utiles attachés au fief. Le jeu de fief ne peut plus avoir lieu
èU'àvenip, mais il y a eu des jeux de fiefs faits antérieurement; ces
opérations étafeni subordonnées à elfes règles- qui avaient été jugées
nécessaires pour le maintien respectif des droits
Elles sont au nombre de quatre.
L'on a demandé : 1° si le propriétaire d'un fonds fief pourra être admis à diviser le rachat des droits casuels, et à ne faire ce rachat que pour une portion de ce qui compose le corps de son fief, ou s'il sera obligé de racheter les droits casuels sur la totalité ae son fonds.
2° Comment il faudra opérer pour liquider le rachat dû par le propriétaire d'un ci-devant fief, quant aux mouvances qui en dépendent, lorsqu'il voudra se racheter lui-même avant d'en avoir reçu le rachat de ceux qui tiennent de lui des fonds en fief, ou en censive.
3° Si le mode et le taux du rachat, dû par le propriétaire du fief inférieur, à raison des mouvances attachées à son fief, doit toujours être le même et dans la même proportion, soit que ces mouvances soient ou ne soient pas inféodées par le propriétaire du fief supérieur.
Ces trois questions tiennent à la combinaison des principes du jeu de fief avec les règles prescrites pour le rachat que le décret du 3 mai autorise.
Il en a été proposé une quatrième, qui dérive des principes de l'ancien régime féodal, relatifs à la réunion des arrière-fiefs, ou censives, au corps du fief dont ils avaient été démembrés. On a demandé si les mêmes principes, sur lesquels il y avait une grande diversité dans les coutumes, devaient encore être suivis, et comment, en ce cas, s'opérera le rachat, soit lorsqu'il y aura eu réunion, ou lorsqu'il n'y en aura pas eu.
Le comité se propose de vous présenter ses réflexions sur ces diverses questions.
Examen des trois -premières questions.
Avant de répondre directement à ces trois questions, le comité a cru indispensable de tracer préalablement un tableau précis des anciens pri-cipes sur la matière du jeu de fief, et des différentes lois et usages qui existaient dans les différentes coutumes et provinces du royaume. Cette dissertation pourrait peut-être paraître inutile, aujourd'hui que la féodalité est supprimée, et qu'il ne peut plus certainement se faire d'aliénation à titre d'inféodation ou d'accensement. ,Le comité n'a pas cru cependant pouvoir s'en dispenser, attendu le rapport et l'influence que les principes de l'ancien jeu de fief ont dans les décisions qu'il faut donner sur les trois premières questions qui font l'objet de ce rapport.
On donnera à cette dissertation le moins d'étendue possible ; mais un certain développement est d'autant plus nécessaire, que cette matière abstraite a toujours été très peu connue et très obscurcie par les auteurs, qui n'ont pas assez fait d'attention à la diversité des lois et des motifs qui les avaient dictées.
Par jeu de fief, on entendait la faculté qu'avait le propriétaire d'un fief d'en aliéner une portion, non seulement sans que cet acte pût opérer aucun droit en faveur au fief supérieur, mais encore de manière que les mutations qui arriveraient ensuite dans la portion aliénée, ne produisaient plus de droits au profit du seigneur
supérieur, et que .ces droits appartenaient, au contraire, au propriétaire du fief inférieur.
Cette interversion se faisait par les actes connus sous le titre de sous-inféodation ou d'ac-censement. De même que Pierre avait reçu de Jean un domaine, à la charge de le tenir de lui sous la charge de la foi et hommage, et de lui payer certains droits aux mutations, Pierre cédait à Paul, sous les mêmes charges, une portion du domaine qu'il tenait de Jean ; en sorte qu'au lieu de deux fiefs qui existaient précédemment, il s'en formait trois : celui de Jean, supérieur ; celui de Pierre, tenu de Jean et supérieur à celui de Paul, formé par la portion qui lui avait été sous-inféodée, et laquelle, par cette opération, se trouvait reculée d'un degré à l'égard du premier fief, qui n'avait' plus de mouvance immédiate que sur la portion réservée par Pierre.
Ce serait une recherche plus curieuse qu'utile, d'examiner si, de tout temps, les ci-devant vassaux jouissaient de la faculté indéfinie de se jouer ainsi de leurs fiefs. Il serait facilede prouver la négative par des monuments très anciens, tels que le livre des fiefs (1), les assises de Jérusalem (2), les anciennes coutumes de Champagne (3) et les anciennes coutumes de Beau-voisis (4).
Ge qu'il y a de certain, c'est que les propriétaires de fiefs ne tardèrent pas à s'apercevoir du préjudice que leur porterait la liberté indéfinie dont auraient joui, a cet égard, les propriétaires des fiefs mouvants d'eux; et que leurs réclamations avaient fait introduire des modifications, qui ont été confirmées par les dispositions des coutumes lors de leur rédaction générale sous Charles VII, ou lors de leurs réformations dans les temps postérieurs; et ce qu'il est important de faire connaître; ce sont les termes, les différents caractères et les motifs des diverses restrictions que nos lois coutumières avaient établies.
Les propriétaires des fiefs dominants se plaignaient de ce que les vassaux, en se jouant indéfiniment de la totalité de leurs fiefs, violaient la loi même du contrat synallagmatique qui était la source de leur propriété. Cette loi les soumettait à payer certains droits en cas de vente et d'autres droits pour les mutations par mort, donation ou autres. Cette loi, disaient-ils, vous la violez doublement : 1° Vous la violez, si vous faites vos inféodations à prix d'argent sans être obligés de nous payer les droits auxquels vous vous êtes soumis; 2° Vous la violez, ce qu'en retirant de notre mouvance immédiate les portions par vous inféodées ou accensées, vous nous privez des droits qui nous auraient appartenu sur ces portions en cas de mutation, et vous vous appropriez ces droits à notre préjudice.
Les vassaux répliquaient que le droit de propriété leur devait donner la
faculté de disposer île leur chose comme ils jugeaient à propos et pour
leur propre avantage, fis ajoutaient qu'ils ue faisaient en cela aucun
préjudice à leur seigneur dominant. 1° Que ceux-ci ne. pouvaient se
plaindre de ce qu'ils ne recevaient aucun droit fors des inféodations,
ou accensements, parce que
Ce système des vassaux donna lieu à une première règle, qui n'en était que la conséquence nécessaire. Cette règle fut que le jeu de fief, opéré par le vassal, ne pourrait point porter préjudice au seigneur dominant, toutes les fois que celui-ci n'y aurait point donné son consentement spécial ; et qu'en conséquence, le seigneur dominant, privé de tous droits sur l'acte d'in-féodation ou d'accensement, et sur les mutations qui surviendraient dans les portions sous-inféo-aées ou accensées, percevrait ses droits, lorsqu'il arriverait une mutation dans la portion réservée par son vassal, avec la même plénitude que si le fief était resté dans sa première intégrité.
Cette règle était devenue un principe général et universel du droit féodal, et à l'exception de quelques coutumes en très petit nombre, qui restreignent le droit du seignèur dominant sur la portion qui est restée entre les mains de son vassal immédiat, toutes nos coutumes ont adopté le principe que nous venons d'exposer.
Mais on ne tarda pas à s'apercevoir combien cette règle éiait insuffisante. Les seigneurs dominants observèrent que les droits qui leur étaient dus seraient bientôt totalement anéantis, si l'on accordait à leurs vassaux la double faculté de se jou r de la totalité de leurs fiefs, et de s'en jouer à prix d'argent. En effet, dans cette double hypothèse, le vassal aurait pu, en aliénant à prix d'argent la totalité de son domaine, ne réserv» r qu'une redevance modique. Alors son fief n'était plus susceptible de mutation par vente, attendu la disproportion énorme qui se serait trouvée entre la valeur du fief acquis et les droits seigneuriaux qu'il aurait fallu payer pour l'acquisition. Si l'on suppose, par exemple, un fief de valeur de 100,000 livres que le vassal a sous-inféodé, moyennant 96,000 livres en ne se réservant qu'une redevance de 100, ce fief ne pourrait être vendu que 3 ou 4,000 livres l'acquéreur devrait payer 20 ou 25.00Q livres de droits. Personne ne serait assez déraisonnable pour faire une acquisition aussi onéreuse. Alors le seigneur dominant aurait été entièrement privé de ses droits-utiles en cas de vente sur le nef, ainsi dégradé par le jeu de fief.
Ce sont ces considérations qui ont fait introduire dans la plupart de nos coutumes, lors de leurs rédactions, ou de leurs réformations, diverses règles pour limiter et restreindre le jeu de fief indéfini. Nous disons dans la plupart de nos coutumes, parce qu'il en existe encore 3 ou 4 qui semblent permettre expressément le jeu de nef indéfini.
A l'égard des autres coutumes, on peut les ranger sous trois classes principales, qui se réduisent même à deux, attendu que dans les coutumes muettes on a dû nécessairement adopter l'une ou l'autre'des règles adoptées par les deux autres.
La première classe est celle des coutumes qui permettent le jeu de fief indéfiniment, quant à la forme de l'acte, c'est-à-dire même à prix d'ar-
gént, mais qui le restreignent quant à la quotité, c'est-à-dire qui ne permettent au vassal de se jouer que d'une portion déterminée, telle que le tiers, la moitié, ou les deux tiers (1). .
La seconde classe est des coutumes qui permettent expressément de se jouer de la totalité du fief, par ces termes en tout ou partie, mais qui ne désignent que le bail à cens ou à rente, comme le mode par lequel l'aliénation se peut faire (2).
La troisième classe est des coutumes qui sont restées muettes sur la question, et auxquelles on peut joindre les pays de droit écrit, qui n'ont point en général de sialuts féodaux, et qui n'ont que des usages fondés sur la jurisprudence.
L'interprétation des coutumes de la première classe ne pouvait donner lieu à aucune difficulté. La limite qu'elles apportent au jeu de fief, quant à la quotité, est clairement désignée pour leur texte ; et la faculté de l'exercer à prix d'argent y est clairement exprimée par ces termes : « Peut « se jouer, disposer et faire son profit... peut « donner, vendre et aliéner en retenant la foi et « hommage. » D'ailleurs, ces coutumes n'avaient plus à s'occuper de la forme de l'acte, qui devenait indifférente, dès lors qu'elles n'attachaient la conservation des droits du seigneur dominant qu'à la rétention d'une certaine portion du corps du fief.
Mais il n'en a pas été de même des coutumes de la seconde classe, dont l'interprétation a fait la matière de contestations des droits sans cesse renouvelées, notamment dans ce siècle.
Les vassaux, qui voyaient les autres jouir, dans des coutumes voisines, de la faculté de se jouer de leurs fiefs à prix d'argent, réclamaient la même faculté et voulaient réunir le doublé pouvoir de tout aliéner et de le faire à prix d'argent. Lorsqu'on leur opposait que la lot ne désignait que le bail à fente, ou à cens* et que ce contrat est d'un genre différent de la vente, ils répondaient que l'indication d'une forme n'était pas exclusive de l'autre.
On-leur répondait : 1° Que toutes les coutumes, qui s'accordaient à permettre le jeu de fief en tout ou partie, s'accordaient à ne désigner pour forme que le bail à rente, ou à cens, forme exclusive de la vente.
2° Que cet accord ne pouvait pas être regardé comme un effet du hasard, et qu'il servait à développer l'esprit de ces coutumes. Elles ont reconnu, comme, celles de la première classe, combien il serait injuste d'autoriser le jeu de fief indéfini; elles ont seulement marché au même but par une route différente. Elles ont senti que lè vassal, restreint à ne se jouer que par la forme d'un bail à rente, n'aliénerait sa propriété que pour une rente qui serait en proportion de la valeur du fief; qu'alors une rente commerçable, comme l'aurait été une portion du domaine lui-même, donnerait ouverture à des droits seigneuriaux au profit du seigneur dominant, dont l'intérêt se trouverait suffisamment conservé.
3° Que l'esprit de ces coutumes, déjà si évident en lui-même, se
manifestait d'uDe manière non équivoque dans les dispositions textuelles
de quelques-unes, qui se trouvaient conçues en ces termes : « pourvu
qu'il le baille à juste rente et « prix autant qu'il vaut et sans fraude
: pourvu
Un -arrêt du parlement 'dé cris de 17?9 semblait avoir fixé le sort d-e -eêtte ques ! idn . En adoptant pour la ccwitu'meAite^ le principe que le jeu de fief ne pouvait é'yexéemer q®e par un bail à cens ou rente, Il avait jugé que c'était-par la quotité de l'argent déboursé que'l'on devait jtrger si l'acte devait être député vente, ou baîl ô rente. L'arrêt portait : « Déchire le eotf trait enques--« tion être contrat de vente... les deniers 'payés « par le vin d'entrade, étant équipollerits au « moins à la juste valeur des tentes y (comprises : *« ee !faisant, décl'are,etc.
Malgré la clafté de ce jugemerft,'rendu pat un parlement il y a 70 ans dans la forme que les décrets de l'Assemblée nationale a prescrite .aux nouveaux tribunaux, la question s'est renouvelée une. infinité de foisdans le même parlement, sous prétexte d'une contrariété de décisions, qu'ileut élé faCile de concilier en y appliquant la distinction écrite dans l'arrêt de 1719.
La question s'étant renouvelée très solennefle-ment.en 1775, pour la coutume d'Orléans, le parlement voulut enfin faire cesser tous les doutes, en faisadt publier, en forme de règlement, l'arrêt qu'il rendit pouf cette coutume.
Mais le>parlemenf, instruit qu'une erreur pnes- 1 er">gué .générale avait conduit, dans le ressort de ; cette coutume, à un grand nombre d'infractions, ; et cr.aig.aant que l'arrêt qu'il venait de rendre, eommer&imp I ement interprétatif delà loi,ne répandît un grand trouble dans la province par ; eon effet rétroactif, sollicita, du roi des lettres | patentes qui, en confirmant TinterpEétatïon que la loi donnait-à la eoutume, ont interdit toutes actions, autres que celles qui pourraient être d^jà intentées, contre .les jeux de-fiefs qui avaient pu - être faits avant 4-775 dans *le-res«ort de cette coutume en contravention à la loi. Ces lettres patentes sont de f 781»-Il en-a été donné de pareilles en 1782, pour les coutumes de Péronne et de Sen-lis, avec cette seu le différence, que l'époque, à laquelle l'effet rétroactif est refusé, est l'année 1777,pour Péronne, et 17-78, pour Senlis.
«Par ces lettres patentes, la véritable Interprétation de tontes tas coutumes de la seconde classe se trouve fixée ^mais il eût été à désirer qu'une loi,générale eût arrêté à une époque commune pour toutes, les actions à intenter contre les jeux de fiefs, qui ont pu être laits en contravention à eesJois.
A l'égard des coutumes>de la troisième classe, û'£st-à*dire des coutumes muettes,le,^parlement de Paris y a toujours constamment étendu ladis- ; position de celte de. Paris, en limitant le jeu de ; nef aux deux tiers.
Quant -aux pays de droit éerit, leurs usages ne paraissent pas aussi;constants.
Il semble, d'après - uu^ arrêt de.1764 ,(3), queie, parlement de Toulouse
iaitadopté pour usage de j ne point ipermettre lejeu'de fief à.prix
d'argent. ?Tel paraissait aussi avoir été l'usage du ; par- j
Tels étaient les principes et les usages principaux (des différentes coutumes et ci-devant -provineeS' du-rqyaume sur 3e jeu de fief. Voyons maintenant quel rapportât quelle influence ils -peuvent avoir sur Ja solution des trois 1 première s questions.
PREMIÈRE QUESTION.
On demande siileipropriétaire d'un fonds,, ci-devant fief, peut être admis-à-diviser le rachat des droits casuels, età ne faire le rachat que pour une portion de ce qui compose le corps de son fief, ou s'il est obligé de .racheter les. droits ca-suels sur la totalUé ?
Nous réduisons la question aux droits casuels; elie ne peut en effet s'élever à;l'égard des rentes et-redevances fixes eu annuelles. C'est une charge solidaire, dont l'article 3 du décret ^du 3 mai ne permet pas le rachat divisé. Si l'on; permet lera-chat partiel des fonds, quant aux droite casuels, oe sera, sans doute, pour faciliter le commerce des (fonds; mais alors il est important que ceux aliénés-passent libres de toutes charges entre les mains des acquéreurs ; et il faut, pour cela, que Jes .rentes soient éteintes. Le comité a donc pensé, d'abord, que le rachatjpartiel des droits casuels ne pourrait s'admettre qu'autant que les rentes, qui .affectent solidairement la totalité idiu fief seraient rachetées.
Quant au rachat partiel des droits casuek,,il est^vivement désiré .parmn (grand nombre de propriétaires de fiefs. Sans cette faculté,.' plusieurs ne pourraient aujourd'hui user du droit qu'ils ont toujours eu .de vendre, un e ; portion -de leurs -fiefs, pour Iem?s arrangements pratticuliers. Les acquéreurs ne veulent acheter «que des biens libres ; etUserait souventtimpossibleau;prQprié-taire d?un fief trèsi considérable >de racheter les -droitsisur la totalité dm fief.
rL'intérêt public se-joint -àJ'intéirêt-des propriétaires; permettre le rachat partiel des droits casuels, c'est favoriser la circulation des fonds; C'est accélérer l'extinction de-la féodalité.
Il ne s'agit donc plus que de.savoiirsi'fie rachat partiel (peut, ou non, être permis, et ha* solution de cette question dépend de l'examen tcfce trois -points :
1° Les principes! de 4a justicedistribuitive pçji-wntiils autoriser icette division-? 2°. Les décrets (antérieurs y, forment-ils obstacle t ^ ^ Uaieidivkion fieut-elleéti}e;pef miseid,une manière indéfinie?
d.fjlèy a-toujours .eu cette,différaace >entre;les droits
.^igneiariauxufixesi ^tals.queles redevances annuelles)et.les droits
casuels dus aux mutations, que (les.premiers affectaien t
solidairement-la tola-
Un propriétaire de fitèf a "toujours eu le droit de vendre, donner, échanger une portion de son fief, et il n'était dû de dnoiits 'seigneuriaux, que .dans la proportion de là valeur de la portion ainsi aliénée.
'Lorsqu' un propriétaire de fief avai t ainsi vendu, cédé, donné, échangé une portion de son fief, l'acquéreur était, à la vérité, tenu solidairement des redevances annuelles, de la loi, de l'aveu ; mais il n'était tenu des droits easuels que sur la portion p;ir lui possédée eteucas de mutation dans cette portion.
Les possesseurs actuels desci-devantfiefs, depuis la suppression de la féodalité, n'ont point perdu le droit naturel de pouvoir vendre, donner, aliéner des portions.de ce3 fiefa, tet par conséquent; de nedonner ouverture aux-droits seigneuriaux que jusqu'à concurrence de la valeur delà portion qu'ils voudraient aliéner : la conséquence naturelle est donc qu'il s peuventraeheterpartiellement les droits, auxquels ils ne donneraient ouverture que partiellement.
A la vérité, si les vassaaax ne pouvaient ^aliéner ce® portions franchement qu'après avoir racheté les droits entiers sur tout le fief, lorsque, placés dans l'impuissance de faire ce rac hat, la nécessité les forcerait de vendre une portion, le seigneur supérieur y trouverait quelquefois cet avantage, ;qu il percevrait les droits de la première vente, et que le rachat ne pourrait être fait que par le nouvel ;acquéneur.
Mais : 1° Le propriétaire du fief inférieur, qui n'aurait pas les moyens de racheter son fief entier, éluderait la gêne que vous lui auriez imposée, en empruntant I«s fonds qu'il aurait vouta.se procurer par une vente. Ge serait donc sans aucun avantage pour le supérieur que vous auriez enchaînaé la liberté de l'inférieur.;
2° Cette facilité est nécessairement restreinite dans le terme de deaxaonées, pendant lesquelles le décret a dispensé du payement des droits seigneuriaux tes fonds qui seraient rachetés dans les deux années postérieures à la publication deice; décret. Et cette restriction diminue considérablement la perte, dont se plaindraient :les seigneurs supérieurs;
3® Cette p"Tte légère est compensée, à l'égard de oeux-ca, par l'avantagé qa'iàs reçoivent de pouvoir faire la même opération. Cefluiqui a desvas-saux sous lui est lui-même vassal d'un autre. Ainsi, ce .qo'on accondiei ses vassaux, on ledui accorde à lui-même ;
4° Eu fin, lintêrêt public parle en cette circonstance si hautenneut en faveur de la liberté réclamée, qu'un intérêt aussi léger et aussi éventuel ne peut prévaloir au contraire.
Votre comité a donc penséqu'aucun principe de justice ne s'oçpôse à ce que vous autorisiez; ipar une loi préciBe la faculté qui est réclamée, de racheter [partiellement les droits casuels.
II. Si quelques-uns tde vos déurets semblaient s'opposer à da faculté du rachat partiel, ils ne sont (point constitutionnels; et par conséquent ils pourraient être modifiés ou changés, dès lors que la justice et l'iaatlérêt public l'exigent.
Mais votre comité in'a pas pensé qu'aucun des décrets antérieurs, qu'il vous a proposés, pût pré-.senter un obstacle directe l'admission de celui-ci.
Opposerait-on l'article 2 du décret du 3 mai, qui dJut « que tout propriétaire peut racheter les
droits -à raison d'tra fief particulier, encore tpfil se trouve en posséder -pflusieurs mouvants du la même seigneurie »'? Nous répondrons que 'la Faculté, affirmative pour un fiefi total sur deux, UVst point une prohibition directe et absdlue de racheter une portion du mè ne fief.
On opposerait, peut-être, avec im prétexte :.pRus 'appareRt, l'article "S du même décret joint à l'article ÎO du décret du 19 septembre. Le prèmiter défend de rembourser les chargés et redevances annuelles,sans racheter en même temps les droits casuels et éventuels, le second défend réciproquement de racheter les droits casuels sans racheter des charges et redevances annuelles. Ces décisions ont eu pour fondement le principe que les conditions, sous lesquelles un îondsa été eoncédé, sont indivisibles ; et que le'possesseur du 'fonds ne 'peut selibérer de l'une par préférence à f autre. Mais ce principe ne sera point violé dès lorsque la redevance annuelle sera rachetée-en même temps, ou avant qu'aucune portion du fief puisse ê4re rachetéedivisément de* droits casuels.
Le comité a donc pensé que ces décisions ne contrariaient point nécessairement celle qu'il vous propose, sur une question qui, d'ailleurs, n'avait été prévue ni discutée.
Reste à examiner si la liberté du rachat partiel des droits casuels peut être accordée d'une manière absolue et indéfinie et sans aucune condition.
III. Votre comité, a pensé que les principes de la justice distributive ne permettaient pas d'autoriser le 'rachat partiel des droits casuels, ci-devant seigneuriaux, sans aucune modification ni restriction; et qùé'les mêmes -motifs qui précédemment'avaient fait restreindre la li'berté 'indéfinie du jeu de fief, devaient faire admettre quelques conditions à la Faculté du rachat partiel des droits-casuels, que voudrait faire cefei gui est seul propriétaire d"un mêmelîef, larsqu'ildé-pend de ce hef des mouvances qui n'ont point été inféodées par le seigneur supérieur.
Nous disons, 'lorsque le 'fier est possédé par un seul propriétaire ; car le rachat partiel ne peut éprouver aucune difficulté, quand il y a (plusieurs copropriétaires. "Ce cas e^t textiieflement décidé 'par les articles 4 et:5 du décret du 3 mai.
Il tfest plus, à la vérité, permis aujourd'hui d'aliéner par la voie du jeu de fief, puisqu'il ri'y ; a plus de féodalité : mais on retomberait évidecn-! ment dans tous les inconvénients de .ranclen jeu de fiçf, s'il était-permis indéfiniment d'aliéner et de irac'heter des portions divisées du 'fief. Le vaêsal pourrait aliéner ainsi et racheter successive ment fous les domaines corporels de son fief et ne conserver que :1a mouvance sèche sur les 'portions précédemment accensées, ou sous-inféodées, dans cé même fief : c'est-à-dire qu'il 'pourrait ne conserver que les mouvances anciennes, et qs'il n'en avait [pu détacher que sous la condition de réserver un tiers, une moitié, ou les deux uters de son fief. La simple mouvance., à'ia-queflle le fief se trouverait réduit, étant d'une valeur infiniment inférieure à celle des fonds sur lesquels elle s'exerce, deviendrait incommer-çable, ^attendu l'importance des droits que l'acquéreur aurait à payer; et par là le seigneur supérieur serait presque toujours irrévocablement privé de ses droits de vente sur celte portion de son fief primitif, ou ne pourrait en rien tirer que dans île-cas où le possesseur du fonds accensé, ou inféodé, voudrait loi-uéme se racketter, ce qu'il se garderait bien défaire.
Le même inconvénient, quoique d'une manière
moins sensible, se ferait sentir dans les coutumes mêmes oû le jeu de fief ne peut se faire à prix d'argent, et seulement moyennant une rente. Cette rente ne peut plus être stipulée irrache-table ; les droits n'en peuvent plus être perçus qu'aux cas du rachat, et ce rachat peut être dissimulé très longtemps.
Voilà donc des inconvénients très graves auxquels pourrait donner lieu la liberté Indéfinie de vendre et de racheter partiellement les fiefs, dont dépendeiit des arrière-fiefs, ou des censives non inféodées. Les autoriser ces inconvénients, ce serait blesser le rispect sacré pour les droits de propriété, dont l'Assemblée nationale a fait la base générale de tous ses décrets.
Mais il paraît facile de cor cilier ce qu'exige le droit de propriété du seigneur supérieur avec ce qu'exige l'intérêt public, qui demande la facilité du commerce c'e3 fonds, et ce qui peut accélérer l'extinction de la féodalité. Il ne s'agit pour cela que d'apposer à la faculté de la vente et du rachat partiel quelques modifications peu gênantes:
1° Dans les coutumes, qui ont restreint le jeu de fief à une quotité déterminée, on peut interdire au propriétaire du fief inférieur la faculté de vendre et de racheter divisément les portions restées entre ses mains à la portion prescrite par la loi, à moins que préalablement il n'ait îacheté les droits sur la portion par lui inféodée, ou ac-eensée;
2° Dans les coutumes qui ne permettent le jeu du fief qu'à titre d'accensement, attendu qu'il deviendrait aujourd'hui très difficile d'y appliquer cette règle, on peut y étendre celle qui était prescrite par la coutume de Paris, et en y permettant les aliénations à prix d'argent des portions réservées par le vassal, ne les lui permettre que jusqu'au tiers, à moins qu'il ne se rachète préalablement sur les portions inféodées ou accensées;
3° Il est également convenable de rendre, par une loi précise, cette règle commune aux coutumes muettes et à tous les pays oû il n'existait aucune loi textuelle sur la quotité du jeu de fief;
4° Enfin il est juste de ne permettre le rachat partiel des droits casuels qu'en obligeant celui qui voudra le faire, à racheter en même temps la totalité des redevances fixes et annuelles, dont le fief peut être chargé. Cela est nécessaire : 1° pour l'intérêt du seigneur, qui ne doit point être obligé de conserver une redevance ordinairement modique, lorsque la partie la plus importante de ses droits sera éteinte; 2° pour l'intérêt public, afin que les portions aliénées puissent entrer dans le commerce, libres de toute charge.
Il n'est prs besoin d'observer que ces modifications ne concernent : l°que le cas où les sous-inféodations ou accensements antérieurs n'ont point été inféodés; 2° que les fiefs régis par les coutumes où le jeu de nef, quand il est renfermé dans b s limites prescrites par les coutumes, fait perdre au seigneur supérieur tous droits sur les portions sous-inféedées, ou accemées. Dans ces deux cas, le seigneur supérieur n'a plus d'intérêt à ce que son \assal réserve aucune portion de pon domaine, puisque cette circonstance ne peut rien ajouter à ses droits qui sont restreints à la valeur de la mouvance, sur les objets détachés par le jeu du lief.
Si l'Assemblée nationale adopte ce plan pour les fiefs, il n'y aura aucune difficulté a étendre la même faculté aux fonds tenus en censive, et à en permettre le rachat partiel quant aux droits
casuels, à la charge de racheter en même temps la totalité du cens et des redevances annuelles.
SECONDE QUESTION.
L'article 44 du décret du 3 mai a prévu le cas où le propriétaire d'un ci-devant fief recevrait le rachat de tout, ou de portion, des droits .à lui dus par le3 fonds mouvants de lui, avant de se racheter lui-même ; comme il est évident qu'alors la valeur de ce fief pourrait être considérablement diminuée, au préjudice du propriétaire du fief supérieur, l'Assemblée nationale a voulu que le propriétaire inférieur fût tenu de payer au supérieur un rachat proportionnel aux sommes qu il aurait reçues.
L'article 45 a voulu qu'alors le rachat, dû par le propriétaire inférieur, fût liquidé sur la somme dont il aurait donné quittance, à moins qu'il n'y eût fraude ou déguisement dans l'énonciation de la quittance.
Ces aiticles n'ont point parlé du mode et taux du rachat, qui serait dû par le même propriétaire du fief inférieur, à raison de ces mêmes mouvances, lorsqu'il voudrait se racheter avant d'en avoir reçu le rachat.
11 était facile de pre- sentir que le rachat devait être, en ce cas, de la même somme qui aurait été due dans le premier cas.
Il n'y a de différence entre ce second cas et le premier qu'en ce qu'il faut ici une double opération, tandis qu'il n'en faut qu'une dans le premier.
Pour évaluer le rachat dû au fit f supérieur, à raison d'une mouvance appartenant au fief inférieur, il faut commencer par fixer la valeur de la propriété, qui résulte de cette mouvance; et cette valeur n'est évidemment que celle fixée par la loi, pour le rachat dû par le fonds sujet à la mouvance. '
Lorsque cette valeur ne se trouve point fixée par une quittance de rachat, il faut y suppléer en évaluant la somme qui aurait été due par le fonds soumis à la mouvance, d'après les règles prescrites par le décret, de la même manière que cela se ferait entre le propriétaire de la mouvance et le propriétaire du fonds qui en est grevé.
Celte première opération Lite, il faut sur la valeur de la mouvance, établie par cette première opération, liquider le rachat dû au fief supérieur; d'après les règles prescrites par le décret du 3 mai (1). j i
Telles étaient les conséquences qui résultaient évidemment des règles prescrites par le décret du 3 mai, que les parties auraient pu tirer elles-mêmes, et qu'il ne s'agit que d'expliquer par un décret spécial pour éviter toute difficulté.
TROISIÈME QUESTION.
La règle que nous venons d'indiquer est incon-t stable, quand il s'agit
d'une mouvance dépendant d'un fief inférieur, qui a été inféodée par le
propriétaire du fief supérieur; mais le comité a pensé qu'elle n'était
point applicable au cas où la mouvance n'était point inféodée. C'est une
omission qui lui est échappée lors du décret du 3 mai, et à laquelle il
est indispensable de suppléer aujourd'hui.
Ainsi, par exemple, le propriétaire du fief A en a détaché, par une inféodation, une portion sous le titre de fief B. Lors de cette concession, il a joint au domaine qu'il cédait, la mouvance sur le fief C, et les cens sur les fonds D et E. Celte mouvance attachée au fief B est une mouvance approuvée et inféodée par le propriétaire du fief A.
La seconde espèce de mouvance, qui peut être attachée à un fief, est celle que le possesseur a formée lui-même, en se jouant d'une portion de son fief; et cette mouvance est inféodée, ou non inféodée, selon que ie seigneur dominant a consenti, ou non, le jeu de fief.
Ainsi, par exemple, Perai, propriétaire du fief A, en a détaché 100 arpents, qu'il a inféodés à Pierre, sôus le titre du fief B; Pierre a détaché de son fief 40 arpents, qu'il a sous-inféodés à Jean, et 30 autres arpents qu'il va accensés à Jacques et*à Philippe. Si Paul a consenti et approuvé ces jeux de fiefs, la mouvance qui appartient au fief B sur les 70 arpents, est une mouvance iuféodée. Cette mouvance n'est point inféodée, si Paul n'a point approuvé ces jeux de fiefs.
Ces définitions posées, la question proposée se résoud d'elle-même.
Lorsque les sous-inféodations ou accensements ont été inféodés, il est évident que le fief inférieur n'a d'autre valeur, vis-à-vis du fief supérieur, que celle drs mouvances. Le3 droits ca-suels, dus au-fief supérieur, ne peuvent être perçus qu'à raison de cette valeur. Le rachat de ces droits, vis-à-vis du fief supérieur, ne peut donc être fixé que d'après l'évaluation première qui aura été faite du rachat que doivent eux-mêmes au fief inférieur les fonds qui en relèvent en fief, ou censuellement.
Mais il n'en peut pas être de même, lorsque les sous-inféodations et les accensements n'ont point été inféodés par le propriétaire du fief supérieur. On a vu ci-dessus que les^coutumes, qui autorisaient le jeu de fief sous "certaines restrictions, voulaient en même temps que ces jeux de fief, quoique renfermés dans les limites prescrites, ne l ussent point porter de préjudice aux propriétaires du fief supérieur lorsqu'ils n'y avaient point consenti. En conséquence, ceux-ci, en cas de mutation de la part du vassal immédiat et dans la portion par lui retenue, pouvaient exiger les droits casuels, à raison de la valeur totale du fief, comme s'il était resté dans son intégrité entre les mains du vassal qui s'en était joué en partie.
Ainsi, par exemple, et en suivant la même hypoihèse ci-dessus, Pierre ayant reçu de Paul un fief de 100arpents, et n'ayant pas pu en séparer, sans le consentement de Paul, les 40 qu'il a sous-inféodéSj et le3 30 qu'il a accensés, est toujours censé, vis-à-vis de Paul, conserver dans sa main les 100 arpeuts. S'il arrive de sa part une mutation qui donne ouverlure au relief, il devra le revenu d'une année, tel qu'il peut être produit par les 100 arpents, et non tel qu'il est produit par les 30 qui lui restent. S'il vend son fief, il en devra les droits de quint, ou autres, non à raison du prix pour lequel ont été vendus les
30 arpents qui lui restaient, et de la mouvance qu'il a réservée sur les 70; mais à raison de la valeur qu'auraient ies 100 arpents possédés en domaine. En un mot, Paul conserve sur le tief de Pierre les mêmes droits que si celui-ci avait conservé dans ïa main les 100 arpents.
D'après ces règles, que Pierre a dû connaître et auxquelles il s'est soumis, lorsqu'il s'est joué de son fief, il est évident que s'il veut racheter son nef, le rachat n'en doit pas être liquidé à raison seulement do la valeur des 30 arpents qu'il s'est réservés et de la valeur de sa mouvance sur les 70 arpents, mais que ce rachat doit être liquidé à raison de la valeur totale qu'aurait son fief s'il-en avait conservé les 100arpents.
Il n'y aura d'exception à cetle manière d'opérer que dans les coutumes, en petit nombre, où le ieu de fief porte préjudice au dominant, encore qu il n'ait point été inféodé, en sorte que le dominant ne peut plus exercer ses droits que sur ce qui est resté dans la main de son vassal.
Quant aux autres coutumes, ce ferait sans fondement que les propriétaires des fiefs, qui y ont fait des jeux non inféodés, se plaindraient qu'ils sont traités trop sévèrement, en ce qu'ils seront obligés de payer à leur dominant la totalité de ce qu'ils auront reçu, ou même quelquefois plus. Cette opération n'est que la juste compensation des droits qu'ils seiaient obligés de payer en cas de vente ou de mutation, de la portion par eux réservée, droits qu'ils devraient alors, non feulement à raison de portion, mais encore à raison de la portion par eux aliénée, et dont ils serout déchargés, pour l'avenir, par le rachat.
QUATRIÈME QUESTION.
L'usage des jeux de fiefs avait amené nécessairement la question de savoir quel devait être l'état et la nature des fonds qui avaient été séparés d'un fief par une sous-inféodation, ou par un accensement, lorsque ces mêmes fonds étaient rentrés dans la main du propriétaire de ce fief, ou lorsque le fief se trouvait réuni dans la main du propriétaire du fonds, qui en avait été détaché par la sous-inféodation, ou par l'accensement.
Cette question présentait ci-devant un double intérêt : 1° l'ordre des successions étant différent pour les fiefs et pour les rotures; il était important de savoir si le fonds accensé, qui ne formait qu'une roture, tandis que l'accensement subsistait avait repris, ou non, sa nature féodale; 2°le seigneur dominant, lors même qu'il n'avait pas approuvé le jeu de fief, ne pouvait exercer ses droits utiles sur les arrière-fiefs, ou censives mouvantes du fief tenu sous sa mouvance immédiate qu'en cas de mutation de la part du vassal immédiat. Le même seigneur dominant ne "pouvait même, en aucun cas, répéter des droits utileasur les portions sous-inféodées ou accensées, lorsqu'il avait approuvé le jeu de fief. Dès lors il devenait très intéressant de décider si les parties, précédemment séparées par la sous-inféodation ou par l'accensement, devaient être réputées, ou non, réunies au corps du fief immédiat, parce que, dans le premier cas, le seigneur dominant rentrait dans la plénitude de ses droits utiles sur la totalité des fonds qui ne formaient plus qu'un même corps.
Le premier genre d'intérêt ne subsiste plus aujourd'hui, au moyen du décret du 15 mars, qui, en éteignant les distinctions honorifiques des fon ls et des personnes, a aboli les distinctions
qui en résultaient quant à Tordre des succès- j Lsions.
Mais le second fœnre!d'intérêt subsiste enocre nécessairement : il subsister l°tpour liquider 4e rachat des fonds, à l? égard desquels il a pu s'opérer rune réunion antérieurement au décret du A août ; 2° il subsistera encore pour l'avenir, à l'égard des fondsjqui» n'auront point1 été f achetés, pour la liquidation des droits auxquels donneront lieu des mutations futures, et pour la liquidation du rachat de ces mêmes fonds, lorsque le propriétaire les voudra libérer.
En effet, l'Assemblée)nationale trayant détruit que les droits ^honorifiques des ici-ctevant seigneurs,set kuraya/nt'conservé tous leurs droits utiles jusqu'aurachat, il est évident'que, "pour 3>a fixation de-ces droits utiles ou de leur nachat, il faut opériœ tictwenatint comme «si -tesfoHds.-étaient encore distingués par leurs anciens caractères de fiefs, ou ete roturesrde 4tefs dominants, ou servants, dfe fiefs médiats, ou immédiats .
C'est cette considération qui a fait proposer la quatrième question, par laquelle oq^demande : . d°» si, l?aprèfiîle nouveau régime,-on doit suivre sur ta iquestion (de la réunion les principes anciens \ slon doit se^conformer à toutes les diversités «que nos coutumes ou l'usage avaient inhiodàiites sur la .décision de cette question ; 3° enfin ^comment, dans tous ©s1 les hypothèses, s'opéram le rachat, tant à l'égard jde l'ancien coirps i du fief, -qu?à «l'égard des'parties qai-s'en, trouvent rapprochées.
Jbest évident que ia décision de la troisième question ne peut être qu'une conséquence de ce, qui aura été décidé sur les deux premières. Si 1 on suppose la réunion, il est évident que la totalité des deux portions du fief seront sujettes iauimêmeitaux et mode.du rachat, puisqtfil n'y aura .qu'un seul fiefrcomposédu domaine ancien et du domaine neuiveau. S'il n'y a point de réunion, il n'y aura dans 4e fier que son ancien domaine, et la mouvance sur les deux portions, quin'en doiventiôt'Fe'ConéidéFées que comme un jarnièse-fidf-et unenîensive ; et le rachat n'en sera liquidé que sur ce qarinpipe.
Quantd la preïnièife.'qKestion, il e^Uimpossible de me nas ippendre une règle-quelconquepour fixer lîétat et la nature des portions qui font reŒrtrëes dans la imain 'du propriétaire du fief, duquel elles auraient été séparées, puisque, sans cela, il serait absolument impossible de liquider un rachat.
Toute la ifiifliculté se réduit donc au «point âe savoir slil Saut .conserver les'différents usages anciens, qui résultaient de lia différence de 'nos lois coutumières, iou des usages -fondés «or "la jurisprudence.
Ces lois et rcee usages ont présenté >ns^ifiei iUine bigarrante et une >diversit*yaussi'étonnante que fatigante jpour les juges et 'les parties dnté-ressées.
Ici .la réunie® istopérait «de plèin droit, et ne poaiiwait pas :même être arrêtée par une déclara-ilion contraire du propriétaire.
er">Dans .uae autre-ooutume, -la réunion «s'opérait de plein droit, imaiis le -ppopiiétuire pouvait en arrêter l'effet pair une déclaration.contraire.
,Ailleurs, la-réunion ne sïopérait de plein droit qu'en certains cas, et non dans d'autres.
kà il -n'y rêvait réunion que quand le propriétaire ;a\tadt iaQmfwds dans son aveu les objets acquis, et .av.ai4 tprêté lia (foi pour le tout. Ëiifin .dans «d'autres pays, la réunion n'avait
pas lieu de plein droit, et ne s'opérait que;par la volonté déclarée du propriétaire.
Rien d'est certainement si absurde et «si susceptible d'inconvénients qu'une aussi grande variété de lois et (l'ufagBs-dan&unmêmeroyaume et sur une même question ; et il est indispensable de la faire cesser pour l'avenir.
Mais il ne serait pas juste de donner à la nouvelle loi un effet rétroactif pour le passé : ce serait aller contre le grand principe que les lois nouvelles -ne peuvent'opérer que surles actes et sur les faits postérieurs ; et ce serait attaquer les'droits de propriété, puisque ce serait's'exposer à enlever à certaines parties intéressées des droits légitimement acquis, dès lors quUIs étalent fondés sur une loi existante.
Votre comité vous proposera donc d'opérer ici comme vous l'avez fait dans le décret du 18 décembre dernier à l'occasioner"> de fla diversité des usages >qui existaient sur .te, question de savoir quand et comment les renies foncières rachetantes devaient donner ouverture aux droits seigneuriaux. Vous avez ordonné qu'on suivrait les anciens usages à 'l'égard des rentes foncières créées avant le 14 août 1789, et vous avez soumis à'une loi uniforme les reates criées, ou qui pourraient -i^être 'depuis cetsfce «époque. Votre comité vous proposera de même de laisser tous (les actes et faits antérieurs^au 4 août 1739, -soumis quan't à la question de Jaréunion, aux lois, -coutumes, statuts et usages anciens, et de faire une loi uniforme et générale pour tous les actes postérieurs. Sous ce point de vue, il ne sera-plus question que de savoir quelle-est celle des lois antérieures que vous choisirez pour devenir la règle unique et géntëraie.
A cet égard, votre comité a pensé^que la pureté des principes devait vous déterminer pour la loi'qiai-prononçait la réunion de plein droit. Les fonds imouvants en fief, ou eeneuellement d'un autre !fief, soat «une émanation de ce fief; Ils en formaient une partie intégrante qui en avait été désunie, mais qui y était restée attachée par île lifen delà féodalité. Le rapprochement des deux parties dans la main du même propriétaire remet naturellement les-choses .dans leur premier état. ia 'réunion n'est que le retour delà paptie.au tout. D'ailleurs, la mouvance est une servitude d'un fonds but -un autre; il est contre ia nature que le propriétaire des deux 'fonds puisse eonservertet exercer un-droit de servitude -sur sa propriété. Toutes îles fois queie fonds servant se réunibau fonds envers lequel il était assujetti à rniedharge, la-charge s?éteint de dro&t par l'impossibilité 4len faire le service.
iVetre 'comité a même ^penaé -que 'oe principe simple devait rendre ia réunion forcée, et interdire au propriétaire ia faculté de s'y opposer par une déclaration contraire.
Il vous proposera donc de -décréter- qu'à l'avenir, lorsque deux fonds, dont l'un était mouvant dtonautre fends ci-devant fief, sous des changes féodales-ou censueUes,se trouveront appartenir^ à titre de propriété ineommutable,*aumême propriétaire par un acte ou par un lait postérieur à Phoque du 4 août 1789, à-quelque titre que Haequisitiom ait été faite, »i elle a précédé te rachat des droite seigneuriaux 4e l'un des fl©us fonds; les deux fonds, quant au payement des droits-seigneuriaux ou au rachat, seront réputés ne former qu'un seul et même corps et sujet» aux mêmes prestations utiles envers le ci-devant «eS-tgneur du fief, dont l'un de ces deux fonds relevait, sans que cette réunion puisse être empé-
cfeée par auouBe déclaration contraire lors de l'acquisition.
PROJET DE DÉCRET.
L'Assemblée nationale, voulant faire cesser! plusieurs difficultés qui se sont élevées en exécution de son décret du 3 mai, en interprétant, en tanit que fle)besoin, ce décret et notamment les articles 2, 3, 4, 5, 44 *et 45 dudit décret,-et l'article 10 de eëlui du 19 «epÈembre suivant, a décrété et décrète ce 'qui eu®t ':
Art. ier. Tout propriétaire d'un ci-devant Hef, lequel ne consistera qu'en domaines corporels, tels que maisons, 'tertres, prés, bois, et autres de même nature, pourra -racheter tlivisémerft les droits casuels dont il est grevé, pour téfle portion qu'il jugera & propos, pourvu qu'il rachète en même temps la totalité ches redevances fixes et annuéUes dont son :fief pourrait être grevé, sans préjudice de l'exception portée au décret du 14 novembre,relativement aux ïie'fs mouvants des biens nationaux.
Art. 2. Il en -sera usé cle même à l'égard des ci-devant fiefs -qui ont sous eux des fonds [tenus en fief ou on censive, lorsque lesdites mouvances auront été inféodées par le propriétaire du fief supérieur, ônlorsque lesdits. fiels feront régis par .les coutumes dans lesquelles le seigneur supérieur ne conserve aucun droit utile immédiat sur les objets qui ont été sous-ihféodés?ou,aecensés par le propriétaire du fief inférieur, encore que le jéude fief n'ait point été approuvé ou recoqnu .par île rséigneur,supérieur-
Art. 3. Lorsqu'ilrdépendra du iîef desmouvan-ces quinlaurotn-t )poiin«t été inféodées, par de.ci-devant «edgaeur t supérieur, et lorsque ce fief sera régi parfie droit comaaain-suivant lequel ces jeux de fief nejpeuvent point porter préjudice ékteet ei-devanfcsetgneur supérieur,le;propriétaire du fief inférieur ne pourjia cacheter partiellement les droits easuels isur lesrdomaines-qui font restés dans sa jnaàn, que jusques à concurrence de la portion dewit Ja loi qui régit le fief lui: avait permis de. se jouer, en comprenant dans ce calcul les portions déjà par lui accensées ou inféodées; en telle sorte qu il reste ifoujjours dans sanaain la portion entière qtue la loi l'auraitobligé de réserver ; .«i mieux il n'akne «acheter préalablement des droits casuels à raison de >1 a totalité des mouvances aïon-inféodées-dépendant aie son fiel,. auqiuel cas, et après .avoir effectué ledit rachat, il pourra racheter likretment et partialement le surplus de son fief, >etipour telle portion qu'il, jugera à propos.
Art. 4. Dans te'ménie cas où les naouvawces ne -seront point inféodées, ^et où ces jeux Jde fiefs ne peuvent point porter préjudice au seigneur1 supérieur, si d'ai'lleurs le -fief-eét régi'par l'une* des coutumes qui ©e permettent point le jeu de fief à prix d'argent, mais seulement par bailàeens ou à rente, le propriétaire de ce fief pourra néanmoins vendre à prix d'argent -telle portion-'des fonds qui sont restés en sa main,-et en racheter partiellement les droits easuerts, » pourvu jqee 4es portions qu'il rachètera, ou vendra, n'excèdent point les £ tiers du fief, en -oomprenant dans ces 2 Hieps 'les fonds déjà -sous-inféoelés ou accensés ; si mieux il n'aime cacheter préalablement ks droits casuelsià raison jde la totalité des mouvances non-inféodées, auquél cas, et après avoir effectué ledit rachat, il -pourra racheter li-
br-ement ,et partiellement le surplus de son fief pour telle portion qu'il jugesa à propos.
Art. ;5.. il «a sera usé de même que dans l'article précédent à A'égaitd des ci-devant fiefs dont dépendront des mouvances non inféodées, et qni ne peuvent poiat porter préjudice m Girde-vant 'seigneur supérieur, lorsque lesdits fiefs seront régis «par l'une des cocu tûmes qui n'avaient aucune disposilion -sur la lifcetrté du jeu de fief, ou qui sont situés Plains les ipays de droit écrit, etxela fnoaao'bstant tout n>?age ou ;ju«riepr»denee particulière >qui se seraient inifoduits idans Lesdits pays.
Art. 6. Le rachat partiel, dans les cas autorisés par îles articles 3, 4 et 5 oi-dessus, ae pourra avoir lieu que sons la condition de iraeheter ^n même temps la totalité des redevances fixes «t annuelles dont le fief pourrait se trouver-changé : sans préjudice de l'exoeption «portée au #écr«t du 14 octobre relativement ;aux (fonds mouvants des biens nationaux.
Art. 7. A l'égard des fonds ci-devant tenus en censive, ou roturièrement, tout propriétaire d'iceux en pourra racheter partiellement des droits casuels à raison de telle «portion ulesdiis fonds qu'il jugera à propos, sous la seule condition de racheter en même temps la totalité des redevances tixes set annuelles dont le-fonds >se trouvera chargé; sans préjudice de l'exception portée au décret du 14 novembre relativement aux fonds ;mouvants des biens nationaux.
Art. 8. .Lorsqu'il sfagira de liquider un rachat des droits casuels dus à raison des mouvanoes dépendant d'un ci-devant fief, et dont le rachat n'aura point élé fait par le propriétaire, ou les propriétaires, des fonds tenus sous oes mouvances, et dans le cas où lesdites mouvances auront été inféodées, et il sera procédé ainsi qu'il suit :
Il sera faitdîabord urne évaluation dé lajsomfflie qui serait due par le propriétaire, ou par les propriétaires desdits fonds, selon qu'ils seront tenus en fief ou en. censive, et conformément aux règles prescrites par le:décret du 3 mai; et la somme qui résultera de cettepremièneopération, formera la valeur de la - propriété de ces mouvances.
Il sera ensuite procédé, conformément.>aux -règles prescrites par le décret du 3mai, et selon , la-mature et la quotité »des droits dont-se trouvera chargé le\fief idont dépendront ces mouvances, -à une seconde évaluation du cachât dû par le propriétaire de oes mouvances, eu égara à la valeur que leur aura donnée la-prem+ère;opératioii^ et de la même manièDesqueis'il s'agissait-de liquider un rachat sur ua fief, ccwporeldela même valeur.
Art. Si les mouvar ces, >à raison (desquelles -on voudra^e racheter, n'ont point été inféodées, audit cas le 'rachat «n sera liquidé ai&si qu'il suit :
11 sera fait d'abord une évaluation des fonds tenus en fief, ou en censive, leu'égard à leuriya--teur/réelle, .-abstraction Caitedes ctorges donfMs sont tenus envers le -fief dontiJsirtdèvent, et de la même manière ique ai la pleine (propriété de ces fonds appafftenait encore -au propriétaire i-du fief dont ils relèvent.
Le rachat des droits «asuels, dus au propriétaire du ifief supérieur, sera ensuite liquidé^ coc-Ïormément aux règttfs presodtee qaar le décret du 3 mai, et selon la nature et la .quotité des ^droits dont «st grevé le tief1 inférieur, sur la somme totale fui jsera résultée de la première
opération; en telle sorte que le rachat payé soit égal à celui qui aurait été dû, si les fonds dont le propriétaire du fief inférieur s'était joué lui appartenaient encore en pleine propriété.
Ai t. 10. La disposition de l'article précédent aura également lieu dans le cas où la mouvance aurait été précédemment rachetée par le propriétaire ou par les propriétaires des fonds chargés de cette mouvance, les dispositions des articles 44 et 45 du décret du 3 mai n'ayant jamais dû recevoir leurs applications qu'au cas où il s'agissait de mouvances non inféodées.
Art. 11. A l'avenir, toutes les fois que les fonds précédemment séparés d'un fief par sous-inféodation ou accensement seront retourné?, à titre de propriété incommutable, dans la main du propriétaire de ce fief, ou que le propriétaire desdits fonds aura acquis à titre incommutable la propriété du fief dont ces fonds relevaient; si ces fonds n'ont point été rachetés avant cet événement, ou si le fief n'a point été racheté, lesdits fonds seront réputés, quant au payement des droits ci-devant seigneuriaux et quant au rachat d'iceux, s'être réunis de plein droit audit fief, et tenus en fief, sans que la réunion ait pu être arrêtée par aucune déclaration contraire; ét ce, nonobstant toutes lois, coutumes, statuts et usages, à ce contraires, lesquels seront seulement observés et -suivis pour la décision des questions qui naîtraient de faits bu d'acies antérieurs aux lettres patentes qui sont intervenues le 3 novembre 1789, sur le décret des 4 août et jeurs suivants de la même année.
INSTRUCTION sur la manière d'opérer en conséquence des articles 8 ët 9 dt* projet de décret.
Art. 8. Lorsque le propriétaire d'un fonds, ci-devant fief, veut racheter h s droits casuels à raison des mouvances inféodées dépendant de son fief, et dont il n'a pas-reçu lui-même le rachat, il faut faire une double opération.
Il faut d'abord évaluer la somme qui lui serait due à lui-même | ar le propriétaire, ou par les propriétaires des fonds soumis à ea mouvance.
Supposons le fief B, mouvant du fief 4, et qui a sous sa mouvance le fief C.
Si ce fief G est éva'ué 12,000 livres, et s'il est sujet au douzième pour les mutations par vente, le rachat que ce fief devrait au fief B, à raison des mutations par vente, sera, suivant le n° 7 de l'article 25 du décret du 3 mai, de la moitié du droit, c'est-à-dire de 500 livres.
Si le fief C, quant aux droits pour les mutations, autres que par vente, est dans le cas de l'article 28 du décret, le rachat dû pour cette seconde cause sera des cinq douzièmes du droit, qui est une année du revenu. Supposant le revenu de ce fief à 400 livres le douzième sera de 33 liv. 6 s. 8 d. et les cinq douzièmes seront de 166 liv. 13 s. 4 d.
Réunissant ensuite les deux sommes de 500 livres et de 166 livres 13 s. 4 d., que le propriétaire du fief B devrait recevoir du propriétaire du fief C, on aura la somme totale de 666 liv. 13 s. 4 d,, qui formera la valeur de la mouvance du fief B sur le fief C-
Pour trouver ensuite la somme que le propriétaire devra lui-même au fief 4 pour le rachat de cette mouvance, il faudra faire une seconde opération.
Supposant (comme cela est ordinaire) que le fief B est tenu envers le fief J, sous les mêmes
charges que le fief C, il en résultera que B doit à A la moitié d'un droit de mutation par vente au douzième. Le douzième de 666 livres 13 s. 4 d., étant de 55 liv. 10 s., le rachat dû pour ce premier droit sera de 27 liv. 15 s.
Quant au droit de relief, arbitrant le revenu de 666 liv. 13 s. 4d. à 30 livres par an, dont le fief B doit 5 douzièmes, il en résultera une somme de 12 liv. 10 s.
Joignant les deux sommes de 27 liv. 15 s. et 12 liv. 10 s., on aura la somme totale de 40 liv. 5 s. pour le rachat dû par le fief B au fief 4, à raison de sa mouvance féodale sur C.
Si cette mouvance n'est pas féodale, mais seulement censuelle,* il ne faudra dans la première opération tirer le rachat qu'à raison des mutations par vente. Supposant le droit de vente toujours au douzième, on aura toujours 500 livres pour résultat de la valeur de cette mouvance, et 33 liv. 6s. 8 d. pour le rachat qui en sera dû par le fief B au fief A : mais on n'aura plus la seconde partie, attendu que le fief B n'aura point de droit de relief sur uné simple censive.
Cet exemple suffit pour indiquer la manière d'opérer générale, laquelle ne pourra varier que dans ses résultats, suivant les différentes quotités des droits que le fief servant aura droit de percevoir sur ies fonds mouvants de lui, et qu'il devra lui-même à son fief dominant.
Art. 9. Cet article est pour le cas où la mouvance qu'il s'agit de racheter procède d'un jeu de fief qui n'a point été autorisé par le propriétaire du fief supérieur.
Ici l'opération est toute différente. Ce n'est plus la simple valeur de cette mouvance qu'il faut estimer, et qui doit servir de base à la liquidation de rachat. Le propriétaire du fief inférieur, n'ayant pas pu préjudicier à son seigneur par un jeu de fief non autorisé, est réputé avoir conservé le fief dans son intégrité ; en cas de mutation de sa part, il doit les droits de la même manière que s'il avait conservé la pleine propriété des fonds qu'il a mis hors sa main, et sur lesquels il n'a réservé que la directe. Le rachat qu'il doit est relatif à la quotité des droits dont il est chargé : il faut donc liquider le rachat de la même manière que si le fief existait dans son intégrité.
Soit supposé le fief B, composé de 100 arpents, et cédé en cet état par le fief 4, dont il est mouvant. B a inféodé à C 50 arpents, et a accencé à Jacques et à Philippe 30 arpents ; en sorte qu'il ne reste entre ses mains que 30 arpents : mais, s'il vend ces 30 arpents, il doit les droits comme s'il possédait les 1C0 arpents ; et c'est sur ce pied que doit être liquidé le rachat.
Supposant les 100 arpents de valeur de 100,000 livres et de 3,000 livres de revenu ;
Si le fief B ( st dans le quatrième cas de l'article 25 du décret du 3 mai, c'est-à-dire s'il est sujet au quint en cas de vente, il devra, pour le rachat de ce premier droit, cinq treizièmes du quint, ou de 20,000 livres, c'est-à-dire 7,652 liv. 5 s. 10 d.
Quant au droit de relief, s'il est dans le cas dé l'article 29 du décret du 3 mai, il devra cinq dix-huitièmes de 3,-000 livres ou 833 liv. 6 s. 8 d.
Ainsi le fiéf devra en total pour le rachat des droits casuels 8,505 liv. 12 s. 6 d, ; somme bien différente de celle qu'il aurait due, si les mouvances eussent été inféodées.
Dans cette seconde hypothèse, la mouvance sur les 50 arpents tenus de lui en fief n'aurait été évaluée qu'à 4,252 liv. 16 s. 3 d.
Celle sur les 20 arpents tenus en censive, qui n'auraient dû leurs lots qu'au douzième, et point d ; relief, n'aurait été évaluée qu'à 833 liv. 6 s. 2 d.
Le fief B n'aurait dû, pour le rachat tant des droits de vente que des droits de relief de sa mouvance sur les 50 arpents, qu'environ 383 liv. 17 s. 1 d. et pour le rachat des mêmes droits de sa mouvance sur les 20 arpents tenus en censive, qu'environ 147 livres.
Ainsi, dans l'hypothèse où les mouvances eussent été inféodées, le fief B n'aurait dû que : „
1° Pour les 30 arpents lenus en pleine propriété. 2,555 1. 10 s.
2° Pour les 50 arpents mouvants de lui en fief.. 383 17
3° Pour les 20 arpents mouvants de lui en censive—................ 147 »
Total... 3,086 1. 7 s.
Il devra au contraire, ses mouvances n'étant point inféodées, en totalité._____ 8,505 1. 12 s. 6 d.
Différence... 5,419 l. 5 s. b d.
L'opération et la différencë des résultats seront les mêmes, soit qu'il s'agisse de liquider le rachat d'une mouvance non encore rachetée par le vassal, ou censitaire, soit que cette mouvance ait été précédemment, rachetée.
(La discussion est ouverte sur ce projet de décret.)
L'article 1er est déçréfé sans discussion ainsi qu'il suit :
Article premier.
« Tout propriétaire d'un ci-devant fief, lequel ne consistera qu'en domaines corporels, tels que maisons, terres, prés, bois, et autres de même nature, pourra racheter divisément les droits ca-suels dont il est grevé, pour telle portion qu'il jugera à propos, pourvu qu'il rachète en même temps la totalité des redevances fixes et annuelles dont son fief pourrait être grevé, sans préjudice de l'exception portée au décret du 14 novembre, relativement aux fiefs mouvants des biens nationaux. »
Un membre propose de décréter que, lorsque le ci-devant seigneur d'un tènement solidaire admettra l'un des censitaires ou tenanciers au rachat de sa quote-part de la censive, il puisse conserver la solidarité contre les autres co-tenanciers, pour le surplus de ladite censive, pourvu qu'il en fasse réserve expresse dans l'acte de rachat.
(L'Assemblée renvoie cette proposition au comité féodal.)
Un membre propose, par amendement à l'article 2, de remplacer les mots : seront régis par les coutumes dans lesquelles le seigneur, par ceux-ci : seront situés dans des pays où le supérieur.
(Cet amendement est adopté.)
Plusieurs membres proposent, sur les articles 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 et 10, divers amendements qui sont acceptés par le rapporteur.
Ces articles sont décrétés comme suit :
Art. 2.
« Il en sera usé de même à l'égard des ci-devant fiefs qui ont sous eux des fonds tenus en fief ou en censive, ou roturièremmt, lorsque lesdites mouvances auront été inféodées par le propriétaire du fief supérieur, ou lorsque lesdits nefs seront situés dans des pays où le supérieur ne conserve aucun droit utile immédiat sur les objets qui ont été sous-inféoclés ou accensis par le propriétaire du fief inférieur, encore que le jeu de fief n'ait point été approuvé ou reconnu par le seigneur supérieur.
Art. 3.
« Lorsqu'il dépendra du fief des mouvances qui n'auront point été inféodées par le ci-devant seigneur supérieur, et lorsque ce fief sera situé dans l'un des pays où le jeu de fief ne peut porter préjudice à ce ci-devant seigneur supérieur, le. propriétaire du fief inférieur ne pourra racheter partiellement les droits casuels sur les domaines qui sont restés dans sa main, que jusqu'à concurrence de la portion dont la loi qui régit le fief lui avait permis de se jouer, en comprenant dans ce calculées portions déjà par lui accensées ou inféodées; en telle sorte qu'il reste toujours dans sa main la portion entière que la loi l'aurait obligé de réserver, si mieux il n'aime racheter préalablement les droits casuels à raison de la totalité des mouvances non inféodées dépendant de son fief; auquel cas, et après avoir effectué ledit rachat, il pourra racheter librement et partiellement le surplus de son fief, et pour telle portion qu'il jugera à propos.
Art. 4.
« Dans le même cas où les mouvances ne seront point inféodées, et où le fief sera situé dans l'un des pays où les jeux de fiefs ne peuvent point porter préjudice au seigneur supérieur, si d'ailleurs le fief est régi par l'une des coutumes qui ne permettent point le jeu de fief à prix d'argent, mais seulement par bail à ceas ou à rente, le propriétaire de ce fief pourra néanmoins vendre à prix d'argent telle portion des fonds qui sont restés en sa main, et en racheter partiellement les droits casuels, pourvu que les portions qu'il rachètera ou vendra, n'excèdent point les deux tiers du fief, en comprenant dans ces deux tiers les fonds déjà sous-inféodés ou accensés, si mieux il n'aime racheter préalablement les droits casuels à raison de la totalité des mouvances non inféodées; auquel cas, et après avoir effectué ledit rachat, il pourra racheter librement et partiellement le surplus de son fief pour telle portion qu'il jugera à propos.
Art. 5.
« Il en sera usé de même que dans l'article précédent, à l'égard des ci-devant fiefs dont dépendront des mouvances non inféodées, et qui seront situées dans des pays où les jeux de fiefs ne peuvent point porter préjudice au ci-devant seigneur supérieur, mais où il n'existerait aucune loi qui restreignît la liberté du jeu de fief; et cela nonobstant tout usage ou jurisprudence particulière qui se seraient introduits dans lesdits pays.
Art. 6.
« Le rachat partiel, dans les cas autorisés par les articles 3, 4 et 5 ci-dessus, ne pourra avoir
lieu que sous la condition de racheter en même temps la totalité des redevances fixes et annuelles dont le fief pourrait se trouver chargé, sans préjudice de- l'exception portée au décret du 14 novembre, relativement aux fonds mouvants des biens nationaux.
Art.7.
« À l'égard des fbods ci-devant mou vants^d'un fief en censive ou roturièrement, tout propriétaire d'iceux en pourra racheter partiellement les droits casuels à raison de toile portion» desdits fonds qu'il jugera à propos, sous la* seule condition de racheter en même temps la totalité des redevances fixes,- annuelles ou solidaires, dont se trouvera chargé le fonds sur lequel le propriétaire voudra racheter partiellement les droits casuels, sans préjudice de l'exception portée au décret du 14 novembre, relativement aux fonds mouvants des biens nationaux.
ArL 8..
« Lorsqu'il» s'agira de liquider un rachat des droits casnsels, dus à raison des mouvances dépendant d'un ci-devant fief, et dont le rachat n'aura point éÉêfâiti par Ife1 propriétaire ou les propriétaires des fonds tenus sousices mouvances; eU dans'le» cas où lesditea mouvances auront été inféodéeSj ouj seront dépendantes d'un fief situé dans1 un pays où le jeu1 de» fief portât» préjudice au seigneur supérieur; il' y sera procédé ainsi qu'il suit :
« U sera fart d'abord1 une évaluation cte la somme qui' serait dire par* le propriétaire, ou par les propriétaires-desdits fbnds', selon» qw'ilfe seront tenus en fief ou en censive, et conformément aux règles prescrites par le décret du 3 mai ; et la somme qui résultera de cette première opération, formera la vaïeup de la propriété de ces mouvances.
k IF sra- ensuite- procédé; conformément aux régîtes prescrites par le décret du 3 mai, et selon la nature et ta quotité des droits» dont se trouvera chargé l'e néP dbnt dépendront ces mouvances, à une seconde évaluation! du rachat' du par le propriétaire de ces mouvances», eu égard à îa valeur que leur aura donnée la première opération, et ae- la même manière que» s'il s'agissait dé liquider un rachat sur un fief corporel de la même valeur.
Art. 9,.
« Si les mouvances à raison desquelles on voudra se racheter, n'ont point été5inféodées, ou dé* pendent d'un fiéf situé-dans un pays où le jeu de fief ne peut point porter préjudice au seigneur, au dît cas, le rachat en sera liquidé ainsi qu'il suit': - ' 1 : » ' - ' er">
« Il sera fait d'abord une évaluation des fonds tenus en fief ou eu censive^ eu égard à leur valeur réelle, abstraction faite des charges dont ils sont tenus envers le fief dont ils relèvent, et de la même manière que si la pleine propriété de ces fonds appartenait encore au propriétaire du fièf dont ils relèvent.
« Le raehat des droits casuels dus au propriétaire du fief supérieur, sera ensuite liquidé conformément aux règles prescrites par le décret du 3 mai, et selon la nature et la quotité des droits dont est grevé le fief inférieur, sur la somme totale qui sera résultée de la première opération ; en telle sorte que le rachat payé soit égal à celui qui aurait été dû, si les fonds dont le propriétaire du fief inférieur s'était joué, lui appartenaient encore en pleine propriété.
Art. ÎO.
« La disposition de l'article précédent aura également lieu dans le cas où la mouvance aurait été; précédemment rachetée pan le propriétaire, ou par les propriétaires des fonds chargés de cette mouvance,, les dispositions des articles 44 et 45 du décret du 3 mai, n'ayant jamais dû recevoir leur application qu'au cas où i£ s'agissait,de mouvances non inféodées. »
, rapporteur, donne leeture de l'article 11 du projet de décret.
Par cet article! le comité prétend nous rappeler à la pureté des principes féodaux; mais nous n'avons pas aboli le régime féodal pour en consacrer les principes. Il existait des principes avant ceux-ci qui, au contraire, ne sont que des abus du principe originaire de liberté.
Je demande donc qu'on substitue à l'article du comité cette disposition :
« Le régime féodal étant aboli, dans aucun cas il n'y aura plus désormais de réunion, des biens tenus en censive au fief servant, ni de celui-ci au fief dominant. »
, rapporteur. Ce n'est pas en s'ap-puyant sur des principes vraiment féodaux, mais au contraire sur des, principes de droit naturel, que le comité: vous & présenté cet article ; car ce. n'est pas seulement en, matière féodale,, mais en toute matière-quelconque, quelorsque deux fonds,, dont l'un est servant, vis-à-vis de l'autre, se réunissent dans la même main,.la con&t&ionde propriété éteint nécessairement la servitude, parce qu'il n'est pas possible que le même propriétaire soit débiteur envers lui-même, et ae la main i droite envers la main gauche.
Au surplus, la raison fondamentale qui n'a pas permis à votre comité d'abolir le principe, c'est le respect que vous avez toujours eu pour la propriété. Par exemple, toutes les fois que j'ai in-réodié mon fbnds, je- l'ai inféodé et accensé sut-* vant' la loi du pays. Si je vous ai permis de* le sous-inféoder, je vous ai également imposé là loi que ce que vous- sépareriez de-votre fief y serait réuni si vous le repreniez, puisque telle était la loi du pays, et que vous n'avez pu recevoir de moij ma propriété que sous la loi qui était existante : voilà nos motifs.
L'intention de l'Assemblée a été de donner des limites à la féodalité et même delà détruire. Si tel a été véritablement son dessein, peut-elle adopter une disposition qui tendrait, pour ainsi dire, à la renouveler, àlta donner plus de faveur?'
J'appuie l'amendement de M. Malès, qui tend à vous faire décréter une autre loi qui, soit précisément l'inverse de ce que le comité vient de proposer. %
(L'Assemblée accorde la priorité à la proposition de M. Malès, et la décrête ensuite sauf rédaction.)
rapporteur. En conséquence du voté que l'Assemblée vient d'émettre, je propose pour l'article 11 la rédaction suivante :
Art. 11.
« A l'avenir, la réunion ou consolidation des biens tenus en censive, aux fiefs dont les biens étaient mouvants, ou de ce fief au fief dominant,
ne produira aucun droit ni aucun profit en faveur du ci-devant seigneur du fief dominant, et n'augmentera, dans aucun cas> le prix du rachat du fief-servant, ni celui des biens tenus en censive. »
(Cet article est décrété.)
L'.ordre du jour est un projet de décret additionnel présenté par le comité de Constitution sur l'ordre judiciaire.
, au nom du comité de Constitution. Messieurs, le comité de Constitution est interrogé, depuis plusieurs mois, sur différentes questions relatives aux juges de paix, à leurs greffiers, aux juges, greffiers et huissiers des tribunaux, et aux. bureaux de paix. Les réponses gu'il a faites eti celles que donne le ministre de la justice, à qui ces questions sont renvoyées par le comité, lorsqu'il ne s'agit que de l'application évidente des décrets de l'Assemblée, ne, portent la lumière que dans un cercle fort étroit, et ne préviennent ni les doutes qui naissent ailleurs, ni lerenouvellementcoatinuel des mêmes questions.
Votre comité a pensé que, par quelques décrets additionnels, qui ne sont que la conséquence des premiers que vous avez rendus, ou qui manquent en effet au complément de l'organisation de l'ordre judiciaire, la source des difficultés serait, tarie, et que l'activité de la justice ne serait plus retardée, soit par de chimériques prétentions, soit par des scrupules exagérés.
lia paru juste d'accorder une légère récompense au juge de paix: pour les ^cations de scellés qui ne sont pas des jugements; cela a paru utile pour prévenir les négligences.
Le respect pour la loi tient souvent à l'impression des sens; nous vous proposerons donc un costume, ou plutôt un signe extérieur servant à faire reconnaître le juge de paix et les officiers ministériels de l'exécution des jugements; lade-mande en est formée de toutes les parties du royaume.
Vous avez réglé les menus frais des directoires: il faut déterminer aussi ceux des tribunaux.
Les fonctions et les droits des suppléants ont donné lieu à plusieurs questions qu'il paraît convenable- de résoudre.
La taxe des dépens, la reconnaissance et levée des scellés apposés par les municipalités sur les greffes, exigent aussi quelques dispositions particulières.
Voici le projet de décret :
Projet de décret. Des juges de paix, de leurs assesseurs et de leurs greffiers,
« Article lor. Nul ne pourra être juge de paix et en même temps oflicier municipal, membre d'un directoire, greffier, avoué, huissier, juge de district, juge de commerce, percepteur de deniers publics.
« Art. 2. Les assesseurs des juges de paix sont exclus des mêmes fonctions, si ce n'est que dans les bourgs et villages, il leur sera permis d'être officiers municipaux : ils ne peuvent être- parents du juge de paix au degré de cousins germains; et s'ils sont parents entre eux à ce degré, ils ne jugeront point ensemble sans le consentement de toutes les parties.
« Art. 3. La première fois que les assesseurs assisteront le juge de paix, ils prêteront dans ses
mains le même serment prêté par lui devant le conseil général de la commune, et il en sera dressé acte.
« Art. 4. Le juge de paix sera tenu de nommer un greffier, lequel ne pourra être son parentjus-qu'au troisième degré, selon la supputation civile, c'est-à-dire jusqu'au degré d'oncle et de neveu.
« Art. 5. Les greffiers des juges de paix ne pourront exercer les fonctions mentionnées en l'article 1er, ni celles de notaires. Il en sera de même des greffiers des tribunaux de district ou de commerce.
« Art. 6. Si le greffier de la municipalité refuse signifier les citations, actes et jugements du juge de paix,il ne pourra conserver sa place;et l'huissier qui le remplacera pour les significations ne recevra, à peine de concussion, que les droits attribués au greffier, si la signification est faite dans la municipalité du domicile de l'huissier; mais en outre, en cas de transport, il recevra 12 sous par lieue, sans qu'il puisse jamais être mis à la charge de la partie condamnée plus que les frais de deux lieues de transport.
« Art. 7. Les juges de paix procéderont d'office à l'apposition des scellés, après l'ouverture des successions, lorsque les héritiers seront absents ou mineurs, et ils passeront outre, nonobstant les oppositions, dont ils renverront le jugement au tribunal de district.
« Art. 8. L'apposition de scellés étant un acte purement ministériel et conservatoire, il sera alloué au juge de paix 2 livres pour une vacation de 3 heures, et 20; sous pour les1 suivantes. Le greffier aura les 2 tiers de la somme attribuée au juge. Les droit* seront d'une moitié en sus dans1 les villes au-dessus de 25,000 âmes, et du double pour Paris. Il en sera de même pour les vacations de reconnaissance et levée de scellés, et pour celles employées aux avis dô parents; le tout indépendamment des droits d'expédition du greffe.
« Art. 9. La confection des inventaires n'appartiendra point au juge de paix, mais aux notaires, même dans les lieux où1 elle était1 ci-devant attribuée aux juges et aux greffiers.
« Ari. 10. La légalisation des actes appartiendra, non aux juges de paix, mais aux présidents des tribunaux de district, ou aux juges qui en feront les fonctions, et concurremment aux maires des chefs-lieux où sont établis, soit les tribunaux, soit les administrations de district.
« Art. 11. Les juges de paix pourront porter, attaché au côté gauche de l'habit, un médaillon ovale en étoffe, bordure rouge, fond bleu, sur lequel seront écrits, en. lettres blanches, ces mots : La loi et la paix.
Art. 12. Les huissiers des juges de paix dans les villes, lorsqu'ils seront en fonctions, porteront à la main une canne blanche. Les citations et jugements des juges de paix seront signifiés par eux, et non par autres huissiers, à peine d'amende de 6 livres, qui sera prononcée par le juge de paix, dont la moitié sera applicable à son huissier; l'autre moitié sera versée dans la caisse du receveur des amendes du district!.
Des bureaux de paix.
« Art. 13. Aucuns avoués, greffiers, huissiers et ci-devant procureurs ne pourront représenter les parties aux bureaux de paix. Les autres citoyens ne seront admis à les représenter que lorsqu'ils seront revêtus de pouvoirs suffisants pour transiger.
Art. 14. Les affaires commencées avant l'installation des tribunaux, seront portées à ceux qui doivent en connaître, par simple assignation de la partie la plus diligente, sans autres procédures et sans avoir passé au bureau de paix, si l'une des parties s'y refuse.
« Art. 15. Toutes saisies, oppositions et autres actes conservatoires pourront être faits avant de donner la citation devant le bus eau de paix. Les affaires qui intéressent la nationales communes et l'ordre public seront portées aux tribunaux sans qu'il soit besoin de comparution préalable devant ce bureau ; il en sera de même des affaires de la compétence des juges de commerce.
« Art. 16. Les officiers municipaux sont autorisés à pourvoir économiquement aux menus frais de bois, lumière, papier et secrétaire du bureau de paix, qui seront à prendre sur le produit des amendes prononcées sur les appels.
« Art. 17. Les bureaux de paix exerceront leurs fonctions sans qu'il soit besoin d'aucune installation. »
Des juges de district, suppléants et greffiers.
« Art. 18. Les fonctions mentionnées en l'article 1er sont interdites aux juges et aux commissaires du roi, ainsi que celles de notaire.
« Art. 19. Les suppléants ne pourront être greffiers, huissiers, ni percepteurs de deniers publics; mais ils pourront exercer le ministère de défenseur officieux, d'avoué, de juge de paix, ainsi que les fonctions municipales, à la charge d'opter au moment où ils auront des provisions de juges.
« Art. 20. Les suppléants ne seront appelés par le tribunal que dans le cas où leur assistance sera nécessaire à la validité des jugements, à l'exception des suppléants qui, remplaçant les membres de l'Assemblée nationale nommés juges, complètent le nombre habituel de 5 dans chaque tribunal. La première fois qu'ils seront appelés, s'ils n'ont pas prêté le serment, lors de l'installation des juges, ils prêteront devant eux le même serment, et il en sera dressé acte.
« Art. 21. Lorsque les suppléants seront appelés pour la validité des jugemeuts, ils porteront le même costume que les juges et ils recevront leur part des droits d'assistance eeulement.
« Art. 22. Les commis assermentés des greffiers des tribunaux ne peuvent, non plus que les greffiers eux-mêmes, être parents de l'un des juges du tribunal qui les a choisis, jusqu'au troisième degré, selon la supputation civile, quand même le juge, parent du greffier, se serait abstenu de donner sa voix pour son élection.
« Art. 23. Dans les lieux où l'usage des taxa-teurs est établi, .il sera nommé par chaque tribunal 2 ou 3 taxateurs de dépens pris parmi les avoués, et qui exerceront pendant 3 mois, après avoir prêté serment de remplir fidèlement leurs fonctions ; ils pourront êlre continués ; partout ailleurs les dépens seront liquidés par le jugement même.
« Art. 24» Toute perception de droits et émoluments, contraire aux règlements, est défendue à peine de concussion et les taxateurs en seront personnellement responsables, sauf leur recours contre l'officier qui aurait trop reçu.
« Arl. 25. Par provision, et en attendant qu'il
ait été fait un nouveau tarif, les émoluments personnels des greffiers, sur chaque expédition, seront de la moitié des ancieos. Ceux des avoués, dijs taxateurs, des huissiers audienciers, seront des trois quarts ; ceux des huissiers ordinaires seront les mêmes ; mais tous ces droits ne seront perçus sur ce piei, même dans les affaires d'appel, qu'eu égard aux tarifs qui étaient établi* dans chaque lieu pour les affaires de première instance. A Paris, ces proportions seront établies sur le tarif de 1778, qui avait lieu aux requêtes du palais ; mais il ne sera passé aux avoués aucuns des droits de conseil ou de consultation attribués par ce tarif aux ci-devant procureurs, ni plus de 3 actes pour venir plaider dans chaque cause.
« Art.26. Jusqu'à ce que l'Assemblée nationale ait statué sur la simplification de la procédure, les avoués suivront exactement celle qui est établie par l'ordonnance de 1667; il ne sera cependant présenté aucune requête pour obtenir la permission d'assigner; et dans les affaires appointées, il ne sera siguifié que deux écrits au plus pour chaque partie; et dans les lieux où il se fait un inventaire de production, il sera fait par un ét it sommaire qui ne passera en taxe que pour livres.
« Art. 27. Les tribunaux de district et de commerce sont provisoirement autorisés à faire des arrêtés relatifs à la police et à l'ordre des audiences; ils feront exposer dans l'auditoire les rôles : l°des affaires sommaires ou provisoires, ou portées par appel des juges de paix et tribunaux de police ; 2° des affaires ordinaires; 3° des affaires majeures et de celles qui sont appointées. Il y aura par semaine des audiences destinées à chaque genre d'affaires civiles, et d'autres pour le rapport et le jugement des procès criminels.
m Art. 28. Les défenseurs officieux seront tenus de justifier au président et de faire viser par lui les pouvoirs de leurs clients trois jours au moins avant celui de l'audience.
« Art. 29. Il sera provisoirement alloué par an, pour menus frais de chaque tribunal de district, en papier, registres, bois, lumière et serviteur ou concierge, une somme de 800 livres, laquelle sera payée par les receveurs. de district, sur les mandats des présidents. Cette somme sera n'une moitié en sus dans les villes au-dessus de 60,000 âmes, et du double à Paris. Il ne sera passé aucuns frais de buvette.
« Art. 30. Les huissiers, gardes du commerce et autres exécuteurs des jugements, faisant une exécution quelconque, porteront une canna blanche et, a la boutonnière, une médaille suspendue par un ruban aux trois couleurs et portant ces mots : Action de la loi.
» Les huissiers audienciers porteront, dans le même cas, le costume réglé par le décret du 2 septembre 1790 : ceux-ci feront seuls les significations d'avoués à avoués; tous autres huissiers qui feront ces significations seront condamnés pour chacune à une amende de 12 livres, dont moitié applicable aux huissiers audienciers du tribunal.
« Art. 31. Les juges dis tribunaux de commerce seront installés par les officiers municipaux dans la même forme prescrite à l'égard dçs tribunaux de district.
« Art. 32. Les ofticiers municipaux des lieux où il y avait des justices ci-devant seigneuriales, reconnaîtront et lèveront les scellés qu'ils ont apposés sur les greffes, et feront transporter les minutes et registres au greffe du tribunal de
district, dont le greffier s'en chargera an pied d'un bref état. Il en sera de même des ci-devant sièges royaux compris dans le territoire du tribunal ; mais à l'égard des ci-devant cours, ci-devant présidiaux, bailliages, sénéchaussées, vi-gueries, établis dans les lieux où. les tribunaux de district sont placés, les officiers municipaux nommeront tel gardien qu'ils jugeront à propos, duquel ils prendront le serment, et qui, après la reconnaissance et levée des scellés, se chargera sur un bref état, des minutes, registres, archives de ces anciens tribunaux, et pourra en délivrer des extraits ou expéditions, en ne recevant que 20 sous par chaque rôle, dont ils compteront de clerc *à maître à la municipalité, qui leur fixera un salaire raisonnable. »
La discussion est ouverte sur ce projet de décret.) *
, rapporteur, donne leclure de l'article 1er.
,. Je demande qu'on ajoute à la nomenclature contenue dans cet article le mot : notaire.
,, rapporteur. J'ai l'honneur de vous faire observer que c'est avec réflexion que nous n'avons pas mis les notaires. Les fonctions de notaire sont des fonctions de paix, sont des fonctions conciliatoires. Vous ne donnez pas un salaire assez considérable à vos juges de paix pour les priver des fonctions particulières qui sympathisent si bien avec celles de notaires dont ils pourraient déjà être revêtus.
(L'amendement de M. de Folleville n'est pas adopté.)
L'article 1er est adopté sans modification
dans les termes suivants :
Art. 1er.
Nul ne pourra être juge de paix et en même temps officier municipal, membre d'un directoire, greffier, avoué, huissier, juge de district, juge de commerce, percepteur de deniers publics.
,, rapporteur, donne lecture de l'article 2.
,. Je demande par amendement que, dans les villes dont la population est inférieure à 4,000 âmes, les assesseurs ne soient pas exclus des fonctions mentionnées à l'article précédent et que cette incompatibilité soit restreinte aux villes dont la population est supérieure à ce chiffre.
iLa question préalable est demandée sur cet amendement.)
(L'Assemblée décrète qu'il y a lieu à délibérer et adopte l'amendement.)
L'article 2 est décrété, avec cette modification, comme suit :
Art. 2.
« Les assesseurs des juges de paix sont exclus des mêmes fonctions, si ce n'est que dans les bourgs et villages au-dessus de 4,000 âmes, il leur sera permis d'être officiers municipaux. Ils ne peuvent être parents du juge de paix au degré de c6usins germains; et s'ils sont parents entre eux à ce degré, ils ne jugeront point ensemble sans le consentement de toutes les parties. »
, rapporteur, donne lecture des articles 3 et 4, qui sont adoptés, sans discussion, en ces termes :
Art. 3.
« La première fois que les assesseurs assisteront le juge de paix, ils prêteront dans ses mains le même serment prêté par lui devant le conseil général de la commune, et il en sera dressé acte. »
Art. 4.
« Le juge de paix sera tenu de nommer un greffier, lequel ne pourra être son parent jusqu'au troisième degré, selon la supputation civile, c'est-à-dire jusqu'au degré d'oncle et de neveu. »
, rapporteur, donne lecture de l'article 5.
Un membre: Je demande si, pour être élu et pour être greffier des tribunaux de district et des juges de paix, il faut être citoyen actif? Il y a beaucoup de jeunes gens dans les provinces méridionales qui ont des talents et qui demandent que cela se décide.
Plusieurs membres : On ne peut pas être fonctionnaire public sans être citoyen actif.
Un membre demande que le greffier soit tenu de faire sa résidence dans le lieu du domicile du juge de paix.
Un membre demande que le greffiér soit tenu de résider dans le canton.
Un membre demande que le greffier soif tenu de résider au plus à une lieue de distance du lieu du domicile du juge de paix.
(Ces amendements sont rejetés par la question préalable.)
Un membre propose par amendement que les avoués puissent être greffiers du juge de paix.
(Cet amendement est rejeté par la question préalable.)
Je crois qu'il est intéressant, comme le comité l'a observé, que le3 greffiers des juges de paix ne puissent exercer les fonctions mentionnées dans le premier article; mais je ne crois pas qu'il soit intéressant d'exclure les greffiers des juges de paix des fonctions de notaire; dans la majeure partie des campagnes, dans les chefs-lieux des cantons, vous ne trouverez personne d'assez instruit pour exercer ces fonctions, si ce n'est les notaires.
Je demaude donc qu'il n'y ait pas d'incompatibilité entre les greffiers des juges de paix et les notaires.
, rapporteur. Le motif du comité pour étendre l'incompatibilité jusqu'aux fonctions de notaire, a été que les greffiers que l'on charge de différentes opérations assez occupantes, fussent tout entiers à ces opérations. Cependant je consens à rayer cette.addition ; car je n'y vois pas un grand inconvénient. Mais aussi je dois dire que je n'aperçois pas l'avantage qu'on y voit
Un membre : Quant à moi, Messieurs, je trouve des inconvénients très sensibles dans cette réunion. 1° C'est que ie greffier ne doit pas être dis-
trait de ses fonctions par celles qu'exige son notariat; 2° c'est que, dans une municipalité, celui qui pourra obtenir le greffe du juge de paix acquerra sur ses confrères une préférence qui leur sera préjudiciable.
Le premier vœu de l'Assemblée est d'avoir des juges de paix; et je dis que dans les trois quarts des campagnes vous n'aurez pas de juges de paix. Ce n'est pas à des intérêts particuliers que vous devez vous arrêter; or, l'intérêt public présente-t-il véritablement quelque inconvénien t à ce que les fonctions de notaire se cumulent plutôt dans une étude que dans une autre? Nullement. L'intérêt public présente-t-il quelque incompatibilité véritable entre les fonctions de notaire et celles de greffier du juge de paix? Je dis au contraire que ces fonctions se rapportent infiniment; je dis que le notaire est le greffier naturel des parties.
À considérer la sentence du juge de paix comme une espèce de transaction, je dis que le droit de recevoir une transaction appartient au notaire, et qu'il n'y a pas d'incompatibilité entre le greffier du juge de paix et le notaire. Enfin j'ajoute et je certifie, d'après la connaissance des lieux que j'habite, que dans les cantons de campagnes au loin de Paris, on ne trouvera pas un homme qui sache écrire, si ce n'est un notaire.
Un membre : L'expérience nous prouve que toutes les fois que vous avez réuni dans la même main les fonctions de notaire et de procureur, vous avez toujours eu des procès, jamais de transactions.
(L'Assemblée adopte l'amendement de M. Gou-pilleau.)
, rapporteur. Voici quelle serait la nouvelle rédaction de l'article :
Art. 5.
« Les greffiers des juges de paix ne pourront exercer les fonctions mentionnées en l'article 1er. Il en sera de même des greffiers des tribunaux de district ou de commerce, qui, en outre, ne pourront être en même temps notaires et seront tenus d'opter. »
(Cet article est décrété.)
Voici une lettre que je reçois d'Aix-la-Chapelle, en date du 12 de ce mois :
« Monsieur le Président, le dérangement de ma santé m'avait fait résister aux vœux de mes commettants pour accepter la députation aux Etats généraux; en cédant à leurs instances, j'avais prévu que je ne pouvais remplir que très imparfaitement la mission qu'ils m'avaient confiée.
« Depuis quelques mois, j'ai été obligé de m'é-loigner de l'Assemblée pour chercher les soulagements que demandait ma santé. Reconnaissant enfin qu'elle ne me permet plus de remplir mes devoirs, j'ai l'honneur de vous déclarer que je donne ma démission et que je consens a être remplacé par M. l'abbé de Lombard de Boulanne, qui m'a été nominativement désigné pour suppléant.
Je suis, etc...
Signé : François, archevêque de Tours. »
(L'Assemblée ordonne que le comité de vérification s'assemblera pour examiner les pouvoirs du suppléant et en fera le rapport.)
M. le maire de Paris m'an-
nonce, par lettre, l'adjudication de plusieurs biens nationaux, qui consistent :
1° En un terrain de 207 toises, quai Saint-Bernard, loué 517 livres, estimé 7,350 livres, adjugé 16,000 livres ;
2° En un terrain de 175 toises sur le nouveau boulevard, loué 500 livres, estimé 7,245 livres, adjugé 18,000 livres.
3° Deux petites maisons près la Bastille, louées 910 livres, estimées 12,000 livres, adjugées 20,400 livres.
Les électeurs du district de Saint-Germain-en-Laye me demandent, par lettre, de vous annoncer que sur 60 curés de leur district, 51 ont prêté le serment, ainsi que 40 vicaires sur 47, et 36 autres fonctionnaires publics sur 48. (App laudissements. )
, au nom du comité des recherches. Messieurs, par votre décret du 30 octobre dernier, vous avez ordonné une information relative à Vin-surrection qui a eu lieu à Belfort le 21 du même mois. Trois prisonniers, aux termes de ce décret, devaient être transférés dans les prisons de l'abbaye Saint-Germain à Paris ; l'un d'eux, le sieur Châlon, aide-major de place à Belfort, actuellement détenu dans les prisons de cette ville, est malade et hors d'état d'être transféré.
Le ministre, incertain sur la conduite qu'il doit tenir en cette circonstance, désire connaître les intentions de l'Assemblée sur l'exécution du décret.
Votre comité vous demande d'être autorisé à répondre au ministre qu'il doit surseoir à l'exécution dudit décret, jusqu'à ce que le sieur Châlon puisse être transféré sans daoger pour sa personne.
Non seulement M. Châlon est malade, mais en outre il a été pris sur les terres de Porentruy, dans un village dépendant de ce territoire.
Ce fait constitue une violation flagrante du droit des gens, et je ne crois pas qu'il soit dans l'intention de l'Assemblée nationale de France dè donner son approbation à quelques-uns de nos concitoyens qui s'en vont violer le territoire de l'étranger pour y enlever un homme qui doit y être en toute sûreté. (Vifs applaudissements. )
Je demande avant tout que ce fait soit indubitablement éclairci, parce que je suis entièrement de l'avis du préopinant.
Si l'homme a été arrêté sur une simple mesure de violence en territoire étranger, l'Assemblée nationale doit avant tout, le fait une fois constaté, faire rendre le prisonnier, et donner ainsi l'exemple du respect du droit des gens. (Vifs applaudissements.)
Je suis sur le principe entièrement de l'avis du préopinant; je crois du reste que, pour éclaircir le fait, les premières lignes de la lettre du ministre suffiront.
« Je m'empresse de vous prévenir, dit le ministre, que le sieur Guy, major-commandant à Belfort, m'annonce que le sieur Châlon, aide-major de cette place et l'un des trois officiers prévenus d'avoir occasionné des troubles le 21 octobre dernier, a été transféré par un détachement de gardes nationales des prisons de Saint-Hippolyte dans celles de Belfort... »
Et Saint-Hippolyte est en France. {Murmures.)
. Je réponds à M. Voidelque le fait est véritable, que le sieur Ghâlon a bien été transféré de prisons de Saint-Hippolyte sur leDoubs, à Belfort; mais je sais qu'il a été pris sur le territoire de Porentruy, dans un village qu'on nomme Davant.
Je dis que je le sais, non pas officiellement, parce que l'on ne m'envoie pas de nouvelles officielles; mais j'ai quatre lettres de Belfort, de personnes notables qui, toutes, m'ont instruit de ce fait à deux postes différentes.
Or, je demande que le comité vérifie ce fait; et ce fait reconnu exact, je demande la relaxation de M. Châlon.
JJn membre ; Une lettre, qui m'a été écrite par un parent de M. Châlon, m'en atteste la vérité.
. Il faut que le fait soit éclairci; Je procès-verbal d'arrestation lui-môme ne suffirait pas, car Ce ne serait pas la première fois qu'un procès-verbal d'arrestation aurait été faux.
Je demande qu'on ne prenne aucune mesure ultérieure avant de s'être procuré des éclaircissements authentiques et certains. (Applaudissements.,)
. L'Assemblée doit reconnaître que si le fait est constaté, M. Châlon sera remis en liberté.
. Je demande que, si le fait est éclairci et qu'il soit prouvé que l'arrestation a été opérée sur les terres de Porentruy, M. Châlon soit réintégré sur les terres de Porentruy.
Plusieurs membres : Oui I oui !
(L'Assemblée charge son comité des recherches de vérifier les circonstances de l'arrestation de M. Châlon et ajourne toute mesure ultérieure jusqu'après le résultat de cette enquête.)
L'ordre du jour est un rapport du comité des rapports sur les troubles excités à Uzès et dans le département du Gard.
, rapporteur. Messieurs, il est arrivé hier un courrier du département du Gard, qui vous a apporté des détails sur les événements arrivés dans cë département. La lecture des pièces dont le courrier était chargé vous a été faite; et vous avez ordonné à votre comité des rapports de vous présenter à cet égard un projet de décret. Je n'aurai donc qu'à vous rapporte? èuccinctement lës faits, afin que vous puissiez les comparer aux mesures que votre comité a cru nécessaire de prendre.
.Le 14 février, une querelle survenue dans un cabaret, dont les administrateurs du département ne peuvent connaître ni la cause ni l'origine, a donué lieu à un mouvement dans la ville d'Uzès. Les effets de ce mouvement ont été tels qu'une partie des citoyens se sont portés vers la cathédrale et ont sonné le tocsin. Le procureur-syndic du district a cru que, dans une pareille circonstance, il devait prévenir des malheurs en déployant la force publique. Il a requis la proclamation de la loi martiale : la proclamation a été faite, et au moment où les cavaliers se rendaient au quartier, deux d'entre eux ont été blessés.
. Cependant le rassemblement des troupes de ligne a été fait, et ensuite l'attroupement des citoyens augmentant considérablement, le procureur-syndic a requis le commandant de la gardé nationale de rassembler sousles drapeaux tous les citoyens: cette convocation des citoyens a eu lieu; le commandant de la garde nationale a essuyé 3 coups de fusil, qui heureusement ne l'ont pas atteint; ce n'est pas la mauvaise volonté, mais la maladresse des citoyens, qui furent cause qu'il ne fut pas touché.
Plusieurs gardes nationales, qui étaient derrière le commandant, ont aussitôt riposté par quelques coups de fusil, et le citoyen coupable a été atteint et tué ; les deux parfis sont restés en présence une partie de la nuit. Le lendemain matin, les rebelles ont aperçu que leur petit nombre ne leur permettait pas d'exécuter leurs perfides complots, ils ont pris la fuite ; mais en se retirant, ils se sont permis des menaces qu'ils n'ont que trop réalisées ; ils ont fui du côté du camp de Jalès.
Le département, instruit des événements arrivés à Uzès, a ordonné aussitôt à M. d'Albignac, du zèle et du patriotisme duquel il se loue, de prendre des mesures efficaces pour empêcher la mauvaise volonté des fuyards. M. d'Albignac a envoyé à Uzès et dans les lieux circonvoisins une portion des troupes de ligne qui était à sa disposition. Le département a envoyé deux commissaires, à Uzès,pour s'informer des auteurs des troubles et se concerter avec le directoire de district pour les prévenir.
La tranquillité paraissait rétablie dans la ville ; la fuite dès malveillants l'assurait ; mais le département a été instruit que ceux qui avaient fui du côté du camp de Jalès se sont réunis à un très grand nombre d'hommes; le département estime que ce rassemblement pouvait être de 8,000 hommes: 1,700 se sont portés vers la ville de Saint-Ambroise ; les citoyens, s'y trouvant en infériorité de nombre, ont été obligés de l'abandonner.
On n'a pas de nouvelles s'il s'y est commis des excès ; on sait seulement que les citoyens qui ont pris la fuite, ont été obligés de remettre leurs armes.
Telle est, Messieurs, la situation du départe-| ment du Gard; les gardes nationales,qui ont manifesté jusqu'à présent le plus grand patriotisme, ! ne peuvent pas fournir tous lés secours qu'on ; peut désirer; la plupart sont retenus chez eux par cette considération-ci : c'est que, suffisant pour arrêter les troubles intérieurs, ils craignent que leur absence n'augmente l'audace des malintentionnés, et qu'ils ne profitent de cette absence pour se livrer à des excès, de sorte qu'aucun n'ose abandonner ses foyers, et que tous sont retenus cheç eux, sans pouvoir porter du secours à leurs voisins. er"> er">
Votre comité n'a pas méconnu la main malveillante qui dirigeait tous ces mouvements. Il ne les a point attribués au peuple, qu'on peut égarer un seul instant, mais qu'on ne trompera jamais. Il a senti que ceux qui jusqu'à présent ont lenté d'inutiles efforts pour le soulever contre une Constitution, qui, en assurant ses droits, assure égalqment son bonheur, avaient pensé qu'ils devaient se servir d'une circonstance, où, sous le voile de la religion, on pourrait impunément secouer la torche du fanatisme et exciter peut-être un incendie dont ils profiteront pour exécuter enfin les complots que leur .criminelle ati-dace leur suggérera ; mais leurs efforts seront
impuissants; leurs espérances seront déjouées.
Dans les départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, ils avaient tenté les mêmes efforts ; et des nouvelles consolantes, arrivées de ces départements, nous font espérer que bientôt nous pourrons calmer nos inquiétudes. Ils avaient excité des troubles dans le Morbihan ; et les habitants de ce département, aujourd'hui honteux d'avoir été trompés, manifestent le plus vif regret d'avoir calomnié la Constitution et d'avoir voulu la compromettre. Nous espérons que les mêmes efforts auront le même succès dans le département du Gard.
Cette considération nous a conduit nécessairement à vous proposer les mesures que vous avez adoptées efficacement dans les départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, et que vous avez employées naguère pour le département du Morbihan. (Murmures.)
Malgré les marques d'improbation qu'on donne déjà au projet que je vais proposer, et malgré les plaisanteries sur les commissaires, le comité a pensé que vous deviez envoyer des commissaires dans le département du Gara, parce que quelque louable que soit la conduite des corps administratifs, des commissaires pouvant se transporter rapidement dans tous les lieux où leur présence est nécessaire, n'étant pas condamnés comme un corps délibérant à des lenteurs, peuvent plus efficacement apporter un remède aussi prompt que le mal.
Cette considération a déterminé votre comité à vous proposer d'adopter celte voie. 11 a pensé d'ailleurs que les administrateurs pourraient être retenus par des considérations personnelles qu'entraînerait l'habitude de vivre avec des concitoyens; que des étrangers ayant une autorité extraordinaire en imposeraient davantage aux malveillants, et présenteraient plus de moyens aux citoyens qui défendent la Constitution.
Il a pensé aussi que cès commissaires, chargés de requérir dans les départements voisius les secours des gardes nationales etdes troupes de ligne, pourraient agir plus efficacement. Voilà quels sont les motifs qui ont déterminé le comité à vous proposer la mesure des commissaires; et dans cette mesure, Messieurs, il a pensé que vous devez étendre les pouvoirs des commissaires non seulement dans le département du Gard, mais encore dans les départements voisins, parce qu'en effet il y a eu des troubles dans le département de l'Ardèche. Ces troubles heureusement sont terminés; mais ils pourraient renaître : on pourrait craindre que dans quelques parties des départements voisins les ennemis de la chose publique ne tentent de nouveaux efforts.
Votre comité est instruit d'ailleurs que dans le département de l'Aveyrou, le district de..., avait tenté quelques efforts qui heureusement ont été réprimés par le département de l'Aveyron, qui a pris les mesures les plus efficaces pour le faire rentrer dans l'ordre. Mais il a cru que pour envoyer des commissaires il fallait, dans le cas où il arriverait des événements fâcheux, avoir sur les lieux un moyen capable de les réprimer.
Votre comité vous proposera, en conséquence, de prier le roi d'envoyer des truupes dans ces départements, et voici les motifs sur lesquels il se fonde; c'est que dans ces départements il existe non seulement une rivalité d'opinions politiques, mais encore une rivalité d'opinions religieuses, et qu'on ne peut attendre des gardes nationales tous les secours qu'on pourrait en espérer dans
d'autres départements où les mêmes circonstances n'existeraient pas.
Certainement le parti patriote a la majorité dans tous les lieux; mais s'ils s'abstenaient il est à craindre que les ennemis ne se portent à de coupables excès. La plupart des gardes nationales sont donc retenus chez eux; on ne peut que les extraire en petite partie pour porter du secours aux lieux où il en est besoin. Par conséquent, la force publique doit être composée de troupes de ligne.
Telles sont donc les mesures que votre comité croit devoir vous proposer. Il a pensé que dans ce moment-ci ondevaituuiquements'occuper de prévenir le mal, et que le résultat des informations pourrait peut-être vous procurer des éclaircissements sur les auteurs coupables de ces désordres ; il a cru qu'il ne devait pas vous parler de ces lettres incendiaires, de ces -mandements, auxquels seuls, je ne crains pas de le dire, on doit attribuer la cause des malheurs momentanés au reste, qui affligent en cet instant la patrie.
Voici le projet du décret:
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports sur les événements arrivés dans le département du Gard,
« Approuve la conduite des administrateurs du dépariement du Gard et du district d'Uzès, ainsi que celle de M. d'Alb gnac, commandant des troupes de ligne de ce département.
« Considérant que l'activité qu'exigent les mesures à prendre nécessite l'envoi des commissaires qui puissent rapidement se porter partout où les circonstances exigeront leur présence; décrète:
« Que le roi sera prié d'envoyer dans le département du Gard et dans les départements voisins un nombre de troupes de ligne suffisant pour rétablir la tranquillité publique;
« Que le roi sera également prié d'envoyer, dans le département du Gard el clans les départements voisins, 3 commissaires qui seront autorisés à se concerter avec les corps administratifs de ces départements, sur ies moyens les plus efficaces d'assurer l'exécution des lois, arrêter les désordres, et en faire poursuivre les auteurs devant les tribunaux, requérir les secours des gardes nationales et celui des troupes de ligne et faire toutes proclamations et réquisitions qu'ils jugeront convenables. »
. Il faut toujours dans les pouvoirs de commissaires une clause générale qui les autorise à faire toutes choses nécessaires au rétablissement de l'ordre et à l'exécution des décrets de l'Assemblée nationale.
, rapporteur. J'adopte l'amendement et je propose de rédiger le décret comme suit:
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports sur les événements arrivés dans le département du Gard,
« Approuve la conduite des administrateurs du département du Gard et du district d'Uzès, ainsi que celle de M. d'Albignac, commandant des troupes de ligne dans ce département.
« Considérant que l'activité qu'exigent les mesures à prendre dans_ ce département, nécessite l'envoi de commissaires qui puissent se porter partout où les circonstances exigeront leur présence, décrète ce qui suit :
« Le roi sera prié de faire passer dans le département du Gard et dans les départements voi-
sins un nombre de troupes de ligne suffisant pour assurer la tranquillité publique.
« Le roi sera également prié d'envoyer dans le département du Gard, et dans les déparlements voisins, ,3 commissaires, lesquels seront autorisés à se concerter avec les corps administratifs de ce département sur les moyens les plus efficaces d'assurer l'exécution des lois, arrêter les désordres, et en faire poursuivre les auteurs par-devant les tribunaux; requérir le secours des gardes nationales, celui des troupes de ligne, et faire toutes proclamations et réquisitions, et prendre toutes les mesures que les circonstances exigeront pour le rétablissement de l'ordre et le maintien des décrets.
« L'Assemblée nationale charge son Président de porter dans le jour le présent décret à la sanction du roi. »
(Ce décret est adopté.)
, secrétaire, donne lecture dè la lettre suivante ae M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères, adressée au Président de l'Assemblée nationale, et relative au départ de Mesdames, tantes du roi :
« Monsieur le Président, je viens d'apprendre que, sur la lecture du procès-verbal envoyé par la municipalité de Moret, quelques membres de l'Assemblée ont paru s'étonner que j'eusse contresigné les passeports donnés à Mesdames par le roi. Si ce fait a besoin d'être expliqué, je prie l'Assemblée de vouloir bien considérer que l'opinion du roi et de ses ministres est assez connue sur ce voyage.
« Un passeport sera une permission de sortir du royaume, quand une loi aura défendu d'en sortir sans passeport; mais cette loi n'a jamais existé. Jusqu'alors,, un passeport ne pourra être regardé que comme une attestation de la qualité des personnes. Dans ce sens, il était impossible d'en refuser à Mesdames. Il fallait s'opposer au voyage ou en prévenir les inconvénients, au nombre desquels il n'était pas possible de ne pas compter leur arrestation par une municipalité qui ne les aurait pas connues.
« Il existait d'anciennès lois contre les émigrations; elles étaient tombées en désuétude; et les principes de liberté décrétés par l'Assemblée nationale les avaient certainement abrogées.
« Refuser un passeport a Mesdames, si cette pièce eût été considérée comme permission aurait été non seulement devancer, mais même faire la loi. Accorder ce passeport, lorsque, sans donner aucun droit de plus, il pouvait prévenir des troubles, ne pouvait être regardé que comme un acte de prudence.
« Voilà, Monsieur le Président, les motifs qui m'ont déterminé à contresigner le passèport de Mesdames. Je vous prie de vouloir bien les communiquer à l'Assemblée. Je saisis avec empressement cette occasion d'expliquer ma conduite et je compterai toujours, avec la plus parfaite confiance, sur la justice ae l'Assemblée. (Applaudissements.)
« Signé : de Montmorin. »
lève la séance à trois heures et demie.
au procès-verbal de la séance de l'assemblée nationale du
Mémoire relatif aux ouvrages qu'il est urgent de faire pour la facilité et la sûreté de la navigation à l'embouchure du Rhône (imprimé par ordre de l'Assemblée.)
La navigation du Rhône est sans contredit une des plus intéressantes du royaume, principale-m nt pour l'approvisionnement des arsenaux de Marseille et de la marine royale de Toulon, qui reçoivent par ce débouché les bois de construction, chanvres, comestibles, boulets, poudres, canons et autres objets nécessaires pour l'armement des vaisseaux et escadres du roi. Elle ne l'est pas moins pour le commerce en général, et surtout pour la foire de Beaucaire, la plus riche et la plus considérable de la France, dont les opérations de commerce, qui lient, l'on peut le dire avec vérité, toutes les nations, tiennent si immédiatement à la facilité de naviguer sur ce fleuve, que souvent elles ont été retardées, diminuées et même interrompues par Tes obstacles que l'on y éprouve trop fréquemment; elle est également avantageuse pour toute la côte de Provence et villes maritimes d'Italie, qui dominent en échange des marchandises propres à alimenter nos manufactures. Cette navigation devient bien plus importante, encore depuis que le gouvernement s'occupe de la jonction du Rhône au Rhin, dont M. Bertrand, inspecteur général, a formé les projets. Cette jonction ouvrira une branche de commerce avec la Hollande et l'Allemagne ; et si celle du Rhin au Danube se fait par la suite, comme il y a tout lieu de l'espérer, ce débouché qui aura une étendue de 5 à 600 lieues, sera le plus utile et le plus célèbre que les hommes aient pu imaginer et exécuter ; en un mot ce sera le canal de toute l'Europe.
Ces motifs puissants militent, de la manière la plus victorieuse, en faveur des travaux à faire aux bouches du Rhône, puisqu'elles sont le dernier terme de ces opérations et le seul passage pour communiquer à la Méditerranée. Cette vérité est incontestable, et la navigation du Rhône, indépendamment du degré d'importance qu'elle acquerra par ces nouveaux projets, a été jugée par le ministère si nécessaire, que depuis très longtemps il s'est occupé des moyens de la rendre libre et sûre.
Les travaux commencés à cet effet, d'après ses ordres, interrompus suivant les circonstances, repris et cessés en différents temps, n'ont pu être conduits à leur perfection. Les mêmes inconvénients et obstacles ont toujours subsisté à l'embouchure du Rhône, et les marins-négo-ciants, ainsi que la ville d'Arles, n'ont cessé d'adresser des représentations pour faire connaître la nécessité d'y parvenir d'une manière efficace. Ce mémoire sera divisé en cinq parties.
La première indiquera les différentes routes que le Rhône a parcourues depuis Arles jusqu'à la mer.
La deuxième renfermera une description delà situation actuelle.
Dans la troisième, l'on rendra compte des différents projets qui ont été proposés, ae ceux qui ont été commencés et de celui mis en avant par les Etats de Provence.
Dans la quatrième partie, l'on fera connaître les moyens qui ont paru les {lus sûrs, les moins dispendieux pour vaincre les obstacles que la navigation éprouve à l'embouchure de ce fleuve.
Enfin, dans la cinquième et dernière partie, l'on répondra d'avance aux objections que l'on pourrait faire sur ce projet. L'on démontrera quel- sero» t les effets et progrès des ensablements du Rhône, » près les travaux construits, et
Su'ils n'ont jamais pu contribuer au comblement u port de Bouc.
PREMIÈRE PARTIE.
Avant que le Rhône fut resserré dans son lit par des digues faites de mains d'hommes, comme il l'est aujourd'hui, ce fleuve, livré à toutes les influences des crues et des vents, s'est frayé différentes routes et issues à la mer. Plusieurs tours encore subsistantes et qui ont été construites sur le bord des anciens lits que ce fleuve a quittés dans la Camargue en sont la preuve. On peut y distinguer encore un ancien lit du Rhône,appelé Saint-Ferréol, qui occupe le centre de cette île, laquelle tire son nom, suivant les anciennes traditions de Caïus Marins, général romain, qui fit ouvrir, par ses troupes, un canal pour recevoir les eaux de ce fleuve et les conduire à la mer afin de se garantir de l'incursion des Cimbres avec lesquels sa patrie était en guerre.
En 1430, l'embouchure de ce fleuve était plus à l'est, vers l'endroit où est situé actuellement le Grau du Gnllejon ; il reste des vestiges de son ancien lit, appelé Bras mort.
En 1587, une crue extraordinaire lui fit prendre une route nouvelle à l'ouest, par le canal nommé Bras-de-fer et désigné, sur la carte, canal du Japon. Ce lit nouveau était fort difficile, pour la navigation, par les contours qu'il prenait. Pour le rendre plus facile, on avait resserré le Rhône par des digues qui existent encore. La navigation par cette embouchure, quoique infiniment lente et dangereuse, était la seule praticable et dont ont pu se servir les marins jusqu'au commencement de ce siècle, pendant. 125 ans consécutifs. Depuis que le Rhône s'est formé un nouveau lit à travers les étangs des Launes, il a totalement abandonné celui de Bras-de-fer, où l'on a pratiqué depuis un canal de navigation pour le transport des sels de Badou.
Les fermiers généraux ayant ouvert un canal, qui avait sa prise d'eau avec écluse près le canal ae Bras-de-fer, pour noyer Je sel sur le bord des étangs des Launes, le fleuve éprouva une crue considérable t n 1712, qui emporta l'écluse ; et les eaux, en se précipitant à travers le canal, s'ouvrirent une nouvelle route à la mer, la plus directe qui eût encore existé. Peu après cette nouvelle ouverture s'est élargie et toutes les eaux du Rhône ont pris leur cours dans ce nouveau lit, ce qui lui a fait donner le nom, qu'il a conservé depuis, de caoal des Launes.
Après avoir fait connaître le plus succinctement qu'il nous a été possible les différents lits du Rhône et les roules qu'il s'est frayées jusqu'à la mer, nous allons donner, sous la seconde partie, la description de sa situation actuelle.
SECONDE PARTIE.
Le Rhône ayant pris pendant de longs espaces de temps des roules fort incertaines pour se dé-
boucher à la mer, suivant les crues qu'il a éprouvées alors, a, déposé sur une étendue immense des acrements très propres à fertiliser les terres. Peu à peu l'industrie des habitants de Beaucaire et de Tarascon les a portés à les resserrer par des digues. Ils ont bientôt ressenti les effets heureux de leurs travaux et les ont continués sur leurs terrains jusqu'à celui de la ville d'Arles.
Un peu au-dessus de cette ville, le Rhône se divise en 2 bras dénommés, l'un, le petit Rhône et, l'autre, le grand Rhône.
Le premier bras passe sous Saint-Gilles et de là se rend, en suivant une ligne très sinueuse, à la mer où il se jette près de la ville de Sainte-Marie. Il n'est fréquenté que par de petits bâtiments catalans et du Languedoc, et sert principalement pour le transport des sels de Peccais et Roquemore qu'on fait remonter sur le Rhône. Il sert aussi de canal d'arrosage pour les terrains situés sur ses deux rives, dans la Camargue et le Languedoc; son embouchure à la mer est fort dangereuse. Il ne peut y passer que de petits bâtiments.
Le grand Rhône a toujours baigné les murs et quais de la ville d'Arles. Son lit y est fort resserré puisqu'il n'a que 73 t. 3 p. de largeur; sa profondeur est fort grande par cette raison, et est de 35 à 40 pieds dans quelques endroits.
Les propriétaires de la ville d'Arles, ainsi que toutes les communautés qui sont de son ressort et ont des propriétés le long des rives des 2 bras du Rhône, encouragés par les succès des opérations des villes de Beaucaire et de Tarascon, ont contenu les eaux du Rhône par des digues en terre ou en pierre et, ce qui caractérise leur industrie, ils ont ouvert un grand nombre de ro-bines et canaux d'arrosage où ils introduisent à volonté les eaux du fleuve.
Tous ces travaux ont contribué à garantir leurs propriétés et à fertiliser leurs terres. Ces digues et canaux sont entretenus avec soin chaque année aux dépens des communautés voisines et propriétaires riverains.
Toute la partie du terrain situé sur la rive gauche du grand Rhône, entre le grau et le fleuve, appelée plan du bourg, est fertile en pâturages et en grains.
La partie la plus riche et la plus étendue est celle contenue entre les deux oras du Rhône. Cette île, appelée Camargue, forme un triangle dont la base est terminée par la mer et les deux côtés par les deux bras du fleuve. L'on a continué les digues dans toute la longueur de leur cours, en sorte qu'il n'y a que des cas rares où les eaux peuvent pénétrer en grande masse dans l'intérieur de celle île qui est d'un très grand rapport, soit pour les grains et les fourrages qu'elle produit, soit par les pâturages qui servent a la nourriture d'un grand nombre de bestiaux et de troupeaux de moutons qui, conduits pendant l'été dans les montagnes du Dauphiné, en descendent à l'entrée de l'hiver et trouvent, dans l'île de Camargue, une subsistance assurée.
Les digues en terre ou en pierre, entretenues par les communautés et propriétaires riverains, se terminent un peu au-dessus de Saint-Tro-pbime, à 16,500 toises de la ville d'Arles. En cet endroit commencent les ouvrages entrepris et entretenus par le roi, qui consistent en doubles digues en pierre qui défendent les deux rives du fleuve, et en plusieurs parties de digues en terre destinées, lors des grandes inondations, à garantir les propriétés, le tout sur une longueur de 5,200 toises. Ces ouvrages, commencés depuis
1723, ont été continués et se terminent à quelque distance au delà de la tour Saint-Louis. On n'a encore rien fait plus loin; on entretient seulement chaque année les dégradations que le Rhône occasionne aux digues anciennement construites.
Depuis la lin des digues jusqu'à la mer, sur une longueur d'environ 2,000 toises, le Rhône, nullement réglé dans son cours par des ouvrages d'art et abandonné à toute l'influence des vents, s'est frayé différentes issues.
Il existe actuellement 5 graux ou ouvertures; le premier, appelé le grau de l'est, est à peu de "distance de la tour Saint-Louis, il a subsisté bien longtemps sans être navigable, jusqu'en 1764, époque à laquelle il s'est élargi et approfondi de manière que les bâtiments, pendant 18 mois, ont pu sortir par ce grau ; depuis ce temps, il s'est totalement comblé et est presque à sec.
Le second, dit grau de l'ouest, est sur la rive droite du fleuve, peu éloigné de l'extrémité des jetées et était presque sans eau il y a 3 ou 4 ans.
11 a actuellement 40 toises à peu près de largeur et, d'après les sondes faites, on y a trouvé 11 à
12 pieds de hauteur d'eau. Ou en attribue la cause à un épi construit depuis peu, au-dessous, par la ville d'Arles. Le volume d'eau qui passe par ce grau diminue celui de l'embouchure qui est praticable, ce qui nuit souvent à la navigation.
Depuis ces 2 graux jusqu'à sa véritable em-j bouchure à la mer, le Rhône conserve encore un lit assez fixe et marqué par 2 rives sur 8 à 900 toises de longueur et une largeur de 400 toises à peu près au delà des digues, laquelle augmente insensiblement et est de 6 à 700 toises à la naissance des 3 bouches qu'il s'y est formées; l'une est appelée grau de Test, la seconde grau du sud, et la troisième grau de l'ouest; cette dernière est la seule navigable pour les bâtiments de mer.
Il existe un banc de sable, à chaque ouverture, qu'on appelle barre dans l'endroit où l'action des eaux de la mer, qui repousse les sables entraînés par le Rhône, est en équilibre avec celle des eaux uu fleuve.
Nous avons trouvé, d'après les sondes faites, 3 pieds de hauteur d'eau sur la barre du grau de l'est, 3 pieds et demi au droit de celle du grau du midi. 11 y a constamment 4 pieds au moins au-dessus de celle du grau de l'ouest, et quelquefois cette hauteur est de & pieds et 5 pieds 6 pouces. Lorsque le vent du nord souille, les bâtiments sortent et rentrent sans courir aucun danger.
Ces moments favorables pour le commerce ne sont pas de longue durée, dès que les vents du sud et de l'ouest agissent sur les sables repoussés dans la direction de l'embouchure qui forment une nouvelle barre, et il ne reste plus assez d'eau pour le passage des bâtiments ; alors toute la navigation est interceptée.
Nous allons rendre compte des moyens qui ont été proposés pour y remédier.
TROISIÈME PARTIE.
L'on a vu dans la première partie, pour les différentes routes que le Rhône a parcourues, soit à l'est, soit à l'ouest, combien sa navigation avait été sujette a des variations. Depuis 1587 jusqu'en 1712, il avait suivi la ligne sinueuse du canal de Bras-de-fer, ce qui rendait la navigation très difficile et excita des réclamations et des plaintes de la part du commerce. Le ministère, craignant que les arsenaux de Marseille et de Toulon ne
manquassent d'approvisionnements, envoya sur les lieux des ingénieurs qui décidèrent' que, vu la situation des lieux et la direction peu favorable du Rhône par ce canal, tout ouvrage serait inutile et infructueux.
M. le maréchal de Vauban fut chargé d'examiner la situation du lit du Rhône par le canal de Bras-de-Fer et de son embouchure en 1665, et ayant reconnu l'impossibilité de la rendre praticable et sûre, proposa un canal de navigation qui aurait eu sa prise d'eau au-dessous de la ville d'Arles, aurait cotoyé les canaux de dessèchement, traversé les étangs de Ligagneau et de Fos, et serait tombé dans le port de Bouc. Mais ce projet, qui renferme de très grandes difficultés, aurait coûté des sommes énormes, et les avantages qu'on aurait pu en retirer n'auraient jamais cuïnpensé la dépense. G'-s motifs en ont empêché et en empêcheront toujours l'exécution, comme on le démontrera ci-après.
Tel était l'état des choses, lorsque la crue de 1702 ouvrit un lit nouveau au Rhône, par le canal des Launes, le plus direct à la mer et le plus favorable pour les bâtiments.
Le gouvernement, toujours occupé de cette navigation, rendit 2 arrêts, le 3 mai 1712 et le 5 juillet 1723, portant une taxe de 5 sous par mi-not de sel dans les provinces méridionales de la France, dont le produit était destiné aux ouvrages de ce nouveau canal et à leur entretien.
Ën 1725, M. Mitbon, intendant de la marine de Toulon, eut une mission particulière pour aller constater l'état des lieux, assisté de différents ingénieurs. Son rapport fut que le canal des Launes avait la direction la plus avantageuse et que, en resserrant le lit du fleuve par des digues jusqu'à son embouchure, on parviendrait à la garantir des ensablements.
Les travaux ont été alors commencés et continués jusqu'au delà de la tour Saint-Louis, qui fut construite, en 1737, pour servir de phare et de guide aux marins; mais ils n'ont pas été poussés plus loin et sont même depuis longtemps abandonnés.
Ces travaux commencés ont procuré à la vérité, pendant quelques années, suivant le rapport des marins, une navigation litre et facile; mais n'étant pas assez parachevés, ils n'ont pu remédier aux ensablements des bouches du Rhône, et les bâtiments au bout d'un certain temps, ont toujours éprouvé des obstacles et des dangers.
La ville d'Arles et lés capitaines de bâtiment n'ont cessé de faire des représentations aux ministres, pour les déterminer à ordonner la continuation et la perfection des opérations entamées.
M. Marmillot, ingénieur en chef alors du Dau-phiné, reçut ordre de M. de la Millière, intendant des finances, de se transporter aux bouches du Rhône, d'en examiner la situation et de proposer les moyens de vaincre les obstacles que la navigation y éprouve.
Cet ingénieur s'est rendu sur les lieux le 5 août 1784, accompagné de 3 députés de la ville d'Arles et de 3 capitaines de bâtiment de mer, et a reconnu, d'aprè3 la disposition du local, qu'il n'y avait rien de mieux à faire que de prolonger les anciennes digues en pierres, et de Ie3 continuer jusqu'à la mer. Il fit en conséquence des sondes dans le Rhône sur l'alignement des digues, et trouva que la hauteur réduite de l'eau, de celle ! de la gauche, était de 7 pieds 6 pouces. Il donne I dans son mémoire un aperçu'de la dépense et estime la toise courante de double digue 312 livres, ce qui produit, suivant son calcul, 764,000 livres
pour les 2,000 toises de longueur de digue à construire. Il ajoute une somme de 100,000 livres pour les terrasses à Taire dans remplacement du Tez-Rostan; ce qui fait une dépense totale de 864,000 livres, non compris les frais d'inspection.
Il met ensuite en avant un projet de canal qui aurait sa prise d'eau au Sambre, traverserait la partie supérieure de l'étang deiiegagnau, de là passerait dans celui de Gallejon dont l'extrémité inférieure, communiquant à la mer, procurerait un débouché facile parle moyen d'une écluse. Mais il reconnaît l'impossibilité de ce canal, tant par lepeu de profondeur d'eau des étangs, que parla difficulté du terrain du grau que ce canal traverserait qui n'est qu'une masse de rochers de la nature du Pudding, d'une dûreté excessive, el qu'on ne pourrait percer qu'avec des pinces de fer et des pointes d'épieu. Il fait voir que les postes de flot seraient continuellement ensahlées ainsi que l'avant-port qu'il faudrait garantir par des jetées.
Il ajoute,-d'après le rapport des marins qui ont le plus fréquenté ces parages, que cette communication serait fort dangereuse à cause des ensablements qui couvrent cette plage, en sorte que les navires; pour y aborder, courraient les plus grands risques.
Cet ingénieur pense que, dans le cas où l'on croirait utile d'abandonner le canal des Launes, aucun emplacement ne paraît plus favorable que celui qui étant ouvert sur la rive droite du fleuve, commencerait au-dessous de Bras-de-Fer, passerait dans l'étang de Giraud, et de là se rendrait à la mer qui n'en est séparée que par une lisière fort étroite de 200 toises environ. Cette direction lui paraît d'autant plus avantageuse que le nouveau canal se trouverait placé suivant lui, derrière les ensablements du Rhône.
Dans le cas où il ne se trouverait nas assez d'eau dans l'étang de Giraud, Al. Marmillot propose de faire passer ce canal sur la terre ferme entre l'étang de Giraud et le fleuve, ou d'y faire passer les eaux du Rhône, dont le cours redressé au coude droit de Bras-de-Fer serait plus court et plus direct à la mer; il évalue ce dernier projet 2 millions. Néanmoins il donne la préférence au canal des Launes, comme le plus simple, le plus facile et celui qui coûtera le moins.
La ville de Tarascon elles Etats de Provence ont mis en avant un projet dont on n'a certainement pas connu la dépense et les inconvénients.
Cette proviuce a fait creuser un canal, qui a sa prise d'eau à la Durance près Malmort, et sert de canal d'arrosage.
Gomme elle est embarrassée pour donner un écoulement aux eaux de ce canal, elle voudrait le continuer jusqu'à Tarascon, et de là jusqu'au port de Bouc. Ce canal prolongé recevrait les eaux de celui appelé Boisgelin, et serait ensuite alimenté par le Rhône. Ce projet ainsi dirigé éprouverait les plus grandes difficultés.
1° Il traverserait le Trébon, plan du bourg et partie du Grau, terroirs dépendants de la ville. d'Arles, dont les premiers sont très fertiles.
2° Il interromprerait le cours des fossés de vidange, qui ont été ouverts à grands frais, et le terrain précaire, qui environne la ville d'Arles, redeviendrait un marais infect comme il l'était avant les travaux faits.
3° Ce terrain, qui est d'un grand rapport, et dont les eaux seraient sans écoulement, serait submergé et inculte.
4° L'on ne peut calculer au juste ce que coûterait la construction de ce canal; mais on ne craint
pas d'avancer qu'il coûterait sept à huit millions : en admettant la possibilité, les avantages qu'il procurerait ne pourraient jamais dédommager de la dépense.
5° Ce projet ruinerait la majeure partie des propriétés des habitants d'Arles, son commerce et sa marine composée de 100 bâtiments de mer, qui emploient au moins 600 matelots très exercés aux manœuvres, et utiles en temps de guerre pour les escadres du roi.
6° Le bien de l'Etat s'oppose à une entreprise aussi chimérique, dont le succès d'ailleurs serait très incertain, et qui coûterait des sommes énormes; tandis qu'avec le tiers environ de la dépense l'on peut infailliblement vaincre les obstacles qui existent aux bouches du Rhône. Si l'on désire plus de détails sur cet objet, on peut lire le long mémoire que la ville d'Arles, a fait présenter au ministre par M. le marquis de Mejeanes, son député à Paris.
Nous allons rendre compte dans la quatrième partie, des moyens qui nous ont paru les plus avantageux pour rendre libre la navigation aux bouches du Rhône, et des opérations que nous avons faites sur les lieux, conformément aux ordres de M. de la Millière.
QUATRIÈME PARTIE.
De tous les projets qui ont été proposés pour vaincre et éviter les obstacles à l'embouchure du Rhône, aucune n'offre plus de simplicité,,plus de certitude dans le succès, et un résultat moins dispendieux que celui de M. Marmillot. En effet, aucun canal, établi à grands frais, Soit sur la gauche, soit sur la droite de ce fleuve, ne peut être comparé à celui que la nature s'est formé elle-même, l'on peut aire aVec magnificence et la plus grande majesté, d'Arles à la mer. Il est navigable dans tous les temps de l'année, depuis cette ville jusqu'à la fin des ouvrages faits, et même jusqu'à la barre qui empêclie les bâtiments de pouvoir passer lorsque les vents du sud, sud-ouest et de l'ouest régnent sur cette plage, en sorte qu'il n'y a qu'une distance de 25 à 30 toises de longueur qui les arrête, et toutes les fois que le vent du nord souffle, cet obstacle disparaît et la navigation est libre.
Les capitaines de bâtiment, que nous avons consultés, nous ont assurés que l'embouchure du Rhône était praticable toutes les fois que les eaux étaiént basses, et qu'elle cessait presque de l'être, lorsque les eaux étaient hautes.
Dans le premier cas, les eaux du fleuve, rassemblées dans la partie du canal la plus creuse, acquièrent plus d'énergie ainsi réunies en masse, pour pousser les sables avec le secours des vents du nord, et les entraîner dans la mer.
Dans le second cas, où les eaux sont hautes, elles s'épanchent, par le grau de l'est, du sud et de l'ouest, sur une étendue immense, perdent, étant ainsi divisées, leur vitesse, leur impulsion, et ne peuvent conserver assez de force pour vaincre les efforts de la mer que les vents du sud et de l'ouest favorisent.eocore, et qui forment, à l'embouchure, cette barre qui empêche les bâtiments de sortir ou de rentrer.
Il est donc évident, d'après Ces effets de la nature, que si les eaux du Rhône étaient resserrées et contenues par de doubles digues, qu'elles auraient la force nécessaire pour anéantir les ensablements à son embouchure, et surmonter tous les obstacles.
Ce n'est pas seulement l'avis de M. Marmillot, c'est celui de tous les marins, des gens instruits quiomfréquentéeesparages, de tous les ingénieurs qui ont examiné; enfin on peut dire que ce sera toujours celui des personnes qui ont les connaissances de l'art.
Des digues, formées avec blindage et clayon-nage, ne pourraient résister aux vagues du fleuve et de la mer, qui sont très fortes lorsque Je s vents sont impétueux.
Les ouvrages à faire pour rendre ces digues inébranlables, et en état de lutter contre les efforts du Rhône et de la mer, exigent la construction la plus solide; et nous n'en pouvons proposer aucune qui puisse, dans la situation actuelle du fond de ce fleuve, être plus durable, moins sujette aux avaries et détériorations, que digues en pierre sèche, telles que les a proposées M. Marmillot. Cette méthode, d'ailleurs, a été préférée d'après l'expérience de plusieurs travaux de ce genre au portd'Agde en Languedoc; les deux jetées en pierre, construites sur les deux rives de la rivière l'Hérault, ont parfaitement réussi, et c'est la seule, selon nous, qui puisse être adoptée avec succès dans ceux à faire aux bouches du Rhône.
Ces ouvrages peuvent être exécutés avec la plus grande facilité; des barques propres au transport des matériaux suffiront presque en tout temps si ce n'est celui des fortes tempêtes, et ce genre de construction est à portée de la plus simple manœuvre.
Le fond du fleuve n'étant composé que de sable très fin, sur une profondeur que l'on n'a point calculée ni mesurée, il est impossible de défendre le pied des digues par des pilotis, auxquels on ne pourrait donner une fiche solide, et d'ailleurs le ïmttage de ces pieux serait très dispendieux, et exigerait un temps considérable sur une plage totalement à découvert et exposée àl'impétuosité des vents du sud et de l'ouest.
M. Marmillot propose, dans son projet, de réduire l'embouchure du Rhône, près la mer, à 150. ou 140 toises de largeur, et de former deux lignes convergentes qui partiraient de la fin des digues où le Rhône a 180 toises de largeur, ce qui diminuerait son embouchure de 30 ou 40 toises.
Nous pensons qu'il suffira de fixer cetle réduction à 20 ou 30 toises au plus, que les digues qui formeront le nouveau lit, ne doivent pas être totalement convergentes jusqu'à la mer, qu'il est nécessaire à l'angle du Tez-Rostang de former deux lignes parallèles, dont on pourra suivre l'alignement à mesure que les môles en pierre seront continués plus avant daDS la mer. D après l'aveu même de cet ingénieur, il sera inévitable chaque année de les prolonger de quelques toises; et si cette prolongation était faite sur deux lignes toujours convergentes, au bout d'un certain nombre d'années, le Rhône se trouverait trop rétréci; c'est pourquoi nous persistons à dire, qu'à son dernier terme, il doit conserver au moins la largeur de 150 toises.
Tout canal artificiel exigera certainement plus de dépense que les ouvrages mentionnés ci-aes-sus; quoiqu'on le construisît avec écluse à sa prise d'eau et portes de flot à sa jonction à la mer, on ne pourrait le garantir des ensablements qu'en prolongeant des jetées en pierre fort avant dans la mer, et il serait inévitablement sujet à des curements annuels très coûteux, et pendant lesquels toute navigation serait suspendue. Eq supposant môme ce canal de navigation
construit dans la position la plus favorable, ce qui est fort douteux, pourrait-il jamais réunir les avantages que procure déjà et que procurera encore plus efficacement par la suite, après les travaux faits, la navigation du fleuve le plus considérable de la France, dans la partie de son cours, où il est fréquenté par des bâtiments de mer qui portent jusqu'à 3,500 quintaux? Ces navires, lorsque lè vent est favorable, vont aisément d'Arles à Marseille dans le même jour et en' reviennent de même.
Pénétrés de cette vérité, après un examen antérieur des lieux et pour nous conformer aux ordres qui nous ont été adressés par M. de la Mil-lière, intendant des finances, le 20 mars dernier, nous nous sommes rendus à Arles le 7 juin 1788, au soir, et le lendemain nous nous sommes embarqués pour nous rendre à Pâtisson, résidence de M. Serry, inspecteur du canal des Launes, où nous avons séjourné le 9 et le lendemain sans pouvoir commencer aucune opération, les eaux du Rhône étant fort hautes et la mer très agitée. Le 10, nous fûmes rejoints par MM. le baron de Drée, chevalier de Saint-Louis, capitaine de vaisseau du roi et .chef des classes de marine à Arles, de la Laurièré, chevalier de Saint-Louis et ancien consul d'Arles, Boulouvard, négociant de cette ville, tous trois députés de la ville d'Arles pour assister à nos opérations, et les sieurs Deschamps et Boutoux, anciens capitaines de bâtiment , avec lesquelles personnes et M. Serry nous nous embarquâmes le 11 à 4 heures du matin, dans un bateau conduit par 6 hommes. Arrivés à l'extrémité de la digue placée sur la rive droite, nous fîmes sur-le-champ planter deux balises élevées à 100 toises environ de distance de l'une à l'autre sur le milieu de la crête de la digue et nous reconnûmes,que ce'te ligne laissait sur la droite la pointe du Tez des Béri-cles, cotoyait le Tez-Rostang, que la direction du nouveau canal traverserait le milieu du.grau du sud, en coupant seulement deux petites pointes avancées du Tez-Rostang et du midi. Celte direction est différente de celle annoncée par M. Marmillot dans son mémoire, soit par le défaut d'attention de la part de ceux qui ont placé à cette époque les balises, soit par les changements que le Rhône a éprouvés depuis à son embouchure.
Commençant à parcourir le prolongement de la ligne formée par les anciennes digues, nous fîmes mettre le Dat.eau en travers, monté par 6 matelots qui ne ramaient pas ; 2 étaient seulement occupés à l'entretenir dans l'alignement à suivre. Le bateau étant ainsi dirigé et marchant par le seul mouvement de l'eau, de minute en minute, nous fîmes une sonde avec des perches de différentes grandeurs que nous avions fait mesurer et graduer avec soin; et depuis la fin des digues jusqu'au delà du premier angle du Tez-Rostang l'on en fit 52, d'après lesquelles nous trouvâmes que la plus grande hauteur était de 25 pieds et la plus petite de 2 pieds, et que la hauteur moyenne de toutes ces sondes était de 12 p. 3 p. 8 1.
Nous observerons qu'à la neuvième sonde nous étions vis-à-vis le grau de l'ouest, qu'ayant ?ondé à son entrée il s'est trouvé 6 pieds d'eau, 50 toises plus loin 11 pieds et 60 plus loin 12 pieds, ce qui prouve que ce grau s'est beaucoup approfondi et s'est même élargi.
Après avoir terminé notre première ligne de sonde à la pointe avancée du Tez-Rostang, et descendu sur la terre ferme, nous plaçâmes la bous-
sole à 9 toises de la ligne sondée, et nous reconnûmes que la nouvelle direction du fleuve par le grau du midi serait du nord-ouest au sud-est à 41 degrés du nord à'l'ouest, eu égard à la déclinaison de la boussole.
Au moment où nous abordâmes sur le Tez-Rostang, la mer était agitée au grau de l'ouest et le Rhône l'étaitaussi, le vent étantà l'ouest. La mer était à peu près calme au grau du midi, ce qui provient de la situation du Tez-Rostang, qui défend ce grau dans cette position du vent.
Nous remontâmes ensuite dans le bateau avec le s mêmes personnes qui nous avaient accompagnés, nous fîmes le tour duTez-Rostahg, en passant par le grau de l'ouest pour revenir à 1 entrée du grau du midi. Nous mouillâmes en cet endroit et l'on jeta à deux différentes reprises une bouée pour nous assurer s'il existait réellement un courant de l'est à l'ouest, comme tous le s marins nous l'avaient dit, et nous vîmes que la bouée marchait sensiblement vers l'ouest.
Nous en fûmes également convaincus le lendemain par une remarque que nous fûmes à portée de faire, étant placés au premier angle du Tez-Rostang, côté de l'est.
Le capitaine Antoine Mayon, de la ville d'Arles, commandant l'allège l'Ardent, et allant à Marseille, débouchant parle grau de l'ouest apiès avoir passé la barre, fut pris par le calme et forcé de jeter l'ancre pour éviter le courant qui l'aurait porté trop avant dans l'ouest et l'aurait éloigné de sa rouie qu'il continua deux heures après a la faveur d'une brise du sud-ouest qui s'éleva.
Revenus le soir à Pâtisson, nous nous embarquâmes de nouveau le Jendemain, à la même heure que la veille, et nous dirigeâmes notre route vers l'extrémité de la digue, près la tour Saint-Louis, sur la rive gauche du fleuve : le Rhône alors était fort calme, le temps beau, le grau de l'ouest praticable, et tous les bâtiments, au nombre d'une vingtaine, étant sous voile, cinglèrent en notre présence vers Marseille. Nous rîmes placer deux balises sur le milieu de la crête de la digue, à 100 toises l'une de l'autre, et après avoir fait mettre le bateau en travers comme la veille et sondé la hauteur de l'eau à chaque minute, l'on fit de cette manière 54 sondes qui furent terminées pour le moment à la partie avancée du Tez du midi; et comme cette portion de terre n'a que 54 toises de longueur, nous continuâmes Ja ligne de sonde au delà, jusqu'à l'endroit où l'on trouve le fond de 12 pieds d'eau dans la mer. L'on fit 11 autres sondes; ainsi 1a ligne entière du prolongement de la digue sur la rive gauche a été sondée jusqu'à la mer, et l'on reconnut que Ja plus grande profondeur del'eauétaitde 14 pieds, plus petite de 18 pouces et que la hauteur moyenne de toutes les sondes était de 6 p. 5 p. 91.
Nous observons que la onzième sonde correspondait au milieu de l'ancien grau de l'est qui est maintenant comblé.
Nous aurions désiré pouvoir continuer de même les lignes de sonde au delà du Tez-Rostang, sur le prolongementdel'anciennediguede la droite; mais les brisants qui agissent continuellement sur cette pointe n'ont pus permis de faire cette opération, et l'on peut évaluer, sur toute la longueur de cette ligne, la même hauteur réduite de 12 p. 3 p. 8 i., que nous avons trouvée d'après le résultat de toutes les sondes. Nous cherchâmes ensuite les moyens de mesurer, le plus exactement qu'il nous serait possible, la longueur des nouvelles digues projetées. Nous traçâmes à cet effet une ligne parallèle sur le Tez des Bericles,
dont l'extrémité vers la mer, correspond au premier angle du Tez-Rostang, et cette première distance est de 1,416 t. 2 p. Par une autre parallèle à la ligne de sonde établie sur le Tez-Rostang, la longueur mesurée, depuis le premier angle, jusqu'à la fin de cet ilôt, est de 419 toises, et nous jugeâmes par estimation que, depuis ce .point jusqu'à l'endroit où avait été faite la première sonde dans la mer, il y avait 225 toises. Ainsi la longueur totale des doubles digues, pour encaisser complètement le Rhône jusqu'à la mer, serait de 2055 t. 2 p., depuis l'extrémité de l'ancienne digue de la droite, ce qui fait 56 t. 2 p. de plus que M. Marmillot ne l'a évaluée dans son mémoire. A cette longueur l'on doit encore ajouter 25 toises de longueur réduite des doubles digues, pour les 50 toises que l'ancienne digue de la gauche a de moins que celle de la droite, ce qui produit 2,080 t. 2 p. au total, de double môle à construire.
La distance depuis l'extrémité de l'ancienne digue de la droite jusqu'au premier angle du Tez-Rostang étant de 1416 toises, et ayant été parcourue en 45 minutes, chaque espace franchi par minute était de 31 t. 2 p. 10 1, et la vitesse du bateau, qui marchait par. le seul mouvement de l'eau, était 3 p. 1 p. 9 1. par seconde, comme on le voit par la ligne de sonde marquée sur le projet.
En comparant la hauteur moyenne de la ligne de sonde de la droite avec celle de la gauche, l'on voit que la première est de 12 p. 3 p. 8 1., et la seconde est de 6 p. 5 p. 9 1; ce qui prouve que la plus grande masse des eaux du fleuve se porte du côté de l'ouest, et que le Rhône tend à s'attérir et se combler du côté de l'est. Cet effet résulte naturellement de l'action des vents du sud et de l'ouest, qui sont les plus ordinaires, et qui poussent dans cette direction les sables que le fleuve charrie.
Après avoir terminé la ligne de sonde de la gauche, nous plaçâmes, en présence des personnes qui nous avaient accompagnés, la boussole sur l'alignement de la ligne sondée, et nous pûmes aisément vérifier que, par la nouvelle direction du Rhône, il y aurait z2 rhumbs de vent pour sortir et 20 pour rentrer; les 2 rhumbs de vent de plus pour la sortie sont donnés par le cours des eaux du fleuve qui la favorise. Cette direction du fleuve est la plus avantageuse que l'on puisse souhaiter suivant le rapport de tous les marins. La position des nouvelles digues du nord-ouest au sud-est, garantira le chenal des vents de l'ouest et du sud-ouest qui soufflent le plus ordinairement. Il n'y aura que le veut du sud-est qui sera absolument contraire, et la navigation sera suspendue alors ; mais ce vent n'est pas le plus constant, et d'ailleurs les bâtiments ae mer sont sujets, même dans les meilleurs ports, à de pareils contretemps qui ne sont que momentanés.
Il ne sera point nécessaire de faire aucun ouvrage de terrasses au Tez-Rostang et à celui du midi, comme l'a avancé M. Marmillot, et en a fait un article de dépenses qu'il porte à 100,000 livres.
Le Rhôue une fois contenu par de doubles digues, et dirigé jusqu'au droit du Tez-Rostang, se fraiera lui-même sa roule dans cette direction, et emportera avec la plus grande facilité tous les obstacles qui supposeraient à son passage. Cet effet est certain; c'est pourquoi cette dépense n'est point comprise dans le devis estimatif, L'on pourrait peut-être e® contenter de
prolonger, dans le projet actuel, les nouveaux môle3, jusqu'à ia moitié de la longueur du Tez-Rostang, et il y a-lieu de présumer que l'embouchure deviendrait très praticable, et subsisterait navigable pendant un certain nombre d'années, comme cela a eu lieu d'après la confection des anciennes digues au delà de la Tour Saint-Louis ; sauf à prolonger ces nouveaux môles lorsque les circonstances l'exigeront, et après que de nouveaux atterrissements en auront démontré la nécessité.
Cette observation notis a paru essentielle; en l'adoptant, le projet offrira un résultat moins dispendieux, et le temps que l'on gagnera en différant un pluç grand travail, mettra l'administration à portée de ménager des ressources pour compléter, s'il est indispensable, le projet général, tel que nous le proposons; c'est pourquoi dans le détail estimatif la dépense sera présentée sous ces deux points de vue.
Tels sont les moyens que nous proposons comme les plus sûrs, les plus faciles et les moins dispendieux pour rendre la navigation libre et sûre aux bouches du Rhône. Nous allons répondre d'avance dans la cinquième partie aux objections que l'on pourrait faire sur ce projet. Nous ferons voir quel sera l'effet des ensablements, et nous démontrerons, d'après l'examen du golfe de Fos et les sondes que nous y avons faites en différents endroits, que les sables du Rhône n'ont jamais pu contribuer à combler le port de Bouc.
CINQUIÈME ET DERNIÈRE PARTIE.
Dès que le Rhône sera entièrement encaissé jusqu'à la mer, les eaux de ce fleuve qui, à son embouchure, s'épanchent sur une étendue considérable, étant resserrées par de doubles digues, acquerront nécessairement en profondeur ce qu'elles perdront sur la largeur du chenal. Le pied des digues ne pouvant être défendu, comme nous l'avons prouvé ci-dessus, par des pilotis, et les pierres qui formeront la base de ces digues, ne pouvant porter que sur un fond de vase et de sable extrêmement fin, s'affaisseront lorsque les eaux auront miné par dessous. D'où il résultera des affouillements inévitables qui se renouvelleront de temps en temps, surtout les premières années. Il sera indispensable d'avoir toujours un certain nombre de bateaux de pierres en réserve, et de garnir le dessus des digues d'approvisionnements pour y remédier aussitôt. En prenant ces précautions et en veillapt avec soin aux dégradations des digues qui pourraient survenir, au bout dè quelques années, elles auront acquis toute la stabilité et solidité nécessaires. ^
Si l'on construisait la crête de ces digues sur un plan de niveau dans la partie supérieure, il résulterait deux angles formés par la rencontre des glacis avec le couronnement. Ces parties anguleuses et saillantes qui seraient exposées aux Vagues du fleuve et dé la mer, dans les temps des fortes tempêtes, et toutes les fois que les vents soufflent avec impétuosité, seraient infailliblement détériorées par le choc des eaux qui s'élèvent alors et retombent avec précipitation.
Nous pensons qu'il est convenable de donner un bon empâtement à ces digues, et que les glacis dont elles seront revêtues doivent avoir au moins un pied pour pied, comme M. Marmitlot les a projetées, et plus ce glacis sera courbé, et
mieux il sera disposé pour anéantir l'énergie et l'activité des vagues qui viendront s'agiter et se briser contre lui. Les nouveaux môles en pierre doivent nécessairement être liés aux anciennes digues, et se prolonger sans interruption jusqu'à la mer.
Si l'on se content lit de resserrer le lit du Rhône à son embouchure, comme on nous l'a observé, il en résulterait de grands dangers dans cet état de choses. Les terrains situés sur ses bords, entre les anciennes digues et les travaux qui seraient Construits suivant ce projet, à l'embouchure, n'étant formés que d'aliuvions et dépôts du fleuve qui ont peu de consistance, et sont entourés de bas-fonds et marais ; les eaux, lors des grandes crues, soutenues en aval par les ouvrages d'art, s'élèveraient beaucoup au-dessus des bords, se frayeraient plusieurs routes èi la mer à travers les terres situées, soit sur la gauche, soit sur la droite, s'échapperaient préalablement par les anciens graux de l'est et de l'ouest, et en s'ouvrant différentes issues, suivant l'impulsion des vents qui pourraient être alors dominants, diminueraient infailliblement l'effet, et rendraient incertain le succès que l'on cherche à se procurer, et que l'on se procurera par la continuité des doubles digues, en réunissant ainsi les eaux du Rhône en un seul canal.
Toutes les eaux des différentes bouches du Rhône étant resserrées et contenues dans un seul chenal, auront plu s de vitesse, d'activité et d'impulsion, pour entraîner les sables dans le fond de la mer. On ne peut alléguer contre cet effet inévitable, ce qui a lieu dans les différents ports de l'Océan, où le reflux constant et réglé dé la mer s'introduit et transporte des sables et autres matières qui, étant repoussées par les eaux d'une rivière, forment des barres à l'endroit où l'action réciproque des eaux de la mer et celles de la rivière sont en équilibre.
Dans la Méditerranée le reflux, quoique réel, est presque insensible; le lit du Rhône, étant rétréci, comme nous Venons de le dire, présentera une ouverture bien moins étendue au refoulement des sables qui s'anéantiront avec d'autant plus de probabilités, que la vitesse du courant du fleuve, par les dispositions des digues, étant beaucoup augmentée, la masse des eaux réunies aura acquis la force nécessaire pour vaincre les efforts de la mer, et transporter au delà de l'embouchure les ensablements. Les vents seuls, lorsqu'ils seront impétueux, pourront favoriser ce refoulement des sables aux bouches du Rhône. D'après ce que nous avons déjà exposé, celui du sud est le seul diamétralement opposé à la direction du nouveau chenal; mais il souffle plus rarement, et lès digues projetées le défendront de ceux du sud-ouest et de l'ouest qui sont les plus forts et dominent sur cette côte.
L'itinéraire d'Antonin fixe la distance d'Arles à la mer à 22,500 toises, ce qui fait sept lieues et demie de 3,000 toises chacune. D'après les toises et les vérifications faites, en suivant les sinuosités du fleuve, cette distance est de 23,756 t. 2 p., çe qui fait une différence de 1,266 t. 2 p.
11 y a 540 ans Aigues-Mortes, était, suivant la tradition, un port ae mer puisque Saint-Louis s'y est embarqué pour la cinquième croisade. Un des bras du Rhône qui se dirigeait vers cette ville en est éloigné actuellement de quatre lieues, et tombe à la mer vers la petite ville de Sainte-Marie.
Aigues-Mortes est à 8,400 toises de là mer, suivant la carte, ce qui prouve que, depuis celte
époque, la mer a beaucoup perdu de terrain, et, i tiage. D'après ce projet, toutes les eaux du Rhône I
en évaluant ce qu'elle en a abandonné chaque étant contenues dans un seul chenal et ne pou- I
année, l'on voit que ce changement graduel est de vant surmonter les nouvelles digues, les sables 6 t. 2 p. environ. Si ces atterrissemems étaient et matières que le Rhône charrie, ne pourraient I
proportionnels aux bouches du Rhône, Arles se- se déposer qu'à l'extrémiié du chenal, et con- I
rait maintenant éloigné de la mer de plus de I tribuer nar leur position incertaine et subordon-33,500 toises, ce qui n'existe pas néanmoins, d'à- né. à l'impulsion des différents airs de vent, à près la dislance mesurée et bi' n reconnue. Ces augmenter et renouveler les obstacles que la effets sont plus ou moins lents, selon les causes navigation est dans le cas de craindre. Celte réparticulières qui les produisent, telles que les flexion et un examen sérieux sur cet objet, nous vents et les courants qui transportent plus avant ont fait connaître la nécessité de ne donner au dans la mer les dépouilles des montagnes et des couronnement des digues à construire , que j
plaines que le fleuve entraîne dans son cours. 18 pouces ou 2 pieds tout au plus au-dessus des
Ces atterrissements ne peuvent faire des pro- plus basses eaux. En voici les rais ns: grès sensibles, et chaque année il suffira de çro- Lorsque le Rhône est dans son état ordinaire, longer les digues de quelques toises, ce qui ne ses eaux sont claires et peu chargées e limon, sera pas une dépense considérable. D'ailleurs les Dès qu'il survient des crues, il reçoit a ors tous digues une fois parvenu s aux endroits où il y les dépôts des autres rivières qui versent leurs aura du fond dans la mer, laprofondeur des eaux eaux dans son lit. La majeure partie de ces dédiminuera l'effet des ensablements à l'embouchure pôts, et surtout les graviers ou pierres, sont du chenal, et le'courant qui existe de l'est à arrêtés dans le canal du fleuve, à une grande l'ouest, les portera dans les anses et brassières distance en deçà de son embouchure, et forment qui sont sur cette plage. ou accroissent différentes îles qu'il renferme dans
On ne peut cependant dissimuler que les dou- la longueur qu'il parcourt, et il ne transporte à bles digues étant prolongées au delà de la barre son embouchure que les parties les plus légères et continuées chaque année suivant le progtès de vase que les eaux entiaîuent avec elles'. En des dépôts du fleuve, ces ensablements s'avan- soutenant le couronnement des môies 18 pouces ceront par la suite à une distance assez grande; ou 2 pieds au plus au-dessus de l'étiage, les mais il n'en résultera rien de préjudiciable à la eaux du Rhôre dans les crues même ordinaires, navigation,tant du Languedoc que de la Provence; s'élèveront plus haut que les digues, et Pépan-au contraire, il y a lieu de présumer, d'après les chement sur la droite et sur la gauche, laisse-effets de la nature, que les vaisseaux du roi et ront derrière les môles la tins grande partie des du commerce jouiront par ce moyen d'un avan- sables et limons que les eaux roulent avec elles, tage réel, comme on va le démontrer. Car ce n'est jamais dans les parties où existe le
On suppose que, dans l'intervalle de plusieurs courant d'un fleuve que se forment les dépôts, siècles, l'embouchure du Rhône soit portée, dans Cet effet n'a lieu que dans les endroits où la sa direction du nord-ouest au sud-est, à un point vitesse des eaux est diminuée, et où elles sont correspondant au cap Couronne, où commence le presque stagnantes. La force du courant sera golfe de Fos; dans cette position, n'est-il pas in- toujours contenue et très grande, dans la lar-contestable que le cap Couronne à l'est, et l'em- geur et longueur du chenal projeté, parce que bouchure du Rhône à l'ouest, formeraient deux toutes les eaux du Rhône y étant resserrées, points avancés du nord au sud, qui garantiraient acquerront dans ce nouvel état de choses plu3 le golfe de Fos de l'agitation de la mer que d'énergie et de rapidité, et le trop plein des eaux peuvent occasionner les vents d'est, de nord-est, de ce nouveau canal trouvant lors des crues qui nord-cuest et de l'ouest, et qu'alors le golfe of- sont fréquentes, une issue par-de-sus les môles, frirait à la marine royale et à celle du commerce il est évident que la majeure partie des matières une baie vaste, commode et des plus sûres qui et vases, se déposeront au delà et dans tous les existent dans la Méditerranée, sans priver les I endroits où les eaux n'auront presque conservé bâtiments marchands de l'asile du port de Bouc, aucune vitesse, et les vases en s'élevaut gra-lorsqu'ils voudraient s'y rendre? Ceci n'est point duellement et successivement, consolideront les un système hasardé. C'est le sentiment des ma- flancs des digues situées à l'est et à l'ouest, rins qui connaissent cette navigation. On peut Cet effet aura toujours lieu an fur et à mesure s'en convaincre encore mieux en jetant un coup I qu'il sera nécessaire de prolonger les môles en d'œil sur la carte. pierre, dont le couronnement sera continué sur
Les personnes de l'art objecteront peut-être que un même niveau. Cette proportion des d gues et les digues en pierre ainsi continuées se trouve- les effets qu'elle produira diminueront considé-ront isolées par la suite fort avant dans la mer. rablement, d'après ce que nous venons de dire, A cela on répond que le courant constant de la les ensablements au droit de l'embou» hure, et mer de l'est à l'ouest transportera la majeure le courant que l'on veut y fixer, conservera tou-partie des ensablements derrière les digues de la jours une force et une énergie fort grandes, droite où la mer fera plus calme, toutes les fois Pour terminer ce mémoire, il nous leste à que les vents d'est et de nord-est régneront, et prouver que les sables du Rhône ne sont jamais que ceux du sud-ouest et de l'ouest qui sont les parvenus au port de Bouc, et n'ont pu contribuer plus violents chasseront partie de ces sables I à le combler.
derrière la digue de gauche. Cette direction des Nous n'avancerons sur cet objet aucune con-ensablements sera variable, mais infaillible, et il jecture comme tous ceux qui en ont parlé; nous en résultera que les môles en pierre se trouveront mettrons à portée de juger, d'après ce que uous insensiblement appujés par les dépôts mêmes du avons remarqué et l'examen que nous avons fait fleuve. scrupuleusement, et avec la plus grande atten-
Cet effet sera d'ailleurs certain, d'après les tion, du golfe de Fos, et du port de Bouc, en hauteurs et proportions que nous proposerons, exposant les moyens que nous avons employés dans le devis, de donner a ces digues en pierre. I pour acquérir des notions certaines. M. Marmillot, dans son mémoire, élève le cou- I Le 12 juin, à une heure cinq minutes du soir, ronnement des môles 5 pieds au-dessus de l'é- j après avoir terminé nos opérations du matin aux
bouches du Rï ône, et la mer un peu agitée ne nous permettant pas d'en faire ae nouvelles, nous itou- embarquâmes dans le même bateau, et fîmes voile vers le port de Bouc, munis d'une sonde marine.
En passant par l'embouchure de l'est, et passant sur la barre qui est à son entrée, l'on fit
Étant entrés dans le port de Bouc, nous pûmes remarquer qu'il n'est exposé qu'aux vents du sud-ouest et île l'ouest, et est à l'abri de tous les autres; qu'il peut contenir 50 à60 bâtiments; nous y fîmes trois rondes : dans les deux premières, l'on trouva 15 pieds de hauteur d'eau, et un lond mêlé de vase et de gravier, et dans le troisième 12 p eds d'eau, et un fond graveleux mêié u'berb s et de coquillages.
Ce po t est placé e tre deux coteaux. Celui de la droite en entrant est couvert de rochers , celui sur la gauche est planté d oliviers fort beaux, et est très cultivé; on y reçoit plusieurs bastides qui annoncent que ce terrain a beaucoup de valeur.
Nous avons cherché les causes qui ont contribué à diminuer la profondeur du port de Bouc, qui néanmoins n'a pas beaucoup varié suivant le rapport des marins depuis longtemps, et nous en avons reinaïqué plusieurs qui sont aussi simules que naturelles.
1° Lorsque les vents d'ouest et du sud-onest soufllent avec force, les vagues de la mer s'agitent avec violence contre le coteau placé au nord-est, eu s'élev >nt et retombant, entraînant insensiblement les bords qui sont formés d'une terre douce, très facile à miner. Cela est si vrai, que la maison du sieur Tronc, située au bas de ce coteau, était éloignée de la mer depuis quelques années de 8 à y toises, et se trouve actuellement r-ur le bord.
2° Lors des forte-» pluies et des orages, les eaux qui coulent avec rapidité sur le terrain cultivé du coteau, entraînent nécessairement avec elles des matières qui n'ont d'autres issues que dans le port, et y forment des dépôts.
3° Il sort tou- les jours du port de Bouc, une vingtaine de tartanues pour la pêche, qui y rentrent le soir. Le-- pêcheurs, à leur retour, y lavent 1 m,rs fil ts qui sont remplis de vase, et ces sédiments renouvelés tous les jours, au bout d'un eerani nombre d'années, ne peuvent que concour r à combler le port.
4° Les poits fréquentés parles bâtiments de mer «ont curés av c soin ; cel i de Bouc ne l'a jamais été d- ( uis qu'il existe. On ne peut attribuer sa conservation qu'au flux et reflux des eaux de la mer avec l'étang de Berre, qui*com-
une sonde et l'on trouva trois pieds de hauteur d'eau. Nous avions le vent arrière, et cinglâmes vers le port de Bouc, en suivant la ligne la plus droite, nous fîmes neuf sondes pendant le trajet, en observant de faire mettre à chaque fois le bateau en travers. En voici la note :
PROFONDEUR de L*E 1 u à chaque sonde. NATURE DU FOND DE Lk MER à chaque sonde.
33 pieds. Fond de vase.
48 — Fond de vase.
66 — Fond de vase.
69 — Fond vasé mêlé d'herbes.
75 — Fond ferme et solide.
78 — Fond ferme et solide.
69 — Fond mélé de pierres et
vase.
60 — Fond de vase mêlé de
gravier.
48 — Fond mêlé de pierres et
vase.
munique au port de Bouc par trois grands canaux. Lorsque le vent e-it au sud-ouest ou à l'ouest, les eaux de la Méditerranée sont poussées dans l'étang de Berre, et dès que le vent souffle nord-est ou à l'est, les eaux sont chassées de l'étang dans la mer. Ce mouvement alternatif des eaux de la mer, enlève les dépôts qui pourraient se former dans le port de Bouc, et y entretient une hauteur d'eau suffisante pour y recevoir des tartanues, allèges et autres bâtiments de mer.
5° Les marins et personnes instruites savent que dans les endroits où les rivières déposent leurs acrements, le varech ne peut y croître. On l'aperçoit très distinctement dans le port de Bouc.
Toutes ces raisons palpables tendent à démontrer que, si le port s'est un peu comblé dans les parties voisines du côteau deouis un laps de temps, cet effet n'a pas été produit par les sables du Rhône. On en sera encore plus certain d'après le résultat des opérations et observations que nous en avons faites en parcourant, avec la sonde marine, le golfe de Fos. Ces dernières preuves vont donner de nouvelles lumières sur cet objet, et ajouteront une nouvelle conviction sur ce que nous avançons.
Après avoir terminé nos observations dans le port de Bouc, nous fûmes coucher à Marligues, ville qui en est. éloignée d'une lieue, et à laquelle l'on communique de ce port par le moyen de bourdigues et canaux fabriqués pour la facilité de la pèche, dans l'étang de Caronte. Ces canaux sont prolongés jusqu'à l'étang de Berre, qui est très vaste, et est situé derrière la ville de Marligues.
Le lendemain, dè3 les quatre heures du matin, nous profitâmes de la brise de l'est pour achever nos opérations, et retourner à l'embouchure du Rhône ; à ciuq heures et demie, nous étions déjà sortis du port de Bouc. Alors on dirigea la voile de manière à parcourir le fond du golfe de Fos, pour reconnaître l'ancienne position de l'embouchure du Rhône qui existait avant 1587 au débouché actuel de l'étang deGallejon, et dont les preuves existent dans les archives de la ville d'Arles.
Entre le port de Bouc et le grau de Gallejou,
Première sonde à 600 ou 700 cents toises de l'embouchure de l'est..........
Deuxième sonde...........................................................
Troisième sonde.........................................................
Quatrième sonde..........................................................
Cinquième sonde dans le milieu du golfe...................................
Sixième sonde............................................................
Septième sonde...........................................................
Huitième sonde.............................................................
Neuvième et dernière sonde à 60 toises en deçà de l'entrée du port de Bouc,
nous limes deux sondes dans l'endroit où il y avait plus de fond; et l'on trouva 78 pieds de hauteur d'eau, et un fond vaseux mêlé de pierres. Parvenus à quelque distance de l'entrée du Gallejon, nous pûmes facilement reconnaître que le fond était de 6abie. L'on fit deux sondes à l'entrée de l'étang en deçà et au delà de la barre qui existe à son embouchure ; à la première il y avait trois pieds et demi d'eau, et à la seconde quatre pieds. De là en prolongeant la plage pour vérifier du côté de la mer les embouchures plus récentes du Rhône, nous en observâmes deux. La première plus rapprochée de la tour Saint-Louis, qui a existé longtemps sans être navigable, jusqu'à l'époque de 1764, ou elle est devenue praticable pendant dix-huit mois, comme nous l'avon3 déjà dit ; et la seconde qui est à la pointe de l'est de l'embouchure du Rhône, par laquelle nous sommes sortis et rentrés.
Nous fîmes six sondes depuis le grau du Gallejon, jusqu'à ce dernier. A la première sonde, la hauteur de l'eau était de 15 pieds ; et le fond était vaseux et mêlé de sable. Dans la seconde et troisième sonde, l'on trouva 18 pieds de hauteur d'eau et un fond de sable; et dans les trois autres, 15 pieds de hauteur d'eau et un même fond de sable. Ces sondes ont été faites à 450 ou 500 toises environ de la terre ferme.
Arrivés à l'entrée du grau de l'est, nous examinâmes, avec les personnes qui nous accompagnaient, la direction des eaux de cette embouchure. Il nous fut facile de remarquer qu'elles s'épanchaient principalement à l'ouest, et tendaient à se rapprocher sensiblement de la direction des eaux au grau du midi et de l'ouest ; ce qui était d'autant plus aisé à distinguer, que dans ce moment les eaux du Rhône étaient troubles, ce qui faisait apercevoir clairement la différence des eaux de la mer d'avec celles du fleuve : observations que nous avons également faites aux graux du midi et de l'ouest, où la barre qui est à l'entrée, se trouve plus avancée vers l'ouest dés Tez-Rostang et du Ponent.
Cette nouvelle observation concourt à confirmer encore l'existence du courant de l'est à l'ouest, comme nous l'avons déjà établi, et que l'attestent tous les marins. Ce courant se fait sentir sur les côtes de Languedoc, et se continue même jusqu'au détroit de Gibraltar. Il portera toujours la majeure partie des ensablements des bouches du Rhône vers l'ouest, et c'est la cause de l'ensablement du port de Bauduf, autrefois praticable, et qui ne 1 est plus actuellement.
Suivant la carte, la partie du golfe de Fos avec la ligne droite tirée de l'embouchure de l'est au port de Bouc, forme presque une demi-ellipse très aplatie. Nous en avons parcouru le grand diamètre et la circonférence, la sonde marine à la main. Ainsi cette portion du golfe a été complètement examinée.
Si les sables du Rhône avaient comblé le port de Bouc, ils auraient préalablement comblé les parties intermédiaires entre ce port ét les bouches du Rhône* qui en sont éloignées de trois lieues, et de suite l'entrée du port avant de pénétrer dans son intérieur. Si cet effet avait eu lieu, l'on ne trouverait que des bas-fonds et du sable entre le port de Bouc, le grau du Gallejon et les embouchures plus récentes du Rhône, situées à l'est de ce fleuve. L'on voit au contraire que, parvenus la première journée de notre opération à 6 ou 700 toises de l'embouchure de l'est, et en suivant la ligne droite de ce grau au port
de Bouc, l'on a trouvé 33 pieds de hauteur d'eau et un fond vaseux ; 75 et 78 pieds dans le milieu du golfe et un même fond, et enfin 48 pieds à l'entrée du port et un fond toujours vaseux, et le lendemain matin, entre Bouc et le grau de Gallejon, 78 pieds de hauteur d'eau, dans deux différentes sondes, et un fond vaseux.
L'on voit également par les sondes faites à 4 ou 500 toises de la terre ferme entre le grau du Gallejon et l'embouchure actuelle du Rhône à l'est, que les dépôts du fleuve se sont étendus de l'est à l'ouest, que partout le fond est de sable.
La hauteur même de 15 à 18 pieds d'eau, indique que les endroits où l'on a fait les sondes, sont presque la fin de ces ensablements, et que si elles avaient été continuées plus loin, comme à 200 toises plus avant dans la mer, l'on aurait trouvé au moins 30 à 33 pieds de hauteur d'eau, comme elle était à la première sonde, faite la veille sur la ligne droite, parcourue par le bateau de l'embouchure de l'est au port de B.»uc.
Ces opérations et observations, jointes aux autres preuves que nous avons données ci-dessus sur la direction des ensablements du Rhône, démontrent avec évidence qu'ils ne sont parvenus en aucun temps dans le port de Bouc, et qu'à plus forte raison, ils sont encore moins redoutables pour le port de Marseille éloigné de 12 lieues des bouches du Rhône.
RÉSULTAT.
Nous avons fait connaître, dans la première partie, les routes incertaines parcourues parle Rhône, d'Arles à la mer; dans la seconde, la situation actuelle; dans la troisième, les différents projets adressés au ministère, pour rendre sûre la navigation à son embouchure ; dans la quatrième, celui qui nous a paru le plus simple et le plus avantageux pour y réussir ; dans la cinquième, nous avons répondu d'avance aux objections que l'on pourrait faire, et nous avons démontré, d'après l'expérience, les sondes et observations faites dans le golfe de Fos, à l'entrée et dans l'intérieur du port de Bouc, que les conjectures hasardées dans plusieurs écrits et mémoires sur les causes qui ont contribué au comblement de ce port, sont dénuées de fondement.
Si nous avons été forcés de relever quelques erreurs de calcul dans les détails donnés par M. Marmillot, nous n'avons pas moins été empressés d'adopter son projet, avec quelques modifications et changements dont nous avons exposé les motifs. Nous osons espérer que d'après les preuves citées dans ce mémoire, l'on sera convaincu que les moyens présentés pour vaincre les obstacles que la navigation éprouve aux bouches du Rhône, sont les plus faciles, ceux où l'art est.le mieux secondé par la nature, ceux enfin qui annoncent le succès le plus certain.
Le détail approximatif offre un aperçu pour le projet réduit de...... 1,391,065 1. 12 s. 9 d.
Ët pour compléter le projet général, une
somme de........... 1,721,250 18 5
L'on voit d'après le montant de celte dépense, très rapprochée de la vraie valeur, que ces ouvrages ne peuvent être entamés avec de faibles secours. La réussite de cette entreprise dépend de la célérité qui sera mise dans son exécution, et si l'on en répartissait ia durée en un trop
grand nombre d'années, il en résulterait des inconvénients réels, soit pour le commerce, soit pour les ouvrages qui ne peuvent acquérir la plus grande solidité que par leur continuité et leur ensemble.
Les besoins de l'Etat même pourraient établir l'impérieuse nécessité de les interrompre, comme cela est arrivé.
La plus grande nécessité sera toujours d'assurer les fonds; il sera cependant possible de s'en procurer :
1° Sur ceux de la crue de sel destinés dans leur origine à cet objet ;
2° Sur ceux de la marine relativement aux approvisionnements des arsenaux de Marseille et du port de Toulon;
3° La ferme générale est dans le cas d'y contribuer par rapport au commerce qui en ressentira les plus grands avantages;
4° Arles et Marseille pourront également donner une somme, étant les deux villes qui ont le plus grand intérêt à la confection de ces ouvrages.
Toutes ces ressources peuvent faire face à la dépense, et faciliter les moyens d'entreprendre et de conduire à sa perfection cette opération, une des plus importantes du royaume, et qui mérité, à plus juste titre, de fixer enfin, d'une manière favorable, les regards de l'administration.
Par nous, ingénieur en chef du haut et bas Languedoc, et département d'Arles, le 28 octobre 1788.
provence (bouches-du-rhône).
Devis des ouvrages à faire pour construire de doubles digues et encaisser complètement le Rhône depuis la fin des anciennes, soit jusqu'à la moitié du Tez-Rostang, soit jusqu'à la mer, sur une longueur, dans le premier cas, de 1,650 t. 5 p., et dans le second, de 2,080 t. 2 p.
Commençant à l'extrémité des anciennes jetées, au delà de la tour Saint-Louis, il sera construit sur la gauche et celle à la droite du Rhône, de nouvelles digues eu pierre sur deux alignements convergents, dont la direction suivra à peu près celle des anciennes. Ces digues seront ainsi continuées jusqu'au droit du premier angle, situé à l'est du Tez-Rostang, sur une longueur de 1,416 t. 2 p., et l'intervalle entre elles, qui sera à leur naissance 180 toises, sera réduit au bout des 1,416 t. 2 p. à 150 toises; ce point sera le dernier terme de la diminution du lit du fleuve, et de là, jusqu'à la mer, dans une longueur de 639 toises ; les digues seront fermées sur dëux lignes parallèles entre elles et à celle du milieu du chenal; en sorte que leurs points correspondants soient à 150 toises de distance, laquelle fixera la largeur que ce fleuve conservera toujours, lorsque de nouveaux dépôts, à son embouchure, établiront la nécessité de prolonger ces digues plus avant dans la mer.
Ces deux dernières lignes parallèles feront avec les deux premières un angle qui sera arrondi et adouci par le moyen d'une courbe développée sur 150 toises de longueur de chaque côté de l'angle, afin d'éviter qu'une trop grande masse d'eau puisse choquer un des points de la surface de ces digues.
Ces différentes lignes seront fixées avec soin par de fortes balises enfoncées le plus solidement qu'il sera possible. Le milieu du couronnement ae la digue droite au bout de 1,4161. 2 p. où elle cessera d'être formée sur une ligne convergente avec celle de la gauche, se trouvent, d'après les alignements déjà vérifiés, à 9 toises de distance du premier angle du Tez-Rostang, situé à l'est, il y sera placé une balisé qui servira à établir la première ligue de la digue à droite, avec le secours des autres balises qui seront placées sur la crête de l'ancienne digue, près la tour Saint-Louis. Cette première ligne étant une fois bien marquée, les autres alignements seront d'autant plus faciles que le Tez-Rostang et du Midi assez étendus, procureront, par leur position, les moyens de faire les opérations convenables ; le Rhône, d'ailleurs, ayant peu de profondeur aux abords de ces îlots, l'on ne sera point gêné dans les alignements que l'on sera dans le cas de tracer.
Le nouveau canal du Rhône, ainsi formé, traversera le milieu du grau du midi, coupera deux parties avancées du Tez-Rostang et du Midi. Cette position du chenal est la plus avantageuse, soit pour sortir, soit pour rentrèr dans le Rhône, comme nous l'avons fait voir daqs lé, mémoire ci-joint.
Il ne sera point nécessaire de faire aucun terrassement; les eaux du fleuve une fois resserrées par de doubles digues, et ainsi dirigées et conduites jusqu'au droit des Tez-Rostang et du midi, approfondiront et élargiront elles-mêmes son lit par l'énergie et la vitesse qu'elles acquerront. Cet effet sera infaillible, et les atterrisse-ments qui ont formé ces deux tez, n'étant composés que de sable et de vase, seront bientôt emportes.
La profondeur des eaux est moindre sur la rive droite ; les digues par cette raison auront des dimensions différentes. La hauteur réduite de celle de la gauche au-dessous des basses eaux sera de 6 p. 5 p. 9 1., et celle de la droite de 11 p. 3 p. 8 I., l'on donnera au couronnement de ces digues 2 pieds au plus au-dessus de l'étiage.
Ce couronnement aura 9 pieds de largeur, et au lieu d'être carré dans la partie supérieure, les deux arrêtes que formera la ligne de dessus avec le prolongement des glacis, seront arrondis pour supprimer toute saillie, et éviter de donner prise aux vagues qui pourraient détériorer ces arrêtes, lorsque les vents impétueux les agiteraient contre les digues, surtout dans les parties qui seront les plus rapprochées de la mer. Cette forme nous a paru d'autant plus admissible, que la solidité du couronnement des digues la requiert, et qu'elle n'empêchera pas de déposer dessus les approvisionnements, ni les matelots de s'en servir lorsqu'ils voudront remonter les bâtiments à la cor-delle.
Pour la construction de nouvelles digues, l'on se servira de bâteaux plats que l'on fera amarrer dans la direction de,la ligne du milieu du couronnement. Qn jettèra les pierrés qu'ils contiendront toujours dans le menae endroit, en sorte qu'en tombant, elles laissent le moins de Vide qu'il sera possible, et l'on continuera de même jusqu'à ce que lé massif soit élevé au-dessous du niveau des eàux basses. L'on remplira avec précaution les trous et inégalités qui pourraient exister, et l'on garnira de même les flancs de la digue, de manière à former un plein parfait. Cette Opération peut être faite avec succès. Après avoir vérifié préalablement la profondeur d'eau, on
connaîtra l'empâtement à donner aux digues, et par le moyen des perches graduées, la surface de l'eau étant toujours de niveau, if sera facile de remarquer les parties qui seraient trop creuses, trop maigres, et de les fortifier.
L'on observera de jeter dans le bas de l'empâtement de ces môles le plus gros blocs de pierre que l'on pourra trouver : il en sera fait un choix dans les carrières, et les matériaux mis en réserve seront employés à cet objet.
Telle est la forme générale proposée pour la construction des digues. Mais il existe des moyens particuliers que la prudence prescrit de ne pas négliger, et qu'il est très important de mettre en exécution.
Si l'on se contentait de construire ces môles de suite et progressivement jusqu'à 2 pieds au-dessous des plus basses eaux, les nouveaux obstacles qui resserreraient brusquement le courant du fleuve, surtout à la digue de la droite où se porte la plus grande masse des eaux, seraient la cause d'affouiilements considérables à l'extrémité des parties de digues élevées et fort avancées ; effet qui aurait lieu fréquemment et que Pon pourrait éviter. Pour y réussir avec succès il sera inévitable de défendre et de couvrir, pour première opération, le fond du fleuve dans la direction des digues à construire, par des pierres jetées qui formeront la base des nouveaux môles. Il suffira de donner à cette base naissante 4 à 5 pieds au plus d'élévation, le tout proportionné à l'empâtement que doivent avoir les môles, en raison de la profondeur de l'eau, et après nue cette base aura été construite avec les soins et les attentions nécessaires, il n'y aura aucun danger d'élever les môles ainsi établis et disposés avec des pierres jetées, suivant ce qui est prescrit ci-dessus; de façon que chaque partie de digue soit, d'après les raisons que nous avons exposées, 2 pieds au-dessous des basses eaux ; et l'on continuera ces opérations suivant que les fonds destinés aux travaux pourront le permettre, et elles seront terminées en sorte qu il reste à la fin de chaque campagne 50 ou 60 toises au moins de longueur de fonds recouverts de jetées en pierre, ainsi qu'il vient d'être dit.
Avec ces précautions l'on sera sûr de conserver le fond du fleuve tel qu'il est, et si l'on ne les employait pas, le Rhône formerait infailliblement à la tête des ouvrages parachevés des trous, des cavités sur de très grandes largeurs, qui exigeraient des dépenses énormes, et qu'il est impossibles de prévoir et de calculer.
La pierre ainsi jetée, prendra au moins une fois la hauteur en empâtement.
La hauteur moyenne des eaux de la ligne droite est, suivant les sondes faites, de 12 p. 3 p. 8 I. D'après les dimensions données, la hauteur de la première ligne sera de 14 p. 3 p. 8 L, non compris lés 2 pieds au-dessus des eaux basses, et chaque empâtement de 14 p. 3 p. 8 1. Ge qui produira pour les deux, y compris la largeur du couronnement, 57 p. 7 p. 4 1. de base, et forme un cube de 9 t. 1 p. 6 p. 9 L par toise courante.
L'on trouvera de même, d'après les dimensions de la digue à gauche, qu'elle contiendra 4 t. 8 p. 5 1. cubes, ajoutant les jetées rechargées successivement après la construction de ces môles que nous évaluerons par chaque côté à 24 pieds de profondeur et 3 pouces d'épaisseur réduite, ce qui produit par toise courante 4 toises cubes. Le cube total par toise courante de double digue sera de 17 t. 2 p. 3 p. 2 1.
Les portions de digues commencées ne seront pas achevées chaque année ; on leur donnera le temps de s'affaisser; elles seront seulement élevées de 2 pieds au-dessus des eaux ordinaires, et après qu'elles auront fait leur tassement, on les terminera en achevant le couronnement.
La surface de ce couronnement, ainsi que les parties des glacis hors de l'eau, seront construites en pierre que l'on parmentra, et qui n'auront pas moins ae 1 pied et 18 pouces de queue alternativement. Elles seront posées en liaison les unes contre les autres, les joints remplis avec cales jointives, et le tout disposé de la manière la plus solide, pour résister au frottement des eaux et au choc des vagues. Cette surface sera descendue le plus bas qu'il sera possible pour la durée de l'ouvrage, et l'on aura attention que le premier rang placé au-dessous du niveau de l'étiàge soit appuyé sur des parties de digue solidement établies.
Le fond du lit du Rhône étant sujet à varier et dans le cas d'acquérir plus de profondeur ou d'en perdre, suivant l'influence momentanée des crues et des-vents, il est impossible, d'après ces changements qui se renouvellent souvent, de calculer d'avance Te cube de pierres qui entrera dans la construction de chaque toise courante de digues; on en a donné les dimensions ci-dessus, par aperçu seulement; d'ailleurs -n jetant les pierres dans l'eau, il y en a qui rouleront et iront se perdre et s'enfoncer au delà de l'empâtement des aiguës.
Pour connaître la véritable quantité de pierres qui sera employée, il sera tenu des contrôles jour par jour, du nombre de bateaux qui arriveront, de la pierre qu'ils contiendront chacun. Ces contrôles seront vb-és par l'ingénieur, chargé de surveiller les travaux, et par l'entrepreneur. Ces états feront connaître, à la fin de la campagne, le cube total de la pierre qui aura servi aux ouvrages des digues.
Le pied de ces d'gues n'étant pas défendu par des pilotis, il s'y formera, les premières années, et jusqu'à ce qu'elles aient pris de la consistance, et un empâtement proportionné à la profondeur du lit du fleuve, des affaissements inévitables. Pour y remédier, l'entrepreneur aura soi i de faire déposer sur le couronnement des parties qui seront perfectionnées, de gros quartiers de pierre en approvisionnement, pour remplir les vides et trous que les eaux pourraient former. Ces opérations ne souffrent aucun délai, et l'on y veillera avec la plus grande attention.
On doit même être assuré qu'il sera indispensable de former une jetée en avant des môles du côté de l'eau pour les défendre, parce que les eaux du fleuve étant resserré-s, et les digues ne pouvant être fondées à une assez grande profondeur, et n'étant au contraire établies que sur le fond tel qu'il se trouvera lors de la construction, les eaux, pour creuser leur lit, mineront le terrain par-dessous;il sera donc indispensable, pour éviter que les môles ne s'écroulent en partie, d'opposer,par des jetées en pierres additionnelles et adossées aux digues, une résistance suffisante pour arrêter et anéantir les efforts continuels des eaux du Rhône.-
La digue de la droite et de la gauche seront construites chaque année sur une égale longueur, afin que les eaux du fleuve tendent insensiblement vers le but où l'on veut les fixer, et ne soient pas forcées de prendre une .direction différente, si une portion de digue était plus avancée que l'autre.
Comme il sera peut-être suffisant, pour la sûreté de la navigation pendant quelques années, de prolonger les môles jusqu'à la moitié du Tez-Rostang, d'après les raisons alléguées dans notre mémoire, sauf à les continuer par la suite après leur confection, si les circonstances locales en imposent la nécessité, nous présenterons dans le détail estimatif deux résultats, l'un de la dépense pour l'exécution de la partie qui serait terminée au milieu de la longueur du Tez-Rostang, et le second pour compléter le projet général. Ces deux projets bien distingués mettront l'administration dans le cas de statuer et donner une décision sur la partie qui sera préférable.
Pour la facilité d'attacher les bâtiments, et ôter tout prétexte aux marins de dérangerles pierres des digues, il sera fourni et posé dans la longueur de chacune de 100 en 100 toises des bornes en pierre de taille qui auront 5 pieds 6 pouces de hauteur, sailliront au-dessus du couronnement de 3 p. 3 p., et seront noyées dans leur épaisseur de 2 p. 3 p. de profondeur; elles seront scellées tout autour en maçonnerie sur 3 pied3 d'épaisseur. Cette dt rnière partie aura 2 pieds en carré, et la partie supérieure 16 pouces de diamètre. Cette dernière sera circulaire et couronnée dans le haut d'une plinthe de 9 pouces de hauteur, saillant de 2 pouces sur le nu de la borne, alin que les cordages qui pourront l'embrasser ne puissent pas glisser.
Ces bornes seront taillées et logées proprement, relevées sur les arêtes avec cerclures ; on en donnera un profil en grand lors de l'exécution.
conditions.
Toute la pierre, qui servira à la construction des nouveaux môles projetés à l'embouchure du Rhône, sera prise dans les carrières de Beaucaire, où toutes celles employées à la confection des anciennes digues du canal de3 Launes ont été tirées. Ces carrières sont très abondantes, peuvent fournir des matériaux d'un échantillon convenable; la qualité de la pierre est fort dure, et très propre aux ouvrages dans l'eau.
Si néanmoins on en peut trouver de bonne qualité, et en suffisante quantité dans les carrières d'Arles, et si elle coûte quelque chose de moins, comme nous le présumons, d'après la visite et examen que nous avons faits sur les lieux, l'entrepreneur pourra s'en servir en partie, d'après les ordres qui lui seront donnée, et il sera fait préalablement les expériences nécessaires pour bien connaître la qualité de la pierre, la difficulté de l'extraction, et ie prix auquel elle doit être fixée.
Elle sera transportée de Beaucaire par bateau. L'entrepreneur fera le marché nécessaire pour en avoir à sa disposition un nombre suffisant, afin que les opérations n'éprouvent aucun retardement.
Il sera tenu de payer à 6es frais, les perches, balises, journées d'hommes et de bateaux nécessaires pour tracer les alignements et l'établissement des ateliers, et un bateau solide et commode, conduit par deux matelots exercés à la manœuvre, pour le service des ingénieurs.
Enfin tous les équipages, comme cordages,
planches, madriers, dont on aura besoin pendant la durée des travaux.
Il se conformera exactement aux ordres qui lui seront donnés sur la conduite et l'avancement de l'ouvrage, et aura,chaque année, des acomptes proportionnés au travail fait.
Si par un cas imprévu il éprouvait des pertes, il en serait dressé un procès-verbal, et re'ndu compte à l'administration, pour la mettre à portée de statuer sur la justice et la validité de ses demandes.
Dans le cas où il surviendrait Quelques contestations entre lui et les ouvriers et fournisseurs, il ne pourra se pourvoir que par-devant 'intendant ae Provence, qui seul en doit connaître.
Par nous, ingénieur en chef du haut et bas Languedoc, et département d'Arles, le 23 octobre 1788. Signé : Remillat.
Détail estimatif des ouvrages à faire pour construire de doubles digues et encaisser complètement le Rhône depuis les anciennes, soit jusqu'à la moitié de la longueur -du Tez-Rostang, soit jusqu'à la mer, sur une longueur, dans le premier cas, de 1,650 t. h p., et dans le second de 2,080 t. 2 p.
Détail d'une toise cube de pierre, pour tirage et transport à 11 heures de distance, et emploi.
La toise cube de pierre de Beaucaire coûte pour tirage et transport, jusqu'à la tour Saint-Louis, 35 livres. Comme il y aura de là jusqu'à la mer, encore 2,080 t. 2 p. à parcourir, la distance réduite des transports sur cette longueur sera de 1,027 t. 4 p., et opérera une augmentation de 4 livres par toise cube ; ainsi la toise reviendra à...................... 39 1. » s. » d.
La main d'œuvre pour l'arranger dans l'eau et former les digues coûtera, par toise cube,
eu égard à la sujétion....... 2 » 10 »
Régie et faux frais de l'entrepreneur, sur le pied du
vingt-cinquième............
Prix de la toise cube em- ployée. .............43 1. 3 s. 3 d.
Détail d'une toise courante de double digue, suivant les dimensions fixées d'après les sondes: 17 t; 2 p. 3 p. 2 J. cubes de pierre, à 43 1. 3 s. 3 d. la toise, suivant le prix ci- dessus..................... 750 1. 1 s. » d.
Pour former régulièrement là surface des glacis et couronnements, il sera fait 6 toises carrées de pavage, avec , pierres parementées à 3 livres
la toise, ci.................. 18 » »
Régie et faux frais de l'entrepreneur, évalués de même
que ei-dessus............... » 14 4
Prix d'unj toise Courante
de double digue............ 768 h 15 s. 4 d.
Série. T. XXIIL
Tableau.
La longueur depuis les anciennes digues jusqu'au coin du Tez-Rostang, est de 416 t. 2 p. ; la moitié de la longueur du Tez-Rostang est de 209 t. 3 p.. à quoi il faut ajouter 25 toises de longueur réduite de double digue pour les 50 toises que l'ancienne digue de la gauche a de moins que celle de la droite, ce qui produit en total 1,6501. 5 p., lesquelles à 7681. 15 s .'4 d.
la toise courante font : ci.......................................j"......
Le projet général contient 2,080 t. 2 p. de longueur au total, à 7681.15 s. 4 d. la toise courante, ci ....................................................
Ouvrages communs et accessoires aux deux projets. 40 bornes estimées, mises en place, y compris le tirage, transport, taille,
pose et massif de maçonnerie au pourtour, à 24 livres chacune, ci Bâtiments à construire pour loger l'ingénieur, l'entrepreneur, ses
mis et placer les bureaux.........................................
Somme à évaluer pour cas imprévus et augmentation d'ouvrage...
Dépense totale pour le projet réduit
MONTANT
DE LA DÉPENSE pour la construction des môles, jusqu'à la moitié du Tez-Rostapg.
1,269,105 1. 12 s. 9 d.
960
21,000 100,000
1,391,065 1. 12 s. 9. d.
Déperjse totale pour compléter le projet général, ci,
MONTANT
DE LA DÉPENSE
pour compléter le projet général.
1,599,290 1. 18 s. 5 d.
121,960 » »
1,721,250 1. 18 s. 5 d.
PROCÈS-VERBAL des expériences faites par l'ingénieur en chef du haut et bas Languedoc, conformément aux ordres à nous donnés par M. de la Millière intendant des finances, pour constater dans la Méditerranée, aux parages des Bouchesrdu-Rhône, l'existence d'un courant de Iq, mer, de l'est à l'ouest.
Pour remplir l'objet de notre mission, nous nous sommes rendus à Arles, le 17 avril 1789, afin de concerter avec MM. les officiers municipaux les moyens de faire les reconnaissances en mer désirées, et de nous procurer des navigateurs expérimentés. MM. les consuls députèrent à cet effet M. Boulouvard, négociant, lequel avait été présent à-nos précédentes visites, ainsi que les sieurs Deschamps et Bontoux, anciens capitaines de bâtiment, et choisirent la tartane Sainte-Marie,. capitaine Benoit, montée de 4 hommes d'équipage.
Le Rhône, lorsque nous arrivâmes, était fort élevé, et la pluie qui tomba à différentes reprises, depuis le 17 jusqu'au 19, et le vent contraire. nous forcèrent de séjourner à Arles.
Le 19, à midi, le temps paraissant plus favorable, nous nous embarquâmes avec les personnes susdites et M. Ferry; mais nous eûmes à peine parcouru 1,500 toises, qu'un vent violent de sud-est nous força de revenir sur nos pas, et ce ne fut que le lendemain 20 qu'il nous fut possible de nous embarquer pour gagner Pâtisson où nous arrivâmes sur les 11 heures du matin. Le vent qui souffla le reste du même jour, et le lendemain 21, ne nous permit pas de sortir de l'embouchure. Les eaux du fleuve étaient tou-
jours fort hautes et la mer trop agitée pour faire les opérations convenables qui exigeaient un temps calme.
Le 22 au matin, le temps ayant changé tout à coup et le vent étant au nord-est, nous sortîmes des bouches du Rhône, et à mesure que nous nous en éloignions, la mer devenant plus tranquille, nous commençâmes les expériences ainsi qu'il va être détaillé.
A chaque expérience faite, le 22 et le lendemain 23, nous jetâmes l'ancre pour que le bâti-timent fût stable. Nous nous servîmes le premier jour d'un morceau de liège qui avait 18 pouces de diamètre, sur 3 pouces d'épaisseur, attaché à une ficelle fort mince qu'on avait jaugé par des nœuds qui indiquaient le nombre de toises. Le veot, la première journée, étant très modéré, ne nous a point contrarié, et n'agissant sur le morceau de liège que faiblement n'en retardait pas sensiblement la vitesse ; mais le lendemain, ayant été forcés de nous éloigner des eaux du Rhône qui étaient troubles, de nous porter à la hauteur du cap Couronne, de marcher contre le vent,, en le serrant toujours au plus près, nous fûmes contraints de nous servir, dans nos opérations, d'une planche de chêne de 18 pouces de longueur sur 1 pouce d'épaisseur et 3 de largeur, laquelle s'enfonçant de son épaisseur dans l'eau de la mer, au moyen de petites pierres attachées dessus, ne laissait que le moins de prise possible à l'effort du vent.
Après avoir rendu compte des précautions employées dans les différentes expériences faites le 22 et le 23 avril, nous allons en donner le résultat.
Tableau.
PROFONDEUR d'eau
DANS LA MER.
NATURE du
FOND DE LA MER.
108 pieds.
141 pieds.
188 pieds.
200 pieds.
224 pieds.
236 pieds.
Vaseux.
Idem.
Idem.
Idem.
Idem.
Idem.
DIRECTION du LOCH.
ESPACE parcouru par
minute.
Du nord-est au sud-ouest.
11 toises 2 pieds
Idem.
Idem.
Idem.
Idem.
Idem.
12 toises 1 pied 6 lignes.
11 toises 2 pieds
11 toises 3 pou ces 6 ligues.
10 toises 4 pieds
8 toises 3 pieds
22 avril 1789.lre Expérience.
Après être sortis de l'embouchure du Rhône, et parvenus à 500 toises de distance, et au large dans la direction du cours du fleuve, nous jetâmes l'ancre, le vent étant alors sud-ouest. Le capitaine du bâtiment se mit dans la chaloupe, et tenant en main un morceau de liège, dont nous avons donné les dimensions, il le posa sur la surface de la mer, et, montre en main, il parcourut 22 t. 4 p. en deux minutes, dans la direction du nord-est au sud-ouest. L'on fit une sonde avec un cône en plomb, garni de suif par-dessous et l'on trouva 108 pieds de hauteur d'eau et un fond vaseux.........................................
Au moment de cette expérience la tartane Nolre-Dame-de Grâce, et d'autres bâtiments de mer qui faisaient route pour Marseille, ayant passé la barre de l'embouchure, furent surpris par le calme, et forcés de jeter l'ancre, dans la crainte d'être entraînés par le courant et éloignés de leur route.
2e Expérience.
A 400 toises au delà et plus au large, en suivant Ta même direction, nous mouillâmes et,après avoir employé les mêmes précautions, l'on prit avec la sonde marine la hauteur de l'eau qui était de 14 pieds, fond vaseux ; l'on jeta avec le même soin le morceau de liège attaché à une ficelle très mince, qui parcourut 24 t. 3 p. en deux minutes, dans la direction du nord-est au sud-ouest, ci...................
3a Expérience.
A 600 toises a peu près plus au large, en suivant la même route, après avoir jeté l'ancre, l'on fit une sonde dans la mer ; là hauteur de l'eau était de 188 pieds, fond de vase, et, après avoir posé avec le même soin le morceau de liège sur la surface de la mer, il parcourut 22 t. 4 p. en deux minutes.........-......................................
4e Expérience.
En continuant de serrer le vent au plus près et d'après la reconnaissance de notre nouvelle position, nous nous sommes trouvés 300 toises à peu près plus au large, et après avoir jeté l'ancre l'on fit une sonde ; la hauteur de l'eau était de 200 pieds, fond de vase. L'on jeta de même le morceau de liège sur la surface de la mer, il parcourut 23 t. 1 p. en deux minutes, dans la même direction du nord-est au sud-ouest...............................
5° Expérience.
Parvenus à 700 toises plus au large, nous jetâmes l'ancre, et,après la sonde faite, la hauteur de l'eau était de 224 pieds, fond vaseux; le morceau de liège, posé sur la surface de la mer, parcourant en deux minutes 21 t. 2 p. dans la même direction du nord-est au sud-ouest...............'.
6e Expérience.
A 800 toises encore plus au large, et k 3,200 toises- environ des bouches du Rhône, nous jetâmes l'ancre, et la sonde donna 236 pieds, même fond de vase ; le morceau de liège, attaché à la même ficelle, et posé sur la surface de la mer, parcourut 17 toises en deux minutes, dans la même direction du nord-est au sud-ouest.....................
Après avoir terminé la 6a expérience, le vent commença à s'élever, les vagues à s'agiter. Nous cessâmes nos opérations et relevâmes les principaux points de la côte avec la boussole, afin d'indiquer avec plus de précision celui où nous étions. Il est résulté de ces opérations :
1° Que le cap Couronne nous est resté à l'est, à la distance d'environ trois lieues;
2° Le port de Bouc, au nord-est à la même distance ;
3° L'embouchure du Rhône était, par rapport à nous, nord-quart, nord-ouest.
Le soleil étant sur le point de se coucher, nous profitâmes de la brise du sud-ouest pour rentrer dans le Rhône, où nous pûmes à peine gagner la
tour Saint-Louis, le vent étant tombé tout à coup. Nous couchâmes à bord du bâtiment, et fîmes nos préparatifs nécessaires pour recommencer nos expériences en mer.
En effet, nous n'étions pas bien satisfaits des opérations de la veille, toujours faites dans les eaux du Rhône, qui, étant fort hautes et troubles, se prolongeaient à environ 400 toises au delà de son embouchure, et se distinguaient avec d'autant plus de facilité, qu'elles formaient une teinte bien différente de celle des eaux de la mer,
Il était donc intéressant de renouveler les expériences de la veille dans ia mer et au delà de la ligne qui séparait ses eaux de celles du Rhône,
afin de vérifier l'existence d'un courant de l'est à l'ouest.
Pour exécuter ce projet, nous sortîmes des bouches du ileuve le23 de grand matin, le vent étant au nord-ouest, et parcourûmes en partie le golfe de Fos.
Nous observâmes que dans ce golfe, qui a, de-uis les bouches du Rhône jusqu'au port de ouc, environ 3 lieues d'étenJue, les eaux qui s'écoulaient par le grau du Gallejon, l'ancien et nouveau grau de l'est, se prolongeaient sur environ la moitié de sa largeur.
Nous suivîmes la direction du grau d»; l'est au port de Bouc, jusqu'à la ligne de séparation des eaux douces avec celles de la mer, et, après l'avoir dépassée d'environ 50 toises, l'on fit une sonde d'après laquelle la hauteur de l'eau s'est trouvée de 144 pieds, fond de vase.
Nous changeâmes alors d; route et portâmes sur le cap Couronne; afin d'y commencer nos expériences, en suivant la direction de l'est à l'ouest, que le vent nous permettait de prendre. Chemin faisant, nous fîmes d'autres sondes, depuis la première jusqu'à la hauteur d î cap Couronne.
Dans la première l'on trouva 158 pieds de hauteur d'eau; dans la seconde 167; et dans la troisième 195 pieds, et partout un fond de vase solide.
Nous avons continué ces sondes pour confirmer celles que nous avions déjà faites d ms le même golfe en 1788, sur la ligne droite du grau de l'est au port de Bouc, afin de s'assurer, par la profondeur d'eau qui s'y trouve, et la nature du fond de la mer, que les sables du Rhône ne sont parvenus ni au port de B juc ni au cap Couronne.
Après être arrivés à la hauteur du cap Cou-
ronne, à 700 toises de la partie du cap la plus avancée dans la mer, nous cherchâmes tous les moyens de nous assurer de l'existence du courant de la mer de l'est à l'ouest, et le point où nous étions était d'autant plus favorable pour cette vérification que, se trouvant à l'extrémité du golfe de Fos, aucune île, aucun obstacle ne peut influer sur le mouvement naturel de la mer. Nous choisîmes donc cette position pour c m-mencer nos expériences. Il régnait alors un calme parfait; le vent sud-ouest qui soufflait était si faible, qu'on ne remarquait aucune vague sur la mer. Nous mouillâmes, et, d'après la sonde faite, la profondeur des eaux de la mer était de 197 pieds, fond vaseux.
L'on jeta d'abord le même morceau de liège dont on s'était servi la veille; mais le vent qui était contraire, quoique faible, en retardait sensiblement la vitesse. Nous employâmes pour y suppléer une planche de bois de chêne, de 18 pouces de longueur, 3 pieds et demi de largeur et 1 pouce d'épaisseur, sur laquelle nous attachâmes encore deux petites pierres, afin qu'elle pût s'enfoncer de toute son épaisseur, et laisser moins de prise au vent. Les choses étant ainsi disposées, le capitaine de la tartane descendit dans la Chaloupe, plaça avec la main la planche ainsi lestée sur la surface de ia mer, et, montre en main, elle parcourut 15 toises 3 pieds en deux minutes, dans la direction de l'est à l'ouest.
Nous jetâmes, en même temps que la planche, du sable dans la mer, qu'il était fort facile de distinguer, et qui, entraîné par la force du courant, parcourait un plus grand espace, ce qui provenait de deux causes : 1° du vent qui, agissant sur la planche quoique faiblement, en retardait un pou 'a vitesse; 2° du frottement occasionné par la ficelle.
PROFONDEUR NATURE DIRECTION ESPACE
d'eau du du parcouru par
dans la mer. fond de la mer. loch. minute.
lre Expérience.
Ci................................................... 197 pieds. Vaseux. De l'est à l'ouest. 7 toises 4 pieds 6 lignes.
2e Expérience.
Nous continuâmes de faire route de l'est à l'ouest, en serrant le vent au plus près ; et après avoir parcouru 700 à 800 toises, nous mouillâmes. La sonde nous fit connaître que la hauteur d'eau étant de 214 pieds, fond de vase. L'on posa, de même que ci-dessus, la planche chargée d'une nouvelle petite pierre, pour la faire encore plus enfoncer dans l'eau, et, montre à la main, elle parcourut 14 t. 2 p. en deux minutes; le vent sud-ouest, quoique faible, était un peu plus frais qu'à la première expérience, et les eaux de la mer étaient calmes. Nous jetâmes aussi du sable, qui, porté par le courant, marchait plus vite que 214 pieds. Idem. Idem. 7 toises 1 pied.
3* Expérience.
A 900 toises environ de la précédente expérience, suivant toujours la même direction, nous jetâmes l'ancre et fîmes une sonde dans la mer, d'après laquelle la profondeur de i'eau était de 237 pieds, fond vaseux. La planche, posée comme ci-dessus, parcourut 11 t. 4 p. en deux minutes, dans la direction de l'est à l'ouest. Le vent,qui était presque contraire, soufflait plus frais, et retardait un peu la marche de la planche, ainsi que ies vagues qui commençaient à se former...................... 237 pieds. Idem. Idem. 3 toises S pouces
Nous continuâmes de marcher et de suivre la en plus, ne nous permit pas de faire de nouvelles même direction; mais le vent,s'élevant de plus expériences. Nous mouillâmes à différentes re-
prises, et nous jetâmes plusieurs fois quelques poigQées de sable dans la mer, qui étaient entraînées par le courant daDS la direction de l'est à l'ouest, et avec la même vitesse à peu près que nous avions observée dans les expériences pré-céJentes. Nous renouvelâmes plusieuis fois cette opération, jusqu'à ce que, parvenus aux eaux du Rhône qui étaient troubles, il nous fut impossible de faire aucune expérience.
Nous étions alors à environ 2,400 toises des bouches du Rhône, et à trois lieues à peu près du cap Couronne, à p^ u de distance des parages où nous avions terminé les opérations de la veille. La nuit commençait à s'approcher; nous courûmes différentes bordées en serrant le vent au plus très pour rentrer dans le fleuve; mais,après avoir fait beaucoup de chemin et de vains efforts, il nous fut impossible de nous élever assez dans le vent pour gagner l'embouchure, et nous fûmes contraints d aller joindre le port de Bouc, où nous couchâmes à bord. . Nous espérions, le lendemain, au moyen de la brise de l'est, revenir à l'embouchure du Rhône, et parvenir au moins à la tour Saint-Louis ou à Pâtisson. Mais pendant la nuit il survint une pluie très forte, et le vent se soutenant constamment à l'ouest, nous fûmes contraints dé rester le 24 aux Martigues,ville située à une lieue du port de Bouc, et de nous rendre à Arles par terie, le 25, le temps totalement changé, les vents contraires rendant impossible toute opération de cette nature.
RÉSULTAT,
L'on voit, d'après les expériences faites le 22 avril dans les eaux du Rhône, que la vitesse du loch a été de 11 à 12 toises par minute, et sa direction nord-est et sud-est.
Le cours des eaux du Rhône entre la tour Saint-Louis et son embouchure est nord-ouest et sud-est. Il faut donc une cause qui les force à changer cette route et les fasse tourner vers l'ouest; cette cause ne peut s'attribuer qu'au courant constant de l'est à l'ouest, que nous avons observé et reconnu le lendemain.
Les eaux qui s'échappent par les graux de l'est, du midi et de i'ouest étant plus élevées que les eaux de la mer, surtout dans un moment de crue, tel que celui où nous avons fait nos expériences, trouvent de la résistance dans les eaux de la mer qui coulent de l'est à l'ouest. Ces deux directions qui se croisent, en produisent une qui est la résultante de deux puissances qui se choquent, et qui doit participer'principalement au mouvement'et à l'impulsion de celle qui est la plus forte. C'est la raison qui nous a paru la plus certaine du changement de direction des eaux du Rhône dès qu'elles sont parvenues à la mer ; mais cette direction particulière aux taux du Rhône n'est que superficielle : à quelques pieds au-dessous, les eaux de la mer conservent nécessairement leur cours constant de l'ett à l'ouest, et cette surface d'eau douce,qui recouvre ® s eaux de la mer, diminue insensiblement d'épaisseur, à mesure que l'éloignement dés bouches du Rhône augmente, en sorte qu'à 4,000 toises environ, lors des grandes crues, et à 2,000 toises à peu près lorsque le fleuve est dans son état ordinaire, cette épaisseur des eaux douces se réduit à rien et l'on distingue très clairement la ligue de démarcation qui les sépare de celles de la mer.
On ne pouvait choisir une position plus avan-
tageuse qce celle offerte par le cap Couronne pour vérifier et constater l'existence du courant de la mer de l'est à l'ouest; ce cap, situé à 3 lieues 1/2 à peu près des bouches du Rhône, plus à l'est forme la nai3same du golfe de Fos, de ce côté, entre lui et l'embouchure ; aucune île, aucun obstacle, comme nous l'avons exposé, ne peut influer sur le mouvement des eaux de la mer, qui est tel que la nature l'a formé.
Nous commençâmes rn.s expériences à 6 ou 700 toises de distance de ce cap, et nous dirigeant vers l'ouest, !a mer était parfaitement calme, aucune vague ne l'agitait à sa surface, et le vent très faible était presque contraire à notre marche projetée. Nous distinguâmes clairement le courant à la simple vue ; mais, pour en calculer la vitesse, nous fîmes les opérations détaillées ci-dessus.
Nous ne pûmes faire que trois expériences ; dans la première, la vitesse du courant était de 35 p. 6 p., dans la seconde de 43 pieds et dans la troisième de 35 pieds par minute. Cette différence est provenue de la variation du vent, qui était presque contraire, et dont le commencement était très modéré; dans la seconde expérience il devint plus frais, dans la troisième encore davantage, et s'éleva de manière qu'il ne fut plus possible d'en faire d'autres.
Nous avons rendu compte plus haut que nous jetâmes à chaque expérience plusieurs poignées de sable que l'on distinguait parfait ment dans la mer, et qui étaient entraînées avec plus de vitesse par le courant que la planche, dont la marche était relardée par lé vent et le frottement, ainsi que le poids de la petite ficelle à laquelle elle était attachée. Nous évaluons ce retardement par aperçu de 10 à 12.pieds par minute; en ajoutant cette diminution avcc 46 p. 6 p. parcourus par minute dans la première expérience, que l'on peut regarder comme la plus sûre, parce que c'est le moment où la mer était parfaitement calme et le vent plus modéré, on peut juger la vitesse du courant de 33 à'60 pieds par minute.
Nous avons trouvé, d'après les expériences faites, entre la tour Saint-Louis et l'embouchure du Rhône, que la vitesse du courant du fleuve en . eaux basses était de 38 loises environ par minute; elle est donc plus de trois fois plus grande q; e celle du courant de la mer; et,lorsque quelques crues surviennent, cette vitesse du courant du fleuve est quadruple- à pe'u près de celle du courant de la mer, parce qu'alors les eaux acquièrent plus de hauteur, et par conséquent plus ae pente avant de s'épancher dans la mer.
Tel est le résultat de nos expériences que nous aurions désiré pouvoir réitérer pendant plusieurs jours de suite; mais elles exigent tant de précautions, un calme si profond dans les vents qui soufflent sur la surface de la mer, qu'il nous a été impossible de les prolonger, les vents étant devenus trop violents et la mer trop agitée.
Pour faire une opération aussi importante, complètement et avec un succès qui ne laissât rien à désirer, il faudrait plus u'un mois, et servir pour cela d'une tartane montée par de bons navigateurs, pour faire les évolutions, les manœuvres nécessaires, et choisir les moments où les eaux du Rhône sont les plus basses, et les vents réglés aux parages de ce fleuve, comme il est ordinaire sur la fin de l'été; alors il serait facile de faire des expériences convenables pour bien connaître la largeur de ce courant et le point où il cesse de se faire sentir plus au large ; de le suivre ainsi au-dessus et au-dessous des bouches
du Rhône et de s'assurer ainsi de son étendue et de sa vitesse par les différentes expériences qui seraient faites ; l'on ne pourrait les faire trop au large et dans les endroits où il y aurait une trop grande profondeur d'eau, parce que, pour faire exécuter ces opérations avec précision, il est indispensable de jeter l'ancre et on ne peut réussir dans cette manœuvre dans les parages ou la hauteur des eaux de la mer ne permet pasde mouiller.
Une vérification aussi longue, quoique très satisfaisante, serait fortdispendieusepour le loyer du bâtiment, les journées d'hommes à solder et autres dépenses nécessaires.
Nous pensons que l'on peut s'en passer, et l'existence du courant de la mer de l'est à l'ouest est assez démontrée pour n'en point douter; elle est d'ailleurs constatée par le témoignage de tous les marins et des personnes qui ont écrit sur les ports de la Méditerranée, et les moyens de les préserver des ensablements.—MM. Mercadier, correspondant de l'académie de Montpellier, et Fro-mond de la Merveillère, capitaine au corps royal du génie, 1788.
Par nous, ingénieur en chef du haut et bas Languedoc et département d'Arles, le 1er juin 1789. Signé : Remillat.
PRÉSIDENCE DE M. DUPORT. Séance du
La séance.est ouverte à six heures et demie du soir.
donne lecture d'une pétition de la ville de Lons-le-Saulnier qui demande que le siège épiscopal du département du Jura, situé à Saint-Claude, soit Iranstéré à Lons-le-Saulnier.
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
Le procureur général syndic du département de laCharente-Inférieureannonce, dans une adresse, que plusieurs fonctionnaires publics de. ce département, égarés d'abord par des ennemis de la chose publique, ou retenus par de fausses craintes, avaient différé de prêter le serment prescrit par le décret du 27 novembre dernier; mais que, mieux instruits des intentions ou des maximes de l'Assemblée nationale par l'instruction qu'elle a décrétée et fait publier, ils ont ouvert les yeux sur leurs erreurs et les pièges qu'on leur avait tendus, et se sont empressés d'obéir à la loi, quoique après le délai fixé par elle.
Je demande que les fonctionnaires ayant fait leur serinent civique avant leur remplacement soient traités et regardés comme ceux qui ont prêté dans les délais prescrits par le décret.
(Celte motion est décrétée.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une pétition de M. Pingré,
membre de l'Académie des sciences, qui prie l'Assemblée nationale de
vouloir bien prendre les arrangements qu'elle croira convenables pour
l'impression d'un ouvrage de
(L'Assemblée renvoie cette pétition à l'examen de son comité des finances.)
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du matin, qui est adopté.
L'ordre du jour est la suite de la discussion de Vaffaire de Nîmes (1).
Je demande à interpeller M. le maire de Nîmes sur un fait particulier.
Plusieurs membres : Non ! non !
, à la barre. Je suis prêt à répondre ; j'accepte l'interpellation.
M. le maire a parlé hier dans son discours d'un approvisionnement de blé, fait pour secourir le peuple ; je lui demanderai de nous dire quelle est la date de cet acte de surveillance.
La réponse est simule ; elle sera courte : c'est en mars et en avril 1790.
En 1790, le blé n'était ni rare ni cher; je ne conçois pas pourquoi cet approvisionnement a été fait.
Le blé était si cher à cette époque, dans mon pays, qui est le ereuier du Languedoc, que le septier, pesant 100 livres, se vendait 14 francs.
La réponse à ces questions, tout au moins oiseuses, se trouve dans une délibération du représentant de la commune du 1er mai 1790, adressée à l'Assemblée nationale ; c'est encore une des pièces dont M. le rapporteur a oublié de faire mention.
(L'Assemblée ordonne la lecture de cette pièce.)
donne leclure de cette délibération (2).
, rapporteur. Cette pièce est authentique et les faits qu'elle relate sont vrais.
, continuant son discours commencé dans la séance d'hier au soir :
QUÀRIÈME PARTIE.
Evénements, excès du mois de juin. — Résumé général.
Les premières hostilités du mois de mai avaient été heureusement
terminées ; mais tout donnait lieu d'en craindre de plus terribles ;
dans ce moment la légion se trouvait presque sans chefs par la démission
de 3 officiers de l'état-major ;
Le maire de Nîmes se rendît sur-le-champ à ce comité, et de là chez M. le rapporteur auquel il remit lui-même toutes les pièces. Comment cet incident (2) pouvait-il faire partie de la grande affaire ? Quoi qu'il en soit, le jugement en a été renvoyé à une même époque; il eût été à désirer sans doute que l'arrangement proposé pût avoir lieu, parce que la nomination des chefs de la légion aurait été faite à Nîmes le 10 juin, et aurait précédé de quelques jours et sans doute prévenu les scènes sanglantes des 13, 14, 15 et 16 juin. Le maire et les officiers municipaux n'ont aucun reproche à se faire.
Dans cet intervalle, et le Ier juin, une entre-
firise Péprébensible de certains capitaines de la égion avait été sur le
point;d'exciter un combat très vif entre différentes compagnies. Les
officiers municipaux avaient requis le major de la légion de commander
400 volontaires pour border la voie dans les rues où la procession de la
Fête-Dieu devait passer, et 200 autres pour faire des patrouilles, ou
former des piquets; le major fut en même temps prié de défendre aux
volontaires qui
Les billets écrits par les capitaines et le lieutenant des dragons avaient malheureusement circulé dans le public. L'inquiétude était devenue générale,, d'autant.que la veille, 30 mai, les volontaires des dernières compagnies reçues, avaient été insultés par d'autres volontaires, qui leur reprochaient d'être en veste, et de ressembler, avec leurs houppes rouges, au bourreau de Chambéry. Le verbal dressé à ce sujet est remis depuis longtemps au comité des recherches; il n'en a été fait aucune mention : il est essentiel d'observer que les premières compagnies qui firent usage des houppes rouges étaient celles aes sieurs Rigal et Roubel, tous deux protestants (2) ; si ces houppes rougis eussent été un signe de catholicité* deux, capitaines protestants en auraient-ils introduit l'usage? D'ailleurs, un grand nombre des agriculteurs, ayant été grenadiers dans divers régiments, arborèrent la houppe qu'ils étaient accoutumés à porter au service du roi : ils souffraient surtout avec peine que les dragons affectassent de les appeler des çéè^s/,c'est-à-dire mangeurs d'oignons; le mot « cébé », dans l'idiome oîmùis, voulant! dire oignon et les cultivateurs ne mangeant ordinairement à leur dîner qu'un oignon blanc et du pain : ce terme de dérision a surtout contribué aux malheurs de Ni nés, parce qu'il offensait d'autant plus les cultivateurs qu'il leur était prodigué par lçs dragons, troupe leste^ riàhe et brillante, composée de jeunes gens les plus aisés de; la. ville, presque tous, non, catholiques ; cette troupe excitait ainsi la rivalité; et la jalousie des cultivateurs pauvres, mal vêtus, mal armés, mais imbus des principe? de la nouvelle;Gohsti-titution, et amis de 1}égalité civile et militaire.
L'assemblée électorale du département, tenait ses séances depuis quelques
jours à Nîmes ; la situation violente des esprits avait redoublé
l'attention et les soins des officiers municipaux pour la sûreté de
cette assemblée, sur laquelle oh affectait de répandre des craintes ;
ils avaient pris ses ordres et ceux de MM. les commissaires du roi, et
ils s'y étaient conformés. Ces ordres
Les officiers municipaux insistèrent d'autant plus sur cette précaution, que, peu de jours auparavant, ils avaient eu beaucoup de peine à arrêter le premier mouvement des volontaires cultivateurs : ceux-ci se plaignaient d'être nargués par les dragons partout où ils les rencontraient, et s'étaient donné rendez-vous en très grand nombre, vers les cinq heures du soir, sur la place des Récollets; ils devaient partir de là, montés sur des bourriques, et tourner en dérision les patrouilles des dragons. L'activité des magistrats parvint à empêcher celte mauvaise plaisanterie; mais il était à craindre qu'elle se renouvelât et ne devînt très sérieuse ; et il était essentiel d'en prévenir les occasions.
Nous voici enfin arrivés au moment de la terrible catastrophe du mois de juin, catastrophe que l'irritation des esprits et la division entre les différents corps de la garde nationale faisaient appréhender depuis longtemps.
Le dimanche 13 juin, à l'issue d'un conseil où presque tous les officiers municipaux avaient assisté, le procureur de la commune et son substitut trouvèrent des traînées * de poudre dans la grande salle de l'hôtel de ville, lis voulurent, conjointement avec un officier municipal, faire quelques perquisitions à ce sujet, et demandèrent à un des volontaires par quel ordre la compagnie avait chargé ses armes; il leur répondit : Qufest-ce que cela vous f.....? Je n'ai aucun compte à vous rendre. Cette circonstance donna lieu à observer que la compagnie n° 1, qui se trouvait de garde, ordinairement composée de 60 hommes, élait plus que triplée ce jour-là, qu'elle fournissait des patrouilles redoublées de 40 hommes; et ces deux faits bien importants, antérieurs de deux heures au commencement de la rixe survenue entre les dragons et les travailleurs de terre, ne permettent pas de douter qu'il n'y eût complot, et que le prétendu billet allégué, et q i n'a jamais été produit, n'a été qu'un prétexte apparent; on doit encore observer que la compagnie
(1) Voyez le verbal de juin, passé sous silence.
n° 1 est la même qui avait occasionné l'émeute du 2 mai.
A l'issue du conseil, trois officiers municipaux, membres du bureau, restent seuls dans la maison commune, pour travailler aux comptes; circonstance bien essentielle.
A six heures et demie, on vient se plaindre de ce qu'un quidam a porté au corps de garde de l'évêché un billet d ns lequel on menaçait les dragons, s'ils y revenaient encore.
Les officiers municipaux réclamèrent sur-le-champ le billet, comme une pièce de conviction, essentielle pour connaître les perturbateurs du repos public; ce billet si important à conserver, l'homme qui l'a porté, d'abord arrêté par les dragons, tout a disparu : il paraît assez avéré que le billet a existé; mais que contenait-il?
A peine avertis, MM. Ferrand et Pontier, revêtus de leurs écharpes, se rendent avec d'autant plus de promptitude à l'évêché que, pendant leur marche, ils entendent des coups de fusil; arrivés sur la place, ils voient des dragons aux prises avec des volontaires de la légion, ceux-ci armés seulement (1) de sabres, les autres armés en même temps de sabres et de mousquetons : 1rs agriculteurs se plaignent aux officiers municipaux, « qu'inquiets sur le sort d'un volontaire « qu'on leur avait annoncé détenu et maltraité « dans l'évêché, ils s'étaient présentés pour le « réclamer; qu'ils avaient essuyé un refus, et « que, sur leur insistance, non seulement on les « avait repoussés, mais qu'on avait fait sur eux « une décharge.de mousqueterie qui en avait tué « ou blessé 7; qu'ils demandaient justice de « ce que les dragons qui étaient de service et « sous les armes avaienttiré, sans ordre, sur des « citoyens désarmés: les dragons se plaignirent, « de leur côté, qu'ils avaient été injuriés et me-« nacés jusque dans l'évêché; » mais il paraît certain que les volontaires à houppes rouges n'avaient point d'armes à feu, lorsqu'on a commencé par tirer sur eux. Bientôt le bruit de la rixe étant répandu, la compagnie de garde vient pour secourir li s dragons; le nombre des combattants augmente; quelques légionnaires à poufs rouges s'arment en diligence; il s'engage des combats dans les Irois rues qui aboutissent sur 1a place de l'évêché. Les ofticiers municipaux n'oublient rien pour calmer les esprits et faire cesser le feu; ils entrent dans la cour de l'évêché; ils y trouvent deux hommes sans uniforme, armés de sabres et couverts de sang. Des dragons et des volontaires de la compagnie n° 1, après avoir injurié les officiers municipaux, lèvent sur eux (2) leurs sabres nus, et les auraient infailliblement frappés, sans le sieur Paris, lieutenant.
M. Ferrand revient alors sur la place; il fait rentrer dans l'évêché
quelques dragons; il fait fermer promptement les portes, ce qui
contraint M. Pontier, son collègue resté dehors, de retourner à la
maison commune. La retraite des dragons avait mis fin au combat : mais,
malgré les représentations de M. Ferrand, malgré sa défense expresse,
ils veulent absolument rouvrir la porte ; ils se présentent sur la
place, et dans l'instant (aulre circonstance bien essentielle), le feu
recommence de part et d'autre; alors ils abandonnent leur poste, ils se
rendent à l'hôtel de ville. Lorsque M. Ferrand et les dragons y
arrivèrent, le major se permit, en présence du peuple, des propos
indécents contre la municipalité:
« La liberté serait perdue, l'esclavage serait « bientôt établi, si, au milieu d'une société sans « armes, des hommes armés pouvaient se mou-« voir, agir, contraindre, sans en être requis, et « commander 6n leur nom, quand ils ne doivent « le faire qu'au nom de la loi, et lorsque les « hommes de la loi l'ont voulu. »
Or, je le demande à M. le rapporteur, quand MM. Ferrand,Aigon, Du
Roure,Razoux, La Baulme, Boyer, Laurens ont été injuriés, excédés de
coups, | rêts à perdre la vie, obligés de fuir ou de marcher en
esclaves, obéissait-on alors aux hommes de la loi? Et cependant, aucune
impro-bation, aucun reproche, pour cet abus rie la force armée ; tout
est permis aux prétendus patriotes ; il ne faut chercher des torts
qu'aux officiers municipaux. Je le demande encore à M. le rapporteur ;
respectait-on la volonté de M. l'abbé de Belmont, homme de loi resté
seul à l'hôtel de ville, lorsqu'une partie des volontaires de garde le
contraignent à prendre le drapeau rouge, à le porter lui-même,
l'entraînent dans la cour, de là sur la place, lorsque vainement il fait
des observations sur les préliminaires à remplir, sur son état qui ne
lui permet guère de proclamer la loi martiale ? On lui répond qu'il y va
de sa vie et que sa robe en imposera. Il représente encore que ce n'est
pas à lui à porter le drapeau rouge : on ne l'écoute point (1), on le
menace, on l'in-iurie, les sabres et les baïonnettes sont levés sur lui.
11 marche donc, et, de femps en temps, on le rudoie, on le frappe; on se
plaint avec fureur qu'il n'élève pas assez le drapeau rouge; on lui dit
qu'il est assez grand (2) pour l'élever davantage. On arrive enfin sur
les dehors de la ville. Bieniôt paraissent des légionnaires à poufs
rouges, quelques-uns armés de fusils, un plus grand nombre avec des
sabres. On tire de part et d'autre ; les injure?, les menaces, les
mauvais traitements sont poriés à leur comble; des volontaires viennent
prendre l'officier municipal au milieu de la troupe qui l'environne et à
grands coups de crosse de fusils on le force d'aller en avant; il en
reçoit un entre les deux épaules (3) qui lui fait vomir le sang à pleine
bouche, et on ne cesse de lui crier : Allez donc en avant ! Je le
demande encore ; obéissait-on à l'homme de la loi? Non, sans doute,
puisqu'il fut contraint, sous peine de la vie, d'avancer seul avec le
drapeau rouge. Toute son escorte resta en arrière, rangée en bataille ;
seul il atteint enfin les légionnaires à poufs rouges;
En entrant dans la salle, M. Ferrand rencontre M. Pontier, son collègue,
qui lui dit qu'après l'avoir quitté à l'évêché, il s'était rendu, à
travers mille dangers, à la maison commune où se trouvaient MM. les
commissaires du roi; qu'il avait été convenu avec eux de faire publier
la loi martiale et de requérir à cet effet le régiment de Guyenne; qu'il
s était rendu aux casernes; qu'en y arrivant il avait demandé que le
régiment prît les armes pour la publication de la loi martiale ; que M.
le lieutenant-colonel avait observé qu'il ne pouvait les faire prendre
saus une
Il est alors arrêté, entre MM. Ferrandi Pontier et un commissaire du roi, qu'ils proclameront de nouveau la loi martiale et qu'à ces lins on requerra, par écrit, le régiment de Guyenne. La réquisition au commandant de place est aussitôt faite et signée par les officiers municipaux. Dans ce moment, on amèneun homme qui avait échappé à la fureur de certains de ses conducteurs; des menaces et des cris se font entendre; les officiers municipaux, voulant lui sauver la vie, se hâtèrent ae le faire entrer dans la salle du conseil, pour le faire conduire de là en prison; mais une foule de volontaires surviennent et les entraînent eux-mêmes pour publier, sans délai et sans délibération préalable, la loi martiale; fortement et tu-multueusementpoussés,ilsdescendent, et cette démarche forcée coûte la vie au malheureux qu'ils ont laissé dsns la salle du conseil ; il y est massacré inhumainement sur les sièges consulaires, traîné dans l'escalier et laissé dans la cour. Je ne me permets ici qu'une réflexion: 15 compagnies à poufs rouges apprennent cet assassinat et restent tranquilles en attendant avec patience les ordres deTétat-major pour marcher ; point de réquisition ; aucune de ces compagnies n'est requise par le major;il met exclusivement sur pied des compagnies à plumets blancs, c'est-à-dire protestantes. Qu'on juge après cela, s'il y avait un complot, quel parti on doit accuser!
Des compagnies de volontaires armés, rassemblés sur l'esplanade, viennent
renforcer le détachement qui escorte le drapeau rouge; devant la place
de l'ancien cimetière, on annonce que des gens sont retranchés derrière
le rempart et dans une tour qui en dépend; un coup de fusil est tiré par
l'escorte (1); à ce signal, il en part beaucoup des deux côtés et,
malgré les défenses que fofit MM. Ferrand et Pontier, le feu se soutient
à mesure qu'on avance ; mais une décharge de mousqueterie arrête le
détachement, lui fait faire une marche rétrogade, et conséquemment
abandonner le drapeau rouge et l'officier municipal qu'on laisse exposé
aux coups. Le commissaire du roi et M. Pontier s'étaient empressés de se
rendre aux casernes où devait se porter le détachement; M. Ferrand ne
veut pas abandonner le drapeau rouge; il les suit lentement avec le
porte-drapeau; mais bientôt le drapeau rouge est enlevé par des
volontaires aux poufs rouges. M. Ferrand, abandonné sans retour par son
détachement, est arrêté par les mêmes légionnaires; il les exhorte
vainement à mettre bas les armes; il leur expose combien ils se rendent
coupables; ils lui répondent qu'ils ne les ont prises que quand ils ont
été attaqués et qu'ils ont vu plusieurs des leurs massacrés. Ils
entraînent alors cet officier munit ipal dans la maison du sieur
Froment, attenante au rempart. Là M. Ferrand réitère vai-
Après avoir été abandonnés par le détachement, M. Pontier et le commissaire du roi s'étaient rendus aux casernes; ils y avaient trouvé un autre commissaire du roi et MM. les officiers du régiment sous les armes; sur la réquisition de M. Pontier resté seul, lé régiment sortit et se forma au-devant des casernes.
Le chirurgien-major arrive; il affirme qu'il a fait le tour de la ville et n'a rencontré personne ; un sergent fait le même rapport; il ajoute que tout est tranquille : MM. les commissaire> du roi, l'officier municipal et ceux du régiment déterminent ensemble que le régiment rentrera.
D'après cet exposé véritable, on ne conçoit pas le reproche fait à la municipalité d'avoir trop différé de publier la loi martiale et de faire agir le régiment de Guyenne, tandis qu'il est avéré que, dès l'instant que MM. les commissaires du roi sont venus requérir les officiers municipaux, ils ont marché sur-le-champ avec eux, précédés du drapeau rouge, vers les casernes où était le régiment de Guyenne"; il est également avéré que les escortes des officiers municipaux, publiant la loi martiale avec le drapeau rouge, les abandonnèrent après les avoir maltraités et que les officiers municipaux n'en sont pas plus responsables que MM. les commissaires du roi eux-mêmes qu'ils n'ont pas quittés; ou plutôt ni les uns ni les autres n'ont aucun tort, et la fatalité des événements est la seule cause que le régiment de Guyejme fut requis un peu plus tard. Il est également difficile de comprendre pourquoi le nom d'antipatriotes est prodigué aux volontaires à poufs rouges, par MM. les commissaires de l'assemblée électorale, tandis que les dragons et autres volontaires qui ont maltraité et violenté les officiers municipaux, qui, les premiers, ont blessé et tué des citoyens sans armes, sont hon'orés du beau nom de patriotes. Cependant, l'émeute était finie, la fureur réciproque était amortie et on ne se battit nulle part pendant la nuit. Plusieurs officiers municipaux la passent à la maison commune. Ils y entendent les propos les plus menaçants contre la municipalité; 4 de leurs confrères viennent les rejoindreà3 heuresdu matin; bientôtils sontfrap-pés des cris multipliés qu'ils entendent; ils apprennent qu'il arrive un grand nombre de volontaires étrangers et qu'on en attend de toutes parts. M. de La Baulme se transporte chez M. Vigier-Sarrazin, président de l'assemblée électorale; il y trouve MM. les électeurs du département rassemblés; il leur propose de se concerter avec la municipalité et les chefs des troupes déjà arrivées, et d'inviter ces troupes à demeurer aux avenues de la ville ; ce projet est adopté. La réquisition est dressée et signée ; un des électeurs offre même d'aller au-devant des troupes de son canton pour les prévenir. M. de La Baulme, d'accord avec ses collègues, se rend avec M. Vincens-Vals, à l'Esplanade, pour parler aux chefs des troupes; à peine y sont-ils arrivés, deux groupes différents les entourent et les séparent. M. ae La Baulme, après les plus horribles menaces, reçoit au défaut des côtes un coup qui lui ôte la respiration ; bientôt les sabres sont levés sur sa tête, les baïonnettes sont tournées contre lui ; il appelle M. Vin-cens-Val ; il fait des efforts pour le rejoindre; heureusement, celui-ci s'approche avec quelques officiers de la légion. M. de La Baulme ne doit son salut qu'à cette réunion ; le sieur Chabanel pare
les coups qui sont portés à l'officier municipal et parvient à conduire MM. de La Baulme et Vincens-Vals dans la maison du sieur Mazel : c lui-ci craint pour eux, et leur annonce que, malgré ses ef-« forts, il n'a pu parvenir à sauver la vie au oom-« mé Bataille, qui vient d'être égorgé chez lui, « après avoir échappé au fatal réverbère dont la « corde s'est cassée. » Les deux officiers municipaux s'évadent par les jardins et parviennent enfin dans la campagne : le lendemain ils s'informent s'il y a sûreté pour eux^en se rendant à Nîmes, mais ils apprennent, par le retour de l'exprès, qu'il n'y a sûreté que pour M. Vincens-Vals, et il est à remarquer que, dès la matinée et dans la journée du lundi, il était arrivé un nombre effrayant de milices nationales étrangères que les moins exagérés portent à 15,000 ; qu'elles arrivent, non seulement des environs de Nîmes, mais, chose incroyable et même impossible si des avis précédents n'y eussent préparé, de 5, 6, même de 10 et 12 lieues. Elles arrivent presque uniquement des cantons où les protestants sont en plus grand nombre ; elles entrent dans Nîmes, non seulement sans aucune réquisition de la municipalité, mais avec des intentions hostiles contre les officiers municipaux, le dessein formel de leur désobéir et la commission de « rapporter la tête et « les dépouilles de tous les officiers munici-« paux. » Elles arrivent, non avec le désir humain de ramener l'ordre et la paix, de s'informer de la cause des'troubles et d'y remédier, de réunir deux partis opposés d'une ville amie et voisine, mais avec le projet injuste et inhumain de détruire et d'écraser tous ceux contre lesquels la haine et la vengeance leur avaient inspiré d'avance les plus cruelles préventions. Enfin, il est à remarquer que les plus grands malheurs de la ville de Nîmes, dans cette crise terrible, sont venus des secours cruels qu'un des partis s'était préparés, et que la grande scène de carnage n'a commencé qu'après leur arrivée. Ah ! ce n'est pas ainsi que se sont comportées les gardes nationales de Bordeaux quand elles marchèrent à Montauban, ni celles d'Orange quand elles ont volé au secours des Avignonais, ni celles de Metz et de Tout quand elles vinrent à Nancy.
Ici, Messieurs, je vais rapporter deux faits décisifs, et dont je suis chargé d'offrir la preuve.
Des affidés au club firent retirer, le samedi 12 juin, du collège et d'une autre pension de la ville, quelques enfants et ceux de leurs amis; un membre du club qui, pat1 sa place, était au courant des événements fit sortir du grand couvent les filles d'une dame très connue, malgré l'opposition des religieuses.
Le commandant d'une légion étrangère s'était mis en marche avec sa troupe le lundi matin 14 juin, sur l'avis d'un électeur protestant de son canton, à l'effet de venir donner main-forte et mettre le bon ordre à Nîmes. Avant de partir, des femmes et des filles disaient aux gardes nationaux : Ne revenez pas sans noos apporter la tête et les dépouilles de tous les officiers municipaux. Arrivé à 2 lieues de Nîmes, il fit reposer sa troupe dans un endroit, où il rencontra plusieurs volontaires de différents lieux. 11 en entendit un qui disait qu'on égorgeait les catholiques de Nîmes et qu'il fallait se hâter de s'y rendre pour faire sauter le couvent des Capucins; un autre qui demandait à son camarade si l'on avait fait marcher tous les catholiques de son village; et sur l'assurance qu'il lui en avait donnée, il avait répondu : « Tant mieux, nous les mettrons en avant « pour tuer ceux de Nîmes, et ensuite nous leur
« ferons subir le même sort, car il ne faut pas « qu'il en reste un seul. » Ces propos alarmants décidèrent les commandants de celte légion à rétrograder. Les catholiques qui en faisaient partie les suivirent et arrivèrent à travers champs dans le lieu d'où ils étaient partis. Les protestants, s'apercevant de leur fuite, coururent après eux, mais sans pouvoir les atteindre.
Avant d'avancer un fait aussi important, j'ai cru devoir prendre de nouveaux renseignements ; on m'a répondu que la preuve setait faite, dès que l'information serait renvoyée à un tribunal étranger à Nîmes.
Cependant, Nîmes n'offre plus que l'image effrayante d'une ville prise d'assaut, livrée au meurtre et au pillage; nul ordre, nulle discipline, nul chef qui commande à ces milices acharnées contre un parti dès lors anéanti par l'énorme disproportion du nombre; certains officiers municipaux sont maltraités dès qu'ils paraissent, ou consignés dans l'hôtel deville; aucun électeur ne se présente pour en imposer aux troupes de son canton, et contenir leur furie; personne ne fait respecter l'autorité des lois. On proscrit hautement quelques officiers municipaux, des membres respectables du clergé, les soldats et officiers des compagnies à poufs rouges, ; les signataires des deux délibérations du 20 avril et premier juin, c'est-à-dire les trois quarts de la ville; les uns désignent les victimes, les autres le deviennent partout où on les rencontre, et, dès cet instant, on ne voit plus que des catholiques massacrés.
Un événement, survenu le lundi à 7 heures du malin, ne laisse aucun doute
sur le complot prémédité à l'avance de piller les couvents. Le boulanger
du second monastère des ursu-lines apporte le pain destiné aux
religieuses et à leurs nombreuses pensionnaires. Au moment où l'on ouvre
la porte du couvent, des légionnaires de la Gardonnengue et des Cévennes
enlèvent le pain, maltraitent le boulanger, insultent la tourière, et
sont sur le point de forcer les portes du couvent, lorsque l'un d'eux
fait observer à cette troupe effrénée qu'on doit respecter les ordres
supérieurs d'après lesquels il faut commencer par les capucins. Cette
seule considération arrête les brigands, qui avaient amené leurs femmes
avec eux, pour prendre part au pillage et emporter le butin. En effet,
sur les 11 heures du matin, on publie qu'il existe dans ce couvent des
hommes et un dépôt d'armes cachés. Par ordre du major de la légion, on
fait sur-le-champ une fouille exacte ; malgré les recherches les plus
actives, on ne trouve rien : on recommande aux religieux de fermer
soigneusement leurs portes et leurs fenêtres; ils obéissent. Quelques
heures après, l'inexpérience d'un volontaire étranger fait partir un
fusil au milieu des troupes étrangères campées à l'esplanade. Le maire
d'un village est atteint et meurt. On dit confusément que le coup est
parti du couvent, quoique toutes les portes et fenêtres en soient
exactement fermées. Sans autre examen, le monastère est forcé, on y
massacre cinq religieux (dont un de 82 ans, retenu dans son lit par ses
infirmités, fut haché à coups de sabre) (1), ainsi que deux jeunes
clercs qui ba-
Il en est sans doule du coup de fusil que l'on prétend avoir été tiré des Capucins, comme de celui qu'on déclara le lendemain avoir été tiré du second couvent des ursulines, ce couvent qui avait été la veille sur le point d'être forcé. En effet, un légionnaire,caché dans la ruelle voisine de ce couvent, attend le moment où il passe une troupe nombreuse de volontaires étrangers, tire en l'air un coup de fusil, court vers cette troupe, se plaint qu'on vient de tirer sur lui des fenêtres du couvent « et crie aux sapeurs d'avancer pour « en briser Ie3 portes ». Heureusement on avait vu ce misérable calomniateur décharger son fusil; il fut confondu en présence de toute la troupe, en faisant toucher le « bassinet qui était encore « chaud et d'où il sortait encore de la fumée ». Les spectateurs outrés ne peuvent contenir leur indignation ; mais pour empêcher toute explication ultérieure, on ordonne de tirer dessus : bientôt, il est étendu sur le carreau sans avoir subi un interrogatoire. Dans toute cette journée du lundi, on s'est livré au massacre plutôt qu'à l'arrestation de ceux qu'on avait désignés comme des rebelles; il ne s'était présenté qu'un point de résistance. On a déjà dit, et on ne saurait trop le répéter, que parmi les compagnies aux poufs rouges, 15 n'ont point pris les armes ni aucune part à l'action ; on ne saurait trop répéter qu'elles ont attendu, mais vainement, les ordres du commandant de la légion pour marcher; il ne s'est présenté, pendant les deux premiers jours, des cantons catholiques, a cune troupe armée pour venir au secours des prétendus révolutionnaires ; la seule ville de Beaucaire envoie un détachement de 600 hommes; le parti dominant débute à leur rencontre, leur fait dire que tout est en paix, et ces braves légionnaires retournent sur leurs pas; et cependant les massacres et les pillages continuaient avec une barbarie sans exemple. D'après ce seul fait, s'il y avait un complot, de quel côté peut-il être? Environ 60 volontaires a houppes rouges, seulement, maîtres des compagnies qui avaient eu dans diverses circonslances, et notamment la veille, des rixes avec les dragons et avec les compagnies de la légion qui avuient chargé leurs armes le jour de la Fête-Dieu, s'étaient retranchés dans une tour sur les remparts, près le collège, et attenant à la maison du sieur Froment; un de leurs capitaines, un membre du club, propose de les attaquer avec du canon; six pièces sont mises sur-le-champ en batterie; deux officiers municipaux, accompagnés de six commissaires conciliateurs, marchent vers la tour, avec un drapeau blanc. Le sieur Froment et les autres capitaines acceptent les conditions qu'on leur propose, pourvu que la légion entière soit désarmée : ils arborent aussi le drapeau blanc; mais ce signe de paix ne ralentit pas l'attaque.
En vain les commissaires conciliateurs invitent à ne pas répandre le sang des citoyens ; plusieurs légionnaires demandent à grands cris la tête des capitaines retranchés dans la tour. Il est pourtant assez généralement convenu « qu'ils mettront bas « les armes, qu'ils les feront porter au palais, « qu'ils s'y rendront eux-mêmes, et qu'ils s'y « mettront sous la sauvegarde de l'assemblée élec-« toraie ». Les capitaines acceptent ces conditions et se dis; osent à les exécuter; on publie que la paix est faite; mais vainement, leur perte était jurée. Malgré la capitulation acceptée par les chefs, l'attaque est continuée; la soif du
pillage (1) et du sang rend le3 assaillants sourds à la voix de l'humanité. Six pièces de canon, habilement dirigées, ont bientôt fait brèche; les faibles murailles tombent et s'écroulent, et la fuite s ule peut soustraire à la mort le reste des infortunés qui y étaient renfermés.
Le collège se trouve dans le funeste voisinage de cette tour; le collège qui eût été un asile sacré pour des ennemis, par le dépôt précieux de la jeunesse nombreuse qu'il renferme, le collège même est violé par ces barbares auxiliaires, sous préiexte d'y poursuivre quelques victimes vouées à la mort. Eu vain un officier municipal exhorte les gardes nationales à ne rien faire de contraire au bon ordre et à la décence ; on trouve dans le collège le recteur, les prêtres, les régents, les pensionnaires réunis dans une même pièce. Le recteur, instruit du motif de la visite, répond que s'il se trouve quelqu s hommes cachés, c'est à son insu. Cependant, on découvre, dans un galetas, trois hommes qui sont massacrés. Des volontaires étrangers accusent le recteur d'en avoir imposé et veulent attenter à sa vie. M. Du Roure,officier municipal, déclare hautement qu'on ne le fera qu'après lui avoir passé sur le corps; il court lui-même les plus grands dangers; il a toujours à ses côtés un légionnaire qui ne cesse de lui vanter la beauté et la bonté de son sabre, bien propre, lui dit-il, à faire sauter des têtes. S'il parvient à s uver la vie du recteur, il ne peut empêcher que les compagnies qui l'accompagnent se permettent les plus grandes dévastations; les portes, les armoires sont enfoncées, les vitres cassées, les meubles brisés; tous les effets, sans exception, des maîtres, des professeurs sont pillés et emportés; on ne laisse à tous les individus du collège que ce qu'ils ont sur le corps. D'après le verbal et les états dressés, l'argent volé se porte à plus de 6,000 livres ; les autres effets, pillés et dévastés, montent à 14,000 livres, sans y comprendre le linge et les effets (2) de tous les pensionnaires. Ou lit plus; les brigands étaient suivis de leurs femmes, qui étaient occupées à vider les paillasses, les matelas et les oreillers, pour en voler la toile; ce fait, omis par M. le rapporteur, est constaté par le procès-verbal dressé par MM. les officiers du prêsidial; enfin les pupitres mêmes des écoliers ont été mis en pièces, et rien n'a été conservé; que dis-je? Deux seules chambres sont demeurées intactes, ce qu'elles renfermaient a été respecté (tandis qu'une pièce contigu'è qui ne contenait que les hardes et les effets du famulus du collège a été pillée et dévastée). N en soyez pas surpris; le sieur Amabric, protestant, y avait déposé une grande quantité de meubles précieux qu'il avait fait venir de Paris pour revendre : ce trait prouverait seul invinciblement la vérité de la déclaration faite par tout le régiment de Guyenne qu'on né peut se dissimuler que « la différence des cultes des protestants et des catholiques était la seule cause des troubles ».
En sortant du collège, trois maUieureux catholiques sont rencontrés et
massacrés à la porte~de l'église : cependant on juge convenable, pour
ramener le calme, de désarmer les poufs rouges; le capitaine de la
compagnie n° 4 donne le premier l'exemple de l'obéissance : on trouve
chez les chefs les fusils de leurs compagnies ; il n'en
non..... c'est l'affreuse vérité tout entière; ce
sont les expressions mêmes du récit de MM. les commissaires de
l'administration du département : on poursuivait en effet les malheureux
poufs rouges, on les immolait partout où on les rencontrait ; eu vain
avaient-ils rejeté loin d'eux ce signe fatal ; au seul so pçon de
l'avoir porté, on les immolait sans pitié; on égorgeait des citoyens qui
ne l'avaient jamais porté, et qui n'avaient jamais été d'aucune
compagnie, tels que l'infortuné Gas, Tribes, etc., etc. ; des barbares,
ivres de haine et de vengeance, indiquaient, pour ces horribles
massacres, à des étrangers aussi féroces qu'eux, les retraites de leurs
victimes, et ces victimes étaient leurs concitoyens. Selon les relations
les plus modérées, il en a été immolé le mardi et le mercredi plus de
300 au moins de cette manière ; les noms de 153 sont connus, malgré la
barbare précaution de jeter de la chaux vive sur les cadavres, pour
empêcher de reconnaître les morts et d'en savoir au juste le nombre;
déjà le couvent des dominicains est entièrement ravagé; tout est saccagé
et détruit, au point de le rendre inhabitable; le pillage est complet;
les brigands qui ont commis ces excès de sang-froid, se partagent, eu
sortant sur la place, l'argent qu'ils y ont volé. Les religieux éperdus,
instruits par le malheur des capucins, avaient fui la ville : on les
pour-
Les récollets, plus heureux, ne virent point leur monastère livré à un pillage généralmais on prit, chez le gardien, tout l'argent qui s'y trouvait, c'est-à-dire 400 livres de l'argent du couvent, et 100 écus du fonds des messes non acquittées.
Plusieurs appartements du séminaire furent également visités et saccagés; enfin, plus de 300 maisons sont forcées et pillées en entier; celle de l'abbé Cabanel, administrateur de l'hôpital général, renommé par sa charité pour les
Î)auvreS, fut une des premières livrées au pil-age; les registres de l'hôpital sont détruits, 1 argent du propriétaire et celui des pauvres, Volés ; les arbres du jardin sont arrachés; les planchers, les plafonds, les cheminées, les portes, les fenêtres, tout est brisé, renversé; le couvert même est emporté.ou abîmé; les quatre murs demeurent à peine entiers.
Tous les effets, tous les meubles de M. Bra-gouse, curé de la paroisse de Saint-Paul, qui né purent être volés, sont entièrement fracassés; tous les livres d'une bibliothèque précieuse sont déchirés ou jètés dans le canal de la fontaine; l'argenterie de M. Bragouse, celle de la fabrique, l'ostensoir, une chape de drap d'or, un ornement complet d'église, valant plus de 3,000 livres, et donné par feu M. Bec-de-Lièvre, évêque de Nîmes, enfin, toutes les provisions de cire d'une année pour la paroisse sont ^volées; tfn offre de prouver que le pillage de cette maison a été ordonné, màis qu'on a recommandé véritablement de tout détruire sans rien emporter. Ce fait sera attesté par une foule de témoins; par ceux-là mêmes qui.Ont déclaré ingénument qu'ils âv aie fit pensé qu'il valait mieux profiter ae la dépouille que de tout brûler. Une circonstance singulière ét frappante mérite surtout d'être , relevée : le curé Bragouse, homme d'une piété émi-nente, s'était distingué dans tous (es temps par le zèle le plus ardent pour la rtligipn; il était le fondateur d'une nouvelle paroisse, et il avait eu s'attirer une confiance sans -bornes de la part de ses ouailles ; il était aussi l'ecclésiastique dont les jours avaient été le plus souvent en danger; cependant, on remarqua que les plafonds, les cheminées, les portes, les fenêtres de la maison qu'il habitait, he supportèrent aucun dégât ni aucune détérioration, Pourquoi donc cette maison n'a-t-elle pas été saccagée comme celle de l'abbé Cabanel etde tant d'autres? C'est qu'elle appartenait à la dame Tomsart, non catholique. 100 autres maisons ont été pillées en entier, et les effets brisés avec une sorte de fureur qui ne peut se décrire ; on répandait l'huile que ron ne pouvait pas s'approprier, le vin qu'on ne pou-Vait pas boire. Enfin, tputes les maisons endom^ magées appartiennent, sans distinction, à des catholiques, et ce fait est bien important dans cette cause. Dans la seule maison du sieur Ca-rayon, négociant, on a évalué à plus de 30,€00 livres les vols ou les dégâts. Je crois pouvoir affirmer à l'Assemblée, qu'il s'est fait pour plus de 760,000 livres de pillagt s et de dévasiations. Comment qualifier après cela le récit de MM. les commissaires de l'assemblée électorale ? Les maisons son t pillées, disent-ils, mais c'étaient des maisons suspectes.
Ce pouvait être, sans doute, une raison pour s'en assurer, pour les faire visiter avec prudence ;
mais ce ne pouvait être une raison pour les piller ou les détruire. Mais, avec 20,000 hommes armés et réunis, n'avait-on pas des forces suffisantes pour s'assurer de tout ce qui était criminel ou suspect, sans se livrer aux assassinats et aux brigandages? Car comment qualifier autrement les horreurs qui se sont passées les journées du mardi et du mercredi, durant lesquelles on continuait à massacrer des hommes qui ne se défendaient pas, et à piller les maisons de ceux qui n'avaient jamais été armés. Il est un fait qui ne permet pas le moindre doute sur l'existence d'un complot réel er">: sur 9 maisons de campagne, que l'on compte sur les collines qui entouient la ville de Nîmes, 4 ont été pillées ou saccagées, et les arbres, les vignes, les olivets arrachés et détruits en partie; 5 ont été respectées ; elles sont enclavées de telle sorte et situées de manière qu'il était impossible à des étrangers, sans être guidés, dé ne dévaster que celles désignées.Comment se fait-il qu'on n'ait pas touché une seule pièce, un seul arbre des domaines qui appartiennent aux protestants, et que ceux qu'on a pillés et saccagés appartiennent tous à des catholiques ?
C'est ici le lieu de faire observer à l'Assemblée que sur la fausse nouvelle que des paysan s avaient commis par représailles quelques dégâts dans la métairie du sieur La Coste,protestant, située dans un canton habité par des catholiques, l'ordre avait été donné par ie chef de la force publique, à 500 hommes d'infanterie, 50 de cavalerie de marcher avec du canon contre plusieurs villages entièrement catholiques.
Les officiers municipaux, instruits de cet ordre sanguinaire, représentent qu'il convient préalablement de s'assurer des faits ; ils demandent que cette terrible exécution soit suspendue jusqu'au retour de l'exprès qu'ils vont envoyer. Celui-ci part, passe à la métairie privilégiée, revient, et annonce qu'elle n'a essuyé aucun dommage, et que tout est parfaitement tranquille. A cette nouvelle, voici la réponse des commissaires de l'assemblée électorale ; « Nous sommes fort aises d'être dis-« pensés d'employer les moyens que nous avions « crus nécessaires pour le retour de la paix. » Quoi! il èxïstait des moyens pour éviter les dévastations et le carnage? Quoi! les commissaires le déclarent eux-mêmes? Et ce n'est que dans l'instant où l'on annonce faussement qu'on a pillé la propriété de M. La Coste, protestant, ce n'est qu'après deux jours et deux nuits entièrement consacrés aux meurtres et aux excès les plus atroces que l'on commence à s'occuper des moyens de lés arrêter? Suivons encore le récit de MM. les commissaires; il a de quoi affliger les âmes justes et sensibles : « Les instances réité-« rées, disent-ils, les efforts constants du comité « électoral, dep commissaires du roi, des "chefs « des gardes nationales, des bons citoyens, arrê-« teutces meurtres; on emprisonne tous ceux qui « sont soupçonnés d'avoir eu part au complot que « le courage des bons citoyens a déconcerté. »
Quoi 1 tant d'efforts, tant d'autorités réunies ont pu rester si longtemps impuissants? Quoi 1 il a fallu 68 heures, si fatales pour tant d'infortunés, pour arrêter ces meurtres détestables, aussi lâches qu'atroces, et on n'a pas songé à les punir? On emprisonne tous ceux qui sont soupçonnés d'avoir participé au prétendu complot qui n'a jamais existé, et tant de bons citoyens qui ont entre leurs mains toute l'autorité ne sévissent contre aucun des assassins qui ont foulé si indignement aux pieds l'humanité, les lois et sans doute les-
ordres et les instances réitérées de leurs chefs? Aucun de ces vils bourreaux n'a été ni arrêté ni puni? Que dis-je! on les appelle de bons citoyens, on vante leur courage, et ce sont des commissaires de l'assemblée électorale qui, dans une adresse à l'Assemblée nationale, prostituent et déshonorent ainsi le titre honorable de bon citoyen! Pour ne pas prolonger trop longuement le compte que j'avais à vous rendre, je n'ai mis sous vos yeux, Messieurs, qu'une esquisse irû-parfaite des horreurs qui ont ensanglanté ma triste patrie au nom de la loi et de la liberté : j-'ài dû épargner à la fois et votre temps et votre sensibilité; mais j'atteste,sur mon honneur, que tous les faits contenus dans les détails circonstanciés relativement aux événements du mois de mai sont exacts et de toute vérité; j'atteste également, sur l'honneur, de fpes collègues, que Jes faits relatifs aux scènes sanglantes de juin, qui se sont passées en mon absence, sont également vrais, et qu'ils en offrent' la preuve, dès l'instant que l'information sera! renvoyée par devant un tribunal étranger au département du Gard. L'Assemblée nationale et tous1 les gens de bien sont suppliés de ne se décider, ni sur les récits pleins d^errëurs, ni sur des informations dont la suspicion est sensible, ni même sur les verbaux qui ont été dressés; ce n'est pas dans une ville où l'esprit de parti s'est si violemment manifesté, qu'on peut se flatter que les informations ont été faitesavec impartialité. Il faut surtout suspendre son jugement, non sur les nombreux assassinats prémédités qui'Ont été commis, puisqu'il est de fait que» plus de 300 citoyens ont disparu de la surface de la terré et que l'on compte dans ce nombre 21 protestants seulement, mais sur les auteurs, les fauteurs et les complices de tant d'atrocités; il faut donc suspendre son jugement, jusqu'à1 ce que des procédures faites avec impartialité, et dans une ville étrangère à tout ressentiment, manifestent de quel côté sont la justice et la vérité; il faut savoir dans quelles vues, sous quels prétextes, sur quelles réquisitions, des brigands attirés dans Nîmes ont rempli leur abominable mission dévàster les ,couvents et plus de 100 maisons, et d'exercer sur leurs victimes désarmées toutes sortes d'atrocités. Mais, arrêtons-nous un moment; quittons des scènes de carnage qui accablent l'imagination et déchirent le cœur; passons à cet instant où le calme va renaître, pour une ville infortunée, après trois jours à jamais désastreux. Ces jours n eussent peut-être pas été les derniérs, si un détachement nombreux de la garde' nationale de Montpellier'ne fût arrivé le mardi soir. Vainement de perfides messages tentèrènt, jusqu'à deux fois, d'arrêter leur marche, sur la route, en leur annonçant faussement, comme aux légionnaires de Beaiicaire, que là paix était faite, et leur représentant que, d'après les décrets de l'assemblée, ils ne pouvaient venir à Nîmes sans une réquisition de la municipalité; on redoutait d'avoir pour spectateurs de tant de crimes des soldats vraiment citoyens, vraiment auxiliaires. Moins crédules aux complots, moins ftvides'du sang et des dépouilles de ceux que l'on avait désignés sous le nom ûe coupables, ces braves militaires déclarent qu'ils veulent s'assurer des faits, et de l'existence réelle de cette paix si faussement annoncée ; ils arrivent... ils détournent les yeux avec horreur des membres épars, des restes sanglants de ces scènes atroces; ifs déclarent hautement qu'ils se croiront obligés de diriger leurs armes contre ceux qui continueraient à massacrer des citoyens
sans armes et dispersés. Leur contenance fière et courageuse fait plus que tous les èffortsemployés jusqu'à ce moment pour arrêter le pillage et le meurtre ; ils cessent tout à fait le mercredi matin : on apprend alors lés atrocités commises sur le sieur et la dame Noguier et sur les Sieurs Maigre, père et fils; d ont les épouses furent gardées en otage à Remoulins^et ne dureut la conservation de léurs jours qu'au coprage de la maréchaussée et du sieur Duprat, son chef, ainsi qu'à la fermeté des officiers municipaux.
Des étrangers, cruellement égarés, portés au désespoir en apprenant les nombreux massacres exercés sur leurs fi ères catholiques de Nîmes et ne pouvant les secourir, se sont rendus coupables des plus terribles représailles. Quoi! les monstres détestables, qui, dans ces jours de calamités,désignaient leurs victimês et ceux moins criminels peut-être qui se laissaient compter leur salaire sur les cadavres entassés, autour desquels ils dansaiént, tous ces monstres sanguinaires voient encore la lumière du jour ? Ils ont échappé jusqu'à ce jour au glaive de la loi? Et 2 respect tables citoyens* un père estimable, son digne fils, qui pendant 60 ans ont fait vivre chaque jour 200 familles, qui pendant 60 ans ont été les bienfaiteurs de leur patrie et de l'humanité, voilà ceux qui ont péri par le plus lâche et le plus noir des attentats ?
Forcés à ne plus répandre le sang, les hommes féroces qui en avaient tant versé à Nîmes s'en consolent par lé souvenir de l'immense butin dont ils se sont enrichis; ils ne songent plus qu'à;le remettre en sûreté; chargés de dépouilles sans nombre, ils regagnent à pas lents leurs retraites,, et l'on vpit qu'ils ont longtemps exposé, qu'ils exposent encore leurs lâches et odieux trophées. Sans doute, ces crimes ne sont pas ceux de toutes les milices étrangères, mais de quelques individus qui en faisaient partie, mais qui, marchant à leur-suite, sont venus fondre, àvec la férocité du tigre et l'impétuosité du lion, sur la ville de Nîmes. Eh l pourquoi ne s'y sont-elles pas opposées? Comment peuvent-elles exeuser une irruption aussi coupable qu'illégale? Le plus grand nombre d'entre elles sans douté ne s'est pas souillé'de sang et dé pillage, mais si elles avaient été pénétrées des mêmes sentiments de justice et d'humanité que celles de Montpellier ; si,dès leur arrivée, elles avaient employé leur utile et pressante médiation pour séparer des citoyens qu'un moment d'acharnement et de fureur poussait à se combattre ; si, loin de se joindre inhumainement aux uns pour écraser les autres; si, loin d'agir en ennemis, plutôt qu'en auxiliaires, ils se fussent jetés entre les deux partis, la paix qui eut été dans leurs cœurs, cette paix salutaire et bienfaisante fût entrée avec eux dans la ville de Nîmes, tandis que le sang, au contraire, n'a cessé de couler à grands flots, que depuis leur fatale arrivée et par leurs mains.
Grâces immortelles soient rendues aux géhé-, reuses milices de
Montpellier ; que la mémoire et la reconnais ance ne s'en effacent
jamais entre ces deux villes voisines et si longtemps émules. Nîmes'
doit principalement à leurcourage et à leur fermeté lè retour de l'ordre
et de la paix dans ses hiurs ; peut-être devra-t-elfe encore un plus
grand bienfait à leur justice : la manifestation de la vérité et le
redressement (1) de là calomnie. Il importait à ceuxqui ont triomphé par
la Ibrce
C'est ainsi que les vainqueurs ont travesti les malheureux événements de Nimes; leurs ennemis vaincus et terrassés sont aussi les ennemis de la patrie. EhI comment l'Assemblée nationale, comment la France entière, à une si grande distance, ne seraient-elles pas trompées, quand,sur les lieux mêmes, les autorités les plus imposantes, le corps éleciorâl du département ont été induits en erreur et entraîné dans ies comptes qu'il vous a rendus, à qualifier, au gré du club les 2 partis de rebelles ou de patriotes? Les motifs les plus purs, le zèe même et l'amour de la Constitution, ont pu contribuer à tromper le plus grand nombre et à lui faire adopter sans défiance les funestes préventions que d'ardents ennemis de la municipalité cherchaient à lui inspirer. '
Les délibérations des catholiques de Nimes, depuis improuvées par vos
décrets, mais qui ne l'étaient pas encore ; les cocardes blanches que
plusieurs légionnaires n'avaient jamais quittées depuis la formation de
la légion, parce qu'elles étaient, dans Nîmes, le signal du patriotisme,
depuis l'insurrection contre M. de Brienne ; les calomnies employées
pour publier ies torts des agresseurs du mois de mai ; les intelligences
supposées, entre les villes agitées ou menacées de mouvements
semblables, Montauban,Toulouse, Avignon ; ces intelligences toujours
supposées, jamais prouvées, jamais appuyées du moindre indice, et qui ne
subsistent peut-être qu'entre ceux mêmes qui en accusent leurs ennemis,
tout devenait, entre les mains perfides du parti, une arme dangereuse,
un moyen de séduction. Il s'en était aussi habilement qu'utilement servi
dans toute l'étendue du département, pour faire regarder le plus grand
nombre des habitants de Nîmes comme suspects dans leurs sentiments,
Enfin, la vérité ne peut être que d'un côté; il faut donc rejeter tontes les préventions, fouler aux pieds celles qui dérivent de ces noms d'ennemis de la Constitution, de fanatiques, d'aristocrates, devenus une sorte d'anathème, e celles de ses écrits aussi prématurés que mensongers par lesquels on cherche d'abord à s'emparer des esprits; ne pas s'arrêter à celles qui peuvent même inspirer les autorités les plus graves, mais qui peuvent avoir été trompées dansles premiers moments ; écouter, avec la même impartialité, celui qui se disant opprimé réclame, et celui qui le poursuit et l'accuse encore comme coupable ; peut-êtrj la vérité naîtra des faits qu'on ne peut contester, peut-être ils nous révéleront quelles sont les causes des malheurs que nous déplorons.
résumé général.
Il résulte des détails dans lesquels je suis entré, que pour la formation
de la nouvelle municipalité, chaque parti adonné des listes, et employé
les mêmes moyens pour l'emporter dans les élections (1).
Le parti le plus nombreux eut le tort de ne mettre qu'un seul protestant dans la municipalité, tandis que la justice exigeait qu'il y en eût au moins 5 ou 6.
Voilà ce qui a augmenté la division qui s'est accrue encore par la formation du club de NîmeSj dont les chefs furent les mêmes citoyens qui avaient concouru vainement pour les charges municipales.
Une partie de la légion s'attacha plus particulièrement au club, et quelques membres se permirent des actes d'insubordination.
L'autre partie resta soumise à la municipalité; mais des individus eurent aussi quelques reproches à se faire. De légères discussions furent assoupies, des rixes particulières plus graves produisirent quelques blessures qui n'eurent point heureusement de suites fâcheuses.
Quant à l'insurrection du deux mai, il est évident que les cocardes blanches n'en furent point le motif, mais seulement le prétexte apparent; il e-t évident que cette insurrection ne peut être attribuée au peuple, puisqu'il n'était pas armé, et que, pour se défendre contre des lâches qui le maltraitaient à coups de sabre, il fut obligé d'avoir recours aux pierres; il est évident que ce ne fut pas, comme on a cherché à le donner à entendre, les prêtres qui suscitèrent cette insurrection ; mais des légionnaires des compagnies nos 1 et 10, bien éloignées d'être du parti des prêtres; en effet le .sieur Barry, protestant et caporal de la compagnie n° 1, annonça, la veille, que le lendemain il y aufait un grand événement; et comment pouvait-il !e savoir, s'il n'eut existé un complot prémédité? Le même Barry a été forcé de convenir qu'il régalait gratuitement les soldats et sous-officiers du régiment de Guyenne; il est établi que d'autres membres des compagnies 1 et 10, après avoir fait boire quelques militaires qu'ils savaient incapables de commettre de sang-froid une mauvaise action (1), les excitèrent à maltraiter leurs concitoyens, et les secondèrent en frappant eux-mêmes du sabre ceux contre lesquels ils avaient quelque ressentiment particulier, ou qu'ils voulaient rendre victimes de leur fureur.
Les insultés ou blessés se trouvent tous catholiques, tandis que ceux qui sont désignés dans les déclarations, pour avoir été vus et entendus excitant les soldats de Guyenne à venger leurs camarades (auxquels on n'avait fait aucun mal) ainsi que les femmes qui donnaient de l'argent aux soldats, et criaient : A bas les capelans! courage, nous sommes vainqueurs, tombez sur ces ca-tholicas, sont non-catholiques.
Des légionnaires insubordonnés, ayant commencé l'émeute, frappèrent â
coups de sabre des citoyens désarmés, et il est évident que, sans le
dévouement du maire et des officiers municipaux gui ont exposé leur vie
pour conserver leurs jours, ils auraient été, ainsi que les soldats de
Guyenne, qu'ils avaient attire dans la querelle, les victimes de la
juste fureur du peuple. Ehl quelles suites fatales pouvaient en
résulter! au
Le lundi 3 mai, on envoya des exprès pour prévenir les habitants de Vers, Vézenobres, Bou-coiran, etc., de se tenir prêts à marcher au premier signal.
Tout était calme dans la ville, lorsque le nommé Larnac, protestant, de
la compagnie n° 10, commanda 200 cartouches meurtrières dont il avait
besoin, dit-il, pour 4 heures du soir; il annonça « que ces cartouches
perceraient plus « d'un ventre, et qu'il était occupé à fondre des «
balles ». Ges menaces, ayant été divulguées, excitèrent un grand trouble
qui fut apaisé sur-le-champ par le maire et les officiers municipaux;
mais on eut grand soin de le faire recommencer, en faisant tirer par un
non-catholique deux coups de pistolet sur un groupe où étaient 2
officiers municipaux; ce fait se trouve même dans l'information ; les
citoyens, indignés de cet acte de perfidie, ne cédèrent qu'avec beaucoup
de peine anx instances réitérées des magistrats, et après avoir jeté des
pierres aux assaillants ; d'un autre côté, un catholique blessa d'un
coup de feu au bras un grenadier du régiment de Guyenne, qui mourut 7
jours après. Cependant, il était impossible de publier à cette époque la
loi martiale, et de la faire appuyer par une force suffisante, puisque
des soldats de Guyenne et les légionnaires étaient ceux contre lesquels
il fallait la publier ; \l était très dangereux de placer les uns
vis-à-vis des autres des militaires aussi animés et aussi opposés entre
eux ; le maire étant parvenu à calmer les esprits et à dissiper les
préventions des sous-officiers du régiment de Guyenne, certain alors
d'avoir une force capable de faire exécuter et respecter la loi
martiale, la fit publier le mardi matin, poui arrêter certains
attroupements ; la ville n'était donc pas tranquille, comme M. le
rapporteur l'a avancé sans preuves ; il fut envoyé des exprès dans la
Gardonnenque pour avertir de s'armer et d'être en état (1) de partir au
premier signal; l'indiscrétion d'un non-catholique (qui dit en plein
café que : « malgré que la loi martiale fût publiée, « la paix n'était
pas pour cela rétablie, et que, « dans moins de 24 heures, on verrait
que ce « qu'on avait fait n'était qu'une petite répéti-, « tion »),
donna l'alarme à plusieurs citoyens, mais la réconciliation s'étant
faite par les soins du maire, entre les soldats de Guyenne et les
citoyens attaqués, et la ville ayant été illuminée, en réjouissance, on
en donna promptement avis aux sieurs Encontre et Saint-Germain,
ministres protestants ; ceux-ci et deux de leurs coofrères
Les as^emblees pnmaires se so t passees fa s (roubles; sur 43 Slecieurs, 12 i rotestants ont eto nommfes; le maire a ir.viie 1* s euros et les ini- nistres protectants Jl prober l'union et la Crater- nite. L'all6gresse rGgnait dans la ville; il ne res- tait plus aucun vestige de division parmi les citoyens, le 11 mai, 6poqae oil le maire de Nlraes est parti pour se rendte a l'Aeserablce natio- nal f3).
LfS trouble-", qui ont recommence a Kiraes le 13 juin, et qui ont continue les jours suivants, offrent-ilsquelques ireuvesd'un eomplot odieux trarnS par les compagnies de cultivatewre, et leur? chefs pour se verger et pour surprendre et immoler k leur haine les autres compagniea de la legion, les dragons et les membres du club it OD^rer nne eontre-revolution?
La menicipalitG a-t-eile paiticipe a ce cora- plot? Ou nVt-elle pas fait ce qui etait de son devoir pour le prevenir et le dtfcoacerter?
Voilft, Messieurs, dans out» sa force, I'accu- sation; on vous a pr^sente le combat du 13 juin, comme le corps du d&it, comme Texplosion d'nn pre ten u projet de contrc-revolution qui se tia- mail depuis longiemps a Nimes, et dont I'exocu- tion avait fix6e au moment oil le corps elec- toral v etant rasscmbie, on pourrait, en l'immolant, immoler & la foiB les plus z6l6s patriotes de la ville et du department t'ntier. Voili sans doute un projet bien abominable, mais ou en toot les preuves, et que rlpondent les faits? Ne rejetlent- ils pas 8i.r les accusatours !a haine dont ils vou- dTaient charter les accuses?
Les faits incontestables repondent que le li- m-^nche 13 juin, jour
auquel le combat s'en- gng. a, eilt 6te de la part des cullivateurs et
de leu re chefs, le jour le plus mal choisi pour une attaque pr6m£dilee,
puisque, ce jour-la, les com- pagnies alfidees au club et les dragons
elaient seuls ?n armes et de service, puisque les jours pr6c£dents les
compagnies des cullivateurs avaient ete successive men t de garde auprs
de l'assemblee 61crtorale jusqu'au sametli, et que le p'us grand ordre
avait regne; puisque le di- manche 13, les cullivateurs, ai contraire,
etaient sans armes, qu'ils u'y coururent qu'aprts le com- bat commence,
que ceux qui y coururent n'e- taient qu'en trfcs petit nombre, que leurs
capi- tainesqui lee avaient en l£p6t, tie se trouvant pas chez eux, on
escalaoa les fenfires, on enfonga
Mais, d'un autre côté, la municipalité qu'on a osé inculper,.était bien loin de favoriser un complot qui n'a point existé,,dont elle ne pouvait qu'être la victime, et tout ce qu'on accumule contre elle d'accusations et de calomnies à ce sujet, ne peut inspirer que l'indignation.
Ouoi 1 le forfait le plus horrible, celui Savoir fomenté des divisions intestines, d'avoir armé les citoyen» les uns contre les autres, d'avoir dirigé les corps des ennemis du bien public* contre tous les bons patriotes, et contre le peuple entier du département, dans la personnja des électeurs qu'il s'était choisi, un tel forfait, s'il était imputé aux scélérats les plus reconnus, devrait être appuyé sur les preuves l'es plus solides, et pour en inculper un corps de magistrats, jusqu'alors irréprochable, récemment honoré du choix d'un grand peuple, on s'etaye & peine des plus misérables indices, on se permet les plus grandes inculpations; on annonce un* complot.formé; et ceux que l'on en accuse, loin d'avoir préparé les moyens de réussir, ont au contraire choisi le moment où toutes les chances, toutes les probabilités sont accumulées contre eux.
Ah I s'il y a eu de coupables et perfides complots pour préparer cet horrible massacre, ;ne sont-ils pas du côté de ceux qu'un grand intérêt, réuni à toutes les probabilités de lieux, de temps, de circonstances, semble seul indique]!! ; de ceux qui, n'étant pas les plus forts dans la ville de Nîmes et voulant y dominer, avaient besoin de faire naître et de saisir les occasions d'y appeler de nombreux et puissants secours étrangers, capables de leur donner en un instant une supériorité telle, qtu'en un instant aussi ils pussent écraser leurs ennemis pour toujours ; de ceux qui avaient répandu avec affectation,: daus tous les pays circonVoisins, attachés aux mêmes opinions religieuses , que la municipalité et les citoyens; catholiques de Nimes étaient opposés à. la Constitution, et qui ne cessaient de faire courir à cèt effet des bruits de massacres, tentéa ou exécutés; qui, tenant leurs amis dans ces craintes perpétuelles dont ils leur faisaient redouter ks suites les plus terribles* les avaient avertis de se pourvoir d'armes (1) et de se tenir prêts,, au. premier signal, à marcher vers Nîmes pour y venir venger, sur la municipalité et sur le peuple nombreux qui lui était attaché, le crime dont on les supposait prêts à se souiller contre les amis Sa la Constitution !
S'il y a eu cle perfides complets, ne sont-ils pas du côté de ceux qui, à l'époque des 2 et 3 mai, auraient déjà attiré les mêmes malheurs sur la. ville de Nîmes si la vigilance du maire et des officiers municipaux n'eût pronaçtenient apaisé ce mouvement et prévenu l'arrivée de ces milices étrangères,, vers lesquelles des exprès^ avaient déjà été envoyés pour solliciter leè secours de-venus depuis si funestes à Tèpoqjue du, 13 juin?
Ne sont-ils pas du côté de ceux, qui, dans ifé-meute des premiers jours
de mai , ayant été les premiers agresseurs, comme la preuve eu est
acquise, doivent encore être regiar^œs comme tels dans la seconde, parce
qu'hfeélaientarmés et de service au moment où lïémeute commença ; parue
S'il y a eu de perfides complots en juin, ne sont-ils pas du côté de ceux qui, d'une rixe qui n'eut été que passagère si en soldats citoyens et courageux ils eussent su braver quelques dangers pour ménager la vie du peuple, pour le contenir et Tapaiser, au lieu dé nrriter, en ont fait un état déclaré de guerre civile par ces décharges imprudentes et criminelles, qui blessèrent et tuèrent quelques citoyens» et par le refus formel d'obéir aux instances des officiers municipaux; dès: que ceux-ci furent arrivés sur le lieu de l'émeute, ils les conjurèrent en vain dè rester renfermés dans la cour de l'évêché, ce qui eût terminé le combat et satisfait ies citoyens!
Ne sont-ils pas du côté de ceux qui, sur la seule réquisition séditieuse de quelques dragons ou volontaires de garde à l'hôtel de ville, ont contraint, à force de menaces, de violences» de bourrades et de coups. Un officier municipal, ['abbé de Belmont, qui s'y trouvait seul» et dont ils auraient dû recevoir les ordres, loin de lui en donner et de ie maltraiter, l'ont contraint, dis-je, à publier malgré lui la loi martiale, à déployer et porter lui-même le drapeau rouge dans les rues, lui disant avec insulte et menace : qu'il était assez grand pour le porter bien haut !
S'il y a eu de perfides complots, ne sont-ils pas ducôtéde ceux qtii dans la cour de l'évêché se sont postés à des menaces et aux plUs grandes violences envers le sieur l'errand, autre officier municipal qu'ils ont traîné de rues en rues, au milieu des plus cruels traitements et des plus grands dangers, au lieu d'obéir à ses ordres et à ses réquisitions pacifiques!
Ne sont-ils pas du côté de ceux qui, dès le commencement de l'émeute, partout où ils ont trouvé des officiers municipaux,: ont témoigné contre eux le même esprit d'insurrection, disons mieux, de révolte et de fureur, si énergiquement exprimé par ce mot cruel et décisif,, pour tout homme impartial, d'un volontairede garde à l'hôtel de Ville qui, voyant entrer le sieur Aigon, officier municipal, déjà blessé et pouvant à peine se traîner» criait à s@s camarades : En voici un ; qu'il ne nous échappe pas; et le sieur Aigon n'était cependant, ne pouvait être à leurs yeux un | chef de> parti, un personnage redoutable, c'était un .marchand! de bois connu et chéri de. ses con-! citoyens, par la douceur et l'honnêteté de ses mœurs 1
Né .sont-ils pas du côté de ceux qui se* sont permis des violences contre la personne des officiers municipaux, qu'ils faisaient marcher à leur tête plutôt comme lehrs. prisonniers que comme leurs supérieurs l
S'il y a eu des ^complots, ne sont-ils pas du côjte de ceux»qui, fidèles au plan concerté de disperser et de poursuivre toute la municipalité, de manière à empêcher ses membres de pouvoir jamais se réunir à la maison commune en assez grand nombre pour prendre aucune délibération et pourvoir efficacement au retour de l'ordre, sont restes- les sèuïs maîtres de ce poste important, seuls y donnaient les ordres, seuls y commandaient despotiquement; de ceux qui, non contents d'avoir excédé de coups plusieurs officiers municipaux, les ont arrachés de leurs bancs, sur lesquels ils ont massacré un infortuné presque à leurs yeux T
Ne sont-ils pas du côté de ceux qui n'ont cessé de menacer et d'injurier, de laisser injurier et menacer toute la nuit MM. Gas et Gaillard! Ces deux officiers municipaux, au premier bruit de l'émeute, n'avaient écouté que l'amour de leur devoir et leur courage ; ils avaient appris à leur campagne les nouveaux troubles survenus dans la ville; ils arrivèrent à 10 heures du soir, dans la maison commune, d'où les menaces et les discours les plus injurieux ne purent les faire sortir mais où leur autorité fut méconnue, outragée par les agents mêmes que la loi chargeait expressément de la faire respecter, ce qui rendit leur présence aussi humiliante pour eux qu'inutile à la chose publique.
' S'il y a eu des complots, ne sont-ils pas du côté de ceux qui, fidèles au même principe de désobéissance, ont refusé de soutenir ét d'appuyer l'invitation prudente et paternelle de 6 officiers municipaux réunis enfin à l'hôtel de ville, le lundi matin, malgré tant de peines et de dangers; de concert avec les commissaires du roi et de l'assemblée électorale, ces officiers municipaux prièrent les chefs de s gardes nation aies étrangères qui arrivaient de toutes parts à Nîmes, sans réquisition légale, de demeurer aux avenues de la ville et de prévenir ainsi les troubles et les désordres que devaient nécessairement y causer leur entrée l
Ahl combien sont coupables ceux qui se sont empressés, au contraire, de les y introduire, de les guider, de diriger leurs sanguinaires opérations et de désigner les nombreuses victimes dévouées à la mort et les maisons destinées au pillage ! Forfaiture évidente contre cet article si sage de la Constitution qui défend aux milices nationales, aux milices des différentes municipalités d'entrer sur le territoire les unes des autres, sans réquisition et, à plus forte raison, contre la volonté de la municipalité du lieu; forfaiture qui est moins excusable encore, d'après l'exemple de la garde nationale de Bordeaux qui avait informé l'Assemblée nationale de sa marche, et a attendu ses ordres et ceux du roi.
S'il y a des coupables, ne sont-ils pas du côté de ceux qui, ayant abandonné la veille jusqu'à deux fois le drapeau rouge et les magistrats qu'ils forçaient à le déployer et qu'ils ont osé accuser de crainte et de pusillanimité, n'ont senti renaître leur courage queloreque, dès les 4 heures du matin et successivement dans la matinée et la journée du lundi, il fût arrivé, avec tme rapidité incroyable, une telle quantité de milices étrangères que l'imagiuation se refuse à le croire et tellement dévouées à leur parti et à leur haine qu'ils n'eurent plus, avec une telle supériorité de forces, qu'à marquer leurs victimes I
S'il y a eu des complots, ils sont du côté de Ceux qui, peu contents de se servir d'une force anticonstitutionnelle si supérieure et si redoutable pour contenir leurs ennemis et les prétendus ennemis de la patrie, s'assurer de leurs personnes et les livrer à la loi s'ils étaient coupables, ne s'en sont servis, au contraire, que pour les livrer impitoyablement, eux et leurs possessions, aux proscriptions, au pillage, à la mortl... La mort... qui, pendant 3 jours, était encore le partage de ceux qui n'opposaient aucune résistance, partout où on les rencontrait.
La mort... lit quelle mort encore! La mort la plus horriblè, la plus affreuse, la plupart des malheureux qui ont perdu la vie ont souffert les plus cruels supplices. On leur coupait les poignets, les pieds, le nez, les oreilles ; on leur ou-
vrait le ventre et on leur arrachait les entrailles pour leur en battre le visage; le nommé Violet est accroché par la gorge au crochet de fer auquel on appendait la viande; on le suspend en l'air, on le laisse pendant une heure dans cet état affreuxî et ce n'est que lorsque ses cris déchirants fatiguent et importunent ses infâmes bourreaux, qu'ils tirent sur lui plusieurs coups de fusil et le tuent. Les nommés Tribes, Gas, Lerouge... Mais je, m'arrête... Non ; je ne vous retracerai pas tant d'atroces circonstances; les détails affreux du double assassinat de MM. Maigre, également chers, également regrettés des deux partis, ces détails déchirants, exposés exclusivement avec l'art le plus touchant par M. le rapporteur, ont excité dans toutes les âmes la plus juste et la plus profonde sensibilité; que serait-ce si je vous retraçais une multitude de morts (1) cent fois plus terrible encore, où la haine a épuisé tous les rafinements de la cruauté et de la perfidie. Ahl sans doute, je ne m'exposerai pas au reproche d'une sanglante récrimination; mais non..., je n'imiterai pas l'exemple de M. le rapporteur; non..., je ne flétrirai pas vos coeurs... Non.., je ne donnerai pas des leçons de barbarie au bon peuple qui nous écoute.
Je ne me permettrai qu'une réflexion sur les atrocités commises en iuin.
La population de Nîmes est de 53,000 âmes, 40,000 catholiques, 13,000 protestants.
Plus de 300 citoyens ont péri; vingt et un seulement sont protestants, dont 7 ont été assassinés, hors des murs, par des étrangers cruellement égarés.
Le reste des morts est catholique ; toutes les maisons pillées, les propriétés dévastées, au nombre de plus de 100, appartiennent à des catholiques et les dégâts se portent à plus 760,000 livres, et c'est sur les catholiques (appelés contre-révolutionnaires) qu'on ose rejeter le projet d'un complot, eux qui, dominant naturellement dans Nîmes par une population presque quadruple, n'avaient pas besoin de crimes pour y être les plus forts, tandis que le parti opposé ne pouvait obtenir cette domination qu'en invoquant des secours étrangers, dont l'irruption subite et préparée d'avance a causé les malheurs affreux dont nous aurons longtemps à gémir.
S'il y a eu des complots, ne sont-ils pas du côté de ceux qui, après avoir admis tant de milices étrangères et affidées, voulaient, sous de vains prétextes qui leur avaient réussi pour la légion de Beaucaire, empêcher l'arrivée de la généreuse milice de Montpellier, la seule qui soit venue avec des intentions pures èt amicales, avec le désir de rétablir l'ordre, la seule enfin dont l'impartiale et fière constance ait fait cesser le carnage et les dévastations I
Ne sont-ils pas enfin du côté de ceux qui, forcés de mettre un terme à
tant d'horribles excès, n'en ont mis aucun à l'usage ou plutôt à l'abus
de leur victoire, qui en recueillent, sans modération comme sans pudeur,
les détestables fruits que s'en était promis leur ambition, qui régnent
en tyrans armés sur la multitude du peuple désarmé; qui, réunissant dans
leurs mains toutes les autorités civiles, administratives et militaires,
ont détruit dans leur malheureuse patrie jusqu'à l'ombre même de la
liberté et de l'égalité; qui, après avoir réduit le nombre des
compagnies de la légion à 24, ont fait, sur 24 capitaines, nom-
En effet, on arrêtait les citoyens sans aucune forme légale; on les entassait dans les prisons de l'hôtel de ville; on en renfermait jusqu'à 40 dans une chambre étroite; on ne leur donnait ni lit, ni chaise pour se reposer, pas même un peu de paille; des vieillards de 60 ans, un ecclésiastique, un chanoine, ont été enterrés vivants dans ce séjour empesté; l'un de ces infortunés, suffoqué par les exhalaisons méphitiques, tombe; vainement ses compagnons demandent un verre d'eau pour le rappeler à la vie ; on le refuse ; il expire faute de ce faible secours. On laisse pendant 4 jours consécutifs son cadavre infect au milieu des 39 autres prisonniers; tel le tyran Mezence faisait attacher un cadavre à ses malheureuses victimes, atin qu'elles expirassent mille fois. Enfin, après 14 jours, on a rendu la liberté aux uns, et on a mis les autres dans les prisons du palais, où 14 gémissent encore depuis 8 mois, sans qu'ils aient pu se faire admettre à leurs justificatifs. Postérieurement les sieurs Gensanne, Talagran, Yiala, Fages, Huby, les demoiselles Rose, Rouvierre, et une infinité d'autres citoyens catholiques, ont été insultés, menacés et frappés (1), et quand ils ont porté leur plainte, on a refusé constamment de les entendre, et on leur a dit qu'il ne fallait pas faire attention à ces misères. Le 17 août, le sieur Froment l'aîné, contre lequel il n'y a pas eu moyen de lancer aucun décret, revient chez lui, après qu'on lui a assuré qu'il peut le faire, sans danger. Bientôt sa maison est investie; 200 hommes disent hautement qu'il faut le pendre; on le fait évader par-dessus les toits; un autre frère et ses gendres revenaient de la foire d'Uzès : on a poussé les vexations jusqu'au point d'arrêter les marchandises de ces nonnêtes négociants, sous prétexte que M. d'Artois était caché dans leurs malles.
On a arrêté un convoi funèbre en disant que la bierre renfermait des arme3 et de la poudre.
Non seulement les officiers municipaux ont été excédés de coups, poursuivis avec le fer et le feu, pendant les jours de massacre, on a fait contre eux, postérieurement, les motions les plus incendiaires ; un membre du club y disait hautement : que ce ne serait pas assez de pendre les officiers municipaux, qu'il fallait les faire expirer sur une roue de charrette.
On a intercepté les lettres qui leur étaient adressées, et le secret (2) en a été violé.
Un valet de ville, chargé de porter à 4 lieues des dépêches retardées de la municipalité, a été arrêté par la garde nationale ; et c'est ainsi que l'on abuse de la force armée.
Pour mettre le comble à la ruine des habitants de Nîmes, on veut leur
faire payer leur propre malheur; on veut imposer sur eux le
remboursement des pillages et des dévastations qu'ils ont souffert, en
leur faisant supporter les dépenses occasionnées par le grand nombre
d'étrangers
Si les officiers municipaux représentent qu'une pareille surcharge est au-dessus des forces de la commune, le directoire du département, dérogeant le pouvoir judiciaire, les condamue personnellement au payement de ces frais exorbitants ; et en conséquence les meubles de M. Ferrand De Missols,officier municipal, sont saisis et déplacés, au grand scandde des citoyens; on en indique même la vente; et cependant un tel abus d'autorité n'a été ni dénoncé (1) par M. le rapporteur ni, par conséquent, improuvé par l'Assemblée.
Des volontaires armés se permettent des proscriptions, altèrent le repos des familles, imposent l'exil aux uns, menacent chaque jour les autres et troublent dans ses fonctions le sieur Vimont, conseil et défenseur bienfaisant des accusés, qu'ils forcent à fuir sous peine de perdre la vie, dans le moment où sa présence est aussi utile qu'indispensable pour ses infortunés clients.
Il est un dernier fait essentiel qu'aucune partie ne conteste; sur 18 compagnies à pouf rouge, des volontaires de trois compagnies seulement se sont réfugiés dans la cour et dans la maison du sieur Froment; les 15 autres compagnies n'ont pris aucune part aux troubles : ce fait est constaté parle rapport, et prouve invinciblement qu'il n'existait delà part des victimes aucun complot. Cette vérité se trouve confirmée parla proclamation faite, au nom du comité militaire électoral du département du Gard, le 6 juin ; elle annonce que les troubles qui ont eu lieu ont été occasionnés par des querelles particulières entre des compagnies de la légion.
Cependant les membres de ces quinze compagnies n'ont pas été requis de prendre le3 armes par les chefs de la légion; cependant ils ont été enveloppésdanslaproscriptionetungrand nombre en a été la victime. Cependant ces quinze compagnies ont été désarmées, ensuite supprimées, et leurs armes ont été distribuées à des étrangers. Cependant il n'y a pas aujourd'hui 250 catholiques armés dans la garde nationale de Nîmes, composée de 1400 volontaires. Cependant le parti le moins nombreux a toute la force et toute l'autorité, tandis que les trois quarts des citoyens sont soumis au plus dur esclavage.
Il est donc nécessaire de rapprocher les esprits, de procéder à une nouvelle formation de la milice, et d'y admettre (2) tous les citoyens actifs, conformément aux décrets. Il est nécessaire que tous jouissent également de la sûreté et de la liberté, sous la protection des lois.
C'est sans doute dans la vue de ramener la paix que le comité propose une amnistie; mais, si elle n'est que partielle, ce n'est plus une amnistie, c'est grâce et impunité. L'impartialité "exige que la procédure soit continuée indifféremment contre tous, ou que nul ne soit excepté; en un mot, jugement pour tous ou amnistie pour tous, telle est la suprême justice.
En exceptant ceux qui s'étaient réfugiés dans la tour et dans la maison
du sieur Froment, c'est excepter tous ceux d'un parti, puisqu'il est
convenu que les autres n'ont pris aucune part à l'action, et sont
exempts de tout reproche comme de tout soupçon ; c'est faire jouir
exclusivement de l'amnistie les vainqueurs, que l'on convient
C'est une grande faute, sans doute, d'avoir enlevé le drapeau rouge,, et eeux-Ià sont coupables gui ont violé le respect dû à la loi et au signe qui la représente; maie siton considère que la loi martiale n'avait pu être publiée conformément aux décrets, que ceux qui ont enlevé ce signe redoutable. étaient témoin s des violences exercées contre l'officier municipal qui la proclamait, et que l'on accablait de coups au point de lul faire vomir le sang; alors cette insurrection ne paraîtra plus un crime, mais un excès de compassion de là part de ceux qu'on veut exclure de l'amnistie. D'ailleurs, ceux-là ne sont-ils pas aussi (1) coupables qui avaient empêchés ie»officiers municipaux de se rassembler pour délibérer librement sur la nécessité de proclamer la loi martiale ; qui avaient fait de l'acte le, plus terrible de la puissance civile et administrative f objet d'une délibération purement militaire, et qui, par les viélences qu'ils, exerçaient contre l'officier municipal, étaient au signe de l'a loi ce caractère imposant, propre à faire la plus profonde impression sur l'esprit des citoyens.
D'aprèslesdétailsimmenses (2)mais nécessaires dans lesquels je suis entré, vous pressentez, Messieurs, quelles devraient être 'nos conclusions, sans doute les mêmes que je n'ai cessé de vous présenter tant en mon nom qu'en celui de mes collègues : continuation d'information contre les coupables, sans exception; élargissement provisoire des prisonniers, à la charge de donner caution; renvoi de l'instruction au tribunal de Montpellier.
Mais je sens personnellement que tout doit céder à la nécessité impérieuse des circonstances ; les nouveaux troubles arrivés dans le bas Languevloc, pouvant avoir les suites les plus fatales; le danger imminent que la tranquillité n'y soit altérée sans retour; les détails affligeants qui ont été mis ce matin sous vos yeux ; voire décret de ce jour pour prier le roi d'envoyer des commissaires pacificateurs à Uzès, tout méfait une loi de changer aujourd'hui mes conclusions. Je sais qu'un grand, nombre de victimes ne cesse de réclamer une justice éclatante, je saisine tantde sang innocent, inhumainement répandu, tant de dévastations et de pillages commis à main armée, appellent la vengeance de la loi sur 'leurs barbares auteurs; je sais qu'une troisième adresse du sieur Folacher, prisonnier depuis 6 mois, sollicite, et un tribunal où l'on daigne enfin lui prêter son premier interrogatoire, et le jugement des brigands et des assassins.
Comme maire de Nimes, j'ai dû soutenir la cause des catholiques seuls
opprimés, seuls accusés, seuls poursuivis^ seuls décrétés, seulsdétenus
dans les fers, tandis que les assassins, connus^ tirent gloire du nombre
de leurs crimes, et fiers de l'impunité se permettent chaque jour de
nouveaux excès ; j'ai dû manifester hautement les vices d'une
information inique et partiale, dans
Oui, Messieurs, il est peut-être un moyen de rendre la paix à la ville de
Nîmes, d'éteindre les haines et de rapprocher les esprits et les cœurs ;
et ce moyen se trouve dans l'ensemble des clauses suivantes qu'il est
essentiel de ne pas désunir-, car toutes sont nécessaires pour réparer
quelques torts, ou prévenir de nouvelles causes de division. Il faut que
tout abus de la force armée soit sévèrement puni; il faut qu'une justice
exacte soit rendue dorénavant à chacun, sans distinction même ùes
sentimenls politiques, sans aucun égard à ces qualifications usurpées de
patriote» et d'antipatriotes ; il faut que le roi soit prié de prononcer
une amnistie générale., relativement aux excès de tous les genres, aux
abus d'autorité commis dans la ville ae Nîmes jusqu'à ce jeur, et de
défendre à l'accusateur public de continuer les informations commencées,
qui seront regardées comme non avenues. Je demande, au nom de mes
collègues et au mien, que la conduite des officiers municipaux ne soit
point comprise dans eette amnistie ; eux seuls doivent en être exceptés
; les commissaires, choisie par le roi, doivent être chargés de prendre
les renseignements les plus exacts sur la conduite individuelle de
chaque membre de la municipalité, avant, pendant et depuis les troubles
; et cependant, pour que la chose publique ne soit pas en souffrance, il
faut accepter, dès ee moment, les démissions si souvent réitérées (1)
des officiers municipaux et -des notables et prier Sa Majesté de faire
procéder sans retard à une nouvelle élection de la municipalité et du
conseil général de la commune; il faut recommander aux commissaires de
prendre, le plus têt possible, connais-
Il est encore une disposition bien ira portante;, c'est d'ordonner que toutes les armes de lagarde nationale de Nînrrs, même celles enlevées aux 15 compagnies désarmées, qui sont à l'abri de tout Soupçon,. seront habituellement déposées à la maison commune, et sans s'arrêter aux chan-
fements survenus dans la garde nationale de îmes, pendant et depuis les troubles, c'est de faire procéder à une nouvelle formation ; les citoyens actifs qui se sont lait inscrire et ceux qui depuis le commencement de la Révolutioa ont fait le service de la garde nationale, doivent être indifféremment admis. Vous ordonnerez encore la restitution des meubles de M. Ferrai d ûe Mis-sols, saisis et déplacés, en vertu d'une ordonnance inconstitutionnelle du directoire du département ; enfin vous inviterez les citoyens de filmes à vivre en frères, à oublier leurs torts respectifs, et à ne jamais perdre de vue que,, sans l'union et la fraternité,, il ne peut y avoir de prospérité publique ni particulière.
Voila, Messieurs f le dernier acte que j'ai dû faire en ma qu'alité de maire de Nîmes. Ces nouvelles conclusions qui me sont personnelles sont uniquement dictées par l'amour de la paix et par la nécessité urgente de prévenir les plus grands malheurs. Satisfait d'avoir démontré les calomnies de mes dénonciateurs, et la surprise faite à la religion de l'Assemblée, quand elle m'a mandé à la barre; jialoux de ne séparer dans aucun temps mes intérêts de ceux de mes collègues, empressé de suivre leur exemple, convaincu que la présence du chef de la commune de Nîmes est nécessaire dans ces circonstances critiques; retenu dans l'Assemblée comme représentant de la nation, et n'ayant point de suppléant je remets eutre ses mains ma démission delà place de maire, et, dès ce moment, je m'interdis toutes fonctions.
Telles sont les vérités que j'ai dû mettre bobs vos ye&x. J'ose vous
supplier de ies peser dams votre sagesse, car votre justice frapperait
un trop grand nombre de coupables (1); mais quel
(La suite de k discussion est renvoyée à la séance de demain soir.)
lève la séance à dix heures et demiie.
PRÉSIDENCE DE M. DUPORT.Séance du
La séance est ouverte à nea'f heures et demie du matin.
, au nom du comité d'aliénation, présente un projet de décret relatif au calcul des annuités pour accélérer la vente des domaines nationaux.
Plusieurs membre» proposent quelques amen-, dements aux articles 3, 4 et 6.
rapporteur, adepte ces amendements.
Le projet de décret est adopté en ces termes :
« L'Assemblée, désirant faire cesser les difficultés que plusieurs acquéreurs ont élevées au sujet du calcul des annuités et accélérer de plus en plus la vente des biens nationaux, ne laissant aucun doute sur les questions que cette importante opération fait naître dans plusieurs circonstances diverses, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Les acquéreurs tes domaines nationaux auront la faculté, au lieu des
annuités qu'ils sont
Art. 2.
« La première obligation comprendra le total des intérêts de la somme entière qui restera due après le premier payement fait lors de l'adjudication; la seconde obligation comprendra les intérêts de la somme qui restera due, déduction faite du capital de la première obligation, et ainsi successivement, la masse des intérêts compris dans chaque obligation diminuant dans la même proportion que la masse du capital qui reste dû.
Art. 3.
« Lesdits acquéreurs, usant de la faculté qui leur est donnée par l'artcle 5 de la loi du 17 novembre 1790, d'accélérer les payements des sommes dont ils seront débiteurs, pourront faire ces payements anticipés sur telles de leurs obligations ou annuités qu'ils indiqueront, même partiellement, sur plusieurs desdites obligations ou annuités, et à, telles époques qu'ils jugeront à
firopos, sous la seule condition de payer, avec es capitaux dont ils se libéreront, les intérêts desdits capitaux, depuis le jour où ils sont dus jusqu'au jour où le payement sera effectué, et sous la déduction néanmoins de l'escompte sur le pied de 5 0/0, dont il sera fait remise aux acquéreurs à raison de l'avance du payement.
Art. 4.
« Au moment où les acquéreurs effectueront le premier payement du prix des biens nationaux qui leur auront été adjugés, les directoires de district dans lesquels les titres auront été déposés, leur remettront les baux courants et le3 cueilloirs particuliers des biens qu'ils auront acquis; ils en donneront décharge au pied d'un état sommaire, et se soumettront à les représenter au district toutes les fois qu'ils en seront requis. A l'égard des autres titres particuliers aux biens vendus et des titres communs à des biens adjugés à différents acquéreurs, ils resteront au district, et il en sera remis aux acquéreurs seulement un état sommaire, afin qu'ils puissent en demander soit la communication sans déplacer, soit des extraits dans h s cas où ils leur seraient nécessaires, même être aidés des originaux dans le cas où il serait besoin de les produire.
Art. 5.
« Lorsque les acquéreurs de domaines nationaux, sur lesquels les municipalités auront droit au bénéfice du seizième, à cause de l'acquisition qu'elles en auront faite, ne donneront en payement d'autre valeur que des reconnaissances de finances d'offices, de fonds d'avance, etc., il sera délivré aux municipalités, par le directoire du district, un bordereau de la somme à laquelle se porte leur bénéfice sur les payements qui auront été faits. Les municipalités adresseront ce bordereau à l'administrateur de la caisse de l'extraordinaire, qui leur sera rembourser par ladite caisse le montant du seizième auquel elles ont droit.
Art. 6.
« Les loyers de domaines nationaux et les rentes qui en dépendent seront acquis aux adjudicataires du jour de l'adjudication; les fruits pendants par les racines au jour de l'adjudication, et les fermages qui les représentent leur seront acquis pour la totalité ; mais ils ne pourront les percevoir qu'après leur entrée en possession et en suite du premier payement qu'ils doivent faire aux termes des décrets de l'Assemblée. Il sera fait mention de celte clause dans toutes les affiches apposées pour parvenir à la vente des domaines nationaux.
Art. 7.
« Les dispositions du présent décret seront communes aux acquéreurs auxquels il a été fait jusqu'à ce jour des adjudications de domaines nationaux. »
, au nom du comité d'emplacement. Messieurs, c'est avec une sorte de peine que votre comité vient vous proposer de déclarer nulle l'adjudication faite en faveur du département du Loir-et-Cher, parce qu'il est évident qu'il a eu intention de se conformer à vos décrets, tout en y contrevenant, et qu'il s'est tout uniment trompé; mais on ne pactise pas avec la loi, et d'ailleurs l'acquisition paraît un peu onéreuse aux administrés.
Non que ce décret puisse affaiblir la considération publique, qui doit environner les administrateurs, qui est leur premier besoin, et que ceux du Loir-et-Cher méritent si bien. Le directeur s'est trompé, et l'erreur est comme un impôt que le talent et la vertu peuvent payer, sans cesser d'être le talent et la vertu.
On présenta en décembre dernier au comité et on demandait un décret d'aliénation. Le comité répondit : Ce n'est pas là la marche; l'Assemblée ne vend pas aux départements et aux districts; elle ne fait que réaliser l'adjudication.
L'unité de principe exige que l'Assemblée prononce, comme elle l'a fait, relativement au département de la Corrèze. L'autorisation est de règle étroite et rien ne peut la suppléer. Ainsi l'a voulu la loi; ainsi elle a dû le vouloir pour ne jamais déranger la hiérarchie des pouvoirs.
Si vous mainteniez l'adjudication qu'on vous propose de confirmer, il y aurait un département qui serait dispensé par vous d'obéir à vos décrets ; il en coûterait 50,000 livres aux administrés pour l'établissement des administrateurs : ce n'est pas là la règle de l'économie.
Votre comité croit devoir exhorter fort le directoire à se renfermer dans des mesures moins vastes, et il est par avance dans la conviction que les administrateurs se rendront, avec un juste empressement, au vœu de votre décret du 7 de ce mois, et qu'ils marcheront imperturbablement sur la ligne qu'il leur trace.
On demandait à Démosthène : Quelle est la première qualité de l'orateur? Il répondit : L'action.
Quelle doit être la première qualité des administrateurs? la première, l'économie; la seconde, l'économie; la troisième, encore l'économie.
L'appartement de la liberté est une chambre, et son palais une maison : enfin, le vrai luxe des administrateurs, cVst le bonheur des administrés.
Voici le projet de décret que nous vous proposons :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d'emplacement, déclare nulle l'adjudication faite au directoire du département de Loir-et-Cher, de la maison conventuelle de Bourg-Moyen, le 26 janvier dernier, moyennant la somme de 40,000 livres, sauf aux administrateurs à se pourvoir en la manière et d'après les formes prescrites par les décrets des 16 octobre dernier et 7 février présent mois. » (Ge décret est adopté.)
, au nom du comité ecclésiastique. Messieurs, vous avez chargé votre comité ecclésiastique de vous présenter un projet de décret sur ce qui vous a été dénoncé concernant la distribution des vicariats dans les églises paroissiales et succursales.
Vous avez appris en effet qu'au lieu de conserver les vicaires des églises supprimées, lorsqu'ils étaient nécessaires dans les églises nouvellement circonscrites, on avait affecté de prendre ou d'anciens bénéficiers qui ont déjà des traitements de la nation, ou des ci-devant religieux qui recevaient en outre la moitié du traitement qu'ils ont comme anciens titulaires. Vous avez désiré qu'on remédiât à cet abus.
Votre comité ecclésiastique n'a vu que deux moyens : celui de stipendier les vicaires supprimés (et il n'a pas cru ce moyen nécessaire); et celui de donner à ces vicaires supprimés le droit de requérir les places de vicaires dans les églises nouvellement circonscrites.
Il nous a paru que ce dernier moyen remplissait tout ce que les vicaires pouvaient attendre de votre justice; d'ailleurs cette mesure est conforme à l'esprit de la règle que vous avez posée dans votre constitution civile du clergé et dans la loi du 23 octobre à l'égard des curés des églises supprimées. Voici le projet de décret ;
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité ecclésiastique, décrète que les vicaires des églises paroissiales et succursales qui ont été ou seront supprimées en 1791 et 1792, en vertu des précédents décrets, auront droit, pourvu u'ils aient prêté le serment prescrit par la loi u 26 décembre dernier, de requérir, suivant l'ordre de leur ancienneté dans le sacerdoce, et par préférence à tous autres que les curés des églises supprimées, les places ae vicaires qui ont été ou seront vacantes pendant lesdites années, -à compter du 1er janvier 1791, dans les églises auxquelles aura été réuni en tout ou en partie le territoire de celles où ils exerçaient leurs fonctions de vicaires, et ce, nonobstant tout choix qui aurait pu être fait au contraire avant ou après la publication du présent décret; en conséquence, aucun titulaire de cure circonscrite dans le cours des années 1791 et 1792, ne pourra refuser de les employer à leur réquisition en ladite qualité, s'ils n'ont obtenu déjà une autre place de vicaire, ou un autre office ecclésiastique, ou si le refus n'est motivé sur des causes légitimes, jugées telles par l'évêque de son conseil.
« Les vicaires des paroisses supprimées pour former la paroisse de la cathédrale sont exceptés des dispositions précédentes; mais jusqu'à ce qu'il aient pu être replacés, il sera payé à chacun d'eux sur le Trésor public, par forme de secours annuel et provisoire, la somme de 350 livres, jusqu'à ce qu'ils aient obtenu une autre place de vicaire ou un autre office ecclésiastique. »
Je ne peux pas penser que votre comité ecclésiastique ait été unanimement de cet avis. Je ne crois pas que vous puissiez intervertir à ce point l'ordre que vous avez établi par la constitution civile du clergé. Vous avez voulu que le choix des pasteurs fût libre et volontaire : le décret qu'on vous propose mettrait le curé en contradiction absolue avec son vicaire, ce qui établirait peut-être l'animosité dans la maison du Seigneur et ne produirait aucun bien réel.
C'est un petit mal local et individuel que vous chercheriez à réparer par ua mal général.
Il y a tout lieu de présumer que la très grande majorité des vicaires réformés auront de l'emploi dans les nouvelles paroisses où se trouveront réunies celles où ils exerçaient leur ministère.
Ge projet de décret n'est ni convenable ni juste. Il me semble, Messieurs, qu'il est de toute justice que les fonctionnaires publics, qui étaient attachés aux paroisses Supprimées, passent avec les paroissiens dans la paroisse à laquelle ceux-ci sont réunis; et je demande qu'on le décrète purement et simplement.
Je pense, Messieurs, qu'il est nécessaire que M. Martineau, qui est membre du comité ecclésiastique, veuille bien se réunir avec ses collègues pour leur proposer ses vues.
Je demande en conséquence le renvoi au comité.
(L'Assemblée décrète le renvoi du projet de décret au comité ecclésiastique.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret additionnel sur Vordre judiciaire (1).
, rapporteur. Nous en sommes restés hier à l'article 6 du projet de décret; cet article est ainsi conçu :
« Si le greffier de la municipalité refuse de signifier les citations, actes et jugements du juge de paix, il ne pourra conserver sa place; et l'huissier qui le remplacera pour les significations, ne recevra, à peine de concussion, que les droits attribués au greffier, si la signification est faite dans la municipalité du domicile de l'huissier; mais en outre, eu cas de transport, il recevra 12 sous par lieue, sans qu'il puisse ja-maisêtre mis, à la charge de la partie condamnée, plus que les frais de 2 lieues de transport. »
Plusieurs membres proposent, par amendements, des additions et modifications à cet article.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur ces amendements.)
Un membre propose une modification et fait plusieurs observations qui sont acceptées par M. le rapporteur.
Je demande si l'aller et le retour sout compris dans la taxe.
, rapporteur. Oui, et je l'exprimerai dans l'article. (L'article 6 est
adopté sauf rédaction.)
(Cette disposition additionnelle est envoyée au comité de Constitutioa.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 7 qui est ainsi conçu :
« Les> juges de paix procéderont d'office à l'apr position des scellés, après l'ouverture dies successions, lorsque les héritiers seront absents ou mineurs, et ils passeront outre, nonobstant les oppositions, dont ils renverront, le jugement au tribunal de district. »
Un membre demandie, par amendement, qu'on mtroJuiise dans l'article ces mots : des absents non représentés et des mineurs non émancipés ou n'ayant pas de tuteurs.
(Cet amendement est adopté.)
(L'article 7 est adopté sauf rédaction. >
, rapporteur, donne lecture de l'article 8 ainsi conçu :
« L'apposition des scellés étant un acte purement ministériel et conservatoire, il sera alloué au juge de paix 2 livres pour une vacation de 3 heures et 20 sous pour les suivantes. Le greffier aura les deux tiers de la somme attribuée au juge. Les droits seront d'unie moitié en sus dans les villes au-dessus de 25,000 âmes, et du double pour Paris. 11 en sera de même pour tes vacations de reconnaissance et levée de scellés et pour celles employées aux avis de parents; le tout indépendamment des droits d'expédition du greffe. »
C'est bien assez de payer aux juges de paix et aux greffiers les émoluments
?;ue vous leur fixerez par le tarif qui réglera les rais des grosses et des expéditions, sans encore leur donner ce nouveau, stimulant pour multiplier les vacations qui sont un des plus grands abus de l'ancien régime.
Je demande donc la question , réalable.
. Un membre : Les fonct'ons de juge de paix doivent être gratuites.
Plusiews membres observent que ce serait aller contre les décrets que de ne point attribuer d'ho»-noraire aux juges de paix.
Plusieurs membres demandent que les appointements des juges de paix soient augmentés et qu'on ne leur accorde pas d'honoraires, comme le propose 1e comité.
Un membre demande le renvoi au comité de Constitution de la question relative à l'augmentation des honoraires.
Un membre> demanda que les apportions des scellés ne soient taxées qu'à 1 livre 5s sols par vacation.
, rapporteur. Si vous interdisez les émoluments des juges de paix, vous allez arrêter' le cours de cette fonction dans, les campagnes.
Vous avez déjà décrété- que, dans la ville de Paris, pour l'apposition des scellés, les juges de paix auraient des émoluments ; cela est plus important encore qu'ils en aient dans les campagnes, ou biea il faut en charger d'autres officiers.
Car on ne peut pas exiger qu'un juge de paix se transporte à deux lieues de son domicile pour mettre des scellés, qu'il fasse des frais pour se déplacer, et cela gratuitement.
Si le droit est trouvé trop fort, je consens à ce qu'il soit dit que, quel que soit Je scellé, il ne pourra jamais produire plus de trois livres de vacation.
Je demande que le décret qui fixe le traitement des juges dé paix soit consulté.
rapporteur. Je propose d'ailleurs de renvoyer l'examen de cet article à la séance de demain matin.
(L'Assemblée ajourne l'article 8 à la séance de demain matin).
, rapporteur. Je présenterai à l'Assemblée dans un décret général les articles votés dans cette séance et qui ont été adoptés sauf rédaction.
, député de la Mayenne, se présente et annonce qu'il est de retour d'hier de chez lui où il était allé par un congé de l'Assemblée.
fait lecture d'une lettre eu date de ce jour par laquelle le maire de Pari» lui annonce que la municipalité a fait hier l'adjudication de trois maisons nationales situées :
La première," cour des Jacohins-Saint-Honoré, louée 6,370 livres, estimée 88,552 livres, adjugée 160,000 U vres.
La seconde, quai des Orm. s, louée 1,000livres, estimée 16,000 livres, adjugée 31,000 livres ;
Et la troisième, rue Notre-Dame-des-Vicloires,, louée 1,400 livres, estimée 25,000 livres,, adjugée 40,100 livres.
J'ai reçu du procureur général syndic du département de la Meuse la lettre suivante :
22 février 1791.
« Monsieur le Président, l'exécution du décret sur la constitution civile du clergé importe trop au succès de la Révolution, pour que l'Assemblée1 nationale ne s'intéresse pas a tout ce qui se passe à cet égard dans les départements.
« En conséquence, j'ai l'honneur de vous informer que celui de la Meuse vient de choisir pour son évêque, M. Aubry, curédeViel, député-à l'Assemblée nationale.
« Ses principes connus, ses sentiments patriotiques, qui ont constamment dirigé sa conduite et ses démarches depuis qu'il en est membre, lui ont concilié presque tous les suffrages et je crois pouvoir présenter ce choix du département de la Meuse comme une preuve de l'esprit de patriotisme qui l'anime. » (Applaudissements.)
donne ensuite lecture :
1° D'une lettre des électeurs du département de l'Oise, qui annonce que M. Massieu, curé de Sergy, membre de l'Assemblée, a été nommé,, à la pluralité absolue, évêque de ce département.
La même lettre annonce que les mêmes électeurs de ce département ont nommé M. Le Por-quier de Chaumont, membre du tribunal de cassation, et M. Simon,'de Beauvais, son suppléant.
2° D'une lettre du président du corps électoral
dfu département cfe l'Eure, et du procès-verbal de Sélection et proclamation de 'M. LiGctet, curé delà paroisse deSainte-Crôrx de Bernay, député à l'Assemblée, à l'évêché de ce dé par tement,.
La môme lettre annonce que M. Antoine-'Claude de Morceng, jnge-prési>dent du tribunal du district de Pont-Ajuâemef, a été é!u membre du tribunal de cassation, et M. Louis-Jacques Sa-vary, homme de loi, administrateur du département de l'JEure, à Evreux, son suppléant.
, évêque du départemevJ du Finistère, et Marelles, évêque du département de VAisne, sacrés ce matin dans la chapelle dé l'Oratoire, par MM. l'ancien évêque d'Autun et les évêques de Lydda e.t de Babylone, entrent dans la salle, revêtus des marques de leur dignité ecclésiastique. Ils sont accueillis par de nombreux applaudissements.
J'ai reçu de M. le. minière de la guerre la lettre suivante, relative au départ de Mesdames, tantes du roi :
« Monsieur le Président, plusieups papiers-annonçant que l'Assemblée nationale a décrété hier qu'il serait demandé au ministre de la guerre Si! a donné des ordres aux. chasseurs de Lor--raine de marcher vers Moret, je crois de mon devoir de ne pas attendre qae ce décret m'ait été Officiellement adressé, pour déclarer que je n'ai donné aucun ordre aux chasseurs de Lorraine, et que je n'ai pris aucune espèce de part à ce qui s'est passé à Moret. J'ai l'honneur de vous prier, Monsieur le Président, de vouloir bien en informer 1"Assemblée nationale.
« Je suis avec respect, etc.
« Signé : du Portail. *
Monsieur le Président, je demande si le décret qui a été l'occasion de Ja lettre du ministre de la guerre dont on vient de nous donner lecture, ne tend qu'à savoir si l'ordre qui a occasionné l'incroyable invasion des chasseurs de Lorraine est contresigné par le ministre de la guerre.
Si, dis-je,, le décret n'énonce que cette iûter-rogatÀon, je demande qu'il soit ampdié.
La lettre de M. Du Portail nous apprend seulement que le ministre de la guerre n'a pas donné d'ordre ; nous devons connaître celui qui a donné l'ordre. C'est là ma réflexion. (Applaudissements.)
Je demande que le comité des recherches nous fasse samedi prochain le rapport de l'affaire de Moret.
Ce n'est pas le comité des recherches qui peut répondre à cette question : il fera le rapport qui lui a été enjoint, mais cette question ne peut être faite qu'au gouvernement.
Le gouvernement doit repondre et je fais la motion expresse qu'il soit interrogé officiellement.
, de sa place. .'Je demande la question préalable sur la motion faite par M. de Miràbeau. (Violentes interruptions.)
Voix nombreuses ;.À la tribune J
, à la tribune-. Je [demande la question préalable sur la motion de M. de
Mirabeau, et je pense, Messieurs, qu'il est inufffe de demander quels .sont ceux, dàns le ministère, qui peuvent avoir donné des ordres pour faire accompagner Mesdames, ft;mtes du roi.
Il n'est pas besoin d'ordres ...(Murmures à gauche-) Je crois, Messieurs, qu'il n'est pas nécessaire de donner des ordres dans de pareilles circonstances, et je suis persuadé que tout ce qui existe de braves militaires dans le royaume, attachés au roi et à la famille royale, se seraient empressés de leur donner tous les secqurs et toutes les marques de respect, de zèle et de dévouement jui dépendent d'eux.
Je demande donc la question préalable.
J'appuie la-motion proposée par M. de Mirabeau et ï1! m'expli |ue.
D'abord, je m'oppose à la question préalable demandée par M. cPi Montlostër, en ce qu'il n'a pas saisi le véritable point de la question. Apparemment le préopînant n'était pas hier à l'Assemblée quand on a lu le procès-verbal de la muni ipalité de Moret ; il résulte de ce procès-verbal que les portes de cette ville ont été forcées par environ cent chasseurs de Lorraine qui ont avancé dans la ville au galop et les armes jiautes contre îes citoyens. Or, il est certain que ce fait ne peut être justifié par personne : il ne s'agit pasià d'accompagner, d'escorter, de défendre, de protéger; il s'agit d'Une infraction à toutes le» lois.
Voilà, certes, un attentat dont il faut connaître les auteurs pour les punir! Autrement, si vous autorisiez, par votre silence,, les troupes de ligne à se porter avec leurs armes contre les citoyens, la Constitution serait impunément violée, la libellé publique anéantie; il n'y aurait pjms de sûreté en France,
Puisque le ministre de la guerre dit n'avoir pas donné d'ordres, il faut savoir quelles sont les personnes qui en ont donné. Les éclaircissements présentes par le comité pourront fournir quelques renseignements qui conduiront à connaître l'auteur ae ce fait; mais il est indispensable que l'Assemblée le sache.
C'est pourquoi je demande que M. le Président se retire par devers le roi pour lui demander le nom de celui qui, contre toutes les lois, a donné aux chasseurs de Lorraine l'ordre d'entrer dans la ville de Moret.
Ce ne peut être que le capitaine des chasseurs qui a donné 1 ordre.
C'est parce que j'étais parfaitement instruit de ce qui « était passé à Moret que j^ai demandé la question préalable sur la motion de M. de Mirabeau.
Messieurs, le résultat de ce dont on a instruit officiellement l'Assemblée nationale, est que les troupes de ligne ont protégé le passage de Mesdames contoe les mouvements séditieux de la plus vile populace. Elles ont maintenu le serment qu'elles omt fait de protéger tous les citoyens et, à plus forte raison, des princesses attachées ^au roi par les liens du sung; c'est leur devoir seul qui les aiguidées. . Nous savons que le premier mouvement des troupes de ligne a été de dissiper des attroupements séditieux de la plus ba«se classe du peuple. La plus forte raison'pou»r prouver qu'3u n'a pas-forcé de porte-, c'est qu'il n'y en a pas.
J'insiste sur la question préalable et'je de-
mande qu'il soit voté des remerciements et des hommages po jr ceux qui ont protégé Mesdames.
La proposition de M. de Mirabeau est prématurée et pourrait avoir des conséquences affligeantes et contraires au vœu de la Constitution. La Constitution veut la responsabilité, l'officier qui commandait est responsable; lors du compte qui vous sera rendu de cette affaire, vous exercerez la responsabilité.
J'ai des vues différentes de celles du préopinant. Je ne m'oppose point à la motion de M. de Mirabeau, mais je réclame contre une erreur grave qui s'est glissée dans cette discussion.
M. d'André vous a dit que les chasseurs de Lorraine étaient entrés à Moret les armes hautes; le procès-verbal de la municipalité dit simplement qu'ils y sont entrés les armes à la main. Il n'y est pas dit pour cela qu'ils aient commis aucun délit, et la position de toute troupe en corps est toujours d'avoir les armes à la main.
Je demande la parole.
A entendre la manière dont on attaque ma motion, il semblerait que j'ai demandé à l'Assemblée nationale de préjuger la cause des chasseurs de Lorraine et de punir, avant aucune information, préalable, l'officier qui les commandait. Je n'ai rien demandé de cela.
Ce n'est pas moi qui.....
Messieurs, lien n'est plus clairement déterminé par la Constitution que l'inviolabilité d'un territoire. Chaque territoire a. constitutionnellement un pouvoir administratif qui répond du respect dû aux lois dans sa juridiction. Certainement je crois que personne n'appuiera l'étrange doctrine avec laquelle M. de Monttosier voudrait vous conduire à voter des remerciements pour l'invasion du territoire de Moret.
C'est mon avis.
Une violation de territoire vous a été dénoncée, non par des bruits publics, mais par un procès-verbal, par une pièce légale; vous avez déjà statué, dans votre décret d'hiér,. que ce fait serait éclairci. Quel est à présent le fait à éclaircir ? C'est de savoir de quelles mains est parti l'ordre, incontestablement inconstitutionnel, qui vous est dénoncé.
On vous a dit que vous aviez un moyen bien simple et que 1 officier qui commandait le détachement -est responsable. S'il fallait disputer de doctrine, je répondrais que la responsabilité va toujours en haut et non en bas ; et, si l'on insistait, je. dirais que l'officier qui commandait ne doit pas être responsable, mais que le seul responsable doit être le premier qui a donné la première impulsion.
Par la mesure que je propose, je Soutiens que vous ne préjugez rien, pas même l'invasion du territoire; je demande seulement qu'on s'assure du nom du donneur d'ordre qui se trouve incriminé dans la municipalité ae Moret. Cette demande est irréfusable.
D'ailleurs, le décret rendu hier va nous mettre d'accord ; tout y est prévu. En effet, l'Assemblée
a décrété de demander au ministre de la guerre quel est celui qui a donné aux chasseurs de Lorraine l'ordre de marcher sur Moret. Le ministre de la guerre s'est justifié en répondant que ce n'était pas lui ; mais ce n'est pas assez : il n'a pas éclairci le fait; il faut qu'il recherche et qu'il nous dise qui a donné cet ordre.
Tout est donc bien prévu et je demande de passer à l'ordre du jour.
Plusieurs membres : L'ordre du jour 1
Je demande que votre énon-ciation soit celle-ci ;
« L'Assemblée nationale, considérant que le décret qu'elle a rendu hier a imposé l'ordre suffisant pour connaître celui qui a signé l'ordre et contre lequel on a porté plainte, passe à l'ordre du jour, après l'observation qui lui en a été faite.»
Je demande la parole.
(La discussion est fermée.)
Je vais mettre aux voix la motion de M. de Mirabeau.
(La motion de M. de Mirabeau
est décrétée.)
Je viens de recevoir, à l'instant, de M. le ministre de l'intérieur la lettre suivante, relative à l'arrestation de Mesdames, à Arnay-le-Duc :
« Monsieur le Président, le roi m'a ordonné d'informer l'Assemblée nationale que Mesdames, tan tes de Sa Majesté, ont été retenues à Arnay-le-Duc.Il a été dressé à cette occasion, par la commune d'Ar-nay-le-Duc, un procès-verbal qui contient les motifs sur lesquels cette commune a cru pouvoir se fonder ; et Mesdames ayant écrit à M. le Président de l'Assemblée nationale pour lui' faire part de cette circonstance.
« Le roi me charge de vous adresser la lettre de Mesdames, ainsi qu'une expédition du procès-verbal de la commune d'Arnay-le-Duc, pour que vous puissiez en donner connaissance à l'Assemblée nationale.
« Le roi ne peut regarder l'obstacle que Mesdames éprouvent, que comme un acte contraire à la liberté qui est assurée à tous les citoyens, et dont Sa Majesté pense que, dans l'état actuel des choses, Mesdames ne peuvent être privées.
« Sa Majesté, qui doit protéger également la liberté de tous, désire donc que l'Assemblée nationale prenne les mesures nécessaires pour lever les doutes d'après lesquels la commune d'Arnay-le-Duc a cru devoir retenir Mesdames.
« Je suis avec respect, Monsieur le Président, « votre, etc.
* Signé ; DE LESSART».
Lettre de Mesdames. Arnay-le-Duc, le
« Monsieur le Président, parties de Bellevue avec une permission et un passeport du roi, et avec une délibération de la municipalité de Paris, qui constate le droit que nous avons de traverser la France, nous sommes aujourd'hui arrêtées à Arnay-le-Duc, malgré le vœu de la municipalité et du district, sur les raisons énoncées dans le procès-verbal que nous avons l'honneur
de vous envoyer : celle surtout qui a paru décider la commune d'Arnay-le-Duc, est que nous n'avons pas un passeport de l'Assemblée nationale. Il existe un décret qui décide qu'il n'en sera plus donné par elle qu'à ses membres. N'étant plus d'après la loi, et ne voulant plus être que des citoyennes, nous n'avons pas cru devoir prétendre à aucune espèce de distinction; mais ca titre de citoyennes nous donne les droits communs à tous les citoyens de cet Empire. Nous les réclamons avec toute la force de la liberté, et la confiance que nous avons en la justice de l'Assemblée ; nous vous prions donc, Monsieur le Président, de vouloir bien nous obtenir d'elle les ordres nécessaires pour nous faire continuer notre route.
« Nous sommes avec respect, Monsieur le Président,
« Vos très humbles et très obéissantes servantes.
«Signé ; Marie-Adélaïde, Victoire-Louise. »
, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la commune d'Arnay-le-Duc, qui est ainsi conçue :
Extrait du registre des délibérations de la commune d'Arnay-le-Duc, district du département
de la Côte-d'Or.
« Assemblée générale des habitants de la ville « d'Arnay-le-Duc, tenue et expédiée en la maison « communeextraordinairement aujourd'hui 22fé-« vrier 1791, heure de 4 après midi, à la dite ligence de M. Je procureur de la commune, sur « la réquisition expresse de tous les habitants « à laquelle ils se sont trouvés au nombre de 138.
« Tous composant la majeure partie des ha-* bitants de cette ville, auxquels assemblés un « des officiers municipaux a dit, qu'en exécu-« tion de l'arrêté du jour d'hier, la garde natio-« nale étant en fonctions, et chargee d'arrêter « tous étrangers pour demander communication « des passeports dont ils doivent être munis, la sentinelle a arrêté un étranger qui s'est « nommé un des ofticiers de la maison de Mes-« dames, tantes du roi, qui étaient sur le point « d'arriver dans cette ville, et qu'il était chargé « de leurs passeports; ayant été conduit par M. le ' major de la garde nationale à la maison com-« mune où se sont trouvés les officiers munici-« paux, cet officier qui a dit s'appeler Louis de « Narbonne, chevalier d'honneur de Madame Adé-« laide, a présenté un passeport signe Louis, plus « bas Montmorin, accordé par le roi à Mesdames « Adélaïde et Victoire ses tantes, le 2 de ce mois, « suivant lequel Sa Majesté mande et ordonne à « tous officiers civils et militaires de laisser pas-« ser librement ses tantes avec la dame de Nar-« bonne et la dame de Chastelux, leur suite et « équipages qui vont à Rome (Rires.) ; l'extrait « d'une délibération de la municipalité de Paris, « avec date surchargée, suivant laquelle il paraît « que considérant que Mesdames sont trop con-« nuespouravuirbesoin des passeports, quela mu-« nicipalitéa délivrésaux citoyens qui pouvaient « eux-mêmes avoir besoin d'attestation d'élat et « domicile, déclare qu'elle persiste dans son arrêté « du 14 de ce mois, desquels passeports et déli-«, bération lecture faite, ainsi que d'une lettre « adressée à MM. les administrateurs du district « d'Arnay-le-Duc, le 19 de ce mois, au sujet du « voyage de Mesdames.
« Que le tout examiné, la municipalité a jugé
« que Mesdames pouvaient continuer leur route; « que, pour leur faire part de cette délibération, « la municipalité s'est transportée à l'hôtel de la « Poste, où elles sont logées, lorsque la moitié « au moins des habitants de la commune, assem-« blee au-devant de cet hôtel, a demandé à la « municipalité si elle avait reconnu la validité « des passeports de Mesdames, et ce qu'elle avait « déterminé sur leur arrestation ou sur la con-« tinuation de leur route; que la municipalité a « répondu qu'elle n'avait pas cru pouvoir p o-« noncer sur la validité des passeports; qi.e sur « cette réponse, la commune a répliqué qu'elle « entenda t prendre elle-même connaissance en « corps d'as-emblée desdits passeports, qu'elle a « requis sur-le-champ à la maison commune, où « tous les habiiants se sont transposés, et aux-» quels lecture a été faite des passeports et la « lettre du directoire.
« La matière mise en délibération, est entré « M. Louis de Narbonne, chevalier d'honneur de « Madame Adélaïde, lequel, après avoir entendu le préambule du procès-verbal, a requis que, « relativement à ce qui a été dit sur une date « surchargée d'une délibération de la municipa-« lité de Paris, cette délibération fût cotée et pa-« raphée par la municipalité, pour qu'il pût être « vérifié par qui la surcharge a été faite.
a La di-cussion reprise, la commune, con-idé-« rant qu'il a été présenté à l'Assemblée natio-« nale, le 14 de ce mois, par les citoyens de Paris, « une motion dont l'objet est de solliciter de sa x sagesse un décret pour retenir dans le royaume « tous les membres de la famille royale, sans « qu'ils en puiss> nt sortir, à moins de passeports « du Corps législatif; que l'Assemblée nationale a « promis de prendre cette pétition en considéra-« tion; qu'elle n'a pas encore prononcé cette t question intéressante du droit public, que par « conséquent Mesdames, tantes du roi, dont le « projet de voyage hors du royaume a excité « cette pétition et les alarmes de tous les citoyens « de l'Empire, n'auraient pas dû se mettre en « routo avant l'émission et la proclamation du « décret que le royaume attend de la sagesse » de l'Assembléenationale, et qu'un voyage aussi « précipité ne peut qu'exciter des craintes.
« Considérant que le passeport du roi est an-« térieur au 14 février, date de la pétition, et que « l'intention exprimée du directoire du départe-« ment dans sa lettre au directoire du district « d'Arnay-le-Duc, du 19 de ce mois, est que la « marche de Mesdames, tanîes du roi, soit sus-« pendue, si elles ne sont pas munies d'un passe-« port légal, postérieur au 14 de ce mois, puis-« qu'elle porte qu'il ne leur sera fait aucun empê-« chemeni, si elles en représentent un de cette « nature.
« Arrête qu'il sera référé au département des « circonstances dans lesquelles se trouve la cornet mune, et de la résolution qu'elle prend par la « présente sur la suspension du voyage de Mes-« dames, tantes du roi, jusqu'à ce que les ordres « du département soient parvenus à la munici-« pa'ité; que copies leur seront envoyées du « passeport, de la délibération de la municipalité «r de Paris et de la présente délibération.
« Que la municipalité sera priée de donner des « ordres au sieur Maugras, maître de poste, pour « qu'il ait à s'abstenir de donner aucun cheval à « Mesdames et de laisser sortir ses voitures de « ses cours, sauf néanmoins le renvoi des che-« vaux d'Ivry qu'il avait fait venir, et la liberté à « M. de Narbonne d'aller où bon lui semblera,
« avec les chevaux qui lui sont nécessaires. (Rires et applaudissements.)
« Qu'il sera donné à Mesdames une gardé pour « leur sûreté et tranquillité-, et un doulile extrait « de la.présente délibération par la voie de E. de « Narbonne. « Fait en la maison commune, etc., etc...
« Signé : VÉLY . »
« Nous soussignés, officiers municipauxvcerti-« fions, à tous qu'il appartiendra, que le sieur . " Véîy, qui a signé l'extrait ci-dessus, est secré-t taire-greffier de la municipalité. »
S'il devait y avoir deux avis dans cette Assemblée s>ur Pobjpt de la délibération que l'on vous propose en ce moment, je n'aurais demandé la parole que le second ét je me serais réservé la faculté de connaître des objections qu'il m'est impussible dé prévoir.
Les principes exposés dans le procès-verbal que vous venez d'entebdre sont d'une nature très sérieuse et très* intéressante pour la liberté publique.
La municipalité d'Ajnay-le-Duc, qui vous instruit de ce qui vient d'arriver dans son sein le 22 de ce mt)is,nej>euiêtre suspecte d'aucune espèce de partialité. Elle ne nous dit pas qu'elle a été forcée par la commune ; mais le texte entier de son procès-verbal suppose que si la municipalité, à qui l'autorité provisoire est déférée par la Constitution, avait pu faire respecter sés ordres^e voyage de Mesdames n'aurait pointété trouble. Il est infiniment dangereux de voir ainsi s'élever la multitude contre l'autorité des corps, administratifs et de se substituer à leur place. Le peuple français est libre ; mais le .peuple,-qui est la source de tous les pouvoirs, ne doit en. exercer aucun piir lui-même. Les habitants d'Arnay-Ie-Duc ont des officiers mun cipaux dans lesquels ils doivent avoir une entière confiance, puisqu'ils les ont Choisis ; ÛS ne peuvènt un seul instant suspendre l'autorité qu'ils ont créée par leur choix pour l'exercer eux-mêmes.
La municipalité d'Arnay-le-D,uçne mérite donc aucun reproche. Mais, Messieurs, dans un temps où il n*eiuste presqùe plus d'autrè tribunal dans le royauiné que lë tribunal de l'opinion publique,, il importé bien moins d'exercer notre puissance que de répandre les véritables principes de la Constitution française. Il faut doue, Messieurs, que le royaume entier sàche qui! n'existe aucune loi en France qpi soumette des voyageurs quels qu'ils soient à avoir des passeports. La liberté, Messieurs, n'est pas une exception ;, la lrberté est un droit, et tontes les fois qu'un homme n'est point privé de sa liberté par un jugement compétent, celui qui porte atteinte à la liberté d'un citoyen français vible les droits les plus essentiels de ta Constitution.
Mesdames, dans la rigueur de vos principes, MesàeUtS, n'étaifcnt donc p^s obligées.de [ résen-ter un passeport. Elles ne pouvaient paà surtout Présenter un passeportde l Assemblée nationale, parce que l'Assemblée nationale,.occupée de tous les intérêts qui sont cotnmùùs à.tous lès. citoyens, ne connaît aucun, particulier en France lat ne donne par conséquent des passeports q,ua .ses membres. La conduite de Mesdames a donc été sans reproche au moment où elles sont parties. La commune d'Arnay-le-Duc,. en les arrêtant, Messieurs, a été: égarée par un prétéxte frivole qui vous est dénoncé dans lé procès^verbal.
La commune de Paris vous avait présenté une pétition. Elle vous demandait une loi constitua t onnelle qui fixât les droits des personnes augustes qui composent la dynastie régnante. Une pétition de la commune de Paris n'est pas un décret, etil serait bien extraordinaire que toutes les fois que la commune de Paris voudra voua présen ter une pétition, le provisoire lui. fût» accordé dans le royaume avant même que le corps législatif ait prononcé. Eh» Messieurs* c'est ma-nif stement le provisoire cpela commune d'Ar-nay-le-Duc a donné à la commune de Pari», et cela contre l'autorité du roi qui s'était expliqué par uiï passeport et, contre la prudence du Corps législatif qui n'avait point fait droit sur la demande de la commune de Paris, mais pi l'avait renvoyée à son comité de Constitution.
Vous ne pouvez' donc tolérer l'insurrection de la multitude contre une municipalité, le plus faible, mais Je premier des corps administratifs. Vous ne pouvez pas exposer les municipalités à se voir forcées a agir contre le vœu de leur conscience, à déposer des droits qu'elles tiennent de la loi.
Lè procès-verbal dont on vous a donné lecture est certainement l'ouvrage dés plus habiles praticiens ; on croirait qu'il a été rédigé par un procureur. On y fait les plus adroits rapprochements des dates ; on y dit que la date du passeport devrait être postérieure à celle de la pétition de là commune dé Paris; tout cela, pour prouver que le nom du roi ne doit pas être respecté dans le royaume:
Ces observations, faites pour tenir de l'espace dans l'étude d'un procureur, ne méritent aucune attention de l'Assemblée. Je demande donc que l'Assemblée nationale décrète dans Pîhstant qu'après avoir entendu la lecture du procès-verbal dressé dans la maison commune d'Arnay-le-Duc, désapprouvant l'insurreèlion anticonstitutionnelle de la commune d'Arnay-le-Duc contre le voeu de la munidipalitè d*Afnày-1e-fluc, déclarant que le peuple n'a jamais droit de s'opposer, même provisoire^eni, aux décisions des corps administratifs, puisque la manière de se pourvoir lui est âsâutée jf/àr la Constitution en lui ouvrant toutes sortes de recours auprès des co^ps administratifs qui liii . sont Supérieurs ; l'Assemblée nationale désapprouve la commune d'Arnay-le-Dufc, lui défend de mettre aucun, obstacle au passage de Mesdames, tàntes du roi, qui, en voya-gôaut pour sortir du royaume, exercent une Ta-ciilté' dont la Constiluîion n!a encore privé aucun citoyen français.
Pour rassurer l'Assemblée nationale, je lui rappellerai que^son comité de Constitution, dont TauloriAé provisoire me semble un peu plus imposante que celle de la commune de Paris, ne propose pas dans le projet de décret qu'il vous a présenté de mettre des obstacles à la liberté des personnes de la famille du roi dans* le degré ou se trouvent Mesdames.
J'ïii une seconde observation à vous faire, c'est que la loi ne peut avoir un e£fet/étroactif. Les communés ne peuvent décider contre le voeu des munii'i^âlijtés. ejfc '^^départements, contre le si-i l,ence du Corps, législatif qui n'avait mis aucun obstacle à .un départ dont,il était instruit. Il ne faut pas souffrir que le peuple exerce un pouvoir dont il est la s^oice,. mais dont l'autMité royale et lé Corps législatif' sonti les réservoirs. ; Ce serait méconnaUrp les intérêts du peuple; ce serait sacrifièr sa propre liberté qjie dé ce. pas lui dire et lui redire quM ne doit exerepr aucun
pouvoir, et que les corps administratifs créés par la loi qwe ,1e peuplea créée doivent être écoutés quand ils parlent en son nom.
(de Saint-Jean-d'Ancfély). Je crois, eemme le préopinant, qu'en pirincipe les citoyens doivent voyager librement et que les communes ne peuvent, ni par la force, ni par l'expression de leurs vœux, s'opposer aux intentions des municipalités. Mais ici il ne paraît pas que l'intention ëe la municipalité d'Ara ay-le-Duc ait été contraire à la délibération de la commune. La conduite de la commune est suffisamment excusée par les troubles et les terreurs dont nous sommes environnés, Si nous étions dans un moment calme, j'adopterais ,1a proposition qui VOU3 est faite de témoigner votre désapprobation; mais quand les gens de l'esprit le plus sage voient dans les projets des ennemis de la Révolution de quoi appuyer au moins la moitié de eeB terreurs, il est possible de ne trouver dans la conduite de la commune d'Arnay^le-Dac que l'acte d'un patriotisme exagéré. (Murmures et applaudissements.) Je ne crois dionc pas que vous puissiez prononcer une improbaiion solennelle, et je pense que sur cette première partie de la motion du ipréopinanl, il n'y a pas lieu à délibérer.
Sur la seconde partie je* ne diffère d'avec lui que sur la forme de la rédaction. L'Assemblée peuUelle diare qu'il faut rendre à Mesdames la liberté de continuer leur voyage? Cela n'est pas de son ressort. S'il existe une toi, œ'est an roi à la faire exécuter ; s'il n'en existe pas, , c'est au roi à assurer à tous les citoyens la liberté de faire ce que la loi n'a pas défendu. (Murmures.) Je ne dis pas que l'attachement de Mesdames pour le roi, que leur amour pour la paix publique n'aurait pas dû leur prescrire une conduite différente; mais je dis qu'il n'existe pas d'autre loi que celle qui exige ia permission du roi et que cette permission a été donnée. On s'est autorisé de la pétition de la. commune de Paris; mais la demande d'une loi n'entraîne pas l'inexécution des lois existantes;, ou bien il y aurait un espace de temps pendant lequel la loi ne subsisterait pas, et, pendant «et intervalle, il n'y aurait plus; de société. Il faut motiver le décret, en éisant que.pour assurer le respect dû à des lois non abrogées et à l'autorité des corps administratifs, l'Assemblée renvoie cette affaire au roi, entre les mains duquel reposent tous les moyens nécessaires pour faire jouir les citoyens de la liberté assurée par la loi.
Bans une;circonstance à peu près semblable, 1 Assemblée a décrété que M. Necker, retenu inconstitutionnellement, aupait la liberté de continuer sou voyage ; vous ne pouvea en user autre oient aujourd'hui à l'égard de Mesdames.
Le préotpànaat a bieh reconnu le principe sur lequel il ne^eut y avoir deux opinions dans l'Assemblée; mais il en a tiré mal la conséquence, en demandant le renvoi au pouvoir exécutif. Lorsqu'une municipalité méconnaît un des principes les plus sacrés que vous ayez proclamés, quand elle enfreint une de vos luis, est-il au-dessous de votre dignité, n'estt-il pas de; votre devoirde manifester haraitement vetre désapprobation et de rappeler cette municipalité solennellement à ses obligations ? C'est parce que la Constitution éstt menacée par des factieux, que tous les bons citoyens doivent se réunir peur que les actes d'insubordination et toutes les atteintes portées à la loi soient désormais réprimés*
Je ne puis adhérer à ce qu'on a dit pour excuser un zèle inconsidéré; aujourd'hui que.tous lis pouvoirs sont marqués, que tous les corps administratifs et judiciaires sont établis, il est néceî-saiie de réprimer avec éclat tous les excès par lesquels une partie du peuple s'élèverait au-dessus d'eux et mettrait en suspens leur autorité. (Murmures et applaudissements»)
Vous avez voulu que les municipalités fussent garantes de l'infraction faite aux lois : il y a aujourd'hui un an que vous avez rendu Ce décret. Eh 1 que deviendraient les principes, que deviendrait cette responsabilité, si une commune pouvait mettre sa volonté à la place de celle du corps municipal, dans les choses où ce Cbrps'a seul le droit de vouloir !
En vain les tribunaux, en vain les corps administratifs excercent les pouvoirs conformément à la Constitution, si l'appel, interjeté à la multitude elle-même de l'exécution: de vos décrets, rend inutiles et infructueux toutes les/ vertus, tout le civisme, tout Je courage des Citoyens qu'elle a elle-même appelés à l'administration. (Applaudissements.) Il serait inutile de faire des lois si, quand leur "exécution est jurée par le peuplé, elles sont détruites par le peuple même. On me dira que la Constitution est établie de droit et non dé fait; mais ici cette observation est de nulle valeur. La commune a été avertie, par le district et par la municipalité, qu'aucune loi ne s'Opposait au départ de Mesdames.
Je demande donc la double mesure; et qu'il soit dit : d'une part, comme ie roi vous lg demande dans ce moment-ci, que la liberté de continuer leur voyage est assurée à Mesdames, qui seront mises en route avec toutes les précautions qu'elles pouvaient prendre; et, d'autre pari, que vaus ex-primiez dans votre décret une improbation de la conduite tenue par la commune a'Arnay-le-Duc et que vous la déclariez inconstitutionnelle. (Ap-p laudùsements. )
La question qui se présente est extrêmement simple;elle ûe jpeut au fond éprôu ver aucune diflicuUé.
Mesdames sont anêtées à Arnay-le-Duc ; la commune donne pour motif qu'y ayant une pétition de la Commune de Paris, renvoyée au comité de Constitution, elle n'a pas pu laisser passer Mesdames. Il faut donC savoir à présent si une pétition renvoyée au comité de Constitution peut suspendre l'exécution d'une loi ou être considérée comme une l'oi.
Il me semble que personne ne peut être de cet avis; et il suffit de.déclaref.que nulle loi ne s'oppose au départ de Mesdames. Renvoyer purement et simplement au pouvoir exécutif, Ce serait amener une solution toute différente : la municipalité ët le district sont. ses agents poûr l'exécution de la loi ; ils n'otit pu assurer cette exécution. Ce serait dire, au roi : « Envoyez des troupes. » Dans les circonstances .présentes, Û" faut tâcher que les lois, soient exécùtées paisiblement. Une I déclaration de la ftart du Corps législatif suffira ; il faut la donner. Ainsi je proposç le décret suivant:
« L'Assemblée nationale déclare qu'il n'y a aucune toi qui s'oppose au départ de Mesdames. »
La commune dont on attaque la conduite n'a pas été mue par une résistance à la I loi, mais seulement par le doute qui s'est élevé j sur lç sens et, sur l'exécution des déprçts rendus ; dans le sein W l'Assemblée nationale; efle n'a
cru agir que pour le bien commun ; on ne peut lui reprocher que l'inconsidération de son zèle.
C'est donc l'explication de ces mêmes décrets que l'on doit donner et alors le pouvoir exécutif aura tous les moyens nécessaires pour faire exécuter la loi réelle.
Je propose, en conséquence, que le décret que vous allez rendre soit ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale, considérant que les décrets d'ordre rendus dans son sein ne sont nullement lois du royaume et obligatoires pour les citoyens; (Murmures.)
« Considérant qu'aucune loi ne s'oppose à l'é-loignemant de Mesdames ayant une permission du roi ;
« Renvoie au roi, pour statuer sur les suites de la permission qu'il leur a donnée, et charge son Président de reinetire à Sa Majesté les différents décrets eu exécution desquels l'Assemblée nationale est prête à statuer sur les devoirs des membres de la famille royale. » (Murmures prolongés.)
Je demandé la parole.
Laissez-moi poser la question.
La question me parait si simple, que je ne croyais pas qu'elle eût besoin d'être posée.
Il faut établir l'état de la délibération.
La discussion n'est pas fermée et je dois avoir la parole.
M. Fréteau a proposé....
Voici ma rédaction : « L'Assemblée nationale déclare inconstitutionnelle la délibération de la commune d'Arnay-le-Duc du 22 de ce mois, tendant à suspendre le voyage de Mesdames (Murmures.) ; ordonne que le roi sera prié d'assurer, par les moyens que la Constitution met en son pouvoir, la liberté (Murmures.)..... de tous les citoyens français ; et déclare qu'aucune loi n'a ôté à Mesdames le droit de continuer leur voyage. »
Plusieurs membres demandent la question préalable.
Plusieurs membres demandent la priorité pour la rédaction de M. d'André.
Monsieur le Président, comme il est extrêmement.....
J'avais certainement ia parole avant vous. Monsieur le Président, je n'attends que l'ordre de l'Assemblée pour dire mon opinion.
Plusieurs membres : Parlez 1 parlez 1
Il y a un ordre de discussion proposé sur la question. D'ailleurs, vous n'auriez pas la parole; elle appartient d'abord à MM. Bouchotte, Le Chapelier, de Grillon. On a réclamé une priorité; c'est sur cela que M. de Mirabeau a demandé la parole.
Je demande la priorité
pour la rédaction que je vais proposer, et comme cette question me paraît avoir consumé beaucoup de temps, je ne motiverai mon opinion que dans le cas où'elle éprouverait de l'opposition. Voici comment je rédige le projet de décret par lequel vous avez à déclarer un principe incontestable :
« L'Assemblée nationale, considérant qu'aucune loi existante du royaume ne s'oppose au libre voyage de Mesdames, tantes du roi, déclare qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le procès-verbal de la commune d'Arnay-le-Duc; renvoie l'affaire au pouvoir exécutif.» (Applaudissements à droite et au centre.)
Voici ma rédaction...
M. de Mirabeau. Je vais motiver la mienne en très peu de mots. Ce n'est ici qu'une question de fait ; car ce que l'Assemblée statuera, demain ou après, ne décidera pas si Mesdames ont aujourd'hui le droit de voyager. Cette question ne peut être jugée que par l'état présent des lois : or nulle loi ne les en empêche. Et il faut bien que l'Assemblée nationale l'ait pensé ainsi, puisqu'elle n'a pas cru devoir prendre de mesures légales pour empêcher l'exécution du voyage dont elle était avertie et qu'elle n'y a pas mis d'obstacle ; il faut bien aussi que la municipalité de Paris l'ait pensé ainsi, puisqu'elle a délibéré qu'aucune loi ne s'opposait au départ de Mesdames; puisque, dans sa pétition, elle demande une loi nouvelle et ne réclame pas l'exécution d'une loi existante.
Qu'objecte-t-on dans le système de ceux qui veulent que l'Assemblée prononce une improba-lion formelle? On dit qu il y a une infraction à la loi. Mais l'Assemblée nationale en ordonnant l'impression de la pétition de la commune de Paris a fort concouru peut-être à induire en erreur et à élever les doutes dont nous voyons l'effet. (Applaudissements.) Ce n'est pas tout ; on ne peut se dissimuler que nous ne nous trouvons pas dans des circonstances ordinaires, que nous ne sommes pas encore parvenus à établir le jeu régulier de l'organisation sociale; il y aurait donc une extrême rigueur à imprimer la tache d'une désapprobation sur une municipalité qui s'est adressée à vous, en motivant sa, conduite d'une manière très respectueuse pour le chef de la nation? (Applaudissements.)
Je le demande à tous les opinants dans tous les systèmes : que voulons-nous en ce moment? Nous voulons faire une déclaration qui, ne laissant aucune espèce de prétexte à une infraction à la loi existante, nous assure que la tranquillité publique ne sera pas troublée par la continuation du voyage de Mesdames, parce que certes la paix publique est notre premier devoir et notre première sollicitude. Eh I n'avons-nous pas de trop grands objets de surveillance et de sollicitude pour donner au voyage de Mesdames plus d'importance qu'il en a ? (Applaudissements.)
Que vous demandé-je? La déclaration d'un fait incontestable, une prononciation parfaitement régulière et enfin un renvoi qui est un hommage à la loi. Je dis : « L'Assemblée nationale, considérant qu'aucune loi existante du royaume ne
s'oppose au libre voyage de Mesdames.....» Ce
fait est-il contesté, oui ou non?...
Je le conteste.
Existe-t-il une loi ?
II y en a une; c'est le salut du peuple. (Murmures et applaudissements.)
Le salut du peuple est surtout intéressé àce qu'il n'y ait pas de tiraillement d'opinions et de mouvements en sens contraire, quand la chose publique exige une unité parfaite d'actions et de volontés. Le salut i}u peuple'n'est pas intéressé à ce que Mesdames couchent 3 ou 4 jours de plus en route. Leur voyage est peut-être un mouvement d'imprudence; mais il ne porte aucune atteinte à la loi. Tous les bons citoyens, sans doute,doivent, dans les circonstances qui nous pressent, rester à leur poste et montrer leur attachement au chef de la uation. Mesdames ont fait une chose imprudente, impolitique; mais non illégale : il n'y a donc pas lieu à délibérer ; et puisqu'il v a eu empêchement à l'exécution de la loi, il faut renvoyer au suprême exécuteur de la loi. Pourquoi l'Assemblée se chargerait-elle d'une responsabilité qui n'est pas la sienne?
Je soutiens qu'il est de sa sagesse, de sa politique, si un corps aussi puissant peut avoir de la politique, de renvoyer cette affaire au pouvoir exécutif.
Je ne discuterai pas, j'ai une rédaction à proposer. Je suis d'accord avec le préopinant sur le fait et sur les principes, et je ne diffère que dans un point.
Le principal objet n'est pas le voyage de Mesdames, mais le respect dû à la loi. Ou il y a une loi, ou il n'y en a pas : dans le premier cas, elle doit être observée, elle n'est point abrogée; dans le second, il en est une aussi ancienne que la nature, c'est que ce qui n'est pas défendu est permis.: (Murmures.)
Voici mon projet de décret : « L^Assemblée nationale déclare qu'aucune loi existante ne s'oppose au voyage de Mesdames, et en conséquence elle désapprouve les obstacles qui y ont été apportés...» (Nouveaux murmures.)
Ce n'est pas là une mesure sévère, c'est l'application des principes. Je continue : « et ordonne qu'ils soient levés ».
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
Je veux présenter une raison.
Un grand nombre de membres : Il faut fermer la discussion.
(La discussion est fermée à la presque unanimité.)
J'adopte la rédaction de M. d'André, mais avec cet amendement :
« Et sera le Président chargé de se retirer par devers le roi pour le prier de ne point accorder de permission à aucune autre personne de sa famille pour voyager, jusqu'à ce que le décret ajourné sur cet objet ait été rendu par l'Assemblée nationale et accepté par le roi. » (Applaudissements.)
Malgré le mouvement que me paraît avoir l'opinion de l'Assemblée, je crois devoir exprimer ma pensée.. Je suis loin de croire, avec plusieurs des préopinants, que le voyage de Mesdames présente peu d'importance ; je suis loin de penser qu'il soit peu important qu'une partie de la famille royale sorte
du royaume et donne le spectacle scandaleux d'aller provoquer, d'aller réunir des ennemis contre une Révolution qui lui assure de si grands avantages. (Murmures à droite; applaudissements à gauche.)
Un membre à droite : Nous voyons ce que la Révolution leur a ôté; montrez-nous ce qu'elle leur a donné.
La discussion est fermée.
Je m'étonne que les opinants ne distinguent pas les moments qui accompagnent la Révolution de ceux qui la suivent...
Monsieur le Président, monsieur n'a pas la parole pour discuter.
Je ne suis pas étonné, Messieurs, qu'une partie de l'Assemblée veuille m'obliger à ne point motiver la rédaction ue je veux vous proposer; certes, on ne deman-erait pas mieux que l'Assemblée nationale, que la nation entière, en regardant la Révolution comme achevée, oubliât la sollicitude, la surveillance, qui,seules,peuvent en assurer le succès.
Mais, Monsieur lé Président...
Je prie, et avec instance, tous les membres de cette Assemblée qui, depuis 20 mois, ont donné tant de preuves de patriotisme et de Courage, de ne pas se méprendre sur le sentiment qu'on veut leur inspirer: celui d'une sécurité aveugle perdrait la chose publique. Et, je le répète avec toute la force que peut donner la conviction, la Révolution ne s'achèvera pas, si on se laisse aller à la regarder comme achevée. (Applaudissements.)
On vous propose de blâmer la commune d'Ar-nay-le-Duc...
Je demande si la discussion est fermée.
Je le dirai avec franchise : je ne puis dissimuler l'étonnementque j'ai éprouvé en voyant, après la lecture du procès-verbal que vous avez entendue, des membres patriotes se laisser aller à vous proposer d'im-prouver formellement la conduite de la commune d'Arnay-le-Duc, conduite dont le procès-verbal m'a paru présenter l'exemple du patriotisme le plus pur, conduite qui est motivée sur le renvoi que vous avez ordonné de la pétition de la commune de Paris au comité de Constitution. (Mouvement prolongé à gauche.)
, montrant le côté gauche. Monsieur le Président, voulez-vous bien mettre l'ordre là-bas, car on va bientôt s'y battre.
J'exige, Monsieur le Président, que vousforciezl'opinantàse renfermer dans sa rédaction.
(de Saint-Jean-d'Angély). Monsieur le Président, vous n'avez pas le droit de laisser parler M. de Lameth.
Puisqu'on me presse d'en venir à ma rédaction, voici mon opi*
nion: je pense que les lois anciennes encore existantes donnent au roi le droit d'accorder ou de refuser aux personnes de sa famille la permission de voyager hors du royaume.
Mon avis est donc que, sans permettre qu'aucun obstacle soit apporté au voyage de Mesdames et qu'en déclarant que les lois anciennes ne .sont pas abrogées, M. le Président soit chargé de prier le roi de peser dans sa sollicitude s'il doit, dans les circonstances actuelles, permettre à Mesdames de sortir du royaume.
L'Assemblée ne tombera pas dans le piège qu'on lui tend. (Bruit.)
M. te Président agite la sonnette.
Vous ne sonniez pas quand M. de Lameth parlait.
Je me renferme dans la question ; je n'ai pas de réflexions à faire à l'Assemblée ni au public. La question est de demander la priorité pour ma proposition, qui me paraît la plus sage et je demande qu'on la mette aux voix.
Je réclame la priorité pour ma motion.
J'adopte la rédaction de M. de Mirabeau ; la sienne et la mienne, c'est la même chose.
Plusieurs membres demandent la priorité pour la rédaction de M. de Lameth.
(L'Assemblée accorde la priorité à la rédaction de M. de Mirabeau.)
J'ai à proposer un amendement qui rentre dans l'idée de M. de Lameth, et qui peut s'adapter à la rédaction de M. de Mirabeau. Il consiste à charger M. le Président de dire au roi, que de lui dépend d'accorder ou de refuser la permission de voyager aux membres de sa famille.
Je demande aussi que M. le Président mette sous les yeux de Sa Majesté la situation du royaume et les motifs pressants qui se puisent dans l'intérêt public. (Applaudissements à gauche.)
Plusieurs membres demandent la question préalable.
Je demande la parole.
Je ne vous la donne pas.
(de Saint-Jean-d'Angély). Monsieur le Président, vous n'avez pas le droit de refuser la parole à M. de Beaumetz.
Monsieur, vous n'avez pas la parole.
(de Saint-Jean-d! Angély). Vous n'avez pas le droit de m'imposer silence; je demande que l'Assemblée soit juge entre vous et moi. Parlez, Monsieur de Beaumetz, vous avez la parole.
Je ne puis donner la parole à M. de Beaumetz sans que l'Assemblée l'ordonne. (Murmures prolongés.)
. Plusieurs membres se lèvent et demandent la parole.
Il résulterait de ce que M. le Président vient de dire...
Monsieur le Président, je demande la parole contre yous. (Applaudissements au centre et à droite.)
Monsieur le Président, vous êtes partial ; c'est un despotisme parlementaire.
Je ne connais de juge que l'Assemblée.
Je demande que M. de Beaumetz ait la parole.
L'Assemblée paraissant ne pas croire que la discussion fermée empêche de donner la parole, parlez, Monsieur.
Monsieur le Président, c'est vous qui l'avez rouverte ; nous ne sommes pas dupes de cela.
La discussion étant fermée sur le fond, c;( st uniquement de l'amendement de M. Camus qu'il s'agit. Cet amendement, bon peut-être en lui-même, me paraît porter sur des alarmes relatives au bruit du départ de Monsieur; alarmes qui ont occasionné Je ridicule attroupement de mardi ; alarmes qui cessent quand Monsieur a donné sa parole. (Murmures à gauche.)
Mon amendement, que je crois plus qu'un autre dans les principes de la Révolution, de la Constitution et de la liberté, est que l'Assemblée déclare que, conformément aux principes de la Constitution, il est défendu aux municipalités, corps administratifs et autres personnes de donner ou d'exiger des passeports.
Je demande la parole.
Si l'amendement de M. de Lameth n'avait pas été précédé de quelques motifs et qu'il se fût contenté de le présenter purement et simplement, comme M. Camus, je me serais contenté de l'abandonner à la question préalable qui le serrait de très près. Mais les motifs qui ont précédé cet amendement m'ont paru mériter une réfutation très sérieuse.
Il est en effet très important que les vrais amis delà Constitution, que ceux qui l'aiment constamment — et sans doute nous l'aimons tous — (Murmures à gauche; applaudissements au centre)... Il est, dis-je, très important que les amis de la Constitution et de la liberté soient enfin d'accord sur les moyens de les affermir l'une et l'autre de les rendre inaccessibles aux efforts de nos ennemis.
Le préopinant a déclaré qu'il croyait que ces moyeos devaient être les mêmes que ceux avec lesquels on a commencé la Révolution, c'est-à-dire l'insurrection— (Murmures à gauche.)
Je n'ai pas dit cela.
On me déclare que j'ai mal compris et mal entend».
Plusieurs membres à gauche : Oui ! oui 1
J'y consens ; je me résous à avoir mal entendu et je me réjouis de voir que nou3 nous rallions tous aux vrais principes. Nous convenons qu'autant il a été nécessaire, au berceau de la Révolution, de déployer d'énergie contre l'autorité despotique dont il ; fallait enfin délivrer ce beau royaume et qui pesait si lourdement sur nous, autant il est nécessaire aujourd'hui de rasséréner l'horizon, de rassurer l'état des affaires, de faire renaître l'ordre et la tranquillité et d'apprendre au peuple que le bonheur, l'aisance dont il a l'espoir, l'assurance de jouir, ne peuvent exister pour lui qu'avec le rétablissement de Ja paix. (Vifs applaudissements.)
Je me réjouis de voir que personne ne conteste ces maximes bienfaisautes; et si, après la sanction que leur donnent les applaudissements de l'Assemblée, quelqu'un croyait encore qu'il faut s'opposer à l'autorité légitime, qu'il faut protéger la résistance aux lois, je devrais mettre en garde l'Assemblée contre des principes qui tendraient évidemment à rétablir tous les désordres, contre des conseils perfides, dignes seulement des ennemis véritables du peuple, du bonheur public et de la liberté. {Vifs applaudissements à droite.)
J'avoue que j'ai été surpris de voir le préopinant demander la parole sur l'amendement de mon frère, pour n'en pas dire un seul mot, et pour lui prêter les sentiments que son caractère connu repousse absolument. (Murmures et applaudissements.) J'espérais que le préopinant aurait du moins cru devoir épargner son collègue.
Je crois que l'amendement qui vous a été proposé par mon frère et que j'avais l'intention de proposer moi-même (Rires à droite)... quand j'ai demandé la parole, est de la plus grande importance dans les circonstances où nous nous trouvons. Je ne combats nullement les principes sur lesquels on a appuyé la liberté de Mesdames comme de tout citoyen, de sortir du royaume et d'aller où bon leur semble. Cependant, c'est une question que votre comité, s'est réservé de résoudre, si, dans un moment de Révolution, chaque citoyen n'est pas tenu de rester dans sa patrie... (Murmures et applaudissements) et s'il nest pas coupable d'abandonner un pays où la liberté s'établit, pour revenir après les secousses jouir des bienfaits achetés par tant de travaux. Les anciens ont loué ceux qui s'attachaient à une opinion déterminée, ceux qui se dévouaient pour leur pays, et ils ont également frappé de blâme et les émigrants e,t les impartiaux. (Applaudissements et murmures.)
Je reviens à l'amendement : il est impossible que l'Assemblée nationale méconnaisse les circonstances critiques où nous sommes. (Murmures à droite).
prononce de son banc quelques paroles qui ne parviennent pas jusqu'au bureau.
Monsieur de Bonnay, vous avez présidé, et très bien présidé ; vous savez qu'on ne doit pas interrompre un opinant.
Je prie qu'on ne vous interrompe pas.
L'Assemblée na-
tionale est instruite par le roi lui-même qu'il a résisté au désir de Mesdames... (Murmures à droite)... qui, pour le dire en passant, se sont plutôt évadées de la capitale qu'elles ne sont parties pour un voyage...
Il n'y a que des prisonniers qui s'évadent ; et ce que vient de dire M. de Lameth ferait croire que la famille royale est prisonnière à Paris. Je demande qu'il soit rappelé à l'ordre.
Je demande que M. de Lameth soit rappelé à l'ordre.
Je demande, que M. d'Estour-mel soit rappelé à l'ordre pour interrompre sans cesse.
Je consens-que M. d'Es-tourmel soit rappelé à l'ordre; mais je demande grâce pour M. de Lameth.
L'Assemblée a lieu de penser que le roi n'attend peut-être que son Vœu pour agir; et l'on vous proposerait de vous associer à Mesdames contre le désir du roi et le vœu de la nation!
Pliisieurs membres : Aux voix 1
et autres membres : La discussion est fermée.
Quel est l'objet de l'amendement ? C'est d'avertir le roi. Qui est-ce qui en a plus que nous le droit et le devoir ? C'est de lui dire que le peuple est affamé, ruiné par les émigrations. (Murmures et applaudissements.) Voilà ce qu'un bon citoyen doit désirer : entendre déclarer au roi par le Président de l'Assemblée nationale, que l'Assemblée n'est plus responsable des malheurs publics, quand . elle a dit aux1 tantes du roi, nourries et entretenues par la nation, qui leu-r a prouvé constamment son attachement et ses égards, qu'il est étonnant qu'elles l'abandonnent. (Applaudis- , sements.)
Je ne crois pas qu'un ami de la liberté et de la prospérité publique puisse demander la question préalable sur un pareil amendement. v
Plusieurs, membres demandent la question préalable. (Bruit prolongé.)
Je crois que l'Europe sera bien étonnée d'apprendre que l'Assemblée nationale s'est occupée pendant quatre heures du I départ de deux dames qui aiment mieux entendre la messe à Rome qu'à Paris. (Rires et applaudissements.)
Je demande qu'on aille aux voix sur la rédaction de M. de Mirabeau, et que la discussion soit fermée sur Je fond et sur les amendements.
Plusieurs membres : Aux voix I
Je demande à dire une parole, si M. de Lameth ne retire pas son amendement.
Non, Monsieur, je ne le retire pas,
Ma parole, la voici : M. de
Lameth, tout en déclarant qu'il n'y a pas de loi pour empêcher Mesdames de voyager, propose par amendement de représenter au roi l'état actuel du royaume pour qu'il retienne ses tantes.
Ce n'était pas un amendement; c'était une rédaction portant que, d'après la loi antérieure, il appartenait au roi de donner aux membres de sa maison la permission de voyager. . Dès lors, mon opinion personnelle était que l'Assemblée nationale devait charger son président de le déclarer au roi et en même temps de lui représenter la situation actuelle du royaume pour que le roi, dans sa sollicitude, puisse juger s'il devait permettre à Mesdames de sortir au royaume.
Il résulte de la déclaration de M. Lameth que je ne m'étais pas trompé dans les intentions de son décret et que je me trompais fort peu dans ses expressions. Il résulte de l'état de la délibération que, la priorité ayant été accordée au projet de M. de Mirabeau, M. Barnave a converti en amendement la proposition de M. de Lameth.
Sous quelque nom que l'Assemblée l'adopte, je dis que cette proposition, qu'on la considère comme amendement ou comme motion, n'est propre qu'à mettre le trouble dans le royaume, et voici comme je le prouve. Il arrivera, après le vœu manifesté par l'Assemblée, de deux choses l'une : ou le roi interdira à Mesdames ses tantes la faculté dé continuer leur voyage, ou il ne la leur interdira pas. S'il la leur interdit, il se brouille ivec sa famille ; s'il ne la leur interdit pas, d'après lé vœu de l'Assemblée, il se brouille avec son peuple.
Je demande donc la question préalable sur l'amendement de M. de Lameth.
Plusieurs membres : Sur tous.
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il n'y a lieu à délibérer sur aucun amendement.)
Je mets aux voix la question
Erincipale, qui est la rédaction de M. de Mira-eau :
« L'Assemblée nationale, considérant qu'aucune loi existante du royaume ne s'oppose au libre voyage de Mesdames, tantes du roi, déclare qu'il n'y a lieu à délibérer sur le procès-verbal de la commune d'Arnay-le-Duc, et renvoie l'affaire au pouvoir exécutif. »
(Ce décret est adopté.)
annonce l'ordre du jour de la séance de ce soir.
La séance est levée à quatre heures et demie.
présidence de m. duport.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Un de MM. les secrétaires donne lecture des adresses suivantes :
Adresse du commissaire du roi auprès du tribunal du district de la Grasse, qui annonce que sur 75 fonctionnaires publics qui sont dans ce district, 71 ont prêté solennellement le serment civique.
Adresse de ia société des amis de la Constitution de Rodez, qui atteste que c'est au patriotisme de dom Nogaret, vicaire de la ci-devant Chartreuse de cette ville, que la nation doit la découverte d'un dépôt d'argent, billets et autres effeis précieux dont les religieux voulaient la frustrer. Celte société sollicite une gratification pour ce patriote généreux, persécuté par ses supérieurs.
Adresse des officiers municipaux de la commune de Prenne, district de Villeneuve, composée de 28 paroisses, qui annoncent que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics, et même un ancien curé non fonctionnaire, se sont consacrés à la patrie, par un serment civique, avec un zèle admirable-
Adresse des volontaires patriotes du Port-au-Prince, qui expriment à l'Assemblée la plus vive reconnaissance au sujet de la mention honorable qu'elle a daigné faire de leur patriotisme dans son décret du 12 octobre dernier. Ils renouvellent le serment de demeurer inviolablement attachés à leur patrie et à leur roi.
Adresse du sieur Delaroche, vicaire fonctionnaire du district de Chalans, département de la Vendée, qui fait hommage à l'Assemblée 4e la prestation de son serment civique.
Adresse des officiers du tribunal du district de Vihiers, département de Maine-et-Loire, qui présentent à l'Assemblée nationale le tribut de leur admiration et de leur dévouement.
Adresses des officiers municipaux de Chanlac, département de l'Ardèche, de Saint-Angel, département du Puy-de-Dôme, et de Saint-Loup-les-Landes, départemeot de la Creuse, contenant les procès-verbaux du serment civique prêté par les curés et vicaires de ces différentes paroisses.
\Jn de MM. les secrétaires fait lecture des procès-verbaux des séances des 22 et 23 février au soir, qui sont adoptés.
fait lecture à l'Assemblée de nouveaux documents arrivés du département du Gard et relatifs aux troubles d'Uzès.
1° D'une lettre du directoire du département du Gard, ainsi conçue :
« Nous vous avons rendu compte des troubles qui se sont manifestés à Uzès, les 14 et 15 de ce mois, et des mesures que le directoire a jugées nécessaires. Aujourd'hui nos commissaires nous ont instruits que la grandeaffluence des gardes nationales qui, de tous le3 environs d'Uzès, accourent au secours de cette ville, a occasionné des désordres qu'on s'est vainement efforcé de prévenir : deux maisons ont été brûlées. Nous avions chargé le district d'Uzès de renvoyer dans leurs municipalités respectives les gardes nationales qui étaient déjà arrivées, de se reposer sur les troupes de ligne que nous avions requises, et sur nos soins. Nous avons pensé que le rétablissement de l'ordre exigeait de nouveaux moyens, de nouvelles précautions; et, par un arrêté dont nous vous envoyons copie, nous avons requis 300 hommes de la garde nationale de Nîmes, de se rendre à Uzès avec deux pièces de canon, à l'effet d'entretenir le bon ordre, le respect dû aux
Sersonnes et aux propriétés. M. Vigier, membre u directoire, est parti avec le détachement, pour se réunir aux commissaires qui sont depuis hier à Uzès. M. Dalhignac, commandant des troupes du département, s'y est aussi rendu avec un nouveau renfort de troupes de ligne ; et nous espérons beaucoup du courage, de la prudence et du patriotisme de cet officier général. Nous apprenons que M. Voulland, commandant de la garde nationale d'Uzès, qui a sauvé sa patrie par son courage et sa prudence, a préservé la maison de M. Tringuelague, ancien maire et commissaire du roi, de la dévastation et du pillage. Il s'est conduit pendant tous ces troubles, avec une touchante générosité, et il a exposé sa vie pour maintenir l'ordre, comme pour repousser les malveillants. »
2° D'une lettre du directoire du district d'Uzès : « Nous continuons à vous rendre compte des événements relatifs à l'affaire d'Uzès. Les fugitifs de cette ville se sont répandus dans la campagné où ils excitent le3 peuples à l'insurrèction. La religion est toujours le prétexte de leurs coupables entreprises. Le directoire a sans cesse les yeux ouverts sur tout ce qui l'environne ; il n'est pas sans inquiétude sur un rassemblement de
fardes nationales qui s'est, dit-on, effectué en ivarais, aux environs de Jaïès; les avis se multiplient, et de toutes parts les esprits fermen-
tent au suprême degré. Nous ne perdons pas un moment; nous ne négligeons aucun moyen; et lorsque nous pourrons vous donner des notions précises sur l'état de la contrée, nous satisferons a ce dernier devoir avec exactitude. La ville d'Uzès est tranquille, et toutes nos craintes tiennent aux tentatives que nous avons à redouter du dehors. Il est à présumer qu'aujourd'hui même nous serons contraints de requérir les gardes nationales du département; cependant nous sommes pleins de cette espérance qui ne peut abandonner des citoyens qui ont pour eux leur courage, la justice et les lois. »
A ces pièces sont jointes une délibération du directoire du département et une proclamation du directoire du district d'Uzès.
(L'Assemblée ordonne le renvoi de ces documents au comité des rapports.)
, au nom du comité de Constitution, présente un rapport relatif à la liquidation faite par le commissaire du roi de plusieurs offices.
Il propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de judicalure, qui lui a donné lecture du résultat des opérations du commissaire du roi . dont le tableau suit :
TABLEAU.
NOMS DES VILLES.
Aix..................
Angoulême..........
Auch................
Aurillae..............
A.ix.................
Bar-sux-Aube........
Bar-sur-Seine........
Beauvais............
Bony-sur-Loire......
Bourg-en-Bresse
Blois................
Briey.........'.......
Besançon............
Corbigny............
Commercy..........
Idem..'..,...........
Idem...............
Crépy ...............
Dijon...............
Douay..............
Châie'au-Porcien.....
Figeac..............
Flandres............
Fenestranges........
Fismes .. ;..........
Gabelles............
Gannat...............
Idem...............
Laigne..............
Lirnoux.............
Loudun.............
Lunéville...........
Le Mans.....t......
Maubeuge...........
Mayenne............
Melun..............
Idem...............
Idem...............
Idem...............
Meulan.............
Montmarault.......
Mirecourt..........
Nancy,.............
Nantes.............
Idem..............
Noyon.............
Orléans............
Ornans.........;».
Idem..............
Paris..............
Idem...............
Idem..............
Idem..............
Phalsbourg........
Ploermel..........
Pont-à-Mousson.... Pont-sur-Yonne
Provins............
Idem..............
Idem..............
Perpignan.........
Provins............
Rennes............
Rouen.............
Rosières.........
Sap..............
Sarreguemines....
Idem.............
Soissons..........
Saintes...........
Senlis ut Soissons
Saint-Maixent.....
Saint-Étienne.....
Sainte-Menehould.
Saint-Quentin.....
Saint-Lô..........
Toul..............
Tonnerre..........
Tliiaucourt........
Tourneheim.......
Vassy............
Dettes actives. Passives......
COMPAGNIES LIQUIDÉES.
PAGES.
MONTANT des liquidations
Chambre des comptes...........................
Eaux et forêts..............................
Bureau des finances...........................s.
Bailliage......................................
Bureau des finances. Addition...............
Ejection.......................................
Eaux et forêts.................................
Bailliage.......................................
Municipalité.................................
Election.......................................
Eaux et forêts.................................
Bailliage......................................
Présidial......................................
Municipalité...................................
Bailliage.....................................
Jurés priseurs..................................
Municipalité....................................
Bailliage.......................................
Table de marbre...............................
Parlement, voyez Flandres.....................
Grenier à sel. Addition........................
Election.......................................
Parlement.....................................
Bailliage.......................................
Bailliage.............................*.......
Contrôleurs généraux (des).....................
Election........................................
Grenier à sel.................................
Eaux et forêts................................
Sénéchaussée et présidial.....................
Election......................................
Municipalité..................................
Chancellerie ..................................
Municipalité..................................
Election......................................
Châtelet.....................................
Jurés priseurs.................................
Municipalité..................................
Election......................................
Bailliage.....................................
Municipalité..................................
Municipalité..................................
Bailliage.-....................................
Dépôts des sels.............................
Présidial.. ;..................................
Election......................................
Châtelet. Addition............................
Bailliage d'..................................
Municipalité...................................
Conseil des finances..........................
Table de marbre, eaux et forêts...............
Bureaux des finances. Addition...............
Maîtres des requêtes de l'hôtel du roi........
Eaux et forêts...............................
Sénéchaussée................................
Municipalité.................................
Prévôté.......................................
Bailliage.............:.......................
Election.....................................
Mattrise des eaux et forêts...................
Chancellerie. Addition.......................
Grelier à sel................................
Présidial.......;.............................
Président du parlement........... ..........
Municipalité........'.........................
Vicomté du..................................
Bailliage.....................................
Eaux et forêts...............................
Eaux et forêts...............................
Présidial...................................
Grand maître des eaux et forêts.............
Sénéchaussée................................
Election.....................................
Traites foraines..............................
Bailliage de Vermandois à...................
Bailliage........ ............................
Municipalité..................................
Election.....................................
Bailliage......................................
Eaux et forêts,..............,................
Prévôté...................................
31 16 24 11 28 6 19
27
19
20 2 7
23 14 16 14 4 16 22
28
4
30 25
25
7
27
26
8 22
19
20 3
21 3 8 1
5 12
6 b
12
13 18
25 9
24 10
9 28
1
14 28
3 2
21 14 18 6
14 7 24
26 23
10
14 21
4
13 23 18
15 2
11 15 17
5 17 10
9 12
114,146 1. 361,169 147,328 75,352 91,378 18,918 126,523 8,000 59,663 108,650 85,128 60,936 1,200 75,052 10,556 31,124 23,196 132,114
3,030 59,868 2,285,706 17,639 1,169 469,390 92,470 26,275 117,421 63,372 36,804 82,697 8,761 50,323 74,432 97,215 23,813 21,578 78,281 22,402 1,673 69,357 270,160 79,962 434,427 52,883 24,738 79,085 29,491 563,084 363,072 84.504 4,364,207 20,715 46,006 80,746 2,470 70,888 48,576 70,119 299,691 22,001 317,820 109,992 28,605 16,663 64,118 194,393 68,892 177,136 307,236 54,956 92,111 7,787 143,186 50,133 75,178 66,562 23,043 66,997 19,298
» s.
13 »
»
18 1
17 »
17
7 10
11 »
16 12
4 6
16
15 9
16 3
8 2
5 11
9 »
2
13 8 7 1
9 »
2
3 15 18
2 5
14 11
4
10 U 19 10
2 10
4 9 6
»
2 7
4 »
6
B »
7 » 10 2
6 »
3 1 18 13
8 »
»
12 19 1 5
7 »
1 9 15 10 19 12 9 3
3
4
13
»
7 3
1
2 »
»
5
6 4
581,660 livres. 581,500
Différence au profit de la nation..........................................
Total de la présente liquidation, montant à la somme de quinze raillions cent cinquante trois mille neuf cent vingt-quatre livres onze sols six deniers, ci.......
Les dettes actives, dont la nation profite, sont de................................
Mais celles passives, dont elle est chargée, sont de..............................
Différence à la charge de la nation.......................................
160
15,153,924 liv. 11 s.
6 d.
675,721 17 902,874
10
10
227,152
13
10
« Décrété que, conformément audit résultat, il sera payé par la caisse de l'extraordinaire, la somme de 15 millions 153,924 livres 11 sous 6 deniers, à l'effet de quoi les reconnaissances de liquidation seront expédiées aux officiers liquidés, en satisfaisant par eux aux formalités prescrites par les décrets. »
(Ôe décret est adopté.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion de l*affaire de Nimes (I).
Messieurs, si j'ai demandé la parole sur cette affaire, c'est qu'il fallait un député de Nîmes pour éclaircir quelques faits-, pour répondre aux calomnies répandues contre une partie de ses habitants. Je ne retracerai pas tous les détails que vous a donnés le rapporteur:; je ne m'attacherai pas à suivre M. le maire de Nîmes dans le dédale de son récit ; je me crois seulement obligé de repousser quelques faits inexacts.
La municipalité de Nîmes cherche à vous séduire par des procès-verbaux qu'elle-même a dressés comme elle a voulu; elle s'est flattée que le masque d'authenticité pourrait vous en imposer; mais les procès-verbaux sont des pièces extrajudiciaires; eHes sont suspectes; ce sont des déclarations dont la plupart ont été recueillies après coup.
Je vous demande si la municipalité accusée peut vous donner en témoignage son témoignage, si elle a pu informer quand les tribunaux informaient légalement et par vos décrets, et si vous pouvez balancer entre ^information publique et juridique, qui est déposée au comité, et l'information illégale et secrète que la municipalité lui Oppose.
Après cette observation, je vais droit au fait, je laisse de côté la discussion. M. de Marguerittes a paru éloigner soigneusement les faits qui déposent contre la municipalité, et détourner de votre attention les circonstances frappantes du projet de contre-révolution, formé dans les murs de ma malheureuse cité : je vais vous présenter la question sous son vrai point de vue.
La municipalité de Nîmes accuse les protestants d'avoir formé et exécuté le complot de massacrer les catholiques. Voilà crûment et simplement son assertion. Les ménagements dont M. le maire dé Nîmes a usé dans sa défense ne sauraient effacer ce que la municipalité elle-même a écrit; et ce moyen, plus dangereux qu'une attaque même qui pouvait affaiblir la défense de ines concitoyens, ne m'empêchera pas de dire la vérité. Je soutiens au contraire et je vous prie, Messieurs, de bien peser la justesse de mes expressions. Je soutiens qu'un eertain nombre de factieux soutenus par la municipalité avaient formé le projet d'exécuter une guerre civile dans le Languedoc pour y opérer une contre-révolution; ils ont tout tenté pour faire battre les protestants avec les catholiques, ce à, quoi ils n'ont pu réussir. Voici, Messieurs, les deux points dont je vous supplie de ne pas écarter votre attention.
La municipalité prétend que les protestants ont formé et exécuté le
projet de massacrer les catholiques. Cette assertion est surtout
souverainement injuste aux yeux des hommes sans passion. Les protestants
ne sont dans la ville de
Et, Messieurs, les protestants qu'on s'efforce de retirer malgré eux de l'obscurité, pour en faire un motif de guerre civile, que vous demandent-ils ? Rien. Vous avez tout fait pour eux, en déclarant pour tous les citoyens les droits de l'homme. Vous avez semé pour tous les Français le germe de la liberté ; ils auront aussi leur part de la récolte; voilà leur intérêt, et ils entendent leurs intérêts. On ne fera donc croire à personne qu'ils aient voulu obtenir, par une force qu'ils n'ont pas, des bienfaits déjà obtenus, et qu'ils ne peuvent conserver que par la sagesse et la modération. (Applaudissements.)
Il y a deux partis dans Nîmes. Comme dans plu-sieurs villes ces deux partis sont les amis et les ennemis de la Constitution; et je vous supplie, Messieurs, de ne pas perdre de vue cette considération importante et qui vous donnera la clef de la conduite des municipaux. Il y a deux partis dans Nîmes, dont l'un sont tous les gens de l'ancien régime ; j'avoue que presque tous ces messieurs sont catholiques, mais il3 ne sont pas catholiques de Nîmes. Dans l'autre parti sont les protestants et les catholiques, qui aiment le nouveau régime ; les commerçants qui chérissent une Constitution qui doit affranchir le commerce de ses entraves; les propriétaires de tous genres, qui vous bénissent de les avoir affranchis de la gabelle et de la dîme, des conseillers catholiques, des procureurs et des avocats de l'une et de l'autre religion. 11 y a deux partis à Nîmes, l'un est mixte et l'autre ne l'est pas: l'un veut la paix et la tranquillité, et l'autre le trouble. Le cri du premier, est : Vive la nation, vivent le roi et la loi ! Lecri du second est : Vive le roi, vive la croix, vive Varistocratie, à bas la nation !
Un membre à droite applaudit. (Tumulte prolongé.)
Plusieurs membres : C'est un malentendu. (Le tumulte continue.)
Il n'y a personne dans cette Assemblée capabled'insulter à ce point la nation ; c'est un malentendu.
Tout est mixte dans le parti des citoyens qui dénoncent la municipalité; et les catholiques et les protestants l'ont condamnée également. Le procureur du roi qui a fait informer, et que la municipalité inculpe, est catholique; les juges dont elle se plaint sont catholiques; les témoins qui ont'déposé contre elle sont protestants et catholiques, et les plus fortes dépositions sont celles des prêtres. Dans l'insurrection du 13 juin, dont l'objet était de dissiper le eorps électoral ^t d'empêcher la formation des départements, lës gardes nationales accoururent à Nîmes au secours de leurs électeurs, dont quelques-uns catholiques avaient été blessés ou menacés. Ces généreux citoyens étaient mixtes; des curés se mirent eux-mêmes à la tête des bandes courageuses, et les conduisirent eux-mêmes dans notre infortunée cité. Si
des gardes nationales ont exercé des vengeances sur les ligueurs, ce sont des gardes nationales toujours mixtes, les patriotes du pays usant de réprésailles contre les antipalriotes.
Qui peut se tromper à ce langage? Qui ne voit dans la perfidie avec laquelle les ligueurs affectent de ne parler que des protestants le dessein de couvrir leurs entreprises sanguinaires du voile de la religion? Yeut-on savoir la vérité? C'est que tous les efforts étaient réunis pour troubler les opérations du corps électoral. On doit observer que, lorsque les ligueurs virent que les électeurs avançaient leurs travaux et que l'administration se formait, ils formèrent leurs attaques. Quelques électeurs furent attaqués. Le sieur Felacion, procureur interdit de ses fonctions, disait aux soldats à. pouf rouge : t Mes amis, c'est par le club qu'il faut commencer, et ne pas laisser échapper un de ceux qui y sont. Or il y avait dans le club 200 électeurs qui, avertis à temps, se sauvèrent -bien vite. Je dois ajouter que plusieurs d'entre eux qui étaient logés aux tours eurent leurs fenêtres criblées de coups de fusil. C'est donc à eux qu'on en voulait.
Je récuse le procès-vérbal fait par des officiers municipaux qui prennent un barbare plaisir à nombrer les morts, à se promener parmi des cadavres dont le sang crie vengeance contre eux, qui d'une plume sanguinolente grossissent leur liste criminelle, et qui disent les uns aux autres, n'y en a-t-ilpas encore? Je récuse les procès-verbaux d'une municipalité qui grossit le nombre des morts, pour enfler et grossir ses inculpations, qui les porte ou les fait porter par ses écrivains, Jusqu'au nombrede7 à 800,mêmede 1,000,tandis que le juge criminel, calcul que j'ai hésité de rapporter, ne les fait monter qu'à 110, et M. le rapporteur à 220; calcul affreux et d'autant plus coupable, qu'un plus grand nombre n'est qu'une plus grande cumulation de reproches. Elle a tout à se reprocher, car rien ne serait arrivé si elle n'avait pas favorisé les factieux.
Tel était le projet de3 malveillants à Nimes. Il est convenu, aisaient-ils, que nous devons faire les premiers pas, et bientôt les principales villes du royaume nous.suivront. Mais une guerre veut un prétexte, on lé trouve dans la religion, et l'on excite la haine contre les protestants. Mais ces perfidies sont odieuses! Eh bien! il faut accuser les protestants d'avoir voulu massacrer les catholiques. Mais les protestants sont visiblement les plus faibles, ont par conséquent le plus d'intérêt à la paix. Eh bien! il faut dire qu'ils sont soutenus par l'Assemblée nationale, que c'est elle qui les a encouragés au massacre.
La formation du département a été la véritable occasion du complot des ligueurs, qui voyaient avec fureur s'établir une autorité qui allait veiller au maintien de la Constitution, qui allait la protéger contre les entreprises d'une municipalité coupable.
Ce motif d'opposition était si bien connu, que les assemblées primaires étaient inquiètes sur le sort de leurs électeurs à Nîmes, et qu'on avait demandé qu'ils fussent transférés à Beaucaire.
Les menaces se succédaient chaque jour avec plus de violence contre les électeurs; elles sont prouvées dans l'information. Plusieurs en furent effrayés et prirent ia fuite; les autres, et ce fut la plus grande partie, firent solennellement le serment de rester et de braver tous les dangers.
Les ligueurs se rassemblèrent près du palais où étaient assemblés les électeurs, et y firent entendre les plus violentes menaces.
Si ma patrie est désormais célèbre par de grands excès et de grands crimes, de grands exemples de courage et de dévouement y ont été aussi dounés, et les courageux amis de la Constitution l'out enfin emporté.
Il est certain que l'information, que l'agression a commencé par les ligueurs, que les protestants ont été égorgés, qne des vieillards ont été foulés au pieds et pendus à leur porte. J'avoue que les gardes nationales, qui étaient accourus au secours des patriotes égorgés, ont eux-mêmes poussé trop loin la vengeance. Ils ont poursuivi un catholique dans la maison-de mon père et de. mon frère qui lui avaient donné asile, et qui le lui ont fidè-, lement gardé.
Ce serait donc s'abuser que de ne voir, comme l'a prétendu insidieusement le maire de Nîmes, qu'une querelle de religion, où il n'y avait de division que sur des intérêts purement temporels. Que l'Assemblée juge donc non pas entre deux sectes, mais entre ses amis et ses ennemis.
Cependant que l'Assemblée daigne n'adopter que des mesures de paix. Si les auteurs coupables des désordres doivent être punis, que la foule de ceux qu'ils ont entraînés au crime, en leur mettant sur les yeux le bandeau de l'erreur, échappe à la vengeance de la justice. Entendez, dans le midi de la France, ces bruits sourds qui présagent une explosion et qui ne nous ont jamais trompés. Adoptez, je vous en conjure, des mesures qui embrassent le présent et l'avenir.
Et si vous pensez que l'acharnement de ces ennemis qui se jettent impitoyablement sur les enfants paisibles d'une religion dont je suis un des ministres; si vous pensez que cet acharnement soit implacable, otez-leur tout sujet de trouble, prononcez notre exil du Languedoc, nous serons soumis à votre voix.
Indiquez-nous, dans l'étendue de l'Empire français, un coin de terre où nous puissions vivre en paix, nous y bénirons vos lois. Parlez, nous sommes prêts a tout quitter, si vous l'ordonnez. Hélas 1 nous avons souffert tant de maux! nous sommes habitués aux émigrations.
Je conclus à l'adoption du projet de décret présenté par le comité.
(La suite de la discussion est renvoyée à samedi soir.)
lève la séance à dix heures et demie.
PRÉSIDENCE DE M. DUPORT.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier au matin, qui est adopté.
La parole est à M. Gossin pour présenter un rapport, au nom du comité de
Constitution, sur plusieurs demandes faites par
, au nom du comité de Constitution. Messieurs, l'administration de3 Bouches-du-Rhône demande la nomination d'un sixième juge au tribunal de commerce à Marseille. La population de cette ville est immense, les affaires commerciales y sont multipliées à l'infini; 5 juges ne pourraient suffire à leur expédition, d'autant plus que ces juges auront dans leur compétence les affaires cou tentieu ses du tribunal d'amirauté, qui était composé de 6 juges; les directoires de district et de département appuient la demande de la municipalité. Le comité de Constitution est d'avis que la loi de l'organisation judiciaire qui établit les cas dans lesquels on peut nommer un sixième juge aux tribunaux de district, reçoit à celui dont il s'agit une application très juste et nécessaire.
Il existe dans le département du Var, district de Saint-Paul, une commune dont les habitants ne peuvent former une municipalité; ce sont les propriétaires, de la commune de Vence qui possèdent presque tout le territoire de Malvans; cependant Yence est du district du Var, et Malvans est de celui de Saint-Paul: cette distribution nuit à l'exécution d'une bonne organisation, au bon ordre et à l'exécution de la répartition de l'impôt.
Le comité de Constitution vous propose la réunion en une seule de deux municipalités qui se sont formées dans la paroisse d'Issigny; sa population ne s'élève pas au delà de 3,000 âmes; cependant ces deux municipalités emploient 40 personnes en activité, et il en résulte une mésintelligence très nuisible.
Voici le projet de décret :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution sur les pétitions des départements des Bouches-du-Rhône, du .Lot, du Var, des communes de Brest et d'Issigny, décrète ce qui suit :
« Le tribunal de commerce établi dans la ville dë Maiseille, en exécution de la loi de l'organisation judiciaire, aura un sixième juge.
« Les mçmbres dont ce tribunal sera formé, pourront se diviser en deux chambres, en conformité des articles 2 et 3 du titre de ladite loi, pour la plus prompte expédition des affaires dont la compétence a été attribuée aux tribunaux de commerce.
« Il sera établi des tribunaux de ce genre dans les villes de Brest et Saint-Etienne.
« La ville de Cahors aura deux juges de paix.
« La commune de Malvans est distraite du district de Saint-Paul, pour être unie à celui de Grasse, et faire partie de la commune de Vence.
« Les deux municipalités établies dans la paroisse d'Issigny, département du Calvados, sont supprimées pour n'en former qu'une, à l'organisation de laquelle il sera incessamment procédé. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité des finances, fait un rapport sur les sommes à fournir pour des travaux utiles dans le port du Havre et propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète qu'il sera fourni, par le Trésor public, une somme de 650,000 livres pour les travaux du Havre, en dix payements de 65,000 livres chacun, dont le pre-
mier commencera au mois de mars, et ainsi de mois en mois. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité des finances, demande qu'il soit accordé des indemnités aux citoyens dont les maisons ont été démolies lors de la construction du pont de Roanne, et propose le décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète qu'il sera payé 45,000 livres sur le Tré-or public, pour indemnité des maisons dont la démolition a été ordonnée pour la construction du pont de Roanne, sauf le remplacement de cette somme sur le département de Rhône-et-Loire, s'il y a lieu. »
(Ce décret est adopté.)
Dans le texte de la loi sur les ponts et chaussées imprimé à l'Imprimerie nationale, il s'est glissé une erreur importante.
A l'article 10, du titre III, il est dit : « Il sëra alloué chaque année 80,000 livres... » Or, le chiffre décrété par l'Assemblée est 8,000 livres : il y a donc lieu de remplacer le chiffre de 80,000 livres par celui de 8,000 livres, qui est le véritable.
"(L'Assemblée décrète que cette erreur sera corrigée et qu'une nouvelle impression de la loi sera faite.)
, au nom du comité dés finances,, fait un rapport sur les comptes à rendre par les_ receveurs ae district au sujet de la contribution patriotique et donne lecture d'un projet de décret.
Je demande, par amendement, que les dispositions de ce décret soient rendues communes aux receveurs et trésoriers des ci-devan t pays d'Etat.
, rapporteur. J'adopte l'amendement; voici le projet de décret amendé.:
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, considérant l'impossibilité où ont été les directoires de district de faire rendre les comptes de la contribution patriotique, tant aux receveurs particuliers des finances qu'aux collecteurs, dans les 15 premiers Jours de février au {plus tard, ainsi qu'il était prescrit par la loi du 14 novembre, vu que les collecteurs, pour l'exercice de 1791, n'ont point été nommés a ladite époque du 15 février, et la nécessité de faire comprendre dans les comptes des ci-devant receveurs, les dépenses auxquelles ont pu donner lieu les frais de perception, de rédaction et d'expédition des rôles, d'après les bases décrétées par l'Assemblée nationale, les 20 décembre 1790 et 27 janvier 1791,.décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Les ci-devant receveurs particuliers des finances auront, pour rendre leur compte de là contribution patriotique, jusqu'au 1er mai de la présente année 1791, à l'effet par eux d'y comprendre toutes les dépenses qui ont pu ou pourront être acquittées en vertu des décrets des 23 décembre 1790 et 27 janvier 1791.
Art. 2.
« Pour mettre les receveurs de district à même de continuer la perception de ce qui reste dû de la contribution patriotique pour l'année 1790, et
pour les termes suivants, les receveurs particuliers des finances seront tenus, aussitôt après la notification du présent décret par le procureur-syndic du directoire de district, chef-lieu de l'arrondissement de leur recette, de former et remettre au directoire de district, dans les quinze jours qui suivront la notification, et ce, sous peine d'être privés de la remise à-eux accordée par le décret du 20 décembre 1790, un état détaillé du montant de la recette pour chacune des municipalités composant leur arrondissement de recette, conformément au modèle qui leur sera fourni par le commissaire du roi au département delà caisse de l'extraordinaire.
Art. 3.
« Aussitôt aprè3 la remise de cet état au directoire du district, il en sera formé autant d'extraits qu'il existe de districts se partageant l'arrondissement de chaque recette particulière des finances; et ces extraits, dûment certifiés, seront envoyés à chacun des directoires de district qui les concernera, pour être remis au receveur de ce même district.
Art. 4.
« A défaut de percepteurs nommés pour 1791, les collecteurs de 1790 suivront la perception de la contribution patriotique, et il leur sera tenu compte du denier pour livre sur les sommes effectuées qu'ils auront reçues pour chacun des receveurs entre les mains desquels ils auront versé leurs deniers.
Art. 5.
« Toutes les sommes reçues sur la contribution patriotique par les ci-devant receveurs particuliers des finances, pour leur ancien arrondissement de recette, et le reliquat qui pourrait se trouver en caisse à l'époque de la reddition de leur compte, seront versées dans la caisse des receveurs de district, à l'effet par ceux-ci d'en remettre le montant à la caisse de l'extraordinaire.
« La copie du compte rendu par chaque receveur particulier des finances, sera envoyée, certifiée par le procureur syndic du district, au commissaire du roi au département de la caisse de l'extraordinaire,, à l'effet dé constater la recette des ci-devant receveurs généraux des finances, et d'arrêter leur compte ; déclare, de plus, l'Assemblée nationale le présent décret commun aux receveurs et trésoriers des ci-devant pays d'Etat. »;
(Ge décret est adopté.)
fait lecture d'une lettre que lui ont adressée les commissaires des députés composant l'assemblée générale de Saini-Do-mingue, lors de leur embarquement sur le vaisseau le Léopard, par laquelle ils demandent une audience à une heure de l'après-midi à la séance de demain.
J'observerai qu'il est intéressant de différer d'entendre les commissaires de Saint-Domingue, jusqu'à ce que l'Assemblée ait décrété les instructions sur l'organisation des colonies.
Je propose, en conséquence, l'ajournement de l'audience demandée, après que l'Assemblée aura entendu son comité colonial, qui doit lui soumettre incessamment le projet d'instruction sur l'organisation des colonies.
(Cet ajournement est décrété).
L'Assemblée juge-t-elle à propos de commencer sur-le-champ la discussion du projet de décret du comité de Constitution sur la résidence des fonctionnaires publics (1)? . (L'Assemblée consultée décide que la discussion est ouverte.)
, rapporteur. Messieurs, je n'ai rien à ajouter aux motifs que j'ai eu l'honneur de vous exposer dans'mon rapport et qui ont décidé le comité de Constitution à vous proposer le projet de décret sur les devoirs des membres de la famille royale. La discussion peut donc s'ouvrir sur l'ensemble du projet qui vous est soumis ; si personne ne se présente pour parler contre, je vais donner lecture du premier article.
(ci-devant de Villeneuve). Messieurs, il faut dans cette discussion s'assujettir à une marche certaine, et ne pas perdre ae vue cette réflexion, que la loi qui vous est présentée s'ap-' plique au cours ordinaire des choses, et particulièrement au roi et à sa famille. Ici s'offrent deux questions principales : 1° Doit-on placer tous les membres ae la dynastie sous la même ligne? 2° Leurs obligations ne diffèrent-elles en rien de celles des autres citoyens?
Selon les uns, les premiers comme les derniers de cette famille sont appelés à gouverner, et il ne faut pas confondre ces. membres avec les autres citoyens.
Selon d'autres, ce serait un funeste privilège que l'esclavage politique des membres de la dynastie. Assujettis aux volontés de la nation, ils entrevoient des dangers à faire de la famille du roi une caste particulière. Ge serait fortifier dés préjugés dangereux, que d'habituer les degrés décroissant de la famille du roi, à se regarder comme privilégiés dans l'Etat.
Je vais me renfermer dans la question de la résidence. Votre comité vous propose d'obliger à la résidence ceux d'entre les membres de la dynastie qu'il désigne comme suppléants du roi. Pour moi, je ne veux pas de membres de la dynastie revêtus de ce titre par une loi ; le chef seul doit être en évidence.
En dernière analyse, la question doit se présenter sous un aspect simple et rigoureux. En principe, aucun membre de la dynastie n'étant en -fonctions, tous, excepté le chef, doivent être assujettis à résider dans l'intérieur du royaume ou à n'en sortir que du consentement du Corps législatif, ou bien tous doivent pouvoir s'en absenter sans cette autorisation ; et j'incline pour ce dernier parti.
N'oublions jamais que cette loi est pour des temps de paix et de tranquillité ; car dans des temps orageux, dans des temps de crise, lorsque l'Etat est menacé, lorsque le Corps législatif l'a déclaré, déclaration que lui seul peut faire, alors la loi contre les ômigrants est en vigueur; chaque citoyen doit rentrer. Si les princes désobéissent à la loi, s'ils ne rentrent pas, la nation les prive des distinctions qu'elle leur a accordées. C'est une peine juste et qui naît de la nature même du délit.
Je propose que le roi seul, en sa qualité de fonctionnaire public sans
cesse en activité, ne puisse sortir du royaume et que les autres membres
de la dynastie, indistinctement, puissent
(ci-devant de Vieuzac). Messieurs, la loi et les conditions de la résidence des fonctionnaires publics de tout genre sont si évidentes, qu'il est inutile d'insister sur ce point. Le comité de Constitution a présenté les principes avec beaucoup de clarté et de méthode ; mais son projet de décret m'a paru insuffisant et mal conçu. Je viens vous en proposer un autre qui embrasse avec plus d'étenaue et d'énergie le principe de la résidence, et qui se concilie avec ie droit naturel d'émigration. Ces deux objets sont essentiellement liés entre eux, et c'est sous ce double rapport que je vâis présenter quelque réflexions.
- La loi de la résidence, combinée avec la liberté le l'émigration, est une grande question, qui présente différentes raisons de décider suivant les temps et suivant les personnes. J'ai dit salivant les temps, qui peuvent être des temps ordinaires de calme et de sécurité, ou des ternis extraordinaires de crise et de révolution. J'ai dit encore suivant les personnes, qui peuvent être de simples citoyens, des fonctionnaires publics, le chef de la dynastie régnante, de tous les fonctionnaires publics le plus éminent, et les divers membres de cette dynastie. Dans chacune de ces hypothèses la nécessité de la résidence, la liberté de l'émigration, se décident par des motifs différents, et, pour les bien sentir, -il faut poser avant toutes choses les principes généraux, dont les motifs sont les conséquences nécessaires.
Commençons par considérer la question dans l'es temps ordinaires de calme et de sécurité. Dans ce cas le simple citoyen a une liberté indéfinie d'émigration, qui est une conférence nécessaire des droits de l'homme. D n'y a que le bonheur et la volonté qui peuvent l'attacher à un pays, et il n'y a que les tyrans qui peuvent méconnaître ces principes. Dans le fonctionnaire public, au contraire, le droit de l'homme à cet égard n'est pas entier, parce qu'il y a renoncé librement, en acceptant avec les fonctions publiques la loi de la résidence ; il n'est pas alors l'esclave de cette loi, parce qu'il est libre de renoncer à ses fonctions publiques, et de reprendre ainsi les droits de l'homme dans l'état de simple citoyen.
Le roi doit être considéré comme un fonctionnaire public par excellence, par conséquent plus soumis que tout autre à la loi de la résidence, dans les limites de l'empire, qui sont celles de ses fonctions. C'est lui-même qui a renoncé à cette partie des droits de l'homme, en acceptant le pouvoir exécutif. Sa gêne à cet égard est volontaire, parce qu'il conserve la liberté d'abdiquer la couronne. Il peut cependant exister des circonstances et un tel état de choses, qu'il soit nécessaire ou utile que le roi puisse sortir du royaume; les voyages furent souvent la meilleure école des rois.
La dynastie régnanle, soit qu'on veuille la restreindre à la ligne directe, soit qu'on veuille comprendre les lignes collatérales, est soumise,
Jour les mêmes raisons, aux mêmes restrictions
ans la liberté de l'émigration, dans les temps même de calme et de sécurité; mais ce n'est pas comme fonctionnaires publics. Les membres divers de cette dynastie sont de vrais citoyens actifs, et sous ce rapport essentiel à fixer, sont de simples citoyens compris dans la loi générale de l'égalité politique; et par conséquent^ on ne
les considérait que sous ce rapport, ils auraient une liberté entière d'émigration. Je suis loin de penser, avec 1e comité, qu'on puisse les regarder comme fonctionnaires publics par fiction, ou comme suppléants. Il n'y a pas de fiction dans les lois constitutionnelles; il n'yapas de suppléants à la couronne. Elle a des successeurs éventuels et des héritiers présomptifs, qualité qui s'étend aux mâles de la branche directe et des branches collatérales.
C'est sous ce rapport et comme membres de la dynastie qu'ils sortent de l'ordre de simples citoyens, sans sortir des lois de l'égalité politique. Leur titre, depuis le premier héritier présomptif de la couronne, jusqu'au dernier membre des branches collatérales, donne à chacun d'eux un droit éventuel à la couronne. Ce droit éventuel les attache à la nation plus intimement que les simples citoyens, et les attache plus intimement encore à la personne du roi. ils jouissent tous des grands bienfaits de la nation; ils participent tous en diverses manières aux avantages et aux agréments inséparables d'un état qui tient de fort près au pouvoir exécutif suprême. C'est à la nation qu'ils doivent la magnificence de leur état et de leurs espérances. On ne contestera donc pas à la nation le droit de mettre à ces grands bienfaits la condition qu'ils ne s'éloigneront pas d'elle sans son consentement ; et cette condition, avant même que vous l'ayez décrétée, devait être considérée comme une condition tacite qu'on doit supposer nécessairement entre une nation sagement généreuse, et les princes d'une âme honnête et sensible. Je dis plus, elle existait même dans l'ancien régime. L'histoire de Louis XIV nous en fournit plus d'un exemple.
Quand le moment est venu où des membres de la dynastie paraissent enfreindre cette condition essentiellement tacite, c'est à vous de la consacrer par un décret formel qui puisse à jamais assurer à cet égard les droits de la nation et les devoirs de la dynastie entière. Les mêmes raisons s'appliquent aux femmes qui sont ou la femme du roi, ou la mère de l'héritier présomptif de la couronne; quant aux autres femmes, membres de la dynastie, qui, à l'exception du droit éventuel de la couronne, jouissent des grands bienfaits que la nation accorde aux membres de la famille royale, et des avantages qui rejaillissent sur elles ae leur proximité du trône, cela ne peut détruire leur liberté d'émigrer comme les autres citoyens dans les temps ordinaires.
Ainsi, si cette question est déjà décidée contre la dynastie régnante, dans les temps ordinaires de calme et de sécurité, comment ne le serait-elle pas dans l'hypothèse des temps de crise et d'orage? L'histoire des révolutions politiques nous apprend que cet état est toujours un état de crise violente qui contient des germes de guerre intérieure, et qui menace toujours de la guerre au dehors contre des puissances intéressées à étouffer autour d'elles les explosions de la liberté. Il faut donc appliquer aux temps de révolution les droits qui appartiennent à une nation dans les temps de guerre et surtout dans les guerres d'où dépendent le salut du peuple et le destin de la patrie.
Qui pourrait douter que dans de pareilles cir-«constances la nation ne puisse Buspendre pour un temps la liberté naturelle aux citoyens de sortir du Toyaume? L'Angleterre, si jalouse de la liberté individuelle, ne la sacrifie-t-elle pas dans des temps orageux à la liberté politique, en
suspendant pour un temps l'exercice de l'acte à'habeas corpus, quoiqu'il soit la sauvegarde et le plus ferme rempart de la liberté civile ? Quelque contraire que paraisse être aux droits de l'homme le droit de retenir le citoyen, ce droit n'est-il pas, en temps de guerre, une loi dictée souvent par la sagesse et l'humanité comme un gage de la sûreté et de la foi publique? « J'avoue, dit Montesquieu, que l'usage des peuples les plus libres qui aient jamais été sur la terre, me fait croire qu'il y a des cas où il faut mettre pour un moment un voile sur la liberté comme l'on cache les statues des dieux. »
D'après ces principes, que penserez-vous de la prétention que montreraient les membres de la dynastie régnante de s'éloigner, s'il leur plaît, de l'empire qui les a élevés à une grande hauteur, et du peuple qui les entretient avec un grand luxe; ae s'éloigner du monarque, dont ils sont les accessoires inséparables, ae s'en éloigner contre le vœu général de la nation; de s'en éloigner dans un temps de troubles, et lorsqu'une heureuse révolution jette le royaume dans une crise qui doit réunir tous les bons Français contre les coupables manœuvres des citoyens pervers; de s'en éloigner, en exportant une masse immense de numéraire, dans un temps de détresse qui force l'Etat à chercher fon salut dans une abondante émission de papier libérateur? Ah! si la liberté ne fut jamais la faculté de mal faire, si elle ne fut jamais le droit de nuire à la patrie', si elle ne fut jamais le droit de fuir les dangers de la patrie, même de les augmenter pour prix de ses immenses bienfaits, vous rendrez un décret qui, après avoir appris à la dynastie les droits que lui donne la nation, lui apprendront aussi les devoirs qu'elle est en droit ae lui imposer.
C'est d'après ces considérations que je propose le décret suivant :
« Art. 1er. Les fonctionnaires publics ne
pourront, sans légitime empêchement, s'absenter des lieux où ils doivent
exercer des fonctions continues,ni retarder leur retour dans les lieux
où ils doivent, à des époques fixes, reprendre des fonctions non
continues, au delà du temps déjà déterminé par les décrets, ou que
l'Assemblée se réserve de déterminer pour chaque classe de
fonctionnaires publics, à peine d'être remplacés comme étant censés
avoir renoncé à leurs fonctions.
« Art. 2. Les fonctionnaires publics ne pourront mêmè se permettre, sans y être autorisés par les corps dont ils sont membres ou par les supérieurs déjà désignés à cet effet, ou que l'Assemblée se réserve de désigner pour chaque classe de ces fonctionnaires, l'absence entière tolérée par l'article précédent, mais seulement l'absence momentanée qui est déjà dispensée par les décrets de la formalité de l'autorisation, ou que l'Assemblée nationale se réserve d'eu dispenser, et ce à peine de perdre le double de la partie de leur traitement correspondant au temps ae leur absence.
« Art. 3. Le roi, comme premier fonctionnaire public, dont l'autorité continue doit s'étendre sur toutes les parties du royaume, est compris dans les dispositions de l'article 1er, sauf les cas où l'Assemblée nationale jugera si elle doit ou ne doit pas consentir à ce qu'il sorte du royaume ; et dans ce cas elle déterminera, suivant les circonstances, la durée de cette absence.
« Art. 4. Pendant la durée des sessions de l'Assemblée nationale, le roi, comme premier fonc-
tionnaire public,sera tenu de résider auprès d'elle.
« Art. 5. L'héritier présomptif de la couronne ne pourra s'éloigner de la personne du roi, ni voyager sans son consentement dans l'intérieur du royaume, et il ne pourra en sortir sans y être autorisé par un décret du Corps législatif, sanctionné par le roi et qui aura déterminé l'époque de son retour.
« Art. 6. La reine de France, soit qu'elle soit ou ne soitnas mère de l'héritier présomi itif de la couronne, ae cela seul qu'elle est essentiellement la compagne du roi, et qu'elle participe à la liste civile,est soumise aux dispositions de l'article 1er.
« Art. 7. Il en sera de même de la mère du roi de France pendant sa minorité ; et de la mère de l'héritier présomptif de la couronne, encore qu'elle ne fût pas reine de France, sans que par le présent article et le précédent l'Assemblée nationale entende rien préjuger ni sur la loi de la régence, ni sur l'éducation d'un roi mineur ou de l'héritier présomptif de la couronne.
« Art. 8. Les membres qui forment la ligne directe de la dynastie régnante, même ceux qui forment les branches collatérales de mâle en mâle, comme ayant tous un droit éventuel plus ou moins prochain à la couronne, jouissant de grands avantages attachés à la proximité du trône et formant une famille indivisible et un seul tout avec le roi qui en est le chef, seront pareillement soumis aux dispositions de l'article 6.
« Art. 9. Les femmes qui font partie de la famille royale ou de celle des princes du sang royal, n'étant pas appelées à la grande substitution de la couronne et n'étant que de simples citoyennes, ne pourront, comme eux, être retenues dans l'intérieur du royaume, si ce n'est dans des temps de crise, de révolution orageuse, de guerre, soit extérieure, soit intérieure,ou d'extrême disette du numéraire, leur émigration pouvant en ce cas augmenter le3 calamités publiques; et ces cas seront déterminés par le Corps législatif. »
Messieurs, votre comité de Constitution a fait distribuer hier un projet de loi, précédé d'un rapport sur la résidence des fonctionnaires publics, sur lequel l'Assemblée veut délibérer dès aujourd'hui. Nous avons eu à peine le temps de le lire. Il y eut hier comme vous le savez, Messieurs, deux séances qui furent l'une et l'autre très proloi gées, et celle du soir fut troublée par les attroupements séditieux qui se portèrent au château des Tuileries. Cette précipitation de promulguer ainsi des lois, ne doit-elle pas faire craindre que le public ne les regarde comme des lois de circonstances," comme des lois, pour ainsi dire, dictées impérieusement au Corps législatif?
Cependant une loi d'une aussi haute importance demandait une méditation profonde et le silence du cabinet, pour en balancer les avantages et les inconvénients. Cette loi majeure, qui doit embrasser tous les fonctionnaires publics, n'a pas même prévu l'ordre hiérarchique, où ces fonctionnaires publics auraient à se pourvoir pour des dispenses ou pour des absences qui pourraient être nécessitées par des circonstances impérieuses.
Mais cette loi prend encore un caractère plus imposant, puisqu'elle comprend parmi les fonctionnaires publics le roi et la famille royale. C'est particulièrement aux articles qui concernent la dynastie régnante que je vais m'aîtacher et vous présenter, Messieurs, quelques observa-
tions, pensées rapidement sur un projet très incomplet et quiexigeun examen plus approfondi, une discussion plus sérieuse. Le sort de l'Empire, la tranquillité publique, la liberté du peuple vont dépendre de cette loi; je le répète, elle ne peut être trop méditée et je conjure l'Assemblée de ne pas presser sa délibération.
Il existe en Europe deux chefs du pouvoir exécutif, à qui les honneurs de la prééminence coûtent la liberté individuelle; et ces chefs ne sont pas des souverains, ce sont les doges de Gênes et de Venise. Le premier est prisonnier dans le palais de la nation, il attend avec impatience que les deux années de sa magistrature suprême soient écoulées, alors on lui dit: Votre Sérénité a fait son temps, Votre Excellence peut se retirer chez elle. Son Excellence obéit avec joie, elle éprouve que les droits de l'homme et du citoyen valent au moins ceux dont on a décoré la première place. Le secoud ne peut sortir des lagunes de Venise sans la permission du Sénat, et sa captivité dure autant que sa vie. Si le décret qu'on vous propose est adopté, auquel des deux pourrons-nous comparer le roi des Français? Sans doute à tous les deux: au doge de Venise par la longueur de sa captivité, au doge de Gênes par la circonscription du lieu de sa servitude.
On veut que le roi ne puisse s'éloigner du Corps législatif pendant qu'il et assemblé, c'est-à-dire qu'on veut le condamner à une prison perpétuelle, à moins que par un décrit bien constitutionnel, vous ne renfermiez la tenue des futures assemblées législatives dans le terme de quelques mois, sauf à vous à le faire exécuter quand vous ne serez plus. Au reste, la captivité des deux doges ne nuit en rien à l'administration. Ils ne peuvent dans aucun cas commander les forces militaires. Il n'en est pas ainsi du roi que vous avez décrété le chef suprême de l'armée; sans doute, il lui sera permis de la commander, d'exposer sa vie pour le salut de la patrie. Si cette armée, conduite par la victoire, suit les ennemis sur leurs propres foyers, si le théâtre de la guerre s'établit au delà de nos frontières, condamnerez-vous son chefs uprême à l'inactivité? Sera-t-il réduit à ne contempler que de loin les triomphes de nos guerriers? Quelle inconséquence de porter une loi dont le premier mot fait naître l'idée des exceptions? Enfin, quelle nécessité d'attacher sans intermède la présence du roi aux Assemblées législatives? Lorsque la Constitution sera achevée et acceptée, la célérité de la sanction ne sera peut-être pas d'une aussi grande urgence, et les décrets des futures législatures n'en auront pas moins de force, quoiqu'on n'y ajoute pas que le Président se retirera sur-le-champ par devers le roi. Il lui sera permis sans inconvénient de parcourir les parties de l'Empire que sa présence ne peut que vivifier et d'acquérir,dans ses voyages, l'instruction et l'expérience si nécessaires a Part du gouvernement. Un roi serait bien malheureux, si son existence publique empoisonnait sa vie privée. Craignez, Messieurs, en environnant le trône de désagréments et de privations, de ré luire le roi à la triste condition d'un doge de Venise, et de lui faire désirer, mais sans espoir, ce terme heureux qui rend, au bout de deux ans, le doge de Gênes à sa famille.
Il est nécessaire pour la liberté de la- sanction que le roi puisse s'éloigner à sa volonté du Corps législatif. Sans cette faculté, la sanction pourrait être soupçonnée d'un consentement extorqué
par la crainte à un roi faible. Un successeur d'un caractère entreprenant, d'un esprit inquiet, d'un génie ardent, ne pourrait-il pas, un jour, troubler la tranquillité publique en voulant revenir sur des lois sanctionnées (dans son système) d'une manière illégale? La même raison qui prescrit la liberté absolue, pour le Corps législatif, l'exige également pour le dépositaire et l'agent suprême de la force publique; puisque, les deux pouvoirs étant indépendants l'un de l'autre, il leur faut une égale liberté. Le Corps législatif étant le maître de choisir le lieu de sa résidence, le roi, comme pouvoir exécutif, ne doit pas en avoir une forcée. En un mot, marchant à même hauteur, puisqu'ils ne sont l'un et l'autre que les délégués de la nation, leurs droits sont les mêmes.
On ne se contente pas d'enchaîner le roi par des liens prétendus politiques, on veut les étendre sur une partie de sa famille, et que le prince du sang, tuteur-né du dauphin et régent provisoire, ne puisse sortir du royaume tant que le dauphin sera en minorité. Mais, Messieurs, peut-il exister un tuteur, un régent provisoire, tandis que le roi régnant tient les rênes du gouvernement? J'en demaode pardon aux auteurs du projet, mais c'est abuser étrangement des subtilités de la métaphysique. Quoi I parce que le premier prince du sang est appelé par sa naissance à la régence du royaume, si le roi meurt avant lui, il est, en vertu de cette éventualité, tuteur de l'héritier présomptif delà couronne 1 Dès l'instant que cet héritier aura vu le jour, le premier prince du sang sera privé de sa liberté individuelle, sous le prétexte frivole qu'il peut être un jour appelé à des honneurs dont il est douteux qu'il jouisse jamais! En vérité, une opinion aussi singulière ne mérite pas d'être combattue sérieusement, et c'est la pulvériser que delà présenter sous son vrai point de vue.
Quel est donc le motif étrange de vous proposer un décret de circonstances qui ne peut subsister, qu'une législature plus calme ne manquerait pas d'annuler. Il faut dévoiler la vérité; c'est le motif de la terreur. Ofi, de la terreur dont on ne cesse de nous envelopper, de la terreur qui ébranle l'Empire jusque daus ses fondements.
Mesdames partent pour l'Italie : elles ont suivi, disent les factieux, l'impulsion des ennemis de la patrie: un bruit vague se répand que Monsieur veut aller prendre les eaux: ce prince va se mettre à la tête des contre-révolutionnaires. Aussitôt le peuple s'assemble aux Halles, et court violer sa maison.
Nous avons encore été témoins hier des attroupements séditieux qui ont troublé le chef de la nation, jusque dans l'enceinte sacrée de son palais.
Le peuple dans son égarement ne voit partout que des ennemis de la Constitution, et ne sent pas que les véritables ennemis de la Constitution sont ceux qui tendent à rendre son joug intolérable, à détruire la liberté individuelle, et à changer le royaume en une vaste prison. Quoi qu'on ose vous dire, Messieurs, ce n'est point un décret constitutionnel; c'est un décret de circonstances qu'on veut vous arracher, puisqu'on: saisit l'instant où le peuple est dans la plus violente fermentation. Sans cette fermentation, excitée par le départ de deux princesses qui n'ont a cun droit au trône, on ne vous eût pas proposé un projet de loi, dont une partie, étant de droit commun, ne méritait pas d'être
discutée, et dont l'autre partie est offensante pour la famille royale.
Je dis que les trois premiers articles sont de droit commun, et qu'il n'est pas nécessaire de rendre un décret constitutionnel pour obliger les fonctionnaires publics à la résidence. C'est une chose de pur règlement.
L'article 4 est ainsi conçu :
« Le roi, premier fonctionnaire public, doit « avoir sa résidence à portée de l'Assemblée na-« tjonale, lorsqu'elle est réunie; et lorsqu'elle « est séparée, le roi peut résider dans toute autre « partie du royaume. »
Je dis que ' cet article est offensant pour le roi:
1° En ce que les Français ne s'accoutumeront jamais à l'idée de classer le roi parmi les fonctionnaires publics. Il est le chef suprême de la nation ; il est partie intégrante de la Constitution. Il répugne à des sujets fidèles, pénétrés de la grandeur et de la majesté de son caractère, de le con-idérer comme un fonctionnaire salarié;
2° En ce que cet article attaque son inviolabilité; car vous n'avez pas sans doute borné celte inviolabilité au privilège humiliant de ne pouvoir être traduit devant un tribunal. Vous l'avez mis encore, quant à la responsabilité, au-dessus des atteintes de la loi, et, à plus forte raison, vous ne l'avez pas astreint à rendre compte de ses actions purement personnelles. Vous devez vous contenter de sa parole dunnée de ne point s'éloigner du Corps législatif, parole plus sacrée que le devoir que vous voudriez lui imposer.
Le caractère connu du roi ne peut laisser aucune inquiétude ; mais si l'un de ses successeurs voulait s'éloigner du Corps législatif, j'ose le demander : quelle peine aurait-il encouru? Quel tribunal oserait la prononcer? Quel tribunal en aurait le droit? Si l'inviolabilité peut être attaquée, vous n'avez plus de force publique, vous renvtrsez la Constitution, et vous exposez le royaume aux intrigues des factieux. Des démagogues égarent le peuple, s'emparent de son esprit, le conduisent aux portes du palais, et. forcent le roi à la fuite. Le roi serait-il donc détrôné d'après la loi que votre comité vous propose? Une loi qui pourrait êlre la cause de factions, la source des plus grands malheurs, doit être proscrite.
L'article 6 porte : Que si l'héritier présomptif est mineur, le suppléant majeur qui sera le plus.près de succéder à la couronne, d'après la loi constitutionnelle de l'Etat, sera assujetti à la résidence, conformément au précédent article, sans que,par les présentes dispositioi s, l'Assemblée nationale entende rien préjuger sur la loi de la régence.
Je dis que cet article est attentatoire à la liberté individuelle du premier prince du sang, et qu'il serait souverainement injuste d'enchaîner cette liberté sur le prétexte de la vacance toujours possible, mais en même temps toujours incertaine du trône.
L'article 7 exige que : « Tant que l'héritier « présomptif sera mineur, sa mère sera tenue à « la même résidence. L'Assemblée nationale n'en-« tend rien préjuger sur ce qui concerne l'édu-« cation de l'héritier présomptif, ou d'un roi « mineur. »
Cet article offense encore plus cruellement la mère de l'héritier présomptif de la couronne. On n'aurait jamais dû mettre en question si une princesse aussi grande, aussi magnanime et en
même temps aussi attachée au sort de son auguste époux, à l'éducation de ses enfants, pourrait jamais oublier un devoir sacré, un devoir dicté par la nature ?
Enfin l'article 9 est ainsi conçu:
« Tout fonctionnaire public qui contreviendra « aux dispositions du présent décret, sera censé « avoir renoncé sans retour à ses fonctions; et « les membres de la famille du roi seront censés « de même, en cas de contravention, avoir re-« noncé personnellement et sans retour à la suc-« cession au trône. »
Cet article, qui renferme peut-êlre le germe secret d'un cruel ressentiment, est contraire au décret rendu sur la succession au trône par droit de primogéniture ; car ce décret n'est point une nouvelle inauguration, il est un aveu formel que fait la nation entière de l'inaliénabilité du droit à la couronne. Droit auquel on n'est jamais censé avoir renoncé, si la renonciation n'est expresse, parce que la tranquillité publique, ennemie des factions que la démarche inconsidérée d'un prince peut faire naître, exige que ce droit soit aussi solide que les bases de l'Empire.
On ne me contestera pas que les erreurs et les égarements d'un jeune prince peuvent être des fautes, mais ce né sont pas des crimes. Pourrait-on punir une inconséquence, une étourderie, par la perte d'une couronne? Quelle proportion entre le prétendu délit et une peine aussi grave? Ne serait-ce pas s'exposer aux horreurs d'une guerre civile, à une anarchie effroyable? Quel est le prince qui se verrait exclu d'un trône où sa naissance et la loi constitutionnelle de l'Etat l'appellent, sans tenter tous les moyens d'y monter? Et plus le prince serait jeune, et plus l'esprit d'une vengeance légitime lui en donnerait les moyens; et les mêmes causes qui auraient préparé ses malheurs politiques, lui serviraient à les réparer. Un prince qui, par jeunesse, par l'enthousiasme de voyager, de s'instruire, de voir des hommes, serait sorti du royaume, aurait sans doute beaucoup d'énergie et d'activité, toute l'intrépidité, tout le courage d'esprit nécessaire au soutien de ses droits?
Les peuples, dit-on, n'ont pas été faits pour les rois, mais les rois pour les peuples. Ce principe, d'une grande vérité, signifie que les peuples ne se sont donnés des rois, que pour se soustraire aux malheurs sans cesse renaissants de l'anarchie, et que la tranquillité des empires dépend de l'ordre immuable de la succession à la couronne.
D'après ce rapide exposé, d'après la brièveté du temps qui ne m'a permis que quelques réflexions hâtives, réflexions qui demandent un grand développement ,je conclus Messieurs, à ce qu'il soit retranché du projet de décret tous les articles concernant le roi et la famille royale, parce qu'il est de la dignité de l'Assemblée, et de toutes convenances de s'en rapporter sur tous ces points à la sagesse du roi, et que l'Assemblée n'ait à s'occuper que de la loi concernant les fonctionnaires publics, si toutefois elle juge cette loi pressante ; ce qui n'est pas mon opinion.
Messieurs, mon opinion particulière est qu'il faut ajourner une question aussi importante à quelques jours. (Murmures.)Je vais tracer en très peu de mots l'aperçu des raisons qui doivent déterminer l'Assemblée à cet ajournement; me laisser parler, c'est économiser votre temps.
Plusieurs membres : Parlez! parlez!
Le projet de loi sur lequel vous avez à délibérer ne nous a été distribué qu'hier... {Murmures.) et ceux d'entre nous qui ont assisté à la séance du matin et à celle du soir ont à peine eu le temps de le lire et ne peuvent avoir une opinion réfléchie sur les dispositions importantes qu'il contient.
Si l'Assemblée nationale veut considérer qu'une des dispositions de ce décret, qui fixe la résidence du roi dans le royaume, tend à priver le pouvoir exécutif suprême, à qui la loi a spécialement imposé le devoir et donné le droit de maintenir les propriétés de ses sujets dans l'intérieur du royaume et de les défendre à l'extérieur, tend, dis-je à lui ôter le droit de commander l'armée, et à le réduire à cet état honteux des derniers rois, sous lesquels la première et la seconde dynastie ont cessé d'être; si l'Assemblée nationale veut considérer qu'en traitant d'une part le roi de fonctionnaire public, et en déclarant, d'une autre, déchus de leurs places, les fonctionnaires qui contreviendront aux précédents articles, on repousse le principe de l'inviolabilité; si vous considérez cela, vous devez admettre que l'article qui porte la déchéance du roi au trône est inconstitutionnel : il viole une inviolabilité que vous avez reconnue comme sacrée. Car il est démontré que si le roi peut être déchu, il peut être jugé; s'il peut être jugé, il n'est point inviolable, et alors le gouvernement français ne peut plus être libre. Car l'Assemblée nationale sait bien que ce n'est pas pour l'avantage particulier de la personne du roi, que sa personne est déclarée inviolable, c'est pour la liberté du peuple;en effet, si le pouvoir exécutif n'était pas inviolable, s'il était justiciable d'un corps quelconque, justiciable du Corps législatif, alors il serait dépendant; et si le pouvoir exécutif était dépendant, vous verriez l'ambition multiplier les factions et les désordres; le pouvoir législatif envahirait l'autorité suprême, et la nation,comptée pour rien, perdrait ses droits et sa liberté. (Murmures.) Le Corps législatif serait tout, le pouvoir exécutif ne serait rien.
Un membre : Vous discutez le fond.
Il est facile de s'apercevoir, à la rapidité de mon aperçu, que je Centre pas dans le lond de la question.
Ainsi donc le projet de décret attente d'abord à la violabilité du roi.
Il est évident, d'autre part, que l'article qui déclare exclus du droit au trône les princes appelés à la succession à la couronne, s'ils contreviennent à ce décret, viole l'hérédité du trône ; et, avant de déclarer une pareille loi, il faudrait d'abord considérer s'il n'est pas vrai que l'hérédité de la couronne était existante avant l'Assemblée nationale. (Murmures et rires à gauche.)
11 est singulier qu'on ne puisse vous dire qu'il faut examiner la loi qu'on vous propose.
S'il est vrai que l'Assemblée nationale a unanimement reçu de la nation française l'ordre formel de respecter l'hérédité au trône, il n'est pas vrai qu'elle a le droit d'y imposer des conditions; il n'est pas vrai qu'elle puisse décréter des dispositions par lesquelles elle reconnaisse les délits qui pourraient changer l'ordre de succession au trône. C'est là une question extrêmement importante; car l'hérédité au trône n'est pas une prérogative royale, mais bien une prérogative du peuple; c'est à cause des malheurs
incalculables qu'entraînerait toute espèce de doute sur cette succession qu'elle a été créée.
Eb! quand il serait vrai qu'il y a des délits qui puissent engager la nation ou ses représentants a changer la succession au trône, ce qui n'est pas une question, ne serait-il pas absurde de punir le peuple, quand un prince, appelé à la succession au trône, aurait commis un délit ? Et quel délit encore? Une absence du royaume sans la permission du Corps législatif, absence qui peut trouver eo;i excuse dans l'inexpérience de l'âge et dans la fougue des passions. Non, ce n'est pas pour une étourdérie de jeunesse que le peuple doit être exposé à toutes les horreurs de la guerre civile.
Je crois que cet aperçu extrêmement rapide, extrêmement résumé, auquel je donnerai déplus grands développements lorsque l'Assemblée me le permettra, et auquel je lui demanderai de donner beaucoup d'attention lorsque le fond de la question sera traité, doit suffire pour motiver l'ajournement.
Remarquez, Messieurs , que l'incohérence, l'obscurité de la rédaction qui vous est proposée par le comité, montre la précipitation avec laquelle elle a été faite. 11 est vrai que cette précipitation a été, pour ainsi dire, ordonnée à votre comité, et c'est déjà une faute; mais ce serait une faute bien plus grave, une faute bien plus impardonnable de se hâter comme lui et de mettre autant de précipitation à changer le projet de décret qu'il vous soumet en droit constitutionnel.
J'espère que, dans une occasion aussi importante, o n ne pa r 1 era pas ici de ci rcons tan ces. Certes, il faudrait plaindre la nation française, si ses représentants se trouvaient jamais dans des circonstances telles qu'ils fussent obligés de précipiter la délibération d'un décret dont dépend et la liberté publique et le bonheur du peuple. Ge n'est jamais sans la plus grande indignation que j'entends parler de circonstances dans cette Assemblée. Ceux qui en parlent sont sans doute les plus grands ennemis de la Constitution. (Murmures.)
C'est ainsi qu'ils diminuent la confiance due aux décrets; c'est ainsi qu'ils en détruisent l'autorité. Le Corps législatif doit être indépendant des circonstances qui l'entourent; il doit être impassible comme la loi même. Les murmures, l'indignation, les cris, les désirs, les-vœux, les mouvements du peuple qui l'entoure, doivent se briser contre les murs de ce sanctuaire. (Applaudissements.) Rendt.z-vous dignes du caractère auguste dont vous êtes revêtus; souvenez-vous que vous êtes les dépositaires de l'autorité nationale et n'oubliez jamais que c'est surtout dans la langue des hommes libres que force veut dire vertu.
Je conclus à ce que le décret du comité de Constitution soit ajourné et je mets en fait qu'il n'est aucun membre de cette Assemblée qui ait assez de connaissances en droit politique pour pouvoir traiter aujourd'hui une aussi grande question.
M. de Cazalès a demandé l'ajournement de la question et il s'est fondé sur l'importance même de cette question et sur la nécessité d'un examen approfondi. Il est impossible de se dissimuler cette importance; mais il est impossible aussi de se dissimuler les raisons qui ont fait désirer à l'Assemblée na'ionalé de traiter immédiatement ce sujet important; il est impossible de méconnaître et notre situation et les circonstances où nous sommes placés (Mumum.) ;
il est impossible de se cacher à soi-même ce qu'elles exigent de nous, La loi qu'on nous propose tient a des questions tellement majeures, qu'un ajournement convenable serait trop étendu pour les besoins du moment Je pense donc que ce n'est point par un ajournement, mais par une loi provisoire, que vous pouvez pourvoir à ces besoins. Le fond de la question ne peut être examiné que quand vous vous serez occupés de la régence, et que votre comité vous aura présenté ses vues sur d'autres points constitutionnels très importants. Cependant les principes généraux sont assez clairs pour que nous puissions dire, dès maintenant, qu'en attendant cette époque aucun membre de la famille royale ne pourra sortir du royaume sans la permission du Corps législatif. (Murmures a droite.)
Je demande la parole pour répondre à cela.
Je vais entrer dans des développements très courts qui me paraissent suffire pour établir cette proposition.
Comme homme, chacun jouit d'une liberté pleine et entière ; comme citoyen, chacun jouit des droits civils, eu acquittant ies obligations du citoyen. La loi hxe ces obligations ; en les remplissant, on s'acquitte envers la société et l'on, acquiert la faculté de jouir pleinement des droits civils que le contrat social assure à tous les individus qui la composent. Dans des temps ordinaires et paisibles, ces obligations se bornent aux contributions nécessaires ; mais, dans des temps orageux et critiques, lorsque la société a besoin du secours entier que chacun peut lui offrir, de la totalité des ressources de chaque citoyen, conséquemment de leur présence, elle a droit de l'exiger. Le corps social nous garantit nos droits, nos propriétés, tout, ce que nous avons mis en commun ; chaque individu doit la plénitude de ses facultés. Ne vouloir pas acquitter ce .devoir, c'est renoncer aux bienfaits que le contrat social nous accorde.
Ainsi donc, comme citoyens, la loi peut obliger provisoirement les membres de la famille royale à se retirer dans le sein de la nation, jus-quà ce qu'elle leur ait octroyé une permission de s'absenter.
Comme suppléants du premier de tous les fonctionnaires publics, leur devoir est encore plus évident. Il est impossible de dire que, dans une Constitution où par un droit héréditaire les membres de la famille royale sont successivement appelés au trône, chacun d'eux ne soit pas un suppléant de cette première dignité ; et si la nation trouve de son intéiêt de retenir ces suppléants dans son sein, soit pour qu'ils saisissent la succession si elle est ouverte, soit pour qu'ils n'aillent pas, parmi des nations étrangères, puiser des principes contraires à la Constitution ou se former à l'étude de la tyrannie; il est incontestable qu'elle a le droit, du moment qu'elle leur a donné la qualité de prétendants au trône, de les retenir dans son sein ou la qualité de suppléant à cette dignité n'est p?s un droit : un droit de citoyen, c'est une constitution sociale que la société a établie librement et qu'elle peut en conséquence charger de toutes les conditions qu'il lui plaît. On ne peut réclamer le droit d'hommes et de citoyens en qualité de fonctionnaire oublie ou de suppléant de fonctionnaire public. 11 est donc incontestable que les membres de la famille royale, qui peuvent
succéder au trône, peuvent être retenus dans la nation par la loi constitutionnelle.
On fait une distinction entre lés temps paisibles et les temps orageux et de révolution. Quand nous en serons à la loi définitive, nous examinerons cette distinction : nous examinerons jusqu'où la suppléance s'étend; nous examinerons si l'obligation de résider en France doit porter seuleqpent sur le3 mâles qui, dans notre Constitution, sont les seuls héritiers du trône, ou si les femmes doivent y être comprises : je pense que la négative s'établira facilement sur cette dernière proposition. Nous examinerons enfin, et c'est un point de profonde discussion, si les obligations particulières des membres de la famille royale doivent se réduire à la question de résidence, ou si, au contraire, les restrictions doivent s'étendre jusqu'à la prohibition du conn mandement des armées et de l'exercice du droit de citoyen actif.
Je crois, pour ma part, que ce serait tout au plus au premier et au second héritier présomptif que la restriction pourrait s'appliquer ; autrement vous sépareriez un trop grand nombre de Français des devoirs de citoyens auxquels il importe de les attacher et vous créeriez une classe particulière. La suppléance exige la présence ; elle ne permet pas la distraction de quelques autres occupations..
Toujours est-il vrai que si ces différentes questions méritent d'être étudiées et résolues avan d'arriver à celle qui nous occupe, nous en savons assez, dès ce moment, sur les principes généraux pour décréter, dès aujourd'hui, que, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la régence, sur les fonctionnaires publics, sur les devoirs particuliers de la famille royale, aucun membre de cette famille royale ne pourra sortir du royaume. Con-r sidérés comme fonctionnaires publics, comme citoyens, la nation ne peut souffrir qu'en c; moment les membres de la famille du roi aillent se mêler aux émigrants qui ont lâchement abandonné la France, et qui ne peuveot cacher leur honte qu'en multipliant les calomnies contre une Révolution qu'ils n'ont pas le courage d'admirer.
M. Cazalès est trop religieux observateur des décrets pour insister sur l'ajournement, s'il savait qu'à l'ouverture delà séance l'Assemblée a décidé que la discussion serait ouverte.
Je viens appuyer la proposition d'ajournement faite par M. Cazalès. Parmi plusieurs autres motifs, il a présenté le peu "de temps que vous aviez eu pour étudier le projet qui vous est offert ; mais je m'appuierai encore sur une autre raison. Ce n'est point seulement parce que l'Assemblée n'est pas suffisamment instruite que je demanderai l'ajournement ; je le demanderai parce que le comité nous présente un travail qu'il n'a pas assez médité, et que ce serait nous dévouer à une perte inévitable de temps que de délibérer sur des idées dont les imperfections ont frappé tous les esprits.
j'ai lu le projet du comité ; il est intitulé : Projet de décret et rapport sur la résidence des fonctionnaires publics. J'avoue, Messieurs, que je ne m'attendais pas à voir traiter sous ce litre une loi sur l'organisation du pouvoir exécutif.
Sans douie, le roi est un fonctionnaire public; mais assurément il est appelé à un ordre de fonctions si élevé que, sous aucune espèce de rapports, la loi ne doit confondre ies fonctions au
chef suprême de la nation avec les fonctions des autres citoyens. Sans doute, il faut des lois pour déterminer l'hérédité au trône, mais il faut des lois particulières, des lois qui ne conviennent qu'au roi et il suffit, Messieurs, que votre comité de Constitution ait ainsi confondu le chef suprême de la nation avec tous les autres fonctionnaires publics pour qu'il vous soit démontré, j'ose le dire, que le comité de Constitution n'a pas suffisamment préparé son travail et n'a pas distingué des objets dont la confusion vous conduirait aux plus grands abu3.
Après cette première réflexion et après avoir lu le titre de la loi dont nous discutons le projet, je me suis demandé, afin de pouvoir mettre de l'ordre dans mes idées, quelles étaient les lois des peuples libres, relativement à la résidence des rois. En Angleterre, dans ce pays qui sera toujours digne de nous donner des leçons et des exemples, il n'y a pas de loi qui oblige le roi à résider dans la Grande-Bretagne; le père de celui qui règne actuellement a passé une partie de sa vie dans les Etats de Hanovre. J'ai souvent entendu dire que le prince de Galles ne pouvait sortir du royaume sans la permission du parlement : c'est une opinion assez généralement reçue. J'ai voulu vérifier si cette loi existait, et je ne l'ai pas trouvée.
C'est après ces réflexions préparatoires que je me suis occupé du projet de décret; chaque article caractérise une précipitation évidente, précipitation qui l'a porté à réunir des idées si disparates qu il nous a privés des lumières que nous devions attendre de sa sagesse. J'en ai réellement conclu que c'était l'œuvre d'un seul homme et que ce ne pouvait être le résultat des travaux en commun du comité : j'en ai pour garant les lumières des membres qui le composent.
Le premier article de ce projet est ainsi conçu :
« Les fonctionnaires publics dont l'activité est continue ne pourront quitter les lieux où ils exercent les fonctions qui leur sont déléguées, s'ils n'y sont autorisés. »
D'abord, je fais une question qui pourra paraître illusoire aux personnes prévenues. J'ai besoin que l'on me dise ce que c'est qu'un fonctionnaire public ; car depuis le trône je descendrai jusqu'à la dernière classe, jusqu'à une classe d'hommes que je n'ose pas même nommer, on me montrera toujours des fonctionnaires publics. (Murmures.) Il est donc essentiel de nous les indiquer individuellement, de particulariser leurs fonctions.
Un membre : Vous sortez de la question de l'ajournement.
Je ne m'écarte pas de mon opinion ; mais je motive les raisons de l'ajournement. Je suis obligé de vous faire l'hommage de mes réflexions pour engager le comité à améliorer son travail.
Le second article porte : « Ceux des fonctionnaires publics dont l'activité n'est pas continue seront tenus de se rendre aux lieux de leur résidence politique pour le temps où ils doivent reprendre l'exercice de leurs fonctions, s'ils n'en sont point dispensés. » Cette disposition est extrêmement vague ; car, qui donne les dispenses? C'est une autorité supérieure. Il y a beaucoup de fonctionnaires dont on ne connaît pas les supérieurs; par exemple, qu'un évêque veuille s'absenter de son diocèse, je demande quel est son supérieur, si on ne le lui a pas fait connaître? Un
juge de paix est un fonctionnaire public ; je connais bien des juges supérieurs, mais je ne connais pas les supérieurs immédiats au juge de paix. Il faut donc que l'on explique précisément ce que l'on entend par ces mots, sans cela on sera sans cesse obligé de recourir à des décrets interprétatifs.
L'article 4 surtout est d'une extrême importance, et aurait, indépendamment des autres,besoin d'être ajourné. Il est ainsi conçu : « Le roi, premier fonctionnaire public, doit avoir sa résidence à portée de l'Assemblée nationale, lorsqu'elle est réunie : et lorsqu'elle est séparée, le roi peut résider dans toute autre partie du royaume. »
J'avoue, Messieurs, que le roi est le premier fonctionnaire public de la nation ; mais il me semble que dans notre Constitution il a un autre nom ; il a 1e nom de roi, de dépositaire suprême du pouvoir exécutif et nous ne devons pas le confondre avec les autres. On vous a parlé dans cette tribune, Messieurs, de l'inviolabilité de la personne du roi... (Murmures.)
J'ai l'honneur de vous observer que vous avez la parole sur l'ajournement et que vous discutez le fond.
Je me renferme dans la question. Je croirais calomnier votre comité si je pouvais lui supposer les intentions dont cet article présente cependant le résultat. Il donne la merveilleuse facilité, pardonnez-moi l'expression, car j'offrirai de le prouver, il donne, dis-je, la merveilleuse facilité de détrôner & p 6 rois par an. (Murmures et rires.)
Si vous voulez connaître, Messieurs, la preuve de cette proposition, la voici : On oblige ie roi à résider auprès de l'Assemblée nationale pendant tout le temps qu'elle est réunie. Eh bien, que l'on suscite une émotion populaire, et qu'au moment même on aille dire au roi que ses jours sont menacés, qu'en même temps on lui ouvre une route pour s'enfuir, il ne sera pas à 2 lieues qu'il sera détrôné constitutionnellement. (Murmures à gauche.) Je ne crois pas, Messieurs, qu'il soit au pouvoir d'aucun moriel doué d'une saine raison, de me contester cette conséquence, et c'est parce que je suis certain qu'elle n entre pas dans ses vues que j'invite le comité à méditer plu3 sérieusement les lois qu'il propose.
S'il est une vérité politique reconnue, c'est que la liberté des peuples est fondée sur l'indépendance des pouvoirs; celle du roi n'est pas moins essentielle que celle du Corps législatif. Le roi sera-t-il indépendant s'il ne peut s absenter sans être détrôné ? Que dirait l'Europe entière si elle apprenait que nos délibérations sont fondées sur de pareils principes ? Que diriez-vous, car je suis obligé de recourir à des suppositions ; que diriez-vous si on vous proposait de décréter que le Corps législatif suivra le roi partout où il ira, et qu'il sera tenu de délibérer, par exemple, dans une citadelle? Vous ririez d'une pareille proposition. Vous avez décrété que vous ne délibéreriez pas au milieu des baïonnettes; eh bien ! le roi doit être aussi indépendant que ie pouvoir législatif ; sans cela, plus de monarchie, plus de liberté pour le chef de cette même nation qui veut être libre. (Applaudissements à droite \ murmures à gauche.)
Je dis cela, parce que je sais bien que vou3 ne voulez pas mettre la nation à la merci des événements qu'il faut espérer que la Providence
éloignera de cet Empire. Mais il me paraît constant que l'Assemblée nationale, au lieu d'obliger le roi à résider auprès d'elle, doit lui donner le droit de s'éloigner dans tous les temps du Corps législatif.
L'histoire prouve que tous les corps délibérants ne sont pas plus infaillibles que les rois, et il suffit qu'il soit possible qu'un Corps législatif abuse ae son autorité, pour que votre Constitution porte d'avance une loi qui met à l'abri de cette oppression tyrannique, contre laquelle il ne resterait aucune ressource si le roi ne pouvait pas s'éloigh'er du Corps législatif.
Quant à l'héritier du trône, il ne doit jamais se séparer du monarque sans la permission de son père.
Mais, Messieurs, il y a ici dans le travail.du comité un imbroglio qui ne peut être contesté
?ar personne. Supposons que M. le Dauphin ait
frères mineurs comme lui; faudra-t-il que celui qu'on appelle premier prince du sang soit à l'attache jusqu'à 14 ou 15 ans, parce qu'il a des neveux mineurs?
L'ajournement de ces dispositions est d'autant plus de rigueur qu'on préjuge la loi sur la régence; en septembre 1789, M. de Mirabeau fit une motion relative à la régence, et il demanda qu'il fût décrété que nul ne pût exercer la régence qu'un homme né en France. L'Assemblée n'a rien statué sur cette proposition.
Je fis la motion expresse qu'il fût déclaré constitutionnellement que nul ne pourrait exercer la régence qu'un homme né en France. Cette proposition ne fut pas rejetée, mais renvoyée au comité de Constitution.
La proposition m'avait tellement frappé, que je l'ai répétée sans y changer une seule syllabe, il importe que la loi sur la régence soit décrétée avant la loi sur la résidence.
Il est très ordinaire de trouver dans les Constitutions des peuples libres, des lois qui ne s'appliquent que dans des moments extraordinaires ; mais je ne pense pas qu'ils aient jamais pris de moments extraordinaires pour époque, quand il s'est agi de déterminer une loi constitutionnelle. Ce n'est pas quand on fait une Constitution qu'on décrète les lois provisoires.
On lit dans le neuvième article : « Tout fonctionnaire public qui contreviendra aux dispositions du présent décret, sera censé avoir renoncé, sans retour, à ses fonctions-, et lès membres, de. la famille du roi seront censés de même, en cas de contravention, avoir renoncé, personnellement et sans retour, à la succession au trône. »
Cet article est en contradiction avec yotre précédent décret, car il préjuge la question des droits de la branche d'Espagne à Ja couronne. Réfléchissez à ce qu'il rénferme; prenez garde de prononcer des peines que l'on n'applique pas par des décrets; n'abandonnez pas la sûreté de vos lois à de pareilles chances; car si le malheur de la monarchie voulait que jamais Un roi encourût les peines prononcées par un tel décret, bien certainement ce serait le canon qui jugerait l'affaire.
Or, Messieurs, il ne faut pas menacer de déchéance quand l'événement est aussi incertain. Outre cela, quel est celui de nous qui peut empêcher un roi de France de sortir à la tête de son armée pour aller repousser l'ennemi?
Il y a, d'autre part, une grande obscurité et,
j'ose le dire de très grands inconvénients dans la partie accessoire de cet article; il y est dit que « les membres 'e la famillè royale seront censés de même, en cas de contravention, avoir renoncé personnellement et sans retour à la succession au trône. » Et de quel membre de la fa* mille royale s'agit-il ? 0 i ne vous parle que de M. le Dauphin et du premier prince du sang. D'ailleurs sera-ce une déchéance purement personnelle? Où le droit véritable passera-t-ii ? Aux mains des lignes collatérales ? La question en vaut la peine et elle n'est même pas indiquée dans le projet.
Monsieur l'abbé Maury, vous traitez la question au fond et vous n'avez pas ce droit, ni l'Assemblée non plus. Attaquez Ouvertement sa compétence. Vous êtes dans un mauvais poste, monsieur. Dites à l'Assemblée qu'elle est sans pouvoir pour créer,, pour discuter une seule hypothèse où le roi puisse être puni. (Murmurés.)
Un membre à gauche : Le Parlement de Paris a-t-il toujours pensé ainsi ?
Oui ! oui I le Parlement de Paris a été et sera toujours, malgré sa suspension, fidèle au roi et l'un des appuis du trône.
(de Saint-Jean-cCAngély). Il faut charger M. d'Eprémesnil de faire le rapport de cette affaire au Parlement de Paris. (Applaudissements.)
On laisse tout dans un nuage qui ouvre une voie très large à la décision arbitraire; et les décisions arbitraires sont trop contraires à la liberté pour que la Constitution doive jamais les autoriser.
Je demande donc, Messieurs, que l'Assemblée nationale renvoie ce projet de décret à son comité de Constitution pour y être revu, corrigé...
Un membre à gauche : Et augmenté.
Et jeté au feu.
Je demande que le comité nous présente eu même temps une loi sur la régence et que le roi soit séparé de tous les autres fonctionnaires publics, parce qu'il* n'est sur la ligne de personne et que sa soumission à la loi n'empêche pas que les devoirs qui lui sont imposés ne soient d'un ordre qui ne doit être confondu avec ceux d'aucun autre citoyen.
J'ajoute qu'il n'est ni prudent, ni sage, ni surtout nécessaire d'adopter la loi provisoire que propose M. Barnave. Pourquoi donner au peuple de nouvelles inquiétudes? Il n'en a déjà que trop. (Murmures à gauche.) 11 me semble généralement reconnu dans cette Assemblée, et je crois comme vous, qu'aucun membre de la famille royale ne demande dans ce moment à se séparer de la personne du roi; ce serait donc, Messieurs, rendre leur patriotisme suspect (Murmures à gauche.)... que de prendre des précautions superflues sans qu'ils l'aient mérité. Ils n'ont pas le moindre désir de retraite. (Rires à gauche.) Pourquoi donc une loi provisoire quand vous n'êtes obligés de pourvoir à rien ?
Un membre : Il y en a déjà de parti
Qa m'objecte qu'il y en a déjà de partis. Je dus dans ce cas que le décret qu'on vous propose est bien peu raisonnable, car il ne pourra pas les faire-revenir.
Je demande donc l'ajournement et surtout la discussion de la loi relative à la régence, avant que nous discutions les devoirs de îa famille royale.
Je demande la parole parce que mon opinion- ne ressemble en principes à aucune de celles que je viens d'entendre.
donne lecture d'une lettre des députés de la commune de Moret, qui, se trou1- ! vant à Paris pour solliciter la liquidation des of- ! fices appartenant à cette communauté, instruisent l'Assemblée de l'erreur qu'a commise leur commune, en inculpant, dans son procès-verbal, les chasseurs de Lorraine, qu'elle a confondus avec ceux de Hainault ; que ce sont ces derniers qui ont commis les excès* exprimés dans son procès*-verbal.
J'ai également reçu des administrateurs composant le directoire de la Côte-d'Or de nouvelles pièces relatives à l'arrestation de Mesdames, tantes du roi.
(L'Assemblée décrète qu'il sera fait mention au procès-verbal de la lettre des députés de la commune de Moret et en ordonne le renvoi, ainsi que des pièces du directoire de la Côte-d'Or, aux comités des rapports, militaire et des recherches réunis, pour en rendre compte, à l'Assemblée.)
La discussion du projet de décret sur la résidence des fonctionnaires publics est reprise.
Un des objets les plus importants qui vous aient jamais occupés; est, sans contredit, ce qui concerne les membres de la dynastie régnante. Vous avez déjà reconnu leurs droits , mais vous n'avez encore rien dit sur leurs devoirs. Les rapports de leurs droits et de leurs obligations nécessiteront une discussion longue et approfondie. L'Assemblée, en reconnaissant une famiîie royale, a reconnu une famille privilégiée ; mais il fallait encore examiner comment de tels individus devaient se conduire dans des moments da ngereux pour la liberté publique ; il fallait rechercher quelles obligations leur imposaient les besoins de l'Etat et l'intérêt général; il fallait encore s'occuper de leur mariage, de leur minorité. L'Assemblée ne l'a pu jusqu'ici ; elle désire le faire ; mais le grand nombre des questions qui s'élàveot appartiennent à un travail général, à un grand ensemble.
Il m'est donc permis de vous représenter que fe projet de décret qui vous est offert est extrêmement partiel et qu'il doit être ajourné jusqu'à ce qu'on vous présente un pian général établi sur le^ bases constitutionnelles.
Quant à l'opinion de M. Barnave, je crois qu'elle peut s1 appuyer d'un fait et d'un raisonnement très simple. Il est de fait qu'hier vous avez décrété, qu'il n'y ayait pas à délibérer sur le procès-verbal d'Arnay et. déclaré qu'aucune loi existante dui royaume ne s'oppose au libre voyage de Mesdames. Il est de fait, que l'Assemblée a été sur le point d'improuver une commune qui avait cru devoir mettre un obstacle momentané à ce voyage. .
La réflexion à l'appui de ce fait est que, si le résultat d'une intrigue de cour mettait l'héritier présomptif dans le cas de quitter le royaume, je ne crois pas que cçla soit possible, mais il m'est permis de le supposer; eh bien! ce serait le signal de la guerre civile, et cependant, d'après votre discussion et votre décret d'hien, aucune municipalité n'oserait l'arrêter et le peuple vous attribuerait avec quelque justice les malheurs que cet événement ferait fondre sur lui. (Applaudissements réitérés à gauche et dans les tribunes.)
D'après ces diverses considérations qui sont d'accord avec les principes de fAssembléë nationale et aveè la nécessité des mesures provisoires que doit prescrire le salut du'peuple, je'demande l ajournement du projet de décret du comité, la présentation d'une loi générale sur les émigrations, au plus court délai, et j'adopte l'amendement dé M. Barnave.
(de Sain t-Jean-d'Angély). L'Assemblée me paraît généralement d'accord sur la demande d'ajournement; d'aussi grandes questions méritent Une longue méditation ët une discussion étendue.
Mais à la proposition de l'ajournement a suc* cédé la demande d'une loi provisoire faite par M. Barnave, fondée sur le vœu du peuple qui s'est manifesté d'une manière évidente. (Interruptions.) Je n'appelle pas le vœu du peuple quelques clameurs tumultueuses de quelques individus attroupés ; f appelle le vœu de la nation, le vœu de la capitale réuni à celui des provinces. (Applaudissements.) Or, ce vœu manifesté solennellement a déjà appris à l'Assemblée nationale que la France entière souhaitait que tes princes résidassent auprès du roi.
Je suis parfaitement d'accord sur ce point avec M. Barnave ;' mais la proposition qu'il vous a faite ensuite est-elle la conséquence nécessaire de ce principe? C'est ce que je ne crois pas.
Il vous a proposé une loi provisoire uniquement appliquable aux membres de la dynastie régnante, qui ne me paraît pas sans danger même pour la liberté publique, sous ce rapport qu'elle vous fait préjuger en avance que vous établirez une distinction entre tous les membres de la dynastie et les autres citoyens. Certes, il peut être dangereux que les citoyens français s'éloignent de là patrie dans un moment de trouble et d'agitation ; mais s'il est, dans la dynastie, des individus qui, appelés de plus près à la succession au trôner semblent appartenir à la nation d'une manière plus particulière, il serait, selon moi, extrêmement dangereux de prétendre que tous les membres de celte dynastie forment une caste particulière, privilégiée, qui se détacherait pour ainsi dire du centre de la nation.
Certes, vous avez des généraux dont l'éloigne-ment, dont l'abandon, dont l'action de transfuge ; serait infiniment plus dangereuse pour nous que S celle de quelques membres de la dynastie. Je dis donc à M. Barnave : Ne faites pas une loi provisoire qui,, n'embrassant pas tous les individus dans* ses dispositions , préjugerait d'une manière fâcheuse une différence, une distinction que la liberté politique et individuel le proscrit et défend. (Applaudissements.) Je dis que le vœu du peuple s'est fait entendre f, vous êtes les organes de ce vœu» et voua êtes en droit de ma-: nifester le vôtre. Ghargez votre Président d'aller ! le déposer au pied du trône. (Murmures.)... . „
d'aller présenter au roi le vœu du peuple et de l'Assemblée nationale. Yous avez le droit d'aller lui dire : Une loi ancienne qui n'est pas supprimée vous donnait la faculté de permettre ou de défendre aux membres de votre famille de s'éloigner de vous, de sortir du royaume; l'Assemblée nationale vous prie d'en suspendre l'effet.
Je conclus à ce qu'on n'adopte pas la motion de M. Barnave, mais à ce que le Président de l'Assemblée nationale se retire par devers le roi pour lui demander de n'accorder aucune permission de s'éloigner de lui, à aucun membre de sa famille, jusqu à ce que l'Assemblée ait rendu des lois à ce sujet.
Un membre : Cette mesure a été rejetée hier.
(de Saint-Jean-d'Angély). C'est la seule qui puisse, sans blesser aucun droit et sans porter atteinte à la société, produire l'effet que l'on désire.
Tout le monde trouve le projet du comité incomplet et il doit être ajourné ; je ne parlerai donc que de la motion de M. Barnave que j'appuie.
Cette motion n'a aucun des inconvénients que lui trouve M. Regnaud. En effet, dire qu'une loi provisoire préjuge une question ne me parait pas exact. Je me permettrai de dire qu'il est peut-être extraordinaire qu'aujourd'hui on vienne nous proposer un projet qui hier, sous la forme d'un amendement proposé par M. Alexandre de Lameth, a été rejeté par l'Assemblée, et contre lequel beaucoup ae personnes se sont élevées.
L'Assemblée nationale exerce eu ce moment-ci une grande responsabilité. Si l'Assemblée se refusait à la mesure qui lui est proposée et si, dans l'intervalle de l'ajournement qu'on vous propose sur le décret du comité de Constitution, un des trois membres de la dynastie royale s'éloignait encore, l'Assemblée nationale serait coupable de n'avoir pas empêché les maux inévitables, les troubles qui seraient la suite de cette démarche.
J'appuie, par conséquent, la motion de M. Barnave.
Plusieurs membres demandent à aller aux voix sur l'ajournement.
Personne n'a été entendu contre l'ajournement ; je demande la parole.
(La parole est accordée & M. Duval d'Epré-mesnil.)
Messieurs, je parais rarement à la tribune; il fallait un intérêt aussi majeur que celui qui vous occupe pour m'y ramener. (Rires et murmures.)
Oui, Messieurs, il fallait un intérêt aussi pressant que celui qui vous occupe pour m'y ramener; et ce qui rend ma situation plus difficile, c'est que j'y viens combattre mon illustre et courageux ami, M. l'abbé Maury. (Rires et applaudissements.) Mais je me sens soutenu dans cette pénible tâche par les applaudissements que je viens d'entendre. (Rires à gauche.) Je ne suis pas venu demander à l'Assemblée sa faveur...
Yous y avez droit.
l... mais du silence. J'admire les talents de M. l'abbé Maury... (Rires.)
Un membre: Nous n'avons pas besoin de son éloge.
J'ai besoin de le faire.
... Vous savez si j'aime son courage; je ne saurais douter de la puretéde ses principes ; mais je le prie de ne pas familiariser son éloquence et son génie, ni l'attention de l'Assemblée, ni celle des Français, avec des discussions directement contraires à la fidélité que nous devons au roi.
Vous avez interrompu mon respectable collègue, quand il allait vous démontrer que l'inviolabilité du roi ne dépend pas de vous, qu'elle est consacrée par la volonté nationale depuis 1500 ans. Il allait démontrer que la personne sacrée du roi est, selon une expression vraiment française, exempte de toute juridiction. Vous l'avez interrompu, je vais continuer pour lui.
Et d'abord, de quel droit, Messieurs, votre comité ose-t-il vous proposer de réduire le roi à la simple qualité de premier fonctionnaire public? (Rires.) Nous savons les idées que la plupart de ceux qui m'écoutent attachent à cette expression. De quel droit ose-t-il vous proposer de confondre dans une même dénomination le suppléant d'un député et l'héritier d'un trône? [Murmures.) Est-ce ainsi qu'on prétend nous apprendre à respecter nos rois?-
Je ne suis pas surpris que des personnes qui se permettent des expressions aussi peu respectueuses, aussi étrangères au cœur de tous les bons Français, aussi éloignées des idées que nous avons eues jusqu'à ce jour, aient proposé d'assujettir le roi à une peine qui n'est autre chose que la déchéance du trône. C'est méconnaître tous les principes. La personne du roi est-elle inviolable, est-elle sacrée, est-elle exempte de toute juridiction, de toute peine? J'interpelle tous les Français, tous les fidèles serviteurs du roi. (Murmures a gauche, applaudissements à droite.) Je leur déclare qu'aucuq d'eux ne peut rester dans l'Assemblée, si le projet du comité est accueilli, si la question même en est traitée, autrement que pour en approuver la proposition. '
Quant à moi, j'annonce hautement que si le projet du comité passe en décret, rien au monde ne m'empêchera de protester et de me retirer ; et j'espère bien n'être pas seul.
Voix nombreuses à droite : Non 1 non 1
Un membre à gauche : Vous en êtes le maître. (Applaudissements ironiques.)
Oh ! malgré les applaudissements que jeviens.de subir, je suis sûr et je n'en serai pas démenti, quand toute la France apprendra le motif de ma retraite, je suis sûr que la majorité elle-même y fera quelque attention.
Nous avons prêté au roi un premier serment, un serment que nul autre ne peut effacer ni coutrebalancer.
Vous ne devez point oublier vous-même, Monsieur, le serment que vous avez prononcé d'être fidèle à la nation, a la loi et au roi. Ce serait y manquer que de dire que ce serment n'a pas pu exister après celui dont vous parlez. (Bruit. — Applaudissements répétés à gauche.)
Plusieurs membres à droite : Ce n'est pas cela.
J'ai l'honneur...
Vive le roi 1
J'ai l'honneur de déclarer...
Vive le roi ! vive le roi !
(Le côté droit se lève et répond à ce. cri par des acclamations et des applaudissements.)
J'ai l'honneur de déclarer que nous avons tous prêté le serment d'être fidèles à la Constitution. Est-il possible que le Président de l'Assemblée nationale suppose que ce serment soit contraire à la fidélité que nous avons jurée au roi ? (Bruit.)
Plusieurs membres à gauche : Le Président n'a pas dit cela.
Je déclare cependant que nous n'aurions jamais prêté ce serment si nous avions pensé que la Constitution dût produire un décret par lequel le serment primitif qui nous lie au roi fût affaibli; notre langue [se fût attachée â notre
palais (Rires à gauche).....nos mains se fussent
desséchées plutôt que de proférer ce serment criminel. (Applaudissements à droite.)
Nous avons juré d'être fidèles au roi (Applaudissements à droite) ; ce germent ne sera pas vain. C'est ce serment même que nous invoquerons pour repousser toutes les atteintes qui seraient por;ées à la monarchie; c'est au nom de ce serment que nous combattrons.
Plusieurs membres à droite : Que nous mourrons 1
Nous le renouvelons tous I
et plusieurs membres à droite : Oui I oui I
C'est au nom de ce serment que nous empêcherons quev dan3 cette même Constitution que nous avons juré de maintenir, on introduise quelque chose qui puisse porter atteinte à l'autorité royale. (.Applaudissements.)
Pusieurs membres: Tout le monde est de cet avis.
. Car l'autorité royalè1 est la pierre angulaire de la Constitution, c'est sur elle que notre gouvernement repose, et si jamais on parvenait à égarer l'Assemblée, à égarer le peuple jusqu'à lui faire méconnaître une pareille vérité (Murmures)......
Plusieurs membres à gauche : Qui est-ce qui cherche à l'égarer ? N'est-ce pas vous?
Plusieurs membres: On n'a pas parlé de cela.
A quoi servent ces clameurs quand tout le monde vous approuve ?
C'est une discussion contraire à la décence et à la majesté de l'Assemblée. (Tumulte prolongé. )
Il n'est pas just.i qu'une Assemblée délibérante s'empare ae l'autorité royale.
Je demande que M. de Cazalès soit rappelé à l'ordre.
Laissez-le parler.
Ne m'interrompez pas.
Je vous rappelle à l'ordre.
A l'ordre vous-même I
(Un grand nombre de membres de la droite quittent leur p'aceet se répandent dans la salle; quelques-uns èntourent le fauteuil du président.)
Je demande la parole.
Un grand nombre de membres à droite : A l'ordre M. de Mirabeau.
Je rappelle à l'Assemblée que la Constitution repose sur l'autorité royale. (Murmures à gauche.)
Dites que l'autorité royale repose sur la Constitution.
Je renouvelle en ce moment le serment qui m'attache au roi.
Voix nombreuse à droite : Et nous aussi I
Vive le roi I (Applaudissements à droite.)
Plusieurs membres à gauche : Nous sommes aussi attachés que vous au roi.
Pourquoi alors avez-vous hué dernièrement M. de Marguerite pour avoir prononcé ces mots : fidèles Sujets du .roi ?
J'insiste pour avoir la parole,
Vous ne l'aurez pas.
Le moment est venu où l'Assemblée doit s'expliquer. Je dis que la Constitution repose sur l'autorité royale : si, au milieu des erreurs politiques dont nous sommes condamnés peut-être à parcourir le cercle, si, dis-je, la nation était égarée au point de méconnaître cette vérité, je rappellerais à l'Assemblée le décret par lequel elle a déclaré que la France est une monarchie. Ce fanal ne nous égarera jamais dans les routes obscures où on veut nous précipiter. Si tel est le flambeau qui doit nous conduire. M. le Président a eu tort de dire que le serment de fidélité au roi est contraire au serment prêté à la Constitution. (Bruit.)
Un grand nombre de voix à gauche : Il n'a pas dit cela.
Un grand nombre de voix à droite : Il l'a dit.
Je conclus, Monsieur le Président, que vous avez fait chose extrêmement inconvenable en opposant le serment qui nous lie à la Constitution à celui que nous avons prêté au roi.
Un grand nombre de voix à gauche : Il n'a pas dit cela.
Un grand nombre de voix à droite : ïl l'a dit.
Si M. le président ne l'a pas dit.....
Voix à gauche : Non ! non 1 il ne Ta pas dit.
Je puis m'êrtre trompé; il suffit qu'il ait pu y avoir quelque ambiguité dans les paroles de M. le Président pour que,l'Assemblée nationale exprime à cet égard ses sentiments et fesse sur cela sa profession de foi à la face de la nation.
Un membre : Elle n'en a pas besoin,
Je termine là mon opinion, puisqu'il paraît que nous sommes tous d accord sur les principes.
Un grand nombre de membres à gauche: Personne n'en doute que vous.
M. de Cazalès a parlé tant qu'il a voulu, je demande la parole.
Voix à droite : Nonl nonl (Murmures à gauche.)
Qui devons-nous rappeler à L'ordre ?
, s'adressant au président. Faites dégarnir yotre bureau.
Un membre à droite : Eloignez ces conseillers.
A bas les souffleurs I
Ce n'est pas nous qui avons élevé cette querelle au moins.
Avant que personne parle, je me crois obligé.....(Murmures.)
Je demande à parler, Monsieur le Président, avant que vous vous disculpiez du tort qui vous a été imputé. (Il monte à la tribune.)
J Plusieurs membres à droite : M. d'Eprémesnil a la parole.
Sur quoi M. de Mirabeau veut-il parler ?
Je veux avoir la parole sur une motion d'QrdFe comme M. de Cazalès l'à eue.
La parole est à M. d'Eprémesnil; il faut consulter l'Assemblée.
Gomme il serait tout à fait indigne de la majesté de l'Assemblée de répondre à ce'qu'on n'a pas dit, pour se donner le droit d'insinuer des intentions que personne n'a manifestées, je demande que l'on constate avant tout le tort imputé à M. le Président. Quant à moi, je déclare que M. d'Eprémesnil à qui j'ai dit tout à l'heure, me trouvant à côté de lui : « Monsieur, j'interpelle votre probité ; M. le Président
a-t-il dit ce que M. de^Casalês lui fait dire?» M. d'Epremesnil, dis-je, m'a répondu : « Non, je n'ai pas entendu ce propos dans la houdhe de M. Duport; je crois que M. de Cazalès s'est trompé à cet égard. » (Applaudissements.)
Ge fait est donc au moins incertain.
Un grand nombre de membres : A l'ordre 1
Mais, Messieui'i, ce qui tfest pas incertain, c'est qn^il serait profondément injurieux pour l'Assemblée nationale, c'est qu'il serait profondément coupable de vouloir scinder, pour ainsi dire, le serment que nous' avons prêté, et de séparer aucune des parties qui le composent, la nation, le roi et la loi. Notre serment de fidélité au roi est dans la Constitution, il est constitutionnel. (Applaudissements unanimes à gauche) Je dis qu'il est profondément injurieux de mettre en doute notre respect pour ce serment : celui nui te met en doute mérite le premier blâmé. (Nouveaux applaudissements unanimes à gauche.)
Après cette déclaration non équivoque, et pour laquelle je lutterai avec tout le monde en énergie, bien décidé que je suis à combattre toute espèce de factieux qui voudraient porter atteinte aux principes de la monarchie, dansquelque système que ce soit, dans quelque partie du royaume qu'ils puissent se montrer et même à quelque poste qu'ils soient. (Applaudissements unanimes à gauche.)
Plusieurs membres à droite (en montrant la gauche) : Ils sont là-bas!
Après cette déclaration qui renferme toutes les classes, tous les lieux, tous les temps, tous les systèmes, toutes les personnes, toutes le3 sectes...
Un membre à droite : Tous les clubs.
Détruisez don© les jacobins et nous aurons la paix.
Sans employer plus de temp-i en vaines irascibilités, passons à la question du jour qui devraitdéjà au moins être posée et qui ne l'est pas ; car on n'a encore parlé que sur l'ajournement. Je termine en priant l'Assemblée d'accepter l'augure d'une réconciliation universelle, puisque M. d'Eprémesnil est aujourd'hui Pami de l'illustre et courageux ami de M. de La-moignon. (Rires et vifs applaudissements.)
Avant de mettre aux voix les différentes propositions, je dois répondre à l'inculpation qui m a été faite.
Plusieurs membres : Nonl nonl
Je vais, non pour répondre à une interpellation isolée, mais pour exprimer le sentiment de toute l'Assemblée, expliquer clairement et positivement re que j'ai dit.
J'ai dit à M. d'Eprémesnil que le serinent dont il paFlait ne pouvait être opposé au serment que l'Assemblée nationale a décrété et que nous^avons tous prête, d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi. Je raidit et je le soutiendrai toute ma vie. (Vifs applaudissements.)
Plusieurs membres demandent que la discussion sur l'ajournement soit fermée.
J'ai commencé mon opinion ; 011 ne peut pas m'empècher de conclure. Voici ce qui me reste à prouver (Murmures.)...
Si l'on peut, sous un prétexte ou sous un autre, empêcher un opinant de conclure son opinion, il n'y a plus de liberté.
Je vais consulter l'Assemblée.
Mais personne ne s'oppose.
Plusieurs membres : Concluez votre opinion.
Je ne reviendrai pas sur l'incident qui vient de s'élever; M. le Présidât ne m'a pas bien compris; cela est indifférent.
Nous avons donc présentement juré d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi. Je sais très bien que le serment qui nous lie au roi est dans la Constitution, mais je dis que les deux autres ne peuvent pas plus le balancer et le contrebalancer qu'il ne les balance et contrebalance lui-même. Voilà un principe qui nous réunit tous. Je n'en dirai pas de même de beaucoup d'autres principes.
_ Nous avons juré constitutionnellement la Constitution. Mais qu'avez-vous déclaré par la Constitution? Une vérité qui existaitavant elle. C'est que la personne du roi est sacrée et inviolable. Or, un décret qui établit un cas où le roi peut subir une peine, laquelle peine est la déchéance du trône, est un décret absolument contraire à cette vérité... (Murmures.) Il est évident que ce décret serait contraire au serment qui nous liait même avant la Constitution, comme à celui qui nous lie après elle et par elle; il s'agit maintenant de prouver qu'il n'y a pas lieu même à ajournement. Voici mon raisonnement :
Ajourner, c'est fixer un terme pour délibérer: or, l'Assemblée n'a pas même la puissance de délibérer sur le projet de décret que son comité lui a présenté; l'Assemblée n'a d'autre puissance, dans ce cas, que de dire que ce projet n'aurait pas dû lui être présenté, et de témoigner son étonnement au moins au comité qui n'a pas craint lui au moins de le présenter. Tel est le principe. Voici la preuve :
Qu'est-ce que dit le comité dans son décret ?
« Le roi, premier fonctionnaire public..... »
—(expressions peu respectueuses), — « doit avoir sa résidence à portée de l'Assemblée nationale, quand elle est réunie ». Voilà le devoir du roi.
Que dit maintenant le comité dans son article 9?
« Tout fonctionnaire public qui contreviendra aux dispositions du présent décret sera censé avoir renoncé sans retour à ses fonctions. »
Je m'arrête là. Le roi est fonctionnaire public; ses fonctions sont d'occuper le trône. S'il ne se tient pas à la portée de l'Assemblée nationale, il contreviendra au décret; et dans ce cas, aux termes même du décret, il sera censé avoir renoncé à ses fonctions et sera puni par conséquent de la perte du droit de régner. Je voudrais qu'il se trouvât un génie assez sublime pour me nier ces -conséquences.
Or, il est un principe indépendant de la Cons-
titution, antérieur à elle, qu'el ea déclaré et non créé, c'est que le roi, dans aucun cas, même par l'effet de sa volonté, ne peut être soumis à un tribunal, à une peine. Or, je dis que l'Assemblée n'a pas le droit d'examiner cette question, de l'ajourner pour l'examiner: que si on délibère, tous les vrais serviteurs du roi, tous ceux qui sont véritablement a'tachés aux droits essentiels et inhérents au trône doivent se retirer et je déclare quant à moi que je me retire. (Applaudissements à gauche.)
J'observe qu'un des moyens familièrement employés dans cette Assemblée pour égarer nos idées c'est de toujours faire usage d'expressions nouvelles :
On dit premier fonctionnaire public au lieu de roi, dynastie au lieu de maison régnante; vous avez emprunté le langage des Chinois. (Rires.) Puisque vous empruntez leur langage imitez aussi leur profond respect pour leur empereur qu'ils regardent, qu'ils aiment, qu'ils traitent comme leur père et convenez que, dans aucun cas possible, vous n'avez le droit de punir le roi, ni par une loi ni par un jugement, même avec l'adhésion de sa propre volonté.
Je n'ai nulle envie de rien dissimuler; il n'est pas dans mes principes de proposer des décrets à cette tribune; mais si je me permettais d'en proposer un, je vous demanderais de témoigner votre improbation à votre comité qui a supposé que l'Assemblée nationale pouvait mettre en question un cas où le roi serait puni. (Applaudissements à droite.)
Je m'oppose donc à l'ajournement et je déclare quant à moi, sans proposer de décret, que, si cette question est agitée dans le sein de l'Assemblée, je proteste publiquement contre l'infidélité commise envers le roi, et je me retire. (Mouvement. )
Un membre : Tant mieux 1 (.Applaudissements,)
, rapporteur. L'ordre de la discussion ne me permet de répondre ni aux inculpations, ni aux objections, à notre avis, plu3 futiles les unes que les autres, qui ont été présentées contre le projet du comité de Constitution. Je me contenterai de dire que le projet que nous avons offert est très constitutionnel, et que la puissance et les devoirs du roi y sont parfaitement démontrés suivant les règles déjà établies. Je ne m'arrêterai que sur la proposition d'ajourné nent et d'une loi provisoire.
Quant à l'ajournement, je n'en vois pas l'avantage. Les observations, d'après lesquelles on a voulu mêler la régence à ce projet de loi, me paraissent n'être point conformes à la série des idées sur cette matière. On ne voudrait pas que le roi fût assujetti à une loi sur les fonctionnaires publics. Les principes les plus monarchiques portent cependant à considérer le roi comme fonctionnaire public, chargé à la vérité d'une fonction très auguste, mais toujours d'une fonction. Et c'est bien à tort que des publicistes ignorants ou ennemis de la liberté ont déclaré que la royauté était une propriété.
Si, au lieu de la loi que nous vous présentons, nous vous avions apporté la loi sur la régence, vous nous auriez dit : Ce n'est pas celle-là qu'il faut apporter d'abord; car avant de savoir qui doit être rég nt, on doit savoir quel sera l'état de la famille du roi. Si nous avions présenté préli-minairement une loi sur l'éducation de l'héritier ou du roi mineur, yous nous auriez fait égale-
ment la même objection et nous en aurions senti toute la justesse. Quelle était donc la loi première que nous devions vous apporter ? La loi sur l'état de la famillè dû roi, sur la résidence des fonctionnaires publics ; c'est cellerlà que nous vous avons soumise; el sans entendre vous faire rien préjuger sur la régence, sur l'éducation de l'héritier, nous vous, avons mis en état de délibérer avec tous les principes de la Constitution. Pourquoi donc ajourner cette discussion? Que sommes-nous appelés à faire? Une Constitution. Pourquoi retarder chaque jour une loi constitutionnelle et mettre une loi provisoire à sa place? Ne serait-ce pas tendre à ne jamais terminer nos opérations ?
Messieurs, je vois un extrême danger dans toutes les lois provisoires; je sais cependant qu'il est quelquefois nécessaire d'en faire, que les circonstances peuvent les exiger; mais quand on peut faire une loi générale, une loi constitutionnelle, qui s'applique aux circonstances dans lesquelles on se trouve, certes, il me semble qu'il n'y a pas à délibérer; c'est la loi constituticmnelle qui doit l'emporter. Une Assemblée constituante n'est pas établie pour faire des lois provisoires ; ces sortes de lois portent toujours avec elles une sorte de contrainte, de gêne, de despotisme et d'arbitraire que n'ont jamais Jes lois générales. (Applaudissements.)
C'est peut-être assez ae ces quelques observations pour motiver l'avis que je propose. Cependant si vous tenez à l'ajournement, renvoyez a demain la discussion du projet de votre comité. D'ici là les réflexions se multiplieront et on sera plus en état de décider si une loi provisoire est préférable à une loi constitutionnelle; s'il n'est pas beaucoup plus de notre devoir de prendre des mesures stables et indépendantes que d'en adopter de passagères et de soumises aux circonstances. On a déjà fait remarquer qu'une loi particulière aux membres de la dynastie préjugeait la question de savoir s'il y aurait dans l'Etat une famille privilégiée, qu'elle én serait une caste particulière ; et que si au contraire la loi est étendue à tous les citoyens, ce sera une mesure nécessaire sur les émigrations.
De tout cela il résulte la nécessité de l'ajournement à demain, et je ne crains pas de nier les conséquences qu'on suppose résulter de notre projet.
M. le rapporteur a répondu à tout, excepté à ce qu'a dit M. d'Epré-mesnil.
, rapporteur. J'ai annoncé que si je ne craignais d'ouvrir la discussion la plus étendue sur les principes et sur les conséquences de M. d'Eprémesnil, je démontrerais que c'est nous qui défendons l'autorité du roi. (Rires ironiques à droite; applaudissements à gauche.)
C'est une mauvaise plaisanterie. Monsieur Le Chapelier, pas de persiflage.
Je demande aussi l'ajournement; mais pas à demain. Je ne me livrerai à aucun développement à moins que ma propositionne soit rejetée.
La loi de la résidence est complète; mais le comité de Constitution convient lui-même que la loi de la régence, que la loi sur l'éligibilité, qui complètent l'état des individus composant la famille royale ne sont pas encore prêtes. Cependant,
pour me décider sur le plan du comité, j'ai besoin de l'examiner dans son ensemble; ]e demande donc l'ajournement à la date où le comité de Constitution pourra présenter les trois parties de son travail.
Le comité lui-même consentira à être jugé sur son ensemble; car c'est là le seul moyen de se décider dans une question si vaste qui tient à l'organisation entière du pouvoir exécutif, question profonde que tout le monde ignore, si ce n'est peut-être ceux qui n'y ont jamais pensé.
Je suis loin de m'opposer à l'ajournement, mais je persiste à croire qu'il est important de prendre une résolution jusqu'au moment où cet ensemble sera décrété, pour empêcher soit l'émigration possible de la famille royale, soit même les inquiétudes que la crainte de ces mêmes,émigrations pourrait causer et perpétuer dans le royaume; jè persiste donc dans la proposition que j'ai faite, qui consiste, en ajournant le projet de décret du comité, à décréter provisoirement et jusqu'à ce qu'il ait été statué sur tout ce qui concerne les membres de la famille royale, qu'aucun des membres de cette famille ne pourra sortir du royaume sans l'autorisation du Corps législatif. (Applaudissements à gauche.)
Plusieurs membres : Aux voix I
Une mesure de ce genre appartient au gouvernement et non au Corps législatif; sous ce rapport j'adopterais plutôt la proposition de M. Regnaud pour que M. le Président se retirât par devers le roi et lui demandât de ne pas donner de permissions à sa famille pour sortir du royaume. Mais avant de faire une loi...
Ce n'est pas une loi que je demande, mais une mesur® de prudence.
Le Corps législatif doit faire des lois et non proposer des mesures.
Je demandé qu'on consulte l'Assemblée pour savoir si elle veut ou non une loi provisoire. On a démontré les inconvénients de ces sortes de loi; c'est pour cela que je me range à l'avis de M. Regnaud, et je déclare que j'aimerais mieux, comme M. Le Chapelier, qu'on décrétât une loi constitutionnelle, en laissant-cependant le temps pour la discussion. Si l'Assemblée se déterminait a préférer une mesure provisoire, je n'en demanderais pas moins qu'elle fût ajournée.
On n'espère pas nous faire rendre à la volée, à 3 heures après midi, une. loi aussi importante.
Elle a été proposée à 10 heures; il est malhonnête de supposer de mauvaises intentions aux meilleurs citoyens. (Applaudissements.)
On ne peut pas rendre un décret provisoire sur les mêmes principes sur lesquels reposerait une loi constitutionnelle. J'insiste sur l'ajournement à lundi.
Plusieurs membres demandent l'ajournement de la discussion, les uns à dimanche, les autres à huitaine.
La loi générale sur les
émigrants pourrait être fixée à la séance de lundi prochain ; on pourrait d'autre part renvoyer la suite de la discussion sur la résidence des fonctionnaires publics jusqu'à ce-que le comité de Constitution>it présenté à l'Assemblée l'ensemble d'une loi sur la régence et sur l'éducation de l'héritier du trôné.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
(L'Assemblée ferme la discussion et accorde la priorité à la motion de M. de Mirabeau.)
Cette motion est mise aux voix et décrétée comme suit :
« L'Assemblée nationale décrète qu'elle discutera la loi générale sur les émigrants dans la séance de lundi prochain, et renvoie la discussion de la loi sur la résidence des fonctionnaires publics jusqu'à ce que son comité de Constitution puisse lui présenter l'ensemble d'une loi sur la régence et sur l'éducation des héritiers du trône. »
lève la séance à quatre heures et demie.
a la séance de l'assemblée nationale du
Opinion de M. Stanislas de Clermont-Ton-nerre, sur le projet de décret relatif à la réhidence des fonctionnaires publics.
Avis. — Le projet de décret rendu me paraissant porter atteinte à la Constitution décrétée par iAssemblée nationale, 'et acceptée par le roi, je crois devoir publier, sans y changer un seul mot, Vopinion que j'avais écrite pour le combattre, et que j'aurais prononcée si la discussion n'avait pas été fermée avant que la parole me vînt. (Note de l'auteur.)
Dans le conseil d'un roi absolu, lorsque l'on veut faire passer une décision appuyée sur des principes faux, ou environnée de motifs faibles, on ne manque pas de se fortifier de cette raison dont le succès est souvent certain. On dit : L'autorité du roi, la grandeur du trône commandent impérieusement cette mesure; il faut être ennemi du roi pour en proposer une contraire. C'est par ce perfide moyen que l'on intimide les contradicteurs, que l'on appelle à son secours la passion dominante du despote et qu'on l'égaré sans danger sur son véritable intérêt.
Dans le conseil d'un peuple libre, lorsque l'on veut faire passer une loi sur ces principes faux, ou environnée de raisons faibles, on ne manque pas de se faire fortifier de cette raison dont le succès paraît certain. On dit : « La souveraineté de « la nation, la liberté du peuple exigent impérieu-« sement cette loi, il faut être ennemi du peuple « pour en proposer line autre. » C'est par ce perfide moyen que l'on veut intimider les contradicteurs, que l'on appelle à son secours la passion dominante du peuple, et qu'on prétend l'égarer sans danger pour soi sur ses véritables intérêts. Heureusement toutefois ce calcul est souvent
déjoué; chez un peuple libre, les contradicteurs ne s'intimident pas facilement. Les passions du peuple ne se développent pas toujours quand on les appelle, et l'on se détache difficilement des succès quelconques des conseils que l'on a donnés. Ce n'est point à votre comité de Constitution que ces réflexions s'adressent; il n'a environné la loi que de ce qu'il a cru des raisons (1) ; il n'a appelé les soupçons sur personne. Je ne l'ai jamais confondu, je ne le confondrai jamais dans mes opinions avec ceux dont les moyens oratoires sont trop souvent des personnalités ou même des dénonciations. Voire comité vous a proposé une loi que je crois mauvaise, il est de mon devoir de la combattre.
Une bonne loi est celle qui s'attache naturellement aux bases constitutionnelles décrétées ; celle qui est véritablement utile, celle qui ne présente pas l'idée d'un danger supérieur à ses avantages. Je soutiens que votre loi n'a aucun de ces caractères, je soutiens qu'elle a tous les caractères.ppposés. Elle est inconstitutionnelle; Elle est inutile; Elle est dangereuse.
J'en conclus qu'elle est mauvaise. Cette loi est inconstitutionnelle, elle détruit évidemment l'effet de décrets auxquels vous ne pouvez porter la plus légère atteinte, sans altérer, sans dénaturer, sans renverser la Constitution que vous avez faite.
Vous avez décrété, Messieurs, l'hérédité à la couronne et l'inviolabilité du monarque ; je ne vous présenterai pas les grandes raisons politiques qui ont motivé cette décision ; elles vous étaient commandées par ce peuple souverain dont vous pouvez exprimer, mais dont vous ne pouvez pas contrarier la volonté. C'est pour lui qu'existe cette loi, vous ne pouvez ni ne devez lui porter jamais aucune atteinte.
Tout décret qui présente l'idée d'une peine, blesse l'inviolabilité du roi; lorsque cette peine est la déchéance, elle intervertit l'ordre éternel de l'hérédité à la couronne.
Si l'hérédité était un droit du monarque, il pourrait peut-être se priver de ses avantages par sa faute; mais l'ordre héréditaire appartient au peuple, et la volonté d'aucun individu ne doit jamais l'intervertir. Je crois qu'il faut environner ce prince d'une telle superstition, si je puis parler ainsi, que dans aucune hypothèse il ne subisse la moindre déviation. La démence même incurable ne doit produire qu'une régence:; l'abdication et toutes les hypothèses qui détacheraient le roi de toutes les fonctions du pouvoir qui lui est confié, me paraissent tout au plus devoir produire le même effet. Il est de l'essence de l'ordre héréditaire que la mort seule du roi puisse appeler au trône son héritier. Une nation chez laquelle 2 hommes vivants pourraient dire : je suis le roi, serait une nation condamnée à la plus affreuse guerre civile, serait une nation qui n'aurait pas suffisamment établi la véritable hérédité.
Si vous sentez fortement les avantages de ce principe, vous devez sentir les dangers de l'atteinte que lui donnerait la loi nouvelle.
Elle renverse également le principe de l'inviolabilité du monarque, et sous ce point de vue elle blesse toutes les notions de la morale et de la politique.
Un roi inviolable est celui qui ne peut être jugé ni condamné pour aucun délit, qui ne peut être jugé ni condamné pour aucun crime, un tel roi serait le pl is cruel des fléaux sans le contrepoids de la responsabilité de ses agents; un tel roi devient, moyennant cette responsabilité, le plus ferme rempart de la liberté politique, le désespoir des factieux.
Il faut que vous ayez senti les avantages inappréciables de cet ordre de choses, pour que vous ayez triomphé des idées morales qui paraissaient d abord le repousser.
Il faudrait que toutes ces grandes considérations eussent promptement disparu, pour que vous adoptassiez une exception qui détruit absolument la loi.
4)n ne peut pas nier la contradiction du projet de décret avec les principes constitutionnels. Examinons les avantages qui pourraient compenser ce vice; examinons donc l'utilité de cette loi : pour en avoir une idée juste, connaissons le délit auquel elle s'applique.
Quelle est la nature de ce délit ? C'est celui qui ne sera commis que dans les grandes crises politiques où la justice se tait ; dans les grandes crises où la faction dominan e a toujours raison, et le parti le plus faible toujours tort; dans ces crises où la volonté générale ne peut se faire jour à travers les passions qui se combattent, où chacun appelle nation la portion du peuple qui le suit et qui l'écoute.
Eh bien, Messieurs, pour ces moments de crise, ce ne sont pas de3 lois qu'il faut faire, ce sont des forces qu'il faut amasser, ce sont les maladies des Empires ; les remèdes se diversifient d'après les symptômes, et le législateur ne peut rien sans cloute prévoir d'avance ; si, comme le dernier des Siuart, c'est son peuple que le roi fuit, les arrêts du peuple seront terribles, et il n'aura pas besoin pour les prononcer, qu'il existe de loi antérieure. Sans doute, si comme aurait pu le faire Henri IV, c'est contre une ligue fanatique et impie que le roi va chercher des moyens chez l'étranger, la nation délivrée des factieux lui prodiguera de nouveaux hommages, et ne lui parlera que repentir.
Quelle sera dans toutes ces circonstances l'influence de votre loi? Cette influence sera nulle, ou plutôt elle-sera, comme toutes les lois faites pour des circonstances plus fortes qu'elle, alternativement invoquées ou méprisées par le parti dominant ; rien de plus impolitique que de faire des lois inutiles. Les lois sont rarement plus fortes que les hommes; elles ne sont jamais plus fortes que les choses.
Celle-ci est d'uni? inutilité frappante; mais je me trompe, son inutilité ne commencera qu'au moment de son application, et les dangers de son adoption commenceront demain, commenceront aujourd'hui; du moment qu'il y aura des factieux elle leur donnera des espérances : ce sont ces dangers politiques qu'il est utile de développer.
La Constitution a tout fait, la Constitution doit tout faire pour écarter du trône toutes les espérances ambitieuses. Cette loi les rappellera toutes; cette loi environnera nécessairement le trône d'une multitude d'intrigues et de factions. Du moment où, par une de ces popularités dont l'effet est incalculable, un prince aura conçu des désirs criminels, votre loi lui apportera des espérances; il lui suffira, pour réussir, d'environner le palais du roi de trouble et de défiance, de présenter à un roi faible des cris tumultueux et payés comme le symptôme de la haine du peuple;
ici la vertu même pourrait conduire à cette faiblesse. Si l'on croit facilement ce qu'on désire, on croit aussi facilement ce qu'on redoute. D'ailleurs le poids de la royauté est si pesant, les obligations sont si étendues, les maux du peuple sont toujours si multipliés, tant d'intérêts se coalisént toujours contre le gouvernement existant, qu'il sera toujours trop facile d'alarmer un bon roi sur les sentiments de son peuple, et de porter le découragement dans sou âme.
Supposons même, si l'on veut, qu'aucune de ces espérances ne se réalise, il suffit a qu'on y puisse croire pour qu'on agisse en conséquence. Vous n'êtes pas un peuple neuf : Si malgré l'ana-thème prononcé par Rousseau contre la vieillesse des nations, vous devez avoir un jour un esprit public et de bonnes mœurs, j'ose vous prédire que dans cette sorte de résurrection les princes ne seront pas les premiers régénérés, et l'ambition ne sera pas la première passion bannie. Il faut donc les entourer de telles entraves, les séparer du trône par de telles barrières, régler tellement leurs places respectives, que le premier mouvement qu'ils feraient pour en sortir, soit aperçu et réprimé ; que le dés:r même de ce mouvement soit une démence dont leurs intérêts les écarte.
C'est pour prévenir les convulsions politiques que vous avez déclaré la couronne héréd taire; c'est à prévenir les convulsions politiques que votre Constitution doit tendre : une loi qui renverse tous ces principes, qui vous conduit à un but contraire, ne peut pas être admise.
Considérerai-je cette loi sous son véritable point de vue, comme une loi de circonstance? Si ce n'est pas ainsi que l'a vue votre comité de Constitution, auquel je rendrai toujours justice, il n'en est peut-être pas ainsi de tous .ceux qui la défendent; mais cette discussion ne serait vraiment pas digne de la majesté de cette Assemblée. 11 serait si difficile de s'y contenir dans les bornes de cette modération dont je n'ai jamais voulu sortir...
Je m'arrête donc et je me résume.
La loi proposée est dangereuse ; elle donne une chance aux factieux.
La loi proposée est inutile; elle prétend décider ce que les circonstances seules décideront.
La loi proposée est inconstitutionnelle.
Un roi inviolable est un roi qu'aucune peine ne peut atteindre, et la loi proposée inflige une peine à votre roi.
Une couronne héréditaire est celle qui ne se transmet que par mort; et, d'après la loi proposée, votre roi vivant, vous pourriez en avoir un autre.
Il y aurait deux lois contradictoires : celle que vous avez faite ou plutôt unanimement promulguée, parce qu'elle existe dans l'universalité de la volonté nationale; celle que nous ferions aujourd'hui, qui ne passerait certainement pas à la même unanimité, que la véritable opinion publique n'a point préparée, et dont le projet même n'est pas connu dans toutes les parties de l'Empire.
A mon avis, cette seconde loi dénature la monarchie; elle dégage du serment civique, de ce serment qui n'a été fait qu'à une Constitution dont elle contredit le principe.
Je conclus en demandant la question préalable sur tous les articles du décret qui infligent une peine au roi et détruisent le principe conslitu-tionnelde l'hérédité de la couronne.
Signé : Stanislas Clermont-Tonnerre.
présidence de m. duport. Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demi-; du matin.
' Un de MM. les secrétaires donne lecture des procès-verbaux des séances de jeudi soir et d'hier, qui sont adoptés.
annoncé qu'il a reçu les diverses adresses suivantes :
Dénonciation de la part d'u prévôt général des maréchaussées du DafupMné contre les agents du pouvoir exécutif au département de la guerre, qui demandé que le roi soit prié de donner les ordres les pins prompts et les plus précis pour îa formation d'un conseil de guerre à Grenoble ou ailleurs, ou d'une cour martiale, qui connaîtra, dans le plus bref délai, des plaintes et des accusations de l'exposant, contre les officiers, sous-officiers et cavaliers de sa compagnie. * Adresse des administrateurs composant le directoire, et du procureur général syndic du département d'ille-et-Vilaine, tendant à obtenir de l Assemblée nationale les sommes nécessaires pour la perfection de la partie de la navigation dudit département, commencée depuis 8 ans. Les précis et états des opérations pour cette navigation sont joints à ladite adresse.
Lettre du sieUt d'Arcy, receveur des aides à Eu, district de Dieppe, département de la Seine-Inférieure, qui réclame un état pour celui qu'il vient de perdre.
Lettre du sieur Falckenhauer, officier ingénieur, qui demande justice sur les vexations qu'il a souffertes, sous l'ancien régime, par les ministres 4u roi.
, député de la ci-devant sénéchaussée de Boulogne-sur-Mer (département du Pas-de-dalais}se présente, et annonce qu'il est de retour de son pays, où il était allé par congé, de l'Assemblée, du 15 décembre dernier.
, député de Saint-Pierre-le-Moutier, annonceegalement son arrivée, et remet son passeport de l'Assemblée nationale, du 7 janvier dernier.
donne lecture d'une délibération de l'assemblée générale de la section des -Quatre-Natiom, en date de mercredi dernier, dans laquelle elle exprime à l'Ass mblée nationale sa plu> vive réconnaissance et les respectueux ^remerciements envers l'Assemblée nationale, de la suppression des droits d'entrée des villes, bourgs et villages; elle y promet et a-sore protéger et soutenir la continuation de ces perceptions jusqu'à l'époque du 1" mai prochain, décrétée par l'Assemblée, et de donner l'exemple' d'une sainte insurrection contre le despotisme.
(L'Assemblée ordonne qu'il sera fait mention honorable de cette délibération dans son procès-verbal.)
donne lecture d'une pétition
Ils demandent à être dispensés die payer les droits d'entrée aussitôt que leurs vins sont dé-pe>ésrdans les halles ou sur les ports ; mais que, après avoir fait constater la quantité de leurs vins existants sur ces mêmes ports ou dajis les halles, il ne soit exigé l'entrée que des vins qui seront vendus jusqu'au 1er mai.
(L'Assemblée renvoie cette pétition aux comités de commerce eft des impositions réunis.)
Je dois également faire part à l'Assemblée de deux pétitions :
Par la première, le sieur Trouard de Riolle3, détenu dans les prisons de l'abbaye de Saint-(iermain-des-Prés, Gomme prévenu du crime de lèse-nation, demande que l'Assemblée nationale lui indique des juges devant lesquels il puisse se pourvoir, attendu que le tribunal provisoire des dix, qu'elle lui a déjà désigné, vient de cesser ses fonctions.
Par la seconde, les enfants du sieur Trouard exposent que» leur père étant tenu au secret dans sa prison, il ne leur a pas été permis, depuis fort longtemps, de le voir et de le soulager, quoiqu'il soit malade, et ils demandent, attendu que dans ce moment il n'y a pas de juges à qui ils puissent s'adresser, que l'Assemblée nationale veuille bien leur faire accorder la liberté de voir leur père dans sa prison, et lui donner des secours qu'il a droit d'attendre de la piété filiale,, et que son conseil enfin ait aussi la faculté de le voir.
Il faut qu'il eoit, pour la troisième fois, enjoint au comité de constitution de présenter incessamment un projet de décret pour l'établissement d'un tribunal provisoire chargé de juger les accusés du crime de lèse-nation.
(L'Assemblée décrète le renvoi de la pétition des enfants du sieur Trouard au pouvoir exécutif pour donner tous ordres convenables à «et effet.) (La motion de M. d'André est mise aux voix.)
Le décret suivant est rendu : « L'Assemblée nationale décrète que son comité de Constitution lui présentera, mardi prochain, sans aucun retard, un projet de formation d'un tribunal provisoire, pour juger les crimes de lèse-hation. »
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une note du ministre de la justice ainsi conçue :
« Le roi a donné, le 16 de ce mois, son acceptation ou sa sanction :
« 1* Au décret de l'Assemblée nationale, du 9 du même mois, contenant divers changements ou additions à faire au décret sur la gendarmerie nationale;
« 2° Au décret du 11, relatif aux villes où les tribunaux criminels seront établis et fixés;
« 3° Au décret du 14, relatif au versement dans le Trésor public, par la caisse de f extraordinaire, d'une snmmie de 72 millions;
« 4° Au décret du même jour, concernant l'envoi de 3 commissaire* dans le département du Morbihan pour y rétablir la tranquillité publique et y maintenir le bon ordre; -
« 5° Et, le 18, au décret du 13 janvier, sur la contribution mobilière;
« 6° Au décret du 5 février, concernant les acquisitions que les corps administratifs pourraient faire, et singulièrement; celle qui a été faite le 29 décembre dernier, au profit du directoire du département de la Creuse;
« 7° Au décret du même jour, relatif au payement, par la caisse de l'extraordinaire, d'une somme de 16,463,6201.10 s. 5 d. pour des offices liquidés;
« 8° Au décret du 8, relatif au secours que recevront le3 curés qui, d'après l'exécution des décrets, seront remplacés par d'autres fonctionnaires publics;
« 9° Au décret du même jour, relatif à l'acquisition à faire par le directoire de Sancerre, de la maison des Augustins de cette ville;
* 10° Au décret du même jour, concernant les acquéreurs des rentes constiluées sur le ci-devant clergé,: ou sur les ci-devant pays d'Etat, et dont les contrats sont antérieurs au l9'janvier de la présente année ;
« 11° Au décret du même jour, concernant la forme dès cautionnements pour l'exercice de la recette des droits régis par les commissaires-administrateurs du droit d'enregistrement ;
« 12° Au décret du 10, concernant les piastres et sommes d'argent arrêtées par la garde nationale de Gavalaire;
« 13° Au décret du même jour, relatif à l'adjudication qui doit être faite du bail des Messageries, et aux moyens nécessaires pour monter le service ;
y 14° Au décret du même jour, relatif à l'exemption du droit d'enregistrement des quittances de liquidation et remboursement des offices;
« 15° Au décret du même jour, concernant la vente dès immeubles réels affectés à l'acquit des fondations de messés et autres services établis dans les églises paroissiales et succursales; . « 16° Au décret du même jour, relatif à la réunion et circonscription des paroisses de la ville du Mans;
« 17° Et enfin au décret du même jour, concernant les oppositions formées sur les titulaires particuliers des compagnies désignées par le décret des 2, 6 et 7 septembre dernier, et qui n'ont d'autre cause que les dettes communes desdites compagnies.
« Le ministre de la justice transmet à M. le Président les doubles minutes de ces décrets, sur-chacune desquelles est l'acceptation ou la sanction du roi. »
Signé : M.-L.-F. Duport.
Paris, le
, au nom du comité féodal, propose divers articles additionnels au décret sur la suppression des droits féodaux précédemment rendu par l'Assemblée.
Ces articles additionnels sont ainsi conçus:
Addition à l'article 15.
« N't mpêcher soit qu'un testament ait son effet à l'égard des immeubles dont le testateur n'aurait pas ordonné, ou le légataire poursuivi la vente dans le délai fixé par les coutumes, soit qu'un créancier, muni d'un titre exécutoire, fasse décréter et vendre les biens-fond s de son débiteur. » (Adopté.)
Article à placer après l'article 17.
« Auront également le même effet que s'ils étaient émanés des justices seigneuriales ou ordinaires, tous les jugements rendus et actes de juridiction contentieuse faits jusqu'à l'installation des tribunaux de district, qu'on pourrait prétendre n'y avoir pa* été autorisés par le décret du 29 décembre 1789. »> (Adopté.)
Article à placer après Varticle 18.
« Il ne pourra être exigé, dans le cas des transcriptions ci-dessus, ni pour toute autre formalité qui pourrait y être substituée par la suite, à l'effet d'acquérir hypothèque, aucun des droits de lods, mi-lods, quint, demi-quint, éterlin et autres que les ci-devant seigneurs ou leurs officiers percevaient pour les actes d'hypothèque constitués par désaisine, saisine, déshéritance, adhé-ritance, rapport, mise de fait ou main assise. » (Adopté.)
Article h placer après ceux qui concernent les bancs seigneuriaux.
« Le droit seigneurial et exclusif d'avoir des girouettes sur les maisons est aboli, et il est libre à chacun d'en placer à son gré et dans telle forme qu'il jugera à propos. » (Adopté.)
, au nom du comité féodal, propose diverses additions et modifications aux articles sur les droits féodaux décrétés dans la séance du 23 février dernier.
Ces dispositions sont ainsi conçues :
Articles à substituer à ceux décrétés . le 23 février.
Art. 10.
« Si les fiefs, d'où dépendent des mouvances non inféodées, sont situés dan^ des pays où il n'existait aucune loi positive sur la liberté du jeu de fief, la faculté du rachat partiel se réglera par les mêmes principes que l'usage y avait adaptés relativement au jeu de fief : en conséquence, dans ceux desdits pays où le jeu de fief n'était autorisé que jusqu à concurrence d'une certaine quotité, le rachat partiel s'opérera conformément à ce qui est prescrit parl'ar-trcle 3 ci-dessus; dans ceux où le jeu de fief n'était admis que par bail, cens et rentes, le rachat partiel s'opérera conformément à ce qui est prescrit par l'article 4 ci-dessus; enfin, dans ceux où le jeu de fief était autorisé indéfiniment, tant par rapport à la quotité que quant au mode, le rachat partiel pourra s'y faire librement pour telle portion que le propriétaire j u-gera à propos. » (Adopté.)
Art. 11 décrété le 23, sauf rédaction.
« A l'avenir, la réunion ou consolidation des biens tenus en censive au fief dont ils étaient mouvants, ou de ce fief à celui dont il était mouvant, ne produira aucun droit ou profit en faveur du ci-devant seigneur du fief dominant et n'augmentera, dans aucun cas, le prix du rachat du fief servant sur lequel le propriétaire
du fief dominant ne pourra exercer que les mêmes droits qui lui appartenaient avant ladite réunion ou consolidation. » (Adopté.)
Art. 12. (Additionnel.)
« Le régime féodal étant détruit, nul ne peut aliéner tout ou partie d'un fonds à titre d'inféo-dalion ou d'accensement, et sous ce prétexte s'exempter des droits auxquels aurait donné lieu l'aliénation faite avant le rachat des droits ci-devant seigneuriaux dont ce fonds était chargé.
« Décrète que l'instruction sur la manière d'opérer en conséquence des articles 8 et 9 du décret du 23 présent mois sera jointe audit décret. » (Adopté.)
Instruction sur la manière d'opérer en conséquence des articles 8 et 9
du
Art. 8.
« Lorsque le propriétaire d'un fonds, ci-devant fief, veut racheter les droits casuels à raison des mouvances inféodées dépendant de son fief et dont il n'a pas reçu lui-même le rachat,
11 faut faire une double opération.
« Il faut d'abord évaluer la somme qui lui serait due à lui-même par le propriétaire, ou par les propriétaires, des fonds soumis à sa mouvance.
« Supposons le fief B, mouvant du fief A, et qui a sous sa mouvance le fief G.
« Si ce fief G est évalué 12,000 livres et s'il est sujet au douzième pour les mutations par vente, le rachat que ce fief devrait au fief B à raison des mutations par vente, sera, suivant le numéro 7 de l'article 25 du décret du 3 mai, de la moitié du droit, c'est-à-dire de 500 livres.
« Si le fief G, quant aux droits pour les mutations autres que par vente, est dans le cas de l'article 28 du décret, le rachat dû pour celte seconde cause sera des 5 douzièmes du droit qui est une année du revenu. Supposant le revenu de ce fief à 400 livres, le douzième sera de 33 1. 6 s. 8 d., et les 5 douzièmes seront de 1661. 13 s. 4 d.
« Réunissant ensuite les deux sommes de 500 livres et de 166 1.13 s. 4 d., que le propriétaire du fief B devrait recevoir du propriétaire du fief G, on aura la somme totale de 666 1. 13 s. 4 d., qui formera la valeur de la mouvance du fief B sur le fief C.
« Pour trouver ensuite la somme, que le propriétaire devra lui-même au fief A pour le rachat de cette mouvance, il faudra faire une seconde opération.
« Supposant (comme cela est ordinaire) que le fief B est tenu envers le fief A, sous le3 mêmes charges que le fief C, il en résultera que B doit à A la moitié d'un droit de mutation par vente au douzième. Le douzième de 666 1. 13 s. 4 d. étant de 55 1. 10 s., le rachat dû pour ce premier droit sera de 27 1. 15 s.
« Quant au droit de relief, arbitrant le revenu de 6661. 13 s. 4 d. à 30 livres par an, dont le fief B doit 5 douzièmes, il en résultera une somme de 12 I. 10 s.
Joignant les deux sommes de 27 1. 15 s. et
12 1. 10 s., on aura la somme totale de 40 1. 5 s. pour le rachat dû par le fief B au fief A, à raison ae sa mouvance féodale sur C.
« Si cette mouvance n'est pas féodale, mais
seulement censuelle, il ne faudra, dans la première opération, tirer le rachat qu'à raison des mutations par vente. Supposant le droit de veute toujours au douzième, on aura toujours 500 livres pour résultat de la valeur de cette mouvance, et 33 1. 6 s. 8 d. pour le rachat qui en sera dû par le fief B au fief A : mais on n'aura plus la seconde partie, attendu que le fief B n'aura point de droit ae relief sur une simple censive.
« Cet exemple sufht pour indiquer la manière d'opérer générale, laquelle ne pourra varier que dans ses résultats, suivant les différentes quotités des droits que le fief servant aura droit de percevoir sur les fonds mouvants de lui, et qu'il devra lui-même à son fief dominant. (Adopté.)
Art. 9.
« Cet article est pour le cas où la mouvance qu'il s'agit de racheter procède d'un jeu de fief qui n'a point été autorisé par le propriétaire du fief supérieur, ou dépendant d'un fief situé dans un pays où le jeu de fief ne peut point porter préjudice au seigneur supérieur.
« Ici l'opération est toute différente. Ce n'est plus la simple valeur de cette mouvance qu'il faut estimer et qui doit servir de base à la liquidation de rachat. Le propriétaire du fief inférieur, n'ayant pas pu préj udicier à son seigneur par un jeu de fief non autorisé, est réputé avoir conservé le fief dans son intégrité; en cas de mutation de sa part, il doit les droits de la même manière que s'il avait conservé la pleioe propriété des tonds qu'il a mis hors sa main, et sur lesquels il n'a réservé que la directe. Le rachat qu'il doit est relatif à la quotité des droits dont il est chargé ; il faut donc liquider le rachat de la même manière que si le fief existait dans son intégrité.
« Soit supposé le fief B, composé de 100 arpents et cédé en cet état par le fief A, dont il est mouvant. B a inféodé à C 50 arpents, et a accensé à Jacques et à Philippe 20 arpents ; eu sorte qu'il ne reste entre ses mains que 30 arpents : mais, s'il vend ces 30 arpeuts, il doit les droits comme s'il possédait les 100 arpents ; et c'est sur ce pied que doit être liquidé le rachat.
« Supposant les 100 arpents de valeur de 100,000 livres et de 3,000 livres de revenu.
« Si le fief B est dans le quatrième cas de l'article 25 du décret du 3 ruai, c'est-à-dire s'il est sujet au quint en cas de vente, il devra, pour le rachat de ce premier droit, 5/13 du quint, ou de 20,000 livres, c'est-à-dire 7,652 1. 5 s. 10 d.
« Quant au droit de relief, s'il est dans le cas de l'article 29 du décret du 3 mai, il devra 5/18 de 3,000 livres ou 833 1. 6 s. 8 d.
« Ainsi le fief devra en total, pour le rachat des droits casuels, 8,505 1. 12 s. 6 d. somme bien différente de celle qu'il aurait due si les mouvances eussent été inféodées.
« Dans cette seconde hypothèse, la mouvance sur les 50 arpents tenus de lui en fief n'aurait été évaluée qu'à 4,2521. 16 s. 3 d.
« Celle sur les 20 arpents tenus en censive, qui n'auraient dû leurs lods qu'au 1/12, et point de relief, n'aurait été évaluée qu'à 833 1. 6 s. 2 d.
« Le fief B n'aurait dû, pour le rachat tant des droits de vente que des droits de relief de sa mouvance sur les 50 arpents, qu'environ 8331.17s. 1 d. et pour le rachat des mêmes droits de sa mouvance sur les 20 arpents tenus en censive, qu'environ 147 livres.
« Ainsi, dans l'hypothèse où les mouvances eussent été inféodées, le fief B n'aurait dû que :
« 1° Pour les 30 arpents tenus en pleine propriété ..... 2,555 1. 10 s. » d.
« 2° Pour les 50 arpents mouvants de lui en tief...... 383 1. 17 s. » d.
« 3° Pour les 20 arpents mouvants de lui en censive.. 147 1. » s. » d.
Total. 3,086 1. 7 s. » d.
« Il devra au contraire, ses mouvances n'étant point inféodées, en totalité....................8,505 l. 12 s. 6 d.
Différence. 5,419 1. 5 s. 6 d.
« L'opération et la différence dt s résultats seront les mêmes, soit qu'il s'agisse de liquider le rachat d'une mouvance non encore rachetée par le vassal ou censitaire, so:t que cette mouvance ait été précédemment rachetée. » (Adopté.)
La parole est à M. Lanjuinais pour1 présenter, au nom du comité ecclésiastique un projet de décret sur la vente des biens des fabriques.
, au nom du comité ecclésiastique. Messieurs, vous avez décrété la vente des biens des fabriques chargés de fondations, moyennant qu'il serait payé à chaque fabrique l'intérêt à 4 0/0 du produit net desdits biens. Je suis chargé par le comité ecclésiastique de vous présenter la même disposition pour les biens immeubles réels des fabriques, non- chargés de fonda-tiens.
Voici notre projet de décret :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité ecclésiastique, décrète :
« Art. 1er. Les biens immeubles réels des
fabriques non chargés de fondaiions seront vendus dès à présent, comme
ceux qui sont chargés de fondations de messes ou d'autres services et
prières, en la même forme et aux mêmes conditions que
lesbiensnationaux.il n'yaurad'exceptés de ladite vente que les objeis
destinés à des usages relatifs.
« Art. 2. Il sera payé sur le Trésor public, et par le receveur du district, à chaque fabrique de laquelle dépendaient lendits fonds,l'intérêt à 4 0/0, sans retenue du proauit net desdits biens, pour être employé aux dépenses du culte.
« Art. 3. Tous les immeubles rtj&ls des paroisses ou succursales qui sont ou seront supprimées en exécution du décret du 12 juillet 1790, et qui étaient destinées à des usages relatifs au culte, sans produire de revenu, comme églises et sacristies, tours et clochers, parvis et cimetières, presbytères et bâtiments pour loger les personnes employées au service de l'église, seront vendus au profit de la nation.
« Art. 4. Mais les éditices et emplacements de même nature que ceux indiqués au précédent article, et provenant des chapitres et monastères supprimés par le déen-t du 12 juillet, pourront être consacrés au culte comme églises paroissiales ou succursales, ou chapelles de secours; par décret de l'Assemblée nationale où du Corps législatif, sur l'avis et la demande des corps administratifs, !er"> ans qu'il soit, pour ce, rien payé au Trésor public et à la seule condition d'abandonner comme biens nationaux, et par une sorte d'échange, les anciens éditices et emplacements desdites églises, suivant la disposition ue l'article précédent.
« Art. 5. Tous les autres immeubles réels des églises paroissiales et succursales qui sont ou seront supprimées,, comme il a été dit, seront vendus aussi dans la même forme et aux mêmes conditions que les biens nationaux. Le Trésor public payera provisoirement, par les mains du receveur du district, à l'église paroissiale ou succursale établie ou conservée, et dans l'arrondissement de laquelle se trouvera l'église dont les-dits biens dépendaient, l'intérêt à 4 0/0 du prix net delà vente, lequel sera emp'oyé comme c'eût été dûment le revenu de dits biens, savoir aux dépenses du culte et à l'acquit des fondations.
« Art. 6. Le prix des immeubles réels des fabriques dont l'aliénation est ci-dessus prescrite et qui ne sont affectés à aucune fondation sera employé à payer les dettes desdites fa briques, autres néanmoins que cesles des dépenses annuelles et ordinaires, et cet emploi sera fait en vertu d'ordonnance du directoire de département, après les vérifications convenables, rendues sur l'avis de la municipalité et du directoire du dis-t ict.
« Art. 7. Toutes ventes d'immeubles réels des fabriques, non chargés de fondations danslesdites églis s, sont approuvées et validées par le piésent décret, pourvu quelesdites ventes aient été faites suivant les formes prescrites pour l'aliénation des biens nationaux. En conséquence, l'intérêt du produit net desdites ventes sera payé et employé, comme il est dit en l'article 2.
« Art. 8. Le produit net des ventes ci-dessus ordonnées s'entend déduction faite des frais de vente et du fonds de toutes charges réelles et foncières, assises sur lesdits biens, et dont les administrateurs de département seront tenus de faire le rachat comme il a été réglé, à l'égard des biens nationaux, par les décrets qui ont statué sur leur aliénation.
« Art. 9. Les baux des biens des fabriques dont la vente est ordonnée ou ratifiée par le présent décret, et par celui du 10 du présent mois, seront entretenus par les acquéreurs, pourvu qu'Usaient été faits suivant les formes prescrites par les règlements ei usages locaux. »
(La discussion est ouverte sur ce projet de décret.)
Je demande la question préalable sur les deux premiers articles de ce projet de décret. Si vous payez aux fabriques à perpétuité l'intérêt de 4 0/0 sur le produit net des ventes, vous'faites une opération ruineu-e pour la nation. Si vous voulez mettre ces biens dans le commerce, que ne les faites-vous vendre par les fabriques elles-mêmes, en les autorisant à en placer les produits, au lieu de grever la nation d'une rente onéreuse?
Dans quel temps vous propose-t-on de vendre au profit de la nation les biens des fabriques? C'est lorsque les malveillants emploient toutes sortes de moyens pour exciter la métiance des peuples contre l'Assemblée nationale. N'est-il pas évident que ce serait mettre entre les mains des ennemis de la Révolution des armes dont ils ne manqueraient pas de se servir pour exciter de nouveaux troubles ?
J'insiste sur la question préalable.
, rapporteur. Vous avez déjà décrété la venie d'une partie des biens des fabriques; ainsi l'opération n'est pas nouvelle. Quels sont les motifs qui vous y avaient déterminés? C'est l'intérêt qu'il y a de multiplier le nombre
dès petits propriétaires, d'augmenter l'industrie, les richesses nationales, le produit de l'impôt.
Cette opération est dans i'intérêtdes fabriques elles-mêmes ; car ilest constant qu'au moyen des frais de réparation, des non-valeurs, elles ne retiraient pas 4 0/0 de l'administration de leurs biens.
Je demande la parole sur un fait. Il n'y a qu'un instant, j'ai remis à M. le rapporteur plusieurs libelles qui circulent maintenant dans les provinces belgiques et qui tendent tous, sur le décret que l'on vous propose aujourd'hui, à mettre le feu dans toutes les campagnes.
Je demande l'ajournement des dispositions contenues dans les deux premiers articles aux prochaines législatures.
J'appuie la proposition du préopinant. Il nTy a pas d'objet d'attachement plus .légitime pour les peuples queles objets du culte; et déjà depuis le décret qui ordonne la vente des biens des fondations, il circule une foule de libelles incendiaires dijfhs les départements. * Je vous prie de considérer que la feule manière d'assurer la paix publique, c'est de prouver que l'Assemblée n'a jamais voulu ni prétendu toucher à cet objet de première nécessité pour le culte.
Je demande donc que vous mettiez aux voix l'ajournement jusqu'aux prochaines législatures.
, rapporteur. L'Assemblée peut renvoyer à son comité ecclésiastique, ou passer à l'orure du jour.
Un membre : fi ne suffit pas de passer à l'ordre du jour, il faut fixer l'incertitude des peuples ; incertitude dont on ne manquerait pas de se servir pour exciter des troubles. Je demande que rAssemblée'décide si elle s'occupera ou non de la vente des biens des fabriques.
(L'Assemblée, consultée, décrète l'ajournement des articles 1 et 2 aux prochaines législatures.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 3.
Plusieurs membres proposent divers amendements et sons-amendements sur cet article.
Il me semble que le projet du comité chargera infiniment les habitants des endroits où les paroisses auront besoin d'être agrandies. Je demande donc que sur le produit de la vente des églises et cimetières supprimés, il soit prélevé les sommes nécessaires pour l'agrandissement et les réparations de l'église à laquelle elles seront réuniés ; et, en cas d'insuffisance, sur les fonds des fabriques desdites paroisses.
Plusieurs membres appuient cette proposition et en demandent le renvoi au comité.
Je ne m'oppose pas au projet du comité; mais j'observe que ce n'est pas au moment où l'on cherche à égarer le peuple sur la religion qu'on doit négliger les précautions nécessaires.
Je demande qu'en annonçant qu'on va mettre un grand nombre d'églises dans le commerce, on ajoute qu'elles n'y seront mises qu'avec les-précautions canvenablvs. Je ne demande que l'addition de .ces mots.
, rapporteur. J'adopte cet amendement.
Je désirerais qu'il fût inséré dans l'article cette addition : a Les fabriques des paroisses supprimées seront réunies aux paroisses nouvellement circonscrites- »
Il est beaucoup de ces églises dont le prix n'est point encore payé ; je vous demande s'il serait bien' loyal à l'acheteur de s'emparer de ces églises. (Murmures.)
(L'Assemblée, consultée, ordonne le renvoi de l'article '3 au comité ecclésiastique.)
(La suite de la discussion est ajournée.)
donne lecture d'une lettre des administrateurs du directoire du département de la Sarthe, qui annoncent à l'Assemblée nationale que l'assemblée électorale de ce département a élevé à la dignité d'évêque et de premier pasteur, M. Prudhomme-larBoussinière, curé du Crucifix, l'une des paroisses de la ville du Mans. Ils informent l'Assemblée nationale que cette nominatiou a été précédée d'un scrutin, dont le dépouillement avait donné une majorité absolue en faveur de M. l'abbé Grégoire, qui, appelé avant à l'épiscopat du département de Loir-et-Cher, l'avait accepté.
Ils expriment le vœu général de leur assemblée électorale pour M. l'abbé Grégoire, dont le patriotisme éclairé eût bientôt accoutumé le grand nombre d'ecclésiastiques de ce diocèse à ne plus considérer qu'avec respect et amour la constitution civile du clergé ; cependant, le ciel, qui se fait entendre par la voix du peuple, n'a pas voulu, pour le bonheur de leur département, que la perte de M. l'abbé Grégoire rût irréparable; les électeurs, en nommant M. Prudhomme-la-Boussinière, ont élu un citoyen dont le mérite, les vertus et les lumières l'auraient, depuis longtemps, appelé à l'épiscopat si la naissance et l'intrigue n'avaient pas presque toujours été, autrefois, les seuls titres qui donnaient la crosse et la mitre.
donne ensuite lecture d'une lettre des administrateurs du directoire du département de la Manche, qui annoncent que M. Bé-cherel, curé de Saint-Loup et membre de cette Assemblée, a été nommé évêque de ce département; ses longs travaux dans le saint ministère* son attachement à la Constitution, ont mérité à ce vertueux ecclésiastique la confianee de ses compatriotes, à laquelle les véritables amis de la religion et de la patrie applaudiront toujours.
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret additionnel, du comité de Constitution, sur Vordre judiciaire (1).
, rapporteur. Messieurs, vous avez ajourné jeudi dernier l'artiele S du projet additionnel du comité de Constitution, sur l'ordre judiciaire : il s'agissait de vérifier le traitement des juges de paix.
Le décret y relatif est du 3 novembre dernier, rendu à l'occasion de ceux
de Paris. Ils ont obtenu un droit pour l'apposition des scellés ; nous
croyons juste d'accorder également une rétribution aux autres juges de
paix du royaume; nous avons donc proposé d'accorder, pour ap-
Un membre, tout en adoptant le fond de l'article, demande qu'il soit rédigé en d'autres, termes que dans le projet de décret.
, rapporteur. J'accepte l'observation et j'apporterai une nouvelle rédaction.
(L'article 8 est décrété, sauf rédaction.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 9.
Un membre présente un Efmendement relatif à la fixation des droits désignés aux notaires.
rapporteur, adopte cet amendement.
Je demande qu'on ajoute après ces mots : la confection des inventaires, ceux-ci .: des procès-verbaux de description et des actes de carence lors des ouvertures de-succession.
, rapporteur. J'adopte l'amendement.
Si l'Assemblée nationale ne juge pas à propos de statuer quant à présent sur les salaire?, je demande le renvoi du tout au comité.
, rapporteur. J'observe qu'il y aura un tarif général des salaires.
(L'article 9 amendé est adopté, sauf rédaction.)
Je crois que vous devriez intercaler ici un article additionnel disant que le droit de suite est aboli et que chaque juge de paix ne pourra mettre les scellés que dans son canton.
(Cet article additionnel est renvoyé au comité.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 10.
Un membre demande que les maires soient exclus de la légalisation.
J'observe à l'Assemblée nationale qu'il n'appartient qu'à l'homme public connu dans une grande enclave, de certifier les actes qui s'y passent; en conséquence, je demande que les maires soient autorisés, concurremment avec les juges de district, à la légalisation des actes dans leur municipalité.
(La motion de M. Chabroud est décrétée.)
J'appuie l'article du comité, mais je demande par amendement que la légalisation soit donnée gratis.
, rapporteur. J'adopte l'amendement.
(L'article 10 amendé est décrété, sauf rédaction.)
, rapporteur, donne lecture des articles 11 et .12.
(Ces articles sont adoptés sans discussion.)
rapporteur. Voici quelques
dispositions additionnelles que nous vous proposons :
«. Si le juge de paix est absent pendant plus de 8 jours consécutifs, il sera tenu de remettre à l'assessur qui l'aura remplacé la portion proportionnelle du salaire qui lui est attribuée; et dans tous les cas où l'assesseur remplacera le juge de paix pour les commissions ou actes auxquels des vacations sont attachées, l'assesseur recevra lesdites vacations. »
(Cette proposition est décrétée.)
Un membre : Je prie Monsieur le rapporteur de dire s'il entend que les assesseurs auront voix dé-libérative ou voix consultative..
, rapporteur. Il est décidé qu'ifs auront voix comme les juges de paix.
Je demande que le comité avise aux moyens de donner une distinction aux commissaires de police, parce qu'ils en ont besoin dans les circonstances actuelles, pour se faire respecter.
(Cette motion est renvoyée au comité de Constitution.)^
, rapporteur. Voici une autre disposition additionnelle :
« Dans les comptes» Jicilations, ordres et contributions dont la compétence était attribuée aux ci-devant commissaires au Chàtelet de Paris, où des absents sont intéressés, et n'auront pas laissé ou envoyé de procurations, nous vous proposons dë faire nommer par ie tribunal, pour y assister en leur nom, un des avoués.
(Cette proposition est décrétée.)
, rapporteur. Nous vous proposons en outre de décréter que l'avoué ainsi désigné ne prendra que l'entier des droits ci-devant accordés aux substituts du procureur du roi.
(Cette proposition est renvoyée aux comités de Constitution et d'imposition réunis.)
(L'article 13 est décrété sans discussiQn.) "
, rapporteur, donne lecture de l'article 14.
Je suis chargé par un juge de paix de demander si les affaires commencées dans les tribunaux ordinaires doivent être soumises aux bureaux de paix. Il faudrait alors lever cette difficulté-là par votre article.
, rapporteur. Les affaires commencées ne doivent pas passer aux bureaux de paix.
Pour éviter le doute, je demande que vous ajoutiez que, même à défaut de tribunal de commerce, les affaires seront portées devant le tribunal de district.
, rapporteur. J'adopte l'amendement.
(L'article 14, amendé, est décrété.)
(Les articles 15, 16, 17, 18, 19 et 20 sont décrétés.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 21 et propose, sur la demande des juges, membres de l'Assemblée nationale, d'ajouter que les suppléants qui, en vertu de cet article, doivent
siéger à leur place dans le tribunal, recevront non seulement les droits d'assistance, mais même les droits fixes. (Applaudissements.)
Un membre : Je demande que cette disposition soit étendue aux législatures suivantes.
Je ne suis pas d'avis qu'on étende aux législatures suivantes la disposition actuelle. Je ne crois pas, Messieurs, qu'on puisse proposer ni décider incidemment une pareille question. Lorsqu'on terminera la Constitution, il faudra examiner avec soin s'il n'y a pas des incompatibilités que l'Assemblée nationale doit décréter. Dans le moment où on a fait la Révolution, on a cru devoir remplir plusieurs fonctions : on a pensé par exemple, quant aux membres de l'Assemblée nationale qui ont été nommés juges, qu'on ne devait pas leur donner à opter, car ils ue pouvaient pas quitter l'Assemblée nationaie; et c'eût été les éloigner des tribunaux. Il y a aussi plusieurs membres de l'Assemblée qui sont procureurs-syndics de départements. Je demande s'il y a une seule personne qui puisse croire que ces deux fonctions soient compatibles. (Murmures.)
Un membre : Et un colonel en temps de guerre I
Je ne croyais pas que l'on dût interrompre, par une chose personnelle, un homme qui fait une observation qui peut être juste. Ce que je dis des juges, je serai le premier à le dire pour les militaires; je demanderai que l'on examine en même temps si un homme peut à la fois commander des troupes et être à l'Assemblée nationale.
Plusieurs membres : Et où prendrez-vous des députés ? L'ordre du jour 1
On retire l'amendement.
Je demande que les suppléants qui remplaceront les membres de l'Assemblée nationale nommés juges, reçoivent le traitement entier des membres de l'Assemblée nationale, jusqu'à ce que ceux-ci prennent leurs fonctions de juges.
, rapporteur. J'adopte.
(L'article 21, amendé, est décrété.)
En attendant la procédure parjurés, les juges de district seront obligés de chetche-r de simples gradués pour compléter le nombre des juges. Je demande que, dans ce cas-là, les gradués partagent pareillement le droit d'assistance.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette proposition.)
, rapporteur. Je présenterai incessamment à l'Assemblée dans un décret général une nouvelle rédaction des différents articles adoptés.
J'invite les membres de l'Assemblée à se retirer dans leurs bureaux pour procéder à l'élection d'un président et de 3 secrétaires.
La séance est levée à trois heures.
A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU
Opinion de M. Malouet sur la révolte de la minorité contre la majorité.
Ces paroles sont de M.Pétion (1); et, quelque interprétation qu'on ait voulu leur donner, je persiste dans ma réponse, qui sera toujours droite et pure, lors même que, dans le silence du cabinet et dans la paix de ma conscience, elle conserverait enco:e le ton d'indignatiou qu'elle a reçu d'un premier mouvement.
J'ai dit que désormais je m'abstiendrais de parler dans l'Assemblée ; et ce ne sont pas seulement les murmures, les calomnies, les outrages qui me condamnent au silence, j'ai assez (trouvé qu'aucune considération ne m'arrêtait, lorsqu'il s'agissait de remplir un devoir; mais l'impossibilité absolue de défenJre mes principes, la certitude que ma persévérance nuit, qu'elle irrite ceux qui commandent; qu'une mesure sage, proposée par moi est à coup sûr abandonnée ou combattue, et, plus que tout cela, la certitude qu'on nous signale aujourd'hui au peupl comme empêchant l'achèvement de la Constitution, comme provoquant des troubles et préparant les malheurs de la France, voilà, voilà désormais les motifs de mon silence. Cette crainte religieuse que j'ai eue trop longtemps de paraître dissident, d'en augmenter le nombre ; cette loyauté méconnue, qui m'a fait braver tant d'injustice pour prendre part, en homme libre, aux opérations de l'Assemblée; ces considérations doivent céder à celle d'un plus grand mal résultant de l'effroyable irritation de la majorité contrariée par des raisonnements que l'on convertit en intrigues et en contre-révolutions.
En examinant cependant de sang-froid la chaleur de M. Pétion et de tant d'aut es honorables membres coutre la minorité, et contre moi personnellement, on ne peut concevoir cet excès d'imprudence, et c'est ici où je n'aperçois plus ni plan ni principes politiques de la part de ceux qui opèrent de si grands changements. Que leur importent en effet les tristes harangues de cette minorité, qui semble créée et combinée tout exprès pour le succès de la majorité, et dont le silence au contraire serait la plus éloquente censure de l'oppression qu'elle éprouve.
Je l'ai dit à l'Assemblée, et je le répète ici, je ne crois pas qu'il y ait d'exemple dans l'histoire des sociétés politiques, qu'on ait accumulé autant d'outrages et de vexations contre la minorité d'une assemblée délibérante.
Et cependant, lorsque toutes les recrues, que de savantes manœuvres ont fait pas.-er de la droite à la gauche, ont réduit au moindre terme cette minorité, elle est restée composée d'hommes inébranlables dans leurs opinions, mais sans aucun point de ralliement, sans unité de principes, sans combinaison da moyens, marchant toujours à la débandade devant une urinée en bataille. N'était-il pas trop heureux pour la majorité et pour l'honneur de la Constitution qu'il y eût des hommes assez impoliliquement honnêtes pour se dévouer, dans une telle position, à une
lutte aussi inégale pour faire croire au peuple qu'ils étaient libres, et qu'ils avaient eu une part suffisante à l'examen et à la discussion des lois décrétées? Assurément on ne doutera pas que je n'aie fait tout ce qui m'était possible pour assurer cet honorable témoignage à la majorité. Mais combien de fois la parole m'a-t-elle été interdite par un décret! Jamais, dans les discussions importantes, je n'ai pu obtenir la permission deré-liquer à MM. de Mirabeau,de Lameth et Barnave. ombien de fois avons-nous vu la discussion fermée pour la minorité avant qu'elle fût ouverte! L'ordre du jour, la question préalable, les cris, les gestes menaçants, les mouvements les plus impétueux, voi'à l'accueil qu'ont éprouvé constamment, de la part du vainqueur, les propositions, les représentations des vaincus, et les galeries se sont toujours mises à l'unisson de cette générosité, si bien que de toutes les parties de la salle on a vu fondre sur le côté droit, dans les grandes occasions, une grêle de huées et d'imprécations. De la barre même de l'Assemblée, asile des doléances et des supplications, uous avons vu sortir régulièrement, pendant six mois, les insultes ks plus grossières contre la minorité. Cependant rien n'ébranlait su constance, et sauf quelques cris de douleur, de maladresse ou d'impatience, auxquels u ie sage politique devait sourire et non grincer des dents, les propos interrompus, les amendements circulaient de la gauche à la droite; cette bonne minorité s'essoufflait par la plus canaide coopération au grand œuvre de la régénération. Gela n'a pas suffi à M. Pétion, et non seulement il veut, ainsi qua 100 misérables écrivains, que tous les troubles, tous les désordres du royaume soient dus à la minorité; mais il lui plaît de nous le dire en face, au grand applaudissement des tribunes et du côté gauche. Je sais qu'on a très ingénieusement répondu que ce reproche ne sadressait point à la minorité de l'Assemblée, mais à celle de la nation; et pour infirmer tout de sui e cette explication, on n'a pas manqué de rappeler les protestations de plusieurs députés du côté droit. Ainsi, on nous a dit l'equi valent de ces paroles : « Assurément, Messieurs, vous avez tort de vous « formaliser de cette apostrophe ; il est évident « que nous ne vous contestons pas le droit de « dire votre avis, et que vous jouissez de la plus « grande liberté d'opinions, à quelques conditions « près, qu'il était indispensable de vous imposer « pour le salut de la chose publique, savoir : 1° De « vous accorder rarement la parole, et jamais « lorsque la réplique peut être décisive; 2° A la « charge d'être interrompus par des huées quand « vous contrariez nos opinions, et d'être livrés « au peuple par nos licteurs écrivains comme en- nemis de la liberté; 3° enfin, vot^e droit de par-« 1er, de discuter, que nous respectons, comme de « raison, et dont le libre exercice vous est ga-« ranti par les deux conditions précédentes, vous « expose très justement,quel que soit votre avis, « dans la minorité, à être responsable de toutes « les protestations faites et à faire, et de tous les « désordres qu'il nous convient mieux de leur « imputer qu'à toute autre cause. Par toutes c* s « considérations je conclus, c'est M. Pétion qui « conclut, que vous avez, Messieurs de la minorité, « le plein et entier usage de toutes vos facultés « législatives, oratoires et représentatives; mais « j'ajoute, par amendement, que c'est la révolte « de la minorité contre la majorité qui occasionne « tous les troubles du royaume. » C'est à cette puissante logique que j'avais à
répondre, lorsque M. d'André, livrant hypothétique nent M. Pétion.à toutes les censures imaginables, s'il avait été capable (ce qui heureusement est sans exemple) d'offenser et d'incriminer l'Assemblée à raison de ses opinions, nous a assuré qu'il ne s'agissait, dans le sens de l'orateur, que de la minorité de la nation qui est en révolte contre la majorité. Ce serait assurément une grande nouvelle que celle-là, et j'inviterais le comité diplomatique, et celui de Constitution, à s'assembler sur -le-champ pour tâcher de concilier les deux puissances, si la révolte était déclarée ; car, en supposant la minorité de la nation dans la proportion de celle de l'Asse n-blée nitionale, la différence du souverain au sujet ne serait que de quelques voix, qui peuvent, d'un instant à l'autre, passer de gauche à droite.
Cette pensée se présente à mou esprit sous des rapports assez graves pour m'y arrêter sérieusement. J'invite maint nant M. Pétioa à descendre avec moi dans les profondeurs de sa phrase qu'il nous a sûrement débitée sans malice.
J'accepte d'abord à volonté ou le texte littoral ou le commentaire proposé par M. d'André.
Dans le premier cas, la minorité de l'Assemblée, incriminée à raison de ces opinions, présente une violation manifeste de tous les principes de la liberté, de tous ceux du droit des gens, du droit public et positif de toutes les uations policées; et certes il y a preuve authentique que jamais minorité ne lut plus incriminée, plus vexée que celle-ci, à raison de ses opinions. Personne n'ignore que la désignation la plus familière dans les harangues a >plaudies, est celle des ennemis de la liberté, des ennemis du bien public, en s'adressant au côté droit. Par le ton des désordres de Vannes, des massacres de Nîmes, il s'élève un cri d'horreur, et j'entends ces douces paroles : Oui, Messieurs, voilà de vos œuvres. Cependant le comité des recherches n'a encore présenté aucun indice des forfaits, ou seulement des intrigues de la minorité. Je parlerai tout à l'heure des protestations. Mais je suis pressé d'arriver à cette explication qui a paru si na'urelle, si concluante, de la révolte de la minorité de la nation contre la majorité. En rapprochant cette phrase d'une autre, fort applaudie lorsqu'elle fut prononcée, l'insurrection est le plus saint des devoirs, il ne me serait pas difficile d'eu faire sortir des principes et des conséquences absolument opposés. Mais je vais droit au but; j'examine ce que c'est que la minorité d'une nation, comment elle peut être en révolte contre sa Constitution,, et quels sont en ce cas les droits et les devoirs de la majorité.
Pour éviter toute équivoque, toute odieuse interprétation, je déclare que je n'aime point les révoltes, que sûrement je n'en conseillerai jamais contre les lois ; q.u\l en est, sins doute, mais qu'on en voit peu dans l'histoire qui ait eu pour agents des hommes purs, lors même qu'ejles avaient des causes légitimes.
Ou ne peut appeler minorité de la nation, et d'une nation de vingt-cinq millions d'âmes, qu'un très grand nombre de citoyens. Il faut compter par millions, pour que cette minorité puisse être estimée dans une proportion relative à la masse; car, s'il ne s'agissait que de quelques milliers d'hommes, et que le reste de la nation fût paisible, satisfait, la maréchaussée suffirait pour mettre les insurgents à la raison. Mais lorsque
toutes les institutions anciennes,bonnes ou mauvaises, sont détruites, lorsqu'un ordre de choses absolument nouveau s'établit, et que ce n'est pas au profil d'un seul, qui ne compte la majorité des voix, que par celle de ses soldats, lorsque c'est au nom de la nation et de la liberté qu'on opère, lorsque c'est la nation elle-même qui parle et qui agit par ses représentants, il n'y a qu'un seul moyen de connaître la volonté générale dans sa pureté et de se soustraire au plus affreux désordre, au plus atroce despotisme. Ce moyen, c'est d'assurer inviola-blement le droit de chaque citoyen, d'exprimer son vœu, quel qu'il soit, et de protéger ce vœu par lou e la force publique contre toute espèce de violence et d'insu te.
Si un seul citoyen est opprimé à raison de ses opinions, cette oppression est un parricide qui tue le souverain, qui enchaîne dans l'instant même la volonté générale. G r il est évident qu'elle ne commande, qu'elle ne consacre que le bonheur et la liberté de tous.
Lorsque la force se déclare pour un tel système, et les menaces, les calomnies, et les périls de tout genre pour ceux qui le contrarient, il est évident qu'il n'y a plus de volonté générale ; car elle se compose de toutes les volontés particulières, et il faut bien nécessairement en retrancher toutes celles qui n'ont osé se compromettre ou qui n'ont pu être énoncées.
D'après cette soustraction, il faut faire un autre calcul pour apprécier la partie ostensible de la volonté générale. L'instinct seul de notre conservation suffit pour faire désirer à tous les hommes la liberté, la sûreté ; et s'il en est d'assez dépravés pour se dévouer au service de la tyrannie, c'est toujours dans l'espérance de conserver ou de s'approprier à eux seuls ce qu'ils ravissent aux autres. Ainsi la volonté générale peut être considérée comme provoquant et prononçant sans exception des lois justes et raisonnables. Mais, de ces principes simples aux détails infinis et très complexes d'un système de législation, il y a un intervalle immense qu'il est donné à très peu d'hommes de parcourir; et lorsqu'on y applique l'expression imposante de la volonté général1©, ce ne peut être, ce ne doit être qu'après avoir tenu compte et balancé scrupuleusement. tous les intérêts, toutes les volontés particulières suffisamment éclairées, et très paisiblement, très librement exprimées. Sans -cette condition, la volonté générale est une fiction ; et ce que l'on met à la place, est une usurpation sacrilège de la souveraineté.
Examinons maintenant comment s'est manifestée parmi nous la volonté générale. Nou-s, représentants du peuple, nous sommes ses organes dans l'Assemblée nationale, et nous avions à choisir, pour stipuler en son nom, entre nos cahiers, nos lumières, nos consciences, si bien cja'il n'y a rien à dire à un député qwi prétend que son cahier a tort, qu'il n'a pas tout prévu, «t quie sa conscience lui conseille de miteux faire; mais aussi n'y a-l-il rien à reprocher à relui qui est parfaitement d'accord avec ses cahiers, ses lumières et sa conscience, et lorsqu'on a diffamé les uns pour exalter les attires, on a blessé mor-tell ment le souverain ; car si la volonté générale s'effraye, c'est tout comme si elle était muette. Mais l'opinion puMique lui a rendu là vie : elle s'est élevée avec une force irrésistible; il n'y a plus eu de doute pour les vrais amis de la patrie; ils ont vu le signal, ils y ont obéi. Voyons donc comment s'est formée ce qu'on appelle en
ce temps-ci l'opinion publique. Elle est, comme la volonté générale, composée de deux éléments, l'un simple, et l'autre infiniment complexe : ainsi il n'y a pas de doute que l'opinion publique ne proscrive le despotisme, et toutes les formes de gouvernement arbitraire ; les hommes de toutes les classes peuvent s'élever à la hauteur de cette conception, Mais quelles seront les meilleures lois pour assurer la liberté et la prospérité générale? Ici l'opinion publique, pour être déterminante, doit être exclusivement celle des meilleurs esprits, des hommes les plus honnêtes et les plus éclairés, et l'on ne peut plus s'appuyer, que par une criminelle astuce, du suffrage de la multitude aveugle et séduite, et des déclarations forcenées des vils écrivains qui la trompent. Ainsi toute question politique au-dessus des principes immuables de la justice, dans laquelle on fait intervenir la multitude, pour favoriser une opinion et en proscrire une autre, est, pour me servir de la figure de M. Barnave, un pain empoisonné distribué au peuple, c'est le moyen le plus sûr de compromettre sa liberté, de corrompre ses mœurs d'effacer tous les signes certains de la volonté générale; c'est tuer le souverain. Que serait-ce. si la multitude, ainsi égarée, exprime non seulement son vœu, mais l'exécute par la force, et si on lui suggère de mettre continuellement toute la force en opposition avec les opinions qui lui sont dénoncées comme antipatriotiques?
Que devient alors la volonté générale et que signifie l'opinion publique ainsi constituée?
Il faut donc retrancher, dans de telles circonstances, de la volonté générale, non seulement toutes les volontés enchaînées par la terreur, mats encore celles qui, croyant n'exprimer qu'un vœu de liberté et de justice, ne peuvent distinguer toutes les nuances des diverses opinions. Il faut enfin retrancher cette quantité prodigieuse de volontés, qui ne sont que des instruments aveugles d'une volonté dirigeante. Voilà incontestablement le dépouillement du scrutin de l'opinion publique, au temps où nous sommes. — Ne pensez-vous pas que ce résultat réduirait à bien peu de choses cette majorité dont on fait tant die bruit ? Et lorsque, malgré tant d'obstacles qui traversent la libre expression des volontés, des opinions de la nation la plus éclairée, il se manifeste néanmoins, dans toutes les parties du royaume, dans les grandes comme dans les plus petites villes, une diversi té et une opposition sensible d'opinions, ce que M. Pétion appelle la révolte de la minorité contre la majori Saurait été jugé, par Sol on et par tous les législateurs qui l'ont précédé, une crise symptomatique de la maladie du corps politique. Premièrement les législateurs anciens et modernes, les philosophes et les grammairiens t'ont tous d'accord sur l'acception du mot révolte : c'est une résistance offensive et défensive à main armée; et jusqu'à présent, tout ce qui est armé en France, tous ceux qui ont tiré l'épée, incendié, massacré, se sont annoncés comme patriotes ët amis de la Constitution. Sesprétendusennemisnesontencore connus que parce qu'ils soutiennent qu'elle n'est paspureet sans tache, et parce qu'ils se plaignent des excès commis en son nom. —Prenez donc garde à votre assertion, qui, au surplus, est celle de tous les jours, de toutes les harangues,, de tous les clubs, de tous les libelles patriotiques: prenez garde, surtout, aux conséquences^ui en découlent nécessairement.
Ce que vous avez dit est vrai ou faux, est applicable à la minorité de l'Assemblée ou à celle de
la nation. — Hé bien, qu'aimez-vous mieux ? Je vous laisse encore le choix de touies ces positions, et je vais vous démontrer que, dans tous les cas, vous avez attaqué de la manière la plus cruelle la Constitution et la majorité, en croyant n'inculper que la minorité.
Yous et moi nous nous plaignons des troubles et d'une fermentation générale. Vous dites que c'est une partie de la nation qui est en mouvement et en irritation conire l'autre : soit. Quel est le parti du plus fort? Celui de la majorité sans doute. Que veut-elle? Nous asservir. L'insurrection, dans ce cas-là, est le plus saint des devoirs. Non, la majorité veut que la nation française soit libre et souveraine. — Fort bien ! il ne s agit plus que de s'entendre. Expliquons-nous. Il n'y a plus de révolte, il ne peut plus y en avoir ; nous serons tous enchantés d'être libres et souverains. Hâtez-vous donc, Messieurs, de nous donner noire part de liberté et de souveraineté. — La voici; c'est la Constitution. Lisez-là, ne répliquez pas. Faites vous jacobins, vous serez libres et souverains; sans quoi il est évident que vous êtes dans un état de révolte, ennemis du bien public, de la liberté, delà Constitution, et nous serionsobligés de vous livrer d'abord au comité des recherches, et ensuite à la haute cour nationale. — Vous vous moquez de nous, Messieurs de la majorité.—Non, nous sommes le souverain. Vous êtes le sujet, obéissez.—Doucement, ceci demandeexplication. Parlez-vous, suivant le texte de M. Pétion, de la majorité souveraine de l'Assemblée? Je n'examine plus comment elle se compose; c'est une souveraineté provisoire : le décret est prononcé, l'ordre public exige qu'il ne lui soit opposé aucune résistance active, et vous calomniez notoirement la minorité, si c'est là ce que vous lui imputez ; vous maltraitez ensuite cruellement la majorité et la Constitution, s'il résulte, de vos propres aveux, que l'une et l'autre ne peuvent pas supporter l'épreuve de la liberté qu'a tout citoyen de dire que la loi promulguée est bonne ou mauvaise : or, comme c'est là ce que vous appelez révolte, qu'il n'y a eu contre la loi nouvelle que des plaintes et des improbations, convenez que vous alliez commettre, sans mes exhortations, le plus grand des crimes, qui est de convertir une souveraineté provisoire en une éternelle et exécrable tyrannie, dont les contradicteurs légitimes seraien t des criminels de lèse-nation, quoiqu'ils ne puissent être, tout au plus, et encore sans mauvaise intention, que des lèse-Pêtion et quoique enfin l'insurrection que cette minorité ne s'est jamais permise soit le plus saint des devoirs.
Je crois que ce raisonnement peut s'appliquer dans toute la force, au commentaire de M. d'André, et que si la minorité d'une nation manifestait sans violence son mécontentement des lois de la majorité, il n'y a qu'une démonstration mathématique de l'injustice et de la déraison de la minorité qui pût dispenser la majorité d'une grande déférence à ces plaintes. Je dis plus, une Constitution nationale étant l'œuvre la plus difficile qui puisse sortir de la main des hommes, la nature n'ayant produit, depuis le commencement des siècles, qu'une douzaine d'hommes au plus, qui s'en soient montrés capables, c'est une épouvantable folie de croire qu une Constitution à laquelle on travaille, qu'on promulgue aujourd'hui puisse inspirer ni respect, ni confiance aux hommes libres, pour lesquels elle est faite, s'ils n'ont la plus parfaite liberté de l'examiner, de la juger bonneoumauvaise; etil n'y aque le résultatdecet examen, librement, paisiblement fait dans la plus
entière sécurité, qui puisse indiquer, par l'opinion publique, d'une part et de l'autre, par des formes solennelles et légales, le vœu souverain de la nation. Jusque-là je soutiens que toutes les opinions qui se raccordent à celle-ci : « Je veux « être libre, je veux que la nation le soit, qu'elle « ne dépende plus de la volonté d'un seul; » toutes les opinions, dis-je, qui portent en substance celle-là et qui divergent ensuite des innovations de ce moment-ci, sont pures, légitimes, utiles à discuter et peuvent devenir, par la réflexion du plus grand nombre des citoyens, par la jouissance tranquille de la vraie liber té, le vœu solennel et légal de la vraie majorité de la nation. Il est donc infâme de les calomnier, ty-rannique de les proscrire; et ceux qui appellent cette tyrannie patriotisme, sont des imposteurs ou des imbéciles, dont l'attelage cause dans ce momertt-ci tous les désordres et les malheurs de la France. Patriotisme! Ah I combien de vertus, de pureté, d'élévation, exige cette sublime passion, et je vois ce titre prostitué à des scélérats, à des hommes sans pudeur, sans humanité qui déchireraient de leurs mains les entrailles de celui qui ne pense pas comme eux. Je vois des patriotes écumant de rage, mais, Messieurs, l'amour de la patrie n'est pas la haine de ses habitants : ce sont nos concitoyens qu'il faut aimer, servir, et ceux qui se plaignent comme ceux qui vous louent. Il n'y a que les brigands qu'il faut haïr.
Quant à l'amour de la Constitution, je ne peux l'éprouver que par ses bienfaits, et je les attends.
Et votre serment, me dira-t-on ?... Oui, mon serment, ne croyez pas que je l'oublie. Certes je ne l'eusse pas fait, si j'avais pu croire qu'on nel'exi-geait de moi que pour me traiter ensuite en parjure. C'est un piège horrible tendu à tous les hommes ho nêtes et paisibles. Ce serment était prématuré, puisque la Constitution n'est pas encore terminée; mais enfin il n'e3t point de cœur droit, il n'est point de Français loyal qui ne jure avec transport de défendre la Constitution qui sera approuvée par la nation et qui la rendra heureuse. Voilà le serment que j'ai fait et que je renouvelle tous les jours de ma vie. Muis ai-je pu m'engager à ne pas discuter, à ne pas improuver toutes les lois qui me paraîtraient vicieuses ? N'en ai-je pas l'obligation comme membre du Corps législatif? n'en ai-je pas le droit comme citoyen; et les décrets constitutifs n'exi-gent-ils pas un examen plus sévère, une plus libre censure que tout autre décret réglementaire? Ainsi quand je suis troublé dans l'exercice de mes droits et de mes obligations, ce n'est pas moi qui viole mon serment, ce sont ceux qui m'oppi iment.
Et pour qu'on ne dise pas que quand la loi est promulguée, je n'ai plus le droit ae l'improuver; c'est le langage d'un esclave, ou plutôt celui des tyrans. Mon devoir est d'obéir; c est en ce sens que je suis fidèle à la Constitution ; mais tout Ce que j'y trouverai de faux dans les principes, de dangereux dans les conséquences, tout ce que j'apercevrai d'astuces et de violences pour en accréditer l'empire, mon devoir est de le dire, et c'est encore en ce sens que je suis fidèle à mon serment, car je n'ai pas juré de défendre une Constitution qu'on établirait parla terreur, mais bien celle que la nation ratifierait librement, et qui assurerait son bonheur. Je suis en cet instant frappé d'une réflexion que je vais rendre, car je la crois juste.
Une révolution dans un empire est un état de
crise violente; mais elle s'opère de deux manières, ou par un mouvement unanime et régulier, lorsque la tyrannie est insupportable, comme à Rome, lors de l'expulsion des Tarquins, et en Suède sous le farouche Christiern ; alors il n'y a de contraire à la révolution que les satellites du tyran, le calme se rétablit promptement et le peuple, devenu libre, peut se constituer sagement, sans que sa Constitution participe aux mouvements convulsifs de la Révolution; car tous les intérêts se fondent dans un seul, celui de chasser le tyran et d'obtenir une plus douce existence.
Mais dans une antique monarchie, où le gouvernement absolu, malgré ses énormes abus, s'est adouci par les mœurs, par l'habitude, et présente un spectacle imposant d'ordre, de puissance et de sécurité; lorsque; par une convention presque unanime entre le prince et le peuple, on se croit au moment d'assurer la liberté sans commotion, d'opérer de grandes et utiles réformes, s'il survient une révolution subite qui détruit tous les ressorts de la monarchie, quelque heureuse qu'elle puisse être dans ses résultats éloignés, elle cause nécessairement des plaies, des déchirements effroyables ; car il doit se trouver un grand nombre de citoyens, non seulement ennemis par intérêt, mais improbateurs, p îr caractère, de la Révolution; savoir, ceux qui tiennent aux abus, ceux qui perdent leur état, leur fortune dans le nouvel ordre de choses, etensuite tous les hommes paisibles qui ne veulent point sacrifier leur repos et la génération actuelle aux générations futures; tous ceux qui, n'ayant éprouvé ni tort ni grâce de l'ancien gouvernement en regrettent la protection et la tranquillité; enfin les hommes même qui, désirant passionnément la destruction des abus et le règne de la liberté, pensent comme Jean-Jacques, qu'elle « se-« rait payée trop cher pour la vie d'un seul « homme » ; toutes ces résistances présumées provoquent des violences qui deviennent d'autant plus atroces qu'aucune cause apparente ne les justifie. Si dans le désordre général on fait une Constitution, prenez garde qu'elle ne participe aux mouvements convulsifs de la Révolution; prenez-y garde, dominateurs du moment! vous vous êtes crus obligés de renier la lie du peuple, préservez la loi de ce contact, il a fallu des brigands, des libellistes, qu'ils n'approche t point delà Constitution et de ceux qui en délibèrent 1
Plusieurs classes de citoyens ont été maltraitées par la Révolution, faites en sorte que la loi paraisse l'œuvre de tous ; que les hommes qui aspirent à la gloire des législateurs, bienfaiteurs de leur patrie, emploient toute leur influence pour séparer la Constitution de la Révolution ; car s'ils confondent les moyens de l'une et de l'autre, la loi sera l'ouvrage de la force comme la Révolution ; et l'histoire ne pardonne pas de telles méprises; elle châtie les téméraires qui veulent trop faire et tout faire à la fois; elle rétablit les faits, les caractères et dévoile toutes les intrigues.; mais avant même ce jugement de l'histoire, la nation, reposée de son agitation, prononcera le sien.
Je conclus de tout cela que la révolte de la minorité contre la majorité est une grande parole échappée à M. Pétion ; et ce n'est pas la payer trop cher que de la payer par mon silence dans l'Assemblée, d'autant que, malgré l'usage des serments, je n'ai point fait celui de me taire irrévocablement. Assurément je parlerais demain si cela était utile, si ma conscience me disait
qu'il faut parler, et surtout si on voulait m'écou-ter avec plus d'indulgence que par le passé; mais outre que les grandes occasions sont passées, que mes instances ont été inutiles pour obtenir la parole dans les circonstances les plus importantes, et toutes les fois que j'aurais pu démontrer la nécessité de prévenir ou de punir de grands désordres, je persiste à croire que je n'ai plus rien à dire à ceux qui ne seraient pas convaincus que mes principes sont ceux d'un homme pur, d'un homme libre, fidèlement attaché à ses devoirs.
J'allais finir cet écrit, lorsqu'on me remet une déclaration de M. d'Eprémesnil, qui m'attaque comme l'un des fondateurs du club monarchique et comme ayant des principes politiques qui lui paraissent dangereux. Me voilà donc obligé, après avoir répondu à M. Pétion, à faire mon apologie en sens inverse; c'est, je l'avoue, ma consolation de n'appartenir à aucun des partis extrêmes qui divisent la France.
M. d'Eprémesnil m'interpelle de répondre catégoriquement, et jusque-là il invite les bons citoyens à se défier du club monarchique.
Voilà bien la preuve de ce que j'ai dit plus haut, que la minorité de l'Assemblée semble créée et combinée tout exprès pour les succès de la majorité. Ce n'est pas assez pour M. d'Eprémesnil, et malheureusement pour beaucoup d'autres, que des hommes ennemis de toutes les violences, de toutes les usurpations, des innovations dangereuses, des factions qui déchirent l'Etat, se dévouent pour combattre le fanatisme de la démocratie et pour défendre en toute occasion les opprimés; cette persévérance n'est rien, lorsqu'on abandonne le système des trois ordres ; et comme si nous avions encore le choix entre le nouveau et l'ancien régime, M. d'Eprémesnil me demande de rendre compte de ma doctrine sur le cleraé, la noblesse et les parlements-, il me déclare solidaire avec M. de Clermont-Tonnerre, et assurément cette solidarité m'honore; mais je réponds sans consulter mon honorable collègue, qui saura bien aussi s'expliquer pour son compte.
Je réponds que c'est au moins une chose fort étrange que de voir le club monarchique attaqué d'une part, parce qu'il respecte lu Constitution, et de l'autre, parce qu'il veut, dit-on, la renverser.
Je réponds à M. d'Eprémesnil que je n'ai pas l'honneur d'être le fondateur du club monarchique; mais j'en ai fort approuvé l'intention qui est de faire connaître à toute la France l'audacieuse tyrannie du club jacobin, et d'éclairer tous les bons citoyens sur les dangers et les désordres résultant de la régence des clubs. Comme il n'y a rien de plus authentique que ce vœu principal de la société monarcnique, et qu'elle n'a jamais eu de prétentions â l'Empire, il me semble que ce vœu bien connu devait lui concilier la bienveillance de tous les honnêtes gens, et que c'est une insigne maladresse, une grande injustice, de la part des plus zélés royalistes, de lui chercher querelle sur son respect pour la Constitution.
Je déclare, pour ce qui me concerne, que je désire par-dessus toutes choses, la paix dans le royaume, que j'ai horreur de la guerre civile, et que je ne l'entreprendrais ni pour le clergé, ni pour la noblesse, ni po.ur les parlements. Je suis bien convaincu que M. d'Eprémesnil ne veut pas plus que moi faire la guerre civile; mais alors que me demande-t-il et qu'exige-t-il du club
monarchique dans l'état où nous somme3, pourlai accorder confiance de renverser tout doucement la Constitution et de rappeler les parlements? Cela me paraît difficile De dire loyalement ce que nous trouvons de vicieux dans la Constitution et d'attendre du temps et de l'opinion publique plus éclairée des modifications légales? C'est ce que nous nous proposons. Quant à mon opinion personnelle sur les bases de la Constitution, je l'ai prononcée assez souvent et assez hautement pour que M. d'Eprémesnil la connaisse. Le dépouillement du clergé, la persécution qu'il éprouve ne sont sûrement pas dans mes principes; mais son existence, comme ordre poitique de l'Etat, ne m'a jamais paru nécessaire à une bonne Constitution. Je n'en connais pas de meilleure que celle d'Angleterre, et si nous l'avions adoptée, en corrigeant ses défauts, nous serions trop heureux. J'ai voté contre le décret qui a détruit la noblesse héréditaire; je n'avais rien à perdre à cet égard; mais je voulais conserver à la société un ornement et au trône un appui.
J'ai voté pour le décret qui a supprimé les parlements,sans partager aucun des ressentiments qui les poursuivent et en reconnaissant même que les grands tribunaux nous ont préservés des excès du despotisme; mais leur composition d'hommes privilégiés, l'influence qu'ils s'étaient attribuée sur l'administration et la législation, Ja trop grande étendue de leurs ressorts et leur grande puissance étaient incompatibles avec un Corps législatif permanent, peut être même avec une Constitution libre. — J'avoue que le nouvel ordre judiciaire me laisse des regrets sur la destruction de l'ancien.
J'ai opiné pour qu'on déclarât la religion catholique nationale, et je n'ai point signé la déclaration des capucins, parce que mon avis était uniquement déterminé par des considérations politiques. — La constitution civile du clergé, sur plusieurs points, et les formes employées pour la faire exécuter, n'ont pas eu mon suffrage. — Les innovations, en matière de religion, m'ont toujours paru d'autant plus dangereuses qu'il n'y a rien de plus respectable qu'une conscience pure qui leur résiste, et rien de plus redoutable que le fanatisme religieux, si ce n'est celui de l'impiété. Mais en satisfaisant ainsi avec une grande docilité aux interpellations de M. d'Eprémesnil, je lui demande à mon tour ce qu'il veut faire de mes réponses et de la doctrine du club monarchique, en supposant qu'elle fût la mienne? Comment a-t-il le courage de rendre suspects des hommes qui, sous aucun prétexte, ne veulent troubler l'ordre public, mais qui se rangent toujours du côté des opprimés, et qui, au milieu de tant de passions et de dangers, ont toujours dit, disent toujours librement et loyalement ce qu'ils pensent? — 0 malheureuse nation, tu seras donc le jouet de tous les partis, de toutes les vanités, de tous les intérêts ? Chacun attachera à sa cause le sort de l'Etat, chacun fera dépendre de ses propres opinions la fortune publique, et pendant que le démagogue en fureur ?ange sur la même ligne tous ces dissidents insensés, les renverse et les détruit les uns par les autres, ils se déchirent entre eux, ils en . sont venus au point de rendre ridicule et coupable Je désir même de la conciliation. Les inimitiés, les rivalités, l'ambition, plutôt que de se taire, s'exerceraient encore sur la cendre des tombeaux ! C'est donc un parti faible, selon vous, que celui de la modération I Hé bien, montrez-moi le joug que j'ai subi, autre que celui de
ma conscience, montrez-moi votre puissance, et si elle protège l'injustice, ma modération la bravera. Montiez-moi le chemin qui conduit à ia paix et au bonheur publie, et si je n'y marche pas avec vous, ou sans vous, rangez-moi dans la classe de ces monstres qui préparent la ruine de la patrie. Ah! que sa voix se fasse entendre, au lieu des hurlements, des cris féroces qui frappent nos oreilles ! Que le vœu pur et réfléchi de la nation se manifeste et, si c'est la Constitution qu'on lui donne aujourd'hui qui doit la rendre heureuse, je la sépare de ses moyens; j'abjure mes propres opinions, et je me prosterne devant ma Constitution.
Signé : Malouet.
NOTES.
1° Tristes harangues par leurs effets; car assurément il y a des orateurs très distingués dans la minorité, et c'est de ce;ix-ià dont M. Barnave vient de nous dire ce soir, dans l'affaire de Nîmes : « Ne souffrez pas, Messieurs, que les orateurs de cette Assemblée, dont vous improuvez les opinions politiques; influent sur votre décision. » Cette inconcevable naïveté a été extrêmement applaudie; la discussion a été fermée sur-le-champ; il n'y a pius eu moyen de répliquer, pas même au maire de Nîmes accusé. Ainsi, lorsqu'on nous permet de parler et lorsque de grandes vérités, éloquemment présentées par M. de Cazalès, par M. de Clermont-Tonnerre, paraissent faire quelque impression, on avertit la majorité qu'elle doit bien se garder de les accueillir : « Les orateurs dont nous avons l'habitude d'improuver les opinions politiques, qu'ils aient tort ou raison, ne doivent jamais influer sur nos décisions. » Voilà le principe. Ai-je donc si grand tort de me taire? Je ne réponds cependant pas d'avoir toujours bouche close ; facit in-dignatio versum. — Le principe de M. Barnave trouva même son application dans les comités Je suis très convaincu qu'on aimerait mieux que le comité de marine ne fît rien, que de m'y voir faire quelque chose ; et dans la réalité, malgré mon assiduité et ma benne volonté, je n'y suis bon à rien.
2° Dans les discussions importantes.— Je ne citerai que celles où il a été question de la prérogative royale, de l'organisation du pouvoir exécutif, et toutes les affaires où il s'agissait d'insurrections, de désordres, d'insubordination, de troubles, de violations manifestes de la liberté individuelle.— Certainement il eût été plus utile que personne de la minorité n'eût parlé dans ces cas-là, que de débiter quelques phrases interrompues par des murmures continuels, ju-qu'à ce qu'un avis entraînant, d'un membre de la majorité fît fermer la discussion. —Ce n'est pas là ce qu'on peut appeler une habile tactique; c'est le droit du plus fort. Et c'est dans toutes ces discussions importantes qu'on a constamment égaré l'Assemblée ; c'est à force de l'épouvanter sur les abus du pouvoir, sur les projets de contre-révolutions, sur la nécessité des circonstancesr qu'on a changé toutes les idées des hommes sages, bien intentionnés, au point de les conduire à des résultatsdont ilssont étonnés aujourd'hui.— Qu'on se rappelle avec quelle astuce on répondait il y a un an, à mes motions sur l'exercice légitime de l'autorité royale.— Nous y arriverons;. « ce n'est pas le moment: nous allons organiser
« le pouvoir exécutif... Le pouvoir exécutif « fait le mort, » disait M. de Lameth, en parlant des ministres qu'il accusait de ne vouloir pas faire leur charge : il était réservé à ceux-ci de le ressusciter.
3° Protestations. —Je n'ai jamais fait aucune protestation parce que je ne l'ai pas jugé nécessaire ; mais j'estime que tous ceux qui pensent autrement ont le droit de protester, c'est-à-dire de déclarer qu'ils n'ont point donné leur suffrage à une telle loi, et qu'ils la considèrent comme nuisible à la chose publique. La protestation ainsi réduite à son véritable terme n'est qu'une opinion écrite, et comme il n'est point de loi ui ne doive être rétractée lorsque la majorité es opinions la rejette, il est évident que si un, deux, cent citoyens commencent à s'expliquer ainsi, on n'a rien à leur reprocher ; car s'il s'en trouvait cent mille de leur avis, il faudrait bien les entendre. — Il ne peut y avoir de coupable que la protestation de ne pas obéir, et j'excepte encore le cas où l'on croirait sa conscience compromise par l'obéissance; car je ne crois pas à toutes les consciences, mais je respecte celles qui se montrent.
4° La volonté générale. — Celle qui s'annonce dans l'Assemblée par les cris et le tumulte produit en moi un effet tout contraire à son intention. Si c'est ainsi qu'on fait une Révolution, ce n'est pas ainsi qu'on doit faire une Constitution. Pour en obtenir une bonne, il faut plus de méditation que de harangues, jamais d'injures et de menaces ; car on ne me persuadera pas qu'un homme tout bouffi de colère et de prévention soit propre à combiner une loi autre que celle du talion.
La volonté générale, manifestée hors de l'Assemblée par toutes les adresses d'adhésion, ne m'a paru d'aucun poids sur toutes les questions que Loke, Montesquieu, Rousseau, Rainai, Mobly auraient trouvées difficiles à résoudre. Tout ce qui a été fait pour le soulagement du peuple, pour l'affranchir de toute oppression, était dans nos devoirs, et.les adhésions à ces décrets ne peuvent êire équivoques ; mais les conséquences de ces premiers principes, appliqués à toutes les nouvelles institutions, ne peuvent être jugées ni au Palais-Royal ni dans les cafés et les places publiques. Il ne faut pas prendre l'ivresse au peuple sur la conquête pour son jugementréfléchisur les moyens de la conserver. La volonté générale n'a donc rononcé encore, à mon avis, qu'un seul mot li-erté. Les bons citoyens ajoutent avec Vordre et la paix, et la multitude aveugle ne veut point entendre parler de condition, parce qu'on la fait vouloir ainsi. Tel est aujourd'hui l'état de la question sur la volonté générale.
5° Le souverain-. — Personne n'ignore que la souveraineté ne peut être considérée, dans aucun cas et dans aucun pays, comme la propriété d'un prince; c'est celle de tous les membres réunis en société politique qui en délèguent l'exercice à plusieurs ou à un seul ; mais il n'en est pas moins dangereux, dans une grande monarchie, de séparer la personne du monarque de la représentation perpétuelle de la souveraineté, et de vouloir qu'elle ne soit jamais considérée que collectivement, parce qu'alors les hommes simples et grossiers ne la voient nulle part, et en sont plus disposés à toutes les résistances qui troublent l'ordrepublic. Déjà c'est un scandale, dansl'A'sem-blée, que de proférer ces paroles : sujets du roi; et cependant, si vous voulez bien le considérer comme l'image vivante de la loi, il faut que nous
nous reconnaissions tous individuellement ses sujets, car lui seul n'est soumis à aucun individu, mais seulement à la loi, et tous les indivi lus sont soumis au monarque, ou nous sommes dans l'anarchie.
Le Corps législatif est seul indépendant, dans le royaume, de toute personne et de toute autorité. Le Corps législatif, et le roi à la tête, voilà la représentation exacte de. la souveraineté nationale; mais le monarque représente à lui seul la souveraineté de la loi. Ain-i, tout ce qui peut porter atteinte à sa dignité, à sa prérogative d'indépendance, à son autorité légitime, est aussi criminel en fait qu'absurde en principe, l'on veut conserver la monarchie.
6° La régence des clubs. — Yoilà tout à la fois le crime des démagogues, et celui des bons citoyens qui la partagent, ou la tolèrent. Le premier club délibérant, dénonçant et requérant les ma^ gistrats sur les affaires publiques, devait être puni ou déserté par tous les honnêtes gens. Dans une des séances d i comité de marine, on lut une lettre des commissaires du roi à Brest, qui nous envoyaient une dénonciation du club patriotique, contre M. Hcçter. Mon avis fut qu'il n'y avait pa3 lieu à délibérer sur la dénonciation d'un club, el qu'il n'y avait point de réponse à faire à des commissaires du roi, qui se chargeaient d'une pareille mission. Les clubs jacobites, et tous les clubs patriotiques doivent être détruits, si l'on veut la paix dans le royaume, si on veuteonnaî-tre une volonté générale. Il est très heureux qu'ils calomnient, qu'ils persécutent aussi bêtement le club monarchique, qui n'a d'autre but que de les démasqu r; plus ilsarrivent rapidement à une domination universelle, plutôt ils seront connus et généralement détestés. On a jusqu'à présentobtenu degrands succès pardessottises; maiselles restent, et les succès passeront, car la terreur ne paralyse pas toujours la volonté générale.
7° M. d'Eprennesnil, avant d'arriver à moi, parle si mal de M. Necker, que ce n'est pas ici le lieu de rappeler que je n'ai pas adopté toutes les opinions de ce ministre, mais bien de déclarer que je n'ai jamais cessé de rendre hommage à sa vertu. Les défauts d'un homme de bien, les fautes d'un homme supérieur ne suffise pas pour l'effacer de la mémoire des hommes justes.
8° M. de C 1ermont-Tonnerre ; c'est après moi le membre de l'Assemblée le plus indignement calomnié; mais c'est le seul avantage que j'aie sur lui. Je nemeflattepasas urément d'avoir de meilleures intentions, ni autant de talent.
9° La constitution civile du clergé. —Je ne suis pas théologien et il serait facile de m'égarer sur les limites des deux puissances : n Bossuet, Féne-lon ou Montesquieu avaient fait cette constitution, je l'aurais acceptée avec plus de confiance, que je n'en ai en nos docteurs modernes. Mais l'inutilité du serment, l'iniju^tice et les dangers de la persécution, et cette doublure d'évêques nouvellement sacrés qu'on voit déjà dans l'Assemblée, m'inspirent une tristesse mêlée d'effroi, qui n'ont rien de commun avec les idées qu'on appelle aujourd'hui superstitieuses. Le comité de marine qui ne fait rien, ou peu de chose; ie comité de f-anté qui n'a point fait encore parler de lui, pourraient bien obtenir une place distinguée dans i histoire, et j'espère alors qu'on n'oubliera pas que j'ai l'honneur d'être membr-e de ces deux comités.
PRÉSIDENCE DE M. DUPORT.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
, député de Lot-et-Garonne. Je suis chargé, Messieurs, de vous exposer les sages mesures prises par no!re département, non seulement pour arrêter des insurrections partielles, s'opposer à des insurrections générales, mais pour éclairer le peuple trompé par les ennemis de la Constitution.
Dans les circonstances critiques où s'est trouvé le département, il a cru devoir déployer tout l'appareil de la force que la Constitution a mise m son pouvoir, et envoyer même des commissaires civil'dans les divers cantons qui étaient menacés d'invasion par les malveillants qui ravageaient le Quercy. Il a cru aussi, pour parvenir avec plus de facilité à ramener 1 ordre, devoir faire une proclamation qui a produit le meilleur effet. Je puis vous assurer, Messieurs, que la surveillance du département s ra infatigable pour déjouer les menées de ceux qui espèrent vainement renverser l'édifice que vous avez élevé sur les ruines du despotisme.
Le département, dans les adresses qu'il fait parvenir à l'Assemblée et que je lui remettrai, fait l'éloge de la conduite patriotique du régiment de Royal-Pologne, de la gendarmerie nationale, des commissaires civils et des gardes nationales, dont le dé) artement a été obligé d'arrêter le civisme, le sortayant seul décidé la préférence pour se porter sur les frontières du Quercy, et voler au secours de nos frères.
Je suis encore chargé, Messieurs, de solliciter de l'A semblée le renvoi d'une adresse du département au comité militaire, tendant à obtenir 18 brigades de gendarmerie nationale et des canons, afin qu'elle soit prise en considération, d'après la position du département, dont les cum-muni ations sont difficiles à cause des montagnes, bois et surtout des mauvais chemins qui pourraient favoriser les ennemis du bien public.
Je remittr al a ussi à l'Assemblée une adresse qui renferme les sentiments civiques et les dispositions patriotiques du département du Lot-et-Garonne, avec l'extrait des délibérations et arrêtés qu'il a pr s pendant la durée des troubles, et la correspondance qu'il a tenue avec les divers corps administratifs, les chefs des troupes, gardes nationales et gendarmerie nationale.
Je fais hommage,en son nom à l'Assemblée, de sa proclamation amicale et fraternelle aux habitants de campagne, dont les principes sont conformes à la Constitution.
Je finis en demandant que M. le Président soit autorisé, au nom de l'Assemblée nationale, d'écrire une lettre de satisfaction au département sur la conduite qu'ont tenue le régiment de Royal-Pologrïe, la gendarmerie nationale, les commissaires civils, les gardes nationales et le département, et qu'une lettre soit adressée aux corps et personnes respectives.
(Ces différentes propositions sont décrétées.)
(1) Cetto séance est incomplèto au Moniteur.
donne lecture d'une lettre de M. de France, juge de paix du canton de Rebais, qui annonce que, sur 200 citations faites à son tribunal, depuis le 26 décembre dernier, jour de son installation, 10 tout au plus ont été portées au tribunal du district, les autres ont été nmia-blement arrangées et très peu ont subi un jugement.
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse de la société des amis de la Constitution établie à Beauvais, qui assurent l'Assemblée que, malgré tous les efforts réunis du fanatisme et du despotisme, l'amour de la patrie et ia raison triomphent, et les décrets de l'Assemblée nationale s'exécutent.
« Malgré les efforts réunis du despotisme et du fanatisme, disent les amis de la Constitution établis à Beauvais, c'est aux acclamations d'un peuple nombreux que les électeurs du département de l'Oise viennent d'élever à l'épiscopat les vertus pastorales et civiques réunies dans un de nos honorables membres.
« Vous touchez au terme de vos travaux, et la reconnaissance du peuple français va vous être à jamais acquise; mais pour assurer le maintien de cette belle Constitution, il devient pressant de prendre les précautions indiquées par une sage prévoyance. Les despotes qui nous environnent semblent prendre de l'ombrage de la liberté que la France a conquise. Toutes les vraisemblances annoncent des projets hostiles, concertés avec nos ci-devant princes, sourds à la voix de la patrie qui les rappelle. Vivre libre ou mourir est devenu le cri de ralliement de la nation. Cette devise, imprimée dans nos cœurs, se lit sur ses drapeaux d'un bout à l'aulre de l'Empire ; mais elle ne pourrait opposer à nos ennemis qu'un courage stérile par le dénuement d'armes, si vous ne faites exécuter le décret qui ordonne la prompte répartition de 97,000 fusils aux gardes nationales du royaume.
« L'ordre pour la levée des troupes auxiliaires compris dans votre décret n'est pas encore parvenu aux départements. Nous vous demandons de ne pas souffrir un plus long retard dans l'exécution de ce décret, que l'approche du printemps rend tous les jours plus instante ; l'organisation si ardemment désirée de; gardes nationales cause partout de l'impatience et de l'incertitude ; vous avez annoncé une formation d'une compagnie de volontaires destinés à voler où le service de la patrie les appellera. Ils n'attendent que le décret pour en presser l'exécution et se rendre propres à leurs honorables fonctions par les services auxquels ils se livreront avec zèle.
« Hâtez-vous, au nom de la patrie, de prononcer le décret qui, au lieu d'une multitude confuse d'hommes sans instruction et sans armes, présentera aux ennemis du dehors et de l'intérieur la masse imposante d'un corps de citoyens redoutables par leur courage, leurs armes et leur discipline.
« Vous avez fait le bonheur de la France : occupez-vous, sans perdre de temps, d'assurer son repos. » (.Applaudissements.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse des amis de la Constitution de Château-Thierry, contenant l'hommage de leur respect, de leur dévouement et des mesures qu'ils prennent pour soutenir et propager le civisme et l'esprit public. Us offrent leurs soins et leurs travaux
aux municipalités des campagnes pour la répartition des impôts.
annonce que M. de Lessart, ministre de l'intérieur, informe l'Assemblée qu'il a rempli ses intentions, concernant la retenue faite au bureau de Saint-Genis de quelques sommes expédiées à la destination de Genève; il assure que la remise en sera faite sans délai au sous-fermier de la messagerie de Genève, ou à ceux qui la réclameront.
Messieurs, je suis chargé de vous annoncer que, dans le district de Loches, département d'Indre-et-Loire, sur 51 fonctionnaires publics ecclésiastiques, 38 ont prêté le serment civique.
Heim I ce n'est pas trop.
Je profite de l'occasion pour vous faire connaître la conduite beaucoup plus généralement patriotique des prêtres fonctionnaires du district de Grenoble. Sur 216 ecclésiastiques, curés ou vicaires, qui sont dans ce district, un seul a refusé de se soumettre à la loi du 26 décembre, concernant le serment civique. (Applaudissements. )
fait part à l'Assemblée de3 dernières nouvelles sur les troubles d'Uzès et donne lecture d'une adresse des membres composant le directoire du département du Gard à leurs administrés; ils les exhortent dans les termes les plus paternels et les plus forts à ne point se laisser séduire par les instigations de ceux qui voudraient, au moyen d'une guerre civile, ramener parmi nous le règne de l'esclavage et du despotisme.
« Sachez, s'écrient ces administrateurs, sachez que la religion sainte, que tant de monstres profanent en osant l'invoquer, n'est pour rien dans ces malheureux désordres excités à Uzès ; ap-
Îirenez à vous méfier du fanatisme et connaissez e but que se proposent ceux'qui voudraient se servir de votre crédulité pour renverser la Constitution, cette Constitution qui vous est si chère et à laquelle vous devez votre bonheur. (Applaudissements.)
(L'Assemblée ordonne qu'il sera fait mention honorable de cette adresse dans le procès-verbal.)
donne ensuite connaissance d'une délibération du département de VArdèche ainsi conçue :
« Le directoire du département, informé qu'un nouveau rassemblement de municipalités et de gardes nationales doit avoir lieu demain sur le territoire de la municipalité de Berrias ; que ce projet a été formé à l'occasion des troubles survenus dans la ville d'Uzès, et des émigrants de cette ville, qui se sont répandus dau8 différentes communautés du district du Tanargues. et qu'il peut avoir pour objet l'envoi dans la même ville d'un secours de gardes nationales du département ;
« Considérant que ce projet est également inconstitutionnel sous ces deux rapports, et que s'il a été conçu dans le premier moment "d'une alarme donnée à l'humanité, et à la propriété des contrées où se sont portés les émigrants d'Uzès, il est du devoir de l'administration de rappeler à ces contrées les principes qui doivent régler leur conduite dans des crises pareilles, et l'intérêt qu'elles ont de s'y conformer.
« En conséquence, il a été fait défense aux-dites municipalités, gardes nationales et tous autres citoyens du département, de se rassembler en armes, sur le territoire de la municipalité de Berrias et de toute autre, et de se transporter sur aucune partie de celui du département du Gard; fait les mêmes défenses à la municipalité et aux gardes nationales de Berrias, charge ladite municipalité de donner incessamment les avis nécessaires aux municipalités voisines, et à toutes autres qui peuvent avoir été prévenues de se réunir audit lieu; et dans le cas que, malgré ces avis, la municipalité de Berrias ne pût empêcher ledit rassemblement, défenses lui sont faites de prendre aucune part à tout ce qui pourra y être fait ou délibéré, à peine, par les officiers municipaux, d'être poursuivis comme perturbateurs du repos publie, et déclarés responsables des événements qui pourraient suivre ledit rassemblement.
« Déclare aussi que les mêmeâ poursuites et responsabilité seront encourues par les officiers municipaux et chefs des gardes nationales des autres communes, qui seraient entrés dans le projet dudit rassemblement ; charge la municipalité de Berrias, dans le cas qu'elle n'ait pa^pu l'empêcher, de se transporter, dans l'Assemblée pour y faire lecture de la présente délibération, et de la lettré d'envoi du directoire.
« Arrête aussi qu'il sera envoyé un courrier extraordinaire à 1 Assemblée nationale et au roi pour leur donner connaissance des faits ci-dessus et les prier de céder aux instances réitérées du conseil et du directoire du département, pour obtenir l'envoi d'un nombre de troupes de ligne suffisant poùr contenir daus ce département les mauvais citoyens et rassurer les bons. »
Je ne demanderai pas que vous ajoutiez aux mesures que vousavez décrétées il y a 3 jours ; mais je demanderai que le Président soit chargé d'écrire au directoire du département de l'Ardèche pour lui témoigner sa satisfaction et pour l'inviter à redoubler de vigilance et de zèle.
Je crois qu'en adoptant la proposition du préopinant, l'Assamblée nationale doit ordonner que son Président se retirera par devers le roi pour lui présenter celle lettre, afin de le mettre à portée de connaître l'état actuel du département dont il s'agit. Je ne crois point ma proposition hors de saison. J'observe que dans l'état actuel i! y a différents endroits de la France qui ont besoin de forces. Je crois prudent de ne pas laisser perdre de vue au roi, et particulièrement au ministre, l'état de ce département.
On ne peut rien ajouter à ce que l'Assemblée a décrété, mais je demande que l'Assemblée veuille bien charger son Président d'écrire une lettre de satisfaction au directoire du département de l'Ardèche, comme elle en a écrit une au département du Gard, afin de l'encourager à continuer son zèle.
(L'Assemblée, approuvant les mesures et la conduite ferme des administrateurs,charge le Président de leur écrire une lettre de satisfaction.)
M. de Laville, consul de France près la cour de Danemark, ayant prêté le serment civique exigé de tous les fonctionnaires, lait part a l'Assemblée qu'il a déféré à son décret le 29 janvier dernier.
J'ai reçu une lettre de M. de Latude dont je dois donner connaissance à l'Assemblée :
« M. le Président, rempli de confiance dans les bontés des représentants delà plus généreuse nation de l'univers, j'élève jusqu'à eux une voix trop longtemps affaiblie par les tyrans et par le despotisme.
« Je crois appartenir plus spécialement à la bienveillance publique ; il n'est personne dans l'Assemblée nationale qui ne se souvienne avec effroi des tourments qui ont déchiré ma pénible vie. Ressuscité à la liberté après 40 ans de la mort, de l'esclavage, j'ai dû regarder comme le garant le plus sûr du bonheur de mes dernier jours, l'enthousiasme avec lequel mes concitoyens m'ont accueilli, lorsque j'ai reparu parmi eux.
«Gomment cet intérêt si touchant serait-il stérile aujourd'hui ? Les citoyens qui réclament le prix de leurs services ont pu du moins, pendant les journées actives ,de leur existence, se ménager,par toutes les ressources du travail et de l'industrie, ces honorables épargnes qui mettent la vieillesse à l'abri de !a misère. Mais moi, Monsieur le Président, moi toujours privé de mes facultés physiques, souvent de mes facultés morales, qu'ai-je pu recueillir?... des peines cruelles, des afflictions profondes, de douloureux et amers souvenirs. Voilà tout mon partage; voilà les titres que j'apporte, les droits qui sollicitent pour un infortuné.
« Je vous supplie, Monsieur le Piésident, au nom de l'humanité, au nom de cette patrie qui me compte depuis si peu de jours parmi ses enfants, je vous supplie de faire connaître mes besoins et mon vœu à l'Assemblée nationale. Ma longue captivité, mçs douloureuses angoisses ne sont-elles pas autant de services négatifs rendue à la liberté publique, à la liberté de tous les peuples? Ma jeunesse a été abreuvée d'amertuno, un avenir long et incertain n'a rien de consolant pour un malheureux.
« L'Assembléenationale souffrirait-elle que mes dernières années fussent flétries par l'indigence? Non, Monsieur 1" Président, elle pensera que c'est aux amis de la liberté de réparer les torts du despotisme envers l'homme de douleur qui en a été la victime. Elle pensera que c'est aux représentants d'un peuple, qui a brisé les fers de l'esclavage, à essuyer les larmes de celui qui les a si longtemps portés. (Applaudissements.)
« Je suis, avec un profond re-pect, Monsieur le Président, etc...
« Signé: Latude. »
Il est inutile de rappeler à l'Assemblée les malheurs de M. de Latude; leur très longue durée, l'injustice du pouvoir arbitraire qui les lui a fait souffrir, sont connus de tout le monde ; ce n'est pas un bienfait que la nation doit lui accorder, c'est véritablement une indemnité qu'elle lui doit; c'est une dette qu'elle a à acquitter envers lui. Je ne pense donc p;!S que l'Assemb'ée nationale puisse balancer à faire droit sur la pétition qui lui est présentée.
Je me borne à proposer qu'elle soit spécialement recommandée aux comités des pensions et des finances, pour en rendre compte lundi sans autre délai. (Applaudissements).
Un grand titre de plus à votre justice, c'est 40 ans de malheurs; ces malheurs sont, pour ainsi dire, les aînés des malheurs qu'ont supportés les honnè:es gens sous la ty-
rannie et sous le plus affreux despotisme. Vous voulez renvoyer cette pétition au comité des pensions et des finances, eh bien, que vous diront-ils? De deux choses l'une: ils diront qu'il y alieu ou qu'il n'y a pas lieu à donner une pension. S'ils vous disent qu'il n'y pas lieu, vous êtes trop humains pour refuser aussi; s'ils vous disent qu'il y a lieu, vous devrez fixer la somme.
Je demande donc, Messieurs, que vous la fixiez vous-mêmes à l'instant, et, pour la gloire de l'Assemblée, je demande que, par un'acte éclatant d'humanité, vous décrétiez sur-le-champ qu'il sera fait au sieur de Latude une pension annuelle et viagère de 1,200 livres,. (Applaudissements.)
Un membre: Pour que les formalités soient remplies, je demande que les comités fassent un rapport dans la plus prochaine séance.
Soit que vous adoptiez la motion de M. Bouche, soit que vous adoptiez celle de M. Barnave, il n'en est pas moins important de reconnaître le principe, que tout homme qui a été aussi longtemps la vietime du pouvoir arbitraire, qui a été persécuté au nom de la nation par le despotisme a, ai ri si que tous ceux qui sont dans la même hypothèse que lui, des droits à la justice et à la bienfaisance. Ge principe est surtout vrai pour M. de Latude; on ne sautait trop tôt venir à son secours.
Je demande que, si vous n'adoptez pas la motion deM. Bouche, vous adoptiez au moins celle de M. Barnave.
Je demande la priorité pour la motion de M. Barnav.
Je demande la parole.
Plusieurs membres demandent la priorité pour la motion de M. Bouche.
(La discussion est fermée et la priorité accordée à la motion de M. Barnave.)
Je mets aux voix la motion de M. Barnave tendant au renvoi de la pétition de M. de Latude aux Comités des finances et des pensions réunis pour en être rendu compte lunai sans autre délai.
(Cette motion est décrétée.)
Une députation des commis aux aides de l'élection de Paris demande à être admise à la barre.
(L'Assemblée or'donne qu'elle soit introduite.)
L'orateur de la députation : Messieurs, les commis aux aides de la ci-devant élection de Paris, interprètes de tous ceux du royaume, pleins de vénération pour la sagesse de vos décrets et pénétrés de la soumission qu'on doit aux lois régénératrices qui vont assurer à jamais le bonheur du peuple français, ont souhaité d'être admis à l'honneur de vous offrir l'hommage de leur respectueuse reconnaissance (Applaudissements à gauche.) de ce que vous avez bien voulu prendre notre sort en considération.
En détruisant un impôt, dont la suppression était universellement désirée, vous n'envelopperez pas les percepteurs dans la même proscription. Dans un temps où la naissance établissait des distances et des distinctions entre les hommes, on exigeait que nous fussions nés de
ce qu'on appelait une famille honnête: obligés de subir des examens, de faire une surnumérariat long et dispendieux, nous étions encore assujettis/dans l'exercice de nos places, à des frais considérables; il n'est aucun d'entre nous qui n'ait été obligé de débourser une somme de 1,800 livres. Par la suppression des aides, nous restons la plupart sans ressources.
Les hommes qui longtemps ont été utiles, les pères de famille, ont des droits incontestables à votre justice ; nous demandons un traitement pour ceux d'entre eux qui ne peuvent plus être utiles.
Les jeunes gens, ceux qui sont en état de servir encore, n'ont point la folle prétention de devenir pensionnaires de l'Etat; ils ne vous demandent que des secours momentanés qui les mettent à même d'attendre la préférence qu'ils sollicitent pour l'admission aux emplois de nouvelle création. Leur éducation et leur capacité les rendent propres à les remplir; et plusieurs de vous, Messieurs, ont daigné se rendre garants de leur boune volonté. Tel est l'exposé de la pétition que nous osons adresser a cette auguste Assemblée.
Nous avons prouvé, par notre conduite, depuis le jour à jamais mémorable où s'opéra notre heureuse Révolution, que les plus grands sacrifices, les pertes les plus sensibles, les dangers les plus imminents, que rien en un mot ne pouvait nous en détacher. Mais si vous daignez adhérer h nos demandes, vou3 ne ferez que nous rendre plus chère cette Constitution et vous ne nous mettrez pas dans la dure nécessité de verser seuls des larmes au milieu de la joie et de la félicité. » (Applaudissements.)
répond: Lorsque l'Assemblée nationale, guidée par la générosité de la nation française, a formé l'entreprise immense de régénérer l'Empire,ellea dû porter ses regards sur le système des impositions, elle a dû surtout délivrer des hemmes libres de toutes les entraves de l'ancien régime ; mais en détruisant les abus de la fiscalité, elle a également senti que 1 s hommes utiles employés jusqu'à ce jour à veiller à la perception des impôts, privés entièrement de leur état sans avoir démérité de la patrie, avaient des droits assurés à son équité. L'Assemblée nationale prendra en considération la position où vous êtes; elle examinera également votre demande et vous permet d'assister à sa séance. (Applaudissements.)
Je demande que l'adresse qui vient d'êtie lue à l'Assemblée soit renvoyée à ses comités des finances et des pensions réunis, et j'ai l'honneur d'observer à l'Assemblée
Su'elle doit prendre en considération la pétition
e gens qui se sont sacrifiés pour le bien public; ils donnent les preuves de leur reconnaissance à la nouv; lie Constitution ; ils donnent une grande leçon à ceux qui combattent contre elle,
Monsieur le Président, je demande l'impression de votre réponse, surtout du dessein de l'Assemblée nationale.
Un membre : Profitez de la leçon.
Je demande que la pétition qui vous est présentée par des employés, qui, par leur patriotisme et leur courage à maintenir les
perceptions, ont mérité la plus grande faveur, soit renvoyés à la commission chargée des compagnies de finances.
J'appuie la motion qui vient de vous être faite par M, de Lameth. Je vous prie de considérer que les mêmes opérations de finances qui privent de leur état les nombreux commis des aides, embrassent non seulement ceux de la capitale, mais encore ceux des provinces;...
Plusieurs membres : Oui 1 oui !
, qu'on prive également de leur étateeuxquisontemployésdansla ferme du tabac. Je demande quj l'Assemblée soit juste pour tout le monde.
(L'Assemblée ordonne l'impression de l'a Iresse et la renvoie à la commission chargée de l'organisation des compagnies de finances.)
Voici le résultat du scrutin pour l'élection d'un président et de trois secrétaires :
Sur 361 votants, M. de Noailles a obtenu 193 voix et M. Tronchet, 128; 40 voix ont été perdues.
En conséquence,M. de Noailles est élu Président de l'Assemblée.
MM. Cochon de L'Apparent,Sa!le et Hébrard sont nommés secrétaires en remplacement deMM.Bous-sion, Livré et Marolles.
L'ordre du jour est la suite de la discussion sur l'affaire de Nîmes (1).
Un membre : M. l'évêque de Nîmes, sans une maladie grave qui le relient dans son lit, se proposait de vous présenter ses observations sur l'affaire de Nîmes; il m'a seulement chargé de vous faire part de ses conclusions. Il se réfère aux conclusions prises par M. de M rguerittes, pour une amnistie non partielle mais générale, comme elle avait été proposée par le comité (2). (Rires à gauche.)
Messieurs, discutée dans le discours du rapporteur de vos 3 comités réunis, présentée sous Fes divers points de vue dans la défense de M. de Marguerittes et dans l'opinion de M. Rabaud de Saint-Etienne, l'affaire ae Nimes me paraît assez éclaircie, pour que, sans vous retracer les faits et sans suivre les préopinants dans la discussion, il me suffise de vous indiquer en quoi je diffère d'eux dans les résultats et de vous présenter, à l'appui de chacune de ces différences, les raisons qui me paraissent les justifier.
L'affaire de Nîmes présente,dans ses nombreux détails, le tableau le plus
affligeant pour l'humanité, pour la philosophie et pour la raison
humaine. Le fanatisme religieux et le fanatisme politique y ont déployé
leur funeste énergie; des armes atroces ont été inventées et fabriquées
de part et d'autre, le sang a coulé et toutes les recherches d'une
ingénieuse barbarie ont été ajoutées à l'atrocité des assassinats; et
cependant, Messieurs, c'est par de petites passions, c'est par de
petites rivalités, c'est par la misé-
Je ne vois pas que les protestants aient voulu massacrer les catholiques et changer en un coupable despotisme la liberté que leur ont donnée nos décrets.
Je ne vois pas que les catholiques aient voulu exterminer les protestants et élever sur une proscription affreuse le fmlôme d'une contre-révolution.
Je vois que de part et d'autre de petits intérêts ont réuni quelques hommes pour accaparer des suffrages, que ces noyaux une fois formés, on a ressuscité d'anciens mots de ralliement et l'on s'est mutuellement prêté les projets les plus sinistres. Du moment où les mots catholiques et protestants ont été prononcés, les catholiques ont dit : Nos adversaires ont été longtemps opprimés, leur système religieux admet de préférence les formes républicaines ; ils vont exagérer leur amour pour la Révolution actuelle ; ils s'attacheront aux hommes turbulents qui prétendent la diriger et, forts de cet appui, ils nous persécuteront ; il est donc nécessaire de nous unir et d'opposer la force contre la force qui nous menace.
Les protestants ont dit : Nous jouissons à .peine de la liberté que la Révolution nous procure ; les catholiques dont le système religieux donne à l'autorité une prépondérance absolue, dont les préjugés voient notre affranchissement avec peine, dont la Constitution actuelle a dépouillé le le clergé, doivent être et nos ennemis et ceux de la Révolution ; ils doivent s'attacher à tous les complots, à tous les projets qui pourront ramener l'ancien état de choses ; il faut donc nous préparer à leur résister; il est donc nécessaire de nous unir et d'opposer la force à la force qui nous menace.
Ainsi ont raisonné les malheureux citoyens de Nîmes : livrés à ces affreuses chimères, ils ont voulu être forts contre des crimes qu'ils supposaient; ils ont désespéré de la loi, ils se sont armés ; et entre des hommes qui se soupçonne :t, qui se haï-sent et qui sont armés, la plus faible rixe suffit pour provoquer des massacres.
Voilà, Messieurs, ce que j'ai cru voir de plus certain à travers les nuages répandus sur cette désastreuse atfaire.
Un membre à gauche : Vous n'avez pas la vue bonce.
Appelés à remédier à tant de maux, poursuivrons-nous ies coupables ou consolerons-nous les victimes? Si la justice conseille la continuation de la procédure, l'humanité s'oppose ici à ce que l'on écoute la justice ; ce n'est pas avec du sang que vous effacerez les traces de celui qui a coulé dans les rues de Nîmes; ces coupables habitants n'ont que trop expié leur crime ; c'est la paix que nous leur devons, il faut donc la leur donner. Je crois cependant, Messieurs, qu'il faut excepter de l'amnistie les ofticiers municipaux; je ne considérerai jamais d'un même œil et les fonctionnaires publics et la masse des citoyens; c'est pour cette masse que le gouvernement existe, son intérêt, son salut est la suprême loi de l'Etat ;
c'est pour elle que je demande l'amnistie, parce que la justice lui serait plus nuisible qu'utile, parce qu'il serait barbare d'ajouter des échafauds aux nombreuses calamités dont la Providence a affligé la ville de Mîmes ; mais il n'en est pas de même des officiers municipaux. Libres d'accepter ou de refuser le devoir que leur impose cette qualité, ils se sont mis dans l'entière dépendance de la loi ; elle ne leur doit plus que justice, et son indulgence deviendrait une flétrissure pour eux. Ces principes posés, j'examine le décret présenté par vos comités; il mérite, selon moi, deux reproches également graves ; il ne rend pas justice exacte aux officiers municipaux, il ne donne pas une entière amnistie aux nabi-tants de la ville de Nîmes.
L'amnistie n'est pas entière ; l'article 2 en excepte ceux qui ont enlevé le drapeau rouge des mains de l'ofticier municipal. Je ne dissimule pas leur délit, quelles que soient les circonstances qui pourraient peut-être l'atténuer. Reportez-vous un moment sur le lieu de cette scène affreuse : deux troupes acharnées se combattaient, la plus faible veut se fortifier de la loi, elle saisit un officier municipal (l'abbé Relmond), elle le force à prendre le drapeau sans que l'on ait pu remplir les formalités prescrites pour la publication delà loi martiale; elle l'entraîne avec le drap au, elle le maltraite de paroles et d'effets ; et c'est au milieu de ce tumulte que le drapeau a été arraché des mains de M. Relmond, et que l'on a méconnu la loi qui paraissait dans ces circonstances être l'arme de l'autre parti.
Je vous le demande, Messieurs, quelle que soit la nature de ce délit, croirez-vous devoir en poursuivre le châtiment, lorsque les assassins d'un vieillard respectable (1) seront impunis, lorsque lesassasins du sieur Gas seront impunis? et croir z-vous pouvoir punir un acte illégal, lorsque vous accorderez le pardon aux actes les plus atroces ? Par ces motifs, je demande la question préalable sur l'article 2 du projet de décret de M. le rapporteur.
Je passe au second reproche, celui de n'avoir pas rendu justice à la municipalité de Nîmes.
Ou les officiers municipaux sont coupables, ou ils sont innocents, ou
leur conduite est douteuse : si les officiers municipaux sont coupables,
il faut en faire mention dans le décret, improuver leur conduite et leur
infliger une peine quelconque; mais M. le rapporteur n'a point dit
qu'ils fussent coupables, et M. Rabaut de Saint-Etienne lui-même, en
déclarant que son opinion est en suspens sur le reproche qui leur était
fait de n'avoir point proclamé la loi martiale, me paraît les avoir
justifiés de ce délit; celui d'avoir toléré la cocarde blanche, délit
que M. le rapporteur me paraît avoir eu tort de placer dans le
considérant de.son décret, surtout puisqu'il ne lui appliquait aucune
peine dans le dispositif du décret : ce reproche, dis-je, me paraît
avoir été suflisammént repoussé par le rapprochement des époques que M.
de Marguerittes a présenté dans sa défense. Les officiers municipaux ne
sont donc pas coupables; si leur conduite était douteuse, il faudrait
continuer la procéJure à leur égard, et je me référerais volontiers à la
proposition qu'en a faite M. die Marguerittes, proposition qui honore
son patriotisme (Murmures et rires à gauche)____proposition qui honore
son patriotisme [Nouveaux rires à gauche)...., patriotisme
Mais, Messieurs, j'avoue qu'il ne me reste aucun doute. La municipalité me paraît irréprochable; le maire de Nîmes n'est coupable d'aucun délit; dans cette circonstance, vous devez le déclarer, et c'est ce que je demande expressément. Je me résume en deux mots : amnistie pour tous les citoyens, justice à la municipalité, et je vous propose le décret suivant, qui n'est, Messieurs, que celui de votre rapporteur, avec les changements que je viens de motiver :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu ses comités des recherches et des rapports décrète :
« Art. 1er. Que sur la démission du maire de
Nîmes et du plus grand nombre des officiers municipaux, il sera procédé
à l'élection d'une nouve le municipalité; que le roi sera prié de donner
à cet effet les ordres nécessaires au procureur syndic du district et de
faire passer à Nîmes des forces suffisantes pour assurer la liberté et
la tranquillité des élections.
Art. 2. Que la procédure, commencée sur les événements des 29 mars, 2 et 3 mai, 13, 14, 15 et 16 juin, cessera d'être suivie et sera regardée comme non avenue ; en conséquence, que les accusés actuellement détenus seront incessamment remis en liberté.
« Art. 3. Qu'il n'y a pas lieu à inculpation contre le maire de Nîmes, ni contre les officiers municipaux.
« Art. 4. Enfin, l'Assemblée nationale, profondément touch e des événements désastreux dont elle a entendu le récit, invite les citoyens de Nimes à se prémunir contre les suggesiions qu'on pourrait employer encore pour les désunir et pour les plonger dans de nouveaux troubles; elie les exhorte à sacrifier, pour le bien de la paix, le souvenir et le ressentiment de leurs maux et à chercher, dans l'union la plus durable et dans la tranquillité publique, la consolation et l'oubli des malheurs qu'ils ont éprouvés. »
Vous avez entendu le récit des malheurs dont la ville de Nîmes a été le théâtre. Je croirais insulter à votre justice, je croirais outrager votre humanité si j'employais des mouvements oratoires pour augmenter la profonde impression de douleur que doit avoir laissé dans vos âmes le récit de ces forfaits.
Placés à une longue distance de tous ces malheurs, comment en distinguer les véritables causes? Comment distinguer la vérité à travers l'exagération de l'esprit de parti, des querelles religieuses, des querelles politiques : tout ce qu'il y a de sacré, tout ce qu'il y a de puissant sur les cœurs des hommes les a, dit-on, excités. De si grands intérêts doivent avoir laissé peu de ciluytns étrangers à ces querelles. Peut-être même que ces puissants motifs de division ne sont pas assez loin de nous, pour que l'Assemblée nationale puisse juger avec impartialité les crimes qu'ils ont fait commettre ; mais par bonheur ce fatal devoir ne nous est pas imposé; heureusement que ce n'est pas à nous qu'il appartient et de découvrir et de juger ces crimes
odieux. Législateurs de la nation française, nous ne sommes pas ses juges. Négligeant donc les faits, oubliant les temps, me séparant, autant que l'humaine faiblesse peut le permettre, et de mes opinions civiles et de mes opinions religieuses, je ne me souviendrai que du caractère dont nous sommes revêtus, je rappellerai les législateurs de l'Empire français à ces principes éternels de justice qui appartiennent à tous les temps et qui doivent dominer tou'es les circonstances.
C'est par la juslice que la société existe; c'est elle qui distingue essentiellement un peuple sauvage d'un peuple policé; c'est par elle que la nature cédant au droit, la violence fut soumise à la loi. Quand un Corps législatif commet un déni de justice, q; and il refuse à un citoyen quelconque la protection que la loi doit également à tous, ce jour-là même il dissout la société qu'il était chargé d'instituer: il remet tous les individus qui la composent dans les droits qu'ils ont reçus de la nature : ils les autorise tous à s'armer pour leur vengeance et pour leur sûreté. Quand un crime est commis, la protection que la.loi do t, c'est la punition de ce crime; car ce n'est pas à la vengeance, c'est à la sûreté de la société, que les auteurs de ces grands crimes sont immolés.
Ainsi quand on vous prjposel'abolition de la procédure commencée à Nîmes ; quand on vous propose de ne pas trouver de coupables où de si grands crimes ont été commis, on vous propose en d'autres termes de refuser aux citoyens la protection que la loi leur doit; car cette protection n'est efficace que par la terreur que le châtiment inspire au crime; on vous propose en d'autres termes de dissoudre la société que vous avez été chargés d'instituer.
Ces maximes peuvent être rigoureuses; cependant (lies sont d'une grande vérité; cependant il est impossible de les contredire. Que l'Assemblée nationale s'en pénètre, et qu'elle soit bien convaincue que son premier devoir, que le devoir le plus instant qu'elle ait à remplir, c'est de rendre à la justice, à la vérité, aux lois, l'empire qu'elles doivent avoir. Ces maximes d'une incontestable vérité semblent répugner à la douceur naturelle de cette Assemblée : combien elle sera raffermie, lorsqu'elle considérera de quelle importance il est de faire cesser l'anarchie qui règne dans le royaume, lorsqu'elle cou-sidérera qu'une triste expérience a appris que, pour sauver un petit nombre de coupables, on expose la vie d'une foule d'innocents. S'il était dilficile de ramener l'Assemblée nationale aux principes d'une sévérité devenue nécessaire, c'est par les funestes effets de sa clémence que je voudrais l'engager à déployer toute la sévérité de la justice.
C'est par un effet de votre clémence que le fort de Marseille a été démoli malgré les fois, malgré vos décrets, que le chevalier de Beausset a été assassiné dans ses murs. Vous avez cru devoir fermer les yeux sur ces événements, et les mêmes malheurs, les mêmes insurreciions se sont renouvelés dans différentes parties du royaume. Il est temps que cette anarchie cesse, et que, pour cet effet, la sévérité des lois prenne la place d'une funeste indulgence ; il est temps que la punition des crimes assure la tranquillité publique et la sûreté des citoyens.
Je répète que les citoyens" seront dégagés de l'obligation d'obéir à la loi, le jour où des considérations de personnes vous auront fait co n-
mettre un déni de justice. Cromwell, ce coupable usurpateur de l'autorité royale, au faîte de la puissance, nomma chef de la justice le plus habile jurisconsulte de l'Angleterre, quoiqu'il fût son ennemi. Cromwell savait que la nécessité d'une justice éclairée et sévère devait faire plier toute autre considération. « Vous êtes la barrière, lui dit-il, que je veux mettre entre ma vengeance et mes ennemis. Une justice sage est une dette de la société. » Ce grand acte de bienfaisance publique fit ex user en partie les crimes de Cromwell: car le dernier des crimes ce cet usurpateur eût été un déni de justice; mais il savait trop bien que toute autorité, fondée sur l'oppression, ne peut être durable, et que la justice est le premier lien de ia société, comme la seule force des lois.
Ces principes et cesmaximes prennent une nou-velleforce quandon les applique aux circonstances particulières de l'affaire de Nîmes.
Le rapporteur vous a dit que, dans les libelles dont on s'est servi pour exciter les troubles de Nîmes, on avait rappelé au peuple les anciennes guerres religieuses, et qu'on cherchait à faire croire que les protestants voulaient renouveler d'anciennes vengeances. Croyez que ces haines réciproques subs s eront toujours, si vous refusez justice à l'un ou à l'autre parti.
Plus le malheureux peuple a été égaré, plus il imparte que l'impunité ne multiplie pas les vengeances et les haines; plus il est essentiel que la peine ne frappe que sur les auteurs de cette inlàme machination, plus il serait dangereux de laisser vaguer au nasard les haines et les vengeances. Hâtez-vous d'arracher du sein du peuple cette éternelle semence de vengeance et de discorde. La vengeance publique peut seule, seule elle aie droit de sus, endre les vengeances particulières. Craignez de funestes représailles : craignt z que dans un pays divisé par ues factions, on ne fasse regarder l'abolition de la procédure comme un déni de justice. (Murmures.),
Le rapporteur de voire comité a inculpé la municipalité de Nîmes : le maire a répondu, et sa justification nae paraîtrait complète, si je n'avais une extrême tendance à être rigoureux vis à-vis des hommes qui se jettent dans la earriè;e de l'administration, vis-à-vis des hommes qui, acceptant des magistratures, s'imposent des devoirs plus rigoureux que le reste des citoyens; et j'avoue que des hommes sous l'administration desquels d'aussi grands crimes ent été commis, des administra eurs qui n'ont pas empéchéde pareils désordres, et q>ui leur ont survécu, ne seront jamais exempts de tout reproche à mes yeux : cependant il est possible que le crime de la municipalité de Nîmes n'ait été que de la faiblesse : peut-êire même serait-il facile de trouver l'excuse de sa conduite dans l'insuffisance de notre loi martiale qui n'a pas tracé aux officiers municipaux la conduite qu'ils devaient tenir, quand le drapeau rouge serait enlevé, quand ils seraient eux-mêmes l'objet de la violence populaire ; peut-être trouverait-on la cause des malheurs de Nîmes, de tous les malheurs dont la France a été souillée, dans l'insuffisance de la loi quia décidé que la force armee ne pourrait déployer ses moyens que sur ia réquisition du pouvoir civil, et qui n'a pas mis.. .(Murmures prolongés à gauche). Oui, Messieurs, je le répète, il serait très facile de trouver ia cause des malheurs de Nîmes, la cause des malheurs dont la France aété couverte, dans l'insuffisance de la loi qui a ordonné que la force armée ne se déploierait qu'à la réquisition de la puissance civile, et qui n'a pas mis au nombre
des réquisitions le flagrant délit; comme s'il pouvait exister une réouisition plus évidemment im-périeu e que ci lle d'un crime commis à votre vue.
J'ai fait ee que j'ai pu pour obtenir que l'Assemblée se décidât à cet égard : la meilleure raison qui à cette époque fut donnée de mon observation, c'est que cela était tellement évident qu'il ne fallait pas le dire. C'est cependant cette omission qui est peut-être la carsede tous les malheurs dont nous avons à gémir. Ehl quelle autre raison pourrait expliquer l'inexplicable c nduite du régiment de Guyenne, qui a resté passif au milieu des citoyens qui s'égorgeaient, et spectateur oisif des atrocités commises à ses côtés. En un mot, ou la municipalité a été faible, ou elle a été coupable; si elle a été faible, elle ne peut pas être responsable; si la municipalité a été coupable, dans ce cas elle a le droit d'être convaincue, et ce n'est pas à vous qu'il appartient de la juger.
Je demande donc Qu'elle soit renvoyée par-devant le tribunal de district de' Montpellier, pour que sa conduite soit examinée et jugée. Je m'oppose à l'abolition de la procédure commencée à Nîmes; je m'y oppose, parce que l'abolition delà procédure est un acte d'autorité qui n'appartient à aucune puissance humaine. Je m'y oppose, parce qu'un tel abus u'autorité commis par le Corps législatif est la dissolution de la société elle-même; je m'y oppose,parce que, quand des grands crimes ont été commis, quand un grand nombre de citoyens ont été offensés, lorsqu'un grand nombre de familles ont un père, un fils, un époux à venger, l'espoir d'une justice qu'on leur doit peut seul susp ndre leur ressentiment : en un mot, je le répète, la vengeance publique seule a le droit de suspendre tes vengeances particulières; je m'y oppose, parce que, dans un pays déchiré par les factions, commettre un déni de justice, c'est mettre la torche de la guerre civile entre les mains des mal intentionnés; je m'yoppose, parce qu'après une grande révolution, la rigidité de la loi, l'impartialité de la justice peuvent seules faire fléchir devant elles tous les intérêts et tous les partis...
Je conclus à ce que la procédure commencée devant le tribunal de Nîmes soit poursuivie devant le tribunal du district de Montpellier jusqu'à exécution, et que la conduite de la même municipalité de Nîmes soit renvoyée par-devant ce même tribunal.
L'objet qui est actuellement soumis à votre délibération est susceptible d'une grande étendue, soit par la multiplicité des faits, soit par les différents points de vue sous lesquels il serait possible de te considérer; quoiqu'il' ne présente qu'une affaire particulière, il est véritablement relatif aux grands intérêts généraux, à l'intérêt dominant de la nation, à celui de la Révolution; cependant je ne le traiterai qu'en peu de mots.
Cette affaire vous a été présentée dans un rapport lumineux où tous les faits ont été développés avec la plus grande clarté. Deux discours contradictoires nous ont ensuite fait apercevoir le point de vue respectif sous lequel les partis opposés envisagent les événements qui ont eu lieu à Nîmes. 11 ne reste donc actuellement qu'à tirer le résultat de ces faits parfaitement connus et qu'à fixer les points sur lesquels doivent porter la décision de l'affaire et 1e parti que vous prendrez. Il me paraît également convenu, soit par M. de Marguerittes, soit par il. Rabaud de Saint-Etienne, quêtes inté-
rêts de Nîmes ne sont point véritablement des intérêts de religion. Ce prétexte, sans doute, a été employé par ceux qui ont voulu faire agir le zèle religieux en faveur de leurs projets factieux et contre-révolutionnaires; mais c motif n'a jamais été le premier mobile des troubles et des querelles qui ont eu lieu. Il est infiniment facile de concevoir que ce ne sont pas dans des qu relies pariiculières, dans des jalousies, de3 rivalités d'emplois, dans des animo.ùtés de famille qu'ont éié puisées les véritables sources de ces querelles ; elles n'auraient point été aussi générales, elles n'auraient point divisé en deux partis une ville et un département; elles n'auraient pas pris, l'une les signes de la Révolution, l'autre les signes de la contre-révolution. Enfin, par un argument qui paraît simple, mais décisif, comment est-il possible que la rivalité, la jalousie aient été du côté de ceux qui défenlent la Constitution, et que ceux qui avaient obtenu des plac 's, qui voulaient les conserver, qui n'avaient qu'à les défendre par les lois dont ils étaient eux-mêmes les dépositaires, aient été les ennemis de ces mêmes lois ou les protec eurs de eux qui les attaquaient?
Di oiis donc la vérité et cherchons le vrai point des choses dans les signes extérieurs que chacun a arboré. Je vois d'un côté les citoyens qui se rassemblent dans des assemblées séditieuses, dans des assemblées dont l'imitation a déjà porté le trouble dans une partie du Languedoc, dans différentes contré s de la France, dans des assemblées qui ont tellement alarmé le patriotisme, dès le moment qu'elles ont été co inue*, qu'elles vous ont été dénoncées par tous les citoyens de tous les départements voisins. Je vois, dis-je, une partie des ci oyens concentrer dans ces assemblées son parti, son système, son opinion; je vois ce même parti arborer hardiment la cocarde blanche; je le vois lorsque la honte et la force supérie ire l'obligent à abandonner ce signe ouvert du contre-révolution, y faire succéder un second signe, moins apparent à la vérité, moins décrié dans l'opinion publique, mais qui n'était que le remplacement du premier.
Je vois, de l'autre part, la nation réclamée, les volontés nationales invoquées, l'Assemblée nationale rendue juge, avertie sans cesse des événements, tandis que les officiers municipaux et les citoyens qu'ils protégeaient cherchaient à tenir dans le secret, dans une obscurité profonde, les projets nu dités, jusqu'à ce que la force qu'ils espéraient acquérir pût les rendre assez redoutables pour qu'ils n'eussent pas à craindre la loi.
Je vois les couleurs de la nation arborées, et ces couleurs en vénération. C'est à ces signes qu'on reconnaît non les protestants, mais les citoyens patriotes de ce département; c'est à ces signes que les gardes nationales, formées depuis longiemps dans 1 s principes de patriotisme, affermies par des fédérations de patriotisme, se son t réunies sans distinction di culte, sans distinction de domicile, se sont réunies de tous côtés pour venir au secours des malheureux habitants de Nîmes et ont condamné, par leurs actions, parleurs opinions fortement prononcées, le parti qui résistait dans cette ville à la Révolution.
Voilà donc quelle est la véritable querelle. La majorité des citoyens n'a peut-être pas été criminelle de son propre mouvement; elle a été abusée, trompée, entraînée, elle l'a été contre la Révolution; ceux qui l'ont trompée ont été les seuls coupables, parce que seuls ils ont connu et les motifs qui les faisaient agir et les maux qui
devaient en résulter. Ce sera donc là,quand l'affaire sera bien examinée, que se portera la sévérité. (Applaudissements à gauche.)
Dans cette position, trois partis vous soit proposés : tout pardonner, tout punir, et le troisième, c'est-à-dire l'avis du comité, consiste à casser la municipalité de Nîmes et à faire poursuivre ceux des citoyens de cette ville qui, en ordonnant l'enlèvement du drapeau rouge, ont commis u te infraction ouverte à la loi, et ont donné le premier signal de tous les troubles qui ont suivi.
L'avis de M. de Cazalèsest de tout punir. Il a, au premier aperçi, l'apparence d'une justice rigide ; mais voyous-le tel qu'il est, et disons la vérité. Dans le moment actuel, après les circonstances qui nous sont connues, après le nombre infini de coupables, après toutes l is raisous qui peuvent, no i pas justifi t, mais excuser dans un peuple animé et furieux un moment d'ivresse, une telle marche serait u ie barbarie et une grande imprudence. 15,000 coupables à poursuivre, c'est une véritable guerre civile ; 15,000 coupîbles à poursuivre, c'est uni barbxrie q l'on ne reprochera jamais aux représentants de la natio Y. (Applaudissements).
Tout pardonner ne serait pas moins imprudent et serait dén ié de motifs. Djs officiers publics qui, dans des moments critiques, ont oublié les devoirs les plus sacrés ; des citoyens assez investis de la confiance de leurs concitoyens pour être leurs chefs dans des moments critiques, assez éclairés sur les motifs et les conséquences de leurs actions, des hommes qui ont ouvertement enfreint ce qu'il y a de plus sacré pour tous, le respect pour la loi, le respect pour le signe extérieur de la loi, de tels hommes nj mér.ient pas d'indulge ice ; et dans le moment actuel, lorsque dans cette partie du royaami on espère, on se flatte encore d'opérer une résistance, notre indulgence envers eux ne serait p is une humanité, ce serait uu véritable délit envers la justice...
Ne nous y trompons pas, Messieurs, il importe d'arriver eu lin à la paix, à la tranquillité du royaume; tous les mouvements, désormais, ne peuvent que nuire à la graude Révolution, à la régénération que vos travaux ont commencée et qui doit se terminer incessamment, pour ne pas faire souffrir la nation uu delà des forces que sou courage a prolongées jusqu'à présent. Les mouvements des contre-révolutionnaires exposent à tout instant la chose publique; l'oubli, la négligence de leurs actions pourraient la mettre en danger. Les mouvements auxquels ils peuvent quelquefois entraîner les amis de La Révolution sont également dangereux ; ils ralentissent nos travaux, ils éloignent les esprits tranquilles, ils éloignent de nous la prospérité que nous avons préparée par d imp ortants décrets, et que nou3 n'obtiendrons jamais tant que la confiance ne sera pas entièrement rétablie. G'est lorsqu'au centre de l'Assemblée, lorsqu'à la face de toutes les puissances, on verra unité, constance, fermeté invariable, sévérité contre ceux qui luttent contre la volonté générale, c'est alors que les bons auront la confiance et les méchants la terreur; c'est alors que les uns resteront tranquilles, en se reposant s ir vous, etque les autres n'oseront pas lutter contre L'immense puissance C|ue vous ferez agir, quand vous saurez, et ne pas ignorer vos fo:ces, et ne pas vous abuser, et ne pas vous laisser entraîner a une fausse cuuliauce, quand il est nécessaire encore de surveiller la chose publique.
Je vous invite donc, Messieurs, à peser ces considérations. Dans les circonstances actuelles, il est plus important qi^'on ne le pense de ne pas ralentir votre détermination et votre volonté constante à achever la Révolution que votre amour pour le peuple, qui, un moment égaré, revient hientôt^au repentir, vous a fait entreprendre. Sans doute, lorsque la Révolution sera terminée, il arrivera, pour nous comme pour tous les peuples, un moment où le comble de la puissance sera celui de la générosité, un moment où après avoir tout fait pour le bien public, où après avoir été forcé de sacrifier à l'intérêt général quelques intérêts particuliers, la nation, tranquille sur ses droits, la nation, jouissant enfin du fruit de ses longues peines et de ses longs travaux, versera un pardon universel. (Applaudissements réitérés à gauche et dans les tribunes.)
Plusieurs membres à droite : Nous voulons être jugés.
Mais si vous voulez hâter ce moment, réunissez aujourd'hui tous les moyens qui doivent déterminer la Révolution. Ne laissez pas un doute dans la nation, car vous l'exposeriez à de grands maux et vous vous forceriez vous-mêmes à des rigueurs que vous auriez redoutées. En un mot, si vous voulez avoir bientôt l'indulgence de la générosité, n'ayez pas aujourd'hui l'apparence de la faiblesse. (Applaudissements très vifs à gauche.)
Plusieurs membres à droite : Nous n'en voulons pas.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
Plusieurs membres demandent la parole. (Bruit prolongé;)
Je mets aux voix la question de savoir si la discussion est fermée.
(L'Assemblée ferme la discussion.)
Je demande la priorité pour le projet de décret du comité.
Je demande la parole.
La discussion est fermée. On demande la priorité pour le projet de décret du comité, je vais la mettre aux voix.
(L'Assemblée accorde la priorité au projet du Comité.)'
entourent le Président et profèrent successivement des paroles entrecoupées par les murmures de la gauche. (Bruit prolongé.)
Monsieur le Président, une grande partie de l'Assemblée n'a pas entendu ce gue vous avez mis aux voix. Je vous interpelle ; je déclare que personne n'a entendu les deux propositions. Le président ne doit pas profiter du tumulte pour surprendre des délibérations, en mettant aux voix des propositions qu'une partie de l'Assemblée n'entend pas.
Vous avez plusieurs fois représenté à l'Assemblée que vous n'avez qu'un pouvoir provisoire ; mais vous avez des devoirs constants, et princi-
paiement celui de poser la question de manière qu'elle soit entendue. Vous devez éviter, non pas seulement qu'on puisse vous accuser, mais encore qu'on puisse vous soupçonner. (Murmures prolongés.)
Je demande que, par égard pour la leçon très patriotique que vient de donner le préopinant, on remette les propositions aux voix.
Je demande la parole.
Il est étonnant que les mêmes hommes qui causent le désordre, se plaignent ensuite de n'avoir pas entendu; cela n'est pas loyal.
Je demande qu'avant que la discu-sion soit fermée, M. le maire de Nîmes, qui est accusé, soit entendu.
Un membre : Il n'a rien à dire.
La délibération est commencée; je ne puis accorder la parole sur aucune proposition nouvelle. Quelques membres prétendent n'avoir pas entendu ; je recommence l'épreuve.
(L'Assemblée décide de nouveau, à une très grande majorité, que la discussion est fermée et accorde la priorité au projet de décret du comité.)
, rapporteur, donne lecture du projet de décret du comité.
Un membre demande la question préalable sur ce décret.
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il y a lieu à délibérer.)
Le préambule de ce décret porte que la nomination de la municipalité de Nîmes n'a été que l'effet de l'intrigue, et autres choses semblables. Je demande sur ce préambule la question préalable, attendu qu'il renferme des calomnies atroces; il est contradictoire avec le troisième article du décret, puisqu'il accuse la municipalité, tandis que l'article fait poursuivre ceux qui l'out troublée dans ses fonctions.
On a peut-être tort de dire que le préambule renf rme des calomnies ; car on h'est pas d'accord sur les faits ; mais je dis que ce préambule est un jugement et que vous n'avez pas le droit de juger. C'est par ce motif que j'appuie la question préalable.
, rapporteur. Comme je n'ai aucune prétention aux préambules, je consens à la suppression de celui-ci.
Je m'oppose à la suppression du préambule. Un décret fondé sur la raison universelle n'a pas besoin de préambule ; mais il n'en est pas de même d'un décret particulier fondé sur la connaissance des faits. L'Assemblée destitué la municipalité de Nîmes; elle a des motifs pour le faire; il faut que ces motifs soient exposés dans le préambule.
Je demande que la discussion sur le préambule soit fermée.
, l'aîné. M. Barnave a toujours raisonné dans cette question comme si les faits dont il s'agit étaient prouvés, comme si les crimes étaient parfaitement constatés.
Je délie au dialecticien le plus subtil de cetle Assemblée de répondre à l'observation que je vais faire. L'Assemblée ordonne une information; donc les faits ne sont pas certains, donc elle ne peut . les affirmer dans son préambule. On a toujours dit : il est prouvé, il est prouvé ; et l'on a perdu de vue l'état dans lequel cette affaire se présente.
Il n'y a dans le rapport qui a été fait qu'une information commencée, qu'un procès entamé dont les témoins n'ont pas été confrontés; je m'étonne que, lorsqu'une procédure n'est pas consommée, on se permette de parler de ce qui n'est pas prouvé comme de crimes parfaitement constatés.
Si le préambule de votre décret déclare les accusés coupables, quel tribunal osera les déclarer innocents? Si vous renvoyez pour le jugement, il faut que dans le préambule vous ne décidiez rien sur la nature des crimes; car, autrement, ce serait procéder en tyrans que de dicter aux juges leur jugement.
Ce n'est que par une confusion d'idées que le préopinant a prétendu qu'on anticipait sur l'information. Il ne s'agit que de punir ceux qui ont donné le scandaleux exemple d'avoir enlevé le drapeau rouge. Il faut que le préambule contienne les faits qui doivent être la base des informations. Le préambule ne désigne personne, ne calomnie personne. Je demande qu'il soit conservé.
Plusieurs membres : Aux voix! aux voix!
paraît à la tribune.
Plusieurs membres à gauche : A la barre 1 à la barre!
Il faut que l'accusé soit entendu.
Qu'il aille à la barre, il sera entendu.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée. (Mouvement prolongé.)
On demande que la discus- , sionsoit fermée; je mets cette proposition aux voix.
(LJAssemblée décide que la discussion est fermée.)
Je demande que l'on consigne au procès-verbal le refus opposé à M. de Marguerittes de l'entendre.
Plusieurs membres à droite: Allons-nous-en! allons-nous-en ! (Applaudissements.)
(Un grand nombre de membres de la droite quittent leurs places ; après être restés un moment „ attroupés au milieu delà salle, ils quittent successivement la séance.)
On demande la question préalable sur le préambule ; je la mets aux voix.
(L'Assemblée décrète qu'il y a lieu à délibérer.)
La municipalité de Schelestadt avait été destituée ; mais les factieux se sont fait réélire. Le même argent, qui a déjà été distribué à Nîmes, pourrait encore faire réélire l'ancienne niunicipalité. Je demande qu'elle soit déclarée inéligible. (Applaudissements.)
(Cet amendement est adopté*)
Je demande que, pour cette affaire, on ne corresponde pas avec le directoire du département, mais avec le procureur général syndic du déparlement.
(Cet amendement est adopté.)
Il est dit dans le projet de décret que la procédure sera renvoyée au tribunal de Montpellier. Je crois qu'il serait plus prudent de la renvoyer au tribunal d'Arles, et je le propose par amendement.
(Cet amendement est décrété.)
, rapporteur. Voici le projet de décret amendé :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu ses comités des recherches et des rapports,
« Considérant que l'élection de la municipalité de Nîmes a été l'effet de l'intrigue et de différentes distributions d'argent ; que cette municipalité a favorisé les troubles, en permettant qu'on arborât la cocarde blanche, ne réprimant pas les projets séditieux manifestés par les délibérations des 20 avril et 1er juin ;
« Que les événements désastreux qui se sont passés à Nîmes les 29 mars, 3 mai, 13, 14, 15 et 16 juin 1790, ont été l'effet des séductions employées par les ennemis du bien public, pour egarer le peuple et troubler la paix du royaume :
« Considérant que la plus grande partie de ces malheurs n'aurait pas eu lieu si la proclamation de la loi martiale n'avait pas été arrêtée le dimanche 13 juin; que ceux qui ont provoqué ou ordonné des violences contre les officiers municipaux, qui la proclamaient, sont seuls respon-~ sables de tous les délits qui ont suivi et doivent en être considérés comme les auteurs, décrète :
Art. ler.
« Que la municipalité de Nîmes est destituée et qu'il sera procédé incessamment à l'élection d'une nouvelle, dans laquelle les membres de la municipalité destituée ne pourront être élus ; que le roi sera prié de donner à cet effet les or-tires nécessaires au procureur général syndic du département, et de faire passer à Nimes des forces suffisantes pour assurer la liberté et la tranquillité des élections.
Art. 2.
« Qu'il sera informé devant le tribunal du district d'Arles, et à la requête de l'accusateur public, contre ceux qui,le dimanche 13 juin, ont donné l'ordre de tirer sur les officiers municipaux, d'enlever à deux fois différentes les drapeaux rouges, d'entraîner et de retenir de force, dans une maison, un des officiers municipaux chargés de la proclamation.
Art. 3.
« Que la procédure commencée sur les autres événements des 13, 14, 15 et 16 juin, ainsi que celle qui est relative aux journées des 29 mars, 2 et 3 mai, cesseront d'être suivies, seront regar-
dées comme non avenues ; en conséquence, que les accusés seront incessamment remis en liberté.
Art. 4.
« Enfin, l'Assemblée nationale, profondément touchée des événements désastreux dont on a entendu le récit, invite les citoyens de Nîmes à se prémunir contre les suggestions qu'on pourrait employer encore pour les désunir et pour les plonger dans de nouveaux troubles ; elle les exhorte à sacrifier, pour le bien de la paix, le souvenir et le ressentiment de leurs maux, et à chercher dans l'union la plus durable et dans la tranquillité publique, la consolation et l'oubli des malheurs qu'ils ont éprouvés pour avoir ajouté foi aux perfides insinuations ae quelques nommes mal intentionnés. » (Ce décret est adopté.)
lève la séance à dix.heures trois quart3.
LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU
Opinion de M. Cortois de Balore, évêque de Nimes, sur la manière de rétablir la tnquillité dans cette ville (1),
Messieurs, les mêmes motifs qui vous ont déterminés à renvoyer par devant d'autres tribunaux que ceux de Montauban et de Schelestadt la connaissance des troubles qui ont agité ces deux villes, vous détermineraient, à plus forte raison, au renvoi de la procédure de Nimes, dont les malheurs ont été plus déplorables encore, et où se sont développées, avec bien plus de chaleur et d'activité, ces passions violentes qu'il importe J3i fort d'écarter de l'enceinte des tribunaux.
Mais, plus j'ai profondément médité sur les cause» de nos funestes divisions, sur leurs effets, sur les moyens les plus efficaces de ramener, dans nos murs désolés, sinon Je bonheur (hélas 1 combien nous aurons longtemps encore de larmes à verser 1) au moins le seul adoucissement qui reste après de grands maux, la douceur de pleurer en paix et de s'attacher insensiblement aux objets de consolation qui nous restent ; plus je me persuade que, pour rétablir sincèrement et solidement la paix dans la ville de Nimes, ce n'est pas le renvoi, mais l'abolition entière de Ja procédure qu'il faut vous demander; plus je me persuade qu'un oubli et un pardon général, tant de la part des législateurs et des vengeurs des lois, que de la part même des opprimés, qui se croient en droit d'en réclamer la vengeance, sônt le seul remède à leurs maux particuliers, comme à ceux de leur malheureuse patrie.
Je ne solliciterais, Messieurs, qu'une seule exception sévère si les inculpations, résultant de la procédure contre quelques ecclésiastiques, paraissent avoir le moindre fondement, je demanderais que la procédure continuât dè s'instruire contre eux seuls; l'honneur même de leur ministère rendrait cette exception nécessaire; mais, Messieurs, quand la faiblesse même des charges ne les justifieraient pas complètement; quand les actions les plus ordinaires, les plus simples, ne seraient pas travesties en actes coupables et séditieux ; quand ces accusations vagues de fanatisme si fastidieusement répétées de nos jours, et qui n'annoncent plus que le fanatisme de l'irréligion et de l'incrédulité, poursuivant avec acharnement la religion et ses ministres, ne détruiraient pas dans tous les bons esprits jusqu'au moindre soupçon contre ces ecclésiastiques, leur nom seul me rassurerait aussi ; en effet, et je ne sais par quelle fatalité, il semble que ce soit aux hommes les plus resr -pectables du clergé de cette ville qu'une maladroite calomnie ait osé s'attaquer; à ces hommes dont le3 noms, depuis une longue suite d'années, se trouvent attachés â toutes les bonnes œuvres, inscrits dans les fastes de toutes nos maisons de charité, connus parmi les pères des pauvres ; à des curés, à des pasteurs, digne3 imitateurs des Vincent de Paul et des Longuet, l'amour et la consolation de leurs troupeaux;- à ces hommes auxquels il fallait bien chercher des crimes, puisqu'on s'était rendu coupable envers eux des plus violentes injustices, mais dont il était plus facile de piller et de dévaster les maisons, comme on l'a fait, que d'entacher l'innocence ; à ces hommes enfin que, sur le théâtre de leurs vertus et de leur charité, on est aussi étonné d'entendre calomnier que vous le fûtes, Messieurs, lorsqu'au milieu ae vous-même, vous entendîtes toutàcoup un nom, dont la loyauté vous était si bien connue, le nom de Toulouse-Lautrec, prostitué dans 1a fable absurde d'une dénonciation maladroitement concertée entre deux vils calomniateurs et cependant adoptée par les magistrats. Je ne m'abaisserai donc pas à craindre, pour de tels hommes, que leur honneur puisse être même soupçonné; et, lorsque l'abolition entière de la procédure me semble être le seul moyen d'adoucir les maux de notre malheureuse patrie, ces noms chéris et respectés auront beau y être témérairement compromis, je n'en répéterai pas avec moins de persuasion et de confiance à l'Assemblée nationale : Nîmes ne peut être sauvé qu'en ensevelissant tout ce qui s'est passé dans un éternel oubli.
Et ne croyez pas, Messieurs, que ce conseil soit uniquement celuU du ministère de paix et de miséricorde que je remplis près des habitants de ces contrées, la religion ne conseille rien que la prudence et la saine politique ne doivent faire adopter.
Malgré la différence étonnante des récits qui vous ont été faits de nos désastres, la voix forte et convaincante, quoique tardive, de la vérité, s'est fait entendre ; elle aura dissipé ces épaisses vapeurs, dont les lieux et les premiers instants de ces scènes terribles sont toujours enveloppés, pour les yeux même les plus perçants et les moins prévenus; sans vous eu laisser imposer par ces noms de patriotes ou de rebelles, témérairement usurpés ou donnés, vous aurez déjà discerné, Messieurs, entre les oppresseurs et les opprimés, entre les victimes et les coupables. Mais, si la dure nécessité de repousser une
injuste accusation et d'en soustraire les victimes à la plus cruelle oppression a forcé les officiers municipaux à rechercher et à faire connaître les vrais auteurs des troubles, loin d'eux, plus loin de vous encore, le sentiment pénible de la haine et de la vengeance ! que l'innocence soit reconnue, elle est assez vengée. Le désir le plus ardent de ramener la paix entre deux portions d'un peuple naguère si uni, maintenant si cruellement divisé, nous anime seul; nous ne voulons plus voir ni coupables, ni victimes ; mais des concitoyens honteux, désespérés d'avoir cessé un instant d'être frères, oubliant tout, pardonnant tout, pour la paix et le bonheur commun.
Il n'est nul autre moyen de redevenir frères et amis.
Dans les crimes particuliers, dans les délits ordinaires, sans doute la vengeance des lois est nécessaire à l'ordre social; mais dans ces grands crimes publics, dans ces mouvements convulsifs de tout un peuple, dans ces plaies si générales et si enflammées, l'usage des remèdes violents serait aussi dangereux que celui des calmants est utile et salutaire... La clémence doit repousser le glaive de la loi, la prudence doit l'enchaîner.
Telle est l'utile leçon que nous donna toujours la sagesse romaine. Après les troubles intestins qui agitèrent tant de fois cette puissante République, au premier retour de l'ordre, le peuple, pour l'affermir, prononçait cette formule si brève et si expressive de l'abolition de tout le passé : acta dèleta. Et certes les plus justes considérations avaient fait embrasser, à ce peuple généreux, une mesure aussi sage qu'humaine.
En effet, à ces époques redoutables pour les nations où une fermentation générale agite les esprits dans tous les sens, les hommes les plus innocents et les plus simples sont aussi les plus faciles à sortir des limites de leurs devoirs; plus susceptibles d'alarmes sur leurs plus chers intérêts, sur leur religion, leurs propriétés, leur liberté, leur vie, à la parole du premier fourbe adroit qui se sera emparé de leur esprit, leur imagination, frappée de toutes les préventions, de toutes les terreurs qu'on veut leur inspirer, ne voit plus, dans tous ceux sur lesquels on dirige leur haine et leurs coups, que des ennemis du bien public à punir des forfaits odieux à prévenir ou à venger. Souvent, dans l'ivresse du carnage se livrant aux excès d'une joie barbare, leur férocité même est pour eux un objet de triomphe que, bientôt rendus, avec le calme de ces passions factices, à la bonté et à la simplicité naturelle de leur âme, ils détesteront avec la pius amère douleur.
11 est donc ju-te, autant qu'il est prudent et humain, que cette déplorable facilité a se laisser tromper et séduire, qui est en eux en proportion de leurs plus estimables qualités, soit aussi pour eux la vraie mesure de la vindicte légale et qu'à tant de coupables, dont le cœur l'est si peu, les remords soient leur seul châtiment.
Déjà ce tourment est trop cruel pour vos âmes. Oh vous! instruments aveugles de nos malheurs, portion égarée de nos concitoyens, habitants des contrées circonvoisines, dont l'amour infatigable du travail, la sobriété, l'économie formaient le caractère et les mœurs estimables ; vous qu'on a nourri de mensonges et de calomnies, dont, par mille suggestions perfides, on a fasciné l'esprit et les yeux pour vous arracher à vos foyers, à vos vertus, pour vous inspirer la haine la plus violente, contre des hommes, des
frères, dont vous n'aviez reçu aucun outrage, pour vous mêler à leurs querelles domestiques, et vous faire impitoyablement plonger vos mains dans leur sang. Alï! puissé-je moi-même, au prix de tout mon sang, effacer la part douloureuse que vous avez eue à nos malheurs I
Peuples plus abusés que coupables, oui, vous inspirez encore assez d'intérêt pour croire vos cœurs étrangers aux crimes que vos mains ont commis ! Oui, revenus de ces moments d'ivresse et de fureur qui vous ont jetés si loin hors de vous-mêmes, rendus au calme de la réflexion et de la raison, 5 vos sentiments naturels, vous ne regarderez pas sans horreur derrière vous ; déchirés de remords, vos peines les plus cruelles seront en vous-mêmes ; en garde désormais contre ces perfides suggestions qui vous ont égarés, d'autant moins coupables à nos yeux que vous le serez davantage aux vôtres, le reste de votre vie vous paraîtra trop peu pour réparer de si grands excès; vous n'aurez un instant été pour nous des ennemis cruels que pour être, par la suite, des voisins plus précieux, des amis plus sincères, des frères plus empressés à contribuer de tous vos efforts au soulagement de nos maux.
Pleins de ces consolantes pensées, loin de nous livrer à aucune idée de vengeauce contre vous, nous l'abjurons même contre les coupables auteurs de vos égarements et de nos maux contre vos séducteurs. Sans doute, si nous ne considérions que leur perversité, ce serait sur eux que, avec l'indignation et la haine publique, nous devrions appeler encore toute la sévérité des lois et la rigueur des supplices; mais leur coupable adresse a su tellement allier leur perfidie à votre simplicité, les perquisitions, les recherches à faire pour parvenir à les convaincre, jetteraient nécessairement encore, parmi vous, tant d'alarmes et de craintes, que votre propre sûreté demande que la clémence et le pardon s'étendent jusqu'à eux.
Nous n'avons que trop cruellement éprouvé à Nîmes l'abus perfide que sait faire la vengeance contre les vaincus qui, dans les troubles civils, ont échappé aux premiers moments de proscription et de carnage, de ce dangereux prétexte de poursuivre les chefs et les auteurs des crimes.
En vain le nom consolant et sacré d'amnistie a-t-il été prononcé dans cette malheureuse ville; en vain y a-t-elle été solennellement proclamée, on n'a cessé d'y donner aux procédures l'extension la plus alarmante; les arrestations, les décrets multipliés, exécutés avec tout l'appareil de la force militaire, ont jeté l'effroi dans toutes les familles du parti opprimé; celles qui n'avaient point encore offert de victime tremblaient de s^ voir frappées à leur tour. Les délations accueillies, récompensées, semaient partout les soupçons, les défiances, les terreurs: et ce mot redoutable Vœ victis! malheur aux vaincus, n'a jamais été d'une vérité si désespérante qu'il l'est a présent, pour la portion la plus nombreuse du peuple de Nîmes.
Peignez-vous tout ce que peut déployer de pius formidable l'appareil militaire, toutes ces précautions effrayantes qui annoncent qu'un pays est en état de guerre; des batteries menaçantes disposées sur toutes les avenues; des postes avancés, des patrouilles fréquentes, des visites sévères de tout ce qui entre et qui sort, et vous n'aurez encore qu'une faible idée delà désolation qui règne dans une ville où tout cet appareil menaçant n'est dirigé que contre ses propres habi-
tants; que les plus aisés comme les plus pauvres quittent en foule, laissant ceux qui restent livrés à une énorme douleur, plus dénués de consolation et de soutien.
Et c'est sur ce théâtre de terreur, c'est au milieu de tant de scènes désastreuses, que s'instruisent des procédures plus désastreuses encore ! Législateurs de la France, vous.qui savez bien que, pour être accessible à la vérité, le sanctuaire de la justice doit être inaccessible à la crainte, quelle que soit la courageuse intégrité des membres du tribunal, croyez-vous que, dans un état de chose si violent, l'autorité de ses ji-gements «oit à l'abri de toute contrainte; hors le danger d'être vioiée, l'innocence elle-même ne doit-elle pas trembler de se trouver compromise dans des procédures commencées sous de si terribles auspices ?
Je dis plus, dans quelle ville neutre, devant quelque tribunal étranger que vous transportiez cette procédure funeste, quels témoins pourront être entendus qui ne soient en même temps parties, et qui, totalement désintéressés au milieu des troubles de leur patrie, n'aient embrassé aucun des deux partis qui la divisaient?
Qu'elles s'anéantissent donc, qu'elles s'évanouissent à votre voix, les procédures odieuses qui ne peuvent que perpétuer les haines et les malheurs de la ville de Nîmes; que l'appareil formidable de la guerre, déployé pour les soutenir, disparaisse avec elle ! Que les forces menaçantes se dissipent ! La morne-tranquillité qu'elles maintiennent depuis quelque temps, dans cette ville désolée, n'estquelecalme repoussant delà terreur, et c'est le calme attrayant de la confiance et du bonheur qu'il doit être dans vos intentions bienfaisantes d'y rétablir.
Il n'en est qu'un seul moyen. Là où tant de ressentiments personnels peuvent encore se couvrir du masque imposteur de la loi, que la vindicte publique s'arrête; que la clémence seule se fasse entendre ; que l'abolition de tout le passé, que le pardon général soient prononcés ; que le désir même d'une juste vengeance s'éteigne dans les cœurs les plus ulcérés; qu'à la voix paternelle de nos législateurs imposant silence à la sévérité des lois, uos concitoyens opprimés, oubliant leur haine et leurs ressentiments particuliers, en fassent le sacrifice à l'amour de la commune patrie.
Que le jour où sera publié ce décret pacifique une fête publique et solennelle réunisse tous nos concitoyens ; car il faut que les imaginations soient fortement frappées du bonheur nouveau que de si douces et de si sages dispositions pourraient ramener dans nos murs ; il faut que les impressions profoudes de terreur et de tristesse, dont les âmes sont pénétrées, cèdent aux impressions vives et promptes de la consolation et de l'espérance ; il faut que la patrie, de ses mains paternelles et bienfaisantes, essuie les larmes de tant de veuves et d'orphelins ; il faut que ses bienfaits les arrachent au moins à la misère, si elle ne peut les arracher au sentiment douloureux de la perte, à jamais déplorable, d'un père, d'un époux, d'un frère ; il faut couvrir de quelques fleurs des cicatrices si récentes encore ; il faut embellir les serments mutuels de tout oublier, de se traiter, de s'aimer en frères, comme ils s'aimaient depuis tant d'années. Oui, ces temps heureux de concorde et de bonheur renaîtraient, quelques moments d'ivresse et de fureur s'effaceraient de nos annales et de notre souvenir ; et la voix majestueuse et tendre de la religion se joindrait encore à ces doux transports pour les consacrer et les perpétuer.
Victimes infortunées de la plus cruelle oppression, vous envers qui on s'est porté à de si cruels excès, qu'eussiez-vous été, tels qu'on vous a dépeints? Des coupables et des rebelles. Vous auriez encore raille fois plus à pardonner qu'on ne vous pardonnerait; plus vous fûtes innocents, plus vous fûtes opprimés; et plus cet oubli généreux et patriotique est digne de vous, parce que toute la générosité en sera de votre côté, parce que la patrie en pleurs le réclame de vous au nom même de ces mânes chéris, que vous croiriez venger et que vous ne feriez qu'attrister par de nouveaux malheurs; au nom surtout de votre sainte religion, qui la première imposa à ses disciples le précepte sublime du pardon des ennemis. , ...
D'après toutes ces considérations, j'ai l'honneur de vous proposer le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouïs les comités des rapports et des recherchés réunis, ainsi que le maire de Nîmes mandé à la barre, sur les troubles qui ont si cruellement affligé cette ville dans les mois de mai et juin dernier ; considérant que la poursuite des procédures, déjà commencées par-devant le tribunal de Nîmes he pourraient qu'ajouter à l'animosité et à la haine des différents partis, sans faire mieux connaître la vérité des faits/toujours incertaine dans les discordes civiles, où tous les citoyens ont pris parti pour ou contre, voulant plutôt, par son indulgence et ses bienfaits, effacer, s'il est possible, jusqu'aux dernières traces de ces malheurs, a décrété et décrète ce qui suit :
« 1° Le roi sera supplié de déclarer toutes les procédures déjà instruites nulles et comme non avenues et d'accorder une abolition entière et générale de tout le passé ;
« 2° Les frais, dommages, indemnités, résultant de cès funestes événements seront supportés par le Trésor public, d'après les états qui en seront dressés par le directoire du département et envoyés à l'Assemblée nationale; "
« 3° D'après les lois gui vont être données pour l'organisation des milices nationales, celle de Nîmes sera formée de nouveau et les armes distribuées entre tous ceux qui la composeront, sans aucune distinction d'anciennes et de' nouvelles compagnies.
« 4° L'Assemblée nationale, désabusée des fausses apparences qui lui avaient fait mander à la barre le maire de Nîmes après l'émeute du mois de mai, et qui, après celle du mois de juin, lui avaient fait suspendre la municipalité dé Nîmes du droit de requérir les forces militaires, reconnaît que c'est principalement à la vigilance, à l'activité, au courage de M. de Marguerittes, maire de Nîmes, que doit s'attribuer le prompt rétablissement du calme à l'époque du mois de mai; et qu'à l'époque bien plus désastreuse du mois de juin, les officiers municipaux n'ont cessé de lutter avec tout le zèle du patriotisme le plus pur, contre la force insurmontable des circonstances; en conséquence, elle les rétablit avec éloge dans l'universalité de leurs fonctions, et, néanmoins, s'ils persistent dans les démissions qu'ils ont données, lève la suspension provisoirement ordonnée par un précédent décret, pour le renouvellement de la municipalité, et autorise la commune à y procéder sans délai.
« Décrète enfin qu'il sera indiqué, par les officiers municipaux de Nîmes, un jour de rassemblement solennel où tous les citoyens seront invités à venir se jurer mutuellement l'oubli g &
néreux du passé, une paix et une union fraternelles. »
Signé : P. M. M., évêque de Nîmes. 26 février 1791.
a la séance de l'assemblée nationale du
opinion de M. Duval d'Eprémesnil, entremêlée du récit des faits oui se sont passés a la séance du matin, le 25 février 1791, à Voccasion du projet de loi présenté par M. Le Chapelier,au nom du comité de Constitution,sur la résidence des fonctionnaires publics. — (Véritable édition, conforme à l'original déposé chez M. Dufouleur, notaire au Ghâtelet, rue Montmartre.)
La discussion était engagée sur ce projet de loi qui prescrit au roi d'avoir sa résidence à portée de l'Assemblée nationale, lorsqu'elle est réunie, et le déclare déchu de sa couronne en cas de contravention; projet qui n'est rien moins qu'un système mûrement réfléchi,un moyen toujours prêt, de conjuration contre le trône et la maison régnante. M. l'abbé Maury occupait la tribune. Il discutait le projet au fond. M. l'abbé Maury, me suis-je écrié, vous traitez la question au fond, et vous n'avez pas ce droit, ni l'Assemblée non plus. Attaquez ouvertement sa compétence. Vous êtes dans un mauvais poste, Monsieur. Dites à VAssemblée quelle est sans pouvoir pour créer, pour discuter une seule hypothèse où le roi puisse être puni.
Un membre du côté gauche, que je n'ai pu connaître, dit alors à haute voix : Le Parlement de Paris a-t-il toujours pensé ainsi?—Oui, oui ! ai-je répondu ; le Parlement de Paris a été et sera toujours, malgré sa suspension, fidèle au roi et l'un des appuis du trône.
M. l'abbé Maury avait été frappé de mes observations ; il rentra dans la vraie route et s'appuya sur la maxime de l'inviolabilité du roi. On feint de s'impatienter, on l'interrompt; mais, au milieu de ce tumulte, M. l'abbé Maury s'aperçut promptement que la majorité du côté gauche penchait du moins pour ! ajournement. Réduit à cet espoir et toujours maître de son sujet, il se rabat sur cette idée, se résume en peu de mots, indique, plutôt qu'il ne propose, l'ajournement, et quitte la tribune.
Nous y vîmes paraître successivement MM. le duc d'Aiguillon et Regnaud (de Saint-Jean-d'An-gély).
Quand ce dernier eut cessé de parler, M. d'André proposa de décréter l'ajournement à jour fixe, puisqu'il n'était combattu par personne. J'ai demandé la parole pour le combattre, ai-je dit aussitôt. La parole ne pouvait plus m'être contestée. M. Duport, qui présidait, me laisse monter à la tribune. J'y débute en ces termes :
« Messieurs, je parais rarement à la tribune. Il fallait un intérêt aussi majeur que celui qui vous occupe pour m'y ramener... (On m'interrompt)... Oui, Messieurs, il fallait un intérêt aussi pressant que celui qui vous occupe pour m'y ramener. Et ce qui rend ma situation plus difficile, c'est que
j'y viens combattre mon illustre et courageux ami, M. l'abbé Maury... (On m'applaudit du côté droit) ;... mais, dans cette pénible tâche, je me sens soutenu par les applaudissements que je viens d'entendre... (Le côté gauche éclate en longues risées)... Je ne suis pas venu demander à l'Assemblée des faveurs, mais du silence... (On se tait, et je reprends)... J'admire les talents de M. l'abbé Maury... (Nous n'avons pas besoin de son éloge)... J'ai besoin de le faire : vous savez si j'aime son courage ; je ne saurais douter de la pureté de ses principes : mais je le prie de ne pas familiariser son éloquence et son génie, ni l'attention de l'Assemblée, ni celle des Français, avec des discussions directement contraires à la fidélité que nous devons au roi.
« Oui, Messieurs, des discussions directement contraires à la fidélité que nous devons au roi. Et d'abord, de quel droit votre comité ose-t-il vous proposer de réduire le roi à la simple qualité de premier fonctionnaire public ? De quel droit ose-t-il vous proposer de confondre, dans une dénomination commune, le suppléant d'un député et l'héritier du trône? Est-ce ainsi qu'on prétend nous apprendre à respecter nos rois ? Je ne suis pas surpris que des expressions aussi nouvelles, aussi peu respectueuses, aient conduit le comité à dépouiller la personne royale de ses plus essentiels attributs. Mais j'avertis, mais j'interpelle tous les vrais Français, tous les fidèles serviteurs du roi : je leur déclare qu'aucun deux ne peut rester dans l'Assemblée si le projet du comité est accueilli, si la question même en est traitée, autrement que pour en improuver la proposition.
« Quant à moi, j'annonce hautement que, si le projet du comité passe en décret, rien au monde ne m'empêchera de protester et de me retirer: et j'espère bien n'être pas seul.... (Non, non; s'est écrié le côté droit; vous en êtes lema\tre,m'a-t-on crié du côlé gauche avec des battements de mains dérisoires.) Oh, répliquai-je, malgré les applaudissements que je viens de subir, je suis sûr et je n'en serai pas démenti; quand toute via France apprendra le motif de ma retraite, je suis sûr que la majorité elle-même y fera quelque attention. .... (Le côté gauche devint sérieux ; je poursuivis.)
« Nous avons prêté au roi un premier serment, un serment que nul autre ne peut effacer ni con-tre-balancer,.... »
M. Duport, qui présidait, saisit habilement ces dernières paroles, non pour me rappeler à l'ordre, comme on Va dit, mais bien pour m'ôbserver très poliment, très froidement, que je blessais la Constitution qui renfermait d'autres objets que le roi dans notre serment. A l'instant, mon autre ami, non moins illustre, non moins courageux que le premier, M. de Cazalès se lève et s'empare de la parole. Que ne puis-je le peindre dans cet heureux et juste mouvement! Il accablait de ses regards l'imprudent observateur ; et s'attachant dans sa pensée à l'esprit plus qu'à la lettre de l'observation :
« — Vous avez tort, Monsieur le Président ; M. d'Eprémesnil n'a rien dit que d'exact. C'est la Constitution même que je réclame à l'appui de ses principes. Nous avons juré de la maintenir. Mais je déclare que nous n'aurions jamais prêté ce serment, si nous avions pensé que la Constitution dût produire uri décret par lequel le serment primitif qui nous lie au roi fût affaibli ; notre langue se fût attachée à notre palais, nos mains se fussent desséchées avant de proférer ce serment criminel. L'autorité royale est la pierre
angulaire de la Constitution. Sans cette autorité, il ne peut exister en France, ni paix, ni liberté.
« Nuus ne permettrons pas que cette autorité tu-télaire soit anéantie, que cette pierre angulaire soit détachée de l'édifice. Je renouvelle en ce moment le serment qui m'attache au roi... —(Et nous aussi), s'est écrié le côté droit ; un autre cri part aussitôt : ( Vive le roi !) c'était M. de Montlausier. ( Vive le roi!) répond avec transport le côté droit... Oh!qui rendra jamais cette scène imprévue et touchante ? On a vu tout à coup le côté droit,comme inspiré,quitter ses places, s'avancer dans la salle, s'élancer vers le fauteuil, répéter, provoquer, obtenir ces cris d'amour et d'espérance : Vive le roi ! Vive le roi ! Non, la France n'est pas perdue : non, le roi nous restera. J'en atteste ce grand courage de ses vrais serviteurs, toujours le même depuis deux ans, malgré les calomnies, au milieu des poignards, après tant de défaites. Cependant les tribunes semblaient frappées d'admiration, toute la salle était rentrée dans le silence. Quelques voix se font entendre du côté gauche : (Nous sommes aussi attachés que vous au roi. — Si cela est, réplique le marquis de Foucault, pourquoi avez-vous couvert de vos huées ces expressions de fidèles sujets du roi, employées dernièrement par M. de Marguerittes, dans son rapport de Nimes, en parlant des Français?), On ne répondit point à cette interpellation : et M. de Cazalès prit la parole : Le moment est venu où l'Assemblée doit s'expliquer. Si au milieu des erreurs politiques dont nous sommes condamnés peut-être à épuiser le cercle, des projets déguis'és, des résolutions secrètes tendent à priver la nation de la seule ressource qui puisse lui rester dans les tempêtes publiques, de la puissance du roi, plutôt que de le souffrir, nous périrons tous ici jusqu'au dernier. Je conclus, Monsieur le Président, que vous avez fait une chose extrêmement inconvenable en opposant le serment qui nous lie à la Constitution à celui que nous avons prêté au roi. »
Ainsi s'est exprimé M. de Cazalès, au milieu des fréquentes et tumultueuses interruptions du côté gauche. On voit qu'il avait pénétré au delà des paroles de M. Duport; car il faut avouer que ce dernier n'avait pas prononcé les expressions que M. de Cazalès lui reprochait. M. de Mirabeau s'est présenté à la tribune. Avant d'y monter, il me demanda, sur mon honneur, en m'assurant qu'il s'en rapportait à moi, si je croyais que M. Duport eût proféré les termes dont M. de Cazalès s'était servi; je lui répondis, sans hésiter : « Non, je ne les ai pas entendus dans la bouche de M. Duport, et je crois que M. de Cazalès s'est trompé à cet égard. » M. de Mirabeau a répété ma réponse à l'Assemblée. C'est le premier usage qu'il ait fait de la parole. M. de Cazalès, avec la bonne foi inséparable de la vraie liberté, dit aussitôt : « Si je me suis trompé, je retire ma conclusion sans me départir de mes principes. » Après quoi M. de Mirabeau déclara qu'il n'était pas moins que nous fidèle au roi, mais qu'il combattrait les factieux en tout temps, en tout lieu, de toutes les manières.....
« Détruisez donc les Jacobins », lui dit le même M. de Foucault. M. de Mirabeau n'accepta point celte mission, et termina sa profession de foi politique et militaire par annoncer « qu'il se flattait d'une prochaine et générale réconciliation, puisqu'il voyait M. d'Ëprémesnil devenu l'ami de l'illustre et courageux ami de M. de Lamoignon. »
M. de Mirabeau peut s'estimer heureux que je sache immoler les vaines jouissances d'une folle
gloire et le talent facile des sarcasmes à la gravité de mon caractère public. Il eût appris, à ses dépens, que M. l'abbé Maury était l'ami de la personne et non des principés de M. de Lamoignon ; que M. de Lamoignon lui-même, esclave du principal ministre, gémissait souvent de sa servitude dans le sein de M. l'abbé Maury; que le véritable auteur de l'édit de la Cour plénière, reproché injustement à M. l'abbé Maury, siégeait au côté gauche. Les flatteurs de la tyrannie ou de la fortune sont toujours, dans l'occasion, les courtisans du peuple; au contraire, celui qui ne fléchit pas devant le peuple, a pu commettre à la cour des rois des erreurs politiques ; mais, à coup sûr, il n'a pas prostitué son caractère. Aidé de es principe, sans établir nulle comparaison entre l'orateur magnanime dont l'amitié m'honore et l'orateur facétieux qui donne des bouffonneries pour des raisons, j'aurais pu parvenir à modérer dans M. de Mirabeau l'ardeur des épigrammes. Mais le temps était trop cher, et ces luttes purement ironiques, devant le public assemblé, ont je ne sais quoi d'irrévérent qui répugne à ceux qui se respectent. Aussi, en reprenant ma place à la tribune, je rentrai sur-le-champ dans la question, et je continuai en ces termes, non sans avoir disputé la parole que voulaient m'arracher, sans attendre ma conclusion, quelques députés du côté gauche, voisins du fauteuil :
« Je ne reviendrai pas sur l'incident qui vient de s'élever. M. le Président ne m'a pas biea compris; cela est indifférent.Un serment de fidélité nous consacre au roi ; nous avons juré en même temps d'être fidèles à la nation et à la loi; ces devoirs sont exprimés par le même décret. Pense-t-on dans l'Assemblée qu'ils puissent être contraires les uns aux autres? J'ai donc eu raison de dire que le serment au roi ne peut être effacé ni contre-balancé. Nous sommes tous d'accord sur ce principe. Je n'en dirais pas autant de tous les vôtres. Messieurs. Mais voulez-vous réduire celui-ci a de vaines paroles? Passons à la réalité. Je dis que la personne du roi est sacrée, inviolable, exemple, suivant notre maxime française, de toute juridiction ; je le dis avec vous, je le dirai sans vous : je dis que cette maxime est antérieure à votre Constitution, qu'elle est indépendante de votre Constitution, qu'elle exprime un attribut inséparable de la royauté : je dis que la personne du roi ne peut être punie dans aucun cas, dans aucune hypothèse, ni par l'effet d'un jugement, ni par l'effet d'une loi, même avec l'adhésion de sa propre volonté : je dis qu'il n'est pas plus au pouvoir du roi de rendre sa personne justiciable, qu'il n'est au vôtre de la déclarer telle : je dis enfin que la seule proposition de mettre en question cette hypothèse est un crime. Est-il quelqu'un dans l'Assemblée qui me conteste ces vérités?
« Eh bien! Messieurs, ce crime, il est commis* et c'est par votre comité de Constitution. Il s'agit de le prouver; il s'agit de démontrer qu'aux termes du projet de votre comité, la personne du roi deviendrait punissable, et pour quelle faute? Pour ne pas résider à portée de l'Assemblée nationale ; et de quelle peine? De la déchéance du trône, seulement. Je vous prie de me suivre.
« Le roi, est-il "dit au 4e article du projet, le « roi, premier fonctionnaire public »... entendez-vous, Messieurs? « premier fonctionnaire pu-« blic. » Nous savons quelles idées certaines personnes attachent à ce titre de fonctionnaire public... (cLe roi, premier fonctionnaire public, doit
« avoir sa résidence à portée de l'Assemblée na-« tionale, lorsqu'elle est réunie...... Tel serait le devoir du roi suivant votre comité. Mais si le roi manquait à ce devoir, qu'en arriverait-il? Ecoutons loujours le comité. « Tout fonctionnaire « public, dit le même projet, article 9, tout fonc « iionnaire public qui contreviendra aux dispositions du présent décret, sera censé avoir « renoncé, sans retour, à ses fonctions... »
« ... En al-je trop dit, Messieurs? Tout fonctionnaire public! pas un n'est excepté. Le roi est fonctionnaire public: le roi, en vertu de ce décret, sera tenu de résider a portée de l'Assemblée; s1il s'en éloigne, il contrevient au décret; s'il contrevient au décret, il est censé avoir renoncé, sans retour, à ses fonctions; mais les fonctions du roi sont de régner: donc, dans le cas prévu, la loi priverait le roi de sa couronne et i'eii priverait sans retour. Et pour qu'on n'en doute pas, pour que l'application de ces premières et funestes expressions du 9e article à la personne du roi soit bien sensible, le comité distingue soigneusement cette personne sacrée des membres de sa famille; et «ceux-ci, nous dit-il, « seront censés de même, en cas de contraven-« tion, avoir renoncé personnellement et -sans « retour^à la succession au trône.» Seront censés « de même » i c'est-à-dire de même que tout fonctionnaire public, de même que le roi, premier fonctionnaire public ! « avoir renoncé personnel-« lement à la succession au trône ! » c'est-à-dire de même que le premier fonctionnaire, à sa couronne! et sans retour! C'est-à-dire que les merd-bres.de la famille du roi seront soumis à la même fatalité que le chef. Tout cela, Messieurs, est-il assez clair? Le masque est-il enfin levé? Je défie l'esprit le plus subtil de répondre à ce raisonnement.
« Et que vos rapporteurs nous rendent compte aussi de leurs nouvelles expressions. Que signifie leur affectation d'employer des termes inconnus au peuple, si ce n'est pas un artifice pour effacer, autant qull est possible, ses anciennes idées? Pourquoi nous parlent-ils sans cesse de la dynastie régnante, au lieu de nous parler de la maison régnante? Puisque.vous empruntez lés termes des Chinois, imitez donc leur profond respect pour leur souverain, qu'ils regardent, qu'ils aiment, qu'ils traitent comme leur père. Ma remarqué, à cet égard, ne paraîtra pas indifférente aux hommes éclairés et de bonne foi. Il me reste à vous dire, Messieurs, car je n'ai nulle envie de rien dissimuler, que mes principes ne me permettent pas de proposer des décrets dans cette tribune. Si je pouvais y déroger, jé vous engagerais à blâmer le projet de votre comité dè Constitution, comme étant directèment contraire à la fidélité que nous devons au roi ; mais je me contente de m'opposer à l'ajournement. L'ajournement supposerait le droit de traiter la question. J'ai démontré que vous ne l'aviez pas, et j'espère que vous y penserez. Quoi qu'il en soit, je renouvelle, en unissant, ma déclaration. S'il arrive que le projet du comité soit accueilli, je proteste publiquement contre l'infidélité que vous aurez commise envers le rej, ét je me retire. »
A ces mots, je descendis de la tribune. Le décrét est connu.
Signé : DuvAL D'EPRÉMESNlL. Paris, le samedi 26 février 1791.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAILLES. Séance du dimanche
La séance est ouverte à onze heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier, au matin, qui est adopté.
cède le fauteuil à M. de Noailles, nouveau président.
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une p& tition de la section des Quatre-Nations, qui soumet à l'Assemblée nationale la question de sa^ voir si M. le cardinal de Montmorency-Laval, évêque de Metz et grand-aumônier de France, qui n'a pas prêté le serment exigé par la loi du 26 décembre, peut continuer à exercer les fonctions attachées à la place de grand aumônier,
Une telle place ne peut plus subsister dans notre, nouvelle Constitution; elle n'est qu'une usurpation manifeste dans le clergé de France, J'en demande la suppression.
Le roi s'étant déclaré le chef et le protecteur de la Révolution, il n'est pas convenable qu'il ait auprès de sa personne des ecclésiastiques fonctionnaires publics qui n'ont pas prêté le serment décrété par l'Assemblée nationale et accepté par Sa Majesté.
Aucun ecclésiastique, de quelque titre qu'il soit décoré, quelques fonctions qu'il remplisse auprès de la personne du roi. ne peut, ni ne doit se dispenser d'obéir à la loi et la moindre résistance est un acte par lequel il se dépose lui-même.
Un membre à droite : Une pétition émanée d'une assemblée illégale ne peut un moment occuper l'Assemblée sans compromettre Sa Majesté.
Je prends cette affaire pour mon compte et sans vouloir engager une discussion sur cet objet, je me borne à demander que l'Assemblée nationale charge son comité ecclésiastique d'examiner la question de savoir si le roi peut ou non garder auprès de sa personne des ecclésiastiques qui ont refusé de prêter le serment et de proposer incessamment ses vues à ce sujet.
(Cette motion est décrétée.)
donne lecture d'une lettré du maire de Paris, qui annonce que la municipalité a fait, le 24 de ce mois, l'adjudication définitive d'une maison louée 1,500 livres, estimée 24,000 livres et adjugée 35,400 livres; P
Et le25, de trois autres,maisons : la première louée 350 livres, estimée 6,000 livres, adjugée 15,100 livres; la deuxième louée 1,400 livres, estimée 19,000 livres, adjugée 36,200 livrés; et la troisième louée 450livres,estimée 2,300 livres,, adjugée 9,400 livres.
, au nom du comité de vérification,
(L'Assemblée nationale décrète que le sieur de Bouvans sera admis, en prêtant le serment civique.)
, député de B,odez, demande un congé de six semaines.
(L'Assemblée accorde ce congé.)
Un membre donne connaissance à l'Assemblée d'une pétition des députés extraordinaires de VUe de Noirmoutier (département de la Vendée), tendant à empêcher la vente du château de Noirmoutier, et de deux bosquets de bois, appelés les bois de la Chaise et de la Blanche, comme étant utiles à la navigation, et servant de balise aux vaisseaux qui sont en mer dans cette partie.
Je demande que l'Assemblée autorise son comité d'aliénation à écrire au directoire du département de la Vendée et à celui du district de Challans, de suspendre la vente dudit château et desdits deux bosquets de bois, jusqu'à ce qu'il ait été autrement statué par l'Assemblée.
(Cette motion est décrétée.)
L'administration du département de Paris demande d'être admise à offrir ses hommages à l'Assemblée nationale.
(L'Assemblée décrète qu'elle sera admisè à la séance de mardi soir.)
, au nom du comité des domaines. Messieurs, le comité des domaines me charge de vous présenter un projet de décret sur les scellés apposés dans lés greffes des commissions extraordinaires du conseil.
Ces scellés vont être levés sous peu de jours; le comité des domaines est instruit qu'il existe dans ces greffes des documents précieux, dont il est intéressant d'empêcher la dispersion. Ces documents consistent en contrats d'aliénation de biens domaniaux, soit par des arrêts du conseil, soit par des contrats passés en vertu d'arrêts du conseil.
Votre comité vous propose en conséquence le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des domaines, décrète qu'un commissaire délégué par le directoire du département de Paris, assistera à la levée des scellés apposés'dans les greffes des commissions extraordinaires du cou-seil, à l'effet de réclamer les minutes des aliénations de biens domaniaux, faites, soit par des arrêts du conseil, soit par des contrats passés en vertu d'arrêts du conseil; lesquelles minutes seront déposées aux archives de l'Assemblée nationale, après qu'il en a,ura été dressé un inventaire, dont un double sera remis au comité des domaines de l'Assemblée nationale. » ,
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité des pensions, présente un projet de décret pour le payement d'indemnités à divers porteurs de brevets de retenue.
Ce projet de décret est ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des pensions, qui a rendu compte des vé-rilications faites par le directeur général de la
liquidation, décrète qu'en conformité de l'article 3 de la loi du 1er décembre 1790, il sera payé aux porteurs de brevets de retenue dont les noms vont suivre, les indemnités qui seront pareillement désignées, avec les intérêts à compter du jour de la rémise et enregistrement de leurs mémoires et pièces, conformément à l'article 4 de la loi du 19 janvier dernier, savoir :
« A Charles-Juste de Beauveau, ci-devant gouverneur, lieutenant général en Provence, la somme de 75,000 livres d'indemnité, avec les intérêts de cette somme, à compter du .5 janvier 1791 ;
« A Pierre Blanchard de Villers, commissaire des guerres, la somme de 20,000 livres d'indemnité, avec les intérêts à compter du 12 du présent mois de février;
A Charles-Léon de Bouthillier, ancien mestre de camp, commandant du régiment de Picardie, infanterie, 5,000 livres d'indemnité et les intérêts de cette somme à compter du 4 dudit mois de février ;
« A Victor Colin de La Brunerie, commissaire des guerres, la somme de 70,000 livres et les intérêts depuis le 15 du présent mois de février ;
« A Loufs-Marie-Florent du Châtelet, ancien colonel général des ci-devant gardes françaises, 420,000 livres d'indemnité avec les intérêts, à compter du SJevrier présent mois;
« A Alexandre-Joseph Loir, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, et les intérêts à compter du 22 dudit présent mois;
« A Antoine-Louis Saussaye, commissaire des guerres, 70,000 livres d'indemnité, avec les intérêts à compter du 21 du présent mois: à la charge, par chacun des dénommés ci-dessus, de se conformer aux lois de l'Etat, pour obtenir sa reconnaissance de liquidation et le payement des sommes qui y seront portées. »
(Ce décret est adopté.)
Messieurs, il s'est glissé une erreur dans la rédaction du procès-verbal du 30 janvier dernier. Cette erreur consiste dans l'insertion audit procès-verbal de quelques articles relatifs aux secours à accorder aux septuagénaires, articles qui ont été renvoyés au comité dans cette séance et qui, présentés de nouveau par le comité le 1er février à la séance du soir, ont été rapportés en entier dans le procès-verbal de cette dernière séance. Ces articles se trouvent donc à tort insérés dans le procès-verbal du 30 janvier.
Je demande, en conséquence, que l'Assemblée nationale décrète que les articles relatifs aux secours des septuagénaires, insérés dans le procès-verbal de la séance du 30 janvier, seront regardés comme non avenus et retranchés de l'édition dudit procès-verbal.
(Cette motion est décrétée.)
, au nom des commissaires delà caisse de l'extraordinairet annonce que vendredi dernier il a été brûlé pour quatre millions d'assignats et que vendredi prochain il en sera brûlé pour une somme de huit millions.
, au nom du comité des finances, présente un projet de décret pour la ratification de l'adjudication de la ferme des messageries.
Ce projet de décret est ainsi conçu:
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, ratifie l'adjudication de la ferme des messageries, coches et voitures d'eau, faite par le ministre des finances, le 21 février courant; en conséquence, l'autorise à passer bail
conformément aux conditions portées dans ladite adjudication et dans le cahier des charges. »
Un membre propose, par amendement, de dire que le bail sera exécuté, au lieu de ratifié.
(Cet amendement est rejeté par la question préalable.)
J'observe qu'il y a une grande faute dans les charges du bail : il y est dit que les pensions accordées pour le service des messageries seront payées sur le produit des messageries. Or, ces pensions sont nombreuses et font ordinairement baisser le prix des baux.
Je demande doncque ces pensions soient, comme toutes les autres, renvoyées par le fermier au comité institué à cet effet, lequel en prendra connaissance et proposera à l'Assemblée tel parti qu'il jugera convenable; jusqu'à ce que l'Assemblée ait pris une décision à l'égard de ces pensions, je propose d'en suspendre le payement.
(Cet amendement est adopté.)
, rapporteur. Voici la rédaction du projet de décret avec les amendements :
« L'Assemblée nationale: ouï le rapport de son comité des finances, ratifie l'adjudication de la ferme des messageries, coches et voitures d'eau, faite par le ministre des finances le 21 février courant ; en conséquence, l'autorise à passer bail conformément aux clauses et conditions portées dans ladite adjudication et dans le cahier des charges.
« Et néanmoins le payement des pensions mentionnées audit bail sera suspendu conformément aux décrets de l'Assemblée, et sous les exceptions portées par lesdits décrets, jusqu'à ce que leur état ait été présenté à l'Assemblée, et qu'elle ait décrété ce qu'il appartiendra. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité des finances. Messieurs, les états de l'ordonnateur du Trésor public sur les différentes dépenses de 1791 sont entièrement rédigés (1). Je demande à l'Assemblée de vouloir bien en ordonner l'impression, ainsi que la lettre d'envoi.
(L'Assemblée ordonne cette impression.)
L'ordre de jour est la suite de la discussion du projet de décret additionnel sur Vordre judiciaire (2).
Avant de passer à l'article 22 auquel nous nous sommes arrêtés hier, j'ai à proposer un article qui suivrait l'article 21. Le voici :
« Lorsque le commissaire du roi sera suspect pour cause de parenté ou autrement, les juges qui composeront le tribunal nommeront un des suppléants pour le remplacer.»
On nous demande tous les jours ce qu'il faut faire dans ce cas ; le moyen que je vous propose me paraît naturel..
, rapporteur. M. Thouret prépare en ce moment un projet sur la procédure
civile, lequel embrasse beaucoup d'objets et particulièrement celui-là.
(L'ajournement est décrété.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 22 du projet de décret, qui est adopté.
, rapporteur, donne lecture de l'article 23.
s'opposent aux dispositions contenues dans cet article, comme tendant à renouveler le brigandage des anciens procureurs, et demandent que dès à présent les dépens soient liquidés par le jugement qui les adjugera.
On a tort de s'imaginer que la taxation qui se faisait au Parlement et au Châtelet par les procureurs lut favorable à ces derniers; ies procureurs étaient extrêmement sévères sur la taxation qui leur était attribuée et, loin de se favoriser mutuellement, comme en pourrait le penser, ils se taxaient souvent au-dessous de ce qui leur était dû.
D'ailleurs la plupart des juges n'entendraient rien à cette taxation et j'avoue que, si j'avais jamais l'honneur d'être juge, je n'y connaîtrais goutte en la matière.
M. Martineau avance, à propos de la taxation par le procureur, un fait contredit par les gens qui ont travaillé au Châtelet et à qui ces taxations auraient dû être aussi utiles qu'à lui.
M. Darnaudat paraît très impatient d'en venir à une explication; je demande qu'il soit mis à l'ordre.
Je me présente assez rarement à la tribune pour qu'on ne puisse pas présumer chez moi l'intention de rechercher quelqu'un et moins encore M. Martineau, dont jecon-nais la probité et les talents. Mais je persiste dans ce que j'ai déjà dit : un de mes voisins assurait tout à l'heure qu'il y avait, dans la manière de taxer des procureurs, un affreux brigandage. Le galant homme qui faisait cette déclaration, quoique sans doute liait profité alors de ce mode de taxation, a du moins la loyauté de faire cet aveu, aveu que j'ai cru devoir communiquer à l'Assemblée.
D'ailleurs, M. Martineau a exercé la profession d'avocat pendant 31 ans ; il a dû faire hien des pièces d'écriture et a dû bien profiter.
Maintenant que ma justification est évidente, et que ce qui se pratiquait au Parlement et au Châtelet est bien connu, je ne crains pas ce que M. Martineau pourra dire en faveur des taxations faites par les procureurs.
Il ne s'agit pas d'examiner les inconvénients ou les avantages de l'ancien usage, mais seulement s'il était conforme aux principes. Il est clair que les taxateurs sont une invention de la fiscalité, et que l'adjudication des dépenses faisant partie du jugement, leur taxation ne peut en être séparée.
J'insiste donc pour que les dépens soient liquidés par le jugement qui les adjugera.
, rapporteur. J'adopte cette motion.
(L'article 23, modifié, est décrété.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 24.
Un membre propose de substituer le mot de : lois à celui de : règlements.
Un membre propose de retrancher la fin de l'article à partir de ces mots : à peine de concussion.
(Il n'est pas donné de suite à ces amendements).
Je propose un amendement; il consiste à ce que l'état des dépens demeure toujours au greffe pour pouvoir y être trouvé et qu'il soit paraphe pour y servir de pièce de responsabilité annexée à la minute des jugements.
, rapporteur. J'adopte l'amendement.
(L'article 24, modifié, est décrété.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 25.
Je demande que l'Assemblée supprime dans cet article l'usage de l'écriture à la grosse et que les affaires soient instruites par simple mémoire. Je n'ai jamais conçu, à moin3 d'adopter les idées purement fiscales, que, pour instruire une affaire, il faille des vqlumes et qu'on ne mette que 2 mots dans chaque ligne.
, rapporteur. Je demande à combattre cet amendement, parce que ma réponse en évitera beaucoup du même genre, qui seraient inutiles en ce moment.
J'ai eu l'honneur de vous dire, Messieurs, que le comité de Constitution vous présenterait très incessamment un projet de réforme sur la procédure civile. L'article que nous vous proposons n'a pour but que le règlement provisoire des droits qui doivent être taxés par le juge; aussi l'article ne doit être considéré que dans les limites que nous lui avons données, c'est-à-dire pour faire provisoirement donner le salaire aux officiers ministériels.
Je retire mon amendement.
Un membre propose qu'il ne soit passé dans tout le royaume que 3 actes à venir plaider.
Un membre demande la suppression des droits de conseils et de consultation.'
M. le rapporteur ne vous propose ni'maximum ni minimum, d'après lequel on puisse faire une taxe pour les droits de l'avoué. Cependant on n'en viendra pas à bout sans cela.
Je crois, Monsieur le rapporteur, que vous feriez mieux d'ajourner l'article à demain, pour vous fixer à une base quelconque ; et l'indiquerai le tarif de 1771 en le réunissant à celui de 1778.
rapporteur. J'adopte l'ajournement.
,(L'article 25 est ajourné.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 26.
L'ordonnance de 1667 n'a, pas été
enregistrée dans toutes les cours supérieures ; je crois qu'il serait nécessaire d'ajouter à l'article une disposition finale ainsi conçue :
« A l'égard des tribunaux établis dans des villes où l'ordonnance de 1667 n'a été ni publiée ni exécutée, les juges et les avoués se conformeront aux règlements qui y sont usités, en ce qui ne sera pas contraire aux modifications faites à cette ordonnance par l'article précédent; et néanmoins aucune cause n'y pourra être instruite ni jugée comme procès par écrit, soit en première instance, soit en cas d'appel, si elle n'a été préalablement portée à l'audience, et si les juges n'ont cru devoir l'appointer après avoir entendu les plaidoyers respectifs des parties. » (Cette disposition additionnelle est décrétée.)
Un membre propose de substituer dans l'article 26 aux mots *. Il ne sera signifié que deux écrits, ceux-ci : il ne sera passé en taxe.
Unmembre prooose d'ajouter après les mots : t'ordonnance de 1667, ceux-ci : et règlements posté-
Je demande, par amendement, qu'après les mots : pour obtenir laper-mission d'assigner, on ajoute : si ce n'est qu'il y ait lieu à abréger les délais, vu l'urgence des cas.
(Ces trois amendements sont adoptés.)
Un membre propose, par amendement, qu'il soit dit que tou3 les inventaires, quel que soit léur nombre, ne pourront être taxés ensemble au-dessus de 15 livres.
, rapporteur, demande l'ajournement de cet amendement jusqu'à la discussion du projet de règlement sur la procédure civile.
(Cet ajournement est décrété.)
(L'article 26, amendé, est adopté,)
donne lecture d'une lettre du président de l'assemblée électorale du département de la Nièvre, qui annonce que les électeurs réunis à JNevers pour remplacer M. de Suffren, ci-devant évêque ae Nevers, ont élu M. Lollet, curé de Vandenesse, qui a été proclamé le même jour aux acclamations du peuple.
Un membre annonce que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics du district,de Chaumont-en-Vexin, département de l'Oise, ont prêté le serment, a l'exception de huit qui ont refusé. Ce même membre ajoute que le nombre des ecclésiastiques fonctionnaires publics de ce district est de 100 ou environ,
Un membre annonce que, dans le district d'Orange, il n'y a eu que quatre ecclésiastiques fonctionnaires publics, qui aient refusé de prêter le serment.
(L'Assemblée décrète qu'il en sera fait mention dans le procès-verbal,)
M. Le Chapelier, rapporteur, donne lecture de l'article 27.
Je demande l'abrogation des fêtes de palais.
, rapporteur. J'adopte l'amendement. ^'article finira par dire que les fêtes dites
de palais sont supprimées, de manière que toutes les audiences se tiendront tous les jours de la semaine, à l'exception des dimanches et fêtes chômées par l'église.
(L'article 27, amendé, est adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 28.
Je demande la suppression de cet article ou, au moins, que la présence de l'avoué ou de la partie à l'audience suffisent pour autoriser le défenseur officieux.
Un membre propose une nouvelle rédaction de l'article.
(L'article 28, modifié, est adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 29.
Un membre demande la question préalable sur l'articlè.
, rapporteur. D'après les observations qui m'ont été faites, qu'il y avait des tribunaux qui, établis dans les cnefs-fieux de district, sont beaucoup plus chargés d'affaires que les autres, je crois qu'il vaudrait mteux dire que les menus frair des tribunaux de district seront fixés de 500livres à 1,000 livres par les directoires de département,
On ne peut pas adopter la question préalable, parce qu'il est constant que, dans les tribunaux de district, il doit y avoir de menus frais et que, par conséquent, il faut pourvoir au payement de ces frais. Mais je maintiens que le dernier mode de fixation qu'a proposé M. le rapporteur est trop fort.
Je crois qu'en fixant cet article à 300 livres par an dans les tribunaux de district des villes au-dessous de 20,000 âmes; 500 livres pour celles au-dessus de 20,000 âmes, et 800 livres pour Paris, on peut décréter l'article.
J'avais l'honneur d'être attaché à un siège; je puis vous protester que, nous ne dépensions pas 300 livres : ainsi j'adopte la proposition de M. de Lachèze.
Je crois qu'il n'est pas possible, Messieurs, de faire une loi générale sur cet objet; je crois qu'il faut s'en reposer sur les directoires de département. Il y ades localités qu'il faut con-. sulter; il n'est pas possible à Metz, par exemple, de pourvoir aux besoins du tribunal de district avec 800 livres.
Si vous voulez faire quelque chose de sage, vous adopterez la proposition de M. Le Chapelier.
Je demande s'il est raisonnable de donner 800 livres, quand il ne faut que 200 livres. Si vous adoptez cet article, il en coûtera au moins 200,000 livres pour Ja justice gratuite,
, rapporteur. Je n'ai pas été étonné que ceux qui regrettent l'ancien système (Murmures à droite; applaudissements à gauche) aient cherché à mettre en parallèle les dépenses qu'ils faisaient autrefois avec celles-ci. Mais, si l'on voulait bien calculer, on reconnaîtrait que les frais de la justice ne coûtaient pas davantage jadis qu'ils ne coûteront par la suite.
Certes, Messieurs, vous avez dans vos institutions nouvelles, avec la pureté de la justice, acquis encore une extrême économie. C'est uniquement pour critiquer vos opérations que l'on cherche à critiquer les salaires, peut-être trop modiques, que vous avez accordés aux nouveaux juges.
Dans presque toutes les villes du royaume, les salaires des juges sont très peu considérables et sont chèrement acquis par un travail très assidu. Je demande que vous preniez pour minimum la somme de 300 livres et pour maximum 800 livres, en en laissant toutefois 1a détermination à la décision des départements.
Mon amendement consiste, d'après les réflexions de M. Le Chapelier, concernant les fonctionnaires publics, à ce qu'on ajoute à l'article que les évêques et curés du royaume et tous autres fonctionnaires publics seront entretenus de burette, de bois et de chandelle.
(L'article 29 est décrété avec les chiffres de 300 livres et de 800 livres proposés par le rapporteur.)
, (Les articles 30 et 31 du projet de décret sont ensuite adoptés.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 32.
Je propose, par amendement, que tous les papiers des différentes cours et juridictions qui existaient dans les villes soient réunis au greffe du tribunal du district, excepté à Paris.
(L'article 32 est décrété avec cet amendement.)
, rapporteur. Les articles décrétés aujourd'hui seront réunis aux articles précédemment adoptés, dans un décret général dont jè donnerai incessament lecture à l'Assemblée.
L'ordre du jour de demain sera la loi sur les émigrations.
J'observe à l'Assemblée qu'elle a décrété qu'aucun projet ne lui serait présenté qu'il n'eût été imprime et envoyé à domicile. Or, comme le comité de Constitution ne l'a pas fait imprimer, je demande que son projet soit envoyé demain à domicile et qu'on ne le discute que lorsqu'on aura pu y réfléchir.
Je demande à parler au nom du comité de Constitution. Fidèles exécuteurs de vos ordres, nous noussommes empressés de préparer le rapport sur les émigrations et nous serons demain en état dé le faire.
Je demande qu'aux termes de votre décret, cette loi, extrêmement simple, soit mise à l'ordre du jour;etquesi, après la lecture qui en sera faite, il paraît que la discussion ne peut pas être ouverte sur les articles, on puisse alors en demander l'impression.
Je crois devoir dire deux phrases sur ce sujet ; l'Assemblée fera après ce qu'elle voudra.
Ce n'est pas pour inculper le comité de Constitution, parce que je trouve extrêmement simple que la loi excessivement importante que vous lui avez demandée ne puisse être prête que pour demain; mais je crois qu'il est impossible à l'As-
semblée de ne pas donner aumoins 24-heures de connaissance de cette loi.
Je demande donc que le rapport soit fait demain; mais la discussion ajournée à mardi prochain.
Un membre demande qu'avant la loi sur les émigrants, on s'occupe d'un projet de décret sur le respect dû à la loi.
(L'Assemblée décrète que le projet de décret sur les émigrants restera à l'ordre du jour de demain et qu'on s'occupera auparavant du projet de décret sur le respect dû à la loi.)
lève la séance à trois heures.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAILLES.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires donne lecture des procès-verbaux des séances de samedi soir et d'hier, qui sont adoptés.
, au nom du comité d'aliénation. Il s'est glissé plusieurs erreurs dans les copies qui ont été faites des différents états de domaines nationaux vendus aux municipalités et joints aux décrets desdites ventes; il paraît d'ailleurs superflu de faire imprimer ces états.
Le comité vous propose en conséquence le projet de décret suivant :
L'Assemblée nationale décrète :
« 1° Que le rapporteur de chaque décret d'aliénation est autorisé à revoir Ie3 minutes et expéditions des états joints auxdits décrets, pour vérifier les erreurs, et les corriger en présence d'un des secrétaires du comité d'aliénation, etde M. Bouche, l'un des commissaires de l'Assemblée nationale, pour la collation des décrets, lesquels parapheront avec le rapporteur les renvois nécessaires.
« 2° Les états d'aliénation ne seront point dorénavant imprimés avec les décrets portant aliénation; et, à l'égard desdits décrets, il sera sursis à leur impression jusqu'à ce que les adjudications aux municipalités étant consommées, la totalité desdits décrets puisse être réunie, et présenter l'ensemble desdites aliénations. » (Adopté.)
, au nom du comité d'aliénation. Il importe de laisser aux municipalités adjudicataires des biens nationaux le bénéfice des fruits et la charge des impositions, à dater du jour de leur adjudièation; dans le cas où cette observation serait rejetée; je me réserve de faire, à cet égard,, une demande subsidiaire en faveur des adjudicataires particuliers qui acquerront immédiatement de la nation.
Plusieurs membres présentent diverses observations.
« L'Assemblée nationale, vu l'instruction du 14 mai 1790, approuvée par le roi le 17, pour être exécutée, et l'article 6 du décret du 24 de ce mois, concernant les fruits des domaines nationaux qui appartiendront aux acquéreurs,
Décrète que ledit article 6 n'aura son exécution que dans le cas d'adjudication faite directement par la nation à des particuliers; mais, dans ie cas d'adjudication sur des reventes faites par les municipalités, les fruits continueront à être partagés proportionnellement à la jouissance entre les municipalités et les acquéreurs, conformément à l'instruction du 14 mai 1790. »
Je demande à M. le rapporteur les motifs du retard qu'éprouvent les ventes des biens nationaux dans mon département. Je réclame, au nom des municipalités du département de Lot-et-Garonne; elles ont été des premières à faire leurs soumissions, et ces soumissions, parvenues au comité, n'ont pas été encore mises au rapport.
Comme M. le rapporteur vient de faire entendre que les soumissions ou les ventes déjà faites approchent des 400 millions décrétés par i'Assem-blee nationale aux municipalités, jé supplie l'Assemblée, au nom de celles de mon département, dont les soumissions se trouvent en règle, d'être admises à jouir de la faveur des décrets.
Je demande donc le renvoi de ma proposition au comité d'aliénation, afin qu'il fasse incessamment un rapport pour que, si les 400 millions sont prêts-à être complétés, le comité ait à. présenter un décret favorable aux municipalités qui ont été les premières à se mettre en règle, et que l'Assemblée décrète 100 millions de plus s'il est nécessaire.
, au nom du comité d'aliénation. Les ventes n'ont été suspendues que pour prendre le temps de récapituler les aliénations déjà faites. J'observerai d'ailleurs que le résultat des aliénations ne se porte pas à la somme totale décrétée par l'Assemblée et que le comité va reprendre incessamment le cours,de ses rapports.
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
J'ai reçu de M. Philippe Feuzansac, là lettre suivante :
a Monsieur le Président,
« L'Assemblée nationale ayant ordonné l'envoi par devers elle de la procédure commencée à Âix, les officiers du régiment de Lyonnais m'ont fait passer par^M. Vinezac, un de leurs camarades, le mémoire historique des événements arrivés dans cette ville le 12 décembre, en me priant de mettre sous les yeux de l'Assemblée la vérité des faits qu'il renferme.
« Le patriotisme du régiment de Lyonnais, son respect pour les lois et son dévoûment à la Constitution me font espérer que l'Assemblée nationale prendra en considération le sort de dix officiers décrétés de prise de corps et dont sept gémissent depuis plus de deux mois dans les prisons d'Aix> sans avoir pu savoir encore quel est leur crime. Ils sollicitent un prompt jugement et l'attendent sans crainte.
« Je vous prie, Monsieur le Président, d'en représenter la nécessité à l'Assemblée, la présence de dix officiers à leur corps doit nécessairement influer sur la discipline et contribuer au bien du service. »
Cette lettre est accompagnée d'un mémoire justificatif en faveur de ces officiers qui, en protestant de leur innocence, prient l'Assemblée de prendre leur sort en considération.
Je vais remettre la lettre et les pièces, pour qu'el'es soient renvoyées au comité des recherches avec les autres pièces de cette affaire.
Je vous observe que le comité des recherches a déjà fait des efforts, mais inutiles, pour se faire remettre les pièces. Il paraît même qu'on met de l'affectation à ne pas les envoyer.
(de-Saint-Jean-d'Angély.) C'est au ministre de la justice à écrire aux tribunaux et à dire si les tribunaux lui ont donné des causes valables de délai ou s'ils lui ont répondu par des refus, ou enfin s'ils ont gardé le silence.
L'information vient d'être faite et les pièces sont renvoyées au comité des recherches pour en faire le rapport à une séance du soir.
(L'Assemblée renvoie au comité des recherches la lettre relative aux officiers du régiment de Lyonnais, ainsi que le mémoire y annexé, pour être joints aux pièces relatives à cette affaire.)
donne lecture d'une lettre de M. de Fleurieu, ministre de la marine, servant d'envoi à un projet général de dépense de la marine et des colonies pour 1791.
(Celte lettre, avec les pièces qui l'accompagnent, est renvoyée aux comités des finances et de marine, réunis.)
présente un article additionnel sur l'ordre judiciaire qu'il propose d'ajouter aux articles décrétés hier.
Cet article est ainsi conçu:
La règle établie par l'article 3 du décret du 11 de ce mois, pour déterminer à quels tribunaux doivent être portées les requêtes civiles, sera observée pour les revisions intentées ou à intenter contre les arrêts du ci-devant parlement de Douai. »
(Cet article est décrété.)
M. le ministre de la marine a fait remettre à l'Assemblée les procès-verbaux de la prestation de sermentde plusieurs employés du gouvernement prè3 des puissances étrangères.
Ce sont :
MM. Vidau, consul à Civita-Vecchia.
Yidau fils, consul en survivance.
Frammery, consul à Trieste.
François, vice-consul à Fiume
Christophe Ferich, vice-coriFul à Segna.
Lambardi, vice-consul à Porto-Ferrajo, en l'île d'Elbe.
Faure, vice-consul à Valence.
Borda, vice-consul à Sévilie.
Thomas Quatre-Sages, vice-consul à Rota.
François René,fvice-consul au Port-Sainte-Marie.
Jean-Pierre Jeannin, aumônier de la nation à Cadix.
Moute, agent de la marine à Rome.
De Pons, consul général à Dantzxk.
Etienne Dulac, vice-consul à Oneille.
Larchevêque, chancelier du commissariat à Amsterdam.
Darguibel, vice-consul à Almerie.
Lesparda, consul à Gyon.
Aubert, consul à Barcelone.
Aubert fils, vice-consul à Barcelone.
, au nom du comité des finances. Messieurs, vous avez précédemment rendu un décret sur l'échange des assignats, dans l'espérance qu'ils pourraient produire quelques effets, mais l'événement qui vient d'arriver nous a prouvé qu'il fallait un changement dans le décret dont l'exécution est impossible et dont les dispositions pourraient s'opposer au bien du service de la caisse de l'extraordinaire.
Nous vous proposons en conséquence ce qui suit :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, instruite qu'aux termes du décret du 29 juin 1790, oppositions pouvaient être formées ès mains du trésorier de l'extraordinaire, ou en celles de tout autre qu'il appartiendrait, à l'échange des billets de la caisse d'escompte contre des assignats ; que l'effet desdites oppositions était d'en empêcher l'échange jusqu'à ce qu'il en eût été autrement ordonné par les tribunaux qui devaient en connaître; voulant écarter tous les obstacles à l'échange et àla libre circulation des assignats, les assimiler en tout à la monnaie qu'ils représentent, et dont ils tiennent lieu, prévenir ou faire cesser toutes les difficultés qui pourraient résulter de semblables oppositions, qui, dans le fait, ne peuvent être qu'illusoires, décrète :
« Que les oppositions formées en exécution du décret du 29 juin 1790, en échange de billets de caisse contre des assignats, sont dès à présent regardées comme nulles et non avenues, et ne peuvent produire aucun effet. »
Je ne m'oppose pas au décret qui vous est présenté; mais je demande, Messieurs, une exception en faveur des receveurs des deniers qui, jusqu'au moment où vous avez rendu le premier décret, avaient suivi tous les moyens que leur fournissait l'administration pour constater l'infidélité de la perception de l'impôt et de l'envoi qu'ils en avaient fait au Trésor public.
Je demande donc, que le Trésor public leur'en tienne compte et qu'il y ait une exception formelle en faveur de ceux qui étaient autorisés à envoyer, par la poste ou autrement, les deniers publics.
Je propose en conséquence l'addition suivante:
« Le Trésor public est autorisé à tenir compte aux receveurs et percepteurs des impôts, du montant des fonds provenant des contributions qu'ils auront expédiées au Trésor public, en billets on en ass goats, lorsqu'après avoir rempli, pour l'envoi de ces fonds, toutes les formes prescrites par la loi, lesdits fonds ne seront pas cependant arrivés à leur destination. »
, rapporteur. Je demande que cette exception soit renvoyée au comité.
(L'Assemblée renvoie au comité des finances la motion M. Foucault-Lardimalie et adopte le décret présenté par M. Vernier.)
, au nom du comité des finances, propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances sur l'arrêté du département de l'Hérault, en date du 14 décembre, concernant la pétition du district de Saint-Pons, autorise le district à imposer la somme de 12,060 livres tant pour le chemin de Saint-Pons à la Salve-tat, qui était ci-devant à la charge de l'ancien diocèse, que pour l'élargissement des avenues du
Pont-de-Ratz, également à la charge dudit diocèse; laquelle somme sera "délivrée aux entrepreneurs sur les mandats du directoire de district, qui demeure chargé de veiller particulièrement à l'emploi. »
La contribution des chemins sera une contribution qui intéressera l'universalité du royaume. Pourquoi de pareilles autorisations, à moins que ce ne soit pour les dépenses déjà faites?
Un membre demande que la partie de la somme de 12,060 livres actuellement due par le district soit acquittée par un emprunt,
(Cette motion est rejetée par la question préalable.)
(Le projet de décret du comité est adopté sans modification.)
Messieurs, je m'empresse de vous apprendre que, dans le département des Hautes-Pyrénées, sur 600 ecclésiastiques fonctionnaires publics, tous ont prêté le serment prescrit par la loi du 26 décembre, à l'exception de 18 ou 20 qui y ont mis des restrictions. (Applaudissements.)
Il est intéressant, dit le directoire, que l'Assemblée nationale sache que notre département renferme dans son sein des ministres dont le patriotisme déjouera les projets des ennemis d'une Constitution qui nous assure autant de bonheur que l'ancien régime nous a fait verser de larmes. (Applaudissements à gauche.).
Mais, parmi ce petit nombre d'ecclésiastiques fonctionnaires qui ont refusé d'obéir à la loi, il en est un que je suis chargé de vous dénoncer. Il s'était distingué parla bienfaisance : on l'avait nommé procureur général syndic du département ; il était curé de la cathédrale et vicaire général de l'évêque. L'évêque a résisté au décret et s'est enfui en Espagne; le vicaire général a cru devoir suivre son exemple. Il a, depuis deux mois, abandonné ses fonctions et il a protesté, avec le chapitre dont il est membre, contre les décrets de l'Assemblée et a refusé le serment.
Voici d'ailleurs l'adresse que le directoire du département des Hautes-Pyrénées me charge de vous transmettre :
« Sages législateurs, vous avez posé les bases du bonheur des hommes. L'Europe en a été étonnée; les tyrans en ont frémi; mais la raison a parlé, la France est régénérée et la liberté, jaillissant enfin du choc des intérêts divers, s'est établie sur l'égalité des droits des hommes et sur la réciprocité de leurs devoirs. Lien sacré de la société, l'opinion publique a secondé vos généreux travaux, et les privilèges et les distinctions, ces échafaudages gothiques d'un gouvernement arbitraire et oppresseur, ont bien disparu pour toujours.
« Mais des hommes dangereux, sous le masque de la vertu, ont abusé de l'empire des opinions religieuses pour capter les suffrages de leurs concitoyens ; ils ont été appelés a partager les fonctions publiques et ils se sont flattés dans leur cœur de retarder la marche de la régénération de l'Empire.
« Dissipez encore cet obstacle, il importe à la perfection de l'ouvrage immortel que vous élevez, et que désormais l'homme opposé à la loi cesse d'être son ministre et ne parle plus au nom de la loi.
« Tel est l'objet du délibéré que nous mettons sous vos yeux ».
Dans son délibéré en date du 16 couraut, joint à cette adresse, le directoire du département des Hautes-Pyrénées arrête, Messieurs, de dénoncer à l'Assemblée le refus fait par le sieur Casleran, dont je vous entretenais tout à l'heure, ecclésiastique et procureur général syndic du département, de prêter le serment ordonné par la loi du 26 décembre et l'abandon total qu'il a fait, depuis près de deux mois, de ses fonctions.
Le directoire pense qu'aux termes de l'instruction décrétée par l'Assemblée nationale, le 21 janvier dernier, ce sont deux choses évidemment inconciliables d'être fonctionnaire dans un Etat et de refuser de maintenir la loi de-i'Etat. En conséquence, il demande que vu l'abandon fait par ce procureur syndic et son refus de serment, le Corps législatif autorise les électeurs qui vont se rassembler pour la. nomination de l'éveque et du membre de la cour de cassation, à nommer un nouveau procureur syndic.
Je demande donc, Messieurs, que l'Assemblée veuille bien faite une mention honorable dans son procès^-verbal du patriotisme des 600 fonctionnaires publics ecclésiastiques qui ont prêté le serment ; et, à l'égard de la dénonciation dont je vous ai entretenus, je demande que vous renvoyez au comité ecclésiastique la pétition du directoire avec ordre de vous présenter un décret général statuant sur l'incapacité des fonctionnaires publics ecclésiastiques qui n'ont pas prêté le serment. ».
(Cette double motion est décrétée.)
donne lecture d'une adresse et d'une pétition de la ville de Cette, qui demande un secours à l'Assemblée pour l'entretien de son port et autres ouvrages en dépendant.
(L'Assemblée renvoie cette pétition à ses comités réunis de marine et des finances, avec ordre de lui en faire le rapport incessamment.) 1
, député du département de VHérault, demande et obtient un congé pour raison de santé.
L'ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur le respect dû a la loi.
, au nom du comité de Constitution. Dans le passage orageux de la servitude politique à une Constitution libre, il y a des désordres inévitables. Il serait injuste de s'en indigner, il est déraisonnable d'en concevoir de l'inquiétude. A mesure que le peuple s'approche de l'état d'une nation libre, il sent renaître le besoin de la règle et de la paix. Les âmes ont pris, dans l'exagération nécessaire de leurs mouvements, une hauteur et une étendue qui leur font mieux apprécier chaque jour les bienfaits inestimables de l'ordre. Elles le recherchent avec intérêt et sont disposées à saisir toutes les vérités qui doivent le ramener et l'affermir.
Voilà le moment qu'il faiit prendre pour publier ces vérités; c'est alors qu'on doit faire sentir au peuple que l'être le plus noble et le plus heureux qu'il y ait sur la terre, c'est un homme libre qui résiste à toutes les volontés arbitraires des hommes, et qui ne résiste jamais à la loi ; d'autant plus docile à ses décrets salutaires qu'ils le préservent de l'oppression, en ie soumettant aux seules règles de la raison et de la justice; que partout où la loi ne règne pas sans partage et n'est pas religieusement observée, il n'y a point, il ne peut pas y avoir de liberté, puisque le dé-
sordre donne à tous sur nous-mêmes le pouvoir de la force que nous usurpons sur les autres; qu'un jour le besoin du repos devenant le plus impérieux des sentiments, il faut se résoudre à choisir enfin entre l'esclavage qui rampe sous la tyrannie du plus fort, et la soumission libre à la volonté générale,
Le despotisme avait raison de dire que la société ne peut se maintenir que par l'obéissance ; oui, sans doute, il faut obéir; mais son orgueil féroce le troqipait sur l'application de cette maxime. Il voulait que le peuple courbât une tête servile sous le joug de la violence et du caprice, et c'est à la loi seule qu'il doit soumettre une tête libre et fi ère.
Au milieu des ruines entassées de l'ancien édifice, cette voix de la raison pouvait à peine se faire entendre; peut-être même elle aurait refroidi une chaleur nécessaire, contre laquelle tant de cris ne se faisaient entendre, que parce qu'elle était le gage de la liberté et du salut de l'Empire. Mais lorsque la société se recompose sur des principes plus sûrs, lorsque les administrations agissent, lorsque les tribunaux s'ouvrent, lorsque la machine politique s'organise, la loi, en quelque sorte ensevelie dans les nuages d'une grande révolution, doit se montrer à la nation fatiguée, comme le centre d'un repos actif et d'un mouvement régulier et paisible.
En vain a-t-on essayé partout de jeter le peuple dans des excès dont l'âme humaine n'est jamais loin, durant les fortes agitations et les secousses générales. En vain l'intérêt, l'hypocrisie, et, plus que tout le reste, la vanité, ont-elles semé l'erreur autour du peuple, à mesure que vous répandiez la lumière; il n'y a de changé, dans le caractère des Français, que ce qui les disposait à la servitude. Leur bonté, leur courage, leur loyauté sont les mêmes; le sentiment les touche et la raison les persuade : instruments négligés sous un gouvernement qui méprisait les hommes, ils déploient toute leur force dans une Constitution qui les honore. C'est le témoignage que nous rapportent de toutes parts les commissaires qui ont parcouru nos contrées.
Votre comité de Constitution a donc pensé qu'il est temps de donner un décret solennel qui pose les principes constitutionnels de l'ordre, qui combatte ies sophismes dont on se sert pour égarer le peuple; qui, rappelant tous les bons citoyens par une instruction simple, contienne les autres par une police sévère sans rigueur, et ferme avec modération ; qui inspire enfin aux amis de la liberté le dessein religieux de se liguer en faveur de la loi, et de couvrir les administrateurs et les juges du respect universel, sans que leur responsabilité soit affaiblie.
Voici le projet que le comité a l'honneur de vous soumettre :
« L'Assemblée nationale déclare comme principes constitutionnels ce qui suit ;
« 1° La nation entière possédant seule la souveraineté qu'elle n'exerce que par ses représentants, et qui ne peut être aliénée ni divisée, aucun département, aucun district, aucune commune, aucune section du peuple ne participe à cette souveraineté, et tout citoyen sans exception y est soumis ;
« 2° Les électeurs nomment pour la nation les fonctionnaires publics, en vertu du pouvoir délégué par la Constitution. Ces fonctionnaires, à l'instant où ils sont élus, appartiennent à la nation, sont indépendants de ceux qui ies ont nommés, et nè sont responsables qu'à la loi dans la per-
sonne de leurs supérieurs établis par la Constitution ;
« 3° Les fonctionnaires publics nommés parles électeurs, étant chargés uniquement de parler pour la loi et de la faire exécuter, sous l'autorité du roi, chef suprême du pouvoir exécutif, le peuple, lorsqu'ils sont choisis, doit à l'instant même reconnaître et respecter en eux les organes et les ministres de la loi;
« 4° Lorsque les administrateurs ordonnent, et que les juges prononcent au nom de la loi, et lorsque lés officiers chargés sous eux de l'exér-cution, commandent l'obéissance, tout citoyen sans exception est tenu d'obéir ;
« 5° Les réclamations contre les officiers municipaux, administrateurs, juges ou fonctionnaires publics, ne peuvent être proposées et suivies que selon les formes établies par la Constitution, et sans préjudice de l'obéissance provisoire;
« 6° Toute action contraire a ces devoirs d'obéissance et de*respect, est une atteinte à l'ordre public et une violation du serment de citoyen;
« 7° Toute invitation faite au peuple verbalement ou par écrit de désobéir à la loi, de résister soit aux fonctionnaires publics, soit aux dépositaires de la force agissant en vertu de réquisilions légales, ou de les outrager, est un crime contre la Constitution de l'Etat.
« En conséquence l'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Les citoyens qui assisteront aux
audiences des juges de paix, à celles des tribunaux de district, des
tribunaux criminels, de ceux de police et de commerce, se tiendront
découverts dans le respect et dans le silence. Tout ce que les juges
ordonneront, pour le maintien de l'ordre, sera exécuté ponctuellement à
l'instant même.
« Art. 2. Si un ou plusieurs des assistants iuter^ rompent le silence, donnent des signes publics d'approbation ou de désapprobation, soit à la défense des parties, soit au jugement, causent ou excitent du tumulte de quelque manière que ce soit ; et si, après l'avertissement des huissiers, ils ne rentrent pas dans l'ordre sur-le-champ, il leur sera enjoint de se retirer, et dans le cas oû quelqu'un opposerait à cette injonction la moindre résistance, les réfractaires seront saisis aussitôt et déposés dans la maison d'arrêt où ils demeureront^ heures.
« Art. 3. Si quelques mauvais citoyens osaient outrager ou menacer les juges et les officiers de justice, les juges feront saisir à l'instant les coupables qui de suite seront déposés dans la maison d'arrêt. Les juges les interrogeront publiquement dans les 24 heures, etpourrontles condamner par voie de police correctionnelle, jusqu'à 8 jours de détention, selon la nature des circonstances.
« Art. 4. Si les outrages étaient d'une telle gravité, qu'ils méritassent peine afflictive ou infamante, les coupables, saisis et interrogés dans les vingt-quatre heures, seront renvoyés dans la maison d'arrêt pour subir ies épreuves de l'instruction criminelle; et s'ils sont convaincus, ils seront punis selon toute la rigueur des lois.
« Art. 5. Les assemblées délibérantes des municipalités et des administrations, s'il s'y trouve quelques assistants étrangers, exerceront, dans le lieu de leur séance, les mêmes fonctions de police qui viennent d'êire attribuées aux juges. Après avoir fait saisir les perturbateurs, aux termes des articles 2 et 3 ci-dessus, les membres de ces assemblées dresseront procès-verbal du délit, et le feront parvenir au tribunal, qui sui-
vra, pour l'interrogatoire et le jugement, ce qui est prescrit dans les articles 3 et 4.
« Art. 6. Toute rébellion des citoyens, avec ou sans armes, contre l'exécution des mandements de justice, saisies, exécutions, ordonnances de prise de corps, contraintes par corps, autorisées par la loi; toute violence exercée, et tout mouvement populaire excité contre les officiers municipaux, administrateurs, juges, officiers ministériels, dépositaires de la force publique, en fonctions, seront poursuivis contre les prévenus, par la voie criminelle, et punis selon toute la rigueur des lois.
« Art. 7. Les officiers ministériels, chargés de l'exécution des jugements, mandements, saisies, ordonnances et contraintes par corps contre un citoyen, lui présenteront une baguette blanche, en le sommant d'obéir. Aussitôt après l'apparition de ce signe de la puissance publique, toute résistance sera réputée rébellion.
« Art. 8. Si des fonctionnaires-publics ou officiers ministériels d'exécution sont insultés, menacés ou attaqués dans l'exercice de leurs fonctions, ils prononceront à haute voix ces mois : Force à la loi. A l'instant où ce cri sera entendu, les dépositaires de la force publique, et même tous les citoyens, sont obligés, par la Constitution, de prêter main-forte à l'exécution des jugements et contraintes, et de régler leur action sur l'ordre de l'homme public, qui seul demeurera responsable.
« Art. 9. Si un fonctionnaire public, administrateur, juge, officier ministériel d'exécution, exerçait sans titre légal quelque contrainte contre un citoyen, ou si, même avec un titre légal, il employait ou faisait employer des violences inutiles, il sera responsable de sa conduite à la loi, et puni sur la plainte de l'opprimé, portée et poursuivie selon les formes prescrites.
« Le présent décret sera lu et publié aux prônes de toutes les églises paroissiales, pendant 3 dimanches consécutifs, par les curés, vicaires ou autres ecclésiastiques. Il sera solennellement proclamé et affiché aux portes des églises, à l'entrée des maisons communes, dans les rues, carrefours et places publiques, par ordre des officiers municipaux. Il sera et demeurera affiché dans les auditoires de justice, de police et de commerce, dans les maisons des juges de paix, et dans les lieux d'assemblée des municipalités, conseils généraux de commune, administrations et directoires de département et de district. »
(ci-devant de Villeneuve). Messieurs, je vais jeter quelques idées générales et rapides sur les articles qui vous sont proposés par le comité, et j'espère vous convaincre que vous ne pouvez pas consacrer ces principes, tels qu'ils vous sont présentés.
Les peuples les plus libres sont ceux qui respectent le plus la loi; et, dans les pays libres, les citoyens doivent d'autant plus la respecter, que ce sont eux qui la font; ils doivent d'autant plus respecter ses organes et leur obéir, que ce sont eux qui les choisissent. Ces principes sont évidents pour tout le monde; mais je vois dans le préambule de loi qui vient de vous être présenté, ces maximes tellement déguisées, ex primées d'une manière si vague et si insignifiante, que vous ne sauriez les admettre sans le plus grand danger. Vous avez d'ailleurs dû remarquer que les articles qui suivent ces principes, n'y ont aucun rapport. Vous les avez décrétés, ces principes, d'une manière beaucoup plus solennelle, beaucoup plus au-
thentique. N'avez-vous pas déjà déclaré que la souveraineté réside essentiellement dans la nation, qu'elle réside dans l'Assemblée des représentants choisis parle peuple? (Murmures.)
Un membre : Et le roi !
(ci-devant de Villeneuve). Je me suis servi d'une expression équivoque. Je prie l'Assemblée de croire que je n'ai pas entendu dire qu'une assemblée représentative quelconque pût usurper la souveraineté, qui n'appartient qu'au peuple; j'ai voulu dire que les représentants de la nation exercent les droits du peuple, et au nom du peuple. Ces maximes, vous les avez consacrées : les répéter me paraît une chose parfaitement inutile en elle-même, mais très dangereuse si vous le faites d'une manière aussi obscure, aussi vague qu'on vous le propose.
Dans le premier article de ce préambule, il est dit : aucune section ne participe à la souveraineté ; expression équivoque et même dangereuse. Chaque section de la nation peut émettre son vœu particulier, et. dans ce sens elle participe évidemment à la souveraineté. (Murmures.) Je dis que la volonté générale ne se compose que de toutes les volontés particulières. Je dis, et ceci est exact en principe, qu'une section en particulier n'exerce pas la souveraineté; mais il n'est pas exact d'en conclure qu'elle neparticipe point à la souveraineté. (Murmures.) N'est-ce pas la réunion de toutes les sections qui forme la volonté générale? Et ne s'ensuit-il pas que chaque section participe à l'exercice de la souveraineté? Je suis surpris que des principes aussi simph s, aussi élémentaires...
Un membre : Aussi faux!
Je suis surpris que ces principes trouvent des contradicteurs dans cette Assemblée. S'ils sont erronés, je prie ceux qui m'interrompent de vouloir bien me réfuter à la tribune lorsque j'aurai fini.
Je ne prétends point considérer ces assemblées réunies comme ayant le pouvoir d'une Convention nationale; mais lorsque les citoyens d'une section sont réunis pour émettre leur vœu, je dis qu'ils participent à la souveraineté; peut-être ne développé-je pasen ce moment cette maxime d'une manière assez claire, mais j'en ferai une application particulière lorsque nous traiterons des Conventions nationales. Je me borne à observer qu'il n'est pas exact, qu'il est équivoque de dire que les sections de la nation ne participent pas à la souveraineté.
Le septième des articles proposés : « Toute invitation faite au peuple, y est-il dit, tendant à le faire révolter contre les lois, est un crime contre la Constitution. » Ne voyez-vous pas combien cette expression est vague, combien elle est susceptible d'applications dangereuses? Tout citoyen peut manifester soit verbalement, soit par écrit, son opinion sur les lois : en parlant contre les lois, il ne conseille pas pour cela la révolte. Eh bien, cependant, d'après votre décret, on sera autorisé à dire à un citoyen : vous avez écrit avec force contre la loi; vous avez par là invité le peuple à la révolte. (Murmures.) Est-il convenable de porter une loi qui ait une aussi grande latitude dans son interprétation? Que signifient ces mots vagues : toute invitation faite au peuple? Ne voyez-vous pa3 qu'il serait facile d'en abuser pour porter atteinte à la liberté qu'a chaque citoyen d'émettre son vœu sur les lois ?
Il faut que le délit soit spécifié; il faut que la loi s'exprime catégoriquement, mais non pas par les termes vagues d'invitation tendant à exciter la désobéissance aux lois. Si ceite invitation ne produisait rien, si elle était faite à une seule personne, je demande si elle serait nécessairement un crime d'Etat* (Murmures.) A-t-ou l'intention de faire contre la liberté de la presse une loi de circonstance, de la diiiger contre tel individu, contre tel écrivain qui excite le peuple à l'insurrection? Mais si telle application de la loi paraît juste, ne voyez-vous pas combien il serait possible de lui donner des applications funestes contre les meilleurs écrivains?
Tout ce que les articles qu'on vous présente contiennent de vrai, d'utile en priucip s, a été exprimé par la déclaration des droits. Si vous vouiez mettre des restrictions, énoncez-les par une loi positive, et non pas en forme de principes généraux, vaguement exprimés. Vous pouvez énoncer en faveur de la liberté des principes généraux, parce que la liberté est le droit de tous ; mais lorsqu'il s'agit de restrictions, d'exceptions, alois il ne faut plus énoncer des principes, mais faire des articles de lois, tracer aux citoyens des règles de conduite précises, positives.
Je demande donc la question préalable sur tout ce qui, dans le projet de décret qui vous est proposé, tst énoncé vaguement en principes constitutionnels. Je demande qu'on rédige en lois positives toutes les restrictions qu'on entend mettre à la liberté.
Je prends la parole parce je crois très utile d'épargner à l'Assemblée une discussion nécessairement abstraiie et épineuse. Déjà vous avez déclaré la souveraineté de la nation, et la manière dont cette souveraineté doit s'exercer. J'ai entendu dire que le préopinant n'avait dit que des mots, mais ces mots exprimaient des choses. On vous a dit que le préambule de décret qui vous est proposé attaque la souveraineté de la nation dans son principe ; et en effet, sous le prétexte d'énoncer le principe, qu'à la nation seule appartient la souveraineté, on va jusqu'à dire que les sections de la nation ne participent pas à la souveiaineté. S'il est vrai que la nation est composée de toutes ces sections, il est vrai de dire que tou e seciion, que tout individu même est membre du souverain; lorsqu'on vous propose de répeter en termes équivoques les vérités que vous avez déclarées u'une manière solennelle dans la déclaration des droits, n'est-ie pas porter atteinte à la s uveraiueté même dont on prétend consacrer le principe ?... Je ne me traînerai pas sur tous les articles qui vous sont proposés pour démontrer le vice de leur rédaction.
Je passe tout de suite au septième qui me paraît le plus imporiant. Tout : invitation faite au peuple, pour l'exciter à desobéir à la loi, est un crime contre la Constitution. Quelle étrange rédaction I Et l'on nous propose un article de ce te importance en l'orme ne préambule à une loi fur la police des tribunaux? Et l'un réJige en termes aussi généraux, aussi vagues, une loi sur la liberté de la presse? Ne voit-on pas combien une pareille loi serait fuues e à la Constitution? Ne voit-on pas qu'elle serait destructive de la liberté? Ne voyo is-nous pas que des juges prévenus, partiaux, pourraient facile ment trouver, dans les expressions de cette loi, les moyens er">d'opprimer un écrivain patriote et courageux?
Vous avez fait, lui dirait-on, une déclaration si véhémente contre la loi ; vous avez fait des reilexionssi amères qu'elles ont dû naturellement exuit r à la révolte. Vous voyez que, par cette loi, vous ouvrez la porte à l'arbitraire , que vous préparez la des ruction de la liberté de la presse, je n'entrerai pas dans des détails ultérieurs. Il me suffit d'ooserver qu'une loi sur la presse, une loi qui intéresse aussi essentiellement la liber é publique et individuelle, mérite une discussion solenhelle, pour que je puisse en conclure qu'elle ne doit pas être insérée dans le préambule d'un règlement particulier, et pour que je sois autorisé à en demander l'ajournement. (Il s'élève quelques applaudissements.)
(de Saint-Jean-d1 Angély). S'il y a des inconvénients.....
Je demande la parole pour une question d'ordre. Je n'examine pas si les principes contenus dans le préambule qui vous èst proposé sont vrais ou faux. Il faut commencer par déterminer s'il faut des principes, s'il faut un préambule à la tète de la loi que vous avez à décréter pour la police des au'diences,ou, si au contraire, ces principes ne doivent pas se réduire aux articles contenus dansladéclaraiion desdroits ou à ceux qu'il serait convenable d'y ajouter. L'Assemblée nationale n'a à faire qu'une déclaration des droits, des décrets constitutionnels, des décrets réglementaires. Je ne sais pas, d'après cela, ce que c'est que décréter des principes.
Je demande donc que l'on commence par discuter la question de savoir s'il faut un préambule de principes constitutionnels à la tête de la loi qui vous est présentée.
Je ne crois pas qu'il faille faire des lois sans principes.
(de Saint-Jean-d'Angèly). Si je crois qu'il y aurait de l'inconvénient à adopter légèrement les principes qu'on vous propose de décréter, je vois aussi de très grands inconvénients à ajourner ces articles, et plus encore à les rejeter par la question préalable.
On a uit avec vérité que l'ouvrage sublime de la déclaraiion des droits était l'inauguration de la statue de la liberté, mais il faut aussi inaugurer celle de la loi par une déclaration de principes qui la préserve desiuteiprétations funestes de l'erreur ou de la mauvaise foi.
M. Pétion vous a dit que chaque seciion, cha^-que citoyen participait individuellement à la souveraineté. C'est précisément cette maxime répandue dans le royaume, c'est cette idée dangereuse que le comité (le Constitution a eu intention de détruire. Une assemblée primaire délibérante peut émettre un vœu, et de ces vœux particuliers se compose la volonté générale. Chaque section a le droit essentiel d'émettre son vœu, de former des pétitions ; mais il ne s'en suit pas qu'elle parti* cipe à la souveraineté, puisqu'au contraire ses pétitions sont jugées isolément dans l'As-einblée générale des représentants de la nation. Je crois donc qu'il est vrai de dire que nulle section .de l'empire ne participe à la souveraineté. (Applaudissements.) Il n'est pas peu important de publie!' celte vérité. Lorsque nous aurons vieilli dans, la l berlé, tous les citoyens de l'empire connaîtront ces principes; ils deviendront l'alphabet des enfants; cependant il importe aujourd'hui de les faire connaître au peuple pour faire cesser les
troubles qu'occasionnent les fausses interprétations de vos décrets. Peut-être faudra-t-il les développer davantage, les exprimer avec plus de Clarté qu'ils ne le totit dans le projet de décret de votre comité : mais il est important de les,poser.
Dans toutes les parties du royaume il s'élève Une foule de questions sur votre Constitution. Par exemple,'si les assemblées électorales peuvent délibérer, jusqu'où s'étendent les pouvoirs des corps administratifs, etc..... Ces questions n'existeront pas dans quelques années ; il faut aujourd'hui Une déclaration de l'Assemblée pour lever tous lés doutes, pour limiter tous les pouvoirs, pour tracer à chaque citoyen ses devoirs.
M. Robespierre a cherché à vous intéresser par une considération qui est sans doute faite pour vous toucher ; je veux dire par la crainte que les principes, présentés par votre comité, ne portent atteinte à la liberté de la presse. La presse est, en effet, le garant de votre Constitution, et le palladium de la liberté. Il faut que tout homme puisse dire que la loi est mauvaise; C'est non seulement le droit, mais le devoir de tout bon citoyen. S'il exprime son opinion.sur la loi, il ne doit pas moins à la vérité en conseiller l'observation jusqu'à ce qu'elle soit réformée. Tout homme qui .invite le peuple à la désobéissance aux lois est criminel de lèse-nation. (AppVaMis-sements.) Gelui qui indique le vite de la loi parle à la raison du législateur pour l'inviter à la rétracter; jamais il ne doit parler au peuple que pour l'inviter à l'exécuter.
Si.la loi qui défend d'inviter le peuple à la rébellion > parait trop vague dans sa rédaction, il y a un préservatif contre ce vice dans l'institution des jurés. Si tin écrivain est accusé d'avoir excité la rébellion, le juré jugera son intention ; il fera constater si cet homme a dit au peuple : il y a un vice dans la loi ; ou s'il a dit : bravez la loi et ses organes.
. De toutes ces observations, je conclus à ceique les principes qui vous sont présentés soient adoptés, mais rédigé! d'une manière tellement claire qu'ils ne puissent donner lieu à aucune application arbitraire.
VoUs avez déjà décrété d'une manière positive tous les principes qu'on voUs propose. Dans l'organisation des niu-nicipalités, vous avez décrété que les municipalités appartenaient à la natioh entière. Dans l'organisation des corps administratifs, Vous avez répété les mêmes principes; vous avez limité leurs pouvoirs respectifs ; enfin Vous avez décrété que l'Assemblée nationale représentait la nation tout entière. Vous avez donc suffisamment déclaré que nulle partie de la nation, nul corps administratif ne peut exercer la souveraineté. Vous avez pareillement déclaré que les fonctionnaires publics ne peuvent exercer d'autres fonctions que celles pour lesquelles ils sont nommés, et qu'ils pe peuvent émettre qu'un Vœu individuel. II reste à Paire une loi sur la liberté de la pressé; mais comment'faire d'une loi aussi importante le préambule d'une loi particulière avec laquelle elle n'aurait aucun rapport? Je ne demande pas la question préalable ; mais j'invite le comité à retirer pour le moment son préambule.
Le préopinant a avancé un fait que je demande à contredire.
On demande que la discus-
sion porte sur la question de savoir si l'on Supprimera le préambule.
Nous ne pouvons discuter l'utilité du préambule sans discuter le préambule lui-même. Je demande donc que la discussion s'ouvre sur le préambule.
Je crois que l'objet de la discussion est de trouver un moyen d'éclairer le peuple sur ses devoirs. Le préambule -qui vous esfcppésenté remplit-il cetob^et? C'est ce que je ne pense pas. Le préambule dit que nulle partie de la nation ne peut exercer individuellement la souveraineté; que la souveraineté réside dans la nation entière. Ce principe est vrai, mais vous l'avez déjà déclaré dans la déclaration des droits, et c'est précisément parce qu'il y est exprimé d'une manière trop ahstraite, qu'il a été mal interprété. Il me semble que l'article qui vous est présenté est également abstrait, et entraînerait les mêmes inconvénients. Je crois qu'à cet égard il est facile de se servir des raisonnements du préopinant contre-lui-même. Il vous a dit que parce que vous vous êtes bornés, dans la déclaration des droits, .à dire que la souveraineté appartient à la nation, chaque partie de la nation croyait pouvoir exercer la souveraineté.
Que résultera-t-ii de l'article qu'on vous propose? Absolument la même chose. On abusera toujours d'un principe trop abstrait pour être à la pontée du peuple. Il est donc inutile de.répéter, dans la même forme, des maximes que les personnes instruites connaissent déjà et que le peuple ne comprendrait jamais. Que devons-nous foiré? Particulariser cette loi générale, la rendre précise, l'appliquer à tous les cas, la mettre à portée de.tousles esprits; énoncer dans i'onga-nisation des municipalités que nulle municipalité, nulle communene peut exercer le pouvoir législatif, ni le pouvoir exécutif; expliquer !ce que c'est qu'exercer le pouvoir législatif ; répéter les -mêmes principes dans l'organisation des corps administratifs,dans la définitiondechacundos pouvoirs délégués. Alors le peuple vous entendra. II faut lui parler son langage; il faut particulariser les idées pour les lui rendre vraiment intelligibles.
Il n'est pas nécessaire de dire dans un préambule que des fonctionnaires publies méritent ie respect, puisqu'il n'est pas une loi qui ne l'ordonne, .puisque vous les environnez de tout ce qui peut imprimer le respect. Ou vous a fait Voir les vices, dés articles qui vous 'sont:proposés.;Certainement le Code pénal d'un peuple libre ne doit pas contenir des expressions aussi vagues. Si vous le trouvez bon, je vous proposerai de faire une im-ifuction-sur le respect dû à la loL,^ instruction qui rendra extrêmementsensiblesaupeuple les vérités que vous voulez lui faire connaître; mais qu'il ne connaîtra pas, tant que 'vous neilui présenterez que des maximes qui échappent souvent aux personnes les plus éclairées.
Quant-au 7* article que plusieurs des préopt-nants *mt justement critiqué, il me-semble qu'on ne doit, jamais se permettre» quand il s'agit de la vie et de l'honneur des citoyens, dîempruùter un langage aussi peu précis,! et de se servir de maximes aussi générales.
D'après ces observations, je conclus à ce que la loi qui vous est soumise soâipié«édée d'une destruction, rédigée en termes simples'età la portée du peuple. (Applaudissements,)
, rapporteur. »Les observa-
tionsdu préopinant me paraissent extrêmement sages. Je crois cependant, comme rapporteur;du comité, devoir vous présenter quelques observations.
D'abord il est extrêmement important d'éviter les fausses interprétations que l'on fait, soit des principes de la Constitution, soit de ceux de la déclaration des droits. Nous sommes environnés de mouvements excités par de fausses applications de vos décrets. On place la souveraineté tantôt dans le corps administratif, tantôt dans le-peuple d'une commune. Il faut faire connaître! aux citoyens que les fonctionnaires publics n'ont ] aucune participation à la souveraineté; que les! citoyens, pris isolément, ne sont tous que des sujets, qu'il n'est pas vrai de dire que les sections de la nation participent à la souveraineté. Il est extrêmement important que ces principes constitutionnels soient connus; que le peuple sachejjue là souveraineté ne réside que dans lai nation entière, qu'elle ne s'exerce que dans l'As-! semblée générale deser"> représentants de la nation; j que partout ailleurs il n'y a que des sujets qui j doive:it émettre leur vœu et obéir.
Nous pensons donc qu'il faut établir ces,prin-j er">ripes constitutionnéls d'une manière ïmpêrative;; et que si une instruction peut porter ia lumière dans l'esprit du peuple, elle n'a pas l'effet du commandement de là roi; En adhérant à fa pro-1 position de M. Bozot, je demande qu'il Soit fait, par le comité dè Constitution, une instruction ! dans le sens des principes constitutionnels que! nous vous avons présentés, pour que le peuple ap- j prenne enfin la'Constitution, et qu'on né puisse plus l'égarer avec les mots de souveraineté et de nation. (Applaudissements.)
Il me semble. Messieurs, que la ; proposition de ne point décréter des principes, parce ; qu'il faut faire des lois, n'est pas exacte. Je ne i ' trouve rien de plus sage quela proposition de l'instruction; maisjecrôisaussiqùe parmi les princi- i pes qui vous ont été présentés, il en est plusieurs j qu'on peut ajouter au texte de la loi, et auxquels il est utilé de donner la forcé d'obligation et de "commandement.
Je ne vous donnerai sur cela pour exemple que le premier article même; du préambule qui j vous est soumis. Car, quoiqu'il ne-soit, à proprement parler, que la conséquence de vos Lois déjà décrétées, il est pourtant nécessaire, pour instruire le peuple et même pour rendre la loi plus obligatoire, de lui développer et de lui indiquer, à titre de commandement, ce qui n'est véritablement que La conséquence d'un principe.
Ainsi, par exemple, si dans le premier article, au lieu devoir dit: « La souveraineté réside dans la nation; mais aucun département, aucun district, etc.... » ; si, dis-je, au lieu .de cela, on s'était contenté de dire simplement : « Aucun département, aucun district, aucune municipalité, -aucune iseetion de citoyens neipojuirra exercer - aucun acte de souveraineté, jmais seulement Je droit de pétition «'; on aurait édiatéun commandement nipii ferait beaucoup plias viis-à-vés du peuple qu'une instruction. (Applaudissements.)
Je supplie StLiLe Chapelier de convertir en loi l'article premier de son préambule.
Je demande que l'on aille aux voix sur la proposition, de M. Buzot : elle me paraît avoir réuni tous les suffrages; elle n'empêche pas qu'on réduise en articles de décrets les
principes du préambule qui en paraîtront susceptibles. .
Je ne sais pas comment l'on peut mettre des maximes.politiques aussi importantes à la tête d'une loi mesquine, dans laquelle on détermine si les citoyens présents à l'audience peu vent, garder ou;non ie chapeau sur la tête. Je demande que l'instruction que le,comité de iGanstitutioo va faire soitséparée .de cette loi purement 4e police.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
(L'Assemblée ferme la discussion et décrète le renvoi du préambule au comité de,Constitution, qui est:chargé de lui présenter une instruction pour accompagner la loi).
La discussion est ouverte sur les . articles du projet; de décret.
Je demande que l'article de M. Tronchet soit discuté le premier.
, secrétaire, donne lecture de la rédaction proposée par M. Tronchet pour l'article premier ; elle est ainsi conçue :
« Aucun,département, aucun district, aucune commune, aucune section du peuple, aucun citoyen ne peut exercer aucun acte de fa isou-veraineté qui, appartient à la nation entière ; sauf le droit de pétition.», ,
Il faut ôter : sauf le droit de pétition, et mettre : mais tous ont le droit de pétition.
J'adopte l'amendement.
J'ai à proposer un amendement. D'après votre déclaration des droits, on a persuadé au peuple qu'il existait des sociétés Légales, mais que je regarde, moi, non seulement comme illégales, mais comme très dangereuses. (Rires à gauche)
En conséquence," je propose que toutes ces sociétés, et particulièrement celleis vulgairement connues sous le nom de clubs, soient supprimées.
Plusieurs, membres à droite appuient la motion.
Plusieurs membres demandent l'ordre du jour.
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour sur la proposition de M. Foucault-Lardimalie.)
Puisqu'on passe à l'ordre du jour, n'espérêzpas avoir la tranquillité, dans le royaume, tant que vous aurez le club des Jacobins.
Je demande gue l'on ajoute â llar-ticle ces mots : les assemblees primaires, les as-sembées électorales, les municipalités et.les tribunaux:
Je .propose d'éteindre cet amendement-à toutes les sections - délibérantes et ée dire: « et aucune seelion du peuple, sous quelque dénomination qu'elle s'assemblé. »
Un membre : Je demande qu'après .les mots :
mais tous auront le droit de pétition, il soit ajouté : suivant les formes qui seront décrétées, paçce que je peose que cette forme peut faire la matière d'une loi qui n'est pas faite et qui est très importante. (L'Assemblée ferme la discussion.)
Voici comment l'Assemblée pourrait décréter l'article :
« La souveraineté étant une, indivisible et appartenant à la nation entière, aucune administration de département ou de district, aucune municipalité, aucun tribunal, aucune commune ou section de commune, aucune assemblée primaire ou électorale, non plus qu'aucune section du peuple ou de l'Empire, sous quelque dénomination que ce soit, n'a le droit et ne peut exercer aucun acte de la souveraineté; mais chaque citoyen individuellement a le droit de pétition, dont il pourra faire usage suivant les formes qui sont ou qui seront décrétées. »
Plusieurs membres demandent la question préalable et ie renvoi à FInstruction.
Je mets aux voix la question préalable.
(La question préalable est rejetée.)
J'appuie la seconde partie de la motion et je demande le renvoi de la rédaction proposée à l'Instruction.
Un membre demande la question préalable sur cette motion.
(Le renvoi à l'Instruction est rejeté par la question préalable.)
Un membre : De la rédaction qui vous est présentée, on conclurait que les citoyens individuellement ont seuls le droit de faire des pétitions ; je demande qu'on supprime dans l'article le mot individuellement et qu'on étende ainsi le droit de pétition aux citoyens réunis en corps.
J'appuie l'obeer val ion du préopinant et je l'appuie par un article de vos^décrets; c'est un article du décret sur les municipalités, qui donne non seulement à chaque citoyen isolément, mais encore aux citoyens réuuis, le droit de faire des pétitions.
Un membre : Tout le monde est d'accord sur ce point.
Je demande donc la suppression du mot individuellement.
, rapporteur. J'adopte l'amendement.
Messieurs, je dois dire que M. Tronchet admet cette demande.
Le comité de Constitution admet aussi la proposition de M. Rewbell.
, rapporteur. Voici donc quelle serait la rédaction de l'article : « L'Assemblée nationale décrète ce qui suit :
Article premier.
« La souveraineté étant une, indivisible et
appartenant à la nation entière ; aucune administration de département ou de district, aucune municipalité, aucun tribunal, aucunecommnneou 8ectio i de commune, aucune assemblée primaire ou électorale, non plus qu'aucune section du peuple ou de l'empire, sous quelque dénomination que ce soit, n'a le droit et ne peut exercer aucun acte de la souveraineté;.mais chaque citoyen a le droit de pétition, dont il pourra faire usage suivant les formes qui sont, ou qui seront décrétées. » (Adopté.)
Art. 2. (Art. 1er du projet.)
« Les citoyens qui assisteront aux audiences des juges de paix, à celles des tribunaux de district, des tribunaux criminels, de ceux de police et de commerce, se tiendront découverts, dans le respect et le silence. Tout ce que les juges ordonneront pour le maintien de l'oidre sera exécuté ponctuellement à l'instant même, i
Il est dans l'esprit de la Constitution que les procédures soient publiques; il faut donc que, dans les séances de référé qui se tiendront chez le président ou chez un juge particulier du district, les portes Soient ouvertes à ceux qui voudront s'y présenter.
Je crois qu'il n'est pas dans l'esprit du nouvel ordre judiciaire, qu'il y ait des référés chez aucun juge particulier/Tout doit se faire à la Chambre du conseil.
Plusieurs membres : La question préalable.
Je retire mon amendement.
(L'article 2, ancien article 1er, est adopté.)
Art. 3. (Art. 2 du projet.)
« Si un ou plusieurs des assistants interrompent le silence, donnent des signes publics d'approbation ou de désapprobation, soit à la défense des parties, soit au jugement, causent ou excitent du tumulte de quelque manière que ce soit, et si, après l'avertissement des huissiers, ils ne reulrent pas dans l'ordre sur-le-champ, il leur sera enjoint de se retirer ; et dans le cas où quelqu'un opposerait à cette injonction la moindre résistance, les réfractai-res seront saisis aussitôt et déposés dans la maison d'arrêt, où ils demeureront 24 heures. » (Adopté.)
Un membre demande, par amendement à l'article 4, d'ajouter après les mots : officiers de justice, ceux-ci : dans l'exercice de leurs fonctions.
(Cet amendement est adopté.)
L'article est rédigé comme suit :
Art. 4. (Art. 3 du projet.)
« Si quelques mauvais citoyens osaient outrager ou menacer les juges et les ollièiers de justice dans l'exercice de leurs fonctions, les juges feront saisir à l'instant les coupables qui de suite seront déposés dans la maison d'arrêt. Les juges les interrogeront publiquement dans les 24 heures, et pourront les condamner, par voie de police corectionnelle, jusqu'à huit jours de détention, selon la nature des circonstances. » (Adopté.)
Art. 5. (Art. 4 du projet.)
« Si les outrages étaient d'une telle gravité qu'ils
méritassent peine afflictive ou infamante, lps coupables, saisis et interrogés dans les vingt-quatre heure-, seront renvoyés dans la maison a'arrêt pour subir les épreuves de l'instruction criminelle ; et, s'ils sont convaincus, ils seront punis selon toute la rigueur des lois. » (Adopté.)
Art. 6:(Art. 5 du projet.)
« Les assemblées délibérantes des municipalités et des administrations, s'il s'y trouve quelques assistants éirangers, exerceront, dans le lieu de leur séauce, les mêmes fonctions de police qui viennen' d'être attribuées aux juges. Après avoir fait saisir les perturbateurs, aux termes des articles 3 et 4 ci-dessus, les membres de ces assemblées dresseront procès-verbal au délit, et le feront parvenir au tribunal qui suivra, pour l'interrogatoire et le jugement, ce qui est prescrit dans les articles 4 et 5. » (Adopté.)
Un membre propose de retrancher ces mots de l'article 7: tout mouvement populaire excité.
(Cette motion est rejetée par la question préalable.)
Un membre propose, par amendement au même article, d'ajouter après les mots: autorisés par la loi, ceux-ci : et ordonnés par jugement.
(Cet amendement est adopté.)
L'article est rédigé comme suit :
Art. 7. (Art. 6 du projet.)
« Toute rébellion des ciloyens, avec ou sans armes, contre l'exécution des mandements de justice, saisies-exécutions, ordonnances de prise de corps, contraintes par corps autorisée* par la loi et ordonnées par jugement ou mandement de justice; toute Violence exercée et tout mouvement populaire excilé contre les ofticiers municipaux, administrateurs, juges, officiers ministériels, dépositaires de la force publique e;i fonctions, sermt poursuivis contre les prévenus, par la voie criminelle, et punis selon toute la rigueur des lois. » (Adopté.)
Ait. 8. (Art. 7 du projet.)
« Les officiers ministériels chargés de l'exécution des jugements, mandemen s, saisies, ordonnances et contraintes par corps, contre un citoyen, lui présenteront une baguette blanche, en lè sommant d'obéir. Aussitôt après l'apparition de ce signe de la puissance publique, toute résistance sera reputée rébellion. » (Adopté.)
Art. 9. (Art. 8 du projet.)
« Si des fonctionnaires publics ou officiers ministériels d'exéc ition sont insultés, menacés ou attaqués dans l'exercice de leurs fonctions, ils prononceront à haute voix ces mots: Force à la loi. A l'instant où ce cri sera entendu, les dépositaires de la force publique et même tous les citoyen* sont obligé*, parlaConsiitu ion,de prêter main-forie à l'execution des jugements et contraintes, et de régler leur action sur l'urdre de Phomuie public, qui seul demeurera responsable. »
Je demande à faire un amendement : c'est d'excepter de prêter main-forte le juge ou l'administrateur qui se trouvera sur les lieux et qui aura rendu l'o donnance en vertu de laquelle on agit. (Murmures.)
Plusieurs membres : Aux voix !
(L'article 9 est décrété sans changement.)
Art. 10. (Art. 9 du projet.)
« Si un fonctionnaire public, administrateur, juge, oflicier ministériel d'exécution, exerçait sans titre légal quelque contrainte contre un citoyen; ou si, même avec uu titre légal, il employait ou faisait employer des violences inutiles, il sera responsable de sa conduite à la loi, et puni sur la plainte de l'opprimé, portée et poursuivie selon les formes prescrites. » (Adopté.)
Je propose un amendement à l'article 11.
Il est malheureusement connu que,quand une loi n'est lue qu'une fois, elle reste ensuite dans la poussière du greffe, en sorte que les citoyens n'en ont pas connaissance. Celle-ci est la base et le complément de la Constitution, parce que, sans respect à la loi, il n'est pas de Constitution.
Je demande donc que la loi que vous décrétez soit lue aux prônes des p iroisses, publiée et-aflichée, de nouveau, tous les ans.
(Cet amendement est adopté.)
L'article est rédigé comme suit :
Art. 11. (Art. 10 du projet.)
« Le présent décret sera lu et publié aux prônes de tou'es bs églises paroissiales et succursales, pendant trois dimanches consécutifs, par les curés, vicaires ouautresecclésiastiques;il sera solennellement proclamé et affiché aux portes des églises, à l'entrée des maisons communes, dans les rues, carrefours et places publiques, par ordre des ofticiers municipaux. Il sera et demeurera affiché dans les auditoires de justice, de police et de comm rce, dans les maisons des juges de paix et dans les lieux d'asse ublées des municipalités, conseils généraux des communes, administrations et directoires de département et de district. 11 sera lu de nouveau chaqu année aux prônes des paroisses, publié et affiché. « (Adopté.)
Messieurs, voici une quantité de paquets que les administrateurs (le la poste viennent de me faire parvenir ; ils sont remplis d'écrits antipatriotiques.
Je demande à l'Assemblee ce qu'il faut en faire.
Un membre : Il faut les jeter au feu.
Je demande comment la poste a appris que c'étaient des écrits antipatriotiques.
On vient de me rendre compte que ces paquets étaient tous contresignés Assemblée nationale. C'e.-t en les portant que l'un d'eux s'est ouvert et cela n'est pas étonnant en voyant de quelle manière ils sont faits; de cette laçon on a consiaié qu'il renlermait une foule d'imprimés incendiaires.
Les administrateurs de la poste, pensant que les autres paquets, dont les adresses paraissent écrites de la même main, renfermaient des écrits de même nature, ont éprouvé de la répugnance à s'en charger et les ont renvoyés à l'Assemblée.
Voilà tout ce dont je puis vous rendre compte.
Ces paquets-là sont
destinés à nôtre département. Je demandé que, sans les ouvrir,.on. les renvoie au comité des recherches pour que, d'après l'adressa, on découvre ceux qtri les ont écrits.
Il serait d'un bien dangereux exemple que, sous le prétexte d'Un envoi qur a1 pour objet des écrits aristocratiques ou antipatriotiques, comme od voudra les nommer, on se permette de violer le secret des lettres.' Certainement, si l'administration des postés s'arroge le droit d'arrêter des paquets, sous prétexté qu'ils contiennent des écrits antfpatrio-tiques, il n'y a pas de raison pour ne pas-en user de la même manière à Pégard des éerits patriotiques.
Si l'Assemblée disposait de ces paquets, elle donnerait elle-même l'exemple de la violation du secret des lëttres.
Je demande que. les paquets soient renvoyés au dépôt d'où on les1 a enlevés; (Applaudissements.)
Vainë. J'appuie la motion du préopinant; je propose toutefois, par amendement, de taxer les paquets. Ce sera une sorte de peine infligée à ceux qui font servir le contre-seing de l'Assemblée nationale à des correspondances anticiviques;
M. Bouche est chargé, au nom des commissaires de l'intérieur, de présenter un règlement pour remédier aux abus des contreseings. Je demande que ce règlement soit mis à l'ordre du jour de1 la prochaine' séance du soir.
Je propose que chaque- député contresigne lui-même son paquet en le remettant au bureau.
Plusieurs membresobservent que cette mesure aurait de grands inconvénients; qu'elle faciliterait la supposition dés signatures et que des malveillants couvriraient du nom d'un patriote leurs mauvais desseins et leurs correspondances.
Je demande la question préalable sur la motion de M. de Menou.
Je retire ma motion.
(L'Assemblée rejette l'amendement de M. Garat l'aîné et décrète la motion de M. Robespierre.)
L'ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur les émigrations.
, au nom du comité de Constitution. Messieurs, votre comité de Constitution, pour remplir la tâche que vous lui avez imposée de vous soumettre un projet de loi sur les émigrations, a dû examiner avec une sérieuse attention si les principes de votre Constitution, si ces principes-conservateurs de la liberté et de lTordre public, s'aceordaient avec une loi sur les émigrations ; il a dû surtout chercher dans les maximes de votre Constitution, dans les décrets que vous avez déjà rendus; s'il trouvait quelques principes ou quelquésbases à cette loi.
Votre comité doit commencer par convenir du résultat de ses; recherches; Ce n'est pas en suivant les principes que vous avez décrétés, qu'une loi pareille peut être formée ; au contraire, attendez-vous, si vous nous ordonnez d'en montrer le projet, . qu'il blessera directement les principes de votre j
Constitution, qu'il sera contraire aux droits; de l'homme que vous avez déclarés.
Darrs les1 efforts que nous avons faits pour remplir la mission que vous nous aviez donnée, nous avons successivement préparé plusieurs projets de loi. Nous avons* vu bientôt que plus nous travaillions et.plus, nous rencontrions la nécessité de former des exceptions au projet de loi que nous faisions. Car nous n'avons pas pensé qu'il fût possible, en interdisant lès émigrations oa en rappelant les Français qui sont hors dà royaume, d'étendre cette loi aux étrangers quii: voyagent en France, ainsi qu'à la liberté qu'ils' doivent avoir d'en sortir.
Nous n'avons pas pensé encorequ'il fût possible; sans détruire'toutes les parties de notre industrie et.sans t arrêter'lè commerce; de se dispenser de prononcer une exception- en faveur des commerçants pour fait de leur commerce ; ainsi voilà encore une exception à proposer, à établir par la loi.
A mesure que les exceptions se multipliaient à nos yeux, les difficultés d'exécution de la loi se multipliaient également. Dans les pays étrangers, il n'est pas possible que la puissance française fasse des proclamations. Nous n'avons donc pas pensé qu'il fût possible d'enjoindre aux agents du. pouvoir exécutif de notifier personnellement à chaque Français qu'on veut appeler, l'injonction qui serait faite par la loi; et cet ordre, qui serait donné au pouvoir exécutif, nous a paru presque impossible dans son exécution; car, comme les ambassadeurs ou les envoyés ne connaissent pas tous les Français, ils notifieraient peut-être à ; l'homme qui es't étranger, ou dans les armées des puissances étrangères, ouqui s'occupe à son commerce, ou même qui est naturalisé dans les pays; étrangers, un ordre que vous n'avez pas l'intention de lui donner.
Ainsi, Messieurs, cherchant toujours à concilier les principes, et trouvant toujours que qcus les violions, ledernier parti auquel nous noussommes déterminés,c'est de rédiger, puisque vous l'exigiez, un projet de décret; mais vous êtes prévenus que j ce décret est hors des principes et que c'est une i véritable dictature.
D'après cet exposé du comité; de Constitution er"> et avant que nous ne vous fassions lecture de ce projet de loi, nous vous prions de décider préalablement si vous voulez qu'il vous soit présenté.
Plusieurs voix : Non! non!
D'après l'aveu qui vient de vous être fait, au nom du comité de Constitution, je ne crois pas qu'il y ait un seul membre dans l'Assemblée qui veuille l'engager à adopter une loi qui serait contraire à tous les principes de la Constitution et de la liberté publique : j'ajouterai qu'il est extrêmement instant que l'Assemblée prenne une délibération à cet égard.
Le simple projet d'une loi coDtre.les émigrants intimide déjà les étrangers qui voulaient s'établir en France et y acheter des biens nationaux. (Murmures à gauche.) Toute loi contre les émigrations paraîtra sans doute à l'Assemblée un moyen de les augmenter Ce qui empêchera les émigrations, ce qui fixera les étrangers en France, ce sera le rétabl ssement de l'ordre. (Applaudissement* unanimes.) Liberté et protection à tous ceux qui ne troublent pas l'ordre public, voilà la loi.que vous demande 1 intérêt général.
Je demande donc, Messieurs, que M. le Président soit chargé de se retirer par devers lé roi, pour
prier Sa Majesté de donner les ordres les pins précis aux départements, à tous les cqrps administratifs, de protéger la liberté des voyageurs, soit dans l'intérieur duroyaume, sait àA'extépieur.
Je demande quo, tant sur la loi, proposée, que sur là motion qui vient d'être faite, on passe à l'ordre du jour,
Moi, je demande la question préalable sur le projet de loi qu'on nous annonce-
Sur le fond,»4e n'àî rien à dire ^ s'il s%git 4'unîe. motion d'ordre»je ne réclame pas la question préalable; mais je demande que le premier article de la loi défroisse clairement ce que c'est que l'émigration.
Je, commence par déclarer avec franchise que je ne suis pas plus que M. lie Chapelier partisan ae la loi sur les émigrations; mais c'est par une discussion solennelle qui dissipe les nuages qui peuvent être répandus sur cptte qu,estiqn que vous devez reconnaître l'impossibilité ou lés dangers d*uHé telle loi ; il ne faut laisser à personne le prét,ex,te de penser que vous ayez écarté cette mesure par d'autres moyens que ceux de la raison et de l'intérêt public. (Applaudissemeftis-)
(de Saint-Jean-dvÂngêly). A l'instant oti 1h comité vous dit qu'il lui a été impossible de faire un projet de loi,qui n,e blessât pas les principes ; à l'instant où personne ne se lève, pour discuter cette question, et pour dire que je conçois une loi qui . n'outrage m la Constitution ni la liberté, il n'y a rien dé mieux à faire que de passer à l'ordre du jour.
Je ne prétends pas être celui qui vous apporte cette loi, mais certainement il est impossible de convaincre de cette incompatibilité le peuple qui nous entend. (Murmures.) Messieurs du comité croient qu'il est impossible d»-respecter les principes en faisant une ioi contre l'émigration. Eh bien, je demande que, S'il est impossible qu'il se présente une- circonstance où une loi de cette nature soit indispensable »le comité nous présente le projet qu'on lui "a demandé et qu'on démontre ensuite l'impossibilité de décréter cette loi.
La question qui se présente ne peut pas, ce me semble, souffrir de difficulté dans l'Assemblée» Le comité vient à la tribune; il nous déclare qu'après avoir approfondi la question*, après l'avoir examinée sous tous les points de vue, il n'a pas pu trouver un projet de loi qui fût conforme aux principes de la Constitution. Après cela l'Assemblée peut-elle, sans se déshonorer, entendre un projet de loi (Murmures),.. oui, Messieurs, sans se déshonorer, un projet de loi que le comité de Constitution annonce d'avance être contraire à tous les principes? (Applaudissements à droite et dans une partie de la gauche,) Je soutiens qu'elle ne le peut pas.
On dit qu'il faut examiner...
11 fàut lire le projet.
Est-il possible qu'un membre attaché àla* Constitution demander qu'on lfàe un semblable projet de loi?
Qui, Monsieur.
Je demande qu'on mette à l'ordre M. Girod, qui a pris à tâche de m'interrompre.
On drt que ce projet de loi n'est pas connu ; mais ne suffit-il pas que le comité lui-même «nous annonce ge§ vices?.,.
Plusieurs membres à gauche : Non ! non!
J'interpelle les membres de cette |Assemblée; s'il en est un qui veuille soutenir qu'un projet de loi contre les émigrants est compatibles avec la Constitution...
Plusieurs membres à gauche : Oui! oui!
, Puisque vous le' penses, propo-| sez en une>
, Je demande à répondre à M. d'An-dfâ.
Oui, Monsieur?, vous me ré* pondrez.
Je demande que, sans*s'arrêter davantage à des avis qui blessent la Constitution, en détruisant la liberté,-je demande, dis-je : 1° qu'on ne lise i pas le pnojet de, décret proposé par le comité ; | 2° que la sanction diu décret rendu, il y a quelques jours, sur la- résidence des fonctionnaires publics-, soit, sollicitée avec la plus grande dilb-geqne, Sur tout le reste, je demande l'ordre du jjour.
Je demande la parole.
Je demande à répondre à l'inter-j pellation de M. d'André.
Quatre personnes ont de-; mandé la parole avant vous.
Plusieurs membres : M. d'André a- fait une iu-j terpellaiion à laquelle il faut répondre^
Je citerai à' M. d'André une auto-^ rité qui en vaut bien une autre. J.-J. Rousseau, dans son Contrat social, a posé comme maxime fondamentale que, dans les temps de trouble, les émigrations, pouvent être défendues. Je n'ai pas \ médité, il est vrai, le projet de loi dont la possibilité est démontrée par cette seule assertion: mais de ce que J.-J". Rousseau a cru possible qu'un corps politique pouvait défendre les émigrations dans un temps de trouble, j'en conclus tout au moins qu'un bon projet de loi sur cette matière n'est pas impossible.
Je demande donc que le projet de votre comité soit lu, i nprimé et ajourné. Si après un délai quelconque, un délai quei l'on peut fixer à huitaine, l'Assemblée nationale trouve que cette possibilité, énoncée par J.-J. Rousseau, est chimérique, alors j'abandonne mon espoir : elle déclarera qu'il n'y a pas lieu à délibérer au sujet d'une loi sur l'émigration. (Applaudissements « gauche.)
J'ai demandé la parole, Monsieur le Présiflén^
Votre tour n'est pas arrivé. Vous ne pouvez parler en ce moment, à moins que l'Assemblée ne déclare qu'elle veut vous entendre.
Je cède mon tour de parole à M. de Mirabeau.
C'est une motion d'ordre que j'ui à faire, car c'est un décret de l'instant même que je viens présenter. Mais je demande avant t ut une permission à l'Assemblée; je demande de lui dire deux mots qui sont personnels à moi.
Plusieurs membres : Oui! oui!
J'ai reçu depuis une heure, dan« celte Assemblée, des liilletsde toutes parts : la moitié me somme de professer les principes que j'ai dès longtemps manifestés sur la théorie des émigrations, et l'autre moitié provoque une surveillance sur ce qu'on a beaucoup appelé la nécessité et l'empire des circonstances.
Je deu ande dans une occasion où il convient au serviteur du peuple, à un ami de la liberté, qui pour son repos n'a fait que trop de bruit, où il lui convient, dis-je, de prendre couleur d'une manière tiès nette et très prononcée, je demande de lire une page et demie...,. — Ce n'est pas long, Monsiiur le Président; fort peu de discours faits dans cette Assemblée smt aussi courts —.....une page et demie, ni plus ni moins, d'une lettre que j'ai cru devoir adresser, il y a huit ans, au despote le plus absolu de l'Europe; et je cr» is qu'après cela les gens qui cherchent quelques princiies, quelque doctrine dans cette occasion, pourront y trouver des choses raisonnables. Tout au moins personne n'aura plus le droit de jeter du doute sur ma profession de foi à cet égard.
Me permettez-vous, Monsieur le Président?
Plusieurs voix : Oui ! oui !
Voici ce que j'écrivis à Frédéric-Guill.iume, aujourd'hui roi de Prusse, le jour de son avènement au trône:
« On doit être heureux dans vos Etats, Sire; donnez la liberté de s'expatrier à quiconque n'est pas retenu d'une manière légale par des obligations i articulières ; donnez par un édit formel cette liberté. C est encore là une de ces lois d'éternelle équité que la force des choses appe'le, qui vous fera un honneur infini et ne vous coûtera pas la privation la plus légère; car votre peuple ne pourrait aller chercher ailleurs un meilleur sort que celui qu'il dépend de vous de lui donner et s'il pouvait être mieux ailleurs, vos prohibitions de sortie ne l'arrêteraient pas. (Applaudissements à droite et dans une partie de la gauche.) Lais-ez ces lois à ces puissances qui ont voulu faire de leurs Etats u e prison, comme si ce n'était pas le moyen d'en rendre le séjour od eux. Les lois les plus "tyranniques sur les émigrations n'ont jamais eu d'autre effet que de pousser le peuple à émigrer, contre le vœu de la nature, le plus impérieux de tous, peut-être, qui l'attache à son pays.
« Le Lapon chérit le climat sauvage où il est né: comment l'habitant des provinces qu'éclaire un ciel plus doux penserait-il à les quitter si une administration tyranniquo ne lui rendait pas inutiles ou odieux les bienfaits de la nature? Une loi d'affrani his-sement, loin de disperser les hommes, 1rs retiendra dans ce qu'ils appelleront alors leur bonne patrie, et qu'ils préféreront aox pays les plus fertiles; car l'homme endure tout de la part de la Providen e; il n'endure rien | d'injuste de son semblable; et s'il se soumet, ce *
n'est qu'avec un cœur révolté... [Applaudissements.)
Il n'y a plus que dix lignes, Messieurs.
Tant pis.
« L'homme ne tient pas par des racines à la terre; ainsi il n'appartient pas au sol. L'homme n'est pas un champ, un pré, un bétail; ainsi il ne saurait être une propriété. L'homme a le sentiment intérieur de ces vérités saintes; ainsi l'on ne saurait lui persuader que ses chefs aient le droit de l'enchaîner à la glèbe. Tous les pouvoirs se réuniraient en vain pour lui inculquer cette infâme doctrine. Le temps n'est plus où les maîtres de la terre pouvaient parler au nom de Dieu, si même ce temps a jamais existé. Le langage «ie la justice et de la raison est le seul qui pui-se avoir un succès durable aujourd'hui ; et les princes ne sauraient trop penser que l'Amérique anglaise ordonne à tous les gouvernements n'être justes et sages, s'ils n'ont pas résolu de ne dom nei bientôt que sur les déseris.» Et j'ajoute : ou de voir des révolutions. (Vifs applaudissements.)
Je demanue maintenant à présenter mon projet de décret.
J'ai l'honneur de proposer à l'Assemblée, non pas de passer à l'ordre du jour, non pas d'avoir l'air d'étouffer d ans le silence une réclamation qui, de part et d'autre, a eu quelque solennité et que la déclaration du comné de Constitution suffirait pour r» ndre très mémorable, mais de porter un décret en ces termes :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité de Constitution..... » (Murmures prolongés.)
Il y a deux choses qui me paraissent incontestables : la première, c'est queM. Le Chapelier a parlé au nom du comité de Constitution; la seconde, c'est que si j'ai tort on peut le démontrer.
Je reprends la lecture de mon projet de décret :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Constitution, considérant qu'aucune loi sur les émigrants ne lui paraît pouvoir se concilier avec les principes de la Constitution, n'a pas voulu entendre le projet de loi sur cet objet, et a passé à l'ordre du jour sans préjudice à l'exécution des décrets précédemment portés sur les personnes jouis-ant de pensions ou de traitements, et absentes du royaume en ce moment. »
Un grand nombre de membres: Aux voix! aux voix 1
Plusieurs membres: Non ! non ! (Bruit prolongé.)
Ce n'est pas sans un grand désavantage que j'entre en lice pour combattre le comité, renforcé par la lecture que le préopinant vient de faire. Les lois sur les émigrations étaient odieuses sous l'ancien régime. (Rires et mur-mures.) Elles étaient odieuses parce qu'elles existaient pour tous les lieux, pour tous les lemps, pour toute-! les circonstances; elles ne s'exécutaient que contre une certaine classe d'hommes. Les émigrations n'étaient pas défendues en temps de guerre. On obtenait de la cour la permission d'émigrer; mais à quels hommes cette permission était-elle donnée? La loi ne s'exécutait que sur les opprimés. Si on en proposait actuellement de semblables, je m'y opposerais.
On dit en général qu'une loi sur les émigrantsou contre les émigrations est absolument incompatible avec les principes d'une bonne Constitution : moi, je vous soutiens au contraire que, s'il n'y a pas une loi dans de certains cas, il est impossible Sue vous ayez une Constitution. Je ne conçois pas e Constitution que je ne conçoive en même temps une société; je ne concevrai jamais qu'il puisse exister une société sans que les devoirs des associés ne soient réciproques.
Je demande de quel droit mon associé peut exiger que je défende ses possessions de mon corps et démon sang, tandis qu'il fuit et ne veut pas défendre les miennes. Je demande de quel droit il pourrait exiger qne j'aille au secours de sa maison qui brûle, tandis qu'il se sauve quand on brûie la mienne.
N'avez-vous pas décrété, Messieurs, que tout citoyen garde nationale est requis d'aller exposer ses jours pour défendre la propriété des autres citoyens? Allez-vous donc commander la même chose aux émigranis? Croyez-vous donc, Messieurs, que c'est ainsi que vous n'établirez pas la réciprocité des droits? Jesoutiensqne tout corps politique s'écroulera nécessairement bientôt, lorsque les liens ne seront pas réciproques, lorsque vous délierez une partie des citoyens pour n'astreindre que les autres à la loi. Si vous voulez as#urer l'exécution de vos lois, il faut que mon voisin soit astreint aux mêmes devoirs que moi. Si je suis obligé ie voler à la défense de son champ, il doit être obligé de voler à la défense du mien. (Applaudissements à gauche.) Si les émigrants se plaignaient de voir marcher avec peu d'activité au secours de leurs possessions, ne leur dirait-on pis: je suis libre de vous lai.-ser piller, incendier. (Murmures.) Voilà ce que demandent les partisans des émigranis. Point de loi sur les émigrations, c'est permettre l'incendie et le meurtre.
C'est, nous dit-on, attenter à la liberté. Mais Messieurs, les Athénien-? étaient-ils libres? Eh bien, Messieurs, lisez les lois de Solon; elles vous apprendront que tout citoyen qui ne prenait pas parti dans une émeute était regardé comme un traître et puni comme tel. (Applaudissements.)
Je soutiens que dans un moment où l'on fait des enrôlements et des mouvements précisément pour ces émigrants, faits dont nous avons la preuve littérale qui vous sera dénoncée incessamment, je soutiens que dans un moment comme celui-là, tout citoyen qui, à ia voix de sa patrie, ne rentre pas dans si-s foyers, ne doit espérer aucun secours de sa patrie et de ses concitoyens et renonce à la protection que la société assurait à ses propriétésetà sa personne. (Applaudissements à gauche.)
Sans doute.....
Si la discussion n'est pas fermée, la parole m'appartient.
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée.
La discussion ne peut pas être fermé3; jamais une question d'une aussi haute importance ne fut agitée dans cette Assemblée. Je défie aucun citoyen français de désavouer les principes ce réciprocité aéveloppés par le préopinant. Ces principes sont les fondements essentiels de toute Constitution ; et sans eux, une société ne peut exister. (Applaudissements.)
Voyez en cet instant l'opinion publique. (Murmures.) Lorsque, d'un bout de l'empire à l'autre, la doctrine ou plutôt, si vous voulez l'appeler autrement, le préjugé sur les émigrations est universel ; lorsque, d'un bout de l'empire à l'autre, il n'est pas un citoyen français qui, prêt à répandre son sang pour la patiin, pour la conservation de la propriété de ses concitoyens, ne voie avec indignation ou de lâches citoyens ou des factieux aller onspirer contre la patrie (Vifs applaudissements à gauche et dans les tribunes.)... peut-on abandonner sur-le-champ une loi qui peut produire les meil'eurs effets?
Cependant, si d'un côté je partage l'opinion publique, de l'autre je crois que ce serait peut-être mettre la patrie en danger que de rappeler dans son sein tous les doyens lâches ou lesfac-tieuxquiont osé conspirercontre elle.(Vifsapplaudissements à gauche et dans les tribunes.)
Je demande que les tribunes soient chassées.
Silence, silence dans les tribunes !
Je m'attendais que le comité nous présenterait une loi quelconque : il vient nous dire que cette loi ne peut être que hors des principes et de la Constitution; mais ia loi demandée n'a pas d'antre obj t que d'établir les obligaiions réciproqu s des citoyens envers eux et la patrie. Celui qui a la lâcheté d'abandonner ses concitoyens ne mérite pas leurs secours. Nous sommes entre de grands principes et de grands inconvénients; mais n'esi-il pas à propos d'examiner les conséquences de l'application de ces pri cipes?
C'est d'après cela que je demande que le comité nous li e, quelle qu'elle soit, la 1 i qu'il nous a dit avoir faite. Nous l'examinerons et, si elle est par trop mauvai-e, nous la rejetterons. (Applaudissements à gauche.)
Un grand nombre de membres demandent, que de nouveau, la discussion soit fermée.
Je demande la parole.
On demande de toute part que la discussion soit fermée.
(L'Assemblée forme ia discussion.)
Les différentes propositions consistent dans ta demande de l'ordre du jour, de la lecture du projet de loi et de l'ajoufriement.
Je réclame la priorité pour la motion de M. de Mirabeau.
Et moi pour la lecture de la loi.
L'ajournement a la priorité de droit.
Monsieur le Président, vous n'avez pas rappelé ma motion; elle a trois objets : la lecture de la loi, l'impression et l'ajournement à huitaine. (Applaudissements à gauche.)
Dans une question qui partage l'Assemblée, qui présente une si grande importance et sur la juelle le comité lui-même a eu deux avis différents; dans un moment
où l'intérêt national, celui du commerce et des manufactures sollicitent une loi contre les émigrations ; dans un moments où' le vœu général (Murmwes et applaudissements.)..*..
Ce vœu respectable mérite au. moins d'être pris en considération.
Dans un moment, dis-ie, où le vœu général de la nation nous demande de prendre tous les moyens qui peuvent empêcher les émigrations, il est de notre devoir, il est de notre sollicitude, je ne dis pas de décider, mais au moins de permettre à toutes les personnes qui ont des moyens à proposer, de lès présenter. La motion de M. Merlin répond précisément à cet objet et réserve l'exercice de cettefaculté. (Murmures.)
Si, sur une loi qui intéresse la nation entière, on veut étouffer la voix de ceux qui, uniquement occupés des droits du peuple, défendent sans cesse ses* vrais intérêts... (Interruptions.)
Je demande si ces Messieurs ont droit de parler; j'ai renoncé à la parole, parce que la discussion était fermée.
Je vous prie, Monsieur, de vous renfermer dans la question de priorité.
Eh bien, Messieurs, puisque l'on m'interrompt), cen'est plus moi, c'est votre comité de Constitution qui va se répondre à lui-même. J® vais opposer aux principes qu'il vous présente aujourd'hui, ceux qu'il a professés dans la séance de vendredi. Je lis dans son rapport imprimé le passage suivant :
« Le travail que nous* vous soumettons aujourd'hui n'est cependant qu'une portion' de celui qu'embrasse:cette matière. Pour fixer complètement l'état et les obligations des membres de la famille du roi, il flaut non seulement dire quels sont ceux d'entre eux qui, comme>fbnotioniïaires pwblicsj ou prochainement appelés à le devenir, sont assujettis à la résidence ; mais encore déterminer les règles qui seront suivies pour la régence et l'éducation de l'héritier présomptif ou du roi mineur.
« Sous fort peu de jours, nous vous apporterons ces projets de loi, et plus promptement encore nous vous soumettrons un projet de décret sur les émigrants.
« Cette dernière loi est aussi nécessaire que les autres, et la liberté ne s'en alarmera pas. (Vifs applaudissements à gauche.) H faut distinguer le droit qui appartient à l'homme èn société, d'aller, de venir, de partir, de rester, de fixer son domicile où bon lui semble, et le délit qu'il commet quand, pour exciter...
Nous connaissons ce rapport.
«... ou pour fuir lâchement les troubles de sa patrie, il en abandonne le sol ; l'ordre ordinaire est alors dérangé, les lois qui lui conviennent, ne sont plus les lois applicables, et comme dans un moment d'émeute la force publique prend Ja place de la loi civile, ainsi dans le cas d'émigration, la nation prend des mesures sévères contre ces déserteurs coupables qui ne peuvent plus prétendre ni à ses bienfaits pour leurs personnes, nt à sa protection pour leurs propriétés.
« Nous sentons et la;justice et l'urgence de cette loi ; nous n'en ferons pas attendre le projet; ce sera encore une loi constitutionnelle, mais qui,
comme la.loi martiale, ne sera applicable qu'à ces moments de désordre et d'incivisme qui en solli* citeront l'application. »
, rapporteur. Je demande la parole.
Nous ne demandons que la justice. Je demande, d'après les prinr-cipes démontrés du comité de Constitution, comh ment nous pouvons ainsi, sans discuter, rejeter une loi aussi importants, qui nous est présentée et demandée par la nation entière.
Quelle est donc cette conduite étrange de votre comité? Quel est donc ce langage étonnant? Quelle est cette instabilité de principes? (Applaudissements.) Votre comité a changé deux fois d'avis ; il peut en changer encore. Qu'il nous permette donc au moins de comparer ses principes les uns iavee les autres ; qu'il nous laisse le temps de réfléchir et de chercher la vérité' à travers cette flexibilité d'opinions; Il faut que nous sachions au: moins auquel nous devons donner notre confiance, à M!. Le Chapelier d'aujourd'hui ou à M. Le Chapelier de vendredi dernier.
Jè demande donc la priorité pour la motion de M. Merlin. (Vifs applaudissements à gauche et dans les tribunes.)
Monsieur le Président, je vous recommande les tribunes.
, rapporteur. Il est peut-être assez bizarre que les mêmes personnes qui demandaient l'autre jour une loi provisoire, et : voulaient que nous la rendissions sans désemparer, veuillent aujourd'hui un ajournement à huit jours sur la même question. (Murmwes à gauche.)
Maintenant voici ma profession de foi. Le co-i mité de Constitution, assemblé'en entier pour délibérer sur la loi que vous lui aviez ordonné de : présenter, a adopté unanimement le discours qu'il ; vous a fait par ma bouche, lorsqu'il vous proposa le projet de loi sur la résidence des fonctionnaires I publics. Nous étions alors sans avoir fait aucun examen d'une loi sur les émigrations ; je-partageais, je l'àvoue, l'opinion de ceux qui croient à la possibilité de cette loi, parce que'mon examen ne s'était pas porté avec mes confrères sur cet ! objet. (.Murmuresv)
interrompt.
, rapporteur. Je n'ai point interrompu M. Muguet quand il a parlé; je le prie de me laisser m'explîquer:
Je partageais. di§-je,. alors l'opinion de ceux : qui croient qu'il e'st possible de concilier une ; loi sur le3 émigrations avec les principes de la ' Constitution et les intérêts du commerce.
Depuis, nous nous sommes assemblés fous | pendant deux jours ; moi, j'ai cherché plus qu'un autre à tourner et à retourner tous les articles qui pouvaient (Rires et interruptions,)...
Messieurs, que veulent dire ces interruptions ? , Est-ce une raison?
J'ai cherché, dis-je, à tourner et-à retourner l tous les articles qui pouvaient former un projet1 i de loi digne de votre sagesse et surtout dont {l'exécution fût praticable; car il me parait que* î l'on ne doit jamais porter une loi qui soit farcie* ! si j'ose m'exprimer ainsi, d'un si grand nombre ' d'exceptions, qu'alors elle devient une loi inu-! tile et qu'elle ne semble plus avoir été rendue
que par la force des circonstances sans apporter aucun profit à l'Etat.
Eh bien, nous avions d'abord fait ce projet; mais, comme je vous l'ai expliqué, il y avait des exceptions si multipliées, si évidemment nécessaires, que nous1 sommes convenu^que son» exécution était impossible et qu'en même temps que nous avions cherché à ménager les principes de la Constitution et de la liberté, nous les détruisions.
Nous avons alors rédigé, comme je vous l'ai dit, un projet qui est hors de la Constitution* qui est hors de tous les principes, qui établit une véritable dictature. Nous vou3 avons demandé vos ordres pour le lire ; si l'Assemblée l'ordonne nous le lirons.
Voix diverses à gauche : Lisez 1 lisez ! non 1 non !
, rapporteur. Peut-être serez-vous étonnés, effrayés par le despotisme et l'arbitraire qui en sont inséparables ?
Plusieurs membres à gauche : Éh bien, nous la referons.
, rapporteur. Après cette déclaration qui doit paraître d'autant moins suspecte que tous les membres ducomltésesont accordés pour la faire, et que par notre premier discours nous avions annoncé notre penchant à vous présenter une loi sur une matière aussi délicate, nous n'avons pas été étonnés de voir aujourd'hui la très grande majorité refuser la lecture d'une loi Contraire à la Constitution, et qui; n'est propre qu'à répandre de grandes alarmes.
Je partage l'avis de ceux qui demandent la priorité pour l'opinion de M. de Mirabeauvet j'observe qu'un ajournement' à cet'égard serait extrêmement dangereux. Il ne faut pas laisser flotteriez esprits dans l'incertitude de savoir si l'on féra une loi sur lès émigrations. Il m'est démontré que cette loi serait aussi funeste quHnconve-nable dans les circonstances actuelles-,
Plusieurs membres demandent la parole sur la priorité.
J'ai déjà eu tort d'accorder la parole sur la priorité, car, suivant le règlement, là priorité appartient de droit à l'ajournement proposé par M. Merlin. On a demandé la division de cette proposition.
C'est moi, Mon-sieur le Président, et je demande là parole. Je crois que la priorité doit être accordée à la motion de M. Merlin; mars j'en demande la division.
Je ne conçois pas comment on; peut demander d'ajourner une loi que l'on ne connaît pas; si l'on demandait l'ajournement d'une loi quelconque sur les émigrants, je ne partagerais pas cet avis, mais je lé concevrais. Je demande donc que le prôjet "de loi du comité soit lu, et qu'on ne délibère qu'après cette lecture. Je pense, avec plusieurs préopinants et avec les vrais amis de la liberté; que c'est une mauvaise chose qu'une loi contre les émigrantsr mais aussi je crois que c'est un crime de déserter son. poste au milieu des dangers de la patrie; et chacun a son poste. Il faut donc prendre contre les émigrants toutes les1 mesures possibles; mais aussi il faut écarter
de ces1 mesures tout ce qu'il pourrait y avoir d'arbitraire et de tyrannique. Avant de rejeter une loi dont l'objet est bon, on doit.supposer que leSi moyens sont mauvais; et pour faird cette supposition et pour apprécier ces moyens, on arbe-soin de connaître le projet de cette loi. Je ne conçois donc pas comment on. peut se^ refuser à entendre la lecture de la; loi que votre comiié vous- a préparée.
Le comité de Constitution a eu raison de faire précéder sa lecture des: réflexions qu'il nous, a exposées; car lorsqu'on a l'honneur d'être le comité de Constitution et que l'on vous apporte une loi dans laquelle les principe» constitution>-nels peuvent être blessés par la nécessité des circonstances ou pan la nature même des chosesy je crois qu'on doit en quelque sorte demander & l'Assemblée la permission de présenter un. semblable projet.
Mais je crois qu'une mesure sur les émigrar tions n'étant pas une mesure destinée à être employée dans les circonstances ordinaires* mais seulement dans des temps de troubles, il serait possible que la Constitution elle-mêcneadmît quelques moyens dérogatoires, et, pour me servir de l'expression de Montesquieu, qu'il y ait des circonstances où il serait nécessaire de jeter uni voile.religieux sur la statue des dieux,, c'esi-à-dire sur l'image de la loi.
Je'Pensedonç qu'en imitant le grand principe de l'homme qui a le mieux connu l'esprit de la; loi, il serait possible; d'y admettre des dérogations : je demande en conséquence que^ conformé ment à la motion de M. Merlin* oh lise le pro^-jet de loi; mais je demande que cette lecture aoit séparée de la motion d'ajournement.
Plusieurs membres: km. voix! aux voiiXil.
Le comité de Constitution...
Je demande à éclaircir un principe de M. de Beaumetz, parce qu'il me paraît dangereux.
Plusieurs membres à gauche : La lecture 1 lalec-turel
Je ne suivrai point l'exemple du préopinant, et je ne ferai pas comme lui une longue dissertation sur le fond, sous prétexte de présenter quelques réflexions .sur la priorité. Je serai religieux sur ce point.
Plusieurs membres à gauche v La lecture !
Le comité de Constitution' vous a dit qu'il ne pouvait dans cette occasion vous présenter qu'Une loi contraire dans sa théorie aux principes delà Constitution-et inexécutable dans ses moyens. Cette vérité...
Plusieurs membres à gauche : La lecture I
Je démande'qu'on me fasse du silence; il y a ici une trentaine de factieux qui se croient autorisés à faire du tapage.
La lecture est-elle contraire à la Constitution ?
Votre comité de Constitution vous a dit qu'il ne pouvaitvousprésenter qu!une loi contraire aux principes de là' Constitution
et dont les moyens d'exécution sont impraticables ; et cette idée est si généralement sentie dans cette Assemblée...
Plusieurs membres à gauche : Non ! non !
.. que, malgré quelques applaudissements mendiés aux tribunes, la très grande majorité s'est d'abord réunie à celte opinion.
Plusieurs voix à gauche : La lecture 1
Une preuve bien sensible de cette vérité, c'est que dans la liste de parole qui est entre les mains de M. le Président, il n'y a personne d'inscrit en faveur du projet ; tout le monde est contre.
On vous a dit avec raison qu'il serait déshonorant pour l'Assemblée de souffrir la lecture d'une loi qu'on vous annonçait d'avance être contraire aux principes de la Constitution. (Murmures prolongés a gauche.)
Je demande que des factieux ne m'empêchent pas de parler, (Murmures prolongés.)
Quand M. d'Eprémesnil est venu lire à la tribune un plan de contre-révolution, on l'a bien écouté.
Je demande que l'on mette aux voix la question de savoir si l'on entendra ou si l'on n'eniendra pas la lecture du projet de loi ; et, pour ma part, je demande, je réclame, j'appuie la négative.
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il sera fait lectuie du projet de loi.)
, rapporteur. \oici le texte du projet de loi :
« Article 1er. — Dans les temps de trouble et
lorsque l'Assemblée nationale aura décidéqu'il y a lieu à la présente
loi, elle sera mise en vigueur pour le temps qui sera déterminé par une
proclamation expresse.
« Art. 2. Il sera nommé par l'Assemblée nationale un conseil de trois personnes qui exer-cerontst ulementsurledroit de sortir du royaume et sur l'obligation d'y rentrer un r ouvoir diciato-rial... » (Murmures prolongés ; bruit.)
Je demande la parole.
, rapporteur. La loi n'est qu'en trois articles; ainsi vous n'aurez pas besoin de beaucoup de patience pour l'entendre. Nous pensons que, s'il peut en exister une, c'est celle-là; car elle seule est exécutable.
Je i élis l'article 2 :
« Ait. 2. Il sera nommé, par l'Assemblée nationale, un con-eilde trois personnes qui exerceront seulement sur le droit de so tir du royaume et sur l'obligation d'y rentrer un pouvoir dictatorial ; il désignerais Français absen s, qui seront tenus de rentrer dans le royaume, sous peine d'être trait s comme rebelles, et il ne sera donné de permission de sortir de France que par la même autorité.
« Art. 3. Les rebelles seront déchus de tous droits de citoyens français ; les revenus de leurs biens seront confisqués; et ils seront de plus déclarés incapables de remplir aucune fonction. > (Tumulte prolongé.)
Plusieurs membres : La question préalable !
Je vous présenterai une loi en quatre articles qui n'aura rien d'inconstitutionnel et surtout qui n'apportera pas un pouvoir dictatorial.
Je demande la question préalable sur cette abominable loi; si vous ajournez un tel projet, si vous laissez en suspens l'oninion que vous devez énoncer sur une pareille matière, vous ferez fuir dans l'instant tous les Français du royaume... (Murmures et applaudissements.)
Je demande la parole.
Plusieurs membres à droite : Qu'on donne la parole à M. de Broglie.
Plusieurs membres : La question préalable.
Demandez 4'ajournement de la question au fond.
Monsieur le Président, rappelez donc à l'ordre M. d?Aiguillon et toutes ces voix qui m'interrompent.
J'entends demander de toute part la question préalable.
Je fais la motion expresse que la chose soit décidée sans désemparer.
Monsieur d'André, j'ai demandé la parole pendant la lecture du projet de loi.
J'ai beaucoup de plaisir à vous entendre parler et je vous cède la parole. Mais, avant de l'abandonner, je prie l'Assemblée de rappeler à l'ordre ces Messieurs (Corateur désigne Vextrême gauche) qui le troublent sans cesse. (Applaudissements.)
La formation de la loi et sa proportion même ne peuvent se concilier avec les ex' és du zèle, de quelque espèce qu'ils soient; l'excès du zèle est aussi peu fait pour préparer la loi, que tout autre ex* es. Ge n'est pas l'indignation qui doit proposer la loi; c'est la réflexion qui doit la porter.
I,'Assemblée nationale n'a point fait au comité de Constitution le même honneur que les Athéniens lirent à Aristide, qu'ils laissèrent juge de la moralité de son projet. Mais le frémissement qui s'est fait entendre à la lecture du projet du comiié a montré que vous étiez aussi bons juges de celte moralité qu'Aristide, et que vous aviez bien fait de vous en réserver la juridiction. Je ne ferai pas au comité l'injure de démontrer que sa loi est digne d'être placée dans le code de Bacon, mais qu'elle ne pourra jamais entrer parmi les décrets de l'Assemblée nationale de France.
Ce que j'entreprendrais de démôntrer peut-être, si la discussion se portait sur cet aspect de la question, c'est que la oarbarie même de la loi nu'on vous propose est la plus haute preuve de l'impraticabilité de cette loi. (Applaudissements à droite et dans une partie de la gauche.)
Plusieurs membres à gauche : Non 1 non !
J'entreprendrai de démon-
trer, et je le ferai si l'occasion s'en présente, que nul autie mode légal, puisju'on veut donner cette épiihète de légal, puisqu'on l'a donnée jusqu'ici du moins à toutes les promulgations faites par les autorités légitimes, qu'aucun autre mode légal qu'une commission dictatoriale n'est possible contre les émigrations.
Cnries, je n'ignore pas qu'il est des cas urgents, qu'il est des situations critiques où des mesures de police sont indispensablemeut nécessaires, même contre les principes, même contre les lois reçues : c est là la dictature de la nécessité ; et comme la société ne doit être considéiée alois que comme un homme tout-puissant dans l'état de nature, certes cette mesure de police do t être prise ; on n'en doute pas. Or, le Corps législatif formera la loi ; dès lors que cette proposition aura reçu la sanct on du contrôleur de la loi, du chef suprême de la police sociale, nul doute que cette mesure de police ne soit tout aussi sacrée, tout aussi légitime, tout aussi obligatoire que toute autre ordonnance sociale.
Mais, entre une mesure de police et une loi, il est une distance immense ; et vous le sentez assez, sans que j'aie besoiu de m't-xpliquer davantage.
Messieurs, la loi sur les émigrations est, je vous le répète, une chose hors de votre puissance, d'abord parce qu'elle est impraticable, c'e-t-à-dire infaisable, et il est hors de vo re sage:-se de faire une loi que vous ne pouvez faire exécuter. Je déclare que, même en anarchisaut toutes les parties de l'empiie, il m'est i rouvé, par la série d'expériences de toutes les histoires, de tous les ternes et de tous les gouvernements de la terre, que, malgré l'exécution la plus tyrannique, la pLs concentrée dans les mains des Busiris, une loi contre les émigrants a toujours été inexécutée, parce qu'elle a toujours été inexécutable. (Murmures et applaudissements.)
Vous sortez de la question.
Une mesure de police, slatuée et mise à exécution par une autorité légitime, est sans doute dans votre puissance. Reste à savoir s'il est de votre devoir de la prononcer, c'est-à-dire si elle est utile et convenable, si vous devez appeler et retenir les citoyens en France autrement que par le bénéfice des lois, autrement que parle seul bienfait de la liberté. Car encore une fois, de ce que vous pouvez prendre une mesure, il ne s'ensuit pas que vous deviez le faire, que vous deviez statuer sur cette mesure de police ; mais je n'entreprendrai pas de le prouver, c'est un tout autre ordre u'idées, et, si je m'étendais davantage sur ce point, je m'écarterais de la question.
La question est de savoir si le projet que propose le comité est délibérable, et je le nie. Je le nie, déclarant que dans mon opinion personnelle — ce que je demanderais à développer si j'en trouvais l'occasion — je serais, et jVn fais serment, délié à mes propres yeux, délié de tout serment de fidélité envers ceux qui auraient eu l'infamie d'établir une inquisition dictatoriale. (Murmures et applaudissements.)
Certes, ta popularité que j'ai ambitionnée (Murmures et applaudissements.) et dont j'ai eu l.honneur ne jouir comme un autre, n'est pas un faible roseau, c'est un chêne dont je veux enfoncer la racine en terre, c'est-à-dire dans l'imperturbable base des principes de la raison et de la justice.
Je pense que je serais déshonoré à mes propres
yeux, si, dans aucun mompnt de ma vie, je cessais de repousser avec indignation le droit, le prétendu droit de faire une loi de ce genre; entendons-nous : je ne dis pas de statuer sur une mesure provisoire, je ne dis pas de statuer sur une mesure de police, mais de faire une oi contre les émigrations et contre^ les émigrants. Une telle loi; je jure de ne lui obéir jamais, si elle était faite. (Murmures et applaudissements.)
Voici le projet de decret que je vous propose :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu la déclaration faite par son comité de Constitution qu'aucune loi sur les émigrants ne peut se concilier avec les principes de la Constitution, passe à l'ordre du jour. » (Murmures et applaudissements.)
Je n'ai qu'un mot à dire. Il s'agit d'une loi contre les émigrants; elle paraît à tout le monde diflicile et elle l'est en effet; mais je vous prie deco sidérer qu'il n'est p is un homme ici qui ose dre que les dis ricts et les départements n'aient pas témoigné la ptus grande sur-piise quand ils ont vu toutes les émigrations. (Applaudissements à gauche.)
Or, Messieurs, je m'aperçois qu'on nous mène par des procédés bien singuliers; comment! on nous présente une loi, mais si barbare, mais 3i ridicule (Vifs applaudissements à gauche.)..., qu'il est impossible d'en délibérer.
Je réunis ces deux idées : il serait à désirer qu'il y eût une loi sur les émigrations, qui pût se concilier avec la Constitution. On nous dit que cela est impossible : tentons à présent celte impossibilité et, pour ce, tenions à présent un moyen simule; le voici : Vous n'avez qu'à ordonner en même temps à tous vos comités de Constitution, des finances, etc., réunis, d'examiner si une loi sur les émigrations peut ou non se concilier avec la Constitution. Si c'est possible, vous adopterez une loi ; si ce n'est pas possible, vous n'y penserez plus. Mais il ne faut pas s'effrayer au seul nom d'impossibilité. (Vifs applaudissements.)
Je demande donc la question préalable sur le projet du comité et qu'il soit ordunné à tous vos comités d'examiner séparément s'il y a lieu ou non à un projet de loi sur les émigrations, et de désigner ensuite des commissaires qui se réuniront pour faire leur rapport mercredi à l'Assemblée. (Vifs applaudissements à gauche.)
Un grand nombre de membres demandent qu'on mette aux voix 1a question préalable proposée sur le projet du comité.
(L'Assemblée consultée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le projet du comité.)
Plusieurs membres demandent la priorité, les uns en faveur de la proposition de M. Vernier, les autres en faveur de celle de M. de Mirabeau.
Je mets aux voix la priorité pour la motion de M. Vernier.
(L'Assemblée consultée accorde la priorité, à cette motion.) (Applaudissements à gauche.)
Les membres du côté droit se lèvent et protestent contre ce vote. (Tumulte.)
et plusieurs membres de la droite : Ce décret a été surpris.
(MM. de Cazalès, Digoine du Palais et plusieurs membres de la droite quittent leurs places, entourent le bureau et interpellent le Président.)
On réclame contre la-manière dont j'ai posé la question; on dit que'ki priorité appartenait 4 la proposition de M. de Mirabeau.
La motion de M. Yernier n'est.qu'uh ajournement; la priorité lui appartenait de droit et l'Assemblée a prononcéqU'etlélui était accordée.
Je demande la parole.
Deux proposition/s sont faites. On réclame -la'priorité pour î'uneei pour l'autre. J'ai entendu1 dire qu'elle appartenait de droit à la proposition de M. Yernier, qui n'est qu'un ajournement. Je pense, moi, qu'elle ne peut l'avoir sur celle de M. de Mirabeau, qui n'est autre chose que la motion de passer à l'ordre du jour. (Violents murmures à gauehe.) Je dois ajouter qu'il 'nous a été impossible d'entente ce que M. le Président mettait aex voix, et je le prie, en faveur1 de cette -partie de l'Assemblée, de vouloir bien parler'en ft-ce»
Je demande la parole.
La délibération est commencée ; on ne peut rouvrir une nouvelle discussion.
C 'est une t espèce ; de dictature s de M. de Mirabeau dans.cetleiAssemblée.
, Un membre : C'est vrai 1
Quelle ëst la dictature (donf parle !M. Gnoupil? Monsieur le Président, faites mettre 'cés^mèssit' urs à l'ordre et à leurs .places,
Je n'ai que trois mots à dire, Monsieur le. Président.
Je demande qu'il me soit pei niis de répondre -à M. de Mirabeau.
Je n? lui ai .point accordé la parole, qtiOiquUl.;soii àk.tribune;elle sera à lui .si l'Assemblée veut l'entendre.
Je prie Messieurs les interrupteurs de remarquer que j'ai toute ma vie combattu le despotisme et, queJ,e le combattrai toute ma vie. (Applaudissements.)
1! Un membre : Ce n'est pas vrai ; Vous l'exercez I
Je prie aussi M. Goupil de se sou\enir qu'il s'est autrefois mépris sur un €àtilina dont il repousseaujourd'huik dictature.
Je prie maintenant 'l'Assemblée-de-considérer qu'il ne suffit pas d'intercaler; dans une proposition le m t ajournement, pour la transformer entièrement en uwe simple preposition d'ajournement . (Murmures à pauehe.) Il ne sttlfit fias d'amalgamer lieux ou trois propositions et de les revêtir... (Murmures à gauche*)
Silence aux trente voix!... Il ne suffit pas, dis-je, d'ama'gaîiier d'eux ou trois propositions et de les revêtir du mot d'ajournement, pour réclamer la priorité d'un simple ajournement. La demande de i'opdre du jour vaut bien, je crois, la proposition de M. Yernier à laquelle, si l'Assemblée vent l'adopter, je propose un amendement, c'est qu'il soit (décrété qfie « d'ici à l'expiration de l'ajour-.aeiiîent,i] n'y aura paatl'attroapements ». (Applau-er"> Ossements)*
J'ai l'honneur d'observer que le projet de décnet de M.. de Mirabeau tend approuver l'impossibilité de faire une loi sur les émigrants qui soit conciliable avec la Constitution. Je -n'entre pas dans la discussion de cette possibilité ou de cette impossibilité ; imais j'observe que la majorité de 1 Assemblée «semble désireuse .d'être plus instruite et d'avoir deux ou trois jours pour, s'éclairer...
Plusieurs membres : Non! non!
Je demandera question préa -feblé sur la motion de M. Yernier; vous devez, Monsieur le Président, la mettre aux voix.
La motion de M.?de Mirabeau juge l'impossibilité de faire une bonne loi»... (Tumulte prolongé:)
On me demande de rétablir l'état delà délibération. La proposition de M. Ver-mier m'avait paru un ajournement ; oo a demandé la priorité sur cette motion. J'ai mis aux voix cette priorité «t la majorité l'a décrétée.
Plusieurs membres à droite et à gauche On ne vous avait pas entendu.
On vous propose maintenant la question préalable sur Je fond de cette motion : je vais donc mettre aux voix la question 'préalable sur le fond de la motion de M. Verhier.
Plusieurs membres à gauche ; Cela n'est pas possible.
La délibération est eutamée Eur l'ajournement.
Non, Messieurs, je jsuis exact. Je ne connais que la vérité; je ne suivrai qu'elle; rietf'ne me fera altérer un fait. (Applaudissements à droite.)
' Je reviens à l'état de la délibération. La priorité a été accordée à la motion de'M. Vernier; on demande à présent la question préalable sur le fond de cette motion. (Murmurei à gauche.)
Je demande le silence; je ne veux, point surprendre l'Assemblée. J'invite tout le monde à prendre part à la délibération et je répète que je mets aux voix la question préalable sur le fond de la motion de M. Vernier.
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il y a lieu à délibérer.)
Plusieurs membres à droite ; Non! non! Il n'y a pas lieu à délibérer. (Bruit.)
Sûr de mon opinion qu'il y a lieu à délibérér, je n'ai pas même ;coMUlbé le bureau; mais, puisqu'il y ;a des diffïciil&és, ije fais une seconde épreuve, et je demande seulement (Il se tourne vers la droite) qu'on veuilèe bien ouvrir les yeux. (Mouvement prolongé.)
Avant de consulter l'Assemblée, je 'vous prie. Monsieur le Président, de remarquer l'évolution qu'on vient de faire dans la salle à votre droite, pour remplir avec peu de personnes, en s'écartant, le grand espace qui reste toujours vide à cette extrémité de la salle.
Un membre à droite : Il y a des étrangers dans le côté gauche.
On me dit qu'il y a des étrangers dans la salle. J'invite les membres du côté droit qui le croient de vouloir bien ies dénoncer avant que je renouvelle l'épreuve. /
Plusieurs membres à droite ; L'appel nominal!
(Une nouvelle'épreuve a lieu.)
Je répète queje n'ai pas de doute : II y a lieu à délibérer sur la motion de M. Vernier. (Mouvement prolongé à droite.)
Plusieurs membres à droite : L'appel "nominal!
, de Mirabeau, Regnaud (de ; er">Saint-Jean-d'Angêly) et plusieurs autres membres déclarent qu'il y?a lieu à délibérer.
Gomme une grande partiel de ceux-là même qui ont opiné confire ta motion voient clairement qu'il' y a lieu à délibérer, 'je prononce le décret : « L'Assemblée nationale | décrête-qu'il y a lieu à délibérer. »
Je persiste à demander1 l'appel nominal. Jamais il ne -fat réclamé dans une circonstance plus intéressante : il s'agit d'un ajournement dont l'eflet serait désastreux ; il a pour but d'éloigner la déclaration d'un principe dont la violation produirait à linstant même une ; émigration nombreuse. Je persiste donc, pour ces raisons, à demander l'appel nominaL (Applaudissements à l'extrême droite.) J'ajouterai aux considérations que je viens de présenter, qu'on a craint qu'il n'y-eût des étrangers dans la salle.
Il faut mettre aux voix la motion, parce qu'alors, s'il y a du doute, on de-1 mandera l'appel nominal.
M. de Mirabeau. Il m'y a pas le plus léger doute. La majorité de l'Assemblée a évidemment: décrété, qu'il y a. lieu à (délibérer.
Je mets aux voix la motion de M- Vernier; en voici les termes :
« L'Assemblée nationale'décrète que-la loi sur ies émigrations est ajournée; que cependant la question est renvoyée à des commissaires pris dans tous les comités, pour examiner s'il y a lieu, ou non, à un projet de loi qui puisse se concilier avec la Constitution, et en faire rapport : . mercredi 9 mars. »
, après avoir consulté ^Assemblée, déclare que la motion-est adoptée.
Plusieurs membres à l1 extrême droite : Il y a du doute 1 L'appel nominal !
Quand la majorité lest aussi évidente et que cependant on réclame l'appel nominal, il est une pratique constante, c'est ;de mettre aux voix La question de savoir s'il y a du doute. On a notamment suivi cet usage quand j'avais l'honneur de.-présider. La majorité est ^évidente; mais comme beaucoup de personnes opposées à l'avis qui a passé le reconnaissent, ainsi que moi, elle sera bien plus évidente encore quand on consultera l'Assemblée sur le doutev On évitera ainsi l'appel nominal.
Plusieurs membres : Il faut faire une nouvelle épreuve.
Je demande la parole.
Je vais renouveler l'épreuve.
(L'Assemblée est consultée -à"nouveau.)
L'Assemblée adopte la motion de M. Vernier.
Plusieurs membres, à droite: Il y a doute! L'appel nominal!
Plusieurs membres :Il faut mettre aux voix la motion de M. d'André. (Applaudissements.)
Je vais consulter l'Assemblée sur la question de savoir, S'il y a eu, -ou non, du doute sur le résultat de la délibération.
(L'Assemblée, consultée, décide qu'il n'y a pas eu de doute.)
En conséquence, la motion de M. Vernier est décrétée.
La séance est levée à cinq heures du'Soir.
A LA SÉANCE t>E L'ASSEMBLÉE NATIONALE du
Nota. — M. Barrère ayant fait imprimer et distribuer une opinion sur le respect dû à la M, nous l'insérons ci-dessous comme faisant partie des documents parlementaires de l'Assemblée nationale.
Discours sur le respect dû à là toi par M. Barrère, député j à. l'Assemblée nationale.
Pour être libres, dl -faut être esclaves des lois, disait aux Romains l'orateur philosophe qu'ils appelèrent le pêre^de da patrie : voilà les paroles qu'il faut adresser aux Français au momentjoù ils ont conquis-la liberté ; car la loi ne peut se soutenir que par un respect inviolable pour elle et par l'exécution servile de tout ce qu'elle ^oïn-maircte.
La philosophie n?a rien imaginé de plus'sublirne que d'assujettir chaque membre de la société, par l'expression de la volonté générale, pour les rendre tous vraiment libres, eûtes affranchissant du joug arbitraire d'uae ou de plusieurs volontés individuelles.il n'est pas d'autres éléments 4e la liberté publique q«e tes sacriliaes habitueMement faits par chaque citoyen à l'empire de la loi, et L'abjuration aonstante de toutejautorité qai'n?est pas la «ieune.
Le sentiment et le dogme trop ignorés de l'égalité apolitique «ont, dans de bons gouvernements, le premier bienfait de la toi* Les hommes, étant tous égaux à ses yeux, ne tardent pas à s'apercevoir qu'ils sont égauxles uns aux autres ; et cdtte opinion, ou plutôt ce (-eutimnt intime une fois affermi dans l^esprit des citoyens, on voit disparaître aussitôt toute autre supériorité que
celle des places établies dans la hiérarchie constitutionnelle, toute autre distinction civique que celle qui est attachée aux fonctions publiques, toute autie différence morale que celle des talents et des venus.
Aussi le respect et l'obéissance ne sont dus qu'à celui qui est revêtu du carac ère de la loi et qui parle en son nom; et c'est en son nom que les chefs, les représentants ou les délégués des peuples doivent parler s'ils veulent être obéis.
Il est des temps de servitude et de barbarie dans l'hisioire de toutes les nations, temps déplor bles, pendant le-qu is un seul homme, usurpant le3 sublimes fonctions du législateur, gouverne à son gré de vastes Etats. Il n'a pour exécuteur de son code barbare que des tribunaux asservis, des lois cruellement pénales, un fisc rapace, vexateur, méprisant les hommes et sacrifiant leur vie à son insatiable avarice, des agents de l'autorité arbitraire répandus avec profusion dans toutes les branches du gouvernement, et une armée dont on n'entretient lu masse ruineuse que po r forcer l'obéissance en tous lieux. La nation n'a plus d'autre mobile ni d'autre frein que la crainte, la force, les supplices ; et la terreur des lois est substituée au respect qu'elles ne peuvent obtenir. Faut-il s'étonner que, dans de par ils gouvernement-, la libi-rté soit inconciliable avec l'horreur qu'inspire la loi et avec le mépris souvent mérité par le législateur?
Quel contraste avec les empires où la souveraineté du peuple est reconnue, où l'on voit ses représentants faisant la loi! Comme c'est la volonté de tous, elle est partout adoptée; et chaque citoyen en surveille l'exécution. C'est là que l'on voit s'opérer le prodige de l'obéissance sans crainte, et de l'accomplissement de la loi sans violence. Tout obéit, et personne ne commande; tous servent, et tous sont libres. Le peuple, enfin, voyant qu'il a concouru à la législation par le choix d s législateurs, par l'émission de son vœu, pour l'influence de son opinion, fait qu'en se soumettant à la loi, il n'obéit qu'à lui-même.
Quel est donc celui qui résisterait à cette voix touchante de la raison publique, qui a tracé des préceptes à chaque citoyen? Serait-ce le législateur qui ne respecterait pas la loi? Ma s n'est-il pas le premier qui doit se soumettre à son empire? Comment le législateur pourrait-il négliger ou dédaigner ce type de législation qu'il a présenté lui-même aux âges futurs? Comment pourrait-il oubl er cette déclaration sub'imectes droits de l'homme et du citoyen, après l'avoir déposée dans les annales de l'empire, après l'avoir comme exhumée du cœur de toutes les nations? Ah! si jamais le législateur s'écartait de quelqu'un de ces droits qu'il a si solennellement proclamés, chaque citoyen n'aurait-il pas le droit de l'opposer à lui-même avec une fermeté aussi sainte que l'insurrection du peuple contre ses tyrans ; car quelle tyrannie pourrait être comparable à celle d'une mauvaise loi?
Que dirai-je du législateur qui, par des contradictions ou des inconséquence^, affecterait lui-même le mépris de son propre ouvrage? Malheur à cet architecte politique qui, après avoir élevé le superbe édifice dis lois, en saperait les fondements! Il serait d'avance coupable de tous les maux que feraient infailliblement a la société des lois irréfléchies ou difficiles à concilier.
Il est encore une*imperfection funeste dont le législateur doit préserver ses lois ; c'est cette perfide obscurité qui facilite les transgressions, ou qui nécessite des interprétations multipliées. Voilà
un de ces vices qui dégradent étrangement la loi, lui font perdre sa saint té et déshonorent son auteur. Mais surtout qu'il ne la laisse pas tomber en désuétude. Cest la rouille de la législation; qu'il révoque la loi plutôt que de la laisser ainsi ronger par le temps.
Serait-ce le magistrat héréditaire de la nation qui manquerait au res ect de la loi? C'est d'elle que dérive son pouvoir: voudrait-il s'anéantir lui-même? Son intérêt est ici d'accord avec son' devoir. Chargé, par état, de faire exécuter I s lois, il doit leur obéir le premier. Quelle plaie faite à la monarchie, quand le prince se fraye, par le mépris de la loi, une route vers le despotisme! Quel ébranlement pour le trône dont elle est la base! Quel danger pour le peuple dont elle est la sauvegarde.
Ah! si jamais une nation était assez inpru-denie pour tolérer que son chef s'affranchît du joug de la lui, c'en serait fait de la liberté publique, la tyrannie serait affûtée et l'esclavage mérité. Quelle étrange prérogative que celle d'un monaïque qui ne serait pas soumis à la loi! Quelle constitution politique que celle qui dispenserait la première tête de l'empire de se courber devant ce palladium delà liberté! Quel serait d'ailleurs cet être extraordinaire à qui tous devraient beaucoup et qui prétendrait ne rien devoir à personne? Ce serait celui à qui la Constitution aurait délégué un pouvoir aussi dangereux que nécessaire ; celui qui, agissant sans cesse, qui, remuant à son gré une grande force publique et jetant de tous côtés ses regards vigilants, serait plus à sa portée, par ses fonctions u êmes, d'usurper les droits de la nation pendant son sommeil.
C'est assurer le respect de la loi que d'y assujettir le prince comme tous les autres citoyens ; il faut encore donner un frein à ses agents ; et ce frein est celui de la responsabilité.
Ge sont eux qui ont le plus souvent bouleversé les empires et subjugué les peuples. Certains ministres ont fait plus de mal au genre humain que toutes les dynasties des rois. Contiaindre ces hommes puissants au respect de la loi, c'est sauver les nations. Ah! s'ils pouvaient se persuader que son exécution franche t loyale leur gagnerait tous les cœurs; et que cette vertu civique leur assurerait une gloire supérieure à celle des talents politiques, à quel d gré de bonheur et de prospérité l'empire ne s'élèverait-il point par cet heureux accord du législateur et du mouarque! Q e ce soitlà désormais l'unique ambition de ces hommes précairement revêtus des fonctions du pouvoir exécutif: pour eux le temps n'est plus de faire trembler les citoyens. Les lois nationales sont entre ceux-ci et les ministres. Elles leur ont ôté le tri.-te pouvoir de se faire abhorrer; et le peuple peut encore leur tenir compte de tous les maux qu'ils ne feront pas. .
Peut-on craindre que les juges, les administrateurs, les officiers municipiux ne portent pas à la loi le Irinut de respect que le trône même et ceux qui l'entourent ne cesseront de lui rendre? Non, sans doute, des magistrats électifs et temporaires ne violeront pas cette loi, au nom de laquel e ils sont élevés dans la société au-dessus des autres (itojens.
Serait-ce le juge? Je sais que dans des temps où il s'enorgueillis-ait d'une autorité usurpée, il a cru pouvoir substituer à la loi une jurisprudence arbitraire et versatile. Je sais que des conseils dangereux, des insinuations adroites,
des passions particulières, des intérêts personnels l'ont fa>tsouvent composer avec les principes. Je sais qu'il à eu ia vanité de pacager l'autoiitédu législateur provisoire, en rejetant ou modifiant les lois avant de les publier, même de faire la loi par forme d'interprétation duns ies cauS' s i robléma-tiques ; mais ces temps ne sont plus. Il n'est point de cas où il soit permis au juge d'usurper les droits du législateur, et jamais la justice, même incèrtaine et chancelante, ne peut abandonner sa balance à l'autorité du juge toujours dépendant de la loi; le législateur est toujours présent, toujours veillant aux be-oins de l'Empire.
Qu'ils s'éloignent donc du temple de la justice, ces esprits indépendants et présomptueux qui regardent l'empire de la loi comme une servitude. Une pareille opinion est une révolte contre la loi ; ils ne sont pas dignes d'en être les organes.
Voudrait-on excuser la fausse conscience du magistrat, qui, placé entre la loi et l'équité apparente, se décide pour celle-ci ? mais ce n'est là qu'unejirévarication mêlée d'orgueil et d'hypocrisie. Sans dou'e, l'équité doit dicter toutes les lois. Mais tout citoyen, et plus encore tout juge, doit présumer qu'elle les a dictées; et si cette présomption n'enchaîne pas toujours l'opinion du philosophe et du politique, elle doit toujours commander les jugements.
Ne nous y méprenons pas ; c'est sous le voile spécieux de l'équité que le magistrat ambitieux cherche à étendre sa domination; c'est pour éluder la loi, plutôt que pour l'exécuter, qu'il prétend pénétrer l'esprit du législateur, et qu'il prépaie insensiblement cette flexibilité funeste qui entraîne à sa suite l'arbitraire le plus dangereux et la ruine totale des principes et des lois.
Oublier le texte de la loi sous prétexte d'en pénétrer l'esprit, c'est en faire un mépris déguisé. Elle veut des ministres et non des censeurs; elle a des organes et non des interprètes.
L'administrateur pourrait, comme le juge, s'égarer dans ( application de la loi, s'en permettre le redressement, ou se régler par des interprétations ai bilraires s'il ne s'imposait le rigoureux devoir d'être scrupuleusement fidèle aux décrets qui ont marqué tous ses pas, qui ont précisé, m circonscrit ses fonctions ; il pourrait encore empiéter sur les pouvoirs législatif, judiciaires ou municipal, il pourrait négliger la surveillance des pouvoirs qui lui sont subordonnés par la 'constitution du royaume. Que deviendrait alors une vas e administration, qui selon les lieux, aurait contracté-le vice d'être arbitraire, mobile ou usurpatrice?
C'est un devoir commun à tous'ceux qui exercent quelques pouvoirs de reconnaître combien il est essentiel de les diviser, d'en discerner attentivement les démarcations, et d'en respecter invariablement les limites. Périsse donc à jamais cet esprit de domination et de rivalité qui tendrait à confondre tous les pouvoirs et tous les genres d'autorité!
Préservons-nous cependant d'un excès de zèle pour l'accomplissement de la loi : il pourrait ajouter à sa sévérité ; une observance trop religieuse pourrait devenir minutieuse et inquiète. L'un et l'autre affaibliraient le respect de la loi aux yèux des citoyens qui ne la jugeraient que par les procédés du fonctionnaire public.
Qu'est-ce qui fait la force des lois?N'est-ce pas leur sagesse? Et de quoi servirait-elle, sans la sagesse de ses ministres ? C'est assez pour une
d'avoir mille moyens de faire le bien, mille occasions de faire chérir, de faire bénir un régime sagemeut substitué à un régime désastreux. Leur faut-il encore la stérile ambition de dominer des hommes qu'ils doivent rendre heureux, de tourmenter des pouvoirs dont ils doivent s'isoler, de s'arroger des fonctions qu'ils doivent s'interdire et d'usurper des droits qui leur sont étrangers?
Sera-ce enfin l'officier municipal qui méconnaîtra la loi ; lui qui est chargé de la publier ; lui sur qui la commune se repose du soin de maintenir l'ordre et la paix de la cité; lui qui est chargé de pénétrer jusque dans les foyers du citoyen pour y étouffer 1 s troubles domestiques; lui qui est placé dans chaque lieu comme une sentinelle, par la Constitution du royaume, pour en surveiller l'exécution et pour dénoncer les atteintes qu'elle aurait reçues; lui qui le premier façonne le peuple au joug de lu loi ; lui qui en punissant toute voie de fait, par le droit de police, est le premier garant des propriétés, du repos et de la vie des citoyens; lui enfin qui peut disposer de la force publique? Certes, si l'homme revêtu de ce pouvoir fondamental, première base de l'organisation d'un Etat libre et policé, manque de zèle, de talent ou d'énergie pour faire aimer et respecter la loi; s'il donne le premier l'exemple de la négliger et de violer lui-même le respect qu'elle exige, on verra l'Empire s'aifaisser sur les fondements mobiles et la Con titution périr par le vice de ses propres éléments.
C'est surtout la force qui doit respecter la loi. Malheur à l'Empire dans lequel ces deux moyens ne seraient pas infailliblement unis ! C'est la loi qui légitime la force ; c'est la force qui est l'appui de la loi. La loi sans la force n'est qu'une vaine théorie; la force sans la loi n'est qu'un brigandage. Non, sans doute, cette milice citoyenne à qui la France doit la-conquête de la liberté, ne pourra jamais servir à l'opprimer. Qu'est ceite gardé immense du royaume, si ce n'est la nation entière armée pour sa lib rlé? Et qui pourrait craindre le suicide politique d'une nation qui tournerait se3 armes contre elle-même ! Vous respecterez donc, généreux soldats de la patrie, la loi qui ne vous a donné une constitution militaire que pour défendre sans cesse la constitution politique contre les tentatives renaissantes du despotisme et les complots de ces âmes viles, qui se rejetteraient si facilement dans les fers de l'ancienne servitude. Trop longtemps l'homme armé avait servi la tyrannie. C'est le moment de l'employer au soutien de la liberté !
Vous remplirez dignement cette destination, citoyens armés au nom de la loi. Tout serait perdu, s'il se formait au milieu de vous un grand parti à qui l'esprit militaire fît oublier les devoirs civiques. La nation, alors eu nroie aux horreurs de la guerre civile, se déchirerait les entrailles de ses propres mains. Quel serait le résultat de tant d'horreurs? L'esclavage y serait noyé dans les fleuves, de sang; et malheureusement la liberté reconquise serait longtemps flétrie par le deuil et les larmes, et partout couverte de voiles funèbres.
Par quelle fatalité cette nation généreuse, devenue libre par le seul effet de sa volonté paisi blement combinée, n'aurait-elle pu maintenir sa liberté qu'à force de troubles et de malheurs? C'est parce que les défenseurs de la patrie auraient méprisé la loi, qui ne les fit citoyens que
pour être ses soldats,, et qui ne les fit soldats qu'à condition qu'ils lesfieraieak citoyens.
Patriotes milwa-kes, n'oubliez donc jamais-que vous; êtes tous frères, d'arme?, tous enfants de la même patrie, et que L'appareil de voire; ctasSume, de vos armes, de vos évolutions, au lieu de vous persuader que vous «Levez être un. objet de terreur pour vos semblables, voua rappelle saos cesse ue vous êtes armés uniquement pour être,l'ef£r©é u dse&f ©Jisme* La sauvegarde du citoyen et le bras de la, loi. Alors, nulle autre différence entre le chef et le soidat;, L'amour- de la patrie: vous élèvera tau» à» la hauteur des héros ; et. la loi, soutenue d'une force irrésistlbley paraîtra partager la majesté des décrets immuables de la Divinité.
Elle appartiendra aux lois, cette majestèsainte,, lorsque les ministres de la religion,, fidèles aux, règles inaltérables et sacrées de l'Evangile, comme aux nations qu'elles éclairent, cendro >t à La puissance publique ce qui lui appartient ;. Io^ue, donnanit les premiers exemples de l'obéissance aux lois, ils éloigneront, les passions superstitieuses qui nuisent au bonheur des. peuples et ces mouvements fanatiques qui altèrent la paix; et L'union des, hommes. Cest aux ministres, de L'autel à, l'aire aimer la patrie dont ils sont les enfants. C'est à ces magistrats politiques et religieux de publier le code, de la nation dans les temples et d'associer ainsi le culte d«es Lois à celui de 1,'E.terneL
. Qui osesait maintenait négliger- ou dédaigner la loi? Ce pèsera pas toi, simple citoyen, ciui n'as d'autre égide contre les tyrans et contre 1?usurpation dotes droits et de tes propriétés. Tu fus toujours un ardent ami des Lois, au milieu des Champs que tu fertiljBes, ou- de l' industrie que tu crées. Pour vous, habitants des cités, gairdez-vous bien du moindre signe de mépris pour la loi Je ne vous dirai pas- que vous appelles l'anarchie et que dans L'aaarehie aucune propriété n'est certaine $ mais ne rougi riez-vous pas de demander des fers,, d'aller au-devant de L'esclavage, d'ex-poser à l'oppression les générations futures et de préparer un nouivel asservissement de la patrie, au moment où elle fait, des, prodiges pour briser le joug qui l'avait si longtemps accablée?,
Non, que je prétende établir an milieu de voua un culte superstitieux, pour La loi; je sais qu'il est un terme où l'opinion publique a le droit de dominer la législation et d'en provoquer la réforme. La raison publique s'éclaire tous les jours et perfeetionneses résultats; l'esprit publie fait des pr«gr-è&, l'expérience y ajoute ses lumières,. et le modeste législateur entrevoit une époque où l'œil perçant de la prospérité dér couvrira, dans son code, des imperfections à corriger et c'es erreurs à détruire. Mais la loi. doit-elle perdre aujourd'hui quelque chose de son empire, parce que L'art du. législateur fera des progrès? Ge serait un funeste présent que le progrès des Lumières,, s'il atJbéûuait d'avance la force des Lois, sous prék xte qu'il doit Les perfectionner un jour. Le sage et, le publieiste, quoiqu'ils espèrent une législation plus parfaitte;, n'en rendent pas moins l'hommage de l'obéissance à celle de leur siècle ;. et c'en est un nouveau de leur paitt„ que de consacrer leurs veillés à La perfectionnera
Qu'on Laisse donc à la liberté de U presse toute sa latitude; que les écrivains politiques, et philosophes ne cessent de réclamer et de chérir ce beau droit de la pensée; Les Lumières et la liberté ont pris chez quelques nations un tel ascendant que leur cours ne peut plus s'arrêter,
qu'il n'ait rétabli un couvel ordre civi'ï et m®ral dans toutes, les sociétés, humainest. qtfil1 n'aitdë-truiti tout* s les superstitions politiques eti religieuses; voilà le moment propre-à rendre Esprit humain à Fempire: de la raison et les hommes au respect des kris,. devenu es e»fi© l'expression delà volonté générale..
a m séance de l'assemblée nationale du
Nota. M. de Sony d'Arsy ayant fait imprimer et distribuer une opinion sur la loi projetée contre les émigrants, nous L'insérons: ci-dessous, comme faisant partie des documents parlementaires de L'Assemblée nationale.
Opinion de M. Louis-Marthe de Gouy d'Arsy, député de Saint-Domingue à VAs&emhlée nationaleysur laloi projetée contre les,émigrants.
Messieurs, j'aurais désiré qu'on n'eût point proposé à l'Assemblée nationale de faire une loi contre, les émigrants. Cette question une fois élevée, j'ai été d'avis de ne point l'éluder, de la traiter avec solennité, de la diisciater avec atlen» tâcwii, et de la résoudre par un décret eoitBsiiLution-nel.
J'ai opiné; pour la lecture de tous les projeta. Il était de notre devoir de tout entendre parce que nous avons reçu mission de tout juger. J'ai opiné pour un examen approfondi; noas De devions à ta, France et à mous-mêmes,.
Mais, auj®dard'hffli, quand tous tes représentants de la nation se sont occupés de cette question, quand plusieurs préopinants éclairés se sont déclarés pour l'affirmative, et qtue plusieurs autres non moins instruits, se sont déclarés contre-; quand j'ai tout écouté, et que je n'ai point entendu mettre en avant un argument qui me paraît sans réplique, je dois, Messieurs, en propenser loyalement la solution à tous les membres de cette Assemblée, parce' que je ne cherche comme eux que la vérité, que le bonheur de notre commune patrie.
Je n'entrerai point dans l'examen des principes; Ils ont été profondément discutés.
Tout homme de bonne foi doit convenir à paré>-sent qu'en philosophie la loi serait juste, qm'en politique elLft serait arbitraire, qu'en théorie; elle serait désirable, qu'en pratique elle serait le tombeau de Lai Constitution.
Mais, pour fiixer vos, incertitudes, pour lever vos doutes, pour conquérir vos suffrages, il importe de vous dêaaomilrer encore que, quand nîême on parviendrait à rendre la loi1 sur les émigrants constitutionnelle et; praticable^ il ne faudrait- pas la décréter, puisqu'il en résulterait infailliblement Ha ruine certaine du royaume.
Cette; proposition pe*»t être rigoureusement dé-montarée en très peu de mots.
Pourquoi vous a-t-on demandé, Messieurs, une loi contre les émiigrante? Ceux qui Font provoquée ne pouvaieat avoir que deux motifs.
Le premier était, en rappelant les mauvais citoyens émigrés,, ou retenant les malintentionnés éfuigraûtsr d'empêcher les fâcheux effets «tue
pourraient produire leurs manœuvres criminelles «toez les poissamee® voisines.:
Le secérëiid motif était sans, doute, dans le cas ©è l'on ne parviendrait pas à faire rentrer tes expatriés,, ou à s'opposer aux émigrations, de s'en; dédommager en appliquant à la nation des revenus immenses que les émigrés doivent à la Sénilité de notre' soi, et 4®nt en ne voudrait plus qu'ils fécondassent'un sol étranger.
Il ne peut pas y avoir eu d'autre raison que ces deux-là. Eh bien 1 Messieurs, la loi décrétée produirait deux effets diamétralement opposés au double but qu'on se propose; et je le prouve fcncûntestablemeîit, à ce1 que j'espère.
Qiawn'8 au premier motif die» provocateurs de la loi qui tend à prévenir ou arrêter l'effet des suis-citations coupables des émigrants, je répondis:que tout individu qui ©se méditer 1» ruine- (te sa patrie, est un traître qui n'a rien à pesdre dans le cas d'une défaite, et qui a tout à espérèr dans le cas dfun succès. 0a tel homme: a fait ses combinaisons, car te cri une calcule aussi et nulle loi n'a la force d'arrêter celui qui ne mini rien et qui brave tcwrt.
Donc la lof qu'oit projette ne rappellera pas lès mauvais citoyens émigrés et elle ne rettenora pas ceux que des intentions coupables entraînent ctrez1 nos ennemis.
Quant au. seciand motif qui anime, les partisans de la loi, et qui tend à venger la nation de l'a trahison de certains émigrés, je demande en quoi consistera cette vengeance? Elle ne peut plus tomber sur la personne, puisqu'il s'agit d'un -expatrié ; elle ne pourra donc atteindre que ses biens. Et queïs biens, Messieurs? Les terres seules, car les portefeuilles échapperont en entier au châtiment national. Ainsi te riche capitaliste pourra trahir impunément sa patrie, et le propriétaire territorial subira srul la peine infligée parla Constitution. Voilà déjà une inégalité dans la loi qui en p.rôuve l'imperfection.
Mais ici un inconvénient d'une tout antre importance réclame toute notre attention. Quand la loi aura solennellement prononcé que,, dans tel ou tel cas,, les biens d'un émigré seront saisis, annotés ou confisqués,, tous ceux qui, animés d'intentions perverses, braveront leur conscience et la loi, auront grand, soin de se mettre à l'abri du châtiment qu'elle leur prépare. S'ils n'ont rien, la confiscation, ne les effrayera pas ; s'ils sont Capitalistes, elle né lès épouvantera pas davantage; s'ils sont propriétaires, ils ne manqueront pas de métamorphoser en papier sur l'étranger toutes. Leuis. propriétés territoriales^ et de se soustrairè ainsi à ia juste punition qui les menaçait.
Donc la nation ne trouvera pas même à se dédommages (tes pertes, qiue les émigrations lui «au-sent; ses, revenus' ne s'accroîtront pas de ceux des émigrés; et ces dernœers verseront malgré aeUSvSur une terne étrangère,des capitaux qulls auront dérobés à la patrie,, et don t il. est impossible de leur ôter la disposition.
Jusqu'ici, j'ai montré l'insuffisance, l'inefficacité d'un décret; il me restes à vous, offrir l'esquisse des dangers qui l'environnent.
Dès qu'il sera bien avéré que lea biens-fonds sont seuls soumis à l'épée de la loir comme il n'est pas ujn seul individu qui, dana un grand Ëmpine, et dans un momeat de révototion, puisse être à l'abri d'un crime involontaire, ou d'une accusation calomnieuse, et par conséquent d'une émigration forcée» vous sentez, Messieurs, que
chacun considérera avec quelque effroi l'embarras et le danger d'une propriété territoriale.
Le capitaliste qui, ennuyé des vicissitudes de son portefeuille, voulait assurer à jamais l'immua-bilité de sa.-fortune» y pensera deux fois avant de consommer cette conversion périlleuse* et finira par ne Ras acheter.
Et dans quel temps, je vous prie, ces réfiexiens ombrageuses deviendront-elles celtes de tous les gens à argent? A une époque où te salut de la France repose en entier sur la vente dè l'immense héritage que nous venons de recouvrer; à une époque où le royaume était sans ressource, si les biens ecclésiastiques et, domaniaux ne lui en avaien t offert une immense; à une époque où cette ressource.se présente avec tant d'avantages; ûù elle remplit, et au delà, toutes les espérances, et où pourtant elle devient, radicalement nulle dès qu'on cessera d'acheter... Or, soyez sûrs, Messieurs, que la suite infaillible d'une loi contre les émigrants, dont tes infractions ne pourront être punies que par k privation des propriétés territoriales, attiédira singulièrement tes nombreux acquéreurs des biens nationaux., dont il importe tant de se défaire. La concurrence diminuant, te prix des adjudications, ne tardera pas à baisser, et bientôt une. stagnation générale, effet naturel d'une méfiance universelle, noua rendra à toutes tes inquiétudes du déficit et à toutes les horreurs delà banqueroute, que la sagesse de vos nîesures semblait rendre désormais impossible.
Ainsi, perte consommée pour l'Etat par la paisse subite, dans le prix des biens nationaux, et danger de la chose publique par la cessation de toutes tes ventes : voilà, les premiers et les infaillibles effets de la loi.
Ce ne seront malheureusement pas tes seuls, car tout ae. tient dans l'ordre politique, et la rupture. d'un chaînon entraîne des désordres incalculables. Cette méfiance si bien fondée empêchera tes capitalistes d'acquérir les biens que la nation a tant d'intérêts de vendre, s'étendra bientôt jusqu'à ceux qui, ne possédant que dea terres, se trouvent naturellement exposés aux. rigueurs de la IqL Le danger de leur position sera bientôt suivi du projet de s'en affranchir.
Ils. mettront leurs terres eu vente, et les céderont à vil prix. La plus; noble et la plus aûce des propriétés» dans le plus beau climat de l'Europe, deviendra, par l'effet d'une loi mal combinée» 1e plus mauvais de tous tes biens, celui que tous les caractères libres et indépendants chercheront à échanger contre: une propriété portative inaccessible aux rigueurs de la loi.
Mais, quelle espèce de, numéraire sera le prix de ces domaines patrimoniaux que chacun s'empressera de vendre.? Ce seront tes assignats qui,, dana l'intérieur delà France, font fonctions.d'espèces et le salut du royaume.,, mais, ne rapportent point d'intérêt, et ne; circulent point chez, l'étranger. On échangera donc à grands frais ces assignats contre des écus, et le numéraire métallique,, thermomètre, de la vraie rteJhesse', s'écoutera de toutes parts vers tes puissances voisines,, ira. donner un. nouveau prix à leurs terres ou vivifier leurs manufactures au grand détriment des nôtres qui s'appauvriront chaque jour;, sans, qu'il leur reste aucun moyen de réparer leurs pertes..,
Si je cherche une. compensation à tant.de maux, où la. trouveraï-je? Sera-ce dans te prétendu gain que doit procurer la confiscation des biens de ceux qui sont actuellement absents ? Mais, ce bénéfice, indigne d'une grande nation, se réduira
à bien peu de chope, puisqu'il ne portera que sur les abseï ces illégitimes, et que cette classe sera sûrement la moins nombreuse. D'ailleurs, quelle que pût être cette compensation, ne sera-t-elle pas absorbée, et bien au delà, par une perte immense dont votre politique, Messieurs, saura mesurer l'étendue.
La France était un Etat intolérant et despotique; elle est, grâce à vos décrets, un Etat libre et tolérant. Les étrangers n'y venaient que pour ses plaisirs e t son climat; ils y viendront désormais pour la douceur et la sûreté de son gouvernement. Us n'y faisaient que des séjours, îlsson-ent aujourd'hui à y former des établissements urables. Assurés de la liberté d'y adorer Dieu à leur manière, ils acquièrent journellement des biens nationaux, et leur concurrence en élève prodigieusement le prix. Nos manufactures, affranchies de l'odieuse exclusion des privilèges et des douanes intérieures, offrent à nos voisins des spéculations utiles. Enfin la France était au moment de devenir l'asile inviolable de tous les Européens, amis de la liberté... Mais voilà qu'une loi barbare, arbitraire, inquisitoriale, vient tout à coup nous enlever tous ces biens inestimables, avilir nos propriétés foncières, anéantir notie agriculture, exténuer notre commerce, ruiner nos manufactures, exciter les citoyens les plus riches à aller peupler les Empires qui nous avoi-sinent, repousser de notre territoire les étrangers qui ambitionnaient le titre de Français, en un mot annihiler les bienfaits de la Constitution et charger la liberté des fers du despotisme... Est-ce votre intention, Me?sieurs? Voulez-vous produire tant de maux, sans qu'il en résulte aucun bien? Non, nous ne voulons, nous ne pouvons vouloir que le bonheur de la patrie. Or, en ce moment, en ce moment critique, où chaque décret important peut décider du sort de la France, menacer lés propriétaires c'est menacer les acquéreurs ; menacer les acquéreurs c'est en diminuer considérablement le nombre, c'est les éloigner presque ions, c'est dire à tous ceux que l'amour de l'indépendance peut porter à la volonté d'émigrer : « Vous ne pourriez emporter « vos terres, et la loi les confisque'ait; mais « écbangez-les contre des assignats, des traites, c de l'argent; allez enrichir uu autre sol et lais-« sez la France, embarrassée de ses nouvelles « richesses territoriales, retomber dans le cruel « état de déficit affreux et de banqueroute immi-« nente dans lequel elle était il y a deux ans, et « dont nous espérions l'avoir affranchie pour « toujours. »
Ah ! si j'étais l'ennemi de la Constitution, si je regrettais ces prétendus avantages qu'elle a enlevés à plusieurs d'entre nous, je conseillerais bien de décréter une loi qui serait, tôt ou tard, le tombeau de cette même Constitution, et qui me laisserait l'espoir de ressusciter un jour, sous l'empire du despotisme, toutes ces distinctions qui se sont évanouies aux premiers rayons delà libérté. J'admettrais avec empressement la nécessité d'une loi contre les émigrations, je tâcherais d'en démontrer l'efficacité, quoique son insuffisance soit palpable; je supposerais la facilité de résoudre la question de la légitimité des al sen-ces, quoique cette distinction délicate soit, le plus^souveut, impossible à saisir; et je me gar* derais bien de vous dire, comme je le fais en ce moment, que l'amour que nous devons à notre pays, que les serments que nous lui avons faits et répétés tant de fois, nous défendent impérieusement d'admettre un moae de punition qui,
en compromettant l'opération commencée de la liquidation des dettes de l'Etat par la vente des hier s nationaux, perdrait infailliblement la France, au moment où, tandis que son existence politique l'élève au-dessus de tous les Etats de l'Europe, sa modération désarme ses ennemis et ses rivaux.
Je conclus, Messieurs, à l'adoption du décret suivant :
PROJET DE DÉCRET.
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de tous ses comités, et les opinions de plusieurs de ses membres, décrète constitution-nellement :
« 1° Qu'une loi conlre les émigrants ne peut pas s'amalgamer à la Constitution libre du royaume;
« 2° Que le comité de Constitution sera chargé de présenter incessamment un projet d'adresse aux départements, dans laquelle il sera démontré que le sacrifice d'une loi qui semblait désirable, ne doit exciter aucun regret dans l'esprit des bons citoyens, du moment qu'elle portait atteinte à la Constitution et qu'elle compromettait le salut public;
« 3° Que ce décret constitutionnel sera présenté sans délai à l'acceptation du roi. »
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAILLES. Séance du er mars 1791
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse des administrateurs du département de Maine-et-Loire contenant des protestai ions d'adhésion et de fidélité aux décrets de l'Assemblée, et la demande de 18 brigades de gendarmerie nationale poUr ce département.
(Cette pétition est renvoyée au comité militaire.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
Je m'aperçois que, lors du décret rendu hier sur les assignats, on n'a pas rappelé à l'Assemblée les considérations qui avaient déterminé les décrets des 17 avril et 29 juin 1790.
Vous décrétâtes alors que les billets de la caisse ou promesses d'assignats pourraient circuler dans les provinces avec l'endossement du caissier de l'extraordinaire;ainsi vous en avez fait un billet à ordre susceptible d'opposition, et des oppositions ont eu lieu.
Aujourd'hui on veut annuler ces oppositions faites sous la sauvegarde de la loi et anéantir 2 de vos décrets. Cela ne se peut pas.
Je demande donc que les décrets des 17 avril
Si M. Le Couteulx s'était trouvé au comité des finances, lorsque l'affaire y a été portée par M. Amelot, il aurait vu qu'il élait impossible de donner de la suite aux premiers décrets qui n'étaient que préparatoires et qui ne s'exécutent plus maintenant.
Si les décrets se contrarient, il faut renvoyer au comité des finances la motion de M. Le Couteulx et suspendre, ju-qu'à ce qu'une décision soit prise à cet égard, l'exécution du décret d'hier.
(La motion de M. Rebwel est décrétée.)
Je demande à faire une observation sur le procès-verbal. Dans l'article 6 décrété hier sur le respect dû à loi, on se sert de l'expression de contrainte autorisée par la loi et par un jugement de police. Je demande qu'il soit dit : ou par un jugement de police ; car lorsqu'un fermier, par exemple, se soumet dans son bail à une contrainte par corps en cas de défaut de payement, lorsque cette contrainte est autorisée par la loi, il n'est pas besoin de jugement, d'ordonnance de justice pour la rendre exécutoire.
Il est vrai que dans certains pays une lettre de la chancellerie suppléait aux mandements de justice; mais cette exception n'est pas un motif pour changer la lettre de votre décret. Je demande au contraire qu'il soit décrété : l°que nulle contrainte par corps ne pourra avoir lieu qu'eu exécution d'un jugementoud'un mandement de justice ; 2° que jamais elle ne pourra être prononcée pour une somme au-dessous de 100 livres.
Le respect dû à la loi doit imposer la condition d'obtenir la permission du juge pour exécuter une contrainte par corps ; mais s'il fallait toujours un jugement, mon débiteur profiterait le plus souvent des délais pour échapper à la contrainte par corps. Je crois qu'il faut mettre purement et simplement dans le décret : en vertu d'un jugement ou mandement de justice.
J'adopte la rédaction de M. Tronchet ; mais il n'a exprimé qu'une partie de ma motion. (Murmures.)
(L'Assemblée renvoie au comité de Constitution la motion de M. Malès.)
Hier, Messieurs, à la fin de votre séance, vous avez rendu un décret portant que vos différents comités se réuniraient pour présenter une loi relative à l'émigration; mais vous n'avez pas fait ce qui était nécessaire pour les mettre en mouvement. Qui convoquera les comités ? où s assembleront-ils ? quand nous présenteront-ils la loi?
. Je pense, Messieurs, qu'il est intéressant pour l'ordre et la tranquillité publique que cette loi vous soit promptement présentée et que l'Assemblée veuille bien décréter quand et où les commissaires des différents comités se réuniront.
Je demande qu'il soit ordonné aux comités de nommer aujourd'hui leurs commissaires, lesquels s'occuperont sans délai de leur travail.
(Ci tte motion est décrétée.)
Avant de porter cette loi salutaire
dont le préopinant vient de parler, j'en sais une, moi, une loi provisoire qui pourrait remédier à une partie du mal que les émigrants nous occasionnent...
Un membre : Ah ! on la présume.
,. elle est dans votre code, la voici, et j'en demande l'exécution-
Le 4 janvier 1790, vous avez décrété que les sources du Trésor public seraient fermées pour tous les expatriés qui avaient sur ce Trésor des pensions, des dons et des traitements.
Le 22 février 1791, vous avez ordonné à vôtre comité des lin inces de vous faire dans la huitaine un rapport sur l'exécution de ce décret du 4 janvier et de mettre sous vos yeux la preuve que les émigrants qui avaient des pensions et des traitements sur le Trésor public avaient été rayés de l'Etat.
Je demande. Messieurs, que vous ordonniez à votre comité des finances de faire son rapport à l'Assemblée sans plus attendre.
Il est impossible de vous donner cet état de radiation; car les pensionnaires émigrés ne sont pas connus au Trésor pumic. Mais ce que je puis vous assurer, c'est que le Trésor public n'a, depuis cette époque, payé aucun traitement, aucune pension sans un certificat de résidence dans le royaume, fourni par le titulaire.
Cela ne suffit pas; c'est la radiation qu'il faut.
Je répète que Cet étnt de radiation est impossible à établir, puisque les émigrants ne sont pas connus au Trésor public.
Il y a au moins une grande partie des émigrants, placés sur la liste des pensionnaires du Trésor public, qui sont connus. D'ailleurs, il y a un décret dont l'exécution est juste et pressante; c'est l'exécution de ce décret qu'il faut provoquer et appuyer par un autre décret.
Ainsi la motion de M. B >uche est parfaitement juste et je demande qu'elle soit mise aux voix.
Messieurs, les observations qu'on vient de vous faire ne se rapportent qu'au décret sur les pensions; mais il en est un autre qii doit iofluer sur l'émigration, c'est l'article 5 du décret du 18 décembre dernier, qui déclare privés, par le fait, de toutes places et grades, tous ceux qui, dans l'espace d'un mois, ne sero.it pas rentrés dans le royaume.
Je demande que I on réunisse l'exécution de ce décret aux autres et je cro i s qu'on pourra composer une bonne loi sur les émigrations, en rappelant les décrets précédemment rendus.
J'adopte le mariage ; il est excel-lent. (Rires.)
En conséquence, monsieur le Président, je demande que l'on retranche de l'état civil, militaire et de tou* autres, ceux sortis du royaume qui, aux termes de la loi du 18 décembre dernier, ne sont pas rentrés dans le royà une ians l'espace d'un mois et n'ont pas prêté le serment.
J'aurais demanda que l'Assemblée nationale s'en tînt seulement au simple décret qu'elle peut avoir rendu
sot cet objet ; mais La liste que v©us propose M. Bouche, cette liste de radiation ne me paraît pas conforme à votre décret.
Elle a été décrétée en février.
Cette liste n'annonce qu'une liste de proscription. M. le Président du comité des recherches, M. Voidel, s'est référé au décret qu'a précédemment rendu l'Assemblée.; .je m'y réfère aussi. Mais je vous engage à nous méfier des motions do matin faites par M. Bouche.
Il estbiet] étrange que l'onveuille confondre l'exécution littérale d'un décret infi-mnient juste par lequel l'Assemblée a déclaré, au nom de la nation, ce qui est certainement le vœu de la nation, savoir qu'elle ne salariera pas des hommes qui la trahissent et qui émigrent par haine pour la tîonstftution et pour la liberté, et surtout qu'elle désavoue cenx qm témoignent une coupable insouciance.
J'appuieles deuxmotionset je demande, qu'elles soient mises aux voix. {Vifs applaudissements.)
J'appuie la motion de M. Camus et, poor compléter, je demande qu'il soit justifié, d'ici à 15 jours au plus, du remplacement et de la nomination aux places qui se seront trouvées vacantes pour cause d'émigration sur les listes du ministre de la guerre, et que vous fixiez un jour pour que vous soyez'certains de l'exécution de votre décret : car sans cela, il est intrtife d« rendre des décrets.
Vous amplifier le décret du mois de décembre.
Je demande la parole. {Rires.)
Vorcs avez la parole.
Messieurs, je sais que j'ai promis de ne plus parler dans cette Assemblée (Rires) ; aussi Taut-il que j'aie à faire des réflexions bien importantes, que je m'estime très obligé de parler pour, rompre le silence™ (Rires.) Je ne puis pas du tout prendre l'engagement d'imposer à ma conscience un si grand sacrifice. (Rires.) Du reste, la recommandation faite par M. Barnave avant-hier., que vous ne laissiez aucune influence aux orateurs dont vous improuvez les opinions politiques., cette recommandation suffirait bien pour me faire persiter dans ma résolution.
JPïusieurs membres : L'ordre du jour !
Mars je remplis un devoir impérieux en demandant la parole et j'y suis excité par la réflexion que voici :
Vous avez jugé hier, aprè3 cinq heures de discussion, qu'une loi sur les émigrants était au moins très difficile à faire et méritait une discussion approfondie; et je vois aujourd'hui que d'amendement en amendement, de conséquence en conséquence, vous allez faire une loi sur les émigrants. Vous la bornez, dites-vous, aux fonctionnaires publics; c'est précisément relativement aux fonctionnaires publics que je voulais vous présenter un exemple qui vous fera peut-être voir la nécessité d'introduire des exceptions dans la ici et qui pourra peut-être vous arrêter. Rapprends en ce moment que 1. le maréchal
: de Castries es i dangereusement maladie à Lau-; zanne; il est dans son lit et se3 blessures vont se rouvrir. M. le maréchal de Castries est parti pour Lauzanneavec un congé de l'Assemblée, aa-trènafle; il lui est impossiMe de venir habiter sa maison qui a été dévastée. Certainement, s'il pouvait Se faire transporter, il Je ferait; car il a besoin de grands cfeirurgiens.
Allez-vous prononcer -dans ne moment-ci que M. le maréchal de Castries, ruiné dans sa maison de Paris et daras sa serre d^llensvilte (Murmures à g anche); a liez-vous prononcer que M. -de Castries, retenu hors du royaume par «ml maladie dangereuse, ayant dix-sept blessures reçues dans différentes batailles, dont, il en a gagné une, | comme chacun sait; al'leï-voUs p-ononoer, dis-je, qu'il sera privé des. droits de citoyen, de son grade de maréchal de France, de sa pensiom ? (Murmures! ' r;
Je vous cite cet exempte potrr vous monttw que M. de Castries mérite une exception et qn'il peut s'en trouver freaoeaap d'astres. ( Murmures^) ...
J'entends parfaitement vos opires et je n'y résisterai pas. Mon intention* est bien de ne plus parler (Rires à gauche) -, mais ii y a ées circonstances {Rires.). ... J'ai Phonneur de vous -assurer que ceci me convient infiniment mieax qu'on ne pense. -,. . v .
Je n'ai rompu le silence que pour vous prier de ne point faire légèrement une loi générale qui comprenne tous les fonctionnaires publics et de vouloir bien vous en ternir à votre ajournement.
Je réponds que des cfreonstances ne peuvent pas former un obstacle à I'ex-ènîtrorr d'une loi. Il existe une loi; on ne vous en demande que fexécfttfion que Je tronve, pour ma part, très simple. Ainsi je demande qu'on mette aux voix cette première proposition;, car il ne s'agit que de cela.
Quant aux exceptions particulières, je répondrai d'abord,, pour le cas de M. de Castries, qu'il a un congé de l'Assemblée et que, par conséquent...
Plusieurs membres ; Non ! non!
Qu'il ait un congé ou qu'il ri'eti ait pas, cela ne fait rien à la question ; car l'opération que vous avez à faire est trèi simple, ûe quoi s'agit-il en effet ? De la radiation des pensions des absents. Qu'avez-vous fait pour les peu sions anciennes? Vous les avaz Joutes supprimées; puis chaque pensionnaire a présenté un mémoire, d'après lequel v&us met jogé s'il y avait lieu oui non de lai accorder une pensio®. Agissez de même aujourd'hui, e$ ceux qnii auront des raisons personnelles, desmoëfs sérieux vous, les soumettront-; vous jagerez de la légitimité de leur réclamation et vous lèverez la radiation à l'égard de ceux pour lesquels vous trouver» convenable de le faire.
Un grand nombre de membres : Aux voix'I
Je demande la parole.
On demande qwe la discussion soit formée ; je rnetB aux voix cette motion..
(L'Assemblée décide que la discussion est fermée.)
Je voulais dire... (Wttrmnres.)
Musieurs membres : La diacMBsion est fermée.
Je demande à proposer lia amendement. (Murmures.)
11 oe peut pas exister d'amende arent.
Laissez-moi poser l'état de la question.
Je demande ia 'question préalable.
Mais, Messieurs, laissez-moi parler. Vous ae pauvez pas empêcher que je propose un amende ment et vous ;ne "pouvez pas 4e combattre avant de Pavoir enteaidu. (Quand je l'aurai proposé, à ia bonne heure !
Je ne doute pas que la nation n'ait le droit d'obliger tous les fonctionnaires publics et même les pensionnaires à rentrer dans -le (royaume, sous ipeine'd'être décrus die leurs p/laces et pensions. Vaas l'avez décrété» il n'est ipius question que de l'exécution. Je demande donc que l'Assemblée prescrive un moyen possible dVaxécu-tion..
Je demande que îles «comités réunis soient tenus de faire «n règlement sur la imanièfts de constater la résidence des fonctionnaires publics et des pensio; un aires de l'Etat et qn'an 'emjaigne à tous ceax qu4 sont sortis du .royaume et «qui y sont rentrés depuis, de faire une .déclaration quelconqué ou devant le directoire du département ou ailleurs. (Murmures.),
Le décret sur cela gande le silence et je vous avoue que j'ai peine à concevoir «omoaent le comité des fma^tees ékuLî inLai&tne pourront vous donner la liste de tous les émigrants qui fie sont pas rentrés ; .U y a, Messieurs, tel pensionnaire de .l'Etat qui n'est pas fonctionnaire public, qui est absent du royaume pour des affaires de qqhhï-merce ou .pour toute antre raison ; U faudrait donc prévoir tous ©es cas-dà dans la loi .que vous demandes.
La motion de M. Bouche et celle die M. Voidel tendent pu rament et simplement à ce q«ue l'Assemblée, tse fasse rendre compte de l'exécution de ses décrets. -Ceux auxquels cas motions ordonnent de lui rendre compte die cette exécution lui ipréseateront à quel point .elle en est, quels moyens ©» a employés ipour la'remplir; et si les décrets n'ont ,pas été exécutés, is'il est nécessaire de prendre de nouvellesm es lares d'exécution pour. assurer cette même exécution, l'Assemblée national îles décrétera. Toujours est-il nécessaire que l'Assemblée commence par se faire rendre m compte.
J'ebfterve d'ailleurs que I'aniendemenit de M. Fréteau, que j'appuierai dans son tempvse trouve dans La motion de M. Bouche-; tout y est prévu, tout y eat renfermé et je demande pure^ ment et .simplement que cette motion soit .mise aux voix!
Plusieurs membres ; .Aux voix !
Un membre demande la question préalable sur l'amendement de M. Martineau-
(.L'Assemblée déclare qu'il n'y a pas Jieu 4 délibérer sus* cet amendement.)
Je demande l'ajournement de.la
motion de M. Bouche et je fœnae que tous les amendemeaifa qu'on a faite doivent être renvoyés au comité .chargé du projet de ko sur les éaiigïamts. ils tpeiuwent ne pas suffisamment resupdiir les inle nti»ns que vous avez eues en ajournant laques tion géaéraie, et si vous les adoptiez en ce !i»Qime'ntr©fl pourrait en induire qu'une loi ultérieure sur tes émigrants est inutile.
Plusieurs membres appuient 'Cette demande d'ajournement..
Plusieurs membres réclament la question préa-r lable sur l'ajournement. \ L -
(L'Assemblée décrête qu'il ify apas lieu à délibérer sur r^ournemenQ: v
Je soutiens que l'amendement de M. tréteau doit être admis. H s'agit -de l'exéeu-tion d'une 'loi importante. L'Assemblée ne peui pas différer à se faire rendre compte du remplace metft des fonction narres qu'elle a déclarés déchus de leurs fondrons.
Je crois avec M. Fréteau qntil est important iq-ue l'Assemblée se fasse rendre compte de l'exécution du décret par lequel elle a ordonné que tous les fonctionnaires publics seront tenus de revemlir â teuir; poste. 'Quant à l'excepHtoa 'dont a parlé M. Mailouot, -elle me paraît iasutile à exprimer éaaas le décret. Déjà un major retsenu par maladie en pays étranger, a obtenu du ministre de la guerre la prolongation du délai, en envoyant son serment civique et les certifiât s q.ud constataient rimpossibilité où il se trouvait de revenir. Vous avez rendu des décrets pour les fonctionnaires publics; il faut que ces décrets soient «xëcutés, et leair exécution n'empêchera ipas quà sous ne puissions vous présenter une loi générale sur les émisants, car il y a bien de Ja différence entre une loi sur les émigrants et une loi >sur leB fonctionnaires publics absents de leur poste.
M. Maiouet a fait um amendement pour les malades. (Murmures.)
Plusieurs membres : L'ardue dm jour!
Il est dit dans la lonque vous avez déjà décrété:: sauf les excuses valables. L'amendement" de JML Malouet est donc inutile.
(La éiseussioia oest ferméej)
L'Assemblée, consultée, décrète oe qiui suit::
« Le comâté des -finances présentera 'dimanche 6 du courant, la radiation qui a été an'dû être faite, en conséquenoe des précédents décrets, des fonctiioranaiDes publics cet pensionnaires de la nation,. absents du royaume. »
(Le procès-verbal est adopté.)
, au nom du comité ecclésiastique. Messieurs, (j'ai à'fhfffineur de vous proposer un projet de décret qui, j'oise lie >dire, sera accepté sur la simple lecture ; c est pour accélérer l'exé-curtixDwi dUxhtfe vos -décrète.
Par votre décret du 14 novembre dernier, vous avez permis, lorsque Itévêque gud donnerait la ; crmfkmation canonique ae serait pas de l'arrondissement iméiropoMtaiffl, ide faire ;le sacre dams telle église que bon lui semblerait. Il s'agit de donner pendant 1791 la même permission à tous les évêquei, même lorsqu'ils seront du même
arrondissement métropolitain, parce qu'il y a des départements dans lesquels il n'y a qu'un évêque qui ait prêté le serment.
S'il fallait que cet évêque se trou vât dans la paroisse cathédrale, il faudrait aussi qu'il invitât deux autres évêques; s'il n'y en a pas dans l'arrondissement du métropolitain, cela entraînerait beaucoup de longueurs et de contradictions et de frais, et cela déplacerait les évêques dans le moment où il est le plus nécessaire qu'ils résident dans leurs diocèses, ne fût-ce que pour dissiper la contagion que voudraient y répandre l'hypocrisie et le fanatisme.
Dans ces circonstances, le comité ecclésiastique vous propose le projet du décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport qui lui a été fiiit par son comité ecclésiastique, décrète que pendant l'année 1791, Pévêque qui aura donné la confirmation canonique à un évêque élu, pourra aussi faire la consécration ou dè'é- fuer à un autre le pouvoir de la faire dans telle glise qu'ils jugeront convenable, encore que lesdits évê îues soient du même arrondissement métropolitain que l'évêque consacré, et sans qu'il soit tenu de demander une permission à l'évêque du lieu. »
Je demande, par amen,, dément à ce décret, que la consécration des évêques puisse se faire même dans une synagogue ou dans un temple des protestants. (Murmures pro-longés.)
Plusieurs membres à gauche : A l'ordre 1 à l'ordre !
On demande que M. Couturier soit rappelé à l'ordre.
Un grand nombre de voix à gauche : Non 1 non ! A l'Abbaye l A l'Abbaye l
Je demande que la motion et le nom de l'auteur soient consignés au procès-verbal.
Je prie l'Assemblée de suspendre pour un moment l'expression de son indignation. J'ai une observation essentielle à présenter sur les motions qui sont faites en ce moment; c'est qu'il est intéressant po jr l'Assemblée, et pour tous les ecclésiastiques qui se sont soumis à la loi du serment, que l'on connaisse les principes et la conduite de ceux qui n'ont pas prêté le sermeot.
Je demande que l'amendement de M. Couturier soit inséré dans le procès-verbal, que le nom de son auteur y soit inscrit et qu'il y soit dit que cet amendement a été lait par l'un de ceux qui ont refusé de prêter le serment exigé par la loi.
(Cette motion est décrétée.)
Je mets aux,voix le projet de décret du comité ecclésiastique.
(Ce décret est adopté.)
donne lecture d'une lettre par laquel e ledéparterae it de la Gorrèze anuooce à l'Assemblée nationale qu'il vient de nommer M. Brivat, curé de la Pleau, â l'épiscopat, vacant par le refus du ci-devant évêque de recoaualtre la constitution civile du clergé.
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre
de la Société des Amis de la Constitution de Car-cassonne, qui annonce que sur 166 fonctionnaires publics, il n'y en a que 28 qui aient mis des restrictions à leur serment.
donne lecture d'une lettre de la municipalité de Paris qui donne avis à l'Assemblée nationale de la vente faite la veille de trois maisons nationales: l'une, dans la rue Saint-Honoré, estimée 35,150 livres, adjugée 55,500 livres, l'autre, faubourg Saint-Jacques, estimée 21,000 livres, adjugée 42,100 livres; l'autre, rue Saint-Jacques, estimée 4,950 livres, adjugée 14,200 livres.
Au bas de cette lettre écrite, figurent le nombre des adjudications fai es dans l'enceinte de Paris depuis le 1er octobre, et le relevé des sommes qu'elles ont produites; 247 immeubles estimés 5,221,152 1. 7 s. 8 d. ont produit à la natiou 10,635,425 livres.
Un membre offre à l'Assemblée, au nom de la paroisse de Venisy, district de Saint-Florentin, département de l'Yonne, un assignat de 300 livres et 12 1. 6 s. 3 d. d'argent en don patrioti que, au complément de laquelle somme ont contribué même les plus pauvres de la paroisse.
L'Assemblée or lonne que ^insertion de ce don sera honorablement faite dans le procès-verbal.
La parole est à M. Rœderer pour présenter au nom du comité de l'imposition ia fin de son travail sur les droits de patentes.
, au nom du comité de l'imposition. Messieurs, j'ai l'honneur de proposer à l'Assemblée d'entendre la lecture générale du décret qu'elle a rendu concernant la taxe des patentes, ainsi que de plusieurs articles additionnels qui ont été jugés nécessaires pour l'exécution de la loi et dout plusieurs ont été renvoyés au comité.
Votre intention a été de supprimer tous le3 droits d'aides existants dans le royaume; or, Messieurs, dans l'énumération qui se trouve au premier article, on a oublié des droits très importants et très onéreux en même temps, qui sont de la même nature que ceux supprimés et qui se perçoivent dans la Flandre, sous le nom de droits des quatre membres, sur les boissons, le blé, la viande, les bestiaux, etc.
Je propose à l'Assemblée de décréter à l'article premier que le droit des quatre membres autres de même nature, perçus dans les ci-devant provinces de Flandre, Hainaut, Artois, Lorraine et Trois-Evêchés, seront compris avec ceux dont la suppression est décrétée par le même article.
le jeune. Je demande que vous compreniez, i ar une expression générale, tous les droits qui se perçoivent au même sujet; car si vous entrez dans quelque détail, ce serait conserver ceux que vous auriez oubliés, au lieu qu'une expression générale les abrogera tous.
Messieurs, il existait anciennement dans quelques parties du royaume,' un ordre de choses qui était que pendant lr! carême il se faisait une adjudication du droit de vendre de la viande pour les malades; et ce droit était attribué dans plusieurs endroits exclusivement, aux hôpitaux. Aujourd'hui, Messieurs, plusieurs des ci-devants corporations de bouchers réclament contre ce privilège exclusif. Je crois qu'il est dans
l'esprit de la Constitution d'abolir ce privilège exclusif; et je demanderais qu'il en fût fait une mentioQ expresse dans le décret qu'on vous propose.
, rapporteur. J'observe que la subsistance des hôpitaux ne doit pas être mise légèrement en péril ; je pense que dès que l'Assemblée s'est réservée de statuer sur leur patrimoine, sur tous les moyens de subvenir aux frais de la subsistance publique, celte partie-là doit être réservée.
On fa t une objection et l'on dit : mais le droit accordéaux hôpitaux pendant 40 jours de l'année, est inconciliable avec le droit de patentes que l'on accorde aux bouchers.
Ce droit-fà n'est pas plus inconciliable avec le droit de patentes qui s'accorde pour une année, qu'il n'était inconciliable avec la maîtrise qui s'accordait pour la vie d'un homme.
Je demande donc que l'ameudementdeM. Prieur soit réservé, jusqu à l'époque où l'on prononcera définitivement sur les moyens de subsistance des hôpitaux.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer quant à présent sur l'amendement de M. Prieur, et elle adopte les additions proposées par M. le rapporteur à l'article premier.)
, rapporteur. Il nous a paru, après y avoir mûrement.réfléchi, qu'on ne pouvait admettre la régie pour les cartes,san-* introduire po irunirès modique produit, des formules dont vous avez purgé le reste de votre système des finances, et que, ne pouvant pas prendre le moyen très ingénieux peut-être du timbre, sans exposer votre loi en q uelque sorte à la dérision des fraudeurs, vous devez plutôt renoncer au produit que toutes les combinaisons devaient vous offrir, pour vous en tenir au droit de patentes sur les cartiers et sur les débitants de cartes ; et nous vous proposerons de placer les fabricants de cartes dans la classe des vendeurs de boissons, c'est-à-dire au plus fort droit.
Tel est, Messieurs, l'avis du comité, qui, en conséquence, vous propose de joindre toujours au même article premier : « sont aussi supprimes les droits maintenant perçus sur les cartes à jouer. »
(Cette proposition est décrétée.)
, rapporteur. Nous proposons d'ajouter à l'article 2, après les mots : « perruquiers, barbiers, baigneurs-étuvistes et agents de change ». une désignation générale de toutes ces espèces d oftices, atin de les comprendre dans les suppressions.
L article serait donc rédigé comme suit :
« A compter de la même époque, les 'oftices de perruquiers, barbiers, baigneurs-étuvistes, ceux des agents de change et tous autres offices pour l'inspei tion et les travaux des arts et du commerce, les brevets, etc... »
Un membre : Et les inspecteurs du commerce?
, rapporteur. Ce n'est pas ici le moment de s'occuper de cet objet : ce ne sont pas des offices, ce sont des commissions du conseil.
(Les modifications proposées par le rapporteur à l'article 2 sont adoptées.)
, rapporteur. A l'article 3, nous
vous proposons de supprimer après le mot : « remettront », celui-ci : « pareillement ».
(Cette suppression est adoptée.)
, rapporteur. Nous proposons deux additions à l'article 4.
La première consis'e à ajouter après les mots : « les remboursements ci-uessus éoo icés seront faits par la caisse de l'extraordinaire », la disposition suivante: « et n'auront lieu que pour ceux qui sont en activité de commerce. ».
Il faut dire : « que pour ceux qui depuis deux ans auront renoncé à leur commerce. »
, rapporteur. J'adopte cette motion.
(La modification est décrétée.)
, rapporteur. La seconde addition est motivée par un billet adressé p tr le comité des finances au comité. En voici la raison : c'est que dans les corporations d'arts et métiers, il y avait beaucoup d'ouvriers qui, moyennant un acompte qu'ils versaient dans la caisse de la communauté, obtenaient la permission de travailler en aitea-dant dans la profession qu'exerçait cette communauté; nous vous proposons donc d'ajouter à l'article ces mots :
« Quant aux particuliers aspirant à la maîtrise qui justifieront avoir payé des sommes acompte sur le prix de la maîtrise qu'ils voulaient obtenir, et qui, à la faveur de ces payem nts, ont joui de la fuculté d'exer-er leur profession, ils seront remboursé-^ de ces avances dans les proportions ci-dessus fixées pour le* maîtres qui ont payé en entier le prix de la maîtrise. »
(Cette addition est décrétée.)
, rapporteur. Nous proposons de terminer l'article 5 comme suit : «.....et achever, s'il y a lieu, la liquidation des dettes contractées antérieurement au mois de février 1776, par les corns et communautés. »
C'est l'époque à laquelle le roi, par un édit, s'est chargé des dettes des communautés.
(Cette modification est adoptée.)
,rapporteur. Nous vous proposons d'ajout r à l'article 6, après les mots : « les fonds existant dans les caisses des différentes corporations..... », ceux-ci : « après l'apurement des comptes qui seront rendus au plus tard, dans le délai de six mois, à compter de la promulgation du présent décret. »
(Cette addition est décrétée.)
, rapporteur. Les articles 7, 12 et 14 du projet de uécret, tel que vous l'avez adopté, au moyen de la correction que vous y avez faite, nous ont paru devoir être leinisen deux articles, à la suite l'un de l'autre, et qui, au lieu d; former les articles 7, 12 et 14, formeront les articles 7 et 8.
Voici la rédaction que nous proposons :
« Art. 7. A compter du 1er avril prochain, il sera libre à toute personne de faire tel négoce, ou d'exercer telle professi >n, art ou métier qu'elle trouvera bon; mais elle sera tenue de se pourvoir auparavant u'un; patente, d'en acq iitterle prix suivant les taux ci-après détermine*, et de se conformer aux règlements de police qui sont ou pourront être faits.
: « Sent exceptés 'de l'obligation de ee pomrvoir de patentes
« 1° Les fonctionnaires publies, exerçait >âes fonctions gratuites ou salariées par le Trésor public, pourvu néanmoins qu'i's n'exercent point d'autres professions étrangères.à leurs fonctions;
« 2° Les cultivateurs occupés aux exploitations rurales ;
« 3° Les personnes qui ne sont pas comprises au.rôle de la contribution mobilière pour ila taxe de trois journées de travail ;
« 4° Les apprentis, compagnons et ouvriers à gage, travaillant dans îles ateliers fabricants pourvus 'de patentes;
« 5° Les propriétaires et les cultivateurs, pour la vente de leurs bestiaux, denrées et productions, excepté lie cas «oél ils vendraient les boissons de leur crû à pinte et à pot. » (Adopté.)
Art. 8. Les vendeurs et vendeuses, de fleurs, fruits, légumes, poisson, beurre et œufs, vendant dans les rues, balles et marchés publics, ne seront point rte nus de se pourvoir de patentes, pourvu qu'ils n'adeoit mi boutiques, ni échappes, et qu'ils ne «fassent aucun autne négoce, a la charge par eux de se conformer aux règlements de police. » (Adopté..).
, rapporteur. JJous vous proposons pour l'article la rédaction suivante :
« Tout particulier qui voudra .se pourvoir «chane patente, en fera, dans le mois de4é£embie de chaque année» à la municipalité du ressort *le son domicile, sa déclaration., laquelle sera inscrite sûr un registre à coudre; il tui en sera/délivré un certificat coupé dans la feuille -de :sa déclaration. -Ce certificat contiendra.soa nom et la valeur locative de ses habitations., boutiques, magasins et ateliers. Il se présentera ensuite chez le receveur de la con tri ballon mobilière,, auquel* Ï1 payera comptant la moitié du prix delà patente, suivant ies taux ci-après .fixés, et iera sa soumission de payer le surplus, -dans-le mois dé juin. Ce receveur lui délivrera quittance de l'acompte et récépissé de te .soumission au 4os4n certificat-, et sur là représentation de-ces certificats, quittance et récépissé, qui seront déposés et enregistrés aux archives du district, la patente lui sera délivréè au secrétariat 4u directoire pour l^amaée suivante.
, « -Ceux qui auront jiayéla moitié du iprix*de leurs patentes, et qui négligeront d'acquitter l'autre moitié au terme fixe, y seront coa tnadhts comme pour le payement de. la contribution mobilière.
x« Les déclarations, .certificats, .quittances,,; spur missions et patentes seront sur papier .timbré et conformes aux modèles annexés .au présent 'décret. »
Je propose que le payerbeiît 4e s patentes soft divisé ou par mois, ou par deux mois, ou au moins par quartier e.t par avance.'
, rapporteur. J'adopte 'le payement par quartier et par avance.
(La rédaction de l'article 9 est adoptée avec cet1 amendement.) >
, mpp&rteur* Jïojs vous proposons de substituer dans iles articles 10,12, et 14 le anat : « négoce », au mot : « commerce ».
Nous avons également compris dans l'article 14 les fabricants et débitants de cartes à jouer,, pi rce qu'ils doivent être pulaces dans la classe Ja .plus chargée de tous les habitants.
Nous avons, d'autre part, à répondre aax réclamations des maîtres d'hôtels parois4e Paris, qui se prétendent trop fortement taxés dans un mémoire qui vous a été distribué; nous répondons : il faut que l impôt soit réparti également. Si us propriétaire de 'iH-aisoa bourgeoise payait de sa maison louée ou habiitêe par -lui .-une beaucoup pims forte contribution foncière que ne payera sons tout autre forme le propiriêtake d'dan hôtel garni,, certainement il y aurait léfion pour les propriétaires de maisons bourgeoises. Tout le monde logerait en hôtel garni, et le Trésor public «n souffrirait.
Ge n'est pie le retranchement d'une virgule que je demande,, et espère que par le retranchement d'une seule virgule ils ,aérant imposés régulièrement et suffisamment. Le retranchement 4e celte virgule, c'est celle qui est après le mot hôteliers, et qui Je sépare des mots donnait à boire et à manger.. Je voudrais que ceux qui .tiennent hÔLel garni et donnent en même temps-a manger .'fussent soumis à La totalité du droit ; maïs que ceux qui ne sont qu'hôteliers ne fussent soumis qu'au droit simple.
Je demande donc la .suppression 4e la virgule.
, rapporteur. M. de Fol'tetille *«* raison, j'adopte sa- proposition:
(Les modifications proposées sont décrétées^
, rapporteur^ Il était 4it dans l'airtiicie 16 : « Les colporteurs exerçant :lie négoce dans les viMes, campagnes, ioires et marchés, ete1..,..: seront tespusdeiseipourwii rde [patentes. » (M propose d'ajouter île .mot ^ « forains ».
On propose paiement d'introduire la disposition suivante : « et après avoir renupliles foruia-liités prescrites ^ foi prendrait place après ces mots « coaiforméœnt aux modèles annesés au préseaé décret. »
; (Ces modifications sont décrétées.)
, rapporteur. Il nous aparu également convenable, «enqore bien, que . l'on .divisât les payements de Ja patente pour les marchands domiciliés de faire payer .comptant la patente des colporteurs; en conséquence: voici la nouvelle rédaction que nous preposons :
« Le prix entier des patentes des colporteurs forains, sera payé comptant, j
(Cette rédaction est décrétée.)
La suite de Ja discussion est feiavoyée à demain (il)-, i
J^i reçu de M. ;dé Menon-ville de Vifliers la lettre suivante :,
« Monsieur le Président,
« Là division qui règne dans le comité de la marine, et surtout l'accusation atroce que s'est permise Mer au soir un .de ses membres sur des collègues absents, nfayant .absolument &té l'es^* pêràncè qu'il pût s^y formé r urt résultat, me'défendent de continùerà y assister:'
i; Je prie donc. l'Assemblée de recevoir la ié mission d'une place qu'èile m'avait confiée^ »
lève la séance 1? 3 hetrres.
PRÉSIDENCE DE M» DE NO AILLES.
Séance du ermars
1791
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Messieurs, j'ai à vous donner connaissa«ce d'une lettre des admimstr tuteur s du département du 'Gard, qui font espérer à f Assemblée le rétaMissement prochain de l'ordre dans cette contrée, et rendent hommage aux soins de l'un des commissaires, è. la courageuse prudence du sieur d'&lbignac, et à la contenance toujours ferme de la garde nationale.
Voici cette lettre :
« Uzès, te 22 février 1791.
« Messieurs,
« Le directoire dta département ayant pris, comme nous avons eu 1"honneur de vous en instruire (Bruit), la'détermination de se transporter à Usés, et d'ayant exécutée, il se trouve à même de vous donner «les imseigaements plus ejyicts sur le véritable état des choses. Il vous rendra cempte des mesures qu'il a prises, d'après lès-quelles il peut espérer d'avoir dissipé ltarage qui menaçait ©es malheureuses contrées.
« Une parttie des malintentionnée, quai avaient excité des doubles dans Uzès, se voyant trompés dans iLeurs coupables espérances, se répandirent dans les campagnes, oti, par mille rapports ateurèes set calomnieux, ilssemèneat il a crainte eties «faim es ; sedoa eux, «les protestants avaient fondu à Pinaproviste sur les catholiques et avaient exercé contre eux les plus horribles cnaautés. (Bruit.)
« Ces rapports trouvèrerat peu de croyance ulaas le département ; mais une partie du Vivarais, depuis longtemps infectée de fanatisme, et travaillée par îles ennemis de la liberté, les reçut avidement, aussitôt il se forma un attroupement considérable, qui, par la célérité, le nombre et le caractère de ceux qui île composaient, devenait vraiment efîfrayant. (Brwt.) Environ deux mille de >ces factieux se portèrent sur la ville die Sainst-Am.bro5&e,itrop faibleraeint munie pour leur résister. Ils y commirent des excès, firent beaucoup de vols, pillèrent quelques maisons, désarmèrent une partie des citoyens et s'y établirent à poste fixe. Bientôt larjax, Saint-Jean, Rivière de Tey-rargues et 'qiœeflques autres communes d«a département firent enviahies; et les malintentionnés établirent un cordon qui interceptait toute communication avec le reste du département.
« Il parait que les desseins de ces ennemis ule la paix et de
la:Gc®stituUoin avaient des vues bien plus vastes. Le moment qiuii
s'approchait de rem- flacer les ecclésiastiques fonctionnaires
publics,ui se sont refusés à l'exécution de la loi, était un nouvel
aiguillon qui les excitait à tenter quelque entreprise d'éclat, qui put
empêcher le rassemblement des électeurs» En conséquence, à l'abri de ce
cordon de troupes établies, de Saint-Amhroise à Barjax, les chefs de ee
p serti dangereux, projetèrent au mépris des décrets, un nouveau
rassemblement dans da plaine de Jailès, Pour
« Cet état de choses était très alarmant, et nos craintes étaii-eni eaeare .augmen tées par des relations exagérées et infidèles. -Cependant le «département ôtait iattaqné pur plusieurs d§ ces communes occupées par les factieux, et un rassemèile-ment formidable s'accroissait de jour en jour, le château de Jalès, recelait des députés dont les délibérations pouvaient avoir des suites terribles. Ces motifs nous parurent plus que suffisants pour exciter notre sollicitude, et nous faire prendre toutes les précautions que la prudeace exige en pareil cas.
« Nous eûmes donc l'honneur, Messieurs, de vous expédier un courrier extraordinaire, avec les dépèches pour les ministres de Sa Majesté, en même temps les troupes nationales du département furent requises, et nous écrlvlme.i au département de là Drôœe, pour loi demander de tenir prêt un corps de 'gardés nationales» qui pût se porter sur la ville du Pont-Saint-Esprit, et de la défendre en cas d'attaque, le prier de requérir une brigade d'artillerie de la garnison de Valence qui.pût servir le canon du Pont-Saint-Esprit, et l'empêcher de tomber en'Xreles mains des factieux qui annonçaient ï*envie de tf'én emparer.
« "Nous demandions encore à ce département'et à la municipalité de Mentélimart, de faire entrer dams le département da'Gard le régiment de Sois-sonnais. rions'requîmes aussi le directoire du département des Bouches-du-Rhône, de nous faire passer une compagnie de canonniers de la 4gar-nison de Marseille., et le régiment de Lyonnais en garnison â Tarascon. Les corps .administratifs de la Drôme et des Bouches-du-Rhône ont déployé, dans cette circonstance difficile, tout le patriotisme et l'esprit public qui les caractérisent. Ils ont su concilier, avec ce désir qu'ils avaient de secourir leurs"voisins en danger, tout'le respect que l'on doit aux formes que les lors près rivent. Trois cerits hommes de Lyonnais ont été envoyés à Uzès, un corps d'artilleurs delà garde nationale de Marseille a été averti de marcher sur nos premières demandes, et les districts d'Arles et de Turascon ont reçu la réquisition de nous porter un prompt secours, si le cas le demandait. D'un autre côté, trente artiîleurs de Valence avec un officier sont déjà arrivés à Pont-Saint-Esprit.
« Aidés de ces secours et ton jours en nous concertant avec M. d'Albignac, il a été formé trois corps différents, composés de troupes de ligne et de gardes nationales ; l'un -sous les «rare d'AHais, avec ordre de protéger le nord du district de cette villa, et notamment Saint-Ambroise et ses environs, l'autre & Uaès pour achever de raraiener le calme et en imposer aux malveitaits qui menaçaient-de s'y porter; le troisième entra, ;au iPont-Saint-Esprit, destiné à défendre cette vile, à secourir 'Barjax, Saint-Jean et les 'commuiaes oir-con voisin es.
« Le directoire du département a hautement annoncé les dis positions tes plus indulgentes et les plus pacifiques. Il n'a négligé aucun moyen pour faire! nentror dans leurs foyers ies malheureux que la crawle ou leurs fautes en avaient
éloigués, et il a eu le bonheur de voir que ses soins n'étaient pas inutiles. Une proclamation a élé aussi publiée pour éclairer les citoyens trompés. Nous vous en adressons une copie.
« Nos soins, nos dispositions, le courage, la prudence de M. d'Albignac, la bonne conduite de nos commissaires, la contenance ferme des gardes nationales, la bonne volonté des troupes de ligne, et surtout le patriotisme éclatant de nos voisins en ont singulièrement imposé aux malveillants et aux malintentionnés. Déjà un grand n >mbre des émigrants d'Uzès est rentré. L'assemblée du cha-teau de Jalès est, dit-on, dissipée par les précautions s âges du département de l'Ardèche, dont nous avions réclamé les bons offices, et l'on assure que le rassemblement considéiable des factieux a diminué; nous venons enfin d'apprendre qu'ils ont évacué la ville de Barjax.
« Telle est, Messieurs, la position où nous sommes, en ce moment nous espérons qu'à chaque instant elle deviendra meilleure; nous nous estimons très heureux, si nous parvenons à ramener la paix, en ménagant le sang; elles moyens de douceur seront toujours mis en usajie conformément à vos intentions. Nous aurons soin de vous instruit^exactement des faitsulténeurs et des mesures que nous jugerons convenables.
« Nous sommes avec un profoni respect, Messieurs, etc., etc.
« Signé : Les membres composant le directoire du département du Gard. »
Je dois également vous donner lecture d'une lettre des officiers municipaux de la ville de Marseille, auxquels les administrateurs du département du Gard ont eu recours p«»ur réclamer, un renfort de leurs troupes nationales et de ligue. Elle mérite d'être conuue de l'Assemblée; la voici :
« Messieurs,
« Vous devez être persuadés que non seulement nous ne mettrons aucun obstacle au départ de la compagnie de canonniers qui est en garnison dans notre ville, mais que nos volontaires artilleurs et les baiaillons de notre garde nationale s'empresseront de voler à voire secours, si nous en recevons la réquisition légale du directoire du département des Bouches-du-Rhôue. C'est à ce corps administratif de prescrire leur marche; ils n'ont besoinque de cet ordre; le nôtre sera donné d'avance, car nous u'avons pas vainement juré de mai tenir la Constitution; et depuis que le royaume est agité par les intrigues des ennemis publics, nous n'avons cessé d'avoir les yeux sur ie déparlement qui vous est confié, et'ou nous prévoyions que le fanatisme et le délire des ci-devant privilégiés occasionneraient quelque fâcheuse explosion.
« Soyez tranquilles sur le succès d'une expédition commaudée au nom de la liberté : les patriotes sauront mouiir pour la défendre, et 20,000 Marseillais sont pi êts à verser 1- ur sang pour une cause aussi belle. (Applaudissements.) Nous écrivons au même instaut au département des Bou-ches-du-Rnôue, pour lui annoncer que noire garde nationale e t prête à marcher au prem er signal, et le prier de requérir les troupes de ligne de se jo ndre à elle, si les circonstances l'exigent. » (Applaudissements répétés.)
J'ai cru uevoir, Messieurs, vous donner connaissance decette lettre, où vous trouverez avec plaisir les sentiments qui caractérisent les vrais
Français, amis des lois et généreux défenseurs de la Constitution.
On a cherché, dans le cours de la discussion de la malheureuse affaire de Nîmes, à rappeler des événements qui se sont passés à Marseille, et qu'on avait l'air de vouloir assimiler à ceux qui ont eu lieu dans nos infortunées contrées; on a comparé la conduite des officiers municipaux de Marseille, dans certaines circonstances, à la conduite de3 municipaux de Nîmes dans les troubles qui ont éclaté à différentes époques; et certes la différence ne saurait être plus frappante.
Aux jours des malheurs de la ville de Nîmes, celle de Marseille envoya àNimes cinquante charges de blé, et en confia la distribution destinée aux malheureux qui avaient le plus souffert des désordres du mois de juin dernier, à la société des amis de la Constituiion, calomniée par ceux dont elle a déjoué les complots et démasqué l'hypocrisie.
Un si bel exemple de générosité ne fut pa3 sans effet sur les membres qui composent cette société patriotique; jaloux de l'imiter, ils ouvrirent une souscription bienfaisante, qui fournit dans l'ins'ant un fonds de dix mille livres : cette somme fut versée parmi les infortunés dont les besoins furent reconnus les plus pressants. Que fit pour eux la municipalité, dont vous avez enfin délivré la ville de Nîmes?... Rien.
Un de MM. les secrétaires fait lecture des adresses suivantes :
Adresses des districts de Pont-à-Mousson, de l'état-major de Rouen, de la société de- Amis de la Constitution, séante à Douay, de celle séante à Aigueperse, contenant divers avis et mesures à prendre dans les circonst ances actuelles, et l'adhésion laplusentière aux décrets de l'Assemblée.
Adresses du sieur de Torcy, prêtre et recteur de Saint Orner, département du Pas-de-Calais; des sieurs curé de Noire-Terre, Crézières, Saint-Georges de Viliennes, des officiers municipaux de la ville du Port-Louis, de Saint-Laids-le-Châ-tel, et communauté de Ravigny, contenant que la presque totalité des fonctionnaires publies ecclésiastiques, a prêté le serment de maintenir la con titution civile du clergé.
Adresse des fabriciens et habitants de la paroisse de Saint-Saiurnin de la ville de Tours, et une autre d'un grand nombre de citoyens de la même ville, tendant à obtenir la conservation d es paroisses Saint-Saturnin et Saint-Pierre-le-Piiel-lier.
Un membre fait lecture à l'Assemblée d'une adresse des négociants d'Auxerre, dans laquelle ils lui annoncent qu'ils viennent d'organiser leur tribunal de commerce, d'après le mode et les principes décrétés par l'Assemblée.
Un membre annonce que, dans le district de Saint-Dié, département des Vosges, la grande majorité des fonctionnaires ecclésiastiques a prêté le serment sans restriction ; il joint la liste qui en a été faite.
Les administrateurs du département de Paris sont introduits à la barre.
, au nom de la députation, s'exprime ainsi :
« Messieurs, le co~p3 électoral du département de Paris a terminé ses élections et l'administration s'est organisée. Nous sommes les en-
fants de la loi ; c'est au législateur que dous devons notre premier hommage.
« Il est maintenant comp'et ce système général d'administration, qui, sur toute la surface de l'Empire, donne des interprètes aux pétitions du peuple, des organes aux lois, di s fonctionnaires au pouvoir exécutif, des mandataires à chaque département et à chaque cité, fies intermédiaires à la collection des citoyens. Pendant quelques instants, au milieu de l'appareil d'une grande création, et quandtou'es lesauciennesinsiitutions renversées n'offraient plus que les ruines de vingt siècles, la France ne pouvait que présenter l'image d'un véritable chaos : il disparaît ; un ordre durable lui succède; les postes sont fixés, les places remplies, les droits déterminés. Nous avons échappé à cette mort qui atteint les Empires comme les individus. Vous n'a\ez pas seuleme.it reculé la durée de notre société politique; vous avez recommencé son exisieuce ; c'est au sein même de la tempête qui allait l'engloutir, que vous avez refait à neuf le vaisseau de l'Etat; il peut maintenant, sans péril, se frayer une nouvelle route à de grandes destinées.
« Nous partageons, comme Français, la gloire de vos travaux; mais comme officiers publics, nou* ne devons nousoccuper que de nos fonctions.
« Le Corps législatif et le monarque sont les représentants du peuple, et nous n'en sommes que les mandataires. Le monarque est l'exécuteur de la loi, et nous sommes les organes du monarque dans cette exécution. Ces différents rapports déterminent tous nos devoirs. Nous ne puuvons pas èxprim r la volonté du peuple; nous ne pouvons que vous transmettre ses besoins, ses vœux, ses espérances.
« Comme la lumière se répand d'un seul foyer sur l'Univers, la loi sortant toute furmée du sein du Corps législatif et des mains du monarque, ne trouve plus que des sujtts. Nous la recevons du chef de l'Empire; et en la faisant exécuter, nous devons les premiers l'exemple de l'obéissance. Nous placerons surtout au nombre de nos devoirs, nos soins pour la tranquillité publique.
« De tous les débris des anciennes institutions et des anciens abus, s'est formee une lie inlecte, levain corrupteur que des hommes pervers remuent saris cesse pour en développer les poisons. Ce sont les factieux qui, pour renverser la Constitution, persuadent au peuple qu'il doit agir par lui-même, comme s'il était sans lois et sans magistrats. Nous démasquerons ces coupables ennemis de son repos, et nous apprendrons au peuple que si la plus importante de nos fonctions est ne veiller à sa sûreté, son poste est celui du travail, fécondé paria paix, de l'industrie active, et des vertus domestiques et sociales. » (Vifs applaudissements.)
répond:
« Messieurs, l'Assemblée nationale n'aurait rempli que bien imparfaitement l'étendue des devoirs qui lui étaient imposés, si, contente d'avoir crée une Constituiion libre, et promulgué de justes lois, elle n'eût pas ensuite porté son attention sur les moyens d'en assurer la jouissance à la nation qu'elle représente. De bonnes lois ne suffisent pas au bonheur du peuple, il faut encore qu'elles soient fidèlement exécutées. La Constitution française promet ce double bienfait, puisque la confection des lois y est confiée aux représentants du peuple, et l'exécution à ses mandataires; puisque les parties du pouvoir qu'il ne peut exercer par lui-même, il a le droit
de ne les déléguer que d'après sa confiance. C'est el!e qui vous a sagement appelés, Messieurs, aux fonctions importantes que vous allez remplir, et vous y répondrez dignement en fai-ant exécuter la loi sans réserve pour aucun individu. De cette confiai ce établie et justifiée, renaîtront sans effort l'ordre et la tranquillité publique, principal objet des voeux qui nous restent à former pour le bonheur du peuple. La sollicitude de ses mandataires sera le fond ment de sa sécurité. Assuré qu'on veille suffisamment pour lui à l'inté êt public, son intérêt personnel et l'at-irait du repos le ramèneront naturellement au travail qui lui est utile et au calme qui lui est nécessaire.
Vous, Messieurs, dont les plus douces, cou.me les plus honorables fonctions sont d'être l'organe de ses besoins et de ses vœux; vous qui, par là même, devenez les dépositaires naturels de sa confiance, vous lui prouverez à la fois qu'il doit et qu'il peut se reposer sur votre surveillance ; et, si pourtant le souvenir de trop longs malheurs excitait de trop longues inquiétudes, peut-être suffirait-il d'apprendre a ce peuple généreux et sensible, que chaque mouvement tumultueux auquel il se livre, imprime une lâche à la Révolution qui est son ouvrage, retarde l'achèvement de la Constitution qu'il chérit, et fournit à ses ennemis le prétexte d'une calomnie nouvelle contre ses plus zélés défenseurs; et si, après d'aussi justes efforts, quelques factieux entraînaient le peuple à s'opposer au vœu de la loi, alors vous lui en feriez connaître toute l'énergie, et vous en ordonneriez la plus entière exécution. (Applaudissements répétés.)
L'Assemblée nationale vous invite à as.-ister à la séauce.
Un membre demande l'impression et l'insertion des deux discours dans le procès-verbal.
(Cette motion est décrétée.)
, au nom du comité des rapports. Messieurs, vous avez connaissance d'une.piainte etd'une dénonciation faites depuis plusieurs mois à l'Assemblée nationale par M. Fournier, propriétaire à Saint-Domingue, contre MM. de Gas-tries, de la Luzerne, ex-ministres,etcontrebeaucoup d'autres agents subalternes du pouvoir exécutif. Votre comité des rapports, auquel l'affaire a été portée, a pris communication des. différentes pièces et il s'est rendu compte que le sieur Foui nier demandait à l'Assemblée la cassation d'un très grand nombre d'arrêts rendus contre lui à Saint-Domingue.
Votre comité, Messieurs, a jugé que ni la dénonciation faite par le sieur Fournier, ni ses plaintes contre les arrêts rendus n'étaient de la compétence de l'Assemblée nationale, qui a déjà manifesié ses intentions de ne pas prendre connaissance de ce qui regarde le pouvoir judiciaire.
En conséquence, il s'est persuadé que cette affaire était susceptible d'être renvoyée soit à la haute cour nationale, soit au tribunal de cassation et il vous propose le décret suivant :
« L'A-semblée nationale décrète que le sieur Fournier est renvoyé à se pourvoir tant à la haute cour nationale qu'au tribunal de cassation ».
président, cède le fauteuil à
, ex-président.
, M. Fournier a été condamné {ar tous les tribunaux auxquels il s'est adressé. B ne s'est adressé à l'Assemblée que parce qu'il n'avait p1 us d'autres moyens d'interjeter appel que la voie de la dénonciation.
Je demande l'ordre du jour sur 1% motion du comité des rapports.
Plusieurs membre» demandent l'ajournement.
IL n'y a pas lien à ajournement et voici mes raisons qui sont bien simples :
Que demandte^on dans ce momeat-ci? On vous demande de juger qu'un particulier qui a été bien ou mal condamné par son supérieur de Saint-Domingue* qui s'est pourvu en cassation au conseil et qui a été débouté dans sa» demande en cassation,, ait la faculté de retourner aux autres tribunaux.
Or, Messieurs,, votre principe le plus sacré en matière de jurisprudence est que: les procès doivent avoir un terme. Si le sreur Fournier a été jugé,, le sieuir Fournier, que je ne connais pas et auquel je ne veux pas nuire, n'a pas le droit de se pourvoir an nouveau, tribunal oa cassation., parce que le conseil du, roi arejetésa requête en cassation.
Je demande doBc la question préalable sur la motion du comité, parce qu'il n'y a pas lien à délibérer-
Je croîs, que le sieur Fournier se plaint contre des: arrêts du propre mouvement; et je vois cependant qu'il convient s"ê,tre pourvu au ccMiséiL pax une requête, ce qui pourrait, faire supposer quelea arrêts intervenus ne sont pas du propre mouvement.
Il est clair que«tout cela mérite d'êire examiné, et si le sieur Fournier a été repoussé par des arrêts du propre mouvement, rl est erocore dans tous ses droits et peut tous les faire valoir.
Je me réduis donc à Phjonrnement peur en faire un rapport plus circonstancié.
Je remarque dans cette affaire deux intérêts : eel'nide l'individu et celui de la société. M. Fournier doit porter aux tribunaux la plainte qui lui est personnelle; mais, quant à la dénonciation, elle intéresse la société entière. L'Assemblée nationale ira pas te droit d'e la rejeter sans la connaître.
Je propose dtenc la motion suira-ate :
«L'Assemblée nationale décrète qufil n'y a lias lieu à délibérer sur le renvoi du sieur Fournier au tribunal de cassation , attendu que cette, affaire est durt ssort des tribunauxordinaires^elle charge son comité de lui faire le rapport de la dénonciation dui sieur Fournrar, relative aux délits par lui imputés aux agents diu pouvoir exécutif. »
Plusieurs membres demandent la priorité pour l'ajournement.
» rapporteur. J'adopte l'ajournement.
(L'Assemblée adopte l'ajournement et charge son comité des rapports de lui rendre un caraple détaillé, de l'affaire.)
Deux maréchaux d>e camp, MM. Louis et Joseph Hautefeuille, partis ce matin pour aller dans le département du Calvados, où ils ont leurs possessions, ont été arrêtés à Saint-Germain-en-Laye, faute de? passeport.
Plusieurs membres : Gek ne nous regarde pas1 L'ordre du jour»?
Aucune loi de l'Assembiée n'exige de passeport ; au contraire, la déclaration des droits assure la plus grande liberté.
Je demande que l'Assemblée donne des ordres pour que la liberté so.t rendue ài ces Messieurs. {BauiL)
Je demande que l'Assemblée passe à. l'ordre, dm jour.
L'ordre du jour est,la liberté.
Un"grand nombre de membres à gauche appuient l'ordre du jour.
Je demande si l'Assemblée doit passer à l'ordre du jour quand il s'agit de: k liberté, de: la vie d'ua citoyen.
Jecreis que MM. Hautefeuille n'ont pas eu tort de voyager sans passeport; il n'y a. aucune Loi qui oblige d'en avoir.
Je vais mettre aux vois, la proposition de l'ordre du joiur. (Emmures prolonges, à droite.) .
Je ne veux point abuser des moments de l'Assemblée. Je me m'opposerais point du tout à l'ordre du jour, si, eni attendant, notre liberté n'était pas violée. Nous avisas décrété qu'on pouvait aller partout où l'on voulait, et cependant, à quatre lieues de Paris, on vous air-rête sous prétexte que vous n'avez pas de pasfe-port.
Il n'est pas possible de passer à l'ordre du jour.
Je demande la parole.
Plusieurs voix à gauche : Nous demandons que M;, l'abbé Maury soit prié de se taire.
Il y a déjà un décret. Je demande qu'on passe: à l'ordre du jour.
M demande alors que le roi soit prié de: tenir la maiu à l'exécution des décrets et que h s citoyens soient libres de voyager dans le royaume.
Je demande l'exécutian du décret d'hier matin. L'Assena bfée a décidé que tout particulier a le- èroit de lui adresser une pétition; or, je vous demandé quelle pétition......
Plusieurs membres' à gawhe A l'ordre du jour !
.. est plus respectable que eejNte de deux citoyens privés de leur liberté parce qu'ils vont à cioquaDte liiieues d'ici.
Souvenez-vous, Messieurs, qu'avant, de passer à l'ordre du jourr, vous avez deux décrets à rendra qui sont d'une justice rigoureuse,:. le premier, c'est d'ordonner l'élargi s-sement de ces deux voyageurs. (Murmures à
gawcke^je De demande pas encore peiur «aie la liberté' d« continuer leur route ; mais je-dis qu'à morns que vous n'ayez de- justes raisons d1© les priver de Iteur liberté (Murmures)...
Plusieurs membres à gauche ; L'ordre d» jour !
Mais vous ne- m'avez pas entendu!... Je dis qu'il faut que la liberté soit rendue aux deux personnes détenues, èt je soutiens qu'il n'y a pas un homme avec quelque no-lie® de justice qui* pwisse se refuser à mon v«u.
Je demande en seceud lieu que l'Assemblée nationale déclare s'il faut ou s'il ne faut pas un passeport pour voyager- éaus; le r©ya®n»e. 'Ne pas le déclare®, et souffrir que la liberté soit violée, ee serait tercdre ®b piège aux (titoyees français qui, jusqu'à présent, croyaient avoir liai liberté de voyager dans le royaume.
Plusieurs membres « gauche s Voussavez bien que cette question est ajournée.
Si vous; apercevez quelques raconvénjeitLs dans l'exercice du; dsoit. dont ont joui jusqu'à présent tous les citoyens de voyager sans passeport, je vous supplie, je vous somme même de vous i xpliqu«rr car il! me faut pas que les citoyens soient trompés,, ou bien voue Jetez la France dans le gouvernement le plus arbitraire et le plus absurde*. (Murmures à gauche.)
Un membre m gauche : Il y a uni décret. formel,
Qa ne Ifessécafte pas.
Lès représentants "de La. nation ont été envoyés pour faire des lois. Vous ne voudrez pas sa&s) doute qu'en lisant vos décrets on puisse mettïe à l'a marge l'observation doat parle Montaigne, en racontant les lois de différents pays, exception pour l'ami. Qu'on soit amis, qu'on soit eonemis, on doit avoir des lois uniformes. Or, Messieurs, il est bien manifeste qu'il n'y a aucune loi qui exige des passeports.
J'ai été le premier martyr de cette incertitude, j'ai'été le premieï citoyen français arnêté pouï n'avoir pas de passeport; vous avez voulu que ma liberté me fût rendue; elle doit l'être aux autres citoyens qui sont dans le même cas.
Il est de droit naturel de brûler la cervelle à l'homme qui en arrête un autre.
Plusieurs membres : A l'ordre 1
Yoifô, Messieurs, à quoi vous exposez par votre silence les. voyageurs, vos concitoyens. Expliquez-vous d!ôfféf de grâce;- si vous exigez des passeports, je ce m'y oppose pas ; mais si oû en extee sans votre autorité, je die que le: royaume est livré au gouvernement le plus arbitraire, je dis qu'il est livré, à i'anacehie. (Murmures.)
Jedemande que l'Assemblée décrète dans l'instant s'il faut, oui ou non* des passeports, et que, dans tous les cas, on rende ia liberté à deux citoyen s français arrêtés sans aucune instruction, sans aucun jugement...
Plusieurs, membres à gauche. : Savez-vous s'il n'y a pas eu d'information?
Qni me répond, Messieurs»
n'en ne sait pas si cela est vrai, :0e, coasme ans une nation libre, comme dan&une Assenu-blée ou l'on parle souvent de liberté, on doit en connaître les. premiena droite,,j'observe qu/undé-cret de prise de corps ae se présume pas,, et qu'à moins qu'il ne soit connu, il faut accorder provisoirement la libellé.
Je combats toutes les propositions qui vous sont faites, autres que celle de l'ordre du jour. La première, qui consiste dans le renvoi au pouvoir exécutif, est on ne peut pas j plus oiseuse. Si vous l'adoptiez, il n'est pas urne contestation qu'on ne pût vous porter pour obtenir le même renvoi», et, uns eapè«e de irecom-mandation au roi. 11 est temps déterminer enfin I les misérables difficultés dont on Vous environne ! sans cesse.
M. l'abbé Maury vous demande d'autre part | que vous accordiez la liberté à deux particuliers ! qui ont été, dit-on, illégalement arrêtés ; eh mais 1 j se n'est pas. là l'objet d'une loi. Si la loi a été I violée» qu'eu s'a.lresse à l'exécuteur- de la loi. | La déclaration des dtroits permet à tout citoyen | de voyager dans le royaume. Il faudrait une loi pour le défendre; il n'en faut pas pour le permettre. D'ailleurs, la même question renaîtrait à chaque instant, soit qu'on exigeât des passeports, ou qu'on les proscrivît.
Et, pour ma part, je dis qu'il n'y a pas lieu: à faire une loi qui défende ou qui permette les, passeports : une telle loi serait inutile et, quelque parti que vous preniez* sait que vous défendiez d'exiger des passeports» soit que vous or-j donniez d'en exiger, il ae«a toujours permis, dans certains cas, dans des circonstances critiques, aux dépositaires de la loi, aux gardiens de la police; d'arrêter ceux qui leur seront suspects, qu'ils soient munis ou non de passeports. (Murmures à dvoiieCe n'èst pas alors au Corps législatif, c'est aux tribunaux à prononcer sur la continuation de l'arrestation.
D'un autre côté, la loi serait dangereuse dans des moments de troubles, dans des moments où l'on sème de toute part l'aspit de sédition et de discorde.
Ainsi, Messieurs, je demande que, sur toutes les propositions qui sont, faites, ou passe à It'urdre du jour ; il n'y a,.à mon sens, aucune autre manière de prononcer.
Je demande La. parole.
Un grand nombre de membres à gauche se Lèvent pour demander l'ordre du jour.
Mi. de Gazalèa dirmanxle liai parole...
Plusieurs membres à gauche : Non! non!
.. D'autre, paiit,.on demande que la discussion soit, fermée. ' Je vais consulter 1 Assemblée.
(L'Assemblée, consultée, décide que îa discussion est. ferméer). .
Un grand nombre de' membres de la droite entourent la tribune. (Tumulte prolongé.)
Je* vais «Msvléat l'Assesn-biée sur la motion: de Fordi e du jour présentée par M. Lanjuinais.
(L'Assemblée décide qu'elle passe à l'ordre du -jour.>
C'est une horreur; c'est uu déni de justice I
Il est affreux de couper la parole quand on demande la liberté...
Vous renversez la Constitution par ce décret-là.
Ce décret-là est atroce.
Je n'entends rien à tout cela.
Vous violez la liberté des personnes et des opinions. (Le tumulte augmente.)
Les membres de la droite se répandent en groupes au milieu delà salle et font entendre de violentes protestations.
Je fais la motion qu'on i asse désormais à l'ordre du jour sur tout ce qu'on dira ; du momi nt où vous commencez à établir le pouvoir arbitraire, nous ne pouvous plus juger.
Plusieurs membres à gauche : A l'ordre !
C'est le dernier degré du despotisme.
La parole est à M. Roussillon pour faire un rapport sur l'importation des tabacs et leur taxe à l'entrée du royaume.
, au nom des comités des contributions publiques, de commerce et d'agriculture. Messieurs, par votre décret du 13 du mois dernier, vous avez permis l'entrée du tabac....
Rendez une loi qui empêche de voyager.
Faites régner l'ordre dans le royaume.
Empêchez les émeutes à Paris, et l'on ne voyagera pas.
Je fais la motion que les prisonniers dont on vous demande en vain la liberté soient amenés à l'Abbaye et jugés ; il faut accélérer cette affaire-là.
Les membres de la droite, placés en groupe au milieu de la salle, appuient tumultueusement la motion de M. de Fol eville.
(Une très grande agitation règne pendant quelques instants.)
J'ordonne à tous les membres attroupés au milieu de la galle de reprendre leur place.
M. de Folleville. Ma motion est appuyée, Monsieur le Président. Si vous ne voulez pas la mettre aux voix...
Il y a un moyen de concilier tout, c'est d'envoyer à la haute cour nationale.
Il est en vérité inconcevable
que la minorité de l'Assemblée ne puisse pas se faire entendre. Je demande qu'au moins on relise le décret qui vient d'être rendu, alin que nous sachions pourquoi on a passé à l'ordre du jour.
Mettez donc ma motion aux voix, Monsieur le Présidentielle est appuyée. Je ne me lasserai pas.
Ni moi non plus.
Un grand nombre de membres à droite : Nous appuyons la motion de M. de Folleville.
Je demande, Monsieur le Président, que vous rappeliez à l'ordre cette partie de l'Assemblée. Il est irrespectueux... (Interruptions.)
Il est insupportable qu'on ne puisse parler....
Tout représentant de la nation a le droit de faire une moiion : M. de Folleville en fait une, vous devez la mettre aux voix.
Il est temps après un si long tumulte... (Le tumulte redouble à droite.)
L'Assemblée a décrété qu'elle passerait à l'ordre du jour; faites exécuter le décret, Monsieur le Présidents
Monsieur le Président, la motion que les prisonniers soient amenés à l'Abbaye...
Un membre à gauche : Oui, que le premier interrupteur soit conduit à l'Abbaye.
Je prie tous les membres de la droite de reprendre leur place et de faire silence.
Ma motion est appuyée, vous devtz la mettre aux voix.
La motion est appuyée.
Un grand nombre de membres à droite : Aux voixl aux voix !
Si vous n'avez pas d'oreilles, descendez du fauteuil.
Tant que je serai vivant, je. ne descendrai point de mon poste.
J'observe qu'il est temps enfin de réprimer...
(avec violence). Ma motion est appuyée! (Grande agitation à droite.)
Je demande la parole pour vous accuser, Monsieur le Président.
Il n'y a qu'une manière de mettre fin à cette dispute; c'est de faire mention dans le procès-verbal qu'on est passé à l'ordre du jour en renvoyant au pouvoir exécutif.
Il est temps après un si long tumulte que le calme se rétablisse dans l'Assemblée. (Le t tumulte recommence dans Vextrémité droite.) .
Je crois qu'il est nécessaire qu'on prenne des mesures pour imprimer à tous les membres le respect qui est dû aux décrets qu'elle prononce. En conséquence, comme le désordre qui règne dans cette partie de l'Assemblée n'est autre chose qu'une révolte contre les décrets que M. le président vient de prononcer (Vifsapplaudissements à gauche), ie demande que le Président soit autorisé et chargé expressément d'user de tous les pouvoirs dont il est investi pour maintenir le bon ordre. (Applaudissements à gauche; murmures prolongés à droite.)
(dans le tumulte). Il est reconnu que vous voulez nous chasser d.'ici; mais nous n'en sortirons pas.
C'est l'Assemblée tout entière qui fait du tumulte, et ce tumulte cessera; l'Assemblée sera d'accord si vous voulez bien mettre aux voix cette rédaction :
« L'Assemblée nationale, considérant que ces sortes d'affaires regardent le pouvoir exécutif...
Plusieurs membres : Il y a un décret 1 L'ordre du jour!
Mais il est certain qu'il faut trouver un moyen...
Plusieurs membres : L'ordre du jour !
Je fais la motion que le décret soit rédigé en ces termes...
Un membre : Il est rendu.
Nous demandons que cette affaire soit formellement renvoyée au pouvoir exécutif.
L'Assemblée a déjà décrété sur cette motion qu'elle passait à l'ordre du jour.
Le secrétaire a dû rédiger le décret qui vient d'être rendu.
Plusieurs membres à droite : Nous demandons la lecture du décret tel qu'il a été rendu.
Nous demandons que la municipalité réponde de l'arrestation des deux particuliers.
parle avec violence dans le bruit.
Un membre à gauche : Envoyez cet homme-là à l'Abbaye 1
Monsieur Roussillon, vous avez la parole.
, au nom des comités des con-, tributions publiques, de commerce et d'agriculture. Messieurs, par votre décret...
Je demande la parole pour une motion d'ordre. (Bruit à droite.)
A l'ordre, Messieurs! (Le bruit redouble ) . . j :v ; i
Faites votre métier, Monsieur le Président, mais faites-le honnêtement.
Je prie les membres qui se trouvent dans le milieu de la salle de reprendre leur place.
Les membres de la droite reprennent successivement le chemin de leurs gradins.
, au nom des comités des contributions publiques, de commerce et d'agriculture. Parle décret du 13 février, vous avez permis l'entrée du tabac étranger en feuille, par les ports qui seraient désignés, moyennant une taxe de 25 livres par quintal. Vous avez accordé une remise du quart du droit sur le tabac qui serait importé directement de l'Amérique par navire français, et vous avez renvoyé à vos comités des contributions publiques, d'agriculture et de commerce, la proposition qui vous a été faite de recevoir les tabacs des îles espagnoles et du Levant, et de n'en laisser importer aucun qu'en boucauts.
Je viens vous soumettre l'opinion de vos deux comités sur ces différents objets. Vos comités ont pensé que l'intérêt bien entendu de notre commerce, autant que les liens qui nous unissent à l'Espagne et à la Russie, avec laquelle nous avons un traité de commerce dont nous pouvons tirer de grands avantages, exigeait que nous ne traitassions pas les tabacs des possessions espagnoles et de l'Ukraine, moins favorablement que ceux des Etats-Unis; qu'il importait également à la prospérité de notre commerce direct au Levant commerce d'autant plus avantageux qu'il se fait presque entièrement par échange, de permettre l'importation des tabacs qui peuvent être récoltés dans la Salonique et la Tagnie en Syrie.
Vos comités sont également d'avis que les fabriques existantes dans l'ancienne province d'Al-. sace et à Valenciennes puissent recevoir les tabacs étrangers dont elles ont besoin pour l'emploi de ceux du crû.
Mais, en même temps qu'il a paru juste à vo3 comités de donner à la culture, à la fabrication et au commerce des tabacs en France, toutes les facilités qu'ils peuvent désirer, vos comités ont dû s'occuper des moyens d'éviter la fraude d'un droit destiné à remplacer une partie des produits de l'ancienne ferme du tabac.
Le premier de ces moyens est d'interdire l'importation du tabac autrement qu'en boucauts. {Il s'élève du bruit à droite.) ;
(;fadressant au côté droit). A l'ordre!
Avec le mot: « A l'ordre! », que voulez-vous dire, Monsieur le Président? Je fais la motion que vous cédiez le fauteuil à M. de Mirabeau.
Plusieurs membres à gauche ; A l'Abbaye M. de Murinais!
Un membre à gauche : Je demande qu'on fasse entrer la garde pour arrêter M. de Murinais.
Je déclare à la nation que
M. de Murinais troublé l'Assemblée nationale et je le rappelle à l'ordre.
Ët moi, je VOUS : dénonce à la nation.
(Un violent tumulte s'élève à droite.)
sé CoUvrè. (Rires à droite.)
Un membre à droite : A bas le chapèau 1
(s*adressant ail Président). Je demande la parole contre yous.
, se découvrant. Eh bien, vous avez la parole contre moi.
C'est moins une accusation qu'une question.
Plusieurs membres : Gé n'est pas là l'ordre du jour.
Rappelez-vous, Monsieur d'Eprémesuil, que Vous avez demandé la parole contre moi et je vous prie de la prendre.
Ce qué vient de dire M. le Président me paraît d'un fort mauvais exemple. Il a dit : « Je déclare à la nation que M.; de MuriQais trouble l'Assemblée nationale. »
Je demande ce que signifie de faire une dé* claration à la nation ; je prie M. le Président de dire ce qu'il entend par ces paroles et quel en doit être l'effet* Gela me paraît un cri séditieux, qui ne doit jamais sortir ae la bouche d'un président de l'Assemblée nationale.
Plusieurs membres à gauche ; A l'ordre ! À l'Abbaye 1
Je réponds à Monsieur le préopinant que, comme la nation ne peut jamais être assemblée que dans la personne de ses représentants* lorsque j'ai interpellé la nation, c'est l'Assemblée nationale entière que j'ai interpellée. (Vifs applaudissements à gauche et dans les tribunes.)
veut parler.
l'en empêche.
Maintenant, je déclare que j'userai de toute la sévérité de la loi, de tout le pouvoir qui m'est confié, pour réprimer ceux qui excitent un désordre aussi scandaleux. (Tumulte à droite; vifs applaudissements à gauche et dans les tribunes.)
Monsieur le Président, leâ tribunes ne doivent pas applaudir ; je vous prie de les rappeler à l'ordre.
Si fait, elles Sont payées pour cela.
Plusieurs membres à droite quittent la salle.
(Le calme se rétablit.peu à peu.)
Monsieur Roussillon, continuez votre rapport.
, rapporteur {continuant son
rapport). Cette forme rendra très difficiles les soustractions, soit à bord des bâtiments* soit à l'entrée des magasins, ou à leur sortie, elle facilitera à cés emmagasinements la réexportation et les recensements.
Une autre précaution qui n'est pas moins essentielle consiste à n'admettre les tabacs que par certains ports ou bureaux; les effets de cette restriction sont sensibles.
Yous avez encore à prévenir l'abus qui pourrait être fait de la faveur que vous avez voulu accorder à votre navigation, et il est du devoir de vos comités de vous proposer une mesure à cet égard* Cette mesure fait partie des dispositions que je vais vous soumettre si vous les adoptez. Les articles du nouveau tarif relatif au tabac seront rédigés en conformité.
Voici le projet de décret que nous yous proposons :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu les comités des contributions publiques, d'agriculture et de commerce, décrète ce qui suit :
« Art. 1er. L'entrée dans le royaume du tabac
fabriqué sera prohibée, et il ne pourra être importé du tabac en
feuilles autrement^qu'en bou-cauts, et par les ports et bureaux qui
seront ci-après désignés.
« Art. 2. L'importation par mer des tabacs en feuilles n'aura lieu que pour les tabacs des Etats-Unis d'Amérique, des Colonies espagnoles, de la Russie et du Levant. -
« Lesdits tabacs devront être importés directement, savoir : ceux des Etats-Unis d'Amérique par navires desdits Etats ou par vaisseaux français ; ceux des colonies espagnoles, par bâtiments espagnols ou français ; ceux de l'Ukraine, par vaisseaux russes ou français, et ceux du Levant par navires français seulement.
« L'importation desdits tabacs par les bâtiments des autres nations est défendue.
« Art. 3. L'entrée des tabacs des Etats-Unis, des colonies espagnoles, de l'Ukraine et du Levant ne Sourra avoir lieu que par Rayonne, Rordeaux, ochefort, La Rochelle, Nantes, Lorient, Morlaix, Saint-Malo, Gran ville, Honlleur, Cherbourg, Rouen, Le Havre, Dieppe, Saint-Val ery-sur-Somme, Roulogne, Calais, Dunkerque, Marseille, Toulon, Cette et Port-Vendres.
« Art. 4. Il sera encore permis d'importer des tabacs étrangers en feuille et en boucauts, quelle que soit leur origine, par les douanes de Strasbourg et Valenciennes, en acquittant un droit de 25 livres par quintal.
« Art. 5. Le même droit de 25 livres par quintal sera perçu sur les tabacs qui seront importés par les bâtiments des Etats-Unis d'Amérique, espagnols ou russes.
« Art. 6. Il ne sera perçu que 18 1. 15 s. par quintal sur les tabacs importés par bâtiments français venant directement des États-Unis d'Amérique, des colonies espagnoles, de Russie et du Levant.
« Et ne seront réputés bâtiments français que ceux construits en France, commandés par des Français et dont au moins les deux tiers de l'équipage seront Français. »
(La discussion est ouverte sur ce projet de décret.)
Monsieur le rapporteur, je vous demande si vous regardez et si vous traitez les tabacs venant des colonies comme étrangers.
, rapporteur. Non, Monsieur,
parce que ce serait déclarer les colonies étrangères.
Je demande que les tabacs des colonies soient traités comme ceux des étrangers.
J'appuie la motion de M. de Folleville, parce que si vous admettiez les tabacs de nos colonies comme tabacs français, vous anéantiriez le commerce français.
, Rapportent. J'âdôptë la proa position ; mais la députation des colonies s'y refusera.
Si MM. les députés des colonies s'y refusent, ils préféreront leur intérêt particulier à l'intérêt général de la patrie* Or, je demande ci l'intérêt particulier doit l'emporter sur l'intérêt général.
Un membre .« Je crois que c'est prématurément que nous traitons, puisqu'on va faire un tarif pour les denrées venant des colonies.
Je demande l'ajournement sur les tabacs des- colonies.
(L'Assemblée décrète l'ajournement)
Je demande que le port des Sables-a'OlOnne soit compris au nombre des ports ouverts à l'importation des tabacs étrangers.
, rapporteur. Cela est impossible; ce port ne possède pas d'entrepôt.
(L'amendement de M. Cochon de l'Apparent est rejeté.)
Je demande que la douane pour l'importation des tabacs soit accordée à Lille au lieu de Yalenciennes.
Je ne vois pas pourquoi on priverait cette dernière ville de sa douane, 'tandis que les deux villes placées aux deux extrémités du département peuvent avoir chacune une douane.
(L'Assemblée décrète qu'il y aura une douane à Lille et une à ValencienUes.)
, Vatnè. L'article 6 porte : « Ne seront réputés bâtiments français que ceux construits en France, commandés par.des Français et dont au moins les deux tiers de l'équipage seront Français. »
Il me semble qu'un navire étranger devient français, lorsqu'il a été acquis par un Français.
Je demande le renvoi de cette partie de l'article au comité, ou tout au moins qu'il soit ajouté à l'article : « En attendant l'acte de navigation, seront censés navires français ceux qui seront en l'état des ordonnances actuelles de la marine. »
C'est-à-dire, Monsieur, que, par cette disposition, vous nous privez de la construction navale.
, rapporteur. On peut ajouter à la rédaction du comité : « Sauf les règlements qui seront adoptés par l'Assemblée nationale. »
Un membre demande l'ajournement de cette
question jusqu'au momept où l'Assemblée s'occupera de l'acte de navigation.
(Cet ajournement est décrété.)
Le projet de décret est adopté en ces termes :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu les comités des contributions publiques, d'agriculture, et de commerce, décrète ce qui suit ;
Art. Ier.
« L'entrée, dans le royaume, du tabac fabriqué sera prohibée et il ne pourra être importé du tabac en feuille autrement qu'en boucauts, et par les ports et bureaux qui seront ci-après désignés.
Art. 2.
L'importation par mer des tabacs en feuille n'aura lieu que pour les tabacs des Etats-Unis d'Amérique, des colonies espagnoles, de la Russie et du Levant.
« Lesdits tabacs devront être importés directement, Savoir i ceux des Etats-Unis d'Amérique, par navires desdits Etats, ou par vaisseaux français; ceux des colonies espagnoles par bâtiments espagnols ôu français; ceux de l'Ukraine, par vaisseaux russes ou français ; et ceux du Levant, par navires français seulement.
« L'importation desdits tabacs par. les bâtiments des autres nations est défendue*
Art. 3.
« L'entrée des tabacs des États-Unis d'Amérique , des oolonies espagnoles > de l'Ukraine et du Levant, ne pourra avoir lieu que par Bayonne , Bordeaux, Rochefort, la Rochelle, Nantes, Lorient, Morlaix, Saint-Malo, Gran-ville, Honfleur, Cherbourg, Rouen, le Havre» Dieppe i Saint-Valery-sur-Somme » Boulogne, Calais, Dunkerque, Marseille, Toulon, Cette et Port-Vendres.
Art. 4.
« Il sera encore permis d'importer des tabacs étrangers en feuille et en boucauts, quelle que soit leur origine, par les douanes de Strasbourg, Valenciennes et Lille, en acquittant un droit de 25 livres par quintal.
Art. 5.
« Le même droit de 25 livres par quintal sera perçu sur 'les tabacs qui seront importés par les bâtiments des Etats-Unis d'Amérique, espagnols ou russes.
Art. 6.
« Il ne sera perçu que 18 l. 15 s. par quintal sur les tabacs importés par bâtiments français, venant directément des Etats-tJnis d'Amérique, des colonies espagnoles, de Russie et du Levant. »
lève la séance à dix heures.
présidence de m. de noailles.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires donne lecture du procès-verbal des séances d'hier au matin et au soir.
Je demande qu'on ôte du procès-verbal la mention qui est faite de l'éclat indécent fait hier par un membre qui cependant n'en a pas été puni.
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
J'ai reçu de M. le ministre de la justice les deux notes suivantes :
Première note.
« Le roi a donné sa sanction, le 18 de ce mois :
« 1° A deux décrets de l'Assemblée nationale du 19 décembre dernier, concernant la vente de biens nationaux aux municipalités d'Arc-sur-Tille et d'Asnières ;
« 2° A trois décrets du 21, concernant pareille vente aux municipalités de Glermont, de Mar-chiennes et Houdan ;
« 3° A vingt et un décrets du 22, concernant pareille vente aux municipalités de Vaunavez, Eurrej Coucy-le-Château, Ardes, Repara, Grest, Allex, Mauglier, Saillans, Sauvigny, Roynat, Soyans, Auriple, Autichamp, Mozun, Poet-Cel-lard, Saon-Celas, Granne, Douchy, Ghabrillànt, Rouen ;
« 4° Au décret du 26, concernant pareille vente à la municipalité de Kerling ;
« 5° Â sept décrets du 27, pour pareille vente aux municipalités de Dienay, Saulx-le-Duc, Ville-comte, Solignac, Sauxillanges, Saint-Germain-Lembron et Issoire.
« 6° A huit décrets du 28, pour pareille vente aux municipalités de Gharnay, Cluny, Marsolan, Avranches, Berzé-la-Ville, Pruzilly,. Çhàlons et Chalon-sur-Saône-,
« 7» A trois décrets du 29, pour pareille vente aux municipalités de Gerilly,Ghâlons et Gannat;
« 8° A cinq décrets du 1er janvier, pour pareille vente aux municipalités d'Aurenne, Saint-Merd-de-Gimel, Saint-Martial-de-Gimel, Saint-Pardoux-la-Groisille et Bassignac-le-Bas ;
« 9° Au décret du 3, pour pareille vente à la municipalité d'Aincourt ;
« 10° A deux décrets du 6, pour pareille vente aux municipalités d'Auzayet de Villeneuve;
« 11° Et enfin à huit décrets des 7, 8, 23 èt 30 du même mois de janvier, concernant pareille vente aux municipalités de Lauzun, Ghâlons, Neufchâtel, Rosoy, Gondon, Trucy, Laon et Glermont.
« Le ministre de la justicë transmet à M. le Président les doubles
minutes de ces décrets, sur
« Signé : M.-L.-F. Duport.
« A Paris, le 27 février 1791. »
Deuxième note.
Le roi a donné sa sanction, le 18 de ce mois :
« 1° Au décret de l'Assemblée nationale, du 10 du même mois, concernant le renvoi au tribunal du premier arrondissement du département de Paris, de l'instance d'entre les prétendants droit à la succession de Jean Thierry ;
« 2° Au décret du 11, relatif à un fonds extraordinaire dé 8,991,248 livres pour les dépenses de l'expédition ordonnée pour les îles du Vent ;
« 3° Au décret du même jour, concernant le traitement de chacun des membres du tribunal de cassation et du commissaire du roi ;
« 4° Au décret des 11 et 12, relatif aux requêtes civiles ;
« 5° Au décret du 12, relatif à la vente et au commerce des eaux-de-vie dans le département du Pas-de-Calais ;
« 6° Àu décret du même jour, concernant la réunion de plusieurs communes au district de Louhans;
« Et l'établissement de tribunaux de commerce dans différentes villes;
« 7° Au décret du même jour, concernant l'union du bourg de la Guillotière à la ville de Lyon ;
« ,8° Au décret du 13, concernant l'exécution de l'article 4 du titre IV, et de l'article 12 du titre VI des décrets sur l'organisation de la gendarmerie nationale.;
« 9° Au décret du même jour, concernant ie rétablissement des doctrinaires dans la jouissance des bâtiments, enclos et jardins dépendant du collège de'Bastia;
« 10° Au décret du même jour, concernant la liquidation de la finance de3 offices municipaux, et le payement des gages des officiers municipaux, jusques et compris le 31 décembre 1790;
« 11° Au décret du même jour, relatif au payement dégagés d'offices, lorsque les états en auront été vérifiés par le commissaire du roi, directeur général des liquidations, et décrétés par l'Assemblée nationale;
« 12° Au décret du 14, concernant les indemnités à payer à divers porteurs de breyets de retenue ;
« 13° Au décret du même jonr, concernant la réduction et circonscription des paroisses de la ville de Narbonne;
« 14° Au décret du même jour, concernant un article additionnel au décret sur le timbre ;
« 15° Et enfin au décret du même jour, concernant rengagement du domaine de Fénestrange aux ci-devant duc et duchesse de Polignac.
« Le ministre de la justice transmet à M. le Président les doubles minutes de ces décrets sur chacune desquelles est la sanction du roi.
« Signé ; M.-L.-F. ÛUPORT.
« Paris, ce 24 février 1791..»,
Lors de ma présidence, on a omis de faire mention dans le procès-verbal de la prestation de serment de M. Paulv, consul de France à Christiania, en Norvège.
Je demande que cette omission soit réparée.
(Cette motion est décrétée.)
Je dois annoncer à l'Assemblée que M. le ministre de la guerre m'a informé qu'il avait reçu le serment civique de M. de Goigni.
au nom du comité ecclésiastique, présente un projet de décret sur le choix des vicaires des églises cathédrales et paroissiales, lequel est ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale, considérant que par ses précédents décrets sur la constitution civile du clergé, et particulièrement par l'article 22 du titre II, il aurait pu s'élever des doutes sur l'inamovibilité des vicaires de l'évêque, appelés à former son conseil ; que la liberté accordée au premier pasteur 4'appeler auprès de lui ceux des ministres des autels qu'il jugera les plus propres à l'aider de leurs avis et à partager ses travaux, pourrait faire penser qu'en cas de mort; ou de démission, son successeur pourrait choisir un autre conseil, et qu'une pareille incertitude sur leur état rendrait le choix des vicaires de l'évêque très difficile; qu'une infinité d'ecclésiastiques, actuellement fonctionnaires, que leur mérite appellerait à ces places, pourraient les refuser, en considérant qu'ils quitteraient un état certain pour un état incertain et momentané; qu'il est égalementessentield'assurer aux vicaires particuliers des paroisses appelés par les curés à les aider daos les fonctions pastorales, .un état indépendant de l'incertitude de la vie du pasteur qui les aura choisis, a décrété et décrète ;
« Art. 1er. Les ecclésiastiques appelés et choisis par l'évêque, dans les formes prescrites par les précédents décrets, pour être vicaires de l'église cathédrale, et être son conseil, conserveront leurs places nonobstant là mort où la démission de l'évêque qui les aura choisis, et les rempliront sous son successeur, qui aura seulement le droit de remplacer, par son choix, les places qui viendront à vaquer dans son conseil.
« Art 2. Il en sera usé de même à l'égard des vicaires particuliers des,paroisses, qui continueront à remplir les fonctiôns de vicaires sous les successeurs aux curés. »
La mesure que vous propose votre comité n'est ni sage, ni conforme aux principes que vous avez décrétés.
S'il est contraire à la , constitution civile du clergé que les vicaires puissent être destitués arbitrairement, l'est-il donc moins dè mettre un évêque dans la dépendance d'un conseil qu'il n'aura pas formé? Je demande en effet qui voudra être évêque à de pareilles conditions.
Si l'avis du comité était adopté, on ne trouverait en effet aucun ecclésiastique zélé et animé de l'esprit de ses devoirs, qui voudrait une place où,dans la dépendance d'un conseil qui ne serait pas de son choix, il ne pourrait pas raire tout le bien qu'il désirerait. Le dégoût serait la conséquence d'une loi qui le rendrait dépendant des autres et qui ne lui laisserait pas la faculté de purifier le choix d'un prédécesseur peu délicat ou peu éclairé.
La question préalable est trop peu sur un pareil projet ; je demande qu'on passe à l'ordre du jour.
Le conseil des évêques, une fois bien organisé, doit nécessairement être toujours un foyer actif de lumières ét de vertus, et tout homme qui pense bien s'honorera toujours de suivre J'avis de ceux qui forment son
conseil. L'instabilité des places irait directement contre vos vues; les hommes de talent .quels que soient leur profession et leur état, veulent une situation fixe et ont raison de repousser la versatilité du sort.
Trop longtemps les vicaires ont été les jouets de l'irascibilité et du caprice des curés; il est temps enfin de mettre un terme aux inquiétudes continuelles de cette portion si utile des prérogatives de la morale chrétienne et que vous rendiez plus respectables, en les mettant à l'abri de l'arbitraire, ces ministres de l'Eglise. Il faut donner aux fidèles des ministres à qui ils puissent accorder leur confiance ; or, on sait qu'un homme récusable à volonté, ne peut pas l'iGspirer. S'ils n'ont ni talents ni vertus, ils seront payés et repoussés de leurs fonctions; mais, dans le cas contraire, leur place est à eux et rien ne peut les en dépouiller.
Je conclusjt ce que l'on mette aux voix article par article le projet du comité.
Le décret sur l'organisation4 civile du clergé a pourvu à tout en ôtant toute espèce de gêne à la liberté du choix et en restreignant celle des renvois et la soumettant à des conditions sévères et favorables aux vicaires. 11 ne faut pas souffrir qu'on vienne ainsi, par des articles de superfétation, vous proposer de détruire des articles constitutionnels; car il n'y aurait bientôt plus rien de stable.
Des vicaires ne sont que des mandataires des évêques ou des curés; ce sont leurs hommes de confiance; ils sont responsables de leurs faits ; ils ne doivent donc pas être forcés de garder auprès d'eux des gens qui ne leur conviendraient peut-être sous aucun rapport. La raison veut qu'on ne donne sa confiance qu'à des hommes de son choix ou dont on a validé librement le choix ; le projet du comité irait précisément à l'èncontre de ce principe.
J'appuie l'ordre du jour sur le projet de décret.
Plusieurs membres appuient la demande de l'ordre du jour.
On .demande l'ordre du jour; je vais le mettre aux voix.
(L'épreuve est commencée.)
rapporteur. Je demande la parole.
La délibération est commencée.
Monsieur le Président, vous n'avez pas le droit d'empêcher M. le rapporteur de répondre; d'ailleurs, l'Assemblée n'est pas assez nombreuse pour délibérer sur un objet d'une si grande importance.
M. le Président. Si M. Merlin veut être de bonne foi, il conviendra que ce n'est pas lorsque la délibération est commencée que l'on peut observer que l'Assemblée n'est pas assez nombreuse; c'est avant qu'il faut le faire.
Vous avez manqué à votre devoir en n'accordant pas la parole à M. le rappor teur.
Plusieurs membres : L'ordre du jour 1
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'elle passe à l'ordre du jour sur le projet de décret du comité.)*
au nom du comité ecclésiastique. Messieurs, vous aves renvoyé à votre co-mité ecclésiastique la pétition des vicaires des églises supprimées, je suis chargé de vous en rendre compte.
La réclamation de ces vicaires vous fut d'abord présentée par M. Bouche; elle intéressa votre justice et votre sensibilité ; vous chargeâtes votre comité ecclésiastique de vous en faire le rapport.
, Sous un gouvernement juste, le fonctionnaire public actif et fidèle ne doit point perdre sa place . lorsqu'il est possible de l'employer sans nuire à personne ; et si la patrie n'a plus besoin de ses services, il doit être consolé de-'ce malheur par un secours ou par un traitement. Cette règle, en général fort équitable, est d'une rigoureuse justice lorsqu'il s'agit de ministres de l'autel, *qui ne sont parvenus à leur poste que par des études longues et coûteuses, à qui maintenant toute autre profession semble interdite, qui ont bien mérité de l'état par des travaux longs et pénibles, qui enfin n'ont pas d'autre moyen de subsistance que l'exercice de leur ministère.
Le comité ecclésiastique vous proposa d'employer les vicaires des églises supprimées dans celles où sont réunis les fidèles ci-devant confiés à leurs soins ; et ce à mesure qu'il y aurait des places de vicaires vacantes dans ces églises, et par préférence à tous autres que les curés des paroisses supprimées.
Cette disposition ne pouvant s'appliquer aux vicaires des églises réunies pour former les paroisses cathédrales, votre comité fut d'avis d'accorder à ceux-ci une demi-pension de vicaire jusqu'à ce qu'ils eussent obtenu un autre office ecclésiastique.
Des préventions s'élevèrent contre la première partie de ce projet : on prétendit qu'il était contraire à la Constitution et au bon gouvernement des paroisses ; qu'il y avait des moyens plus convenables de subvenir aux vicaires déplacés. Afin d'arrêter une discussion qui se prolongeait et qui ne paraissait pas devoir être à l'ordre du jour, la proposition fut renvoyée au comité pour être rapportée de nouveau.
Elle le fut quelques jours après : votre comité persistait dans son premier avis; mais, dans ce moment-là même, séduits par une erreur qui s'était glissée dans la constitution civile du clergé, et que vous avez depuis corrigée, d'après le procès-verbal de vos séances, vous veniez d'écarter la demande d'inamovibilité que le comité vous faisait pour les vicaires de fa cathédrale, dans le cas de changement d'évêque.
Un de nos collègues saisit adroitement cette circonstance ; il invoqua le préjugé désavantageux qu'elle semblait répandre sur l'autre question ; il fit valoir les inconvénient^ de l'inamovibilité des vicaires et ta règle d'en laisser le choix aux nouveaux curés. Cette idée fut reprise encore et développée par d'autres membres de l'Assemblée ; il en résulta un décret qui, sur la demande de replacement, ordonne qu'il sera passé à l'ordre du jour, et renvoie la question de secours ou d'indemnité aux comités réunis des pensions et deg affaires ecclésiastiques.
On s'est rassemblé au comité des pensions; Ie3 membres de ce comité n'ont point voulu entendre parler de replacement, prétendant que la de-
mande de replacement était rejetée par la résolution de passer à l'ordre du jour. Mais il est assez connu que cette formule nedéciderien,et que c'est celle qu'on emploie, précisément pour ne rien préjuger.
Les membres du comité des pensions étaient les plus nombreux. Il fut arrêté de demander un décret pour faire envoyer» par les directoires de département, l'état des vicaires déplacés par l'effet des suppressions, avec la note de leurs services et de leurs âges. Il devait y avoir dans le déoret un article" pour inviter les curés à choisir par préférence leurs vicaires parmi les ci-devant vicaires des églises supprimées.
Ce décret vous a été proposé ; mais ies vicaires vous demandaient alors à être entendus à la barre. Vous avez bien voulu les y admettre, et ne pas statuer auparavant.
Un curé (1}, connu par ses écrits et par son patriotisme, s'est rendu l'avocat des vicaires ; il a parlé devant vous en leur faveur, avec le même zèle et le même talent qu'il avait déployés pour la cause de la liberté et pour la réforme ecclésiastique. Il vous a peint ces jeunes et laborieux ministres, victimes de la fausse interprétation d'une loi régénératrice, et qu'ils n'ont pas cessé de bénir. 11 vous les a fait voit* privés, sans leur faute, de leurs places et de leur subsistance ; remplacés par des ci-devant religieux, par d'autres ecclésiastiques déjà stipendiés par la nation et qui recueilleraient ainsi un double salaire. Il a demandé pour ces vicaires, non pas des pensions qui seraient onéreuses au peuple, et qu il n'est point nécessaire d'accorder, mais l'honneur du ministère, le pain du travail, qui ne peuvent être ôtés au fonctionnaire quand ses fonctions subsistent, et quand il a rempli fidèlement ses devoirs.
Vous avez applaudi à ce discours, vous en avez ordonné l'impression, et l'avez renvoyé, non pas au comité des pensions, mais au seu f comité ecclésiastique, pour en faire le rapport. Il a examiné de nouveau* cette affaire, et n'a point changé d'opinion.
Il serait inutile d'insister sur les puissants motifs d'équité naturelle qui appuient la réclamation des vicaires des églises supprimées ; mais il faut examiner, en peu de paroles, si les objections faites contre eux sont aussi fortes qu'on a paru le croire, et si elles doivent déterminer vos suffrages.
On leur oppose la Constitution, qui n'a rien décidé à cet égard, et l'on presse, on exagère de prétendus inconvénients, attachés à la nature humaine, et dont les plus sages institutions ne peuvent jamais être exemptes.
La Constitution attribue aux curés le choix de leurs vicaires ; mais elle
n'a point prévu le cas dont il s'agit; elle n'a point attribué aux curés
des églises nouvellement circonscrites et formées par l'adjonction d'un
troupeau qui avait ses pasteurs délégués; elle ne leur a point attribué
le droit de les déplacer arbitrairement; elle n'a point dit que la mort
ou ie changement d'un curé serait une cause ^destitution pour ses
vicaires : elle a dit au contraire que ce n en serait pas une pour les
vicaires de l'évêque, dont la stabilité serait bien plus dangereuse que
celle des vicaires d'un simple curé, si une stabilité toujours soumise
au jugement de l'évêque et de son conseil pouvait avoir de véritables
dangers.
Pourquoi hésiterions-nous à le dire puisque c'est une vérité? Le choix arbitraire des prêtres appelés vicaires, et leur destitution libre par les curés sont une invention des bas siècles, une chose inouïe dans l'Eglise primitive.L'Assemblée nationale a heureusement corrigé cet abus; elle a rendu les vicaires inamovibles, comme tous les prêtres l'étaient selon l'ancienne discipline, sauf le jugement de l'évêque et de son conseil.
Il est encore incertain si le successeur d'Un curé pourra changer à son gré les vicaires qu'il trouvera dans la paroisse. Le comité ecclésiastique vous a proposé de statuer, à cet égard, pour les vicaires de paroisse ordinaire, comme Vous avez fait dans la constitution civile du clergé, pour les vicaires de la paroisse cathédrale. La raison, l'équité, l'analogie exigent la même mesure pour les uns et pour les autres. Le nouveau curé sans doute choisira ses vicaires; mais il attendra que leurs places soient vacantes, ou bien il fera approuver par l'évêque et son conseil un changement, qui ne sera jamais accordé par des considérations d'intérêt personnel, nui ne sera jamais refusé pour l'avantage de l'Eglise, pour le bien de la religion.
Au reste, quelque parti que prenne l'Assemblée nationale sur cette dernière question, quand même elle croirait pouvoir permettre à un curé nouveau ce qu'elle refuse a un nouvel évêque, il n'y aurait pas de conséquence à tirer contre la pétition des vicaires des églises supprimées : ce qu'ils sollicitent ne serait alors qu'une mesure momentanée, une exception passagère et bornée à leurs personnes, exception déjà reçue pour les curés des églises réunies, même à la cathédrale, et autorisée par toute la conduite de l'Assemblée nationale, qui, dans chaque institution qu'elle a formée ou coordonnée au régime de la liberté, a toujours séparé comme objets très distincts les moyens de reproduire et de perpétuer l'institution qu'elle organise ou qu'elle corrige, et ceux de la composer au moment même où elle reçoit l'existence ou subit la réforme.
Reste le chapitre des inconvénients. Il s'établira de la discorde entre un curé et des vicaires qu'il n'aura pas choisis; elle éclatera scandaleusement ; les vicaires, ne devant point leur place au curé, lui obéiront mal; ils manqueront à leurs devoirs.
Si ces inconvénients étaient réels et sans remède, nous dirions : Les mêmes se trouvent, et bien plus probables, à rendre les curés supprimés vicaires de droit de leurs anciens confrères, devenus leurs supérieurs; et vous avez voulu qu'ils le sussent, vous les y avez même excités en faisant, dans ce cas, leur condition meilleure. Les mêmes, et bien plus graves, se trouvent à rendre les curés supprimés pour former la cathédrale, vicaires de droit de l'évêque et ses coopé-rateurs dans le gouvernement de tout le diocèse^ et vous avez adopté cette disposition. Les mêmes
se trouvent, et bien plus à craindre, puisqu'ils seraient permanents, à laisser en place les vi*. caires de l'évêque au décès de celui qui se les associa; et vous- en avez fait une disposition constitutionnelle.
Quels sont doncles Goopérateurs à l'abri du venin delà discorde? Mais plutôt, quels sont ceux que le choix de l'qn par l'autre en a préservés? Les ministres de la religion qui ne seront pas retenus par la doctrine de paix et de charité dont ils doivent le précepte et l'exemple, le seraient-ils par le faible motif d'un choix, ouvrage léger d'une volonté presque toujours versatile en imprudence ou abusée?-
Çommis par je curé directement, ou ,délégué par le curé, en vertu de la loi, le Vicaire est le coopérateur du curé; il est son égal dans le sacerdoce, mais son subordonné dans les fonctions. S'il manque à son devoir, s'il1 ne se conforme pas aux justes intentions de celui qui le délègue, il doit prendre un emploi dont il s'ac-quite mal : l'évêque est là pour juger le différend avec son conseil, pour écarter la surprise et l'arbitraire.
Inutile de prétendre qu'il y a des choses qu'on ne peut pas dire à l'évêque et à son conseil, et qui doivent autoriser le renvoi d'un» ancien vicaire par le euré d'une église nouvellement circonscrite. C'est d'abord une de ces preuves ambitieuses qui ne prouvent rien à force de trop prouver. Il s'ensuivrait que les vicaires devraient être amovibles au caprice des curés; par un juste retour aux anciennes règles, vous avez statué précisément le contraire. Mais il y a une réponse plus directe : tout cé qui regarde l'état extérieur des ministres doit se régler sur des preuves extérieures et non pas sur des faits qui ne peuvent ni se dire ni se prouver. Voilà le principe constamment observé dans tous les temps et reconnu par la constitution civile du clergé. Tout autre système ressusciterait l'inquisition et le despotisme, et avec eux tous les vices qui en sont inséparables.
Encore si l'on voulait, à défaut d'emploi, assurer un modique traitement aux vicaires des églises supprimées. Mais non; l'état présent des finances ne le permet guère, et vos principes sur les pensions /et récompenses exigent 30 années de service pour obtenir ces sortes de grâces. Aussi, le comité des pensions n'avait dessein que de proposer, en forme de secours, quelques mois de traitement aux vicaires dépouillés, sans leur faute* d'un état que vos décrets ont déclaré inamovible. Ne vaut-il pas bien mieux, puisque c'est le vœu de la raison, de l'équité naturelle et de la Constitution même, puisque enfin nul obstacle ne s'y oppose ; ne vaudrait-il pas mieux rendre ces ecclésiastiques aux fidèles qui les regrettent et leur accorder la préférence pour les places de vicaires des nouvelles paroisses, après leurs curés supprimés?
C'est là ce que votre comité ose vous proposer pour la troisième fois ; ainsi, vous aurez, en acquittant une dette légitime, épargné les fonds du Trésor public, et récompensé par une protection éclatante des prêtres qui le3 premiers, dans le clergé, ont signalé leur patriotisme et leur soumission à la loi de l'Etat.
Cette mesure est si juste, elle est si raisonnable que nous n'avons pas balancé à vous engager de lui donner un effet rétroactif, à compter du Ie? janvier 1791, époque où a commencé l'injuste déplacement des vicaires des églises supprimées et leur remplacement par des religieux déjà sti-
pendiés pour ne rien faire beaucoup plus que lés vicaires pour porter le poids de la chaleur' et du jour.
Par rapport aux vicaires des églises supprimées pour former les paroisses, et qui se trouvent par là sans emploi, il paraît convenable de les rèn-voyer au comité des pensions. Ils doivent être secourus, en attendant qu'ils1 aient un autre emploi. Ceux qui ont mérité un vicariat dans une simple paroisse ne sont pas pour cela présumés capables de coopérer au. gouvernement général du diocèse ; ils ne sont pas en grand nombre, et plusieurs sont déjà replacés ; ce sera pour le Trésor public un léger fardeau.
Voici le projet de décret que nous vous proposons :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité ecclésiastique, décrète :
« Art. l6r. Les vicaires des églises paroissiales et succursales qui ont été ou seront supprimées, en vertu des précédents décrets, auront droit, pourvu qu'ils aient prêté le serment prescrif par la loi du 26 décembre dernier, de requérir, suivant l'ordre de leur ancienneté dans le sacerdoce, et par préférence à tous autres que les curés des églises supprimées, les places de vicaires qui ont été ou seront vacantes dans les églises auxquelles aura été réuni en tout ou en partie le territoire decelle où ils exerçaient leurs fonctions de vicaires ; et ce, nonobstant tout choix qui aurait pu être fait au contraire avant ou après la publication du présent décret-, en conséquence, aucun titulaire de cure nouvellement circonscrite, ne pourra refuser de les admettre àremplir, en cet ordre, lesdites places vacantes dans lesdites églises, à compter du lor janvier 1791, à moins qu'ils n'aient obténu déjà un autre office ecclésiastique.
« ArL %. A l'égard des vicaires des églises supprimées pour former une paroisse cathédrale, et qui se trouveront sans emploi par l'effet de ladite suppression, ils sont exceptés de~la disposition précédente, mais les directoires de déparlement en enverront l'état au comité des pensions avec la note de leur âge, de la nature et du temps de leurs services. Le comité des pensions et celui des affaires ecclésiastiques présenteront ensuite leurs vues à l'Assemblée nationale sur les moyens de secourir lesdits vicaires jusqu'à ce qu'ils aient pu être replacés. »
La première disposition de ce décret du comité est dans le même esprit que le décret précédent et je demande que l'on suive à cet égard la même mesure. Je trouve surprenant qu'après avoir admis les ci-devant moines à concurrence, on veuille les exclure à présent. C'est le mérite qui doit être préféré ici. Si un moine est préféré à un jeune vicaire, c'est que le curé lui aura trouvé plus de mérite.
Quant à la seconde partie du décret, relative aux secours à donner aux vicaires non fournis d'emplois, c'est un objet sur lequel vos comités ecclésiastiques et des pensions peuvent se concerter.
Messieurs, les vicaires sont de bons sujets ou ne le sont pas. S'ils ont prêté serment, comment se peut-il qu'ils ne trouvent pas de places,dans un moment où il y a beaucoup de prêtres qui refusent de prêter leurs serments? S'ils sont de mauvais sujets, ils ne doivent trouver de place nulle part. (.Applaudissements..)
et plusieurs autres membres demandent la question préalable sur le projet de décret.
J'appuie la motion de M.Gamus qui, si je me rappelle bien, renvoie une partie du projet de décret du comité au néant, et l'autre aux comités ecclésiastique et des pensions réunis.
Je l'appuie par une considération très sage, qui sort de celle qui vous est présentée et qui ne tend pas à examiner si l'affaire est jugée ou si elle ne l'est pas; mais, en général, je trouve que nous nous occupons prodigieusement trop du clergé» Je voudrais que nous nous occupassions d'autre chose que de leur faire.payer leurs pensions et que nous les laissions dormir en paix. (Applaudissements.)
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'article l9r du projet du comité et renvoie les dispositions de l'article 2 aux comités ecclésiastique et des pensions réunis.)
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre de M. de Ségur, colonel des chasseurs du Hainaut, qui est ainsi conçue :
« Monsieur le Président,
« On accuse un capitaine du régiment que je commande de contravention aux lois du royaume, pour avoir pris les armes pour Mesdames, tantes au roi, et les avoir suivies, avec son détachement, de Fontainebleau à Moret.
« Il me paraît de la plus grande importance pour les citoyens et les militaires même que tout fonctionnaire public ne puisse impunément violer son serment.
« Mais, comme chef des chasseurs du Hainaut, j'ai l'honneur de vous communiquer les détails relatifs à cette affaire, que j'ose vous supplier d'avoir la bonté de mettre sous les yeux de l'Assemblée.
«. Une lettre du ministre, reçue il y a 4 mois, prescrit à l'armée de se conformer aux anciennes ordonnances, jusqu'au moment où les nouvelles seraient promulguées. D'après l'ordonnance des places, il me semble que l'officier que l'on accuse ne pouvait se dispenser de prendre les armes au passage de Mesdames : c'est ce qu'il a fait.
« Suppose-t-on (d'après l'égalité établie) que l'on ne devait plus reconnaître des princesses devenues simples citoyennes? Aucun décret n'abrogeant sur ce point les dispositions de l'ordonnance que j'ai citée, il me paraît qu'un militaire ne doit connaître qu'elle; d'ailleurs, Mesdames avaient une garde à Bellevue. Pourquoi faisait-on pour elles à Paris ce qu'on leur refuserait dans les provinces?... surtout lorsque le ministre de l'intérieur a prévenu les départements de leur voyage, et que le département de Seine-et-Marne a donné à cet effet des ordres à la municipalité de Fontainebleau, où l'officier que l'on accuse se trouve en quartier.
« On le blâme d'être sorti de son territoire» La municipalité de Fontainebleau ne lui a prescrit aucune borne sur ce point (Murmures) ; et le régiment que je commande tenant près de 50 lieues de pays, les détachements vont le plus loin possible dans leurs reconnaissances, et cherchent même à se joindre les uns aux autres pour la sûreté publique.
« Si cet officier a passé le sabre à la main dans Moret, tout militaire sait que c'est un usage adopté par les troupes en passant dans les villes à qui elles rendent cet hommage. (Murmures.)
« Le détachement s'est, dit-on, opposé à ce
que le peuple arrêtât Mesdames. J'ignore quelle était la disposition des esprits ; mais si telle était l'intention, du peuple, la persuasion seule, a été employée par les chasseurs pour s'y opposer. J'en appelle à tous les citoyens de Moret ; on ne peut citer aucun acte de violence, dont le corps que je commande est incapable sans réquisition.
« D'après ce simple précisai me paraît que cet officier n'a nullement enfreint les lois ; si je l'eusse cru, j'aurais été le premier à l'en punir.
« Je suis avec respect, Monsieur le Président, votre très humble, etc,.,. .
« Signé : Le colonel de SéguR.
« Le 28 février 1791; »
(L'Assemblée ordonne le renvoi de cette lettre aux comités des rapports et des recherches.)
M. l'abbé,Couturier demande un congé de 3 semaines.
Plusieurs membres proposent la question préalable sur cette demande.
J'ai l'honneur de demander aux membres qui s'opposent à ce qu'on donne un congé à un membre de l'Assemblée nationale pour 3 semaines seulement, pour des affaires qui exigent impérieusement sa présence, j'ai l'honneur, dis-je, de leur demander pourquoi on m'empêche de. me réunir à ma famille pour affaire importante.
C'est pour que vous n'intriguiez pas.
Il me semble, Messieurs, que ceux qui s'opposent à ce qu'on accorde un congé à uu.mempre.de cette Assemblée ne font pas du tout à l'Assemblée nationale l'honneur qui lui est dû, en voulant faire regarder comme une punition l'honneur dé siéger dans son sein. (Rires à gauche.) .
L'Assemblée nationale n'a jamais refusé la permission d'un congé, et je demanderai pourquoi je serai le premier à qui elle veuille le faire-
Je sais bien que l'Assemblée nationale ne s.'est jamais refusée à accorder des passeports aux membres qui les demandaient ; mais je sais bien aussi qu'aucun membre de l'Assemblée n'a manifesté des. intentions plus malfaisantes contre la Constitution que cellesqu'a indiquées celui qui est à la tribune. (Rires.) *
J'observe que le membre qui parle n'est nullement dangereux dans le sein de l'Assemblée nationale : mais je crois que, d'après ce qu'il a dit hier, il pourrait l'être beaucoup dans le pays où il va. (Murmures à droite.)
Je suis d'un avis entièrement contraire à celui de M. Voidel et je pense qu'après ce qui s'est passé, hier, un congé ne peut pas être dangereux. Je désire seulement qu'en tête de ce congé, on transcrive l'article qui concerne dans le procès-verbal d'hier le membre qui le sollicite (Applaudissements.) ,
(L'Assemblée accorde le congé.)
au nom du comité des finances. Messieurs, sur les observations faites hier par M. LeCouteulx, relativement au décret que vous rendîtes avant-hier sur les oppositions qui pour-
raient être formées à la circulation et au paye-mentdes billets de caisse ou promesses d'assignats répandus dans le oublie, en attendant la fabrication des assignats, vous avez renvoyé lesdites observations et le décret à l'examen du comité des finances (1).
Votre comité, après les avoir examinés attentivement, a persisté dans son opinion et m'a chargé de vous prier de maintenir le décret que vous avez rendu avant-hier.
(Gçtte motion est décrétée.)
au nom des comités diplomatique et d'agriculture et du commerce. Messieurs, par votre décret du 28 janvier dernier, vous avez fixé à 75 livres par quintal les droits à percevoir sur les toiles.
Le lendemain, il vous a été demandé, au nom des commerçants de la Flandre autrichienne, de modérer le droit sur les toiles importées par le département du Nord, et il vous en a été donné pour motif la facilité des introductions frauduleuses dans ce département.
Cette considération vous a déterminés à renvoyer cette pétition-là aux comités diplomatique et d'agriculture et de commerce. Je viens, Messieurs, vous présenter les vues de ces comités.
Ils sont d'avis que le droit de 75 livres par quintal, auquel vous avez assujetti toutes les toiles de chanvre et de lin venant de l'étranger peut être conservé sur celles qui seront introduites par mer ; ils désireraient cependant que ce droit fût abaissé à 70 livres.
A l'égard des toiles importées par terre de la Flandre autrichienne et ae l'Allemagne, les comités ont pensé que le droit devait être modéré à 36 livres par quintal pour les toiles écrues et à 15 livres pour les blanches, à raison de la nécessité d'entretenir nos liaisons avec ces deux pays.
(L'Assemblée décrète un droit de 70 livres par quintal pour les toiles de chanvre et de lin importées par mer et un droit de 36 livres par quintal pour les toiles écrues et de 15 livres pour les toiles blanches importées par terre de la Flandre autrichienne et de l'Allemagne.)
On ne doit pas s'occuper de cela le matin ; ce n'est pas un objet constitutionnel. Au soir! au soir!
au nom du comité d'agriculture et de commerce. Nous vous demandons d'autre part de réformer la proportion fixée par le tarif pour les droits sur les rubans de fil.
Ces rubans sont actuellement divisés en deux classes, savoir :
I ï° Rubans de fils écrus, taxés à 45 livres le quintal ;
2° Rubans de fils blancs et teints, taxés à 60 livres.
. Nous pensons qu'ils doivent être divisés en trois classes, savoir :
. 1° Rubans de fils écrus et d'étoupes, 30 livres le quintal ;
2° Rubans dits blancs, 50 livres le quintal ;
3b Rubans dits teints, 70 livres le quintal ;
(Cette motion est décrétée.)
au nom des comités diplomatique et d'agriculture et de commerce. Le droit
mis sur l'huile de poisson est exorbitant ; il a excité
Nous vous proposons de réduire ce droit à 5 liv. 18 s. par quintal.
Un membre propose de porter ce droit à 6 livres.
(L'Assemblée, consultée, décrète un droit de 6 livres par quintal sur les huiles de poisson des Etats-Unis, et sur les huiles de poisson importées par les départements du Haut et du Bas-Rhin, de la Meurthe et de la Moselle.)
rend compte des difficultés qui se sont élevées à l'occasion des droits d'entrée sur les noix de coco et propose le décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète que, dans le tarif des droits d'entrée, elle n'a entendu imposer sous la dénomination de noix de coco à 6 livres du quintal, que l'amende du cqco comprise dans la classe des médicaments, mais non les poires de coco qui seront exemptes de tous droits, ce qui sera également indiqué au tarif général. » (Adopté.)
Le décret suivant est ensuite rendu :
« L'Assemblée nationale décrète que les droits d'entrée et de sortie sur les productions et marchandises venant de l'étranger et sur celles exportées du royaume à l'étranger, seront perçus conformément au tarif suivant :
TARIF GÉNÉRAL des droits qui seront perçus à toutes les entrées et sorties du royaume, sur toutes les productions et marchandises venant, de l'étranger, et sur celles exportées du royaume à l'étranger.
TARIF DES DROITS D'ENTRÉE.
liv. s.
Absinthe, herbe, le cent pesant payera
5 sous, ci...................» 5
Acacia, drogue, le cent pesant payera
6 livres, ci........;...... 6 »
Acaja, ou prunes de Monbain, le cent
pesant payera 20 sous, ci...........1
Acaiou (noix d'), le cent pesant payera
30 sous, ci....................... 110
Acier non ouvré, et acier fondu, le cent
pesant payera 80 sols, ci.. ;........110
Acorus vrai ou faux, le cent pesant payera 30 sous, ci.......110
Aes-Ustum» ou cuivre brûlé, le cent pesant payera 30 sous, ci....110
Agaric autre que celui ci-après, le cent
pesant payera 4 livres, ci...........4
Agaric entrochique, le cent pesant pavera
11. îo s. ci.;..................:...710
Agnus castus (graine d'), le cent pesant payera 40 sous, ci. ................ .2
Agrès ou apparaux de navires payeront
à raison de 10 0/0 de leur Valeur. Aigle (pierre d'), le cent pesant payera
20 sous, ci........................1
Aigre, ou huile de vitriol, le cent pesant
payera 20 livres, ci................20
Ail, le cent pesant payera 3 sous, ci .
Aimant (pierre d') le cent pesant payera
20 sous, ci........................ 20
Alana, craie et tripoli de toutes sortes, le cent pesant payera 10 sous, ci... » 10
Albâtre.................*............ néant.
Alkecange, bayes et feuilles, le cent pesant payera 20 sous, ci.......... 1 »
Alkerme ou écarlate, le cent pesant
payera 10 sous» ci................. » 10
Allière (graine d'), le cent pesant payera
10 sous, ci.........................................» 10
Allumettes, le cent pesant payera
12 sous, ci............>.........,, » 12
Aloès, le cent pesant payera 4 livres, ci. 4 » Alpagattes ou souliers de corde, la douzaine de paires payera 30 sous, ci.. 1 10 Alpiste ou millet, le cent pesant payera
10 sous, ci. ............... » 10
Alquifoux, le cent pesant payera 10 sous,
ci................................. » 10
Alun, excepté celui ci-après, le cent
pesant payera 5 sous, ci.. -.......... » 5
Alun brûlé ou calciné, le cent pesant payera 15 livres, çi.. ........ 15 »
Amadou, le cent pesant payera 3 livres,
ci................................. 3 »
Amandes en coque, le cent pesant
payera 20 sous, ci.................. i »
Amandes cassées, le cent pesant payera 40 sous, ci................—v— 2 »
Ambre gris et liquide, la livre payera
15 livres, ci........................ 15 »
Ambre jaune, le cent pesant payera
9 livres, ci......................... 9 »
Ambrette ou abelmosc, le cent pesant
payera 50 sous, ci...»i,.«..v....a» 2 10 Amiànthe, le eent pesant payera 5 sous,
ci................................. » 5
Amidon, le cent pesant payera 5 livres,
ci................................. 5 »
Ammy, le Cent pesant payera 40 sous»
ci........................... ;. -... 2 »
Ammoniac (sel d'), le cent pesant payera
5 livres, ci ................................5 »
Ammomum racemosum ou verum, le
cent pesant payera 7 1. 10 s. ci..... 7 10
Amurca, ou marc d'olive.............. néant.
Anacardes, lecent pesant payera 3 livres,
Anatrum ou natrum, écume de verre... néant. Anchois, le cent pesant payera 9 livres, ^
Ancres de fer pour la marine, le cent
pesant payera 30 sous, ci —....... 1 10
Anes et ânesses, la pièce payera 5 sous,
Angélique (graine, racine et côte d'),
le cent pesant payera 4 livres, ci..... 4 » Anis vert (graine ou semence d'), le cent
pesant payera 3 livres, ci..,..,..... 3 » Anis étoilé ou badiane, ou anis de la Chine» le cent pesant payera 5 livres,
Antale ou antalium, coquillage, le cent
pesant payera 30 sous, ci........... 1 10
Antimoine cru, le cent pesant payera
30 sous, ci..........;.............. 1 10
Antimoine préparé, le cent pesant payera
4 livres, ci.... — ................. 4 »
Antolphe de girofle, le cent pesant payera
15 livres, ci........................ 15 »
Antore ou antora, le cent pesant payera 20 sous, ci,.......... .........1 »
Appios ou fausse angélique, le cent pesant
payera 50 sous, ci... -..............210
Apocin (graine d'), le cent pesant payera 5 sous,
Arbres en plans—..................néant.
Arcanson où bray sec, le cent pesant
payera 5 sous, ci..................5
Arco ou potin gris, le cent pesant payera
4 1. 10 s. ci . Ardoises ordinaires, pour couvertures de maisons, le millier en nombre payera
3 livres, ci.... —.................410
Ardoises en table, le cent en nombre
payera 50 sous, ci..........*»......3
Aréca ou- aréque, le.cent pesant payera
50 sous, ci.........................210
Argent en masse, en lingot, en espèces
monnayées, et argenterie cassée. Argent fin en trait, en lame, en feuilles, battu et filé, le marc payera 6 livres,
ci
Argent faux-ou cuivre argenté, le cent
pesant payera 50 livres, ci...........50
Argent faux, en lames, en feuilles, trait et battu, le cent pesant payera 50 livres,
Argent faux, filé sur fil ou filé faux, le
cent pesant payera 80 livres, ci— Argenterie de toutes sortes, le marc
payera 6 livres, ci.......—.......6
Argent vif ou mercure, le cent pesant
payera 3 livres, ci...............110
Argentine (graine), le cent pesant payera
10 sous, ci .. '..............10
Argile ou terre glaise. Aristoloches, le cent pesant payera
30 sous, ci.........................110
Armes blanches, le cent pesant payera
40 livres, ci......................40
Armes à feu, ie cent pesant payera
36 livres, ci....................36
Arsenic, le cent pesant payera 10 sous,
ci.................................
Asclepias ou contrayerva blanc, le cent
pesant payera 4 livres, ci............4
Asphaltum ou bithume de Judée, le cent pesant payera 5 livres, ci. Aspini ou épines anglières, lecentpesant
payera 20 sous, ci.il...............1
Assa fœtida ou stercus diaboli* le cent pesant payera 3 livres, ci. Avelanède ou valanède. Avelines ou noisettes, le cent pesant
payera 30 sous, ci. P. «...........30
Avirons de bateaux, le cent en nombre payera 20 sous, ci,,..,,.,.,..,,,...20
Aulne (éçorce d'). .....................
Aunée ou énula campana (racine d'),le cent pesant payera 5 sous, ci........5
Avoine (gruau ou farine d'), le cent
pesant payera 30 sous, ci............110
Autour, le cent pesant payera 10 livres,
ci.................................10
Autruche (poil, ploc et duvet d')......néant.
Azarum, le cent pesant payera 10 sous,
Azur de roche fin ou iapis iazuli, ie cent
pesant payera 60 livres, ci.........60
Azur en pierre ou smalt, le cent pesant
payera 5 sous, ci....4.....------...5
Azur en poudre ou émail, le cent pesant payera*3-livres, ci..................3
Balais de bouleau, et autres communs, payeront à raison de 5 0/0 de la valeur.
Balausles fines et communes, le cent
pesant payera 50 sous, ci............210
Baleine coupée et apprêtée, le cent pesant
payera 30 livres, ci...............30.
Baleine en fanons, le cent pesant payera
15*ïivres, ci....................15
Balles de paume, le cent pesant payera
6 livres, ci.------—..........—...6
Bamboucs payeront à raison de 12 0/0
de la valeur. Bandouillères ou baudriers, le cent pesant
payera 20 livres, ci.................20
Bangue, le cent pesant payera 3 livres, ci. Barbotine ou semen-contra, le cent pesant payera 5 livres, ci..............3
Bardanne (racine de), le cent pesant
payera 5 sous, Gi..........,........5
Bats, selles grossières, la pièce payera 10
sous, ci............................5
Bateaux, barques, canots et autres bâtiments de mer hors d'état de servir... Bateaux de Savoie et du Rhin, neufs, payeront à raison de lOO/Ode leur valeur.
Battin non ouvré................»...10
Baume du Pérou, noir, liquide, seG; de Tolu et de la Mecque, la livre payera
25 sous, ci........................15
Baume du Canada, la livre payera 10
sous, ci....................10
Baume de Copahu, la livre payera 5 sous,
ci.
Baves de laurier, le cent pesant payera
15 sous, ci.... —..............15
Bedelium, le cent pesant payera 6 [livres, ci...........................6
Ben (noix de) le cent pesant payera 6 livres, ci-....................6
Benjoin de toutes sortes, le cent pesant payera 10 livres,ci............v....10
Besoard ou pierre de fiel, le cent pesant payera 60 livres,ci.................60
Bestiaux de toutes sortes, comme agneaux, béliers, bœufs, boucs, brebis, cabris, chevreaux, chèvres, cochons, génisses, moutons, taureaux,
vaches et veaux... ;................néant.
Bétel (feuilles), le cent pesant payera
10 livres, ci.............,..;..»...10
Beurre frais...........................néant.
Beurre salé et fondu, le cent pesant payera 50 sous, ci.....210
Beurre de Saturne, le cent pesant payera
50 sous, ci.......,....,..,,.....,,..210
Beurre de nitre et de salpêtre, le cent pesant payera 3 livres, ci..............10
Bière, le muid de Paris payera 10 livres,
ci....,.., —.....................10
Bijouterie de toutes sortes payera à raison de 12 0/0 de la valeur.
Biscuit de mer........................néant.
Bimbloterie (ouvrages de), payeront à
raison de 12 0/0 delà valeur Bismuth ou étain dé glacé, le cent pesant
payera 20 sons, ci..................1
Bisnague ou visnague (tai|le de), le cent
liv. s.
pesant payera 6 livres, ci........... 6 »
Bistorte, le cent pesant payera 15 sous,
ci................................. 15
Bistre, le cent pesant payera 15 sous, ci. 15 Bithumes, autres que ceux dénommés au présent tarif, le cent pesant payera
20 sous, ci.._....................... 1 »
Blanc à l'usage des femmes, le cent pesant payera 24 liyres, ci............ 24 »
Blanc de plomb en écaille, le cent pesant
payera six livres, ci............. — 6 »
Blanc de balline, le cent pesant payera
15 livres, ci........................ -45 »
Bleu de Prusse, le cent pesant payera 30.
livres, ci_________............ —....... 30 »
Boîtes de bois blanc, le cent pesant
payera 7 1. 10 s. ci.........................7 10
Boîtes ou tabatières de carton, de papier ou de cuir, le cent pesant payera 90 livres, ci............................. 90 »
Boisde construction navale et civile et
tous autres, excepté ceux ci-après... néant. Bois de buis, le cent pesant payera 20
sous, ci------...............—...... 1 »
Bois de marqueterie et de tableterie— néant. Bois merrain,....... ....................... néant.
Bois de teinture, moulus, le cent pesant
payera 3 livres, ci.................. 3 »
Bois de teiuture, en bûches ou éclisses. néant.
Bois à tan........................... néant.
Bois ouvrés de toutes sortes payeront à
raison de-15 0/0 de la valeur. Bois d'éclisse pour tamis, seaux, cribles, etc., payeront à raison de 5 0/0 de la valeur. Bois feuillards pour cercles ou lattes, eto, le millier en nombre payera 5 sous, ci. » 5
Bois à Vusage de la médecine et dès parfumeurs.
Savoir :
Bois d'aloès où aspalatum, le cent pesant payera 20. livres, ci,,...,.....,. 20 »
Bois néphrétique, le cent pesant payera 25 livres, ci....................... .>........ ,25 »
Bois tamaris, le cent pesant payera 7 1.
10s. ci.............................. 7 10
Bois de baume ou xilo balzamum, le cent pesant payera 20 livres, ci.....20 »
Bois de crable ou de girofle, le cent pesant payera 15 livres, ci...... ... 15 »
Bois de Rhodes à i'usage.des parfumeurs, le cent pesant payera5livres, ci.... . 5 »
Bois de Santal, citrin au même usage, le
cent pesant payera 10 livres, ci.---- 10 er">»
Bol d'Arménie, le cent pesant payera 10 livres, ci............. ......... 2 »
Bonneterie de ton tes sortes.
Savoir :
Bonneterie dé lainé ou étames, lë cent pesant payera 100 livres,
ci..................... 100 »
' de cdtoh,'le centpesant payera
140 livres, ci...........140 »
de fil, le cent pesant payera
90 livres, ci .............. 90 »
de laine; fil ët'cbtôo, poil et au-
liv. s.
très matières mêlées, le cent pesant payera 90 livres, ci.................. 90 »
de poil de lièvre, delapin et de chèvre, le cent pesant payera 90 livres,,ci........... 90 »
Bonneterie de filoselle ou fleuret, la
livre payera 4 1. 10 s., ci 4 10 de soie, la livre payera 6 livres, ci...... ;.......... G »'
de soie mêlée d'autres matières, . la . livre payera
41. 10 s., ci............. 4 10
de castor, la livre payera
35 sous, ci.............. 1 15
de vigogne» la livre payera
30 sous, ci.............. 1 10
Borax brut et gras, le cent pesant payera
3 livres................................................3 »
Borax purifié et raffiné, le cent pesant
payera 12 1. 10s., ci................ 12 10
Bouchons de liège, ou liège ouvré, le
cent pesant payera 12 livres, ci...... 12 »
Bougies de Spermaceti, ou blanc de baleine, lecentpesantpayera30 livres, ci. 30 » Boules de mail, le cent pesant payera
4 livres, ci......................... 4 »
Boules de terre....................... néant.
Bourdaine,.. _......................... néant.
Bourgeons de sapin, le cent pesant payera
15 sous, ci......................... » 15
Bourre ou ploc de toutes sortes........ néant.
Bourre rouge et autres à faire lit..... néant.
Bourre nolisse ou nalisse............. néant.
Bourre tontissë....... i.... 1.......... néant.
Bourre de chèvre... —.............. néant.
Boutargue, le cent pesant payera 3 livres,
ci........................Y....... 3 ,»
Bouteilles de verre noir, pleines ou vides, le cent en nombre payera 4 livres, ci. 4 »
Boutonneries de toutes sortes.
Savoir :
Boutons de fil d'or fin, trait ou clinquant,
la livre payera 9 livres, ci... 9 » de fil d'argent, la livre payera
7 livres, ci—............. 7 »
de fil, le cent pesant payera
100livres,ci.... .......... 100 »
de laine, le cent pesant payera 72 livres, ci...»..,......... 72 »
de soie, mêlée de crin, de poil, de fil, de laine et autres matières, la livre payera 20 sous,
ci.......................... 1 »
de soie, la livre payera 3 livres,
ci.........;............... 3 »
d'étoffe, de drap, et autres faits au métier,le cent pesant payera
20 livres, ci................ 20 »
de cuivrer ou d'autres métaux dorés ou polis, le cent pesant
payera 54 livres, ci......... 54 »>
de nacre de perle, lé cent pesant
payera 40 livres, ci......... 40 »
Briques, tuiles, ou.carreaux de terre, le
millier en nombre payera 15 sous, ci. » 15 Bronze ou airain, et tout métal non ouvré, allié dé cuivre, d'étain ou de zinc, le cent pesant payera 6 livres, ci;.... 6 »
liv. s.
Bronze ouvré, en. siatuesr vases, urnes, et autres ornements de bronze, le cent
pesant payera 30 livres, ci. ....... 30 »
Brou ou écorce de noix.......____— néant.
Bruyères à faire,vergettes, le cent pesant
payera 5 sous, ci........................» 5
Brun rouge ou rouge brun, le cent pesant
payera 5 sous, ci......... ......., « > 5
Cacao et épiuchures de cacao, le cent
pesant payera 25 livres, ci.......... 25 »
Cachou (suc de), le cent pesant payera
12 livres,, ci .v....................... 12 .«
Café, le cent pesant payera 30 livres, ci. 30 »
Calamine ou cadmine................. néant.
Calamus ver us, aromaticus ou amaros, le cent pesant payera.45 soua, ci.... , _ 2 5
Calcantum ou vitriol rubitîé colchota, le cent pesant payera 45 sous, ci...... 2 5
Calebasse de terre, plante, le cent pesant
payera 10 sous, ci.................. ; « 10
Calebasse, courge vidée et séchée, le cent
pesant payera 3 livres, ci3 » Camomille (fleurs de)* le cent pesant
payera 3 livres, ci,^.... 3 » Camphre brut et raffiné, le cent pesant
payera 6 livres, ci.........................6 »
Canelle de Ceylan, la livre pavera 30 sous,
ci..........................$..... 1 10
Canelle commune, lalivre payera 15 sous,
ci........—..................,-y 15
Ganéfice, le, cent pesant payera 7 livres,
ci................................... 7 »
Cannes ou joncs non montés, le cent posant payera,25 livres, ci............,, 25 »
Cantarides (mouches),, le cent pasant...
payera 15 livres, ci................. 15 »
Capillaires, le cent pesant payera3 livres, .
ci............................... .. 3 »
Câpres de toutes sortes, le cent pesant
payera 6 livres..................... 6 »
Câprier (racine de), le Cent pesant payera
3 livrer, ci.....................— 3 »
Caractères d'imprimerie en langue française, le cent pesant payera 40 livres, ci —............................. 40 »
Caractères en langues étrangères, le cent
pesant payera 20 livres, ci........... 20 »
Caractères vieux d'imprimerie, en sac ou
bloc..........................—.. néant.
Cardamomum, le cent pesant payera
30 livres, ci...................................30 »
Cardes à carder, le cent pesant payera
41. 10 s., ci-----.--------.....------- 4 10
Carline ou Caroline, ou caméléon, le cent -pesant payera 40 sous, ci........... 2 »
Carmin fin, la livre pesant payera 14 livres, ci...,......................... 14 »
Carmin commun, le cent pesant payera
8 livres, ci...................................8 »,
Carpobalzamum, le cent pesant payera
6 livres, ci.....................................6 »
Carreaux de pierres de toutes espèces.. néant. Carreaux de terre, le millier en nombre payera 15 sous, ci i....... !....,.... « 15
Carrobe ou carrouge, le cent pesant payera
5 sous, ci.........................................« 5
Cartami (graine de), le cent pesant payera 30 sous, ci ... 1........1 10
liv. s.
Cartes géographiques payeront 5 0/0 de la valeur.
Cartons de toutes espèces, le cent pesant
payera 24 livres, ci................. 24 - »
Cartons gris ou pâtes de papiers....... néant.
Carvi ou carvi. semen,. le cent pesant
. payera. 3 livres, ci...... —. — ^. 3 »
Casse, le cent pesant payera 7 livres, ci. 7 » Casse confite, .le .cent pesant payera
15 livres, ci........................ 15 »
Cassia lignea, le cent pesant payera 8 livres, ci........................— 8 »
Castine.............................. néant.
Castoreum, le cent pesant payera 45 livres, ci............................ 45 »
Catapuce ou pal ma christi, le cent pesant.
payera 3 livres, ci.................. 3 »
Cendres à l'usage, des manufactures, comme cendres communes, cendres
d'orfèvre et cendres de.chaux........ néant.
Gendres bleues et vertes â l'usage des peintres, le cent pesant payera 40 livres, ci........... ..........................40 »
Cendres de bronze, le cent pesant payera
3 livres, ci........ —...—,....... 3 »
Cerf (os de cœur de), le cent pesant payera
10 livres,, ci............................ 10 »
Cerf (moelle, riérf, vessie de), le cent
pesant payera 3.livres, ci............ 3 »
Cerf (esprit, sel, huile de), le cent pesant
payera 3 livres, ci................. 3 »
Cerf (cornes râpées de), le cent pesant
payera 40 sous, ci.................1. 2 »
Ceruse en pain, le cent pesant payera
4 livres, Ci......................... . 4 »
Céterac, espèce dè capillaire, lé centpe-
. sant payera 10 sous, ci—......... « 10
Gevadille, (graine de),'le cent pesant
payera 40,sous, ci.................... 2 »
Chairs salées de toutes sortes, le cent pesant payera 5 livres, ci............ 5 »
Champignons secs, le céht pesant payera 15 livres, ci............... — 15 »
Chandelles de suif, le cent pesant payera
3 livres, ci................. ..... 3 »
Chanvre en masse, même celui apprêté
ou en filasse....................... néant.
Chapeaux ' de castor et demi-castor, là
pièce payera 6 livrés, ci..................6 $
Chapeaux de toute espèce, en poil commun ou laine, la pièce payera 3 livres,
ci.....................'...................3 - , ».
Chapeaux de paille, la douzaine payera
4 livres, ci......................... 4 »
Chapeaux dè cuir, la douzaine payera
15 livres, ci........................ 15, »
Chapeaux d'écorce dé bois ét dé crin, la
douzaine payera 50 soUs, ci..'....... 2 10
Chapeaux, marc de rose, le cent pesant
payera 5 sous, ci................... « 5
Chapes de bouclés, de fer oïl d'acier, le
cent pesant payera 20 livres, ci...... 20 »
Charbon de bols.néant. Charbon de terre importé par les ports de l'Océan, depuis BordéâUx inclusivement, jusqu'aux sables d'OIonne aussi inclusivement, et depuis Khédon jusques et y compris Saint-Valery-sur-Somme etAbbéviile, lé tonneau d'envi-g? ron 22 quintaux payera 6 livres, ci... 6 » Charbon de terre, importé'par les autres ports du royaume, le tonneau d'envi-r ron 22 quiùtaux payera 10 liViW, ci.. 10 >
liv. s.
Charbon de terre importé par terre, 1e baril de 240 livres pesant payera
4 sous,ci*......: .............. »» « 4
Charbon de terre importé par les départements de la Meurthe, de la Moselle et
des Ardennes...................... néant *
Chardons à drapiers et bonnetiers...... néant.
Chaux à brûler, le muid de 48 cubes
payera 10 sous, ci.â..*..........*.» » 10
Chenevotte (charbon néant.
Chevaux, valeur de 300 livres et au-dessous, la pièce payera 6 livres, ci..... 6 » Chevaux au-dessus de 300 livres, la
pièce payera 30 livres, ci... »....... 30 »
Chiens de chasse, la pièce payera 10 sous,
ci................................. «10
Chocolat et cacao broyé et en pâte, le ceot
pesant payera 50 livres, ci........... 50 »
Chouan ou couan, le cent pesant payera
25 livres, ci....,,»,.».— 25; »
Choucroute. le cent pesant payera
40 sous, ci...... ».... *. » . ........» 2 ; »
Cidre, le muid de Paris payera 6 livres,
ci................................. 6 >»
Ciment.............................. néant.
Cinabre naturel et artificiel, le cent pesant payera 10 livres, ci............ 10 »
Cire jaune non ouvrée, le cent pesant
payera 3 livres, ci.........................3 «
Cire jaune ouvrée, le cent pesant payera
24 livres, ci......................241 »
Cire blanche non ouvrée, le cent pesant
payera 30 livres, ci;t;.......... — 30V »
Cireblancheouvrée, le centpesant payera
40 livres, ci................*......» 40 »
Cire à cacheter, le cent pesant payera
48 livres, ci........................ 48 »
Cire à gommer à l'usage des tapissiers, le
cent pesant payera, 6 livres, ci»...... 6. »
Cire pour souliers, le cent pesant payera
30 livres, ci...............—------- 30 »
Civette, la iivre payera 60 livres, ci.... . 60 »
Cloches, clochettes, mortiers de fonte et de métal, le cent pesant payera 18 11-vfes, ci..........................18 »
Cloportes, le cent pesant payera 15 livres,
ci................................. 15 »
Clous de toutes sortes, le cent pesant
payera 8 livres, ci................. . 8 »
Cobalt ou cqbolt, le cent pesant payera
20 sous, ci......................... 1 »
Cochenille de toutes sortes, même en grabeau, le cent pesant payera 40 sous,
Coco r(noix de), le cent pesant payera
6 livres, ci......................... 6 »
Coco (coque de),....................... néant.
Colle commune, colle forte et autres, excepté celle-ci après, le cent pesant
payera6 livres, ci.................. 6 »
Colle de poisson, le cent pesant payera
20 livres, ci........................ 20 »
Colophone ou colophane, le cent pesant
payera 5 sous, ci................... » 5
Coloquinte, le cent pesant payera 3 livres,
ci................................. 3 »
Confitures de toutes sortes, le cent pesant
payera 15 livres, cl................. 15 »
Contrayerva, le cent pesant payera 5 livres, ci........................... 5 »
Coques de Levant, le cent pesant payera
4 livres, ci......................... 4 »
Coquillages et autres morceaux d'histoire
liv. s.
naturelle.......».»...*»............ néant.
Coquilles denacre non travaillées, le cent
pesant payera 9 livres, ci............ 9 »
Corail non ouvré, en fragments, le cent
pesant payera 10 livres, ci. .»...,... 10 » Corail ouvré, payera à raison de 15 0/0
de la valeur. Coraline ou mousse marine, le cent pesant payera 40 sous, ci.............. 2 »
Corderie (ouvrage de), le cent pesant
payera 4 livres, ci.................. 4 »
Cordages de joncs et de tilleul, le cent
pesant payera 20 sous, ci............. 4 »
Cordages usés........................ néant.
Coriandre (graine de), le cent pesant payera 15 sous, ci.................. » 15
Coris ou cauris....................... néant.
Cornes de bœufs ou de vaches, le millier
en nombre payera 5 sous, ci.. ....... « 5
Cornes de cerf et de snak, le cent pesant
payera 25 sous, ci. ;................ 15
Cornes de moutons, béliers et autres communes.............................. néant.
Cornes rondes ou plates à faire peignes,
le cent -pesant payera 30 sous, ci.... 1 10 Cornes de licorne, la livre payera 3 livres,
ci —............................. 3 »
Cornichons confits, le centpesant payera
4 livres, ci*» » . * « i..... 4.. er">. 4 : » Costus inicus et amarus* le cent pesant
payera 60 livres, ci.. , ........... 60 »
Costus doux ou canelle blanche, le cent
pesant payera 4 livres, oi .»*..>».%.»» 4 - » Coton en rame, en laine ou en graine.. néant. Goton filé, teint ou non teint, la livre
payera 45 sous, ci.... » »............ 2 5
Couleurs à peindre» de toutes sortes, en sacs, en vases, en boîtes et en tablettes* le cent pesant payera 7 livres,
ci........»*.*»............*....... 7 »
Cordonnerie (ouvrage de), le cent pesant
payera 70 livres, ci................. 70 »
Couperose blanche, le cent pesant payera
71. 10 s., ci..;.................»... 7 10
Couperose verte, le cent pesant payera
3 livres, ci......................... 3 »
Couperose ou vitriol bleu, le centpesant payera 7 1., 10 s., ci................ 7 10
Coutellerie (ouvrages de), lé cent pesant
payera 20 livres, ci-.s20 » Coutils de toutes sortes, le cent pesant
payera 40 livres; ci... »............. 40 »
Couvertures de soie, de filoselle et fleuret, le eent pesant payera 100 livres, ci. 100 » Couvertures de coton ou laine, le cent pesant payera 50 livres; ci........... 50 »
Couvertures de ploc et autres matières, .
le cent pesant payera 24 livres, ci____ 24 »
Grasse de cire, ie cent pesant pàyera
30 sous, ci.......;.................. 1 10
Graie, le cent pesant payera 10 sous, ci.. «10 Crayons en pastel et autres de toutes sortes, le cent pesant payera 5 livres,
ci.......................................5 »
Gravons noirs, le cent pesant payera
10 sous, ci......................... « 10
Grême ou cristal de tartre, le cent pesant
payera 4 1., 10 s., Ci. ; ; ;............ 4 10
Crêpes de soie, de toutes sortes, la pièce
de 10 aunes payera 9 livres, ci_______ 9 »
Crin frisé ou uni, le cent pesant payera
40 sous, ci.»...,................... 2 »
Cristal de roche non ouvré, le cent pe-
liv. s.
santpayera 15 livres,ci.»....».»»..» 15 » Cristal de roche ouvré, payera à raison
de 15 0/0 de la valeur Cubèbe ou poivre à gueue, le cent pesant
payera 40 sous, ci...»....»»....;.>. 2 » Cuir bouilli, le cent pesant payera 8 livres, ci..................»......... 8 »
Cuirs dorés et argentés pour tapisseries,
le cent pesant payera 37 i. 10 s., ci* 37 10 Cuirs ouvrés, autres que les ouvragés de la cordonnerie, lé cent pesant payera 40 livres, ci*..«V. ...... > 40 »
Cuivre rouge brut, fondu en gâteau ou plaque, lingot, rosette et- mitraille
rouge de toute espèce......h....... néant.
Cuivre rouge laminé en planches et fonds plats, de toute dimension, le cent pesant payera 12 livres, ci.... « *.... » * » 12 » Cuivre rouge battu en fonds de chaudières relevés, baquets, casseroles, barreaux carrés ou ronds, flaons pour les monnaies, anses, poignées et clous de toute espèce en œuvre, le cent
pesant payera 18 livres, ci........... 18 »
Cuivre ouvragé; savoir i alambics avec leurs chapiteaux et serpentins, bassinoires, baguettes de guinée, bouilloire, cafetières, lingots, vernis pour les Indes, pompes, robinets, triangles ou fil de cuivre, de 6 lignes de diamètre et au-dessous, le cent pesant
payera 20 livres, ci.......................20 »
Cuivre cerclé, vernis et plaqué, comme vases et urnes de toute espèce, théières étamées ou vernies, garnitures de pendules, flambeaux ét ornements dépendant" du ciseleur, doreur, et-toute . espèce de quincaillerie avec cuivre rouge, jaune ou plaqué, le cent pesant
payera 24 livres, Gi................» 24 »
Cumin, le cent pesant payera 20 sous, ci....................... 1 »
Dattes,- le cent pesant payera 40 sous,
ci._______....... —------------------ 2 »
Daucus (graine de) ou semen-dency» le cent pesant payera 5 livres, ci. »..... 5 »
Dégras de peaux, le cent pesant payera 5 livres, ci........................ 5 »
Dentelles de fil et de soie» la livre payera
15 livres, ci...........................................15 »
Dentelles d'or fin, le marc payera 30 li-
vres, ci»....,.........»....».».»... 30 »>
Dentelles d'argent fin» le marc payera
20 livres, ci.............. »....... ». 20 »
Dentelles d'or et d'argent faux, la livre payera 12 livres, ci................. 12 »
Dents d'éléphant ou morphil, le cent pesant payera 5 livres, ci.............. 5 »
Derle ou terre de porcelaine........... néant.
Dibidivi., «.,.»'..!t »* néant.
Dictame, ou radix dictami, en feuilles,
le cent pesant payera 40 sous, ci».... 2 » Dragées de toutes sortes, le cent pesant payera 45 livres, ci......».......... 15 »
Draperie ou étoffes de laine. Savoir :
Draps fins, façon de Sedan, de Louviers, d'Elbeuf, et autres dénominations , sur quatre tiers,. cinq quarts, trois huitièmes et sept huitièmes d'aune de large........».»»...
Draps dits à long poil, ou à poil ras, avec ou sans lustre.................
Draps de Vigogne, poil de chameau, castor et autres matières..........
Draps fins rayés et unis, façon de Silésio ou de Royale, et autres dénominations, sur cinq huitièmes, deux tiers et demi-aune de large.......
Draps dits rayés» unis, à poil......... — *......
Draps ratines en quatre tiers et cinq quarts d'au ne de large, façon de Hollande.....»»......
Le cent pensant payera 300 livres, ci.
Draps d'Andelys,devienne, et autres dénominations.
Draps Casimir............
Draps ratz de castors croisés et unis.............
Flanelles croisées et unies. Draps espagnolettes, façon de Rouen, et autres dénominations, croisées et unies, en blanc ou en couleur*»»...»........
Draps camèlot, poil, laine
et soie... .
Draps serges de satin ou satin turc, prunelle et
turcoise........ *.
Tricots en pièce ou en gilets. Draps Etamines ou Burats, imitant les voiles de Reims, et autres étoffes sous quelque dénomination qué ce puisse être, fabriquées avec de la
laine fine..»....»»......
Draps communs, forts, sur une aune de large, croisés et unis.............
Draps dits de demi-aune.. Draps dits à poil, rayés ou
unis ..................
Draps moltons, façon de sommiers, et autre dé- Le cent pe-
nomination.......»....\sant payera
Draps ratines communes .(150 livres, ci. Draps croisés communs, de largeur d'une aune,d'une demi-aune et d'un quart
d'aune...........
Drapskalmoucks ordinaires Draps camelots en laine,
unis et rayés..... Draps Sagatis et autres
genres d'étoffes, fabri-\
quées avec de la lainej Lè centpe_
commune ............ -Lanf navera
Drap et étoffe de coton, basin piqué et véloursybUllvres'C1,
de coton.............../
Duvet de cygne, d'oie et de canard, le cent pesant payera 15 livres, ci......
Eau-de-vie simple , le muid de Paris payera 24 livres, ci.................24
Eau-de-vie double et rectifiée, au-dessus " de 22 degrés, jusques et compris 32.,.
le muid de Paris payera 48 livres, ci. Eau-lorte, le cent pesant payera 8 livres,
ci.................................8
Eaux minérales, excepté les droits sur
les bouteilles......y.......,... ...néant.
Eaux médicinales et de senteur,'le cent
pesant payera 30 livres, ci v..... Ecaille d'ablette, le cent pesant payera
20 sous, ci.........................1
Ecailles de tortue, de toutes sortes, le
cent pesant payera 10 livres, ci — Ecarlate (graine d'), le cent pesant payera
10 sous, ci.........................10
Ecorces de chêne et autres à faire tan.. Ecorces de citrons, d'orangés et berga-mottes, te cent pesant payera 4 livres,
Ecorce de gayac, le cent pesant payera
15 sous; ci....................'—,15
Ecorce de câprier, le cent pesant.payera
3 livres, ci................ :........3
Ecorce de coutilawan, le cent pesant
payera 6 livres, ci..................6
Ecorce de mandragor, ou feux gens-eng, lè cent pesant payera 9 livres, ci..;. Ecorce de simarouba, le,cent pesant
payera 71. 10 s., ciy.....,------,.,--710
Ecorce de tamaris, le cent, pesant payera
3 livres, ci—..............3
Ecorce d'orme pyramidal, payera à raison de 2 1/2 0/0 de la valeur...
Ecorce de tilleul pour cordages........néant.
.Ederdon ou édredon, la livre payera
20 sous, ci......................1
Ellébore noir ou blanc (racine d'), le
cent pesant payera 40 sous, ci ;......2
Email brut, le cent pesant payera 6 livres,
liv. s.
Email ouvré, le cent pesant payera
45 livres, ci....................... .45
Emeri en poudre et en grains, le cent pesant payera 10 sous, ci...........10
Encens commun ou galipot, le cent pesant payera 5 sous, ci...............5
Encens fin ou oliban, }e cent pesant payera 5 livres, ci........,.......;..5
Engrais de toutes sortes pour fumier... Encre à écrire, le cent pesant payera
12 livres, cL.......................12
Encre de la Chine, le cent pesant payera
40livres, ci........................40
Encre à imprimer et en taille douce, le
cent pesant payera 6 livres,, ci,. . Epingles blanches, le cent pesant payera
30 livres, ci..........|............30
Epithimes ou cuscutes, le cent pesant payera 40 sous, ci..................40
liv. s.
Epiceries non dénommées, payeront à
raison de 10 0/0 de la valeur. Eponges fines, le cent pesant payera
25 livres, ci........—............ 25 »
Eponges communes, le cent pesant
payera 3 livres, ci------.:.................3 »
Eponges servant à la fabrication de
l'amadou........................... néant.
Escajolles, le cent pesant payera 5 sous, ci............. x 5
Esprit-de-vin au-dessus de 32 degrés, le
muid de .Paris, payera .72 livres, ci.. 72 » Esprit de soufre, le cent pesant payera 5 livres, ci........................ 5 »
Esprit de. sel, le cent. pesant payera 15 livres, ci... ................... .. . 15 »
Esprit ou essence de térébenthine, le .
cent pesant, payera, 3 livres, ci....... 3 »
Esprit ou essence de bergamottes et de
citrons, la livre payera 15 sous, ci,. » 15 Esprit ou essence de girofle, la livre payera 40 sous, ci., —............ , 2 »
Esprit de nitre, le cent pesant payera
10 livres, CU... ^.................... 10 »
Essaye, le cent pesant payera 10 sous,
ci>................................. » 10
Essence ou quintessence d'anis, le cent pesant payera 100 livres, ci.......... 100 »
Essence de romarin et autres semblables,
le cent pesant payera 40 livres, ci____ 40 »
Essence de cannelle, la livre payera
721 livres, .ci-.................________ 72 »
Essence de rose, ou rhodium, la livre payera 24 livres, ci................. 24 >
Estampes de toutes sortes, payeront à
raison de 15 0/0 de leur valeur. Esule, racine médicinale, le cent pesant
payera 10 sous, ci................... » 10
Etain non ouvré, le cent pesant payera 40 sous, çi.......................... 2 »
Etain ouvré, de toutes sortes, le cent
pesant payera 25 livres, çi........... 25 »
Etain en feuilles ou battu, le cent pesant
payera 25 livres, ci...,............. 25 »
Etain usé ou brisé, propre à la refonte,
le cent pesant payera 40 sous, ci..... 2 »
Etoffes de drap ou de soie unies de toutes sortes, la livre payera 7 1. 10 s.,
ci....................................... 7 10
Les mêmes, brochées sans or ni argent, la livre payera 9 livres, ci. 9 » avec or ou argent fin, la livre
payera 15 livres, ci......... 15 »
de soie mêlée d'autres matières sans or ni argent, la livre
payera 6 livres, ci......... 6 »
mêlées avec, or et argent fin,
la livre payera 6 livres, ci.. 8 » de filoselle.QU fleuret, la livre
payera 3 livres, ci.......... 3 »
avec or et argent fin, la livre
payera 4 1. 10 s. ci.......... 4 10
de poil de chèvre, la livre payera
. 7 livres, ci.........-t:...... 7 »
de soie et coton, la livre payera
4 livres, ci................. 4 »
mêlées de soie, de fil, de coton et de laine, la livre payera
3 livres, ci................. 3 »
avec or et argent fin, la livre
6 livres, ci................. 6 »
Etoupes de chanvre et de lin.......... néant.
Euphraise, le cent pesant payera 40 sous,
Euphorbe, le cent pesant payera 3 livres, ci........................»........3
Fabago (racine de), le cent pesant payera
1 i. 10 s., ci.....................: . 1 10
Faïence et poterie de grès (ouvrages de),
le cent pesant payera 12 livres, ci... 12 » Faisse ou lie d'huile, le cent pesant
payera 4 1. 10 s., ci................. 4 10
Farine de toutes sortes—. —. —.. néant. Fenouil (graine ou semence de), le cent
pesant payera 3 livres, ci..........r 3 »
Fenugrec, le cent pesant payera 5 sous,
ci................................. » 5
Fers en verges, feuillards, carrillons, rondins, et autres fers qui ont subi * une première main-d'œuvre, le cent
pesant payera 30 sous, ci..:..::.'.... 1 10 Fers en barres, le cent pesant payera
20 sous, ci......................... 1 »
Fers en gueuse....................... néant.
Fers ouvrés, de toutes sortes, comme fers en taillanderie, ressorts de voitures, serrures et autrës ouvrages de serrurerie, le cent pesant payera 18 livres, ci........:.'.:....;........... 18 »
Fil de fer ou acier, le cent pesant payera
6 livres, ci.....................— 6 »
Fer en fonte, en plaques de cheminée, et autres ouvrages, le cent pesant payera
4 1. 10 s., ci........................ 4 10
Fer-blanc, le cent pesant payera 6 livres,
ci.............................— 6 »
Fer noir, le cent pesant payera 3 livres,
ci............'..v................... 3 »
Fer en tôle, le cent pesant payera 3 li-1
vrès, ci.........................3 »
Fer-blanc onvré, le cent pesant payera
15 livres, ci........................ 15 »
Fer noir et fer en tôle ouvré, le cent pesant payera 15 livres, ci—....... 14 »
Ferraille et vieux fer.. :.............. néant.
Ferret d'Espagne, le cent pesant payera
5 sous, ci.......................... » 5
Fèves de Saint-Ignacé, te cent pesant
p&yera 7 livres, ci.................. , 7 »
Feuilles de houx...................... néant.
Feuilles de'mirthe et autres, propres à la teinture et aux tanneries......... néant.
Feuilles de noyer..................... néant.
Fil de lin et de chanvre, simple, bis, écru et blanc, le cent pesant payera
5 sous, ci.......................... » 5
Fil de lin et de chanvre, retors, écru, bis et blanc, venant de Haarlen, accompagné du certificat du bourgmes* tre de ladite ville, et importé par les bureaux de la Chapelle et Héricourt, le cent pesant payera 30 livres, ci.. 30 » Fit de chanvre et de lin, teint de toutes sortes, le cent pesant payera 60 livres, ci............................ 60 »
Fil d'étoupes, le cent pesant payera
5 sous, ci............ .............. » 5
Fil à voiles, le cent pesant payera 3 livres, ci.....................................3 »
Fil de mulquinerie et fil de linon...... néant.
Fil de ploo, ou poil de cheval, le cent pesant payera 40 sous, ci............ 2 »
Série. T. XXIII.
liv.
3 10
60 » >10 néant.
Fleurs de violette, de pêcher et de romarin, le cent pesant payera 31.10 s.,
ci.................................
Fleurs de soufre, le cent pesant payera
3 livres, ci.............."...........
Fleurs artificielles de toutes sortes, lé cent pesant payera 60 livres, ci..... Flin, le ceht pesant payera 10 soïis, ci..
Foin et herbes de pâturage____.......
Folium gariolilâtum, ou feuilles de girofle, le cent pesant payera 10 livres,
ci........................................10 «
Folium indicum , ou indum , le cent
pesant payera 50 sous, ci.._______....- 2 10
Forces à tondre les draps, le cent pesant
payera 5 livres, ci..............____ 5 »
Fourbissèrie et arquébuserie, à l'exception des armes blanches, le cent pesant payera 36 livres, ci........... 36 »
Fromages, le cent pesant payera 45 sous, ci........:.............................2 5
Fruits crus, Savoir :
Bigarades, cédrats, citrons, limons, oranges, chadecs, le cent pesant
payera 50 sous, ci.:............ 2 10
Châtaignes, marrons, noix, le cent
pesant payera 10 sous, ci. :..... » 10
Olives et picholines, le cent pesant
payera 4 livres, ci.............. 4 »
Coings, gourreaux, melons, poires, pommes, et autres fruits crus non dénommés dans ie présent article.........................
Fruits secs, Savoir :
Jujubes, gengeoles, prunes et pruneaux, figues, raisins, jubis-pas-ses, picardats et autres non dénommés dans le présent article et tarif, le cent pesant payera
20 sous, ci..................... 1 »
Fruits à l'eau-de-vie de toutes sortes, le cent pesant payera 24 livres,
ci................................. 24 »
Fustel (feuilles et branches de)........ néant.
Futailles vides ou en bottes._________ néant.
Galbanum, le cent pesant payera 4 liv.,
ci........................................ 4 »
Gallium blanc et jaune, le cent pesant
payera 10 sous, ci................... » 10
Galons vieux pour brûler............. néant.
Gants et autres ouvrages de ganterie, en peau et cuir, la livre payera 55 sous,
ci............. 2 15
Les mêmes garnis, doublés en soie,
la livre payera 3. liv. -15 s., ci.... 3 15 Les mêmes, doublés de laine, la livre payera 40 sous, ci- 2 »
Garance verte...................... ^. néant.
Garance sèche en racine, ou alisari, le
liv. s.
cent pesant payera 20 sous, cl,...... 1 »
Garance moulue, le cent pesant payera
5 livres, ci.....:."..'................. 5 »
Garouille.---------------------..------ néant.
Gaude............................... néant.
Gazes et marly de sole, la livre payera
15 livres, ci........................ 15 »
Gazes de soie et de fil, la livre payera
8 livres, ci......................... B »
Gazes d'or et d'argent, ou mêlées d'or et
d'argent, la livre payera 30 livres, ci. 30 » Gallengal mineur et majeur, le cent
pesant payera 40 sous, ci............ 2 »
Genestrole........................... néant.
Genseog, le cent pesant payera 45 livres,
cl................................ 45 »
Gentiane, le cent payera 15 sous, ci.... » 15
Gibier de toutes sortes................ néant.
Gingembre, le cent pesant payera 3 liv.,
ei................................. 3 »
Girofle (clous de), la livre payera 15 sous,
ci................................. » 15
Glaces et miroirs au-dessus de 12 pouces, payeront à raison de 15 0/0 de la valeur.
Glaces de 12 pouces et au-dessous, le cent
pesant payera 15 livres, ci........... 15 »
Glayeux ou iris du pays, le cent pesant
payera 15 livres, ci................. 15 »
Glu, le cent pesant payera 3 liv. 10 S., ci................................. 3 10
Gommes et résines,
1° A l'usage des teintures, fabriques et manufactures,
Savoir :
Gommés de cerisier, abricotier, pêcher, prunier, olivier et autres communes
pour la chapellerie.................. néant.
Gommes de Bassera, arabique, turique, du Sénégal, etc., le cent pesant payera
20 sous, ci...............»......... 1 »
Gommes copal, lacque, en feuilles, en grains et sur bois; mastic et sandarac pour les vernis, le Cent pesant payera o livres, ci................. *....... 6 »
2* A l'usage de là médecine et des parfumeurs,
Savoir :
Gommes d'acajou, de cyprès, animée; de lierre, hèdre et sarcolle, le cent pesant
payera 5 livres, ci..................
Gomme de cèdre^ le cent pesant payera
10livres, ci..........................
Gomme ou résine élastique, le cent pesant payera 40 sous, ci. ... » u. Ammoniaque, le cent pesant payera
3 livres, ci.........................3
Ëterni de toutes sortes, le cent pesant payera 9 livres, ci................. »9
Gayac, le cent pesant payera 50 sous,
ci.....,».4........................4
Gutte ou de cambogium, le cent pesant
payera 20 livres, ci.............»...20
Oppoponax, le cent pesant payera 10 liv.,
Sagapenum, seràphinum ou seraphique-taccamàta, le cent pesant payera 6 liv.,
ci ........ ........................ 6 »
Goudron, gaudrot ou goustran, le baril de deux cent quarante à trois cents,
payera 15 sous, ci.................. » 15
Gourre ou tamarin confit avec le sucre,
le cent pesant payera 15 livres, ci.... 15 » Grabeau ou pousse, résidu des drogues lorsqu'on en a séparé le meilleur, acquittera les droits comme les drogues dont il est le résidu............Mémoire
Grains de toutes sortes, Savoir :
. Avoine, baillarge, orge, escourgeon,
sucrion........................ néant.
Blé de froment, blé de méteil, maïs ou blé de Turquie, riz, sarrasin,
blé, seigle...................... néant.
Graines de lin, navette, rabéttê, colza et autres propres à faire huile, le cent
pesant payera 7 sous,-ci............. » 7
Graine turiquê, le cent pesant payera
15 sous, ci....... ................ . » 15
Graine d'esparcette, de foin, sainfoin, luzerne, trèfle et autres propres à
semer dans les prairies............
Graine de genièvre..................
Graine de jardin de toutes sortes.....
Graine de mirtile....................
Graine d'Avignon ou grainette d'usage » n-anf
en teinture...................... } neanu
Graine jaune.......................
Graine de ver à soie................
Graisses de toutes sortes............
Gravelle ou tartre de vin............
Gremil ou herbes aux perles (graines ou semences de), le cent pesant payera
15 sous, ci...........................................» 15
Grenadier (écorce de)................. néant.
Groisil ou verre cassé................. néant.
Groison, le cent pesant payera 25 sous,
Ci........... *....................1 5
Guimauve (fleurs et racines de), le cent
pesant payera 25 sous, ci...................1 5
Guimauve (suc de), le cent pesant payera
6 livres, ci......................... 6 »
Guy de chêne, le cent pesant payera
9 livres, ci........................« 9 »
Gyp, espèce de gros talc, le cent pesant payera 30 sous, ci.................. 1 10
Habillements neufs à l'usage des hommes et des femmes, et ornements d'église, payeront à raison de 15 O/Ô de la valeur.
Habillements vieux, le cent pesant payera
25 livres, ci......................................25 »
Nota. Les habillements à l'usage des voyageurs...................... néant.
Harnais de chevaux, payeront à raison de 15 0/0 de la valeur.
Héliotrope ........................... néant.
Hématite (pierre), le cent pesant payera 10 sous, ci.........;....................» 10
liv. s.
néant, néant.
1 10
Herbes propres à la teinture, non dénommées dans le présent tarif.......néant.
Herbe de maroquin...................néant.
Herbes médicinales non dénommées dans le tarif, le cent pesant payera 30 sous,
ci............... .................110
Herbe jaune.......................... néant.
Herbe de pâturage..............»»»... néant.
Hermodate, le cent pesant payera 40 sous,
ci....;............................ 2 *
Houalte, houelte de coton ou de soie, le cent pesant payera 30 livres, ci..... 30 >*
Houblon............................. néant.
Housses de chevaux garnies et non garnies, payeront en raison de 15 0/0 de la valeur.
Huile à Vusage de la médecine et des parfumeurs,
Savoir :
Huile d'ambre, le cent pesant payera
50 livres, ci.................. 50 »
d'asphaltum, le cent pesant payera
18 livres, ci.................. 18 »
d'anis ou de fenouil, le cent pesant
payera 100 livres, Ci.......... 100 »
d'aspic, le cent pesant payera
7 liv. 10 s., ci.».............. 7 10
de cacao ou beurre de cacao, le cent pesaut payera 22 liv. 10 s.,
et..,.......:...........»..! 22 10
de cade, de cedria, d'oxcicèdre, le
cent pesant payera 40 ?ous, ci. 2 » de canelle, la livre payera 40 sous,
ci .......................... 2 *>
d'ambre jaune, carabé ou saccio, le cent pesant payera 25 livres,
ci........................... 25 »
de citron ou d'orange, le cent pesant payera 25 livres, ci.... 25 » Huile de jasmin, roses et autres fleurs, le
cent pesant payera 25 livres, ci....... 25 »
Huile de gayac, le cent pesant payera
25 livres, ci. —................... 25 »
Huile de girofle, la livre payera 40 sous,
ci...............».,............... 2 »
Huile de gland, le cent pesant payera
7 livres 10 sous, ci................. 7 10
Huile de genièvre ou sandarac, le cent
pesant payera 15,livres, ci. ........ . 15 »
Huile de palme, le cent pesant payera
5 livres, ei............ »............ 5 »
Huile de lavande, le cent pesant payera
15 livres, ci......................... 15 »
Huile de laurier, le eent pesant payera
10 livres, ci........................ 10 »
Huile de macis,lalivrepayera40sous, ci. 2 » Huile de marjolaine, ie cent pesant payera
18 livres, ci........................ 18 »
Huile de muscade, la livre payera 30 sous,
ci...................:............. 1 10
Huile d'œillet, le cent pesant payera
4 livres, ci......................... 4 »
Huile de palma christi, le cent pesant payera 9 livres, ci.................. 9 »
Huile de pavot blanc, le cent pesant
" payera 4 livres, ci.................. 4 »
Huile de pétrole, le cent pesant payera
6 livres, ci..................................6 »
Huile de pignons, le cent pesant payera
liv. s.
9 livres, ci.................................9 »
Huile de sassafras, le cent pesant payera
15 livres, cii.;;.».................» 15 >.
Huile de sauge, le cent pesant payera
18 livres,ci.................»...... 18 »
Huile de. soufre, le cent pesant payera
18 livres, ci........................ 18 »
Huile jde tartre, le cent pesant payera
il livres, ci...».................... 11 »
Huile d'olive de Naples, Sicile, Levant, Barbarie, Espagne et Portugal, le cent pesant payera 4 livres 10 sous, ci... s 4 10 Huile d'oliVe de 'a côte d'Italie, le cent
pesant payera 7 livres 10 sous, ci... . 7 10 Huile de graines, le cent pesant payera
4 livres 10 sous,ci.................. 4 10
Huile de noix, le cent pesant payera
4 livres 10 sous, ci................. 4 10
Huile de cheval, le cent pesant payera
4 livres lOsous, ci................. 4 10
Huile de baleine ou autres poissons, en-} trant parles départements du Haut et du Bas-Rhin, de la Meurthe et de la Moselle, le cént pesant payera 6 livres, ^
Huile de baleine ou autres poissons Venant des Etats-Unis de rÂméric[ûê, et importés par bâtiments fiançais où américains, le cent pesant payera 6 livres, ci............................ 6 »
Huîtres fraîches, le millier en nombre
payera 5 livres, ci.................. 5 »
Huîtres mari-nées, le cent pesant payera
6 livres, ci..»»...........................6 *
Hyacinthe, le cent pesant payera 6 livres,
Hypocistis, le cent pesant payera 3 livres, ci............................ 3 j>
Jalap, le cent pesant payera 4 livrés, Ci. Jaysou jayet, le cent pesant payera 10 livres, ci............................15
Impératoire, le cent pesant payera 30 sous,
Indigo, le cent pesant payera 15 livrés, ci.................................15
Instruments de musique, Savoir :
Poches, la pièce payera 15 sous, ci.. Violons, altovioles et guitares, la pièce
payera 3 livres, ci.. »......*.»».♦.
Gistres, mandolines, tambours, tambourins, tympanons et psalterium*
la pièce payera 30 sous, ci........
Vielles simples, la pièce payera 5 livres,
ci..............,....—,..... 2
Vielles organisées, la pièce payera 18 livres, ci.... »t.....................5
Serinettes, la pièce payera 3 iivres, ci. Harpes et forte-piano, la pièce payera 36 livres, ci......................
Clavecins, la pièce payera 48 livres, ci» Epinettes, la pièce payera 18 livres,ci. Basses et contre-basses, la pièce payera 7 livres 10 sous, ci.......,710
liv. s
vres, ci.......................... 18 »
Orgues d'église, payeront à raison de
12 0/0 de la valeur...............3
Serpents, bassons, cors' de chasse, trom-
pettes, etc., la pièce payera 3 livres,
ci........... ...!............... 3 »
Clarinettes, la pièce payera 4 livres, ci. 4 » Flûtes, la pièce payera sous, ci.... » 15 Hautbois, la pièce payera 4 livres, ci. 4 » Fifres, flageolets, galoubets, la douzaine payera 7 livres 10sous, ci... 7 10 Instruments de musique non dénommée, payeront à raison de 12 Ô/0 de la va-: leur.
Instruments d'optique, d'astronomie, mathématique, navigation, physique et chirurgie, a raison de 10 0/0 de la valeur.
Ipécacuanha, le cent pesant payera 15 livres, ci........................... 15 »
Iris de Florence, le cent pesant payera
3 livres, ci......................... 3 »
Juncus adoratus, le cent pesant payera
9 livres, ci......................... 9 »
Jus de limon et de citron.............. néant.
Jus de réglisse, le cent pesant payera 3 livres, ci'.................... '.... 3 »
Kamine mâle, ou beurre de pierre, le
cent pesant payera 3 livres, ci:...... 3 »
Kirschwasser, la pinte payera 5 sous, ci. » 5
Labdanum naturel et noir apprêté, le cént
pesant payera 6 livres, ci............ 6 »
Labdanum liquide et purifié, le cent pesant payera 22 livres 10 sous, ci... 22 10
Laines non filées..................... néant.
Laines filées, le cent pesant payera 36 livres, ci............................ 36 »
Laine (bourre 4e). ; ;_______ — néant.
Langues, poos ou noves, et tripes dë morue, le cent pesant payera 20 livres, ci: 20 » Lapis entafis, le cent pesant payera
40 sou s,' ci.: : : : ;. : : :. 2 » Lacque plate de Venise, le cent pesant
payera 50 sous, ci.................. 2 10
Lacque colombine sèche, le cent pesant
payera 50 sous, ci.........................2 10
Lacque liquide, le cent pesant payera
5 sous, ci.......................... » 5
Lard frais non salé.................... néant.
Lavande sèche (fleurs de), le cent pesant
payera-3 livres, ci.................. 3 «
Légumes verts de toutes sortes, et herbages frais......................... néant.
Légumes secs de toutes sortes, le cent pesant payera 5 sous, ci........... . 5 »
Laiton ou-cuivre jaune battu et laminé en planches, de toute dimension, gratté noir et décapé, le cent pesant
payera 15 livres, ci................. 15 »
Laiton ou cuivre jaune ouvré, comme chaudières, poêlons, bassines, et toutes espèces de dinanderie, le cent pesant
payera 20 livres, ci................. 20 «
Laitons de toute espèce, en instruments, de quincailleries et merceries, le cent
12 mars 1791.)
liv. s.
pesant payera 24 livres,ci.......... 24 »
Laiton filé, ou fil de laiton noir, le cent
pesant payera 20 sous, ci,.......... 1 »
Librairie en langue française, le cent
pesant payera 6 livres, ci........... 6 »
Librairie ou livres imprimés en langue
étrangère —......... ............... néant.
Lichen........................ néant.
Lie-de-vin........................... néant.
Liège en table, le cent pesant payera
20 sous, ci......................... 1 »
Lierre (feuilles de).......,............ néant.
Limaille d'acier et d'aiguilles, Je cent
pesant payera 30 sous, ci............ 1 10
Limaille de cuivre...........................néant.
Limaille de fer, le cent pesant payera
20 sous, ci......................... 1 »
Lins cruds, tayés ou apprêtés.......... néant.
Linge ouvré de toutes sortes, et linge de table, le cent pesant payera75 livres, ci. 75 »
Linge vieux ou drille................. néant.
Linon et batiste, la livre: pesant payera
6 livres, ci........ .............— 6 »
Liqueurs et ratafiats de toutes sortes, la
pinte payera 10 sous, çi....................» 10
Litarge naturelle et artificielle, le cent
pesant ^payera 20 sous. ci............ 1 »
Loups (dents de) le cent pesaut payera . 15 sous, ci....................r«*? 15'
Macis, la livre pesant payera 20 sous, ci. 1 »
Mâchefer.......... —............... néant.
Magalaise............................ néant.
Malherbe, herbe pour la teinture....... néant.
Manne de toutes sortes, le cent pesant
payera 6 livrés, ci.... :............. , 6 »
Marbre brut de toutes sortes, le pied cube
payera 20 sous, ci... — ..... 1 »
Marbre en cheminée^ scié ou travàillé, le
pied cube payera 40 sous, ci —. . .., 2 » Marcassite d'or, d'argent, de cuivre, le
cent pesant payera 8 livres, ....... .8 »
Marqueterie et tableterie (ouvrage de) payeront à raison de 150/0 de la va leur Marum (feuille de)',le cént pesant pavera
40 sous, ci......................... 2 »
Massicot,le centpesant payera9 livres, ci. 9 »
Mâts pour vaisseaux..........—.... néant.
Mechoacham, ou rhubarbe blanche, le
cent pesant payera 50 sous, ci....... 2 10
Médailles d'or, d'argent et de cuivre— néant. Mélasse, le cent pesant payera 5 livres, ci. 5 »
Mercerie commune de toutes sortes.
Savoir :
Aiguilles de toutes sorles ; ambre jaune travaillé ; bâttefeux et briquets limés ; boëtes de sapins peintes; boëtes ferrées; bois de miroirs non enrichis; bougettes; bourses de cuir, de fil et laine; boutons dë manches d'étain, et autres métaux communs, brosserie; . cadrans d'horloge' et de montre; chapelets de bois et de rocaille ; coffres non garnis; colliers de perles et de pierres fausses; compas; cornets à jour, de corne ou de cuir ; cornes claires à lan-
liv. s.
ternes ; dés à coudre en corne, cuivre, fer, os et ivoire; dés à jouer; domino-torie ; écritoires simples ; éperons communs ; éventails communs ; feuillesd'é-venlails; fouets; hameçons; horloges à sable; houpes à cheveux de duvet; fourreaux d'épées ; fourniments à poudre; fuseaux; gaines; gibecières; grains de verre de toute sorte ; grelots ; jetons de nacre, d'os et d'ivoire; lanternes commu nés ; lignes de pêcheurs ; manicordium; masque pour bal; moulins à café et à poivre ; ouvrages de buis ; ouvrages en cuivre et fer, tels que chandeliers, flambeaux, mouchettes, tire-bouchons, et autres de même espèce; ouvrages menus d'étain, comme cuillers, fourchettes, peignes de buis, de corne et d'os ; perles fausses ; pipes à fumer : ramonettes ;raquettes ; sifflets d'os et d'ivoire; soufflets; tambours; tamis et volants, le cent pesant payera 20 livres, ci................20
Mercerie fineset autres non dénommées dans le présent tarif, payeront à raison de 15 0/0 de la valeur Mercerie en soie; comme bourses à cheveux, mouches et mouchoirs de soie, la livre payera 6 livres, ci..........6
Mercerie précipité, le cent pesant payera
15 livres, ci,...-----—...... :.....15
Métiers à faire bas et autres ouvrages, payeront à raison de 15 0/0 de la valeur
Métal de cloches, le cent pesant payera
18 livres, ci..—...................18
Meubles de toutes sortes, payeront à raison de 15- 0/0 de la valeur. Meules à taillandiers, de 4 pouces et au-dessus, la pièce payera 40 sous, ci.. ; Meules au-dessous de 4 pouces à 2 1/2,
la pièce payera 15 sous, ci...........15
Meules au-dessous de 2 pouces 1/2, la pièce payera 5 sous, ci......... .. ..;5
Meules de moulins au-dessus de 6 pieds de diamètre, la pièce payera 7 I. 10 s. eh... Meules de 6 à 4 pieds de diamètre, la
pièce payera 5 livres, ci.............5
Meules au-dessous de 4 pieds de diamètre, la pièce payera 50 sous, ci... » .. Meum d'athamante, lecent pesant payera
20 sous, ci.........................20
Miel, le cent pesant payera 3- livres, ci. Mine de plomb noir, le cent pesant
payera 15 sous, ci..................15
Mine de fer brute et lavée.............néant.
Minium, le cent pesant payera 5 sous,
ci.................................5
Mirrhe (gomme de) le cent pesant payera 4 livres, ci......................4
Modes (ouvrages de) payeront à raison de 12 0/0 de la valeur.
Momies, corps embaumés.............néant.
Montre d'or ou d'argent, avec son mouvement, la pièce payera 40 sous, ci.. Morilles et mousserons, espèces de champignons, le centpesant payera 12 livres, ci....................§....11.
Mottes à brûler, t.....................néant.
Moules de boutons, le cent pesant payera 3 livres, ci......................3
Moulard ou terre cimolée..............néant.
Mousselines rayées et unies, à carreaux, brochées, et fkhus unis, le cent pesant payera 300 livres, ci...........300
Mousselines et fichus brodés de toutes sortes, le cent pesant payera 400 livres, ci................ "..'... i.
Moutarde, le cent pesant payera 6 livres,
ci........................ *,......
Mouvements de montres en blanc, montés, la pièce payera 15 sous, ci......15
Muguet ou lys de vallée (fleurs de), le cent pesant payera 30 sous, ci: : ; .*-.-;r Mules et mulets, la pièce payera 20 sous, ci........................—....'.20
Munitions de guerre, à l'exception de la poudre à tirer >
Savoir :
Balles de fusils et pistolets, le cent pesant payera4 1. 10. s., ci.......... 4 10
Bombes, boulets de canons, grenades et mortiers, le cent pesant payera 30 sous,
ci...........;..:.......1 10
Canons de fer le cent pesant payera
30 sous, ci........................ 1 10
Canons de fonte, le cent pesant payera
41. 10 s., ci....................... 4 10
Canons de fusils, le cent pesant payera
24 livres, ci............."... 24 »
Canons de pistolets, le cent pesant payera 48 livres, ci..................... 48 *
Musc, la livre payera 15 livres, ci...... 15 »
Muscade, la livre payera 20 sous, ci.... 1 »
Myrabolans non confits ; le cent pesant payera 3 1. 10 s., ci.... .......... ^ ? 3 10
Myrabolans confits, le cent pesant payera 15 livres, cit 4 i ; 1 : : ; i ; i : i ; ; : : : ; : : ; 15 »
Naphe ou naphte, le cent pesant payera 30 sous, ci...,.................. 1 10
Nattes de paille, de roseau et autres plantes et écorces, le cent pesant payera 20 sous, ci....................".. 1 »
Nattes de jonc, le cent pesant payera 4 livres, ci.................. ......4 »
Nénuphar, le cent pesant payera 15 sous,
ci................................v. » 15
Nerprun............................. néant.
Nerfs de bœufs et autres animaux..... néant. Nigelle romaine (graine de) le cent pe- :
sant payera 4 1.10 s., ci............ 4.10
Noir de teinturier d'Allemagne, d'us et de cerf, le cent pesant payera 30 sous,
ci...........................v....; 110
Noir de fumée, de terre et des cor-royeurs, le cent pesant payera 20 sous,
ci................................. 1 »
Noir d'ivoire, le cent pesant payera
15 livres........................... 15 »
Noir d'Espagne, le cent pesant payera
31. 10 s., ci........................ 3 10
Noix de cyprès, le cent pesant payera
20 sous, ci......................... 1 »
Noix vomiques, le cent pesant payera
20 sous, ci......................... 1 »
Noix de galle pour tëinture, le cent pesant payera 20 sous, ci...... »........... 1 »
liv. S.
Ocre jaune et ronge, le çept pesant
payera 5 sous, ci................... 5 »
Oculi cancri, le cent pesant payera 4 livres, ci........................... 4 »
Œufs de volaille et de gibier.nésmt-Oignons de fleurs.néant. Opium, le cent pesant payera 1Q livres,
ci,..............................,, 10 »
Or brûlé én barres, en masse, lingots et
monnayé, et bijoux cassés. — —. néant. Or en ouvrages d'orfèvrerie, payera à raison de 10 0/0' de la Valeur. Or en feuilles battu, Ponce payera 8 li-
vres, ci................... 3 »
Or trait battu, en paillettes ou clinquant,
l'once payera 2 livres, ci........... 2 »
Or filé, ou fil d'or fin, Ponce payera 30 sous,
ci...........................................1 10
Or faux en barres et en lingots, le cent
pesant payera 36 livres, ci.......,... 36 »
Or faux en feuilles, paillettes, clinquant, trait et battu, le cent pesant payera
70 livres, ci.,..,................... 70 »
Or faux filé ou fil d'or faux, le cent pesant payera 80 livres, ci,..........,. 80 »
Qrcanette, le cent pesant payera 5 sqns,
ci----......p..,,..,..,.,...,..,... » 5
Oreillons ou brillons................. néant.
Orgé perlée ou mondée, le cent pesant payera 40 sous, ci.................. 2 »
Orobe (graine ou spmence d'), le cent pesant payera 10 sous, ci....,.. », » 10
Orpiment, le cent pesant payera 5 sous,ci, » 5
Qrseille apprêtée et non apprêtée...... néant.
Os de bœufs, de vaches et aqtres ani-r,
maux ......... .................... néant.
Os de seiche, lé' cent* pesant payera
10 sous, ci......................... » 10
Osier en bottes....................... néant.
Outremer, la livre payera 15 livres, ci- 15 » Ouvrages en piècesd'horlogerie non montées, payera 3 liyre§v ci,,,,,,,.... i. : 3 » Ouvragesén boisjen pierre,acier, comme chaînes de montres, épées et autres ouvrages finsdemêmeespèce; en marbre, en cuivre doré, et autres matières enrichies et garnies ou non eh or ou argent, et non dénommés au tarif, payeront à raison, 'de 15 Q/Q de la valeur.
Ouvrages de paille, de jonc et de palme,
le cent pesant payera 6 livres, ci.. .. 6 Ouvrages d'osier, le cent pesant payera
I l 10s., ci./.,.................... 7 10
Ouvrages à pierres de composition mar-cassites ou autres, montées sur étain* cuivre argenté ou doré, ou sur or ou sur argent, payeront à raison de 50/0 de la valeur.
Pailles de blé et autres grains..........néant.
Pailles d'acier et de fer, le cent pesant
payera 5 sous, ci.,.,.,............... » 5.
Pain d'épice, le cent pesant payera 3 livres,Ici..........................3 »
Pain de navette, lin et colza.........., néant.
liv. s.
Papier blanc- de toutes sortes, le cent
pesant payera 30 livres, ci.......... 30 »
Papier gris, noir, brouillard, bleu, de toutes sortes,lé cent pesant payera 18 Jj,-
vres, ci ,.,..,.......,,...................18 »
Papier doré, argenté, uni et à fleurs, le
cent pesant payera 36 livres, ci,..... 36 » Papier marbré, le cent pesant payera
24 livres, ci—.......,,........... 24 »
Papier peint en façon de' damas, le cent
pesant payera 45 livres, ci.,,.,,.... 45 » Papier-ton tisse pour tapisserie, le cent
pesant payera 36 livres, cl,,..,.,,,., 36 » Papier de la Chine, le cent pesant payera
90 livres, ci.,,..,,..,.............. 90 »
Parapluie de toile pirée, la pièce payera
15 sous, ci............ » 15
Parasols de taffetas, la pièce payera 40 sous, ci.. —..., 2 »
Parchemin neuf brut................. néant.
Parchemin neuf travaillé, le cent pesant
payera 6 livres, Gi..........................6 »
Paréira brava, le cent pesant payera
40 sous, ci......................... 2 »
Parfums de toutes sortes, pon dénommés au présent tarif, le cent pesant payera 50livres, ci-,,.,.,, —........... 50 »
Passementerie et listonneries, comme galons, gances, jarretières, aiguillettes, franges, rubans, et tous autres ouvrages de passementerie et rubannerie,
Savoir :
En or et argent fin, la livre payera
15 livres, ci—..............,.... 15 »
Les mêmes, en or et argent faux, le
cent pesant payera 150 livres, ci.. 150 » Les mêmes, en soie avec or et argent
fin, la livre payera 12 livres,ci..,. 12 » Les mêcqes en soie Fans or ni argent, la livre payera 71-10 s., ci......, 7 10
Les mêmes, en soie et coton ou matières mêlées, la livre payer a 31.10 s.,
Ci...,,,,,,,.,.......3 10
Passepierre ou percepierre, le cent pç-*
sant payera 15. sous, ci ,.er">,.......... » 15
Pastel ou guelde, drogue pour la teinture. ...,...,..,.................................néant.
Pastel d'écarlate...................... néant.
Pastel (crayons de), le cent pesant payera
5 livres, ci.-.....,-.............................5 »
Pâtes d'amandes et de pignons, le cent
pesant "payera.6 livres„Qi,6 » Pâte d'Italie,. le cent pesant payera 5 li' vres, ci......... 5 i
Patience, Je.cent pesant payera 20 sous,
ci................................. 1 »
Pattes de. JiQU, le. cent pesant payera
vingt sous,......................1 »>
Pavot rouge ou coquelicot (fleurs de),
le cent pesant payera 20 sous, ci..... 1 »
Pavés ou pierre de grès..........
Peaux et cuirs de toutes sortes, secs et,
en poils.......;.,,».,...........j
de bœufset vaches salèespt en vert,
de cheval et d'âne, en vert........> néant.
de moutons, brebis et agneaux en(
vert................... ...
de veaux salés et vert.........
non dénommées, salées et en vert.,
Peaux et cuirs passés, tannés, corroyés et apprêtés, de toutes sortes,
Savpir :
liv. s.
Peaux d'anta, biori, bœufs, buffles, élans, d'empakasse de mes ou moos, d'orignac, tannés en fort, le cent pesant
payera 10 livres, ci.......... —.... 18 »
Les mêmes, corroyées, le cent pesant
payera 22 1.10 s., ci............ 22 10
Peaux de vaches, tannées, le cent pesant
payera 16 livres, ci................. 16 »
Les mêmes, corroyées, le cent pesant payera 20 livres, ci,,....,....,« 20 » Peaux de vaches et de bœufs, passées en Hongrie, le cent pesant payera 15 livres, ci............................ 15 »
Les mêmes, passées en chamois et en buffle, le cent pesant payera
30 liyres, ci_______________________ 30 »
Peaux de vaches, fabriquées en russi ou roussi, le cent pesant payera 30 livres,
ci........,../...... .............. 30 »
Peaux de cheval tannées en croûte, et passées en Hongrie, le cent pesant
payera 7 l. 40 s„ ci............... .. 7 10
Les mêmes, étirées et corroyées, le
cent pesant payera 10 livres, ci.. 10 » Les mêmes, passées en chamois, le cent pesant payera 12. livres, ci.. 12 i » Peaux de boucs, chèvres, chevreaux, chamois, etc., maroquiqées en cordouan, ou maroquinées en rouge, le cent pesant payera 70 livres, ci............. 70 »
Les mêmes, en cordouan, ou maroquinées en noir,vert, bleu, citron, et autres couleurs, 1e cent pesant
payera 90 livres, ci............. 90 »
Les mêmes, en basane, le cent pesant payera 18 livres, ci......... 18 »
Les mêmes, tannées et corroyées, le
cent pesant payera 80 livres, oi., 30 » Les mêmes, passées en chamois, le
cent pesant payera 45 livres, ci.. 45 » Les mêmes, passées en blanc ou en mégie, le cent pesant payera 27 li*
vres,ci.......................................27 »
Peaux de cerfs et de chevreuils, passées en chamois, le cent pesant payera
75 livres, ci........................ 75 »
Les mêmes, passées à l'huile, lecent pesant payera 45 livres, ci... — 45 » Peaux de chagrin de Turquie, le cent pesant payera 75 livres, ci............. 75 »
Peaux en façon de Turquie, le cent pesant payera 45 livres, ci............. 45 »
Peaux de chiens tannées et corroyées, le cent pesant payera 37 1. 18 s., ci.,.... 37 10
Peaux d'ânes, tannées et "corroyées, le cent pesant payera 45 livres, ci...... 45. »
Peaux ae daims, d'élans, passées en chamois, le cent pesant payera 75 livres,
ci.................................. 75 »
Peaux de moutons, brebis et agneaux en chamois, le cent pesant payera 25 livres, ci........................................25 >
Les mêmes, passées en basane et en croûte, le cent pesant payera 24 livres, ci......................». 24 »
Les mêmes, passées en blanc et en mégie, le cent pesant payera 30 livres, ci......,................. 30 »
Les mêmes, passées en mégie, avec la laine, appelées howes, bis-quains ou housses de chevaux» le cent pesapt payera 18 livres, çi.t Peaux d'agnelins, apprêtées pour vélins ou smucques, le cent pesant payera 150 livres, ci....?............t,.,.,
Poaux d'orignaos, passées en chamois, le cent pesant payera 60 livres, ci......
Peaux de porcs et de sangliers, tannées en croûte, le cent pesant payera 22 ),
10s., ci.........................4k
Peaux de rennes, passées en chamois, le cent pesant payera 180 livres, ci.. Peaux de veaux, passéps en Ghamois, le cent pesant payera 120 li vres, ci..... Peaux ae veaux, tannées en croûte, le
cent pesant payera 16 livres, ci......16
Les mêmes, corroyées, le cent pesant payera 24 livres, ci.,,,.,,,.....,24
Les mêmes, en mégie, le cent pesant payera 150 livres, ci............150
Peaux de veaux d'Angleterre, ou préparées en Angleterre, lecent pesant payera
45 livres, ci.,......................45
Peaux de cagneaux bleus, chiens de mer ou roussettes, lions et ours marins, le
cent pesant payera 4 livres, ci.......,4
Peignes d'écaillés, la livre payera 20 sous,
Peignes d'ivoire, la livre payera 15 sous, ci.................................15
Pelleteries, Savoir :
Peaux de blaireaux, de loutres, loups de bois et cerviers, de ciguës, de chèvres angora, de carcajoux, la pièce payera
4 sous, ci..,.......................4
Peaux de chats-cerviers, chatsrtigrâs, de lions, lionnes, de martres de. toutes espèces, d'oies, de renards de toutes espèces, de pekands, veaux, vaches et loups marins, la pièce payera 2 sous,
ci.
Peaux de chats de feu, de chats sauvages, chiens et chikakois, de fouines, degé-nettes, de gredbes, de marmottes, de putois, de vizons, la pièce payera 1 sou,
ci.
Peaux d'ours et d'oursin de toutes couleurs, la pièce payera 5 sous, ci-------5
Peaux de léopards, panthères, tigres et zèbres, la pièce payera 10 sous, ci... Peaux d'hermines blanches et lasquette, le timbre de quarante peaux payera
40 sous, ci............. ...........40
Peaux d'hermines de terre, mouchetées et bervesky, écureuils d'Amérique, palmistes des Indes, le cent en nombre
payera 40 sous, ci..................40
Peaux de petit gris, et écureuil de toute espèce, le cent en nombre payera 20
sous, ci............................néant.
Nota. Toutes lesdites espèces de pelleterie ci-dessus dénommées payeront, à l'exception des ours, le double des droits ci-dessus, lorsqu'elles seront apprêtées.
Peaux d'agneaux, connu sous lenom d'As-
trakan, de Russie, de Perse et de Grimée, la pièce payera 10 livres, ci— 10 » Peaux de lièvres blancs, apprêtées, le cent en nombre payera 6 livres, (3.. 6 » Gorges de renards, de martres et de fouines, le cent en nombre payera 40 sons, ci...;......2 »
Queues de martres de toute espèce, le
cent en nombre payera 50 sous, ci. 2 10 Queues de petit gris, d'écureuils, d'hermines, de putois, le cent en nombre payera 5 sous, ci........ » 5
Queues de renards, de fouines, de car-cajoux, de pekands, de loups, le cent en nombre payera 30 sous, ci. 1 10 Sacs ou nappes de martres de Russie, de Canada, de Suède, d'Ethiopie, d'agneaux d'Astrakan, d'hermines, de lasquettes, le sac ou nappe payera 5 livres, ci....»i................. 5 »
Sacs ou nappes de dos et ventres de petitgris, d écureuilsde toute espèce, de lapins dé toutes couleurs, de taupes, de fouines, de putois, de dos, ventres de lièvres blancs, d'hermines de terre mouchetées ou bervisky, rats palmistes des Indes, d'amster, de dos,-ventres et pattes de renards, le sac ou nappe payera 30 sous, ci. 1 10 Peaux de castors, et rats musqués propres pour la chapellerie............. néant.
Peaux de lièvres, de lapins gris, blancs, roux, de toutes espèces et couleurs
non apprêtées...................... néant.
Toutes les pelleteries, non dénommées dans le présent article, payeront les droits de celles auxquelles elles seront assimilées.
Tous les ouvrages en pelleterie, comme manchons, fourrures, etc., payeront à raison de 15 0/0 de la valeur. Peaux de lapins blancs, riches, roux, noirs et bruns, apprêtées, la pièce payera
2 sous, ci........................... » 2
Pendules de toutes sortes, payeront à
raison de 15 0/0 de la valeur. Pennes ou paines et corons de laine, de
fil et coton etc....................... néant.
Perelle apprêtée et non apprêtée....... néant.
Perles fines et fausses non montées____ néant.
Périgord ou périgueux................ néant.
Perruques de toutes sortes, la pièce payera
40 sous,, ci----------. . .----------------------- - 2 >
Persil de Macédoine, le cent pesant payera
5 livres, ci......................... 5 »
Pieds d'élan, le cent en nombre payera
30 sous, ci......................... 1 10
Pierres à bâtir........................ néant.
Pierres arméniennes, le cent pesant
payera 10 livres, ci------------------... 10 »
Pierre de choin brute, ou même taillée
sans être polie...................... néant.
Pierre de choin polie, en cheminées, etc., payera à raison de 2 1/2 0/0 de la valeur.
Pierre à plâtre et à chaux............ néant.
Pierre à feu, à fusil et arquebuse, le cent
pesant payera 40 sous, ci........... 2 »
Pierres à aiguiser de toutes sortes, le «ent pesant payera 10 sous, ci ... — » 10
Pierre savonneuse.................... néant.
Pierre de touche, le cent pesant payera 20 sous, ci......................... 1 »
Pierre ponce, le cent pesant payera
10 sous, ci..........................
Pierre de mangayer, le cent pesant payera
5 sous, ci...........................5
Pierres fausses ou fines, même montées. Pignons blancs, le cent pesant payera
3 trois livres, ci... —.............3
Pignons d'Inde, le cent pesant payera
4 livres^ ci............... —;....
Pinceaux autres que de cheveux et de
poil fin, le cent pesant payera 9 livres,
Pinceaux de poil fin, le cent pesant'
payera 72 livres, ci..................72
Pirestre, le cent pesant payera 50 sous, ci. Pistaches cassées, le cent pesant payera
121ivres, ci............— —....121
Pistaches non cassées,, le cent pesant payera 3 livres, ci....... — —3
Pivoine (racine? et fleurs de), le cent pesant payera 3 livres, ci........3
Plâtre à bâtir.........................néant.
Plomb brut et en saumon, le cent pesant payera 3 livres, ci..................3
Plomb à tirer et en grenaille, le cent pesant payera 4 1. 10 s. ci............10
Plomb laminé et ouvré de toutes sortes, le cent pesant payera 9 livres, ci— Plumes d'autruche, d'aigrette, d'espadon, e héron, d'oiseau couronné, de xo-molt, et autres qui entrent dans le commerce des plumassiers, de première qualité, le cent pesant payera
50 livres, ci---------------------------50
Les mêmes.apprêtées, le cent pesant
payera 150 livres, ci..............150
Plumes de qualité inférieure, comme petites noires, bailloques brutes, le cent
pesant payera 20 livres, ci..........20
Les mêmes apprêtées, le cent pesant
payera 50 livres, ci»..............50
Plumes à écrire non apprêtées, le cent
pesant payera trois livres, ci........néant.
Les mêmes apprêtées, le cent pesant
payera 20 livres, ci...............20
Plumes à lit, le cent pesant payera 7 1.
10 s. ci............................10
Poil en masse et non filé, de lapin, de lièvre, castor, chameau, bouc, chèvre, et chevreau........................néant.
Poil filé et en écheveaux, Savoir :
Poil de lapin et de lièvre, le cent pesant
payera 40 livres, ci..................40
Poil de bouc, chèvre et chevreau, le cent
pesant payera 10 sous, ci............10
Poil de castor, le cent pesant payera 180
livres, ci. ..........................néant.
Poil de chameau, retors et en cordonnet,
le cent pesant payera 60 livres, ci-----60
Poil de chèvre, retors en cordonnet, pour boutons, etc., le cent pesant
payera 120 livres, ci................120
Poil ou soie de porc et de sanglier, le cent
pesant payera 20 sous, ci............ .20
Poil de chien.................. .......néant
Poiré, le muid de Paris payera 6 livres, ci.
Poisson d'eau douce, frais.............néant.
Poisson de mer, frais, sec, salé ou fumé,
Poivres de toutes sortes, même ceux connus sous la dénomination de poivre long, corail de jardin ou piment en graines ou en grabeau, le cent pesant
payera 15 livres, ci.................. 15 »
Poix grasse, poix noire, poix-résine, ou résine de sapin, le cent pesant payera
5 sous, ci.......................... » 5
Polium montanum, le cent pesant payera
30 sous; ci...............................110
Polozum ou fonte verte, le cent pesant
payera 12 livres, ci.......... —... 12 »
Pommades de toutes sortes, le cent pesant
payera trente livres, ci............. 30 »
Pompholix ou calamine blanche, le cent
pesant payera 3 livres, ci............ 3 »
Porcelaine iine, le cent pesant payera
160 livres, ci....................... 160 »>
Porcelaine commune, le cent pesant
payera 80 livres, ci.................. 80 »
Potasse............................... néant.
Poterie de terre grossière, le cent pesant
payera 30 sous, ci.................. 1 10
Poudre à poudrer, excepté celle ci-après,
le cent pesant payera 6 livres, ci..... § »
Poudre de senteur, le cent pesant payera
45 livres, ci............... —... ;. 45 »
Poudre de Chypre, la livre payera 40 sous,
ci.--------------------------------... 2 »
Pouliot de Virginie, le cent pesant payera
vingt sous, ci....................... 1 »
Pourpre naturelle et factice, le cent pesant
payera 7 1., 10 s. ci................. 7 10
Pouzzolane........................... néan t.
Presle (feuilles de), le cent pesant payera
5 sous, ci.......................... » 5
Pressure............................... néant.
Quincaillerie, consistant en faux, faucilles, scies, vrilles de toutes sortes, et autres instruments aratoires, le cent
pesant payera 20 livres, ci............ 20 »
Quincaillerie, consistant en fléaux de balances, limes communes, et autres gros ouvrages de quincaillerie en fer, le cent pesant payera 10 livres, ci — 10 * » Quincaillerie iine, comme alênes, broches, carlets, emporte-pièces, Urnes fines à orfèvreet|inorloger, et toutes limes en acier, le cent pesant payera 37 1.
. 10 s., ci............................. 37 10
Quincaillerie en cuivre de toutes sortes, ou avec cuivre rouge, jaune ou plaqué sans or ni argent, le cent pesant payera
24 livres, ci........................ 24 »
Quinquina, le cent pesant payera 8 livres, ci.................................. 8 »
Raisins de Damas et de Corinthe, le cent
pesant payera 20 sous, ci............ 1
Rapatelle ou toile de crin, le cent pesant payera 10 livres, ci.................. 10
Rapure d'ivoire, le cent pesant payera 5 livres, ci......................... 5
liv. s.
Redon ou rodon...................... néant.
Redoul ou rodoul (feuilles de).......... néant.
Réglisse en bois, le cent pesant payera t-
15 sous, ci....... —.............. » 15
Régule d'antimoine, le cent.pesaat payera
4 livres, ci..,...................... 4 »_
Régule d'étain, le cent pesant payera
12 livres, ci....................— 12 »
Régule martial, le cent pesant payera
8 livres, ci......................... 8 "»
Régule de Vénus, le cent pesant payera
20 livres, ci-----... —20 »
Régule d'arsenic ou de cobalt, le cent
pesant payera .4 livres, ci,........... 4 »
Résine de jalap, le cent pesant payera
30 livres, ci......,.....,........... 30 »
Rhubarbe, le cent pesant payera 18 livres,
ci..................,,,........... 18 »
Rhue (feuilles de), le cent pesant payera .
20 sous, ci,....................................1 »
Ricin, le cent pesant payera 4 livres, ci.. 4 » Rocou, le cent pesant payera 3 livres, ci. 3 » Rogues,coques, raves ou résures de morue néant. Romarin (fleurs de), le cent pesant payera
4 livres, ci. . ......................... 4 »
Ronas.................................... néant.
Roseaux ordinaires.................... néant.
Roses fines et communes, le cent pesant
payera 5 livres...................... 5 »
Rosette, le cent pesant payera 20 sous,
ci.................................. 1 »
Rotins ou roseaux des Indes pour faire meubles, le cent pesant payera 3 livres,
ci................................ 3 »
Rouge pour femme, la livre payera 4 livres, ci.........................— 4 »
Rubans de fil, Savoir :
Rubans de fit écru et d'étôupes, le cent
pesant payera 30 livres, ci........... 30 »
Rubans de fil blanc, le cent pesant payera
50 livres, ci........................ 50 »
Rubans de fil teint, le cent pesant payera
70 litrres, ci........................ 70 »
Rubans, cordons, tresses de laine et fil de chèvre mêlés, le cent pesant payera
60 livres, ci........................ 60 »
Rubans ou tresses en poil de chèvre mêlés de soie, le cent pesant payera 100 livres, ci............................ 100 »
Ruches à miel —................... néant.
Safran, la livre payera 45 sous, ci...... 2 5
Safran bâtard, ou saffranum........... néant.
Safre ou zaphre, le cent pesant payera
7 1. 10 s.,. ci..................... 7 10
Sagu ou sagou, le cent pesant payera
10 livres, ci........................ 10 »
Salep ou salop, le cent pesant payera
30 livres, ci........................ 30 »
Salse pareille, le cent pesant payera 6 livres, ci.... —..................... 6 »
Sandarac, le cent pesant payera 6 livres,
ci......................................6 »
Sang de bouc ou bouquetin, le cent pesant payera 7 1. 10 s., ............. 7 10
Sang-de-dragon de toutes sortes, le cent
pesant payera 9 livres, ci............9
Sangles*pour chevaux, meubles, etc., le cent pesant payera 60 livres, ci..... . Sanguine pour crayons, le cent pesant
payera 5 sous, ci..............5
Sarrette ou sariette, le cent pesant payera
10 sous, ci ; » ».......».......10
Sassafras ou saxafras, le cent pesant
payera 30 sous, ci..................110
Sauge, le cent pesant payera 20 sous,
Savon de fabrique de Marseille, le cent pesant payera 3 livres, ci.... —....3
Savon venant de l'étranger, le eent pesant payera 9 livres, ci............. —.9
Savon noir, le cent pesant payera 6 livres,
Savonnettes, le eent pesant payera 40 livres, èii iiiiii ji»iiiinitiitiiji..>
Saxifrage (graine ou semence de), le cent pesant payera 30 sous, ci«. *...... 4.
Scabieuse, le cent pesant payera sous,
ci
Scamonée, le cent pesant payera 50 livres,
ci — i............................50
Scammoné (résine de), le cent pesant payera 150 livres, ci..............150
Scilles ou squilles marines, le cent pesant payera 15 sous, ci w............15
Sebestes; le cent pesant payera 40 sous,
ci.
Sel gemme, ou sel fossile naturel, le cent pesant payera 5 livres, ci. * * « * * Sel de saturne et de tartre, le cent pesant payera 10 livres* ci............10
Sel d'epsom ou duobus, le cent pesant
payera 3 livres, ci.,...,,,.......3
Sel d'oseille, le cent pesant payera 5 livres, ci................I...........5
Sel volatil de cornes de cerf, de vipère, de carabé, le cent pesant payera 60 livres, ci ......................60
Sel végétal, de saignette et de lait, le
cent pesant payera 10 livres, ci._____
Semences froides et autres médicinales, le cent pesant payera 3 livres, ci.».. Semence de ben, le cent pesant payera 40 sous, ci.........................40
Semen d'anci, le cent pesant payera
5 livres, ci i »......5
Semen cartami * le cent pesant payera 30 souS, ci. 4............
Séné, ou feuilles, follicules ou grabeau, le eent pesant payera 6 livres, ci.....6
Sénéka ou poligata de Virginie, le cent pesant payera 4 livres, ci...........4
Sennevé, le cent pesant payera 10 sous,
ci.
Serpentine ou serpentaire, le cent pesant payera 5 livres, ci...........5
Seseli de Marseille ou de Candie, le cent pesant payera 30 sous, ci......30
Sirops, à l'exception de ceux dénommés dans le présent tarif» le cent pesant payera 25 livres, ci,............ 25
Sirop de Kermès, le cent pesant payera 5 livres, ci ........................5
Soldanelle ou choux de mer, le cent pesant payera 30 sous, ci.. «...........30
Son de toutes sortes de grains..... 30
Sorbec, le cent pesant payera 18 livres, ci..................18
Souchet ou cypèrus de toutes sortes, le
cent pesant payera 20 sous, ci..............1
Soudes de toutes sortes............... néant
Soufre brut ou vif^.......................néant
Soufre en canons, le cent pesant payera 20 sous, ci........... r.».1
Soies de toutes sprtes,
Savoir :
Soies grèzes de toutes sortes, excepté celle ci-après, la livre payera 10 sous,
ci.^............... ..............
Soies grèzes, doubles ou doupions, la
livre payera 5 sous, ci.......... . .
Soies ouvrées en trame, poil et organcin, la livre payera 20 sous, ci...........
Soies à coudre, crues, la livre payera
20 sous, ci.........................20
Soies teintes, la livre payera 30 sous, ci. Fleuret ou fiioselle, crus, la livre
payera 8 sous, ci............8
Fleurets teints, la livre payera 30 sous,
ci...............................30
Cocons et bourres de soies de toutes
sortes...........................
Bourre de soie cardée, la livre payera
8 sous, ci........................
Spalt....................—......
Spicanardi ou nard indien, le cent pesant
payera 10 livres, ci—...........«c
Spica celtica, ou nard celtique, le cent
pesant payera 3 livres, ci ........
Spode, le cent pesant payera 40 sous, ci. Squœnante ou pailles de squenante, le cent pesant payera 10 livres, ci..... Squine ou esquine, le cent pesant payera
3 livres, ci ----------------------------
Staphisaigre, le cent pesant payera
30 sous, ci.........................
Steca ou sticade, le cent pesant payera
30 sous, ci.........................
Slil de grains, le cent pesant payera 6 livres, ci.......................,..,»
Storax calamité, Je cent pesant payera
10 livres, cl.........____s........
Storax liquide, le cent pesant payera
3 livres, ci ...... f. ................
Storax rouge et en pain, le cent pesant payera 4 livres, ci... . ... ... .. .
Stuc ..............................
Sublimé doux et corr'osif, le cent pesant
payera 15 livres, ci.................
Sucres bruts, le cent pesant payera 9 livres, ci ...........................
Sucres-têtes et terrés, le cent pesant payera 18 livres, ci ................
Sucres raffinés ou en pains, le cent pesant
payera 25 livres, ci............... ;.
Sucre candi, le cent pesant payera 25 livres, ci............................
Suifs non ouvrés.....................néant.
Sumac ..............................néant.
Suie de cheminée....................:néant
Tabac en feuilles, en bOUcâuts, venant directement dès Etats-Unis, des colonies espagnoles, de
l'Ukraine et du Le- . vant, sur bâtiments français, dans les ports qui seront désignés, le cent pesant payera 18 1,15 s., ci-..,,.,..,.. 18 15 Tabac en feu'illgs, en boucauts, quelle que soit leur origine, importés par |es bureaux de Lille, Valeneiennes et Strasbourg, le cent pesant payera 25 livres,
ci..'..............................................25 »
Tableaux sans bordure ............... néant.
Tableaux à cadres ou bordures, sur l'estimation des cadres ou bordures seulement, payeront à raison de 15 0/0 de la valeur.
Talc................................. néant.
Talc de Moscovie, ou mica ............. néant.
Tamarin, le cent pesant payera 50 sous,
ci................................... 2 10
Tan............................... néant.
Tannezi ou herbe aux vers, le cent pesant payera, 5 livres, ci........., v, 5 »>
Tapisseries, excepté celles ci-après, le cent pesant payera 120 livres, ci .... 120 »
Tapisseries d Anvers et de Bruxelles, le cent pesant payera 40 livres, ci ...... 40 »
Tapisseries avec or et argent, te cent pesant payera 240 liyres, ci.... ,.,..,., 240 »
Tapisseriés peintes, le cent pesant payera 45 livres, Ci..................... .... 45 >)
Tapis de toutes sortes,
Savoir 4.
Tapis de laine, le cent pesant payera
72 livres, ci........................ 72 »
Tapis de fil et laine , le cent pesant
payera 50 livres, ci................. 50 »
Tapis de soie, ou mêlés de soie, le cent
pesant payera 150 livres, ci.......... 150 »
Tartre, le cent pesant payera 15 sous, ci » 15 Terra mérita ou curcuma, le cent pesant payera5 sous, ci................... .» 5
Terre d'ombre....................
Terre de Leranos..................
Terre rouge,.ou rouge d'Inde.......
Terre rubrique à faire crayons néant.
Terre de moulard....................
Terre à pipe....................
Terre sigillée...................— »,
Terre verte, le cent pesant payera 20 sous',
ci...................... .......... 1 »
Tapsic noir et blanc, le cent pesant payera
20 sous, ci. —.................... 1 »
Thé, le cent pesant payera 75 livres, ci 75 » Thérébentine commune, le cent pesant
payera 35 sous, ci-------------------- 1 15
Thérébentine de Venise, le cent pesant
payera 7 1.10 s,, ci.................... 7 10
Thimelée ou garou (racine de)......... néant.
Thon mariné, le cent pesant payera
45 livres, ci........................ 45 »
Tiges de bottes (cuir), le cent pesant
payera 180 livres, ci................ 180 »
Toile de chanvre ou de lin, écrue, importée par les bureaux de Lille, Va-
61 ô liv. s.
lenciennes, Givet, La Chapelle et Saint-Louis, le cent pesant payera 36 livres,
ci................................. 36 »
Toile de chanvre ou lin, blanchie, importée par les mêmes bureaux, iecent pesant payera 45 livres, ci..,,.;,»..»er"> 45 » Toile de chanvre ou de lin, blanche ou écrue, importée par tout autre bureau ou par mer, le cent pesant payera.
70 livres, ci........................ 70 »
Toiles à voile, grosses, le cent pesant payera 10 livres, ci,.. ,".'«»'......... 10 »
Toiles à voile, dont l'aune ne pèsera pas une livre, le cent pesant payera 75 livres, ci............................ 25 »
Toiles blanches de coton, ou de fil et coton, le cent pesant [payera 52 livres,
ci................................. 75 »
Toiles teintes et peintes, excepté celles ci-après, le cent pesant payera 135 livres, ci. ........... 135 »
Toiles à carreaux pour metelas, le cent pesant payera 40 liyres, ci.......... 40 » -
Toiles cirées de toutes sorte, le cent
pesant payera 20 livres, ci-....______ 20 »
Toiles gommées, treillis, bougrans, et autres toiles à chapeaux, noires ou autres couleurs, le cent pesant payera
15 livres, ci........................ 15 »
Toiles de Nanckin, la pièce de cinq aunes
payera 15 sous, ci.......,,,,....... » 15
Tombac, similor ou métal de prince et de Manheim, non ouvré, le cent pesant
payera 71. 10 s., ci................ 710
Tombac ouvragé en feuilles, en calottes de boutons, gratté ou non, le cent pesant payera 18 livres, ci............. 18 r
îormantille, le cent pesant payera 20 sous
ci................................. 1
Tourbe.............................. néant
Tournesol ou maurelle en drapeaux, en
pain ou en pierre................... néant
Toutenague ou zinc................... néant
Truffes fraîches, le çent pesant payera
18 livres, ci......................... 18
Truffes sèches, le . cent pesant payera
10livres, ci......................... 10
Turbit, le cent pesant payera 5 livres,
ci....................."....... N____ 5
Tussilage ou pas^d'âne, le cent pesant
payera 20 sous, ci................... 1
Tutie, le cent pesant payera 20 sous, ci. 1
Uspée, le cent pesant payera 20 sous, ci................. —.......1
Vanille ou badille, la livre payera 6 livres, ci............................ 6
Vélin, le cent pesant payera 6 livres,
ci..... —........................ 6
Vert-de-gris sec et en poudre, le çent
pesant payera 7 liv. 10 s., ci....,.... 7 Ver-de-gris cristallisé, le cent pesant
payera 10 livres, ci................. 10
Vert-de-gris humide, le cent pesant
payera 3 livres, ci.......................3
Vert de Vessie, le cent pesant payera
liv. s.
10 livres, ci...................... 10 »
Vert de montagne, le cent pesant payera
7 1. 10 s., ci........................ 710
Vert d'antimoine, le cent pesant payera
4 livres, ci.......................... 4 »
Vert de Moscovie..................... néant.
Verjus, le muid payera 6 livres, ci...... 6 »
Vermeil, le cent pesant payera 10 livres,
ci................................. 10 »
Vermillon, le cent pesant payera 10 livres, ci............................ 10 »
Vernis de toutes sortes, le cent pesant
payera 20 livres, ci.....,........... 20 »
Vases de verre, servant à la chimie, payeront à raison de 5 0/0 de la valeur.
Vez-cabouli, le cent pesant payera 3 livres, ci............................ 3 »
Vif-argent, le cent pesant payera 3 livres
ci................................. 3 »
Vinaigre, le muid payera 3 livres, ci... 3 » Vins en futailles, le muid payera 25 livres, ci............................ 25 »
Vins en bouteilles, le muid payera 60 livres, ci..-------.................... 60 »
Viorme ou hardeau (feuilles et baies de)
lecent pesant payera, 20 sous, ci.... 1 » Vipères vivantes et sèches, le cent en
nombre payera 5 livres, ci........... 5 »
Vitriol blanc, le cent pesant payera
5 I. 10 s., ci..............................7 10
Vitriol de Chypre, le cent pesant payera
3 1. 15 s. ci......................... 3 15
Voitures vieilles ou neuves, excepté celles servant aux voyageurs, payeront à raison de 12 0/0 de la valeur.
Volailles............................. néant.
Vulnéraires (herbes), le cent pesant payera 40 sous, ci.................. 2 »
Y
Yvoire, le cent pesant payera 5 livres, ci.......................................5 »
Z
Zédoaire ou citouard, le cent pesant payera 9 livres, ci.................. 9 »
Marques d'or et d'argent.
Indépendamment des droits d'entrée, fixés par le présent tarif, les bijouteries, les montres et les autres ouvrages d'or et d'argent acquitteront le droit particulier de marque, tel qu'il est ou sera réglé par l'Assemblée nationale.
Tarif du droit additionnel de la marque des fers, qui sera perçu en sus du droit d'entrée sur les objets dénommés ci~après;
Savoir :
Mines de fer, fer en gueuse et ferraille, néant.
Fer en barres et en verges, fer feuil-lard, rondins, carrillons, fer-blanc, fer noir, fer en tôle, fil de fer et fer en fonte, comme plaques de chemi-
liv. s.
nées, etc. le cent pesant payera 20 sous,
ci................................. 1 »
Ancres de fer pour la marine, armes blanches, armes à feu, canons de fonte et de fer, bombes, boulets, grenades et mortiers, cardes à carder, clous, fer-blanc ou noir ouvré, faux, limes, scies, et toutes espèce de mercerie, de taillanderie et de quincaillerie en fer,
le cent pesant payera 27 sous, ci----- 1 7
Acier brut et fondu, le cent pesant
payera 30 sous, ci..........-......... 1 10
Quincaillerie ou mercerie, composée en tout ou partie d'acier, le cent pesant payera 30 sous, ci.................. 1 10
Tarif des droits sur les marchandises provenant du commerce français au de là du cap de Bo nne-Espérance.
Art. 1er.
MATIÈRES PREMIÈRES.
Cotons en laine et en graine, bourre de soie, noix de galle, bois de teinture et de marqueterie, étain de Malack, toute nague, canris, perles fines, rotins, dents d'éléphants, écaille, nacre brut,
ou coquille de nacre................ néant.
Soie écrue de Nankin, de sole du Bengale, la livre payera 5 sous, ci...... « 5
Soie à coudre, crue, la livre payera
10 sous, ci......................... « 10
Soie teinte, la livre payera 30 sous,
ci................................. I 10
Coton filé, la livre payera 12 sous, ci... « 12
Salpêtre, ne sera admis qu'à la charge d'être vendu à la régie des poudres, ou du renvoi à l'étranger. Dans ces deux cas il sera exempt de droits.
Art. 3.
Drogueries.
Aloès, ambre gris, anis étoilé, assa-fœtida, benjoin, borax, cachou, camphre, encens, esquine, galbanum, gomme arabique, gomme ammoniaque, gomme copale, gomme-gutte, gomme laque, noix vomique, rhubarbe, roses de Provins, sagou et tamarin, payeront la moitié des' droits d'entrée du tarif général.
Art. 5. Epiceries.
Poivre, le cent pesant payera 5 livres,
ci................................. 5 »
Thé, le cent pesant payera 5 livres, ci.. 5 » Canelle de Chine, le cent pesaut payera
9 livres, ci......................... 9 »
Girofle et muscade, payeront le tiers
des droits du tarif général, Café moka,lecentpesantpayera20 liyres,
ci................................. 20 »
Sucre candi, le cent pavera 20 livres,
ci...................".............. 20 »
Cassia-lignea, le cent pesant payera 6 livres, Cl.-;.......................... 6 »
Art. 4 Marchandises diverses.
Joncs ou cannes non montés, bamboucs, filières de nacre, encre de Chine, écrans, cabarets, plateaux, éventails, et autres ouvrages vernis, le cent pesant payera
20 livres, ci........................ 20 »
Porcelaine dorée ou d'autre couleur que celle ci-après, le cent pesant payera
25 livres, ci................................25 »
Porcelaine bleue ou blanche, le cent pesant payera 9 livres, ci........... 9 »
Art. 5 Marchandises blanches.
Toiles de coton unies, le cent pesant
payera 37 I. 10 s. ci................ 37
Basins, linge de table et de lit, le cent
.pesant payera 50 livres, ci.......... 50
Mouchoirs de coton, rayés ou à carreaux, et mouchoirs blancs à bordure de couleur, le cent pesant payera 200 livres,
ci................................. 200
Toiles peintes, le cent pesant payera
135 livres, ci.......................................135
Toiles de Nankin, la pièce de 4 à 5 aunes
payera 10 sous, ci.................. 10
Celles d'un aunage supérieur, comme toiles de coton unies, le cent pesant Mousseline unie, rayée ou cadrillée, le cent pesant payera cent 50 livres, ci.. 150
payera 37 livres, 10 sous, ci......... 37
Mousseline brodée, le cent pesant payera
200 livres, ci....................... 200
Etoffes de pure soie, ou dans lesquelles il entre de la soie, ou étoffes d'écorces d'arbres, prohibées, même à l'importation.
Toiles rayées et à carreaux, et guinées bleues, le cent pesant payera 75 livres, ci............. —................. 75
Art. 6.
Denrées des Iles de France et de Bourbon, accompagnées de certificats d'origine donnés par les adinistrateurs desdites colonies.
Le sucre brut payera comme le surce de Cayenne.
Le café, comme le café de la Martinique.
Indigo, cannelle, girolle et muscade, comme ceux des colonies françaises.
Art. 7
Marchandises non dénommées dans le présent tarif général.
liv. s.
Art. 8.
Marchandises réexportées.
Colons en laine et en graine acquitteront les droits de sortie du tarif général.
Toiles de coton, mousselines» mouchoirs, toiles rayées et à carreaux, et ruinées bleues, jouiront de l'entrepôt à Lorient et à Toulon, et à la réexportation, par mer seulement, de la restitution de la moitié des droits qu'ils auront acquittés lors de la vente.
Art. 9.
Marchandises déclarées pour le commerce d, Afrique.
Toiles rayées et à carreaux, et guinées bleues, exemptes de droits.
Toiles de coton unies, destinées à l'impression, pour être employées au même commerce, jouiront de la restitution du droit de 37 1.10 s. après qu'il aura été justifié qu'elles auront été imprimées en France, réintégrées en entrepôt, et embarquées pour la côte d'Afrique.
TARIF DES DROITS D'ENTRÉE.
Amurca ou marc d'olive, le cent pesant
payera 10 sous, ci..................10
Anes et ânesses, la pièce payera 5 sous, ci.................................5
Bestiaux de toutes sortes, Savoir :
Agneaux, la pièce payera 3 sous,ci.. » 3
Beliers, la pièce payera 10 sous, ci... » 10
Bœufs, la pièce payera 20 sous, ci... 1 »
Boucs, la pièce payera 8 sous, ci.... » 8
Brebis, la pièce payera 5 sous, ci— » 5
Cabrils et chevreaux, la pièce payera
3 sous, ci......................... » 3
Chèvres, la pièce payera8 sous, ci... » 8 Cochons, grands et petits, la pièce
payera 10 sous, ci.................. » 10
Génisses, la piè-e payera 10 sous, ci. er">> 10 Moutons la pièce payera 5 sous, ci... » 5 Taureaux, la pièce payera 20 sous, ci.. 1 » Vaches, la pièce payera 15 sous, ci... 15
Veaux, la pièce payera 6 sous, ci____ » 6
Bois de marqueterie et de tableterie, le
cent pesant payera 40 sous, ci....... 2 »
Bois de buis, le cent pesaut payera
40 sousj ci.'....................— 2 »
Bois d'éctisse pour tamis, seaux, cribles, etc., payera à raison de 40/0 de la valeur.
liv. s.
Bois feuillard pour cercles ou lattes, le
cent pesant payera 30 sous, ci...... 1 10
Bourre ou ploc de toutes sortes, le cent
pesant payera 40 sous, ci................2 »
Bourre rouge et autres à faire lit, le cent
pesant payera trois livres, ci........ 3 »
Bourre nolisse ou nalisse, le cent pesant
payera trois livres, ci..............» 3 »
Bourre tontisse, le cent pesant payera
4 livres, ci........................ 4 »
Bourre de chèvre, le cent pesant payera
6 livres, ci.......»................ 6 »
Brou ou écorce de noix, le cent pesant payera 30 sôus, ci.................. 1 10
Chardons à drapiers et bonnetiers, le
cent pesant payera 3 livres, ci....... 3 »
Chevaux (valeur de 300 livres et au-
dessous) la pièce payera 6 livres, ci.. 6 » Chevaux (au-dessus de '300 livres), la
pièce payera 30 livres, ci............ 30 »
Cire jaune ouvrée, le cent pesant payera
5 livres,ci...............,...... 5 »
Cornes, de bœufs, vaches, de cerfs, de
snak, de moutons, beliers, et- autres cornes communes, le cent pesant payera
10 sous, ci,........................ » 10
Cotons en laine et en graine, le cent pesant payera 12 livres, ci............ 12 »
Derle ou terre de porcelaine, le cent pesant payera 10 sous, ci............. » 10
Ecaille d'ablette, le cent pesant payera
40 sous, ci......................... 2 »
Ecorce de tilleul pour cordages, le cent pesant payera 4 livres, ci........... 4 »
Feuilles de myrthe, et autres propres à la teinture et aux tanneries, le cent
pesant payera 10 livres, ci........... 10 »
Fil de lin et de chanvre simple, le cent
pesant payera 10 livres, Ci........... 10 »
Fil de mulquinerie et fi 1 de linon, la livre payera 120 livres, ci............ 120 »
F us tel (en feuilles ou branches), le cent pesant payera ?0 sous, ci........... 1 »
Graines d'Avignon, ou grainette, et graine jaune, d'usage en teinture, le centpesant payera 5 livres, ci...... 5 »
Graine jaune, le cent pesant payera 5 livres, ci..........:................. 5 »
Graisses de toutes sortes, le cent pesant payera 3 livres, ci............. 3 »
Gravelle ou tartre de vin, le cent pesant
payera 3 1. 10 s. ci............... 3 10
Grenadier (écorce de), le cent pesant payera "25 sous, ci.................. 1 5
liv. s.
Herbes propres à là teinture, non dénommées, le cent pesant payera 5 livres, ci............................ 5 »
Herbes de maroquin, le cent pesant
payera 30 sous, ci.................. 1 10
Houblon, le cent pesant payera 50 sous,
ci................................. 2 10
Huîtres fraîches, le millier en nombre payera 10 sous, ci.................. » 10
Laines non filées, le cent pesant payera 'à 371. 10 s. ci....................... 37 10
Laines filées, lè cent pesant payera 9 vres, ci.......^...9 »
Lie-de-vin, le cent pesant payera 20 sous, ci____________________________________ 1 »
Malherbe (herbe pour la teinture), le cent
pesant payera20 sous, ci........— 1 »
Métiers à faire bas et autres ouvrages,
le cent pesant payera 30 livres, ci... 30 » Mules et mulets, la pièce payera 3 livres, ci................................. 3 »
Nerfs de bœufs et autres animaux, le centpesant payera41. 10s. ci....... 4 10
Os de bœufs, de vaches et autres animaux, le cent pesant payera 10 sous, ci................................. » 10
Pain de navette, lin et colza, le cent
pesant payera 10 sous, ci........... 10 »
Parchemin neuf et brut, le cent pesant
payera 6 livres, ci.................. 6 »
Peaux de bœufs et vaches, salées et en vert, le cent pesant payera 6 livres,
ci................................. 6 »
Peaux dé cheval et d'âne, en vert, le
cent pesant payera 5 livres, ci....... 5 »
Peaux de moutons, brebis et agneaux, en vert, lé cent pesant payera 15 livres, ci............................. 15 »
Peaux de veaux, salées et en vert, le
cent pesant payera 15 livres, ci..... 15 »
Peaux non dénommées, salées et en vert, le cent pesant payera 6 livres, ci.... 6 »
Redoul ou rodoul (feuilles de), le cent pesant payera 15 sous, ci........... 15 »
Suifs non ouvrés, le centpesant payera 30 sous, ci........................ 1 10
liv» s.
Tournesol ou maurelle eu drapeaux, le cent pesant payera 25 sous, ci...... 1
Vinaigre, payera par muid comme le vin, d'après les distinctions admises pour les ports et bureaux de l'exportation .............................
Vins rouges exportés par les rivières de Garonne et Dordogne, autres que ceux ci-après, le muid payera 7 livres, ci. 7 » Vins blancs exportés par les même rivières,- également à l'exception de ceux ci-après, le muid payera 4 livres, ci.....—..............-..... 4 »
Vins rouges et blancs, qui seront chargés de bord à bord, au port de Li-bourne, et seront accompagnés d'un acquit-à-caution du bureau de Gastil-
lon, le muid payera 50 sous, ci...... 2 10
Vins exportés par Bayonne et Saint-Jean-
de-Luz, le muid payera20 sous, ci.. 1 » Vins exportés par le département de l'Ariège et les frontières d'Espagne, le
muid payera 30 sous, ci............. 1 10
Vins muscat exportés par les mêmes départements, et vins de liqueurs de toutes sortes, le muid payera 6 livres,
ci................................. 6 »
Vins exportés par les départements des Pyrénées-Oriéntales et de l'Hérault, le
muid payera 40 sous, ci............. 2 »
Par les départements des Bouches-du-Rhône et du Var, le muid payera
30 sous, ci. .................... 1 10
Par les départements des Hautes et Basses-Alpes, de l'Isère et de l'Ain,le
muid payera 20 sous, ci........ 1 »
Vins exportés par les départements du Mont-Jura, au Doubs et de la Haute-Saône, le muid payera Î0;sous, ci... » 10 Par les départements du Haut et du Bas-Rhin, de la Meuse et delà Moselle, le muid payera 25 sous, ci. 1 5 Vins exportés par terre ou par mer, depuis le département des Ardennes, inclusivement, jusqu'à la rivière de Vilaine, aussi inclusivement, le muid
payera 7 livres, ci.................. 7 »
Vins rouges ou blancs exportés par le département de la Loire-inférieure, à l'exception de celui ci-après, le
muid payera 40 sous, ci..... «....... 2 »
Vins blancs du département de la Loire-inférieure, exportés par le même département, le muid payera 10 sous,
ci.................................. » 10
Vins blancs exportés par les départements de la Vendée et de la Charente-Inférieure, le muid payera 10 sous, ci.. * » 10 Vins rouges exportés par les mêmes départements, le muid payera 20 sous, ci................................, 1 »
Vins en bouteilles et en doubles futailles, le muid payera 7 livres, ci...... 7 »
état des marchandises prohibées à Ventrée du royaume y
Savoir
Argent faux, filé sur soiev
Bateaux, barques, canots et autres bâtiments de mer, vieux ou neufs.
Cartes à jouer. Confections de toutes sortes. Corail en poudre.
Eau-de-vie autre que de vin. Etoffes, avec or et argent faux.
Fil de lin et de chanvre, retors, écru, bis et blanc, autre que celui de Harlem.
Huile de baleine et autres poissons, excepté dans les cas énoncés au tarif.
Médicaments composés.
Nitre, espèce de sel.
Or faux, filé sur soie.
Poudre à tirer.
Rapontic ou fausse rhubarbe.
Salpêtre.
Sel marin et sel de salines. Sel de quinquina et de rhubarbe.
Tabac en feuilleB autrement qu'en boucauts, et toute espèce de tabac fabriqué.
Tabac en feuilles, même en boucauts, provenant d'ailleurs que des Etats-Unis d'Amérique, des colonies espagnoles, de l'Ukraine et du Levant, ou importé par des bâtiments étrangers à ces possessions, ou par les ports non désignés par la loi.
Tabac en feuilles, même en boucauts, importe par terre, par d'autres bureaux que ceux de Lille, Valenciennes et Strasbourg.
Verrerie (ouvrages de), à l'exception des vases de verre servant à la chimie, et des bouteilles.
ÉTAT des marchandises prohibées à la sortie du royaume,
Savoir :
Bois de construction navale et civile, et tous autres, excepté ceux de buis, de marqueterie et tableterie. Bois merrain. Bois à tan. Bourdaine.
Cartons gris ou pâtes de papiers. Cendres d'orfèvres. Charbon de bois et de chenevotte. Cordages U6és.
Écorces de chêne et autres à faire tan. Etoffes avec or et argent faux.
Ferraille et vieux fer. Feuilles de houx. Futailles vides ou en bottes.
Groisil ou verre cassé.
Lins crus, tayés ou apprêtés. Linge vieux ou drille.
Mine de fer brute et lavée.
Or faux, filé sur soie. Oreillons ou orillons.
Peaux de lièvres, de lapins blancs, roux de toutes espèces et couleurs, crus.
Pennes ou paines de laine, de fil et corons. Poil en masse ou non filé, de lapin, lièvre, cas
tor, chameau, bouc, chèvre et chevreau. Potasse.
Redon ou rodon.
Rogues, coques, raves ou résure de morue.
Soies grèzes de toutes sortes.
Soies ouvrées en trame, poil et organsin.
Soies à coudre, crues.
Fleuret ou Moselle crue. Fleuret teint. Soie (bourre de) de toutes sortes. Idem, cardées. Cocons.
Tan.
au nom du comité d'agriculture et de commerce, fait sentir la nécessité d'éteindre tous les procès de l'ancienne régie des traites et de prévenir ceux qui pourraient naître; il propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ayant ouï le rapport de son comité d'agriculture et de commerce, sur la suite à donner aux affaires de l'ancienne régie des traites, décrète ce qui suit :
« Art. 1er. Les procès commencés à raison de fraude ou contravention relatives aux droits intérieurs de traite, sont annulés sans frais; sont également annulés, aussi sans frais, les soumissions fournies dans les bureaux pour assurer les transports de marchandises en exemption des droits de circulation et pour lesquelles on n'aura pas rapporté les acquits-à-caution déchargés, ou passeports en forme.
« Art. 2. Les -instances suivies à la requête des anciens fermiers ou régisseurs des droits de traite, ou contre ladite régie pour tout autre objet que pour fraude ou contravention relatives aux droits de circulation, seront mises en état d'être jugées d'ici au 1er juillet de la présente année, à peine de forclusion ; et les juges seront tenus de procéder au jugement desdites instances dans les deux mois suivants. »
Je demande que l'Assemblée veuille bien renvoyer la rédaction du décret qui est proposé au comité de l'imposition qui a déjà un projet de décret sur cette matière, et qu'il présentera au moment où les nouvelles lois recevront leur exécution.
(L'Assemblée décrète le renvoi du projet de décret au comité d'imposition.)
Messieurs, l'Assemblée a chargé ,son comité de lui présenter aujourd'hui le projet d'une haute cour nationale provisoire. Je demande la permission de lui faire remarquer qu'il est indispensable d'organiser promptement ce tribunal; les affaires. languissent ; les prisonniers sont détenus depuis longtemps!
Je demande que le comité veuille bien presser-son rapport.
au nom du comité de Cons-
titution. Le comité s'est occupé de l'ordre que lui a donné l'Assemblée. Il vous observe qu'il est impossible de charger les juges du département de Paris de cette commission, ils sont absorbés de procédures. Afin de conserver l'application de vos principes, le comité a pensé que l'on pouvait ordonner aux trente districts les plus voisins de la capitale d'envoyer un de leurs juges dans-un lieu désigné et de les revêtir du pouvoir nécessaire.
Je me contente de présenter cette idée à l'Assemblée pour lui montrer que le comité a obéi à son ordre, et je lui observe que son travail sera prêt samedi prochain.
au nom du comité de Vimposition, donne lecture des articles additionnels du décret des patentes.
(de Saint-Jean-d1Angèly). Je vous prie,* Messieurs, de me permettre une seule observation relativement aux arts que l'on appelle, d'après l'ancienne liberté, des arts libéraux. Il est des hommes qui exercent réellement ces professions, par exemple, la médecine, pour soulager l'humanité. Il est aussi des défenseurs officieux qui, après avoir vieilli dans le travail, se contentent de rendre des services aux pauvres, de concilier les affaires, et n'en retirent aucun bénéfice. Ces individus-là, qui ne retirent aucun avantage de leur profession, les confondrez-vous avec ceux qui en retirent un bénéfice ?
rapporteur. D'abord, pour pouvoir faire droit sur l'amendement de M. Regnaud, il faudrait établir dans l'article une distinction que nous n'avons pas cru devoir y mettre : nous ne voulons pas séparer des arts libéraux ce ix qui ne le sont pas. Ceux qui exercent la médecine gratuite, ceux qui se constituent gratuite-. ment défenseurs des pauvres et des opprimés, ceux-là n'exercent pas un métier, dans ce sens qu'ils n'en retirent pas de profit ; ils exercent une grande vertu publique; et le droit de patentes n'est point appliqué aux vertus.
(de Saint-Jean-d\Angély). Je prie l'Assemblée d'ordonner qu'il sera lait mention dans le procès-verbal de l'explication que vient de donner M. le rappoiteur, qu'un homme qui exerce son art gratuitement exerce une grande ve;tu publique, et je retire mon amendement.
(L'Assemblée décrète qu'il sera fait mention dans le procès-verbal de la déclaration de M. Rœ-derer.)
Un membre représente que l'on ne doit pas en-
?;ager les particuliers à poursuivre ceux qui se ivreraient à quelque commerce sans avoir des patentes, par l'appât immoral des amendes et des confiscations. .
rapporteur. Ces poursuites ne pourront être exercées que par les particuliers pourvus eux-mêmes de patentes. (Assentiment.)
Je demanderai à M. le rapporteur si les patentes sont sujettes ou non à l'enregistrement.
rapporteur. "Voici, Messieurs, à cet égard, l'opinion du comité. La patente ne doit pas être soumise à l'enregistrement, car on ne doit pas mettre impôt ^ur impôt; mais, comme
on peut avoir une action à intenter pour raison de sa profession dans divers lieux à la fois, alors il faut plusieurs expéditions de la même patente. Or, je vois que ces expé ditions sont dans le cas de toutes les expéditions notariées et qu'elles doivent être soumises à l'enregistrement.
(L'Assemblée renvoie l'examen de cette ques-tiou à son comité d'imposition.)
Les différents articles proposés sont décrétés et le décret général sur les patentes est adopté dans les termes suivants :
DECRET SUR LES PATENTES.
L'Assemblée nationale décrète ce qui suit : Art. 1er.
A compter du 1er avril prochain, les droits connus sous le nom de droits d'aides, perçus par inventaire ou à l'enlèvement, vente ou revente en gros, à la circulation et à la vente en détail sur les boissons ; ceux connus sous le nom d'impôt et billots, et devoirs de Bretagne, d'équivalent du Languedoc, de masphaneng en Alsace, le privilège de la vente exclusive des boissons dans les lieux qui y étaient sujets; le droit des quatre membres et autres de u ême nature, perçus dans les ci-devant provinces de Flandre, Hainault, Artois, Lorraine et Trois-Evêchés, le droit d'inspecteur aux boucheries, et tous autres droits d'aides ou réunis aux aides, et perçus à l'exercice dans toute l'étendue du royaume; les droits sur les papiers et cartons; le droit maintenant perçu sur les cartes à jouer, et autres dépendant de la régie générale, même les droits perçus pour les marques et plombs que les manufacturiers et fabricants étaient tenus de faire apposer aux étoffes et au ires objets provenant de leurs fabriques et manufactures, sont abolis.
Art. 2.
A compter de la même époque, les offices de perruquiers, barbiers, baigneurs-étuvistes, ceux des agents de change et tous auties oftices pour l'inspection et les travaux des arts et du commerce, les brevets et les lettres de maîtiise, les droits perçus pour la réception des maîtrises et jurandes, ceux du collège de pharmacie et tous privilèges de profession, sous quelque dénomination que ce soit, sont également supprimés.
Le comité de judicature proposera incessamment un projet de décret sur le mode et le taux des remboursements des offices mentionnés au présent article.
Art. 3.
Les particuliers qui ont obtenu des maîtrises et jurandes, ceux qui exercent des professions en vertu de privilèges ou brevets, remettront au commissaire chargé de la liquidation de la dette publique, leurs titres, brevets et quittances de finance, pour être procédé à la liquidation des indemnités qui leur sont dues, lesquelles indemnités seront réglées sur le pied des fixations de l'édit du mois d'août 1776, et autres subséquents, et à raison seulement des sommes versées au Trésor public, de la manière ci-après déterminée.
Art. 4.
Les particuliers reçus dans les maîtrises et ju-
randes, depuis le 4 août 1789, seront rembour*-sés de la totalité des sornmeB versées au Trésor public.
A l'égard de ceux dont la réception est ànté^-rieuré à l'époque du 4 août 1789, il leur sera fait une déduction d'un trentième par année de jouissance ; cette déduction néanmoins ne pourra s'étendre au delà des deux tiers du prix total; et ceux qui jouissent depuis 20 ans et plus recevront lè tiers des sommes fixées par l'édit d'août 1776 et autres subséquents.
Les remboursements ci-dessus énoncés seront faits par la caisse de l'extraordinaire ; mais ils n'auront point lieu pour les particuliers qui auraient renoncé à leur commerce depuis plus de deux ans.
Quant aux particuliers aspirants à la maîtrise, qui justifieront avoir payé des sommes à compte sur le prix de la maîtrise qu'ils voulaient obtenir, et qui, à la faveur de ôes payements, ont joui de la faculté d'exercer leur profession, ils seront remboursés de ces avances dans les pro" portions ci-dessus fixées pour les maîtres qui ont payé eh entier le prix de la maîtrise.
Art. 5.
Les syndics des corps et communautés d'arti-* Sans et marchands seront tenus dé représenter ou de rendre leurs comptes de gestion aux municipalités, lesquelles les Vérifieront et formeront l'état général des dettes actives et passives, et biens de chaque communauté; ledit état sera envoyé aux directoires de district ét de département, qui, après vérification, le feront passer au commissaire du roi, chargé de là liquidation de la dette publique, lequel en rendra compte au comité des finances, pour en être par lui fait rapport à l'Assemblée nationale.
Le commissaire du roi ne pourra néanmoins surseoir à la liquidation des retnbourseméhts et offices de chaque individu ; il se fera remettre les états, titres, pièces et renseignements nécessaires pour constater l'état actuel, et achever, s'il y a lieu, la liquidation des dettes contractées antérieurement au mois de février 1776, par les corps et communautés.
Art. 6.
Les fonds existants dans les caisses des différentes corporations, après l'apurement des comptes qui seront rendus au plus tard dans le délai de six mois, à compter de la promulgation du présent décret, seront versés -dans la caisse du district, qui en tiendra compte à celle de l'extraordinaire ; les propriétés, soit mobilières, soit immobilières desdités communautés Seront vendues dans la forme prescrite pour l'aliénation des biens nationaux, et le produit desdites ventes sera pareillement versé dans la caisse de l'extraordinaire.
Art. 7.
A compter du 1er avril prochain, il sera libre à toute personne de faire tel négoce, ou d'exercer têtle profession, art oh métier qu'elle trouvera bon; mais elle sera teriue de se pourvoir auparavant d'une patente, d'en acquitter ie prix suivant les taux ci-après déterminés, et de se conformer aux règlements de police qui sont ou pourront être faits.
Sont exceptés de l'obligation de se pourvoir degpatentes :
1° Les fonctionnaires publics exerçant des fonctions gratuites ou salariés par le Trésor pu-
blifc, iHmrvd néanmoins qu'ils, n'exercent point d'autres professions étrangères à leurs fonctions}
2° Les cultivateurs oècupés aux exploitations rurales;
3d Les personnes qui né sbht pas ôbmprises au rôle de la Contribution mobilière poUr la taxé de trois journées de travail ;
4° Les apprentis, compagnons et ouvriers à gage, travaillant dahs les ateliers dé fabricants pourvus de patentes ;
5° Lés propriétaires et les cultivateurs, pour la vente dé leurs bestiaux, denrées et productions, excepté le cas où Us vendraient les boiâsotis dè leur crû à pinte et à pot.
Arts 8.
Lés vendeurs et vendeuses de fleurs, fruits, légumes, poisson, beurre et oôufâ, Vêbdâht dans les rues, halles et marchés publics, ne seront point tenus de se pourvoir de patentes-, pourvu qu'ils n'aient ni boutiques, ni ècnoppeé, et qu'ils ne fassent auCUh autre négoce, à là charge ftour eux de sê conformer aux règlements de policé.
Art. 9.
Tout particulier qui voudra se pourvoir d'une patente, eh ffera, dans le mois de décembre de chaque année, à la municipalité du ressort de son domicile, sa déclaration, laquelle sera inscrite sur un registre à Souche ; il lui en seradé-livré un certificat, coupé dans la feuille de sa déclaration. Gti certificat contiendra Son nom et la valeur locative de st s habitations, boutiques, magasins et ateliers. Il se présentera ensuite chez le receveur de la contribution mobilière, auquêl il payera cofhptaht le quart du prix de la patenté, suivant les taux ci-aprèâ fixés, et fera sa soumission de payer le surplus, par parties égales, dans les mois de mars, juin et septembre. Ce receveur lui délivrera quittance dé l'acompte, et récépissé de là soumission au dos du certificat; et sur la représentation de ces certificats, quittance et récépissé, qui seront déposés et enregistrés aux archives du district, la patente lui sera délivrée au secrètetriât du directoire pour l'année suivante.
Ceux qui auront, payé le quart du prix de leurs patentes et qui négligeront d'acquitter les autres quartiers aux termes fixés, y seront contraints cbmme pour le payement de la contribution mobilière.
Les déclarations, certificats, quittances, soumissions et patentes seront sur papier timbré et conformes aux modèles annexés âu présent décret.
Art. 10.
Ceux qui voudront faire le négoce, ou exercer une profession, art et métier quelconque pendant la présente année, seront tenus de se présenter à leurs municipalités avant le 1er avril prochain* et de remplir, avant la fin du même mois, les formalités prescrites par les articles précédents; ils acquitteront comptant un tiers du droit, et fourniront leur soumission de payer un second tiers dans le courant de juillet prochain, et !e surplus dans le courant d'octobre suivant*
La jouissance des patentes qui leur seront délivrées commencera au 1er avril prochain, et les. prix en seront fixés aux trois quarts des patentes qui, dans la suite, seront accordées pour une auaée.
Art. 11.
Les particuliers qui, dans le courant d'une an»
née, voudront se pourvoir de patentes, en auront la faculté eû remplissant les formalités prescrites, et le droit sera compté pour le restant de l'année, à dater du premier jour du quartier dans lequel ils auront demandé des patentes.
Art. 12.
Le pfix des patentes annuelles pour les négoces, arts, métiers et professions autres que ceux qui seront ci-après exceptés, seraréglé à raison du prli du loyer ou de la valeur locatiVe de i'fia-b tation, dos bou tiques, magasins ou ateliers occupés par ceux qui ies demanderont* et dans les proportions suivantes :
2 sous pour livre du prix du loyer jusqu'à 400 listes ; 2 s. 6 d. pour livre depuis 400 livres jusqu'à 800 livras, çt 3 sous pour livre au-dessus dé 800 livres.
Art. 13.
Les boulangers qui n'adrOnt pas d'autre commerce ou profession ne payeront que la moitié du prijt deë patentes, réglé par l'article pré>-cédent.
Art. 14.
Les particuliers qui voudront réunir à leâi! négoce, métier ou profession, lès professions de marchands de yin, brasseurs, limonadiers, distillateurs, vinaigriers, marchands dé bière ét de cidre, àubergistes, hôteliers donnant à boire et à manger, traiteurs, restaurateurs, les fabricants et débitants de cartes à jouer, les fabricants et débitants de tabac, ceux même qui n'exerceraient que les professions ci-dessus dé-» nommées, payeront leurs patentes dans les proportions suivantes, sâvoir \ 30 livres quand le loyer tol&l dé léur habitation et dépendances sera de 200 livres et au-dessus | 3 s. 6 d. pour livre du pîii de ce loyer, quand il Sera de 200 livres jusques et compris 400 iivïest 4 sous pouf livre un prix de Ce loyer, quand il surpassera 400 livras jusques et compris 600 livres; 4 s. 6. d. quand il sera de 6 à 800 livres ; et, entin, 5 soUs pour livre pour les loyers au*dessus de 800 livres.
Art. 15.
k II sera délivré des patentes pour un ou plusieurs mois aux propriétaires et cultivateurs qui voudront vendre en détail des boissons de leurs crûs; le prix desdites patentes sera de 3 livres par mois : elles ne seront délivrées qu'après î'accomplissément des formalités prescrites, et que le prix en aura été acquitté entre les mains du préposé au recouvrement tfb la contribution mobilière. Mais ces patentes ne pourront être accordées pour plus dê 6 mois dans lé cours de l'aûnée; au delà dé Ce terme, elles seront répu»-tées patentes annuelles, et seront payées comme telles»
Art. 16.
Les colporteurs exerçant le négoce dâns lôs villes, campagnes, fbirés et marchés» les forains exerçant le négoce ou leur profession hors de leur domicile et hors les temps dé foire âetont tenus de se pourvoir de patentes particulières et spéciales, conformément aux modèles annexés au présent décret, et après avoir rempli les formalités prescrites'. Le prix entier dès patentes des colporteurs et forâinë sera payé comptant et fixé suivant les proportions de l'article 12, mais ne pourra être aU*dessous de 10 livres pour
les marchands portant là balle* de 50 livrés pour ceux qui emploieraient à leur commerce un cheval ou autre bête de somme, et 80 livres pour ceux qui se serviront d'une voiture, quand même le prix du loyer de leur domicile établirait une proportion inférieurei hesdits colpo«> teurs et marchands forains seront tenus, lors» qu'ils en seront requis, de justifier de leur domicile et de leur contribution mobilière, même de représenter leurs patentes de colporteurs ou forains, aux officiers municipaux des lieux où ils exerceront leur commerce.
Àrt. 17.
Il. sera versé 2 sous pour livre du prix de chaque patente dans la caisse de la commune* pour servir à ses dépenses particulières.
Les officiers municipaux tiendront la main à ce qu'aucun particulier ne s'immisce dans l'exercice des professions assujetties à des patentes par le présent décret* sans avoir rempli les formalités ci-devant prescrites, et sans avoir acquitté le droit.
Art. 18.
Tout particulier qui aura obtenu une patente sera obligé, avant d'en faire usage, de la rap« porter à sa municipalité, où il sera apposé un visa au bas de la déclaration prescrite par l'dr-ticle 9. Tout colporteur et forain sera déplus obligé de faire viser sa patente dans toutes les municipalités autres que celle de son domicile i est excepté de cette règle* le forain en teitips de foire seulement.
Il sera dressé* dans chaque municipalité, une liste ou un registre alphabétique des noms des personnes qui auront obtenu une patente, ainsi que de ceux des forains ou colporteurs qui auront fait viser les leurs ; cette liste sera déposée au secrétariat de la municipalité*, et 11 sera libre à toutes personnes de la voir*
Art. 19»
Tout particulier qui fera le négoce, exercera une profession, art ou métier quelconque, sans avoir rempli les formalités prescrites par les articles précédents* et s'être pourvu d'Une patente, sera condàmnë t?n Une amende du quadruple du prix fiké pour la patente dont il aurait dû se pourvoir.
Àrt. 20.
Les marchandises qui Seront fabriquées ou mises en Vente par des personnes non pourvues de patentes seront confisquées.
Àrt* 21.
Toute personne non inscrite sur le registre des pourvus de patentés pourra être appelé au tribunal de district, à la réquisition du procureur syndic du département, de celui du district, ou du procureur de la Cbttlthuhe, pour déclarer, audience tenante, Si elle exerce OU non Une profession sujette à la patente; et^en cas d'aveu, être condamnée aux peines prescrites par le présent décret.
Àrt. 22.
Aucun partiôUlief assujetti à prendre une pa* tente ne pourra former de demande en justice pour raison de son négoce-, profession, art ou métier, ni l'aire valoir atifcuti acte qui s'y rap* porte, par forme ou moyeh d'exception et dé* fense ; ou, enfin, passer aUcUn acte, traité ou
transaction en forme authentique qui y soit relative, s'il ne produit sa patente en original ou en expédition ; et il en sera fait mention en tête de l'acte ou exploit.
Tout huissier et notaire, qui contreviendra à cette disposition, sera condamné à 50 livres d'amende pour chaque contravention ; et en cas de récidive à 500 livres.
Aucun acte civil ou judiciaire, aucun exploit fait en contravention au présent article, non plus qu'aucun acte sous seing privé, relatif à l'exercice d'une profession soumise à la patente, ne pourront être admis à l'enregistrement, si la patente en original ou eU expédition, prescrite pour l'exercice de la profession à laquelle se rapportent lesdits actes ou exploits, n'est représentée au receveur, qui en fera mention, à peine de 50 livres d'amende pour chaque contravention, et de 500 livres en cas de récidive.
Nul ne pourra pareillement présenter ses registres au juge, pour recevoir la cote et le paraphe, dans les cas où ces formalités sont prescrites par les lois, pour [l'exercice de professions assujetties à la patente, s'il ne produit en même temps la patente prescrite en original ou en expédition ; et le juge ne pourra en ce tas apposer sa cote et son paraphe, à peine de 50 livres d'amende pour chaque contravention.
Nul ne pourra être inscrit sur la liste des personnes éligibles aux tribunaux de commerce, ou sur celles des officiers servant près des tribunaux, ou assermentés et sujets à la patente, s'il n'a produit sa patente en original ou en expédition.
Les commissaires du roi, près des tribunaux, veilleront à l'exécution du présent décret.
Art. 23.
Moyennant le payement d'un triple droit, il sera délivré des patentes de supplément à ceux tjui, ayant des actions à exercer, ou des défenses à proposer pour raison d'une profession soumise a la patente, auraient négligé de s'en pourvoir.
Art. 24.
Nul ne sera admis à faire déduire de ,'sa contribution mobilière la taxe proportionnelle à la valeur locative de ses ateliers, chantiers, boutiques et magasins, qu'il n'ait produit sa patente en original ou en expédition.
Art. 25.
Toute personne pourvue d'une patente pourra, en donnant bonne et suffisante caution, requérir la saisie des marchandises fabriquées ou vendues par des fabricants ouvriers ou marchands, dont les noms ne seraient pas inscrits dans la liste ou registre qui sera tenu au secrétariat des municipalités, eu vertu de l'article 18, et en poursuivre la confiscation.
Le procureur de la commune sera obligé de faire ces réquisitions et poursuites quand il y aura lieu.
Art. 26.
Tout procureur de commune, qui aura connaissance d'une profession, fabrication ou négoce exercés sans patente, et sans être poursuivis dans détendue d'une autre municipalité du même district, requerra la saisie, et poursuivra la confiscation des marchandises ainsi fabriquées ou vendues en contravention.
Les procureurs syndics de district feront dans
les mêmes cas les mêmes poursuites et réquisitions dans toute l'étendue de leur district, et les procureurs syndics de "département dans toute l'étendue de leur département.
Art. 27.
En cas de poursuite exercée par des particuliers pourvus de patente, le produit des amendes et confiscations sera partagé par moitié entre le Trésor public êt eux.
En cas de poursuite de la part d'un procureur de commune, le produit sera partagé entre la caisse municipale et le Trésor public.
En cas de poursuite de la part d'un procureur syndic de district ou de département, le produit appartiendra entièreme nt au Trésor public, et sera dans le premier cas appliqué aux besoins particuliers du district ; dans le second, à ceux du département.
Art. 28.
Les contraventions seront constatées et poursuivies dans les formes prescrites pour les procédures civiles, et devant les tribunaux de district.
Le présent décret sera porté, sans délai, à l'acceptation du roi.
Modèle de la déclaration à faire au greffe de la municipalité par tout particulier qui voudra obtenir une patente.
Je soussigné, habitant domicilié de
la municipalité de y demeurant
rue paroisse de déclare
vouloir y faire le négoce et y exercer la profession de pendant le cours de l'année
je certifie qne le prix du loyer ou la valeur lu-cative de mon habitation, de l'atelier, boutique et magasin que j'occupe est de
pourquoi je requiers qu'il me soit délivré certificat de ma déclaration pour acquitter le droit de patente auquel je suis tenu,, suivant l'article du décret du 2 mars 1791, accepté par ie roi.
Fait à ce
Modèle du certificat à délivrer par la municipa-lité pour l'acquit du droit de patente sur la déclaration ci-dessus.
Patente. Année...
Ce jourd'hui à habitant de la municipalité de y demeurant, s'est présenté au greffe de notre municipalité, et a déclaré vouloir y faire le négoce et y exercer la profession d pendant le cours de l'année de , en se conformant aux règlements de police et autres sur le fait de ladite profession, et en acquittant le droit de patente auquel .il est assujetti par l'article , dp décret du 2 mars 1791, accepté par le roi. Nous certifions que la valeur locative de l'habitation, des magasins, ateliers et boutique dudit sieur a été par lui déclarée de la valeur de en conséquence
nous autorisons B , receveur de la
contribution mobilière de cette municipalité, à lui délivrer la quittance du droit de patente pour l'année à raison de conformé-
ment au taux fixé par l'article dudit décret,
en payant par lui un quart comptant, et trois quarts dans sa soumission payable dansle courant des mois de . En foi de quoi
nous avons délivré le présent certificat.^ Fait au greffe de notre municipalité, ce
Modèle de la quittance du droit de patente à délivrer par le receveur de la contribution mobilière, au dos du cetificat de la municipalité.
Je soussigné receveur de la contribution mobilière de la municipalité de district de reconnais avoirreçu de M. habitant domiciliéde ladite municipalité, la somme de pourlé quart de son droit de patente de l'année suivant la fixation contenue dans le certificat de l'autre part, laquelle est conforme aux dispositions de l'article du décret du 2 mars 1791, déclarant que ledit sieur a fait sa soumission entre mes mains, pour le payement des trois autres quarts dudit droit dans le courant du mois de aux termes de l'article dudit décret ci-dessus cité; dont quittance, A ce
Modèle de registre de recette et de soumission pour Vacquittement du droit de patente.
Enregistrement du quart du droit de patente.
Du 1791Reçu de M. habitant domicilié de la paroisse de district de la somme de à laquelle monte le quart de son droit de patente, pour la faculté du négoce et d'exercer la profession de pendant le cours de l'année conformément au taux fixé par l'article du décret du 2 mars 1791. La valeur locative de son habitation étant de quant aux trois quarts restants mondit sieur l'a payée dans sa soumission ci-dessus ; ci
Soumission pour les derniers trois quarts du droit.
Je soussigné habitant domi- cilié de la municipalité de m'engage à payer en trois termes égaux dans le cours des mois de entre les mains de receveur de la contribution mo- bilière, la somme de pour les trois quarts de mon droit de patente, pour l'exercice de l'année prochaine, me soumettant aux règles prescrites pour le recouvrement de la contribution mobilière, en cas d'inexécution de ma part auxdits payements, dans les délais ci-dessus prescrits, fait à le
Signé,
Quittance de payements et décharge de soumission.
Je soussigné receveur du droit de patente, reconnais avoir reçu de M. la somme de pour le second terme de son droit de patente suivant la soumission ci-dessus, le reçu pour le troi- sième terme, suivant la soumission ci-dessus, le reçu pour le quatrième et dernier terme, suivant la soumission ci-dessus, laquelle au moyen du présent payement est et demeure annulée, ce
Patente orainaire.
Année
Ce jourd'hui s'est présenté devant nous administrateurs du directoire du district de habitant domicilié de la municipalité de y demeurant, paroisse de ayant un loyer de la valeur de lequel après nous avoir justifié de la déclaration par lui faite au greffe de ladite municipalité, suivant le certificat sous le n° par lui déposé au secrétariat de notre directoire, conformément à l'article du décret du 2 mars dernier, au dos duquel est la quittance du receveur de ladite municipalité, de la somme de payée, un quart comptant, et trois quarts dans une soumission payable en trois termes égaux de trois mois en trois mois, pour son droit de patente de ladite profession de pour l'année nous a requis de lui délivrer une patente pour avoir droit de faire le négoce et d'exercer ladite profession de pendant le cours ae l'année en vertu desquels certificats et quittance, nous lui avons délivré la présente, au moyen de laquelle il est loisible audit sieur de faire le négoce, et d'exercer la profession de dans le ressort de la munici- palité de pendant le cours ae l'année sans trouble dans son commerce et sa profession. Délivré par nous administrateurs du directoire du district de fait à ce
Modèle de la déclaration à faire au greffe de la municipalité, par tout particulier qui voudra obtenir une paente de colporteur ou marchand forain.
Je soussigné habitant domi- >cilié de la municipalité de y demeurant, déclare vouloir exercer pendant le cours de l'année la profession de col- porteur, ou marchand forain, et vouloir employer au transport de mes marchandises pourquoi je requiers qu'il me soit délivré certificat de ma déclaration, pour acquitter, comptant, le droit de patente auquel je suis tenu, suivant l'article du décret du 2 mars 1791, accepté par le roi. Fait à ce
Modèle de certificat à délivrer par la municipalité pour l'acquit du droit de patente sur la déclaration cidessus.
Patente de colporteur ou marchand forain
Ce jourd'hui A habitant de la muni-cipalité de y demeurant, s'est présenté au greffe de notre municipalité et a déclaré vouloir exercer la profession de colporteur ou marchand forain, avec pendant le cours de l'année
en se conformant aux règlements prescrits pour l'exercice de ladite profession par l'article du décret du 2 mars 1791, accepté par le roi; en conséquence, nous autorisons rece-
veur de la contribution mobilière de cette municipalité à lui délivrer la quittance du droit de patente pour Tannée en payant comptant entre ses mains, la somme de à laquelle
est taxée ladite profession, par l'article du décret susénoncé.
En foi de quoi nous avons délivré le présent certificat, Fait au greffe de notre municipalité, ee r
Modèle de la quittance du droit fie patente CQlpQvteur ou marchand forftinA
Je soussigné receveur de la contri- bution mobilière de la municipalité de district de reconnais avoir reçu de N habitant de ladite municipalité, la somme de pour le prix de son droit de patente de colporteur ou marchand forain, aveo (cheval ou voiture), pendant le cours de l'année conformément aux dispositions de l'article du déopet du 2 mars 1791, accepté par le roi. Dont quittance à ce
Modèle du registre de recette pour C acquittement du droit ae patente de çolporteur ou marchand forain,
Du 179 reçu de N habitant de cette paroisse, la somme de pour le prix de son droit de patente de colporteur ou , marchand torain, avec pour le coups de l'année en exécution de l'article du déeret du 2 mars 1791, accepté par le roi, ci
Patente de colporteur ou marchand forain.
Année.
Ce jourd'hui s'est présenté devant nous, administrateurs du directoire du district de N habitant de la municipalité de lequel,
après nous avoir justifié de la déclaration par lui faite au greffe ue ladite municipalité, suivant le certificat sous le n« par lui déposé au secrétariat de notre directoire, au dos duquel est la quittance du receveur de ladite municipalité, de la somme de que ledit sieur a payée comptant, pour l'exercice de la profession de çolporteur, ou marchand forain, pendant le cours de l'année , nous a requis de lui délivrer une patente de eolporteur ou marchand forain, pour avoir droit d'exereer ladite profession dans tQU'e l'étendue du royaume pendant ladite année en vertu desquels certificat et quittance, nous }pi avons délivré la présente, au moyen de laquelle il est loisible audit sieur d'exercer, pendant le cours de l'année , ladite profession de colporteur ou marchand forain, en se conformant aux règlements dé police et en faisant viser sa patente par les offleitrs municipaux dos lieux où il exercera ladite profession, conformément aux dispositions de l'article du décret du 2 mars 1791, accepté par le roi.
Délivré par nous, administrateurs du directoire du district de Fait à ce
L'ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur les dispositions qui doivent compléter l'organisation des corps administratifs.
M. Démennter, rapporteur. Messieurs, le décret du 22 décembre 1789 et les dispositions particulières que vous avez eu occasion d'y ajouter ne contienpeqt pas, à beaucoup près, toute l'organisation des corps administratifs. Dans un ordre de ehoses si nouveau, d'une part, il fallait attendre les lumières de l'expérience, et de l'autre, laisser mûrir l'opinion publique. Sur ces entrefaites, les circonstances ont donné lieu à des écarts; des prétentions se sont élevées; au défaut de la loi qui n'avait pas encore parlé, pq a méconnu les principes.Il s'agit donc de dissiper le* erreurs, de réparer les fautes, et, en achevant un ouvrage incomplet, de remettre toutes les choses à leur vraie place.
Qe travail est d'amant plus instant "que, lors de la grande opération de la division du royaume) les districts se sont trop multipliés, au moins pour l'avenir, Vous avez déjà pris, Messieurs, le véritable moyen d'en diminuer le nombre. Les frais d'administration et de justice fe trouvant à la charge de chacun d'eux, l'intérêt ramènera à la juste mesure du besoin et la réduction s'opérera sans convulsion et même sans murmures. ieuf multiplicité offre des avantages momentanés, qui paraîtront bien sensibles, si l'on considère ce que les administrations inférieures pnt à faire, touchant l'aliénation des domaines nationaux et la contribution patriotique, le rachat des droits féodaux et des dîmes inféodées, la suppression des chapitres et des couvents, la circonscription des paroisses,- l'établissement de la constitution civile du clergé et d'un nouveau mode de contributions publiques, la direction enfin de t&nt d'autres objets qui ne les occuperont pas habituellement. Mais il y a du danger à laisser plus longtemps indécise l'autorité qui réprimera leurs écarts. Cette mesure n'est pas seulement recommandée par les Intérêts du Trésor public; elle l'est aussi par les intérêts de l'ordre général, sans lequel la liberté s'évanouirait. Après avoir déterminé, avec précision, les rapports des administrations inférieures à l'égard des administrations supérieures, il faut déterminer les rapports d > celles-ci, à l'égard du chef suprême de l'administration générale. Il faut tracer le cercle de l'action des départements et du pouvoir exécutif, et dire comment on parviendra à les y retenir. Il est temps de régler en détail le mouvement de chacune des parties de l'administration et d'établir le régulateur qqi doit le maintenir.
Les articles qui suivent ce rapport ne pourront être classés qu'à la fin de vos travaux, lorsqu'on recueillera Vos décrets sur l'organisation des çorps administratifs. Toutefois, ils se trouvent rangés dans l'ordre qu'indiquait la liaison des idées. Nous présentons d'abord les dispositions communes aux administrations de district et de département, ensuite les dispositions qui regardent les administrations de district; celles qui sont particulières aux administrations de département viennent après, et. nous finissons par indiquer les moyens de contenir les corps administratifs dans les bornes de leurs pouvoirs.
Parmi ces dispositions, il en est de secondaires sur lesquelles on tombera aisément d'accord; il en est de plus importantes dont je développerai les motifs. On peut réduire celles-ci à trois points principaux : 1° La manière
de juger les contestations, tant sur la forme et la régularité des assemblées et des élections que sur lès conditions d'éligibilité;. 2° la détermination d®s pouvoirs qui contiendront tes mua^cipar lités et les administrations 4e district ; 3° la dé? termination des pouvoirs qui doivent contenir lès administrations de département.
De quelle manière doit-on faire juser les contestations relatives aux élections? Des décrets particuliers et l'instruction du mois d'août 1790 les ont renvoyées aux administrations: de département; mais, parmi ces dispositions,, les unes sont provisoires et les autres incomplètes, et nous avons besoin d'une règle définitive, qui embrasse tons les objets et tous les cas. Le jugement des contestations relatives aux assemblées et aux élections ne peut jamais appartenir aux tribunaux, car- on les ferait sortir de la ligne judiciaire. Il ne peut appartenir non, plus, au pouvoir exécutif, car la. liberté publique serait en danger. Il reste donc 4 examiner s'il convient de ^attribuer au Corps législatif, si on pourrait former une espèce de cour parties iière, ou si enfin les administrations de départe? ment n'offrent pas le çneilleur moyen d'assurer ce Service. Il est clair que toutes ces discussions absorberaient le temps de la. législature. Le comité, ayant eu de nombreuses occasions de voir comment les parties intéressées parviennent à embrouiller des questions dent la solution est aisée dans les lieux où la contestation a pris naissance, avec quelle adresse on cherche à éluder la loi, en taisant des faits décisifs, ne craint pas d'assurer qu'on tromperait le Corps législatif et qu'il prononcerait fort mal sur ces sortes d'affaires. Une cour particulière aurait les mêmes inconvénients; elle en aurait d'autres, encore., et il y a lieu de penser que ee dernier système rencontrera peu de partisans.
De pareilles contestations ne pouvant être bien jugées que sur les lieux, ce pouvoir doit être dér légué aux administrations du département. Vous leur avez attribué provisoipement la connaissance des contestations relatives à la forme des élections et aux conditions d'éligibilité des juges de paix et de leurs, assesseurs; des juges de district et de commerce, et de leurs suppléants, et nous proposons de rendre cette disposition définitive. Noua sommes ici parfaitement d'accord avec les principes; car, jusqu'à, l'époque où l'élefc tion des juges est déclarée valable, il ne s'agit que de l'exécution d'une loi, relative aux assemblées primaires, aux assemblées électorales, ou à des conditions d'éligibilité, qui ne se trouvent ni dans l'ordre judiciaire, ni dans l'ordre législatif. Quant aux contestations relatives au procureur-général syndic, et aux membres d'une ad*? ministration de département; elles ne peuvent être jugées par le|corp.s qu'elles intéressent, et nous les renvoyons au directoire de département, dont le chef-lieu sera le plus voisin.
Ces détails doivent suffire et je passe à la détermination des pouvoirs* nécessaires pour contenir dans tes bornes de la loi, les municipalités et Vadministration du district.
Le principe du mode qu'il faut employer se trouve dans le décret du 22 décembre 1789, dans des décrets particuliers et dans l'instruction du mois d'août 1790. Mais les observations que j'ai faites plus haut s'appliquent également içi : quelques-unes de ces dispositions sont provisoires, et, en les réunissant, on est loin d'avoir, pourvu $ tout. Plusieurs des municipalités et des adminis-
trations de district ont excédé les bornes de leurs pouvoirs. Quelquefois, sous de frivoles p^ét^ljès* elles ont opposé une résistance à Autorité supérieure bien connue. Vous, avez, Messieurs, rendu des décrets qui les ont averties et, d%ns le moment actuel, la subordination n'est troublée qu'en un petit nombre d,'endroits. Les erreurs passées sont excusables, parce que yous n'avez pas encore réglé les devoirs d'une manière pos$ve; les erreurs futures le seraient encore, n^algré le grand dommage qu elles causeraient à lâi ctoqsé publique, si la loi ne déterminait pas précision l'étendue du pouvoir que vous avez pl%çé au-dessus, des municipalités et des districts.
Mais, avant de régler l'action du p,ouvotr. supérieur, il faut établir quelques dispositions fonda.-Qi enta les. Il en est une surtout nécessaire à la Réforme d'un abus criant. On a vu q^fcifft-lités et des administrations de district adresser aux municipalités oii districts de leur département, et quelquefois aux municipalités et aux districts de tout le royaume, des délibérations ou des lettres manuscrites ou içpjimées flfti provoquaient ou fomentaient la résistance cfe? actes émanés des autorités su périeures. Qn les a voulu aussi publier et faire afficher dos cfélêr rations contraires à celles du département ou ïft respectueqses dans leur contenu. Dse telles infracr tions bouleverseraient les principes du gouverner ment représentatif que vous avez adoptés, et mèneraient directement à l'anarchie. La loi goft donc être formelle; elle doit avoir, one jqstg sure de sévérité, et nous vous proposons, Messieurs, de déclarer que tout corps administratif ou municipal, qui publiera ou fera parvenir à d'autres administrations ou municipalités, des délibérations ou lettres provoquant ou tant la résistance à l'exécution des actes éwàpés des autorités supérieures, sera suspendu et, en cas de réeidive, destitué dp ses fonctions; qu'aucun directoire ou conseil de district, ni aucune municipalité, ne pourront sous la même peine, publier, faire afficher, ou persister |t faire exér cuter une délihératidn contraire à celle du département eu du district, ou manquant au respect dû à l'administration supérieure.
Le décret du 22 décemhre 1789 l'a statué expressément, et de manière â ne lasser aucune équivoque. « Les conseils de district ne pourront « s'occupe? que de préparerles demandes â faire « et les matières à soumettre à l'administration « du département pour l'intérêt du district, de « disposer les moyens d'exécution et de repe^Qjr « les comptes de la gestion de leurs directoi-* res.
» Les directoires de district seront chargés de « l'exécution, dans le ressort de leur district, « sous la direction et l'autorité de l'adminUra-« tion du département et de son directoire, et « ils ne pourront faire exécuter aucun arrêté « du conseil de district, en matière d'-adwinisîra-« t|on générale, s'ils n'ont été approuvés par « l'administration du département, »,
Enfin, après avoir réduit à. des points généraux tous les détails de l'administration, l'article trois de la section troisième ajoute : i les admi-« nistrations de district ne participeront à toutes « ces fonctions dans le ressort de chaque district « que sous l'autorité interposée des administrer « tions de département. «
Toutefois, outre les ordres relatifs à l'exécution, assez souvent les directoires de district en ont donné d'autres sans aucune autorisation. Il faut arrêter cette invasion, laisser aux distincts
ce qu'ils feront bien, leur interdire par des dispositions absolues, et réprimer par des peines les actes irréguliers qui anéantiraient la hiérarchie des fonctionnaires publics. Des décrets particuliers leur ayant délégué des pouvoirs immédiats qui tiennent à l'aliénation des propriétés nationales et à d'autres objets passagers, dont j'ai parlé plus haut, il convient de maintenir provisoirement cet ordre de choses et de se ménager des avantages pareils pour quelques circonstances de l'avenir.
Les moyens de retenir ies municipalités et les administrations de district dans les bornes de leurs pouvoirs se réduisent à quatre. Envoyer des commissaires chargés soit de recueillir les informations nécessaires au département, soit de rétablir l'ordre à l'aide de la persuasion et de la loi; annuler sans éclat les actes irréguliers : si ces moyens ne sulfisent pas, appeler suit le procureur syndic, soit un ou plusieurs membres du directoire de district, et publier la défense de mettre à exécution les actes déclarés nuls. Enfin, dans les circonstances très graves où l'intérêt général demande une répression subite et absolue, suspendre ceux auxquels on ne pourrait, sans péril, laisser l'usage de leurs fonctions. Ces quatre moyens sont analogues à l'esprit et au caractère d'un peuple libre: nous les proposons, mais avec des ménagemeuts qui en assureront l'effet.
Le premier moyen n'exige pas de développement. Je me contenterai de dire que les directoires de département, ne pouvant obtenir les renseignements ou informations nécessaires à l'administration, ne seraient autorisés à envoyer des commissaires qu'après deux avertissements successifs.
Quant au second, qui se confond avec une partie du troisième, vous avez déjà délégué aux administrations de département le pouvoir d'annuler, en certaines occasions, les actes des municipalités qui seraient contraires aux lois ou compromettraient la sûreté et la tranquillité publiques. A l'égard des administrations de district qui se trouveraient dans le même cas, vous avez décrété le principe-, mais l'expérience prouve qu'il faut des dispositions plus détaillées, qu'il faut même, par une disposition nouvelle, renforcer l'autorité des départements sur les districts.
Pour les grandes nations, pour la France telle que vous l'avez constituée, il n'est qu'une bonne méthode de donner à l'administration l'activité qui lui est absolument nécessaire, c'est de placer, les uns au-dessus des autres, des pouvoirs qui contiennent tout ce qui est au-dessous d'eux dans la hiérarchie des fonctionnaires, en présentant toujours, pour dernier terme, le chef de l'administration générale, qui est le premier des fonctionnaires publics, et les représentants de la nation, surveillants suprêmes de l'exécution des lois et chargés de tout ce qui concerne leur interprétation; mais ce dernier terme est éloigné et, si les circonstances sont urgentes, le moindre délai est un péril.
Vous observerez, Messieurs, que, en autorisant formellement les directoires de département à déclarer nuls les aetes irréguliers des districts, d'abord sans éclat, et ensuite à faire puolier la déclaration de nullité et la défense de mettre ces actes à exécution, vous ne déléguerez pas un nouveau pouvoir et que, à proprement parler, il ne s'agit pas ici de cassation ou d'annulation; la loi du 22 décembre 1789 a elle-même anéauti tous ces actes, puisque, d'une part, les direc-
toires de district ne sont chargés que de l'exécution et, l'autre, qu'aucun arrêté d'un conseil de district ne peut être exécuté par eux, s'il n'a été approuvé par l'administration du département, et qu'enfin les fonctions des conseils de district se bornent à préparer les demandes à faire et les matières à soumettre à l'administration du département, pour l'intérêt du district, à disposer les moyens d'exécution et à recevoir les comptes de la gestion de leurs directoires. Il s'agit seulement de déclarer que le département n'a point autorisé tel acte, qu'ainsi il n'a aucun caractère. Sa nullité résulte de cette déclaration, qui ne peut être faite que par l'administration de département. Lorsqu'une défense publique de le mettre à exécution devient nécessaire, elle est de droit. Si le district a donné de la publicité à ses actes irréguliers; s'il en a réclamé l'exécution, il faut bien ies annuler en forme. Cette nécessité sera développée plus en détail par la suite; mais je dois ajouter jci que le conseil ou le directoire de département peuvent craindre de se compromettre, peuvent aimer le repos plus que leurs devoirs; que leur zèle peut se borner à instruire l'administration suprême; et que nous indiquons l'intervention qui aura lieu à leur défaut.
Dans le plan du comité, la déclaration de nullité se fera d'abord sans éclat; si la résistance continue, la loi doit ménager un moyen de plus, avant d'arriver aux remèdes extrêmes, c'est-à-dire à la suspension, à la dissolution du corps et au renvoi à la haute cour nationale ou au tribunal criminel.
Ce moyen paraît simple : c'est d'appeler ies réfractaires devant le directoire du département ; de leur remontrer que, en intervertissant l'ordre des pouvoirs constnutionels, ils mettent la chose publique en danger, et prononcer,par une délibération qui serait imprimée, la défense de mettre à exécution les actes déclarés nuls. Mais,comme on doit se défier des prétentions des fonctionnaires supérieurs et songer que l'amour-propre irrité des inférieurs les rendrait moins disposés à rentrer dans l'ordre, il convient de mettre deux conditions à cet appel : la première qu'il n'aura lieu qu'après avoir employé la voie de la persuasion ; la seconde, qu'on ne se servira point de l'expression de mander à la barre.
En supposant de la part d'un directoire de district, ou de quelques-uns de ses membres, une rébellion persévérante à la loi, après la déclaration de nullité, la défense imprimée de mettre à exécution, après l'appel, devant le directoire de département, en d'autres cas très graves qui compromettraient la puissance publique, et la tranquillité générale, la suspension est indispensable. Ici se présentent deux questions : la suspension enlraînera-t-elle toujours le renvoi à la haute cour nationale ou au tribunal criminel, et par qui sera-t-elle prononcée? La première, tenant à la nature des peines qu'on peut prononcer contre les fonctionnaires publics en corps ou les fonctionnaires publics individuels, sera résolue dans le Code pénal, et nous nous contenterons d'indiquer le principe : la seconde dépend du mode que vous adopterez pour contenir, dans les bornes de leurs pouvoirs, les administrations de département elles-mêmes, et c'est ce mode qui nous reste à examiner.
Le rapport surl'organisatiou du ministèrevous a déjà présenté, Messieurs, le tableau des écarts de quelques directoires de département et l'indispensable nécessité de prévenir ces abus ; le comité ade plusexposé en détail les raisons quipres-
crivent de rallier les diverses parties de l'administration à un seul point , de les mettresous le. joug d'une loi précise dans ses dispositions, et de les y retenir par l'action d'un moteur unique. Sans doute les instructions, les avertissements et les explications donnés par des ministres responsables, l'action paternelle d'un gouvernement libre réunie à l'action plus puissante encore de l'opinion et des lumières publiques suffiront presque toujours pour réprimer les écarts. Mais les législateurs doivent songer que toute espèce de pouvoir corrompt plus ou moins les hommes; et que le zèle même du bien entraîne souvent à des usurpations. Ils doivent songer encore aux moments de trouble ,àces époques où des fonctionnaires publics égarés ou séduits, ne veulent plus, dans l'accès des passions qui les agitent, écouler la voix de la raison. Alors l'autorité souveraine, environnée de toute la force publique, doit paraître. L'expérience vient à l'appui de la théorie, et c'est pour vous un avantage de votre longue carrière. Quelles que soient les mesures de répression que vous adopterez, vous avez à craindre que les dépositaires de ce pouvoir ne montrent, par intervalle, du relâchement et de la mollesse. C'est un motif de plus de renforcer la loi. Il est donc évident que vous devez placer dans l'organisation des corps administratifs un contrepoids assez fort pour les retenir. Il faut donc que les administrateurs sachent nettement en quelles occasions leurs actes délibérés sans pouvoirs seront annulés; dans quels cas ils seront suspendus de leurs fonctions ; à quelle période d'égarement leur corps sera dissous; et comment se fera, devant la haute cour nationale ou des tribunaux criminels, la poursuite des individus?
La quatrième question, étrangère à cette partie de travail, sera traitée ailleurs; nous dirons quelques mots sur la troisième qui semble y tenir d'assez près ; les deux premières ne peuvent en être séparées..Voyons donc par qui seront annulés les actes d'une administration de département contraires aux lois? Ët lorsque l'intérêt général demandera la suspension des administrateurs, par qui elle sera prononcée? Ces deux questions fondamentales unefoi3 résolues, on se réunira aisément au même avis.
La première se trouve décidée par vos précédents décrets. Celui du 22 décembre 1789 ne se contente pas de placer les départements sous l'autorité du roi, dans les détails de l'administration économique; l'article 5 de la section troisième est ainsi conçu :
« Les délibérations des assemblées administra-« tives du département, sur tous les objets qui « intéresseront le régime de l'administration « générale du royaume, ou sur des entreprises « nouvelles et des travaux extraordinaires, ne « pourront être exécutées qu'après avoir reçu « l'approbation du roi. »
Puisque les actes des administrations de département sur tous les objets qui intéressent le ré-: gime de l'administration générale du royaume n'ont aucun caractère légal s'ils ne sont revêtus de l'approbation du roi ; il ne s'agit pas précisément de les annuler, mais de déclarer que le roi ne les a pas approuvés. Or, lui seul peut faire cette déclaration, et il ne peut plus y avoir de doute.
Il n'y a donc une apparence de difficulté qu'à l'égard du directoire. Si un directoire met à exécution un arrêté qui n'est pas autorisé par le, roi ; s'il se permet des actes hors de ses pouvoirs, il
MENTAIRES. [1" mars 1191.1 633
est clair que c'est encore au roi à le réprimer : c'est la suite naturelle de vos décrets, et il ne s'agit que de le dire expressément. Cependant il faut annuler dans les formes ces actes irréguliers ; car, dans l'hypothèse que nous examinons, le corps administratif ayant promulgué et expédié sa prétendue délibération, quoique de nul effet en elle-même, la promulgation, l'envoi et l'ordre d'exécuter, tromperaient les inférieurs et les subordonnés s'ils n'étaient avertis par l'autorité supérieure.
Quand le décret du 22 décembre ne serait pas rendu, oh ne pourrait employer que ce moyen.
En effet, U n'y aurait que trois autres expédients : vous'serïez réduits à déléguer le pouvoir d'annuler, soit au tribunal de cassation, soit à unè espèce de cour formée de quelques-uns des membres envoyés par la moitié des départements, soit au Corps législatif. Le premier et le second systèmes confondraient lés pouvoirs; la. chose publique souffrirait de la lenteur des opérations, et vous renonceriez à la responsabilité. Le troisième dénaturerait le caractère du Corps législatif ; il faudrait que la législature fût toujours assemblée, et, au lieu de faire de bonnes lois, elle rendrait de mauvaises décisions.
Le système que vous avez adopté offre au contraire des avantages sans nombre. Si le roi approuve les délibérations d'un département con-trires aux lois, son ministre est responsable; si les corps administratifs se permettent des actes irréguliers sans l'aveu du chef suprême de l'administration, ces actes sont annulés par le roi et toujours sous la responsabilité du ministre. Ainsi, dans tous les cas, les droits du peuple sont en sûreté, et aucune combinaison n'est plus propre à maintenir la bonté du service et à donner à l'administration générale l'activité dont elle a besoin.
Nous voici arrivés au seul point qui ne soit pas encore résolu; je veux dire la suspension des corps administratifs.
Les membres des corps administratifs sont nommés par les départements et les districts pour servir à l'administration générale du royaume ; ils se trouvent réduits à la pure exécution des lois. Vous avez déjà pris diverses précautions pour qu'ils ne puissent sortir du cercle de leurs fonctions, et il est convenable d'en-ajouter de nouvelles. Une Constitution libre ne pouvait abandonner au pouvoir exécutif le choix de ces agents; il aurait eu des moyens de séduire et de corrompre, et l'ambition l'aurait entraîné lui-même au delà des bornes qui lui sont assignées. D'ailleurs, lorsque le peuple ne délègue pas au loin le pouvoir de conduire ses affaires immédiates, lorsqu'il le retient près de lui et sous ses yeux, l'administration inspire plus de confiance, le choix des administrateurs est meilleur. Ces magistratures populaires qu'on exerce un moment pour rentrer dans la classe des citoyens, auxquelles on peut arriver avec de la bonne conduite et de l'intelligence, répandent l'esprit public et produisent 1 inestimable avantagé d'éclairer tout le.monde. C'est enfin le meilleur moyen d'assurer l'intégrité des fonctionaires publics* Mais il est difficile de tenir toutes ces têtes sous le joug de la loi; il est difficile de faire marcher ensemble, sur tous les points du royaume, un si grand nombre d'administrateurs. C'estun laborieux travail, que celui de combiner le dernier terme de la délégation et de l'exercice des pouvoirs de l'administration générale, d'assurer l'action du pouvoir exécutif qui n'a que des
agents nommés par le peuple, et de maintenir sur les uns et les autres la puissance du Corps législatif et de la loi.
Les Constitutions représentatives dans un vaste pays sont voisines d'un écueil dangereux. Ceux qui les forment ne doivent jamais les perdre de vue. Elles teqdeqt à rompre l'unité nationale, et mille obstacles, renaissants tous les jours, combattent l'uniformité et la force de l'exécution des lois. La nécessité d'un moteur puissant qui arrête complètement les écarts est évident» Il serait monstrueux de voir 83 administrations de département et 547 administrations.de district, qui ne pourraient être ni arrêtées ni suspendues promptement lorsqu'elles persisteraient dans leur rebellion à la loi- La nécessité de lenr anéantissement, lorsque La gravité des résistances s'accroît, n'est pas moins évidente : la question se divisant ici, il convientd'au'ant plus d'examiner d'abord ce çiui regarde ia suspension d'un corps administratif que la dissolution tient à d'autres rapports, qu'on peut diviser ces pouvoirs, qu'il est bon en soi et conforme à tout ce que vous ave? fait de les séparer afin de le balancer et de les contenir réciproquement,
Je vais donc examiner séparément ce qui regarde la suspension d'un corps administratif et je parlerai ensuite de ce qui regarde la dissolution.
Pour arrêter d'une manière absolue des corps administratifs rebelles à la loi, vous n'avez à choir sir qu'entre deux expédients. Il faut placer ce moyen de répression dans le Corps législatif, ou, remettant la loi tout entière au pouvoir exécutif, l'armer avec les précautions convenables do la force nécessaire pour la maintenir t c'est là seulement que vous trouverez l'action imposante et rapide qui est indispensable.
Le droit d'anéantir l'effet des actes contraires aux lois que pourr^ientse permettre les corps administratifs appartient au roi. Nous l'avons prouvé par vos décrets, par les principes et par l'intérêt général.
La question se réduit donc à ce point ; si la déclaration de nullité d'un acte de 1 administration de département, si la défense publique de le mettre à exécution ne suffit pas, le roi, lorsque les circonstances seront urgentes, pourra4-il sus» pendre un corps administratif en état de rébellion persévérante à la loi ? Et quelles seront les bornes de ce pouvoir?
D'abord le droit de déclarer nulle, la défense de mettre à exécution les actes d'un eprps administratif, contraires à la loi, ne serait d'aucune utilité, serait même illusoire si le roi ne pouvait assurer l'effet de sa déclaration et de sa dé-fense. Ensuite, la correspondance habituelle, les avis, les instructions et les ordres de chaque jour, appartiennent incontestablement au pouvoir exécutif.
Le roi est chargé de l'exécution pleine et entière de la loi, ses ministres en répondent ; il faut donc qu'il puisse arrêter pour un moment des agents rebelles à cette exécution, Ce qui vient de se passer dans le département du Bas-Rhin lèvera tous les doutes. Supposons que les représentants de la nation n'aient pas été rassemblés, et que, dans un moment si dangereux, le ministre, sous les ordres du roi, n'ait pas eu lf droit de suspendre ces administrateurs? Imaginez,Messieurs,les malheurs que la France aurait à redouter! Sans doute, les mêmes circonstances ne reviendront pas : mais d'autres non moins inquiétantes peuvent ^voir lieu. Pour que la législature pût exercer
le droit de suspendre les corps administratifs, il faudrait qu'elle fût toujours assemblée. Dans ce système an dénaturerait les fonctions, on confondrait tous les pouvoirset,en recherchant un petit avantage, qu'on n'obtiendrait point, on perdrait des biens sans nombre. Enfin on mettrait le Corps législatif dans l'impuissance de remplir ses devoirs, et quels devoirs ! et avec quels soins nous devons ménager à nos successeurs le temps de les remplir! Même à l'époque où leCodecivil sera terminé, ils auront chaque année à examiner si la Constitution et la liberté publique n'ont point reçu d'atteintes de la part des ministres, des tribunaux, des administrations et des municipalités, à pourvoir aux dépenses publiques, à vérifier et arrêter les comptes, à faire les lois que demanderont les circonstances et la variation des choses humaines. Lorsqu'on réfléohit aux grands objets qui occuperont chaque législature, aux immenses occupations que vous lui avez réservées, à celles que la nature de la Constitution lui attribuera encore par la suite, ©n est fortement convaincu que ce serait un malheur de lui laisser un pouvoir dont l'exercice habituel repose sur des détails minutieux. De plus, le soin de décider si quelques fonctionnaires publics doivent être suspendus de leurs fonctions n'est pas digne d'elle. Elle s'en acquitterait très mal, ne pouvant bien examiner une affaire de détail, on la tromperait souvent et elle s'égarerait elle-même.
Mais si le Corps législatif, par sa composition, par le nqmhre de ses membres, par la nature de ses fonctions, ne peut ni suivre journellement la correspondance et les actes des corps administratifs, ni les dirigdT habituellement par des instructions, ni examiner toutes les infractions de détail, pour les déclarer nulles; si, ne devant pas toujours être assemblé, il se trouve dans l'impos-sibilité de suspendre les corps administratifs, lorsque la sûreté et la tranquillité publique ne permettent aucHn délai ; si durant sa session il ne peut, sans abandonner des devoirs plus importants, étudier et discuter à fond toutes les circonstances d'un délit d'administration, il est une haute fonction qu'il remplira bien ; c'est lorsque après la déclaration de nullité des aetes d'une administration de département ou de district, après une suspension, il s'agira de juger l'exer-ciee du pouvoir qui aura donné la déclaration ou prononcé la suspension,
Si le corps a violé toutes les règles, s'il persiste dans sa rébellion à la loi, il doit être puni gravement. Mais, Messieurs, on ne peut, contre les corps, prononcer d'autre peine que la dissolution. C'est à la législature que ce pouvoir doit appartenir : il ne peut même, d'après la séparation des pouvoirs que vous avez établie, convenir qu'à elle; car il n'est pas dans l'ordre judi* ciaire, et il serait dangereux de l'attribuer au pouvoir exécutif. La disso lu tion des corps administratifs aura alors le caractère imposant qu'elle doit avoir; la peine du corps réfractaire aura de plus toute la gravité dont elle est susceptible; car lorsqu'il sagit d'un corps on ne peut connaître les vrais coupables. Tout moyen pour s'en assurer est vicieux en lui-même, il blesse la li-» berté des suffrages, viole le respect dû à la liberté des opinions et demande des précautions qui présentent des inconvénients de toute espèce. Les individus seuls peuvent êlre renvoyés à la haute cour nationale ou aux tribunaux criminels de département.
Dans le projet de décret, le roi ayant arrêté les corps rebelles par sa déplaratiçm de nullité, par
sa suspension, en réfère au Corps législatif qui prononce non seulement sur les corps prévenus d'un délit, mais sur les agents du roi qui sont intervenus au nom de la loi.
Il nous st mble que ce système offre cette heureuse intervention de l'autorité royale et du Corps législatif, qui est la base de vos décrets les plue importante ; qu'il balance les autorités, qu'il assure les droits des citoyens et qu'aucune autre ne ferait plus favorable à la liberté. Après la déclaration de nullité des actes d'un départi -ment, contraires aux lois; après la défense de les mettre à exécution, après l'acte de suspension, finissent les pouvoirs du roi. L'autorité souveraine de ta nation parait alors dans toute son énergie; le peuple ne pouvant exercer cette autorité par lui-même, elle est exercée par ses représentants. La suspension ayant été justement prononcée," et la gravité du délit étant bien reconnue, ils foudçpient le corps en état de rébellion, et terminent ïe débat. Si la suspension est un attentat contre les lois, ils font poursuivre le ministre qui l'a provoqué ou exécuté.
Le comité exposera d'autres motifs encore de cette combinaison qui lui paraît juste; vos lumières pourront la modifier; mais il est difficile d'en imaginer uneau tre qui puisse subir l'épreuve de la discussion. En effet, maintenant que toutes nos institutions sont formées, qu'une seule et même loi constitutionnelle gouverne toutes les partiis-de l'empire, que oie l'émanation de l'autorité souveraine iln« reste que deux centres de pouvoir délégué, l'autorité royale, et l'Assemblée des représentants de la nation: o'est là qu'il faut placer y ne force proportionnée à l'action nécessaire à un grand royaume dont toutes les parties doivent avoir le même mouvement. C'est la clef de la voûte, sans laquelle, nous pouvons le dire nettement, l'édifice s'écroulerait.
Après le développement des principes et des basés du projet de décret, les détails ne demandent aucune explication. On y trouvera des précautions très multipliées, Nous avons pris les désordres à leur naissance, nous en avons suivi le cours jusqu'aux derniers excès. Les contrepoids se renforcent jusqu'à ce qu'enfin, leur action ne suffisant plus, l'anéantissement du corps est prononcé par les représemants de la nation qui renvoient à-la haute cour nationale ou aux tri-1 bunaux criminels de dépariement les individus dont les délits peuvent sé constater.
PROJET DE DÉCRET.
Art 1er. Les actes des directoires, ou
conseils de district ou de département, ne pourront être intitulés,
ni décrets, ni ordonnances, ni règlements, ni proclamations, Ils
porteront le nom de délibérations, lorsqu'ils statueront sur les
matières générales, et celui d'arrêtés, lorsqu'ils prononceront sur
des affaires particulières.
Art, 2. Chaque délibération ou arrêté sera signé par tous les membres présents, quelle que puisse avoir été leur opinion. L'expédition en sera faite sous la signature du président et du Secrétaire greffier.
AFt. 3. Les conseils de département ou de district, après avoir procédé à l'élection du directoire, nommeront les premiers quatre membres, les seconds deux membres du conseil, lesquels remplaceront au directoire, ceux dont les places deviendraient vacantes par mort, démission ou autrement.
Art. 4. - Les membres des conseils de district ou de département, dont les places deviendront vacantes par mort, démission ou autrement, ne seront remplacés qu'à l'époque des élections ordinaires.
Art. 5. Le président d'une administration de district ou de département, aura voix délibéra-tive au directoire ; il ne présidera point l'assemblée du conseil, lors de la reddition des comptes.
Art. 6. Les membres des administrations de département ou de district pourront être continués par une nouvelle élection : maist ensuite, ils ne pourront être réélus qu'après un intervalle de deux années.
Art. 7. Si la place de procureur général syndic, ou de procureur syndic devient vacante par mort ou démission, le directoire de département ou de district nommera dans son sein un commissaire qui fera les fonctions de procureur général syndic, ou de procureur syndic, jusqu'à l'époque du rassemblement des électeurs.
Art. 8. Tout corps administratif ou municipal, qui publiera ou fera parvenir à d'autres administrations ou municipalités, des délibérations ou lettres provoquant ou fomentant la résistance à l'exécution des délibérations, ou ordres émanés des autorités supérieures, sera suspendu, et, en cas de récidive, destitué de ses fonctions.
Art. 9. Aucun directoire du conseil dé district, ni aucune municipalité ne pourront, sous la même peine, publier, faire afficher, ou persister à faire exécuter une délibération contraire à celle du département ou du district, ou manquant au respect dû à l'administration supérieure.
Art. 10. Le mandement de faire exécuter, qui se trouve à la fin des lois, n'aura, à l'égard des municipalités et des corps administratifs, en ce qui concerne les objets relatifs à la guerre et à la marine, que l'effet d'assurer l'exécution de la loi, lorsqu'ils en seront requis, dans les formes prescrites par la Constitution ; et dans aucun cas, les corps administratifs et les municipalités ne pourront contrarier, suspendre, gêner ni s'immiscer en rien de ce qui regarde l'exécution des ordres donnés par le pouvoir exécuiif touchant l'administration, la discipline, la disposition et le mouvement de l'armée de terre* de l'armée navale et de toutes leurs dépendances.
Art. 11. Les conseils de district seront tenus d'adresser chaque année; au directoire de département, le procès-verbal de leur session, et ce, huit jours avant l'ouverture de la session au conseil de département.
Art. 12. Indépendamment de la correspondance habituelle avec les directoires de département, les directoires de district seront tenus d^envoyer tous les mois, au département, un tableau raisonné des progrès de l'exécution des diverses parties conhées à leurs soins.
Art. 13. Les actions relatives aux domaines nationaux ou propriétés publiques ne pourront être intentées ou soutenues, par un directoire de district, qu'avec l'autorisation du directoire de département.
Art. 14. Ces actions seront intentées ou soutenues au nom du procureur général syndic du département, et à la diligence du procureur syndic du district de la situation des biens.
Art. 15. L'action relative aux domaines natio-r naux, dont le roi a la jouissance, sera intentée ou soutenue paF l'intendant de la liste civile, ou
par celui que désignera le roi, mais à 1a charge de notifier l'action, tant au directoire de département qu'à cëlui dé district du lieu des domaines.
Art. 16. Les conseils de département ne pourront ni retarder, ni avancer l'époque de leur rassemblement, à moins que, d'après des circonstances impérieuses, les directoires n'en aient obtenu la permission du roi. Dans le cas où l'époque de leur rassemblement serait avancée, les directoires de département le notifieraient aux directoires de district, afin que l'intervalle prescrit entre la tenue des conseils de district et celle de département soit toujours observé.
Art. 17. Les conseils de département ne pourront ni discontinuer leurs séances, ni s'ajourner qu'aux époques fixées par la loi, à moicis que les circonstances n'aient déterminé le roi à autoriser cette discontinuation ou cet ajournement.
Art. 18. Les conseils de département seront tenus d'adresser, chaque ànnée, au roi, le procès-verbal de leur session, et ce dans la quinzaine après la clôture.
Art. 19. Le conseil ou le directoire du département proaoncera sur les contestations qui pourront s'élever à la suite, tant des assemblées des communes par communauté entière, ou par section, que des assemblées primaires en ce qui concerne :
1° La régularité de la convocation et formation de ces assemblées ;
2° L'exclusion qu'on aurait pu prononcer contre des citoyens actifs, ou l'admission qu'on aurait pu faire de citoyens non actifs ;
3° Le choix de sujets inéligibles;
4° La violation des lois relatives, soit à la tenue des assemblées, soit à la forme des élections. Pour l'exécution du présent article, les conseils et directoires de départements se conformeront aux principes posés dans l'instruction décrétée par l'Assemblée nationale le 12 août 1790, et sanctionnée par le roi le 20 du même mois.
Au surplus, les opérations d'aucune assemblée dûment convoquée pour une élection ne pourront être attaquées sous prétexte de l'absence d'un nombre quelconque de citoyens actifs; ou, s'il s'agit d'une assemblée primaire, sous le prétexte de l'absence de la totalité des citoyens d'une ou plusieurs communautés.
Art. 20. Dans le cas où des troubles survenus, soit dans les assemblées de communes par communautés entières ou par sections, soit dans les assemblées primaires, auraient empêché d'en terminer les opérations, ou donneraient lieu à en prononcer la nullité, le conseil ou le directoire du département pourra, sur l'avis du directoire de district, convoquer une nouvelle assemblée, y envoyer, au besoin, des commissaires pour maintenir l'ordre; et, à l'égard des assemblées primaires, déterminer le lieu où il paraîtra convenable de les convoquer, pourvu que ce soit dans le même canton.
Art. 21. Si dés troubles s'élevaient, soit dans les assemblées municipales, soit dans le conseil général d'une commune; le conseil ou le directoire du département, sur l'ayis du directoire de district, pourra pareillement nommer des commissaires chargés d'y rétablir l'ordre-
Art. 22. Les conseils ou directoires de département, après avoir pris l'avis des directoires de district, prononceront sur les contestations qui pourraient s'élever, tant sur la forme et la régularité des élections, que sur les conditions, d'éligibilité des officiers municipaux, notables et autres fonctionnaires attachés aux municipalités,
du procureur syndic, et des membres de l'administration dé district, des juges de paix et de leurs assesseurs, des juges des tribunaux de district, de ceux des tribunaux de commerce et de leurs suppléants.
Art. 23. Les contestations qui pourraient s'élever, tant sur la régularité de l'élection, que sur les conditions d'éligibilité d'un procureur général syndic, ou des membres de l'administration d'un département, seront jugées par le conseil, et, en son absence, par le directoire du département dont le chef-lieu sera le plus voisin. . Art. 24. Si les directoires de département ne peuvent, malgré deux avertissements successifs, obtenir des municipalités ou directoires de district les renseignements ou informations nécessaires à l'administration, ils sont autorisés à nommer deux commissaires, qui se transporteront, aux frais des officiers municipaux, ou des membres des directoires de district, pour recueillir ces renseignements ou informations.
Art. 25. Indépendamment delà correspondance habituelle que les directoires de département seront obligés d'entretenir avec le ministre de l'intérieur, ils lui . feront parvenir tous les mois un tableau raisonné des affaires du département, et des progrès de l'exécution des diverses parties confiées à leurs soins.
Art. 26. Les conseils ou directoires de département seront tenus d'exécuter et faire exécuter sans délai les ordres d'administration émanés du roi, en qualité de chef suprême de l'administration générale, et contresignés par le ministre de l'intérieur.
Art. 27. Si le procureur syndic requiert, ou si le directoire d'un district prend des délibérations contraires, soit aux lois, soit aux délibérations de l'administration du département, soit aux ordres qui leur auraient été donnés ou transmis par le directoire du département, celui-ci déclarera ces actes nuls, et en instruira le directoire dè district.
Art. 28. Si le directoire ou le procureur syndic d'un district mettaient à exécution une délibération du conseil général de district, sur laquelle le conseil général du département aurait notifié sa désapprobation, ou même refusé son approbation, comme aussi, dans tous les cas où ils se permettraient une résistance persévérante à l'exécution, soit des lois, soit des délibérations de l'administration du département, soit des ordres qui leur auraient été donnés ou transmis par le directoire du département; celui-ci pourrait, sans se servir de l'expression de mander à la barre, appeler devant lui le procureur syndic, même un ou plusieurs membres du directoire de district, leur, remontrer qu'en intervertissant l'ordre, des pouvoirs constitutionnels, ils mettent la chose publique en dànger, et prononcer par une délibération qui sera imprimée, la défense de mettre à exécution les actes déclarés nuls. -Art. 29. Si le directoire du département ' n'a pas annulé les actes mentionnés en l'article 27, le roi pourra les annuler par une proclamation, sous la responsabilité de son ministre.
Art. 30. Dans le cas où, soit après Ja déclaration de nullité prononcée par le roi, so.it après la défense de mettre à exécution prononcée par le département, ainsi qu'il est dit en l'article z8, le directoire, ou le procureur-syndicd'un district, persisterait dans son insubordination, le roi pourrait suspendre individuellement ou collectivement, comme il sera expliqué par la suite, les
membres du directoire, ainsi que le procureur syndic du district.
Àrt. 31. Toutefois, si les circonstances sont urgentes, le directoire, ou le conseil du département, pourra, sous sa responsabilité, suspendre de leurs fonctions le procureur syndic qui aurait requis, ou les administrateurs de "district qui auraient pris des délibérations capables de compromettre la sûreté ou la tranquillité publiques, mais à la charge d'en instruire aussitôt le pouvoir exécutif, lequel lèvera ou laissera subsister cette suspension.
Art. 32. Si la suspension n'a été prononcée que contre deux membres du directoire de district, ils seront remplacés par les deux suppléants. Si le nombre des membres suspendus excède celui de deux, le directoire de département nommera, parmi les membres du conseil de district, des commissaires, en nombre suffisant, pour compléter le directoire.
Art. 33. Pour remplacer ua procureur syndic suspendu de ses fonctions, le directoire du département nommera un commissaire pris parmi les membres de l'administration de district, o au besoin, parmi ceux du conseil de département.
Art. 34. Si un directoire de département met à exécution une délibération du conseil de département, auquel le roi aurait refusé son approbation, ou prend, de toute autre manière, des délibérations ou arrêtés contraires, soit aux règles établies pour la constitution des corps administratifs, soit aux ordres donnés par le roi, en matière d'administration, sous le contre-seing du ministre, qui en est responsable, le roi pourra, sous la responsabilité de son ministre, annuler ces actes par une proclamation, et défendre de les mettre à exécution.
Art. 35. Si une administration de département prenait, dans des circonstances urgentes, des délibérations ou arrêtés capables de compromettre la sûreté et la tranquillité publiques, comme aussi, dans le cas où, après une déclaration de nullité prononcée par le roi, et les ordres donnés par lui en matière d'administration, soit le conseil général, soit le directoire, soit le procureur général syndic, persisteraient dans leur insubordination,^ roi, sous la responsabilité de son ministre, pourrait suspendre les auteurs du délit individuellement ou collectivement, et les faire remplacer provisoirement par des commissaires, qu'il nommerait, sans préjudice du remplacement déterminé par l'article 3, lorsqu'il pourra avoir lieu.
Art. 36. La suspension mentionnée au précédent article, ainsi qu'en l'article 30, pourra être prononcée, soit contre le corps entier du conseil ou du directoire, à raison des délibérations ou arrêtés qu'il aura pris, quel que soit le nombre des membres qui auront concouru à les former, soit contre un ou plusieurs membres, pour les actes qui leur seront personnels, hors la délibération .
Art. 37. Dans tous les cas où une suspension sera prononcée, soit par le directoire de département, soit par le pouvoir exécutif, le roi en instruira sur-le-champ la législature, si elle est assemblée, et dès les premiers jours de sa sei-sion si elle est en vacances.
Art. 38. Sur cette notification, le Corps législatif pourra, ou lever la suspension, ou dissoudre le corps administratif, même statuer, à l'égard de quelques-uns de ses membres, qu'il y a lieu à accusation; et, dans ce dernier cas, les renvoyer
pour être jugés, soit à la haute cour nationale, soit aux tribunaux criminels de départèmeut.
(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport et du projet de décret.)
M. Lombard de Bouvans, suppléant de M. de Gonzié, ci-devant archevêque de Tours, membre démissionnaire de l'Assemblée nationale, demande à prêter le serment.
Je jure d'être fidèle à la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le roi, en exceptant les objets qui depuis ont touché au spirituel. (Murmures prolongés à gauche.)
Je demande qu'il sorte de l'Assemblée sur-le-champ.
Messieurs, l'individu qui vient de parler n'est pas encore membre de l'Assemblée; on ne peut être admis dans son sein qu'en prêtant le serment purement et simplement.
Un membre de droite : En ce cas, il faut nous chasser tous.
On ne peut être admis dans l'Assemblée qu'en prêtant le serment pur et simple d'être fidele à la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le roi : voilà le serment que nous avons tous prêté.
Plusieurs membres â droite : Non I non !
Oui, Messieurs, nous l'avons tous prêté et vous comme nous. (Il s'adresse à la droite.)
J'observe que toute personne qui, après avoir juré d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout son pouvoir la Constitution, ne persiste pas dans ses sentiments, doit sortir à l'instant de cette Àsse ublée. (Vifs applaudissements à gauche et dans les tribunes.)
J'ajoute et je conclus à ce que M. le Président fasse donner lecture par un des secrétaires de la formule du serment et que l'individu qui se présente pour être admis à la place de celui qui s'est absenté, dise simplement . Je le jure.
S'il ne veut pas le dire, il ne doit pas être admis dans l'Assemblée. (Applaudissements à gauche.)
Je suis d'accord avec M. d'André; que celui qui ne veut pas prêter le serment doit sortir....
Plusieurs membres à droite : Prononcez-en le décret.
(de Saint-Jean-d'Angély). Je demande que la discussion soit fermée.
Un grand nombre de membres à gauche se lèvent et demandent à aller aux voix.
Un moment.
L'Assemblée ne peut pas vous entendre, Monsieur.
(L'Assemblée, consultée, adopte la motion de M. d'André.)
Un de MM. les secrétaires lit la formule du serment :
« Je jure"d'être fidèle à la nation, à la loi et nu roi, et de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le roi. »
Je vais répéter la formule. (Murmures à gauche J)
Plusieurs membres à gauche : Dites i Je le jure.
Un membre à droite : S'il ne le pense pas, il ne peut pas le jurer.
Je vous prie de déclarer si vous voulez prêter le serment pur et simple.
Monsieur n'a pas le drôit dè parler dans cette Assemblée avant d'avoir prêté le serment. Il doit dire simplement à présent : Je le jure? sinon* il doit s'en aller.(Applaudissements.)
descend de la tribune sané prêter le serment et se dirige vers le côté droit de la salle.
Les membres du côté gauche se levant : Sortez! .sortez!
s'arrête ët se Mêle à quelques membres de la dtbite.
descend de Sâ place et va parler a M. l'abbé de Bouvans.
quitte la salie. (Vifs applaudissements.)
M. l'abbé Lombard de Bouvans n'est pas admis membre de l'Assemblée. (Vifsapplaudissements à gauche.)
Je demande la parole Contre vous> Monsieur le Président;
Plusieurs membres à gauche : A l'ordre dU jour !
monte à la tribune;
Plusieurs membres à gauche -: A l'ordre du jotir ! A l'Abbaye !
J'annonce que c'est contre moi qûe M. l'abbé Maury réclame la parolè . Je la lui dôhné.
Un grand nombre de membres à gauche : A l'ordre du jour!
Je demande l'ordre du jour sur la proposition de M. l'abbé Maury.
Messieurs, quand on n'est pas embarrassé de fépundrè, on iie doit pas Craindre d'être interpellé.
Un grand nombre de membres à gauche: Non! non! à l'ordre du jour !
Monsieur le Président, vous tt'aVez pas le droit d'aceorder la parole contre ie vœu de 1'A.ssemblée ; vous devez faire exécuter le décret.
A l'ordre, M. d'André.
Plusieurs membres à gauche ; A l'abbaye! À l'Abbaye, l'abbé Maury.
(L'Assemblée, consultée, décrète l'ordre du jour»)
secrétaire, donne lecturê delà lettre suivante adressée par M. Delessart, ministre de l'Intérieur, à M. le Président dë l'Assemblée nationale :
« Monsieur le Président* " « Mesdames ayant informé le roi que* malgré le décret de l'Assemblée nationale; gui déélare qu'aucune loi existante rte s'oppose à leur libre voyage, et malgré les ordres que le département et le district ont donnés pour l'exécution de cé décret* la commutië d'Arnay-le-Duë a persisté à s'opposer au départ de Mesdames j le roi m'a ordonné d'écrire de nouveau au directoire du département, pour faire cesser utte résistance éga-i-lement contraire à .l'autorité du Corps législatif et à Celle du roi.
« Je crois, Monsieur le Président^ devoir donner connaissance & l'Assemblée nationale de la lettre quë j'ai écrite à Ce sujet au département de lâ Côte-d'Or.
* Sigùé : DELËSSART.
Copie de la lettre du ministre de l'intérieur à
MM. les administrateurs du directoire du département de la Côte-d'or, jà Dijon.
Paris, le er
mars 1791
« Le roi* Meésietarsj vient d'être informé par une lettre dé Mesdames, que la commune d'Ar-hay-lë-Duc persistait à leur refuser le passage, malgré la connaissance qui a été donnée à cettë commune du dêcrët de l'Assembléë nationale, dont je vous ai envoyé unè expédition. Le roi, en mettant à part ce qu'il doit d'intérêt à des personnes qui lui appartiennent de si près, ne pourrait s'empêcher dë manifester son mécontentement de la résistance que la commune d'Arnay-ie-Duc met à l'exécution d'un décret du Corps législatif, revêtu de la sanction de Sa Majesté. La soumission due àufc lois serait bientôt compromise, et l'empiré de la Constitution ne tarderait point à s'affaiblir-, si le roi négligeait dè prendre les mesures nécessaires pôUr faire rentrer la Commune d'Arnay^le-DuC dans l'obéissance dont elle s'est positivëment écartée.
En conséquehcë, t'intentiott du roi ëst que VOUS employiez votre influence et votre autorité pbufc faire connaître à la commune d'Arnay-le^Dtic, eombieii sa conduite est repréhenéiblë, cômbién elle est inconstitutionnelle ; pour lui apprendre que Mesdames qui s'hbftorent dti titre de ci* toyenhes, doivent jouir, sans obstacle, dès rnêtheS droits et de la même liberté qui Boût asëUïéS à tous les citoyens; et pour lui faire sentir, enfin, que vouloir empêêber îilus longtemps leur départ, après le décret qui porte formellement qu'au» cunë loi existante ne s'oppose à leur libre voyage, c'est méconnaître l'autorité du Corps législatif éi briser les liens dë lâ Constitution.
Peut-être, Messieurs, serez-vous déjà pârvetius à éclairer cêtte commune sUr la désobéissance dont elle s'est rendue coupable ; mais Si lès voies de përstiâsion dont vous aurez, sans doute, fait usage étaient restés sans effet, le roi, qui doit et qui Veut faire obsëtver les lois, vous enjbirtt d'employer tous les moyens qui sont à vOWe dis* position, pour assurer le libre passage de Més-
dames, conformément au décréta Je dois vous préVè'nir en même temps que le ministre de la justice va donner, de son coté, les ordres convenables pour qu'il soit fait des poursuites Contre ceux qui se seraient montrés ou qui se montre^ raient réfractaireg à la loi.
Je vous prie, Messieurs^ dé vouloir bien m'instruire exactement de ce que voua aurez fait dans cette circonstance et du succès des mesures que vous aurez jugé à propos de prendre.
Je puis assurer l'Assemblée nation nale de rattachement de la commune d'Arnay-le-Duc, et du département tout entier pour là Constitution, et soû obéissance & la M. ha cbmmtiué ne voyant pas que le décret du 24 du mois dernier fût accompagné d'ordre positif de la main du roi, et contresigné de la main de ses ministres» elle avait cru que là prudence et le patriotisme lui prescrivaient d'envoyer une députation auprès du foi pour connaître ses intentions, et s'y conformer. La députation ayant eu connaissance des ordres définitifs du roi, a sur-le-champ pris leB mesures nécessaires pour les faire connaître à leur commune»
Je certifie que la commune d'Arnay-le-Duc et tous les citoyens de ce département moritreront autant d'empressement à faciliter à Mesdames* tantes du roi, lés Moyehs de continuer leur voyage, qu'ils avaient cru devoir mettre de zèle à les retenir jusqu'à ce que le roi eût fait connaître ses intentions d'une manière claire et positive.
Plusieurs membres : Tant mieux l taftt mieux 1
Un de MM. les sefétAirês donne lecture d'uné lettre de M. le maire de Paris, qui fait part à l'As>-semblée de l'adjudication de trois maisons Situées rue du Faubourg-Saint-Jacques t la première, louée 1,450 livres, estimée 25,180 livres, adjugée 26,600 livres; la deuxième, rue du Puits, lôuéé 600livres, estimée 9,000 livres, adjugée 20,000 livres; la troisième, louée 775 livres» estimée 5,650 livres, adjugée 27,100 livres.
du nom des comités des recherches et dès rapports* Messieurs, Vous n'avez pas perdu de Vue la situation dans laquelle se trouvait l'àiidienûe province d'Alsace, lorsque vous avez décrété d'y envoyer trois commissaires, dont le zèle actif et éclairé à déjà produit de si heureux effets. Parmi lés causes qui agitaient les deux départements du Rhin, on vous avait sûr-tout dénoncé dans celui du Haut-Rhin des édii-grations et des enrôlements Coupables. Des gens, qui feignent d'être incrédules à toùë projets de contre-révolution, afin que votre prudèncë cesse de veiller pour les prévenir, ont réVoqilé en doute le but et même l'existence de ces enrôlements qui, cependant, ont continué d'avoir fcôurs et viennent même de s'étendre jusque dans le département du Bas-Rhin. MM. les commissaires du roi en ont été instruits, et sur les preuves qu'ils en ont acquises, ils ont recouru à des mesures aussi efficaces qu'analogues à l'importàëce des fonctions puissantes dont votre confiance les â investis.
Vos comités des rapports et deé recherches m'ont chargé de vous expose!* les détails de bette affaire, qui mérite d'autaut plus votre attention qu'on y trouve clairement démasqués les auteurs et les agents de toutes ces trames criminelles, agents parmi lesquels vous en reconnaître^ qui,
las de s'opposer feàhfe frtiit à la CônètitUtion dans cette Assemblée, se sont flattés de la troubler et de là détrdlre en agitant nos frontières et qui, n'ayant jamais pu consentir à s'élevêr dû titre de repréfeehtant d'une Classé particulière au titré plus grand et plus sacré dé réprésehtàùt dé fcdlît un peuplé, ont juré de Venger dUr cë* peuple mêmé l'extinction dès injustes privilèges de la classé qui leur avait accordé une confiance dbht ils ont taat àbusë»
Un soldat déserteur dU régiment royal dës Deux-Ponts, dêsirahtbbtenir sà grâce, s'estadressô à M. Dufresnay, ancien secrétaire et chancelier dë M. le Càrâihal de Rohan-, et dertiëuràntà Marmou-tier, dans le département du Bas-Rhin. Celub-ci, après Mie ebhversatiën àussi mystérieuse que sùspècte, dont lés détails sbût consignés UàhS là déposition du soldat, lui proposa de s'enrôler dans l'armée des princes réfugiés et lë chargea d'une lettre pour M. l'abbé Eytnàr, résidbftt à Eitenheini, auprès de M. le cardinal ae Rohan. Ce soldat, effrayé du crime dont on voulait le rendre complice, confia cette lettre et lâ conversation qdi l'avait pfécéaëé à M. Zoberh, ministre protestant de Wasselonne, lieu de son domicile.
Ce ministre, fidèle à la cause de la patrie, en fit Sentir les conséquences à ce soldat, et fut au-lorisé par lui à faire dénoncer sur-le-champ Ces faits gravés ët à déposer cette lettre entre les mains dës Commissaires du roi et dû directoire dû département du Bas-Rhin, par MM. Steinbreim, officier municipal de Wasselonhe, et Lobstéin, citb^ën du même lieu, tous deux thembrës de la société des amis de la Constitution établie dans cette ville. Vous vërrèz, par la lecture que j'aurai l'honneur de vous faire de cette lettre-, avec qûelle perfidie on s'est prévalu du désir que ëe malheur reui dësérteUr avait de rentrer dans sa patrie, pour lui proposer comme un moyen sûr d'aW-nistie de porter pendant un an les armes cdtitre elle. Vous verrez avec quélle audacieUëe fràtK chisô oh y parle de l'armée des princes expatriés et du projet de la formation d'un corps d'armée, comme de choses également connues, et de i'àgent qui écrit et dé l'agent plus coupable encore auquel cette lettre est destinée. Vous verrez que ces aveugles ëonapirateurs ne négocient entre eux ces engagements que pour Une cathpaghe, parce que, dans leurà ëoUpablés espérances, ils se flattent que* pour rëplohger la France dans son ancien esclavage, il në faudra, en effet, pas plus d'pne année. Vous verrez enfin que le fils de M. Dufresnay, à la têtë d'une troupe armée, â été chargé précédemment par son père dë soutenir dans le refus de la prestation de serment pur et simple un fonctiobnâiré ecclésiastique réfrac-tâire à vos décrets.
Saisis de cette pièce importante, écrite tout entière de la main de M. Dufresnay et signéé pàr lui, les commissaires s'étant concertés aVec le nouveau directoire du département, qui, depuis son installation, prouvé chaque jour pâr sa conduite patriotique combiétt là destitution dé l'ancien était nécessaire, n'ont point cru devoir s'a3treindre à des lenteurs de forme qui, dans lës circonstances, ne pouvaient que favoriser le crime. Ils ont donné des ordres pour aller à Marmoutier arrêter MM. Dufresnay pèfë ët fils. Cette arreslâtlon a été exécutée avec ordre et promptitude par Uh détachement de troupes de ligne. Les deux prévenus ont été traflsférés dans leS prisons de Strasbourg, et leurs papiers, saisis et reconnus pàr eux, déposés àu directoire du département.
Plusieurs autres affaires du même genre, mais . beaucoup moins importantes, ayant été déférées I en Alsace aux tribunaux ordinaires, et n'y ayant pas été suivies avec l'activité et la juste sévérité que celle-ci exige, les commissaires n'ont pas cru devoir la leur attribuer; ils ont pensé que la poursuite en devait être conliée au tribunal suprême dont vous avez chargé votre comité de Constitution de vous présenter incessamment l'organisation provisoire. L'opinion de vos comités I des rapports et des recherches est qu'il est indispensable d'adopter cette mesure et de faire, en conséquence, transférer MM. Dufresnay père et lils, sous bonne et sûre garde, dans les prisons de l'abbaye Saint-Germain, à Paris.
Je vais vous faire lecture de la lettre qui forme le corps du délit et de la déposition du soldat : ces pièces vous mettront au fait de la marche que les commissaires et le directoire ont suivie dans cette affaire.
Copie de la lettre de M. Dufresnay à M. l'abbé Eymar. — L'original est au département du Bas-Rhin.
« Marmoutier, 13 février.
« Monsieur le prévôt, l'homme que j'envoie a servi quatre ans au régiment de Deux-Ponts; il déserta au mois de juillet 1789. Il n'a point pris service chez l'étranger, mais il a travaillé de son métier de tailleur de pierre au delà du Rhin. 11 y a plus de six mois que sa mère, veuve et bourgeoise de Wa?selonne, me pressa de sollicfter la I grâce de son lils. Je consultai M. Klinglin qui no put m'indiquer la route que je devais prendre. Ce qui ajoute beaucoup au désir qu'a la mère de voir son lils revenir libre, c'est qu'elle lui a ménagé un mariage.
Sur l'impossibilité d'obtenir cette grâce, j'ai offert à cet homme un moyen de rentrer dans sa patrie et d'y jouir paisiblement de la tendresse de sa mère et de ses effets; c'est de s'engager pour une année dans l'armée des princes. Absent de Haguenau depuis trois semaines, j'ignore l'état des choses. Si le projet d'une légion se soutient, mon soldat est une bonne acquisition; il serait propre | à être sergent : s'il nTy a rien de commencé pour cet objet, il faudra l'envoyer ailleurs. Mais je vous supplie, Monsieur, de prendre des précautions pour que rengagement ne soit en effet que pour une campagne. Persuadé qu'il n'y en aura qu'une eu effet, je pense qu'il sera facile de faire cet arrangement. Je lui ai promis que son zèle sera récompensé par une amnistie particulière, quand même (ce qui n'est pas à présumer) il n'y en aurait pas une générale. C'est dans cette confiance et sur cet espoir qu'il part.
« Avez-vous appris, Monsieur, qu'il est question d'envoyer des émissaires avec de l'argent dans les Etats de S. A. S. E., pour sôulever Je peuple? Deux de vos amis, que le hasard a réunis hier chez moi, m'ont conlirmé coite nouvelle : c'est l'abbé de M.... »
On croit qu'on a voulu désigner l'abbé de Marmoutier; mais comme ce fait n'est pas avéré, je ne le cite pas. (Murmures.) Oui, Messieurs, il y a un abbé de Marmoutier. « ... C'est l'abbé de M.... et votre doyen... » Pour celui-ci, il est désigné par le mot doyen, parce que M. u'Ejmar est grand prévôt de Boux-villtr, et M. l'abbé Gérard est doyen de ce chapitre.
« ..-Il serait prudent de veiller sur ces agents, qu'il ne doit pas être difficile de découvrir. Ce
matin, le maire et un municipal sont entrés dans la sacristie, où le prieur-curé s'habillait pour la messe. Je veux, a dit le maire, en présentant la formule du serment, que vous le lisiez sans y changer un mot, et que le serment prononcé, vous quittiez la chaire sans vous permettre de rien dire avant ou après. Le curé a répondu qu'il ne prêterait ce serment qu'avec les restrictions que lui prescrit sa conscience. Menace du maire.
« Dans ce moment, un détachement de la garde nationale, bien choisi, est arrivé à l'église, conduit par mon fils. Le curé, sûr du vœu de tous les honnêtes gens de la paroisse, et rassuré par la petite troupe armée que j'envoie, est monté en chaire. Voilà, a-t-il dit, le serment que ma conscience et mon honneur me permettent de prêter. Il l'a lu, il a ajouté des choses bien touchantes, bien fermes. Son auditoire a été satisfait, et tout s'est passé tranquillement. Ge qui rend le maire si fier, c'est la faveur de celui de Strasbourg, chez qui il va depuis quelque temps. Il a eu le bonheur inexprimable d'être présenté aux trois commissaires; il en a été caressé, on lui a fait son thème. Depuis ce moment, cet homme annonce des vengeances et de grands moyens. Yoilà, Monsieur, où nous en sommes. Je vous écris de mon lit, où un accident à la jambe me retient. J'espère que je serai libre dans quelques jours, et en état de regagner Lichtenau, dès que je recevrai des lettres du prince. »
Signé : Dufresnay. .
Voici maintenant, Messieurs, la déclaration : « L'an 1791, le jeudi 24 février, est comparu au secrétariat de la commission royale, pour les départements du Haut et du Bas-Rhin, Jean-Jacques Frenezer, âgé de 25 ans, de la confession d'Augsbourg, natif de Yasselonne, lequel a déclaré qu'en l'année 1785, il s'est engagé à Landau, au régiment Roval-Deux-Ponts, dans lequel il a servi jusqu'en 1789, au mois de juillet de ladite année; qu'il a déserté dudit régiment, en garnison à Neuf-Brisach, où il se trouvait alors: que, depuis ce temps, il a voyagé eu Suisse et travaillé de son métier de tailleur de pierre; et (m'a la Saint-Martin dernière, il est retourné at|dit Yasselonne, où il s'est tenu caché depuis; qu'ayant désiré d'obtenir sa grâce, on lui avait conseillé de s'adresser à M. Dufresnay, demeurant à Marmoutier; qu'on lui a dit pouvoir la lui procurer; que la mère du déclarant s'était déjà antérieurement adressée audit sieur; que 15 jours avant Noël dernier, le déclarant était allé la première fois audit Marmoutiers, en la maison de M. Dufresnay; qu'il n'y a trouvé que la servante, qui lui a dit que son maître se trouvait alors à Prehte-nau, de l'autre côté du Rhin ; que, hier quinze jours, 9 de ce mois, il s'est rendu de rechef audit Marmoutier, où il a trouvé, pour la première fois, M. Dufresnay, chez lequel le déclarant a été conduit par son lils ; que M. Dufresnay i'avait conduit dans une chambre séparée, et lui avait dit qu'il avait en vain sollicité sa grâce près de l'Assemblée nationale, qu'on commençait à s'ennuyer de celte Assemblée, et que si lui déclarant voulait l'en croire, il passerait le Rhin, qu'on y levait une armée, qu'il allait lui donner une lettre pour l'abbé d'Eymar, qui se trouve à Ettenheira, auprès du cardinal de Rohan, qu'il devait la lui porter, et qu'on lui donnerait une place de sergent dans ladite armée, qu'il avait ajouté qu'il y aurait quatre armées de 60,000 hommes chacune; que l'une serait commandée par M. de Couvé ; l'autre, par le duc de Brunswick; la troisième, par le
prince de Hohenlohe, dans l'armée duquel le fils de M. Dufresnay allait avoir une place d'officier; et que lui déclarant avait oublié le nom du général de la quatrième armée.....» —
Un membre à droite : C'est M. le maréchal de Broglie.
«.....Qu'une de ces armées se porterait directement sur Paris, et que les autres attaqueraient à trois différents endroits; que la campagne qu'on projetait allait être finie au bout de 6 mois, et 'qu'à l'expiration de ce terme, lui M. Dufresnay allait lui faire donner son con^é; et que le déclarant lui ayant répondu qu'il allait faire ses réflexions ou parler à sa mère, il lui avait répliqué qu'il devait lui faire dire, sous peu, un oui ou un non-, que de retour à Vasselonne, le déclarant a confié le tout à M. Zobern, ministre de l'évangile audit lieu, qui lui a déconseillé une démarche aussi coupable; que cependant il lui a dit qu'il serait bon qu'il pût acquérir la preuve des criminelles manœuvres de M. Dufresnay; que, le samedi suivant, le déclarant lui a fait dire p^r le fils du nommé Bambel, citoyen de Vasselonne, qu'il acceptait sa proposition ; que, dès le jour suivant, le fils dudit sieur Dufresnay est venu à Vasselonne, qu'il est venu dans la maison du déposant,acco npagîié par ledit garçon; que,l'ayant pris de côté dans la cuisine, il lui a r mis une petite lettre cachetée en cire noire, en lui disant qu'il devait la remettre à .l'abbé d'Ettenheim-Munster; qu'il l'enverrait de là à Bâ!e où était le rendez-vous des recrues, et qu'il allait être sergent dans cette armée; que Frédéric N., boulanger et cabaretier à l'enseigne de la Fleur-de-Lys, où le déclarant demeure, ensemble la femme dudit Frédéric, avaient vu arriver le fils dudit sieur Dufresnay chez le déposant; que le lendemain à midi le déclaraut a remis ladite lettre au sieur Zobern, ministre, en lui abandonnant l'usage à en faire; mais que depuis ce moment le déclarant n'a plus entendu parler du sieur Dufresnay : qu'il a seulement appris que quelques jours après son fils est venu danser à une noce à Vasselonne; ajoute le déclarant qu'en lui remettant la lettre, le sieur Dufresnay fils lui a recommandé de la bien garder, pour qu'il n? la perde point. — Lecture et interprétation en langue allemande, faite au déclarant de la présente déclaration, il a dit icelle contenir vérité, y a persisté et a signé à toutes les pages avec nous. Le secrétaire, interprète de la commission, les jour, mois, an et heure susdits.
Signé : Johann-Jacob Brenneisen. »
Je vous ai annoncé, Messieurs, une dénonciation importante, et à laquelle il n'était pas possible de donner des interprétations équivoques : je crois n'avoir point trompé votre attente; vos comités n'ont pas douté que vous n'y donnassiez toute l'attention qu'elle mérite, et que sollicite impérieusement la gravité des circonstances qui nuus environnent.
Les mouvements continuels, par lesquels on cherche à ébranler les bases sur lesquelles repose notre liberté naissante, exigent que l'on juge enfin, et que l'on punisse solennellement tous ceux qui seront convaincus de l'avoir attaquée. Les moyens que vous avez sagement employés ont apaisé les troubles prêts à éclater dans l'ancienne Alsace. Le patriotisme et le zèle du nouveau département du Bas-Rhin et de plusieurs corps administratifs, l'activité ferme et éclairée des trois commissaires y ont presque entièrement
rétabli l'ordre ; mais, pour épouvanter et contenir ceux qui seraient encore tentés de le troubler, il faut sans doute un grand exemple, et,si la justice l'ordonne, comme le salut public l'exige, il n'y a pas un moment à perdre pour le donner.
Voici le projet de décret que nous vous proposons :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu ses comités des recherches et des rapports, réunis, décrète:
Art. 1er.
« Que le roi sera prié de donner les ordres nécessaires pour que les sieurs Dufresnay père et fils soient transférés sur-le-champ, sous bonne et sûre garde, dans les prisons de l'abbaye Saint-Germain de Paris, pour leur procès être fait et parfait par le tribunal qui sera chargé provisoirement de prononcer sur les crimes de lèse-nation.
Art. 2.
« Que les papiers saisis chez les sieurs Dufresnay pcre et fils, au moment de leur arrestation, ensemble les procès-verbaux, dépositions et autres pièces relatives au délit dont ces particuliers sont "prévenus, seront remis à l'officier qui exercera les fonctions d'accusateur public près le tribunal auquel sera attribuée la connaissance des crimes de lèse-nation, ainsi que les renseignements ultérieurs qui pourront être pris successivement sur cette affaire par MM. les commissaires du roi près les départements du Haut et du Bas-Rhin.
« L'Assemblée nationale déclare,en outre,qu'elle est satisfaite du zèle et du patriotisme qu'ont témoignés dans cette circonstance les sieurs Zobern, ministre de Vasselonne; Steinbreim, officier municipal, et Lobstein, citoyen de celte ville. »
Plusieurs membres : Et la grâce du soldat?
rapporteur. La demande en est faite eu ce moment.
Ne parlons pas de cela.
Un membre : Elle est déjà donnée.
(Le projet de décret du comité est adopté.)
M. Favre demande un congé de deux mois.
(Ce congé est accordé.)
lève la séance à trois heures.
présidence de m. de noailles.
Séance du
La séance est ouverte^, neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires donne lecture du pro-
cès-verbal de la séance de mardi au soir, qui est adopté.
Messieurs, je demande la permission de dénoncer à l'Assemblée une nouvelle feuille qui parait depuis quelques jours et qui a pour titre : Journal des mécontents. On y lit que le camp de Jalès s'augmente journellement; que déjà il y a plus de 30,000 hommes assemblés; que ie nombre des mécontents augmente chaque jour et que bientôt tout le pays sera soulevé..
Gomme député du déparlement de l'Ardèche, je crois devoir démentir des faits aussi dangereux à être accrédités. J'ai reçu des lettres de mes commettants qui m'annoncent qu'effectivement il y a eu quelques attroupements à Jalès, occasionnés par les calomnies et la malveillance des mauvais citoyens, mais que la bonne conduite des administrateurs a dissipé ces séditieux, et que la tranquillité ne tardera pas à être rétablie dans ce canton.
Je puis attester à l'Assemblée que les 15,16 et 17 février il n'y avait presque personne à Jalès; que les 18, 19 et 20 les factieux sont parvenus à assembler des paysans égarés et quelques gardes nationaux ; mais leur nombre n'a jamais monté à plus de 5,000 hommes et ce prétendu camp a été bientôt abandonné par les paysans qui, ayant reconnu que les aristocrates voulaient les tromper, s'en sont retournés chez eux. Dans ce moment, il n'y a pas un homme, excepté les chefs qui, n'ayant pas même osé paraître, Se sont contentés de mettre en avant des personnes inconnues qui n'ont pu contenir les paysans. Dès que ceux-ci ont reconnu qu'il n'y avait point de protestants massacrés, ils ont été furieux contre les chefs, et c'est pour ces derniers seuls qu'on doit trembler aujourd'hui. (Applaudissements.)
Pour tranquilliser les peuples sur les suites d'un pareil attroupement et pour confondre les intentions perfides des scélérats qui cherchent sans cesse à égarer le peuple, je demande 1'insertio.n dans le procès-verbal de ce que vient de dire M. de Saint-Martin.
(Cette motion est décrétée.)
secrétaire, fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
L'Assemblée a décrété hier que M. Lombard de Bouvans n'était point admis; il ne faut donc pas le traiter dans le procès-verbal de député suppléant.
Je ne prétends pas nier le décret par lequel cet ecclésiastique n'est point admis, pour avoir voulu mettre des restrictions à son serment; mais je demande si, en se renfermant littéralement dans la prestation du serment pur et simple, il ne peut pas être admis aujourd'hui.
Je fais la motion qu'il soit formellement décrété que M. l'abbé de Bouvans est déchu de tout droit.
Je demande à le contester.
Je regarde le fond de la motion de M. d'André comme inutile. M» l'abbé Lombard de Bouvans n'a pas voulu hier se sou-
meitre au décret de l'Assemblée* il doit être exclu.
Je retire ma motion et je demande l'ordre du jour.
Si vous voulez infliger à M. de Bouvans une peine correctionnelle, vous pouvez le mander à la barre pour qu'il s'explique;.....
Plusieurs membres à gauche ; Non! nonl nous ne le pouvons pas.
mais je soutiens que vous ne pouvez pas refuser un membre que la nation vous envoie ; autrement c'e6t une tyrannie.
Plusieurs membres à droite appuient l'opinion de M. de Bois-Rouvray.
(L'Assemblée, consultée, décrète l'ordre du jour.)
(Le procès-verbal est adopté.)
M. l'abbé Audrein, vice-gérant du collège des Grassins, fait hommage à l'Assemblée d'un mémoire sur l'éducation nationale française.
Je prie l'Assemblée d'ordonner que ce mémoire soit^renvoyé au comité de Constitution et qu'il en soit fait mention au procès-verbal.
(Cette motion est décrétée.)
au nom du comité d'emplacement. Un voyageur, comparant il y a quelques années les Anglais aux Français d'alors, disait que l'une des différences qu'il y avait entre eux était que les Anglais n'avaient ni moines ni loups. Je ne sais s'il y a des districts où il n'y a pas de loups ; mais votre comité n'en connaît pas encore un seul où il n'y ait des moines,
M. le rapporteur n'est pas exact, parce que les loups ont mangé les moines.
rapporteur. La petite ville de Sarrelouis en renferme deux maisons, qui toutes deux sont trop vastes pour loger l'administration et d'un prix supérieur aux facultés des administrés. Le directoire de district demande à être autorisé d'acquérir une maison louée 300 livres appartenant aux ci-devant chanoinesses de Loutres. Votre comité ne voit rien qui puisse s'opposer à cette modeste acquisition. Si la, propreté est le luxe de la médiocrité, la modestie est bien plus encore celui de la liberté. Nous vous proposons le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de gon comité d'emplacement, autorise le district de Sarrelouis à acquérir, aux frais des administrés, la maison appartenant au ci-devant çha-r noiuesses de Loutres, située rue du Palais, en observant les formes prescrites par les décrets pour l'aliénation des domaines nationaux. »
(Ce décret est adopté.)
au nom du comité Remplace» ment, présente deux autres projets de décret ainsi conçus :
1er PROJET.
«L'Assemblée nationale, ouï ie rapport de son
comité d'emplacement, a autorisé le directoire du département d'Eure-et-Loir à acquérir, aux frais des administrés, la maison conventuelle des ci-devant cordeliers de Chartres, ainsi qu'elle est désignée au plan qui demeurera joint au présent décret, en observant les formes prescrites pour l'aliénation des biens nationaux : excepte de la présente permission d'acquérir, le jardin coté D, et les deux portions de terrains cotés E, F, sur le même plan, pour être ces trois objets vendus séparément, et en la manière prescrite par les décrets. » (Adopté.)
2® projet.
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d'emplacement, autorise les administrateurs du département des Vosges à continuer de tenir leurs séances dans la portion du collège d'Epinal qu'ils occupent actuellement, et qui est reconnue inutile à l'administration de cet établissement, à la charge d'entretenir, aux frais des administrés, ladite portion de bâtiment de toutes réparations, aux termes du décret du 16 octobre dernier, sauf à prendre des mesures ultérieures, s'il arrivait que la totalité de l'édifice devînt nécessaire à l'éducation publique. » (Adopté.)
annonce à l'Assemblée que M. de Failly demande un congé.
(Ge congé est accordé.)
au nom des comités de commerce et d1 agriculture et des monnaies, présente un projet de décret sur l'emploi de Vargenterie des églises, chapitres et communautés religieuses, jugée inutile au culte.
Ge projet de décret est ainsi conçu :
Art. 1er rend="superscript".
« L'argenterie des églises, chapitres et communautés religieuses, qui a été ou qui pourra être jugée inutile au culte, d'après les inventaires faits suivant l'instruction du comité d'aliénation, du 19 octobre dernier, décrétée par l'Assemblée nationale, et sanctionnée par le roi, les 8 et 9 novembre, sera envoyée par les directoires de districts aux hôtels des monnaies les plus voisins, et les directeurs desdites monnaies leur en feront passer un reçu par le procureur général syndic de leur département.
Art. 2.
« Les pièces d'or et celles d'argent doré qui se trouveront parmi l'argenterie dont il vient d'être parié, en seront séparées, pour être envoyées à la Monnaie de Paris par les directoires de districts, avec un état certifié par eux des pièces qui seront envoyées; et le directeur de la Monnaie de Paris leur en fera passer un reçu par le procureur général syndic de leur département,
Art. 3.
« Les directoires de district donneront avis à l'administrateur de la caisse de l'extraordinaire, et lui enverront l'état des envois faits par eux aux hôtels des monnaies, et de leurs poi is; et ils enverront des doubles de ces états aux départements, qui les feront passer au comité d'aliénation.
Art. 4.
« Après que le comité d'aliénation aura donné
son avis, suivant l'article 4 de l'instruction du 19 octobre, il sera procédé, de la manière qui va être expliquée, à la fonte des matières d'or et d'argent comprises aux envois et dépôts, et qui n'auraient pas été exceptées d'après l'examen et l'avis du comité.
Art. 5.
« Le3 matières étrangères, telles que le bois, le fer, le cuivre, seront exactement séparées desdites pièces d'argenterie; les pierres fines ou fausses qui s'y trouveraient enchâssées seront également séparées, et remises en dépôt au receveur du district, qui en donnera son reçu, pour en être disposé conformément aux décrets de l'Assemblée nationale.
Art, 6.
« Ces distractions étant faites, les matières seront pesées ; il sera dressé procès-verbal de la pesée, et procédé à la fonte. La fonte étant faite et les lingots formés, il sera pris un morceau d'essai de chaque fonte, lequel sera envoyé sous cachet à l'hôtel dès monnaies de Paris.
Art. 7.
« Les mêmes formalités seront observées pour la fonte des matières d'or, d'argent doré et d'argent, qui se fera à la Monnaie de Paris; chacune de ces matières y sera fondue séparément.
Art. 8.
« Les morceaux d'essai ayant été numérotés et constatés de manière à pouvoir reconnaître à quelle fonte ils appartiennent, seront divisés en trois parties, et il sera procédé à l'essai de chacune d'elles séparément et le même jour :
« 1° Par l'essayeur général de la Monnaie de Paris ;
« 2o Par des commissaires de l'Académie des sciences ;
« 3° Par 4 des anciens gardes orfèvres de Paris, qui seront nommés par tous les gardes et anciens gardes réunis.
Art. 9.
« Le titre des matières d'or et d'argent sera fixé aux taux résultant des 3 essais réunis.
Art. 10.
t Les matières d'argent doré seront également jugées d'après le résultat des 3 essais réunis ; et ensuite le départ en sera fait.
Art. 11.
« L'or et l'argent provenant de toutes ces fontes seront payés par le Trésor public à la caisse de l'extraordinaire, et ensuiie convertis en monnaie» qui sera versée dans le Trésor public. »
(Ge décret est adopté.)
Malgré les décrets rendus l'an passé en mars et juin, jamais on ne nous a rendu compte que par aperçu des quantités d'or et d'argent versées dans l'hôtel des monnaies. On sait seulement par aperçu, car on aime bien les aperçus, qu'il y en a eu pour 33 millions, dont la majeure partie est des dons patriotiques.
Je demande ce que sont devenus ces 33 millions, et, en outre, que les décrets soient exécutés.
M. Bouche oublie que le comité des finances a rendu compte de ce qui avait été porté à l'hôtel des monnaies, et qui était non pas de 33 millions, mais seulement de 15 ou 16.
Ce compte n'a point été rendu comme le décret l'ordonne ; il a été rendu par aperçu, puisqu'aperçu il y a.
Non pas par aperçu, mais par un compte exact.
(de Bigorre). C'est moi qui ai fait le rapport à la tribune ; j'ai donné l'état en entier, et m>n pas un aperçu.
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour. )
au nom des comités des pensions et de liquidation. Messieurs , vos commissaires à la liquidation ont recherché les causes du retard qu'elle éprouvait ; ils ont trouvé extraordinaire que, dans un Etat obéré de dettes, il n'y ait pas de créanciers prêts à être payés.
Déjà nous avons proposé plusieurs décrets tendant à accélérer la liquidation : cette raison d'accélération vous a fait demander un commissaire du roi dans cette partie, qui vous présentait en outre une responsabilité. Cependant la liquidation n'avançait pas autant que vous et la nation le désiriez ; nous en avons recherché les causes, et nous nous sommes aperçus que le retard venait de ce que les rapports à iaire par le directeur de la liquidation, se trouvaient divisés en une multitude de comités, parmi lesquels il s'élevait quelquefois des difficultés de compétence. Pour prévenir ces retards, voici le projet de décret que nous avons l'honneur de vous présenter :
« L'Assemblée nationale décrète qu'à compter de ce jour, le directeur général de la liquidation portera tous les rapports relatifs à la liquidation des différentes parties de la dette publique remboursable, pensions, brevets de retenue,décomptes des pensions et autres objets compris dans les différents décrets précédemment rendus sur la liquidation de (a dette remboursable, au comité central de la direction de liquidation ; que, sur ces rapports, le comité centrai rendra compte à l'Assemblée de tous les objets qu'il jugera n'êîre susceptibles d'aucunes difficultés ; qu'à l'égard de ceux qui seront jugés susceptibles de difficultés, le comité central les renverra aux comités respectifs qu'ils regardent, pour y être examinés et et ensuite portés à l'Assemblée. »
Un membre demande l'ajournement de ce projet de décret.
(L'ajournement est rejeté par la question préalable.)
J'observe que le comité de * liquidation devait statuer,i) y a 15 jours.....,
Plusieurs membres : Aux voix I aux voix 1
sur une difficulté qui s'est élevée pour la liquidation de l'arriéré du département de la maison du roi. Je puis en parler d'autant plus savamment, qu'étant dans le cas de faire liquider un arriéré dû à la succession de mon beau-père, je n'ai pu obtenir de décision.
Je demande le renvoi de ma demande au comité de liquidation.
(L'Assemblée ordonne ce renvoi et adopte le projet de décret du comité.)
Messieurs, les électeurs au département de Seine-et-Marne ont procédé à
l'élection du nouvel évêque de ce dé-
J'ai reçu la lettre suivante :
« Monsieur le Président, Îe3 députés des hommes de couleur, libres, des Antilles, de [Saint-Domingue, privés, contre le terme des décrets, du droit le plus précieux pour tous les hommes, supplient l'Assemblée nationale de vouloir bien les admettre à la barre afin d'y exposer leurs griefs; ils espèrent cette justice d'une Assemblée qui leur a déjà assuré que jamais aucun opprimé ne réclamerait vainement son secours.
« Nous sommes, avec un profond respect, Monsieur le Président, etc... »
Il faut savoir si ces Messieurs sont effectivement députés ; je demande qu'ils soient tenus de présenter leurs pouvoirs au comité colonial.
M. Camus. Il est d'usage que les pouvoirs des députaiions soient vérifiés par le Président.
(L'Assemblée décrète que la députation sera admise lorsque M. le Président aura vérifié ses pouvoirs.)
L'ordre du jour est la discussion du projet de décret concernant les dispositions qui doivent compléter Vorganisation des corps administratifs (1).
rapporteur. Messieurs, parmi les dispositions que contient le projet de décret sur le complément de l'organisation des corps administratifs, qui vous a été distribué hier, il en est plusieurs qui sont si simples, si analogues à ce que vous avez décrété, que je ne les crois pas susceptibles d'une longue discussion.
Sans doute, on pourra y proposer des modifications et des amendements; mais il me semble qu'on pourrait les mettre aux voix successivement, avant d'arriver à la grande question, la suspension et la dissolution des corps administratifs.
Le projet qu'on nous propose est de la dernière importance; il touche à
la Constitution entière; il décide de l'influence des corps
administratifs sur toute la Constitution et de la destinée des corps
administratifs eux-mêmes. Le résultat évident du projet qui vous est
présenté est d'annuler lès corps administratifs inférieurs, tels que les
municipalités et les administrations de districts, pour les mettredans
une dépendance purement passive des directoires de département.
(Murmures et applaudissements.) Et on ne met les corps administratifs
dans la dépendance des directoires de département que pour remettre
ensuite, dans ce même projet, les directoires, de département eux-mêmes
dans les mains du ministre. Voilà, Messieurs, en deux mots le résultat
du projet. (Murmures et applaudissements.) 11 est bien douloureux pour
un membre qui demande à parler sur une matière qui intéresse aussi
essen-
Laissez-le parler.
Je demande l'ajournement et un délai suftisa it. pour que tous les membres puissent prendre connaissance delà question; son extrême importance s'aperçoit, et par la nature de la matière, et par le résultat que je vous ai présenté.
Voix diverses : Oui ! Non 1
Je demande le silence ; ce que Monsieur dit est juste.
La délibération ne peut commencer ayant qu'il se soit établi une discussion générale sur l'ensemble et sur les résultats de ce projet. (Murmures.) Ce n'est fias par des cris qu'il convient de repousser les réflexions qu'un membre se croit obligé de présenter sur un décret de cette importance, sur un décret d'où dépend le sort des corps administratifs et de la Constitution. Ce décret u'ayantétéprésenté qu'hier, il est impossible d'en faire aujourd'hui l'objet d'une discussion, et bien moins d'une délibération.
Une délibération de celte importance proposée du soir au malin, c'est ce qui ne s'est jamais vu. Toujours les questions constitutionnelles ont été discutées. Ici il s'agit d'un décret qui renferme une foule de questions constitutionnelles du plus grand intérêt, et dont la décision peut, ou affermir, ou renverser la Constitution.
Je n'ai pas besoin d'en dire davantage pour réclamer avec succès, au nom de la liberté, au nom de 1a nation, un ajournement qui donne à tout ie monde le temps de la réflexion.
Un membre demande la question préalable sur l'ajournement.
S'il ne s'agissait dans ce projet de décret que de savoir si les départements doivent avoir une influence quelconque sur les districts et sur les municipalités, et si le gouvernement lui-même doit avoir sur les corps administratifs une influence, salutaire à mon avis, il n'y aurait pas besoin de discussion ; car ces questions sont décidées; mais il s'agit de fixer les limites de cette influence, le mode de son exercice; il s'agit de la voûte dé l'édifice de l'administration. Un rapport de cette importance, qui n'a été distribué qu'hier au soir, ne peut être discuté ce matin.
J'appuie 1 ajournement et je propose que la discussion soit placée à jour fixe, à lundi.
En général tous les moyens qui peuvent éelaircir une discussion doivent être adoptés; on ne saurait examiner avec trop d'attention des questions constitutionnelles. Cependant je tie suis pas d'avis de l'ajournement.
Depuis deux ans que nous nous occupons d'objets constitutionnels, que nous travaillons sur les corps administratifs et que nos idées ont été naturellement appelées à examiner ce qui peut convenir à ces différents corps pour les faire aller d'une manière plus rapide et plus sûre, il est certain que presque toutes les idées sont faites sur la matière qui nous est soumise et que tout le
monde convient qu'il faut attacher ces corps d'une manière quelconque au pouvoir exécutif et au pouvoir législatif, pour qu'ils ne menacent pas le pouvoir que la Constitution délègue à l'un et à l'autre.
Ainsi ie ne vois pas la moindre difficulté à discuter le projet; allons doucement dans la délibération; qu'il s'établisse une espèce de discussion entre le rapporteur et chacun de nous.
Si j'insiste sur ce que vous n'ajourniez pas, c'est que je vois que vous n'avez pas de travail constitutionnel prêt à être discuté; c'est que vous allez être pendant plusieurs jours à vous affliger de l'espèce d'inaction dans laquelle vous serez. Or, ne vaut-il pas mieux nous occuper de cette manière que d'être à ne rien faire?
Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix !
Ce n'est pas assez de hâter nos travaux, il faut qu'ils soient médités. Quel membre de l'Assemblée a assez approfondi les questions importantes qui, dès le deuxième article du décret, se présentent à votre délibération? (Murmures.)
Le plan du comité tend à asservir entièrement les municipalités et les districts, il demande donc un sérieux examen ; il faut en discuter les prin^ cipes généraux et je demande un ajournement, quelque prochain qu'il soit.
On nous dit que,depuis le temps que nous sommes occupés de tout ce qui concerne les corps administratifs, nos idées doivent être très présentes sur cet objet. Assurément, Messieurs, vous n'aviez jamais vu un travail semblable à celui qu'on vous propose et vous n'aviez certainement jamais réfléchi à une pareille liaison, à une pareille connexité entre les corps administratifs, qu'on enchaîne les uns aux autres, de maniéré à les mettre entre les mains du ministère dans l'asservissement et dans l'esclavage le plus absolu. (Murmures et applaudissements.)
Je demande donc l'ajournement à un terme prochain.
rapporteur. Messieurs, les premiers articles ne préjugent pas du tout les questions importantes, par exemple ce qui re-, garde la suspension et la dissolution des corps administratifs. Gela est si clair que si vous voulez discuter successivement ces articles, sauf à vous arrêter lorsque l'Assemblée l'ordonnera, vous verrez qu'il ne s'y trouve pas le moindre rapport.
Je provoque moi-même la discussion la plus étendue, non seulement sur les premiers articles, mais sur tous ceux qui paraîtront susceptibles de grandes difficultés.
J'ajouterai que, dans le département de M. Pétion, on a intitulé décrets les délibérations du directoire; l'Assemblée le lui a défendu et il est nécessaire de statuer sur cet objet.
La plupart des députés sont trop occupés dans les comités pour pouvoir examiner aussi rapidement des projets d'une telle importance sur des parties de la Constitution.
J'insiste pour l'ajournement.
(L'Assemblée, consultée, repousse l'ajournement.)
(La discussion ést ouverte sur le projet de décret du comité.)
rapporteur, donne lecture de l'article ler.
Je demande à faire un amendement. J'adopte parfaitement l'idée de l'article, qui distingue le pouvoir législatif du pouvoir administratif remis aux corps chargés de cette partie; mais je pensé que l'article même ne remplit pus son objet par la manière dont il est rédigé. Je ne crois pas qu'il existe pour les corps administratifs des matières générales et des matières particulières. Il n'y a que ce qui est matière de législation qui puisse être considéré cdmme une résolution générale. . Je demande donc que la fin de l'article'soit changée et que tous les actes des corps administratifs portent le nom d'arrêtés. Dans ce mot me paraissent devoir être compris tous les actes de leur compétence,
, rapporteur. Nous avons distingué avec raison, je crois, les matières générales et les matières particulières.
Par matières particulières, nous entendons les réponses au bas des requêtes, les mandats pour payements qui se font journellement avec la signature d'un seul des membres du directoire, loîsque cela a été arrêté.
Par matières générales, Messieurs, nous entendons ce qui comprend l'administration des chemins, la répartition de l'imposition entre les différentes municipalités.
Je conclus à ce qu'on adopte l'article tel qu'il est, parce qu'il est fondé sur la vérité.
Il faut éloigner toute dénomination qui pourrait faire croire aux administrateurs qu'ils sont juges ou législateurs, sous aucun rapport. ;
J'appuie l'amendement de M. Barnave.
rapporteur. J'adopte la dénomination unique d'arrêtés; c'était d'ailleurs la première idée du comité,
(L'amendement de M. Barnave est adopté.)
Il y a des directoires de département qui, sous prétexte de l'exécution de vos décrets, y ajoutent des peines. Je citerai pour exemple l'exécution du décret qui défend l'usage de l'eneensoir dans les églises : eh bien, on y a ajouté une peine de, 30 livres d'amende contre quiconque dans l'église oserait user de l'encensoir soit envers un laïque, soit envers un ecclésiastique, de manière qu'il ffie paraît nécessaire d'ajouter au premier article ces mots : « Sans qu'il soit permis aux directoires des dé-« parlements de rien ajouter à leurs arrêtés qui « puisse leur donner force de loi. »
Je crois que la disposition présentée par M. Durand-Maillane est en soi fort sage; mais je crois qu'elle appartient à cette partie des règlements qui vous, seront proposés prr le comité de Constitution sur la promulgation des lois. J'en demande le renvoi à ce'moment.
Je demande que la motion de M. Durand-Maillane soit renvoyée au comité pour qu'il rapporte un nouvel article.
(L'Assemblée renvoie au comité de Constitution la motion de^M. Durand-Maillane.)
rapporteur, donne lecture de l'article 1er amendé :
Art. 1er.
« Les actes des directoires ou conseils de district ou de département, ne pourront être intitulés ni décrets, ni ordonnances, ni règlements, ni proclamations. Ils porteront le nom d'arrêtés. » (Adopté.)
rapporteur, donne lecture de l'article 2 du projet de décret.
S'il arrivait qu'un directoire de département vînt à prendre un arrêté contraire à toutes les lois, le directoire dé département serait suspendu, puis on introduirait contre lui une procédure criminelle; et moi qui aurais lutté contre la rébellion de mes confrères, obligé de signer, n'ayant aucun moyen de constater mon refus, je subirais la suspension et la procédure criminelle; car les membres réfractaires pourraient se réunir pour me perdre et soutenir que j'ai été du même avis qu'eux. Comment prouve-rais-je le contraire?
Je demande, si vous persistez dans l'article, que le secrétaire greffier tienne note, sur une feuille séparée, de l'avis de chacun et qu'il n'en puisse être délivré expédition qu'à ceux qui ont exigé procès-verbal dé leur refus.
M. Bobespierre. J'appuie l'amendement du préopinant : l'article est immoral d'une part et impossible de l'autre, parce que la loi n'a pas un moyen dang ses mains pour forcer un homme à mettre son nom au tas d'un avis auquel il se soumet, parce qu'il doit se soumettre à la majorité, mais qu'il regarde en son âme et conscience comme essentiellement injuste. .
En conséquence, je demande qu'on retranche de l'article la disposition qui tend à forcer tous les membres sans distinction à signer les arrêtés.
Je maintiens qne le projet du comité est contraire à tous les principes. En effet, je suppose qu'un conseil de département refuse non-seulement de reconnaître l'autorité supérieure, mais lève des troupes pour s'opposer à la volonté du Corps législatif; il est évident qu'il aurait encouru lu peine de forfaiture. Or, voudriez-vous dans ce cas faire juger et punir les innocents comme les coupables? Il n'y a qu'un seul moyen, c'est que la délibération soit signée par tous les membres présents, et que, si quelques-uns refusent, il en soit fait mention.
Celui qui s'est opposé à une déJibératioh évidemment contraire aux lois ne aoit pas être obligé de la signer, parce que vous lui enlèveriez le moyen de se défendre et de prouver qu'il n'est pas coupable; mais il est Un autre inconvénient qu'il faut aussi chercher à éviter ; c'est que quelquefois dans des délibérations qui ne seraient m coupables, ni criminelles, mais o(l quelqu'un des membres du directoire ou du conseil, par entêtement, ne voudrait pas signer, si le refus de signer fait par plusieurs membres était connu du public, l'exécution des délibérations pourfaît être compromise, tandis que le public ne doit pas en être le juge.
Je ne vois qu'un expédient pour éviter ces deux inconvénients, c'est que ceux qui ne sont pas d'avis de la délibération, aient la faculté de ne point la signer ; et que 1 expédition de cette délibération ne porte jamais que la signature du président et pelle du secrétaire greffier, sans
jamais faire mention de ceux qui ont signé ou qui n'ont pas signé, atin que le public ne connaisse pas, dans des cas souvent fort indifférents, qu'un tel membre n'a pas voulu signer, et afin qu'il n'en résulte pas de prétextes pour l'inexécution de l'arrêté.
(L'amendement de M. Tronchet est décrété.)
, rapporteur. On pourrait, en conséquence, rédiger l'article comme suit :
Art. 2.
« La minute de chaque arrêté exprimera le nombre des délibérants; ceux qui n'auront point été de l'avis de l'arrêté pourront ne pas le signer. L'expédition en sera faite sous la signature du président et du secrétaire greffier, sans qu'il soit fait mention des autres signatures. » (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture des articles 3, 4 et 5 qui sont ainsi conçus :
Art. 3.
« Les conseils de département et de district, après avoir procédé à l'élection du directoire, nommeront, les premiers, 4 membres ; les seconds, 2 membres du conseil, lesquels remplaceront au directoire ceux dont les places deviendraient vacantes par mort, démission ou autrement. » (Adopté.)
Art. 4.
« Les membres des conseils de district ou de département, dont les places deviendront vacantes par mort, démission ou autrement, ne seront remplacés qu'à l'époque des élections ordinaires, » (Adopté.)
Art. 5.
« Le président d'une administration de district ou de département aura voix délibérative au directoire; il ne présidera point l'assemblée du conseil, lors de la reddition des comptes. » (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 6 du projet de décret.
Je crois que cet article a une très grande importance; il porte que les membres des administrations de département ou de district pourront être continués par une nouvelle élection. Je demande qu'il y ait un intervalle avant cette réélection.
L'Assemblée nationale a déjà statué que les corps administratifs seraient renouvelés par moitié; or,le renouvellement par moitié est absolument incompatible avec la faculté de réélire. Si, au lieu d'être renouvelé par moitié, les administrateurs peuvent être réélus, qu'en résultera-t-il? C'est qu'il y aura toujours dans les corps administratifs une majorité contre les nouveaux membres, de telle manière que l'esprit des corps se continuera, qu'un despotisme absolu pourra s'établir et par là altérer d'une part les droits du citoyen et donner de l'autre une telle force à ce corps, qu'ils pourraient peut-être lutter avec avantage contre le Corps législatif.
Il est vrai que vous avez établi que les procureurs syndics pourraient être élus deux rois de suite; mais la place de procureur syndic exige d'éminentes lumières; l'administration, au contraire, ne présente pas les mêmes difficultés. D'ailleurs, en excluant de la réélection, vous ne
privez pas, par là, le peuple des secours des hommes éclairés ; rien n'empêche qué celui qui sortira du département ne soit élu dans le district, et que celui qui sortira du district ne soit élu dans le département, dans la législature ; mais il ne doit pas rester dans le même corps.
L'administration, Messieurs, ne ressemble pas à la magistrature; c'est en quelque sorte Une charge imposée à chaque citoyen; chacun doit y passer à son tour. C'est la gestion de la chose publique dont on s'occupe, après s'être occupé de la sienne et d'après l'expérience et les circonstances de la vie.
Je crois donc qu'il est important qu'aucun citoyen ne puisse être réélu deux fois de suite dans les mêmes corps administratifs et que la réélection ne puisse être permise qu'après un intervalle de deux années. (Applaudissements.)
(Cet amendement est adopté.)
, rapporteur. Voici comment l'article serait rédigé :
Art. 6.
« Les membres des administrations de département ou de district ne pourront être réélus qu'après un intervalle de deux années. » (Adopté.)
, rapporteur, fait lecture de l'article 7.
Je propose par amendement que, en cas de vacance, le commissaire désigné pour faire les fonctions de procureur général syndic ou de procureur syndic, puisse être pris non seulement dans le directoire, mais même dans le conseil.
(Cet amendement est adopté.)
, rapporteur. L'article peut être en conséquence rédigé comme suit :
Art. 7.
« Si la place de procureur général syndic ou de procureur syndic devient vacante par mort ou démission, le directoire de département ou de district nommera, dans son sein ou dans le conseil, un commissaire qui fera les fonctions de procureur général syndic ou de procureur syn* die, jusqu'à l'époque du rassemblement des électeurs. » (Adopté.)
, rapporteur, fait lectuie de l'article 8.
L'article 8 porte que tout corps administratif qui publiera ou fera circuler des arrêtés ou des lettres provoquant ou fomentant la résistance à l'exécution des délibérations ou ordres émanés des autorités supérieures, sera suspendu de ses fonctions et, en cas de récidive, destitué. Remarquez combien ces expressions sont vagues et combien elles laissent à l'arbitraire. Cet article n'établit aucune gradation dans les peines, quoique le délit puisse être plus ou moins grave.
Il faut, Messieursl particulariser les délits et ne pas infliger arbitrairement une peine aussi sévère que celle de suspendre à l'instant un corps administratif, soit pour une lettre écrite, Soit pour upe délibération prise. Il est des délibérations, il est des lettres qui, quoique dans le sens de l'article, pourraient êlre telles qu'elles ne mériteraient pas une peine aussi grave que celle de la suspension.
Je demande donc que votre comité s'explique netlement, textuellement.
rapporteur. Nous avons déjà vu des exemples de ces lettres circulaires envoyées par des administrations. Les expressions aue nous employons sont adoptées dans toutes les ordonnances. Il est facile devoir si une lettre circulaire contient une provocation contre les lois; et il est aisé devoir que ceux qui favoriseraient la circulation de pareilles lettres fomenteraient la résistance aux lois : voilà tout ce que nous avons voulu exprimer dans l'article.
11 faut établir une subordination, sans laquelle l'anarchie est inévitable.
Il n'est pas un seul terme dans l'article qui ne présente des idées vagues, qui seront interprétées par chacun à sa manière et qui toutes dépendront du caractère ou des préventions de ce ix qui prononceront; il est évident que cet article ouvrira la porte à l'arbitraire.
Et voulez-vous, Messieurs, apercevoir tout le danger de Partie le? Le voici. Portez vos regards sur la gravité de la peine applicable aux corps administratifs nommés parle peuple, la suspension, et sur l'autorité qui, dans le projet du comité, doit prononcer cette peine. Un article subséquent porte que c'est le roi qui aura le droit rie suspendre les administrateurs qu'il jugera avoir contrevenu aux lois.
Ainsi, Messieurs, vous voyez que ce sera le ministre qui sera juge, en vertu de ces termes vagues de la loi. Et dans quel cas? Lorsqu'un corps administratif aura écrit à d'autres corps administratifs pour provoquer ou fomenter la résistance aux ordres supérieurs, et le dernier échelon de cette administration supérieure, c'est le ministre. Rien n'est plus contraire à la liberté.
Combien il lui sera facile de dire qu'une lettre provoque, fomente la résistance aux ordres supérieurs, è'èst-à-dire aux ordres du ministre! Peut-on faire une loi plus arbitraire? Et peut-on la faire appliquer plus arbitrairement que par un ministre qui, pour suspendre une administration, n'aura qu'à se plaindre qu'on fomente la résistance contre ses ordres? L'objet de cet article est d'empêcher même un corps administratif, lorsqu'un ministre violera la Constitution, d'en avertir les autres corps administratifs, de les consulter.
Je demande la question préalable sur l'article du comité.
, l'aîné, demande l'adoption de l'article tel qu'il est proposé par le comité.
Je crois que l'administrateur qui commet le crime de provoquer la résista ce aux lois doit être non pas arbitrairement suspendu, mais poursuivi et jugé. Il est évident que, dans cet article, tous les cas ne sont pas prévus. Je ne puis proposer aucune disposition, parce que je n'ai pas eu le temps de réfléchir. Je demande l'ajournement.
Plus la forme d'un gouvernement est populaire, plus il faut que ceux qui sont chargés des fonctions publiques soient liés par des lois sévères, soient retenus parle frein de la subordination, si vous ne voulez pas qu'ils finissent par opprimer le peuple qui les a élus et
par devenir des despotes. Or, Messieurs, je vous demande à présent si vous pouvez tolérer, sou3 quelque prétexte que ce soit, que les corps administratifs se coalisent entre eux pour résister aux autorités supérieures. Si vous admettiez ce principe, le Corps législatif ne serait plus rien; ies corps administratifs seraient tout; et vous auriez l'anarchie la plus complète, c'est-à-dire ou des mouvements populaires ou l'aristocratie des corps administratifs.
Il fa- t qu'une sage gradation de pouvoirs donne aux différentes administrations une influence les unes sur les autres, depuis les municipalités jusqu'au Corps légis'atif; et il ne faut pas, pour effrayer les amis de la liberté, présenter les inconvénients d'une dépendance absolue des corps administratifs à l'autorité des ministres.
M. Robespierre vous a présenté le pouvoir exé-( cutif comme le dernier échelon. Point du tout : le dernier échelon, c'est le Corps législatif, qui est le timon de l'administration, qui régit tout, puisqu'il fait les lois; et le pouvoir exécutif lui-même est subordonné au pouvoir législatif. (Murmures..)
Non pas dans le projet.
, rapporteur. Pardonnez-moi, Monsieur, dans ce projet-là même; et je crois qu'il est important de le déclarer publiquement, attendu qu'on a dit hier le contraire.
Quel est le gouvernement qui subsisterait sans subordination, sans l'obéissance provisoire? Tout corps administratif qui n'obéit pas aux ordres supérieurs est coupable. Conserver au peuple l'influence qu'il doit avoir et qu'il exerce par la nomination de ses officiers et par le droit de pétition; mais l'obéissance provisoire sera toujours d'une nécessité rigour use; et cette obéissance n'existera pas si vous ne prenez des mesures sévères pour prévenir les coalitions. Je finis par rappeler que le ministre n'exercera d'autorité sur les corps administratifs que pour sa responsabilité.
Je proposerai toutefois deux modifications. La première consiste à retrancher de l'article le mot fomentant, parce que le mot provoquant dit tout. Je demande ensuite que l'on supprime ces derniers mots : et, en cas de récidive destitué de ses fonctions, parce que je ne regarde cet article que. comme destiné à maintenir provisoirement l'autorité, attendu que, la suspension prononcée, le corps administratif a droit de se pourvoir devant le Corps législatif.
Je propose de remplacer dans l'article le mot fomentant par celui-ci : appuyant.
Je crois tous les changements inutiles et j'appuie l'article du comité.
(L'Assemblée adopte l'amendement de M. d'André.)
, rapporteur. D'après ce vote, je propose de rédiger ainsi l'article :
Art. 8.
« Tout corps administratif ou municipal qui publiera ou fera parvenir à d'autres administrations ou municipalités, des arrêtés ou lettres provoquant la résistance à l'exécution des délibérations ou ordres émanés des autorités supérieures, pourra être suspendu de ses fonctions. » (Adopté.)
(La suite de la discussion est renvoyée à la séance de demain.)
, secrétaire, fait lecture de deux lettres adressées à M. le Président de l'Assemblée, l'une par M. Delessart, ministre de^ l'intérieur , l'autre, par les commissaires de la Côte-d'Or, et relatives à l'arrestation de Mesdames à Arnay-le-Duc.
Ces lettres sont ainsi conçues :
Lettre du ministre de l'intérieur.
« Monsieur le Président,
« Mesdames ayant obtenu la liberté d'envoyer une personne de leur suite à Paris, cette même personne a remis une lettre écrite à l'Assemblée nationale par les commissaires du département de la Côte-d'Or, qui se sont transportés à Arnay-le-Duc.
« J'ai en conséquence l'honneur, Monsieur le Président, de vous transmettre cette lettre dont j'ignore le contenu. Mais,suivant ce que me mandent les commissaires, elle doit présenter des détails dignes de fixer l'attention de l'Assemblée nationale.
« Je suis avec respect, etc...
« Signé : ÛELESSART. »
Lettre des commissaires de la Côte-d'Or.
« Monsieur le Président,
« Mesdames, tantes du roi, nous ont permis de profiter d'un courrier qu'elles expédient à Sa Majesté, et nous nous empressons de vous rendre compte de ce qui vient de se passer en cette vil e, et de la conduite que nous avons tenue dans les circonstances difficiles dont nous avons été témoins.
Hier, vers les 7 heures du soir, le directoire du dépariement reçut avis par une lettre de M. Narbonne, apportée par un courrier extraordinaire, que Mesdames étaient encore retenues en cette ville et que les consignes étaient portées au point de gêner leur service et leur correspondance. Le directoire arrêta sur-le-champ que deux de ses membres se rendraient à Arnay-le-Duc en qualité de commissaires chargés de procurer, par tous les moyens possibles, l'exécution de la loi du 24 février dernier, de faire toutes réquisitions nécessaires et d'accompagner Mesdames jusqu'aux limites du déparlement, si elles le jugeaient à propos. Nous partîmes à l'heure même que cette commission nous fut remise, et, arrivés à 4 heures du matin à Arnay-le-Duc, nous ne perdîmes pas un instant pour faire avertir MM. les administrateurs du district et MM. les officiers municipaux.
« Le directoire du district assemblé, nous nous y présentâmes, et il fut délibéré, sur la proposi-lion que nous en fîmes, qu'après avoir enregis-t:é la commission dont nous étions porteurs, nous nous transporterions en la maison commune pour, avec Messieurs du district et la municipalité qui y étaient déjà assemblés, concerter les moyens les (lus prompts et les plus efficaces pour procurer la pleine exécution de la loi du 24 février dernier. La municipali é annonça les mêmes dispositions que le district, elle proposa seulement d'appeler les notables,qui, par la réunion de leurs voix, fortifièrent les espérances que j
nous commencions à concevoir du succès de notre mission, en nous donnant plus de moyens encore pour influer sur la détermination des citoyens à l'obéissance. Il y avait pour lors dans cette ville plusieurs détachements de gardes nationales de Dijon, Beaune, Autun, Semur et des villages circonvoisins. 11 f it convenu d'inviter tous les commandants et officiers de se rendre à la maison commune. 11 leur fut f;iit lecture de l'arrêté du département, du prorès-verbal, qui venait d'être dressé, et ils manifestèrent tous hautement la résolution d'obéir à la loi et de déférer aux réquisitions qui leur seraient faites.
« Nous venions à peine de signer cette réquisition, lorsque nous fûmes avertis, de la part de Mesdames, de nous rendre auprès d'elles ; nous leur rendîmes compte de ce qui venait d'être réglé, et elles nous parurent disposées à reprendre leur route le jour même. En retournant à la maison commune, nous ne tardâmes pas à nous apercevoir que nous ne devions pas compter sur l'unité d'action des pardes nationales, sous les ordres de leurs chefs. Nous fûmes environnés d'un grand nombre de ces gardes, qui paraissaient douter que le roi eût manifesté sa volonté postérieurement à la sanction qu'il avait donnée au décret du 24 février, qui insistaient principalement sur ce que, la commune ayant envoyé deux députés à Paris, il n'était pas possible de ne pas attendre leur retour; enfin, que l'on avait lieu de croire que l'Assemblée nationale était encore occupée du même objet, ou que Sa Majesté prendrait en considération les alarmes que l'on concevait dans toute la France du projet de Mesdames de sortir du royaume.
« Une partie de ces gardes nationales, accom-pagnéesd'un petit nombre de citoyens, nous suivirent en la maison commune et répétèrent les mêmes discours avec ta .t de persévérance que nous jugeâmes de notre devoir de faire connaître à Mesdames cette disposition des esprits. Nous leur fîmes part en même lemps du désir que quel-ques-uns avaient témoigné qu'elles voulussent bien prendre leur route par Dijon. En effet, il s'était formé une députation de quelques-uns des officiers de ces détachements, pour se rendre auprès d'elles et leur en faire la demande. Mesdames y consentirent, elles eurent même l'attention d'ajouter que les commissaires du département les accompagneraient dans cette marche. Alors il s'éleva plusieurs voix qui demandèrent que Mesdames fussent encore accompagnées des gardes nationales, et elles eurent la bonté d'entrer dans tous les arrangements qui pouvaient faciliter ce projet, en leur laissant partie des chevaux destinés à leurs équipages.
« Lorsque nous eûmes quitté Mesdames pour retourner à la maison commune, uous remarquâmes cette fois une bien plus grande agitation dans le peuple, qui formait des groupes multipliés et parmi lesquels on distinguait un assez grand nombre de gardes nationales des villages voisins. Arrivés à la maison commune, nous entendîmes sonner une assemblée, sans qu'il n'y eût aucun ordre ni permission du corps municipal; nous y vîmes entrer un tambour qui se dérobait aux instances que l'on lui faisait de battre la générale, et peu de temps après il s'y présenta plusieurs citoyens, quelques-uns même en uniforme et portant leurs armes blanchi s, dont les discours annonçaient la fermentation la plus inquiétante. En toute autre occasion, secondés, comme nous l'étions, des administrateurs du district, des officiers municipaux et
des commandants des détachements, nous n'aurions pas hésité de prendre les mesures rigoureuses dont la loi nous fait un devoir dans ces circonstances difficiles; mais il fallait, avant tout, pourvoir à ce qu'exigeait de nous la présence de Mesdames à Arnay-le-Duc, et quoique tous, sans exception, jusque dans leurs discours les plus animés, n'eussent cessé de manifester la résolution de conserver à Mesdames la sûreté, la tranquillité et les témoignages de respect et d'amour pour toutes les personnes de la famille royale, il ne nous était pas permis d'oublier un instant ce que Mesdames nous avaient recommandé, en nous exprimant leurs craintes, que cet événement ne pût causer aucun trouble et occasionner la moindre effusion de sang.
Il ne nous restait alors qu'un parti, c'était d'obtenir de la bonté même de Mesdames de nous autoriser àannonçer qu'elles voulaientbien encore suspendre leur départ; elles daignèrent y consentirent sur nos instan tes prières et celles de Messieurs du district et delà municipalité. Cette nouvelle fut accueillie avec transport et portée si rapidement dans toute la ville, que l'assemblée qui avait été sonnée, que l'on continuait encore de sonner, se trouva dissoute avant que d'avoir été formée, et les citoyens ne songèrent plus à se réunir que pour se livrer à la joie.
« Tel est, Monsieur le Président, le récit de ce qui vient de se passer, aussi circonstancié que le permet le peu de temps qui nous reste pour en rendre compte à l'Assemblée nationale. Nous venons d'eu donner avis au directoire du département, et nous sommes déterminés à ne quitter Arnay-le-Duc que lorsque notre commission sera remplie. Nous vous prions de prendre en considération là situation pénible et inquiétante où nous nous trouvons, et dont nous informons par le eourier le ministre de Sa Majesté.
« Nous sommes avec respect, Monsieur le Prési* dent, les commissaires du département de la Côte-d'Or.
« Signé ; A. Hernoux; L.-B. Guyton, procureur général syndic. »
'Mesgieurg, je dois ajouter aux renseignements contenus dans cette lettre que depuis cette époque la municipalité d'Arnay-le-Duca envoyé ici une députation qui s'est présentée dans la matinée, chez le ministre de Pin-térieur.
Ces députés n'avaient pas d'autre mission que d'informer le roi des mesures prises par la corn* mune et de s'assurer des dernières intentions du roi; aussitôt qu'ils les ont sues, ils ont fait partir un courrier qui doit être arrivé maintenant, et sans doute que Mesdames continuent à cette heure leur voyage.
lève la séance à trois heures.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAIUES.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
, secrétaire, fait lecture d'une adresse de la commune de Sémrme, qui s'empresse d'offrir à l'Assemblée nationale l'hommage de la gratitude la plus vive et la plus respectueuse au sujet de la suppression des aides.
Il y est dit : » Il
est donc entièrement supprimé, ce régime « oppresseur qui n'a que trop longtemps désolé « la France. L*esprit des finances et l'esprit de « chicane ne se coaliseront plus pour assurer la « ruine des familles. On ne verra plus des hommes « vertueux, victimes des combinaisons* perfides, « verser des larmes de sang, obligés d'abandon-« ner leurs femmes et leurs enfants pour se sous-« traire aux horreurs des prisons.
« Elles sont rompues, ces chaînes financières « forgées par le despotisme et dont le poids tri-i plait parla dureté et par le crime des traitants. « Le Français ne rougira plus des fortunes scan-( daleuseset du luxe de ces vampires public» dont « l'existence était le plus horrible fléau de l'em-« pire. L'abolition des droits d'aides et celle d'en-« trées des villes sont deux bienfaits nouveaux dont le souvenir sera éternel.
« Il est impossible de vous peindre avec assez - d'expression l'allégresse des citoyens qui ha-« bitent dans les murs de cette ville; elle est « devenue bien plus vive encore, par l'idéejuste de l'ivresse du plaisir de leurs frères de Paris.
« Ils voient avec transport que la capitale sera « enfin indemnisée des sacrifices qu'elle a faits avec: « tant de générosité, et qu'elle ne tardera pas à « reprendre toute sa splendeur.
« Qu'il fut grand et qu'il se montra digne de « représenter cette vaste cité, l'orateur qui repoussa « l'outrage fait à la nation , qui rappela le courage « des Parisiens dans cette insurrection heureuse « qui a sauvé la patrie, et qui se porta garant de « leur soumission et de leur désobéissance aux « lois. Voilà le plus bel éloge des sentiments des « vrais conquérants de la liberté... Législateurs « suprêmes, continuez vos travaux immortels, « achevez l'édifice majestueux de la plus sainte « Constitution; ne craignez pas les ennemis inté-« rieurs, le patriotisme est armé et veille* Ne « redoutez pas davantage les ennemis du dehors; * une nation qui a brisé ses chaînes et qui sent « le prix de sa liberté, est invincible.
« Les Sézannois vous jurent amour, dévoue-« ment et fidélité; ils vous supplient, âu nom de « l'intérêt public, de faire reviser tous les comptes « des anciens régisseurs et fermiers ; et ils espèrent « que les propriétés dont ils s'enorgueillissent, a rentreront bientôt dans la classe des biens natio-f naux. »
, secrétaire, fait ensuite lecture d'une adresse de la société des amis de la Constitutioni, séant aux Jacobins, à Carcassonne, contenant le procès-verbal d une de ses séances, dans laquelle tous les membres de la société et tous les spectateurs ont iuré de défendre, au péril de leur fortune et de leur vie, tout citoyen qui aurait le courage de se dévouer à la dénonciation des traîtres à la patrie et des conspirateurs contre la liberté.
Plusieurs membres à droite disent que cette résolution n'a pu être inspirée que par le club des Jacobins de Paris ou par la lettre imprimée du président de cette société.
, secrétaire. C'est une erreur. Ce serment a été prêté à d'oceasipp. d'un assassinat
commis sur la personne de M. Blanc, prêtre, qui, huit jours après avoir prêté le serment civique exige par le décret du 27 novembre dernier, fut attaque à sept heures du soir et reçut deux coups dé bâton et cinq coups de couteau; ce prêtre a échappé au fer de ses meurtriers, et on espèrj que ses blessures ne seront pas mortelles.
, secrétaire, fait ensuite lecture des adresses suivantes :
Adresse du directoire du district de Laon, qui demande des secours particuliers en faveur des pauvres honteux de son territoire;
Adresse de la société de3 amis de la Constitution, établie à Cherbourg, qui fait des observations sur les mesures importantes qu'il s'agit do prendre contre les ennemis de la Constitution;
Procès-verbal de prestatioti de serment civique faite par le curé de Saint-Martin de Longju-meau, dans le département de Seine-et-Oise;^
Adresse de la société des amis de la Constitution de Clermont-Ferrand, séant aux Carmes, qui expose que les émigrations dans l'intérieur de la France sont tellement multipliées qu'elles annoncent Je projet certain d'une contre-révo-lution ; elle sollicite toute l'animadversion de l'Assemblée contre les émigrants ;
Discours prononcé par M. le curé de Montéli-mar, le 30 janvier 1791, après avoir prêté, le matin, le sermént ordonné par le décret du27no-vembre 1790 î « Qu'ils osent, dit-il, se produire « ceux qui voudraient nous faire un crjme de « noire fidélité à la nation, à la loi et au roi, de « notre attachement inviolable et respectueux « aux décrets émanés du pouvoir législatif et « revêtus de la sanction de notre auguste mo-« narque; qu'ils se montrent ces censeurs non « moins injustes que peu éclairés, et je leur « dirai : A-t-on jamais pensé faire un crime aUx « évêques du serment qu'ils prêtaient entre le s mains du roi d'être fidèles à sa personne et « d'être soumis aux lois du royaume? Serment «sans lequel leur nomiuation eût été nulle et « sans lequel ils n'auraient pu exercer aucune « fonction de l'épiscopat ! Et ta nation qui vient c de recouvrer ses droits, la nation en qui ré-« side la souveraineté suprême ne sera pas fon-« dée à exiger le même seraient et la même « fidélité de tous ceux qui sont élevés aux di-« gnités ecclésiastiques ! Et ce serment ne pourra « pas se produire au dehors, sans être exposé à « Ja censure et au blâme ! Y eût-il jamais incon-« séquence plus absurde? »
M. Aubert, député de la ci-devant assemblée coloniale à Saint-Domingue, demande un congé pour s'en retourner dans cette colonie ; cette demande est appuyée par le comité colonial.
, député de la Meurthe, demande également un congé.
(Ces congés sont accordés.)
, au nom du comité ecclésiastique, présente un projet de décret concernant la nouvelle circonscription des paroisses de la ville et des faubourgs de Bordeaux. Ce projet de décret est ainsi conçu : « L Assemblée nationale, sur le compte rendu par son comité ecclésiastique, des procès-ver-baux du directoirede district de Bordeaux, du 22 février dernier, et du directoire du département de la Gironde, du 26 du môme mois, concernant la réduction et circonscription des pa-
roisses de la ville et des faubourgs de Bordeaux, arrêtés en l'absence de l'évêque dûment requis d'y assister et Concourir, par sommation du 12 février dernier; enfin, du tableau de la formation proposée et de là carte figurée desdites paroisses, annexée auxdits procès-verbaux, décrète ce qui suit :
Art. 1er.
« Il y aura 10 paroisses dans la ville et les faubourgs de Bordeaux, savoir :
« 1° La paroisse cathédrale et métropolitaine dë Saint-André. « 2° Sainte-Eulalie. « 3° Sainte-Croix. « 4° Saint-Michel. « 5° Saint-Paul. « 6° Saint-Pierre. « 7° Saint-Dominique. « 8° Saint-Seurin. « 9° Saint-Louis.
« 10° Et Saint-Martial de Bacalan.
Art. 2.
« Lesdites paroisses seront desservies dans les églises indiquées auxdits procès-verbaux, tableau et carte figurative, qui resteront déposés aux archives de l'Assemblée nationale.
Art. 3.
« Elles seront limitées ainsi qu'il est exprimé auxdits procès-verbaux, tableau et carte figurative.
Art. 4.
« Les autres paroisses de la ville et des faubourgs de Bordeaux sont supprimées.
Art. 5.
« L'église de Saint-NicoIas-des-Grâves sera conservée coïnme oratoire et chapelle de secours de la paroisse deSaihte-Eulalie ; le curé de cette paroisse enverra un de ses vicaires dans ladite chapelle, les jours de fête et de dimanche, pour y célébrer la messe et faire les instructions au peuple. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité militaire. Messieurs, le 15 du mois dernier, vous avez décrété que les colonels et lieutenants-colo" nels en activité de service, les premiers qui auraient dix ans elles seconds douze ans de commission dans leur emploi, seront susceptibles de se retirer avec la retraite affectée dans vos décrets aux emplois qu'ils occupent et le brevet de maréchal de camp.
Une réclamation est arrivée au comité militaire; les colonels et lieutenants-colonels susceptibles de remplacement par vos décrets, ont représenté qu'étant dans la même position que les Jieute-nants-colonels effectifs ; que n'ayant au-dessus d'eux que le malheur, quin'a pas dépendu d'eux, d'être réformés, et la privation des traitements, ils ne devaient pas souffrir encore de la faveur accordée par le décret du 15 février dernier. En conséquence, ils ont réclamé le droit de se retirer avec le brevet de maréchal de camp, conformément à vos décrets. D'après ces considérations le comité m'a chargé de vous présenter le décret suivant : h L'Assemblée nationale décrète : « Les colonels et lieutenants-colonels qui, par les décrets concernant l'organisatipn de rarmée,
sont susceptibles de remplacement, seront, quant aux dispositions du décret du 15 février 1791, assimilés aux colonels et lieutenant-colonels en activité effective, et pourront en conséquence, et aux conditions prescrites par ledit décret, obtenir le brevet de maréchal de camp. »
On craint que quelques jours après que ces messieurs auront connu le décret, ils demandent non pas d'être maréchaux de camp, mais le traitement d'activité, et on vous prie de rédiger ledécietde telle manière qu'il n'y ait pas d'inquiétude à cet égard, et que ceux que vous appelez au grade de maréchal de camp, par assimilation à ceux qui y sont déjà appelés par un décret, ne soient pas en droit d'être réputés en activité et d'obtenir un traitement.
Je vais vous expliquer l'idée de votre comité. On a dit : il y a des lieutenants-colonels et des colonels qui, par le décret sur l'avancement, ont conservé le droit d'être remplacés, c'est-à-dire qui, l'année prochaine, dans deux ans, seront par le droit remplacés, colonels on lieutenants-colonels. On a regardé qu'ils étaient en activité, puisque demain ils pouvaient y être appelés par le décret que vous avez fait sur l'avancement militaire. On a même ajouté que s'ils se retiraient dans le moment, ils n'encombreraient pas la marche de ceux qui sont dansla ligne ; que de plus ils emporteraient moins de retraite en se retirant maintenant, si toutefois ils en sont susceptibles, qu'ils n'en emporteraient dans cinq ou six ans.
On a donc voulu donner aux lieutenants-colonels et colonels qui ont droit au remplacement le même droit de se retirer avec le grade de maréchal de camp. Mais ceci ne fait pas le moindre changement dans les dépenses, au contraire cela ne tend qu'à diminuer la dépense des retraites. Mon opinion particulière, lorsque je m'y suis opposé, était que l'on devrait mettre .|uelque différence et accorder de la faveur aux colonels commandants et aux lieutenants-colonels qui sont en activité, plutôt qu'à des colonels attachés.
La demande de ceux qui ont fait la pétition est juste; ils abandonnent une partie de leur traitement pour avoir l'avantage de retourner chez eux avec un habit brodé : Voilà tout. (Rires.)
Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix !
(Le projet de décret du comité militaire est adopté.)
L'ordre du jour est un rapport du comité des finances et de mendicité réunis, sur un plan de tontine viagère et d'amortissement proposé par le sieur Lafarge.
, rapporteur. Messieurs, j'ai eu l'honneur de vous présenter, le 30 octobre dernier, un projet de tontine viagère et d'amortissement, proposé par le sieur Lafarge (1). Vous avez honoré ce projet d'une attention toute particulière, et vous l'avez distingué de tous ceux dont le public est inondé.
Il s'agissait de la création d'actions de 90 livres payables en 10 ans, à
raison de 9 livres par an.
Chaque actionnaire aurait eu la faculté de payer, dès la première année, les 90 livres, prix de l'action. Le terme de la jouissance aurait été, dans ce cas, rapproché pour ces derniers.
Cette analyse rapide suffit, sans doute, Messieurs, pour vous rappeler ce projet distribué, dans le temps, à l'Assemblée; vous avez paru frappés de deux avantages précieux qu'il offrait, même dans l'état d'imperfection où il était encore à cette époque.
Le malheureux trouvait, dans un léger sacrifice de 6 deniers par jour, des ressources pour l'âge des besoins et des infirmités, celui de la vieillesse.
Le gouvernement lui-même pouvait trouver, dans le succès de ce plan, des bénéfices très considérables.
Cette double considération vous a déterminés à renvoyer l'examen du projet à vo3 deux comités de mendicité et de finances, et vous avez désiré que l'académie des sciences fût consultée sur la partie des calculs.
Cette compagnie savante a donné son avis; les calculs ont été trouvés exacts; elle a même applaudi aux vues de l'auteur. Elle a adopté les bases, mais elle a censuré quelques objets de détails.
Des commissaires ont été nommés par vos comités; ils ont rectifié le projet dans les parties qui avaient été justement critiquées; mais ils se sont convaincus que les bases que nous vous avons retracées en commençant devaient être conservées; la modicité de la mise est précieuse pour que le pauvre puisse y atteindre. L'emploi du prix des actions, en remboursements de contrats, a le double avantage d'être utile aux finances de l'Etat et d'offrir aux actionnaires une garantie sûre et durable; le travail de ces commissaires a été soumis ensuite à leurs comités respectifs, et c'est, Messieurs, le résultat de cet examen réfléchi, médité et discuté pendant plusieurs séances, que je suis chargé de vous présenter aujourd'hui.
La tontine viagère et d'amortissement du sieur Lafarge, amendée par lui-même et rectifiée par vos deux comités, offre le double moyen d'exercer la bienfaisance envers les malheureux, de ménager aux pauvres, moyennant un sacrifice insensible, des ressources précieuses pour la vieillesse, et peut amener, sans crise et sans surcharger les peuples, l'extinction d'une partie foit importante de la dette publique.
Moyennant 9 livres par an, ou 6 deniers pàr jour, que l'homme riche sacrifiera aisément pour ceux qui l'entourent, que l'ouvrier prélèvera volontiers sur le prix d'une journée, on aura droit,
au bout de 10 ans à la pension viagère de 45 livres par action. Tous les actionnaires, à la vérité, ne seront pas favorisés à cette époque; mais après des calculs arithmétiques, et ceux de probabilités de ia vie scrupuleusement faits, 15 an3 s'écouleront à peine, sans la réalité de cette jouissance promise; et lorsque tous les actionnaires seront arrivés par action à cette jouissance, la portion des morts accroissant progressivement aux survivants jusqu'au maximum de 3,000, ils auront encore trouvé, dans les rentes intermédiaires, les fruits abondants de cette économie si légère dans le principe.
Arrivés au maximum de 3,000, les rentes s'éteindront au prolit de l'Etat.
Mais celui-ci n'ayant payé aux actionnaires que le même intérêt qu'il payait à ses créanciers, il est constant que ce qui était à -perpétuité devient pour lui viager seulement, puisque l'intérêt qui n'avait pas de terme vis-à-vis des créanciers en aura vis-à-vis des actionnaires.
En dernière analyse et pour dernier résultat, la nation aura donc gagné tous les capitaux, puisqu'on aura converii en rentes viagères à 5 0/0 des capitaux exigibles, et qui produisaient 5 0/0 d'intérêt. Ces bases générales du plan sont évidemment avantageuses; vos comités les ont conservées; et ceux qui ont lu le projet distribué ces jours derniers, oui sûrement reconnu qu'elles étaient à l'abri de toute critique raisonnable : aussi les amendements de vos comités n'ont-ils porté que sur des objets de détails.
Le si' ur Lafarge, daus son premier plan, n'avait fait que deux classes d'actionnaires, savoir : la classe de ceux qui payaient sur-le-champ, et en une seule fois, les 90 livres, prix total de l'action; et la classe de ceux qui, profitant du délai des dix auuées, ne payeront que 9 livres par an.
Ces deux classes étaient composées indistinctement de tous les âges et, comme le remarquait fort bien l'académie, il était injuste de faire concourir la jeunesse avec la vieillesse, et présenter pour le vieillard, comme pour l'enfant, les mêmes chances, l'avantage n'était plus égal.
Nous sommes convenus avec ie sieur Lafarge qu'on ne recevrait le payement partiel de 9 livres par an, que de ceux qui seraient âgés de moins de 45 ans; et que ceux qui, parvenus à cet âge, voudraient en prendre sur leur tête, ne seraient reçus qu'autant qu'ils mettraient sur-le-champ la somme de 90 livres; que ces actionnaires composeraient une classe à part, n'ayant absolument rien de commun avec les autres, et dont le dixième jouirait, dès la seconde année, d'une rente viagère de 45 livres.
Cette pension viagère resterait à ce taux jusqu'à ce qu'il n'y eût plus qu'un dixième des actionnaires de cette classe existants; alors l'extinction tournerait au prolit des survivants et accroîtrait progressivement jusqu'au maximum de 3,000 livres.
Un second changement, non moins important que le premier, puisqu'il tend à multiplier les jouissances, en multipliant le nombre des favorisés, c'est la réduction que votre comité de mendicité, dont vous connaissez la tendre sollicitude pour les malheureux, a demandé comme intéressant ' singulièrement cette classe de citoyens si digne de votre intérêt.
Cette réduction consiste à porter toutes les rentes à 45 livres et, par conséquent, supprimer celle de 150 et 300 livres que promettait l'auteur; il est évident que, dans le premier pro-
jet, la portion de 10 se trouvait concentrée entre deux actionnaires seulement. N'est-ce pas un assez beau sort que celui de 45 livres pour 90 livres, lorsque surtout on marche progressivement au maximum de 3,000 livres, et que l'on jouit jusque-là de toutes les rentes intermédiaires ?
Ce moyen nouveau d'exercer la bienfaisance et d'éteindre la mendicité mérite les plus grands éloges; et sous le rapport de l'utilité démontrée pour l'indigence, et sous celui des bénéfices qu'il procure à l'Etat, il ne pe ut vous être indifférent sans doute. Nous avons pensé qu'il était de la justice de l'Assemblée, de lui donner les applaudissements qu'il mérite, et vos suffrages sont d'autant plus nécessaires ici, qu'ils concourront à un succès dont l'Etat recueillera les fruits les plus abondants. Voici les conditions auxquelles vos comités se sont déterminés à vous proposer d'adopter le plan du sieur Lafarge :
PLAN de la Tontine viagère et d'amortissement, proposé par le sieur Lafarge, rapporté à l'Assemblée nationale, le 30 octobre, par M. l'abbé Gouttes, et renvoyé à l'examen des comités de finances et de mendicité, par lesquels il a été rectifié, d'après l'avis de l'Académie des sciences.
« Art. 1er. Il sera créé des actions
viagères, dont le capital sera de 90 livres.
« Les fonds provenant du prix des actions seront employés, en totalité, au remboursement de contrats perpétuels dus par l'Etat, en commençant par les petits, qui seront préférés à ceux de somme? plus considérables.
« L'intérêt, dû par le gouvernement aux créanciers, sera dù, en conséquence de ces remboursements, à la société des actionnaires qui les aura effectués, et le Trésor public le lui payera aux époques d'échéance, comme il l'aurait payé aux créanciers Le directeur de l'établissement joindra ces intérêts au prix intégral des actions, pour les employer également, au furet à mesure qu'il les touchera, à des remboursements nouveaux.
« Art. 2. Cet établissement sera sous l'inspection et la surveillance du ministre des finances, et le sieur Lafarge eu sera le directeur, en fournissant une caution, en immeubles, d'un million.
« Le directeur est autorisé à percevoir 8 deniers pour livre, en sus du prix intégral de l'action, à la charge par lui de fournir à tous les frais de bureaux, établissement de commis, correspondance, établissement de receveurs dans les autres départements, enfin de faire toutes les dépenses de quelque nature qu'elles soient, sans pouvoir jamais réclamer aucune indemuité, sous quelque prétexte que ce puisse être.
« Art. 3. Le sieur Lafarge sera tenu de justifier, le 1er de chaque mois, et plus souvent, s'il en est requis, des remboursements au profit de l'Etat, au prorata, et dans la proportion exacte du prix des actions, et des Intérêts des capitaux remboursés. Les grosses des contrais et celles des transports seront remises par lui, au fur et à mesure de ces remboursements, aux commissaires, et il lui sera délivré par eux une reconnaissance de cette remise.
« Art. 4. Toutes personnes qui voudront avoir part à cette tontine viagère, en prenant des ac-" tions, soit sur leur tête, soit sur toute autre, seront tenues de ies prendre dans les six mois, pour la capitale, et dans un a:i, pour les autres
départements, du jour de la publication du décret qui autorisera la tontine; passé lequel temps, la société sera fermée et ne recevra pas d'actionnaires.
« Art. 5. Les 90 livres, prix total de chaque action, seront payables dans l'espace de dix ans, à raison de 9 livres par an.
« Geux qui laisseront courir l'année sans nourrir leurs actions perdront les mises partielles-et précédentes: elles profiteront à la société, ainsi que fts payements partiels de ceux qui viendraient à décéder avant le complément du prix de 90 livres.
« Art. 6. A l'expiration des 10 années, tous les contrats remboursés seront rapportés au Trésor public, et ils seront refondus en un seul et même titre, par lequel la nation s'obligera, envers les actionnaires, au payement de l'intérêt.
« La totalité des intérêts sera divisée en pensions viagères de 45 livres, lesquelles seront distribuées entre les actionnaires existants, par des tirages faits publiquement, et dans les mêmes formes que ceux qui se font à l'hôiel de ville.
« Chaque année, ceux des actionnaires existants, qui n'auraient pas été favorisés dans les années précédentes, participeront seuls aux tirages auxquels donnera lieu le décès de ceux qui étaient en jouissance, et cela jusqu'à ce que tous soient parvenus à ia rente de 45 livres par chaque action; au fur et à mesure de leur extinction, le produit accroîtra à toutes les autres existantes, jusqu'au maximum de 3,0U0 livres, et jamais au delà; arrivées à ce terme, les rentes n'accroîtront plus ; elles s'éteindront au profit de l'Etat.
« Art. 7. Les personnes âgées de 45 ans accomplis, qui voudront prendre part à cet établissement, en plaçant sur leur tête, ne le pourront faire qu'en payant, dès la première année, les 90 livres, prix intégral de l'action. Il sera fait de ceux-ci uue classe à part, qui restera distincte et séparée, jusqu'à son entière extinction; et dès l'année suivante, l'intérêt proveuant des capitaux remboursés par le produit du prix de leurs actions sera divisé en pensions viagères de 45 livres, lesquelles seront distribuées également, par la voie du sort, entre les actionnaires de cette classe seulement; de sorte qu'un, sur dix, jouira de cette rente dès cette seconde année.
« Lorsque tous jouiront de cette rente, par la succession des non favorisés à ceux qui jouissaient, la portion des morts accroîtra aux survivants, d'après les règles ci-dessus établies, dans une proportion égale, jusqu'à un maximum de 3,000 livres.
« A l'extinction de cette classe, si ies actionnaires des autres classes ne sont pas encore parvenus, par chaque action, au maximum de 3,000 livres, l'intérêt des capitaux, qui appartient à celle-ci, sera reversé sur la société entière; dans le cas contraire, il s'éteindra au profit de l'Etat.
« Art. 8. Pourront aussi les actionnaires âgés de moins de 45 ans placer, soit sur leur propre tête, soit sur toute autre, et devancer le terme de payement, en payant sur-le-champ les 90 livres, prix total de l'action : ils composeront, dans ce cas, également, une classe à part; les intérêts provenant seulement des capitaux remboursés par le produit de ces actions seront également divisés en portions de 45 livres, pour être distribués entre eux, par la voie du sort, dans la proportion, et suivant les règles déterminées dans les articles ci-dessus, avec cette différence, qu'à l'expiration de la dixième année, les actionnaires
favorisés se confondront avec ceux qui auront payé 9 livres par an, et participeront ainsi, avec la société entière, à toutes les distributions qui doivent augmenter progressivement la rente de chacun d'eux, jusqu'au maximum de 3,000 livres.
« Art. 9. Le directeur sera tenu d'avoir, pour chaque classe d'actionnaires, un registre à partie double, paraphé par les commissaires, chaque année. Il y inscrira, par ordre de date, et sans interruption, les noms, surnoms et âge des actionnaires, le numéro de leurs actions, et les mentions, par époques, des contrats remboursés.
« Les commissaires et le ministre des finances feront afficher, tous les mois, à la porte des bureaux de l'établissement, et enverront à tous les départements du royaume, pour être également affiché à la porte du directoire, l'état certifié d'eux, et imprimé, des remboursements effectués dans le cours du mois, et dans la proportion du prix des actions reçues.
« Cet état sera, en outre, également déposé aux archives de l'Assemblée nationale, pour servir de preuve, à la révolution de dix années, des remboursements effectués, et devenir la base du titre que doit, en échange, souscrire à cette époque, la nation, au profit des actionnaires.
« Art. 10. A l'expiration des dix années, le Corps législatif continuera, si il l'avise, le sieur Lafarge dans l'administration de ladite société, ou lui substituera toute autre personne; et, dans tous les cas, il déterminera le traitement de l'administration, ainsi que les frais de ses bureaux; lesquels traitements et frais seront pris sur les parties de rente qu'aucun des actionnaires pourra laisser vacante, dans l'intervalle de son décès à la révolution entière de l'année; et l'excédent seulement desdites rentes ainsi vacantes tournera au prolit de la société. »
Voici le projet de décret que vous proposent vos comités de finances et de mendicité :
PROJET DE DÉCRET.
« L'Assemblée nationale, aprè3 avoir entendu le rapport de ses comités de finances et de men-dicite, décrète qu'elle approuve le projet du sieur Lafarge, et ordonne que le contrôleur général des finances sera chargé d'en surveiller l'exécution, qui sera réglée d'après le plan rédigé par ses comités, et qui demeurera joint au présent décret. »
Messieurs, vos comités trouvent une foule d'avantages dans l'adoption du projet de M. Lafarge. 11 en est un dont ils oe vous parlent point, c'est qu'un pareil établissement rappelant sans cesse à la classe indigente de la société les ressources de l'économie, lui en inspirera le goût, lui en fera connaître les bienfaits, et en quelque sorte les miracles. J'appellerais volontiers l'économie la seconde providence du genre humain. La nature se perpétue par des reproductions; elle se détruit par les jouissances. Faites que la subsistance même du pauvre ne se consomme pas tout entière ; obtenez de lui, non par des lois, mais par la toute-puissance de l'exemple, qu'il dérobe une très petite portion de son travail, pour la confier à la reproduction du temps; et par cela seul, vous donnerez les ressources de l'esj èce humaine.
Et qui doute que la mendicité, ce redoutable ennemi des moeurs et des lois, ne fût détruite par de simples règles de police économique? Qui
doute que le travail de l'homme daus sa vigueur ne pût le nourrir dans sa vieillesse? Puisque la mendicité est presque la même chez les peuples les plus riches, et parmi les nations les plus pauvres, ce n'est donc pas dans l'inégalité des fortunes qu'il faut en chercher la véritable cause, elle est tout entière dans l'imprévoyance de l'avenir, dans la corruption des mœurs, et surtout dans cette consommation continuelle sans remplacement, qui changerait toutes les terres en désert, si la nature n'était pas plus sage que l'homme.
M. Lafarge appelle son projet tontine viagère et d'amortissement, je voudrais qu'il l'eût appelé caisse des épargnes, caisse des pauvres, ou caisse de bienfaisance; ce titre aurait mieux fait connaître au pauvre ses besoins, et au riche ses devoirs. Assez de fortunes ont été amoncelées pur l'avarice, en accumulant des intérêts, en échangeant des privations pour des richesses; il faut apprendre aussi â la classe indigente ce moyen de se préparer un plus doux avenir. Une pension de 45 livres serait un grand bienfait pour les habitants des campagnes; cette somme est presque ie salaire du travail d'une année entière, une pension de 1.000 livres, de l,000écus y serait la fortune de la famille la plus nombreuse. Quelle émulation, ce prix décerné à l'économie ne serait-il pas capable d'y exciter?
Partout le peuple est à portée de faire quelques épargnes, mais il n'a presque nulle part la possibilité de les faire fructifier. Qui voudrait se charger chaque jour du denier de la veuve ? Supposons même qu'un fils pour son père, ou qu'un père pour son fils, voulussent retrancher 6 deniers par jour du travail que cette économie leur rendrait plus doux ; dans quelles mains déposeraient-ils la modique somme de 9 livres à la fin de chaque année? Quel serait même l'accroissement de cette somme si elle ne produisait que de simples intérêts? L'esprit d'économie jusqu'aujourd'hui était donc presque impossible dans les classes indigentes; il n'en sera pas de même lorsqu'une caisse des épargnes aura réalisé les vœux des bons citoyens.
En vous parlant des avantages de l'esprit d'économie, comment passer sous silence les bonnes mœurs qui en sont le premier bienfait? La pauvreté se concilie avec toutes les vertus; mais à la pauvreté succèdent l'indigence, la mendicité ; et combien cet état cruel n'est-il pas voisin de la plus dangereuse corruption ! Tout se tient'dans l'ordre moral. Le travail est le pain nourricier des grandes nations. L'économie jointe au travail leur donne des mœurs, les fruits de cette économie les rendent heureuses, et n'est-ce point là le but de toutes les lois ?
Vous craindrez peut-être de diminuer la subsistance du pauvre par des sacrifices même volontaires que son état semble ne pouvoir pas supporter. Que vous connaîtriez mal les effets de l'esprit d'économie I II double le travail parce qu'il en fait mieux sentir ie prix; il augmente les forces avec le courage ; mais comptez-vous pour rien l'invitation que vous allez faire aux riches ; et, lorsque vous autorisez une caisse des pauvres, à qui donc prescrivez-vous de la remplir? Non, j'en atteste tous ceux qui ont vu de près les ravages de la misère. Les pauvres ne seront pas les seuls à s'intéresser à cette caisse bienfaisante qui ne va recéler des épargnes ou des aumônes que pour les multiplier. Une nouvelle carrière s'ouvre à la bienfaisance, comme une nouvelle chance s'offre à la pauvreté. En est-il de plus douce?
Elle embrasse l'avenir, elle est accordée au malheur, elle a pour base l'espérance. Il ne nous reste qu'à donner un exemple qui sans doute aura des imitateurs ; et j'ajouterais au projet de décret proposé par vos comités, qu'il sera prélevé, par le Trésor public, 5 jours du traitement de chaque député, pour former 1,200 actions sur la tête de 1,200 familles pauvres qui seront indiquées; savoir: 14 par chaque directoire des 83 départements, et 38 par la municipalité de Paris. (Applaudissemen ts.)
Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix !
J'adopte avec-empressement te projet du comité dans tout ce qui peut soulager les malheureux, et j'applaudis à l'amendement de M. de Mirabeau. C'est pour en proposer un second que j'ai demandé la parole. Si, il y a 3 mois, nous eussions adopté la proposition de M. Gérard, député de Bretagne (Murmures à gauche.), peut-être la régénération serait-elle plus près de nous, peut-être la Constitution serait-elle plus près de se linir.
Voici mon amendement : non seulement j'accepte la proposition de M. de Mirabeau, mais je demande qu'à compter du 5 mai, époque à laquelle la Constitution peut très bien être terminée. (Murmures.) Je demande sl ie terme, d'ici au 5 mai, n'est pas suffisant pour terminer la Constitution ; j'en appelle à votre zèle et à votre bonne foi.
Plusieurs membres à gauche : A la vôtre l
Je demande donc qu'à compter de cette époque, si la Constitution n'est pas tinie, les honoraires des députés soient versés dans la caisse de la tontine des vieillards.
Un membre à gauche : Oui, si vous voulez ne plus nous faire perdre de temps.
Voilà 22 mois que j'entends dire : nous sommes près d'achever le grand œuvre ;...
Un membre à gauche : Vous êtes toujours prêt à l'empêcher.
il est temps de le finir en effet. Nous n'avons pas d'ambition plus chère à satisfaire que celle de retourner dans nos foyers.
Je persiste dans mon amendement,
J'ai demandé la parole pour appuyer la proposition de M. Foucault, parce que personne n'est plus impatient que moi de finir ; mais j'y fais un sous-amendement ; c'est que l'Assemblée ira à un scrutin épuratoire, pour interdire la parole à ceux qui, depuis si longtemps, arrêtent sa marche. {Rires et applaudissements.)
Je diffère avec M. Foucault pour l'époque à laquelle les députés doivent verser leurs appointements dans la caisse des vieillards. Je demande que ce soit depuis l'époque à laquelle les ordres se sont réunis.
Plusieurs membres : L'ordre du jour !
Il semble qu'on ait choisi le projet le moins conforme à la morale, celui d'une
loterie pour vous la présenter sous des formes séduisantes. Je laisse à ceux qui ont étudié les calculs de ce projet à en développer les autres vices. Je m'étonne que, pour le faire adopter, on vous ait présenté un amendement fait d'abord pour en imposer à l'Assemblée nationale, je veux parler de celui de M. de Mirabeau : je ne suis point la dupe de l'appât qu'il présente. (On entend quelques applaudissements.) Quoique le genre de courage qu'il faut montrer dans cette circonstance soit le plus difficile de tous, puisqu'il sert à combattre des vues d'humanité, je dirai cependant qu'il faudrait avoir de soiTmême et du caractère des représentants de la nation une bien haute idée pour ne pas voir en cela-un intérêt personnel quelconque et j'oserai combattre l'amendement.
Le salaire des représentants de la nation n'est pas une propriété individuelle, c'est une propriété nationale. La nation leur donne une indemnité, parce que l'intérêt public exige qu'ils soient indépendants. Toute motion tendant à détourner de sa destination le salaire des représentants «de la nation n'est point un secours accordé aux malheureux, c'est l'anéantissement d'un des principes protecteurs de l'intérêt public. Faites attention que cette bienfaisance serait tout entière au préjudice du peuple. (Murmures.)
Je prie l'Assemblée de faire moins attention à une expression impropre qu'à la nature de la chose.
Je dis que ce sacrifice, léger pour plusieurs, serait peut-être pénible pour quelques-uns. Je demande en conséquence que le projet et l'amendement soient rejetés. (Applaudissements.)
(de Saint-Jean-d'Angély). Les différents amendements me paraissent importer peu au fond du projet; il ne faut donc pas les confondre. Les calculs de M. Lafarge ont été vérifiés par l'Académie des sciences qui les a trouvés justes. Son plan me paraît renfermer de grands avantages. En vain voudrait-on chercher à l'écarter, en lui donnant le nom de loterie ; tous les emprunts viagers sont aussi des loteries. Les comités de mendicité et de finances lui ont donné leur approbation. Je conclus à ce qu'il soit adopté.
Si je trouvais dans le projet proposé que le pauvre pût en effet, par son économie, retirer pour ses vieux jours un moyen sûr de soutenir son existence et celle de sa famille, j'y applaudirais sans doute; mais il me semble qu'il ne présente aucune chance en faveur du pauvre; au contraire, il en est une qui lui est très défavorable. En effet, que donnez-vous donc au pauvre, en lui présentant une sorte de loterie qui flatte d'abord son imagination, et qui ne rend rien de ce qu'elle promet, absolument rien pendant dix aimées; il faut que le malheureux prenne sur son nécessaire une somme annuelle de 9 livres pour nourrir ses actions; car si, dans le cours des dix années, il arrive une seule où il ne puisse pas l'entretenir, tout ce qu'il a mis jusqu'alors est absolument perdu.
C'est une compagnie qui voudrait s'approprier la sueur du malheureux. On objecte que le projet ne présente aucun objet d'intérêt pour la compagnie elle-même; ce fait n'est pas vrai; car je vois à l'article 2 du projet que le directeur est autorisé à percevoir 8 deniers pour livre en sus du prix intégral de l'action. Mais il suffit que l'Etat veuille spéculer sur la misère des hommes les plus malheureux de ia société, pour que l'As-
semblée nationale rejette à l'instant un projet si désastreux. (Applaudissements.)
Un membre demande la question préalable sur le projet de décret.
Je ne puis cependant m'empê cher de dire un mot sur l'amendement de M. de Mirabeau. Sans doute que, flatté par les idées que présente ce même projet, il a cru que les représentants de la nation se feraient un plaisir, un honneur, une gloire de concourir avec le peuple pour sa propre subsistance et son bonheur, et en cela il ne s'est pas trompé; mais il me semble que de celte idée il en naît une autre.
J'entends toujours parler dans cette Assemblée de moins populariser le peuple: Eh! qui sommes-nous donc, Messieurs? Ne sommes-nous pas nous-mêmes le peuple! Je voudrais mettre à l'écart toutes ces idées qui tendent à isoler les représentants du peuple du peuple lui-même. Quand un homme fait ici son devoir, il ne fait pas seulement un acte de popularité, il fait un acte personnel. Car, indépendamment de la représentation que nous avons ici, nous sommes nous-mêmes nos représentants, et nous sommes peuple aussi. (Applaudissements.) Quant à ce moyen usé dont s'est servi M. Foucault, je n'y réponds qu'en disant : Nous ne sommes pas ici encore une fois pour nous, mais pour tous les autres.
Si une assemblée législative osait un jour se priver de quelque salaire, elle exposerait sensiblement la liberté publique. Il est intéressant que les hommes qui travaillent pour le peuple soient payés par lui; car ils seraient bientôt payés par d'autres. Je conclus avec M. Robespierre à la re-jection du projet et des amendements.
Plusieurs membres demandent à aller aux voix.
(L'Assemblée décide que la discussion est fermée.)
Je mets aux voix la question préalable.
(L'Assemblée,consultée, adopte la question préalable et repousse le projet de décret du comité et les amendements.)
, au nom du comité de Constitution, fait un rapport sur les contestations auxquelles a donné lieu l'élection de la municipalité de Mauriac et propose le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport qui lui a été fait sur le différend survenu dans la ville de Mauriac au sujet de l'élection de la municipalité; ouï l'avis du directoire du département du Cantal, sans avoir égard audit avis, déciète qu'il sera procédé incessamment, sous l'inspection de deux commissaires de l'administration dudit département, à l'élection d'une nouvelle municipalité dans ladite ville de Mauriac ; et néanmoins improuve l'assemblée des citoyens, formée le 18 avril en la chapelle des pénitents de Mauriac, comme illégale et inconstitutionnelle } enjoint auxdits citoyens de se conformer, à l'avenir, à l'ordre établi, et invite les citoyens dudit Mauriac à l'union et à la concorde. »
(Ce décret est adopté.)
lève la séance à neuf heures et demie.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAILLES.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
, secrétaire. fait lecture des procès-verbaux des séances dhier au matin et au soir, qui sont adoptés.
Je prie l'Assemblée de charger son comité de Constitution de lui proposer uue décision sur la coniest tion qui divise en ce moment Aurillac et Salnt-Flour, au sujet de la fixation de celui des deux endroits où doit se faire la nomination de l'évêque, et celle du membre du tribunal de cassation.
D'après votre décret sur l'alternat, la prochaine session électorale devrait se tenir à Saint-Flour ; mais l'impossibilité de faire une élection libre dans cette ville, inacces-sib e par les neiges, et que l'on ne saurait regarder que comme une des bizarreries de la nature, s'oppose à ce qu'en ce moment le tour de l'alternat soit suivi.
Je demande que le comité fasse, demain matin au plus tard, le rapport de cette affaire.
(Cette motion est décrétée.)
Je suis chargé de vous rendre compte des vexations qui s'exercent dans la ci-devant province de Franche-Comté : les gardes nationaux de Dêle obligent les prêtres à monter la garde. Il y a quelques jours, vous avez décrété que tout homme âgé de 60 ans serait exempt du service personnel; je demande que vous décidiez pareillement que les prêtres en sont exempts.
J'ai encore à vous entretenir d'un autre objet intéressant. Dans la ville de Pontarlier, on arrête tous les voyageurs; on conli-que le numéraire qu'on trouve sur eux et on leur laisse ensuite la liberté d'émigrer. La preuve de ce que j'avance, c'est que le 11 février dernier, un citoyen du canton, muni d'un passeport de la municipalité, allait en Suisse avec son épouse, pour y passer quelque temps ; la municipalité de Pontarlier l'a arrêté : on l'a fouillé et, après lui avoir pris 200 louis qu'il portait sur lui, Ou l'a laissé libre de continuer sa route.
Un membre à gauche : Le plaignant oublie de dire que les 200 louis out été officieusement changés pour des assignats, afin que le voyageur fût moins incommodé du poids de sa somme, ce qui n'est pas une grande offense.
(L'Assemblée renvoie au comité de Constitution la plainte relative aux ecclésiastiques de Dôle.)
Je propose que l'Assemblée charge son comité des monnaies de lui
proposer, dans trois jours, une loi qui statuera « où, par qui, et
devant qui », les matières d'or et d'argent, provenant de l'argenterie
des églises, seront pesées, et les lieux où il sera dreasé procès-verbal
du poids et prix de ces matières, ainsi que les per-
L'Assemblée, par 6es précédents décrets, a autorisé l'établissement de la juridiction des prud'hommes patrons pêcheurs, dans toutes les villes et lieux maritimes qui en formeraient la pétition.
Je n'ai pas besoin de rappeler en ce moment -les motifs de cette institution bienfaisa i te ët salutaire ; je demande seulement que les patrons pêcheurs de la vi'le de Cannes, district de Grasse, département du Var, soient autorisés à jouir du bienfait de la loi.
Voici, en conséquence, le projet de décret que je vous propose :
« L'Assemblée nationale, en conformité de son décret du 9 janvier^der nier, décrète que la juri-d ction des patrons pêcheurs de la ville de Cannes, district de Grasse, département du Var^ est confirmée définitivement. » (Ce décret est adopté.)
, au nom du comité ecclésiastique, présente un projet de décret relatif à la réduction et à la nouvelle circonscription des paroisses de Nantes et de Clisson. Ce projet de décret est ainsi conçu : L'Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par sou comité ecclésiastique, des procès-verbaux des directoires des districts de Nantes et de Clisson, et du directoire du département de la Loire-Inférieure, concernant les réduction et circonscription des églises paroissiales des villes et faubourgs de Nmtes et de Chsson, en date des f, 7, 8, 9, 10, Il et 24 février d. rnier, et des sommations d'y concourir faites les 4 et 14 dudit mois à M. l'évêque de Nantes, décrète :
Art. 1er>
« Il y aura 8 paroisses dans la ville et les faubourgs de Nantes ; savoir : 1° la paroisse cathédrale, sous l'invocation de Saint-Pierre ; 2° les paroisses de Sainte-Croix ; 3° de Saint-Jacques; 4° de Saint-Nicolas; 5° de Notre-Dame; 6° de Saint-Similien ; 7° de Saint-Clément et 8° de Saint-Donatien.
Art. 2.
* Lesdites paroisses seront desservies dans les églises indiquées au procès-verbal du directoire du département, et auront les limites énoncées dans ledit procès-verbal.
Art. 3.
« Les autres paroisses de la ville et des faubourgs de Nantes sont supprimées.
Art. 4.
« L'église de Toussaint et l'église qui formait la chapelle des capucins de l'Hermitage, seront conservées comme oratoires ou chapelles de secours ; la première, de la paroisse de Saint-Jacques; et la seconde^ de la paroisse de Notre-Dame; les curés desdites paroisses enverront, les dimanches et fêtes, chacun un de ses vicaires, célébrer, dans les li;es chapelles, l'oifice divin, et y faire des instructions publiques, sans pouvoir y exercer les fonctions cunales.
Art. 5.
« Les paroisses de la Trinité, de Sainl-Jacque?,
et la Madeleine de la ville de Glissera, sont supprimées et réunies en une seule, qui sera desservie dans l'église de Notre-Dame de ladite ville ; les faubourgs de Saint-Antoine, la porte Pal-quaire, ta Gremauderie, le bourg Cornu, et la portion deila paroisse de Saint-Georges, enclavée entre les rivières de fièvres et de la Moine, sont démembrés des paroisses doiœt ils décidaient, et réunis à ladite paroisse de Notre-Dame. '
Art. 6.
« L'église de la Trinité «ie Glisson sera conservée comme oratoire ou Chapelle de secours de ladite paroisse de Notne-Dame ; le euré de cette paroisse enverra, les dimanches iet Mes, l'uuée ses vicaires célébrer 1® servie© divi®, et faire ies instructions nécessaires dans ladite chapelle ; mais ledit vicaire n'y fera point de fonctions cu-riaîes. »
(Ce décret est adopté..)
, au nom du comité militaire. Messieurs, depuis le commencement de la Révolution, un grand nombre d'officiers en pied et de remplacement ont quitté >le,u&s drapeaux sans permission Jé^ale et n'ont pas reparu dans leurs corps respectifs depuis cette >ëpo que*.
Des capitaines de réforme .ont été appelé© par le roi pour remplir ces plaoes qui étaient restées sans cnefs et ont servi constamment et avec «n zèle qui mérite l'attention de l'Assemblée.
Beaucoup de ces braves militaires, à qui il ne manquait que dvs quartiers pour être gens à talents-, demandèrent du service dans l'expédition d'Amérique; ils se comportèrent avec distinction pendant le cours de la guerre, mais la paix fut proclamée ; ils retinrent en France et furent remplacés par des nobles.
Ils s'adressèrent alors aux puissances étrangères qui les accueillirent et leur confièrent des postes importants. Aujourd'hui que d'injustes préférences ne souillent plus le choix qui doit élever les hommes de mérite aux différentes plaoes de l'Empire, ils demandent à servir leur patrie et à lui consacrer leurs talents et leur vie.
Nous vous proposons, en conséquence, le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire, décrète ce qui suit :
Art. 1er
« Les capitaines en pied et les capitaines de remplacement qui n'auront pas rejoimt leur régiment depuis le 1er octobre 4789 jusqu'au 1er janvier 1791, sans avoir eu.de congé ou une permission légale, ne seront pioint susceptibles d'obtenir des places d'aides de camp.
Art. 2.
Les capitaines, dits de réforme, qui auront été employés par le roi dans l'activité de leur grâde^ en 1789 et 1790, sont déclarés susceptibles d'obtenir des places d'aides de camp; mais pour le premier choix seulement.
Art. .3,
« Les Français qui, sous l'ancien régime, ont été exclus des emplois militaires, parce qu'ils n'étaient pas né&noble£, mais gui, ayant servi la cause de ia liberté en, Amérique aussitôt que l'armée française y est arrivée, et, conjointement avec elle, ont obtenu on grade d'officier supérieur chez quelque puissance étrangère, amie de
: la France, seront susceptibles d'obtenir des places de l'armée qui sont à la disposition du roi, et ; concourront avec lès officiers du grade immédia-; tement inférieur à celui qu'ils avaient chez la puissance amie, pourvu toutefois qu'ils aient manifesté, avant l'époque du 1er janvier de la présente année, l'intention d'entrer au service de leur patrie ; ce qui sera constaté par un état nominatif, qui sera remis dans 3 jours par le ministre de la guerre, pour rester annexé au présent décret, lequel ne pourra s'appliquer qu'aux personnes comprises dans cet état. »
(Ce decret est adopté.^
, au nom du comité d'agricul-trnm et de commerce. -Messieurs, dans votre eéance du 1er mars, au soir, vous avez renvoyé à votre comité d'agriculture et de commerce l'article suivant qui vous avait été-présenté :
« Ne seront réputés bâtiments nationaux que ceux construits en 'France, commandés par des Français, et dont au moins les deux tiers de l'équipage seront composés de Français. » er">
Sur ies observations de MM. Garat et Gasteilla-net, votre comité a examiné die nouveau cet article. Il a appelé dans son sein les députés de Bordeaux, Nantes, Saint-Malo, Marseilieet attitrés villes maritimes : tous sont convenus que la manufacture de navires est une entreprise des plus intéressantes et qui mérite le plus -votre protection-et des encouragements, et c'est d'après leur avis que nous vous proposons d'adopter l'article tel qu'il vous avait été présenté tout d'abord, et de décréter en plus la prohibition de tout navire de construction étrangère.
Vous vous occupez, tous les jours, Messieurs, dè pourvoir aux besoins des pauvres; je pense que votre première attention doit être de leur donner du travail, et vous ne pouvez pas donner un plus grand secours à la classe des citoyens pauvres qu'en fournissant des travaux sur les bâtiments de construction française;, en encoura-geaut vos constructeurs dont les talents sont ehviés par les nations étrangères.
NoUs avons un grand nombre de bras oisifs qui demandent à être occupés et qui attendent avec impatienté le décret .bienfaisant que je vous propose. Nos ports sont pleins de vaisseaux que les étrangers, vous, ont Construits àgran Is frais et au détriment de l'industrie nationale, tles't temps de faire cesser ees,abus qui arrachent, aux ouvriers leur subsistance et à la nation son numéraire, et qui font émtgrer tant d'ouvriers utiles que nous avons tant d'intérêt de retenir parmi nous;.
'On vous a dit que vous n'avez pas de bois de construction. Je -réponds que les Hollandais n'en ont pas, que les: Anglais en ont bien moins que vous ; i le ont l'attention de le cher\her dans le Nord; ils gagnent le fret; il# font des échanges-utiles. Imitons leur exemple, etnous donnerons une pius grande activité à notre marine marchande; nous occuperons plus de matelots, nous ferons gagner à nos ouvriers la main-d'œuvre que nous payons .actuellement aux étrangers.
D'après ces considérations, le comité persiste à maintenir l'article tel qu'il vous a été présenté et il vous demande d'ajouter qu'à l'avenir tout navire de construction étrangère sera prohibé..
Il voua propose, en conséquence, de décréter quei
« 1° Ne seront réputés bâtiments nationaux que ceux construits en France, commandés, par des Français et dont au moins les deux tiers
de l'équipage seront composés dy Français. » (Adopté.)
« 2* L'imporfcaJion des navires -et autres bâtiments de construction étraagêre, pour être vendus dams royaume, sera prohibée ; lesdits naviresetibâtiments nepourront,en conséquence, jouir des avantages réservés à la «avigatron fi-an-caise, à l'exception toutefois de ceux desdits bâtiments, qui, à la promulgaftio'n du présent décret, se trouvèrent être "propriété française; »
(de Saint-Jean d'Angély). Beaucoup de négociaflits ont été -autorisés, -en vertu des lois anciennes, à acheter des vaisseaux Jde construction étrangère, notamment1 chez les Américains; ils -ont contracté des engagements à raison du privilège que leur accordaient les lois de ne point payer de droits. !Je crofs donc qu'il faudrait do ner aux négociants un délai pour; faire la déclaration des hâtimerïts qu'ils ont ainsi en construction.
©'autre part, it-y a beau coup d'étrangers, riches commerçants, qui cherchent à vrvie sous Pempi re de la liberté, par exemple les Anglais et les'Hollandais, et qui sont près de s'établir en France; ils n'ont souvent-d'autre propriété que des 'bâti-meàte. il serait impolitique de les repousser par un décret qui gênerait leur commerce, en soumettant à une -taxe quelconque leurs vaisseaux et leur industrie.
Je propose, en conséquence.:
1° Que les négociants ou armateurs français, qui ont fait des traités avec les étrangers pour mire construire des vaisseaux, ou en ont acheté de tout faits en ce moment., puissent en faire leur d^clarati m devant lesipréposés des douanes, afin qu'ils soient exempts de droits, et quele décret n'ait pas un effet rétroactif;
2*%ue les étrangers, qui viendront s'établir en France avec'leurs bâtiments, ne soient pas dbligés de payer le droit (f eutrée pour les bâtiments qu'ils emmèneront, s'ils en sont propriétaires.
, rapporteur. 11 faut commencer par établir le principe qu'à l'avenir les vaisseaux de construction étrangère seront prohibés. Vous examinerez ensuite, d'après les réclamations qui vous seront adressées et les instructions qui vous seront présentées, ies exceptions dont le principe paraîtra susceptible.
Je demande en ce moment l'adoption de la disposition que nous vous proposons et le renvoi des deux amendements do M. Regnaud aux comité d'agriculture et de commerce et de ma-rin'e réunis.
Je suis d'avis dè donner des encouragements et des primes pour les chantiers français; mais je crois qu'il serait nuisible au commerce de France de prohiber les vaisseaux étrangers. Je demande que le comité prenne l'avis des chambres de commerce.
[L'Assemblée, consultée, ajourne le projet de décret du comité et renvoie aux comités d'agriculture et de commerce et de matme réunis les amendements M. Regnaud (de Saint-Jean d'An-gêlyj
, cm nom du comité militaire. Messieurs, le régime oppressif des milices était depuis longtemps l'objet des réclamations, des plaintes universelles du royaume. Cette institution, produite par un gouvernement arbitraire, eet arrêt du sort, qui arrachait le citoyen
à ses foyers, à m famille, à ses travaux, était la désolation des campagnes. Sa destruction était le vebu de tous les Français. Aussi a-t-il été proscrit dans celte séance mémorable q>ri lit disparaître les abus que des'siècles avaiewt amonceléB, , qui délivra la nation de ses chaînes, prépara l'établissement des lois qui devaient assurer la liberté, et qui, pour ainsi dire, nettoya 'la place oû devait ^'élever l'édifice de la nouille iGoiïsfà-tution : le 4 aoM les milices ont été supprimées.
Deux mesures importantes ; l'une de précaution pour la sûreté de l'Etat; l'autre de justice pour les individus, réclamaient l'attentro®' de l'Assemblée aaiionale.
La première était de trouver un moyen d'augmenter l'armée de ligne au moment où les circonstances l'exigeraient; de manière que pendant la paix elle ne fût pas assez nombreuse pour alarmer la liberté, et que sa dépense ne fût pas tellement considérable, qu'elle nécessitât des contributions immenses. Mais les droits consacrés par la Coh-tïtulion demandaient que ce moyen ne fût pas à charge anx citoyens, et qu'il ne fût pas très dispendieux : vous y avez pourvu par l'établissement des auxiliaires. 100,000 hommes seront toujours prêts à marcher au premier signal pour recruter l'armée, et la porter à l'état de force le plus imposant. Leur dépense ne surpassera pas f> millions 400,000 livres et Celte somme peu grevante pour l'Etat sera répartie dans les campagnes de la manière la plus propre â y apporter 'l'aisance et y favoriser l'industrie. Ainsi, ce qui concerne cette première mesure est terminé, et les dispositions que vous avez arrêtées à Cet égard paraissent avoir obtenu l'approbation publique.
Le remplacement des milices assuré, c'est de la seconde mesure, de celle relative aux individus qui les composaient, que vous avez à vous occuper en ce moment, et c'est sur cet objet que je dois vous présenter quelques dispositions.
Les milices, dont l'organisation éprouve de fréquentes variations, composent en ce moment 13 régiments de grenadiers royaux, 14 régiments provinciaux et 78 bataillons de garnison. La dépense qu'entraînaient ces troupes serait difficile, pour ne pas dire impossible à calculer; car elle le serait d'une manière bien inexacte, si on la bornait aux sommes fournies par le Trésor public, si l'on n'y ajoutait pas en même temps tout ce qu'elles coûtaient aux provinces et aux citoyens. Il n'est pas nécessaire de rappeler ici des faits qui ne sont ignorés d'aucuns membres de cette Assemblée; les Vexations de toute espèce qu'exerçaient les intendants ou leurs agents, l'arbitraire qui régnait dans les tirages, les frais considérables qu'occasionnait aux familles la perte des journées; la somme que mettaient dans ta bourse commune les jeunes gens qui .étaient appelés au tirage; enfin., celle qu'ils donnaient quelquefois pour obtenir leur liberté.; ces abus, ces vexations étaient un véritable fléau pour les campagnes. Votre décret va les. proscrire. Voici les dispositions que nouâ avons l'honaeiir^ie vous présenter :
1® De prononcer d'une manière formdile l'abolition absolue du régiment des milices, sert de supprimer en conséquence les régime® ts aes(grenadiers royaux, les régiments provinciaux et bataillons de garnison.
2° De déclarer que les sous-officiers et seftdats des troupes provinciales ne seront plus astreints à aucun service, et qu'il leur sera délivré des
cartouches qui constateront le temps et la nature de leurs services.
3° De statuer que ces sous-officiers et soldats seront susceptibles d'être admis dans la gendarmerie nationale, et auront la préférence accordée à ceux qui ont servi dans les troupes de ligne pour entrer dans les auxiliaires.
4° Enfin, que ceux de ces sous-officiers et sol-dats qui, par leurs services, ont droit à des retraites, les obtiendront suivant deux règles différentes, savoir : conformément au décret du 14 décembre 1790, pour ceux qui auront servi précédemment 16 ans dans les troupes de ligne; et conformément à l'ordonnance d'administration du 25 mars-1776, concernant les troupes provinciales, pour ceux qui n'auraient pas été en activité pendant 16 ans dans l'armée, les années de rassemblement de troupes provinciales comptant comme le ser vice dans la ligné. Cette ordonnance du 25 mars 1776, relative aux troupes provinciales, accorde des pensions, des récompenses militaires beaucoup inférieures aux traitements que vous avez accordés par votre décret du 14 décembre 1790; aussi nous ne l'adoptons que pour ceux qui n'ont pas à faire valoir des Services actifs dans l'armée, et nous avons cru qu'il était de votre justice d'établir une différence éntre ceux qui avaient peu ou point quitté leurs foyers, et ceux qui avaient supporté les fatigues de là guerre ou celles même d'une garnison. C'est à ces derniers que nous avons cru devoir appliquer. les dispositions du décret du 14, décembre.
Les porte-drapeaux, sous-lieutenants, lieutenants et capitaines des troupes provinciales jouiront également du droit d'être admissibles aux places de la gendarmerie nationale. Pour eux comme pour les sous-officiers et soldats, il y aura deux modes de retraite, suivant qu'ils auront ou n'auront pas eu 16 années d'activité dans les troupes de ligne. Ceux de ces officiers qui auront plus de 15 ans de service et qui voudront se retirer, jouiront de la décoration militaire, ainsi qu'elle a été accordée aux officiers de l'armée. Les officiers qui ne seront pas âgés de 25 ans seront susceptibles, s'ils veulent continuer de servir, d'être remplacés comme sous-lieutenants aux places vacantes dans les troupes de ligne; mais leurs services ne pourront être mis en Comparaison avec ceux qui n'ont cessé d'être en activité; ils ne prendront rang pour leur avancement qu'à dater du jour qu'ils entreront dans la ligne, leurs services antérieurs comptant néanmoins pour la décoration et récompenses militaires. Les officiers supérieurs des troupes provinciales seront remplacés, ainsi qu'il a été prescrit par le décret du 29 octobre dernier, sur l'avancement militaire; ceux qui voudront se retirer et qui sont su?ceptibles de retraite, l'obtiendront conformément aux dispositions que je viens d'énoncer pour les autres officiers de ces troupes; ceux qui désireront continuer leurs services.conser-veront, jusqu'à leur remplacement ou leur retraitera moitié des appointements dont ils jouissent en ce moment. Les officiers ci-deVant dits de fortune (car il s'en trouve plusieurs parmi les officiers supérieurs des troupes provinciales) jouiront de la totalité de leurs appointements ou traitements. Voilà les dispositions générales, relatives à la suppression des milices et au sort à faire aux individus qui les composent.
Il ne me reste plus qu'à vous présenter une mesure particulière ^concernant le régiment provincial de Corse. Ce régimen t est dans une situation différente de celle des autres régiments pro-
vinciaux; il pourrait même être regardé comme un régiment de ligne, puisqu'il en faisait partieau-trefois, et que, depuis l'année qu'il a été déclaré régiment provincial, il n'a jamais cessé d'être rassemblé. MM. les députés de Corse, à l'Assemblée nationale, sont divisés d'opinions sur la suppression ou la conservation de ce régiment. Nous ayons cru devoir nous réunir à l'avis de ceux qui demandent que la Corse soit en tout assimilée aux autres départements du royaume, et qui assurentqu'ilsrefuseraientmêmeunefaveur, puisqu'elle serait une distinction, et que leurs commettants ne veulent pas qu'il en existe entre eux et les autres Français; nous vous proposons donc de prononcer également la suppression du régir ment provincial de Corse. Mais nous pensons que ce régiment, ainsi que celui de Paris, et un détachement du bataillon du régiment du roi, qui étaient habituellement assemblés, et sous tous les rapports sur le pied des régiments de ligne, doivent être traités différemment que les autres troupes provinciales, et que les officiers et sous-officiers doivent jouir des avantages qui ont été accordés à ceux qui sont réformés par la nouvelle organisation. Ces mesures qui vont rendre la liberté et 1'ihdépendance à un grand nombre de citoyens, qui donneront des débouchés à plusieurs, qui délivreront les campagnes de charges importantes et de vexations insupportables, ajouteront à la reconnaissance qu'ont inspirée vos immenses travaux.
Voici le projet de décret que j'ai l'honneur de vous proposer...
Je suis entouré de six membres du comité qui disent tous n'avoir pas connaissance de ce décret.
, rapporteur. Je déclare qu'il a été fait un règlement au comité, c'est que l'on ne pourra jamais arrêter un projet de décret qu'il n'y ait au moins sept membres présents; et, pour celui-ci, sept membres y étaient; M. de Wimpfen peut l'attester.
Voici le projet de décret que nous vou3 proposons :
« Article premier. Le régime des milices est aboli. En conséquence, à compter de la publication du présent décret, les 13 régiments de grenadiers royaux, les 14 régiments provinciaux et les 78 bataillons de garnison, formant les troupes provinciales, sont et demeureront supprimés. »
Je demande à M. le rapporteur pourquoi les milices gardes-côtes ne sont pas comprises dans ce décret. Si on tarde à les supprimer, il n'y aura plus de places à prendre dans la gendarmerie nationale, et elles seront plus mal traitées que lés autres.
, rapporteur. Sous quatre jours, nous présenterons le projet de décret qui les concerne.
La milice est déjà abolie par un décret antérieur et sanctionné; je propose donc par amendement, qu'au lieu dé dire : « Le régime des milices est aboli », on rédige l'article en ces termes :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité militaire, décrète ce qui suit:
Art." 1er. *
« Le régime des milices! étant aboli à dater du
jour de la publication du présent décret, les 13 régiments de grenadiers royaux, les 14 régiments provinciaux et les 78 bataillons de garnison, formant les troupes provinciales, sont et demeureront supprimés. »
, rapporteur. J'adopte cette rédaction.
(L'article 1er ainsi rédigé est décrété).
Art. 2.
« A dater du même jour, les sous-officiers et soldats desdites troupes provinciales ne seront plus astreints à aucun service, et il leur sera délivré des cartouches de congés absolus, sur lès-quelles seront inscrits le temps et la nature de leurs services. » (Adopté.)
Art. 3.
« Les sous-officiers et soldats des troupes provinciales seront susceptibles d'être admis dans la gendarmerie nationale, et ils auront droit à la préférence accordée aux troupes de ligne pour entrer dans les auxiliaires. >.
J'ai l'honneur de vous observer que la plupart des soldats et sous-ofticiers provinciaux, très braves gens, très en état de faire la guerre dans l'infanterie, sont absolument incapables de servir comme gendarmes nationaux. La plupart de ces soldats, et soUs-officiers ne savent pas même monter à cheval. (Murmures.)
Un membre : C'est au choix des départements; ils ne les prendront pas s'ils ne sont pas capables.
Je demande donc par amendement qu'ils ne puissent concourir qu'avec ceux qui ont servi à pied.
(L'Assemblée repousse l'amendement et adopte l'article 3.)
Art. 4.
« Ceux desdits sous-officiers et soldats qui, par leur service, auront droit à une retraite, l'obtiendront conformément à ce qui suit, savoir :
« Les sous-ofticiers, grenadiers et soldats pro-vinciaux,qui auront servi précédemmer. t seize ans dans les troupes de ligne, obtiendront leurjretraite sur le pied fixé par le décret du 14 octobre 1790; les années de rassemblement dans les troupes provinciales seront comptées comme le service dans la ligne.
« Les sous-officiers, grenadiers et soldats qui ne pourront pas justifier de seize ans de service dans les troupes de ligne ou rassemblement de troupes provinciales obtiendront des pensions de récomp nses militaires, conformément à ce qui est prescrit par l'ordonnance d'administration du 25 murs 1776, concernant les troupes provinciales. » (Adopté.)
Art. 5.
« Les porte-drapeaux, sous-lieutenants, quartier-maîtres, lieutenants et capitaines des troupes provinciales seront susceptibles d'être admis comme officiers dans la gendarmerie nationale, pourvu qu'ils aient au moins six ans de service, dont trois ans d'activité, soit dans la ligne, soit dans les rassemblements de troupes provinciales. (Adopté.)
Art. 6.
c Ceux desdits officiers qui, par leurs services,
seront susceptibles de retraite, l'obtiendront conformément à ce qui suit, savo r :
« Les officiers des troupes provinciales qui auront servi précédemment seize ans dans les troupes de ligne ou rassemblement de troupes provinciales, obtiendront leur retraite sur le pied fixé par le décret du 3 août 1790.
« Ceux qui ne pourrout pas justifier de seize ans de service dans les troupes de ligne ou de rassemblement de troupes provinciales, obtiendront des pensions de récompenses militaires, conformément à ce qui est prescrit par l'ordonnance d'administration du 25 mars 1776. » (Adopté.)
Art. 7.
« Les officiers des troupes provinciales, qui ne seront pas âgés de plus de 25 ans, seront susceptibles d'être remplacés aux places de sous-lieutenants, vacantes dans la ligne, après ceux des officiers qui, par le décret sur l'avancement, ont conservé droit au remplacement; mais ils ne prendront rang que du jour de leur entrée dans le régiment, leurs services précédents ne pouvant être comptés que pour la retraite et la décoration militaire. » (Adopté.)
, Art. 8.
« Les officiers supérieurs susceptibles de remplacement, et qui désireront continuer leurs services, seront nommés à des emplois de leur grade, conformément à ce qui est prescrit par les articles 10 et 11 du décret du 29 octobre 1790, sur l'avancement militaire, titre II du i emplacement. Ceux des officiers supérieurs qui ne voudront pas continuer leurs services, ou qui ne sont pas susceptibles de remplacement, obtiendront leur retraite, conformément à ce qui est prescrit par l'article précédent. » (Adopté.)
Art. 9.
« Les officiers supérieurs susceptibles, de rem-placement* et qui désireront continuer leur activité, conserveront,jusqu'à leur remplacement ou leur retraite, la moitié des appointements dont ils jouissent dans ce moment, à l'exception des officiers ci-devant dits de fortune, qui en jouiront en entier. Les officiers de tout grade des troupes provinciales conserveront 10. ans d'activité, année pour année, pour la décoration militaire seulement. ;>
Je demande à M. le rapporteur d'expliquer d'une manière plus précise ce que l'on entend par les officiers susceptibles de remplacement.
, rapporteur. Cela est expliqué dans le décret sur l'avancement.
(L'article 9 est adopté.)
Art. 10.
« Le régiment provincial de Corse, le régiment de Paris et la partie du bataillon au régiment du roi, habituellement rassemblée à Saint-Denis, également supprimée par le présent décret, obtiendront les récompenses militaires,ainsi qu'il est prescrit par les articles ci-dessus, et jouiront des mêmes avantages accordés aux officiers, sous-officiers réformés par la nouvelle organisation. » (Adopté.)
, au nom du comité militaire. Messieurs, le comité militaire m'a
chargé de vous présenter une autre disposition relative aux maréchaux dé France et aux principaux commandements de troupes.
Vous vous rappelez: que lorsque nous voua présentâmes les. lois sur l'avancement, le comité n'était pas e ncone convenu du i ombre des maréchaux de France quîii croyait utile d'employer; vous^ajournâtesi alors cette question.
' Au momefit deladernière:promotion lenomnce des maréchaux était de 18 ; il a été quelquefois plus considérable : le- comité propose de le fixer à 6. Leur traitement était plus ou. moins fort suivant la nature des grâces:qu'ils avaient obtenues ; plusieurs avaient plus de 200,000' francs, et aucun n'en avait moins, de 100. Le comité a pensé que ce traitement pourrait être fixé à 40,000 francs, et il s'est, déterminé àeetfce somme sur ces deux considérations-,, d?une part, q u'i li vous proposait de restreindre le- nombre des lieutenants-généraux de qaaatne,, ce qui diminue la. dépense' de; 80,000 livres-.; et de l'autre, iilra. cru que vos décrets appelant tous les citoyens, suivant leurs services et leur mérite^ aux premiers grades militaires, il devait mettre: à portée ceux, qui n'avaient plus de fortune personnelle de remplir honorableme t le poste émanent auquel ils seraient appelés.
C'est surtout c tte dernière observation qui a fixé l'opinion de votre comité. Quant aux quatre principaux commandements, le comité; propose qu'ils puissent ê re confiés par le roi soit aux maréchaux de France,jsoitaux lieutenants généraux.
Nous vous proposons, en conséquence,, le décret suivant :
« L'Assemblée nationale'décrète :
la Qu'à l'avenir le nomb; e des maréchaux de France ne pourra excéder celui! de 6, et que leur traitement sera fixé à 40,000 livres. Quamt aux maréchaux de France actuellement existants, qui ne seront pas conservés* en activité, ils conserveront ce même traitement ;
2° Que les liemidienants généraux en activité seront réduite à BO, et que les quatre principaux commandements de troupes auxquels il a été affecté un traite aient particulier de 20,000 livres pourront être confiés par le roi, soit à des maréchaux de France, soit à des lieutenants généraux en activité. »
, le jeune. J'ohserve à l'Assemblée que le grade de maréchal de Francè est si éminent que je ne crois pas que l'on doive faire une foi .d'avoir toujours 6 maréchaux; de France» Ce grade, pendant, la paix, peut ne pas être nécessaire. Lé roi de Prusse n'a jamais eu plus de 2 feld-maréchaux. Je demande donc qu'il ne soit pas dit qu'il y aura toujours 6 maréchaux de France* parce que je crois que pendant la paix il est plus utile que ce grade ne soit pas renouvelé.
Permettez-moi de vous faire observer que vous avez décrété qu'aucune pension ou traitement n'excéderait jamais 13,000 litres. Qu'est-ce que c'est que le traitement d'un maréchal de France en temps .de paix? Ger.tes, c'est une pension,, c'est un honoraire sans fonctions.
Divers membres : Otri 1' oui I Ifon! nonf
Pourquoi donc tant de dis-tinction? Ist-ce que dans tous les Etats on ne sacrifie pas son sang et sa vie pour la patrie ? Je
demande que les appointements de 40,000 livres soient réduits à 25,000 livres en temps de praxr et. que? l'amendement de ML de Grillon soit adapté;.
Un membre demande la question préalable.
Sans>dbute, on ne verra plus ce qu'on a vu, un bâton de maréehai de France donné pourun assassinat;: sans douter on ne verra pas davantage les bâtons de maréchaux de France donnés pour des assiduités d'antichambre, à un courtisan. Mais, Messieurs, s'il est convenu, et je croi s qu'on ne le nierapas, quel e: grade demaréchal de France;ne-sera accordé : loqu'ài iHi mérite très: éminent; 2* qu'à, des service» très mémorables,, il suit, de- là incontestablement que l'on ne peut pas fixer le nombre des maréchaux de France, qu'on aura.
Assurément nous ne* sommes pas assez heureux pour combiner que dans Fespèce humaine en général, dans quelque pays qu'on la prenne, il y aura par lustres tantt d'hommes d'un mérite très éminent; et. nous ne. sommes' pas assez- malheureux pour que l'on puisse assumer qu'il y aura des occasions de rendre des services militaires très mémorables. le crois donc tout à fait avec M. de Griillon, qu'il est impossible de fixer le nombre des; maréchaux de France, et j'appuie son amendement.
Il serait injuste de suspendre en temps de paix la nomination, des maréchaux de France. Par exemple vous avez dans le moment aetuel des gens qui'ont très bien servi, M. de Rocbambeau et M. de Bouillé (Murmures et applaudissements), et par conséquent ils doivent avancer tant qu'il y a place pour eux ;. eac.fi nous avions le bonheur de vivre en paix- pendant 50 ans; tous ceux qui ont bien servi ne pourraient parvenir à ce grade-là. Jé demande en outre que le traitement soit réduit à 25,000 livres en temps de paix.
Je pense,, comme M» d'André, que la paix ne doit pas empêcher dé donner lé grade de maréchal dë France, à un officier qui a bien servi pendant la guerre. J'ajoute que dans notre ancien droit politique l'état de maréchal de. France était véritablement un.état ; Tes maréchaux remplissaient des fonctions purement civiles. Je propose en conséquence de dire qu'il y aura six. maréchaux de France qui he.seront considérés que comme premier grade militaire seulement, n'ayant aucune des autres attributions incompatibles avèc le régime militaire..
C'est sans doute assez de six maréchaux de France (n temps de paix ; mais je crois qu'il doit y avoir une exception en temps de.guerre. Je supplie l'Assemblée de ne pas perdre dé vue quê' la perte d'un maréchal de iranca, du grand Turenne, mil Louis XIV dans la nécessité de faire une promotion de huit maréchaux pour le remplacer, ce que M"* de Cornuel appelait la monnaie dé M. de Turenne.
(L'Assemblée fixe le nombre des maréchaux à six et décrète l'amendement de M. Emmery* relatif à l'incompatibilité de leur geade avec les fonctions civiles.)
Souvenez-vous, Messieurs, que les grandes places largement récompensées sont la plus grande source de la destruction des Constitutions libres. On a prie pour base le trai-
tement des ministres, qui est porté à 100,000 livres. Avez-vous pris cette base pour vos. juges, pour ves évêques? Je.persiste à demander l'adoption de l'amendement de 25,000 livres en temps de paix.
Le comité militaipe vous apporte une foule de décrets particuliers pour fixer la dépense de l'armée; vous ne sav^z pas encore à quelle somme va s'élevèr cette dépense; de la guerre. On vous a toujours annoncé qu'elle serait réduite avec une sé'vëre économie, et je vois qu'elle s'élèvera au moins à lOdou 110 millions.
Gertain ment, quand un maréchal de France aura 20,000 livres de traitement pendant la paix, ce sera bien honnête. Il faut, pour le rétablissement des mœurs, ramener l'économie et la fru-f alité dan*le royaume. Or, un homme qui aura 0,000 livres de rente, pourra vivre fpi*t honnêtement.
, rapporteur. Pour répondre à M„ Martineau, je dis que le comité est certain que les dépenses de la guerre ne passeront pas 90,000 millions; sur.quoi il y a de&dé--penses qui ont été fixées par l'Assemblée elle-même, lorsqu'elle a arrêté l'organisation de l'armée.
Quant au traitement des maréchaux de France, l'Assemblée peut le réduire si elle le veut; mais it est impossible qu'ils ne reçoivent pas chez eux les officiers qui leur apportent des nouvelles des diverses parties de Jeur commande tuent. Le comité avait pensé que ce n'était pas le moment d'ôter k cet état le lustre qu'il pouvait avoir, et à; ceux qui l'obtiendraient, les moyens de vivre honorablement.
Je demande que le traitement des maréchaux de France soit réduit à 10,000 livres,
(L'Assemblée dévête qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cet amendement-);
Je propose de fixer le traitement des maréchaux à. 30,009 livres.
11 faut adopter cet amende** méat.
Je demande la priorité pour l'amendement de 25,000 livres.
(L'Assemblée rejette.déchiffré de 25>00Q livres et adopte celui de 30$Û0.)
Le décret est imparfait : avant d'obtenir 30,000 livres pour être en activité en temps de paix, je demande combien iis auront en temps de paix lorsqu'ils ne seront pas en activité.
, rapporteur, La difficulté de M. Lànjuinais consiste en ce qu'il y a actuellement neuf maréchaux de. France, doafc vous venez de décréter que six seront, en activité. Vous pouvez, si vous le voulez, renvoyer cette question au comité des pensons, pour voir ce qu'ici vous proposera.
(Cette motion est décrétée.)
, rapporteur. Voici, avec les amendements adoptés, k rédaction du
(Cette motijn est décrétée.)
L'"Assemblée nationale décrète :
1° Qu'à l'avenir le nombre des maréchaux de France lie pourra excéder celui die 6; qu'ils ne pourront avoir d'autres fonctions qnie des fonctions militaires, et que leur traitement sera fixé à 30,000 livres. Quant aux traitements des maréchaux de Fratnce, actuellement existants, qui ne seront pas conservés en activité, il- y sera sta*» tué, après avoir entendu le comité des pensions^
2a Que les lieutenants généraux en activité seront réduits à 30, et que les quatre: principaux commandements de troupes, auxquels il a été affecté un traitement particulier de 20,000 livres, pourront être confiés par le roi, soit à des maréchaux deFraiice„seikà desilieutenants généraux en activité. »
(Ge .décret est adopté.)
L'ordreda jour est la suite êe la discussion du projet de décret du eomïté de Constitution sur les dispositions qui doivent compléter l'orgam&atitMi des corps- administratifs (jl)t
, rapporteur, rappelle à l'Assemblée qu'elle s'est arrêtée hier à l'article 9 et en donne lecture.
Il me semble que les derniers mots de l'article présentent un sens trop vague. Je voudrais qu'au lieu de : « ou manquant au respect dû à l'administration supérieure », on mît : ou manquant à la -subordination prescrite par la loi».à l'égard de l'administration supérieure. »
, rapporteur. J'adopte la proposition de M. Buzot et je rédige ainsi l'antiele :
Art. 9.
« Aucun directoire- ou conseil de district, ni aucune municipalité, ne pourront, sems la même peiue; publier, faire afficher, ou persister à faire exécuter un arrêté contraire à cvlui du département ou du district,. ou manquant à la subordination prescrite par la loi, à; l'égard de l'administration supérieure. » (Aappté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 10.
Je voudrais que dans la disposition : « en ce qui concerne lies objets relatifs à la guerre et à la marine », on ajoutât : «et à l'ordre judiciaire. »
, rapporteur. J'adopte l'amendement.
Un membre : Je demande qu'on retranche de l'article les mots : * contrarier, suspendre, gêner », qui me paraissent inutiles.
, rapporteur. J'adopte aussi cet amendement.
Je fais part d'un amendement relatif à la défense aux corps
administratifs de recevoir des envoyés. Le département de la Moselle —
je dénonce ce fait à l'Assemblée — a eu l'audace de recevoir un envoyé
du prince de Nassau, malgré la réquisition contraire de.son procureur,
général syndic.
, rapporteur. Je proposerai un article qui contiendra les propositions de M. La-vie.
Voici, avec les amendements, la rédaction de l'article 10 :
Art. 10.
« Le mandement de faire exécuter, qui se trouve à la fin des lois, n'aura, à l'égard des municipalités et des corps administatifs, en ce qui concerne les objets relatifs à l'ordre judiciaire, à la guerre et à la marine, que l'effet d'assurer l'exécution de la loi, lorsqu'ils en s ront r quis, dans les formes prescrites par la Constitution : et dans aurun cas, les corps administratifs et les municii alités ne pourront s'immiscer en rien de ce qui regarde l'exécution des ordres donnés par le pouvoir exécutif touchant l'administration, la discipline, la disposition et le mouvement de l'armée de terre, de l'armée.navale et de toutes leurs dépendances. » (Adopté.)
, rapporteur, fait lecture des articles 11,12 et 13.
Art. 11.
« Les conseils de district seront tenus d'adresser chaque année, au directoire de département, le procès-verbal de leur session, avant l'ouverture de la session du conseil de département. » (Adopté.)
Art. 12.
« Indépendamment de la correspondance habituelle avec les directoires de département, les di-rectoiies de district seront tenus d'envoyer tous le3 mois, au département, un tableau raisonné des progrès de l'exécution des diverses parties confiées à leurs soins. * (Adopté.)
Art. 13.
« Les actions relatives aux domaines nationaux ou propriétés publiques ne pourront être intenté' s ou soutenues par un directoire de district, qu'avec l'autorisation du directoire de département. »
Il me parait que cet article est insuffisant; car si les directoires de district ne font pas leur métier, il faut bien que le département y supplée.
, rapporteur. Je réponds au préopiliant que cela est décrété dans la loi du 29 décembre 1789.
Dans le décret que l'on vient de citer, il est dit que les tribunaux de district ne pourront point s'immiscer dans les objets d'administration. De là, il est arrivé que les distric s, sans avoir égard à la disposition de certains articles qui ont excepté de la loi générale 1 s biens dépendant des bénéfices étrangers, ont procédé à l'adjudication de ces bieus, nonobstant toute opposition.
Je voudrais bien qu'il fût pourvu à un pareil abus.
, rapporteur. Lorsque vous
ourez achevé votre Constitution et que les idées se seront éclaircies, il ne sera pas difficile de distinguer ce qui est dans l'ordre administratif et ce qui est dans l'ordre judiciaire.
Je demande donc qu'on mette l'article aux voix.
(L'article 13 est adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 14 :
Art. 14.
« Ces actions seront intentées ou soutenues au nom du procureur général syndic du département et à la diligence du procureur syndic du district de la situation des biens. » (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 15.
Comme l'esprit de l'article est d'éviter toute collusion entre les intendants et les particuliers, il faudrait ajouter à l'article": « Et le procureur général syndic du département sera tenu d'intervenir ».
, rapporteur. Il y aurait de l'inconvénient à forcer l'intervention.
Eh bien, mettez : « pourra intervenir ».
, rapporteur. Cela est de drôiL:
Je demande qu'il soit dit dans l'article que ce sera toujours en la présence du procureur général syndic ou par son avoué que l'action se poursuivra.
J'appuie l'amendement de M. Le Chapelier; il laut spécifier l'obligation de la présence du procureur général syndic.
{L'amendement de M. Le Chapelier est adopté.)
, rapporteur. Voici la rédaction de l'article avec les amendements :
« Art. 15. Les actions relatives aux domaines nationaux, dont le roi a la jouissance, seront intentées et soutenues par l'intendant de la liste civile, ou par celui que désignera ie roi, à la charge de notifier la contestation au directoire de département lor-qu'elleintéresseralapropriété; en ce ras, lé procès ne pourra être instruit et jugé qu'eo la présence du procureur général syndic, qui sera tenu d'intervenir à la diligence du procureur syndic du district. » (Adopté.)
M. Démennier, rapporteur. Messieurs, je demande à rendre compte a l'Assemblée des motifs qui ont déterminé le comité à vous présenter les articles suivants, dont je viens vous donner lec-tuie :
« Art. 16. Les conseils de département ne pou-ro it ni retarder ni avancer l'époque de leur rassemblement, àmoinsque, d'après des «constances impérieuses, les directoires n'en aient obtenu la permission du roi. Dans le cas où l'époque de leur rassemblement serait avancée, les directoires de département le notifieraient aux directoires de district, afin que l'intervalle prescrit entre fa tenue des conseils de district et celle de département soit toujours observé.
« Art. 17. Les conséils de département ne pourront ni discontinuer leurs séances, ni s'ajourner
qu'aux époques fixées par la loi, à moins que les circonstances n'aient déterminé le roi à autoriser cette discontinuation ou cet ajournement. »
D'abord, il y a des administrations de département qui ont discontinué leurs séances et qui se sont ajournées sans permission: premier point sur lequel il faut statuer.
U est assez difficile d'établir qu'en aucun cas un directoire de département ne pourra pas discontinuer sa séancer II peut arriver des maladies épidémiques. Il peut arriver dans les départements frontières, voisins de la mer, des accidents qui ne permettent pas le rassemblement du corps administratif; il est impossible que l'on abandonne au Corps législatif le soin de juger dansce cas. Voilà les motifs qui nous ont déterminés à proposer ces deux articles.
Je pense qu'il faut examiner ces articles et en conséquence les ajourner, parce qu'ils tiennent à la liberté et cela sous plusieurs rapports..Ces articles donnent évidemment tropdeforce au directoire. il faudrait examiner si on ne pourrait pas trouver un moyen par lequel le conseil d'administration, non seulement peut s'assembler sous l'avis ou contre l'avis du directoire, mais en certains cas, rares sans doute, et nécessaires à déterminer, sans la permission du pouvoir exécutif. Je dis que si ce moyen n'est pas trouvé, que si les cas ne sont pas déterminés, cela doit être statué, ou que si la démonstration n'est pas prête, il faut ajourner; car la matière est trop importante et tient trop aux racines les plus intimes de la liberté pour y glisser si légèrement.
Les réflexions de M. de Mirabeau me paraissent très sages. Il est des circonstances en effet où le conseil peut désirer de s'assembler, même contre le directoire, et il est bon de prévoir ce cas-là. On peut peut-être encore faire une observation. Il est dit : « que les directoires n'en aient obtenu la permission du roi ». Je crois que si le Corps législatif était assemblé, il faudrait s'adreSser au Corps législatif pour avoir cette autorisation. Je demande donc l'ajournement.
Je suis convaincu que l'écueil de notre Constitution, que le danger imminent qui la menace est un accord quelconque du pouvoir exécutif, soit avec les directoires, soit avec les conseils de département. Je pense donc qu'on ne doit pas introduire dans la Constitution un moyen par lequel le" pouvoir exécutif réuni à celui des airectoires pût avancer ou retarder le rassemblement des conseils de département, ou en faire des rassemblements extraordinaires.
La loi générale veut qu'à un temps donné les départements soient rassemblés, mais cela ne suffit pas. La loi doit prévoir encore que dans l'absence du Corps législatif il peut exister des cas où le rassemblement des conseils de département soit utile et même nécessaire. Elle doit l'autoriser, elle doit fixer précisément ces cas. Je demande donc, comme les préopinants, que les articles soient renvoyés au comité pour être décidé: 1° que les cas de rassemblements exraordi-naires des conseils de département seront prévus par la loi; 2° qu'aucune exception à la loi constitutionnelle à cet égard ne pourra être prononcée que par un décret du pouvoir législatif.
(L'Assemblée décrète l'ajournement.)
(La suite de la discussion e*t renvoyée à la séance de demain, au matin.)
Monsieur le Président, je demande la paro'e sur un objet particulier.
Vous avez la parole.
Je priel'Assembléede considérer l'observation que je vais lui faire, moins sous l'aspect philanthropique qu'elle présente, que sous le tort qu'elle peut causer à la France, et de considérer que je crois parler à des législateurs sur qui repose le honhenr de l'Empire, et non devant une société de philanthropes qui a cherché à égarer l'Assemblée, en l'engageant à admettre demain au soir à la barre une députation de soi-disant gens de couleur.
Vous n'ignorez pas l'état d'effervescence où sont les Colonies, rap; elez-vous que vous venez de dépenser 20 millions pour y envoyer des armées. Eh bienl quand vous en dépenseriez 500, quand vous enverriez toutes vos forces navales, si vous admettiez les gens de couleur à la barre, je vous le dis en frémissant, vous ne pourriez plus compter sur vos colonies. Ce n'est pas sans une profonde douleur que jeime vois obligé de vous annoncer cette vérité ; mais, Messieurs, votre décret montera l'effervescence au dernier point. Je déclare que, dans mon opinion, dans celle de nos concitoyens, nous sommes dans l'intention d'adoucir le sortde cette espèce d'hommes. (Murmures prolongés.)
Les colonie- n'ont accepté vos décrets qu'en stii ulant que l'Assemblée nationale ne se mêlerait jamais du sort des gens de couleur : votre comité colonial vous a fait décréter, le 12 octobre dernier, que l'intention de l'Assemblée nationale était de ne jamais se mêler du sort de ces gens-là, sauf la demande préliminaire des colonies.
Actuellement, Messieurs, 'qu'est-ce qu'on vous propose ? De prétendus philanthropes, dans l'ombre des ténèbres, vous suggèrent des mesures qui réduiraient cette superbe monarchieà devenir un pays désert, si leurs folies pouvaient y être admises.
Un membre: Qu'est-ce que c'est donc que ça?
Oui, Messieurs, ils ont attaqi é vos décrets et vos comités dansdes libelles incendiaires; ils ont attaqué personnellement les membres qui les composent; et cela parce qu'ils ont été législateurs, hommes d'Etat.Ces gens qui se présentent aujourd'hui ne sont pas envoyés par les colonies; leur réclamation n'a point été présentée au comité colonial ; ce sont des gens sans aveu, dans un état de domesticité ici à Paris, et qui peut être sont vendus à cette prétendue société de philanthropes...
Plusieurs membres : A l'ordre! A l'ordreI
Vous ne devez rien avancer à cette tribune que vous n'en ayez des preuves.
Je conclurai en priait l'Assemblée, pour rétablir la paix et l'ordre dans les colonies, pour empêcher que des torrents de sang ne coulent, de vouloir bien suspendre cette admission et ordonner que si les gens de.couleur ont des réclamations à faire, ils les remettent au comitécolonial, et qu'ils ne soient point admis; car je le dis avec amertume, mais avec vérité,'un quart d'heure après qu'il sera connu dans les colonies
que vous avez admis à la barre une députation de noirs, soyez certains que toutes les colonies seront en insurrection.
paraît à la tribune.
Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix !
insiste pour avoir la parole.
Je demande la permission de faire une motion que je n'ai jamais faite dans l'Assemblée, c'est que la discussion soit fermée. {Applaudissements-)
Plusieurs membres ; Aux voix ! aux voix !
Je demande la parole pour repousser une calomnie.
Je demande que M. Pétion soit rappelé à l'ordre, il veut faire la loi à l'Assemblée.
paraît à la tribune, à côté de M. Pétion.
Il y a un décret qui accorde l'admission; j'en demande l'exécution^kfuetfoB passe à l'ordre du jout.
Il y a un décret rendu pour admettre cette députation à la barre. Je demande qu'on passe à l'ordre du jour.
Messieurs, hier, à midï passé, il est arrivé une. lettre adressée au Président, par laquelle des gens de couleur demandaient l'admission à, la barre pour présenter une pétition. L'Assemblée a décrété que son Président examinerait leurs pouvoirs et lui en rendrait compte. Voilà la position où est l'Assemblée dans ce moment-ci. Je me feraf toujours un devoir d'être de la plus grande exactitude.
. Cette députation a envoyé chez votre Président une pétition revêtue d^un grand nombre de signatures. Je ne sais pas s'il y .a un homme qui puisse juger dé la vaUdité de signatures envoyées de 1,500 lieues : certainement, si cet homme existe, ce n'est pas votre Président. Je demande donc en vous présentant la question telle qu'elle est, que vous me mettiez à portée de suivre,non pas mon vœu particulier, mais les ordres de l'Assemblée. Si quelqu'un demande la parole sur la manière dont je pose la question, je demande à l'Assemblée la permission de la lui accorder.
Je demande le renvoi delà pétition des gens de couleur au ccmtté colonial,
Plusieurs membres : Aux voix I aux voix !
(L'Assemblée décrète ce renvoi.)
insistent à la tribune pour obtenir la parole.
Plusieurs membres : L'ordre du jour !
Je demande la parole sur une motion particulière. (Murmures.)
L'Assemblée ne peut pas... (Bruit.)
Plusieurs membres demandent que la séance soit levée.
Monsieur le Président, veuillez bien mettre aux voix si la séance sera levée ou non ; il est deux heures et demie.
Vous ne. connaissez pas la réclamation de M. Pétion .Gomment est-il possible. Messieurs, que vous obligiez votre président à lever la séance, quand on demande la parole pour détruire une calomnie!
Plusieurs membres : Nous insistons.
La motion de lever la séance est appuyée; je la mets aux voix.
(L'Assemblée décrète que la séance est levée.)
La séance est levée à deux heures et demie.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOMLLES.
Séanee du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre de M. le maire de Paris, qui annonce l'adjudication de trois maisons : l'une louée 1,550 livres, estimée 19,833 livres et adjugée 35,700 livres; la deuxième louée 4,500 livres, estimée 75,000 livres,adjugée 88,200 livres; et la troisième louée 4.2G0 livres, estimée &7,942 livres, adjugée 79,100 livres.
Les membres présents à l'ouverture des séances sont en si petit nombre que la salle est presque déserte.Je connais deux moyens de punir les membres paresseux de cette Assemblée et de les rendre plus diligents; le premier de ces moyens me parait bon; le second infaillible. .
Le premier moyen consiste à inscrire au procès-verbal de la séance le nom des membres présents au moment où le secrétaire monte à la tribune pour iire le procès-verbal de ,1a séance précédente; et la France ne sera pas peu étonnée de voir tous les jours les mêmes membres présents à l'ouverture des séances.;
Quant au second moyen, j,e le dirais bien ; mais peut-être quelques personnes se fâcheront.
iPlusieurs membres : Non 1 non ! parlez ! partez!'
Vous me l'ordonnez, Messieurs?
Plusieurs membres : Oui! oui !
Eh bien, ee moyen-consiste à condamner, en forme de neuvaine pënitentielle, les membres paresseux de la gauche à siéger pendant neuf jours de ce côté. (Il désigne la droite„)
Un membre à droite : Et huit jtiurs là-haut. (ï? désigne l'extrême gauche.)
Je ne propose point de peines
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre des administrateurs du directoire du département du Jura, qui témoignent l'inquiétude que leur a causée le refus fait par M. Guilloz, d'accepter l'évêché du Jura, refus motivé sur son grand âge et ses infirmités; ils supplient l'Assemblée nationale de faire cesser la joie insultante des méchants en décidant M. Guilioz à se rendre aux vœux de ses concitoyens.
J'atteste la vérité des motifs et la sincérité des sentiments patriotiques de ce vertueux erclésia-tique; je prie l'Assemblée nationale d'autoriser M. le Président à répondre aux administrateurs.
(Cette motion est décrétée.)
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier, qui est adopté.
Messieurs, je n'ai jamais eu l'honneur de demander votre attention pour aucun fait qui me fût personnel; il en est un qui m'est plus cher encore, puisqu'il concerne mon père. Je vous demande de me permettre de vous parler de lui pendant quelques instants.
Messieurs, en assurant à chaque citoyen fran' çais le droit de pétition, vous n'avez pas prétendu l'interdire aux membres de cette Assemblée, vous n'avez pas voulu les distinguer, d'une manière aussi sévère, du peuple dont ils font partie et qu'ils représentent. C'est dans cette confiance que, cédant aujourd'hui aux sentiments les plus chers et les plus irrésistibles, désirant accomplir un devoir impérieux et sacré, j'ose réclamer un moment votre attention; j'ose vous adresser une demande dont votre justice même,que j'invoque, semble me permettre d'espérer le succès.
Forcé de "rappeler des circonstances glorieuses pour la nation, mais qui furent bien i énibles, bien difficiles pour moi, ma reconnaissance ne laissera pas échapper cette occasion de rappeler en même temps les témoignages consolants que je reçus de votre bienveillance, et qui', malgré l'extrême délicatesse de la position où je me trouvais, m'ont permis, j'ose le dire, rte prétendre voir mon nom inscrit, par vous-mêmes, parmi ceux des plus constants et des plus intrépides défenseurs de la liberté. - Il, y a quelques jours que, au moment où la discussion d'une affaire pressante m'avait appelé dans un de vos comités, vous avez rendu un décret, dont l'intention est sage et ju-t sans doute, mais dont l'application, immédiate à toutes les circonstances,pourrait, à quelques égards, paraître d'une extrême rigueur. Les dispositions de ce décret menacent mon père de se | voir privé, à la /in d'une longue et glorieuse carrière, de la première dignité militaire, de cette dignité dont il fut jugé digne- par l'estime reconnaissante de ses concitoyens qu'il avait défendus, par l'estime honorable des ennemis de la patrie qu'il venait de combattre.
Vous ne l'ignorez pas, Messieurs ; mon père, toujours étranger aux intrigues de la cour, toujours repoussé de ce séjour par sa vertu même, a vécu, depuis l'âge de quatorze ans, parmi les soldats : il fut leur ami, leur père ; et leur attachement, aussi constant qu'éprouvé, fut à la
fois sa plus douce récompense et l'une des principales causes de ses succès
Si les dangers de l'Etat, si Fopinion que mon père ava t donnée de ses talents l'ont placé fort jeune à la têie des armées, pour repousser l'injuste idée qu'il en fût redevable à la faveur, il me suffirait sans doute de dire que, après plusieurs victoires décisives dont une, entre autres, -celle de Berghen, empêcha les ennemis de pénétrer sur le territoire de France, il ne reçut de la cour, pour récompense, qu'une disgrâce éclatante, un exil qui, en ajoutant à sa gloire par l'éclat de l'adversité, devient aussi le terme fatal de la .supériorité qu'il avait rendu aux armes françaises.
D'après ce tableau succinct, que ceux qui combattirent auprès de mon père ne trouveront pas exagéré, et où ceux mêmes qui n'ont pas eu avec lui des rapports personnels reconnaîtront une image tracée depuis longtemps par l'estime publique, j'interpelle toutes les âmes sensibles à la voix de l'honneur ; j'ose m'adres-ser au cœur de tous ceux qui m'écoutent ; je leur demande s'ils croient qufr celui qui ne vécut que pour la gloire, qui, pendant tant d'années, la regarda comme le seul prix cligne de ses travaux et de ses^servi-ces, pourrait sur-vivre un moment au malheur de perdre, dans l'armée française, un rang si justement acquis et de subir une peine infligée par la nation même, pour laquelle il versa plusieurs fois son sang, il exposa mille fois sa vie.
S'il était question ici de réclamer la conservation des traitements et des grâces pécuniaires dont jouit mon père, je rougirais die vous rappeler les titres qui les lui ont mérités ; je ne m'exposerais pas à être désavoué [ ar son désintéressement éprouvé : je croirais m'abaiisser moi-même. Mais il s'agit uniquement d'honneur et de gloire ; mais je suis entraîné par un sentiment profond de piété filiale, dont mes opinions constantes doivent être le plus sûr garant aux yeux de ceux à qui je m'adresse, aux yeux de ceux qui ont fondé les bases de la liberté sur la régénération du véritable honneur et de toutes les vertus morales.
Me voici arrivé à une époque qui réveille toute ma sensibilité, et pour laquelle je vous ai annoncé, Messieurs, que j'aurais besoin de toute votre indulgence. La gravité des circonstances qui se sont succédé depuis vingt mois, m'a imposé jusqu'ici un silence pénible. Il est temps enfin de le rompre ; et c'est un devoir sucré pour moi de vous montrer la vérité, dès qu'elle peut, quand elle doit être accueil ie.
M. le maréchal de Broglie, éloigné de la cour et des affaires, vivait paisiblement à la campagne. Pour l'arracher à cette retraite qu'il chérissait, il ne fallut pus moins que la nouvelle positive et officielle des dangers dont on était parvenu à persu ider au roi lui-même que sa personne était environnée. Sur cet avis alarmant, accompagné d'un ordre positif, il arriva à Versailles. Déjà les ordres étaient donnés pour le rassemblement d^s troupes, et le général destiné à les commander ignorait encore et la véritable situation politique du royaume, et ce réveil d'une nation entière., et cette opposition imposante et nouvelle entre la puissance impérieuse des vœux légitimes du peuple et les intentions de la cour. Ses premières paroles, paroles mémorables, sans doute, furent celles-ci : Je vois bien une année; mais où sont les ennemis ?
Cependant mille insinuations perfides se pressent et s'accumulent pour lui dérober la vérité. Le conseil du roi, qui redoutait sa vertu sévère, s'assemble sans cesse dans ces moments d'orage et ne l'appelle jamais. Il ignore tous les projets ; cè n'est que par la voix publique qu'il apprend le départ de M. Necker, et tandis qu'il ne s'occupe que de maintenir, parmi les troupes, la discipline el l'union avec les citoyens, cette union est troublée par des ordres oppofés aux siens, par des dispositions hostiles auxquelles il n'a aucune part.
La nouvelle qu'il en reçoit pénètre d'une douleur profonde, et, malgré les horreurs qui l'environnent, lui aide à apercevoir enfin les dangers de la chose publique.
Le premier il dévoile aux yeux du roi, trompié lui-même, l'effrayante vérité ; il lui fait connaître la nécessité de retirer les troupes; il en sollicite l'ordre; l'Assemblée nationale manifeste son vœu; les troupes s'éloignent; et leur chef, qui, s'il n'avait considéré que lui, pouvait sans doute regarder dès lors ses pénible s fonctions èomme terminées, croît devoir se dévouer encore, pour empêcher que, dans une marche longue et difficile, les soldats ne pussent être compromis avec les citoyens. Il se décide à les accompagner et sa présence prévient tous les désordres.
Arrivé dans son commandement, entouré de foldats qui le pressent d'entrer avec eux à Metz, il craint d'être un ofyjet d'inquiétude pour des citoyens qu'on était parvenu à abuser sur ses intentions. Il craint surtout, il ne peut supporter l'idée des suites funestes et peut-être sanglantes que peut entraîner leur résistance; il préfère de s'exiler lui-même; il part : les soldats qui l'accompagnentjusqu'aux frontières, aperçoivent sur son visage une altération que n'y lit jamais naître l'aspect du danger ; ils ne peuvent retenir leurs larmes, en voyant couler de ses yeux celle qu'arrache à leur vieux général le parti vigoureux auquel il se condamne.
Depuis ce temps, Messieurs, le maréchal de Broglie, vivement affecté de son 6ort, a vu sa santé s'altérer et se trouve, pour ce moment, dans l'impossibilité de se conformer au décret que vous avez rendu. Tranquille et sans reproche, dans la retraite isolée qu'il s'est choisie, il compte parmi les plus grands malheurs de sa position, de n'êtro pas à l'abri des invitations coupables que ses talents ont enhardi plusieurs fois les ennemis de la patrie à lui faire, et qui, je l'affirme ici, viennent de lui être renouvelées avec plus d'instance et plus d'audace que jamais par des personnes qui ne dissimulent plus leurs intentions. -
Voici ce que, dans sa franchise habituelle, il a répondu à ces agents perfides, etla franchise égale qui m'empêche de vous en dissimuler même la rudesse est le garant le plus sûr de la fidélité de mon exposé. Il leur a dit : « Je conçois qu'on « peut être opposé d'opinion à ce qui se fait en « France, et regarder tant de changements comme « un bouleversement fâcheux; mais je ne puis « entendre sans indignation le projet formé par « des Français, de porter les armes contre leur « patrie. Allez, vous me. faites horreur. » (Applaudissements unanimes.)
Malgré les dispositions favorables que ce récit fidèle a pu jeter dans vos esprits, quoique les demandes d'un fils pour son père ne puissent jamais prendre à vos yeux le caractère de l'exagération, je suis trop pénétré de l'étendue et de
la rigueur des devoirs que m'impose ma qualité de député à l'Assemblée nationale. Mon respect pour vos décrets combat trop puissamment dans mon cœur les mouvements silongiempsjréprimé3 d'une tendresse vive et profonde , pour que je ne sente pas l'indispensable nécessité de mettre moi-même des bornes à mes vœux.
Ce n'est donc pas une exception absolue et illimitée que je réclame en faveur de mon père; exception cependant qui, j'oserai le dire, présenterait d'autant moins d'inconvénient, que je puis défier ici l'envie elle-même de mettre quelqu'un sur la même ligne que lui, et pour la durée et pour l'importance des services militaires et pour la réputation d'une vertu intacte.
Ce que je me borne à demander, ce que je sollicite avec un sentiment de confiance qui naît de vos bontés et de votre justice, mais avec cette inquiétude qu'inspire un si grand intérêt, c'est que vous suspendiez, à l'égard démon père, l'effet immédiat de votre décret, pour ce qui concerne seulement le rang et le grade de maréchal de France; c'est que, par un ajournement, dont l'effet presque certain sera de rendre à la patrie un général qui la servit si bien pendant plus de 60 années, vous donniez à sa santé le temps de se rétablir ; à son âme celui de se pénétrer de sentiments altérés par d'autres habitudes, mais si dignes d'elle; et a son fils que vous voyez dans ce moment partagé entre des espérances timides etla crainte du dernier malheur, les moyens d'accélérer, par les motifs de la reconnaissance, un retour si désirable, et qu'il est si naturel d'attendre dans un moment où la patrie se dispose à rappeler solennellement dans son sein tous les citoyens qu'elle jugera dignes de la défendre» (Applaudissements unanimes et répétés.)
Ces applaudissements prouvent assez l'estime que vous avez pour M. le maréchal de Broglie. Je ne pourraisdire d'une manière plus touchante et plus dignement que ne l'a fait son fils, combien ce général avait mérité celle de la nation. Un mot suffirait d'ailleurs à son éloge : appelé être courtisan, il a mieux aimé être vertueux. S'il est lombé dans quelques erreurs, un demi-siècle de vertus les eftace; il ne doit nous rester que le souvenir de ses services et l'espoir de le rappeler dans nos armées.
La disposition de l'Assemblée me paraît telle que je n'ai rien à ajouter; je désirerais toutefois que l'exception proposée fût étendue au traitement de M. le maréchal de Broglie.
insiste pour que l'exception ne porte que sur le grade.
L'Assemblée adopte le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, après avoir ouï la pétition de M. Victor de Broglie, considérant les longs et utiles services de M. le maréchal de Broglie, absent en ce moment du royaume, etle mauvais état de sa santé ;
« Décrète qu'il ne sera rien statué, quant à présent, sur le rang et le grade de maréchal de France, dont jouit en ce moment M. le maréchal de Broglie, etle maintient provisoirement dans les rang et grade dont il était revêtu ;
« Décrète, en outre, l'impression de la pétition qui lui a été présentée à cet égard, et charge son Président de porter le présent décret à la sanction du roi. »
Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une
lettre du ministre des finances relative au rétablissement des bureaux de douane limitrophes de la franchise de Bayonne.
Celte lettre est ainsi conçue : « L'Assemblée nationale a décrété, le 6 décem-«er"> bre dernier, le rétablissement des douanes « limitrophes de la franchise de Bayonne ; et je « me suis empressé de prendre les mesures né-« cessaires pour l'exécution de la loi; mais à peine « le département des Basses-Pyrénées a eu pro-« cédé à cette opération, ea ce qui le concernait, « que l'esprit d'insurrection s'est manifesté de « nouveau dans plusieurs communautés voisines « de la franchise. Plusieurs bureaux ont encore « été désertés de force par les employés. Il paraît « que les habitants de l'intérieur désirent que les « barrières soient reportées à la frontière et qu'il « n'y ait plus de franchise. Si cette question, que « l'Assemblée nationale a cru devoir ajourner, « recevait une prompte décision, il est a présu-« mer que son décret aplanirait toutes diflicul-« tés.
« Je ne me permettrai pas de préjuger sa déci-« sion sur une affaire où l'intérêt ne semble plus « le même'depuis la suppression des droits à «l'intérieur, et d'après la liberté donnée à la « culture et à la fabrication du tabac; mais je « saisirai cette occasion pour la supplier de con-« sommer l'organisation des douanes nationales « que son comité d'agriculture et de commerce a « entièrement préparée, et surtout des nouveaux « bureaux sur les frontières. L'intérêt de l'indus-« trie nationale et des revenus publics sollicite «également qu'elle daigne mettre la dernière « main à l'un de ses plus importants travaux. « La France jouira alors, sans réserve, du bien-« fait d'une circulation libre. « Je suis avec respect, etc.
« Signé : DELESSART. »
'(L'Assemblée décrète le renvoi de cette lettre au comité d'agriculture et de commerce pour en faire incessamment le rapport.)
, au nom du comité de Constitution. Messieurs, vous avez ordonné au comité de Constitution de vous rendre compte de la pétition des administrateurs du district d'Aurillac, dont l'objet est que l'assemblée des électeurs au département du Cantal ait lieu eu cette ville, au lieu de celle de Saint-Flour, pour l'élection de l'évêque, et celle du membre de la cour de cassation. Je vous demande quelques minutes d'attention, afin que cet objet, dont votre comité n'avait pas cru devoir vous occuper, ne vous fasse perdre que le moins de temps possible.
Le décret relatif au département du Cantal porte l'alternative de son administration en faveur d'Aurillac, la loi. qui constitue les assemblées administratives règle, à l'article 23, que l'assemblée de tous les électeurs d'un département se tiendra alternativement dans les chefs-lieux des différents districts, pour élire les représentants de l'Assemblée nationale. C'est sur l'abus du sens et des termes de ces deux lois que posent la pétition d'Aurillac et l'arrêté du directoire du département; on y joint des inculpations contre Saint-Flour, qui ne peuvent pas faire plus d'impression. Votre, comité doit donc établir que, ni le. décret particulier du département du Cantal, ni la loi générale des assemblées administratives, ni les considérations particulières dont on s'appuie, ne vous permettent d'adopter une pétition semblable.
L'alternat que vous avez permis d'établir est celui des administrations du département dans ceux, où l'alternative de l'administration serait jugée nécessaire : ainsi de plus/en décrétant en vertu de cette loi l'alternat de l'administration entre Aurillac et Saint-Flour, c'est l'alternative de l'administration du département du Gantai et non celle des assemblées électorales que vous avez déterminée. Si les décrets généraux et particuliers sur les alternats de3 administrations de département condamaent la prétention de la ville d'Aurillac, il en est de même de la loi constitutive des administrations de département dont elle s'aDpuie. De quoi s'agit-il en ce moment? De l'assemblée des électeurs pour la nomination d'un évêque et d'un membre de la cour de cassation. De quoi parle la loi? Elle parle des assemblées électorales pour la nomination des représentants de l'Assemblée nationale. Le motif qui vous a fait déterminer la convocation des électeurs alternativement dans tous les chefs-lieux de district était d'éviter la prépondérance que pouvait prendre une seule ville pour l'élection des représentants à l'Assemblée nationale; mais si ce motif a pu déterminer une semblable disposition, on ne peut pas l'étendre au delà de son sens et de son texte formel.
Ce sont ces raisons qui ont déterminé votre comité de Constitution à ne pas vous présenter la pétition des. administrateurs du district d'Aurillac; ils la colorent encore d'imputations contre la ville de Saint-Flour, qu'ils prétendent peuplée d'ennemis de la Constitution ; ils articulent qu'il y a eu des troubles lors de la première assemblée électorale qui y a été tenue, et que s'il n'en a pas été dressé procès-verbal, c'est que le maire de Saint-Flour a supplié que la chose fût oubliée. Il n'y a presque pas eu d'assemblées électorales qui n'aient été troublées par les rivalités des villes. Aurillac et Saint-Flour sont opposées et rivales depuis longtemps; c'est par cette raison que l'on a voulu les réunir, en établissant en leur faveur l'alternative de l'administration; mais c'est un mauvais système pour les accorder, ainsi que les électeurs de ces cantons, que de violer la loi particulière qui a été faite eu faveur de tous pour le bien de la paix; c'est u a mauvais système que d'intervertir les lois générales pour favoriser une prétention particulière; un pareil décret serait l'interversion de V03 lois constitutives, il mettrait le trouble dans les départements, et il serait contraire à la raison et à la justice.
Voici ce que votre comité vous propose :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution, décrète qu'il n'y a lieu à délibérer sur la pétition de3 administrateurs du district d'Aurillac, à l'effet que l'assemblée électorale du département du Cantal soit convoquée en cette ville, pour y être procédé à l'élection de l'évêque, et à celle d'un membre de la cour de cassation. »
(Ce décret est adopté.)
Plusieurs membres élèvent des réclamations sur cette décision.
Je dénonce à l'Assemblée la réticence de M. le rapporteur.
Plusieurs membres : L'ordre du jourl
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
L'ordre du jour est un rapport du comité d'imposition sur la suppression de la ferme générale et de la régie générale et sur la vente au sel et du tabac.
, au nom du comité d'imposition. Messieurs, l'ordre du jour est la suppression de la ferme générale et de la régie générale. De toutes les perceptions confiées à la régie générale et à fa ferme générale, i>l n'en subsiste presque plus de fait, et de droit elles doivent toutes cesser en vertu de vos décrets. Les aides cesseront au-Ie" avril, les entrées des villes au 1er mai. Ces administrations n'ont donc plus d'objet d'existence; vous ne pouvez vous dispenser de prononcer leur suppression. Il n'existera plus pendant le mois d'avril que la partie des droits d'entrée des villes, à la perception desquels nous vous proposonside prépo.-er deux administrateurs, l'un de la ferme, l'autre de la régie. Par ce moyen, vous pourrez, dès le 1er avril, faire cesser les appointements des fermiers et régisseurs généraux. Nous n'entendons pas dire par là qu'ii ne leur r^it pas dû d'abord une indemnité pour la résiliation du bail, ensuite un salaire quelconque pour la peine de leur reddi'ion'décomptés; mais cette reddition de comptes ne doit pas être un sujet de prolonger leurs appointements. 'Des appointements ne doivent jamais être attachés qu'à des services actifs. Le salaire donné pour une reddition de comptes, au lieu d attacher les comptables à ce travail, doit au contraire les déterminer à l'accélérer.
Quoique ce soit au comité des finances à vous présenter le mode de liquidation et de comptabilité, je vous présenterai quelques vues, fc proposerais que quand on aura déterminé le temps nécessaire pour la reddition des comptes, le payement des comptables lût réglé dans une progression décroissante, de telle manière qu'à l'époque où l'on presumera que les comptes devront être terminés, le payement cesse entièrement; et que lorsque ie terme fixe sera passé, au lieu d'être appointés, ils soient tenus à une restitution : c'est ainsi fu'OH les forcera, par leur propre intérêt, à accélérer leurs comptes. Mais c'est au comité des finances à s'occuper de cet objet.
Le seul point que je puisse soumettre en ce moment à votre délibération, c'est queues appointements des fermiers et régisseurs cessent à compter du 1er avril. Le but de l'Assemblée nationale doit être d'éviter les frais de manutention de toutes ies régies quelconques. Le nombre des personnes employées à l'administration des magasins de sel et aes fabriques de tabac ne doit pas être considérable pour qu'elles fructifient. Nous vous proposons donc que la viente de ces objets ne se fasse que 4ans un seul magasin, et qu'il n'y ait point d'entrepôts aux frais et périls de la nation.
La nation doit agir comme l'entrepreneur qui exploite une manufacture importante. Il se garde bien, quand la manufacture est achalandée, d'entretenir des dépôts à ses frais et risques; il a des correspondants qui revendent à leur compte; il s'assure de leur bonne foi, et ne court que les chances du commerce, c'est-à-dire qu'il se borne à faire quelques avances; mais il se garde bien de se soumettre à des manutentions lointaines à ses frais. Loin d'avoir des entrepôts tels que ceux de la ferme générale, vous n'aurtz plus qu'une administration ce .traie siégeant auprès du gouvernement, et vous aurez une responsabilité plus certaine. Nous pensons que, dans l'exploitation des manufactures nationales, il faut diminuer, autant qu'il est possible, te nombre des administrateurs ; c'est le seul moyen d'affirmer et de rendre efficace la respon-
sabilité, et d'éviter la fraude et la mauvaise foi»
En laissant subsister les entrepôts, vous perpétueriez les agents de la ferme générale, longtemps après que la ferme elle-même serait supprimée; et nous devons vous faire remarquer combien ce système serait dispendieux. Depuis que le sel «est libre, la ferme générale n'en a presque i oint vendu-dans ses entrepôts; et la raison en est évidente : les employés ont dit en eux-mêmes : nos appointentente dureront tant que nos magasins seront remplis ; il est donc de notre intérêt de ne point vendre. C'est ainsi qu'il e-t arrivé que la ferme générale n'a vendu, pendant l'année dernière, que pour 1,800,000 livres de sel, tandis que les frais de manutention ont coûté 1,500,000 livres. C'est d'après ces motifs que tous vous proposons de supprimer dès cette année les entrepôts.
Nous avions compté que la vente du sel et du tabac en magasin produirait 10 millions pendant chacune des années 1791 et 1792; -mais comme nous aurons cette aanée quelque peine à combler le déficit, il paraît plus convenable de faire cette vente en une seule année, ce qui suppléera à la ressource des impôts extraordinaires. Ce moyen diminuera effectivement les revenus sur lesqi'ut4s nous comptions pour l'année prochaine; niais nous aurons alors, et moins de besoins, et plus de ressources-, nous aurons surtout une ressource d'environ 10 millions que votre comité d'imposition vous proposera d'employer; je veux dire celle de l'extinction des rentes viagères les plus onéreuses. iËn supprimant tout de suite les entrepôts, vous ôt z à la ferme générale tout prétexte de retarder la reddition de se^ comptes. Tant ijU'il lui resterait des magasins, des entreposeurs, elle voudrait perpétuer son existence. Nous aurions toujours des commis, des administrateurs disséminés sur toute la surface du royaume; et il est temps de mettre fin même aux éloges que des personnes intéressées s'obstinent à donner à ce régime dispendieux. D'ailleurs, en vendant tout cette année, vous n'aurez plus à supporter les frais de régie, et les magasins eux-mêmes seront disponibles et pourront être vendus comme les autres domaines nationaux; ce qui augmentera d'autant les fonds dont nous avons besoin cette année.
Voici le projet de décret que nous vous proposons :
« Art. 1er. A compter du 1er avril prochain,
les droits d'entrée des villes, conservés jusqu'au l'9r mai suivant, et
les droits perçus par la régie générale, conservés jusqu'au 1er avril,
seront régis par deux administrateurs que le roi nommera.
« A compter du même jour; la ferme et la régie générale sont supprimées, à la réserve des employés nécessaires pour la perception des entrées des villes.
« À compter dm même jour, le traité passé avec Kalewddu est résilié; à compter du 1er janvier 1791, le bail passé à Jean-Baptiste Mager et à ses cautions, le 8 mai 1786, est pareillement résilié. Ledit Mager et ses cautions compteront, de clerc à maître, du produit de leurs perceptions, depuis cette époque jusqu'au 1er avril.
« Art. 2. Le comité des finances proposera incessamment un projet de décret, relativement à la reddition des comptes, tant de la régie que de la ferme, à la liquidation des cautionnements et fends d'avance, tant desdits Mager et ses cautions, } Kalesdrin et ses cautions, que de leurs receveurs ' et autres employés ; et enfin au remboursement
desdits fonds d'avance et cautionnement, ainsi qu'à la conservation des droits, privilèges et intérêts respectifs, tant des prêteurs desdits fonds d'avance et cautionnement, que des débiteurs pour lesquels l'avance en aura été faite au Trésor public.
« Ne pourront aucuns desdits comptables faire compensation de leurs fonds d'avance et cautionnement avec le produit de leurs recettes.
« Art. 3. Immédiatement après la promulgation du présent décret, ies directoires de district nommeront des commissaires pour procéder, sans délai, à l'inventaire des sels et tabacs qui sont maintenant dans les mains d ; Mager et ses cautions, ainsi que des terrains, bâtiments, pata-ches, bateaux, voitures, chevaux, meubles et ustensiles de toute espèce, servant à l'exploitation, tant dudit Mager et ses cautions, que de Kalendrin et ses cautions, à l'exception néanmoins des parties qui pourraient concerner les entrées des villes conservées jusqu'au 1er mai, desquelles parties il ne sera fait inventaire qu'aux époques où finiront les perceptions.
« A la clôture de chacun desdits inventaires, en chaque lieu, lesdits sels, tabacs, terrains, bâtiments, pataches, bateaux,- chevaux, voitures, meubles et ustensiles, seront remis à la nation par lesdits Mag« r et Kalendrin et leurs cautions, à qui les commissaires en donneront acte.
« Art. 4. Les fabriques de tabac et les salines faisant partie du bail de Mager, ainsi que les magasins ou dépôts nécessaires à l'exploitation des salins et à la recette des sels dos à titre de redevance par quelques salins particuliers, seront employées avee toutes leurs dépendances aux exploitations décrétées au profit du Trésor public et ainsi qu'il sera dit ci-après,
« L'Assemblée nationale se réserve néanmoins de statuer ultérieurement sur la conservation, la suppression ou l'aliénation des salines et salins, après le rapport qu'elle charge son comité de l'imposition de lui faire sur les avantages ou les inconvénients de ces possessions.
« Art. 5. Les autres maisons, bâtiments, magasins et entrepôts qui ne servent point aux exploitations mentionnées dans l'article précédent seront vendus comme les autres bieûs nationaux.
« Art. 6. Les baux de ceux qui sont tenus à bail seront résiliés, etle comité des finances proposera les moyens de pourvoir aux indemnités des propriétaires s'il y a lieu.
« Art. 7. Les directoires de district mettront en vente au plus offrant et dernier enchérisseur, après deux affiches et publications faites deux dimanches consécutifs dans toutes les municipalités de leur ressort, les sels et les tabacs manufacturés qui se trouveront dans les entrepôts ou magasins, à l'exception néanmoins des sels existant dans les salines, salins et dépôts servant à l'exploitation des marais salants. Le sel sera vendu par parties de 5 quintaux au plus, et le tabac par quintal.
« L'adjudication ne pourra $tre faite à un prix inférieur à ceux fixés par le tableau joint au présent décret.
« Les directoires de district vendront pareillement les chevaux, pataches, bateaux, meubles et ustensiles de toute espèce dépendant des exploitations des fermes et régies dont il s'agit, et autres que celles réservées par l'article 4.
« Art. 8. La direction de la fabrique nationale de tabac et le débit du tabac de cette fabrique,
ainsi que l'administration des salines et salins nationaux et des redevances en sel dues par quelques salins particuliers, et le débit en libre concurrence des sels provenant de ces s ilines, salins et redevances, et e ifin les fournitures die sel à faire aux étrangers, en vertu ds traités faits par le gouvernement, scrontremis à un régisseur négociant depuis dix années au moins, ët qui sera nommé par le roi.
« Art. 9. Les sels et les tabacs provenant à l'avenir de fabriques ou recettes nationales, seront vendus immédiatement par la régne aux acheteurs sans intermédiaires, entreposeurs ou commissionnaires pour le compte de la nation.
« Art. 10. Les prix, auxquels lesdits sels et tabacs devront être vendus, seront déterminés suivant les circonstances des temps et des lieux, par l'administration des finances à qui le régisseur national rendra compte chaque semaine de l'état des choses, et les prix fixés seront affichés en chaque lieu de débit et annoncés dans les papiers publics.
« Art. 11. L s administrateurs des douanes nationales nommeront aux places vacantes, les ci-devant préposés et employés de la régi-i de la ferme généraient ils suivront l'ordre d'ancienne'é, pourvu néanmoins que lesdits préposés soient pourvus de certificats de bon serviee et de bonne conduite, de la part des municipalités où ils auront exercé leurs fonctions, et des chefs sous lesquels ils auront servi. »
La discussion est ouverte sur ce projet de décret.
Les trois premiers articles sont adoptés, avec quelques amendements, dans les termes suivants :
Art. 1er.
« A compter du 1er avril prochain, les droits
d'entrée des villes, conservés jusqu'au 1ersip mai suivant, seront régis
par deux administrateurs que ie roi nommera.
« A compter du même jour, la ferme et la régie générale sont supprimées, à la réserve des employés nécessaires pour la perception des entrées des villes jusqu'au 1er mai.
« A compter du môme jour, le traité passé avec Kalendrin est résilié; à
compter du 1er janvier 1791, le bail passé à Jean-Baptiste Mager, et à
ses cautions, le 8 mai 1786, est pareillement résilié. Ledit Mager et
ses cautions compteront, de clerc à maître, du produit de leurs
perceptions, depuis cette époque jusqu'au ler avril.
Art. 2.
« Le comité des finances proposera incessamment un projet de décret, relativement à la reddition des comptes, tant de la régie que de la ferme, à la liquidation des cautionnements et fonds d'avance, tant desdits Mager et ses cautions, Kalendrin et ses cautions, que de leurs receveurs et autres employés; et enfin au remboursement desdits fonds -d'avance et cautionnements, ainsi qu'à la conservation des droits, privilèges "et intérêts respectifs, tant des prêteurs desdits fonds d'avance et cautionnements, que les débiteurs pour lesquels l'avance en aura été faite au Trésor public.
« Ne pourront aucun desdits comptables faire compensation de leurs fonds d'avance et cautionnement, avec le produit de leurs recettes.
Art. 3.
« Immédiatement après la promulgation du
présent décret, les directoires de district nommeront des commissaires pour procéder, sans délai, sous la surveillance des directoires de département, à l'inventaire des sels et tabacs qui sont maintenant dans les mains de Mager et ses cautions, ainsi que des terrains, bâtiments, pataches, bateaux, voitures, chevaux, meubles et ustensiles de toute espèce, servant à l'exploitation, tant dudit Mager et ses cautions, que de Kalendrin et ses cautions, à l'exception néanmoins des partie-; qui pourraient concerner les entrées des villes conservées jusqu'au 1er mai, desquelles parties il ne sera fait inventaire qu'à l'époque où finira la perception.
« A la clôture de chacun desdits inventaires, en chaque lieu, lesdits sels, tabacs, terrains, bâtiments, pataches, bateaux, chevaux, voitures, meubles et ustensiles seront remis à la nation par lesdits Mager et Kalendrin et leurs cautions, a qui les commissaires en donneront acte. >
Les articles suivants, relatifs à la vente des magasias nationaux, et des sels et des taba s emmagasinés me paraissent extrêmement importants. Ou propose effectivement dans l'article 7 que ces objets soient vendus à l'enchère ; mais on ne donne pas de moyens propres à prévenir le gaspillage, on ne lixe pas l'à-peu-près du prix.
On vous a dit que les préposés à la vente des sels n'en vendent pas pour faire perpétuer leurs émolumentSi N'inculpons personne gratuitement et disons la vérité. Puurquoi vos sels ne se sont-ils pas vendus jusqu'à présent? En voici, à mon sens, la raison. Vous avez, je crois, déterminé que vos entreposeurs de sel le vendraient 3 sols la livre; je sais que plusieurs gardes de greniers à sel se sont plaints qu'on ne leur laissait pas la liberté de vendre leur sel au prix courant. Je demande s'ils pouvaient vendre du sel à 2 ou 3 sols la livre, lorsque tout le public en trouve, tant qu'il en veut, à 1 sol la livre et même à 9 deniers. Voilà la véritable raison pour laquelle Votre sel ne s'est pas vendu jusqu'à présent.
Ces objets sont très importants ; je demande le renvoi du reste du projet de décret aux comités des finances et de l'imposition réunis, ei l'ajournement de la discussion à lundi.
J'appuie l'ajournement. On ne nous dit pas quelles sont les conditions; on ne nous dit pas ce qui peut appartenir à la ferme générale et à la nation. Le comité ne nous dit jamais que la moitié de ce qu'il faut nous dire et veut qu'on adopte de confiance tuut ce qu'il nous présente; il faut qu'il nous fournisse des renseignements ultérieurs et nécessaires.
Je demande que l'A?semblée s'occupe en même temps des moyens de replacer les employés de la ferme et de la régie, ou de leur faire un sort quelconque.
, rapporteur. Il n'existe plus que la perception des douanes qui puisse fournir un moyen de remplacement aux employés. Vous n'aurez plus dans l'intérieur du royaume aucun de ces percepteurs armés qu'on appelait employés; vous n'aurez plus que pour votre contribution foncière et mobilière que les percepteurs municipaux. La perception des droits d enregistrement exige des personnes instruites dans les affaires, dans les lois domaniales.
Nous sommes obligés, même, pour détromper
les commis, qui pourraient se fonder sur de fausses espérances, de relever une erreur importante. Quelques personnes ont pensé qu'on distribuerait le papier timbré, comme autrefois le tabac, dans des entrepôts. Gela serait impossible. La perception du droit de timbre exige elle-même de grandes connaissances, comme celle des droits d'enregistrement; elle entraîne des détails minutieux. Il faut différencier la nature des actes et des lettres de change. Je dis donc que non seulement la perception du droit de timbre doit être pour l'économie, réunie à celle du droit d'enregistrement, mais que l'une et l'autre exigent des connaissances que n'ont pas la plupart des anciens percepteurs accoutumés à des perceptions purement mécaniques, et qu'elles ne peuvent, par conséquent, leur offrir aucune ressource.
Les droits de patentes remplacent les entrées des villes; c'est encore un bonheur, que, au lieu d'exiger des percepteurs armés, ils puissent être conliés aux receveurs de la contribution foncière et mobilière.
Il n'y a donc que les douanes qui offrent à la nation un asile à donner aux anciens employés. Quelque respectable que soit leur malheur, on ne regrettera sans doute pas l'ancien régime, où l'on choisissait les modes de perception bien plus pour donner des places, que pour davantage des contribuables. On ne regrettera pas cette multitude d'hommes armés qui dépeuplaient nos campagnes, et consumaient une partie des revenus publics. Les employés ne doivent donc plus attendre de ressources que dans ce qu'ils pourront obtenir de la munificence nationale et de la générosité particulière : vous leur devez la préférence pour la perception des douanes, et c'est ce à quoi pourvoit notre article 11.
Je demande l'ajournement de la motion de M. Camus, et de l'article 11, jusqu'au rapport très prochain sur les douanes.
Il n'y a qu'un tiers des sels en magasin qui appartiennent à la nation ; les deux autres tiers sont aux fermiers. Je demande que le comité présente un projet de décret sur les précautions à prendre pour en faire la distinction.
(L'Assemblée ajourne le reste du projet de décret à lundi, sauf l'article 11 qu'elle ajourne jusqu'au moment où le comité d'agriculture et de commerce fera son rapport sur les douanes nationales.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret concernant les dispositions qui doivent compléter l'organisation des corps administratifs (1).
, rapporteur. D'après les observations qui ont été faites à la séance d'hier par M. de Mirabeau et par plusieurs autres membres, sur les articles 16 et 17, le comité a examiné à nouveau ces articles, ainsi que l'Assemblée l'avait ordonné ; nous en avons modifié le texte et nous avons rédigé un article additionnel qui deviendrait l'article 18.
Voici, Messieurs, la rédaction que nous vous proposons pour l'article 16 :
Art. 16.
« La session annuelle de chaque conseil de défi) Voyez ci-dessus, séance du 2 mars 1791, page 630, le rapport de M. Démeunier et le projet de décret du comité de Constitution.
partement, ordonnée par l'article 21 delà seconde section du décret lu 22 décembre 1789, aura lieu sans aucune convocation : l'époque de cette session ne pourra être ni retardée ni avancée, à moins que, d'après une nécessité reconnue par la majorité des membres du conseil, et sur une pétition qu'ils auraient adressée au roi, le roi n'en eût accordé la permission. Dans le cas où l'époque du rassemblement serait avancée, les directoires de département le notifieraient aux directoires de district, afin que l'intervalle prescrit, entre la tenue des conseils de district et celle de département, soit toujours observée. »
Je demande, avant de statuer sur cet article, que M. le rapporteur nous fasse également lecture de l'article 17 et de l'article additionnel qu'il propose.
, rapporteur. Voici l'article 17 :
Art. 17.
« Les conseils de département ne pourront ni discontinuer leurs séances, ni s'ajourner qu'aux époques fixées par la loi, a moins que la nécessité des circonstances n'ait, sur leur.demande, déterminé le roi à autoriser cette discontinuation ou cet ajournement. »
Voici maintenant l'article additionnel qui deviendrait l'article 18 :
Art. 18 (nouveau).
« Néanmoins, dans le cas où la sûreté intérieure d'un département serait troublée au point qu'il fût nécessaire de faire agir la force publi-
3ue de tout le département, le président du irectoire sera tenu de convoquer le conseil, et, à défaut de convocation, le conseil sera tenu de se rassembler, mais toujours en donnant sur-le-champ avis de ce rassemblement extraordinaire à la législature, si elle est réunie, ainsi qu'au pouvoir exécutif; le conseil ne pourra alors s'occuper que des moyens de rétablir l'ordre, et il se séparera aussitôt que la tranquillité ne sera plus troublée. »
(Les articles 16, 17 et 18 nouveau sont décrétés.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 18 du projet de décret.
Au lieu de dire tout simplement que les conseils de département seront tenus d'adresser le procès-verbal de leur session, je voudrais que l'article portât qu'ils seront tenus d'adresser chaque année au roi deux expéditions du procès-verbal de leur session, dont l'une serait déposée aux archives de l'Assemblée nationale.
, rapporteur. J'adopte l'amendement et je propose la rédaction suivante :
Art. 19. (Art. 18 du projet.)
« Les conseils de département seront tenus de faire adresser au roi, chaque année, et dans la quinzaine après la clôture, deux expéditions du procès-verbal de leur session, dont l'une sera déposée aux archives de l'Assemblée nationale. » (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture des articles 19,22 etf23 du projet de décret, et dit : Lorsqu'une administration de département aura
prononcé sur des discussions relatives ou à la formation d'une assemblée ou aux conditions d'éligibilité, ou enfin aux divers cas désignés dans l'article 19 et dans l'article 22, nous avons pensé que l'on pourrait en appeler au directoire d'un département voisin. Il y a lieu de croire qu'on profitera rarement de cette faculté ; mais il est conforme à vos décrets, il nous a paru conforme à la raison d'établir deux degrés pour ceux qui voudraient en profiter. Alors, à l'article 22, il faudrait ajouter ces mots, qui ont été omis :
« La partie qui croira pouvoir réclamer contre la décision en appellera à l'une des administrations des trois départements, dont les chefs-lieux seront les plus voisins, laquelle prononcera en dernier ressort. »
Certainement vous avez levé une partie des objections en établissant une voie d'appel. Il est impossible, en matière d'éligibilité, de s'en passer; mais je voudrais encore : 1° qu'on distinguât l'éligibilité pour les corps administratifs et l'éligibilité pour les corps judiciaires ; 2° qu'il y eût une loi sur l'appel des décisions de 1 éligibilité pour les corps judiciaires : ainsi ie proposerais que les corps électoraux, dans leur première session, jugeassent de ces sortes d'appel. (Murmures.) Observez que ie ne fais que substituer le mot électoral a celui de directoire.
(de Saint-Jean-d'Angély). Il faut nécessairement que le pouvoir exécutif puisse refuser la commission au sujet dont l'élection à la place de juge sera contestée.. Je crois que, pour toutes les autres é'eclions, les contestations doivent d'abord être portées au directoire de département, de là au département voisin qui donnera son avi3 ; enfin, en dernier ressort, au tribunal de cassation.
Vous avez déjà décrété que les assemblées primaires et les assemblées électorales jugeraient des contestations qui pourraient s'élever dans leur sein ; l'appel sera porté au département. Il ne faut donc pas permettre d'interjeter un troisième appel, qui embarrasserait la marche des élections.
Je pense qu'en matière d'élection on ne peut pas aller aussi soudainement, de manière qu'un directoire de département puisse être maître absolu des élections. Je crois même qu'il v a une distinction remarquable à faire à ce sujet .
Il peut y avoir, sur les élections, deux manières de les attaquer. La première, parce que l'Assemblée a été tenue irrégulièrement, et que l'élection ne s'est pas faite suivant la forme prescrite par la Constitution. Cette question-là est une pure question d'administration et qui doit être jugée par le directoire de département.
L'autre partie de la distinction est celle-ci. Lorsqu'il est question des difficultés ordinaires-à l'occasion des élections, ce sont de véritables questions d'Etat. Elles portent sur la faculté d'être ou de n'être pas éligible. Or, ce n'est pas là du tout une affaire d'administrâtion, c'est une question d'Etat, un droit de citoyen qu'il faut faire juger par les tribunaux. Il n'y a qu'eux qui puissent juger cela dans lès cas spécifiés par vos lois. (Applaudissements.)
Je demande donc que cette distinction soit établie par cet article ; et je fais observer ensuite, sur le recours au pouvoir exécutif, qu'il faut être, surtout en matière d'élection, extrêmement sobre snr ce recours ; tar ai le pouvoir exécutif pouvait une ,fois, sous un prétexte quelconque, annuler des élections, s'en emparer, écarter à son gré ceux qui auraient été éhis et conserver les, autres, il est certain que cela attaquerait les bases de notre liberté publique, et que la Constitution serait perdue.
Je soutiens que dans aucun cas une.question de qualité ou de capacité,, pour être représentant dè la nation ou pour être administrateur, ne peut être portée dans un tribunal. Si on portait ces questions-là devant un tribunal, on rendrait donc les corps judiciaires arbitres, en dernière analyse, des droits politiques des citoyens; car il ne faut porter dans.les tribunaux que ce qui concerne les droits civils des citoyens, relativement à leurs possessions, relativement à leurs propriétés ; mais, quand on rentre dans la grande sphère du corps politique, il ne faut jamais qu'ils s'en mêlent. Il faut renvoyer la décision à des corps qui sont dans la ligne de la juridiction et des pouvoirs politiques. Je conclus donc que l'Assemblée veuille Dien renvoyer les articles au comité pour être rapportés demain et rédigés dans cet esprit-
C'est un principe incontestable que les droits politiques des citoyens, et par conséquent les droits de la nation, ne peuvent point être soumis ni au pouvoir exécutif, ni au pouvoir administratif, parce que si l'un ou l'autre avait droit de prononcer sur le droit politique d'un citoyen et, par une conséquence nécessaire, sur la. souveraineté du peuple, il s'ensuivrait qu'il dépendrait de ces corps d'attaquer les droits du peuple dans leurs principes et la Constitution dans ses fondements.
Il faut bien se garder, Messieurs, de confondre le pouvoir des corps administratifs avec le pouvoir du Corps législatif. Les corps administratifs ne sont pas les représentants du peuple, ils ne sont que ses délégués ; ils ne peuvent juger des qualités politiques et individuelles de chaque citoyen. Ils ne peuvent que prévenir le vœu du peuple. Le Corps législatif au contraire doit juger des qualités politiques et individuelles, parce que ce sont là les véritables intérêts du peuple.
Je conclus de cela que lorsqu'il s'élève une contestation sur le droit qu'a un citoyen de paraître à une assemblée primaire ou électorale, le sort de ce citoyen ne petit être soumis ni au pouvoir exécutif, ni au pouvoir judiciaire, ni au pouvoir administratif, mais que la contestation doit être décidée d'abord par la majorité des citoyens qui, composent l'Assemblée, et qu'elle doit être exécutée provisoirement, sauf ensuite le reeours au corps des représentants de la nation,, au Corps, législatif.
La théorie des principes, qui vient d'être développée par le préopinant me paraît la seule qui soit dans la rigueur des principes. Cependant j'avoue qu'il me paraît difficile dte ramener ce principe à son application et de faire le Corps législatif j,uge de toutes les questions 4e rillégibilité personnelle qui peut s'appliquer à chaque citoyen. Ces contestations consumeraient un temps précieux au
détriment de la chose publique. Or, if me semble tjue dans Pembarras de donner cette attribu -tion à un corps politique quelconque, je crois qu'il y a mçins de danger de la donner aux corps judiciaires.'
Le pouvoir judiciaire est absolument indépendant du pouvoirexécntif, qui n'a nulle force pour réformer les jugements du pouvoir judiciaire; et si ces jugements,, lorsqu'ils sont directement contraires à la loi, peuvent subir une cassation, il n'est pas moins vràt que ie pouvoir exécutif ne peut jamais le réformer ni substituer un jugement qu'il improuve.
C'est donc cette indépendance .du.corps judiciaire qui me ferait préférer de* leur remettre le jugement des droits politiques du citoyen. Et, après tout, ces droits politiques ne sont-ils pas la propriété la plus précieuse des citoyens? Ne sont-ils pas sa première propriété? Et à quoi sont destinés les corps judiciaires, si ce n'est pour être les juges de nos propriétés? Je leur remettrai donc en dernière analyse le jugement de cette propriété personnelle. Je conclus donc à ce que les articles soient renvoyés au comité de Constitution pour être amendés, et particulièrement dans le sens de M. Le Chapelier, pour les contestations personnelles.
La proposition la pins conforme aux principes est celle qui donne l'attribution au Corps législatif ; mais l'exécution m'en paraît impossible. Il faudrait qu'un citoyen auquel on ferait quelque difficulté attendît cinq ou six mois la solution du Corps législatif, et ce rendant i( resterait privé de ses droits; il reste donc à statuer entre deux questions, l'attribution aux corps administratifs et aux tribunaux. Comme C'est purement sur une question d'Etat qu'il s'agit de statuer, que c'est évidemment un procès qu'on fait au citoyen qu'on attaque, il doit être porté aux tribunaux. Je suppose qu'on conteste l'éligibilité à un citoyen, soit parce qu'on prétend qu'il a fait faillite, soit parce qu'étant fils de famille il n'a pas payé les dettes de son père , je demande comment porter cette cause aux corps administratifs. L'âge, le domicile, la valeur de telle ou tellé personne, tout cela est vraiment delà compétence des tribunaux, et eux seuls peuvent en être juges.
Les opiuions se sont partagées en deux systèmes nouveaux, et cependant tous ont été d'accord axec M. Robespierre sur les principes auxquels il est remonté pour appuyer son avis. Ils n'ont différé qu'à cause des difficultés de l'exécution. Moi, je n'aperçois là aucune difficulté et n'aperçois ailleurs que dangers pour la Constitution et la liberté.
Les administrateurs ne sont que les délégués du peuple et n'ont pour fonctions que ce qui regarde le percepteur des deniers publics et la surveillance générale sur leur arrondissement. Le droit politique des citoyens net peut, sans danger, être soumis à leur jugement, parce que les contestations politiques ne peuvent être de leur ressort.
Des tribunaux offriraient encore plus d'inconvénients, s'ils avaient droit de prononcer sur les droits les plus essentiels du peuple. Ils sont établis pour décider sur les droits civils, et s'ils passaient outre, ce serait une prévarication punissable. D'ailleurs les jugements de ceux qui doivent prononcer sur le droit d'éligibilité doivent être à l'abri de toute iiïfluence étrangère, et
je ce trouvt de véritable sûreté pour les citoyens qui réclament un droit contesté, aussicher, étaait non citoyen, que celui d'éligibilité, dans les décisions du seul corps qui a droit de prononcer.
Le droit de citoyen est un droit commun et public, et les tribunaux et tes corps administratifs n'ont qu'une délégation particulière, et il ne faut donc pas leur attribuer cettoétendueimmense de pouvoir qui ne peut leur appartenir.
Il n'est pas à craindre que, dans la suite, les contestations soient aussi fréquentes qu'on se l'imagine. Il ne s'agit ici que de balancer les avantages et les inconvénientsdesdiver&systèmes que l'on propose, et choisir avec prudence ce qui est le plus avantageux au peuple et à ses droits. Je» demande la priorité pour l'opinion de M. Robespierre ou l'ajournement à demain.
, rapporteur. Si l'Assemblée veut ajourner à demain la discussion, )e ne demande pas la parole.
;. Cette question se réduit à une réflexion fort simple, et queje vais avoir l'honneur de vous proposer. Il est sans doute incontestable que, pour être.représentant du peuple, il faut avoir le vœu du peuple ; mais on n'a point le voeu du peuple lorsque l'on n'a point été élu régulièrement, soit parce q&e l'élection pièche en la forme, soit parce qu'elle, est contraire à la loi, qui a exigé telles conditions pour que 1er peuple puisse vous donner son vœu.
Or, toutes les fois qu'il est question de déclares* si, conformément à la loi, j'ai ou je n'ai pas eu le vœu du peuple, il me semble qu'il n'y a que eelui qui, par la Constitution même, est chargé de faire l'application de la loi qui puisse prononcer sur cette question. Pour cette raison, j'insiste dès à présent pour que, en renvoyant l'article pour être rédigé, il soit déclaré, comme priBcipe, que ce seront les tribunaux, judiciaires qui recevront l'appel du premier jugement rendu parle corps électoral.
Von 3 rétablirez l'ancien despotisme des tribunaux judiciaires, aussitôt que vous ne les renfermerez pas à ne juger que les différends dès particuliers : alors l'intérêt général ne peut jamais être compromis. Il faut restreindre les tribunaux aux intérêts purement privés. Ainsi, Messieurs, l'amendement de M. Tronchet serai t'ie plus dangereux de fous les amendements, il est contraire à ce que vous avez décrété.
Toutes les fors qu'on nous parle, nous voyons toujours ces grands spectres, qui, grâce à Dieu, ne-sont plus que des spectres: les parlements, les tribunaux, les bailliages. Eh! Messieurs, les tribunaux d'autrefois n'étaientco m-posés que des commis inamovibles du pouvoir exécutif, et certes, si c'était' encore là nos tribunaux, nos terreurs seraient infiniment justes. Mais aujourd'hui ce sera au contraire les délégués amovibles du peuple; et certes, entre les délégués inamovibles du pouvoir exécutif et les délégués amovibles du peuple, il y a une très grande différence.
On oublié toujours que le pouvoir judiciaire, étant une émanation du peuple, est aussi pur que l'émanation du pouvoir administratif. Quoi qu'il en soit, il y aaumoinsune chosedont nous sommes obligés de "convenir dans la discussion i du moment, c'est que, dans tous les systèmes, ! nous nous écartoos iusqa'à un -certain point des principes dans i'appficatron.
Quoique nous trouvions après un mûr examen (car j'avoue que la question que nous traitons depuis ce matin est une des plus importantes, est une des plus grandes (gestions politiques que nous ayons eu encore àfcrai t^cfuenouslerions infiniment mieux de suspendsre^e comité trouvera, du moins je le crois, que dans l'ajournement à demain il y a plu» de zèle» que de réflexion. Je demande l'ajournement avec les préopinants ; mais ce ©'est pas une nouvelle rédaction que je demande, cpe&t un éclaircissement, de théorie, et que le comité nous représente les articles Î9, et 23, sons la forme et dans le mode qu'il aura trouvé le meilleur.
(La discussion est fermée.)
(L'Assemblée décrète le renvoi des articles 19, 22 et 23 au comité et l'ajournement, ainsi opte l'impression des nouveaux articles que le comité de Constitution présentera, d'après les dé veloppements qui ont été donnés dans l'Assemblée et les observations qui ont été faites.)
annonce l'ordre du jour des séances de ce soir et de demain.
L'Assemblée décrète ensuite qu'il y aura une séance extraordinaire lundi soir pour entendre la continuation du rapport cfti comité militaire sur les engagements et dégagements.
La parole-est à M. de Montesquiou pour faire un rapport, au nom du comité des finances, sur ta demande faite'phr lu municipalité de Paris d'une avance de fonds.
, au nom du comité ides finances. Messieurs, fa ville de Paris a présenté à l'Assemblée nationale l'état de ses besoins. Avant d'en faire le rapport, le comité des finances a demandé l'avis dù département, at®si que toutes fes piêees et renseignements qui pouvaient servir à éclairer la détermination de l'Assemblée. C'est après les avoir examinés que nous vous en apportons le résultat. Il -s'agit de disposer ies deniers publics; il s'agit de les appliquer à des objets auxquels, dans Tordre ordinaire «es choses, ils tte doivent pas être destinés : c'est donc jusqu'à l'évidence qu'il faut démontrer la justice ou la nécessité ffun pareil emploi.
Paris a été le berceau de la Révolution. C'est là que le despotisme avait ses'forteresses, sets arsenaux, son code, sa magnificence ; du centre de sa force et de ses séductions est parti le signal qui, à la fois, a été entendu et répété d'une extrémité du royaume à l'autre. Parisy à cette époque, avait une fortune particulière, suffisante à ses besoins ; au milieu de la-déprédation générale, ses revenus avaient été administrés avec assez de sagesse pour suffire à tous ses engagements, et même pour qu'il pût destiner une réserve annuelle à sa future libération. Le 4® juil»-le? 1789, jour célèbre dans notre histoire, au moment où les .électeurs pripent'pojsessïon de la maison commune, ils y trouvèrent en caisse 2^854.676 livres et' peut-être devo&s-noas àcette faible ressource le saeeès des grandes choses qui se sont opérées depuis.
Bans ce moment critique, les calculs de l'économie n'étaient plus de saison. La nécessité des circonstances les plus impérieuses devint tout à coup la seule mesure des efforts-de tout genre. Armer et nourrir un peuple immense, protéger les amis de la Révolution,-surveiller ou combattre ses ennemis, former, en nn instant, le plus vaste plan de défense, voilà quelle fut la
tâche des nouveaux magistrats créés par le vœu de leurs concitoyens. Ils l'ont glorieusement remplie, celte tâche difficile; mais, en même temps que des dépenses nouvelles étaient chaque jour commandées par des événements imprévus, chaque jour les anciens revenus qu'alimentait le luxe et que soutenait le despotisme, ou disparaissaient au biuit des armes, ou s'affaiblissaient, privés de leur ancien appui.
Les revenus de Paris au moment de la Révolution, montaient à 4,260,389 i. 17 s. 5 d., dont 184,000 seulement étaient le produit de ses biens-fon. s. Le reste était formé d'octrois de tout genre.
La dépense, administrée alors par le bureau de ta ville, montait à 3,200,000 livres. Sur cette comme, 1,800,000 livres acquittaient les rentes dont la ville était grevée; le reste était employé à payt-r les frais de l'administration et les entretiens ou constructions dVditices à sa charge.
Il lui restait un million par an, ou pour suP-veuir aux dépenses extraordinaires, ou pour amortir successivement le capital de sa dette, montant à 32 millions.
Depuis le 15 juillet 1789jusqu'au 31 octobre 1790, jour où la municipali é provi-oire a été remplacée |>ar la municipalité constitu ionnelle, les recettes des revenus ordinaires, des contributions volontain s et quelques débets recouvrés avaient produit 5,265,142, L 15 s.
Dans ce même espace de temps, les dépenses habituelles que des travaux forcés et quelques j événements extraordinai i es avaient cependant ac crues, montaient à 5,145,221 L 18 s. 4 d.
Il est donc évident que si aucune autre circonstance n'avait commandé d'autres entreprises, les finances de Paris auraient présenté, à cette nouvelle époque, un résultat pareil à celui du 13 juillet 1789. Le même fonds de réserve qu'il avait au moment de la Révolution se serait trouvé dans sa caisse et son nouveau régime, lui pré-seniant de nouveaux moyens d'économie, aurait encore amélioré sa position.
Pourqu'il ne résulte auc une méprise du compte très abrégé que je vous rends, je dois vous faire observer, Messieurs, que les dépenses ordinaires, dont je viens de vous parler, consistent uniquement dans les intérêts des capitaux empruntés, les entretiens des bâtiments dont la ville est chargée, et les frais d'administration intérieure, et que dans cette classe ne sont comprises, ni la dépense de la garde de Paris, ni celle de son illumination, de sa police, de son pavé et de ses carrières.
Le Trésor public a toujours acquitté cette dernière partie, et, suivant vos décrets, il doit continuer à l'acquitter jusqu'au moment où vous aurez mis la ville de Pans en état de se suffire à elle-même. Vous en avez fixé l'époque au 1er de mai prochain.
Il est une multitude d'autres dépenses étrangères aux deux classes précédentes, dépenses non prévues, non calculée , sur lesquelles, ainsi que je vous l'ai dit, il n'était pas même permis de délibérer. La Révolution les rendait indispensables, et l'administration de Paris, cédant a l'impulsion du patriotisme, u'a point examiné dans quel trésor elle en puiserait le montant. Il suffit ici, pour vous en faire concevoir l'étendue, de vous en présenter4a récapitulation.
La démolitiou de la Bastille, les frais de garde et de détention de MM. de Btzenval et de Savar-din, la dépense particulière des soixante districts, la fédération, les fêtés qui y ont été relatives, la
construction des nouveaux corps de garde et les frais du nouveau casernement, l'habillement, l'armement et l'équipement de la garde nationale, les différents détachements qui lui ont été commandés, le conseil de guerre tenu à Saint-Denis, et mille petit» s dépenses de tous les jours, commandées parles circonstances,et qui aujourd'hui forment une masse considérable : voila ce qui, pendant 18 mois, a été à la charge de Paris en totalité, et ce qui monte à 8,200,000 livres.
Les fonds de caisse que la ville avait en 1789, et depuis cette époque jusqu'au 31 octobre dernier, l'excédent de sa recette à sa dépense ordinaire, ont acquitté, sur celte somme, celle de 3,039,446 1. 16 s. indépendamment de 520,000 livres que vous avez accordées pour solder l'atelier employé à démolir la Bastille, et ce qui reste à payer monte à 4,650,000 livres. C'est sur ce dernier objet qui se partage entre une multitude d'ouvrier-, d'entrepreneurs, de fournisseurs, que le corps municipal sollicite l'attention de l'Assemblée natonale.
H désirerait aussi pouvoir se livrer à un autre objet infiniment intéressant pour la sûreté de la capitale, l'objet des subsistances. Il voudrait pouvoir porter à un approvisionnement complet de trois mois les magasins qu'elle renferme; mais malheureusement ce serait un objet de dépense de 3 millions dont il n'ose parler, quelque désirable qu'il fût de pouvoir saisir le moment d'abondance où nous sommes.
Aii milieu des embarras inséparable* de tant d'engagements et de besoins, la ville de Paris ne prétend cependant pas se soustraire au fardeau de la dette honorable qu'elle a contractée, elle regarde comme son devoir de l'acquitter ; elle ne demande point de grossir la liste des dettes nationales. Elle veut iouir, jusqu'au bout, de l'inestimable avantage d avoir pu contribuer plus que toute autre partie de l'empi' eau succès de la dévolution : maiSj ayant disposé de tout ce qu'elle avait de fonds libres, elle se voit forcée de rassembler tous les moyens légitimes qu'elle peut avoir pour parveuir à sa libération. Elle en a de deux sortes, ce qui lui est dû et ce qui lui reviendra de ses bénéfices sur la vente des domaines nationaux. Quant au premier objet, il consiste, pour la plus grande partie, en réclamations qu'elle se croit fondée à faire sur le Trésor public, soit pour des fonds qu'elle y a versés à différentes époques, soit pour des dépenses qu'elle a faites à son acquit. L'A-semblée nationale prononcera sur leur validité. La municipalité en a déjà remis l'état au commissaire du roi, cha gé de la liquidation, et ne réclame pour elle que la justice qu'ont obtenue tous les créanciers de l'Etat.
Le département de Paris, après avoir pris en considération la situation de la caisse municipale, ne demande à l'Assemblée qu'un secours provisoire pour tirer la ville de Paris de la position critique où elle se trouve. Je vais avoir i'hunueur de vous lire sonjarrêté du 21 février :
Extrait des registres des délibérations du département de Paris.
(Du
« Sur le rapport, fait à l'administration, de la demande de la municipalité de Paris, qui lui avait été envoyée par. le comité des. finances de l'Assemblée nationale, ouï le procureur général
syndic, l'administration dn département est d avis d'autoriser la municipalité de Paris à demander à l'Assemblée nationale :
« 1° Que le caissier de l'extraordinaire verse dans la caisse de la municipalité de Paris une somme de 2,400,000 livres à titre d'avance, et par imputation d'abord sur les sommes que la municipalité a droit de réclamer sur le Trésor public, pour raison des dépenses extraordina res occasionnées par la Révolution, et subsidiaire-ment, en cas d'insuffisance de ces réclamations, sur le seizième attribué à la municipalité dans le prix des ventes des domaines nationaux situés dans son ressort, pour être, ces 2,400,000 livres, employées au payement des objets les [>lus pressants dus parla municipalité, suivant l'état qu'elle en fournira à l'administration du département, et d'après son approbation, et à la charge p i r elle de justifier au département de cet emploi un mois après la réception des fonds.
« 2° En attendant qu'il ait été décrété un mode de remplacement des octrois ci-devant perçus pour le compte de la ville de Paris, il soit en outre avancé, par chaque mois, à compter du 1er de mars, une somme de 600,000 livres, pour fournir aux dépenses fixes et ordinaires de la ville de Paris, suivant l'état qui en sera présenté au département, et d'après son approbation, à la charge par la municipalité de ompter de clerc à maître de ce qu'elle continu ra de percevoir des octrois jusqu'au 1" mai prochain, et d'en fournir l'état par chaque semaine, soit au conseil, soit au directoire, après 1a séparation du conseil.
« Le département se réserve de délibérer incessamment sur les moyens les plus convenables :
« 1° Pour acquitter le restant des dettes arriérées et exigibles de la municipalité de Paris;
« 2° Pour assurer à l'avenir d'une manière constante l'acquittement de sa dette constituée et dépenses nécessaires de son administration municipale.
« Pour extrait conforme à ia minute.
« Signé : Blondel, secrétaire du département. »
Après avoir examiné cet arrêté du département de Paris, dont les dispositions sont fort sages, qui ne préjuge rien sur les réclamations de la municii alité et qui se borne à demander une simple avance, nous avons pensé que le fond de la demande était juste et méritait de trouver faveur dans l'Assemblée ; mais nous pensons qu'au lieu de porter le secours qui vous est demandé à 3,600,000 livres, en accordant au jour du décret un premier payement de 2,400,000 livres, et ensuite 600,000 livres dans le cours de ce mois, et autant dans le mois pro hain, on pouvait le réduire à une avance de 3 millions de livres, sans rien changer d'ici au 1er de mai aux recettes ordinaires de la ville sur les oc rois qui lui sont attribués, et sans demander aucune comp nsa-tion sur cet objet. Nous pensons encore qu'il y aurait de l'avantage à distribuer cet'e avance en trois payements, dont le premier aurait lieu da is le cours de ce mois, le deuxième en avril et le troisième en mai. C'est au 1er de ce dernier mois que le nouveau régime des revenus municipaux sera établi. C'est à cette époque qu'un fonds d'avance pourra être d'une grande utilité à Paris qui, tout à coup, aura à sa charge une dépense nouvelle très considérable, et qui sera obligé d'attendre la rentrée de ses nouveaux revenus.
En conséquence, votre comité a l'honneur de vous proposer le décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, décrète ce qui suit :
« Art. 1er. La caisse de l'extraordinaire
versera dans la caisse de la municipalité de Paris une Somme de 3
millions à titre d'avance, et par im-puta'ion, tant sur les sommes que
ladite municipalité pourrait avoir droit de réclamer sur le Tré-or
public que sur le seizième attribué à.la municipalité dans le prix des
ventes de3 biens nationaux par elle acquis, pour être, ladite somme de 3
million?, employée au payement des objets les plus pressants dus parla
municipalité, suivant l'état qu'elle en fournira à l'administration du
départem nt, et d'après son approbation, à la charge par elle de
justifier au département de cet emploi un mois après la réception des
fonds.
« Art. 2. Le payement de ladite avance de 3 millions sera fait dans l'ordre suivant, savoirs
« 1 million aussitôt après la publication du présent décret;
« 1 million au 10 avril;
« i million au 10 mai.
« Art. 3. Le directoire du département adressera incessamment au comité des finances l'état et les motifs des réclamations que la municipalité peut former sur le Trésor public, pour être pris par l'Assemblée, sur le rapport qui lui en sera fait, tel parti qu'elle jugera convenable. »
(L'Assemblée décrète l'impression de ce rapport et en ajourne la discussion.)
L'ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur Vorganisation d'un tribunalpro-visoire pour juger les crimes de lèse-nation.
, au nom du comité de Constitution. Messieurs, en attendant l'organisation d'une haute cour nationale, vous avez ordonné à voire comité de Constitution de vous présenter un projet de décret sur la formation d'un tribunal provisoire. Deux cons dérations importantes nous ont guidés dans ce travail.
D'une part, nous avons cherché une combinaison qui ne portât pas préjudice à l'activité du service des tribunaux de district ; et, de l'autre, nous nous sommes efforcés de rempircettegrande vue de sagesse qui vous a déterminés à placer la haute cour nationale à une distance raisonnable du Corps législatif.
Le plan est d'ailleurs très simple : c'est celui que j'ai eu l'honneur de vous indiquer il y a quelques jours.
Nous vousproposonsde choisirla villede Melun, et d'ordonner que les quinze districts les plus voisins y enverront chacun un de leurs membres. Ces quinze juges choisiront l'un d'entre eux qui remplira les fonctions d'accusateur public; ils nommeront un greffier; ils pourront juger au nombre de dix.
La compétence de ce tribunal, Messieurs, ne nous a pas paru offrir de difficulté : nous avons pensé que votre inteution était sans doute dé le commettre pour pronon er surtout s les affaires que vous avez renvoyées aux tribunaux chargés successivement de connaître des crimes de lè e-nation, ainsi que eur toutes les autres affaires criminelles au sujet desq ielL s l'Assemblée pourra déclarer par la suite qu'il y a lieu à accusation et qu'elle jugera à propos ae lui renvoyer.
Le dernier point que nous avons eu à examiner, c'est l'indemnité à accorder aux juges que
vous commettrez. Il nous a semblé qu'il aérait convenable de leur allouer, outre leur traitement ordinaire, une somme double de celles qu'ils auraient en qualité de juges,
Après ces quelques réflexions, voici le projet de décret que noua vous proposons :
« L'Assemblée nationale, après avoir eatendu le comité de Gonsiitution, décrète ce qui suit :
« Article 1er. Il sera établi provisoirement
à Melun un tribunal que l'Assemblée nationale commet pour instraireet
juger en éernier ressort les affaires criminelles qui ont été renvoyées
jusqu'à présent aux tribunaux successivement désignés pour prononcer sur
les crimes de lèse-nation, ainsi que toutes les affaires erimiaelles sur
lesquelles l'Assemblée déclarera qu'il y a lieu à accusation.
« Art. 2. Pour former le tribunal provisoire, les quinze tribunaux de district lés plus voisias de la ville de Melun, savoir ceux de... nommeront chacun un de leurs membres.
« Art. 3. Ge tribunal, aussitôt qu'il sera formé, choisira parmi ses membres un accusateur publie chargé des fonctions dii ci-devant procureur du roi et nommera un greffier ; il recevra d'eux le serment civique et celui de remplir avec exactitude les fonctions-qui leur seront déléguées.
« Art. 4. Il pourra juger, au nombre de dix, et se conformera dans l'instruction et le jugement aux dispositions établies par les décrets des 8 et 9 octobre 1789 et 22 avril 1790.
« Art. 5. Les juges du tribunal provisoire etl'ac-cusàteur public auront, outre le traitement fixe ordinaire, une indemnité équivalente au double de ce traitement, au prorata du temps qu'aura duré leur service; le greffer aura aussi, au prorata du temps de son exercice, un traitement sur le pied de 3,000 livres par année.
«Art. 6. Les fonctions d» tribunal provisoire cesseront le jour de l'installation delà haute cour nationale.
« Art. 7. Le roi sera prié de donner les ordres nécessaires pour que les membres du tribunal provisoire soient rassemblés à Melun le 25 du présent mois. »
Plusieurs membres : Aux voix! aux voix,!
Ge qui me déplaît dans le décret, c'est la bigarrure du traitement, les honoraires de touslesjugesdoiventêtred'égâlesomme. Je demande donc que l'indemnité des juges du tribunal provisoire soit uniformément fixés à 3,600 livres.
, rapporteur. J'adopte l'amendement.
Je demande qu'on laisse aux détenus la liberté d'attendre la formule de la haute cour nationale. (Murmures.)
Plusieurs membres ; La question préalable !
Je retire mon amendement.
Il y a deux omissions au projet de décret.
Il faudrait dire, tout d'abord, que les juges, au moment de leur rassemblement, éliront entre eux un président.
Ensuite, ce n'est pas assez de désigner un accusateur public; il faut un commissaire du roi pour veiller à ce que les formes soient exactement'
suivies. Je demande que celui du tribunal du district de la ville désignée pour le siège du tribunal provisoire en remplisse les fonctions.
, rapporteur. J'adopte ces deux observations.
Le premier objet de la délibération doit être l'emplacement du tribunal; le second, les fonctions de; ce tribunal.
Vous avez décrété sagement déjà que le siège du tribunal provisoire serait a 15 lieues au moins de Paris ; je crois en effet qu'il est nécessaire qu'il soit à une grande distance du fau* bourg Saint-Antoine.. Je demande en conséquence qu'il soit placé à Nenwurs ; cette ville est à la distance portée pa* votoe décret.
Quant aux fonctions du tribunal, je de-mande qu'on définisse quels sont les délits dont il doit connaître; autrement rien ne sera plus arbitraire.
Plusieurs membres demandent que te tribunal soit placé::.les uns, à Soiseon»; les autres, à Beauvais, Ghartresy Qçléans, Sems.
, rapporteur. Le comité serait d'avis que le tribunal provisoire fût établi dans une ville assez considérable pour qu'il y ait note, opinion publique et u&e défense légitime.
Plusieurs membres demandent la priorité pour Orléans.
(L'Assemblée décrête que tè tribunal provisoire sera établi à Orléans.)
, rapporteur* Voici leprojet de décret avec les modifications adoptées r
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le comité de Constitution, décrète ce qui suit :
Art.1er
c II sera établi provisoirement à Orléans un tribunal q,«e l'Assemblée nationale commet pour instruire et juger en dernier ressort les affaires criminelles qui ont été renvoyées jusqu'à présent aux tribunaux successivement désignés pour prononcer sur les crimes de lèse-nation, ainsi que toutes affaires criminelles sur lesquelles l'Assemblée déclarera qu'if y a lieu à accusation.
Art. 2.
«er"> Pour former le tribunal provisoire, chacun des 1*5 tribunaux de district les plus voisins de la ville d'Orléans, savoir: de Beaug^-ney, de Neuville, de Boiscommun, Pithiviers, Jaoville, Mer, Blois, 6ien, Aubigny, Montais, Nemours, Etam pes, Chàteaudun, Vendôme et de Romorantin, nommera un de ses membres.
Art, 3
« Ge tribunal, aussitôt qu*il sera formé, après avoir élu son président, choisira parmi ses membres un accusateur public, chargé des fonctions des ci-devant procureurs du roi, et nommera un greffier : il recevra d'eux le serment cmqwe, et celui de remplir avec exactitode les foaetioas qui leur sont déléguées.
Art. 4.
«er">Il pourra jugera/» nombre de 1(0, et «e conformera, dans riostpuctîora et le jug)emeirt,.a«x dispositions établies par tes-décrets ées 8et 9 octobre 4788 et 22 avril. 1790.
Art. 5.
« Le commissaire .du roi auprès du tribunal de district d'Orléans exercera auprès du tribunal provisoire.
Art 6.
« Les juges du tribunal provisoire et l'accusateur public auront, outre leur traitement fixe ordinaire, une indemnité sur le pied.de 3^600 livres par année, ~ au prorata du temps qu'aura duré leur service-; le greffier aura aussi, au prorata du temps de son exercice, un traitement sur le pied de.3,000 livres par année,
'Art. 7.
! « Les fonctions du tribunal provisoire cesseront le jour de l'installation de la haute cour nationale.
Asrt. 8.
« Le roi sera prié de donner les ordres nécessaires pour que les membres du tribunal paroyi-soire soient rassemblés à Orléans le 25 du présent mois. »
(Ge décret est adopté.)
, secrétaire ,doniiie lecture d'une lettre du procureur général syndic du département de Rhôm'-et-Loirei ainsi ,conçue,:
« Lyon* leer mars
1791
« Monsieur le Président, j'ai, l'honneur de vous prévenir que le choix des électeurs du département de Khône-et-Loire, pour l'évêché de ^e département, s'e?t porté sur M.l'abbé Lamour.ette, grand viewce d'Arras.
« Je suis, etc.., »
,secrétah"e, donne lecture d'«ne lettre de trois particuliers se disant commissaires de l'assemblée générale de la partie française de Saint-Domingue :
« Monsieur le Président,
« Il nous est impossible de concilier l'esprit de justice et de prudence qui dirige l'Assemblée nationale avec le refus réitéré qu'elle fait de nous entendre. Il est vrai qu'elle nous a déjà condamnés une première fois sur «m faux: exposé et.sans nous avoir entendus.»,. » (Mur mures.)
Plusieurs membres : De qui est cette lettre?
, secrétaire, Bile est signée : Les commissaires de l'Assemblée générale & la partie française de Saint-Domingue.;
Ils n'ont pas le droit de se qualifier de députés de la partie française de Saint-Domingue; il faut renvoyer cette lettre^ au comité colonial.'
Je demande qu'elle soit lue, sans approbation des qualités.
, secrétaire, se dispose à continuer la lecture de la lettre.
Un membre,: Il faut consulter l'Assemblée pou? savoir si ou lira, celte, lettres M. Barnave seul n'a pas le droit de le décider.
On nepeut tolérer que ces inr
dividus se qualifient de commissaires d'une assemblée que vous avez dissoute.
Ce M précisément sur la motion de M. Barnave lui-même que lés 'titres de commissaires de l'assemblée générale de Saint-Domingue furent supprimés; je m'étonne aujourd'hui que ce soit M. Barnave qui demande la lecture d'une lettre où cette dénomination est employée. (Applaudissements.)
J'ai demandé la lecture de la lettre sans approbation de qualités qu'elle renferme et voici mes raisons. C'est que cette lettre est une itérative réclamation des membres delà ci-devant.assembléé générale de Saint-Domingue contre le comité colonial ; j'ai désiré qu'une plainte de cette nature, à laquelle mon intention est de répondre en deux mots, ne fût pas secrète pour. l'Assemblée.
Plusieurs membres: Continuez la lecture!
, secrétaire, continuant la lecture : ____« Du temps du despotisme, une surprise de ce genre serait devenue une raison insurmontable à tout moyen de retour; mais sans doute ce régime ministériel n'est pas celui de la liberté et cette jurisprudence celle des législateurs.
« Nous persistons, au nom de là colonie, dont nous sommes les légitimes, les seuls représentants, à demander d'être entendus... » (Murmures pr.o langés.)
Plusieurs membres se lèvent et protestent contre la continuation de la lecture,
Ce sont ces mêmes hommes, qui, depuis 15 jours, ont répandu dans Paris un écrit dans lequel ils traitent de rebelles les membres de l'assemblée coloniale de la partie mord, à laquelle seule vous devez la propriété de Saint-Domingue; car,ils s'étaient portés au point, Mes' sieurs, de délibérer contre vos décrets, de licencier les trompes, de s'emparer, de tout.
Je demande quels sont ces hommes qui ont l'audace de venir dans l'Assemblée nationale insulter à ses décrets et méconnaître son autorité.
Il est contraire à toute espèce de convenanee et de régularité de laisser lire dans cette enceinte des écrits aussi despee-tueux pour l'Assemblée et aussi violateurs de ses décisions.
Je demande,. Messieurs, que ceux qui ont adressé cette incroyable lettre, slïs sont encore sous la juridiction immédiate de- L'Assemblée, s'ils sont encore à sa.suite,......
Plusieurs membres : Oui, ils y sont!
, soient blâmés avec
toute la rigueur que vous devez à vous-mêmes et au. peuple que vous représentez; et je demande en outre que cette lecture soit à l'instant interrompue. (Applaudissements.)
Je demande à dire un mot que cette Assemblée n'a pas encore, entendu,, Dm membre vous a dit hier que si vous preniez telles ou telles dispositions, il faudrait doubler les forces que vous envoyez en Amérique. Mais savez-vous ce que c'e&t que Saint-Domingue? C'est une colonie
au bord de la mer... (Murmures.) Elle a 250 lieues de côtes, sur 5 à 6 de large; l'extérieur appartient aux Espagnols. Il n*y a pas de pays plus faible. Les menaces qu'on vous a faites ne peuvent effiayer que les gens qui n'ont rien lu. Les habitations sont si éloignées, que de l'une à l'autre, on ne pourrait pas s'atteindre avec une carabine. ..
Plusieurs membres : L'ordre du jour !
L'Assemblée nationale prendra telle résolution qu'elle voudra; mais je demande à lui exposer très brièvement deux ou trois faits, et je demande en même temps à tous les députés des colonies qui peuvent être dans l'Assemblée, et à tous ceux des villes de commerce, de m'ar-rêter si je dis un fait inexact.
Il est important que l'Assemblée sache ce que sont véritablement les démarches que font auprès d'elle les soi-disant représentants de la colonie de Saint-Domingue. Ces démarches ne sont point l'ouvrage des 85 membres de la ci-devant assemblée générale. Elles sont l'ouvrage au contraire d'un petit nombre d'entre eux. Le fait est tellement vrai, qu'une très grande partie de ces membres sont venus au comité colonial y discuter les intérêts de leur patrie, qu'ils y ont donné des preuves de leur modération, et nous ont démontré, par leur conduite et leurs opinions, qu'une grande partie des démarches auxquelles on les avait entraînés, avait été l'effet de Terreur.
Cette même assemblée vient de publier un mémoire prétendu justificatif, composé de faits tellement faux, que je n'ai besoin que d'en citer un seul. Elle a avancé que MM. Le Chapelier et Thouret, membres du comité colonial, n'avaient pris aucune part au projet du décret qui vous a été présenté. Je réponds que ces deux honorables membres se sont trouvés dans le comité comme les autres; qu'ils ont donné leur avis sur le décret; et que le jour où les commissaires de la ci-devant assemblée générale ont été entendus pendant 4 hiures consécutives au comité colonial, ce comité était présidé par M. Thouret, tellement qu'eux-mêmes ne pouvaient pas ignorer
au'il avait assisté et pris part aux délibérations
e ce comité.
Le surplus des faits du mémoire est de la même exactitude que celui-là; mais voici comment ce mémoire a été fait. Il a été signé de 75 personnes, et là rédaction en a été confiée à un homme qu'il est inutile de nommer.
Plusieurs membres : Qui? qui?
C'est M. Linguet. Ce mémoire a été rapporté dans leur assemblée. Là un très grand nombre l'a trouvé absurde, mauvais, manquant son but, et ne pouvant être signé par des gens honnêtes. Ils ont en conséquence nommé des commissaires pour y faire des changements. Ces changements ont été faits et convenus; les signatures ont été apposées d'après les ratures et changements, et le mémoire a été ensuite imprimé par quelques-uns d'entre eux avec les signatures, mais sans corrections. Une partie de eeux qui avaient demandé les changements est venue au comité colonial dire qu'ils étaient infiniment blessés de la fausseté qu'on avait employée à leur égard. Alors ils paraissaient vouloir faire des réclamations puoliques; peut-être la crainte de montrer une division à leurs com-
patriotes les en a-t-elle empêchés; mais toujours est-il certain qu'ils ont conservé le ressentiment de l'injure qui leur avait été faite.
La démarche qu'on fait aujourd'hui, Messieurs, a certainement le même caractère. Je ne puis penser qu'elle soit l'ouvrage de 85 personnes parmi lesquelles j'ai moi-même la preuve, ainsi que tous les membres du comité, qu'il y a des gens pleins de modération et très estimables; mais ce qu'il faut ajouter, à l'occasion de ce qu'a dit M. Lavie, c'est que ce n'est point sur la faiblesse de cette colonie que l'Assemblée nationale doit avoir sa sécurité; c'est sur les excellentes dispositions de ses habitants; c'est sur leur invariable fidélité à la France, c'est sur les nouvelles preuves qu'ils viennent d'en donner, et j'interpelle encore ici et les députés des colonies, et tous ceux de3 villes de commerce, de m'interrompre si je me trompe : c'est, dis-je, sur ce que votre décret du 12 octobre y a rétabli parfaitement la tranquillité publique, ce qui peut-être n'est pas une des moindres causes de l'acharnement avec lequel quelques-uns de ceux qui l'avaient troublée viennent réclamer aujourd'hui devant vous contre ce même décret qui l'a rétablie.
Ils se plaignent dans cette lettre, et je suis obligé de lé1 dire, parce qu'ils la rendront certainement publique, que 1e retard qu'ils éprouvent ici altère leur sântê et a déjà coûté la vie à plusieurs. Je ne réponds qu'un fait à cela, c'est qu'il n'a jamais été refusé un congé à aucun d'eux pour parcourir toute l'étendue de la France.
11 y a plus; il n'en a jamais été refusé un seul, demandé pour cause de santé, à ceux qui ont voulu se rendre aux colonies. Cinq d'entre eux, sur de3 attestations de médecins, en ont obtenu à l'instant, pour retourner dans leur patrie. Il ne faut donc pas dire qu'il y a eu de 1 inhumanité dans la manière dont ils sont traités. Il y a, et il a dû y avoir de la prudence. Les renvoyer sur-le-champ eût été recommencer les troubles. Il a été nécessaire de les retenir jusqu'à ce que l'Assemblée, par les mesures qu'elle a déjà prises et par celles qu'elle va prendre encore, au moyen des nouvelles instructions et des commissaires dont elle a décrété l'envoi, ait assuré la tranquillité de cette importante possession.
L'Assemblée nationale a déjà décrété qu'elle ne s'occuperait de l'assemblée particulière de cette colonie qu'après l'instruction qui doit lui être présentée ; et je ne pense pas qu'elle veuille changer de résolution.
Quant au parti qu'il faudra prendre à l'égard des individus, si le salut de cette précieuse colonie, si l'intérêt de la nation, si la nécessité de conserver à la France ce qui fait en grande partie la prospérité, le succès de son commerce et de ses manufactures, ont exigé de votre comité des mesures sévères, quand il a fallu anéantir politiquement une assemblée qui avait troublé la colonie, votre comité vous prouvera, par les dispositions qu'il compte vous présenter, que son intention est d'en traiter favorablement toutes les personnes; que tout ce qu'il est possible d'employer pour leur justification, que même toutes les excuses qu'on peut puiser dans les temps de troubles, dans des circonstances extraordinaires, dans un grand éloignement de la loi, que tous ces motifs, dis-je, lui sont présents, sont sensibles pour lui et détermineront son avis.
Je termine en faisant observer à l'Assemblée que la lettre dont M. de Mirabeau demande que les expressions soient blâmées, n'est vraisembla-
blement l'ouvrage quedestrois commissaires qui l'ont signée.
Plusieurs membres : A l'ordre du jour !
Ma proposition est indépendante de l'explication que vient de donner M. Barnave. Bile porte uniquement sur les mots despectueux, véritablement violateurs de l'autorité de cette Assemblée. Je demande que les hommes qui ont revêtu de leurs signatures cette pièce souverainement injurieuse, puisqu'ils sont à ia suite de cette Assemblée, soient mandés à la barre et improuvés.
Je demande par amendement que l'improbation soit faite par le décret sans qu'on mande à la barre.
Je demande qu'on passe à l'ordre du jour.
Il me paraît plus convenable de ne pas porter aujourd'hui de décision à cet égard, et de différer de statuer jusqu'au moment où le comité colonial vous présentera ses vues sur le sort des membres de la ci-devant assemblée générale de Saint-Domingue.
On sait assez que mes principes ne sont pas conformes à ceux du comité colonial, et je m'en honore. Ma motion porte uniquement sur le titre que prennent les signataires de l'écrit dont il s'agit, de commissaires d'une assemblée que vous avez dissoute. Je me rallie à la motion de M. Treilhard et je demande qu'on la mette aux voix.
(L'Assemblée, consultée, décrète qu'elle improuve la lettre et passe à l'ordre du jour.)
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du ministre de l'intérieur relative à M. Ame-lot, ci-devant évêque de Vannes.
Cette lettre est ainsi conçue :
« Monsieur le Président,
« Les commissaires envoyés parle roi dans le département du Morbihan, en exécution d'un décret de l'Assemblée nationale sanctionné par le roi, ayant appris que M. Amelot, ci-devant évêque de Vannes, était encore dans cette ville le 28 du mois dernier, quoique le décret lui eût été notifié le 22, ont requis le directoire du département d'enjoindre a M. Amelot départir àl'ins-tant, conformément au décret, pour se rendre à la suite de l'Assemblée nationale. Le directoire, adhérant à cette réquisition, a enjoint au sieur Amelot de partir deux heures après la notification qui lui en était faite; il a nommé en même temps deux gardes nationales pour l'accompagner jusqu'à Paris et pourvoir à sa sûreté dans la route. M. Amelot est arrivé chez moi à midi, accompagné des deux gardes nationales auxquels j'ai déclaré que leur mission était finie.
« M. Amelot m'a dit que son intention était de se conformer au décret sanctionné, mais qu'il était absent, lorsque la notification lui en avait été faite, et qu'il comptait partir le lendemain qu'il a reçu son injonction. D'après la soumission par écrit que m'a donnée M. Amelot de se conformer au décret qui lui ordonne de se rendre à la suite de l'Assemblée nationale, je lui ai dit qu'il pouvait se retirer et que j'allais instruire l'Assemblée de son arrivée. « Je suis, etc.
« Signé : delessart. »
, secrétaire, donne lecture d'une lettre du procureur général syndic du département de l'Ardéche, relative aux troubles du camp de Jalès.
Cette lettre est ainsi conçue :
« A Privas, le
« Monsieur le Président, après avoir fait part à l'Assemblée nationale des alarmes et des dé ordres qu'avait jetés jians le département le nouveau rassemblement du camp de Jalès, nou- ne devons pas lui laisser ignorer l'heureuse et subite révolution qui s'est faite dans les opinions et les événements relatifs à ce camp. Dès le 22 de ce mois, la plupart des gardes nationales que leur égarement et de fausses alarmes y avaient conduits s'en retirèrent et rentrèrent dans leurs communautés, convaincus des mauvaises intentions et des projets de contre-révolution des au -teurs de cette insurrection. Depuis, les autres se sont aussi retirés successivement, et il y a lieu de croire que tout a disparu aujourd'hui. L'indignation se tourne en divers endroits contre les auteurs perfides de cette entreprise criminelle ; cependant il reste encore dans les autres beaucoup d'agitation, et nous avons toujours le plus grand besoin d'un secours considérable en troupes ae ligne, soit pour rétablir l'ordre partout, soit pour seconder les poursuites indispe sables qui doivent être faites contre les coupables.
« Je joins ici l'extrait de la délibération que notre directoire a prise, d'accord avec des commissaires du département de la Drôme, pour la direction des secours que ce département nous a accordés dans la crise fâcheuse où nous étions. Vous y verrez que, d'après les rapport? qui nous ont été faits, les sieurs Chastanier, officier d'artillerie, Roger, officier d'infanterie, commandant de la garde nationale d'Aubenas, et Roux, officier municipal, ont beaucoup contribué, notamment le premier, à la dispersion du camp. Ces trois citoyens assurent qu'ils avaient été forcés de s'y rendre, et tous les rapports qu'ils ont faits sur l'heureuse révolution qu'ils y ont produite n'ont pas encore été contredits.
« Je suis avec respect, Monsieur le Président, votre très humble, etc.
« Signé : Dalmas, procureur général au département de l'Ardéche. »
, secrétaire. Voici maintenant, Messieurs, une plainte de la Société des amis des Noirs contre M. Arthur Dillon. (Murmures prolongés.)
Plusieurs membres demandent que la séance soit levée.
Quand on a été inculpé dans l'Assemblée, il faut pouvoir se défendre dans l'Assemblée.
(de Saint-Jean-d'Angély). Quand on a entendu la calomnie, il faut entendre ceux qui veulent y répondre.
(L'Assemblée ordonne la lecture de la lettre.)
, secrétaire, lisant :
« Messieurs,
« Les amis d'une classe d'hommes opprimés et malheureux s'adressent avec confiance aux représentants d'une nation libre, et leur demandent justice.
« Voués à la défense de ces êtres infortunés, occupés ^aos relâche d'adoucir l;ur sort, ils poursuivent avec courage leur sainte. entreprise.
« Il n'est aucun de leurs écrit?, aucune de leurs démarches, aucune de leurs actions, dont l'homme le plus pur ne puisse s'honorer.
« Depuis longtemps, l'iatérêt personnel, les passions les plus viles, le délire de la cupidité s'attachent à eux avec une rage insensée. Il n'est pas de calomnie absurde dont on ne cherche à les noircir; il n'est point dé manœuvre qu'on n'emploie pour les perdre dans l'opinion publique. Ces atrocités, ils Les ont dédaignées; ces libelles, ils les ont méprisés. Forts de leur conscience, ils s'en sont reposé; sur le temps et sur leurs oeuvres pour les justifier, Mais aujourd'hui qu'un membre, au milieu de l'Assemblée nationale, s'est permis de les outrager de la manière la plus sanglante; de dire que c'était à ces amis de l'humanité qu'il fallait imputer les troubles qui agitent nos colonies; d© dire que ces amis étaient vendus à des puissances étrangères, il ne leur est plus possible de garder le silence, et chacun d'eux a le d/ o j t d'exiger un e réparation authen» tique de ces infâmes calomnies.
« Deux partis se présentent : ou l'Assemblée doit improuver le m mbre qui a osé hasarder des inculpations.aussi coupables, ou elle doit permettre aux offensés de le poursuivre en justice. C'est là q$ie nous lui porterons le défi formel d'alléguer, nous ne disois pas de* preuves,,mais même les plus légers indices des faits odieux dont il nous accuse. C'est là que l'innocence sjra vengée.
« La Société des amis des Noirs demande donc que l'Assemblée, dans sa justice, censure M. Dil-lon, ou que, dépouitHaat. de sou inviolabilité, elle permette de le.poursuivre devant les tribunaux , pour obtenir une rétractation.éclatante, (Murmures et applaudissements.)
« Nous sommes, avec un profond respect, Messieurs,
« Les membres de la Société des amis des Noirs,
« Signé ; Clavière, président par intérim;
: « J.-P Brissot; secrétaire.
; « 5 mars 1791, »
M. Arthur DiUon, mon collègue dans la députation de la Martinique,, se trouve absent de l'Assamblée; mais il m'est très facile de le suppléer.
Je tiens à la main deux exemplaires d'un imprimé qu'il a fait faire hier et qui doit vous être distribué; il a.pour titre : Motifs de la motion faite à l'Assemblée nationale le 4 mars 1791, par M. Arthur Dillon, député de la Martinique.
Je demande la permission de te lue pour sa défense.
Plusieurs membres : Lisez 1 lisez !
, Voici çe document :
« Plusieurs personnes, dont je respects le suffrage, ui'ont paru désapprouver, dans la motion que j'ai faite aujourd'hui à l'Asseoibléeuaiionale, la pnrase où j'ai tracé le danger du progrès des opinions de la société connue sous le nom d'amis des N&m. On semble croire que j'ai cherché à inculper la société entière, et à lui prêter de? intentions coupables. Je déclare formellement que je n'en ai jamais eu la pensée ; que je tUMr
pp.cle et estime la plus grande partie des mentr bres de cette société. Je dirai, avec la même franchise, que je gémis de leur erreur : que je vois, avec autant d'effroi que de douleur, qu'ils creusent aux colonies et à la nation entière un abîme qui engloutira les uns et causera la ruine des autres.
« N'est-il pas évident que la première et la principale cause des malheurs des colonies a été provoquée par la publication des écrits des amis des Noirs, qui, sans aucune connaissance des lieux, veulent détruire des liens politiques que le temps et un long calme peurraient seuls affaiblir ? Si on y parvient jamais, ce ne sera que par la persuasion, et non en encourageant .des écrits injurieux et coupables.
« Je maintiéndrai toujours cette vérité fâcheuse, mais incontestable, qu'il a été de mon devoir de présenter à l'Assemhlée nationale ; .c'est que si, dans les circonstances présentés, et après les décrets des 8 mars et 12 octobre 1790, elle eût admis à la hatre une députation 4'hommes de couleur, le jour méiee où la nouvelle en serait arrivée aux colonies aurait été celui de l'insurrection générale» contre la mère-pairie, que des flptg de sang et l'épuisement du Trésor publia n'eussent pu éteindre.
« Je le demande aux citoyens qui veulent sincèrement le bien : lorsque, enflammés de l'amour de la patrie, et voulant faire connaître à ses législateurs tout le danger d'une démarche imprudente dont j'étais profondément pénétré, j'aurais pu, contre mon intention, généraliser un reproche cofltre une société.qui a causé les plus grands malheurs, quel est eelui qui ne m'a pas déjà justifié dans son cœur ? Ët l'Assemblée nationale doit-elle voir avec indifférence» des journalistes, vraisemblablement stipendiés, attaquer, avec impunité, ses propres décrets, et même oser inculper ceux de ses membres qui, après un travail pénible, ont su lui présenter en vrais hommes d'État, et en véritablement bons citoyens, lés seules mesures qu'elle eût é adopter pour conserver à l'empireses plus belles et plus précieuses possessions, et qui, par son ordre, sont occupés, dans ce moment même, à lui présenter le travail définitif qui doit.à jamais consolider l'union des colonies à, la mère-patrie ?
« Paris, ee 4 mars 1791. »
« Signé : A. DiLbON, »
Après cette lecture, Messieurs, je me bornerai à demander que l'Assemblée veuille bien passer à l'ordre du jour.
Plusieurs membres ; Ouil oui!
Je demande la parole.
Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix l
(de Saiftt-Jean-d'Angély) demandent la parole,
Plusieurs membres : L'ordre du jour !
Je consulte l'Assemblés sur la question de savoir si on passera à l'ordre du jour.
(C'épreuve a li&>.)
paraît à la tribune et insiste pour avoip la parole.
On me demandepourquoi je consulte l'Assemblée. M. le curé Grégoire avait demandé la parole, il m'a dit qu'il n'insistait pas ; et, comme la motion faite à la tribune par M- Ma-reau avait été parfaitement entendue, j'ai cru pouvoir la mettre aux voix; M,. Regnaud«tJJ. de Mirabeau,réclament la parole, l'Assemblée décidera si je dois l'accorder ou la refuser.
Yoix diverses ; L'ordre d u jour ! Levez la séance l
Je demande à parler sur l'ordre du jour.
La délibération est commencée; je demande qu'on fa?se la contrepartie. (Mouaeimnt prolongé.)
Yoix nombreuses ; L'ordre du.jour! Levez la séance 1 La contre-partie i
L'Assemblée veut-elle délibérer sur la. demande de l'ordre du jour ?
Non, Monsieur le Président.
(L'Assemblée, consultée, passe à l'ordre du jour)*
lève la séance à trois heures et demie.
a la séance de l'assemblée nationale du
Nota. Nous insérons ici une opinion non prononcée de M. Malouet sur les crimes de lèse-nation. —Cette opinion ayant été imprimée et distribuée fait partie des documents parlementaires de l'Assemblée nationale.
Opinion de M. Malouet sur les crimes de lèse-nation, sur la responsabilité des ministres et. autres agents du pouvoir exécutif.
J'ai voté contre l'établissement d'un tribunal provisoire destiné à juger les crimes de lèse-nation* ,par#e que ces; crimes ne sont pas définis ; parce qu'il est absurde et tyranoique de laisser aux accusations et aux jugements une latitude illimitée; parce qu'il n'y a rie® de plus urgent, surtout dans un temps de révolution, que d'ap-
Ïirendre aux mécontents et aux citoyens de;toutes es classes quel est le légitime usage de leur liberté, et comment ils peuvent se rendre coupables en en abusant. Cette attention du législateur, nécessaire dans ;tous les gouvernements, est indispensable dans une Constitution qu'on a voulu Faire remonter aux premiers principes du droit naturel; lequel n'a d autres limites que les facultés de l'homme, et ta résistance qu'elles peuvent éprouver, quand il les emploie à attaquer son semblable. Il n'est pas douteux que l'état social n'impose d'autres obligations au citoyen, ne l'environne d'entraves inconnues à l'homme naturel ; et cette considération suffirait pour faire rejeter d'un système de législation toutes ces abstractions dont on compose les théorèmes inapplica-
bles aux membres d'une société politique. Mais quels que soient les ,devoirs auxquels on les astreint, le premier de leurs droits est de les connaître, et de les comparer aux avantages qui résul tent de leur engagement envers Je corps social.
C'est ctoflc injustement, c'est probablement la première fois qu'on a osé soutenir dans une As-semblée législative, qu'il était inutile dei définir les crimes de lèse-nation, qu'il était bien entendu qu'on comprenait dans celte, classe tout ce qui blessait la nation. Mais appartient-il à un particulier, ou à la multitude^, ou à une section du peuple, de prononcer arbitrairement qu'une telle action blesse La nation? Nous avons tous entendu appeler crime de. lèse-nation l'abandon de la cocarde nationale, le refus de prêter le serment sur la constitution du clergé, des écrits,, des opinions contradictoires aux décrets du Corps législatif ; et l'on sait avec quel empressement Je peuple obéit à ces signes funestes de proscription,. Comment ne s'empresse-t-on pas» au cooj-traire, de Lui apprendre que l'étourderie, l'iacoa-sidération, le ressentiment, ne peuvent avoir une expression coupable, qu'autant qu'ils provoquent évidemment deser"> actes criminels ; et que,.lorsqu'il s'agit d'appliquer un jugement à une intention, les preuves matérielles sont aussi nécessaires pour incriminer l'intention que pou# constatée une action ?
Ainsi, comme dans les délits ordinaires, les gradations, les différentes espèces d'un même genre, doivent être déterminées par la loi; comme en proscrivant les violences, les voies de faitfy la loi les classe, les définit depuis l'injure jusqu'à l'assassinat : do même dans les crimes publics, il est de la plus grande importance de n'abandonner aux tribunaux ni aux délateurs aucune défiait ion arbitraire, et de circonscrire ce crime redoutable de lèse-nation dans ses justes limites.
11 est temps que les;dénonciateurs connaissent détendue et les bornes du champ qu'ils oat à parcourir; il est temps de faire a sser les véritables crimes ;de ces magistrats inquisiteurs, qui,souillent Je berceau de la liberté de tous lesiforfuits de la tyran ode ; il est temps que tous les citoyens connaissent la.nature et les -conditions légales de l'accBsatioin publique, àJaquelle ils peuvent être soumis.
Vous qui êtes nés pour être courbés sous la verge d'un despote ; qui ne savez, qui ne voulez ofCrir à la patrie que des sacrifices de sang humain, qui avez multiplié dans tous les coins du royaume les-cachots de laJEUs tille.; qui ne- voyez que des ennemis là ou le véritable patriotisme vous eût eréé des frères et des amis; hommes iodignes de la liberté, son règne, arrivera, et vous serez couvert d'un éternel opprobité 1 Ges voix féroces auxquelles vous obéissez, au lieuse l«ur imposer, cesseront de se faire entendre; mais vos noms y resteront attachés ; l'histoire , aura soin «l'apprendre à, nos neveux tous les crimes que vous n'avez point vengés et ceux que vous a^ez commis, en laissant opprimer les innocents par cette accusation funeste de lèse-nation, avant que la loi l'eût prononcée : oui, l'histoire nous flétrira ; car d'autres hommes que vos infâmes écrivains écrivent pour la postérité.
Ce qui distingue essentiellement les pays libres de ceux soumis au despotisme, c'est le earactèoe nettement prononcé par la loi des accusations publiques, et leur rapport unique avec laliherté etiasouver.aiae.té.Car., en supposant une Constitution populaire, faite par des démagogues et à leur
profit, si l'on veut trouver les vues secrètes par esquelles ils tendent au despotisme, il suffit d'examiner ce qu'ils prononcent et ce qu'ils dissimulent sur les accusations publiques ; plus ils les multiplient, plus ils en voilent les limites, plus la liberté est en danger. L'intérêt de l'Etat, le salut du peuple, seront alternativement pour eux le glaive de la vengeance, l'excuse de l'ambition, le motif d'une extension de pouvoirs. Quand nous ne serions pas, à cet égard, éclairés par l'histoire de toutes les Républiques, des plus célèbres démocraties, ce qui se passe aujourd'hui parmi nous ne suffirait-il pas pour épouvanter tous les citoyens, qui savent braver la mort, mais qui prisent plus que la vie : l'honneur, la liberté?
Dans les États despotiques, tous les crimes sont une offense envers le souverain parce que toutes les lois ne sont que ses volontés (t) : là où il n'y a point de patrie, il ne peut y avoir d'accusation en son nom ; mais, dans un pays libre, il cesse de l'être, s'il existe une volonté, un intérêt privé, qu'on puisse venger au nom de la patrie par une accusation publique, et si les divers dommages, que la société peut souffrir des délits ordinaires, sont légèrement ou vaguement confondus par la dénomination des crimes de lèse-nation. Et, lorsqu'on ose nous dire que, dans un temps de révolution, il ne faut pas être si difficile sur les définitions ; qu'il n'y a alors que deux espèces d'hommes, les bons et les mauvais patriotes, les amis et les ennemis de la Révolution ; que parihi ces derniers doivent être comptés tous ceux qui improuvent, tous ceux qui se plaignent : je réponds que la coupable absurdité de ces maximes fera plus de victimes que de conquêtes; qu'Octave et Geogis-Khan les pratiquèrent en débutant, mais ne les avouèrent jamais : je réponds que c'est dans cet ébranlement d'un vaste Empire qu'il faut se hâter d'établir le régulateur de toutes les opinions, de tous les mouvements populaires : ce régulateur c'est l'éternelle justice, c'est la raison écrite, qui mérite seule le nom de la loi. Et c'est dans le grand livre des hommes; c'est dans vos consciences, comme dans les annales du monde, que vous trouverez des nations justes sur le crime de lèse-nation. Il me paraît si facile d'en assigner le caractère, qu'il faut encore plus se hâter de dire ce qui lui est étranger que d'en donner le signalement.
On ne peut assimiler les crimes de lèses-nation à ceux commis anciennement sous le nom de lèse-majesté. On sait que les empereurs romains faisaient rendre même à leurs images une espèce de culte divin, et que non seulement l'insulte, mais l'irrévérence devint un délit capital. C'est de là que sont partis tous les jurisconsultes du despotisme, pour distinguer les différents chefs et multiplier les espèces du crime de lèse-majesté.
11 faut donc distinguer dans un Etat libre, les injures faites au prmce, des attentats commis contre sa personne, sa vie, sa liberté, son gouvernement; et les injures faites à la nation, des attentats commis contre sa sûreté, sa liberté, sa souveraineté.
Les injures faites à la nation ou à son chef peuvent être considérées, à raison de leur gravité, comme crime de lèse-majesté. Les attentats coni-mis contre la personne du prince ou contre la liberté, la souveraineté nationale, sont les seuls crimes de lèse-nation.
Mais il faut bien se garder de donner au mot injure une acception indéterminée, soit relativement au prince, soit relativement à la nation. Et premièrement, en ce qui concerne le prince, l'injure grave présente plus sensiblement un corps de délit, qu'en ce qui concerne la nation ; car un homme violent et irrité peut avoir l'intention d'outrager le chef de l'État; et il exécute cette intention par uneinjuré directe à sa personne; mais il ne peut y avoir qu'un insensé qui ait le projet d'outrager la nation, laquelle ne peut être atteinte par les outrages d'un individu. Ainsi, il e3t difficile de composer un corps dè délit de paroles injurieuses à la nation, si elles ne s'adressent à un corps qui en représente la souveraineté, tel que le Corps législatif. — Je Suppose donc un homme disant, dans un accès de rureur, tout ce qu'il est possible d'imaginer de plus offensant pour la nation, cet excès de démence peut être puni par voie de police ; mais je n'entends pas comment il pourrait être la matière d'une accusation publique : car la liberté ni la souveraineté nationale ne peuvent être compromises par des paroles insensées. Il n'en n'est pas de même si l'injure s'adresse au représentant de la nation ; il peut exister alors un corps de délit ; les paroles injurieuses ne sont plus, comme dans le premier cas, lancées dans le vague des airs; elles frappent à un but ; elles retentissent dans le sanctuaire des lois ; elles blessent la majesté du peuple ; maiscen'est point encore là un crime de lèse-na-tion ; et l'on sait qu'il faudrait distinguer dans cette espèce ce qui ne serait qu'un manque de respect au Corps législatif, de ce qui serait une violation manifeste de sa dignité, de sa puissance. Eu fin, la violence d'un premier mouvement et l'outrage prémédité présentent des différences frappantes, qui peuvent faire de l'un une faute seulement, et de l'autre un délit.
Les paroles ou les écrits contre la Constitution sont susceptibles d'une distinction encore plus marquante, puisqu'ils peuvent être innocents ou coupables, non seulement par l'expression littérale, mais aussi par le but indiqué. — Ainsi celui qui dit : « Ces lois sont mauvaises, injustes, « tâchons de les réformer, » exprime un vœu libre et légitime ; mais s'il appelle, s'il conseille la force pour renverser les lois, ce n'est plus un homme libre, usant de son doit de coassocié au corps politique, c'est un mauvais citoyen, qui excite, qui prépare aulant qu'il est en lui ues désordres, des troubles intérieurs. Un tel homme est dans un état de révolte; et cependant la qualification de séditieuse est celle qui lui convient plutôt que celle de criminel de lèse-nation ; car je ne saurais la séparer d'un acte matériel, par lequel la liberté, la sûreté et la souveraineté nationale sont directement attaquées.
Je n'appelle donc attentat contre la Constitution que les démarches faites ou concertées pour la renverser à main armée, soit par des insurrections intérieures, soit par l'appui d'une puissance étrangère. Or, comme un assassinat, un vol projetés, sont punis, non en déposant de la volonté mais des tentatives faites pour l'exécution, lorsqu'il est prouvé que l'assassin s'est armé et a cherché ou attendu dans tel
lieu l'homme qu'il voulait tuer; de même un attentat contre la Constitution ne peut être constaté et puni qu'autant qu'il y a un corps de délit, c'est-à-dire des actes positifs, des démarches combinées, des preuves de mesures concertées pour agir violemment.
— C'est ici que le zèle patriotique, dans son aveuglement, peut s'exalter jusqu'à la férocité.
— Et quand on lira, dans dix ans, la dénonciation du club monarchique par M. Barnave, par les sections de Paris, et l'arrêté de la municipalité contre les citoyens arrêtés chez le roi(l), le 28 février dernier, et tant d'autres dénonciations atroces, dont nous avons lu ou entendu les rapports, dont les tristes victimes ont été massacrées ou languissent encore dans les prisons, on croira que la France entière était ivre, que la pitié, l'humanité s'étaient éteintes dans tous les cœurs, et la raison dans tous les esprits. Que sont en effet devenus les hommes honnêtes, qui, par leurs lumières et leurs exemples, doivent restituer au peuple ses mœurs et sa droiture ? Si on les empêche de parler, pourquoi n'écrivent-ils pas? Comment ne lit-on pas dans les rues, dans les places publiques, et jusque sur l'écorce des arbres, l'horreur ae tous les excès dont nous sommes flétris? Pourquoi la voix de tous les bons citoyens ne s'élève-t-elle pas au-dessus de celle des énergumènes, qui prolongent le délire de la multitude?
Philosophes, gens de lettres, qui prêchiez tant la tolérance ; qu'attendez-vous pour la prêcher encore ? Vous avez abandonné i'arène aux gladiateurs ; c'est à vous à éclairer, à épouvanter le peuple sur ses soupçons, ses fureurs, son ignorance, ses jugements iniques, et sur les monstres qui les provoquent; c'était à vous à faire justice de ces nouveaux criminels, qui voudraient faire un crime de lèse-nation de l'exécration qu'ils inspirent et de la punition qu'ils méritent. Citoyens vertueux, qu'êtes-vous devenus ? C'était à vous à vous emparer de l'instruction du peu-
pie, à veiller sur les accusations publiques, à démasquer les démagogues et leurs perfides astuces, à protéger les innocents, à montrer la différence du crime à l'imprudence et celle d'une juste ou injuste indignation avec les coupables complots. Toutes les idées ont été confondues ; la lâcheté d'une part et la scélératesse de l'autre, ont laissé la vérité sans défense, ou ceux qui l'ont défendue, sans appui.
Cependant, quand on annonce le règne des lois, quand on veut conduire les hommes à la liberté et au bonheur, les idées les plus saines, les principes les plus purs ne doivent-ils pas en frayer la route ? C'est en m'y attachant que je ne trouve qu'un seul genre de crime de lèse-nation, qui se subdivise en plusieurs espèces : je vais les indiquer.
Je rangerai dans la première classe tous complots, traités, négociations de la part d'un citoyen ou d'un corp3, avec l'ennemi ou avec des puissances étrangères, si l'objet de la négociation non autorisée est préjudiciable à l'Etat j
2° Les entreprises ou tentatives faites pour enlever, disperser ou dissoudre par la force le Corps législatif, les assemblées primaires et électorales légalement convoquées;
3° Les entreprises ou tentatives faites contre la vie, ia liberté ou la sûreté du roi et de l'héritier présomptif du trône;
4° Les entreprises ou tentatives faites pour surprendre une place forte, un arsenal, corrompre les troupes et les gardiens des arsenaux, vaisseaux, magasins et places fortes, les incendies ou y introduire l'ennemi ;
5° Tout enrôlement ou levée des troupes, tous établissements d'impôts ou octrois non autorisés par une loi ;
6° Toute résistance à main armée à l'exécution des lois, tout attroupement avec menaces et voies de fâits contre les magistrats en fonction ;
7° La soustraction, le divertissement ou déprédation des fonds publics par les administrateurs et comptables ;
8° L'emploi de la force armée contre le3 citoyens, hors les cas prévus par la loi;
9° Toute provocation verbale ou par écrit à l'insurrection contre les lois, à la scission ou à l'indépendance d'une ou plusieurs parties de l'Empire.
Tels sont les principaux délits qui, en attaquant directement la liberté et la souveraineté blessent véritablement la nation. Le divertissement des fonds publics semblerait devoir être rangé plutôt dans la seconde classe que dans la première de haute trahison ; mais si l'on considère qu'une administration infidèle des revenus de l'Etat peut en opérer la subversion ou la servitude, on sera convaincu de la nécessité d'attacher une grande importance à ce délit, qui doit être cependant gradué dans l'application des peines, selon la gravité des cas ; car celui qui aura soustrait une somme au Trésor public pour l'appliquer à son profit, aura fait une action infâme, mais moins criminelle encore que s'il l'eût employée à payer des traîtres à la patrie.
De toutes les qualifications énoncées dans les articles précédents, le cinquième et le neuvième présentent celles dont on pourrait le plus facilement abuser contre des hommes innocents ou seulement imprudents, poursuivis par la haine ou la vengeance.
Ainsi un véritable enrôlement de troupes, non autorisé, est criminel; et si, dans un temps de
troubles et de brigandages, un citoyen était convaincu de s'être entouré d'hommes affidés, qu'il entretiendrait, qu'il armerait pour la défense de sa maison, de sa personne menacée, si l'on ne pouvait établir aucune preuve de coalition, de correspondance de cet homme avec les ennemis, il serait innocent.
Un établissement d'impôts ou d'octrois, non autorisé par le Corps législatif, est certainement criminel ; mais pourrait-on qualifier ainsi sans tyrannie le mouvement de zèle et de eharité qui, dans une calamité publique, dans un besoin pressant, porterait un ou plusieurs citoyens à proposer une taxe ou contribution aux habitants aisés de la cité, en supposant que la multitude des nécessiteux en pressât la perception, sans aucune des formes légales? On voit, dans cet exemple, comment des citoyens honnêtes pourraient être incriminés, poursuivis par leurs ennemis, et comment la loi doit pourvoir à leur défense, en ne s'appliquant dans ce cas qu'aux hommes constitués en autorité, qui s'en permettraient un tel abus ou à leurs agents reconnus.
Toute provocation verbale, ou par écrit, à l'insurrection contre les lois est une des espèces du crime de lèse-nation. Ainsi, quand nous avons rendu le décret dn marc d'argent, il était bien permis aux plus zélés démocrates de s'en plaindre, d'en solliciter la réformation ; mais exciter le ^peuple à punir la majorité corrompue qui avait prononcé cet odieux décret, est certainement un crime irrémissible, et c'est celui de plusieurs écrivains patriotes, non seulement dans cette circonstance, mais dans tous les cas où l'Assemblée s'est éloignée des principes de la pure démocratie. Combien n'avons-nous pas vu de provocations à l'insurrection contre l'autorité et la prérogative royale constitutionnelle, sans qu'aucun magistrat ait eu le courage d'en poursuivre les auteurs 1 Combien d'atrocités révoltantes qu'il n'a pas même été permis de dénoncer. D'un autre côté, que deviendraient la liberté et les droits les plus sacrés des citoyens, si l'on poursuit, si l'on condamne comme insurrection des pétitions, des remontrances, des observations critiques d'une loi ?
Les délibérations des catholiques de Nîmes ou d'Uzès étaient bien ou mal motivées ; peu importe : leurs intentions étaient pures ou suspectes, je fie les défends point; mais leur droit de remontrance était-il équivoque? Lorsque le peuple a remis toutes ses forces entre les mains d'un despote, il doit obéir et se taire; mais lorsqu'il confie ses droits à des représentants, pent-il aliéner celui d'improuver leurs opérations ? Peut-il l'exercer autrement qu'en conservant à chaque individu la liberté de manifester son vœu ? L'obéissance provisoire est nécessaire parce que le Corps législatif est l'interprète de là volonté générale, jusqu'à ce qu'elle s'explique elle-même ; mais elle serait à jamais captive, si vous étouffl* z partiellement la voix en chaque particulier (1).
Je suppose que, dans toutes les parties de la France, les citoyens les plus éclairés s'assemblent paisiblement, qu'ils examinent nos décrets, que chacun dise librement ce qu'il approuve, ce qu'il condamne,cequ'il juge bon, inutile ou dangereux, que de toutes ces conférences il résulte dans chaque canton un avis commun, et que la réunion de ces avis prépare pour une seconde législature la réforme de plusieurs parties de la Constitution, en y obéissant provisoirement, je demande quel est le tyran démagogue, ou le comité des recherches qui s'aviserait d'appeler cela une insurrection ou une provocation à l'insurrection? Je demande si l'on prétend bien sérieusement nous lier par un nouveau serment de ne point concourir légalement à la revision d'une Constitution décrétée au milieu de tant de passions et d'orages? Je sais que le serment sera encore déposé, et je déclare d'avance que je ne le prêterai pas.
Dans le temps du gouvernement absolu, j'ai écrit, non seulement aux ministres contre leurs décisions, mais j'ai rendu public des mémoires contre les lois subsistantes; j'en ai blâmé les dispositions; et ce qui ne pouvait être alors qu'une cause de disgrâce, deviendrait aujourd'hui la matière d'une accusation publique ! 11 est impossible qu'il y ait des Français assez aveugles ou assez lâches pour le souffrir. Il faut donc des actes positifs de révolte ou d'excitation à la révolte contre les lois, pour donner lieu à cette accusation, et je maintiens que j'aurais le droit, sans pouvoir être inculpé, n'écrire à toutes les municipalités, à toutes les assemblées primaires du royaume, pour les engager à demander la révocation de tel ou tel décret, comme injuste, dangereux, préjudiciable au bien général. Il se trouverait sûrement d s hommes qui appelleraient une telle démarché provocation à l'insurrection; mais j'appellerais leur censure provocation à la tyrannie, et je prouverais cette assertion. C'est une pratique aussi vulgaire qu'elle est ancienne, de la part des hommes qui gouvernent le peuple ou le prince, de se faire considérer, eux et leurs intérêts, leurs opérations, comme la chose publique, de telle manière qu'on ne puisse attaquer leur crédit, leurs intrigues, leur système, sans être réputé ennemi de la patrie. Le cardinal de Richelieu parvint à cet excès de la toutes puissance; et, avant comme après lui, tous ceux qui ont voulu s'emparer de l'autorité sous le masque de la popularité, ou avec l'audace du despotisme, ont employé les mêmes moyens, la terreur et le mensonge, mais avec cette différence que le démagogue parle toujours de liberté, en exerçant la tyrannie, et le tyran commande franchement qu'on exécute sa volonté, qu'il appelle le bien de l'Etat; tous les deux voudraient dépouiller le peuple de ses facultés intellectuelles. La raison d'un citoyen courageux tes épouvante et les irrite; mais le démagogue ouvre un vaste champ à la licence de la multitude; il la lance
sur ses ennemis et lui persuade ainsi qu'elle est libre.
Il n'y a qu'une manière d'être libre : la déclaration des droits l'a prononcée et peut être exagérée; c'est, d'une part, l'égalité des droits politiques, et, de l'autre, la liberté de toutes les opinions, et leur promulgation, sans porter atteinte à l'ordre public.
Or, il ne suffit pas, pour restreindre l'usage de ma liberté ou m'en punir, que ce que j'ai dit ou écrit soit considéré comme une cause prochaine de troubles ; il faut que le crime de la révolte y soit empreint. Ainsi, le refus de payer l'impôt est un délit; l'excitation à ce refus est un crime public; mais me rendriez-vous responsable4e ce refus, si j'ai dit ou écrit que l'impôt est excessif, mal conçu, mal réparti, et si je l'ai néaomoi is acquitté?
La provocation à la scission ou à l'indépendance d'une partie de l'empire, présente comme crime public diverses considérations. S'il était possible que les habitants d'une province se réunissent unanimement pour manifester Je désir de se détacher du corps social, d'après les principes que nous avons établis, ils en auraient le droit; et cette entreprise ne pourrait être considérée comme un attentat contre la nation, d'autant qu'elle serait appuyée d'actes hostiles ou de forces étrangères qui menaceraient notre sûreté.
On retrouve dans cette hypothèse de la déclaration d'indépendance, faite unanimement parles habitants d'une province, le danger d cet alignement des priiicij.es d'un gouvernement quelconque sur ceux du droit naturel ; car, de conséquence en conséquence, et en suivant toujours la rigueur du principe, la monarchie pourrait se dissoudre en cent Etats différents. Mais, comme de semblables projets sont le plus souvent le résultat d'une intrigue secrète, d'un intérêt privé, plus que de la volonté réfléchie des habitants d'une province, leurs instigateurs doivent être poursuivis pour le maintien de la tranquillité générale. Je n'excepterais que le cas où la proposi-tiond'indépendance serait faite dans une assemblée primaire ; car, c'est là seulement que chaque cito y en p articipe i mméd i ateme nt, par s on s uf f rage, à la plénitude du pouvoir social. Il doit donc jouir de la plus parfaite liberté, jusqu'à la violence exclusivement.
J'ai réduit le crime de lèse-nation à son véritable terme, en le circonscrivant dans les cas où la liberté et la souveraineté nationale sont directement attaquées; mais il me reste à exposer tous ceux qui donnent lieu à une récusation publique contre les divers agents du pouvoir exécutif, ministres, généraux d'année, magistrats, administrateurs et comptables, à raison de leur responsabilité. Je n'ai pas besoin de faire observer que, pour l'es délits communs et poar ceux cle haute trah son, dont j'ai indiqué les principaux chefs, leS agents du pouvoir exécutif ne peuvent être distingués des autres citoyens, c'est parce qu'ils peuvent se rendre coupables de délits relatifs à le»rs fonctions et à l'autorité qui leur est confiée qu'il faut spécifier les cas de la responsabilité qui leur est propre.
En dé rétant la responsabilité, nous n'avons encore imposé qu'une obligation vague, dont l'application ne pourrait être faite également à tous les cas qui en sont susceptibles, et dont l'extension illimitée deviendrait tyrannique. C'est eatre ces deux écueils que la loi doit tracer la ligne sur laquelle les administrateurs, les magis-
trats et tous les agents du gouvernement doivent se tenir, pour n'être point exposés aux accusations et aux dénonciations périodiques; car, il serait aussi dangereux de leur inspirer une timidité d'inertie dans leurs fonctions, que de leur laisser envisager comme purement comminatoire la loi de la responsabilité. Il faut donc déterminer l'acception de ce mot, et en arrêter irrévocablement l'emploi.
Les prévaricateurs dans tes emplois publics n'ayant jamais pu prétendre à l'impunité, en le3 déclarant aujourd'hui responsables, nous ne faisons point une loi nouvelle; et ce rempart, peut-être unique de la liberté, ne serait plus qu'âme faible barrière, si nous n'entendions appliquer !a responsabilité qu'aux délits ordinaires, et s'il n'y avait, pour l'exercer, des moyens plus sûrs que par le passé.
C'est donc aussi sous le rapport de la liberté publique et des atteintes qui peuvent y être portées, c'est à la violation des principes constitutionnels, des droits du citoyen, qu'il faut appliquer la responsabilité, à raison de laquelle tout agent du pouvoir exécutif peut être cité devant le Corps législatif; mais il est indispensable que ces délits soient formellement caractérisés par la loi, que les faits dénoncés soient positifs, qu'on n'applique point à une espèce défaits les inductions et les qualifications qui appartiennent à une autre; et comme un accusé de ce genre est tout de suite accablé de la défaveur publique, que tes soupçons, les préventions se multiplient et se dirigent contre lui, il faut aussi que la loi veilleàsa sûreté et protège son innocence comme celle de tous les autres citoyens.
Ainsi le ministre, d'un caractère ardent et inconsidéré, mauvais économe, imprévoyant dans ses plans, négligeant dans ses opérations, fera un mauvais ministre; et quoi qu'on pût recueillir dans sa conduite publique un assez grand nombre de faits pour l'inculper, comme la négligence, l'imprévoyance, l'impéritie, ils ne présentent point une mesure fixe de délit et de peine ; il faut que le mépris public, la disgrâce du prince poursuivent un tel ministre, mais on ne doit pas le soumettre à une accusation capitale. Celui, au contraire, à qui des talents distingués, une vie irréprochable auraient concilié la faveur publique, ne peut commettre impunément un acte de violence ou d'injustice envers un citoyen ; mais tel doit être l'empire de la loi, que dans ce cas les tribunaux ordinaires doivent seuls en connaître; car il est bien important de ne pas confondre les actions publiques avec les actions privées.
Quels sont donc les cas où un ministre ou tout autre agent du gouvernement peuvent être cités comme responsables de leur conduite? Geux, et ceux-là seulement, où la Constitution est violée.
Ainsi, indépendamment des articles ci-dessus énoncés, l'ordre de suspendre une procédure, une commission expédiée pour informer, instruire une procédure autrement que par tes juges légaux, une défense d'obéir, un ordre de suspendre l'exécution des décrets sanctionnés par le roi, un ordre d'enlever, d'enfermer des citoyens non décrétés, la dissipation, la distraction frauduleuse pour d'autres objets des fonds assignés à telle défense, l'ordre donné secrètement de commencer les hostilités contre une puissance étrangère, des conventions à la charge de ta nation, soustraites à l'examen du Corps législatif, un emprunt, une défense publique non autorisée,
la divulgation ou communication à l'ennemi des plans, projets et traités proposés au conseil du roi, l'exagération des prix, la connivence avec les fournisseurs pour les marchés et approvisionnements publics, voilà, je crois, les chefs d'ac usation sur lesquels un ministre ou administrateur principal peuvent être cités devant le Corps législatif ; toute autre faute ou délit rentre dans la classe des délits communs.
Le* cas que je viens d'indiquer sont également applicables à ious les agents supérieurs du gouvernement; mais ceux relatifs aux généraux de terre et de mer doivent être spécialement expliqués.
Ainsi, un général ou commandant qui aura reçu l'ordre de se tenir sur la défensive, et qui aura fait un acte d'hostilité; qui aura, dans une posiiion avantageuse, conclu une trêve sans autorisation; qui aura disposé des fonds et des approvisionnements de l'armée, sans pouvoir en rendre compte; qui aura divisé et dispersé les forces qu'il commande, de manière à être suspecté de connivence avec l'ennemi; qui aura été surpris et battu pour avoir négligé les précautions de sûreté dont il doit s'environner; qui, par des abus u'autorité et des injustices manifestes, aura produit le découragement et excité les plaintes de son armée; qui aura favorisé ou toléré l'indiscipline... tels sont les cas d'accusation publique contre un général d'armée.
Les corps administratifs et les tribunaux doivent y être également soumis, pour toute désobéissance expresse aux lois, pour toute négligence dans leurs fonctions, lorsqu'il en résulte des désordres ou des malheurs publics. Or, c'est un malheur public qu'une sédition non réprimée, qu'un coupable impuni ; c'est un grand crime que la lâcheté du magistrat lorsque sa fermeté peut prévenir ou épouvanter le crime. Jamais nous n'avions vu autant de magistrats tyrans avec les faibles, lâches devant ceux qui les bravent.
La responsabilité des comptables ne peut être relative qu'à l'emploi des deniers, marchandises ou munitions, dont ia garde leur est confiée, et leur prévarication ne peut devenir un crime public, qu'autant qu'elle se lie à la violation des lois constitutives. Ainsi, un trésorier ou garde-magasin doit être poursuivi et puni comme dé-p sitaire infidèle, s'il a détourné à son profit les fonds ou effets dont il est gardien : mais s'il a supposé des ordres de payement, s'il a falsifié les pièces de sa comptabilité, s'il a délivré les fonds ou effets par d'autres ordres que ceux auxquels il est tenu d'obéir, son délit sort de la classe de ceux soumis aux tribunaux ordinaires, et doit être poursuivi devant la haute cour nationale.
Pour donner à la responsabilité toute la latitude qu'elle doit avoir, j'ajouterai qu'il est nécessaire de déclarer responsab es dans l'ordre administratif et militaire tous les subordonnés envers leur supérieur, de telle manière que la désobéissance à un ordre ou instruction non contraire à la loi, émanée d'une autorité supérieure, ne puisse jamais être impunie, et que la peine soit graduée suivant la gravité des cas, mais ne puisse être jamais moindre que la destitution du délinquant. Gomme cetie échelle de subordination, dans toutes les i arties du gouvernement, est la sauvegarde de l'ordre public, il ne me paraît pas douteux que les citoyens n'aient le droit et l'obligation d'en dénoncer l'infraction,etqu'ellene puisse être la matière d'une accusation publique.
Je remarque ici que la détermination exacte de tous les cas de responsabilité des ministres et administrateurs supérieurs est la véritable organisation du ministère, (1) que leurs fonctions n'étant autre chose, dans une Constitution libre, que l'exécution des lois, il est indispensable de prononcer à quel terme ils doivent s'arrêter, ce qu'il serait coupable de faire ; mais il est inutile, inconséquent, dangereux de prescrire tout ce qu'ils doivent faire; c'est au chef suprême du pouvoir exécutif qu'il appartient de les mettre en action, de leur départir les détails du gouvernement, de les réunir ou de les diviser suivant le besoin des circonstances. L'action du gouvernement ne doit paraître dans la Constitution que par ses principes et ses limites : où commence, où finit sa puissance, voilà ce qu'il faut statuer; mais l'intervalle doit être libre pouragir, sans quoi l'administration d'un grand empire, environnée d'entraves dans toutes ses parties, n'aurait jamais cette marche imposante, nécessaire à la dignité et à la sûreté de la nation, au dedans et au dehors. Il y a en législation, comme dans les arts, une manière large qui n'appartient qu'aux grands maîtres.
J'ai parcouru tous les délits qui peuvent intéresser une nation comme corps politique, et dont il est utile qu'elle se réserve la poursuite. Avant d'en résumer l'exposé, arrêtons-nous encore un moment sur le spectacle que présente aujourd'hui la France, sur cette puissance des mots, cette confusion d'idées dont le3 ignorants et les fripons font un si cruel abus.
Civisme, patriotisme, amis, ennemis de la Constitution, de la Révolution, bien public, contre-révo' lution, voilà les paroles magiques qui mettent toute la France eu mouvement. Je dis ies paroles, et point les choses, car je ne crois pas plus au patriotisme de la plupart de ceux qui adorent le bon peuple, qui sont passionnés pour le bien public, qui trouvent tous nos décrets sublimes, qu'aux contre-révolutions combinées par les mal-
heureux qu'on a pendus ou qu'on projette de pçndre.
Gomment donc est-il si facile d'agir sur les hommes de tous les temps, de tous les lieux, par des paroles qui n'ont pas plus de valeur que le son "d'un instrument? Mon civisme n'est pas contesté, dit un misérable charlatan, ie suis ami de la Constitution, de la Rèvohttion, et le voilà classé parmi les patriotes ; il a reçu dès lors, comme le médecin de Molière, la faculté de nier impunément. — Cet homme est contre-révolutionnaire^ dit un comité des recherches ; voilà une lettre de sa femme, de son cousin, qui lui parle comme à un ennemi de la Révolution; il regrette les parlements: il observe, il compte les mécontents; il a malpa^é de la Constitution et des prêtres jureurs ; il n a point de cocarde; c'est un papiste, un royaliste, un ennemi du bien public... et le malheureux est bientôt arrêté; on vous prouve que, pour le préserver de la fureur du peuple, il faut le mettre en prison, et lui faire son procès pour le maintien ae la liberté publique. D'un bout de la France à l'autre, celui qui est mécontent de son voisin lui impute une contre-révolution, comme s'il n'y avait qu'à charger son fusil, et à aller attendre la Révolution sur un grand chemin, pour la tuer en passant. Voilà cependant l'excès de démence auquel nous sommes parvenus. La plainte, l'improbation, les complots sont devenus synonymes. Il faut absolument admirer ou se taire; c'était ainsi que Denys le tyran voulut être compté parmi les poètes de son temps.
Où. est Tacite et son pinceau, pour nouspeindre cette génération corrompue invoquant la liberté, et s'enivrant du marc de la licence, travaillant à l'envi à poser les fondements de l'anarchie ! Et cependant quelques idées vastes et fécondes sortent de ce chaos. On ne sait d'où vient, ni à qui appartient cette énergie imposante, même dans ses écarts^ qui renverse ce que le temps avait respecté, qui rabaisse tout ce qui était grand, jusqu'à la royauté, qui brise les monuments de l'orgueil comme ceux de Jp piété, qui présente tout à la fois le spectacle ae la force et de la faiblesse, de l'aveuglement et des lumières, de la création et du néant 1 Nos usages, nos mœurs, le clergé, la noblesse,la magistrature, tout disparaît, et uous ne voyons à la place ni ces vertus, ni ces talents éminents qui expliquent, qui justifient tout; aucun grand citoyen ne s'élève sur tant de débris! C'est au milieu des excès, des désordres de toût genre, que les éclairs d'une raison supérieure sillonnent de sombres nuages, et nous laissent tantôt l'espoir d'un beau jour, tantôt l'image lugubre d'une profonde nuit. 0 citoyens, si Vous voulez être libres, désenivrez-vous, connaissez les dangers de l'exagération, de l'hypocrisie, des fausses vertus, des perfides alarmes; embrassez étroitement la vérité, la justice et faites-en la règle de vos jugements.
La contre-révolution dont on vous menace ne saurait se faire sans vous. Si vous êtes heureux, plaignez les mécontents, et ne les opprimez pas; si vous êtes inquiets, agités, vous travaillez vous-mêmes au changement dont on vous épouvante. Il résultera de votre agitation, soit que vous cherchiez franchement une assiette plus fixe dans de meilleures lois, soit que votre inquiétude déplace inconsidérément tous les contre-poids de la puissance publique.
0 citoyens, calmez-vous; que les haines, les défiances, les soupçons disparaissent! Gardez-vous d'accuser les innocents, quand vous pouvez légalement confondre les coupables. Délendez-
vous de ces préventions injustes, de ces jugements précipités, qui mettent en péril voire propre sûreté, quand vous ne respectez pas celle d'autrui : frémissez d'apprendre qu'il n'existepeut-être pas encore aux yeux de la loi un seul criminel de lèse-nation, quoiqu'on en ait tant dénoncé.
Appréciez donc à leur juste valeur ces signalements d'amis et d'ennemis de la Révolution. Parmi les premiers il se trouve sans doute de bons citoyens, de zélés défenseurs de la liberté ; mais combien d'intrigants qui n'y voient, qui n'y cherchent que le chemin delà fortune, des places, des honneurs ou des moyens de vengeance! Parmi ceux appelés ennemis, si vous retranchez les gens qui souffrent et ceux qui usent d» leurs droits d]bommes libres, d'improuver ce qui leur disconvient; de préférer dans leurs opinions telle ou telle forme de gouvernement, où trouverez-vous les ennemis redoutables qui peuvent mesurer leurs forces aux vôtres? Et que vous importent les confidences, les secrètes pensées, les vœux prononcés pour un autre ordre de choses?
Sachez que celui qui médite le crime peut encore reculer d'horreur à son approche, et, lorsqu'on viole le secret des familles, les épanche-ménts de l'amitié, la souveraineté de la pensée, pour vous montrer une lettre coupable, souvenez-vous que celui auquel elle appartient peut être innocent; qu'avant que sa pensée fugitive eût produit l'action que vous auriez le droit de punir, il avait celui de la reprendre, de vous la dérober, et d'arrivèr-par la réflexion, de la colère à la générosité, de la fureur à la raison.
Sachez que l'homme le plus vertueux, le plus passionné pour sa patrie, peut redouter jusqu'à l'exécration la tyrannie des démagogues, la lâcheté de3 magistrats, les fureurs impunies de la multitude, les malheurs de l'anarchie, et si dans son indignation il s'écrie : Qui donc nous délivrera de ces brigands-là? Att ndez pour le juger coupable qu'il invoque la violence ou la loi, le citoyen ou l'ennemi.
Il n'y aurait plus de crime de lèse-nation chez un peuple où ces principes seraient méconnus. Le corps social y serait dans un état d'oppression, qui ne laisserait subsister que le droit du plus fort. Chaque citoyen rentrerait alors dans le droit naturel de pourvoir à sa conservation, d'améliorer sa condition; et, celui qui rendrait à sa patrie, par quelque jnoyen que ce fût, la liberté, la paix, en serait le héros.
Ainsi, dans un temps de révolution, ce n'est qu'après avoir ouvert à la plainte, aux remontrances, aux mécontentements, à la liberté paisible, toutes les issues possibles, qu'on doit statuer sur les crimes de lèse-hation. C'est en prescrivant toutes les formes et les interprétations arbitraires, toutes les inductions équivoques; en débarrassant de toute entrave, de tout péril la volonté, les opinions, qu'on doit déterminer nar des définitions précises et sur des actes positifs, les délits qui font la matière des accusations publiques.
Jé vais les résumer, en employant la formule d'un projet de décret :
Art. 1er. Les crimes de lèse-nation sont les attentats commis contre la liberté publique et la souveraineté.
Art. 2. Tous les délits par lesquels les lois constitutives sont violées seront poursuivis au nom de la nation:
Art. 3. Les accusations publiques seront ainsi libellées : Poiir crime de haute trahison;
Pour attentats contre la Constitution;
Pour crimes de lèse-majesté.
Art. 4. Les accusations ainsi libellées seront expositives de faits détaillés; l'époque* le lieu, et toutes les circonstances de l'action mise en jugement seront énoncés.
Art. 5. Nul ne pourra être soumis à une accusation publique, pour ses paroles et écrits, si ses paroles ou écrits n'annoncent expressément et ne représentent, par un conseil ou une excitation positive, Un acte de haute trahison ou de lèse-majesté, ou d'attentat contre la Constitution.
Art. 6. Seront coupables de haute trahison ceux qui seront convaincus d'avoir traité avec l'ennemi ou avec des puissances étrangères, pour leur ouvrir l'entrée du royaume, livrer une place forte ou un corps de troupes nationales, ou une portion quelconque de ia fort e publique, comme aussi d'avoir négocié sans mission et autorisation un traité ou convention, si l'objet de la négociation est préjudiciable à l'Etat !
D'avoir trahi et livré à l'ennemi le secret des plans, opérations et missions qui leur sont confiés;
D'avoir attaqué ou tenté d'attaquer, disperser et dissoudre par la force, le Corps législatif, les assemblées primaires et électorales légalement convoquées;
D'avoir attaqué, menacé ou conspiré contre la vie ou la liberté du roi ; d'avoir attaqué ou menacé la personne de l'héritier présomptif du trône ;
D'avoir fait quelque entreprise ou tentative pour surprendre une place forte, un arsenal, corrompre les troupes et les gardiens des arsenaux, vaisseaux, magasins et places fortes, les incendier ou y introduire l'ennemi;
D'avoir fait un enrôlement ou levé des troupes; d'avoir établi ou perçu des taxes, impôts ou octrois non autorisés par une loi;
D'avoir résisté à main armée à l'exécution des lois ; d'avoir provoqué un attroupement et employé la violence, tué, frappé ou menacé les magistrats en fonctions;
D'avoir employé la force armée Contre les citoyens, hors les cas prévus par la loi et celui d'une légitime défense (,1);
D'avoir provoqué Verbalement ou par écrit l'insurrection contre les lois, la scission ou l'indépendance d'une partie de l'Empire.
Art. 7. Seront coupables d'attentats contre la Constitution les fonctionnaires publics, ministres, généraux d'armée, administrateurs et comptables qui seront convaincus, savoir les ministres et administrateurs :
D'avoir suspendu une procédure, expédié une commission pour informer, instruire et juger autrement que devant les tribunaux légalement établis;
D'avoir défendu d'obéir ou suspendu l'exécution des décrets sanctionnés par Je roi, de ne les avoir pas fait publier et enregistrer;
D'avoir fait enlever ou enfermer des citoyens non décrétés;
D'avoir dissipé ou distrait frauduleusement les fonds assignés à une dépense publique ;
D'avoir secrètement et sans autorisation légale, donné l'ordre de commencer les hostilités contré une puissance étrangère;
D'avoir, soustrait à l'examen du Corps législatif des Conventions à la charge de la nation;
D'avoir fait un emprunt ou une dépense publique autre que celles urgentes et imprévues, sans autorisation;
D'avoir corrompu ou tenté de corrompre les membres du Gorps législatif et des corps administratifs, en leur proposant ou faisant proposer de vendre leurs suffrages;
D'avoir passé des marchés frauduleux pour les approvisionnements publics.
Art. 8. Seront coupables d'attentats contre la Constitution les généraux commandant les forces de terre et de mer, qui seront convaincus :
D'avoir commencé les hostilités, ayant reçu l'ordre de se tenir sur la défensive ;
D avoir divisé et dispersé les forces qu'ils commandent, en présence de l'ennemi, de manière à être suspectés de connivence ;
D'avoir, dans une position évidemment avantageuse, conclu une trêve sans autorisation;
D'avoir disposé des fonds et des approvisionnements de l'armée, sans pouvoir en rendre compte ;
D'avoir laissé enlever leurs quartiers, de s'être laissé surprendre, pour avoir négligé les précautions de sûreté dont ils doivent s'environner;
De faire des marchés et mouvements de troupes dans l'intérieur du royaume, déplacer les garnisons sans un ordre du roi ;
D'avoir produit le découragement et excité les plaintes de l'armée par des abus d'autorité, des injustices manifestes, violences, déprédations ;
D'avoir favorisé ou toléré l'indiscipline des troupes, permis ou point réprimé leâ insultes et violences que pourraient commettre les soldats contre les citoyens.
Art. 9. Seront déclarés coupables d'attentats contre la Constitution les corps administratifs et municipaux convaincus d'avoir usurpé les pouvoirs qui ne leur sont point délégués;
D'avoir désobéi aux décrets sanctionnés par le roi ;
D'en avoir suspendu volontairement l'exécution ; d'avoir refusé de rendre compte au roi de leurs opérations, d'avoir méconnu ou contrarié les ordres du roi non contraires à la loi;
De n'avoir pas réprimé par les voies légales les émeutes et séditions; d'avoir refusé ou empêché la proclamation de la loi martiale, lorsque les séditieux emploient la violence ;
D'avoir dissipé ou diverti les fonds publics.
Art. 10. Seront coupables d'attentats contre la Constitution les juges convaincus d'avoir fait un déni de justice ;
D'avoir violé littéralement les commandements de la loi dans leurs jugements;
D'avoir usurpé les pouvoirs administratifs :
D'avoir refusé d'enregistrer et faire exécuter les décrets sanctionnés par le roi;
D'avoir suspendu l'instruction et jugement des procès criminels ;
D'avoir déféré à des ordres contraires à la loi.
Art. 11. Seront coupables d'attentats contre la Constitution tous les comptables convaincus d'infidélité dans leur gestion, d'avoir délivré les deniers et munitions dont ils sont dépositaires,
autrement que par les ordres et dans les formes prescrites.
Art. 12. Seront coupables du crime de lèse-majesté tous ceux qui seront convaincus d'avoir déclaré verbalement ou par écrit qu'ils ne se tiennent point obligés d'être fidèles à la nutioti, à la loi et au roi ;
Qu'ils ne reconnaissent point l'autoritédu Corps législatif, légalement assemblé;
Qu'ils ne reconnaissent point l'autorité royale constituMoonelie ;
Tous ceux qui seront convaincus d'avoir par des paroles ou des écrits outrageants et calomnieux offensé la nation dans la personne du régnant;
Tuus ceux qui seront convaincus d'avoir, par des paroles ou des écrits outrageants, insulté le Corps législatif
Tels sont, à mon avis, les principaux chefs d'accusation publique ; l'application des peines serait un autre travail qui réclame les lumières de ceux qui out particulièrement réfléchi sur la proportion qui doit exister entre les délits et les peines.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAILLES.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance de jeudi soir, qui est adopté.
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre des administrateurs du directoire du département du Gard, qui est ainsi conçue :
« Messieurs, nous nous empressons de vous rendre compte du succès des mesures que le département du Gard avait prises pour en imposer aux fédérés du camp de Jalès, et pour la sûreté du pays confié à notre administration, en conséquence des craintes qu'il éprouvait et des maux qu'il avait déjà ressentis, comme nous avons eu l'honneur de vous le dire.
« Les deux postes les plus considérables, occupés par les soi-disant fédérés du camp de Jalès, étaient Barjac et Saint-Ambroix. G'est de là qu'ils se répandirent dans les campagnes du nord, s'em-parant des villages, désarmant les patriotes, se livrant au pillage et commettant toute sorte d'excès. Leurs troupes étaient nombreuses, mais peu redoutables, car elles n'avaient ni ordre, ni discipline. M. d'Albignac a pensé que, pour les effrayer et ménager le sang des hommes, il fallait déployer un appareil de forces capable de les efi rayer et de leur ôter tout moyen de résister. En conséquence, et après avoir donné les ordres, les troupes se sont formées en trois colonnes, se sont mises en marche à des heures différentes et tellement combinées qu'elles pussent se mouvoir en Un instaut dans le pays envahi par les factieux.
La première de ces colonnes s'est portée sur
Saint-Ambroix ; elle était composée de 2,000 hom» mes de gardes nationales, commandées pur M. Le Grand, ancien capitaine du régiment de Valence, et menant avec elles deux pièces de canoh de la garnison de Valence : la ville de Saint-Esprit était gardée par le régiment de B»esse et par des gardes nationales rassemblées sous ses murs.
« La seconde, sous les ordres de M, de Mauda-jors, lit uteuant-colonel de Roussillon, était de 1,200 hommes, avec deux pièces de canon.
« Enfin la troisième colonne, commandée par M. d'Albignac, Be porta directement à Stiut-Ambroix. Outre Ces dispositions, un cordon de gardes nationales garantissait la plaine menacée des invasions des factieux.
« Le succès a parfaitement répondu à nos espérances. A peine les trois corps se sont-ils montrés, que tous les factieux ont disparu. M. d'Albignac est rentré sans aucune difficulté da s Samt-Ambroix. Barjac a été évacué; et ce département a été débarrassé en très peu d heures de la présence des malintentionnés. Deux de leurs chefs ont été pris à Barjac ; un troisième, M. d'Albon, a été conduit à Uzès. (Applaudissement.)
« Nous ne pouvons pas omettre de vous dire que deux citoyens, dont un prêtre recomman-aable par s s vertus, s'étaient rendus dans les environs d'Uzès, sur la première nouvelle de l'attroupement, pour dissiper l'orage et faire connaître la Vérité qu'on altérait si fort relativement aux troubles d'Uzès.lls ont été retenus et maltraités par les malintentionnés, et n'ont dû leur salut qu'à la crainte que l'arrivée des patriotes a inspirée.
« Les lois qui nous défendent de sortir à main armi e de notre département ont été sévèrement respectées. M. d'Albignac n'a pu pousser plus loin son expédition. En arrivaut à Saint-Ambro x, il a trouvé grand nombre de maisons pillées. Dans tous les lieux qu'ont habiiés les factieux, le signe caractéristique qu'ils avaient adopté : c'était une croix qu'ils avaient à leurs chapeaux ou sur leurs habits. Le projet de M. d'Albignac est de renvoyer les gardes nationales qui out si généreusement strvi dans cette occasion, et de faire garder par des troupes de ligne les limites du département; mais de nouvelles forces lui sont nécessaires pour assurer le repos de ces contrées.
« L'Assemblée nationale et tous les amis de la liberté peuvent être parfaitement rassurés sur les projets des malintentionnés de cette comrée: leurs efforts pour armerun peuple égaré, aveuglé, contre la Constitution et la loi, n'ont servi qu'à manifester leur impuissance ; et ce fameux camp de Jalès, dans lequel les factieux de ce pays avaient mis toute leur confiance, ne doit plus inspirer la moindre inquiétude aux bons citoyens.
« Le courage et le dévouement des troupes de ligue, le patiiotisme des gardes nationales, les talents et le zèle de M. d'Albignac ont assuré la réussite de cette expédition. La sagesse du directoire du district d Uzès, qui a déjà pris les mesures les plus vigoureuses, achèvera de déjouer les funestes projets des contre-révolutionnaires et de faire rentrer dans le devoir ceux qu'ils auraient égarés.
« Les émigrants d'Uzès rentrent aussi en grand nombre. Hier, soixante out rendu leurs armes à la municipalité, et ont été conduits ici. Ils y seront traités eu frères.
« Signé : Les Administrateurs du directoire du département du Gard. »
Je demande,
d'après la lecture que vous venez d'entendre, que l'Assemblée nationale décrète que son Président est chargé d'écrire des lettres, savoir: au directoire du département du Gard, à M. d'Albignac, commandant les troupes de ligne dans le dèpar-partement ; à MM. de Mandajors et Le Grand, officiers dans les troupes de ligne; à M. Vouiland, commandant de la garde nationale d'Uzès, et à M. Aubry, commandant de celle de Nîmes, pour leur témoigner, à chacun en particulier, la satisfaction de l'Assemblée nationale, pour la prudence, le courage, la fermeté qu'ils ont montrés dans les derniers troubles excités dans le département, et, au nom de l'Assemblée, les remercier d'y avoir rétabli le calme et la tranquillité.
(Cette motion est décrétée.)
Messieurs, voici un procès-verbal par lequel le département du Gard annonce l'arrivée de MM. les commissaires du roi et de leur honorable réception ; ils y étaient attendus avec la plus vive impatience et sont regardés comme des anges de paix. Leur premier soin a été de présenter à nos citoyens égarés le divin rameau "de l'olivier, de faire ôter de.dessus nos remparts le drapeau rouge, signé fatal de la discorde et de la guerre, et d'y faire substituer le drapeau blanc, signe auguste de la concorde et de la paix.
Nous espérons le plus heureux succès de la mission de MM. les commissaires, dont la conduite justifie pleinement le choix du chef d'une nation noble et généreuse, du restaurateur de la liberté française, dont ils sont les représentants.
Messieurs, à la séance de ce matin, il a été lu un extrait du procès-verbal des délibérations du directoire du département de l'Ardéche, qui rend compte des sages mesures qu'il a prises pour éclairer et dissiper les factieux.
Je demande qhe l'Assemblée décrète qu'il sera également écrit en son nom par M. le président, une lettre : au directoire du département de l'Ardéche, pour lui témoigner la satisfaction de l'Assemblée sur la conduite du directoire-et sur celle de MM. Chastanier, officier d'artillerie; Roger, officier d'infanterie, commandant la garde nationale d'Aubenas, et Roux, officier municipal, qui ont concouru à la séparation du camp, et à .éclairer les citoyens égarés. . (Cette motion est décrétée.)
Un de MM, les secrétaires fait lecture des adresses suivantes ;
Adresse des citoyens de la ville de Lyon tendant à prévenir les dangers qui s'annoncent de toutes parts; ils demandent surtout que les gardes nationales soient organisées et armées; ils offrent le secours de leurs armes et de leurs bras pour la défense de la patrie.
Adresse de la Société des amis de la Constitution établie à Blois, qui anponce que le fanatisme épiscopal fait de pernicieux progrès dans le département et fait craindre une insurrection. Ils supplient l'Assemblée d'ordonner au plus tôt l'organisation et ^'armement des gardes nationales, de déclarer le ci-devant évêque de Blois déchu de toute fonction épiscopale, comme de tout traitement. Ils manifestent le plus vif désir de voir bientôt au milieu d'eux leur nouvel évêque.,
Adresse de la Société des amis de la Constitution, séante à Mer-sur-Loire, qui expose ses alarmes sur les tentatives des ennemis de la Révolution ; elle demande que les membres de la famille régnante, absents du royaume, soient
tenus de rentrer en France, sous peine d'être privés non seulement de leurs pensions et traitements, mais même de tous les droits que la Constitution leur assure.
Adresse des administrateurs composant le conseil (l'administration du département des Bouches-du-Rhône, qui supplient l'Assemblée de s'occuper de la fixation du traitement des membres des conseils administratifs de département et de district.
Adresse du directoire du district de Florac, département de la Lozè?e, qui attribue les désordres qui régnent dans les Cèvennes et dans le département du Gard, aux machinations mise3 en oeuvre, pour détourner les curés et vicaires de prêter le serment civique. Il dénonce une lettre pastorale incendiaire ae l'évêque de Mende et demande qu'il soit au plus tôt remplacé, et que la convocation de l'assemblée électorale soit faite dans la ville de Florac, ou en celle de Mar-vejols. Il fait en même temps une pétition de 1,000 fusils pour les distribuer aux différentes municipalités de son ressort.
Lettre du président de rassemblée électorale d Orléans, contenant le procès-verbal de nomination de 5 cures vacantes. Il annonce que les élus ont accepté et que tout s'est terminé à la satisfaction commune.
Lettre du président du district d'Arcis-sur-Aube, qui annonce que 46 fonctionnaires publics du district ont déjà prêté leur serment civique purement et simplement. ,
Prestation de serment civique faite par M. Henry, curé de Val-Saint-Germain, département de Seine-etrOise, et par celui de Feuilloux, district de Montluel et de Garnetot.
Adresse du directoire du district d'Aubigny, qui annonce que tous les fonctionnaires publics et les religieux de son arrondissement, à l'exception de 7 curés et d'un seul vicaire, ont prêté leur serment civique.
Lettres des assemblées électorales du département de la Sarthe, dè la Vienne et des Bouches-du-Rhône, qui annoncent que MM. Prudhomme, curé du Crucifix, M. Le Gesvé, curé de Saint-Triaise, député à l'Assemblée nationale, etM.Benoît Roux, curé de la paroisse d'Errargues, ont été élus évêques; le premier, du département de la Sarthe; le second, de celui de la Vienne; le troisième enfin, de celui des Bouches-du-Rhône.
Un de MM. les secrétaires fait lecture de deux lettres de M. Bailly, maire de Paris.
La première, en date du 4 mars, annonce l'adjudication de deux maisons nationales situées : la première, rue d'Enfer, louée 13,000 livres, estimée 245,828 livres, adjugée332,800 livres;la seconde, rue d'Orléans, louée 3,800 livres, estimée 56,271 livres, adjugée 91,600 livres.
La seconde, en date du 5 mars, annonce l'adjudication de trois maisons nationales situées : la première, rue Sainte-Marthe, louée 600 livres, estimée 8,000 livres, adjugée 12,500 livres ; la seconde, vieille rue du Temple, louée 1,000 livres, estimée 13,300 livres, adjugée 23,700 livres; la troisième, enclos Saint-Germain, louée 2,074 livres, estimée 16,416 livres, adjugée 40,200 livres.
Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une note de M. le garde des sceaux, ainsi conçue :
« Le roi a donné sa sanction le 20 février:
« 1° Âu décret de l'Assemblée nationale, du 17 du même mois, relatif à l'arrestation de Mme de Gonstable et des sieurs Chaillot et Oauquoi;
« 2° Et le 13, au décret du 23 juin 1789, sur
l'inviolabilité des membres de l'Assemblée nationale ;
« 3° Au décret du 13 juillet 1789, concernant la responsabilité des ministres et agents du pouvoir exécutif, et la dette publique ;
« 4° Au décret des 21 et 24 décembre dernier, relatif au remboursement des offices de procureurs et autres offices ministériels;
« 5° Au décret du 8 janvier, concernant les impositions des ecclésiastiques;
« 6° Au décret du 1er février, relatif au payement provisoire, à titre de secours, d'une somme de 919,712 1. 10 d. aux personnes comprises en l'état y annexé ;
« 7° Au décret du 15, concernant les colonels et lieutenants-colonels qui ont 10 et 12 années de service, et qui, renonçant à l'activité, préféreraient de se retirer en ce moment, avec le grade de maréchal de camp;
« 8° Au décret du 16, relatif aux fermiers des biens nationaux dont le prix du bail est en denrées ;
« 9° Au décret du 17, concernant" la circonscription des paroisses de la ville de Rouen ;
110° Au d^pret du même jour, relatif à l'acquisition à faire par le directoire de Pontoise^de la maison appelée le grand vicariat;
« 11° Au décret du même jour, relatif à l'arrêté des comptes, à la libération des officiers comptables supprimés par le décret des 12 et 14 novembre 1790;
« 12° Au décret du même jour, relatif tant aux jugemen ts rendus contre les rieurs Bosque, Gré-lier, Guys et le Borgné, qu'au sieur Edmond Saint-Léger, commandant de la garde nationale de Tabago;
« 13° Et enfin à 96 décrets des 26, 27, 28, 29, 30, 31 décembre, et 3, 4, 5, 6,1, 8, 9, 10, 11 et 12 janvier derniers, concernant la vente de biens nationaux aux municipalités de Beziers, Benais, Lodève, Châlons? Ghassaignes, Vic-le-Comte, Ghâlons, Danjoutinf Ghâlons, Di]on, Dijon, la Margelle, Fuisse, Saint-Laurent-de-Terregatte, du Tanu, Ghâlons, la Haye-Pesnel, Saiut-Yineent-des-Prés, Saint-Gengoux-le-Royal, Ghâlons, Ghâlons, Ghaintre, la Manche, Sailly-en-Ostrevent, Toulon, Ghâlons, Pas, Viguier, Sauzat, Mont-Saint-Eloy, Saint-Jean-de-Fos, Ghâlons, Amiens, Bran-court, Nesles, Gasville, Saint-Lumier, Villiers, Saint-Orient, Bonneval, Ghâlons, Beauvais, Guer-ville, Rilhac, Epône, Limay, Mantes, Follainville, Noailles, Saint-Aubin, Ëapaume, Taisniaires, Quincy, Saint-Ancour, Saint-Laurent-d'Aigoure, Mer, Châteauroux, Montargis, Dracy, Dezert, Dennevy, Saint-Sulpice, Moliens-Widame, Ghâ-tillon, Saint-Marcel, Orléans, Saint-Martin-des-Ghamps, Romans, Noizay, Gluny, Ligny-sur-Gan-che, Arras, Vitry, Anduze, Saint-Loup de la Salle, Ghabeuil, Charpey, Dupie-Beaumont, Saint-Jean-en-Royans, Lamotte-Faujas, Roche-Ghinard, OrioK en-Royans, Etoile, Marche, Saint-Martin-le-Golo-nel, Gombovin, Servés et Crôme, Tain, Laroche-de-Glun, Boulogne-sur-Mer, Neuvy-le-Roi, Amiens, Genech, Farges, Ghâlons, Gien, Lyon, Orléans, Vailly, Montpellier, Mâcon, Lavalette,Draguignan, Saint-Tropez, Marcillac, Severac, Gompiegne, Duval-sous-Rougemont, Bavilliers, Aix, lllange, la Croix, Laumesfeld, la petite Etange, Macque-nom, Kedange, Kuntzichr Koenismaker, Mailing, Kirschomen, Metzeresche, - Gavièe, Blettange, Bousse et Laudrevange, Rurange, Moudelange, Yolstrofs, Krische et Richemont.
Le ministre de la justice transmet à M. le Pré-
sident les doubles minutes de ces décrets, sur chacune desquelles est la sanction du roi.
Signé : M.-L.-F. Duport. '
Paris, le 24 janvier 1791.
Une députation des employés des bureaux de la régie générale des aides est admise à la barre.
, orateur de la députation. Messieurs, nous étions convaincus, avant l'époque heureuse de notre Révolution, et depuis, nous avons pu le professer hautement, que la régie générale des aides n'avait dû subsister qu'en rampant sous la sauvegarde d'un gouvernement despotique, qui, s'honorantpour ainsi dire d'être flétri par l'opinion publique qu'il bravait, avait successivement accueilli cet amas monstrueux d'ordonnances, édits et règlements prohibitifs et coercitifs, créés par le génie fiscal, pour arracher à la classe la plus malheureuse et la plus laborieuse du peuple français une portion essentielle de sa subsistance, qu'elle ne pouvait défendre qu'en luttant continuellement de ruses et de chicane avec le percepteur. L'anéantissement du régime dévorant de cet impôt était un hommage indispensable que vous aviez à rendre aux principes les plus sacrés de la Constitution ; elle nous impose des sacrifices, ils étaient prévus ; nous les subissons avec calme.
Nous sommes loin de nous enorgueillir d'un dévouement dont nous aurions désiré donner l'exemple; l'époque seule de notre dissolution nous range dans la classe des imitateurs, de ceux qui, se ralliant autour de l'autel dé la liberté, brisent sous vos yeux les tablettes de leurs privations, pour ne s'occuper que de vos bienfaits.
De tous les droits que la Constitution pourrait nous faire perdre, le plus précieux pour nous est celui de la défendre et de faire preuve de ce zèle civique constant et réfléchi qui, animant aujourd'hui la nation française, neutralise les efforts coupables des ennemis du bien public.
Nous n'abuserons pas des moments que vous employez si précieusement aux intérêts delà nation; nous vous prions de nous permettre de dépo* ser sur le bureau la pièce qui traite des nôtres et d'y ajouter la soumission que nous venons professer devant vous, quelle que soit la décision ae notre sort.
répond à la députation et lui accorde, au nom de l'Assemblée, les honneurs de la séance,
Je propose que la pétition des employés des bureaux de la-régie générale soit renvoyée à l'examen des quatre comités chargés par l'Assemblée de celui de la pétition des employés de l'élection de Paris et au travail relatif à l'organisation des compagnies de finances.
(Ce renvoi est décrété.)
fait hommage à l'Assemblée d'un nouvel ouvrage qu'il vient de publier sur la constitution civile du clergé.
Un, membre, député du Gantai, fait hommage d'une adresse aux citoyens du département du Cantal par la Société des amis de la Constitution de Saint-Flour, adresse relative à la constitution civile du clergé.
(L'Assemblée ordonne qu'il en sera fait mention dans le procès-verbal.)
, président, quitte le fauteuil et est remplacé par M. Treilhard, ex-président.
L'ordre du jour est un rapport du comité diplomatique sur le sort de 3 priso?iniers détenus à Huningue, prévenus de crimes de faux commis dans les Etats de Vempereur, et réclamés par le ministre impérial.
, au nom du comité diplomatique. Messieurs, vous avez chargé vos comités de Constitution et diplomatique de vous présenter un projet de loi sur le cas où un étranger prévenu de crime devrait être renvoyé à ses juges naturels, d'après la réquisition d'une puissance étrangère, et principalement sur h forme de cette réquisition. Ce travail n'a pas encore pu être fait, parce que d'un côté le comité diplomatique n'a pas eu le temps de se procurer la collection de tous les traités et conventions qui doivent déterminer son opinion ; et que d'un autre côté, le comité de Constitution, consulté par votre comité diplomatique, n'a encore qu un aperçu de son travail. Cependant les instances du chargé d'affaires de Vienne, relativement à 3 individus arrêtés à Huningue, sont d'autant plus intéressantes, qu'il a fuit remettre au comité des pièces de conviction sur la procédure intentée au tribunal criminel de Vienne. Ces 3 particuliers ont été arrêtés sur la réquisition du ministre de la cour de Vienne, et leur extradation est réclamée conformément aux piocédés et usages réciproques subsistants de tout temps entre les Etats d'Autriche, les autres Etats de l'Empire et la France.
Je vous ai dit dans mon premier rapport (1) que le ministre de Frauce
avait ordonné leur extradation; mais que le tribunal d'Altkirch fit
défense à la municipalité d'Huningue d'obéir aux ordres du ministre,
jusqu'à ce que 1'A.ssemblée nationale eût prononcé sur cette question de
droit public. D'après la vérification faite des usages constamment
suivis entre les deux nations, nous vous proposions de condescendre à la
demande de la cour de Vienne; ce qui était d'autant plus intéressant,
que nous n« us trouvons dans une circonstance où l'impunité de ces
sortes de crimes serait trèi alarmante et très préjudiciable. Vous avez
suspendu votre décision : 1° parce que nous ne vous présentions aucune
preuve légale qui eonsta'ât que les particuliers réclamés
ministé-riellement fussent effectivement prévenus du crime dont ils sont
accusés ; 2^ pare qu'il s'éle-vaii des doutes sur l'usage de la réripi
ocité entre les 2 nations, à l'occasion du refus que faisait le tribunal
de Bruxelles de délivrer un faux-mon-nayeur réclamé par le tribunal de
Charleville. Sur le prem er point, nous pouvons dissiper vos méfiances,
par la lecture d'une pièce signée par le bourgmestie et par bs
magistiats de Vienne, et certifiée par le chargé d'affaires, pièce qui
constate que d'après l'information judiciaire faite au tribunal criminel
de Vienne, il résulte que l'un des particuliers, directeur de ia banque,
a fait circuler de faus>es lettres de change, et qu'il existe les plus
fortes préventions de complicité contre son coaccusé. Cet acte est
dressé dans la forme usitée pour la prise de corps, et équivaut à un
décret. La cour de Vienne appuie ses réclamations sur les usures
conventionnels observés pour l'extradation des criminels trans-
Les provinces helgiques ont toujours été des Etats distincts des autres possessions de la maison d'Autriche, soit en Allemagne, soit en Italie; ils ont toujours été gouvernés par des lois particulières ; lois par lesquelles le tribunal de Bruxelles est autorisé à refuser l'extradation des transfuges réclamés. Il y a donc une grande différence entre les deux cas qu'on a comparés, puisqu'ici il s'agit d'un délit commis à Vienne, d'un criminel que le tribunal de Vienne réclame, et que nous avons constaté des usages de réciprocité entre l'Autriche et la France. Ce n'est pas comme duc de Brabant : c'est comme archiduc d'Autriche que Léopoldfait réclamer par son ministre, et par la voie juridique et légale, les 3 particuliers détenus à Huningue. Si donc vous pensez que la preuve de la prévention légale est suffisamment établie par l'acte judiciaire dont nous avons l'original entre nos mains, vous n'attendrez pas que vous ayez pu combiner la loi générale que vous vous proposez de porter; et ne consultant que les lois d'usages actuellemeut existants, et l'intérêt pressant des circonstances, vous vous déterminerez à ordonner l'extradition demandée. C'est à quoi se réduit le projet de décret que le comité diplomatique m'a chargé de vous présenter et qui est ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité diplomatique, qui en a conféré avec son comité de Constitution, sur l'ar-re-tation des sieurs Henning, Bargou et Schwartz, à Huningue, et sur la réclamation faite desdits prisonniers par le chargé d'affaires de la cour de Vienne, en conséquence de la procédure criminelle intentée contre tux, aux tribunaux de Vienne en Autriche, lieu où le crime, a été commis; le délit grave dont ils sont prévenus, ainsi qu'il est constaté par la piè e juridique, produite p.jr ledit chargé d'affaires èt dûment légalisée par la signature du chargé d'affaires de France à la cour impériale et royale ; décrète qu'en vertu des usages et de la réciprocité constamment observée en pareilles circonstances, entre la nation française et les Etats germaniques, le roi sera prié ne donner les ordres nécessaires, pour que lesdits prisonniers soient remis, suivant la réclamation du ministre impérial, pour être renvoyés à leurs juges naturels, l'Assemblée nationale se réservant, d'après le rapport de ses comités de Constitution et diplomatique, de faire incessamment une loi générale sur cette matière, laquelle sera notifiée à toutes ies nations de l'Europe. »
(La discussion est ouverte sur ce projet de décret.)
Le préopinant vous propose un décret qui, non seulement est contraire aux décrets que vous avez déjà rendus, mais qui désho-n serait l'Assemblée nationale. 11 vous propose l'extradation de 2 et même de 3 particuliers d'après les usages et conventions réciproques. Qr. je nie que ces usages et conventions aient jamais existé. Pour le prouver, on vous a dit que la France a récemment accordé l'extradation d'un volèur réclamé par le canton de Bàle. Ne saiboq
pas que nous avons, avec les cantons helvétiques, un traité exprès à ce sujet? M. le rapporteur n'aurait pas dû l'ignorer. Il aurait aussi dû s'apercevoir que les usages qui subsistent entre nous et les cantons helvétiques, ne prouvent rien en laveur de la cour de Vienne.
Il a donc essayé, sans citer aucun exemple, d'établir une réciprocité entre l'Autriche et la France, c'est-à-dire entre l'esclavage et la liberté, Voulez-vous savoir pourquoi on insiste tant sur cette réclamation? c'est qu'il s'agit ici d'une vengeance ministérielle. Rappelez-vous les moyens qu'on a rois en usage. Un brigadier de maréchaussée, obéissant à la simple réquisition d'un ministre étranger, exécute une arrestation telle, que, si ces formes se multipliaient, je proposerais à tous les amis de la liberté de quitter la France, Le tribunal d'AWrirch refuse de confirmer cette arrestation ; il en rend le brigadier responsable. Que fait-on? on essaie de corrompre les juges. Bt si on a voulu corrompre ceux-ci, qui vous répond que ceux qui ont fait l'instruction ne l'ont pas éto? Sommes-nous donc encore au temps où, je ne dis pas un ministre étranger, mais où même un ministre français peut ordonner arbitrairement l'arrestation, l'extradation d'un homme quelconque, d'un étranger qui vient en France chercher la liberté? Von lez-vous connaître les motifs de cette poursuite? les affaires de la banque de Vienne étaient engorgées; les ministres-directeurs étaient embarrassés; ils voulaient des victimes. « Poursuivis, quoique innocents, vous disent dans leur mémoire les particuliers arrêtés, nous cherchions un asile dans un pays libre, où nous ne nous attendions pas à être victimes d'une arrestation arbitraire.
« Nous demanduns à être jugés, mais non pas à être livrés sans preuves entre les mains de nos ennemis. » Si vous accédez à la demande de la cour autrichienne, vous établirez en effet cette prétendue réciprocité. On fera arrêter, extrader les hommes échappés au despotisme; ce sera un service d'amis que se rendront réciproquement les ministres. Cette réciprocité de réquisitions arbitraires n'existe encore entre aucuns pays. Lorsque nous réclamons un criminel réfugié en Savoie, on nous répond : Envoyez-nous la procédure, et nous jugerons. La même chose se passe entre les différents Etats de l'Empire, parce que chacun est jaloux de l'inviolabilité de son territoire.
Je passe à un autre point également important, vous aviez ajourné cette affaire jusqu'à ce que le comité de Constitution, de concert avec le comité diplomatique, vous eût proposé une loi générale. D'où vient que le comité diplomatique, en contravention à ce décret, imprimé dans tous les papiers de l'Europe, vops reproduit sa première proposition sous le prétexte d'un prétendu certifii at de conviction? Le bruit de cette extradation, l'arrestation illégale des particuliers ont excité une indignation générale dans le pays, où les lois sont connues. Je répète que les moyens dont on s'est servi font présumer bien des choses, Quand on commence par tenter de corrompre un tribunal, ne doit-on pas soupçonner qu'il y a de l'iniquité ministérielle sous jeu?...
Je conclus par demander l'ajournement.
Je commence par écarter la futile distinction faite par le rapporteur, entre Léopold, duc de Brabarit, et Lféopold, archiduc d'Autriche; et je ne m'arrête pas même à l'objection tirée du refus du tribunal de Bruxel-
les. Cette affaire ne doit pas être jugée d'après les anciens principes, mai3 d'après les principes de liberté que vous professez. La personne d'un citoyen n'est soumise qu'à la juridiction du pays qu'il habite. Si une puissance étrangère accuse un individu qui vient chez nous chercher un asile, qu'elle nous envoie la procédure et nous le jugerons. S'il est condamné, c'est alors seulement qu'il sera transféré dans le pays, pour l'exemple.
En ce moment, je demande qu'on passe à l'ordre du jour.
Quoiqu'il soit vrai que l'Assemblée ne puisse juger d'un fait sans le connaître; quoiqu'il soit évident qu'elle n'a point encore réuni les bases sur lesquelles doit être fondée sa décision, et que, dans aucun cas, elle ne petit prononcer aussi légèrement sur le sort d'un individu, je crois que ce n'est pas même encore la question de fait qui doit nous occuper. Ne voyez-vous pas qu'il s'agit de la plus grande question de droit public?
Il s'agit de déterminer quels sont les droits et les devoirs réciproques des nations; il s'agit de savoir quelle est la juridiction générale des sociétés sur les individus de l'espèce humaine. Croyez-vous que ce soit à l'occasion d'un rapport superficiel, incomplet et ambigu que vous devez prononcer sur les premières et les plus précieuses lois des sociétés, et sur les rapports du genre humain?... Cette observation suffit pour vous déterminer à renvoyer cette question au comité de Constitution, pour la décider ensuite avec toute la préparation et la maturité qu'elle mérite.
Je demande donc qu'il ne soit statué sur le sort des trois prisonniers détenus à Huningue qu'après que l'Assemblée aura décrété la loi générale sur cette matière et qu'en conséquence, le projet de décret soit renvoyé au comité de Constitution.
J'appuie d'autant plus volontiers la demande de renvoi au comité que, depuis l'ajournement ordonné par vous sur ma réclamation, l'état des choses n'est pas changé : le tribunal de Bruxelles auprès duquel le tribunal du district de Charleville a réclamé le faux-mon-nayeur, a répandu : Envoyez-nous les charges, envoyez-nous les témoins et surtout de l'argent (Rires.) et nous lui ferons son procès; et lorsque son procès sera fait, nous vous le remettrons pour l'exécution.
Je n'en dis pas davantage.
Il est vrai que, relativement à l'affaire de Bruxelles, l'empereuF s'est enveloppé dans les clauses de la joyeuse entrée, qui autorise le tribunal de Bruxelles à refuser l'extradation; mais votre comité a vu que oe refus ne pouvait pas autoriser le vôtre, et qu'il n'en fallait pas moins suivre les principes de justice que vous avez établis dans votre Constitution, et que vous ne rendrez précieux à toutes les autres nations qu'en y restant inviolablement attachés. Les preuves légales de préventions nous paraissent acquises par l'aveu même des accusés. Voici comment ils s'expriment dans leur mémoire: .
M. Bargou était directeur de deux établisse-? ments, de la banque et de maison de corn-; merce. La guerre ayant influé sur le mauvais état de la maison de commerce, elle eut recours à la banque, et le directeur tira des lettres de
change sur des négociants de Vienne, qui à la vérité ne devaient rien. La maison de commercé n'eut recours à cette espèce d'agiotage en usage à Vienne, que pour ne pas se mettre à la merci des usuriers. Le .directeur avait prévenu tout éclat, changeait ces lettres de change contre d'au-trés effets qu'il retirait. En cela, il n'a fait que suivre les usages suivis par la banque... »
Je ne sais si c'est un usage que de fabriquer des lettres de change pour les escompter, comme si èllés étaient dues; mais je demande si ce n'est pas de la part des accusés donner de fortes preuves de prévention, que de se livrer à des aveux aussi graves, (Murmures.)
Je réponds à une observation; on a nié les usages de réciprocité, et moi je dis qu'excepté l'Angleterre, toutes les autres puissances accordaient l'extradation, non pas à la vérité des débiteurs, mais des criminels légalement requis. Mais ne nous occupons pas de l'ancienne politi-
Sue, ou de ce qu'a fait le tribunal de Bruxelles, e consultons que les lois de la justice, que l'intérêt réciproque des nations, que la vraie et immuable règle de morale, qui veut que les coupables soient punis.
Je conclus à l'adoption du projet de décret, en y ajoutant toutefois cette disposition :
« ...après néanmoins que l'empereur aura reconnu par un acte solennel» et souscrit la condition de réciprocité entre la France et les Etats de sa domination. »
Il me paraît en effet indispensable que l'homme qui fuit un pays dans lequel il a commis un crime, ne puisse trouver dans aucun autre pays un asile qui lui assure l'impunité; mais qu'on donne aussi un moyen de prévenir l'injustice ministérielle, et d'empêcher 1 inquisition qui pourrait s'exercer sur tout homme qui cherche une terre libre et hospitalière pour se mettre à l'abri des poursuites du despotisme. Une question aussi délicate ne doit pas être jugée sur des circonstances. Si, par exemple, cette contre-révolution dont on parle tant arrivait, quel est celui d'entre nous qui ne fuirait pas cette terre aujourd'hui si chère, et alors si odieuse? Eh bien, d'après les principes de M. le rapporteur, nous serions aussi réclamés comme des criminels transfuges, et déclarés coupables pour n'avoir pas voulu cesser d'être libres.
Il ne s'agit pas moins que d'un pacte à faire entre les nations, en faveur de la liberté, ou en faveur du despotisme. La question mérite bien d'être renvoyée à l'examen du comité de Constitution, et d'être plus solennellement discutée. (Applaudissements.)
, rapporteur. On nous avait demandé des pièces légales de conviction. Nous vous présentons le certificat du conseil royal et impérial de Vienne, qui porte qu'il résulte de la procédure assermentée, que l'un des deux accusés a fait circuler pour 200,000 florins de fausses lettres de change, et qu'il y a contre ses coaccusés les indices les plus forts de complicité. C'est là une pièce légale: que veut-on de plus?
D'après celte pièce, il me paraît que les partieuliers arrêtés à Huninguene sont rien moins que criminels. Si un véritable crime existait, on n'aurait pas manqué sans doute de le présenter à l'Assemblée nationale. J'atteste au contraire tous les négociants, et je
leur demande si ce dont les détenus sont accusés est réellement un crime. Ils n'ont fait que ce qui était en usage; et concevez-vous que si des accusés à la poursuite desquels on met tant d'importance étaient réellement coupables, on se fût contenté d'envoyer un certificat, en vous cachant l'information.
Ne voyez-vous pas que si vous n'ajourniez pas, vous décideriez la question de fait, et préjugeriez la question de droit, sans connaitre ni l'une ni l'autre?
Si l'on accède à la demande du ministère autrichien, je demande qu'on réclame M. de Lambesc, décrété de prise de corps.
Je vous prie de remarquer comme la question a changé d'aspect. Le rapporteur vous disait, dans son premier rapport, qu'il s'agissait d'une falsification de billets de banque, puis d'une falsification de lettres de changé. Eh bién, vous voyez actuellement qu'il ne s'agit que d'une simple opération de commerce, usitée à la banque.
Je ne. prétends point justifier le délit de faire circuler des lettres de change tirées sur un homme qui ne les doit pas, et auquel on n'est pas sûr de pouvoir remettre des fonds pour l'acquitter ; mais il n'est personne qui ne sache que ces opérations se font souvent dans les banques, qu'elles se font sans porter préjudice àpersonne et qu'elles ne sont point un crime. Mais vous devez faire une autre remarque également importante : c'est que le comité diplomatique a contrevenu à votre premier décret, qui prononçait l'ajournement jusqu'à la loi générale ; c'est que l'on vous a parlé sans cesse d'usages réciproques, et qu'on n'adonné aucune preuve de ces usages, qu'on a dit que cette réciprocité avait été vérifiée, et qu'on n'en a pu citer aucun exemple.
Je demande l'ajournement et l'élargissement des particuliers arrêtés.
Je dois dire à la décharge dû comité diplomatique, que votre décret ne lui ordonnait pas de vous donner les preuves de la réciprocité, mais bien de vous présenter un acte légat d'accusation ; or, il vous présente un acte en forme de la municipalité de Vienne.
Je demande si un certificat de municipalité est un acte judiciaire. Je demande si la municipalité de Paris a le droit de faire.arrêter un homme à Vienne ?
Je ne crois pas qu'aucun membre de 1 Assemblée veuille faire ici, en quelque sorte, le rôle d'accusateur, et que quelqu'un ait intérêt à s'opposer à l'ajournement. Je demande qu'on aille aux voix.
(L'Assemblée, consultée, décrète l'ajournement du projet de décret et le renvoie au comité de Constitution qui est chargé .de lui présenter un projet de loi générale 0
, au nom des comités d'aliénation et des finances, présente un projet de décret sur les dîmes inféodées, qui est ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport qui lui a été fait au nom de ses comités des finances et d'aliénation des domaines nationaux, décrète ce qui suit :,
Art. 1er.
« Les propriétaires laïcs de dîmes inféodées, qui ont affermé ces dîmes par bail distinct, avant une date certaine, antérieure à celle du décret du 4 août 1789, pourront, sur la représentation des baux, donner la valeur de leurs dîmes en payement dans les acquisitions des domaines nationaux: elle y sera reçue jusqu'à concurrence de la moitié du capital de la redevance annuelle de leurs dîmes, déduction faite, sur la totalité de ladite redevance, des charges de toute espèce, d'après l'état que lesdits propriétaires seront tenus d'en donner, certifié d'eux. » (Adopté.)
Art. 2.
« Ces baux et états seront représentés aux directoires du district de la situation des biens, et seront par eux certifiés véritables ; sur la représentation et sur la remise desdits baux et états ainsi certifiés, le commissaire du roi, préposé à la liquidation générale des offices, expédiera provisoirement une reconnaissance équivalente a la moitié de la valeur du bail, conformément au précédent article, et ladite reconnaissance sera reçue en payement de domaines nationaux, soit dans la caisse des receveurs de district, soit dans celle de l'extraordinaire, conformément aux précédents décrets. » (Adopté.)
Art. 3,
« Ceux desdits propriétaires qui, à défaut de bail, pourraient produire un contrat authentique et distinct d'acquisition faite depuis l'année 1785, et antérieur au décret dudit jour 4 août 1789, seront admis à présenter ledit contrat certifié de même; et il sera reçu pour moitié de sa valeur en payement des domaines nationaux, de la manière ci-dessus. » (Adopté.)
Art. 4.
« Quant-aux propriétaires laïcs dont les dîmes inféodées sont en régie ou affermées confusément avec d'autres héritages, ou ceux qui en auraient joui par eux-mêmes, ils requerront la municipalité dudit lieu, qui appellera même, si elle le juge à propos, les curés décimateurs ou autres qui en auraient fait la perception, de leur donner une estimation certifiée de la valeur de ladite dîme, d'après la notoriété publique, déduction faite de toutes les charges. » (Adopté.)
Art. 5.
« Cette estimation se fera dans une assemblée du conseil général de la commune, convoquée dans le délai de huit jours, où seront appelés, au besoin, les régisseurs ou fermiers, pour y être consultés -seulement. » (Adopté.)
Art. 6.
v Cette estimation sera visée par les directoires de district et de département de l'arrondissement dans lequel seront situées les dîmes, et le capital de ladite estimation sera de même reçu en payement de domaines nationaux, provisoirement pour moitié, de la manière énoncée en l'article 2 ci-dessus, après que déduction aura été faite des charges, suivant l'état que le propriétaire de la dîme sera tenu de donner suivant l'article 1er. » (Adopté.)
Art. 7.
« Les biens nationaux au payement desquels
auront été admis, pour moitié, les baux, contrats d'acquisitions ou estimations des dîmes inféodées, conformément aux articles ci-dessus, demeureront affectés, par privilège spécial, au payement du prix de l'adjudication jusqu'à ia liquidation définitive, sans que cette hypothèque puisse être purgée par aucune espèce de formalité ni laps de teçaps. » (Adopté.)
Art. 8.
« Pour plus grande sûreté, ceux des propriétaires des dîmes inféodées qui voudront donner en payement d'acquisition de biens nationaux la valeur de leurs dîmes, sur une éstimation provisoire, suivant l'article 4, seront tenus de donner caution, qui sera reçue par le directoire du district qui aura fait l'adjudication desdits biens, de fournir et faire valoir la somme pour laquelle la valeur desdites dîmes aura été comptée daus l'acquisition. » (Adopté.)
Art. 9.
« Ceux' qui auront fait liquider définitivement leurs dîmes pourront en donner leur reconnaissance définitive de liquidation pour sa valeur entière en payement des domaines nationaux qu'ils acquerront comme les autres créanciers de l'Etat, auxquels cette faculté a été accordée. » (Adopté.)
Art. 10.
« Pour faciliter la liquidation définitive, ceux dont la dîme se percevait sur un territoire circonscrit, qui ne rapporteraient pas des baux, aux termes de l'article 5 du titre V de la loi du 5 novembre dernier, seront censés avoir satisfait à l'article 7 de la même loi, en donnant un état du territoire, contenant: 1° les limites; 2* une désignation des terres en friche et de celles qui ne produisent pas des fruits décimables dans le canton; 3° un dénombrement de terres possédées par le propriétaire de la dîme qui en réclame l'indemnité. »
Plusieurs membres présentent sur cet article divers amendements ayant pour but :
1° D'ajouter que la désignation des portions non appartenant au propriétaire de la dîme et non sujettes à la dîme soit jointe à la déclaration ;
2° De joindre à la désignation des limites l'étendue et la nature du terrain ;
3° D'ajouter à l'article : eu égard aux terrains qui ne sont pas décimables, mais qui peuvent le devenir ;
4° De substituer à ces mots : terres en friche, ceux-ci : terres réputées en friche aux termes de l'ordonnance de 1766;
5° D'ajouter, enfin : suivant la valeur des 10 dernières années.
(Ces amendements sont repoussés par la question préalable.)
(L'article 10 est mis aux voix et décrété.)
Art. 11.
« Les propriétaires de dîmes auront le choix de demander pour leur indemnité une somme fixe, ou de s'en rapporter à l'estimation, sans déterminer eux-mêmes aucune somme. Lorsqu'ils demanderont une somme fixe, le directoire du département, sur les observations de la municipalité, et d'après l'avis du directoire du district, leur feront une offre en cas de contestation ; sur l'offre, il sera procédé à une estimation par ex-
perts, conformément à l'article 9 du titre V delà loi du 5 novembre dernier, aux frais de celui qui succombrra, lesquels seront, dans tous les cas, alloués au directoire de district dans la dépense de son compte ; mais, en ce cas, les propriétaire:} de dîmes seront tenus de libeller leur demande clairement; en conséquence, de donner, aveo l'état prescrit par l'article 11 du présent décret, l'étendue du territoire de leur dlmerie, la qualité des terres, la nature des récoltes et tous les renseignements propres à établir leurs demandes. » (Adopté.)
Art, 12,
c S'ils ne veulent pas demander une somme fixe, il sera procédé a l'estimation prescrite par l'article 9 de la loi du 5 novembre dernier; et les frais en seront supportés, par moitié, entre les propriétaires et le directoire du district, qui pourra porter la sienne dans la dépense dq son compte, » (Adopté.)
Art. 13,
« Lorsque la dîme sera possédée par des propriétaires indivis, jouissant cependant indivise^ ment, si l'un d'eux avait affermé sa portion, le bail ne"pourra nuire à ceux qui n'auraient pas affermé la leur ; ces derniers pourront prendre pour base de .la liquidation ou le bail ou l'esté mation prescrite. » (Adopté.)
Art, 14.
« Les propriétaires des dîmes inféodées, qui, sur leurs autres propriétés, seraient grevés de rentes ou redevances quelconques envers le dQr maine, ou autres biens nationaux, pourront s'en affranchir, en compensant le capital avec la totalité ou partie du prix de l'indemnité qui leur sera due pour la valeur de leurs dîmes. » (Adopté.)
Art, 15.
« Les hypothèques et lesdettes dont pourraient être grevées lés dîmes inféodées, seront transfér rées sans novation sur les domaines nationaux au payement desquels elles seront admises. A cet effet, les reconnaissances provisoires ou définir tives qui seront délivrées par le commissaire du roi, directeur général de la liquidation, contiendront une mention des oppositions qui auraient été formées entre les mains des conservateurs des hypothèques pour la conservation des droits 'des créanciers, ainsi qu'il a été statué par les précédents décrets relatifs à la liquidation des offices de jucjicature. » (Adopté.)
Art. 16.
« Seront, au surplus, les décrets relatifs à la liquidation des offices de judicatura exécutés, par rapport aux dîmes inféodées, en tout ce qui concerne la sûreté des oppositions des créanciers, la manière d'admettre en payement les reconnaissances de liquidation, et en tout ce qui est prescrit pour la marche de la liquidation non contraire au présent lçcret, » (Adopté.)
lève la séance à dix heures et demie.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAIL^ES.
Séance du
La séance eit ouverte à onze heures et demie du matin.
Un de MM> les secrétaires fait lecture du procès-verbal de là séance d'hier au matin, qui est adopté.
au nom du comité général de la direction de liquidation, présente un projet de décret concernant le remboursement d'un office, de brevets de retenue et d'une fourniture de lits militaires.
Ce projet de décret est ainsi ccfpçq ;
h L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son oomité général de la direction de liquidation, décrète, en conformité de ses précédents décrets concernant la liquidation des différentes parties de la dette remboursable, et d'après la vérification des faits çar le commissaire du roi, qu'il sera remboursé, savoir ;
« A Memie^Fra-içois Legras, dit la QhàPinotte, pour la finance d'un office de payeur des rentes, supprimé par édit de mai 1772, et dont le remboursement a été suspendu par les arrêts du cpnseil de 1788 et 17§9, la somme dé255,000 livres.
v A Louis-Woldemar Huimopt, dit de BaiÙeul, çir-devant commissaire des guerres, la somme de 70,000 livres, montant d'un brevet de retenue sur sa charge, avec les intérêts à 5 0/0 du g? février derpier,
« A JacquesrGabrieKLouig Leclerc de Juigqé, ci-devant gouverneur de la ville d'Arras, la somme de 50,000 livres, montant d'un brevet de retenue sur son gouvernement, avec les intérêts à 5 0/0, dp 3 février dernier.
« A Adrien-Louis de Guiqes, ci-devant gouverneur gégèrçl dé l'Artois, la somme de 112,500 li-yres, montant d'un brevet de retenue sur son gouvernement, avec les intérêts à 5 0/0, à compter du 5 janvier dernier, et à la pharge par lui de rappofteF provisions dudit gouvernement.
« A GabrieUMauriep de Talleyrand-Pé'igord, ci-devant gouverneur et lieutenant générai de Picardie. la somme de 300,000 livres, pour l'indemnité de son brevet dé retenue sur ledit gouvernement, avec les intérêts, à compter du 12 janvier derpier,
p A ÇlaudeT-Âutpine de Ifêziade, dit d'Avaray, ci-devant lieutenant général au gouvernement d'Orléanais, la semipe de 30,000 livres, pour indemnité dé son brevet 4® retenue sur ladite lieu-tenance générale, avec les intérêts à 5 0/0, du 8 février dernier.
« Aux héritiers de feq Louis-gabriel de Qqu-flans, lieutenant général de
la Haute-iÇqienne» fô somme de 160,QÛQ Uvres, pour indemnité du brevet
qe retenue àècordée audit de Confiant sur ladite lieutenance générale,
avec les intérêts à compter du 1B février dernier. " h A $icûlas-Jo>eph
pelfqs^e, entrepreneur de la fourniture des.Tits miiiia.ires des
ct-dnvant pro-yinoesdu Nprd, la soin nie de 205,0^0 livrés, ppqf le
montant des fburuiturès desdits lits, jusqu'au 31 décembre 1789, sur
laquelle somme Ï1 sera
« A ta charge aussi par tous les dénommés au présent décret de se conformer aux lois de l'Etat pour l'obtention des reconnaissances de liquidation et mandats sur la caisse de l'extraordinaire. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom du comité de liquidation, préfente un projet de décret relatif à la cessation des intérêts des différentes parties de la dette remboursable.
Ce projet de décret est ainsi conçu :
« L'Assemblée nationale décrète que les intérêts des différentes parties de la dette remboursable qui sont accordés aux créanciers de l'Etat, à compter du jour de la remise complète de leurs titres, cesseront à l'expiration de la quinzaine, à dater du jour de la sanction de chacun des décrets particuliers qui ordonnera leur remboursement; ce qui aura lieu tant que le payement des reconnaissances définitives de liquidation se fera à bureau ouvert, et sauf l'exécution de l'article 8 du décret du 7 novembre dernier, dans le cas où les remboursements n'auraient lieu que par ordre de numéro. »
(Ce décret est adopté.)
, au nom des commissaires de l'extraordinaire. Je dois informer l'Assemblée que le brûlement de 8 millions d'assignats, préparé pour vendredi dernier, a eu lieu à cette date, et que, vendredi prochain, il en sera encore brûlé pour 6 millions.
, député de Carcassonne, fait part à l'Assemblée que les ecclésiastiques fonctionnaires publics du district de Narbonne, moins 5, ont prêté le serment ordonné par la loi du 26 décembre dernier, et que, du 12 janvier au 12 février suivant.il a été vendu des domaines nationaux pour 924,552 1.18 s. 6 d., sur une estimation de 510,709 1. 13 s. 9 d.
(de Saint-Jean-d'Angély) annonce que 80 curés de son district ont également prêté le serment.
L'ordre du jour est la lecture de l'ensemble des articles additionnels sur l'ordre judiciaire, décrétés dans les précédentes séances.
rapporteur, donne lecture de ces articles qui sont adoptés, avec quelques amendements, comme suit :
Art. ter
« Nul ne pourra être juge de paix, et en même temps officier municipal, membre d^un directoire, greffier, avoué, huissier, juge de district, juge ne commerce, percepteur d'impôts indirects.
Art, 2.
« Les assesseurs des juges de paix sont exclus
des mêmes fonctions, si ce n'est que, dans les bourgs 11 villages au-dessous de 4,000 âmes, il leur sera permis d'être officiers municipaux ; ils ne peuvent être parents de juges de paix au degré de cousins germains, inclusivement ; et s'ils sont parents entre eux à ce degré, ils ne jugeront point ensemble, sans Je consentement de toutes les parties.
Art. 3.
« La première fois que les assesseurs assisteront le juge de paix, ils prêteront dans ses mains le même serment prêté par lui devant le conseil général de la commune, et il en sera dressé acte.
Art. 4.
« Le juge de paix sera tenu de nommer un greffier, lequel ne pourra être son parent jusqu'au troisième degré selon la supputation civile, c est-à-dire jusqu'au degré d'oncle et de neveu inclusivement.
Art. 5.
« Les greffiers des juges de paix ne pourront être en même temps officiers municipaux, membres d'un directoire, greffiers, avoués, huissiers, juges de district, ju^es de commerce, percepteurs d'impôts indirects. 11 en sera de même des greffiers des tribunaux de district ou de commerce qui, en outre, ne pourront pas être notaires.
Art. 6.
« Si le greffier de la municipalité de campagne refuse de signifier les citations, actes et jugements du juge de paix, il sera destitué de sa place; et l'huissier qui le remplacera pour les significations ne recevra, à peine de concussion, que les droits attribués au greffier, si la signification est faite dans la municipalité du domicile de l'huissier ; mais en outre, en cas de transport, il recevra 12 sous par lieue, sans qu'il puisse jamais êtr^ mis à la charge de la partie condamnée, plus que les frais de 2 lieues de transport, le retour compris.
Art. 7,
« Les juges de paix procéderont d'office à l'apposition des scellés, après l'ouverture des successions, lorsque les héritiers seront absents et non représentés, ou mineurs non émancipés, ou n'ayant pas de tuteurs ; et ils passeront outre, nonobstant les oppositions, dont ils renverront le jugement au tribunal de district. Chaque juge de paix apposera les scellés dans l'étendue de son territoire, et ne pourra pas, par suite, les apposer dans un autre territoire.
Art. 8.
« L'apposition des scellés étant un acte purement ministériel et conservatoire, il sera alloué au juge de paix 2 livres pour une vacation de trois heures, et 1 livre pour toutes les vacations suivantes ; de manière qu'une apposition de scellés ne coûte pas plus ae 3 livres. Le greffier aura les deux tiers de lq somme attribuée uu juge. Les droits seront d'une moitié en sus dans les villes au-dessus de 25,000 âmes, et du double pour Paris. Il en sera de même pour les vacations de reconnaissance et levée des s ellés, et pour celles employées aux avis de parems; le tout indépendamment des droits d'expédition du greffe.
Art. 9.
« Dans les cas qui n'excéderont pas sa compétence, le juge de paix connaîtra des contestations qui pourront s'élever entre père et fils, grand-père et petit-fils, frères et sœurs, neveux et oncles, ou cnlre alliés aux degrés ci-dessus, sans que les parties soient tenues de se pourvoir suivant les formes prescrites par l'article 12 du titre X du décret sur l'organisation judiciaire.
Art. 10.
« La confection des inventaires, procès-verbaux de description et de carence à l'ouverture des successions, n'appartiendra point au juge de paix, mais aux notaires, même dans les lieux où elle était ci-devant attribuée aux juges ou aux greffiers.
Art. il.
« La légalisation des "actes ne sera point faite, les certificats de vie ne seront point donnés par les juges de paix ; la légalisation sera faite, les certificats seront donnés gratuitement par les présidents des tribunaux de district, ou ceux des juges qui en feront les fonctions. Dans les chefs-lieùx où sont établis, soit les tribunaux, soit les administrations de district, les maires feront les légalisations et donneront les certificats de vie, concurremment avec les présidents des tribunaux, mais seulement sur les actes des officiers publics, ou pour les citoyens qui seront domiciliés dans Tét-ndue de la commune.
Art. 12.
« Les juges de paix pourront porter, attaché au côté gauche de l'habit, un médaillon oval, en étoffe, bordure rouge, fond bleu, sur lequel seront écrits en lettres blanches, ces mots : la loi et la paix.
Art. 13.
« Les huissiers des juges de paix, dans les villes, lorsqu'ils seront en fonctions, porteront à la main une canne blanche ; les citations et jugements des juges de paix seront signifiés par eux, et non par autres huissiers, à peine d'amende de 6 livres, qui sera prononcée par le juge de paix, dont moitié sera applicable à son huissier, l'autre moitiée sera versee dans la caisse du receveur des amendes du district.
Art. 14,
« Si le juge de paix est pendant plus de huit jours consécutifs sans remplir ses fonctions, il sera'tenu de remèttre à l'assesseur qui l'aura remplacé la portion proportionnelle du salaire qui lui est attribué ; et dans tous les cas où l'assesseur remplacera le juge de paix pour les commissions et les actes auxquels des vacations sont attachées, l'assesseur recevra lesdites vacations
Des bureaux de paix.
Art. 15.
« Aucuns avoués, greffiers, huissiers et ci-devant hommes de loi ou procureurs ne pourront représenter les parties aux bureaux de paix. Les autres citoyens ne seront admis à les représenter que lorsqu'ils seront revêtus de pouvoirs suffisants pour transiger.
Art. 16.
« Les affaires commencées avant l'installation des tribunaux seront portées à ceux qui doivent en connaître, par simple assignation de la partie la plus diligente, sans autres procédures et sans avoir passé au bureau de paix.
Art. 17.
« Toutes saisies, oppositions et autres actes conservatoires pourront être faits avant de donner la citation devant le bureau de paix. Les affaires qui intéressent la nation, les communes et l'ordre public seront portées aux tribunaux, sans qu'il soit besoin de comparution préalable devant ce bureau ; il en sera de même dès affaires de la compétence des jugesde commerce, quand même les affaires seraient portées au tribunal de district, au cas de l'article 13 du titre XII du décret du 16 août 1790, sur l'organisation judiciaire.
Art. 18.
« Les officiers municipaux sont autorisés à
Pourvoir économiquement aux menus frais de
ois, lumière, papier et secrétaire du bureau de paix, qui seront à prendre sur le produit des amendes prononcées sur les appels.
Art. 19.
« Les bureaux de paix exerceront leurs fonctions sans qu'il soit besoin d'aucune installation, et les citations pourront être notifiées par les greffiers des municipalités dans lesquelles les personnes citées auront leur domicile.
Des juges de district, suppléants et greffiers.
Art. 20.
« Les fonctions mentionnées en l'article 1er sont interdites aux juges et aux commissaires da roi, ainsi que celles ae notaire et de défenseur officieux, même hors de leur tribunal.
Art. 21.
« Les suppléants ne pourront être greffiers, huissiers ni percepteurs des impôts indirects, mais ils pourront exercer le ministère de défenseurs officieux, d'avoués, de juges de paix, ainsi que les fonctions municipales, à la charge d'opter au moment où ils auront des provisions de juges.
Art. 22.
« Les suppléants ne seront appelés par le tribunal que dans le cas où leur assistance sera nécessaire à la validité des jugements, à l'exception des suppléants, qui, remplaçant les membres de l'Assemblée nationale nommés jugés, complètent le nombre habituel de cinq dans chèque tribunal. La première fois qu'ils seront appelés, s'ils n'ont pas prêté le serment lors de l'installation des juges, ils prêteront devant eux le même serment, et il en sera dressé acte.
Art. 23.
c Lorsque les suppléants seront appelés pour la validité des jugements, ils porteront le même costume que les juges, et ils recevront leur part des droits d'assistance seulement. Les suppléants, qui remplacent les membres de l'Assemblée nationale qui ont été nommés juges, recevront la totalité du complément jusqu'à ce que les députés nommés juges puissent entrer en fonction.
Art. 24.
« Les commis assermentés des greffiers des tribunaux ne peuvent, non plus que les greffiers eux-mêmes, être parents de l'un des juges du tribunal qui les a choisis, jusqu'au troisième degré selon la supputation civile, quand même le juge parent du greffier se serait abstenu de donner sa voix pour son élection.
, Art. 25.
« Les dépens seront liquidés par le jugement même sur l'état sommaire qui sera donné par les avoués des parties, et auquel les pièces seront jointes.
Art. 26.
« Toute perception de droits et émoluments, contraire aux règlements, est défendue, à peine de concussion ; et le juge qui aura fait la taxe en sera personnellement responsable, sauf son recours contre l'officier qui aurait trop reçu : ainsi, d'après la taxe, le mémoire des dépens sera paraphé par le juge, et restera au greffe annexé à la minute de la sentence.
Arl. 27.
« Jusqu'à ce que l'Assemblée nationale ait statué sur la simplification de la procédure, les avoués suivront celle qui est établie par l'ordonnance de 1667 et règlements postérieurs : il ne sera cependant présenté aucune requête pour obtenir la permission d'assigner, si ce n'est pour abréger les délais ; et dans les affaires appointées, il ne sera passé en taxe que deux écrits au plus pour chaque partie; et dans les lieux où il se fait un inventaire de production, il sera fait par un état sommaire qui ne pourra, quel qu'il soit, être taxé plus de 15 livres.
Art. 28.
« Les tribunaux de district et de commerce sont provisoirement autorisés à faire des arrêtés relatifs à la police et à l'ordre des audiences; ils feront exposer dans l'auditoire les rôles : 1° des affaires sommaires ou provisoires, ou portées par appel des juges de paix et tribunaux de police; 2* des affaires ordinaires; 3° des affaires majeures et de celles qui sont appointées. Il y aura par semaine des audiences destinées à chaque genre d'affaires. Tous les jours seront utiles pour les actes judiciaires et les audiences, à l'exception des dimanches et fêtes chômées.
Art. 29.
« Les défenseurs officieux seront tenus de justifier au président et de faire viser par lui les pouvoirs de leurs clients, à moins qu'il ne soient assistés de la partie ou de l'avoué.
Art. 30.
« Il sera provisoirement alloué par an, pour menus frais de chaque tribunal de district, en papier, registres, bois, lumière, serviteur ou concierge, une somme depuis 300 jusqu'à 800 livres, suivant les besoins du tribunal; la fixation de la somme nécessaire sera faite entre ces deux termes, de 300 livres et de 800 livres, par les directoires de département, sur l'avis des directoires de district, et de concert avec les juges.
« Dans les villes au-dessus de o0,000 âmes, la fixation de la dépense pourra être portée jusqu'à 1,200 livres; à Paris, jusqu'à 1,600 livres pour chaque tribunal, si les besoins l'exigent.
Art. 31.
« Les huissiers, gardes du commerce et autres exécuteurs des jugements, faisant une exécution quelconque, porteront une Canne blanche, et à la boutonnière une médaille suspendue par un ruban aux trois couleurs et portant ces mots : action de la loi.
« Les huissiers audienciers porteront, dans le même cas, le costume réglé par le décret du 2 septembre 1790; ceux-ci feront seuls les significations d'avoués à avoués ; tous autres huissiers qui feront ces significations seront condamnés pour chacune à une amende de 12 livres, dont moitié applicable aux huissiers audienciers du tribunal.
Art. 32.
« Les juges des tribunaux de commerce seront installés par les officiers municipaux, dans la même forme prescrite à l'égard des tribunaux de district; aussitôt après leur installation, ils procéderont à l'élection du greffier, .de la même manière que dans les tribunaux de district-
Art. 33.
« Les officiers municipaux des lieux où il y avait des justices ci-devant seigneuriales, municipales et de mairie reconnaîtront et lèveront les scellés qu'ils ont apposés sur les greffes et feront transporter les minutes et registres au greffe du tribunal de district, dont le greffier se chargera au pied d'un bref état. Il en sera de même des ci-devant sièges royaux compris dans le territoire du tribunal; et à l'égard des ci-devant cours, ci-devant pré'sidiaux, bailliages, sénéchaussées, vigueries, établis dans les lieux où les tribunaux de district sont placés, les minutes et registres seront déposés au greffe du district de la ville où siégeait la cour supérieure, le bailliage, la sénéchaussée ou la viguerie; le greffier du district donnera les expéditions et extraits de ces minutes et registres, et percevra les émoluments qui lui ont été ci-dessus attribués. Pour Paris, les officiers municipaux nommeront tel gardien qu'ils jugeront à propos, duquel ils prendront le serment, et qui, après la reconnaissance et levée des scellés, se chargera, sur un bref état, des minutes, registres, archives de ces anciens tribunaux, et pourra en délivrer des extraits ou expéditions, en ne recevant que 20 sols par chaque rôle, dont il comptera de clerc à maître à la municipalité, qui lui fixera un salaire raisonnable.
Art. 34.
« Dans les comptes, partages, liquidations, ordres et contributions dont l'achèvement est attribué aux ci-devant commissaires au Ghàtelet de Paris, qui les avaient commencés, s'il y a des absents intéressés qui n'aient pas laissé ou envoyé de procurations, il sera nommé par le tribunal, pour y assister pour eux, un des avoués, lequel ne recevra que la moitié des droits ci-devant accordés aux substituts du procureur du roi. »
Je propose de décréter, par article additionnel, que les juges de paix ne puissent connaître , de l'inscription de faux ou dénégation d'écriture et que, lorsqu'une des parties déclarera vouloir s'inscrire en faux, il lui en soit donné acte et que la cause soit renvoyée au tribunal de district.
, rapporteur. Je ne vois pas à cela de difliculté.
(Cette motion est décrétée sauf rédaction.)
Il faudrait exprimer dans les articles que les jugements pourront être faits tous les jours, excepté les fêt set dimanches et fêtes solennelles, et ne pas employer le mot utiles.
, rapporteur. Il faut que les jours de dimancheset fêtes soient comptés dans les délais ; si les expressions de l'article fontunedéro-gation à la loi actuelle à cet égard, tous les jours seront utiles pour les actes judiciaires, à l'exception des dimanches et fêtes chômées. Il me semble qu'il n'y a pas d'amphibologie.
J'ai à vous proposer, au nom du comité : 1° la rédaction de quelques articles ajournés; 2° cinq articles sur les juges de paix : comme il est fort lard et que l'ordre du jour estappelé, si l'Assemblée nationale veut renvoyer ces articles à demain soir, je serai prêt.
Plusieurs membres : Non! nonl
Nous venons d'adopter tout à l'heure la proposition qui vous a été faite indéfiniment, tendant à ce que hs juges de paix ne puissent connaître d'inscriptions de faux : cette disposition exige une précaution, c'est que le juge de paix soit tenu néanmoins de constater, par son procès-verbal, le fait de dénégation de l'écriture ou du billet, et il en sera donné acte. (Marques d'assentiment.)
, rapporteur. Cette disposition pourra être comprise dans la rédaction de l'article additionnel proposé par M. Christin. (Adopté.)
, rapporteur. Voici, Messieurs, deux articles que vous avez précédemment ajournés et dont nous avons modifié la rédaction :
Art. 1er.
« Le bureau de paix, après avoir concilié les parties, constatera dans le procès-verbal les poinîs de conciliation dont elles sont tombée-! d'accord ; ce procès-verbal sera signé des parties, ou contiendra mention de la dèclaiation qu'elles auront faite de ne savoir signer. » (Adopté.)
« Art. 2. Par provisiou et en attendant qu'il ait été fait un nouveau tarif, les émoluments personnels des greffiers sur chaque expédition, des avoués sur chaque acte de procédure, des huissiers par chaque acte de signification, seront des trois quarts des anciens, sans que les greffiers puissent, en aucun cas, rien percevoir à titre de paiisis. Les huissiersordinairespercevront les mêmes droits que par le passé ; tous droits ne seront perçus sur ce pied, même clans les affaires d'appel) qu'eu égard au tarif éiabli dans chaque lieu pour lesalfaires de première instance.
,« A Paris, le tarif de 1778, établi aux requêtes du palais, servira de base aux proportions ci-dessus déterminées, en tout ce qui concerne les huissiers ou les avoués, sans néanmoins qu'il puisse êtie alloué aux avoués aucun des droits de conseil et de consultation attribués, à Paris, auxcf-devant procureurs. A l'égard des huissiers audienders et des huissiers ordinaires exploitantàParis, la base de proportion sera prise dans le tarif usité au ci-devant Châtelet. »
Il avait été dit qu'on prendrait le tarif de la juridiction royale, à laquelle ressor-tissait le chef-lieu de district.
Plusieurs membres : Non pas ! non pas !
, rapporteur. Je ne vois pas d'inconvén ents à adopter l'amendement de ' M. Goupilleau ; vous prendrez pour base de votre tarif actuel le tarif qui avait lieu dans la juridiction royale à laquelle il ressortissait.
Je demande que les droits des greffiers soient réduits à demi-droit.
, rapporteur. Le préopinant ne propose sûrement pas de revenir sur les décrets qui ont dit que les greflit rs auraient pour salaire les deux tiers du salaire du juge, outre les émoluments pour l'es expéditions. Voulez-vous connaître le produit de ces places ? le greffe de Rennes a rapporté 15 livres jusqu'à présent. M. Defermon peut attester ce fait.
Je crois qu'il n'est pas possible de proposer une réduction. Je vous prie de regarder, Messieurs, que, dans plusieurs endroits du royaume, on a renouvelé les tarifs en proportion de l'augmentation du prix des denrées.
Je demande donc que la réduction n'ait pas lieu dans les tribunaux où il n'y a pas de tarif renouvelé depuis cinquante ans.
, rapporteur. Il faut mettre le plus d'économie possible dans l'administration de la justice; mais comme les greffiers de district sont à la fois maintenant greffiers en première instance et gieffiers d'appel, cela augmente par conséquent leurs expéditions et leurs émoluments. Ainsi il est fort juste de réduire les anciens tarifs d'un quart'.
D'après les observations qui viennent d'être faites, voici comment je propose de rédiger l'article :
Art. 2.
« Par provision et en attendant qu'il ait été fait un nouveau tarif, les émoluments personnels des greffiers sur chaque expédition, des avoués sur chaque acte de procédure, des huis-siers-audienciers pour chaque exploit ou signification, seront des trois quarts des anciens, sans que les greffiers puissent en aucun cas rien percevoir à titre de pari sis. Les huissiers ordinaires percevront les mêmes droits que par le passé.
« Tous ces droits ne seront perçus sur ce pied, même dans les affaires d'appel, qu'eu égard aux tarifs établis dans chaque lieu pour les affaires de première instance ; et dans les districts dans l'étendue desquels il n'y avait pas autrefois de juridiction royale, on prendra pour base le tarif qui était suivi dans la juridiction royale la plus voisine, située dans le département.
« A Paris, le tarif de 1778, qui avait lieu aux requêtes du palais, servira de base aux proportions ci-dessùs déterminées pour les droits des greffiers et des avoûés, sans néanmoins qu'il puisse être alloué aux avoués aucun des droits de cons il ou de consultation attribués par ce tarif aux ci-devant procureurs. A l'égard des huis-siers-audiemïers et des hui-siers ordinaires exploitant à Pans, la base de proportion seia prise dans le tarif usité au ci-devant Châtelet. » (Adopté.)
, rapporteur. Voici maintenant, Messieurs, cinq articles additionnels que le comité Vous propose d'aiopter;
Art. 1er.
« L'appel des jugements dis juges de paix, lorsqu'ils seront sujets à l'appel, ne sera pas reçu par les tribunaux de district, si l'appelant n'a pas signifié copie du certificat du bureau de paix du district, constatant que la partie adverse a été inutilement appelée devant ce bureau pour être conciliée sur 1 appel, ou qu'il a employé sans fruit sa médiation, » (Adopté.)
Aft. 2.
« Si la partie ajournée en première instance devant un tribunal de district n'a pas comparu au bureau- de paix et vient à perdre sa cause, elle sera condamné! par le même jugement en une amende de 30 livres, au payement de laquelle elle sera contrainte, soit qu'elle exécute le jugement, soit qu'elle en appelle, et sans restitution en ce dernier cas, quel que soit l'événement de l'appel.
« La même amende sera prononcée contre le demandeur qui, s'étant pourvu au tribunal de district sans avoir fait citer son adversaire devant le bureau de paix, sera, par cette raison, déclaré non recevable. » (Adopté.)
Art. S.
« Lorsqu'une partie citée devant le bureau de paix sera exposee à l'exécution d'une contrainte par corps, prononcée pour cause civile, le bureau de paix pourra lui accorder un sauf-conduit, et elle ne pourra être arrêtée, ni le jour fixé pour sa comparution, ni pendant son voyage pour aller au bureau de paix, et pour en revenir. » (Adopté.)
Art. 4.
« Si un débiteur, après avoir obtenu ile son créancier, devant le bureau de paix, un terme de payement, manque de payer à l'échéance de ce terme, le créancier pourra l'ajourner directement au tribunal de district, sans le citer de nouveau devant le bureau de paix; et le délai de l'ajournement ne sera, en ce cas, que de cinq jours, et d'un jour en outre pour dix lieues. » (Adopté.)
Art. 5.
« Lorsque de deux parties présentes devant le bûréau de paix, l'une déclarera s'en rapporter au serment de 1 autre partie sur la vérité d'une dette méconnue, ou d'une convention contestée, ou de tout autre fait décisif, le bureau de paix recevra ce serment, ou fera mention dans son procès-verbal du refus de le prêter. » (Adopté.)
Un membre propose d'ajouter à ces articles une disposition qui fournisse un moyen moins dispendieux que celui actuellement suivi pour les actions en pavement de droits ci-devànt féodaux qui sont portées aux tribunaux de district : il propose de renvoyer au comité de Constitution pour examiner si on ne pourrait pas donner, à ce sujet, une attribution aux juges déapaix.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette motion.)
Voici une lettre d'Arnay-le-Duc adressée aux députés de cette ville par les membres du district:
s Messieurs, MM. les officiers municipaux d'Ar-nay4ê-Duû ont communiqué aux citoyens de dette ville la lettre que vous avez pris la peine de leur écrire; ils les ont éclairés sur leurs devoirs et ils se Sont empressés d'obéir à la loi.
« Mesdames n'ont plus éprouvé aucun obstacle et elles sont parties de cette villa le 4 du courant à 2 heures après-midi. »
Plusieurs membres : Bon voyage l bon voyage I
demande un eoagé de deux mois peur se rendre dans son pays.
(Ce congé est accordé.)
L'ordre du jour iit un rapport du comité dès finances sur l'état de radiation des fbnctionnaifès publics absents du royaume.
au nom du comité des financés. Messieurs, l'Assemblée ayant ordonné^ par son décret du pretûler de ce mois, que le comité des finances lui rapporterait l'état de radiation des différents fonctionnaires publics qui sont absents du royaume, le comité a cru que ce décret rappelait celui du 17 février.
Le comité s'était déjà mis en mouvement pour î-atisfaire l'Assemblée à Cet égard; il avait déjà chargé ses commissaires de vérfler chèia le payeur des pensions quelles étaient celles qui avaient été rayées et dont le payement n'avait pas été fait, en exécution de vos premiers décrets.'Il a vu quel était l'ordre observé dans les payements ; il a vu les formes qtsi Sont prescrites et usitées dans ce bureau, pour qu'aucun absent ne soit payé. Ces formes sont que, pour toutes les pensions, on exige non seulement un certificat de vie, délivré par les juges résidents, mais encore l'attestation de domicile d'une municipalité. Le payeur des pensions, M. Sa Valette, déclare que sur sa responsabilité, c'est-à-dire sur l'obligation de voir rayer de son compte ces pensions, il n'en présentera aucune qui ne soit revêtue de cette formalité.
Quant à liste des absents, il ne peut pas la donner; car il ne connaît pas les absents, et je crois que personne d'entre nous ne peut faire cette liste. Le comité lui-même ne peut donner à cet égard que quelques noms, mais non t>as une liste exacte; car le comité ne sait pas quels sont les abseuts. S'il était un comité dans l'Assemblée que l'on pût inviter à donner cette liste, ce serait, je crois, le comité des recherches. Ainsi à cet égard lé comité des finances n'a pu faire autre chose que dé s'assurer des mesures prises au Trésor public pour qu'il ne soit payé aucune pedsion à un absent: il rapporte simplement une liste très courte des absents notables très connus.
Quant aux autres fonctionnaires publics qui pourraient être absents, le comiré a écrit aux ministres des différents départements, pour avoir la luste de ces fonctionnaires ou de ceux qui n'ont pas rempli les conditions prescrites par vos décrets. Déjà le ministre de la marine a repondu qu'il n'avait que trois membres absents ; il a donné, dans une lettre adressée au comité, le détail et les motifs deces absences. Le mipisire de la gùerre a annoncé qu'il ne pouvait donner en cet instant cette liste, parce que les absents lui étaient la plupart inconnus, et que d'ici à peu de temps,d'après lés démarches qu'il Avait faites, il serait en état de satisfaire le comité » mais il
a rendu compte des précautions qu'il a prises pour qu'aucun traitement ne soit payé à un fonctionnaire absent ; et j'en apporte pour preuve le plan imprimé, distribué depuis longtemps dans les bureaux, et qui exige les précautions les mieux combinées, c'est-à-dire l'attestation de résidence de la municipalité dans laquelle le fonctionnaire doit être fixé pour remplir ses fonctions.
Quant aux fonctionnaires, résidant par état hors du royaume, qui sont dans le département des affaires étrangères, ceux-là n'ont d'autre obligation que de prêter le serment ordonné par vos décrets. Les uns l'ont déjà prêté et vous en avez connaissance, l'état en a été dressé. C'est cet état qui a été demandé au ministre des affaires étrangères. Je sais même qu'il est parvenu. Mais la lettre adressée hier au soir au comité des finances n'est pas encore parvenue à la section du comité chargé de cette opération, à l'instant où je me présente à la tribune : c'est ce qui me met dans l'impossibilité de présenter à l'Assemblée le détail qu'elle paraît désirer à cet égard.
Je proposerai donc à l'Assemblée de vouloir bien ajourner à tel jour qu'elle voudra, demain si elle le veut, le rassemblement des pièces envoyées par les ministres au comité pour former le tableau qu'elle exige.
Quant à la liste des pensionnaires, je demande que l'Assemblée veuille bien indiquer un moyen d'avoir cette liste, si elle ne croit pas qu'il soit possible de s'en rapporter à cet égard aux précautions prises et qui paraissent arriver absolument au même but.
Je demande que le comité des recherches donne la liste des pensionnaires absents.
La proposition de M. Ëouche ne peut pas être adoptée.
Je demande l'ajournement du rapport, parce que le comité central qui s'occupe dans ce moment d'une loi sur les absents doit lui présenter en même temps des dispositions à cet égard.
(L'ajournement est décrété.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur les dispositions qui doivent compléter l'organisation des corps administra-tifs (1).
, rapporteur. Nous nous sommes arrêtés hier à l'article 20 du ^projet qui conserverait son numéro d'ordre par suite de l'ajournement de l'article 19 ; il est ainsi conçu :
Art. 20.
« Dans les cas où des troubles survenus, soit dans les assemblées de
communes par communautés entières ou par sections, soit dans les
assemblées primaires, auraient empêché d'en terminer les opérations, ou
donneraient lieu d'en prononcer la nullité, le conseil ou le directoire
du département pourra, sur l'avis du directoire de district, convoquer
une nouvelle assemblée, y envoyer, au besoin, des commissaires pour
maintenir l'ordre; et, à l'égard des assemblées primaires, déterminer le
lieu où il paraîtra convenable tle les convoquer, pourvu que ce soit
dans le même canton. » (Adopté.)
« Si des troubles s'élevaient, soit dans les assemblées municipales, soit dans le conseil général d'une commune, le conseil ou le directoire du département, sur l'avis du directoire de district, pourra pareillement nommer des commissaires chargés d'y rétablir l'ordre. » (Adopté.)
, rapporteur. L'Assemblée ayant ajourné hier les articles 22 et 23, nous passons à l'articsle 24 du projet de décret qui est ainsi conçu :
Art. 22 (art. 24 du projet).
« Si les directoires de département ne peuvent, malgré deux avertissements successifs constatés par la correspondance, obtenir des municipalités ou directoires de district les renseignements ou informations nécessaires à l'administration, ils sont autorisés à nommer deux commissaires, qui se transporteront, aux frais des officiers municipaux, ou des membres des directoires de district, pour recueillir ces renseignements ou informations. » (Adopté. )
Je voudrais qu'on décrétât, par un article additionnel, les formes qui constateront que les deux avertissements successifs mentionnés en l'article précédent ont été donnés et reçus. « .
En prononçant une peine, il n'est pas possible de laisser à l'arbitraire des administrateurs de dire : Nous avons donné deux avertissements successifs. 11 faut que ces avertissements soient constatés.
(Cette motion est renvoyée au comité de Cons-r titjition.)
, rapporteur, donne lecture de l'article suivant :
Art. 23 (art. 25 du projet). |
« Indépendamment de la correspondance habituelle que les directoires de département seront obligés d'eutrenir avec le ministre de l'intérieur,, ils lui feront parvenir tous les mois un tableau raisonné des affaires du département, et des progrès de l'exécution des diverses parties confiée i a leurs soins. » (Adopté.)
, rapporteur. Je dois avertir l'Assemblée que le comité a cru convenable de transporter à l'article 26 du projet de décret une disposition que nous avions tout d'abord placée ailleurs, mais qui a plus de connexité avec l'objet actuel. ,. . "
Voici, en conséquence, la rédaction de cet article :
Art. 24 (art. 26 du projet).
« Les conseils ou directoires de département seront tenus d'exécuter et faire exécuter sans délai les ordres d'administration émanés du roi, en qualité de chef suprême de l'administration générale, et contresignés par le ministre de l'intérieur. Mais si ces ordres leur paraissent contraires aux lois, après lès avoir exécutés provisoirement, ils en instruiront le Corps législatif. » (Adopté.) *
, rapporteur, donne lecture de l'article 27 du projet de décret.
Je demande que le directoire d'un
département qui aura cassé un acte du district, soit tenu d'eu rendre compte sur-le-champ au pouvoir exécutif. (Cet amendement est adopté.)
Un membre : Je demande que le directoire du département soit tenu de motiver sa déclaration de nullité.
(Cet amendement est renvoyé au comité de Constitution.)
Je demande que tout corps administratif soit autorisé à faire sans intermédiaire telles adresses ou pétitions qu'il jugerait convenable au Corps législatif.
La marche n'est pas de se pourvoir directement au Corps législatif; il faut épuiser le premier degré de juridiction de l'administration, le pouvoir exécutif. Si la décision du pouvoir exécutif, qu'il faut obliger de donner, est contraire à la loi, alors le Corps législatif est le recours nécessaire.
Voilà comme je demande que soit amendée la disposition proposée par le préopinant.
Je maintiens la disposition telle qu'elle a été proposée par M. Barnave, parce que dans le sens que M. Barnave y a donné, les principes sont conservés.
, rapporteur. Le comité doit présenter très incessamment un travail sUr cette matière, ainsi que sur la manière d'exercer le droit de pétition, de manière à ne point blesser les pouvoirs, à conserver les droits des citoyens et des corps administratifs.
Je demande qu'on veuille bien ajourner cette question.
(L'Assemblée décrète le renvoi de la motion de M. Barnave au comité de Constitution.)
, rapporteur. Voici, avec les amendements adoptés, la rédaction de l'article 27 :
Art. 25 (art. 27 du projet).
« Si le procureur syndic requiert, ou si le directoire d'un district prend des arrêtés contraires, soit aux lois, soit aux arrêtés de l'administration du département, soit aux ordres qui leur auraient élé donnés ou transmis par le directoire du département, celui-ci déclarera ces actes nuls. 11 notifiera son arrêté au directoire de district et en instruira le pouvoir exécutif. » (Adopté.)
Art. 26 (art. 28 du projet).
« Si le directoire ou le procureur syndic d'un district mettaient à exécution un arrêté du conseil général de district, sur lequel le conseil général du département aurait notifié sa désapprobation, ou même refusé son approbation, comme aussi dans tous les cas où ils se permettraient une résistance persévérante à l'exécution, soit des lois, soit des arrêtés de l'administration du département, soit des ordres qui leur auraient été donnés ou transmis par le directoire du département, celui-ci pourrait, sans se servir de l'expression de mander à la barre, appeler devant lui le procureur syndic, même un ou plusieurs membres du directoire de district, leur remontrer qu'en intervertissant l'ordre des pouvoirs constitutionnels, ils mettent la chose publique en danger, et prononcer, par un arrêté qui sera im-
primé, la défense de mettre à exécution les actes déclarés nuls. » (Adopté.)
Art. 27 (art. 29 du projet).
« Si le directoire du département n'a pas annulé les actes mentionnés en l'article 25, lé roi pourra les annuler par une proclamation, sous la responsabilité de son ministre. » (Adopté.)
Art. 28 (art. 30 du projet).
« Dans le cas où, soit après la déclaration de nullité prononcée parle roi, soit après la défense de mettre à exécution, prononcée par le département, ainsi qu'il est dit en l'article 26, le directoire, ou le procureur syndic d'un district, persisterait dans son insubordination, le roi pourrait suspendre individuellement ou collectivement. comme il sera appliqué par la suite, les memnres du directoire, ainsi que le procureur syndic du district.
, rapporteur. Il y a deux expressions dans cet article qui demandent une explication : ce sont les expressions individuellement et collectivement.
Vous vous rappelez que vous avez ordonné que les arrêtés de département ou de district seraient signés par les membres présents; mais que ceux qui n'auraient pas été d'avis de prendre l'arrêté pourraient ne pas apposer de signatures.
C'est pour nous conformer à l'espritde vos décrets que nous avons mis ces mots individuellement et collectivement.
(L'article 28 est adopté.)
Art. 29 (art. 31 du projet).
« Toutefois, si les circonstances sont urgentes, le directoire, ou le conseil du département, pourra, sous sa responsabilité, suspendre de leurs fonctions, le procureur syndic qui aurait requis, ou les administrateurs de district qui auraient pris des arrêtés capables de compromettre la sûreté ou la tranquillité publique, mais à la charge d'en instruire aussitôt le pouvoir exécutif, lequel lèvera ou laissera subsister cette suspension. » (Adopté.)
Art. 30 (art. 32 du projet)..
« Si la suspension n'a été prononcée que contre deux membres du directoire du district, ils seront remplacés par les deux suppléants. Si le nombre des membres suspendus excède celui de deux, le directoire de département nommera, parmi les membres du conseil de district, des commissaires, en nombre suffisant pour compléter le directoire. » (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 33 du projet de décret.
Un membre propose de remplacer les mots : au besoin, par ceux-ci : en cas de refus.
, rapporteur. J'adopte l'amendement ; l'article serait donc rédigé comme suit:
Art. 31 (art. 33 du projet). ,
« Pour remplacer un procureur syndic suspendu de ses fonctions, le directoire du département nommera un commissaire pris parmiles membres de l'administration du district, ou, en cas de refus, parmi ceux du conseil de département. » (Adopté.)
Art. 32 (art. 34 du projet).
« Si un directoire de département met à exécution un arrêté du conseil de département, auquel le roi aurait refusé son approbation,. ou prend de tonte autre manière des arrêtés contraires soit aux règles établie* par ia constitution des Corps administratifs, soit aux lois de l'Etat, soit aux ordres dounés par le roi en matière d'administration, sous le contreseing du ministre, qui en est, responsable, le roi pourra, sous la responsabilité de son ministre, annuler ces actes par une proclamation, et défendre de les mettre & exécution. » (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 35 du projet de décret,
Le pouvoir exécutif pourrait bien, dans un cas urgent, ponjmer des commissaires pour surveiller l'administration ; mais le pouvoir txécùtif ne peut pas nommer des commissaires pour faire l'administration, car cela irait contre le principe de votre Constitution,
Quel est donc l'arrangement à prendre à cet égard? Si ce sont des membres du directoire.'il n y a rien de si facile, car 30 membres du çoqt seil du département peuvent fournir, par Tprdre de leur élection, des membres au directoire qui éprouve la suspension des sujets qui lé composaient.
' Le mode pour le remplacement du conseil du département ëst un peu plus difficile: cependant j'aime beaucoup mieux le mode que je vais vous proposer que celui du comité : c'est de prendre, pour composer Je conseil du département, des commissaires dans chaque conseil du district, un . certain nombre pour chaque élection.
Je me résume et je demande que les commissaires nommés pour remplacer les membres suspendus soient pris dans le conseil du département par ordre d'élection, lorsque le directoire seul sera suspendu ; et dans les conseils de district du dépaitement, lorsque la suspension frappera le conseil du département.
, rapporteur. Je demande qu'on ajourne cette partie de l'article qui traite du mode de remplacement én Cas de suspension et que l'on décrète le reste de l'article.
(Cette motion est décrétée,)
, rapporteur. No ici en conséquence quelle serait la rédaction de l'article :
Art, 33 (art. 35 du projet),
« Si une administration de département prenait, dans des circonstances urgentes, des arrêtés capables de compromettre la sûreté ou la tranquillité publique, comme aussi dans le cas où, après une déclaration de nullité prononcée par le roi, et les ordres donnés par lui eu matière d'administration, soit le conseil du département, soit le directoire, soit le procureur général syndic, persisteraient dans leur insubordination, le roi, sous iaresponsabilitéde son ministre, pourrait suspendre les auteurs du délit, individuellement ou collectivement. » (Adopté.)
Art, 34 (nouveau).
« Si la suspension est prononcée contre tous les membres du directoire, ils seront remplacés provisoirement, d'abord par ies suppléants mentionnés en l'article 3 ; ensuite par des commissaires
que le roi choisira parmi les membres du conseil de département, et, au besoin, parmi les membres de tous les conseils de district du même département. Le remplacement aura lieu de la même manière, dans le cas où la suspension aura été prononcée contre quelques membres du directoire individuellement. » (Adopté.)
Art. 35 (nouveau).
« Si un conseil de département se trouve suspendu, soit à l'époque où il doit tenir sa session annuelle, soit avant d'avoir consommé les opérations, le roi nommera 3 commissaires, pris dans chaque conseil du district du même département, dont ies fonctions seront bornées a la réception des comptes delà gestion du directoire, à la répartition des contributions de l'année, et à la distribution des travaux publics de la même année, si ces opérations n'ont pas été faites. » (Adopté.)
Art. 36.
« La suspension mentionnée en l'article 33, ainsi qu'en l'article 28, pourra être prononcée soit contre 1e corps entier du conseil ou du direc* toire, à raison des arrêtés qu'il aura pris, quel que soit le nombre des membres qui auront concouru à les former, soit contre ua ou plusieurs membres, pour les actes qui leur seront personnels, hors ia délibération, »
, rapporteur. Nous avon3 cru que lorsqu'il s'agit des corps en général, il était difficile de prononcer contre eux d'autre peine que la dissolution; nous avons pensé d'autre part qu'il était extrêmement dangereux de suspendre les membres d'un corps pour des actes pris dans l'intérieur du corps. Nous avons cru qu'il fallait distinguer soigneusement les actes hors de la délibération, et les actes qui sont dans l'intérieur de la délibération.
Un directoire de département prend, à la pluralité de 6 voix contre 2, un arrêté contraire aux lois, un arrêté qui compromet la sûreté et la tranquillité publiques. Sans doute, on a le droit et le devoir de suspendre le directoire, mais il s'agit de savoir s'il faut le suspendre en entier, ou s'il faut faire le triage de ceux qui ont été de l'avis die l'arrêté, et de ceux qui l'ont combattu. Le comité a cru que la suspension d'un corps ne préjugeait rien sur les individus ; que d'aiùeurg il était impossible de savoir ceux qui, dans une délibération, avaient été de l'avis de la majorité, et qu'il serait même très dangereux d'en chercher les moyens. La majorité lie toujours la minorité : en conséquence, il nous a paru que ceux de la minoritéi devaient être suspendus par provision, sauf ensuite à eux à prouver qu'ils n'ont pas pris part à la délibération.
(L'article 36 est adopté.)
Art» 37,
« Dans tous les cas où une suspension sera prononcée, soit par le directoire 4e département, soit par le pouvoir exécutif, le roi en instruira sur-le-champ la législature, si elle est assemblée, et dès les premiers jours de sa session, si elle est en vacance. » (Adopté.)
, rapporteur, donne lecture de l'article 38 :
« Sur cette notification, le Corps législatif pourra, ou lever la suspensioQ, ou dissoudre le corps administratif, même statuer, à l'égard
de quelques-uns de ses membres, qu'il y a lieu à accusation ; et, dins ce dernier cas, les renvoyer pour être jugé-, soit à la haute cour na* tionale, soit aux tribunaux criminels de département. »
Je propose pour amendement qu'on retranche ces mots : soit aux tribunaux criminels du département. En effet, ce serait pour ainsi dire rentrer dans l'ancien ordre des choses où la justice avait quelque chose de commun avec l'administration, au lieu qu'il ne doit y avoir qu'un seul point central auquel tout doit venir aboutir, c'est la haute cour nationale.
Vous avez déclaré, dans vos précédents décrets, que le ministre n'exercerait les pouvoirs que vous lui avez confies que sous sa responsabilité.
je demande que cela soit rappelé à la fin de cet article, et qu'il porte que le Corps législatif pourra les renvoyer pour être jugés soit à la haute cour nationale, soit aux tribunaux criminels des départements, ou déclarer qu'il y a iieu à inculpation contre le ministre.
, rapporteur. J'adopte l'amen-demept de M. Prieur,
Quant à l'amendement de M. de Folleville, le comité a examiné avec beaucoup de soin si tous les délits dans l'ordre administratif qui si raient portés à la législature, lorsqu'on aurait jugé qu'il y a lieu à accusation, devaient être ren^ voyés à la haute cour nationale. Nous avons pensé qu'il y aurait les plus grands inconvénients a rassembler la liaute cour nationale pour up individu qui s'est rendu coupable d'un délit public, mais qui par sa position ne semble pas exiger tout cet appareil de procédure. D'ailleurs, lq co^-miié a cru que ce serait une vue de sagesse et de politique de votre part, de ne faire rassembler la haute cour nationale que dans des circonstances très importantes, il ne faut réserver ce tribunal que pour les grands crimes ministériels.
Vous avez ici deux points dont il ne faut point vous écarter : mettre notre liberté à couvert de tous les pouvoirs constitués ; 2° considérer que vous avez décrété qu'aucun homme ne serait traduit devant un tribunal criminel que sur l'accusation de ses pairs; et en adoptant ce qu'on nous propose, il y serait conduit sur l'accusatiou de ia législature. Il y a donc le plus grand danger pour la liberté individuelle, dans cette thèse générale; et il est évident que vous violez le décret que vous avez précédemment rendu, Je crois do:ic qu'il faut examjuer avec attention le point de notre jurisprudence criminelle, S'il n'y a qqe la haute cour nationale qui puisse juger, ce qu'on vous propose serait une intervention singulière de pouvoirs que de donner cette attribution aux tribunaux criminels.
Je demande donc, aveo M. de Folleville, que l'on retranche la dernière partie de l'article."
Je propose de distinguer les crimes publics, des prévarications et délits ordinaires- Dans le premier cas, le Corps législatif prononcera s'il y a lieu à accusation ; et ce sera alors la haute coup nationale. Dans le second, elle renverra à l'accusateur public pour poursuivre.
Jusqu'ici, nous n'avons pas encore défini dans quelle classe seraient rangés les différents délits qui pourraient être commis par les corps administratifs, ou par les individus des corps administratifs : voilà d'où vient noire embarras.
Je'demande que l'article s'arrête ici : Dans le dernier cas, etc. Nous dirons alors s'ils doivent être poursuivis devant la haute cour nationale ou devant les tribunaux criminels ordinaires.
Je ne vois aucun inconvénient à la rédaction de M. Prieur ; mais elle laisse une grande question à décider, Il me semble que tout le monde serait d'accord par cette disposition-ci: « Pourra également le Corps législatif renvoyer les prévenus devant les tribunaux criminels, devant les tribunaux ordinaires dans les cas de..... »
, rapporteur. Il n'est pas possible d'adopter cette rédaction; car la première partie préjuge la seconde, et est même contradictoire. Après avoir dit que le Corps législatif pourra statuer, contre tout ou partie ne ces membres, qu'il y-a lieu à accusation, et les renvoyer à la haute cour nationale, ce qui tranche la question dans le système de M. Duport, on ajoute ensuite incidemment qu'un pourra cependant les renvoyer aux tribunaux criminels de département.
Je proposerais donc de décréter le fond de l'article et de ne rien prononcer pour le moment sur le mole de renvoi des prévenus soit à la haute cour nationale, soit aux tribunaux criminels ordinaires ; on ne préjugerait pas, de cette façon, du système de M. Duport, ni de celui du comité.
L'article serait donc conçu en ces termes :
Art. 38.
« Sur cette notification, le Corps législatif, après avoir examiné la conduite du ministre en cette occasion, pourra, ou lever la su-pension, ou dissoudre le corps administratif, ou renvoyer quelques-uns de ses me nbres aux tribunaux criminels de département; ou enfin, en déclarant qu'il y a lieu à accusation, les faire poursuivre devant la haute cour nationale ». (Adopté.)
Un membre, au nom ducomité des domaines, présente le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des domaines, conlirme la concession, à titre de bail emphytéotique, du droit d'établir et louer seuls des parasols et autres abris aux marchands et regratiers dans le marché desinnocents, faite au sieur Courvoisier et Cie, par lettres patentes dûment véritié'js, à la charge par les con-^ cet.sionnaires de veis r dans leTresor public, dans le délai de trois mois, la somme de 80 000 livres et de réduire, selon leurs offres, à 4 sols par jour, ia location de chaque parasol, ou autre abri, sans distinction de personnes. »
, Je demande le renvoi de cette affaire à la municipalité.
M. le rapporteur. Monsieur, elle lui a été renvoyée.
Eh bien, Monsieur, je demande le renvoi au département. Il est incroyable que l'on vienne occuper l'Assemblée nationale des parasols des halles de Paris.
(L'Assemblée décrète le renvoi au département de Paris.)
lève la séance à trois heures et demie.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAILLES-
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du mutin.
Un de MM les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier, qui est adopté.
Messieurs, les administrateurs du district d'Uzès vous ont adressé la relation, certifiée par les adfhinistrateurs du département du Gard, des événements qui se sont passés dans cette ville depuis le 14 février jusqu'au 22.
Plusieurs folliculaires, dans le seul et trop coupable espoir de perpétuer les troubles et d'augmenter le désordre, ne cessent de grossir, dans les écrits qu'ils répandent, ces malheureux événements.
Je demande que, pour servir de réponse à ces libelles, la relation des administrateurs du district d'Uzès soit littéralement transcrite dans leprocès-verbal.
(Cette motion est décrétée.)
Suit ce documerft :
Récit des événements arrivas à Uzès les 13 et 14 février 1791 et jours suivants jusqu'au 22.
La ville d'Uzès était depuis longtemps menacée d'une explosion; un évêque, distributeur d'un grand nombre de bénéfices et de places temporelles, un seigneur puissant, et qui avait dans ses mains de grands moyens de récompense; un clergé enfin nombreux et riche, ne cherchaient pas à faire des amis à ta Constitution française.
Cependant jusqu'aux décrets sur la rentrée des biens du clergé dans les mains de la nation, un bon esprit avait dirigé tous Jes citoyens, et les efforts des malintentionnés n'avaient pas pu réussir à les diviser : tous aimaient et respectaient les législateurs et les lois.
Le fanatisme n'avait pas encore été mis en jeu, parce qu'on aurait manqué de prétexte ; mais ces armes ont été déployées, et ce n'a pas été sans succès.
La ville d'Uzès renferme une population d'environ 6,000 âmes, dont le tiers seulement est protestant.
Parmi les catholiques,les uns, en grand nombre, tenaient aux privilèges ou étaient privilégiés eux-mêmes, attachés aux places de l'anciénne administration, intéressés aux revenus du clergé, à sa puissance ; en un mot, à l'ancien ordre de choses; ceux-là avaient leurs créatures.
D'autres n'ont ni possessions, ni fortune, et peu leur importe la forme
du gouvernement, pourvu qu'ils vivent.
A ceux-ci il faut joindre les non-catholiques, qui, n'ayant ni autorité, ni places sous l'anciea régime, qui, n'étant rien et ne pouvant rien être dan3 l'Etat, ne peuvent regretter l'ancienne forme de notre gouvernement.
Ce sont ces deux dernières classes réunies, qui sont restées à Uzès les amis de la Constitution. - Pour rendre ces citoyens odieux, on n'a pas manqué d'invoquer la religion; les catholiques patriotes ont été des renégats; les protestants, des gens qui voulaient détruire la religion catholique et qui dirigeaient l'Assemblée nationale vers ce but.
Dès lors, il s'est établi une séparation marquée entre les citoyens; et, pour éloigner tout rapprochement, il s*est formé de nouvelles sociétés, où on n'admettait que les gens d'une même opinion politique, que le peuple confond avec les opinions religieuses.
Ces sociétés aotipatriotiques lisaient au peuple l'Ami du roi, la Gazette de Paris, le Mercure de France, et toutes les brochures propres à engendrer le mépris des lois nouvelles et à réveiller le fanatisme.
Nouvellement encore une nouvelle société s'é-lait formée prèsPévêché, composée de prêtres, de gens d'affaire, et d'une partie des artisans; la dernière délibération de ce club a été une députation envoyée à un club de prétendus vrais Français, séânt'àAlais pour lui demander son affiliation (1).
Les amis de la Constitution étaient ici les moins nombreux; ils étaient subjugués; les propos les plus téméraires, les chansons les plus indécentes contre les lois, et les citoyens qui les aimaient, étaient impunément proférés; la modération et la patience ont été constamment la vertu des patriotes.
Il fallait exécuter les décrets sur la constitution civile du clergé; il fallait faire cesser aux chanoines leurs fonctions ; mais le peuple ne voulait pas le souffrir, et menaçait; le directoire usa de ia plus grande circonspection, et se Contenta de "faire fermer le chœur de la cathédrale ; deux chapelles fureut laissées libres, et cependant il se manifesta une émeute populaire auprès de ladite église ; le jour de l'opération, plusieurs personnes furent injuriées et blessées.
Enfin la loi du 26 décembre fut sanctionnée, et les ennemis de la Constitution s'agitèrent encore plus ; M. de Béthisy, ci-devant évêque d'Uzès, fit répandre dans tout son diocèse une lettre prétendue pastorale, et l'instruction de M. de Boulogne, avec plusieurs autres écrits, tendant à éloigner les ecclésiastiquesde l'obéissance à la loi; cet écrit fut dénoncé par nous à l'Assemblée nationale.
La fermentation devenait tous les jours plus
Le directoire du district dissimulaitses craintes ; il espérait tout du temps et de la raison; il ne voulait pas heurter de front Les préjugés et le? opinions; mais les ennemis du bien publie ne s'endormaient pas, ils disaient hautement qu'ils avaient des moyens sûrs pour détruire les patriotes, et amener une contre-révolution ; ils annonçaient leur plan ; c'était de faire une première attaque ; de fuir, de se répandre dans les campagnes en publiant partout que les protestants égorgeaient les catholiques, qu'ils les détruisaient entièrement; et- mille autres horreurs de cette espèce.
Ils menaçaient surtout du camp de Jalès, de ce camp qui a si longtemps fait l'espoir; des ennemis de la patrie, de ce camp qu'on a montré à toute l'Europe comme le foyer où devait s'allumer la première étincelle d'un incendie qui devait dévorer notre liberté, et anéantir notre Constitution.
On allait jusqu'à dire que les dragons de Lorraine, en garnison: ici, dont le patriotisme est connu, ne pourraient pas empêcher le désordre, parce qu'on s'emparerait de leurs, écuries.
Enfin, depuis quelque temps on distribuait des fusils à des personnes évidemment hors d'état de les payer, et nos craintes redoublaient, surtout depuis l'établissement de ce club monarchique ou de la liberté.
La garde nationale d'Uzès avait été instituée dans un temps où il n'était pas question d'opinions religieuses ; dans un temps où catholiques et protestants admiraient également ie génie de nos législateurs et chérissaient les lois. Tous les citoyens en état de, porter les armes composaient cette milice, et la division régoait souvent dans les compagnies.
Le dimanche, 13 de ce mois, il y eut une rixe dans un cabaret, sur les affaires du temps, entre quelques étrangers et des gens de la ville : elle n'eut pas de suite fâcheuse. Le soir ces étrangers et des citoyens de la ville tirent des farandouîes que la municipalité dispersa.
Le lendemain, lupdi 14, les farandouîes recommencèrent et grossirent; 4es attroupements se for-mèrènt; on commença à craindre. Un nommé Bouffard, revenu depuis trois à quatre jours du régiment rojal, qui l'a renvoyé à la demande de ses camarades, était à la tête de ces farandouîes ; on y criait à bas la nation ! au diable la nation! vivent les Aristocrates ! etc. : tout cela présageait une explosion prochaine; elle ne tarda pas en effet à se manifester.
La garde nationale ne faisait de service que la nuit, depuis 5 à 6 heures du soir jusqu'au jour. - Ce soir la compagnie n° 19 était de garde ; elle était composée, en presque totalité, de travailleurs ou artisans non patriotes. Ces citoyens, placés pour la garde et la sûreté des habitants, tournèrent leurs armes contre eux; olusieurs coups de fusil furent tirés, aucun ne fit feu, M. Voul-land, chevalier de Saint-Louis, catholique patriote, et commandant de la garde nationale, essuya -un de ces coups, qui manqua. Un scélérat se jeta sur lui avec sa baïonnette au bout du fusil : son frère, capitaine d'artillerie et chevalier
de Saint-Louis, lui sauva la vie. Dans le même instant le sieur Meyniel, autre catholique patriote^ et président du club des amis de la Constitution, fut poursuivi avec des fusils : un coup tiré sur lui manqua également.
Le directoire, instruit de ces excès, requit la garde nationale et les troupes de ligne de se mettre sous les armes, et la municipalité de publier la loi martiale. Le commandant delà garde nationale donna ordre à sa troupe de se réunir sur l'esplanade, mais plus de la moitié ne s'y rendit pas, et bientôt l'on apprit qu'ils étaient réunis a l'évêché sans leurs chefs légitimes.
Les dragons ayant reçu l'ordre de monter à cheval, deux d'entre eux furent aux écuries de l'évêché chercher leurs chevaux ; mais les gardes nationales en insurrection voulurent s'y opposer et blessèrent l'un d'eux d'un coup de fusil a l'épaule, l'autre d'un coup de baïonnette dans les entrailles -. ils ont été tous les deux dangereusement malades (1).
Le directoire délibéra ce soir même d'instruire le département de ce qui se passait, et de ne se séparer que lorsque les troubles seraient entièrement apaisés. Un courrier partit la même nuit pour exécuter le premier article de cette délibération.
Malgré la loi martiale publiée, les antipatriotes se réunirent bientôt de nouveau, et ils osèrent entrer dans l'église cathédrale et sonner ie tocsin vers les 7, heures du soir.
Le bruit des cloches jeta l'alarme et la consternation dans le cœur ae tous les bons citoyens; ils ne doutèrent plus que l'on n'appelât du secours contre eux, et que le moment d'exécuter le complot, souvent annoncé, ne fût enfin venu. Le directoire crut devoir appeler du secours et requit les gardes nationales des environs d'Uzès. et notamment celles d'Arpailhargues et de Mon-taren, qui arrivèrent bientôt, malgré l'ordre donné par la municipalité d'Uzès de les faire rétrograder.
La nuit s'était passée dans les plus cruelles perplexités; les patriotes étaient restés assemblés à l'esplanade sans faire aucun mouvement; et un fait qui prouve leur sagesse et leur extrême prudence, c'est que 60 ou 80 des déserteurs rassemblés à l'évêché, ayant eu la témérité de passer en armes au-devant des patriotes, ceux-ci ne leur dirent rien, ne firent aucun mouvement, et les laissèrent passer devant eux, tandis qu'un seul n'aurait pas échappé de leurs mains, s'ils l'eussent voulu.
Les antipatriotes placés à l'évêché avaient posté des sentinelles et des gardes avancées qui occupaient tout le devant de la ville ; ceux qui répondaient au qui vive: patriotes, étaient repousses ; on recevait ceux qui répondaient : royalistes.
Le grand matin, cependant, cette troupe de malintentionnés eut peur; et après s'être retranchée à l'évêché, elle disparut, et fut prendre ses quartiers à Valabrix et a Saint-Hippolyte-de-Montaigu, villages situés à une lieue de la ville.
Le même jour, dans la matinée, il vint, sur la
Le soir du même ionr, mardi 15, MM. Ménard et David, membre du directoire du département, vinn nt à Uzès en qualité de commissaires, pour rétablir l'ordre dans la ville.
Le directoire du département ne crut pns es précautions suffisantes; et le mercredi nous vîmes aniver avec la p'us grande satisfaction M. d'Albignac, commandant pour le roi dans le déparement ou G >rd, M. Vigier, troisième com-mis-airedu déi ariement, 300 généreux citoyens, gardes nationaux de Nîmes, et 50 hommes de plu* des trounes de ligne.
Alors le directoire requit les autres gardes nationales étrangères de se retirer; ce qu'elles firent.
Dans le5 journées de mardi et mercredi, il fut lait des visites dans les endroits où ou soupçonnait qu'il s'était caché de mauvais citoyens armés, ou qu'il y avait quelque amas d'armes et de munitions. On ne pOita à l'évêché, les portes qui ne purent être ouvertes, parce que le concierge n'avait pas les clefj, furent enfoncées et brisées ; mais il ne se commit atlcofl autre désordre; les meubles, finge et papiers furent respectés, et on se retira lorsqu'on eut vérifié qu il n'y avait personne. Un procès-Verbal constate Ce fait.
Il n'en fut pas de même de la maison où était le club monarchique; on prétend qu'il y fut trouvé des munitions de guerre, et elle fût dévastée. Le directoire y aCcourtft dès qu'il fut instruit du désordre; mais il n'arriva pas asez tôt pour empêcher la plus grande partie du mal. Le Sieur Passé, directeur oes po-tes, essuya aussi quelque dommage dans son jardin, parce qu'on y trouva enterré un sac de poudre à tier (1).
Le même jour mardi, 15, au mâtin, un nommé Colin, armurier, se présenta à la place? il avais la veille enlevé le pistolet d'Un dragon, et il s'en servit pour tirer sur une sentinelle, qu'il manqua : il fut at'e fit lui-même d'un coup de fusil doftf il mourut peu de temps ai rès. Le pistolet du dragon fut trouvé dans ses mains.
Le soir du même jour un particulier tira de sa fenêtre sur des dragons qui passaient ; on enfonça sa porte, et il a reçu un coup de baïonnette; mais sa blessure n'a"pas été mortelle.
Voilà les S' Uls malheurs et les seuls désordres que la ville d U2ès ait éprouvés.
Les gardes nationales étrangères et patriotes, ulcérées depuis longtemps
contre les ennemis de la Révolution que renfermait la ville d'Uzès,
témoignaient une ardeur qui pouvait devenir dangereuse. Les commissaires
du département et les membres du directoire du district se
transportèrent partout ; et secondés par de bons citoyens, ils évitèrent
de grands désordres. Les soins de M. d'Albignac et son influence sur (es
citoyens et sur les troupes de ligne firent le salut de cette ville
malheureuse. La bonne discipline de fa garde nationale de Nîmes et son
service infatigable, ne contribuèrént pas peu à assurer la tranquillité.
Le patriotisme courageux et impartial du régiment du Dauphiné n'eut pas
moins de succès : et combien ne faut-il pas admirer l'incroyable
modération des dragons de Lorraine, qui, montrant le zèle le plus
généreux pour le soutien de la bonne cause, n'ont pas tiré un seul coup
de fu&il, quoiqu'ils aient vu
Un peuple en fureur s'étant porté à la maison de M. Trinquefague, ancien maire, et aujourd'hui commissaire du roi, M. Voulland, colonel de la garde nationale d'Uzès, oncle du député de ce nom à l'Assemblée nationale, s'y transporta av c emprt s-ement, et empêt ha qu'elle ne fût dévastée; il exposa sa vie pour assurer le reto ir de l'ordre, avec le même dévouement que pour sauver son pays, et repousser les ennemis de la Constitution.
Le directoire, instruit que les émiarants s'étaient rendus aux villages de Valabrix et de Saint-Hippolyte, se hâta de leur envoyer des exprès pour les exhorter à revenir dans leur patrie par les voies de conciliation et de douceur. MM. les commissaires do département employèrent le même moyen à plusieurs reprises. Le directoire du district fit une proclamation dans cette vue ; elle fut solennellement publiée le mercredi 16 dans toute la ville. MM. les commissaires du département, le directoire du district, la municipalité, M. Dampmartin, commandant pour le roi à Uzès, MM. les officiers militaires, voulurent bien assister à cette proclamation, qui fut de suite imprimée et répandue avec profusion, et qui a contribué à ramener beaucoup de nos concitoyens chez eux.
La condition de remettre des armes dont ces ci'oyens avaient si fort abusé, était absolument nécessaire à la tranquillité publique ; elle fnt imposée aux fuyards, et certains ont refusé d'y souscrire, malgré les efforts infinis de MM. les commissaires, de MM. d'Albignac et du directoire, pour les ramener par la douceur et la persuasion.
L'ordre était rétabli dans la ville d'Uzès, mais le trouble naissait aux environs. Les rassemblements de Valabrix et de Saint-Hippolyte, les invasions de fédérés de Jalès dans le département, ont déterminé le directoire du déparlement du Gard à se porter en corps à Uzès, afin d'être plus près du péril et plus à portée de le faire cesser Les forces de la yarnison se sont accrues d'une partie du régiment de Lyonnais', personne ne s'est plus permis la moindre insulté; catholiques et protestants sont tranquilles ; les émigrants rentrent, el ont la bonne foi d'avouer leurs torts; ils conviennent qu'ils ont été trompés : ils trouvent chez leurs concitoyens des consolations et des secours, et le directoire a pris dés précautions pour que leurs femmes et leurs enfants ne soient pas exposés à manquer du nécessaire.
Le directoire du département a éclairé les peuples, et leur a rappelé leur devoir par une proclamation publiée de sa part, le 19 de ce mois.
Maintenant, ce n'est plus de la tranquillité de la ville d'Uzès qu'il peut être question, mais de celle des contrées voisines, où nos émigrants el ceux de Jalès se sont répandus, comme Saint-Ambroix, Barjac, Saint-Jean de Marvejols, Rivière de Teirargues, Navacelle, etc.
Déjà plusieurs campagnes ont été dévastées; mais nn grand malheur surtout a été commis auprès de Valabrix ; pendant que les émigrants dUzès y ét lient réfugiés, un nommé Pc Hier, protestant, fermier de la métairie du Moutet, terroir de Masinolène, entendant heurter la porte de la métairie dans 1a nuU, se leva, parût à la fenêtre, et reçut un coup de fusil, dont il mourût ; les autres gens de) la.maison fuirent ou se Cachèrent, la maison fût dévastée et pillée.
Tels sont les événements arrivés dans notre cité on aux environs; noué n'avons pas dit tous les torts des émigrants, mais tout ce que nous avançons est vrai'
Sans doute on aura suivi le plan qu'on avait formé et répandu que la ville d'Uzès a été remplie de massacres et de sacrilèges; cependant un seul citoyen y a péri, et bien évidemment par sa faute ; les prêtres, les églises, les maisons religieuses ont été respectés.
Français, qui lirez cent récits différents des malheurs qui nous affligent, ri'y Croyez pas; des administrateurs appelés à le&r place par la confiance des peuples, qui ont été témoins de tout, sont incapables dé trahir la Vérité et de se déshonorer par un mensonge; ils ont raconté sans passions, sans détour, tout ce qui s'est passé sous letïrs yeujt et autour d'eu*.
Fait et arrêté au directoire du district d'Osés, le martif 22 février 1791, Sigfié: Folchey, président; BalthaSar; V..-P. Guiraud, J.-P. Vérdier; Gide, seôrétaite.
Le directoire du département du Gard, séant extraordlnairemënt à Uzês, après avoir pris des informations sur lès troubles d'Uzès, et enteildu le rapport de ses Cointnissairès;
Redd témoignage à l'exactitude du récit du directoire du district d'Uzès, rédigé lè 22 février présent mois, et déclare que la différence des opinions religieuses n'a été que le prétexte dés éntréprises Criminelles des ennemis de la Constitution.
Donné à Uzè* le 23 février 1791, Signé : Grioléï, P.-G.-ÉJ-.J. iulién Trélis, Bolâsiér, Dautun.
Messieurs, l'exception que vous avez décrétée samedi dernier en faveur de M. le maréchal de Broglie m'encourage à Voûs demander la même faveur pour M. le maréchal dé Castriés, dont Vous n'avez entendu parler ni avant ni depuis fa Révolution, puisqu'il s'est , retiré dans le pays étranger pour y vivre tranquilte et ne se mêler dé rien.
Ôn sait que M. le màréçhal de Castrieë s'est montré avec la plus grande distinction et le plus grand zélé, qu-il s'è>l divmement conduit daiis toutes 1s places qu'il a remplies et que personne fi'a riénà lui fepfocher dans aucun genre.
M. de CastriéS a gagné plusieurs batailles, dans l'une desquelles il a eu le. bras cassé; tout le mônde sait que sa blessure s'est rouverte plusieurs fois; dans ce moment-ci il en gouffre cruellement et se trouve dâns l'impossibilité absolue de voyager.
Je démanue donc, ainsi qu'il a été fait pour M. îe maréchal de Êroglié, qu'il soit sursis, à l'égard dé M. lè maréchal de Castries, à l'exécution du décret du 4 dé ce mois, eh ce qui Concerne seulement le rang et les prérogatives purement honorifiques du grade du maréchal de Ffàncëdont il est pourvu,
Û'eXCéptiôn en excéplioû, il arriverait infailliblement que les fonctionnaires publics absents et fugitifs seraient enfin tous regardés comme présents. La proposition de M. Laùtfed a été faite, il y a quelqués jours, par M. Malouet, et rejetée. Je demande qu'on passe à l'ordrê du jour.
ÀL die Toulouse-Lautrec. La loyauté de M. dé Castries et ses services militaires sont C0ùfiiï§.
Je ne sais pas si l'Assemblée nationale peut craindre une exception pareille; mais certes il serait à désirer qu'il y en eût beaucoup de ce genre.
La loi dont s'occupent vos comités pour les fonctionnaires publics absents présentera sans doute les moyens propres* à relever d'uù délai fatal ceux qui auront des excuses légitimes et pourvoira à toutes les exceptions. Ainsi je crois que l'Assemblée ne doit pas s'occuper actuellement de ces objets dé détail et je demande l'ordre du jour.
Je Suis très éloigné de Vouloir étendre d'exceptions en exceptions la loi que vous avez portée, parce qu'il est nécessaire qu'elle ait Son effet ; mais j'ai l'honneur de vous prévenir que les exceptions ne seront pas nombreuses, si vous les réduisez au cas où se trouve M. de GaStries.
Il yons a prévenu, avant de sortir, du motif qui le portait à aller etî Suisse, et a même ajouté qu'il était toujours prêt à rentrer dans le royaume, dès que sa présence y serait nécessaire ; d'autre përt, la blessure qu'il a, Vient d'un coup de feu qui l'a mis dans le cas ae perdre le bras.
J'ai eu l'honneur de servir pendant vingt ânê sous Ses ordres, et je sais que pendant Ces vingt ans, cette blessure s'est continuellement rouverte : or, sa vie est en danger, dés le moment que cettê blêssuré se rouvre ; ét l'homme qui a été blessé presque mortellement, en gagnant une bataille, a assûréfnent des droits à l'indulgence.
Et à la jus -
Ëh conséquence, je demande que l'Assemblée nationale accorde à M. de Castries la même faveur qui a été accordée à M. de Broglie.
Un membre : Les faits présentés, par M. Dede-lày peuvent être vrais ; mais nous n'avons aucune preuve qui les constate; et L'Assemblée nationale ne peut pas se décider sur des allégations Vagues.
Je demande qu'on passe à l'ordre du jour.
Je vous demande la permission de vous faire remarquer qu'il y a quel** ques jours les mêmes observations furent présentées. (Murmures et interruptions.)
Én m'exprimant ainsi, Messieurs, je fais l'office de votre Président.
M. Malouet vous représenta que M. de Castries devait être excepté dé la proposition qti'dn faisait alors, et il retraça ses services et Sés blessures ; plusieurs membres observèrent que le décret ne pouvait avoir son effet contre ceux des officiers publics qui auraient justifié dè leur irûpoâ^ sibilité dé rentrer en Frahcë dans lé temps fixé, et l'Assemblée, en ordonnant lé renvoi au Comité, chargea celui-ci d'examiner ïa validité des excuses qui pourraient être présentées.
Plusieurs membres : Aux voix f
(L'Assemblée décrète qu'elle passe à l'ordre du jour.)
C'est un e injustice. La distinction que vous mettez entre MM. de Brogliè et de Castries est inique et atroce. (Murmures.)
, au nom du comité d'emplacement. Messieurs, tous avez chargé votre comité d'emplacement de vous faire un rapport sur la pétition des administrateurs du département de la Lozère.
Voici deux, directoires vraiment édifiants : leurs jouissances sont des privations"; ils consentent à se placer tous deux dans la maison commune, qui cesse de convenir à la municipalité et à s'imposer une gêne de tous les jours pour le soulagement des administrés.
Les montagnes ont été en général la patrie de l'économie ; puisse-t-elle descendre dans les plaines et s'y naturaliser à jamais ! Puissent les administrateurs présents et à venir pratiquer ses maximes, et ne jamais rougir de son évangile! Puissent-ils se répéter : chaque jour que, pour un peuple libre le premier moyen de s'enrichir est de perdre des besoins 1 Puissions-nous tous arrive^ bientôt au moment où perdre ainsi, ce sera jouir !
Votre comité vous présente le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d'emplacement, autorisé les administrateurs du directoire du département de la Lozère à acquérir de la municipalité de Mende la maison commune et ses dépendances, pour y placer le département et le district; autorise pareillement le directoire à faire faire, aux frais des administrés, les réparations énoncées au devis estimatif, montant à 5,214 livres, à la charge par la municipalité d'acquérir avec les deniers qui proviendront de la vente qu'elle aura faite de ladite maison commune, celle des Carmes, ou toute autre maison nationale, en observant les formalités prescrites par les décrets de l'Assemblée pour la vente des bien nationaux. »
(Ce décret est adopté.)
Un membre : Messieurs, vous avez décrété que la compagnie de Clermontois. ferait le service concurremment avec la gendarmerie nationale. Cette compagnie était payée et entretenue dans l'ancien régime aux frais de M. de Condé, qui s'en était chargé depuis votre décret, de sorte qu'elle -ne touche rien depuis le 1er janvier dernier.
A la fin du mois dernier, j'ai fait une motion tendant à ce que cette compagnie fût soldée par le Trésor public sur le même pied que la gendarmerie dont elle a pris à ses frais l'uniforme. Cette motion a été' renvoyée au comité militaire pour prendre à ce sujet .des arrangements avec le ministre de la guerre. Les choses en sont restées là et cette petite troupe, composée seulement de 16 hommes, n'a pas touché un sou depuis l'époque susdite.
D'après le Vceu des administrations, municipalités et tribunaux des districts du Clermontois, qui attestent le zèle de cette troupe dans son service continuel, service très diflicile dans les circonstances présentes, je me trouve obligé de renouveler ma motion et je propose, en conséquetice, le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale, satisfaite du zèle que la ci-devant maréchaussée du Clermontois montre constamment dans le service qu'elle fait con-
curremment avec la gendarmerie nationale de France, ordonne qu'à compter du 1er janvier dernier elle sera payée sur le même pied que cette dernière par le Trésor public ; qu'il lui sera accordé une gratification pour lui tenir lieu des avances qu'elle a faites .pour prendre l'uniforme national et qu'en conséquence elle sera portée incessamment sur l'état des payements du département de la guerre. »
Je demande que le comité militaire fasse le rapport de cette affaire à la première séance du soir.
(L'Assemblée décrète le renvoi de la motion au comité militaire pour en rendre compte incessamment.)
Messieurs, vous avez aboli plusieurs genres de retrait; et vraisemblablement vous avez eu l'intention de les abolir tous. Cependant il existe encore dans le ressort du ci-devant parlement de Toulouse un reste du régime féodal, destructeur de l'agriculture et du' commerce, qui a échappé aux recherches du comité et dont je vous demande la suppression au nom de la très grande majorité des députés du pays.
Cet abus, dont la députation de Toulouse demande l'abolition, est connu sous le nom de rabattement de décret. Ce prétendu droit est exercé par celui dont les biens ont été saisis et vendus, en vertu de sentence du parlement. La jouissance en est ouverte pendant dix ans en sa faveur, et pendant tout cet intervalle, l'aliénataire peut rentrer en jouissance de sa propriété vendue. Par là, il arrive que l'acquéreur, ne pouvant compter sur la propriété de l'immeuble qu'il a acheté, n'y fait, ni réparations, ni améliorations; et que le vendeur qui conserve un droit de retrait, auquel il n'est pas libre de renoncer, n'obtient du fonds qu'il aliène qu'une partie de sa4 valeur, ce qui porte un double coup à l'agriculture et au commerce.
Le préopinânt vous fait une demande extrêmement juste, mais j'observe que M. Thouret, membre du comité de Constitution, est occupé d'un travail qui touche maintenant à son terme, concernant l'abréviation de la procédure et la vente des immeubles. Ce sera le moment, lorsqu'il le présentera, de supprimer ce retrait.
Je demande^ en conséquence, le renvoi au comité de Constitution.
(Ce renvoi est décrété.)
L'ordre du jour est un rapport du comité d'agriculture et ae commerce sur les encouragements pécuniaires à accordera l'agriculture, aux manufactures, à la navigation et au commercé. ;
, au nom du comité d'agriculture et de commerce. Messieurs, toutes les fois que vous avez porté vos regards sur l'agriculture, l'industrie et le commerce, vous avez fait sentir que vous les considériez comme les véritables sources de la prospérité publique; que les négliger ce serait rejeter des bienfaits que la nature nous a prodigués plus qu'à toute autre nation, ét qu'en les améliorant par de sages5 règlements, vous voulez accroître la masse des richesses de la France, lui faciliter les moyens de remplir ses engagements, et assurer la subsistance d'une multitude de citoyens qui en sont la principale force, et dont l'industrie et le travail sont la seule
propriété. C'est d'après ces principes, et pour satisfaire à un désir si cher à vos cœurs, que vous avez chargé votre comité d'agriculture et de com merce de vous préseuter un travail général sur les primes d'encouragemeat, propres à donner de l'activité à l'agriculture, aux manufacture-, à la navigation et au commerce, et à étendre nos rapports commerciaux avec les autres nations. Le désir de seconder des vues si sages a fixé toute l'attention de votre comité; il n'a rien épargné pour se procurer tous les renseignements dont il avait besoin, pour nous mettre à portée de répartir avec justice sur chaque partie d'industrie, la portion d'encouragement pécuniaire qui lui est nécessaire pour recouvrer sur les autres nations cette supériorité que l'avantage du sol, l'énergie de la nation française, et son goût pour les arts, semblent lui promettre.
Les recherches de votre comité n'ont pas été sans fruit; mais pour compléter son travail, il a besoin de recueillir l'avis de divers départements, sur certains genres de culture : il a besoin de connaître l'état actuel de nos manufactures, celui des nouveaux établissements; il est nécessaire qu'il ait des idées déterminées sur la situation présente de notre commerce avec l'étranger ; mais si ces renseignements sont utiles à votre comité pour qu'il puisse vous proposer une juste application des encouragemenis pécuniaires que vous aurez déterminés, il est un préalable indispensable, celui de fixer la somme qui sera destinée à ces encouragements.
Votre comité des finances vous a présenté, dans son rapport du 6 février dernier, l'objet des primes et encouragements pour 3,862,000 livres; mais il vous a observé en môme temps que depuis quelques années ces encouragements s'étaient élevés à 6,500,000 livres. C'est donc véritablement cette dernière somme à laquelle vous devriez vous arrêter. Cependant, vu les circonstances qui commandent laplussévèreéconomie, votre comité a pensé qu'il convenait de ne fixer la somme de ces encouragements qu'à 6 millions. Il espère qu'en adoptant un nouveau mode et d'autres bases pour quelques-unes de ces primes, les 6 millions suffiront non seulement à encourager les mêmes branches de commerce et d'industrie qui en jouissaient, mais encore à favoriser de nouvelles branches qui n'y participaient pas, et surtout la filature du coton et l'agriculture.
Les grands avantages que l'Angleterre a retirés et reçoit encore chaque jour des encouragements qu'elle n'a cessé de prêter à l'agriculture, à l'industrie et au commerce, vous prouvent que les nations qui savent calculer leurs intérêts s'enrichissent par ces espèces d'avances, comme le laboureur par celles qu'il fait à la terre; qu'ainsi le sacrifice de 6 millions que votre comité vous demande n'est dans la réalité qu'un véritable prêt fait à l'agriculture et au commerce. C'est avec ce moyenque l'Angleterre,.dont la population est si inférieure à la nôtre, est parvenue à porter son commerce à un si haut et si étonnant degré de prospérité, et a réussi non seulement à nous écarter de tous les marchés étrangers où notre concurrence pouvait lui être nuisible, mais même à introduire en France les objets de son industrie.
Ce sont principalement les armateurs pour la pêche de la morue qui ont besoin de ce secours, et qui le sollicitent. Voire comité a reçu à cet; égard les réclamations ies plus pressantes de Bayonqe, Saint-Brieuc, Saint-Malo, Granville, Dieppe et des autres ports qui se livrent à ce
genre d'industrie; les pertes que ces armateurs ont éprouvées depuis plusieurs année-, notamment l'an dernier, les jettent dans le plus grand découragement. Il est reconnu que le commerce de la pêche, qui tient ordinairement en activité plus de 450 navires, sera bientôt anéanti, si vous ne continuez pas les primes que des arrêts du conseil des 18 septembre 1785, Il février 1787, et une décision du conseil de 1784, avaient successivement accordées, tant pour déterminer les expéditions pour la pêche de la morue dans la partie occidentale de l'Ile de Terre-Neuve, que pour exciter l'importation de la morue sèche en Portugal, Espagne, Italie, le Levant et les colonies françaises; si vous n'ordonnez pasquele payement en sera continué depuis l'époque où elles ont cessé, et si vous n ajoutez pas à l'avenir aux expéditions pour le Portugal, l'Espagne, et le Levant une prime additionnelle de 3 livres par quintal.
Sans cet encouragement, le commerce, qui ne pourrait soutenir chez l'étranger ni dans nos colonies la concurrence des Eiats-Unis et de l'Angleterre, serait obligé de restreindre sa pêche de la morue à la consommation nationale, et de diminuer dans la même proportion ses armements, qui sont la pépinière de nos meilleurs matelots, et qui alimentent une multitude de personnes de la classe la plus indigente. Cette pêche a d'autant plus besoin de secours extraordinaires, qu'en ôtant, par votre décret du 28 janvier dernier, aux armateurs français la faculté d'employer des sels étrangers, beaucoup moins chers que les nôtres, et qui jusqu'à présent ont été plus propres à la salaison des poissons, vous avez augmenté le désavantage de nos pêcheries.
Les considérations qui militent en faveur d'une augmentation de prime sur la morue nationale exportée sont les mêmes pour les harengs de notre pèche.
Votre comité d'agriculture et de commerce a fixé son attention sur l'importance de cette branche d'industrie, l'une des principales du royaume; elle forme un grand nombre de matelots, elle les entretient pour le service de notre navigation marchande et celui de nos forces navales. Sa main-d'œuvre, aussi multipliée que variée, fait vivre dans une étendue de plus de 60 lieues de côtes, non seulement les habitants des ports où cette pêche se t'ait, mais encore ceux des campagnes qui les avoisinent. Votre comité a senti la nécessité de conserver à cette multitude d'individus ce moyen de subsistance dont ils manqueraient si les armateurs, dont les frais d'armement sont depuis plusieurs années beaucoup renchéris, étaient forcés de diminuer leurs armements faute de débouchés. Vous ne pouvez assurer ce débouché que par une prime de 6 livres par baril de harengs exporté chez quelques puissances étrangères.
Vous n'hésiterez point à accorder cette prime, ainsi qu'une addition de 3 livres par quintal à celle dont jouissent les morues sèches exportées à l'étranger, si vous considérez ce sacrifice comme une demi-solde en faveur de l'armée auxiliaire de mer. Vous avez décrété une demi-solde pour le temps de paix aux soldats nationaux auxiliaires qui, en cas d'invasion, seraient prêts à défendre la patrie. Les matelots, qui sont tenus de monter au premier ordre, au premier signal, les vaiss aux de la nation, et qui, en attendant, s'exercent sur des bâtiments pêcheurs, sont dans un cas au moins aussi favorable. Si pendant la paix vous ne leur fournissez pas des moyens de subsistance,
ils seront réduits à en chercher chez l'étranger, et, en cas de guerre, vous ne pourrez pas compléter les équipages nécessaires à vos flottes.
D'après ces considérations, J'ai l'honneur de vous soumettre, au nom du comité d'agriculture et de commerce, le projet de décret suivant ;
« Art. 1er. L'Assemblée nationale fixe
provisoirement à 6 millions par an la somme qui sera destinée aux primes
et encouragements nécessaires à de nouvelles espèces de culture, à
l'éducation des bestiaux, à l'amélioration de nos laines, au
dessérhément des marais, aux manufactures, à la navigation et au
commerce; elle charge son comité d'agriculture et de commerce de lui
pré* senter le plus tôt possible ses observations sur l'emploi le plus
utile à faire de ces fonds. En attendant, les primes et autres
encouragements dont jouissaient en 1790 différentes branches de
l'industrie et du commerce national seront continuées, en se conformant
rigoureusement aux formalités qui étaient prescrit s pour les obtenir.
« Art. 2. Les primes et encouragements dont jouissaient les pêches de la morue, tant pour les expéditions faites à la côte Occidentale de l'île de Terre-Neuve nue pour l'importation de cette morue en Espagne, Portugal, Italie, au Levant et aux colonies françaises de l'Amérique, seront conti-Duées, en se conformant rigoureusement aux formalités qui étaient prescrites pour les obtenir, et le payement en sera continué de l'époque où il a cessé. Il sera de plus accordé, à l'avenir, une prime additionnels de 3 livres par chaquequintal de morue sèche qui sera portée en Espagne, en Portugal, en Italie et au Levant.
Art, 3. Il sera accordé une prime de 6 livres par haril de harengs de pêche française exporié en Suisâe, en Espagne, en Portugal, en Italie, au Levant et dans les colonies françaises d'Amérique, en se conformant aux formalités prescrites pour assurer la destination de la morue. »
(de Saint-Jean d'Angèly). Je demande l'impression du décret et l'ajourne ment à trois jours.
Le projet dé décret qui vous est présenté est instamment sollicité par tous les ports où se font les armements pour la grande pêche; il offre cependant dans ses dispositions plusieurs difficultés qui nécessitent l'ajournement. Mais quant à la partie qui concerne les primes accordées à la grande pêche, vous ne pouvez différer de l'adopter, si vous ne voulez détruire entièrement cette branche de commerce, dont la cessation momentanée anéantiraitnos relations habituelles dans tes échelles du Levant, dans l'Italie, dans l'Espagne.
Voici le moment où les bâtiments pour la pé-ehe doivent se préparer à partir; plusieurs le sont déjà; mais les autres ne seront pas armés, si l'Assemblée ne prononce pas sur les primés. S'il était besoin de vous prouver combien cette branche de commerce est intéressante, je vous dirais qu'elle emploie annuellement plusieurs millions de capitaux pour les armements qui se font en France ; que les armateurs rapportent annuellement plus de 1,500,000 livres qui répandent l'aisance dans nos ports, et font vitre une foule de familles.
Je vous propose d'augmenter les primes de 31ivreSpar quintal, cequt compensera à peine la perte qu'éprouvent les armateurs parla prohibi* tion des sels étrangers. Je demande donc que la partie du projet de
décret relative aux primes à accorder à la pêche soit adoptée, avec 1 augmentation de 3 livres par quintal pour les morues salées qui seront portées dans les échelles du Levant, en Italie, en Espagne et dans les colonies.
Je demande l'impression et l'ajournement du tout. Je serais même bien tenté de demander la question préalable; et je n'y renonce pas, lorsque l'affaire reparaîtra. L'Assemblée doit s'occuper, il est vrai, de faire fleurir par de bonnes lois le commerce et l'agriculture ; mais ce qui n'est pas aussi bien établi, c'est de savoir si le moyen d'y parvenir est de donner des primes. J'ai vu les mauvais effets et les abus de ces prétendus moyens d'encouragements. Laissez agir l'intérêt personne), c'est le plus puissant aiguillon: il ne faut que de bonnes lois pour diriger son action.
On vous propose de destiner à ces primes 6 millions ; et où les prendra-t-on? Sur l'agri-cultureetle commerce. Quel est donc cet étrange calcul? Je demande si ce n'est pas on revirement destructeur que de charger l'agriculture de 6 millions d'impôt pour l'encourager ? Ces encouragements ne tombent jamais que sur les plus intrigants; l'homme tranquille, qui ne sollicite rien, n'obtient rien.
On dit que le décret est instant : que ne le proposai t-on plus tôt?Quand il s'agit de grever l'Etat d'une dépense de 6 millions, qu'on nous donne au moins le temps de réfléchir. Je demande l'ajournement.
Un membre i Je demande la question préalable. Ce qu'on nous propose, c'est un impôt sur l'agriculture en faveur du commerce. Le comité d'agriculture et de commercé est en -effet composé, en majeure partie, de commerçants : on ne voit jamais que des commerçants à la tribune*
Les primes d'encouragement, qu'on vous propose pour la grande pêche ne sont qu'un Objet de 500,000 livres, et l'on ferait à regret une pareille dépense, lorsqu'il s'agit de vivifier un commerce utile à l'agriculture, par les consommations qu'il nécessite et sans lequel il n'y aurait point de marine 1
Ce qu'on dit ici contre ce commerce ressemble à la fanle de l'estomac* Je ne sais pas comment l'Assemblée refuserait une prime que le despotisme même n'aurait pu refusrr. Je ne sais pas comment elle refuserait de donner 500,000livres d'encouragement nécessaires à un commerce d'où dépend l'existence de notre marine, tandis qu'elle a consacré tant de pensions usurpées, tant de dons du livre rouge* tant de brevets de retenues.
Il y a une différence dë 20 0/0 entre les avantages de notre pêche et ceux de la pêche des Anglais et des Américains* Ceux-ci sont sur les lieux ; ils commencent leur pêche avec le printemps et la finissent avfec l'automne. Nos pêcheurs, au contraire, perdent une partie de ce temps dans les trajets* perdent une autre partie du bénéfice par les frais de cargaison, et sont obligés de ramener leurs bateaux* 08 de courir risque dé les perdre chaque année. Comment avec ces désavantages pourraient-ils, sans primeg, soutenir la concurrence des étrangers, lorsque ces derniers jouissent et des avantages naturels et des encouragements du gouvernement
Je persiste à demander que non seulement les
primes anciennes soient conservées, mais qu'elles soient augmentées de 3 livres par quintal pour les importations qui seront faites à l'étranger.
Ce n'est qu'avec une extrême surprise que j'ai entendu la nouvelle théorie qui vous a été présentée par l'un des p éopinants sur la prime. Il vous a dit, par exemple, que c'était un moyen de favoriser l'in-trigoe, et des instruments visiblement indignes de la faveur d'une administration sage. Je soutiens, moi, que les primes sont des germes de prospérité publique; et, sans m'occuner de les considérer en général, je m'arrêterai à celle destinée à l'encouragement des pêches.
Les désavantages de la pêche nationale, comparée à celle des étrangers, sent produits par la nature, supérieure à toutes les institutions. En eflé', vous ne sauriez empêcher que l'Amérique septentrionale ne soit plus voisine que vous des lieux de pêche, et que l'Angleterre n'ait dans ces établissements maritimes une supériorité réelle. Dira-t-on : il n'y a qu'à abandonner la pêche; ce ne serait pas voir en homme d'Etat, en homme qui a jeté des regards étendus sur l'ensemble d'un grand Empire. Je suppose que vous ayez abandonné la pêche pendant une longue paix, au moment de la guerre vous seriez privés de matelots, dont la pêche est l'école; et parce que cette école n'en aura pas produits, et par> e que les ancièns auraient porté leur industrie chez des nations riysles., Gomment réaliseriez-vous alors des opérations militaires ou commerciales, relatives à la conservation de Vos colonies? Si vos faibles convois sont enlevés, si vos armateurs sont ruinés, qui donnera lieu à la consommation des objets de votre agriculture et de vos manufactures?
Ce n'est pas tout : vos colonies privées de secours, parce que votre marine sera faible et impuissante, se verront contraintes d'ouvrir leurs portes aux étrangers, et les denrées coloniales deviendront l'objet de leurs immenses projets; que de maux 1 Voilà ce qu'offre la renonciation aux primes.
Quant aux 3 livres d'augmentation qui vous sont demandées par quintal de morue importée à l'étranger, il m'est facile d'en prouver la nécessité Dar ce qui s'est passé aux îles du Vent. Dans celle que je représente, la pêche nationale, malgré la prime, malgré le droit énorme et maladroit, il est vrai, mis sur les morues étrangères, n'a jamais pu soutenir la concurrence, et la Martinique n'a pas reçu d'elle le sixième delà consommation. Jugez du bénéfice de l'étranger.
Hâtez-vous donc d'encournger notre pêche, que le commerce ne peut faire sans encouragement : et pour tout dire, si vous arrêtiez les armements, les fonds iraient se placer dans les spéculations de pêche chez l'étranger. Le profit serait perdu pour l'Etat, et vous auriez négligé son véritable intérêt.
D'après ces motifs, j'appuie de tout mon pouvoir la demande de la prime nationale et celle de l'augmentation de 3 livres par quintal de morue importée à l'étranger. (.Applaudissements.)
(de Saint-Jean-d'Angély). Je demande que les comités réunis d'agriculture et de commerce et de marine présentent incessamment à l'Assemblée un règlement sur la distribution des primes, qui puisse obvier aux fraudes
qu'il serait possible de faire sur les morues achetées de l'étranger.
s'oppose à l'augmentation des primes et demande leur continuation sur l'ancien pied.
(La discussion est fermée.)
L'Assemblée ajourne l'article premier du projet de décret et décrète les deux autres dans les termes suivants :
Art. 1er (art. 2 du projet).
« Les primes et encouragements dont jouissaient les pèches de la morue, tant pour les expéditions faites à la côte occidentale dé l'île de Terre-Neuve, que pour l'importation de la morue en Espagne, Portugal, Italie, au Levant et aux Colonies françaises de l'Amérique, seront conti* nuées, en se conformant rigoureusement aux formalités qui étaient prescrites pour les obtenir et le payement en sera continué de l'époque où il a cessé. II sera de plus payé, à l'avenir, une prime additionnelle de 3 livres par chaque quintal de morne sèhe qui sera portée en Espagne, en Portugal, en Italie et au Levant,
Art. 2 (art. 3 du projet).
« Il sera accordé une prime de 6 livres par baril de harengs de pêche française, exportés en Suisse, en Portugal, en Espagne, en Italie, au Levant et dans les colonies françaises de l'Amérique, en se conformant aux formalités prescrites pour assurer la destination de la morue.
« L'Assemblée nationale charge ses comités de lui présenter incessamment un projet de règlement sur les moyens de prévenir les fraudes que l'on pourrait faire sur les morues achetées chez l'étranger. »
Lorsque l'Assemblée nationale a jugé nécessaire d'établir un comité particulier d'agriculture et de commerce, elle a voulu qu'il fût composé d'un député par chacune des anciennes généralités du royaume. Saint-Domingue, la seule des colonies qui fut représentée alors dans l'Assemblée nationale, a donné un député comme une généralité. Les Colonies du Vent de l'Amérique diffèrent de Saint-Domingue par leur culture, par la nature de leurs impôts, et même de leur commerce.
Je supplie l'Assemblée d'autoriser les députés de colonies à désigner entre eux celui qu'ils croiront devoir envoyer à ce comité et d'ordonner qu'il lui sera adjoint.
, au nom du comité d'agriculture et du commerce, appuie cette motion.
(La motion de M. Moreau de Saint-Méry est dé-crètèé.)
, demandent des congés.
(Ces congés sont accordés.)
Je vais donner connaissance à l'Assemblée d'une lettre de M. te ministre de l'intérieur, relative au traitement à faire aux ci devant préposés à la perception des droits d'aides, entrées des villes, tabac, etc.
« Monsieur le Président, la suppression des impôts de la gabelle et du tabac, des droits des aides et d'entrées dans les villes, va livrer uû grand nombre de familles aux horreurs de Pindi-
gence eldes besoins. Les agents de quelques-unes de ces perceptions ont mis sous les yeux de l'Assemblée nationale le tableau de la situation pénible à laquelle ils sont réduits; mais je ne puis me dispenser de rappeler également à son iniérêt la portion beaucoup plus nombreuse de ceux qui attendent sa décision dans le silence du respect et de la confiance.
« Je supplie l'Assemblée nationale de considérer que la plupart de ces préposés se trouvent aujourd'hui, par la nature môme des fonctions qu-ils remplissaient, éeartésau moins pour quelque temps de toute autre ressource ; que le traitement qui leur était attribué leur présentait généralement à peine ie moyen de fournir à leurs plus pressants besoins. L'assurance d'un secours momentané qui puisse adoucir les privations qu'ils éprouvent, et dont l'Assemblée réglera la mesure suivant la nature et la durée de leur mission, est la seule grâce que je me permettrai de demander pour eux. Un-grand nombre d'entre eux est dépositaire de renseignements importants ; ils ont dans ies mains les principaux éléments de Ja comptabilité, plusieurs ont des comptes à rendre, des fonds à remettre au Trésor royal ou à recouvrer sur les contribuables : ainsi la reconnaissance que leur inspireront les bienfaits de l'Assemblée, ne sera pas perdue pour la chose publique.
« Je suis persuadé, Monsieur le Président, qu'elle trouvera dans sa sagesse et dans sa justice plus de motifs que je ne puis en présenter pour prévenir le désespoir, l'expatriation de près de 10,000 familles qui seraient en un instant privées de toute ressource.
« Je suis, etc...
« Signé : Delessart. »
Vn membre : Le comité des finances est déjà saisi de cette affaire ; il faut lui renvoyer cette lettre.
(L'Assemblée décrète le renvoi de la lettre de M. Delessart au comité des finances.)
L'ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur Vorganisation du ministère.
, au nom du comité de Consti-tution. Messieurs, avant de discuter l'organisation du Trésor public, dont le comité des finances a donné le projet, vous avez voulu connaître les vues du comité de Constitution sur l'organisation du ministère. Cette question importante ayant des rapports intimes avec les décrets qui compléteront l'organisation des corps administratifs, nous faisons imprimer en même temps ces deux parties de travail, et vous y trouverez les lois fondamentales, qui doivent assurer, diriger et contenir la marche du gouvernement.
La personne du roi est inviolable et sacrée. Par une heureuse fiction, on suppose que le roi, agissant en qualité de chef de l'administration générale, veut toujours le bien, et il ne présente ainsi aucune garantie par. lui-même. Mais, comme il faut asseoir les institutions politiques sur des fondements assurés, une loi constitutionnelle doit établir que le pouvoir exécutif n'agira, en matière d'administration, que par l'intermède de plusieurs agents, appelés ministres, qui répondront de tous les actes publics du roi. D'après ce principe, comment maintenir d'une part la dignité et la prérogative royales, nécessaires à la liberté et au honneur d'un peuple nombreux; et de l'autre, comment concilier l'énergie et la rapidité
d'administration, sans lesquelles une grande nation ne saurait exister, sous le même régime, avec le droit imprescriptible qu'a cette même nation de contenir dans les born s de la loi tou3 ies actes du gouvernement? Tel est le problème qu'il s'agit de résoudre.
Pour ne rien préjuger sur des questions délicates, nous devions soigneusement circonscrire nos idées, et nous renfermer dans un plan tracé avec précision ; c'est ce que nous avons tâché de faire. Ainsi, par exemple, nous n'examinerons point si les ministres peuvent être membres du Corps législatif; si, durant les vacances de ce corps, vous accorderez au roi un vote de crédit pour les dépenses extraordinaires. Nous laissons également, dans son entier, la question de la nature des réparations ou des peines à prononcer contre les ministres manquant à leurs devoirs; elle est réservée pour le moment où l'on discutera les principes du code pénal et leur application.
Le nombre des ministres est le premier point à examiner. Une seule difficulté se présente. Y aura-t-ii un ministre des colonies? Et, en se décidant pour l'affirmative, doit-on déterminer ses fonctions, avant que la constitution des colonies ait été décrétée par l'Assemblée nationale ou le Corps législatif dé la métropole ?
L'importance des colonies, la multitude d'affaires qu'elles apporteront au gouvernement, les modifications que vous avez promises, et qui sont nécessaires touchant leur régime et leurs lois, demandent un ministre occupé uniquement de cette administration. D'autre3 considérations relatives à la bonté du service, aux soins éclairés qu'on doit prendre d'une partie si précieuse de l'Empire, aux moyens les plus sûrs de lui rendre toujours justice, ne laissent aucun doute sur la question. Enfin, par l'établissement d'un ministre des colonies, la métropole aura non seulement plus de moyens de montrer sa constante affection pour les colons français, mais il en résultera des avantages sans nombre en faveur de l'agricUlture et du commerce du royaume.
Loin de différer cet utile établissement, des raisons, tirées de la nature même des choses, et ensuite des circonstances actuelles, prescrivent de l'accélérer. Vous êtes instruits des troubles qui affligent les colonies; ce moment d'erreur passera ; vos dernières mesures y rétabliront sans doute la paix; mais, dans votre sollicitude pour leur bonheur, vous voulez, par un examen approfondi de leurs griefs, prévenir le retour de ces divisions, qu'on peut bien dire fondées sur des malentendus. Il faudra prononcer surdes plaintes de tous les genres: de part et d'autre on formera des prétentions qui ne peuvent être réglées que par vous. Ce n'est pas tout encore, les troubles dont je viens de parler, affligeants sous plus d'un rapport, différeront inévitablement la constitution des colonies, et cependant vous désirez les faire jouir promptement de ia liberté et de la prospérité qui en est la suite.
Pour remplir ces vues, pour saisir la vérité, dans des discussions qui seront épineuses et même obscures, à raison delà distance des objets, vous aurez besoin des renseignements et des détails dont le gouvernement est dépositaire, èt l'on peut assurer que le même ministre, surchargé toui à la fois par le travail relatif à la marine, et par celui qui regarderait les colonies, se trouverait dans l'impuissance de bien remplir des fonctions si multipliées. Le département dë la marine offrant seul des détails infinis, tous
importants dans leur rapport avec le Trésor publie, présente à l'ambition du ministre un vaste champ de réformes à indiquer au Corps législatif, et à maintenir lorsque la loi aura prononcé; Ainsi, nous n'hésitons pas à demander qu'il y ait un ministre des colonies, et qu'on l'établisse sans délai; car il est facile de régler dès à présent l'étendue et les bornes de ses fonctions.
Le nombre des ministres une fois convenu, nous nous sommes attachés à indiquer, d'une manière précise, les bornes des départements respectifs; à réunir les fonctions analogues et à préparer à l'avance la bonté du service, en soumettant l'administration centrale à un ordre invariable. Cette première vue est digne de quelque attention, car les ministres les plus habiles et les plus intègres ne peuvent faire le.bien lorsqu'ils sont gênés à chaque pas, par un vice radical dans la division et la distribution des pouvoirs. Il est impossible de calculer les maux qu'ont faits à la France la confusion des pouvoirs abandonnés aux ministres sous l'ancien régime, la réunion des fonctions qui devaient être séparées, et la séparation de celles qui devaient être réunies : ce désordre, ajoutant aux désordres inséparables des mauvaises lois, legouvernement était parvenu au point de ne plus avoir pour ressort que des ordres arbitraires pour exécuter des dispositions commandées à l'aventure, et dés décisions capricieuses pour remédier au bouleversement occasionné par de prétendues lois rédigées sans principes et sans régie. On souriait d'indignation et de pitié, lorsqu'on examinait le ridicule chaos de ce qu'on appelait les départements. Pour vous en donner une idée. Messieurs, les ministres se partageaient les provinces tellement au hasard, que celles qui dépendaient du ministre de la maison du roi, élaient les unes au midi, les autres au nord, et le reste à l'orient et à l'occident, tandis que leurs voisines dépendaient de ses collègues, dont le domaine épars, également, offrait un partage aussi déraisonnable. Enfin, le clergé des provinces frontières se trouvait dans le lot du ministre de la guerre; le ministre de la marine avait la direction de quelques tribunaux ; celui des affaires étrangères gouvernait plusieurs provinces du royaume ; et celui de la maison du roi réunissait pêle-mêle l'expédition de la feuille des bénéfices, les Etats, les parlements et tous les tribunaux de justice, les gouvernements militaires et les intendances des provinces de son département.
Nous avons débrouillé ce chaos. C'est en suivant de bonne heure le grand principe de la division des pouvoirs politiques, que, vous avez vaincu tous les obstacles; ce principe qui vous a guidés jusqu'ici, qui vous guidera jusqu'à la lin de votre carrière, n'est pas moins fécond, lorsqu'on l'applique aux opérations du gouvernement. Les pouvoirs ministériels entraînant la responsabilité, il est indispensable de les séparer et de prononcer fortement cette séparation. Si la ligne de démarcation est bien tranchée; si on a réuni avcc exactitude les fonctions analogues ; si on a séparé avec la même exactitude les fonctions discordantes, le service se fera mieux, les agents n'auronf pas besoin d'un degré extraordinaire d'habileté, pour remplir leurs devoirs, et il est difficile de prévoir le caractère d'activité et de facilité que prendra l'administration.
Tandis que le ministre des affairés étrangères, celui de la marine et de la gu rre, uniquement occupés des objets qui leur conviennent, feront, pour ainsi dire, sentinelle sur l'océan, sur nos
frontières méditerranées, et au milieu des cabinets ambitieux .ou inquiets des puissances étrangères; tandis que de concert ils présenteront au dehors, et environneront d'un appareil imposant les résolutions pacifiques de la France, qui a renoncé aux conquêtes, et offre la paix à toutes les nations, l'exécution des lois, dans toutes les parties de l'Empire, reposera principalement sur le ministre de l'intérieur, sur le ministre des colonies et sur celui de la justice.
Le ministre de l'intérieur à longtemps fixé notre attention. Nous avons senti que le maintien de l'organisation de tout le royaume dépend, en quelque sorte, de l'organisation de cette partie du ministère; qu'il faut y placer les moyens d'assurer la liberté, la tranquillité et la prospérité publique. Mais la multiplicité de fonctions, qu'il parait nécessaire d'accorder au ministre de l'intérieur, est effrayante. Cette multiplicité de fonctions, et le danger qu'il y aura toujours de ne pas rencontrer des nommes qui puissent porter un pareil fardeau, ont conduit le comité à Une disposition qui lui semble réunir des avantages de tous les genres.
Nous vous proposons, Messieurs, de partager en cinq divisions les fonctions du département de l'intérieur, et de confier chacune de ces divisions, sous les ordres du ministre, à un directeur général responsable et nommé par ie roi. Vous verrez, dans le projet de décret, les précautions qu'il est aisé de prendre, pour ne point affaiblir la responsabilité en la divisant; pour ne pas énerver cède du ministre, en lui donnant des directeurs généraux, qui auront de leur côté une responsabilité particulière.
Nous ne ie dissimulerons point, les corps administratifs ont éfô abandonnés à eux-mêmes, depuis leur formation, parce que le ministère n'a pas pu, n'a pas voulu, ou, si on l'aime mieux, n'a pas pu les guider ou les contenir. Votre position ne vous a point encore permis de compléter les lois qui les regardent, et cependant il a fallu les surcharger d'occupations, malgré leur inexpérience, et dès les premiers pas de leur carrière. Le rassemblement qu'on en a fait les mois derniers, sans objet de travail bien déterminé, les a jetés à l'aventure dans un monde nouveau pour eux; là, sans guide et sans frein, ils se sont écartés de la roule, et avec de très bonnes intentions, ils ont contracté des habitudes dangereuses, et préparé au gouvernement et à vous, Messieurs, des embarras et des difficultés que vous ne surmonterez point, si vous ne détruisez la racine de cet abus, et si, après les avoir ramenés par vos délibérations au joug de la loi, vous ne les y retenez par la force et la précision des mouvements de l'administration général.
En guérissant les maux, le législateur n'a rempli que la moitié de sa tache, s'il ne prend des moyens pour les empêcher de renaître. Il doit offrir dans ses institutions la réforme du passé, et l'espèce de garantie qu'on peut se ménager pour l'avenir. Or, puisqu'il serait absurde de demander aux hommes des talents plus qu'humains, puisque les principes ordonnent de concentrer l'administration d'un grand Etat, comme celle d'un Etat de peu d'étendue; puisque l'unité d'action, très difficile, dans Une vaste monarchie, n'en est que plus nécessaire; puisque cette unité d'action ne peut y avoir lieu qu'en réglant, d.'une manière uniforme, les mouvements des' agents subalternes, et les ramenant au centre commun, il faut Craindre que tant de fils ne se croisent, et ne se brisent en y arrivant ; il faut que la con-
fusion, qui à ia longue perd tout, ne puisse s'établir : il est donc indispensable de répartir l'administration intérieure dans des divisions particulières subordonnées séparément à un agent qui éclaire le ministre d'une manière complète. C'est en effet le seul moyen qu'on puisse donner à celui-ci, pour saisir et gouverner l'ensemble.
Mais si la correspondance des corps administratifs et des municipalités sur toutes les parties de l'administration intérieure s'établissait exclusivement avec le ministre, le renvoi aux différents bureaux de cette multitude d'affaires qu'apportera chaque courrier deviendrait impossible; les méprises et les erreurs se montreraient à chaque pas, dérangeraient l'harmonie et ralentiraient la rapidité de la marche nécessaire dans tous les moments : ils doivent donc correspondre direc" tement avec le ministre, pour les affaires importantes^ n ais pour les affaires journalières, pour ces détails d'administration, pour ces difficultés, qu'un homme éclairé fait disparaître d'un mot, en citant la loi, la correspondance avec un directeur général, sera plus sûre, plus utile et plus prompte. ,
Le rapport des corps administratifs jouissant, dans leur ressort, d'une grande considération et d'un giand pouvoir, doit avoir lieu par des intermédiaire?, qui jouissent eux mêmes de quelque eonsidération,1 qui aient le pouvoir de faire le bien, et qui puissent répandre la lumière sans perdre leur temps à consulter un ministre sur dès choses qu'il ne saura pas, ou à lui demander sa signature au bas d'une lettre qu'il n'entendra point : il faut donc les tirer de la classe des premiers commis, les rehausser dans l'opinion par lu nomination royale, leur donner les moyens d'agir promptement, les intéresser, par la gloire et par la crainte, au suecès de leurs travaux, et, pour cela, L'ur permettre de faire excécuter les détails, et de tenir une partie de la correspondance d'instruction, que le roi et son ministre surveilleront et dirigeront en chef.
Ët ne craignez pas, Messieurs, d'affaiblir la responsabilité du ministère. Ce frein puissant dont on connaîtra mieux l'action lorsque le comité vous aura présenté la loi sur la responsabilité, sera conservé par les dispositions que renferme le projet de décret.
Le comité, je le répète, Messieurs, attend les plus heureux effets de l'organisation qu'il a conçue pour ie ministère de l'intérieur. Vos lumières perfectionneront ce que cette partie de son plan pourrait avoir de défectueux; mais il vous supplie de ne pas perdre de vue, d'un côté, l'extrême danger de la confusion, de la lenteur et de la faiblesse dans tout autre système, et de l'autre, la nécessité d'une administration centrale qui ait de l'unité, de la rapidité et de la force. Les nombreux développements dont cette matière serait susceptible, allongeraient trop le rapport, et on les donnera, s'il le faut, dans le cours de la discussion.
Outre l'organisation matérielle du ministère, il en est une autre qu'on peut appeler morale ; c'est dans celle-ci qu'il faut régler en détail l'action de l'autorité royale en matière d'administration. Vous avez déjà, Messieurs, recopnu le principe et arrêté la principale base, en déclarant par votre décret du 22 décembre 1789, que les départements, à l'égard de leurs fonctions administratives, seraient sous l'autorité du roi, comme chef suprême de l'administration générale. Çette loi indique même les grandes masses d'objets sur lesquelles portera la subordination. Il s'agit main-
tenant de déterminer le mode et l'étendue de l'action du pouvoir exécutif; mais parmi les dispositions multipliées, qui sont nécessaires pour arriver à ce but, les plus importantes ne pourraient être bien appréciées, si on les séparait des articles qui, en complétant les fonctions d*s ministrationsde département, poseront les bornes de leurs pouvoirs, et elles se trouvent dans le projet de décret qui complète l'organisation des corps administratifs. Si elles sont adoptées, on leur donnera, dans le code constitutionnel, la-place qui leur conviendra lê mieux.
Avant de parler de celles qui appartiennent plus immédiatement à l'organisation du minis*-tère, il faut dès à présent appeler votre attention sur les dispositions principales des deux projets de décret.
Et ici le comité doit 1e dire hautement à ceux qui se livreraient à des préjugés ou à des exar gérations : vous ne parviendrez jamais à contenir, dans les bornes posées par la loi, plus de 600 corps administratifs; un nombre de municipalités qui sera encore très considérable, même après la réduction que chacun paraît désirer; un nombre plus grand de fonctionnaires publies ecclésiastiques sur lesquels la surveillance aura peut-êire besoin d'être active, si, vous contentant d'une disposition déjà décrétée, vous bornez l'action du pouvoir exécutif à des proclamations, pour ordonner ou rappeler l'exé-ution des lois ; Si vous ne déléguez pas au roi, et au ministre de l'intérieur, sous les ordres du roi, et sa propre responsabilité, le pouvoir de réprimer les écarts des trois classes de fonctionnaires dont je viens de parler. Mais, nous n'en doutons point, éclairés par l'expérience, avertis par le passé de ce qu'on peut craindre pour l'avenir, vous ne Lisserez pas dans la Constitution un vice radical qui ne tarderait point à la renverser, et qui, procurant à ces hommes coupables, dont on nous menace chaque jour, le plaisir de voir, dans votre pro re ouvrage, les moyens d'une prompte destruction, les détèrminerait enfin à une inaction plus dan=-gereusë pour vous que toutes leurs menées.
Pour obtenir plus sûrement des bons résultats, pour différer, pour rendre inutiles les voies de rigueur, pour profiter de l'heureux caractère de la nation française qui se montre si soumise à la voix de la raison, qui sur un mot, sur un vœu de votre part, s'est dévouée à tant de travaux, qui, dans la erainte de vous déplaire et dans le désir de prouver sa confiance aux représentants de la natipn, a montré une émulation si digne d'éloges et s'est dévouée à de si grands et de si nombreux sacrifices, pour attacher vos institutions au cœur de tous nos fonctionnaires publics, pour les intéresser par un sentiment avec lequel on obtient tout des Français, nous avons songé à les contenir par l'honneur, et il y a lieu de croire que vous accueillerez une disposition qui prescrit au ministre de la justice et au ministre de l'intérieur, de rendre compte chaque année au Corps législatif, de l'état de l'administration de la justice et de l'administration générale, des abus qui auraient pu s'y introduire et en particulier de la conduite desjoges etoffieiers deé tribunaux, ainsi que des membres des corps administratifs.
Les événements très multipliés qui peuvent mettre en péril la chose publique, le secret que l'intérêt générai oblige souvent de garder, nous ont conduits à une disposition nécessaire à l'administration d'une monarchie étendue, et sans laquelle le gouvernement se trouverait paralysé,
lorsqu'il aurait besoin d'une plus grande foree. Cette disposition est très simple, c'est dans les cas qui, intéressant la sûreté de l'Etat on la personne du roi, exigeront une marche rapide et secrète, de donner au ministre de la justice, sous sa responsabilité, le caractère et le pouvoir de juge de paix, en matière de police de sûreté; de lui déléguer le droit de délivrer un mandat d'amener, et, après avoir interrogé le prévenu, de délivrer, s'il y a lieu, le mandat d'arrêt sous l'expresse condition, à l'égard des délits de nature à être portés à la haute cour nationale, qu'il dressera l'acte d'accusation et le transmettra sur-le-champ à la législature si elle est assemblée, et que si, d'après les réponsés des prévenus, le délit paraît être Un simple délit ordinaire, il les renverra dans la maison d'arrêt du district où la poursuite aura lieu, conformément à ce qui a été décrété sur la justice criminelle. Vous ména* geriez ainsi au gouvernement le moyen de prévenir les complots dans nos ports et de déjouer les menées des étrangers ou des nationaux tramants ces grands forfaits qui sont des calamités nationales. Afin de dissiper toutes les inquiétudes, on déclarerait que le ministre de la justice répondra de ses mandats d'amener et d'arrêt; et la ioi s«r la responsabilité déterminerait en détailla nature des réparations qu'on pourra prononcer dans le cas d'abus de ce pouvoir. La délégation que nous réservons au ministre de la justice appartient à tous les ministres, dans la Constitution d'un peuple voisin de nous; elle y produit les effets les plus heureux. Ces ministres en font un fréquent usage; jamais ils n'en abusent, et ce qui le prouve bien, les tribunaux qui les ont plus d'une fois condamnée à de fortes amendes, pour av©ir, par précipitation ou par négligence, omis 4esformalitéses3fintielles,ou employé desexpres-siQns générâtes dans leur Warrants, n'ont jamais pu les surprendre exerçant ce pouvoir sans cause légitime.
Les précautions qui assurent les droits des citoyens, contre l'usurpation du ministère, sont très multipliées dans le plan; vous y verrez, Messieurs, qu'eu aucun cas, l'ordre du roi, verbal ou par écrit, non plus que les délibérations du conseil, ne soustrairont un ministre à la res-poasabikté ; qu'outre les mesures de détail, contre la dilapidation des deniers publics, nous avons eu soin d'établir, sur cet objet, une barrière constitutionnelle que rien ne pourra franchir : mais ensuite, c'est un devoir pour vous d'a-surer l'énergie et l'activité du gouvernement, de le débarrasser des tracasseries qui nuiraient à la chose publique. Une action en matière criminelle, pour faits de ^administration d'un ministre, soumet celui-ci à une sorte de tâche perdant alors, au moins, pour un moment, la considération dont il a besoin, il ne pourrait continuer ses fonctions avant qu'un tribunal eût reconnu son innocence. En ne soumettant cette action à aucune formalité, le renvoi ou la suspension d'un minière dépendrait ainsi de quiconque voudrait le traduire en justice.
Les dangers d'un pareil système frappent tous les esprits. Le gouvernement serait impuissant et avili; l'administration tomberait dans la dissolution la plus complète, si vous l'exposiez de çette paa ère à la jalousie et à la violence de ses ennemis. Nous pensons qu'un ministre en place, ne *ioiit pas êtie traduit criminellement én justice, poisir faits de son administration, sans un décret da Corps législatif qui prononce qu'il y a lieu dé l'accuser, jusque là le Corps législatif
peut présenter au roi les adresses qu'il jugera utiles, sur la conduite, et même sur le renvoi des ministres. De plus, si le choix et la révocation des ministres appartiennent au roi, l'intérêt delà liberté nationale exige qu'un ministre accusé par le Corps législatif, après une délibération, soit suspendu de ses fonctions, et nous n'hésitons pas à le proposer.
Votre comité a longtemps discuté en quel cas et sons quel mode les citoyens pourraient former une action en dommages et intérêts contre un ministre, pour faits de son administration. Trois systèmes se présentent ici : dans le premier, une autorisation spéciale du CoFps législatif, serait nécessaire ; dans le second, on abandonnerait cette action aux risques et périls de ceux qui voudraient l'entreprendre ; et enfin, dans le troisième, l'action en dommages et intérêt!! ne serait ouverte qu'à la suite des faits d'administration, sur lesquels le Corps législatif aurait prononcé qu'il y a lieu à Paccusation contre le ministre. Pour saisir le point de la vérité, il faut comparer les trois opinions.
L'action des citoyens contre le Trésor public, ou l'administrationgénérale, étant de droit naturel et toujours permise, leurs droits pécuniaires ne courent aucun risque. Ainsi, sous ce premier rapport, on paraîtrait fondé à soutenir que l'action en dommages et intérêts ne doit être permise qu'avec l'autorisation du Corps législatif. En effet il y a lieu de craindre que les mécontents ou les ennemis du ministère ne saisissent ce moyen de le tourmenter : d'un autre côté, la permission accordée par le Corps législatif gérait une sorte de préjugé contre le ministre, et cet inconvénient est majeur, et même rien ne peut le balancer. De plus, ua peuple qui veut maintenir sa liberté, doit avoir une défiance raisonnable des agents du pouvoir exécutif; ce sentiment doittoujours se retrouver parmi les membres de la législature; et on peut penser qu'elle accorderait, trop aisément cette permission. Ge premier Système est donc très dangereux. ;
Les secours de l'imprimerie devant presque toujours assurer ici la bonté des jugements, il y a lieu de penser que deux ou trois actions indiscrètes, dont la honte et les frais seraient retombés, sur les accusateurs de mauvaise foi, serviraient de leçon aux autres ; il semble ainsi au premier coup-d'œil, que le second système aurait peu d'inconvénients; mais on ne tarde pas à s apercevoir que ce serait livrer les mi» nistres aux tracasseries et à la haine des ambi-^ tieux ; que les ennemis de la chose publique susciteraient ou favoriseraient sourdement un accusateur de mauvaise foi et «ans fortune, sauf à le faire disparaître au moment de la condamnation : d'ailleurs, il faut craindre aussi les accusateurs de bonne foi mais peu éclairés, qui, dans leurs exagérations et leurs méprises, voudraient faire payer à un ministre juste et ferme les erreurs de leur amour-propre, ou celles de leur conduite. Les ministres ayant ainsi à se défendre chaque jour contre les accusateurs de bonne ou dé mauvaise foi, il n'y aurait plus de repos pour eux. Vous établiriez un moyen sûr de harceler et de perdre celui qui remplirait ses devoirs avec le plus d'exactitude et ae succès. On ne doit donc pas laisser absolumeojt libre l'action en dommages et intérêts pour faits de l'administration d'un ministre.
La troisième opinion, en conservant dans toute leur intégrité, les droits des citoyens et ceux de la nation, a l'avantage de laisser aux gens immé -
diats du pouvoir exécutif, la tranquillité d'esprit nécessaire aux devoirs multipliés du gouvernement. C'est celle que nous avons adoptée, et vous penserez, sans doute, que l'action en dommages et intérêts ne doit s'ouvrir qu'à la suite des faits d'administration sur lesqui ls le Corps législatif aurait prononcé qu'il y a lieu à accusation cootre le ministre.
Les ministres soumis à rendre compte dans tous les moments, exposés à l'accusation du Corps législatif, à l'action accessoire en dommages et intérêts, de la part de tous les citoyens, peuvent encore être recherchés après leur ministère. Mais il serait impolitique et cruel de les livrer à la malveillance et à la persécution, parce qu'ils se sont trouvés à la tête des affaires. En écartant ainsi ceux qui, par leur sagesse et l'élévation de leurs sentimens, seraient le plus en état de servir la patrie, vous abandonneriez les premières places à des hommes audacieux, qui braveraient tout, pour satisfaire leur ambition. Vous fixerez donc un intervalle de temps après lequel ces actions seront prescrites, et nous croyons qu'on peut le fixer à deux ans, à l'égard du ministre ae la marine et des colonies, et à une année, à l'égard des autres.
J'ai parcouru les bases principales du plan du comité ; leur importance a demandé quelques détails. Le projet de décret renferme d'autres dispositions que peut-être on ne contestera point. Outre l'économie du temps, il sera plus utile d'en exposer les motifs, lors de la discussion ; je me contenterai d'ajouter qu'en traçant le cercle des devoirs de chaque ministre nous nous sommes efforcés d'établir nos réunions ou nos divisions d'après les rapports des objets entre eux et de tenir les affaires étrangères, la marine et la guerre bien séparées de l'administration intérieure. Si les tableaux ont de l'ordre et de la netteté, ils frappent tous les esprits et l'explication devient inutile.
Nous avions songé d'abord à ôter au ministre de la marine la correspondance avec les consuls de la nation française, pour la donner au ministre des affaires étrangères, à qui elle paraît convenir beaucoup mieux.
Un examen plus détaillé des rapports des consuls avec le département de la marine, et en particulier, de la liaison de leur service avec le régime de nos classes et de nos matelots, nous a déterminés d'autant plus aisément à laisser subsister à cet égard l'ancien ordre de choses, que le comité de marine adopte unanimement cette dérnière opinion. Mais nous avons eu soin d'ôter au ministre de la marine la direction de plusieurs parties de commerce, objet qui a toujours excité les réclamations des négociants et qu'on aurait dû laisser au département chargé de la surveillance des arts, des manufactures et du commerce de l'intérieur du royaume. Relativement aux grandes pêches maritimes, il nous a paru convenable de distinguer la police et le produit; d'attribuer la première au ministre de la marine et les détails sur le produit au ministre de l'intérieur.
Outre les colonies proprement dites, nous avons des établissements ou comptoirs sur les côtes d'Afrique et en Asie. L'agence extraordinaire, auprès des puissances des côtes de l'Afrique et de l'intérieur de l'Inde, a lieu tour à tour par des officiers ou agents du département de la marine et de la guerre ; cependant ces négociations politiques ou commerciales tiennent essentiellement
aux rapports et aux intérêts des puissances de l'Europe que le ministre des affaires étrangères doit connaître et surveiller; et c'est à lui que ce travail doit appartenir.
En proposant de donner au ministre des colonies la surveillance et la direction des établissements et comptoirs français, en Asie et en Afrique, il paraît nécessaire d'en excepter ceux qui sont situés dans les Etats de la Porte ottomane, les régences de Barbarie et de l'empire de Maroc, et de charger de ce soin le ministre de la marine. En effet, ces comptoirs ne se soutiennent qu'autant que nos navires sont protégés contre les corsaires barbaresques. Les consuls transmettent, aux commandants de nos bâtiments de guerre, des avis sur les parages où notre commercé est troublé ou menacé; ils sont même autorisés à requérir la croisière de ceux des vaisseaux de lâ marine militaire, qui font des campagnes dans la Médite ira née-Ces détails et beaucoup d'autres tiennent essentiellement aux fonctions des consuls; et pour ménager aux opérations commerciales l'unité et la rapidité d'action dont elles ont besoin, nous croyons qu'il faut placer, sous la même main, les divers instruments qui doivent y concourir.
Nous n'avons pas rappelé des dispositions déjà décrétées; nous avons omis, par exemple,'celles -sur les gratifications et les pensions, et d'autres encore que vous avez adoptées, sur le rapport du comité des finances. Dans le cours de vos délibérations, et surtout en achevant les diverses parties de la Constitution, des .précautions nouvelles vous seront indiquées; enfin la loi sur la responsabilité et les crimes de lèse-nation contiendra plusieurs des devoirs des ministres, et rien ne sera plus facile, à la fin de vos travaux, que de présenter, par la réunion de tous les articles, l'organisation la plus détaillée du ministère.
Une sorte de défaveur s'est répandue sur l'expression de responsabilité. Cette prévention est le résultat d'une confusion d'idées. Il semble que chaque mot, chaque action du ministre qui agit de bonne foi, et selon ses lumières, l'expose à une peine. Une pareille servitude est regardée avec raison, comme impossible et illusoire; mais, je le répète, c'est une pure confusion d'idées. L'imperitie, ou la négligence, qui n'est pas la suite d'une mauvaise intention, et même qui, avec des intentions suspectes ou mauvaises, se réduit à un rôle passif, ne peuvent exposer un ministre qu'à la défaveur publique, ou a une pétition du Corps législatif, qui avertisse le roi ae l'impuissance ou de la mauvaise volonté de son agent. La responsabilité est toute autre chose : elle s'exerce sur les actions ; elle soumet à une peine tout ministre qui se permet un acte quelconque contre la Constitution et les lois, contre la liberté et la propriété des citoyens; qui se permet ou qui favorise la dilapidation des deniers de l'Etat. Ces trois bases de responsabilité seront développées ailleurs : et ne voulant ici que dissiper une erreur, nous nous bornons à la distinction que nous venons d'établir.
L'organisation du ministère, telle que nous la présentons aujourd'hui, ne parle point de l'ordonnateur du Trésor public. Sous l'ancien régime, le contrôleur général des finances n'entrait pas toujours au conseil, et c'était l'excès de la déraison ; car les ministres faisant arrêter des dé-* penses folles, sans savoir si le Trésor publique pouvait le payer; le bon sens aurait ordonné du moins d'écouter celui qui devait connaître les
ressources et les besoins du peuple; celui qui devait recommander l'économie, déclarer nettement que telle dépense se trouvait impossible, ou que telle autre devait être préférée : mais sous une Constitution libre, avec le régime que vous avez établi, quel que soit le mode de la nomination de l'ordonnateur du Trésor public, il ne doit pas être au nombre des ministres ; il suffit qu'il y ait au conseil un ministre qui mette en mouvement tous les corps administratifs sur la répartition et l'assiette des contributions, qui aide de la force royale, le recouvrement de ces contributions, et cet objet se trouve rempli par les fonctions attribuées au ministre de l'intérieur.
Le comité des finances vous a déjà rendu compte, Messieurs, de quelques-unes des vues du comité de Constitution sur le Trésor public, et les moyens d'en écarter les dilapidations et le désordre ; mais je crois remplir les intentions de l'Assemblée, en développant davantage notre opinion.
Nous ne pensons pas que l'ordonnateur du Trésor public puisse, sans ae graves inconvénients, être nommé par le Corps législatif :
1° En pareille matière, un corps nombreux ne saurait faire un bon choix. L'élection serait livrée à l'intrigue et à la cabale; puisque les sujets aspirants à cette place seraient à peine connus de la soixantième partie des députés.
2° On affaiblirait la vigilance du Corps législatif, car il aurait naturellement de la prévention pour un homme nommé par lui, ou par les re-résentants de la nation qui l'auraient précédé, e membre du comité de l'imposition qui a soutenu ce système, l'a si bien senti, qu'il propose de le faire nommer par une législature, le dernier jour de session; mais, demande-t-il que l'ordonnateur du Trésor public n'exerce ses fonctions que deux ans, à moins qu'il ne soit réélu? et si ce n'est pas là son idée, qu'arrivera-t-il, lorsque, dans le cours d'une législature, cette place sera vacante, par mort, démission, ou suspension?
3° On a laissé au roi, et avec raison, la nomination de son commissaire auprès de la caisse de l'extraordinaire. Ce décret fait plus que préjuger la question, et il faut le changer, ou suivre le même principe à l'égard de l'ordonnateur du Trésor public.
4° Enfin, le roi est chargé de l'exécution des lois sur les finances, ainsi que de toutes les autres. On doit rendre sévère la responsabilité de son agent; mais pour conserver l'unité des principes dont s'est trop écarté le rapporteur du comité de l'imposition, en offrant une théorie qui ne nous convient pas, il faut abandonner au roi, avec les précautions convenables, le soin de faire exécuter les lois sur le versement des dépenses publiques, ainsi qu'on lui abandonne le soin plus important de maintenir la Constitution. En effet, il est d'autant plus nécessaire de ne point affaiblir son action, que le travail delà répartition et du recouvrement des contributions a besoin chaque jour d'un moteur puissant et d'un moteur unique. De véritables dangers nous environnent, si dans de pareilles discussions, on se laisse frapper de terreur; si l'on attribue au Corps législatif d'une vaste monarchie, ce qu'il ferait très mal, ou ce qu'il ne fera point; si l'on ne concentre pas la puissance pour la rendre plus efficace ; si l'on s'obstine à regarder en arrière au lieu de porter ses regards en avant.
En examinant les dai gers dont on nous me-
nace, on y aperçoit beaucoup d'exagération. Sans doute on ne doit pas un instant perdre de vue l'emploi des deniers de l'Etat; la surveillance doit être de la pius grande sévérité; mais il en résulte seulement, qu'outre la comptabilité et la responsabilité continuelle au Corps législatif, il faut établir un comité d'administration des finances auquel l'ordonnateur du Trésor public rendra compte fréquemment sans préjudice de sa responsabilité, et composer ce comité de manière à écarter les abus ; que pour avoir la double action de la force royale et du Corps législatif, on peut y mettre des ministres ou des agents nommés par le roi, et des surveillants nommés par la législature. Si l'on dit que la présence de ces surveillants nommés par la législature- énervera la responsabilité du comité d'administration, je répondrai que la responsabilité de l'ordonnateur du Trésor public restera entière; que les ministres que nous appelons à ce comité sont des surveillants pour le compte du roi, ainsi que les commissaires sont des surveillants établis par le Corps législatif.Observez, en effet, qu'on n'institue pas ce comité, pour répondre du versemeut et de l'emploi des deniers, mais pour éclairer, pour contenir la marche de l'ordonnateur du Trésor public, pour l'épier, pour le dénoncer au Corps législatif; pour être instruit de l'embarras qu'éprouvent les perceptions, pour aviseraux moyens de le dissiper, et pour exercer alors la double influence de l'autorité royale, et celle des représentants de la nation.
L'organisation du ministère, telle que nous la présentons, serait imparfaite; la machine du gouvernement n'aurait point de jeu, si l'Assemblée n'adoptait pas les moyens de réprimer les écarts des corps administratifs, que l'ordre des idées, et le désir d'abréger et de faciliter les délibérations, a fait rejeter dans la partie de travail qui sera distribuée en même temps que celle-ci. Pour montrer l'importance des rapports qu'ont entre elles ces deux parties, le comité ajoutera un petit nombre de réflexions, que vous jugerez peut-être de quelque utilité. Messieurs, vous avez devant vous un éjcueil dangereux. Si vous énervez l'action et la force du gouvernement, le royaume,livré à l'anarchie, n'offrira plus qu'une foule éparse de corps administratifs ou municipaux agissant sans accord et sans frein. Cette faute perdra font et fera tout oublier. Point de liberté publique, si l'administration centrale ne tient pas tout lié et tout soumis à la loi. Nous avons ici à nous défendre de nos préventions et même de nos habitudes. Il a fallu longtemps gêner des ministres dont les intentions étaient suspectes. Au milieu de la désorganisation entière de l'Etat, il a fallu tracer jusqu'aux moindres démarches de l'administration, administrer quelquefois; il l'a fallu, parce que les peuples n'avaient de confiance qu'en vous, que de toutes parts on s'adressait à vous et à vous uniquement. L'impérieuse nécessité vous a contraints d'ajouter cet immense fardeau à tous ceux que portait déjà votre courage. Vous savez, si l'administration peut convenir à un corps nombreux, et s'il n'y a point d'inconvénients lorsque le Corps législatif ose s'en charger. Nous devons oublier les premiers moments de la Révolution; nous devons songer non à ce qui est passager, mais à ce qui doit être permanent. Nous devons nous souvenir que les lois de circonstance sont presque toujours mauvaises; que le législateur se déshonore, s'il brise lui-même le ressort de son ouvrage; que rien ne marchera; que la Constitution serait
vainement dans vos procès-verbaux, si votre main, devenue moins intrépide, craignait trop le moteur'qu'elle a créé. Tels moyens sont nécessaires pour faire une Révolution, pour établir une Constitution ; tels autres ie sont pour la maintenir. Ces moyens ne sont pas les mêmes; les confondre c'est une erreur grossière : enfin vos nobles travaux bien en sûreté, d'ailleurs, n'ont à redouter que cette méprise.
Voici le projet de décret sur l'organisation du ministère :
PROJET PE PÉCRET.
Art. Ier. Au roi seul appartiennent le choix
et la révocation des ministres.
Art,2. Lesmiuistres seront au nombre de six; savoir t le ministre de la justice, le ministre de l'intérieur, le .ministre des colonies, le ministre de la guerre, celui de la marine et celui des affaires étrangères.
Art. 3. Les fonctions du ministre de la justice, seront : lp De garder ie sceau de l'Etat et de sceller les lois, les traités, les lettres paieutes de provisions d'offices, les commissions, patentes et diplômes du gouvernement;
2° L'exécuter les lois relatives à la sanction des décrets du Corps législatif, à la promulgation et à l'expédition des lois;
3e D'entretenir une correspondance habituelle avec les tribunaux et les commissaires du roi;
4° De les éclairer sur les doutes et difficultés qui peuvent s'élever dans l'application de la loi; mai* à la charge de proposer au Corps législatif, les questions qui, dans l'ordre judiciaire, demanderaient une interprétation;
5° De donner aux juges des tribunaux de district, ainsi qu'aux juges de paix et de commerce, tous les avertissements nécessaires ; de les rappeler à la règle, ainsi qu'à la décence et à la dignité de leurs fonctions, et de veiller à ce que la justice soit bien administrée ;
6° De transmettre au commissaire du roi, près le tribunal de cassation, les pièces et mémoires concernant les affaires qui lui auront été déférées, et qui seront de nature à être portés à ce tribunal; d'accompagner ces pièces et mémoires des éclaircissements et observations dont il les croira susceptibles;
7° De rendre compte à la législature, au commencement de chaque session, de l'état de l'administration de la justice, des abus qui auraient pu s'y introduire et de la conduite des juges et des officiers.
Art. 4. Il y aura près du ministre de la justice deux gardes et un officier, qui veilleront sur le sceau de l'Etat. Les secrétaires du roi du grand collège sont supprimés : sont pareillement supprimés les officiers en chancellerie, à l'exception de deux huissiers, lesquels serviront près la personne du ministre, à l'audience du sceau, et pourront exercer auprès du tribunal de cassation.
Art. 5. Le département du ministre de l'intérieur sera divisé en 5 sections, à la tête de chacune desquelles il y aura un directeur général, savoir :
Première section. Les détails relatifs au maintien du régime constitutionnel, touchant les assemblées de communes, par communautés entières ou par sections; les assemblées primaires et les assemblées électorales; les corps admi-nistiatifs, les municipalités, la force publique intérieure, la Constitution civile du clergé, l'ins-
truction et l'éducation publique : sansj néanmoins que de la présente disposition on puisse jamais induire que les questions définitives sur la validité des élections et sur l'activité et [l'éligibilité des citoyens puissent être soumises au jugement du pouvoir exécutif.
Deuxième section. Les détails relatifs à l'assiette des contributions directes et à leur répartition.
Ceux relatifs au recouvrement, dans le rapport des contribuables avec les percepteurs, dans le rapport de ces derniers avec les receveurs de district.
Ceux relatifs à la régularité de la nomination des percepteurs et du receveur de chaque district.
Enfin la surveillance, tant des dépenses d'administration, d'utilité générale, que des dépenses locales, qui pourront être autorisées par la législature dans les départements.
Troisième section. Les détails relatifs à la perception des contributionslndirectes et à l'inspection des percepteurs de ces contributions.
A l'inspection des monnaies et de tous les établissements, baux, régies ou entreprises qui rendront une somme quelconque au Trésor public.
Quatrième section. Les détails relatifs à la direction des travaux, pour la confection et entretien des routes, ponts, canaux, ports de commerce et autres ouvrages publics qui seront autorisés dans les départements.
A la conservation de la navigation et du flottage sur les rivières et du halage sur leurs bords.
A celle des bâtiments et édifices publics, tels que prétoires, églises et presbytères, maisons d'arrêt, maisons de justice, maisons de correction et prisons.
Les détails relatifs aux hôpitaux, établissements de charité, ateliers de charité, et à la répression de la mendicité et du vagabondage.
Cinquième section. Les détails relatifs à la conservation et administration économique des forêts nationales, domaines nationaux et autres propriétés publiques, produisant ou pouvant produire une somme quelconque au Trésor public.
Enfin ceux relatiis à l'agriculture, aux produits des pêches sur les côtes, et des grandes péchés maritimes, à l'industrie, aux arts et inventions, fabriques et manufactures ; au commerce de terre ét de mer, ainsi qu'aux primes et encouragements qui pourront avoir lieu sur ces divers objets.
Art. 6. Le ministre de l'intérieur sera chargé :
1° De faire parvenir toutes les lois aUx corps administratifs ;
2° D'exécuter et de faire exécuter, sous les ordres du roi, les lois relatives aux objets compris dans les divisions ci-dessus; et particulièrement de surveiller par lui-même l'exécution des lois relatives à la sûreté et à la tranquilité de l'intérieur de l'Etat ;
3° De correspondre avec les corps administratifs, de les rappeler à leurs devoirs, de les éclairer sur les moyens de faire exécuter les lois, à la charge de s adresser au Corps législatif, dans tous les cas où elles auront besoin d'interprétation;
4° De rendre compte, tous les ans, au Corps législatif, de l'état de l'administration générale, des abus qui auraient pu s'y introduire, et en particulier de la conduite des membres des corps administratifs et des municipalités.
Art. 7. Le3 conseils des départements lui adresseront les procès-verbaux de leurs sessions, dans la quinzaine, à compter du jour de la clôture; il en soumettra les arrêtés à l'examen et à l'approbation du roi, conformément à l'article 5 de
la section troisième, du décret sur les assemblées administratives.
Art. 8. Le directeur général de chacune des divisions du département de l'intérieur sera nommépar leroi,quipourrale révoquer à volonté. Il sera chargé de la conduite des bureaux de sa division, et responsable dans les cas déterminés par l'article suivant.
Art, 9. Le ministre de l'intérieur pourra retenir et suivre par lui-même celles des affaires des cinq divisions qu'il jugera convenable de se réserver. Il aura la décision générale de toutes les autres sur le rapport de chaque directeur. Après avoir pris les ordres du roi, il donnera les siens par écrit, et sera seul responsable de ses décisions et ordres généraux, mais le directeur répondra de ses propres lettres ou de ce qu'il aura fait sans les ordres ou les décisions signés du ministre.
Art. 10. Le ministre des colonies aura : 1° L'exécution des lois touchant le régime et l'administration de toutes les colonies dans les îles et sur le continent d'Amérique, à la côte d'Afrique et au delà du cap de Bonne-Espérance;
2° La surveillance et la direction des établissements et comptoirs français en Asie et en Afrique, à la réserve de ceux qui sont siiués dans les Eta's de la Porte Ottomane, les régences de Barbarie et l'empire de Maroc, lesquels continueront d'être du département de la marine;
3° Les détails relatifs aux approvisionnements, aux contributions, aux concessions de terrains, et à la force publique intérieure des colonies et établissements français ;
4° Les détails lelatifs à la défense locale et intérieure des colonies et établ ssements français, ce qui comprend les fortifications, les batteries des côtes, les magasins de l'artillerie et tous les objets qui en dépendent Quant à la disposition des foret s navales re ativement à la protection du commerce et à la défende extérieure des colonies, les établis ements et magasins faits et à faire pour ia marine, ainsi que l'administration et la f oliee des (lasses des gens de mer, et la police des poris et rades des colonies, ils continueront d'appartenir au département de la marine ;
5° Le travail concernant ceux des emplois civils et militaires, donl la nomination appartiendra au roi ;
6° Le travail concernant les récompenses dues, suivant les lois, aux fonctionnaires publics ;
7° Il surveillera et secondera les progrès de l'agriculture et du commerce des colonies ;
8° Il rendra compte, chaque année, au Corps législatif, de la situation des colonies, de l'état de leur administration, ainsi que de la condui te des administrateurs, et en particulier de 1 accroissement ou du décroissement de leurs cultures et de leur commerce ;
9° Il présentera aussi chaque année à la législature, et dans les délais qui seront prescrits, l'état détaillé des fonds employés pour le service public des colonies, établissements et comptoirs français. Il répondra des ordonnances qui en auront réglé la distribution, et il indiquera les économies dont chaque partie serait susceptible.
Art. il. Le ministre de la guerre aura : 1° La surveillance et la direction des troupes de ligne et des troupes auxiliaires, qui doivent remplacer les milices;
2° De l'artillerie, du génie, des fortifications, des places de guerre et des officiers qui y commanderont, ainsi que de tous les otticiers qui
commanderont les troupes de ligne et les troupes auxiliaires ;
3° Il aura également la surveillance et la direction du mouvement et de l'emploi des troupes de ligne, contre les ennemis de l'Etat, pour la sûreté du royaume,ainsi que pouria tranquillité intérieure, mais en se conformant strictement, dans ce dernier cas, aux règles posées par la Constitution ;
4° Il aura en outre la surveillance et la direction de la gendarmerie nationale, mais seulement pour les commissions d'avancement, la tenue et la police militaires ;
5° Il sera chargé du travail sur les grades et avancements militaires, et sur ies récompenses durs, suivant les lois, à l'armée, ainsi qu'aux employés de son département;
6" Il donnera les ordonnances pour la distribution des fonds de son département, et il en sera responsable;
7° Il présentera, chaque année, à la législature, l'état détaillé des forces de terre et des fonds employés dans les diverses parties de son département : il indiquera les économies, dont telle partie serait susceptible.
Art. 12.Le minisire de la marine aura : ^L'administration des po ts, arsenaux, approvisionnements et magasins de la marine, t dépôts des com-damnés aux travaux publics, employés dan3 les ports du royaume;
29 La direction des armements, constructions, réparations et entretien des vaisseaux, navires et bâtiments de mer;
3° La direction des forces navales et des opération militaires de la marine;
4° La correspondance avec les consuls et agents du commerce de la nation française au dehors;
5° La surveilla ice de ia police qui doit avoir lieu d ins le cours des grandes pêches maritimes, à l'égard des navires et équipages, qui y seront employés, ainsi que l'exécution des lois sur cet objet;
6° Il sera chargé de l'exécution des lois sur les classes, les gracies, l'avancement, la police et autres objets concernant la marine. Les directoires de département correspondront avec lui en ce qui concerne ies classes et la police des gens de mer;
7p II donnera les ordonnances pour la distribution des fonds assignés à son département, et il en sera responsable;
8° Il sera chargé du travail sur les récompenses dues, suivant les lois, à l'armée navale et aux employés de son département;
9° Chaque année il présentera, à la législature, un état détaillé de la force navale et des fonds employés dans chaque partie de son département, et il indiquera les économies dont telle partie se trouverait suceptible.
Art. 13. Le ministre des affaires étrangères aura : 1° La correspondance avec les ministres, résidents ou agents que le roi enverra ou en Retiendra auprès des puissances étrangères ;
2° Il rapportera au conseil et dirigera ce qui sera relatif aux négociations avec les puissances de l'Afrique et d'au delà du cap de Bonne-Espérance ;
3° Il suivra et réclamera l'exécution des traités;
4° Il surveillera et défendra au dehors les intérêts politiques et commerciaux de la nation frauçaise;
5°* II sera tenu de donner au Corps législatif les instructions relatives aux affaires extérieures, dans les cas et aux époques déterminés par la
Constitution, et notamment par le décret sur la paix et la guerre;
6° Conformément au décret du il rendra,! chaque année, à la législature, un compte détaille, et j appuyé de pièces justificatives, de l'emploi des fonds destinés aux dépenses publiques de son département.
Art. 14. Les ministres feront arrêter au conseil les proclamations relatives à leur département respectif, savoir : celles qui, sous la forme d'instructions, prescriront les détails nécessaires soit à l'exécution de la loi, soit à la bonté et à l'acr tivité du service; celles qui ordonneront ou rappelleront l'observation des lois, en cas d'oubli ou de négligence.
Art. 15. Chacun des ministres sera tenu de recueillir et de présenter annuellement au Corps législatif les observations qui peuvent motiver un changement dans les lois relatives aux objets de leur département respectif.
Art. 16. Aucun ordre du roi, relatif à l'administration; aucune délibération du conseil në pourront être exécutés, s'ils ne sont contre-signés par le ministre chargé de la division à laquelle appartiendra la nature de l'affaire.
Dans le cas de mort ou de démission de l'un des ministres, celui qui sera chargé des affaires par intérim, répondra de ses signatures et de ^ ses ordres.
Art. 17. En aucun cas, l'ordre du roi, verbal ou par écrit, non plus que les délibérations du conseil, ne pourront soustraire un ministre à la responsabilité.
Art. 18. Soit que la législature ait accordé ou non,un vote de crédit, èt quellequesoitl'urgence des circonstances, aucun ministre ne pourra, en l'absence du Corps législatif, ordonner, dans son département, des dépenses extraordinaires, sans avoir demandé et obtenu l'approbation du conseil. La délibération du conseil sera mise par écrit, les ministres qui auront été d'avis de là prendre, la signeront, et chacun d'eux en demeurera responsable.
Art. 19. Les ministres seront tenus de rendre compte, en ce qui concerne l'administration du royaume, tant de leur conduite, que de l'état des dépenses et affaires, toutes les fois qu'ils en seront requis par le Corps législatif.
Art. 20. Les ministres sont responsables au Corps législatif:
1° De tous les actes qui blesseront la sûreté nationale, la Constitution et les lois ;
2° De tout attentat à la liberté et à la propriété des citoyens ;
3° De toutes dissipations des fonds publics qu'ils auraient faites ou favorisées.
Art. 21. Le mode de l'action en responsabilité, les détails de cette responsabilité, les réparations et les peines qui pourront être prononcées contre les ministres qui manqueraient à leurs devoirs, seront déterminés par une loi particulière.
Art. 22. Dans les cas qui intéresseront la sûreté de l'état ou la personne du roi, le ministre de la justice aura, pour toute l'étendue du royaume, le caractère et l'autorité de juge de paix, en matière de police de sûrèté.
Art. 23. En quelque lieu que les prévenus soient domiciliés, le ministre de la justice pourra, sous sa responsabilité, délivrer un mandat d'amener, et les interroger lorsqu'ils comparaîtront devant lui.
Art. 24. Si les réponses des prévenus laissent subsister des charges annonçant un délit de la natnre de ceux qui doivent être portés à la
haute cour nationale, après avoir délivré un mandat d'arrêt, il dressera l'acte d'accusation, qu'il transmettra sur-le-champ à la législature, si elle est assemblée; si le Corps législatif est en vacance, il fera conduire les prévenus dans la maison d'arrêt, pour y être détenus jusqu'à ce que la législature ait prononcé.
Art. 25. Si, d'après les réponses du prévenu, le délit paraît être un simple délit ordinaire, le ministre de la justice, après avoir délivré son mandat d'arrêt, fera conduire le prévenu dans la maison d'arrêt du district où la poursuite devra être faite, conformément à ce qui a été décrété sur la justice criminelle.
Le ministre de la justice pourra requérir la force publique, pour l'exécution de ses mandats d'amener et d'arrêt.
Art. 26. La loi sur la responsabilité déterminera la nature des réparations qu'on pourra prononcer contre le ministre de la justice abusant de ce pouvoir.
Art. 27. Tous les ministres feront partie du conseil du roi, et il n'y aura point de premier ministre.
Art. 28. Le Corps législatif pourra présenter au roi telles adresses qu'il jugera convenables sur la conduite de ses ministres.
Art. 29. Aucun ministre en place, ou hors de place, ne pourra, pour faits de son administration, être traduit en justice, en matière criminelle, qu'après un décretdu Corps législatif, prononçant qu'il y a lieu à accusation.
Tout ministre contre lequel il sera intervenu un décret du Corps législatif, déclarant qu'il y a lieu à accusation, pourra être poursuivi en dommages et intérêts par les citoyens qui éprouveront une lésion résultant du fait qui aura donné lieu au décret du Corps législatif.
Art. 30. L'action en matière criminelle, ainsi que l'action accessoire en dommages et intérêts, pour faits d'administration d'un ministre hors de place, sera prescrite au bout de deux ans, à l'égard du ministre de la marine et de celui des colonies, et au bout d'un an, à l'égard des autres.
Art. 31. L'acte d'accusation porté par le Corps législatif contre un ministre suspendra celui-ci de ses fonctions.
Art. 32. le traitement des ministres.sera, savoir:
Pour celui des affaires étrangères, de 150,000 livres par année, et pour chacun des autres de 100,000 livres payés par le Trésor public.
Art. 33. Si leur ministère a été de moins de 5 ans, ils auront en retraite une pension de 2,000 livres pour chacune des années qu'ils auront exercé leurs fondions; et quelle qu'en ait été la durée, leur pension de retraite, ne pourra excéder 12,000 livres.
(ci-devantde"Vien®ac).Nous voilà parvenus à un des plus importants travaux, la création de cette partie qu'on appelle le gouvernement, de cette partie difficile et active, qui a souvent survécu seule à la liberté et aux droits des peuples, et qui plus souvent encore les a violemment usurpés quand elle ne pouvait pas les violer insensiblement. Il existe dans le système des grandes sociétés politiques bien organisées quatre grands objets distincts : la patrie, la Constitution, l'administration nationale et le gouvernement. Les peuples asservis n'ont point de patrie, point de Constitution, aucune idée d'administration publique. Chez les peuples libres, au contraire, le nom touchant de la patrie réveille en eux tous les sentiments dignes de l'homme,
et rappelle tous ses droits ; une Constitution politique élève, distribue tous les pouvoirs, protège tous les droits, organise toutes les fonctions et circonscrit toutes les autorités.
Une administration populaire élective, responsable, et dont les instruments sont fréquemment renouvelés, couvre toute la surface du royaume, en vivifie toutes les parties, protège tous les individus, et assure les encouragements à l'agriculture, au commerce, à l'industrie, en appelant les contributions publiques et en maintenant partout la paix et l'exécution des lois.
Que manque-t-ii à un tel état de choses? Ce que nous cherchons aujourd'hui, gouvernement; ce moteur actif qui donne la vie et l'ordre à toutes les fonctions nationales ; cet agent perpétuel qui presse l'action de tous les corps, qui surveille la régularité de leurs mouvements, et qui en arrête et dénonce tous les excès, tous les abus, tous les délits : voilà le ministère, voilà le pouvoir exécutif. Les dangers, les corruptions du ministère sont connus, il faut les éviter: son action constante sur tous les pouvoirs peut les user ou les détruire. Il faut donc une juste mesure à cette action ; il ne participe à l'exercice d'aucun des pouvoirs confiés par le peuple à ses officiers électifs; il faut hieu les en séparer.
Préposé pour réprimer ou dénoncer les abus des divers pouvoirs, la transgression des lois, l'usurpation des fonctions, le ministère peut encore plus imperceptiblement abuser de ces fonctions, usurper les autres pouvoirs et laisser sommeiller les lois i c'est à vous qu'il appartient aujourd'hui de prévoir les inconvénients qui saperaient insensiblement votre Constitution et les droits de la nation. Pour y parvenir, votre comité vous a présenté un long projet de décret qui renferme tout, excepté la loi si nécessaire de la responsabilité, et la nature de l'autorité ministérielle pendant la vacance du Corps législatif, et la grande question de savoir si les ministres peuvent être membres du Corps législatif. Cependant, dans mon opinion, les principes, les règles, le mode et les peines de la responsabilité sont intimement liés au travail actuel. Comment organiser un grand corps sans en voir toutes les parties, sans en mesurer toutes les proportions ? Comment en déterminer les fonctions, si on n'en voit pas les résultats et les ressorts ?
On dira peut-être que, comme il faut agir avant d'être responsable, il faut organiser le corps qui doit agir, avant de régler lé mode et les peines de la responsabilité. Ce n'est là qu'une vaine subtilité facile à résoudre. Vous ne pouvez, vous ne voulez confier aux ministres du pouvoir exécutif que des fonctions dans lesquelles ils Soient responsables des maux qu'ils pourront faire, des violations des lois qu'ils pourront commettre. 11 est donc vrai de dire que, pour organiser et désigner des fonctions, il faut connaître lés fonctions qui peuvent subir le joug de la responsabilité, ou qui peuvent y échapper.
En parlant des droits des ministres, il faut s'occuper de leurs devoirs, et on n'apercevra dans le plan proposé que les droits de 1 autorité des ministres. La loi de la responsabilité nous fera connaître l'étendue de leurs devoirs, et c'est ce qu'il faut montrer à la fois à la nation et aux ministres, pour rassurer l'une et contenir les autres. Je demanderai donc, en premier lieu, que toute la partie du projet de décret qui a trait aux diverses fonctions du ministère soit ajournée jusqu'à ce que le comité ait fait con-
naître son projet de loi sur la responsabilité ; loi qui a plus de rapport qu'on ne pense avec la question de savoir si les ministres peuvent être membres du Corps législatif, et quel sera leur genre de fonctions, leur mesure d'autorité pendant la vacance du Corps législatif? Loin de nous cette manière paresseuse et funeste des travaux partiels quand il s'agit de la partie la plus influente, la plus dangereuse de l'organisation politique. Les Empires n'ont jamais péri que par les usurpations des ministres, et la seule Constitution politique qui existait en Europe avant celle que vous donnez à la France n'a subi des altérations que par l'autorité corrosive et par l'action dévorante du pouvoir exécutif. Il faut donc en embrasser toute l'étendue pour ne pas errer dans les détails ; mais, en prononçant cet ajournement nécessaire, vous pouvez discuter aujourd'hui quelques questions séparées que le plan de votre comité vous présente.
On voudrait élever la question de savoir qui doit nommer et élire les ministres. Il est impossible que cette question vous agite longtemps, surtout dans une Constitution ou le roi nomme seul, même les commissaires du roi. 11 m'a semblé, au premier aperçu, que ce serait isoler la division constitutionnelle des deux grands pouvoirs législatif et exécutif, si, après avoir délégué au roi le dernier, le peuple pouvait exercer le droit d'élection des ministres de ce même pouvoir. Dès que vous avez un chef pour l'exécution des lois, et que ce chef est inviolable, c'est, à lui à élire les bras visibles de son pouvoir ; le peuple a une action sur les instruments du pouvoir exécutif par la,responsabilité.
Donnez au peuple une part dans l'élection des ministres, aussitôt le pouvoir exécutif devient une chimère, et la responsabilité est impossible.
La division des parties ou des départements du ministère peut occuper votre attention. Suivant les uns, le commerce et les colonies ont une grande affinité de principes, une grande réunion d'intérêts. Suivant les autres, la marine et les colonies peuvent présenter des points de réunion, parce que sans colonies point de marine, et sans marine point de colonies ; àt entendre quelques opinions d'hommes éclairés dans la marine, le département de la guerre doit y être réuni. La mer est devenue aussi le théâtre de la guerre, et tout ce qui tient à cet art terrible semble devoir être réuni. Voilà un vaste champ aux discussions, sur la division ou réunion des diverses parties.
Vous examinerez ensuite si les ministres peuvent avoir en aucun cas un autre caractère que celui de ministre, un autre pouvoir que celui qui émane du pouvoir exécutif, et s'ils peuvent, dans aucune circonstance possible, puiser des pouvoirs dans les sources nationales. Sans doute vous circonscrirez dans les fonctions qui leur sont essentiellement transmises, ces hommes qu'une superstition politique environnera longtemps; les commissions extraordinaires dans ce genre furent toujours funestes aux nations qui l'es tolérèrent. Assez vaste est le champ du pouvoir exécutif; assez grand est le nom dont ils couvrent si souvent leurs volontés individuelles pour que l'Assemblée constituante ne permette jamais ni que les ministres soient investis du droit de délivrer 4es mandats d'amener, d'interroger et de dresser l'acte d'accusation, et de requérir à volonté la force publique.
J'ai été, je l'avoue, épouvante autant qu'indigné du pouvoir énorme que le comité a fait pas-
ser sur la tête 'des ministres, et l'idée horrible des lettrés de cachet s'est présentée à mon souvenirs lisant lesartic'es 22, 23,24 et 25.Je doute que l'Assemblée puisse en soutenir là discussion. L'article 28 m'a paru digne de3 honneurs de la question préalable, tant 11 ëst sensible que les droits aliénables et inhérents à des fondions k1* présentatives d'une nation n'ont pas besoin d'être écrits. Comment a-t-on pu dire : Le Cofps législatif pourra présenter au rûi telles adresses qu'il jugera convenables, sur la conduite de ses ministres ? Le conseil naturel du prince, les représentants de la nation n'ont pas besoin que le droit d'adresse soit écrit. On vous a parlé de la nécessité de prévoir et d'arrêter subitement les complots contre la nation et le roi; mais pëhsé-t-on donc qu'une nation libre s'endormira sur des complots qui pourraient menacer ses droits, et que les nombreux fonctionnaires publics seront indifférents à ces dangers?
Je croyais qtiele comité s'occuperait dés moyens qui pourraient déjnuer les complots des ministres contre la liberté publique, et je ne m'attendais pas qu'il leur confierait un pouvoir énorme et effrayant pour arrêter les complots que tous les citoyens et tous les magistrats du peuple sauront biën arrêter dans toutes les p;ihties de 1 Empire. Il a existé dans les siècles les plus barbares; il a été exercé dans les tempà du plus violent despotisme, il n'était écrit que dans le cœur des hommes, et ce droit était ëxércé; Comment l'écrira-t-on aujourd'hui sous le règne de la liberté ? Quant à la prescription des Crimes des ministres, je doute que l'Assemblée nationale imagine jamais de les bornera une ou deux années, et à distinguer des autres citoyens des hommes qu'une certaine opinion bien uu mal éclairée sépare encore trop du reste des hommes. Les crimes ou les délits des ministres sont-ils donc privilégiés, p irce qu'ils sont nationaux, parce qu'ils attaquent les plus grands intérêts? Voilà quelques questions qui pi Uverit être discutées dans ce moment.
Je conclu* donc à rajotirneun nt de la partie du projet relativeaux fonctions des ministres jusqu'à ce que le comité ait présenté un travail complet sur l'organisation du ministère, qui comprenne:!0 le projet de loi sur la responsabilité; 2e la nature de l'autorité qui sera confiée aux ministres pendant la vacance de l'Assemblée nationale ; 3° Son opinion sur la question de savoir si les ministres peuvent être membres du Corps législatif.
fait lëctUre d'qne Opinion rédigée par M. d'Ailly ët que la faiblesse d'organe de ce dernier l'empêche de prononcer lui-même.
Il présente les inconvénients qui s'opposent à la réunion du ministère des finances et de celui de l'intérieur. Au lieu de faire un département particulier des colonies, il propose de le réunir à celui des affaires étrangères, et finit par conclure à l'ajournement du plan du comité.
Ce que nous avons de mieux à faire* c'est d'ordonner l'ajournement dé la discussion.
Il paraît que nous âommês tous de l'avis.de l'ajournement; mais peut-être avec des motifs différents. Le projet du comité de Constitution se réduit à présenter la division des départements; mais avant de répartir les fonctions, ne faudrait-il p&iS les Connaître? Le co-
mité n'aurait-il pas dû nous présenter d'abord la nature des pouvoirs qui seront confiés aux ministres, leur rapport vis-à-vis du roi? Venait ensu t'3 la question de savoir s'ils seraient payés sur la liste civile ou sur le Trésor national.
, rapporteur. Pour l'intérêt de la liberté publique, ce doit être sur le Trésor national.
Je ne donne point la solution de cefe question, je dis seulement qu'elle existe. Après leurs rapports avec le roi, devaient se présenter ceux avec le Corps législatif ; la nature de la responsabilité, et quelles peines y seront affectées-, quelles doivent être, dans l'intérêt des sessions ae la législature, les fonctions attribuées aux ministres, s'ils peuvent être présents à ses délibérations; en quelle qualité et sous quel caractère? Nous ne pouvons pas délibérer une trésorerie dont nous ignorons la nature, avant d'avoir examiné s'il est possible d'établir dos directeurs, ainsi que le propose le comité. C'est une grande question de savoir si la responsabilité peut être divisée. Quant à moi, je ne conçois pas comment on peut établir des hommes maîtres des détails, et rendre ensuite un autre responsable des choses qui n'auront été que le résultat de ces détails. Enfin, après ces diverses opérations est venue la division du ministère et la répartition de son travail. Encore s'élève-t-il la question de savoir si cette division est constitutionnelle; si le Corps législatif, avec la sanction du roi, n'aurait pas le droit de la changer. Après ces divers motifs d'ajournement, je n'examinerai pas le fond du projet; je dirai seulement que le département des colonies ne peut pas occuper un homme, et que quand même on le détacherait, c'est au département du commerce, qu'il faudrait le réunir. Je demande donc que, conformément à la proposition faite par M. Barrère, le travail du comité soit ajourné jusqu'au moment où il sera en état de vous présenter le complément de l'organisation du ministère. Je demande à ajouter une observation; c'est que l'organisation du Trésor public doit ptéréder celle du ministère, et je propose de mettre demain cette question à l'ordre du jou^
Quand finiront donc ces demandes perpétuelles d'ajournement? Dans la nécessité où nous Sommes de presser l'achèvement de la Constitution, elles ne peuvent être que dangereuses. (Murmures dans l'extrémité de la partie gaïiche.) Je trotive que le plan du comité est susceptible de corrections, qu'il doit même être changé dans plusieurs de ses bases ; mais je ne pense pas, pour cela, qu'il faille l'ajourner; car, dans deux mois, nous nous trouverons encore dans la même position et dans le même embarras. On demande la définition du pouvoir des ministres, biais cela est déterminé dans l'organisation judiciaire. Dans vos décrets sur les corps administratifs, cela l'est encore. Il ne faut donc plus que des hommes qui mettent en activité ce qui est décrété pour l'ordre judiciaire et pour les corps administratifs. Quant à la loi sur la responsabilité, c'est une loi pénale, et il me semble que la marche ordinaire est de faire des hommes, avant d'établir des lois pour les punir. Je demande donc que ta discussion soit continuée demain, que l'on n'ajourne pas ët que l'on finisse enfin. (Applaudissements.)
J'aurais eu un grand regret
de ne pas avoir entendu M. Barnave. Il a, pour motif d'ajournement, développé des principes biert étrangers à ceux que je professe; fet il donnera une preuve bien signalée de ses talénts* s'il peut les ailler avec le décret qui place entre les mains du roi lè pouvoir exécutif suprême.
Quoique bien éloigné des principes de M. Barnave, je parviens aux mêmes résultats et je conclus, comme lui, à l'ajournement. Le comité présente à la délibération la division des départements ; s'il est vrai que le pouvoir exécutif suprême réside entre les mains dut roi, c'est à lui à le distribuer dans les mains qu'il croira lés plus habiles. Il me paraît en mêfne temps qu'on â Omis le point extrêmement important de fixer d'une manière claire et précise la responsabilité de ces mêmes ininistres, afin que personne ne puisse pfêtendré à ces places sans avoir pour la chose publique un zèle aussi pur qu'un grand talent. Voilà mes motifs d'ajoum entent; que le comité présente ses vues sur la totalité du ministère ; qu'il distingue ce qui appartient à l'un et à l'autre pouvoir, que les principes soient définis et nous les discuterons alors.
Jecbnclusdônc,avecM.Barnave,àcequé le projet du comité de Constitution lui Soit renvoyé, pour que, dànë le nouveau plan qu'il vous soumettra, il distingue, d'une manière plus claire, ce qui appartient à l'Un et à l'autre pouvoir, et qu'il ne nous expose pas à.délibérer, en enchevêtrant les deux pouvoirs qui doivent être séparés.
Je pense, âVéc M. Le Chapelier, qu'on he peut trop mettre en action le gouvernement; et Comme je né vetil pas qu'on mette en action un autre gouvernement qu'un god-verment responsable, il nie parait hors de doute que le projet de décret actuel, que je ne qualifie pas, que je nè discute pas, ni &u fond, ni dâns la forme, ne peut être traité qu'en Concurrencé avéC un projet de loi sur la responsabilité. Sans donc m'enfoncët dans lâ théorie dès ajournements, sans distinguer même la différence extrême qu'il y â entre un ajournement indéfini et un ajournement prochain, je demande que la discussion ne soit entamée qu'au moment où l'on donnera la loi sur la responsabilité; car nul gouvernement, à ihoins qu'il ne soit tyranniqué, ne peut pas ne pas être responsable..
(Là discussion est fermée.)
Je mets aux Voix l'âjourne-ment dii prbjet de décret.
(L'ajournement est décrété.)
, ûu nom du comité de Constitution. Je demande que l'Assemblée mette à l'ordre du jour dé demain l'organisation du Trésor public.
(Cette motion est décrétée.)
lève là séànce à trois heures.
a la séance de l'assemblée nationale du
OPtNltfN dé M.ÎLasttier de Vanssenay, au comité aagfi&ûltûre et de commerce, SWr VaTticlè du pfôjêt Ûê décret Ûu comité dë Constitution pro-
posant la création d'un ministère spécial des
colonies. (Imprimée par ordre du Comité.)
Messieurs, le comité de Constitution, dans le projet de l'organisation du ministère, propose de faire décréter qu'il y aura un ministre particulier des colonies.
L'intérêt dé lâ France et de sés colonies doit être indivisiblé dans ses rapports commerciaux. Un ministre particulier des colonies deviendrait bientôt étranger au commercé national. Il ne S'occuperait cfUëdé la prospêrité des îles confiées à Son administration, sacrifierait votre culture et vos fabriques, et serait peu jaloux de prévenir la fraude, puisqu'il n'en aurait même pas les moyens.
Le ministre de la marine dépossédé du gouvernement politique et économique des colonies; le ministre de la marine qui a seul en main les forces réprimantes (car la fraude n'y peut arriver que par mer, et être prévenue nar les vais-seâux de l'Etat) se trouverait sans intérêt comme sans récompense, ét laisserait au ministre impuissant des colonies le soin d'une surveillance aussi Importante.
Le ministre des colonies n'aurait ni les moyens d'être averti à temps, ni ceux nui lui seraient nécessaires pour arrêter ou punir la fraude. Il est donc essentiellement nécessaire que le ministre de la mariné conserve l'administration dé vos colonies. Si vous la séparez, le commerce de la métropole est perdu; vos colonies échapperont bientôt à la dépendance, et vous ne pourrez ni les y rappeler, ni, tes y contenir.
II e«t étonnant, Messieurs, que le comité de Constitution n'ait pas connu le piège et ait tranché, sâns vous consulter, sur une question d'aussi grande importance.
Réunissez voâ efforts, Messieurs, pour obtenir qtié l'administration de vos colonie1' soit, comme par lè paSsé, rêùniè à la Marine, sarts quoi vous allez perdrè votre commerce en Amérique,et dans peu Vos colonies.
Signé : Lasnier de Vaussenay.
présidence de m. dé noailles.
Séancê du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Un de MM. tes secrétaires donne lecture du procès-verbal de la séance de samedi au soir* qui est adopté.
Un de MM. les secrétaires lit ensuite : 1° une lettre du procureur syndic du district de Melun, portant que de 125 curés qui composaient ce district, neuf seulement avaient refusé de prêter le serment décrété par l'Assemblée nationale ;
2° Une lettre du président de l'assemblée électorale du département de l'Isère, portant que M.'Pôuchot, ancien curé de Saint-Ferjus, avait été nommé à l'évêché vacant dans ce département,
par le refus qu'avait fait M. Dulau, ci-devant évêque, d'obéir 3 la loi ;
. 3° Une lettre du procureur général syndic du département de la Drôme, por tant que M. François Marbôs, curé du Bourg-le-Valence, avait été nommé évêque en remplacement de Messey, qui avait refusé de prêter le serment ;
4° Une lettre du maire de Paris, portant que la municipalité avait fait le 5 de ce mois, l'adjudication de trois maisons nationales, situées, la première rue Saint-Jacques, louée 1,240 livres, estimée 19,185 livres, adjugée 36,600 livres; la seconde, rue des DeuX-Portes-Saint-Jean, louée 700 livres, estimée 6,600 livres, adjugée 16,600livres; la troisième, rue Geoffroy-L'Asnier, louée 1,200 livres, estimée 18,000 livres, adjugée 32,200 livres ;
5® Une pétition faite par plusieurs receveurs des consignations, près les anciens tribunaux, et adressée .à l'Assemblée pour qu'elle voulût s'occuper de déterminer le mode de leur comptabilité; et en attendant leur remplacement, les continuer dans leurs fonctions.
(Cette pétition est renvoyée au comité de judiGa-ture, pour en faire son rapport incessamment, dans une des séances du soir.)
L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret du comité militaire sur les recrutements, engagements, rengagements et congés (1).
, rapporteur. Messieurs, vous avez précédemment aaopté, dans vos séances des 8 et 10 février dernier:, le litre Ieret lesar-ticles 1 et 2 du titre II du projet de décret qui revient atijourd'hui en discussion. Voici l'article suivant :
Art. 3.
« Les régiments,ci-devant connus sous le nom d'allemands, irlandais et. liégeois, seront seuls autorisés à engager les étrangers. Il leur sera permis néanmoins d'engager des Français; mais il leur sera défendu, sous aucun prétexte, de prendre des déserteurs de régiments français, à moins qu'ils n'aient eu leur amnistie. »
, le jeune. Pour rappeler d'une manière plus précise encore l'amendement que j'ai proposé à la dernière séance, je vais le renouveler.
Je propose que les Suisses soient les seules troupes reconnues étrangères; que les régiments connus aujourd'hui sous le nom de régiments allemands, irlandais et liégeois, soient déclarés troupes nationales et assimilés en tout aux régiments français, et qu'en conséquence lé remplacement des officiers qui ne pourront être qûè français et le recrutement des soldats dans ces régiments se fassent d'après les mêmes règles que dans les régiments Français,et que les fonds assignés aux masses de recrutement soient les mêmes pour tous les régiments.
Il est inutile de dire que les officiers ne seront que des français, puisque vous déclarez ces régiments troupes nationales.
Je trouve d'une bonne politique de tirer des soldats de chez les
étrangers ;
Je vois un troisième avantage ; c'est celui d'enlever à l'étranger des cultivateurs et de nous enrichir de ce qu'ils perdent à cet égard en conservant à notre commerce, à nos arts, à notre agriculture des bras qui cultivent avec succès et qui font fleurir ces différentes branches de la prospérité publique.
, le jeune, Il n'est pas d'une bonne politique de chercher l'avantage d'une nation dans le tort qu'on fait aux autres; en soldant des troupes étrangères, c'est à la France même qu'on fait tort, parce que cette même solde pourrait êt e gagnée par des Français. Il n'est pas vraisemblable, d'ailleurs, que les arts industrieux perdent tous les hommes qui entrent dans les régiments, parce qu'un pays tel que la France multiplie toujours sa population lorsqu'elle a de nouveaux ^mplois pour de nouveaux hommes.
Enfin, s'il est utile en temps de guerre d'avoir des troupes étrangères, rien ne sera plus aisé que de s'en procurer ; nous en avons pour exemple la formation soudaine du régiment des Deux-Ponts qui fut levée en 1756 da,ns un moment pressé et qui servit aussitôt avec distinction.
Je rends justice à la fidélité des troupes étrangères et je reconnais les services qu'elles nous Ont rendus; je ferai remarquer toutefois, qu'en thèse générale, les corps étrangers sont dangereux à la liberté nationale.
En temps de paix, ils sont redoutables à la liberté publique à laquelle ils ne peuvent pas être aussi attachés que les soldats français dont elle est le patrimoine. En temps de guerre, ils ne serviront pas avec plus de fidélité que des soldats enfants d'une patrie à la défense de laquelle ils mettront tout leur courage,! tout leur dévouement.
L'expérience de tous les pays et de tous les temps atteste que les troupes étrangères ont fini par être fatales à la nation qui les soldait. _ J'aperçois toutefois un avantage dans ces régiments étrangers, c'est d'-être un asile toujours ouvert aux déserteurs des autres nations, d'être même un appât qui les attire parce qu'ils ont à la fois le plaisir de changer de pays et de se trouver toujours parmi leurs compatriotes. Mais je trouve cette ruse de guerre peu digne d'une nation à qui l'artifice n'est pas permis, puisqu'elle peut vaincre toujours par le génie et par la force ; et, d'ailleurs, cet ignoble avantage pèse bien peu dans la balance lorsqu'on le pèse avec tous les inconvénients que je viens de signaler.
, rapporteur. J'insiste pour l'a rédaction qre je vous ai proposée; j'admets toutefois la partie de l'amendement de M. de Crillon relative à la première admission des officiers.
Ce n'est point là l'ordre du jour; il ne s'agit pas à présent de la discussion des officiers. Je demande l'ajournement de cette disposition.
Je suis chargé, de la part du comité militaire, de présenter a l'Assemblée le mode d'admission au service et il me parait extrêmement simple; mais l'Assemblée nationale doit être persuadée que le comité militaire ne perdra pas, pour sa propre instruction, le
fil d'une discussion qui a eu lieu à la précédeote séance, qu'il y fera attention pour ce qui regarde les régiments allemands.
Je demande que l'on passe à l'ordre du jour sur la question des officiers.
(L'Assemblée décrète l'ajournement elle renvoi au comité militaire des amendements relatifs aux. emplois des officiers dans les régiments étrangers.)
Monsieur le Président,a-t-on décidé la question de savoir si les régiments allemands, liégeois, irlandais, seront réputés troupes étrangères et formeront une arme à part f
, rapporteur. Dans le procès-verbal du 20 septembre dernier, au matin, il est dit à l'article 14 du titre II sur l'avancement :
« L'infanterie française formera une arme.
« L'infanterie étrangère et suisse formeront chacune une arme.
« Les troupes à cheval indistinctement formeront une seule arme.
« L'artillerie et le génie formeront deux armes différentes. »
Ainsi l'Assemblée a donc prononcé qu'il y aurait une infanterie étrangère.
(L'article 3, présenté par le comité, est décrété.)
, rapporteur, donne lecture des articles suivants :
Art. 4.
Les régiments suisses continueront les opérations de leurs recrutements conformément à leurs usages et à leur capitulation. (Adopté.)
Art. 5.
11 est défendu d'engager, sous aucun prétexte, les déserteurs, le3 vagabonds, les mendiants d'habitude, les gens suspects ou soupçonnés de crimes^ceux poursuivis ou flétris par la justice, ainsi ftiue ceux qui auront été chassés des régi-m ea®T
TITRE III.
DES ENGAGEMENTS.
Art. 1er.
Toutrecruteur sera tenu de déclarer, à l'homme de recrue qu'il veut engager, le nom du régiment et l'espèce de troupe pour laquelle il l'engage. (Adopté.)
Art. 2.
La durée de l'engagement dans toutes les troupes, tant d'infanterie que de cavalerie, dragons, chasseurs et hussards, sera fixée à 8 ans, et ne pourra, sous aucun prétexte, être portée au delà. (Adopté.)
Art. 3.
Le prix des engagements sera déterminé en raison de la taille des hommes, et sera toujours porté en dépense par les recruteurs et par les régiments, tel qu'il aura été payé réellement : il sera divisé en deux parties : l'une, qui pourra être donnée comptant à l'homme qui s'engagera, et l'autre, qui sera toujours réservée pour lui être payée à son arrivée au régiment, et servir à lui fournir tous les effets de petit équipement
qui pourraient lui être nécessaires, ainsi qu'il sera plus particulièrement prescrit par les règlements.
Un membre propose, par amendement, que le maximum du prix des engagements soit fixé à 120 livres.
(Cet amendement est rejeté par la question préalable.)
^ (L'article 3 est décrété.)
Art. 4.
Le recruteur, après avoir pris, sur la conduite, sur l'âge et la probité de l'homme qui se présentera à lui pour s'engager, tous les renseignements nécessaires; après s'être fait représenter tous les certificats dont il pourra être porteur, pour constater son âge et son existence civile; après s'être assuré du consentement de ses père, mère ou tuteur, s'il n'a pas 18 aus; enfin, après avoir fait vérifier dans les formes qui pourront être prescrites par les règlements, qu'il n'a point d'infirmités qui puissent l'empêcher de porter les armes, lui fera signer son engagement. (Adopté.)
Art. 5.
Tout engagement contracté dans l'ivresse, par surprise ou par violence de la part du recruteur, sera déclaré nul à la ratification. (Adopté.)
Art. 6.
Si l'homme de recrue sait écrire, il remplira lui-même l'imprimé de son engagement, en y écrivant de sa main ses noms, demeure, âge, et les sommes convenues avec lui, tant payables comptant, que payables à son arrivée au régiment, lesquelles seront détaillées en toutes lettres; il le datera de même, et Je signera de ses noms de baptême et de famille. (Adopté.)
Art. 7.
Tout engagement qui ne sera pas daté, rempli en toutes lettres, et signé par le recrue, ainsi qu'il est prescrit en l'article précédent, sera déclaré nul ; et pour le rendre valable, si le recrue ne sait pas écrire, il fera sa marque au bas, en présence de deux témoins, par l'un desquels les blancs de l'engagement devront être remplis, et qui devront le signer tous les deux en cette qualité. (Adopté.)
Art. 8.
Ces témoins ne pourront être des militaires, sous peine de nullité de l'engagement; ils seront pris parmi les domiciliés de l'endroit, et il sera fait mention, au bas de leur signature, de leur demeure et de leur qualité. (Adopté.)
Art. 9.
L'engagement, quoique signé, soldé, ne sera valable néanmoins qu'après la ratification faite à la municipalité du lieu, et ainsi qu'il sera dit ci-après. (Adopté.)
Art. 10.
Le recruteur sera tenu de présenter, dans les trois jours, les hommes de recrue qu'il aura engagés, à la municipalité du lieu, pour lui faire ratifier leur engagemènt; cette ratification ne pourra avbir lieu dans la même journée, pendant laquelle l'engagement aura été contracté, ni être remise au delà des trois jours. (Adopté.)
Art. il.
Si l'homme de recrue, au moment de la ratification, réclame contre la validité de son engagement, contre la violence qui aurait pu être employée pour le lui faire contracter, Ou contre son ivresse dont on aurait abusé, la municipalité vérifiera le fait. S'il est grave, elle en fera une information dans les règles ; si cette vérification ou cette information lui font juger indispensable de ne point ratifier l'engagement, elle le refusera; mais elle ne pourra le faire qu'après avoir appelé, pour être témoin des raisons de son refus, le commissaire des guerres, s'il y en à, ou à son défaut un officier, de n'importe quel gradé, soit en activité, soit retiré du service. {Adopté.)
Art. 11.
Si la municipalité croit devoir prononcer la nullité de l'engagement, elle fera restituer én sa présence, au recruteur par le recrue, la sommé stipulée lui avoir été payée comptant, telle qu'elle sera énoncée par son engagement, à moins que ce dernier ne puisse prouver qu'elle ne lui a pas été réellement délivrée. Si au contraire elle Groit devoir procéder à la ratification, elle le fera en présence du recrue et du recruteur, en signant au bas de l'engagement la formule de ratification qui y sera insérée. (Adoptée)
Art. 13.
Si l'homme de recrue, réclamant contre la validité de son engagement susceptible d'être déclaré nul, n'est pas en état de restituer aussitôt les sorhmes qu'il aurait touchées, il sera tenu de fournir caution pour cette sommer dans le délai de trois jours; sinon, après cette époque, son engagement sera déclaré valable et il sera obligé de rejoindre le régiment. (Adopté.)
Art. 14.
Chaque municipalité tiendra un registre de recrutement; elle sera tenue d'y inscrire le ndm de tous les recruteurs de quelque espèce qu'ils soient, qui auraient fait constater par elle leurs droits ou leurs pouvoirs pour recruter, ainsi que tous les engagements présentés par chacun d'eux, qu'elle ratifiera* ou dont elle refusera la ratification ; et, dans ce dernier cas, elle y détaillera les raisons qui l'y auraient déterminée, ainsi que les noms du commissaire des guerres* ou de l'officier appelé pour être témoin de ce refus de ratification, lèquél sera tenu de figurer au registre. (Adopté.)
Art. 15.
Les recrues qui se feront au corps, soit en garnison, soit en route, seront engagés avec les mêmes formalités. La municipalité de la garnison ou du lieu de passage sera chargée des ratifications, et sera tenue aux mêmes inscriptions Sur les registres de recruteménts, que foutes les municipalités devront avoir. Lorsqu'un régimént Sera én routé, les ratifications pourront se faire dans la journée même, si le régiment n'y à pas séjour. (Adopté.)
Art. 16.
Tout hommé de recrue qui, se repentant de S'être engagé, voudrait, avant la ratification, fairé tihnuler sôti engàgerhent, sans dépendant pouvoir àttaqUer Sa validité, pourra y parvenir en por^ tant sa demande au moment à la municipalité. Çelle-ci, mais en présehpè seulement du com-
misSairé des guerres* s'il y en a, ou, à son défaut, d'Un officier, n'importe de quel grade, soit en activité, soit retiré du service, appelé à cet effet, ainsi qu'en la présence du recruteur, en prononcera la résiliation aux conditions prescrites ci-après : « Une fois la ratification consommée, l'homme de recrue, pour faire annuler son enga^-geffient, Sera tenu de se conformer aux disposé tions qui seront prescrites ci-après pour les congés de grâce.
« Il est défendu expressément à tout recrutebr d'annuler les engagements, sous aucun prétexte et pour aucun prix, lorsqu'ils auront été ratifiés. » (Adopté.)
Art. 17.
Tout homme de récrue qui désirera, conformément aux dispositions de l'article précédent, se faire restituer son engagement, pourra le faire en remettant sur-le-champ aii recruteur la somme reçue comptant par lui en s'engageant, et stipulée sur son engagement, et en outre, celle de 24 livres pour indemnité des faux frais du recrutement. En payant par lui ces deux sommes, le recruteur, sous aucun prétexte, ne pourra en exiger davantage, ni se refuser à lui remettre son engagement. (Adopté;)
AU. 18.
La municipalité, en annulant ainsi cet engagement, en fera mention sur sdn registre, et cette mention sera signée par le commissaire des guerres, ou l'officier appelé pour le suppléer, ainsi que par le recruteur. (Adopté.)
Art. 19,
Toutes coilventions portées dans les engage-gements ou faites verbalement, tendant à les annuler, en restituant lés sommes reçues dans un temps fixé, ainsi que toute promesse d'une solde plus forte que celle établie par les décrets, ou d'Un gradé quelconque en arrivant au régiment, sont défendues sous peine de nullité de rengagement. (Adopté.)
Art. 20.
S'il s'élevait des contestations pour raison des engagements, soit èrltre les recruteurs et les hommes engagés, soit entre les recruteurs de différents régiments, les uns et les autres seront tenus de s'adresser à la municipalité, qui jugera de la validité de l'engagement, mais en présence seulement du commissaire des guerres, s'il y en a, ou, à son défaut, d'un officier, n'importe de quel grade, appelé conformément aux dispositions ci-dessus. (Adopté.)
Art. 21.
S'il s'élève quelques difficultés entre les municipalités ét les rëcrutèurs, commissaires des guerres ou officiers appelés pour jugér de la validité des engagements ôtide lehr restitution, les contestations sut i'àppèl dil recruteur, du commissaire des guerres ou de l'officief appelé, Seront portées devant le direotoire du département, qui prononcera définitivemént, mais en présence seu-lechebt du commissaire Ordonnateur du département) ou de ëeltiiquiën fera les fonctions. (Adopté.)
Art. 22^
Les recruteurs ainsi qUe les 'recrues* dont les engagements auront été ratifiés, èéront en conséquence subordonnés pour tout èe qdi pourra intéresser la police ef la disciplipé militaire. (.Adopté.)
Art. 23'. _
Il sera statué par les règlements sur les précautions ultérieures à ordonner soit aux gendarmes nationaux, sôit aux commandants oucom missaires des guerres employés, soit aux régiments mômes, relativement au service des recruteurs et à leur comptabilité, ainsi que relativement aux recrues, à leur envoi, à leur conduite aux régiments, à leur admission ou à leur réjection. (Adopté.)
TITRE IV.
DES RENGAGEMENTS.
Art.1er
Tout sous-officier ou soldat, tant dans l'infanterie que dans les troupes à cheval ou l'artillerie, qui sera reconnu en état de continuer ses services, et qui aura servi de manière à faire désirer de le conserver? séra admis à se rengager de nouveau pour deux ou quatre'ans au plus, c'est-à-dire pour un quart ou demi-engagement de nuit ans, le tout à son choix ; il pourra le faire pour quatre ou huit ans, mais dans le moment seulement où il serait dans le cas d'obtenir son congé absolu.
La demande en sera faite en son nom au conseil d'administration du régiment, qui prononcera en conséqueuce sur l'acceptation ou sur le refus.
Art. S.
Les prix des rengagements seront payables de deux manières» au choix de l'homme rengagé, ou en argent comptant ou en haute-paye pendant toute la durée du rengagement; ils seront les mêmes pour tous les grades ; il sera en conséquence stipulé sur lé certificat de rengagement, si la valeur en a été convenue payable en argent ou en haute-paye.
Art. 3.
Lés prix des rengagements en argent, ainsi que les nautes-payes qui eh seront représentatives, augmenteront progressivement du premier au second, et du second au troisième Rengagement, c'est-à-dire de 8 ans en 8 ans ; le troisième rengagement, qui n'aura lieu qu'après 24 ans dé service révolu, ne sera plus qu'annuel.
Art« 4,
Les tetigagëraêiils, tant en argent comptant qû'én hautes-payes représentatives, serbnt filés pour, toutes leS armes ainsi qu'il suit :
« Savdir :
ARGENT COMPTANTS Infanterie française, étrangère et légère.
« Premier rengagement de 8 ans, 100 francs, sur le pied de 12 1. 10 s. par an. »
« Second rengagement de 3 ans, 130 livres, Bur le pied de 16 L 10 s. par an» »
« Troisième rengagement annuel, 20 livres palan. »
Artillerie, Mineurs, ÔùvHéïs, Cavalerie, Carabiniers.
4« Premier rengagement de 8 ans, 120 livres, misant par an 1d 1. 15 â. »
« Second rengagement, 150 livres, fais^qt par an 18 1. 15 s, »
« Troisième rengagement annuel, 24 livres par an. »
Dragons, Chftsseurs, Hussards.
« Premier rengagement de 8 ans, 110 livres, faisant par an 13 î. 15 s. »
» Second rengagèment de 8 ans, 140 livres, faisant par an 1? L 10 s. »
« troisième rengagement annuel, 21 livres par àh. »
HAUTES-PAYES « Infanterie française, étrangère et légère.
« Premier rengagement* 9 deniers par jour, faisant par an 13 I. 13.s. 9 d. »
« Second rengagement, 1 sou par jour, faisant par an 18 l. S s. »
« Troisième rengagement, 1 s. 6 d. par jour, fàisant par an 27 1. 78. è d». »
Artilleriè, Mineurs, Ouvriers, Cavalerie, Cai'àblnieré.
« Premier rengagement, 11 deniers par jour, faisant par an 16 1. i4 s. 7 d. »
« SéCOrid rengagement, 1 s. 2 d. par jour* faisant 21 1. ,5. ê. 10 d. par am *>
« Troisième rengagement, 1 s. 8 d. par jour, fàisant par an 30 1. 8 â. 4 d. »
Dragons, Chasseurs, Hussards.
« Premier rengagement, 10 deniers par jour, faisant 15 1. 4 s. 2 d. par au. »
« Second rengagement, 1 s. 1 d. paf jour, fàisant 19 1.15 s. 5 d. par an. »
« Troisième rengagement, 1 s. 7 d. par jour, faisant 28 1. 17 s. 11 d. paï an. » (Adopté.)
Art. 5.
i Le montant de ces hautes-payes de rengagement sera cumulé avec la solde de l'homme, pour établir le calcul des grâces dont il pourrait être susceptible pour sa retraite, lorsqu'il les aura préférées aux rengagements payés comp« tant. Ceux qui en auraient touché la valeur de cette dernière manière ne seront point admis à réclamer la cumulation des hautes-payes dont ils auraient pu se trouver susceptibles par leurs rengagements. » (Adopté.)
Art. 6.
« Aucun grade obtenu ne rengagera plus désormais dans aucune arme. Ceux néanmoins qui se trouveraient dans cô cas en exécution de l'ordonnance du 20 juin 1788, concernant le recrutement, resteront assujettis aux rengagements contractés en conséquence, comme ayant rëçu en indemnité le prix stipulé pour ce rengagement par cette ordonnance. » (Adopté.)
Art. 7.
« Dans toutes les armes, excepté dans les régiments suisses, qui conserveront à cet effet les usages de leurs capitulations, les adjudants, les sergents-majors, et sergents dans l'infanterie française, étrangère et légère, ainsi que dans l'artillerie, les mineurs et les ouvriers; les maréchaux des logis en chef, et les maréchaux de§
logis ordinaires dans tontes les troupes à cheval, ne seront plus engagés à compter du jour où ils parviendront à ce grade ; ils seront libres d'abau-donner ces emplois de la même manière que les officiers, moyennant leur démission, mais en prévenant néanmoins trois mois à l'avance.
« En cessant ainsi d'êlre engagés, ils ne seront point tenus de rendre la somme qu'ils auraient pu recevoir pour le rengagement'anticipé qu'ils auraient pu contracter; mais ils cesseront, à compter de ce jour, de jouir de la haute-paye qu'ils auraient pu obtenir à ce titre.
« Les présentes dispositions auront leur effet à compter du jour de la publication du présent décret, en faveur de tous ceux revêtus à préseut de ces grades. » (Adopté.)
Art. 8.
« Tout soldat qui se rengagera, soit dans le même régiment, soit dans un autre, conservera les droits résultant de l'ancienneté de ses premiers services, pour l'acquisition des droits de citoyens actifs, pour la décoration militaire et pour la retraite.
« Dans l'un et l'autre cas, l'intervalle du temps entre le congé et son rengagement ne sera pas compté pour obtenir ces récompenses. »
Un membre propose,par amendement, de décréter que les soldats qui, après avoir servi dans un régiment, s'engageraient dans un autre, perdraient deux ans de service pour parvenir aux récompenses militaires accordées à l'ancienneté.
Un membre propose de réduire à moitié cette perte de service.
Un membre réclame la question préalable sur ces amendements.
(La question préalable est adoptée.)
(L'article 8 est décrété.)
Art. 9.
« Quoique un soldat ayant déjà servi dans un régiment puisse être dans le cas de jouir, dans un autre, des droits conservés par l'article précédent, il ne prendra néanmoins rang dans la compagnie où il entrera, que du jour de son arrivée, et ne pourra parvenir aux hautes-payes qu'à son rang d'ancienneté dans cette compagnie, et au rengagement annuel, que par une suite de services nécessaires à cet effet et non interrompus dans le même régiment.
« Tout soldat sorti d'un régiment, et qui s'y rengagera avant l'expiration de trois mois, y reprendra son rang d'ancienneté, et même son grade, vacance arrivant d'un de ces emplois : passé cette époque, il ne sera plus admis à cette faveur. » (Adopté.)
(La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.)
lève la séance à dix heures.
PRÉSIDENCE DE M. DE N0A1LLES.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier au matin, qui est adopté.
, au nom du comité des pensions.
Messieurs, vous avez chargé votre comité des pensions de vous présenter un projet de décret sur le sort des employés supprimés et sur les moyens de venir à leur secours.
Un grand nombre d'employés, privés de leur place par les changements qui ont été la suite nécessaire de la Révolution, sont réduits à la misère et méritent que la nation vienne à leur secours, soit en les employant à des occupations utiles à l'État, soit en leur assurant des moyens suffisants d'exister en récompense de leurs services. Ils ont sacrifié leur temps et leurs bras pour l'État ; c'est à l'État à distribuer à chacun d'eux les secours auxquels ils ont droit.
Ces secours doivent être calculés sur la qualité et l'étendue des services, sur l'âge et les besoins de ceux qui ont bien mérité.
D'après ces considérations, nous vous proposons le projet de décret suivant :
« L'Assemblée nationale décrète :
Art. ler.
« Que les ministres, ordonnateurs, chefs des ci-devant administrations des provinces et de toutes autres administrations, fermes et régies publiques, seront tenus d'adresser à l'Assemblée nationale, dans le délai d'un mois, l'état nominatif de toutes les personnes employées sous leurs ordres, et payées directement ou indirectement des deniers publics.
« Ledit état contiendra le jour de la naissance des employés, la nature et la durée de leurs services et le montant de leurs appointements.
« Il sera pareillement envoyé par les ministres, ordonnateurs et autres ci-dessus dénommés, des états semblables de toutes les personnes actuellement pensionnées par lesdites administrations, ainsi que dés personnes auxquelles il avait été accordé des emplois à titre de retraite et de récompense de services ; le produit desdits emplois sera évalué dans une des colonnes desdits états.
Art. 2.
« Les états envoyés en exécution du précédent article seront remis aux différents comités réunis des pensions, des contributions publiques, des finances, des domaines, d'agriculture et de commerce, pour en être par eux rendu compte sans délai à l'Assemblée nationale, et lui présenter un projet de décret sur la manière de procurer aux employés les secours que leur état et leurs services peuvent exiger.
Art. 3.
« Pendant le cours de trois années, à compter de la sanction du présent
décret, il ne pourra
Art. 4.
« Jusqu'à ce que les employés compris dans les états qui doivent être dressés en exécution du premier article aient été remplacés, ou qu'il ait été statué définitivement sur les secours qui leur seront accordés, ceux d'entre eux qui ne perçoivent pas au delà de la somme de 50 livres par mois d'appointements fixes continueront à être payés à compter du jour de leur suppression ou ae leur réforme, soit ladite somme de 50 livre?, de toute autre somme inférieure qu'ils percevaient précédemment.
« Ceux dont les appointements fixes excédaient la somme de 50 livres toucheront jusqu'à concurrence de ladite somme de 50 livres par chaque mois, le tout provisoirement sans tirer à conséquence pour l'avenir, et sans que lesdits payements puissent se prolonger au aelàdu 1er juillet sans un nouveau décret de l'Assemblée.
Art. 5.
« Les payements décrétés par le précédent article seront faits par les receveurs de districts, au moyen des fonds qui leur seront fournis par le Trésor public sur des états présentés par les ordonnateurs, chefs ou directeurs d'administration, visés par les districts et par les départements.
Art. 6.
« Le présent décret sera porté à la sanction dans le jour, et le roi sera supplié d'en ordonner l'exécution la. plus prompte de la part de ses ministres et de celle de tous ordonnateurs, administrateurs ou régisseurs. »
Tout en rendant hommage aux vues de bienfaisance du comité, je trouve qu'il ne va pas assez loin. Je crois, Messieurs, et c'est une idée que j'ose vous'soumettre; je crois qu'il serait à propos de donner un effet rétroactif à la la loi qu'on vous propose; autrement beaucoup de pères de famille, beaucoup d'honnêtes serviteurs dans les fermes générales—et certainement il y en avait — resteraient sans place, car dans tous les nouveaux établissements, on a mis de côté tous les anciens commis, quoiqu'ils eussent des prétentiohs incontestables au remplacement.
Je demande donc, Messieurs, qu'on donne à la loi un effet rétroactif qui remonte jusqu'à l'éta- ~ blissement des impôts, pour partir de cette époque et placer dans les branches diverses de la nouvelle administration tous les employés qui ont été déplacés, et qu'ils soient choisis préféra-blement à tous autres qui sont étrangers à l'ancienne administration.
(de Saint-Jean-d' Angély). Deux raisons principales me font combattre l'amendement du préopinant.
La première, c'est que la justice que l'on doit à des individus ne peut jamais justifier l'injustice commise envers d'autres. Les individus placés ont fait des dépenses dans leur nouveau poste ; leur installation leur a occasionné des frais : vous ne pourriez donc les déplacer sans injustice.
La seconde raison, c'est que le succès de l'établissement du contrôle dépend absolument des personnes qui sont préposées au recouvrement des droits dans de3 pays où ils sont inconnus et où l'emploi d'étrangers les rendrait peut-être intolérables. En Alsace, par exemple, l'adoption de la motion de M. Bouche causerait les plus grandes commotions. C'est par des employés du pays que les droits nouveaux se sont établis ; c'est par le moyen de ces mêmes hommes qu'ils pourront être affermis. Les employés des différentes parties du royaume ne pourraient pas être envoyés en Alsace, car il faudrait qu'ils connussent la langue, et vous ne pouvez pas apprendre la langue à vos commis des aides en trois jours.
Je désirerais que ce qu'on vous propose pût s'effectuer; mais, comme cela est impossible, je demande la question préalable.
Ma motion n'est que provisoire ; lorsqu'il sera question du définitif, je ferai connaître mon opinion.
Les observations de M. Regnaud sont très dignes de considération ; mais je ne pense pas qu'il faille mettre la question préalable sur la motion de M. Bouche. Je demande qu'elle soit renvoyée aux comités des finances et des pensions. Tout le monde est-il de cet avis ?
Un grand nombre de membres : Oui ! oui !
(L'Assemblée décrète le renvoi de la motion de M. Bouche aux comités des finances et des pensions.)
Je demande la question préalable sur le projet du comité.
, rapporteur. Je crois que la dépense résultant du projet de décret sera considérable; car il peut y avoir 10 à 15,000 employés qui, au 1er avril ou au 10P mai, se trouveront sans aucun emploi. Toutes ces personnes, sans doute, ne méritent pas d'avoir 600 livres de pension par an, ni même, à titre de pension, les appointements inférieurs à la somme de 600 livres dont elles jouissaient; mais il n'est pas possible de réduire à la mendicité des personnes que vous supprimez et dont vous avez besoin encore pour des droits qu'ils reçoivent.
(Le projet de décret du comité est décrété.)
Messieurs, vous avez décrété au mois de janvier que la procédure commencée contre les personnes arrêtées à Aix et à Marseille serait continuée devant le tribunal d'Arles et cèpendant qu'il serait sursis à tout jugement. Il est résulté, à ce qu'on dit, de cette procédure qu'il n'y a pas de charges contre la plupart des accusés qui, en conséquence, ont présenté requête en élargissement provisoire devant le tribunal .
Le tribunal a prétendu, nonobstant les conclusions du commissaire du roi, que le décret de l'Assemblée les empêchait d'élargir provisoirement.
Il est important pour l'humanité que les tribunaux puissent élargir provisoirement ceux contre lesquels il n'y a pas de charges; il n'est pas juste que des hommes que Ja calomnie a fait suspecter et arrêter dans un mouvement populaire, restent emprisonnés lorsqu'il n'y a aucune accusation contre eux.
Je propose donc le décret suivant :
« L'Assemblée nationale déclare que, par le décret qui ordonne que les procédures prises à Aix, Marseille et Toulon, pour crimes de lèse-nation, lui seront envoyées, et que cependant il sera sursis à tout jugement, elle n'a pas entendu que les tribunaux, pussent refuser de statuer sur les requêtes des accusés, même sur les requêtes en élargissement provisoire. »
(Ce décret est adopté.)
Messieurs, les commis avaient consenti à faire une caisse composée de sommes ptises sur leurs appointements pour subvenir aux besoins de ceux d'entre eux que leur vieillesse ou leurs infirmités avaient mis hors de service. Ils se sont apérçus qu'on avait porté sur leur compte des personnes, qui ne devaient pas y être. Ils vous demandent actuellement la permission de se pourvoir par devant les tribunaux pour se faire remettre les sommes.
(L'Assemblée décrète l'ordre du jour.)
Je suis chargé également de vous faire le rapport de la pétition des invalides qui vous a été envoyée. Je n'ai pu prendre sur moi de vous donner mon avis là-dessus, parce que l'esprit est si fort monté, dans ces quartiers-là, que ces gens seraient capables de se lâiher contre celui qui leur aurait donné un conseil salutaire. (Rires.)
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
J'ai demandé la parole pour présenter à l'Assemblée nationale l'arrêté du district de Berlues, département du Nord, qui paraît mériter singulièrement l'attention de l'Assemblée. Pour avoir la clef de cet arrêté , il faut savoir que Bergues était ci-devant dans le diocèse d'Ypres. Voici l'arrêté ?
« Le sieur Jean-Baptiste Legrand, curé de Saint-Martin-de-Bergues, s'est avisé de publier au prône, le dimanche 27 dudit mois de février, un mandement de l'évêque d'Ypres, pour le règlement du carême prochain. La municipalité,ayant eu communication de cette publication, a résolu de faire appeler ledit sieur curé de Saint-Martin, pour prendre des informations à ce sujet; lequel ayant comparu a déclaré ne connaître, pour le présent, d'autre évêque diocésain que celui d'Ypres; que lui ayant demandé si l'évêque de Cambrai n'était point notre évêque diocésain, en conformité des décrets de l'Assemblée nationale, il a fait réponse que l'Assemblée nationale ne pouvait pas nous donner d'évêque légitime, que son décret à cet égard était une loi abusive, et que ceux qui ne connaissent pas leur évêque légitime sont dans le schisme.
« Considérant que les dispositions de l'article 4 du titre Ier du décret de l'Assemblée nationale du 12 juillet 179Q, pour la constitution civile du clergé, sanctionné par le roi, par lequel il est défendu à toutes églises et paroisses de France et à tous citoyens français, de reconnaître, dans aucun cas et sous quelque prétexte que ce soit, l'autorité d'un évêque ordinaire ou métropolitain dont le siège serait établi sous la domination d'une puissance étrangère, ni celle de ses délégués résidant en France et ailleurs, le sieur curé de Saint-Martin a eu la coupable audace de publier le mandement fait à l'occasion du prochain carême par l'évêque d'Ypres, son ci-devant évêque, tandis que la loi lui ordonne de ne reconnaître pour son évêque que celui qui siège à Cambrai pour le département du Nord, dans l'é-
tendue duquel se trouve la ville de Bergues; considérant que cette illégale publication n'a pu être fajte qu'avec la plus criminelle intention d'ébranler h s bases les plus solides de notre admirable Constitution, et de transmettre dans l'es* prit du peuple le mépris dont son auteur aveugle et insensé paraît être profondément pénétré, envers les lois qui ne tendent qu'à assurer l'exécution du dogme, à faire triompher la religion, et à opérer le bonheur et la gloire de l'Empire français: arrête que les dénonciations seront faites, tant à l'Assemblée nationale qu'au directoire du département, des faits dont ledit sieur curé est prévenu; en conséquence, que copie du procès-verbal ci-dessus sera envoyé à l'instant à M. le président de l'Assemblée nationale et au directoire du département du Nord, pour être pris en considération, et prononcé ce que de droit. »
Messieurs, la nécessité de donner un grand exemple à cette partie de l'E m pire dans laquelle le sieur curé de Bergues a trouvé beaucoup d'imitateurs et en trouvera encore davantage si l'on n'y pourvoit promptement, imposé a l'Assemblée le devoir de prendre de deux partis l'un, pu renvoyer à ses comités l'arrêté, dont j'ai eu l'honneur de vous faire lecture, pour lui en être fait rapport incessamment, ou d'adopter un projet de décret tel que celui-ci :
« L'Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu de l'arrêté pris par le diiectoire du district de Bergues, du 2 de ce mois, d'après le procès-verbal dressé par la municipalité de la même ville, le 28 février précédent, au sujet de la publication faite par le sieur Legrand, curé de la paroisse de Saint-Martin de ladite ville, d'un mandement de l'évêque d'Ypres, ci-devant diocésain du lieu ;
« Décrète que le président se retirera dans le jour par devers le roi, pour prier Sa Majesté de donner ordre au tribunal du district de Bergue?, séant à Dunkerque, d'informer contre le sieur Legrand, pour le procès lui être fait, comme prévenu d'avoir troublé l'ordre public.
* Décrète en outre que le ministre de la justice sera tenu de renure compte à l'Assemblée nationale, de huitaine en huitaine, de l'exécution du présent décret. »
Plusieurs membres : C'est juste l Aux voix ! aux voixl
(L'Assemblée adopte le décret.)
Les alarmes plus ou moins fondées qui ge répandent sur les frontières m'obligent de vous présenter encore un autre projet de décret dont la seule lecture vous fera sentir la nécessité. Le voici ;
« L'Assemblée nationale décrète que le ministre de la guerre lui rendra compte, et que ses comités militaire, diplomatique et des recherches lui feront, dans la semaine, le rapport de la situation actuelle des forc s militaires du royaume, de l'exécution qui a dû être donnée à ses décrets du 28 janvier dernier, ainsi que des mesures uk térieures qu'il pourrait y avoir lieu de prendre pour la défense de l'Etat. »
(Ce décret est adopié.)
(de Saint-Jean-d'Angély). Je demande également qu'on ajoute à celte première disposition la disposition suivante t
« L'Assemblée nationale décrète, en outre, que le ministre de la guerre lui rendra compte de l'état où se trouve l'organisation de la gendar-
merie nationale, et de ce que les corps administratifs, d'après les ordres du roi, ont fait pour mettre en action cette partie de la force publique, comme aussi que le même ministre rendra compte de ce qu'il a dû faire pour organiser l'armée auxiliaire, dont l'Assemblée a ordonné la formation. »
(Ce décret est adopté.)
Et moi je prie l'Assemblée d'ordonner à son comité d'agriculture et du commerce de lui faire incessamment son rapport sur les frais de régie nécessaires pour mettre en activité les employés des domaines ; car il y a lieu de croire que lorsque ces employés seront établis sur les frontières, ils suffiront à eux seuls pour repousser l'armée du ci-devant prince de Gondé.
Je dois faire observer à l'Assemblée, malgré ia très agréable plaisanterie du préopinant, que ces bruits d'invasion d'une prétendue armée ennemie ne laissent pas que d'occasionner des alarmes sur les frontières, et de retarder la vente des domaines nationaux, même d'en diminuer le produit. Dans te département du Nord, les biens nationaux se sont vendus a très haut prix et maintenant le prix baisse tous les jours.
Je demande que vous vous occupiez très incessamment de cet objet.
(La motion de M. Rœderer est décrétée,)
Je crois ne pas devoir différer de vous donner lecture d'une lettre que je viens de recevoir dans le moment. La voici :
c Monsieur le Président, ï
« J'ai l'honneur de vous envoyer copie du bulletin du roi.
« Je suis avec respect, etc....
'* Signé : AmédÈE de Durfort, ci-devant duc de Duras; »
Bulletin du roi.
« Depuis vendredi dernier, le rot s'est senti atteint d'un catarrhe, avec des mouvements de frisson et de fièvre; elle s'est déclarée plus manifestement dimanche matin. La lapgue chargée et le dégoût annonçaient des humeurs dans les premières voies que plusieurs digestions troublées devaient faire soupçonner. On a donné un vomitif dont l'effet a été facile et favorable; néanmoins la toux, l'enrouement et la fièvre ont continué. Ge matin les mêmes symptômes subsistent; le rbi a toussé fréquemment pendant ia nuit et a eu fort peu de sommeil.
« Signé : Le Monnier, La Servolle, Vicq-Azir, Andouillé. »
Je fais la motion que l'Assemblée députe vers le roi pour s'informer de sa santé.
(Cette motion est décrétée.)
On demande que la députation aille tous les matins cbez le roi jusqu'à son rétablissement et rende compte tous les jours de la santé de Sa Majesté à l'ouverture de ia séance ; ce sera le moyen de la rendre* complète.
(Cette motion est décrétée à l'unanimité.)
^'Assemblée nomme comme membres de la députation MM. l'abbé Massieu, évêque de Beauvais,
de Folleville, de La Roque-Moos, Darnaudat, Ulry et Maréchal.
, au nom du comité d'imposition. Messieurs, je viens vous présenter plusieurs articles additionnels au projet de décret sur la vente du sel et du tabac dont vous avez décrété samedi les trois premiers articles (1).
Nous avons considéré que, tant qu'il y aurait des entrepôts de sel et de tabac ou ne pourrait pas obtenir de li ferme générale la liquidation de ses comptes. Nous avons pensé qu'il était extrêmement important pour le Trésor public, pour vos finances mêmes, que les comptes de la ferme générale soient incessamment liquidés, attendu que, par vos précédents décrets, vous payez l'intérêt à cinq pour cent à toutes les compagnies de finances, et à compter du premier janvier dernier, pour tous les fonds d'avance qu'elles ont versés dans les coffres du roi. Relativement au tabac, il est évident que le moment actuel est celui où vous pouvez vendre aux conditions les plus avantageuses, parce que, dans un an, il y aura plus de concurrence dans les vendeurs,
Une autre raison encore, Messieurs, c'est que vous avez cette annéedes besoins urgents, et qu'il est à peu près démontré, du moins à votre comité d'imposition qu'il serait impossible d'ajouter de nouveaux impôts, sans employer les moyens dont vous avez eu le bonheur de vous préserver jusqu'à présent.
Voici les articles que nous proposons:
Art. 4. Les fabriques de tabac dépendant de la ferme générale avec les ustensiles nécessaires à leurs exploitations, et les tabacs en fabrication à l'époque de l'inventaire seront laissés à bail au plus offrant et dernier enchérisseur ipar adjudication séparée et par les directoires de dis^-trict.
« Les salines de Lorraine et de Franche-Comté seront aussi laissées à bail au plus offrant et dernier enchérisseur.
Les comités d'imposition, des finances et des domaines réunis proposeront incessamment à l'Assemblée les conditions des baux et les modes d'adjudication. ,.
'Art. 5. Les salines, marais salants et magasins dépendant de leur exploitation seront vendus comme les domaines nationaux. Les redevances en sel pourront être rachetées.
« Seront aussi vendus les magasins, entrepôts, bâtiments, maisons dépendant de la ferme générale, et-ne servant point à l'exploitation des fabriques des salines mentionnées en l'article 2 ou à l'exploitation des droits de traite.
« Les baux de ceux qui sont teuus à bail seront résiliés, et le comité des finances proposera le moyen de pourvoir aux demandes des propriétaires s'il y a lieu.
« Art. 6. Immédiatement après la promulgation du présent décret, les
directoires de dis-, trict, sur la surveillance des directoires de
département, mettront en vente, au plus offrant et dernier enchérisseur,
après deux affiches et publications faites deux dimanches consécutifs
dans toutes les municipalités de leur ressort, tes tabacs en feuilles et
manufacturés qui se trouveront dans les entrepôts, magasins et bureaux
dépendant de la ferme générale ; ils mettront pareillement en vente les
sels autres que ceux existant dans les salines de Lorraine et de
Franche-Comté.
Le prix sera, Messieurs, celui auquel revient le sel.
.....« Les directoires de district vendront pareillement les chevaux, patache, bateaux, meubles et ustensiles de toute espèce dépendant de l'exploitation dont il s'agit, et autres que ceux réservés par l'ariicle 4. »
(La discussion est ouverte sur ce projet de décret.)
Un membre demande l'ajournement des dispositions relatives au sel.
(Cet ajournement est décrété.)
Dans l'article 1er, vous laissez à bail les tabacs en fabrication. J'ai de la peine à comprendre comment on peut laisser à bail une marchandise qui se consommera, à moins que vous ne vouliez vous en faire rendre la même quantité à la tin du bail.
Il faut donc dire que le tabac qui sera en adjudication à l'époque de l'entrée en jouissance du fermier lui sera vendu, outre le prix de son bail.
Il faut dire que les tabacs seront vendus à ceux à qui on adjugera le bail.
, rapporteur. Je propose d'écarter de l'article ce qui concerne les tabacs en fabrication, parce que cela fait une disposition séparée et je me réduirai à dire :
« Les fabriques de tabac dépendant de la ferme générale, avec tous les ustensiles nécessaires à leur exploitation, seront séparément données à bail par le directoire du district dans lequel chacune d'elles sera située ».
(Cette rédaction est décrétée.)
Le public est instruit qu'il y a des spéculations sur le tabac qui ne sont pas étrangèies à quelques membres de l'Assemblée. Je n'inculpe personne; je dis ce que j'ai ouï dire. Je demande donc que le minimum du prix du tabac soit fixé à 27 sols.
Je demande que l'on ne vende pas le tabac par quintal, mais par partie de vingt-cinq livres.
Cela ferait tort aux patentes. Si vous vendez en détail, vous ne pourrez plu3 trouver de personnes qui prennent des patentes pour vendre au détail.
, rapporteur. Voici, Messieurs, d'après les observations qui viennent d'être faites et adoptées par l'Assemblée, quelle serait la rédaction des articles que nous vous proposons :
Art. 4.
« Les fabriques de tabac dépendant de la ferme générale, avec tous les ustensiles nécessaires à leur exploitation, seront séparément données à bail par le directoire du district dans lequel chacune d'elles sera située.
« Les comités de l'imposition, des finances et des domaines proposeront incessamment à l'Assemblée les modes des adjudications et les conditions des baux.
Art. 5.
« Immédiatement après la promulgation du présent décret, les directoires de district, sous ta surveillance des directoires de département, mettront en vente au plus offrant et dernier enchérisseur, après deux affiches et publications faites, deux dimanches consécutifs, dans toutes les municipalités de leur ressort, les tabacs en feuille et manufacturés qui se trouveront dans les fabriques, entrepôts, magasins et bureaux dépendant de la ferme générale.
Art. 6.
« Le tabac fabriqué sera vendu par quintal ; le tabac en feuille par millier. Le tabac fabriqué ne pourra être adjugé à un prix moindre que 35 sous la livre ; le tabac en feuille à moins de 12 sous ».
(Ces articles sont décrétés.)
, au nom du comité de judicature.
Messieurs, le comité de judicature me charge de vous prévenir qu'il vient de terminer son travail sur leremboursement des officiers ministériels et de vous prier de vous occuper prompte-ment de cet objet.
(L'Assemblée décrète que la discussion aura lieu samedi prochain.)
L'ordre du jour est la discussion du projet de décret sur l'organisation du Trésor public.
, au nom du comité des finances. Messieurs, votre comité des finances vous a présenté un projet de décret sur l'organisation du Trésor public, concerté avec le comité de Constitution, quant aux principes (1). Le comité de l'imposition vous a présenté d'autres vues presque contradictoires (2). Avaut de relire le projet de décret que vous a soumis votre comité des finances, il faut d'abord dire quelque chose sur le système du comité de l'imposition : il nous a porté sur un sol nouveau, où tout a paru étranger et à la Constitution que vous avez décrétée, et à ce que nous a révélé l'expérience d'une grande nation.
Je n'examinerai pas, avec le comité d'imposition, si une nation peut
exister sans finances. Partout où il existe des propriétés, une
agriculture, une industrie, des arts et du commerce, il faut qu'on
apporte dans les dépenses une police pour en maintenir la prospérité et
l'harmonie, ae3 tribunaux pour en régler les intérêts, une
administration pour en faciliter les mouvements. Rien de tout cela
n'existe sans finances. La finance est le mobile qui met en jeu tous les
ressorts, qui donne l'activité à toutes les parties du gouvernement, qui
entretient dans tout et l'action et la vie. Comment donc et sous quel
rapport serait-elle étrangère à la Constitution, elle sans laquelle il
n'y aurait point de Constitution? La force militaire lui serait donc
étrangère aussi, car on a vu (les peuples où le citoyen était soldat,
Que l'établissement de l'impôt, que les règles qui en déterminent la mesure et la perception, soient ou non le résultat d'une convention sociale, qu'importe cette question métaphysique ; je vois toujours, dans ces actes de la volonté générale, une volonté constante dans ses principes, invariable dans ses applications.
Dans le système de notre Constitution, les impôts directs sont dans les mains de la nation jusqu'au Trésor public; les impôts indirects sont sous la surveillance delà nation jusqu'à ce même Trésor public. Les uns et les autres versés dans le Trésor public y restent encore sous la surveillance des représentants de la nation et ne peuvent en sortir qu'avec les précautions et les formes prescrites par vos décrets. Il n'y aurait donc à craindre que lorsque les fonds livrés aux agents du pouvoir exécuiif pour frayer aux dépenses, n'ont plus d'autres garants que Ja responsabilité ; mais il faut céder à la nécessité des choses; et le comité d'imposition en convient dans ce cas.
Si vous vous mêlez de l'administration, si les ordonnateurs des finances, si les directeurs des registres sont vos agents immédiats, sont nommés par vous, quel sera le refuge du peuple contre l'oppression, contre leurs dissipations? Il croira, ce peuple, que vous êtes leurs protecteurs et leurs complices, et dans sa fureur il frappera également, et sur les instruments fidèles, et sur le pouvoir qui aura mal choisi. Vous ne serez point comme les rois défendus par l'opinion. Les rois sont si loin des autres hommes ! Il y a tant de nuages entre eux et la vérité ! On leur pardonne l'erreur de leurs choix.
Mais vous, les lumières vousenvironnentetvous frappent de tous côtés : vous avez tous les moyens de vous instruire. Si vous avez mal choisi, on croira, ouon feindra de croire que vousavez voulu choisir mal. Et quel est, en matière d'administration, le choix qui soit généralement approuvé? Quel est le choix qui puisse être approuvé longtemps ?Quel est l'ordonnateur qui ne soitpas suspect ? Quel estle régisseur qui ne soit pas accusé ? Tous ces soupçons, toutes ces accusations retomberont sur vous et sur la Constitution. La Constitution sera décriée dans toutes ses parties, parce que vous en aurez méconnu les priucipes dans un seul. La nation égarée abandonnera uné législation qui aura trompé ses vœux et ses espérances.
Entre le pouvoir exécutif et le vôtre, croyez-vous qu'il puisse existerune harmonie véritable? Nous connaîtrions bien mal les hommes, si. nous étions assez aveugles pour nous le persuader. La jalousie observera le cours de votre administration; mais elle ne l'observera que pour en accuser les erreurs et les écarts. Les secours de l'autorité ne seront jamais assez prompts pour arrêter lemal : ils n'arriveront qu'au moment précis où il faudra pour que le mal soit fait, et que cependant la faute tout entière n'en soit pas imputée aux administrateurs.
Ajoutez les intrigues dont la législature s'environnera. Ne pouvant pas choisir dans son sein, elle ne connaîtra pas ceux qui mériteraient son choix, mais elle ne nommera pas. Ce ne sera point à la législature, ce ne sera point au roi : à qui donc avons-nous le droit de déléguer cette fonction importante? Quelle autre branche peut-on introduire dans la Constitution?
Je sais que, dans quelques ouvrages, on a nommé le département de Pari s ; j'ose croire qu'une pareille
proposition ne sera avancée ni par l'Assemblée quien sentira l'inconvénient et le danger, ni par la France entière, qui ne verrait pas sans indignation ses délégués déléguer à leur tour, et une section de l'Empire devenir la souveraine de toutes les sections. C'est au roi de nommer l'ordonnateur qui doit ordonner le versement des caisses particulières dans la caisse nationale, et delà distribution de la caisse nationale dans les canaux subordonnés.
Je crois qu'avant de lire les articles de détail, il serait nécessaire de présenter des idées générales, et j'observe d'abord que l'intérêt de Ja discussion vient moins de la nécessité de conserveries propriétés nationales que decette considération, que dans le maniement des finances repose tout à la fois et la splendeur de l'Etat et le germe de sa corruption. Il est donc utile d'examiner quelles seront les mains entré lesquelles seront versés les deniers publics. Il faut suivre les contributions depuis le moment où elles seront consenties par les législatures, jusqu'à celui où les deniers publics auront acquitté toutes les dépenses de l'Etat.
Je ne pense pas que le travail du comité des finances soit assee étendu; il ne présente que l'organisation particulière et intérieure du Trésor public. Il semble que le comité d'imposition a eu des vues plus vastes. Il est remonté au principe : il part du point où l'impôt est déterminé par la législature, avec la simple acceptation du roi. Vient ensuite la féconde idée qui confie l'impôt pour sa répartition aux corps administratifs, leur correspondance avec la législature se fait par l'intermédiaire des ministres. Il faut donc que les ministres soient responsables. Cette marche me paraît simple. L'impôt une fois arrivé au percepteur est versé dans la caisse du trésorier du district, et ensuite dans la caisse nationale. Vous aurez des administrateurs de cette caisse qui n'auront d'autres fonctions que de presser la perception; ils seront tenus de présenter tous les mois un état de leur situation avec leurs correspondants.
La question qui se présente la première est cellede, savoir si les administrateurs de la caisse nationale seront nommés par le roi, ainsi que le propose le comité des finances, ou bien s'ils seront nommés d'une manière quelconque par la nation.
Avant de discuter qui nommera des administrateurs, je demande que l'on décide s'il y en aura. Car si on ne voulait qu'un caissier, on se déciderait peut-être plus facilement sur la manière dont il devrait être nommé.
Il faut expliquer nettement si nous appelons administrateur celui qui délivre une ordonnance sur le Trésor public, ou bien si l'on veut parler de ceux qui n'auront qu'à ouvrir la caisse pour en distraire les deniers. Je demande donc que l'on décide d'abord s'il y aura une ou plusieurs personnes occupées à délivrer des mandats sur le Trésor national, et si la garde en sera confiée à un ou à plusieurs.
Le comité de l'imposition a senti que ia nation ne pouvait pas abandonner ses fonds à un trésor purement royal, et en conséquence il a proposé d'en déférer la surveillance à des membres du Corps législatif. Je demande donc que l'on réduise la question à ces termes : A qui
a|Jpartiëllt-il, de la hâtioh otl du roi, d'êiërcer 1b suprême administration ën matiêi'èdeflndbces?
JefcdhViènsquë les administrateurs dti TréSof publiti doivent être surveillés ët que i'état des recettes ël des dépenses du Trésor public ddit 6ire publié chaque mois ; maië le CorpSJêgisv latif tlë peut, sans sortir de ses fonctions ël Stif-ttibt Ëâtis violer ouvertement les principes Ino-narchiquesquel'Assemblée-nationale aCOnsâiiïëg", se transformer en un corps d'électeurs, introduire dans son Sein lès intrigues les plus dapgërêUâës.
La proposition du comité de l'imposition étant itiàdmiéSibie, je demande que l'on paSse â rbrdre dti jour sûr Soû projet.
(de Sàint-jeàn-d'Ahgély). Lâ dis-Ctissioti a besoin d'être éclaircië ; j'en demande lajoùr dément.
J'appuie la proposition faite par M; de Bèaumetz, et je pense que l'on doit suivre l'ordre de discussion qu'il a proposé. L'Assemblée a décrété qu'aucun membre de l'Assemblée nationale ne pourrait être appelé au ministère pendant la durée des sessions; et cependant la proposition du comité d'imposition n'est autre chose qu'un degré ad ministère.
Si l'Assemblée nationale yeut traiter les grandes questions qu'offrent à sa délibération les countés dés finances ët d'imposition* dans l'ordre le plus naturel, il me semble qu'elle doit commencer par. déterminer Quelles seront les fonctions de i ordonnateur du Trésor pubïio; quelles seront celles de ses surveillants; ensuite s'il doit y avoir un OU plusieurs administrateurs ou surveillants; si ces administrateurs ou surveillants seront nommés par l'Assemblée nationale ôu par le roi. Je pense que voilà la manière la plus claire de discuter i
t Je demande que l'on mette en question par oui ou par non, si les ordonnateurs seront nommés par ie roi ou par le Corps législatif*
Vous avez à prononcer aujourd'hui y en dépit de cetix qui mettent une si grande précipitation, sur la plus grande question qui puisse s'élever, sur l'administration des finances.
Plusieurs membres demandent l'ajournement de la discussion;
Si mon avis avait prévalu dans cette Assemblée, on aurait donné au roi plus de pouvoirs qu'il n'en a; ainsi je né suis pas suspect, lorsque je pense qu'il faut écarter de lui tout ce qui pourrait mettre en ses mains des moyens de séduction* C'est pour oela que je regarde la question comme n'étant pas assez éclair-oie, et que jé demande l'ajournement i
(L'Assemblée renvoie la suite de la discussion à demain 0
, au nom du comité de liquidation. Messieurs, votre comité de liquidation voit son existence menacée d'une influence dangereuse; il réclame contre une décision que vous avez portée, le 3 de ce mois, au commencement de la séance : elle renverse tout le système de vos travaux en finance, et ne peut être qu'une surprise
faite à votre Sâgesêe. Cette dêfcisl&h est ainsi concile i
« L'Assemblée nationale décrète» qu'à compter de ce jour, le directeur général de la liquidation portera ttitis lëfc rapports relatifs â la liquidation des différentes parties de la dette publique remboursable, pensions, brevets de retenuè, décomptes des pensions et autres Objets Compris dans les différents décrets précédemment rendus sur la liquidation de la dette remboursable, au comité centrale dë la direction dé liquidation; qiie sur ces rapports le comité centrai rendra compte à l'Assemblée de tous lés Objets qu'il jtiget'a n'être SusdèptibleS d'atiëutieS difficultés} qu'à l'égard dë cëuX qui seront jtigéS susceptibles dë difficultés, le comité centrai les renverra aux comités respectifs qu'ils regardent, pour y être examinés, et .ensuite portés à l'ASsëmblée. »
VoUs àVit'a eu l'intention de distribuer les liquidations âui comités dont les tràVabx étàietit analogues aux objets qu'il fallait liquider. Pdf la dé^ cisiott du 3 &arS vous avëfc détruit cette sage diS-* position pour confier la liquidation à tin comité qu'elle ne devrait pas concerner. L'Assemblée a-t-elle entendu supprimer tous Ses comités, pour remettre sa confiahce ehtière à celUi-là SeulV C'est sur cette question que vous âVez à statuer^
Dans la persuasion que l'Assemblée n'a pais ëU cette intention à l'égard du Comité de liquidation, nous vous proposons de décréter ce qui Suit :
« L'Assemblée hatidnële excepte le comité de liquidation des dispositions cohtehdeS dans son décret réglementaire du 3 dë Ce mois; ët lé direcj teur général delà liquidation continuera de rendre compté directement à ce comité de ses vérifications sur l'arriéré des départements et les indëm-1 nités. »
Pltt$ieiirs membres : La question préalable!
L'Assemblée nationale admettra la mbtiofi préalable; mais le Cdmité lui donnera sa démission.-
Voilà un grand malheur I
(dé Saint-Jetxh-d* Ahgêly). Pouf appuyer là question préalable, jë représenterai Seulement l'embarras pdiir la formé, et lë pfèjti-dice qu'il y atifàit pouf l'Etat à revenir sur la dééiSibn du 3 mars. Il y a des objets arriérés, Soit pour les fournisseurs, soit pour les ouvriers, qh'fctn ëèul bomrrië pedt juger â la première inspëctiôn. Ûiiaht atii ôbjëtS qui présentent dës difficultés, lë Comité Cëntrâl de litJUidatiôh n'à pas vdUItt s'en emparër, ils seront renvoyés aux autres Comités.
On a cru qué là disposition que VOUS âVëz décrétée lë 3 ttiâfs tiponerslit plus d'activité aUX liquidations. L'autorité dë celui qui Vous l'a présentée...
Un membre i QU'est-ce que c'est que l'aUtoritê?
(de Stzint-Jeén-d'Angêly), Je n'entends pas par autorité, puissancej mais j'entends l'autorité attachée à la connaissance d'un homme et de ses Opinions, ët je érois qu'en fait de surveillance et dë rigueur, M. Camus en Vaut bien ùfi autre: (Applaudissements.')
: il est inutile d'insister sur l'importance de l'objet soumis à votre délibération. Ceux qui savent à Qiiôi monte la dette, ceux qui sè
sdUViënfledt deë dllëpitlâtidis dë l'âhciëii Régime, cetii qiii ôrit àppflsqUë dë pféteridhs ërédribiers, repoussés autrefois par des ministres bien faeilèS, se présentent aujourd'hui à votre comité de liquidation, fcërititdtit cbmbien il êst ittttioftâut de confier la surveillàribë dë£ liquidations a tîil gland nëtnbrë tl'individds étr&tigëfs ëlix iûtërêts qu'Us doivent surVéillër. La tigtiéllf tiës jjrincijiëS du comité a effrayé les banquiers, une ligue s'est forrnéë ; ëllë àvait poUif but ë'ëflgiiiet' l'ÀfeSetamée à briVe? ëë ëdthité de së êëfiHaMë, ët à lui ôtëtf une surveillance trop active, pour ne pas é^ayet le génie spéculateur de ces Messieurs. Voidi les moyëns qd'bh a employés jjbut1 pàHëhir à ce btlt :
Od Vous a proposé de crëëi1 un Bureau delitjui-datlbil, et vous aaccepté cêltë pPopoéllibil. On voué a pÉojjoSé de créëF fihë êbmtnisâidn composée dè deux iherhbreS pris datns ëhaqtie comité, et Vous aVëz àccepté Cette prbpbSitibh. On à chargé fcëtlë commission de l'Organisation du butëâu ue liquidation: Unë section entière dë cè coittité s'est glissée daùs ceite commission ët S'eât emparée de la ïâajorité. (Applaudissements.)
Plusieurs rûetkbrés. Voilà lè fait.
Quand lë bdheàd tië llquidâlltJn a été Organisé, lâ CotnmiSsioh dëvait ilhir. pUiS^ qii'elle avait rëthpll son objet. Mais ôd à proposé de l'ihVëstir de nohveabx pduVdirs i cette codlmissioii ëst dêvënue un ëômité centràlde direction de liquidatiori.ét ainsi le comité d'organisation est parvenu à son but, en empêchant la âurVeillance du comité dë liquidation, et sans dotitë M. Gathiis afait prévu quë cela serait aitisi, lorsqu'un jour, après la iecture du procês-vëtbal, il Vous présenta urie réclâmaiiod du nioihs très équivoque de Monsieur d'Orlëaiis, ën Vous disacft qu'elle n'était pas mèmé litigieuse.
L'ÂsfeembléeHationàië, par uri instinct dë prd-bité qui l'a tarënient trompée (Ori applaudit), a renvoyé fcëtte réclamation ah comité de liquidation ; et qiiànd on vous fetà lë ràppdrt dë cette affâirè, vous vërFeé qde l'ëxtrêmë rigôbisine d$ M. Camus s'était extrêmement refroidi; (Biruli.)
C'est un hdnhête hothine, Qdoi quë Vous en disiez.
s'interpellent avec Violencé ah milieil du brUit.
Monsieur le Président, je vous dénonce M. Camus qui a l'insolence de m'inSul-ter à la tribune.
(Le silence se rétablit peu à peu.)
On vous a donné pour motif de la décision du 3 mars, la nécessité d'àceélérer les liquidations ; mais deux sortes d'affaires seront portées au comité central; Celles qui pourront être liquidées sans difficultés et celles qui seront jugées susceptibles de difficultés. IL faudra donc d'abord que le comité leS examine toutës; c'est après ce premier examen qu'il renverra àu comité pour examiner de nouveau ; ainsi il faudra faire un dobfaië t|aVâil, 'è\ éè doublé travail n'accélérera rien; u'amëulS, dû fie pérstiâdera point â l'Assënibléé qde zu pëlîSbrtheS iront plus vitë qUë 150, Surtout Sic'eë 150 Sont divisées eh plusieurs comités auxc|helk le travail sera distribué divisé-ment et dans lâ partie qui les concerne respectivement. ïi n'y âuraitdonc qii'uné seule hypothèse
4ui pdUrrâit phëséhtër plufe dë rapidité, 6Jest ftani lë Câs dû le cdmité éehtràl Serait très, fatJilé à rëgàhdéf Ctlmifle liqbides Sahs difficulté dés dbjëts qui donhet-aièdt lieu â dë £rahdëS côdtëstàtionë.
11 sdlt de toht cë c}Uë je Vieris dë VdUs présëfi-tèr, qu'ulië êëctidn dti cdihitë Ufes ftnallbeS a mânœuVI'ê âvëe Mbilëtë, pouf Se sàisii' dë la liquidation que l'Assemblée lui iefusàit, tJUë bat cë nouvëad rflddé lës liquidations sërbnt Mar-dées ; quë lës autres Comités cbritlàltront uniquè-ment les affairés qUë lé coctiitë d'organisation daignefâ lëlir rëfiVdyër. Ënfifa, cjhe vdtis tfestrëitt-drez à peu d'individus Uhe shrVèillsthee dui nê saurait êtrë ttop êtëndue, qUattd lë T^ésof pubiib est attâdué dë tbulës pàrtë. L'AS^eniblée cfoirà sans ddiilë deVoii4 fairë jiàrticibe^ lë plus gfàtid hombrê dÔ sëS mëthbfës â ses IhyfetèreS fitian-fiers, sihdh H ëst aisé dë préVdif quë lësàniiiëh-tiés dilapidatidhs se feddhVellefont, et ddë t'As-sëmblée aurâ là ddUlëUr et la hdtUë de voir le Trésor publié dëvehir là "fltdlë dë Cëâ narpieà ttnahclères qui èeihblènt déjà së l'êtrëpâi'iâgé. Jë finirai en rappelant la maxime d'un dès plus grands hommes d'Etat, de Machiavel: Peu sont corrompus par pèU.
Je conclus donc à ce. que la surveillance et l'eianien dë la liquidâtibn dë là détfë iSiiblltjue soiétit renVdyés aux diVërS comités. éhàcUn dâns lâ partie qui le èonceftië. (ÀpplduUisseitiènts.)
Jë dêfëhdrai la dédiâlon dti â itlàtà âVëC tràntjdillitè, pahce qdé les imputations du prëopinant fie ^ëdveht àtlë.lhdi'e çertaitiS membres de cette Assëtilblée. [kiféS'à df'ôïiû; âpplàu-dissefnents à gaUch'é.) Je lâ défëndrii âvëc Cdli-rage, pafcë quë jë l'ai présdhtée avëc confiafice, non coihme mph ouvrage, Ihàiè cotiihlè feeitii de tous lëk comités l-éhdis, j'en dois exCëptër le cdmité dë liquidation.
Il y a quàtorze mois qu'il ëst étstnli, et il hb VdUs a fait d'aUlrë râpport qdë Ifêllii des ëàUX Perriëi* ; et il y à ad ptfocêâ-Vërbal un décret qui rënvoie Ce râpport au ëdinité dés rapports^ âlic qu'dn vbus fasse conn<rë commëtlt Udçdniltéô puexigër du fbihistre titi âîrêt du Conseil^ séâhci tenante, potlr faire arrôtëb toutes les cautions dë la compagnie des ëâdx. C'eSt stlr mon 'âoïfcïide-ment qd'oti a réfjdUSSê lâ pHsë à pdrtie dii Comité de iicididatioh, ët qu'on lui a permis de sè réunir â ëëllii des rapports. Votis âVez vu les assignats së créer, lâ câisSe de l'extraordinaire së fëiiiplif, ét des ^ëhS qU'oti hë pâvàit pas èlêVér de toutës bâ^ts des r'eclàtnâtions. VouS avez préposé uri ndmifiè fësppnsàble p'diir Veriper lës fâits, et accélêrët' âinSi le tràvâil, eh obtenant une fespdhé^bilité que vos co nitës ne pouvaient vous olfrir; Voila le pifemiét- fâit qu'on a appelé lë premier anneau d'Une chaîné dë rpanœuvres; Je Uë dOuië pas que VouS n'établissiez aujourd'hui là liquidation géhôMlê, ài elle U'ëtàit pas étàblie. Alors plusieurs liquidations vous ont été pféâëntêes, Celle deS brëvëts de retenuë, êellë des charges de judicaturë... . On s'est plaint que des"îournisseurs, que des ouvrlël'S lié pd'uVaieht ëlré payés, uri à deihândq un projet de décret au comité de liquidation. En bien, il ne vous a point encore fait de rapport, et vous laissez ltO-thilliôhâ dans lâ caisse de l'extraordinàirë, sânS lës ëmfjldjfër, èt Voûs pér-dez 700,000 livres d'intérêts nar ipois. Tels sont lés ffldtifâ de lâ décision qUé j ai dû vous proposer le 3 de ce mois, et qu il était impossible que l'Assemblée n'accueillît poinjk Vous^ avez senti qu'il était convehablé de distinguer les objets
qui ne demandaient qu'une simple vérification de ceux qui demandaient un long eXamen. Vous avez chargé de ce travail un comité composé de 24 personnes prises dans les autres comités. Nous avons toujours admis à délibérer avec nous tous ceux de nos collègues qui ont voulu s'unir à nous. Ainsi l'intention du comité n'a jamais été de cacher ses opérations.
Vous savez que le salut public dépend de l'aliénation des domaines nationaux ; il dépend également de la baisse de l'intérêt de l'argent. En effet, quand l'intérêt aura baissé, on remboursera avec un très grand avantage une multitude de dettes qui portent des intérêts très grevants. Voilà ce qu'_on a parfaitement senti: voilà ce qui avait d'abord déterminé certaines personnes à s'opposer à l'émission des assignats ; voilà ce qui les a portées, après cette émission décrétée, à rechercher toutes les mesures propres à faire écouler lentement les assignats, à retarder h vente des biens nationaux, à reporter à un temps fort éloigné la baisse de l'intérêt. (Applaudissements.)
Plusieurs membres : Voilà le fin mot.
Je ne présente que des,faits. Il y a 170 millions dans la caisse de l'extraordinaire, et dans l'espace de 14 mois le comité de liquidation ne vous a pas fait un seul rapport sur l'arriéré des départements. Voilà comment ou entassera assignats sur assignats, voilà comment on fera manquer l'aliénation des domaines nationaux. (Applaudissements.) J'ajoute un fait. Il y a cinq mois que je vous présentai le rapport des reprises à faire par le Trésor public, ces reprises s'élèvent à 80 millions ; la rentrée de la moitié au moins dè cette somme est certaine. Sur une proposition, vous avez ordonné le renvoi au comité de liquidation. Je demande combien, depuis cinq mois, les soins de ce comité ont fait rentrer, non de millions mais de cent pistoles.
C'est dans cette position que les différents comités réunis ont arrêté la mesure que vous avez adoptée. Nous avons écrit au liquidateur général pour lui demander pourquoi rien de l'arriéré des départements n'est payé à la caisse de l'extraordinaire : il a répondu que rien ne se faisait au comité, qu'il avait envoyé des états pour 16 millions, que deux jours après on lui en avait renvoyé la plus grande partie en lui disant que ces objets ne regardaien t pas ie comité. Cette réponse seule devait déterminer la disposition qu'on attaque et dont l'utihjé est incontestable. Nous avons voulu empêcher les assignats de s'entasser dans la caisse de l'extraordinaire. Nous avons voulu que leur sortie pût devenir prompte et rapide, afin d'assurer la vente des biens nationaux. Voilà notre but : il estévident, il se remplit, et le succès de notre travail justifiera nos intentions. Mais ont-elles besoin d'être justifiées quand c'est M. de Cazalès qui les attaque? (Applaudissements.)
Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée..
Il est impossible... _ (L'Assemblée ferme la discussion.)
Plusieurs membres: Aux voix la question préalable!
Plusieurs
membres du comité de liquidation qui m'entourent demandent eux-mêmes la question préalable.
Il est impossible qu'un comité inculpé ne puisse pas se justifier.
(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la motion de M. de Batz.)
fait lecture d'une lettre des administrateurs du département des Vosges :
Il y est dit :
« M. Chàumont, évêque de Saint-Dié, disent les administrateurs, ayant refusé de prêter le serment prescrit par la loi, les électeurs du département des Vosges se sont rassemblés pour procéder à son remplacement; l'esprit de concorde, des sentiments patriotiques et l'amour de la religion ont dirigé leurs suffrages; leur choix.S'est fixé sur Jean-Antoine Maudru, curé de la paroisse d'Aydoiles, dans le district de Bruyères.
« Cet ecclésiastique, membre de l'Assemblée nationale, joint à des vertus qui l'honorent, des lumières suffisante * pour remplir les obligations que lui impose la dignité épiscopale; mais ce qui le distingue surtout, c'est un attachement inaltérable aux principes de la Constitution, dont il s'est constamment montré le défensèur. Sa,nomination a généralement été applaudie, et il y a lieu de croire qu'il inspirera la confiance que l'on doit attendre d'un évêque, appelé, par la voix du peuple, au gouvernement spirituel du département.
« Le directoire du département a vu le choix avéc beaucoup de satisfaction ; mais il a été particulièrement touché du patriotisme qui anime tous les électeurs de ce département, où l'amour de la Constitution fait chaque jour ne nouveaux progrès. Nous protestons de ne négliger aucun des moyens propres à environner cet évêque constitutionnel de la considération et de l'autorité qui doivent accompagner ses premiers pas dans une carrière où l'on ne manquera pas de lui opposer beaucoup d'obstacles. » (Applaudissements.)
La même lettre annonce que les sept-huitièmes des ecclésiastiques fonctionnaires publics du département des Vosges ont prêté le serment. (Applaudissements.)
lève la séance à deux heures et demie.
PRÉSIDENCE DE M. DE NOAILLES.
Séance du
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
, évêque de Beauvais. La députation que vous avez chargée de se rendre
auprès du roi, pour s'informer de l'état dé sa santé, y est allée à 6
heures ; elle n'a pu voir le roi, parce qu'il reposait ; mais un
officier du châ-
Messieurs, voici le bulletin du roi pour ce matin :
« Mercredi 9 mars, 8 heures du matin.
« La fièvre, la toux âcre et les autres symptômes du catarrhe ont continué hier jusqu'à quatre heures après midi. Dans cet intervalle, le roi a craché trois fois du ?ang; les évacuations ont été bilieuses, brunes et glaireuses, les Urines rares et foncées. Le redoublement a commencé à 8 heures, par une augmentation d'enrouement et de chaleur à la gorge. La nuit a été souvent interrompue par la toux; les autres symptômes sont un peu diminués.
Signé : Le Monnier, La Servolle, Vicq-Azir, An-douillé, Loustaneau, Amédée Dur-fort, ci-devant duc de Duras. »
Messieurs, la députation allant le soir cbez le roi et le bulletin nous parvenant tous les matins; nous aurons deux fois par jour des nouvelles de la santé de Sa Majesté. (Applaudissements.)
, député du Finistère, demande un congé d'un mois.
(Ce congé est accordé.)
Messieurs, les ennemis du bien public avaient youlu profiter du d éçret sur les com-munautés d'arts et métiers pour exciter des troubles funestes à la liberté, dans la ville de Nancy; mais la municipalité qui est extrêmement patriote, par son influence^ a ramené l'ordre.
L'arrêté suivant en est une preuve sensible :
« Les perruquiers anciens et modernes de la ci-devant communauté de Nancy, instruits que la plus grande partie de leurs confrères, aveugles instruments de la fureur des hommes, se permettent les démarches les moins excusables contre le décret bienfaisant des jurandes et des communautés d'arts et métiers, qui va ramener l'industrie languissante et rétablir une classe nombreuse de citoyens, délaissée jusqu'alors, dans le droit le plus imprescriptible des propriétés, persuadés qu'il est du devoir de tous bons Français de témoigner hautement leur indignation, déclarent qu'ils ne se laisseront aller à aucune sédition contraire à la fidélité qu'ils ont jurée à la nation, à la loi et au roi, et qu'ils ne seront point ébranlés par les pertes les plus sensibles, s'en rapportant tout à fait à la sagesse des législateurs de l'Empire français sur l'indemnité qu'ils attendent pour la perte de leur état et dont ils . n'hésiteraient pas de-faire le sacrifice à la pairie, s'il était nécessaire à son salut et si leurs moyens répondaient à leur dévouement envers elle.
« En conséquence, ils protestent contre les menées coupables pratiquées par leurs 6onfrères pour engager dans leur insurrection les autres corps et communautés d'arts et métiers, et surtout contre le choix illégal et incivique qu'ils ont fait par décision du 28, de deux commissaires chargés de répandre leurs sentiments séditieux dans les différentes corporations de cette cité.
« Copie de la présente sera' remise sur le bu-
reau de la municipalité, pour être déposée en ses greffes.
« Signé, collationné, etc. »
Je vais informer l'Assemblée de nouvelles agréables. Voici une lettre du procureur syndic ae Vannes, dont je vais vous donner lecture:
« Vannes, le 5 mars 1791. « Après vous avoir si souvent entretenu de nouvelles et de détails affligeants, je n'ai qu'un , instant pour vous apprendre une agréable nouvelle en vous priant de la transmettre à nos législateurs.
« Nous venons de procéder à la vente de plusieurs biens. M. Perrier, commandant de la gardé nationale, est resté adjudicataire de deux objets, l'un de 7,600 livres, l'autre de 11,975 livres. Un quart d'heure après cette adjudication, M. Perrier est rentré et a remis au directoire de district un acte par lequel il abandonne les fonds et autres dépendances des bois par lui acquis, aux femmes et enfants de nos malheureux laboureurs qui, séduits, trompés et égarés par le fanatisnqé et les artifices des perfides ennemis du bien public, ont perdu la vie.dans la triste journée du 13 janvier dernier ; et le donateur charge le directoire de Vannes de faire la distribution de ces biens.
« Puisse cet acte civique et religieux faire entrer en eux-mêmes les cruels ennemis de la Révolution et les porter enfin à cesser leurs inutiles et coupables efforts. »
M. Perrier, né en Dauphiné, porte un nom déjà célèbre dans cette province, par de3 actes de patriotisme et de bienfaisance; c'est le chef de cette famille qui prêta son château de Vizille, en 1788, pour la fameuse assemblée qui s'y est tenue, acte de civisme qui était bien courageux à cette époque.
Je demande qu'il soit fait mention honorable dans le procès-verbal des faits contenus dans la lettre du procureur syndic du district de Vannes.
Je demande que M. le Président soit chargé d'écrire une lettre de satisfaction à M. Perrier.
(L'Assemblée décrète les motions de MM. de, Delley et Lavie.)
donne lecture d'une lettre de Mme de Coaslin, qui réclame contre une omission qu'elle prétend avoir été faite dans'le décret du 12 décembre dernier, qui la concerne nominativement.
(L'Assemblée décrète le renvoi de cette lettre aux comités de liquidation, d'aliénation et des pensions.)
, au nom du comité de Constitution, fait un rapport sur des pétitions de divers départements et communes et propose le projet de décret suivant :'
« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution sur les pétitions des départements de la Haute-Vienne, de l'Ariège, de Seine-et-Oise, du Nord, de dllle-ei-Vilaine, de Mayenne et Loire, des communes d'Agde, de Serignan, et de Gruissan décrète ce qui suit :
« 11 sera établi des tribunaux de commerce dans les villes de Limoges,'Bayeux, Pamiers et Louhans.
« La juridiction consulaire actuellement existante Limoges, continuera ses fqijctioqf jusqu'à l'électÎQn et l'insipllfqjpp des nouveaux jur ges, gui sepont faitps dàpg la'fpymp pre§Grj|;e par là loi de l'organisation judiciaire.
« Il sera nommé un troisième juge de paix dans le canton de Dunkerque, et un quatrième an$ celui de fytqntapbçn-
Celui dp Vitré aura deqx juges de ppix. t Il en sera nqfpmé uq p@qr le bourg de Çoq-flangTS^ini^Hppprjnt'f '
« Les municipalités des hameaux de Çppi^-Vprte pt (je J'Iler^epvç gggf êttRBTlflftéëf r®u~ pies à celle de Mflpijjïi
(t u sera établi t)ps juridictions de prudhommeg npur Ips çommupautë§ des P^îrpps pêcheurs de§ villes et ppfP} d'Âgde,' ^fign^p et 6rjii§san, Jesqiipllès cQmjpiinaùtés, tapj: qçs pite^ei^ nationaux, qpp qes 'p^cheqrs GatalanS, gf gqùyefr npron£ çelqn [es [pis, statuts et règlements qqj jsont ep usage ji ^rseille, CQefor$.èmppt aq décret'du 8 décembre (Ce décret est adopté,)
, au nayi du, çom\t$ des çle-: vnaines. Messjeprs, le |5 janviepdern'er, YQHs avez chargé votre comité des domaines de yoiis présenter un prpjet de décret §ur les taxes des Officiers des maîtrises?.
Le comité des domaines s'est occupé de cette affaire avec beaucoup cie maturité et dé réflexion*.
11 a pensé que votre décret du 15 janviër ne peut concerner que les opgratiops oui aurqnt lieu en'1791'et non pas cpjles' qï|i obt eu lieu en 1790. Cette déclaration est d'autant plus nécessaire que quelques grands maîtres refusent avep ràjsqn, jùsq^à ce que vous vous soyez exnliqpés. Bè procéder à aucune taxé en éxécutipn du «Jécrei 15 janvier dernier.
Én conséquence, voici le projet de décret que
vous prpqospns : « L'Assemblée nationale, ouï Je rapport de son ppmité des (lqmainès, cf^cj^e qpp, par spq décret du 15 janvièr dernier, elle n'âpaç entendu arrêter ni suspendre la taxe et le payement des salaires et vacations des officiers des maîtrises pour les opérations faites dans le cours de l'an-r née 1790; qu'en conséquence, ladite taxe continuera d'être faite en laforipp et d'après les Règlements qui ont été suivis jusqu'^ ce jPP?t. fjMftf à statuer, lors de l'organisation de la nouvelle administration forestière, sur la taxe des opérations qui se trouveront avoir été faites en 17$1. » (Ce décret est adopté.)
Messieurs, vous avez décrété, le
12 juin dernier, que tout corps partiqqUpr de milice bourgeoise, d'arquebusiers et autres, spus toute dénomination, seront tenus de s'iqpQrpqrer dans la garde nationale, sous l'uniforme de la nation ; vous avez détruit par Ge décret toutes les compagnies de milice bourgeoise,
Il s'est élevé des discussions à Valeneiennes parmi les membres des ci-devant compagnies bourgeoises et leurs créanciers ; les malveillants cherchent à tirer parti des plus petites cliascfl, Pour éviter les suites funestes dp ces inquiétudes, je propose de décréter t
1» Que les syndics et comptables des ci-devant compagnies de milice hourgeoise supprimées par le décret du 12 juin dernier sèrout tenus dâ
fournir leprs comptes de gestiqns aux piumqi-palités, lesquelles les vérifieront, et fornRgront 1 état général des jettes actives et passives de chaque corporation, )esqpë]$ états seront envoyés aux qirpctpires des district^ des départements qui, appès vérification faite, lps feront passer au commissaire du roi chargé de la liquidation de la dette publique ;
'2° Que les fonds existants dans Ips c&issgs desdites ci-devant compagnies de milice bourgeoise seront versés dans la caisse de district, qpi en tiendra compte g. celle de l'extraordinaire.
Que les propriétés, soft mobilières, soit immo* bilières, desdites compagnies, vendues dans la forme prescrite pour l'aliénation des biens nfr-tionaux, et le produit desdites ventes sera versé pareillement dans la caisse de l'extraordinaire.
Je demande la question préalable.
J'observe que ces compagnies bourgeoises étaient très légalement existantes, car elles ont obfènu des lettres patentés.
{de Sçint-Jean-d'Ajigély). Ces compagnies ont des dettes qu'il faut payer, puisqu'elles sont supprimées,
Il serait injuste que la nation se mêlât de s'approprier les fonds des sociétés particulières formées pour le plaisir ou Rbur lïnsr truction, et qu'elle ne liquidât pas leqrs dettes. Que l'Assemblée se donne donc la peiné de payer les deites que pourraient faire les clubs.
Je soutiens que la nation p§ peut pas se charger de leUF$ biens ni de leurs dettes* car il est impossible que vous l'embarrassiez de toptps les sociétés qui existent dans le royaume.
Je demande la quesiipp préalable sur (a, motion de M. Perdry, à la charge que, s'il y a un deçrej; qui dit que les biens des sociétés appartiennent â la natiqn,' ce décret soit rapport, parpe que c'est un mauvais décret.
Je retire mon projet de déPfet.
Il ne dépend pas du préopinant de retirer sa mption; je la soutiens, afin qu'on y applique la question préalable.
Un grand nombre de membres : L'prdrp du jpur | l'ordre du jour! (L'Assemblée décrète Tordre du jouF»)
, député du Clermontois, annonce que tous les curés du district de Clermontr-en-Argonne, département de la Meuse, à l'exception de 8, ont prêté le serment, nonobstant les mandements et écrits incendiaires qui put circulé, avec autant de profusion que de scandale, dans lps ci-devant diocèses de Reims et de Verdun, et qu'il a été procédé les 27 et 28 février dernier au remplacement de ces 9 fonctionr naires publics, et de deqx autres curés décédés dans le courant de 1790.
, au nom du comité de Constitution. Messieurs, je viens vous proposer un article additionnel au décret sur l'ordre judiciaire. Cet article est uniquement relatif au département de Paris ; il est sollicité par le ministre delà justice et par les 6 présidents des tribunaux. Le voici
« L'Assemblée nationale décrète ce qui suit : « Les adjudications d?imme|ibles et dp baux judiciaires, sqit en exécution des arrêts, jugements et sentences des ci-deyant pours, tribunaux et juridictions de Paris, même des commissions établies en ladite ville; soit en vertu des jugements qui ont été ou seront rendus* par la suite dans les 6 tribunaux d'arrondissement, ne ront faites en justice, dans tout le département de Paris, qu'à la seule audience des Griées, établie par la loi du 9 février dernier : cette audience sera tenue, aux jours et heures accoutumés, par un des juges de chacun des 6 tribunaux, alternativement de mois en mois, et ledit juge scel? lera provisoirement les lettres de ratification ; les enchères continueront en poqséquence d'être déposées entre les mains des greffiers nommés par ladite loi du 9 février dernier, pt publiées par les huissiers de ladite audience des criées, qui sont dépositaires des doubles des enchères ; dans laquelle audience sera aussi exposé le tableau des contrats et autres titres d'acquisition des immeubles situés dans le département de Paris. » (Ce décret est adopté.)
L'ordre du joqr est la suite de la diçcussfp.p, du projet dç décret sur pgrgaKiisatiorf, du Trésor public (J).
, rapporteur. Messieurs, je crois qu'il faut circonscrire la discussion que nous allons continuer. Ce n'est pas la constitution générale du ministère des finances quia été renvoyée à votre cpmitédes finances ; c'est l'organisation pure et simple du Trésor public. Or, le Trésor publie est une caisse qui reçoit Tés contributions publiques, qù elles restent déposées, d'où elles se distribuent dans les différents départements; ensuite il faut èn rendre compté.
C'est donc ce dépôt dans le Trésor public, la distribution dans le département., et enfin la comptabilité, qui constituent l'organisation duTré-sor public dans tous ces objets. Je ne vois ici qu'Une seule question constitutionnelle, la vpici : La gestion du Trésor de la nation se fera-t-elle sous la direction immédiate dupouvojr exécutif, ou se ferà-t*elle sous la direction du pouvoir national £ C'est à céijte question qu'il faut rappeler toutes les autres.
J'indique Ici'ies principales dispositions dudé-pret, afin que l'Assemblée connaisse ce sur quoi porte la discussion :
« Il continuera d'y avoir un ordonnateur général du Trésor public', nommé par le roi.
« Ses fonctions sqropt, sous les orc^rès du roi, de diriger le yersement dans le Trésor public des contributions directés oil indirectes, et des revenus qui lui seront assignés; de diriger l'administration du Trésor public, de régler la distribution des fonds et les divers départements et les diverses parties des dépenses, Suivant les mesures déterminées par lè pouvoir législatif, et en proportion dés besoins de faire terminer les comptes arriérés et de faire mettre en règle les comptes courants. " « Il sera établi un comité d'administration des finances composé du 'ministre de la justice, du ministre de l'intérieur et de l'ordonnateur général dp Trésor pujjlic.
«f II sera nommé par l'Assemblée nationale et successivement par chaque législature des commissaires pour surveiller l'administration et la Comptabilité du Trésor public. '
, ci-devant de Villeneuve, Messieurs, votre comité des finances noqs propose par son projet (le faire revivre un ministre absolu des finances, sous le titre modeste ^ordonnateur du Trésor public; si yops ayp,z lu pyep attention pè projet, vous ave? dfy être effrayé de l'étenidlue et dè'la délicatesse des fonctions qup l'on ponfile a cet ordonnateur. Seulement, Messieurs, Pfir un article de ce projptt on le soumet à une prétendue surveillance qui : eu eilérmème, serait certainement plus dapgereusé qu'utile à la chose publique. - '
Cette surveillance, telle qu'elle nous est proposée, rietipptjrjsqt à autre chose qu'à légitimer les erreurs, {ps malversations (Je cet ordonnateur public, à mettre çet orilqpnateur public hors de. la respops'aKlité/fles sjiryejliants Seraient nommés par )'Assem&!ée nationale, et ce serait le Corps législatif lui-même qui deviendrait en quelque sorte responsable aux yeux de la nation de toutes les prévarications qui pourraient' se commettre par le ministre des finances, ce qui certes n'est j>as admissible.
Une idée fort simple s'est présentée à tous les esprits, et elfe dérivait de la nature des choses. Il y a le Trésor royal et le Trésor publie.* D'un côté, il semblait fort simple et naturel que le roi fît régir son trésor particulier à son gré', mais que le Trésor national fut dirigé par des agents qui seraient choisis par la nation. Cette idée fort simple, Messieurs, se fortifie énèore lorsqu'on réfléchit aux heureuses conséquences qu'il y aura t à faire régir le travail national par des agents choisis par la nation.
Nouâ avons des exemples si fràppaBts, si effrayants de toutes les déprédations commises par le ministre des finances, que je ne sais pas comment nous allons encore confier à un seul homme la gestion importante de la propriété publique. Et, Messieurs, ne vous laissez pas abuser par ces vains mots de surveillance : je ne crains pas de le dire, et l'expérjpnçe le prouve chez un peuple voisin de pqus; toujours la surveillance et la responsabilité dans le ministère des finances est absolument nniipi
Messieurs, nous sommes tous convaincus que M. de Galonné, par exemple, a éfé certainement le' ministre le pins déprédateur. Eh bien ! Messieurs, si tons ses comptes nous étaient reipis, si toutes les pièces jje sa gestion étaient renvoyées à un comité, vous seriez peut-être dans ] impog-sibilité la plus pbsolue de )a convaincre de ses malversations. (Murmures.) Un ministre dès finances, placé seul, avec un pouvoir absolu, à J? tête de cette administration, lié avec les autres ministres, pourra, par Je moyen dès avances|e fonds, faire un préiudipe cQnsid£rab|e au frésor public, sans que, qans.çeite immense comptabilité, personne n'aperçoive la pFéyaricatjqp.
Je vpusdisais, Me&sieurs, que (fônsup royaqme voisin, où la responsabilité a lïeq, le ministre des finances se fait un véritable jeu de la comptabilité. A l'entrée des sessions» le parlement d'Angleterre nomme ordinairement un pqmité pour vérifier ses comptes : on apporte à ce epinité des monceaux de pièces; mais est r^re qu'il puisse obtenir celles qu'il lui demande et qui lin font nécessaires, et presque toujours les membres de ce comité finissent par être vpnçlus, pgp être stipendiés (Murmurer)
Ce sont là des faits notoires et dont on ne saurait douter.
Ëh bien ! quoi qu'on puisse dire» nous sommes exposés à pareil inconvénient: votre comptabi-
lité sera nécessairement obscure, parce que le ministère aura'intérêt qu'elle le soit. Je ne vois pas que le comité vous présente aucune mesure qui puisse vous rassurer sur ces abus: car tant que vous n'aurez qu'un seul ministre des finances, vous ne parviendrez pas à établir un bon ordre de comptabilité. Et voyez, Messieurs, quels dangers vous courez : car, on ne peut pas se le dissimuler, les finances maintenant gouvernent les Etats. C'est avec l'argent que l'on corrompt, c'est avec l'argeut qu'on anéantit la liberté.
Mais, dit-on, qui nommera donc les administrateurs? Quoi! la difficulté du choix est ce qui vous écarte d'un principe simple! Eh bien I mettez les administrateurs hors de la dépendance du pouvoir exécutif : je dis les administrateurs, Messieurs, parce que ce ne doit pas être un seul administrateur. Faites-les nommer par le Corps législatif.
Mais les moyens de faire cette nomination? C'est là, vous dit-on, qu'est la difficulté. Il ne s'agit que de prendre des précautions pour éviter les cabales, pour déjouer les intrigues. Voici l'expédient que j'ai l'honneur de vous proposer :
Le Corps législatif choisirait au sort dans son sein le corps électoral qui nommerait. Les noms des membres du Corps législatif, seraient tous déposés dans une urne; lès 100 membres dont les noms sortiraient les premiers formeraient le corps électoral et seraient tenus de choisir, à l'instant même et sans désemparer, les administrateurs du Trésor public. (Murmures.)
Je propose en conséquence ce qui suit :
« Le Trésor public sera administré par trois administrateurs élus à temps, avec faculté d'être réélus.
« Un commissaire du roi aura voix consultative dans le bureau d'administration.
« Les administrateurs seront élus de la manière suivante :
« Le Corps législatif nommera parmi ses membres, et au sort, 100 membres, qui formeront un corps électoral qui choisira hors de son sein, et sans désemparer, les trois administrateurs. »
Un principe incontestable doit nous guider dans la solution de la difficulté qui se préfente. Nous n'avons reconnu dans le corps social que deux pouvoirs : le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Nous avons divisé tous les actes de la puissance nationale en volonté et en exécution. Nousavons établi que ce qui n'appartient pas à l'une appartient nécessairement à l'autre. Ainsi, quand les r présentants de la nation votent l'impôt pour des besoins et des emplois déterminés, et que le pouvoir exécutif est chargé de faire ces emplois, tout reste dans les limites naturelles des deux pouvoirs. Introduire un pouvoir nouveau, le pouvoir de la finance, inconnu de tous les politiques anciens et modernes, depuis Zo-roastre jusqu'à l'auteur du Contrat social, c'est renverser, ou du moins compliquer inutilement la machine du gouvernement, et toute complication inutile est dangereuse.
L'administration des finances ne peut jamais être un pouvoir distinct. C'est une fonction de l'un de ceux qui divisent le corps social; c'est, par la nature des choses, une des fonctions du pouvoir exécutif. Ainsi nous ne pouvons reconnaître un pouvoir financier, sans manquer aux principes que nous avons établis; nous ne le pouvons, sans introduire des lenteurs, des réactions continues, des résistances anarcbiques dans
un gouvernement dont les mouvements ne sauraient être trop simples et trou rapides:
Le rapporteur a si bien senti que si l'impôt était une loi, l'exécution appartenait au roi, qu'il s'est cru forcé de chercher à établir que voter l'impôt, ce n'est pas l'aire une loi. Que penser d'un système secouru d'appuis aussi ruineux? Le vrai caractère de la loi n'est-il pas qu'elle soit l'expression de la volonté générale, que tous les citoyens aient le droit d'y concourir personnellement ou par leurs réprésentants, et qu'elle soit la même pour tous. Or, ne sont-ce pas là les vrais caractères de l'impôt? Puisque voter l'impôt est faire une loi, l'exécution de cet acte appartient au pouvoir exécutif.
Craignez-vous que, dans l'inextricable dédale de la linance, la responsabilité n'expire sans pouvoir saisir les coupables? Mais ne transportons pas dans un ordre de choses nouveau les idées et l'expérience de l'ancien régime. Ne voyons plus ces caisses multipliées, ces revirements, ces entrelacements de toutes espèces : un seul Trésor renfermera le dépôt des contributions nationales, les différents canaux de circulation seront simplifiés, l'ordonnateur du Trésor public ne sera qu'un commis dont les comptes pourront être vérifiés par les calculs les plus simples. Si, au mépris des principes, vous donnez l'action au pouvoir législatif et la surveillance au pouvoir exécutif, vous ne gagnez rien, vous perdez; car la surveillance que vous voulez établir devient nulle; la liste civile exactement payée, les commissaires du pouvoir exécutif pourraient être fort indifférents à la gestion de la fortune nationale. Dans l'autre hypothèse, vous devez attendre les plus grands avantages de la rivalité qui existe naturellement entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. D'ailleurs, la législature peut-elle nommer les administrateurs du Trésor public? Non, elle n'est apte qu'à faire des lois, sa puissance dans l'opinion publique tient à la pensée qu'elle est sans intérêt et sans faiblesse.
Qu'arrivera-t-il si vous placez au milieu d'elle un foyer d'intrigues et de corruptions, si vous la rendez responsable des choix qu'elle ferait en nommant les administrateurs de la fortune publique. Laissons donc au pouvoir exécutif ce que l'ordre des idées, ce que les principes île la Constitution lui confient. Enlaçons ce géant des entraves de la responsabilité la plus inévitable, et nous aurons fait tout ce que ie salut et l'intérêt général exigent de nous.
Un des hommes qui a le plus profondément étudié le mécanisme des gouvernements et qui a tout fait pour le peuple, J.-J. Rousseau, dans ses considérations sur la Pologne, a dit : « Pour que l'administration soit bonne et marche bien à son but, toute la puissance exécutrice doit être dans les mêmes mains ; mais il ne suffit pas que ces mains changent; il faut qu'elles agissent, s'il est possible, sous les yeux du législateur et que ce soit lui qui les guide. Voilà le vrai secret de ne point abuser de ses pouvoirs. »
Je conclus, conformément au comité, que l'ordonnateur du Trésor public soit nommé par le roi.
Plusieurs membres : Oui! oui! Aux voix! aux voix 1
Nous sommes tous de l'avis qu'il doit y avoir un ordonnateur nommé par le roi.
Nous sommes tous d'accord.
C'est sur ces mots : nous sommes tous d'accord, que je demande que la discussion ne soit pas fermée; car je déclare que je ne suis pas d'accord avec M. Roederer sur ce qu'il vient de dire, savoir qu'il doit y avoir dans tous les cas un ordonnateur nommé par le roi pour le contrôle de l'organisation du Trésor public. Je conçois des modes où cela ne peut être ni nécessaire ni utile; j'en conçois où cela peut être nuisible et j'avoue que je n'entends pas comment une des plus importantes questions de l'ordre social et, sans exception, la plus importante qui puisse se présenter aujourd'hui, peut être l'objet d'une demande si hâtive de fermer la discussion.
Il n'est pas dans mon être d'être assez modeste pour croire que là où je ne vois encore que des doutes, tout le monde voit l'évidence.
(de Nemours). On alarme les bons citoyens en leur faisant accroire que l'ordonnateur du Trésor public disposera à lui seul d'une manière absolue des finances de la nation ; on veut faire revivre par là l'idé de l'ancien régime. L'ordonnateur du Trésor public n'aura absolument rien à sa disposition ; il ne sera maître «l'aucune dépense : c'est lui qui pourra le moins abuser des deniers du Trésor public. Ceux qui pourront commettre des abus dans la disposition des deniers nationaux, ce sont bien plutôt les ministres chargés de faire les marchés, car il vous sera toujours impossible de savoir le véritable prix des choses et si, par exemple, le pied cube de bois qu'on aura acheté 18 sols ne valait que 17 s. 6 d.; et cependant on n'a pas proposé que les ministres fussent à la nomination du Corps législatif.
L'ordonnateur du Trésor public fera ses payements aux époques où les récoltes rendent les recettes de tout genre plus abondantes; il ne pourra pas faire valoir à son profit le fonds du Trésor public; car vous ne décréterez les fonds que proportionnellement aux dépenses. La caisse ae l'extraordinaire pourvoira aux dépenses imprévues. De plus, il s'établira une lune salutaire entre tous les administrateurs, lorsque aucun ne pourra ni excéder la somme qui lui est accordée, ni faire d'anticipation, sans prendre sur les fonds d'un autre. L'ordonnateur ne sera alors qu'un teneur de registre, qui pourra dire aux ministres : Messieurs, vous prendrez vos engagements à telle époque, parce que c'est à telle époque que j'aurais mes rentrées.
Ce sera au Corps législatif à avoir un bon comité des finances qui surveillera l'ordonnateur, qui constatera les recettes, qui se fera présenter les états des receveurs de districts, etc., qui fera imprimer chaque mois le journal des recettes et des dépenses, de manière qu'il n'y ait pas un seul citoyen qui ne soit le surveillant des surveillants, et le juge des moindres opérations : c'est cet ordre sage dans la comptabilité, c'est cette surveillance immédiate du Corps législatif et de tous ies citoyens, qui vous donneraient de bons administrateurs.
Il faut établir une forme qui empêche ceux que vous aurez chargés de l'administration, fussent-ils même de malhonnêtes gens, de faire une action malhonnête; il ne faut donc pas violer les principes de la Constitution pour n arriver à aucun résultat utile; il ne faut pas vous exposer, comme votre comité d'imposition vous le propose, à créer un monstre en politique, c'est-à-dire à nommer des administrateurs qui, étant inamo-
vibles pour deux ans, seraient indépendants du pouvoir exécutif : voilà ce qui arriverait si la législature nommait le jour où elle lèverait sa ses ion.
Je ne veux pas que les envieux puissent calomnier le choix de l'Assemblée nationale; je demande donc de laisser nommer le ministre des finances par le pouvoir exécutif, attendu que de tous les ministres c'est celui qui peut le moins abuser de vos finances, attendu que vous avez laissé le pouvoir exécutif nommer le ministre de la marine et celui de l'intérieur, qui peuvent abuser bien davantage.
Je demande surtout que l'ordonnateur des finances soit mis sous la surveillance de votre comité des finances et que vous rendiez cette surveillance perpétuelle et générale, en la mettant sans cesse sous les yeux de la nation par un journal perpétuel des recettes, des distributions de fonds, des objets de dépenses et de payements. (Applaudissements.)
Puisque l'impôt n'est autre chose qu'une partie des propriétés nationales mise en commun pour subvenir aux besoins de la société, l'intérêt et les droits de la nation exigent essentiellement deux choses : la première qu'il n'existe d'autres impôts que ceux qu'elle a librement établis; la seconde, que les précautions les plus efficaces soient prises pour assurer la conservation et le fidèle emploi des sommes qu'elle consacre à ses besoins. C'est à ses représéntants qu'elle confie ce double soin : c'est vous qu'elle en a chargés. Vous avez rempli à cet égard la première partie de votre tâche, en consacrant le principe que tous les impôts devaient être établis par elle; il vous reste la seconde, sans laquelle la première serait presque absolument illusoire, c'est-à-dire de prendre les précautions les plus sages pour assurer la conservation et le fidèle emploi du Trésor public.
On vous propose deux partis : l'un de le remettre entre les mains du ministre, et l'autre de le laisser entre les mains de la nation, c'est-à-dire de les confier aux mandataires qu'elle aura choisis. Il s'agit donc d'examiner de quel côté est la garantie la plus sûre? Or, quel homme de bonne foi peut hésiter sur cette question? Qui osera dire que le choix des ministres mérite plus de confiance que ceux du peuple ou de ses représentants, c'est-à-dire que les intrigues de cour sont des garants moins suspects que ie vœu national? Certes pour résoudre cette question, il ne faut point se perdre dans des raisonnements subtils : il suffit de suivre les premiers principes du bon sens, et les premiers mouvements de sa confiance. Eh ! qui sont donc ceux qui jusqu'ici, et dans tous les temps, ont dilapidé les finances et dévoré la substance du peuple? La cour, les ministres. Qui sont ceux qui sont proposés pour réparer ces désordres, pour en prévenir le retour? Les représentants de la nation, vous, et c'est entre les mains de la cour et du ministre que l'on vous propose de remettre le Trésor national; et ce sont eux que l'on préfère à la nation même ou à ses représentants!
C'est ici b' moment de confondre un sophisme qui pourrait non seulement produire en cette occasion une erreur funeste, mais qui serait un prétexte éternel de violer les droits delà nation. On vous présente le roi, ou le ministre d'un côté, l'Assemblée nationale de l'autre, comme deux espèces de représentants placés sur la même ligne, comme deux pouvoirs délégués, auxquels
vous pouvez également ppnfjer le soin de veiller à la coriseFvatipn du Trésor public,
Npp, fep véritables représentants de la nation sont ceux qu'elle a choisis pour défendre ses droits, à ce fitre, ppur être les organes de sa vo-iopfp, poyr suryejUgr en son nom les divers ma-r sistrats et les agents du pouvoir exécutif. Dans fout ce qui concerheleur compétence, il faut, dans votre système surtout, reconnaître en eux les droits et l'aptorjté de la nation elle-même, il faut les considérer comme tenant sa place. Et certes, n'y a Ml pas trop peu de bonne foi, tantôt à décréter que la nation n'exerce point sa souveraineté et ses droits par elle-même, mais seulement par le ministère de ses représentants; tantôt à méconnaître dans fps représentants le droit d'pxeycer §qn pouvoir, de ne les regarder que comme des délégués ordinaires, placés sur la niême ligne que les fonctionnaires exerçant ce que vous appelez le pouvoir exécutif.
Il résulterait de ce système que la nation serait dépouillée de sa souveraineté, puisqu'elle ne pourrait en exerper les droits, ni par elle-rmême, ni pàr 4eS fegrépêfl^nts \ il n'y aurait plus alors
u'un pouvoir royal ou ministériel, immense,
eptjné à tqnt engloutir; il n'y aurait plus de natioq, Heqiettez dans ses mains l'armée et les fiancés, vous §urez rempli cet objet dans toute spn étendue ; vous aurez adopté le moyen le plus infaillible 4e rétablir ponstitutionnellement le dpspptisme. Je vous supplie donc de remplir le vœu de qation et de respepîpr ees droits, en décrér tant que le Trésor public ne sera confié qu'à ceux qu elle aura choisis,
Je ferai de très courtes observations pour, bp simplifiant la question, écarter quelques terreurs qui ajoutent trop à son importance. Saps noïis en apercevoir, nous discutons comme si nous étions encore sous l'ancien rér gime. Pourquoi présentait-ij, tant d'abus? Parce que le ministre des finances était tout à la fois législateur et exécuteur de ses lois. Quand une fois il avait obtenu un bon du roi, il était déchargé de toute responsabilité.
Né retqtqbQUS pas dans pette confusion. Si c'est l'Assemblée nationale qui conserve la délégation de la législation des finances, celui qui aqra été nommé aura beaucoup plus de force pour commettre des abus, que s'il avait été pommé par le pouvoir exécutif. En organisant la pqmptaftilité, ce qui est infiniment simple, en ordonnant ensuite la publicité des travaux et la surveillance d'un comité, vous avez pris pour la finance des précautions suffisantes. Dans ce moment l'ordonnateur du Trésor consulte pontjnuel-lement le comité des finances. Si le comité ne donne pas son avis, l'ordonnateur ne marche pas; s'il le donne, il pe se croit plus responsable. Ï1 faut, dans les finances, une marche plus sûpe, et je pense qqe vous ne pouvez l'établir qu'ep laissant au roi le choix des aduainisr trateurs du Trésor public.
Je demande que la question soit ainsi posée : La nation déléguera-tTfilje ou non au pouvoir exécutif l'administration de ses finances?
Ce n'est pas seulement soqs l'ancien régime que les ministres avaient trouvé le moyen d'abuser des finances; en Angleterre cet abus est porté aux plus grands pxGès, et p'est par le maniement des finances, laissé aux ministres nommés par le Foi, que les législatures ne sont pas à l'abri de la cppruption qu'on lepr
reproche, et qu'elles réagissent à leur tour sur le mauvais système des finances. Les ministres pq^rompent nqp seulement par l'argent, mais encore, et bien davantage, par lps places de finances, toujours très multipliées dans up mauvais système. Vous ave? pncpre unp armée fiscale pour la perception des droits de traite et d'enregistrement ; e lle est composée d'environ 30,Q0Q hommes. Avec 20.000 places à donner, qn s'assure facilement de 60,000 hommes.
J'ai montré quels sont les inconvénients qui résultent de la facilité de donner des places de finances, On n'a point assez développé peux du maniement de l'argent.
Ëh bien, Messieurs, non seulement deux ou trois ministres prévaripatsu?s pourraient demander, par anticipation, des fonds qui B® seraient nécessaires i leurs besoins que ÉlejoiiP en joup; mais encore ils pourraient abuser du crédit momentané qui leur est absolument nécessaire pour assurer l'action de la maphipe politique. Qu'on suppose une armée ennemie aux portes du royaume, les ministres de la marine et de la guerre viendraient au Trésor puiser des rpsr sources, afin d'opposer la force à la force. Si le Trésor public était au dépourvu, il faudrait pour un moment recourir à un usage de crédit quelconque, et au moyen de deux ou iroU ministres qui s'entendraient, ils pourraient tout à la fois abuser du crédit et des fonds. Qui nous préservera de ces inconvénients? La responsabilité» ditron. Nous demandons un remède, non pas contre l'individu minjetériel, mais contre l'abus même; et quand l'abus est d'avpir corrompu le jusfii, qu'est-ce pour nous que la resppusabilité? Or, Messieurs, c'est pour prévenir la poryupiiop du tribunal, c'est pour prévenir la corruption de tpus les pouvoirs, c'est pour prévenir l'abus d'un pouvoir immodéré sur l'armée, que pops ne voulons pas que l'argent sorte des mains de la nation, que par écoulements insensibles, pro-r portionnés aux besoins de chaque jour» Pt que jusque-là il ne soit point accumulé dans des mains suspectes, mais qu'il reste dans les mains de la nation. (Applaudissements.)
On me demande quelle caution je donne de mes administrateurs nationaux ; je réponds par deux observations ; la première, c'est que des administrateurs nationaux, nommés par des.délégués du peuple, seront pris tpès certainé-roent dans une classe d'hommes dpnt Ip patriotisme aura été longtemps éprpuvp. (Murmures.) Il faut dire, ou que le choix des courtisans? vaut mieux que celui du peuple, ou il faut avouer la proposition que je viens d'établir-
Ma première motion est le choix dn peuple ; ma seconde motion, l'amovibilité au gré des législatures.
On vous a dit que cette doctrine n'avait jamais paru depuis Zoroastre jusqu'à nos jours. On ignore donc que ce régime a été proposé au meilleur de nos rois, à Henrj IV, par lA'Ssemblêe des notables; et Henri IV l'a adopté.
Dites que cela n'a duré que tfois mois,
Je vais le dire, Monsieur- Il est très vrai que dans les temps d'ignorance et de trouble, où l'on n'avait pas les premiers éléments (Applaudissements à droite), le projet de dépret adopté par Henri IV ne put être exécuté ; mais loujouFs est-il vrpi qu'il lut reconnu, par le meilleur de nos rois, que le droit d'adminisirer les
finances appartenait aux représentants du peuple. Ce principe peut (jonc aujourd'hui avoir toute son application, parce que les lumières sont répandues et que ypus avez administré vous-mêmes les finances avec succès. (Rires à droite.)
Au reste, Messieurs; je n'irçyqgue ici qp® les décrets qu'ont le plus signalé votre patriotisme et vos profondes connaissances en politique, vos décrets sur les départements et la d.msiop de l'administration. Vous y avez dit que l'inspection des contributions publiques serait fyite par le Corps législatif et par les corps administratifs nommés par le peuple. {Appla^issemenis.) Je lë demande, Messieurs, 4 quoi servirait-il de mettre les plus petits réservoirs de l'impôt entre les mains du peuple, j'entends par là les trésoreries, de district, tandis que vous mettriez le réservoir général entre les mains des courtisans?
11 n'y a plus qu'une seule difficulté; c'est celle d'établir l'élection des administrateurs nationaux que nous proposons; car op ne peut pas charger les départements d'envoyer d^ns la capitale chacun un électeur (Murmures) pour faire, ce choix (Murmures). Je sais que cette idée èsf absurde ; ci ceux qui ia critiquent pe voient pas que c!est ce que je fais moi-même. Le pur mité d'imposition vous avait proposé d'abord de les faire nommer par }a législature à la fin de la se-siop, et sans qu'aucun dq ses membres pût être choisi; mais nous n'avions pas prévu l'effet de 1 intrigue, et certainement il y aqrait trop de Ranger; c'est pourquoi nous proposons en outre que les électeurs soient déterminés par le sort et au nombre de cent, lesquels se retireraient à part surrle-champ, et nommeraient sans désemparer.
"Voici le projet de décret que nous vous proposons :
Art. ler. 11 sera établi un pqmité
d'administration nationale des finances, composé de trois
administrateurs.
« Art. 2. Il sera établi un trésorier général des finances.
s Art. 3. Les administrateurs des finances et le trésorier général seront nommés, immédiatër ment après chaque législature, par 1Q0 députés déterminés par le sort à la dernière séance du Corps législatif.
« Art. 4. Le comité d'adminisjratipp nationale nommera les régisseurs généraux des contrifyur tions qui seront mises en régie.
« Art. 5. Il réglera tout ce quj concerne les recettes et les dépenses publiques.
} Art. 6. Il sera établi, près du comité d'administration nationale, un commissaire nommé p§,r le roi. Ce commissaire sera spul ordonnateur du trésor public, et correspondra seul aveç les corps administratifs et régies. |p tout aq ppm du f pi ; priais il se conformera, aux dgpis{ops du qomité, et il Jes rappellera dans §es ordres et mandements, *'
« Art. ,7. Les administrateurs, le trésorier général et le commissaire du j*pi seront responsables chacun en cp qpi les cpqperne, »
Vpiçi Une lettre des qiifti-ni§trqte\irs du département $u Morbihan^ quidoit rassurer les amis de la CqnstitjitiOO sur la suite des événements arrivés dans Cette partie du royaume. Je vais en donner lecture à l'Assemblée:
« Vannes, le
« Monsieur le Président, nous nous empressons d'annoncer à l'Assemblée nationale l'élection de
M. Guégan, curé $e Pontivy, membre du Çorps législatif, au siège épiscQpal dq département du ftjprfyihan. Tous les efforts dq fanatisme ont Pté inutiles, le patr|ptjsq^e et l'union ont présidé h l'assemblé de nos électeurs, qui aurait étq complète si les ecclésiastiques s'en étaient jugés dignes, mais tous les électeurs Iniques s'y sont présentés avec pe si hieupeuses dï^ppsHipns, qu'un seul sqrutfn a suffi pour poqs 490Per un prélat. Ce choix, pn poqronpant le civisme et la piété de M- Guégan, honpre lé corps électoral. Toutes les cjocjigs et une s^lvp de panqq pq| annoncé cette peureuse nouvelle au peuple, qui l'atëeFk' dait avec la plus viyê iippalience. » Nous désirerions q#e lp temps nqps permit de vous peindre toute la joie des fions citoyens; mais les ennemis publics ne nous laissant pas goûter longtemps un moment de satisfaction. On nous a prévenus qu'ils se dfspQSfiieqf; 4 envoyer UP message, en vue de contrarier celte éleciiqn. Cet avis nous a déterminés à (Jépêclier sur-le-champ un dragon d'ordonnance de Lorient, pour instruire l'Assemblée nationale et le roi, de Ja nomination de notre nouveau préiat, qui, ppus l'espérons, ne se refusera pas au vœu de §es concitoyens.
« Nous croirions manquer à la reconnaissance que nous devons à MM. Daniel, Bértolip et Léçn, commissaires nommés par le rqi, en exécution d'un décret du Corps légisîatjf, pour le rétablisse? ment de la tranquillité publique dans notre dé-; partement, si nous omettions de rendre un hom-mage authentique à leurs travaux et à leur zèle infatigable. A peine avons-nous eu le bonheur 4« les pqsséder, que nous avons éprouvé les heureux effets de leur présence. Le roi nous a envoyé, dansées trois %rpi9 de patrie, autant d'anges tutélsires de la liberté et de la Constitution. Sa Majesté, en les honorant de sa confiance, a honoré son civisme,
« Nous vous prions instamment, Monsieur le Président, de communiquer à FAsserohlPe oatiô-nale cette faible expression de sentiments que les vertus de ce9 trois commissaires nous ppt inspirée. L'approbation (les représentants de la, nation doit être pour tous les citoyppsla plus glorieuse comme la plus^ouce des récompenses. »
( Vifs applaudissements.)
annonce l'ordre du jour pour les séances de ce soir et de demain et donne la liste des députés qui doivent aller ce soir chez le roi. . D
Ce sont MM. Goqrdan, Millet de Mureau, de Bonneville, Darche, Gossin et l'abbé GQuttes,
La discussion sur l'organisation du Trésor public est reprise.
Il faut d'abord établir d'une manière simple l'état de la question : elle consiste à savoir si l'administrateur ou les administrateurs du Trésor publia seront nommés par le Corps législatif ou par le roi.
La nation, d'une part, peqt nommer par elle-même les administràteupS da Trésop : la question se réduit donc à examiner si des délégués de la nation doivent nommer ces administrateurs ; or, les délégués de l'Assemblée nationale ne peuvent nommer les administraieùrs 5 ils pe peuvent Pas les nommer, parce que les fonctions qui leur sont déléguées ne sont point dé mettre a exécution des lois qui émanent d'eux, mais bien de rendre des lois, de voter des impôts, Si le même
corps, si la même puissance qui fait une loi ou qui vote un impôt, fait exécuter la loi et ensuite examine tous les actes relatifs à cette exécution, il est évident qu'il y a confusion de pouvoirs, et qu'il n'y a plus de Constitution. D'après cela je crois qu'il est parfaitement inutile d'entrer dans les détails énoncés au rapport fait au nom du comité d'imposition. Mais, dit-on, il y a un grand inconvénient pour la liberté à laisser l'administration des fonds publics entre les mains des agents du pouvoir exécutif, car on s'en servira pour corrompre. Or, je dis que si vous n'établissez une Constitution et une responsabilité telles qu'il soit impossible, non seulement à l'agent du Corps législatif, mais à l'agent du pouvoir exécutif, de faire une distraction de deniers, vous ne pouvez être sûrs de rien, pas plus lorsque vous auriez donné la disposition à des gens que vous auriez nommés, que lorsque vous l'auriez donnée à des gens nommés par le pouvoir exécutif, car enfin votis n'aurez pas la présomption de croire que les gens que vous nommerez, d'une façon ou de l'autre, fussent incorruptibles : il faut donc organiser tellement cette administration, qu'à chaque minute l'administrateur puisse rendre compte ; alors on ne pourra plus se servir de ces agents pour corrompre qui que ce soit.
Maintenant je réponds à un principe énoncé par M. Rœderer ; il prétend qu'en laissant au roi la nomination d'un ou plusieurs administrateurs vous détruisez le décietqui ordonne que les corps administratifs dirigeraient tout ce qui a rapport à l'imposition, sous la surveillance du pouvoir législatif. Point du tout, car il est vrai que tout ce qui a rapport à l'impôt, sera toujours sous la surveillance du Corps législatif. Ce sera le Corps législatif qui décidera en dernière analyse de tout ce qui a rapport à la levée de l'impôt. Ainsi ce que l'on vous propose ne détruit pas le principe déjà établi.
Sans entrer dans une plus grande discussion, je ne veux qu'une seule raison pour déterminer les principes du comité ; c'est l'impossibilité de l'élection. Je suppose que dans ce moment-ci il fallût faire la nomination de trois ou de six administrateurs ; je crois qu'à l'exception des membres de Paris et de ceux qui ont beaucoup vu Paris, il n'y aura pas quatre personnes dans l'Assemblée qui fussent en état de décider quelles sont les personnes capables d'être administrateurs. (Applaudissements.)
Ainsi donc l'élection par le Corps législatif est absolument impossible. De plus, Messieurs, la proposition que l'on vous fait est extrêmement aangerèuse : les administrateurs élus pour deux ans, comme on le propose, ne pourront donc pas être destitués ; car il serait presque impossible de leur faire leur procès, puisqu'ils seraient soutenus par ceux-là mêmes qui les auraient élus.
Je conclus à ce que l'administrateur ou les administrateurs du Trésor public soient nommés par le roi.
Un grand nombre de membres : Aux voix 1 aux voix!
(La discussion est fermée.)
Plusieurs membres demandent la priorité pour la motion de M. d'André.
(Cette priorité est décrétée.)
Je mets aux voix la motion de M. d'André :
« L'Assemblée nationale décrète que le ou les administrateurs du Trésor public sera ou seront nommés par le roi. »
(Cette motion est décrétée.)
(La suite de la discussion est renvoyée à une séance suivante.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture de deux lettres du Président de VAssemblée élec" torale du département du Gard, qui annonce que le choix des électeurs s'est fixé :
1° Sur M. Dumonchel, recteur de l'Université de Paris, membre de l'Assemblée nationale, pour l'évêché du département du Gard ;
2° Sur M. Voullard, pour le poste de membre du tribunal de cassation.
J'ai demandé la parole à M. le "Président, non pas pour une question d'ordre relative à cette séance, mais pour une question que je supplie l'Assemblée de vouloir bien placer à l'ordre du jour, dans le cours de la semaine prochaine.
En voici l'objet : Messieurs, vous avez décrété hier que les dettes de l'Etat pourraient être liquidées par votre comité central de liquidation, indépendamment des opérations de votre comité de liquidation. Le 11 du mois de janvier, on vous fit une demande de 4,158,000 livres, que réclame M. d'Orléans pour la dot de la reine d'Espagne, sa grand'tante. Je demande ce rapport, qui aurait dû être fait, puisque deux mois se sont écoulés depuis que vous l'avez ordonné, afin que cette question ne soit pas renfermée dans la délibération intérieure du comité. (Murmures.)
On veut nous faire perdre du temps; je demande l'ordre du jour.
J'ai lieu de croire que la discussion de cette cause sera très importante ; que des membres de cette Assemblée, pourront opposer, à l'opinion qui a été déjà manisfestée, des raisonnements qu'il importe de faire connaître aux membres qui y sont intéressés, afin que M. d'Orléans puisse répondre, s'il le juge à propos, car je vous préviens qu'immédiatement après le rapport, vous ne pourrez même juger : il y aura un délai inévitable entre la discussion et la décision.
Je m'y oppose, Monsieur le Prési-dent ; nous avons l'affaire de Clermontois, qui est bien plus pressée.
Voici l'état de l'affaire: Lorsque la première fois j'ai fait te rapport, on a ordonné deux choses: 1° que les pièces seraient remises au liquidateur général; 2° que mon rapport serait imprimé, et que le rapport serait fait ensuite par le comité de liquidation, et non pas par le comité central.
J'ai satisfait, pour ma part, à ce que j'étais chargé de faire, j'ai fait imprimer mon rapport avec toutes les pièces; il y a un mois ou six semaines qu'il a été distribué. M. de Saint-Léon a les pièces entre les mains, il en fera le rapport, lorsqu'il sera prêt.
Messieurs, voici une lettre du ministre de la guerre à Varmée; je demande la permission d'en donner lecture à l'Assemblée.
Plusieurs membres : Oui ! oui ! Lisez !
, lisant : « Messieurs, lorsque l'armée reçoit une nouvelle formation, lorsqu'elle va se régénérer avec toutes les autres classes de l'Empire, son chef suprême daigne approuver que je développe à vos yeux les principes qui doivent désormais la régir, que je vous présente le tableau des avantages importants qui viennent de vous être assurés par la Constitution, et en même temps celui des devoirs sacrés qu'elle vous impose.
« C'est surtout en ce moment qu'avant d'offrir à la patrie la continuité de ses services, chacun doit réfléchir mûrement aux obligations qu'il contracie avec elle, se représenier tout ce qu'elle exigera de lui désormais, peser enfin les mots de ce serment solennel qu'il doit renouveler touies les années: qu'il sonde ensuite les dispositions de son âme et qu'il s'assure d'y trouver les sentiments qui lui feront remplir avec joie les engagements qu'il aura formés; car je ne supposerai jamais qu'un militaire, en faisant un serment, médite le projet de lui être parjure; ce serait commettre la plus indigne lâcheté et se rendre le plus méprisable des hommes.
« Toutefois, Messieurs, je conçois difficilement comment aucun de vous pourrait hésiter à engager sa foi à la nation, ainsi qu'elle le prescrit à tous les citoyens. Que faut-il donc promettre? l'exécution dea lois faites par les représentants de la nation, acceptées ou sanctionnées par son chef héréditaire. Certes si une telle autorité peut être méconnue, il n'en est point de légitime sur la terre, il n'y a plus de gouvernement, plus d'Empire, plus de société.
« J'adresse ceci à l'esprit juste, capable de saisir la vérité : mais qu'il faut plaindre l'homme qui ne verrait, dans la nouvelle Constitution, que des lois auxquelles il ne peut refuser d'obéir, et dont l'âme indifférente et froide n'est point saisie du caractère de grandeur et de dignité qu'elle imprime à l'espèce humaine!
« Malheur surtout au militaire qui ne sent pas combien les fonctions de son état en sont ennoblies I Sans doue, il avait l'honorable emploi de défendre 1e pays où il se trouvait exister; mais aussi il contribuait à y maintenir un ordre de choses peu avantageux à une grande partie de ses concitoyens. Désormais c'est vraiment une patrie, une mère commune qu'il aura à défendre, des lois à la confection desquelles il aura eu part, un gouvernement combiné pour opérer le bonheur de tous, digne en un mot que celui que sa naissance n'y a point attaché, l'adopte par choix et par prédilection.
« Tels sont les motifs de patriotisme qu'auront dorénavant les militaires français; mais quelle satisfaction ne doivent pas éprouver ceux qui composent aujourd'hui l'armée, en se voyant appelés par d'heureuses circonstances, à fonder, dans un grand Etat, et préparer ainsi partout, le règne de la liberté, de la justice et de la raison !
« Je dois aussi, Messieurs, vous faire remarquer combien les lois données au militaire par l'Assemblée nationale, sont sagement adaptées à l'esprit de cette profession. Vous n'y trouvez point ces distinctions mortifiantes, ces avilissantes exceptions qui flétrissent le cœur et glacent l'émulation; ces abus ont disparu. Tous les honueurs de la carrière sont offerts à qui veut les mériter : avec des vertus et des talents, un soldat peut monter au rang de général.
« Avec quel discernement nos législateurs n'ont-ils pas concilié, dans les règles de l'avancement, ce qui est dû à la longueur et la con-
fiance des services, avec ce que le bien public exige qu'on accorde au talent, qui peut rendre des moments donnés par certains hommes au service de l'Etat, plus utiles que la vie entière d'un grand nombre d'autres! Car, Messieurs, je dois vous le déclarer au nom du roi, vous n'avez plus à craindre que dans les choix qui lui seront attribués, une aveugle faveur ou des avantages de naissance, évanouis devant la raison, aient désormais une influence dont vous vous plaindriez avec justice. Le roi sent trop combien est beau le privilège qu'il a de récompenser le mérite, de distinguer les hommes que la nature a voulu distinguer elle-même, et faire ainsi servir à l'utilité publique les qualités dont il lui a plu de les orner. (Applaudissements.)
« Vous reconnaîtrez encore avec gratitude, Messieurs, ce que l'Assemblée nationale a fait pour améliorer votre situation.
« Forcée par les besoins urgents de l'Etat de commander à des classes nombreuses des sacrifices pénibles, il semble qu'elle se soulageait de tant de rigueurs, en ordonnant de votre sort; la paye des soldats, les appointements des officiers ont été augmentés, et des retraites honorables ont été assuréesà tous. Mais je ne m'étendrai pas sur ce sujet; je serais fâché, je vous l'avoue, de vous trouver trop sensibles aux avantages que je viens de mettre sous vos yeux. La profession des armes n'est celle de l'homme fort, que parce qu'elle exige non seulement le sacrifice de la vie, mais encore parce qu'elle condamne à de longs travaux, à des privations de toute espèce. Eh! sans cela, qui ne voudrait donc inscrire son nom parmi les défenseurs de la patrie, et jouir de la considération que l'opinion publique attache partout à ce titre?
« Au reste, il est encore d'autres vertus nécessaires au militaire, et sans lesquelles on n'en mérite point le nom.
« L'expérience de tous les pays et de tous les temps a prouvé que la discipline et la subordination peuvent seules rendre les armées capables d'agir et de remplir le véritable objet de leur destination. Des troupes indisciplinées sont au dehors l'objet du mépris de l'ennemi, au dedans elles sont l'effroi du citoyen; leur valeur, leur audace, dirigées par le vrai patriotisme, sont la sûreté, la gloire des Empires; égarées par la licence, elles en causent bientôt la désolation et la ruine.
« Assurément, Messieurs, votre choix ne sera pas douteux, vous ne souffrirez pas que l'époque de la liberté de la France soit celle au déclin de ses armes: vous voudrez au contraire qu'on les voie briller désormais d'un nouvel éclat; vous voudrez continuer d'être craints de nos ennemis, et chéris de vos concitoyens; myis permettez-moi une observation importante. La France a des voisins jaloux depuis longtemps de sa prospérité : ces puissances rivales ont des troupes belliqueuses, bien disciplinées, parfaitement instruites dans toutes les parties de l'art militaire. Songez que, pour les combattre, il faut nous donner les mêmes avantages : c'est à tort que l'on croirait que la valeur peut suppléer à tout; l'histoire dépose contre ce sysièrae: et sans consulter ses fastes, suivons les événements de la présente guerre entre les Ruses et les Turcs : n'y voit-on pas la science militaire des premiers triompher constamment de la valeur des autres, à qui cette même valeur semble ne servir qu'à les précipiter comme des victimes sans défense sous le glaive de leurs ennemis?
Or, Messieurs* vous h'ignorez pas que les événements ijui olit ed lieu depuis 2 ansy put suspendu dans l'aroléé les exercices, les instructions de todt getire; hâtons-nous donc de les reprendre, hâtons-hous de nous remettre au niveau dë nos belliqueux vdisins : l'activité et l'intelligence dont la nature a doué lés Français, vobs feront acquérir en peu de temps ce qu'un tràvail long et péniblë apprëhd lentement aUx peiiplesqui nous environnent;
« Cependant je Veux vous découvrir un piège dans lequel vous pourriez vous laisser entraîner» Des hommes peu sensés ou mal intentionnés vous diroht peut-être que cette subordination exacte, cette discipline sévère, que je recommande, ne s'accordent point avec ia liberté, qui est désormais l'apanage de tous les Fiançais; mais prenez garde, Messieurs, de vous laisser égarer par de coupables suggestions, et considérez les choses soUs leur véritable point dé vue.
« La liberté consiste à n'obéir qu'aux lois : il en est de générales qui prescrivent indistinctement à tous les citoyens les mêmes devoirs: il en est de particulières à chaque profession. Or, la loi foîidaihentale de l'état militaire est que dans les foUctioùs qui lui sont propres, chacun renonce à sa volonté. La seule raison vous découvre que pour qu'une armée soit capable de la plus simple opérâtion, il faut qu'un seul homme la dirige, qu'un seul commande et que le reste obéisse. Aussi regardez autour dë vous, Vous verrez que le militaire le plus judicieux, le plus véttueUx, est todjours Je plus subordonné.
« Bien loin doncque votre profession admette une sorte d'esprit d'indépendance, rien ne lui est plus essentiellement opposé. S'il est Un spectacle qui fasse vraiment honneur à la raison humaine, qui montre les progrès de là société, c'est de voir le guerrier intrépide dans les combats, devenu dd-cile, obéissant à la loi de son pays, et n'agissant plus que par elle.
«Au resté, Messieurs, voUsn'avez pas lied d'être incertains sur vos droits non plus que sur Vos devoirs; les uns et les autres sont tracés dans les décrets de l'Assembléenationale, et vous pouvez, sans cfainte, y chercher, dans tous les cas, la fêgle immuable de votre conduite. Cette Assemblée qui a créé la liberté pour la France, ne së sera pas sans doute écartée de ses principes ddns la combinaison des lois qu'elle a données âti militaire i sûyëz donc persuadés que Si ces loi^ vôus imposent quelque gêné, c'est qu'elle est nécessaire, indispensable,et qu'elle tient à l'essënCë de votre profession. VoUs ne devez pas avoir moins de confiance dans la manière; dont l'exécutiod de ces mêmes lois sera ordonnée et dirigée par le chef suprême de l'armée; Rappelèz-vous, Messieurs, lés inclinations que notrë roi a toujours montrées ; rappèlez-vous qu'il a débuté Sur ld grandé scène du monde par mériter dans un autre hémisphère le nôm d e restauraient dés droits dès hômfries, et què bientôt après il l'a obtenu parmi nous (Applaudissements.) ; eût-il acquis cë titré glorieux, Si sou cœur n'eût aimé vraiment la liberté ? Soyez donc bien sûrs qu'il îl'exigera rien dë vous, qui ne soit Conforme à la loi ; mais at-tendez-vous aussi qu'il déploiera toute l'énergie du pouvoir qui lui est confié pour assurër l'exécution de ce qu'elle prescrit véritablement : ainsi l'exigë le bien public, le maintien de cette même liberté, votre gloire, et celle de la nation entière.
« Quant à moi, Mëssiëurs, si j'ai l'hdtïneUr d'ètfe,
près dë l'armée, l'interprète des volontés de son chef suprême, cestqUe j'ai cru être sûr que les ordres que j'aurais à en recevoir et à vous trans-inettrë ne séfaieUt, dans aucun cas, en opposition avec mon attachement âUx vrais principes de la Constitution. C'est VOUS dire, et j'ose en prendre l'engagement solennel devant la dation, quë je ne contribuerai jamais à l'exécution de rien qui puisse leur porter atteinte.» (Applaudissements réitérés.)
Je demande l'impression de ce sermon.
Nous dertiàndons l'impression de cette lettre par ordre de l'Assemblée nationale.
(L'Assemblée décrète l'impression de la lettre et son insertion au procès-verbal.)
lête la séance à trois heures.
PRÉSIDENCE DE M. DE N0A1LLES.
Séance du
La séance est ouverte à six heures et demie du soir.
Un de MM. les secrétaires fait lecture du pro-cès-verbàf de la séance de lundi au soir, qui est adopté.
Un de MM. lès secrétaires donne lecture des adresses suivantes :
Adresse des employés aUx entrées de Paris, qui s'empressent, après leur suppression, de prêter le serment civique entre les mains de l'Assemblée nationale. ,
Adresse des officiers municipaux de Marquièe, district de Boulogne, qui annoncent qûe leur curé a prêté le serment, à là grande satisfaction de tous ses paroissiens.
Lettre du directoire du département dë la Hduië-Garontie, qui annonce que ie "corps électoral de ce département s'étant assemblé pour procéder au remplacement du siège métropolitain, vacant par la démission de M. Foniange, M. le cardinal de Brienne a été nommé, à la pluralité absolue des voix, évêqUe métt'ùpolitaiu du Sud.
Lettre dU procurent gértêràî syndic dit dépàrtë-ment de la Vendée, qui fait éd'voir quë té'S ëlèc-tëttrs de ce département ont élevé à la dignité d'évêque M. Jean Servant, prêtre de l'OratOire', dë ia maison deSaumur.
Adresse du directoire du département de l'Audè, portant que l'Assemblée électorale a nOrùîné, pour évêque dU département, M. Bëéaucellé, doyen du ci-devant chapitre de la cité de Car-cassonhe, distingué pat les mœurs ies plus pures et par son patriotisme.
Procès-tërbal dû conseil général de là commune de Varines, qui constate que l'arrivée des commissaires du roi-dans cette ville pour rétablir la tranquillité que le fanatisme avait malheureusement troublée, a été un signe de joie et dè con-
cordé, ët fjiië Iëdrapëàu blanc a été arbôfé sut la tqiiF de là Ville. . ^.
Adresse de la Société dés amis delà Constitution établie à Ères t, qui fait hommage à l^Assëhiblée d'iiqe adresse iidpriiïiéô qu'ëllê à envoyée aux habitants dëS càmpagnes pëUr lés prémunir contré les écrits et lës sermons inCëhdiàifes des prêlrés fahatiqués dë lâ ci-devaht province de Bretagne ; éllë supplié l'Assëihblée dé éué{Dëfidrë l'exécution de l'article 2 du décret fendu pour dissiper lés troubles quioiit agité lé département du Morbihan, portant qtle le roi. sera prie de faire passer des forces suffisantes dans cë dépàr té ment. Lës iheni-brés de cette société dépendent sïir leur tête de ratil^ner partout le calme, sans sëcôurg étrangers.
Adresse de là société des amis de la Constitution séant â Dunkèrquê, qui dénoncent ticë défense faite par le ministre de la guerre, aux officiers et soldats des régiments Colonel, Général et Viennois, d'assister aux séances des sbcïétês dëâ amis de la Constitution.
Un mèmbré fait iecturè rf unê adresse des patrons pécheurs dés ville et port dé Céilê, Contenant l'ël-prësëion dè leur rëëOohaiss'ànoë pour là juridiction des priid'hommes, qui léiir à été accordée par le décret du 6 janvier dernier; ils réclament la même fâVëUr pour les pêcheurs dès étangs qui -av'ôiëifiept là Ville de Celte, et jui sont dàns le toêtrië département des classes de là marine. ,
(L'Asserhblée rëhvoië cëtte adresse au côrhitë de la marine.)
Je fhë présente à la ffibûne, Messieurs, polir, vous faire part d'une liouVellé qui doit être infinimetit agréable àùx législateurs dé l'Empire, puistjju'èlle leur prouvera qu'il est dés honimes qui, cdbstàniment occupés du bdnheur dé leurs cdhCitoyens, leur font accueillir tous vos déCretâ âvëc transports, ët surtout célui de là cobtribulion foncière.
Ces hommes sont les officiers municipaux de Villeréàl, district de Monflanquin, département du Lot-et-Garonne. A ppine l'arrêté du dépàrte-meqt et. votre instruction rëlaliVë au nouveau mode d'imposition leur Sont parveiius, que ces Véritables amis de ia Constitution, animés du plus pur Civisme, se sdnt ëdaprëssës d'appélër.â leu^s Conférences patriotiques tous les bons vil-Iâgë6iè, cultivateurs et propriétaires, pour s'éclairer mutuellement, discuter et adopter les moyens les plus convenables pour asseoir la répartition de l'impôt.
Les commissaire^ des Sëctiôns ont été nommés au gré dë tous lës habitants, et à mèsùre qu ils se fendent Sur Chaque èéction,cliaqUe cultivateur se tfdUVë sur Son Champ ; et tous à l'envi désirent côiicourir a Cette opération ët 1 accélérer.
Je passerai sous silence les fêtes civiqùés qui ont ëh liëti à cette otcâsion.
Dë jeunëS enfants ët des jeunes' filles vêtus de blanc, dansent en cbàntànt Ça ira, ça ira, sèmënt des fleurs sur le passage des commissaires; d'àutrés leur présénteiit des couronnes de tendres rameaux dè chêne : présage heureux d'un bonheur durable.
QUëlle différencé, Mëssiéurs» de ces impôts jadis arbitraires, qu'on n'arrachait que par la fdrdè, et de ceux consëfttis libréihent par les re4 présentants du peuplé.
C'est au flotfi du aépârtêmenf que j'ai flionneur dè remettre sur le bureau l'extrait dé la lettre que ïtii ont écrite ces vërtuëiix officiers munitsi-pâtix, (rôtir îtii éipriiûér la joie avec laquelle
toute là commrihé de Villeréal avait reçu, et son arrêté, ët 1 instruction sur l'impôt; J'y joindrai ia réponse du département et spn adresse à l'Assemblée nationale, dans laquelle le. département vous assure que ce louable exemple sera suivi» et que si les bons villageois et cultivateurs oilVrëut les trésors de ieurs terres à la liberté* ils auront le courage de les fermer au despotisme. (Murmurés à droite)
Plusieurs rhembrôs à droite : L'ordre du jour!
Je feaiB» Messieurs^ que ce qui plaît aux amis de ia Constitution» déplaît à ses ennemis ; mais je demande à être entendis ét jè suis persuadé que les patriotes de I'AssèfnBlêe en auront du plaisir.(Vifs applaudissements à tjàMhê) .
J'ai l'honneur de demander, Messieurs,» ,c(tlé l'Assemblée ordonne dbé mention honofablë» dans soh procès-verbalj de la conduite Vfaithënt patriotique des officiers municipaux de VlllërèdL (Applaudissements.)
(Cette motion est décrétée*)
Un de MM. les secrétaires, donne lectbrë d'Ufië note du ministre dé ta justicef ainsi CoûçUe î
« Le roi a donné sa Sanction, le 24 dii mois dernier :
« 1° Au décret du même jour» relatif au voyage de Mesdames, tantes de Sa Majesté.
« 2° Ét le 25, au décret du 20 janvier, relatif à l'établissement d'un tribunal criminel dans chaque département.
« 3° Au décret du 3 février j concernant là vedte de biens nationaux à la municipalité de Vincent) es.
« 4° Au décret du 9, relatif à la recherche de 2 fiégates françaises, la Boussole et l Astrbldbe, commandées par M. dè la Pérouse.
« 5° Au décret du 18, relatif aux fonds à faire au Trésor public en 1791,- pour acquitter toutes les dépenses attribuées au culte, à la liste civile, aux apanagiates et aux divers dépàrtemedts de l'administration.
. « 6° Au décret du même jour, relatif à là priorité acquise à ia municipalité de Romaniao* pour l'acquisition de domaines nationaux-, situés dans son territoire. , .
« 7° Au décret du 19» conëerôant la suppression de tous les ipaptôs perçus à l'entrée des villëSf bourgs et viliages;
« 8° .Au,décret du même Jëùr» relatif à la dépense de l'administration des haras.
« 9° Au décret du 20, concernant la suppression des gouvernements de province et des places de toutes les classes, les lieutenances générales et les majorités des op devant pfoVinoës,' places et gouvernements.
« 10° Au décret du même jour, concernanf lës pensionnaires non compris dans les états nominatifs des secours.
« 11. Au décret du 21» relatif ail pâyefnëht d'ndemnités à quelques porteurs de breveta dë retenue.
« 12° Au décret du même jour, Concernant lë temps nécessaire aux ofliciers des régimertts coloniaux» pour obtenir la ëécoratiott militàife,
« 13° Au décret du même jour, rèlatifà la rédaction de l'article 4 du décret du 27 novembre précédent, sur le serment à prêter par les fonctionnaires publics ecclésiastiques.
« 14° Au décret du même jour, concernant les assignats qui reste à fabriquer, et la nomination de 6 nouveaux signataires.
« 15° Au décret du même jour, relatif à la contribution foncière à laquelle seront soumis les droits de péage, et autres de même nature supprimés, et le revenu net des canaux de navigation.
« 16° Au décret du même jour, relatif au payement des secours accordés aux officiers tant civils que militaires, Acadiens et Canadiens, et à leurs familles.
« 17° Au décret du 22, relatif à l'acquisition à faire par les administrateurs du département de l'Ariège, de la maison de l'Abbaye de Saint-Yolusien, pour y placer tant le directoire de l'administration du département, que le tribunal du district.
« 18° Au décret du même jour, concernant les personnes qui, étant dans les cas prévus par la loi du 23 août dernier, pour des services rendus à l'Etat antérieurement à l'époque du 1er janvier 1790, n'auraient pas été récompensées, et celles qui prétendraient avoir droit à des pensions et gratifications, pour des actions faites postérieurement à cette époque.
« 19° Et enfin au décret du 23, relatif à l'envoi de trois commissaires dans le département du Gard et dans les départements voisins, pour y rétablir l'ordre et la tranquillité publique.
« Le ministre de la justice transmet à M. le Président les doubles minutes de ces décrets, sur chacune desquelles est la sanction du roi. »
« Signé : M.-L.-F. Duport.
« Paris, le
, qui avait obtenu un congé, annonce à l'Assemblée qu'il est de retour et qu'il vient reprendre ses fonctions.
, député du département de l'Hérault, demande un congé de 2 mois pour raisons de santé.
(Ce congé est accordé.)
fait lecture d'une lettre de M. Bailly, maire de Paris, qui informel'Assemblée que la municipalité a fait, le 7 de ce mois, l'adjudication de 3 maisons nationales situées : la première, rue Cassette, louée 2,800 livres, estimée 39,600 livres, adjugée 52,800 livres ; la deuxième, rue de la Verrerie, louée 2,400 livres, estimée 30,187 livres, adjugée 54,100 livres; la troisième, rue de la Tonnellerie, louée 12,000 livres, estimée 180,700 livres, adjugée 273,000 livres.
Je demande à l'Assemblée la permission de lui faire une proposition q e je crois importante dans les circonstances actuelles. Vous avez décrété, le 26 de ce mois, que le tribunal institué pour connaître des crimes de lèse-nation, serait séant à Orléans. Il est important, sous plusieurs rapports, qu'à l'époque du rassemblement de ce tribunal, les prisonniers pour crime de lèse-nation se trouvent rendus dans les prisons d'Orléans, afin que, lorsque les juges seront rassemblés, ils puissent s'occuper du travail important dont ils sont chargés.
Mais, Messieurs, il y a un autre point de vue sous lequel la proposition que j'ai l'honneur de vous faire est extrêmement importante. Les prisons de Paris sont remplies de prisonniers; déjà
peut-être, par une mesure inconsidérée, vous avez ordonné ou vous avez permis que le donjon de Vincennes soit arrangé pour y renfermer des prisonniers. Cette disposition a une foule d'inconvénients que je pourrais détailler, mais dont je ne vous rapporterai que deux. Le premier, c'est une dépense énorme; le second,c'est la difficulté de faire aller les prisonniers, pour être entendus, dans les tribunaux de Paris qui doivent connaître de leurs affaires.
D'après toutes ces considérations et surtout d'après la nécessité qu'il y a que la nation sache qu'on s'occupe efficacement de juger les gens qui se permettent de troubler le repos public, ie demande que l'Assemblée nationale décrète qu'il sera pris les précautions les plus promptes et les plus sûres pour que les prisonniers détenus dans la prison de l'Abbaye, pour crime de lèse-nation, soient transférés incessamment à Orléans. (Applaudissements.)
En reconnaissant la nécessité de la mesure que propose M. d'André, je demande d'abord que M. le Président soit chargé de re retirer par devers le roi, comme l'a dit M. d'André, pour le prier de se faire donner les instructions les plus promptes pour savoir si le local destiné à recevoir les prisonniers à Orléans, est dans un état si sûr, que la tranquillité publique ne puisse pas être troublée ; secondement, qu'on les transfère dans cet endroit par les voies les plus sûres.
Je m'arrête un instant sur un objet que M. d'André n'a fait qu'effleurer et qui me paraît digne de toute votre attention : je veux parler du donjon de Vincennes. Un matin, le comité des domaines, pressé par la municipalité de Paris, vous proposa d'autoriser celle-ci à réparer ce donjon qu'on aurait dû détruire. Cette dépense qui vous a été proposée sous le prétexte spéc eux qu'il n'y avait pas assez de local à Pans pour loger les prisonniers, paraîtra futile au moins, pour ne pas dire davantage ; il faut donc i'arrêter.
Je demande, en conséquence, qu'il soit décrété que dès aujourd'hui on ne fera plus aucune dépense au donjon de Vincennes et qu'il ne servira plus à rien, parce qu'il ne doit servir à rien et qu'on doit anéantir et non réparer ce monument du despotisme. (Vifs applaudissements à gauche et dans les tribunes.)
J'appuie les propositions qui viennent de vous être faites, et je m'étonne avec les préopinants, que l'on soit parvenu à entraîner l'Assemblée dans une mesure qui me parait à la fois contraire à l'économie et aux principes de la liberté dont nous devons toujours être animés.
Je ne crains pas de dire qu'il est honteux de laisser subsister plus longtemps, à la vue de cette capitale, une forteresse qui n'était, pour me servir d'une expression commune, qu'un nid à tyrans. {Applaudissements.) S'il était prouvé que nous n'eussions pas d'autres moyens de pourvoir à la sûreté des prisonniers qui sont accusés de crimes de lèse-nation, s'il était démontré qu'aucun autre endroit de cette capitale ne pût également assurer leur sauvegarde, je crois alors qu'il faudrait sacrifier quelque chose à la nécessité publique. Mais s'il est vrai que ce donjon ne peut contenir que 80 prisonniers, je demande pourquoi il faut encore renouveler une espèce ue prison d'Etat dont la vue a si longtemps scandalisé tous
les bons citoyens. Messieurs, il y a plus de huit jours que j'aurais fait la motion de détruire ce d njon, si alors ce vœu n'avait pas été inconsidéré et inconstitutionnel.
La tranquillité publique a été, comme on le sait, instamment troublée à ce sujet. Mais à présent qup le peuple est parfaitement dans l'ordre, actuellement que tout est parfaitement tranquille, actuellement que le peuiile de Paris ne témoigne que ce qu'il témoignera toujours, lorsqu'il sera laissé à lui-même et lorsqu'il ne sera pas auité par les ennemis de la cno-e publique, je porte en son nom et je porte au nom de la nation, dont j'ai l'honneur d'être le repr sentant, le vœu de démolir cette scandaleuse forteresse.
Je fais donc la motion que l'Assemblée nationale décrète que le donjou de Vincennes sera démoli, que le département sera chargé de cette démolition, et qu'il sera en même temps chargé de veiller à ce que cette démolition ne soit accompagnée d'aucun désordre. (Vifs applaudisse-ments.)
J'appuie la motion, car j'avais demandé la parole pour la faire.
J'appuie la motion des deux préopinants, car je n'aime point les prisons ni les forteresses ; mais je crois devoir vous proposer un amendement sur la proposition de M. d'André, au sujet de la transi tiou des prisonniers à Orléans. Je dois vo s p évenir, Messieurs, qu'outre legrand nombre de prisonniers que vous devtz avoir, vous devez vous att ndre à en avoir encore incessamment 600 de plus. (Murmures.)
J'ai l'honneur de vous prévenir qu'il est impossible que l'Assemblée i aùonale ne prenne pas en considération.... (Rires.)', oui, Messieurs, je vous dénonce une tyran ie, une vexation effroyable. J'ai le droit de vous faire cette uénonciation, j'âi le droit de vous dire qu'on ne peut pas enfermer des hommes dont le vœu public est aussi connu que celui-ci, que tous doivent être punis...
Plusieurs membres : Oui ! oui! Tous 1 tous I
Eh bien ! Messieurs, je puis le dire à l'Assemblée : du moment que vous direz (ce que je ne peux pas imaginer, car te vœu de quelques indivi lus n'est point le vœu de l'Assemblée nationale), que tous doivent subir le sort des 8 personnes respectables...
Plusieurs membres à gauche ; Oui 1 oui I
qui sont à l'Abbaye (Rires.), j'irais m'enfermer avec eux.
Plusieurs membres: Oui ! oui !
Je propose donc, pour amendement, qu'on excepte la translation des huit personnes, dans lesquelles est cornons le lils de M. Bcrthier, intendant de Paris. (Murmures.)
Plusieurs membres : La question préalable.
Vous ne pouvez pas encore transférer les prisonniers à Orléans pour être jugés par un tribunal qui n'y est pas encore. Je m'en réfère, quanta ce, à l'a isd M.LeChapelier. A l'égard de la motion de détruire le donjon de Vincennes, c'est une motion patriotique, Messieurs, elle est écrite dans le cœur de tout bon citoyen.....
Plusieurs membres à droite : Ah ! ah !
Et bon patriote; nous le sommes tous, nous sommes tous de cet avis, j'appuie cette motion. Il faut que le département de Paris s >it chargé de faire détruire ce donjon.(Applaudissements.) Relativement à la motion qui vous a été faite par le dernier préopinant, nous ne devons pas nous en occuper. Chaque département est chargé de disposer les choses de manière qu'on puisse avoir de petites maisons pour ceux qui méritent d'y être mis.
Dans les propositions qui vous sont faites, il y en a une qui ne peut pas souffrir de difficulté,en ce qu'il d agit seulement d'exécuter, avec les précautions nécessaires, la destruction entière et absolue du donjon de Vincennes; mais je vous fais observer qu'il y a une chose de la plus grande importance qui doit fixer votre attention et qui doit vous être pré-entée sous deux jours par vos comités de jurisprudence criminelle et de Constitution ; c'est l'état des prisons de Paris et les mojeus à prendre pour que las tribunaux de Pans puissent les vider.
D'après oes détails très positifs qui m'ont été remis, il résulte qu'il y a dans ce moment-ci, dans les pri ons de Paris seulement, 1,801 prisonniers et 1,400 proi ès à j ger. Je pense donc que vous devriez ajourner cette question jusqu'au moment où il vous sera présenté un plan pour vider les prisons et pour hâter le jugement des procès.
Le moindre inconvénient de la motion de M. Le Chapelier, c'est de faire croire que l'Assemblée nationale a été trompée par la municipalité de Pans,et, sous ce rapport, la motion est inconsidérée. Ce n'est point dans ce moment-ci que l'on doit détruire le donjon de Vincennes, dont les prisons sont établies pour la commodité et la santé des prisonniers. En conséquence, je detmnde l'ajournement de la motion îucidenie de M. Le Chapelier.
J'adopte la proposition de M. d'Audré et celle de l'ajournement faite par M. Duport. Je consens aussi à la démolition du donjon, sauf à renvoyer au comité des domaines, pour qu'il présente les moyens les moins coûteux pour y parvenir.
Il est très possible et très convenable à la fois que le comité d'aliénation vous présente incessammeut un projet de décret, par lequel le château de Vincennes sera mis en vente, avec la condition imposée à l'acquéreur de le démolir. Par ce moyen, vous soulagez le Trésor puolic d'une dépense très considérable.
Mais dans quel moment vient-on vous proposer cette motion? Dans un moment où, je ne sais par quelle intrigue, le peuple s'est porté à Vincennes pour exécutercette démolition. (Applaudissements à gauche). Si nous voulons faire calomnier l'Assemblée nationale, rendons-nous à la motion qu'on vient vous faire. On dira dans les départements que l'Assemblée naiioriale ne fait que céder à des mouvements populaires. (Applaudissements.) Je demande que la motion de M. Beaumetz et celle de M. Le Chapelier soient renvoyées au comité, et que la motion de M. d'André, qui me parait infiniment simple, soit mise aux voix.
Je dois justifier le comité, et dire
que la proposition, ée réparer cette prison a été faite par un motif d'humanité. On nous a dit que les dépenses,à faire ne monteraient qu'à .8,000 ou 10,000 livfles.,» et nous avons des lettres de la-mu-nieipalité qui le constatent. Nousvous supplions de nous adjoindre au comité d'aliénation, pour prendre;les mesures les plus convenables à cet égard.
Je dois répondre à M. Merlin 'que je-tne suis permis d'être l'organe du vœu du peuple dans cette Assemblée pour cette démolition; que, dans l'instant oU la tranquillité publique était parfaitemeaitr.établée,etoùlekpeuple ayant mis, comme il le doit, sa confiance entière dans ses représentants, il pouvait et il idevait énoncer un voeu tq.ui n'a jamais été combattu, pas même des vrais amis de la liberté.
Je déclare qu'autant j Saurais résisté à une pareille impulsion, lorsqu'il était emporté par des mouvements violents, par des mouvements irréguliers, inconsidérés eidnconstitutionnels,, autant je suisfobligé, comme représentant ide la nation, de faire une motion, qui me paraît,nécessaire pour abattre les anciens trophées de notre servitude et pour élever à leur place les étendards de la liberté.
On ne peut opposer à la motion de M. Le Chapelier aucun smotif raisonnable, demande q.u?elle soit mise aux voix.
Plusieurs membres : Aux voix I aux voix ! (La discussion .est fermée.)
Je demande d'abord la division de la motiicn de M. d'André et de celle de M. Le Ghar-pelier. Je demande ensuite la priorité pour la motion de M. d'André.
(L'Assemblée adopte la division et accorde la priorité à la .motion de M. d'André.)
Je mets aux .voix cette motion qui est ainsi conçue :
L'Assemblée nationale décrète que le roi sera prié de prendre les mesures les plus promptes et les plus sûres peur faire traduire des prisons de l'Abbaye tous les prisonniers accusés.de crime de lèse-nation idans les prisons de la -ville d'Orléans, pour y être jugés par le tribunal établi dans cette ville et chargé provisoirement de la connaissance des crimes de cette nature. »
(Cette motion est décrétée.)
Je demande au moins que l'assemblée nationale ^arrête toutes les dépenses ultérieures pour la réparation du donjon de Vin-cennes: secondement, que l'Assemblée décrète que le donjon xle Viaceanes sera déclaré vendable. Je crois qu'il faut l'abattre ; mais, dans ce cas, je demande par amendement qu'on démolisse également tant d'autres châteaux iqui ne sont bons qu'à renfermer des prisonniers, tels que le château d'If.
Soit que vous déclariez vendable, soit que vous décrétiez la démolition, cfest absolument la même chose ; mais, en ce moment-Gi, devez-vous le faire ? Non, sans.doute, parce que vous «auriez ilair d'avoir lait un décret de cir-constance, ce que vous devez soigneusement éviter. Déclarer que les travaux cesseront, voilà tout ce que vous devez faire. (L'Asaemblée décrète le renvoi de la motion de
M. Le Chapelier .à l'examen des comités d'aliéné tion et des domaines réunis.)
La députation s'est ren-due au château pour s'informer de la santétdù roi. &ous n'avons point pu pénétrer dans «on appartement, parce que c'était le moment du redoublement, il. de Duras est venu au-devant de nous, et .a annoncé que;l'état de la santé du roi paraissait être meilleur ; que .le, redoublement n'avait pas de symptômes dangereux* comme on gavait craint. La r eine, ayant appris que nous y létions, est sortie elle-même pour nous faire la même déclaration et nous remercier de l'intérêt que l'Assemblée nationale prenait à sa santé. (Applaudissement&,)
L'ordre du jour .est la suite de la discussion hu projet de décret sur le recrutement, les engagements, les rengagements et les congés.
, rapporteur, donne lecture des différents articles du titre V.
Un membre propose, sur l'article .2,,un amen-r dement en faveur des troupes coloniales qui, revenant de leur congé dans les. Iles, doivent obtenir un secours pour fournir aux frais de leur traversée.
Un membre propose, sur le même article, un amendement ayant pour objet de fixer un taux plus considérable en faveur des soldats qui s'engager,ont pendant la .guerre,.
(Ces deux amendements sont, après quelque disûussion, renvoyés à l'examen du comité.)
Plusieurs membres présentent divers amende-^ ments aux différents .articles du titre V du projet de idécret. , , ;
Plusieurs de ces amendements sont adoptés et insérés dans la rédaction des articles qui sont compris dans le décret général ci-après :
décret
Sur le recrutement, ]les engagements, les rengagements et les congés.
TITRE PREMIER.
L'Assemblée nationale, ayant entendu le rapport de son comité-militaire sur le recrutement des troupes de ligne, les engagements, les rengagements et les congés, décrète,:-
Art. 1er.
Tous les officiers, saus-of liciers et soldats ule toutes les armes en activité de service, ou attachés à quelques régiments, pourront se livrer er">au travail des recrues, dans le lieu de leur domicile ou de leur résidence ; mais ils ne pourront le faire que pour le régiment même clans lequel ils serviront, sans pouvoir, jamais, et sous aucun prétexte, engager aucun recrue pour un autre régiment.
Art. 2.
Tous les officiers, sous-officiers et soldats de toutes les armes retirés du service, ainsi que tous particuliers, de quelque état qu'ils soient pourront également se livrer à ce travail dans 'le lieu de leur domicile ou de leur résidence ; mais
-Ils ne pourront le faire qu'en vertu d'uflewm-j /mission expresse pour recruter à eux donnée! par le conseil d'administration d'un régiment ; : ils tue pourra ntHrecevoir de pouvoir de-plnf ieurs ;à latis, et ils .'ne pourront, -sous aucun prétexte, ? engager pour : aucun autre 'que pour cvlui fui les y aurait autorisés.
Art. 3.
Indépendamment de ces deux espèces de re-cruteurs, lés conseils ^administration, en cas d'io suffisance Jde ces moyens, pourront, #ft leur parait nécessaire, défauher ien -outre lafls les villes ou dans les départements, des officiers, sous-officiers et soldats recruteurs; mais ils seront tenus de leur délivrer, ; à cet effet, des commissions et pouvoirs, sans lesquels ils ne pourront être autorisésià s'occuper de ce travail.
Art. 4.
Tous les ôfficierB,'sous-officiers et soldats en activité de service ou'retirés ; tous les 'particuliers autorisés à recruter dans le lieu de leur idainicite ou de leur résidence, ainsi que tous officiers, sous-officiers ou soldats détachés de leur régiment à cet effet, conformément aux jdis-positions des articles 1, % et 3 ci-dessus, seront tenus, avant de se-livrer au travail des recrues, de déclarer au commandant militaire, et au commissaire des guerres, s'il y en a, 'et en outre à :1amunicipalité du lieu, et au directoire du district, l'intention dans laquelle ils sont de s'en occuper, de nom du régiment pour lequel ils travailleront, et de leur demander toutes les permissions nécessaires en conséquence. La municipalité, sur le vu de leurs pouvoirs visés par le directoire du district, ou après avoir reconnu leurs droits résultant de ractivité même de leurs-services, leur délivrera, sans pouvoir le refuser, iun certificat de 'recruteur, et les enregistrera comme étant autorisés à cet effet pour telirégiment nominativement : en conséquence, tous les engagements faits par des individus non enregistrés à la municipalité, ou par eux, pour d-'autres régiments que pour ceux pour lesquels ils auraient été inscrits, seront déclarés nuls et de nul; effet.
Art. 5.
Les engagements qu'ils feront contracter ne seront réputés valables qu'autant qu'ils seront passés dans les formes prescritt s, et qu'ils auront été ratifiés avec les formalités qui seront ordonnées ci-taprès.
Art. 6.
'Tous lescfficiers, sous-officiers et soldats, employés au travail des recrues, quoique non domicilies habituellement dans le iieu,seronta&sujettis à tous les règlements de ville et^xiepolice, comme les autres citoyen?, et le seront en, outre à .tous ceux ;de .cette espèce qui pourraient têtue faits particulièrement concernant les recruteurs,,par les corps administratifs des lieux où ils seront employés, ainsi qu'aux dispositions qui seront .prescrites ci-après .pour . assurer .l'oEdre de. leur travail.
.Art. 7.
11 ne sera plue exigé des officiers aucun homme de recrue comme condition 'de leur semestre, ~Gengé, ou de leur admission au Hgervice; ii^e ;le«rsera plus fait-en conséquence aucune Tete-'ime1 en ïâison des hommes qu'ils n'auraient pas engagés.
TITRE 11.
Des recrues.
Art.1er
Dans toutes les tronpes.on n'engagerait l'avenir de recrues que depuis l'âge de 16 ans accomplis jusqu'à 40 ans en temps de paix, et jusqu'à 45 ans, en temps ;de guerre,, pourvu toutefois que ceux qui auront ce ,dernier .âge, aient, précédemment servi, et qu'ils soient eocore en état jie remplir la durée entière d'un engagement. Ceux qui .s'engageront avant l'âge de 18 ans, .ne pourront le faire que du consentement de leurds pères ou mères, ou tuteurs ou curateurs, s'ils en ont; sans ce consentement,, leur engagement . sera .déclaré nul. A 18 ans, ils,le seront sans aucune intervention de .famille, et ils ne pourront plus être admis à aucune réclamation. Les présentes .'dispositions n'auront point d'effet rétroactif pour les soldats déjà engagés dans l'armée,avant lîâge de 18 ans.
Art. .2.
Aucun régiment français, soit d'infanterie, d'infanterie légèreysovt de cavalerie, dragons ou chasseurs, ne pourra, sous aucun prétexte, engager des hommes'nés hors de la domination française, ni déserteurs d'aucun régiment.
Art. 3.
Les régiments ici-devant! connus sous te'nom d'Allemands, Irlandais et Liégeois, seront seuls autorisésengager des étrangers. Il leur 'sera permis néanmoins d'engager des Français; mais il leur sera défendu, sous aucun prétexte, de prendre des déserteurs des régiments français, à moins qu'ils n'aient eu leur amnistie.
Art. .4.
Les régiments'suisses continueront l^i opérations de leurs recrutements, 'conformément à leurs usages et ;à leurs capitulations.
Art. ,5.
Il est défendu d'engager, sous aucun prétexte, les déserteurs, les vagabonds,les mendiants d'habitude, les gens suspects ou soupçonnés de crime, ceux poursuivis et flétris,par la. justice, ainsi que ceux qui auront été chassés des régiments.
TITRE: III.
Des engagements.
Art.1er
Toût rmUteur sera'tenudettéctarerfàl'homme de recrue, qu'il veut engager, le nom du régiment, et l'espèce dé groupé pour laquelle il l'en-jage.
Art. 2.
! La durée des engagemerttsdans 'toutes les trouves, tant d'infanterie que de cavalerie, ^dragoirg, chasseurs ou bussarfls, sera 'fixée à .8 ans, il, ne -pourra,'sousauenn'prétexte, êtremportée au âélà.
Art. 3.
.Le prix des engagements sera déterminé»en raison tle'la taillelles iiommes, -et sera toujours
porté en dépense par les recruteurs et par les régiments, tel qu'il aura été payé réellement; il sera divisé en deux parties: l'une qui pourra être donnée comptant à l'homme qui s'engagera, et l'autre qui sera toujours réservée au régiment, et servir à lui fournir tous les effets de petit équipement qui pourraient lui êtie nécessaires, ainsi qu'il sera plus particu ièrement prescrit par les règlements.
Art. 4.
Le recruteur, après avoir pris sur la conduite, sur l'âge et la probité de l'homme qui se présentera à lui pour s'engager, tous les renseignements nécessaires ; après s'être fait repré-enter tous les certificats dont il pourrait être porteur, pour constater son âge et son existence civile ; après s'être assuré du consentement de ses père, mère ou tuteur, s'il n'a pas 18 ans, en-lin, après avoir fait vérifier dans les formes qui pourront être prescrites par les règlements, qu'il n'a point d'infirmités qui puissent l'empêcher de porter les armes, lui iera signer son engagement.
Art. 5.
Tout engagement contracté dans l'ivresse, par surprise ou par violence de la part du recruteur, sera déclaré nul à la ratification.
Art. 6.
Si l'homme de recrue sait écrire, il remplira lui-même l'imprimé de son engagement, en y écrivant de sa main ses nom, demeure, âge, et les sommes convenues avec lui, tant payables comptant, que payables à son arrivée au régiment, lesquelles seront détaillées en toutes lettres; il le datera de même, et le signera de ses noms de baptême et de famille.
Art. 7.
Tout engagement qui ne sera pas daté, rempli en toutes lettres, et signé par le recrue, ainsi qu'il est prescrit en l'article précédent, sera déclaré nul ; et, pour le rendre valable, si le recrue ne sait pas écrire, il fera sa marque au bas, en présence de deux témoin®, par l'un desquels les blancs de l'engagement devront être remplis, et qui devront le signer tous les deux en celte qualité.
Art. 8.
Ces témoins ne pourront être des militaires, sous peine, de nullité de l'engagement; ils seront pris parmi les domiciliés de l'endroit, et il sera lait mention, au bas de leur signature, de leur demeure et de leur qualité.
Art. 9.
L'engagement, quoique signé et soldé, ne sera valable néanmoins qu'après la ratification faite à la municipalité du lieu, et ainsi qu'il sera dit ci-après.
Art. 10.
Le recruteur sera tenu de présenter dans les 3 iours les hommes de recrue qu'il aura engagés, à la municipalité du lieu, pour leur faire ratilier leur engagement : cette ratification ne pourra avoir lieu dans la même journée pendant laquelle l'engagement aura été contracté, ni être remise au delà de 3 jours.
Art. 11.
Si l'homme de recrue, au moment de la ratifi-
cation, réclame contre la validité de son engagement, contre la vio'ence qui aurait pu être employée pour le lui faire contracter, ou contre son ivresse, dont on aurait abusé, la municipalité vérifiera le fait. S'il est grave, elle en iera une information dans les règles : si cette vérification ou celte information lui font juger indispensable de ne point ratifier l'engagement, elle le refusera; mais elle ne pourra le faire qu'après avoir appe'é, pour être témoin des raisons de son refus, le commissaire des guerres, s'il y en a, ou, à son défaut, un officier, n'importe de quel grade, soit en activité, soit retiré du service.
Art. 12.
Si la municipalité croit devoir prononcer la nulli'é de l'engagement, elle fera restituer, en sa présence, au recruteur, par le recrue, la somme stipulée lui avoir été payée comptant, telle qu'elle sera énoncée par son engagement, à moins que ce dernier ne puisse prouver qu'elle ne lui a pas été réel'ement délivrée. S:, au contraire» elle croit devoir procéder à la ratification, elle le fera en présence du recrue et du recruteur, en signant au bas de l'engagement la formule de ratification qui y sera insérée.
Art. 13.
Si l'homme de recrue, réclamant contre la validité de son engagement susceptible d'être déclaré nul, n'est pas en état de restituer aussitôt les sommes qu'il aurait touchées, il sera tenu de fournir caution pour cette somme, dans le délai de 3 jours ; sinon, après cette époque, son enga-gemem sera déclaré valable, et il sera obligé de rejoindre le régiment.
Art. 14.
Chaque municipalité tiendra un registre de recrutement ; elle sera tenue d'y inscrire le nom de tous les recruteurs, de quelque espèce qu'ils soient, qui auraient fait constater par elle leurs droits ou leurs pouvoirs pour recruter, ainsi que tous les engagements présentés par chacun d'eux, qu'elle ratifiera, ou dont elle relusera la ratification ; et,dans ce dernier cas, elle y détaillera les raisons qui l'y auraient déterminée, ainsi que les noms du commissaire des guerres, ou de l'officier appelé pour être témoin de ce refus de ratitication, lequel sera tenu de signer au registre.
Art. 15.
Les recrues qui se feront au corps, soit en garnison, soit en route, seront engagés avec les mêmes formalités. La municipalité de la garnison ou du lieu de passage sera chargée des ratifications, et sera tenue aux mêmes inscriptions sur les registres de recrutement, que toutes les municipalités devront avoir. Lorsqu'un régiment sera en route, les ratifications pourront se faire dans la journée même, si le régiment n'y a pas séjour.
Art. 16.
Tout homme-de recrue qui, se repentant de s'être engagé, voudrait, avant la ratification, faire annuler son engagement, sans cependant pouvoir attaquer sa validité, pourra y parvenir en portant sa demande à moment à la municipalité. Celle-ci, mais en présence seulement du commissaire des guerres, s'il y en a, ou, à son défaut, d'un officier, n'importe de quel grade, soit en activité, soit retiré du service, appelé à cet effet,
ainsi qu'en la présence du recruteur, en prononcera la résiliation aux conditions prescrites ci-apiès. Une fois la ratification consommée, l'homme de recrue, pour obtenir son dégagement, sera tenu de se conformer aux dispositions qui seront prescrues ci-après pour les congés^ de grâce. Il est défendu expressément à tout recruteur d'annuler les engagements, sous aucun prétexte et pour aucun prix, lorsqu'ils auront été ratifiés.
Art. 17.
Tout homme de recrue qui désirera, conformément aux dispositions de l'article précédent, de se faire restituer son engagement, pourra le faire en remettant sur-le-champ au recruteur la somme reçue comptant par lui en s'engageant, et stipulée sur son engagement ; et, en outre, celle de 24 livres pour indemnité des faux frais de recrutement : eu p tyant par lui ces deux sommes, le recruteur, sous aucun prétexte, ne pourra en exiger davantage, ni se refuser à lui remettre son engagement.
Art. 18.
La municipalité, en annulant ainsi cet engagement, en fera mention sur son registre, et cette mention sera signée par le commissaire des guerres, ou l'officier appelé pour le suppléer, ainsi que par le recruteur.
Art. 19.
Toutes conventions portées dans les engagements, ou faites verbalement, tendant à les annuler eu restituant les sommes reçues dans un temps fixé, ainsi que toute promesse d'une solde plus forte que celle établie par les décrets, ou d'un grade quelconque en arrivant au régiment, sont défendues, sous peine de nullité de l'engagement.
Art. 20.
S'il s'élevait des contestations pour raison des engagements, soit entre les recruteurs et les hommes engagés, soit entre les recruteurs de différents régiments, les uns et les autres seront tenus de s'adresser à la municipalité, qui jugera de la validité de l'engagement, mais en présence seulement du commissaire des guerres, s'il y en a, ou, à sou défaut, d'un officier, n'importe de quel grade, appelé conformément aux dispositions ci-dessus.
Art. 21.
S'il s'élève quelques difficultés entre les municipalités et les recruteurs, commissaires des guerres ou officiers appelés pour juger de la validité des engagements ou de leur restitution, les contestations sur l'appel du recru eur, du commissure des guerres ou de l'officier appelé, seront portées devant le directoire du département, qui prononcera, mais en présence seulement du commissaire ordonnateur du département, ou de celui qui en fera les fonctions.
Art. 22.
Les recruteurs, ainsi que les recrues dont les engagements auront été ratifiés, seront toujours immédiatement sous les ordres des commandants militaires dans les villes où il y en aura d'établis, et leur seront en conséquence subordonnés pour tout ce qui pourra intéresser la police et la discipline militaires.
Art. 23.
Il sera statué par les règlements sur les précautions ultérieures à ordonner, soit aux gendarmes nationaux, soit aux commandants ou commissaires des guerres employés, soit aux régiments mêmes, relative ment au service des recruteurs età leur comptabilité, ainsi que relativement aux recrues, à leur e ivoi, à leur conduite aux régiments, à leur admission ou à leur réjection.
TITRE IV.
Des rengagements.
Art. 1er.
Tout sous-officier ou soldat, tant dans l'infanterie que dans les troupes, à cheval ou l'artillerie, qui sera reconnu en état de continuer ses services, et qui aura servi de manière à faire désirer de le conserver, sera admis à se rengager de nouveau pour 2 ou 4 ans au plus; c'est-à-dire, pour un quart ou un demi rengagement de 8 ans ; le tout à son choix ; il pourra le faire lorsqu'une lui restera plus que 2 ans de service de son engagement ou rengagement courant. Il pourra le faire aussi pour 4 ans ou pour 8 ans, mais dans le moment seulement où il serait dans le cas d'obtenir son congé absolu.
La demande en sera faite en son nom au conseil d'administration du régiment, qui prononcera en conséquence sur l'acceptation ou sur le refus.
Art. 2.
Les prix des rengagements seront payables de deux man ères, au choix de l'homme rengagé : ou en argent comptant, ou en une haute paye1 pendant toute la durée du rengagement : ils seront les mêmes pour tous les grades. Il sera en conséquence stipulé sur le certificat de rengagement si la valeur a été convenue payable en argent ou en haute paye.
Art. 3.
Les prix des rengagements en argent, ainsi que les hautes payes qui en seront représentatives, augmenteront progressivement du premier au second, et du second au troisième rengagement, c'est-à-dire de 8 ans en 8 ans. Le troisième rengagement, qui n'aura lieu qu'après 24 ans de service révolus, ne sera plus qu'annuel.
Art. 4.
Les rengagements, tant en argent comptant qu'en hautes payes représentatives, seront fixés pour toutes les armes ainsi qu'il suit, savoir :
ARGENT COMPTANT.
Infanterie française, étrangère et légère.
Premier rengagement de 8 ans, 100 francs, sur le pied de 12 1. 10 s. par an.
Deuxième rengagement de 8 ans, 130 livres, sur lè pied de 16 1.10 s. par an.
Troisième rengagement annuel, 20 livres par an.
Artillerie, mineuirr, ouvriers, cavalerie, carabiniers.
Premier.rengagement de § ans, 120, livres, fai-saut par ah 15. livres..
Deuxième, rengagement, ,150 livres^ faisant par an 18. LIS. s..
Troisième, rengagement annuel, 24 livres-, par an.
Dragons, chasseurshussards.
Premier rengagement de 8 ans, 110 livres, faisant par an 13 1,15 s-..
Deuxième rengagement de 8 ans, 140 livres, faisant par an 17 l. 10 îs..
Troisième rengagement annuel,, 21 livres, par an.
HAUTES . PAYES.
Tnfdnterie française, étrangère, et légère.
Premier rengagement, 9 deniers par» jpur,, faisant,par an 131. 1,3. s, .9 id..
Deuxième rengagement, 1. sou par jour,, faisant par. an 18 1. 5. s.
Tïoisième rengagement, 1 s.. 6 d. par jour, faisant par an 27 1„7. sy> d. '
Artillerie, mineum; ouurienSy cavalerie, carabiniers^
Premier rengagemènt, 11 deniers par jQtir, faisant par an 16 1. 14 s. 7 d.
Deuxième rengagement 1 s. 2 d. par jour, faisant 2iltl„ 5-s. 10 dL. par an.
Troisième, rengagement,, 1 s.. 8 d.. par jour,gisant par an 3Q 1. 8 s. 4 d»,
Dragons, chasseurs, hussardS.
Premier rengagement, tfife deniers par jour;, faisant 15 1. 4 s. 2 d. par an».
Deuxième rengagement, 1 s. 1 d. par jour, faisant 19 I. 15 s. 5 d. par an.
Troisième rengagement,, 1 s> 7 d.par jour,£ài-saiikiSL.l? Sv.ll d. par an..
Art. 5,
Le: montant de-ces hautes payes de rengagements sérac u mu lé avec ^solde de l'homme, pour établir le calcul des grâces-dont il pourrait être susceptible pour sa retraite, lorsqu'il les aura préférées aux rengagements payés comptant.. Ceux qui en auraient touché la, valeur de çette dernière:manière^ ne seront point, admis à réclamer la cumulation des hautes payes dont ila auraient pu se trouver susceptibles par leurs rengagements.
Art: 6.
Aucun, grade obtenu ne rengagera plus désormais dans aucune arme r ceux néanmoins qui se trouveraient dans ce cas, en exécution de FàTd6rmance du 20'juin 178», concernant le recrutement , resteront1 assujettis aux, rengagements^ contractés1 en conséquence", comme ayant reçu en iodemnitê ler prix stipulé pour ce rengagement par cette ordonnancé.
Art. 7.
Dans toutes les armes, excepté dans les régi-
ments suisses, qui; conserveront à cet: effet les usages de leurs capitulions^ les-adjudants, les sergents-majors > et sergents dans IZinfaeterie française* étrangère et légère,, ainsi que.- dans l'artillerie, le& mineurs et les ouvriers,.lesrnaaré-chaux. des > logis en chef; et- les, maréckmca de s logis ordinaires! dans toutés les troupes à chenal,, ne seront, plus engagés, à compter du jour ojù ils-parviendront à: ce gratte*. et; ils seront^ liboes d'abandonner ces emplois de la même manière que les officiers, moyennant leur démission, mais en prévenant -néanmoins trois mois a l'avance-..
En cessant ainsi; dfêtre: engagés, ils- ne seront point tenus de rendre la. somme qu'ils auraient pu recevoir, pour le: rengagement anticipé qu'ils^ auraient pu contracter'; mais: ils- cesseront;, è compter ae ce! jsurç de jouir de la, haute paye-qu'ils auraient! pu obtenir) à: ce titre.
Les présenter dispositions auront leur effet à; compter; du jour de; la, publication ; du présent ; décret* en faveur de tous ceux„r.eivêtus àp résent de ces grades. ja
Art.8
Tout sold it qui se rengagera, soit, dansrlemême régiment, soit, dans, unautre, coaserverales-droits^ résultant de l'.ànciènneté de ses.premiemser vices* pour l'acquisition des droits de:citayen actif,,bout la décoration militaire et pour la retraite.
Dans l'un et l'autre cas, l'intervalle du temps, entre le congé et le rengagement, ne sera pas compté pour obtenir ces récompenses.
Art. 9
Quoiiqp'un soldâtayant déjà servi dans un régiment puisse être dans le cas cfe jouir, dàns un autre, (fesdroits conservés par l'articl'e précédent!,,, il ne prendra néanmoins rang1 dans la compagnie L où il entrera, que du' j our de son arrivée et ne: pourra parvenir aux hautes payes qu'à son rang: d'ancienneté dans cette compagnie et au rengagement annuel que par une suite de services nécessaires à» cet effet, et non' interrompus dans le même régiment.
Tout soldat sorti d'Un^ régiment; et; qui s-'yren-gagera avant l'expiration" de trois mois-; y repren1-dra son rang d'ancienneté1, et même son grade,* vacance1 arrivant di'iiu' de ces emplois3: passé cette époque^ il, ne sera plus^aduri& à cette'faveur;
TITRE V.
Des congés d'ancienneté, des? réformes et des dégagements*.
Art. ler.
En temps de: paix,. Les? congés absolus seront toujours expédiés: ausjpur même deileur expiration.
Art. 2.
En temps de guerre, les congés- absolus qui viendraient à échoir.pendatrtila oampagneseront' retardés jusqu'au moment de la rentrée des troupes dans leur quartier d'hiver. Ils seront alors expédiés aussitôt, et il sera tenu; compte" aux hommes dans ce.cas, et par un décompte particulier, faits à. cette époque^ de^lapartiomde tempsr pendant laquelle leursi congés auraient été suspendue, en les indemnisant,, d'aprèsile tarif:fixé: ci-dessus, en raison dela.classeducrengagementi qu'ils auraient été dans le cas de contracter!;.
Art. 3.
Si les hommes dans ce cas préféraient la haute raye représentative du rengagement, ils seront libres de le déclarer au moment où leur congé absolu devrait leur être expédié ; alors ils en jouiront en raison de la classe de leur rengagement, conformément au tarif, à compter de ce jour, jusqu'à celui auquel leur congé absolu leur sera réellement expédié.
Art. 4.
Les congés absolus d'ancienneté seront délivrés, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, soit que l'homme soit présent au corps, soit qu'il soit absent par congé : dans-ce dernier cas, on ne lè forcera pas de rejoindre pour venir chercher sa cartouche ; mais alors il ne pourra pas réclamer les parties de sa solde et masse d'entretien de son absence, dont il n'aurait dû être payé que sur le rappel qui en aurait été fait à son retour, lequel rappel en conséquence n'aura pas lieu pour lui.
Art. 5.
II sera fait, à tout homme congédié par ancienneté, le décompte de tout ce qui devra lui revenir pour sa solde, ses hautes payes de son grade, ses 6 deniers de poche et sa masse d'entretien jusqu'au jour de son congé, s'il est présent au corps, ou jusqu'au jour seulement auquel il. se sera absenté, s'il est en congé ; dans l'un et l'autre, cas, ce décompte sera toujours détaillé sur sa cartouche.
Art. 6.
Le décompte de sa haute paye de rengagement, s'il y a lieu, lui sera toujours fait jusqu'au jour de son congé absolu, soit qu'il soit absent ou présent; il en sera fait particulièrement mention sur la cartouche.
Art. 7.
Tout homme congédié par ancienneté emportera avec lui l'habit, la veste, le chapeau et la culotte de son habillement courant, sans qu'ils puissent être échangés contre d'autres d'une moindre valeur. Il sera tenu de laisser son sabre, sa buffleterie et son armement, ou de renvoyer à ses frais celles de ces parties d'armement et d'équipement qu'il pourrait avoir emportées avec lui en congé, avant de faire réclamer sa cartouche, qui ne lui sera expédiée qu'après ce renvoi.
Art; 8.
Tout homme dans le cas d'être congédié par ancienneté, et qui se trouvera redevoir â la caisse du régiment, ne pourra obtenir son congé qu'après s être acquitté envers elle: en conséquence, il sera tenu de continuer ses services jusqu'à ce que, par ses économies, ou retenues consenties par lui, il se. soit totalement libéré.
Art. 9.
Tout homme de recrue arrivé à un régiment, lorsqu'il ne sera pas admissible, soit par défaut de taille, soit pour raison de quelques infirmités, ne pourra être renvoyé que sur l'avis du conseil d'administration assemblé à cet effet. La subsistance lui sera fournie' pendant quatre jours francs, non compris celui de son arrivée, pour lui donner le temps de se reposer; il lui sera remis, pour sa route, 3 sous par lieue, depuis
sa garnison jusqu'à l'endroit où il aura été engagé.
Art. 10.
Il sera statué par les règlements sur les différents cas dans lesquels ces faux frais devront être au compte du recruteur, et la manière de les porter en dépense sur la masse destinée au recrutement, lorsqu'ils ne devront pas être supportés par lui.
Art. 11.
Aussitôt qu'Un homme aura été admisrdans un régiment, il ne pourra plus-être réformé que par l'officier général chargé de-son inspection; et, excepté dans des cas de licenciement, il ne pourra plus être réformé faute* de taille,1 aussitôt qu'il y aura fait de guerre : les hommes dans le cas de la réforme seront présentés à l'officier général, afin qu'il puisse la prononcer, s'il y a lieu; ils ne pourront en conséquence être réformés que présents au régiment, à moins d'un cas d'impossibilité dûment constatée.
Art. 12.
Il sera expédié à chaque homme dans ce cas un congé de réforme, qui en détaillera.les causes et les motifs.
Art. 13
Tout homme, à son troisième rengagement, c'est-à-dire, ayant plus de 24 ans de service, ne pourra plus être réformé pour raison d'infirmités, de quelque cause qu'elles proviennent; il sera conservé au régiment, sans faire d'autres services que ceux dont il pourrait rester su^ceptibfe, jusqu'à ce qu'il puisse obtenir les grâces qui seront dans le cas de lui être accordées, d'après les règles prescrites à ce sujet.
Art. 14.
Tout homme qui serait dans le cas d'être réformé pour une infirmité résultant d'une blessure à la guerre, ou suite de quelque accident occasionné par son service, même en temps de paix, ne pourra l'être,, quel que soit son peu d'ancienneté, qu'en assurant son existence; il restera en attendant à son régiment, en ne demeurant assujetti qu'aux services dont il pourrait être encore susceptible.
Art. 15.
Il sera libre à tous les soldats de toutes les armes, en temps de paix seulement, de demander à se dégager aux conditions qui seront prescrites ci-après ; mais leur congé absolu ne pourra leur être expédié qu'au moment de la revue finale d'inspection de chaque année. Tous- ceux qui voudront obtenir ainsi leur congé seront tenus de se faire inscrire deux mois avant cette époque. L'état en sera présenté alors à l'officier général, et il sera autorisé à faire délivrer tous les ans des congés de cette espèce jusqu'à la concurrence du trentième du complet dans les régiments d'infanterie, et du quarantième seulement dans ceux de troupes à cheval, en suivant l'ordre d'inscription de ces hommes.
Art. 16.
Il ne sera délivré de congé de grâce qu'aux hommes présents aux corps. Si cependant quelques affaires importantes et pressées, bien constatées par les certificats des corps administratifs, exigeaient que quelque soldat fût congédié de
cette manière, sans attendre le moment de la revue, il pourra lui être expédié, en attendant cette époque, un congé limité, aussitôt qu'il aura fait la remise de ses effets «l'habillement et équipement, et de la somme qu'il sera tenu de verser à la caisse; mais sa cartouche de congé absolu ne lui sera jamais expédiée que par ordre exprès de l'inspecteur.
Art. 17.
Tout homme qui obtiendra un congé de grâce sera tenu de laisser au régiment toutes les parties de 8' n habillement, équipement et armement courant ; son décompte lui sera fait jusqu'au jour de son départ, comme aux hommes congédiés par ancienneté, sans pouvoir lui être reb nu sous aucun prétexte, non plus que les effets à lui appartenant.
Art. 18.
Tout homme redevable de quelque somme à la caisse du régiment, ne pourra être admis à obtenir son congé de grâce, qu'après s'être acquitté totalement envers elle.
Art. 19.
Tout homme, pour obtenir son congé de grâr-e, sera tenu de verser nréliminairement à la caisse du régiment le double de la somme stipulée ci-dessus pour le premier rengagement de 8 ans, dans son arme, s'il lui reste 7 années, et plus, à achever. Cette somme décroîtra d'un huitième tous les ans, en raison du moindre nombre d'années qui lui resteraient à courir; le tout conformément au tableau ci-après pour chaque arme, savoir :
Infanterie française, étrangère et légère.
8 ans de service..................... 200 1.
7 ans — ...................... 175
6 ans — ..................... 150
5 ans — ..................... 125
4 ans —. ..................... 100
3 ans — ..................... 75
2 ans — . ................... 50
1 an — ..................... 25
Artillerie, mineurs, ouvriers, cavalerie, carabiniers.
8 ans de service...................................2401.
7 ans — ....................................210
6 ans — ..........................................180
5 ans — ................................150
4 ans — ..........................................120
3 ans — ..................... 90
2 ans — ..................... 60
1 an — ..................... 30
Dragons, chasseurs, hussards.
8 ans de service.................... 216 1.
7 ans — ..................... 189
6 ans — ..................... 162
5 ans — .................... 135
4 ans — ..................... 108
3 aus — ..................... 81
2 ans — ..................... 54
lan — ........... ......... 27
Art. 20.
Tout homme qui obtiendra son congé de giâce
étant absent n'aura droit à réclamer son décompte que de la même manière prescrite pour le3 hommes congédiés par ancienneté par les articles précédents.
Art. 21.
Les cartouches des congé de grâce seront signées de tous les membres du conseil d'administration et de l'inspecteur; elles seront visées par le commissaire des guerres; elles exprimeront en tou'es lettres la somme qui aura été payée en raison des années de service restant à faire, ainsi que le montant du décompte payé à l'homme congédié.
Art. 22.
En temps de guerre, il ne sera expédié aucun congé de grâce; ce temps sera censé commencer du jour où un régment aurait reçu l'ordre de se porter au complet de guerre.
Art. 23.
Il sera statué par les règlements sur les autres formalités de détail pour l'expédition des différentes espèces de congés absolus, ainsi que pour la surveillance à ce sujet à prescrire aux commissaires des guerres chargés des revues et police des troupes.
L'ordre du jour est un rapport fait au nom des sept comités réunis des domaines, des finances, d'imposition, de féodalité, d'aliénation, de l'extraordinaire et ecclésiastique, sur la régie et la perception des droits incorporels dépendant des domaines nationaux.
, rapporteur. Messieurs, il est une branche du domaine national dont l'administration est très diflicile, et dont on ne peut cependant, sans une régie éclairée et vigilante, ni conserver le fond, ni maintenir le produit: ce sont les droits incorporels. Si, d'un cô'é, votre devoir est de ne point laisser dégrader cette partie de la fortune publique, votre juste désir est aussi de faciliter la libération des débiteurs sur qui elle pèse, et d'extirper, autant qu'il est en vous, cette dernière racine du tronc féodal. Sept comités, pénétrés de vos vues sages et bienfaisantes, se sont réunis dans l'intention de revoir attentivement ce que vous avez fait jusqu'ici pour les réaliser. Quelques dispositions simples, mais importâmes, leur paraissent nécessaires pour arriver à votre but; et je viens vous les proposer en leur nom. Elles se rapportent à trois points principaux : la régie, la vente et le rachat des droits incorpoiels. Le produit de ces droits est évalué de 15 à 20 millions ; et, lorsqu'il faut de grands efforts pour réparer les longs désordres d'un régime dissipateur, il est juste de ve ller avec soin sur cette portion précieuse du patrimoine de l'État.
(1) » Voscomités, Messieurs, n'ont point été arrê-« tés par la
considération que leur projet pour-« raif, à certains égards, paraître
s'écarter de « quelques-unes des mesures que vous avez déjà « adoptées :
ils ont cru que dans cette matière t rien ne pouvait vous lier,
lorsqu'il s'agit du
« Ce serait un grand mal sans doute, que sa « marche fût incertaine et versatile, et que la loi « de la veille pût être détruite par celle du len-« demun. Au milieu de cette mobilité funeste, « plus d'espérances raisonnables, plus de sécurité « légitime, et bientôt de la défiance universelle « résulterait la dissolution du corps social. Elle « est donc sage, elle est indispensable, cette « règle qui assujettit la législature à ne point re-« devenir sur ses propres décrets.
« Mais de qusls décre's ceci doit-il s'entendre? « C'est ce qu'il est essentiel d'expliquer pour * prévenir toute éiuivoque.
« La règle doit s'appliquer sans exception, à « tout décret qui forme une loi de l'Etat, c'e-t-à-« dire qui prononce sur les droits de la grande « société et sur les rapports civils et politiques « de ses membres. Mais en finance tout décret « n'est pas une loi, et tout décret qui n'est pas « une loi n'est pas soumis à la règle de l'irré-« vocabilité.
« Il est évident, en effet, Messieurs, que dans « cette matière le Corps législatif n'est pas « seulement législateur, il est encore adminis-« trateur. S'il exerce le pouvoir législatif lors-« qu'il établit l'impôt, il n'exerce que le pouvoir « administratif lors, par exemple, qu'il s'occupe « de la régie du domaine public. Alors les re-« présentants de la nation ressemblent à un « père de famille qui s'éiudie à tire* le meilleur « parti de son patrimoine; alors, si de premières « mesures ne les ont pas conduits assez direete-« ment à ce but, il ne doit pas leur être plus « dél'en iu qu'à lui de faire usage des moyens « d'amél oration : il n'y a nul inconvénient à « adopter cette distinction, et il y en aurait beau-« coup à la proscrire. Vous l'avez, Messieurs, « toujours cru juste, et vous en ? z déjà jugé « Papplicat'on nécessaire dans plusieurs cir-« constances ; je n'en citerai que deux. Vous « aviez d'abord confié à quelques-uns de vos « comités la liquidation de plusieurs parties de « la dette publique, et vous l'avez depuis ren-« voyi e au pouvoir xécutif. Vous aviez d'abord i décidé qu'on ne serait point admis à racheter « divis-ément les droits fixes t les droits casuels, « et depuis vous avez accordé la faculté de faire « cette division ; ce cernier exemple me ramène « aux droits incorporels qui font le sujet de ce « rapport. »
On présenta à votre délibération, au mois d'octobie dernier, la question de savoir de quelle manière ils seraient régis. La compagnie de finances, qui était chargée de la perception des droits de contrôle, fut citée alors comme l'in-trument le plus avaniageux de cette régie. Mais on ne savait encore ni si ies droits de contrôle seraient conservés, ni de quelle manière ils pourraient être remplacés; et comme on convenait en même temps qu'il était impossible de charger de la perception des droits incorporels les cor, s administratifs et les receveurs de district, il n'y eut d'autre parti à prendre que celui de les affermer.
Aujourd'hui, Messieurs, que l'état des cho?es est changé, aujourd'hui que le droit d'enregistrement n'est, au fond, que celui de contrôle, que sa perception exige les mêmes formalités et les mêmes agents, et qu'elle a également néces-
sité l'établissement d'une régie centrale, la question qui s'agitait au mois d'octobre se re-pré ente tout entière à votre examen; elle s'y représente même avec l'avantage qui résulte des réflexions et d'une expérience de quelques mois.
Vos comités, Messieurs, ont pensé qu'il fallait, sous peine d'une dégradation effrayan'e du fonds et du revenu des droits incorporels, en confier la perception à la régie du droit d'enregistrement ; je me hâte d'exposer les raisons qui les ont conduits à ce résultat.
Les choses peuvent être envisagées sous deux poi ts de vue différents : par rapport à l'intérêt de la nation, créancière des droits, et par rapport à l'intérêt des débiteurs. Sous ces deux aspects, la régie que vous proposent les comités a sur les baux de grands et nombreux avantages.
Trois causes doivent concourir, Messieurs, à la vilité du prix des baux ; il n'y a point de base certaine nour l'évaluer; il n'y aura point de concurrence suffisante pour l'élever à un taux raisonnable; et la nature même des droits incorporels ne permet de les louer qu'à très bas prix.
Je dis qu'il n'y a point de base certaine pour évaluer le prix des baux ; cela est évident par rappoit aux droits casuels auxquels d> s cas purement contingents font seuls ouverture; aus-i avez-vous déjà reconnu vous-mêmes, par cette raison, l'impossibilité de Ie3 affermer.
Il n'y a fiuère plus de certitude sur la quotité des droits fixes ; outre qu'ils doivent s'éteindre succe-siverm nt par la voie du rachat (ce qui écarte toute spéculation de quelque durée) les droits fixes des mouvances ecclésiastiques sont peu connus. On sait avec quel soin les corps, et notamment le clergé, s'appliquaient à dérober la connaissance nu produit de leurs liefs ; et tout fait présumer que les titres, qui n'auront point disparu dans les circonstances trop favorables à la fraude, fourniront peu de renseignements.
L'ignorance de ia véritable quotité des droits produit nécessairement le défaut de concurrence à l'adjudication des baux. Un fermier voulant toujours mettre toutes les chances en sa faveur, n'ulfrira presque rien d'uue chose qui sera peu connue; et si par hasard il se trouve parmi les » nchérisseurs quelque homme instruit, tel que l'ancien agent d'un co ps ecclésiastique, croy z que ses connaissances ne seront utiles qu'à lui, et qu'il s'en prévaudra pous s'assurer un bénéfice plus ample et plus certain.
Jesupposemainteuantque les droits incorporels soient paifaitement connus; je suppose qu'il se présente aux adjudications beaucoup d'enchérisseurs : il n'e-t pas moins inévitable que les baux se fassent à Vil prix. Car, quel sera l'homme assez fou pour ri.-quer beaucoup d'argent sur des objets aussi minutieux que mult p'iés, qui exigent une surveillance continuelle; dont la perception est long e, difficile et coûteuse ; dont la rési tance des débiteurs rend, en beaucoup d'endroits, le recouvrement périlleux ; dont enlin les plus solid s seront les premiers éteints par la voie du rachat? Il n'y a que l'espoir d'un gain excessif qui puisse inspirer une spéculation de ce genre.
Tous ces inconvénients, Messieurs, disparaissent dans le système d'une régie générale, confiée aux pencèpt u s du droit u'enrt gistrement.
Elle vous présente d'abord un avantage nécessaire, inappréciable, et que vous ne trouverez nulle part ailleurs : c'est la facilité que lui as-
sûre l'enregistrement' des actes, de suivre la trace: des. mutations, de connaître- les profits casuels qùi èn résultent,, et de découvrir lès redevables"; etce n'est pas seulement pour l'avenir qu'elle aura ces ressources ries anciens registres du contrôle, lès tablés alphabétiques; les sommiers, tenus dans Cfeque bureau sont, autant de répertoires précieux à l'aide desquels elle pourra pu conserver, ou même découvrir une foulé de droits que 1 ignorance dès fermiers laisserait perdre sans retour; et que les ecclésiastiques eux-mêmes auraient eti peine ^ dêfèndre. Ainsi fti perception, loin dé se cregrader dan s les main s d'une telle régie; s'améliorera au contraire par lê recouvrement de beaucoup d'objets inconnus. Cette première remarque est srimportanté, qu'elle devrait suffire seule pour opérer la conviction.
Observez d'ailleurs, Messieurs, .que cette régie a partout des préposés déjà exercés' à ce genre, de travail, puisqu'ils, font la recette des droits incorporels de l àncïeb domaine; que ces agents principaux ont acquis, par un long usage, la connais: ance st abstraite, et néanmoins si nécessaire de toutes les difficultés pratiques de la matière féodale ; et qu?au lieu du bénéfice énorme d'un fermier, vous n'aurez d'autre sacrifice à. faire, sur le produit des droits incorporels, que celui d'une modique attribution en faveur des. préposés de la régie. Jë dis modique; car, la, régie' ayant déjà une machine toute montée pour la perception du droit, d'enregistrement*, il ne s'agit pas de faire Tes-frais d'Un établissement nou? veau; maisseulémment dé dédommager lés agents dé cette perception d'un surcroît de travail.
Enfin, Messieurs, dans des temps difficiles, où le recouvrement dés droits ci-devant seigneuriaux éprouve tant dè:dé¥a.veuret,de. résistances, jè nF crains pas de-dire que le seul instrument qp'on puis-e employer avec succèp,,est un corps qui agisse au nom de l'Etat, et qui, couvert de là force publique, soit étranger à toutes les craintes comme à toutes les- considérations, particulières;
. Ce n'est pas'seulement sur le produit, c'est sur. le Capital même dès droits incorporel& que ,le.système dés baux influera d'une ma n ièr&e ffraya n te. If ne faut' point'se le, dissimuler, JMeSfsièurs,"dans, les circonstances actuelles, vous ne pouvt z. pas espérer que la plupart de vos- fermiers soient des: gens honnêtes et délicats. Or, comment des droits si* Sujets à s'éclipser, si faciles-à prescrire^pour-rônt-fl&se conserver; lorsque la" natièn. aura mis encore contre elle les chances; non seulement de l'ignorance, mais encore1 de la mauvaise, foi. des férmiersf Certamementils" ne s'appliqueront pas à veiller pour elle, toutes les fois qjue par dès pactions1 clandestines, dès* compositions-, frauduleuses avec les débiteurs; ils pourront soustraire le droit à-leur profit; et,dans lé désordre, où sont les titres de la plupart dès- établissements supprimés, l'occasion ne leur manquera, pas. -
Vous n'avez' rien die semblable à craindre, Mêssieurs, de. la régie du droit d'enregistrement. Assujetti à;une surveillance active,.à une compta? bilité sévère, son préposé,tient registre* dé toute sa recette; il est garant de chaque omission ;.il. compromettrait soïrétat par la moindre infidélité; en un mot,; la. simplicité, l'uniformité, et l'éxactitude sont les-caractères d'un, régime unique* dont les rapports établis d'un, bout du royaume à l'autre, partent d'un, même Bûint pour y revenir sans cesse;
Dans' l'état actuel dès^clmses,, lès baux, ont un inconvénient particulier, auquel on n'a pas assez
réfléchi r c'est l'extrême difficulté de fixer.iln-demnité du fermier à raison des extinctions successives opérées par le rachat. Vous avez prononcé qu'elle ne consisterait que dans une diminution du prix du bail, proportionnée au produit des droits rachetés;, ce qui veut, dire sans doute que l'indemnité ne sera pas du. produit total du droit éteint, mais seulement dans la proportion du produit de, ce droit aivec Iè, produit ae ceux qpi resteront soumis à; la jouissance du fermier. Or, aurart-on jamais lies véritables éléments de ce calcul ? Ne donnera-t-il pas lieu à des contestations perpétuelles avec le fermier, dont l'intérêt est d'atténuer ce qui restera, et d'exagérer la valeur de ce qui sera racheté ?" Vos corps administratifs "aUronMis le temps, auront-ils^ la possibilité, auront-ils même toujours la volonié de se déféndre; dê ses.- pièges ? N'en doutez, pas, Messieurs,.cette indemnité aéra un des plus infaillibles moyens.dë.réduire a rien, le prix de vos baux.
Dans le système d'une régie, non seulement it n'est aucun obstaclë dé'cette nature, mais de plus, vous assurez le succès de la. liquidation des. rachats; car cette opération doit se faire alors par les préposés de la régie, plus capables que qui que ce soit de là bien faire; et les lumières des corps administratifs ne, seront pas perdues,, puisque l'opération devra toujours être- vérifiée, et approuvée par eux.
Si les baux4 sont préjudiciables, à l'intérêt de nos finances, ils ne le sont pas moins à celui des. débiteurs.
Én. effét,,qui aurez-vous pour fermiers ? Des spéculateurs, c'est-à-dire des hommes durs et, avides. De toutes, parts une nuée da praticiens, se dispose à fondre sur cette proie; et le malheureux redeVablè, l'honnête habitant dès campagnes, ne doit attendre dé ces sangsues, ni les remises, accoutumées, ni les moindres délais; car l!im-pitoyable : fèrmier aura regardé d'avance* l'occasion de faire des,frai3 comme la, source la plus féconde'; de son bénéfice.
Ces vices ne, peuvent pas exister dans,le régime dés percepteurs du droit d'-enregistrement. D'abord vous assurez, au débiteur une remise fixe sur les-drûi's casuels ; vous lui procurez ensuite la commodité dé payer., en. même temps etdàns. lè même lieu, la dette du droit d'enregistrement et celle du droit incorporel ; enfin, il'n'a plus à faire qu'à des préposés, qui.n'ont pas d'intérêt, de. le vexer ; et s'il arrivait que quelqu'un d'eux, s'écartât, sur ce point, dès règles de Inhumanité,, est-ce que les corps administratifs ne sont point là:pour.la protection du citoyen? Messieurs; ils n'existent plus ces. temps ofi dés lais toutes fiscales n'offraient d'autre ressource contre une. perception arbitraire qu'Un inutile recours! au conseil- Aujourd'hui que lat Constitution: a placé ; en tre.lè lis c et lê citoyen des. magistrats piopu-I làires, s'il- y a quelque chose à. craindre,,c'est plutôt que lès intérêts du Trésor public soient quelquefois compromis.
' Les inconvénients: dès baux.à ferme. sont déjà, j reconnus, partout : des corps administratifs vous j ont fait parvenir à ce; sujet-leurs représentations! ' où. ils démontrent que la perte sera énorme ; et, leurs sollicitudes sont justifiées par l'expérience du gouvernement qui, ayant toutefois affermé les droits incorporels de l'ancien- domaine,, s'est convaincu ensuite que le seul1 moyen d'en tirerparti était de- les, faire, régir.
Cè; point une fois convenu, vous penserez, sans douté, Messieurs, qu'il n'y a que les percepteurs
dudroit ^enregistrement qui paissent être les agents de cette régie.
D'ôbord il est impossible qu'elle soit confiée immédiatement aux corps administratifs; iine faut pour s'en convaincre que cette seule considération. 11 n'existe,1 pour chaque'district; qu'un seul reeenreuT! ; et il est tel district ' où les' droits incorporels forment plus de 30,000 articles : aussi' aucun corps administratifWa-t41'jamais imaginé que les receveurs de1 dietricti déjà surchargés d'une recette immense, pussent suffire à la perception des droits incorporels : aussi vous-mêmes, Messieurs, avez déjà consacré en quelque sorte,i cette impossibilité' par.- votre décret du mois d'octobre.
.-Vous reconnûtes alors- que ce que vos; comités! soutiennent aujourd'hui, pour, tous les droits! in? corporels indistinctement: était déjà certain » par rapport aux droits; casuels;. Vous n'avez? voulu ni quïils fussent affermés, ni qu'ils: fussent régis par les receveurs de district. C'est au fermier,des droits fixes et annuels, dépendant de la terre la plus voisine, que vouff en avez confié la perception».en autorisant les directoires de district à lui allouer, une rem^e qui peut s'élever à 2 sous pour livre. Je ne crains .pas de le. dire,.Messieurs i: un tel expédient ne. peut se justifier que par la,po-sijLionj-émharrassante où vous tvous trouviez,alors. Car quel zélé, et même quelFe fidélité peut-on attendre de semblables agents? Et n'est-ce pas payer beaucoup trop chèrement, des hommes qui; peu- bupMnt surveillés, ne partageront ltnirs1- soin s entre lès' droits ' affermés etlës droits régis] qp'àutant qu'ils trouveront les moyens de gagner sur céux«-éi; autant que sur ceux-la, c'est-; à-arre de faire leur- main aux dépens du Trésor public?1
Il ne- serait pas; plus raisonnable; Mësé'èurs; cfautoriser chaque département: à établir une régie particulière daais son territoire. Toute régie1 partielfe'Sera loin de-présentertes mêmes avantages que celle du dr©itdi?enregistrement ; elle n'aura ni les mêmes facilités, ni les mêmes connaissances, ni cette uniformité de prihcipes et dJesécutiôn, sans- laquelle toute-administration esti.toot&'iia parfaite.
Et d'aitleuraf remarquezbien'qne,dànsla plan de vos:comités, oma prévu la seule objection par laquelle omeesayerait de-faire-prévaloir les régies-particulières. Unecondition essentielle de ce plan, . c'est que la, régie générale des. droite incorporels; sera sous là surveillance^ immédiate dès oorps-administratifs. Au moyen de cette précaution, nulle atteinte au droit* d'adfninislration que vous aweffi comféré à-ioes-;corps sur lesadomaines nationaux). Car .ce; droit,, ils* no'peweut l'exercer que par 'de^ agents; quelconques.';: et ih est au fbnd teè® indèïféœoUà lœ nature du droit que l'instru-ment soit un-receveur de district s ou un* fermier plutôtqu'un préposé? de t'enregi&trement, dès lorts q'uedîautoiàtédeilMmmiBtrateursur'cetinstrument quelconque est légal ementétaëlie. (Jues'il était vrai,Messieurs,que centains corps administratifs préférassent des' agents dont ils pussent chsposer; d'une manière, plus absolue, les motïfs s+jcrets'd!uu tel; désir neseraieutiqu'une raisondè pâus: en faveur de l!opmion de* vos comités 11 seraàti dangereux; en efféti)que l?agent, dè lèp perceptions fût; dans- les* mains- dés corps1 adminis1-tratifây- un' instrumentsservile-. Il faut au con1-traàre qu'il ait? assez de» force1 pour* ne' pouvoir êtï-e entraîné1 hors delà»lignes dm devoir: Enfin; si-les fOnetions-sonttellement distPibuées qtfilen résulté; une émulation réciproque} une1 suFveii^
lance1 mutuelle; nous aurons atteint' la sorte de perfection' dont1 une1 teferéfeië est" susceptible:
Vos comités, Messieurs; ne seront pas bornés à examiner quel était'lè mode le plus convenable de régii" les» droits incorporels ; ife se sont aussi proposé cette autre 'question importante': conviendrait^-il point de surseoir; quant à présent; à leur vente?' De puissantes raisons leur' ont rait-embrasser l'affirmative.
Il est évident,' d^bord^ quéfes' principales déjections faites contre1 lés baux s'élèvent égaler ment contre lés ventes? les mêmes .causes qui avi-Hront'Ië prix des uns dégraderont aussi lè p.rixdes autres -, et la condition dès débiteurs sera même plus dùre encore avec un-acquéreur qu'âvec un fermier; Car vous, pouve z du moins iniposej aux' fermiers l'obligation de certains ménagements: envers lesdébiteurs,etvous ne le pourrez pas-par dès- contrats de vente., Cé qui, dans lé pre-mièrCas; ne serait qpe-Pexercice au droit dè propriété;. eni serait, dans le second: cas, la violation:
D'après cela, Messieurs; si4 vous vendez maintenant; qu'arriverai-t-il T
1» «Vous ne retirerez presquej rien'de ce qui: représente un capital de 400, ou 500'millibns.. Vous ne- perdrez, pas1 seulement le quart" dés. droits dus en argent.et lé cinquième cres .droits; dus en nature, dont vous avez .consenti d'avance le Sacrifice ; vous ferez:tme' autre perte, inappré-ciablè, résultant de l'imperfection des évaluations; Gâr; comment'évalaer. ayec exactitude, dès droits* dont on ne'connaîtra pas là majeure partie? H est sensible que, sous lé rapport de futilité précuniaire, il n'est qu'un parti raisonnable celui d'assurer à la nation, plutôt qu'à d'avides spéculateurs, 1er bénéfice," des; rachats que l'émission des assignats né peut manquer d'accé-! lérer beaucoup..
2.Des vues bienfaisantes vous ont guidés jusqu'ici; dans tout'ce que vous avez décrété5sur les. ; dfoits incorporels; mais',si vous souffrez qu'ils*se: j vetïdènt} ces vues: seront trompées.. Des'compagnies' sont'prêtes èt accaparer partoutreette foule ; ae redevances; qui sont' un'moyen si. facile dé i vexatronr et! le régime féodal^ dont" vous avez ; désiré le prompt anéantissement;'se1 reproduira sous- une formeplus hideuse et plus oppressive.
3. JeivieHS déparier à dés législateurs humains; j jè m'àdresse maintenant à» des législateurs éclairés: Nvoyezivous.pas^Mêssieurs,que rien"n'est j pîus'con trairel'éspritidê votre Cbnstitutionqnie lia vente- dés droite incorporels?,En,supprimant I la féodalité; vous-avez eu principalëmenteuvue ] dè détruire, lav dépendance- dangereuse dans ïaS quelle eRë-avaitmrs le*pauvre à l'égard'du riche, , I par cette multitude dë' charges dbnt ' elle avait i grevé les'personnes etlèschoses : en créantune Constitution: lrbre? vous avez voulu rappeler l'homme' à sa dignité naturelle, et briser toutes les entraves par lèaquelles'sa volonté'pouvait être: j enchaînée. Vendez lès droits, incorporels, et ce | but est manqué pour longtemps. Les*droits féodaux qui, possédés pas la nation, n'ont rien d'inquiétant pour la liberté publique, une fois sortis j ae ses'mains*, vont former; sous Une dënomina-j tîon différente* autant de* nouveaux, fiefs qu'il' y aura d'acquéreurs. Ceux-ci' auront' strr les dé^-mteursl'asceHdant'irrésistible et'irrémédiable du-i droit'de^ Ifes vexer; et eomme la plupart dè ces* j aequéreurs seront1 peut-être de la pire espèce: d'hommes; là servitucte^qa'ils'exerceront sur les' mal heureux5 débiteurs* sera-aussilapirede toutes: Vos-'comités ont été^ surtout frappé dë-cèttfecom
sidération majeure, et ils n'ont pas douté qu'elle ne fit la même impression sur vos esprits.
En même temps qu'ils ont pensé, Messieurs, qu'il fallait surseoir à la vente des droits incorporels, ils ont cru qu'il fallait en favoriser de plus en plus le rachat, et en cela ils ont suivi la route que vous avez déjà tracée. C'est dans cette intention que vous avez permis aux débiteurs de racheter séparément les droits fix^s et les droits casuels appartenant à la nation. Il a paru à vos comités que cette faculté pouvait être étendue encore, et ils vous proposent aujourd'hui de permettre à chacun des codébiteurs solidaires ue droits incorporels de racheter séparément leur portion contributive. L'intérêt du Trésor public ne peut être compromis par cette mesure, puisque la partie subsistante du droit se trouve suffisamment assurée, soit par la solidarité des codébiteurs qui ne se rachèteront pas, soit par l'hypothèque privilégiée sur la partie de l'héritage qui ne se trouvera point litéré. Ce que la nation peut faire pour elle-même dans cette circonstance, le respect du droit de propriété ne permet pas qu'elle le prescrive aux autres créanciers. Mais son exemple ne sera point perdu; il ne peut manquer de tourner au profit des débiteurs. La plupart des anciens seigneurs, convaincus que leur intérêt est de hâier le rachat de leurs droits, s'emp esseront d'adopter une mesure dont l'effet infaillible est de l'accélérer. C'est ainsi que le Corps législatif, lors même qu'il ne peut rien par l'autorité de la loi, peut employer encore avec puccès l'influence de la raison.
Voici le projet de décret que nous vous proposons :
PROJET DE DÉCRET.
« L'Assemblée nationale, considérant que la réunion, sous un même régime, de la perception et régie des droits incorporels dépendant de tous les biens nationaux, aura le double avantage d'en maintenir la valeur et les produits, et d'anéaniir de plus en plus toute ancienne distinction entre les diverses origines de ces biens;
« Qu'il n'est pas moins essentiel de ne pas séparer la perception et régie desdits droits incorporels de celle des droits d'enregistrement des acles, celle-ci pouvant procurer aux agents de la première les moyens de suivre la trace des mutations, de connaiire les prolits casuels qui en résultent et de découvrir les redevables;
« Ët que l'établissement qu'elle vient de décréter, d'une ré^ie particulière pour les droits d'enregistrement, lui offre maintenant les moyens de réaliser, dans cette partie d'administration, les vues d'ordre, de simplicité et d'économie auxquelles elle est invariablement attachée.
« Après avoir entendu le rapport de ses comités des domaines, des finances, d'imposition, de féodalité, de l'aliénation, de l'extraordinaire et ecclésiastique, décrète ce qui suit :
Art. Ier.
Les droits ci-devant féodaux et tous autres droits incorporels, tant fixes que casuels, de quelque nature, espèce et quotité qu'ils soient, non supprimés par les décrets de l'Assemblée nationale et dépendant des domaines et biens nationaux, sans aucune distinction de l'origine desdits domaines et biens, seront perçus/régis et administrés, pour le compte de la nation, par les commissaires et régisseurs qui sont ou seront
chargés de la perception des droits d'enregistrement des actes, et par leurs commis et préposés, sous la surveillance des corps administratifs.
Art. 2.
« Les rachats qui seront faits pour parvenir à l'extinction des droits énoncés au précédent article seront liquidés, en conformité des décrets de l'Assemblée nationale, par lesdits commissaires régisseurs, leurs commis et préposés.
Art. 3.
« La liquidation par eux faite sera vérifiée et approuvée, d'après l'avis des directoires de district, par les directoires des départements dans le ressort desquels sont situés les biens dont dépendent les droits rachetables; et les directoires de département enverront, tous les mois, à l'administrateur de l'extraordinaire, le bordereau des liquidations qu'ils auront vérifiées et approuvées.
Art. 4.
« Le prix des rachats ainsi réglé, sera perçu, ainsi que le produit des droits non rachetés, par lesdits commissaires régisseurs, leurs commis et préposés, et. le montant de leurs recettes sera versé par la régie à la caisse de l'extraordinaire.
Art. 5.
« Les baux des droits incorporels, qui ont été faits en conséquence du décret des 23 et 2|8 octobre dernier, et les baux antérieurs confirmés par ledit décret, seront exécutés; le prix de ceux de ces baux qui ne comprennent que des droits incorporels, fera perçu par lesdits commissaires régisseurs, leurs commis et préposés. Quant à ceux desdits baux qui comprennent d'autres objets que des droits incorporels, le produit en sera versé par les fermiers à la caisse du district.
Art. 6.
« Les droits incorporels dont la perception serait sujette à de trop grandes difficultés, pourront être affermés par les commissaires régisseurs; ce qui ne pourra néanmoins avoir lieu, ni pour les droits casuels, quelle que soit leur quotité, ni pour les droits fixes payables en argent, qui sont de 20 livres et au-dessus. Le prix des baux consentis par la régie sera perçu par elle, ses commis et préposés.
Art. 7.
« Les baux des droits incorporels que la régie voudra affermer, seront faits, à 1a poursuite et diligence de ses commis et préposés, devant le directoire du district de la situation des biens dont dépendent les droits incorporels; et il sera procédé publiquement, et à la chaleur des enchères, dans la forme prescrite par le décret des 23 et 28 octobre dernier.
Art. 8.
« Les Commissaires régisseurs, leurs commis et préposés pourront, toutes les fois qu'ils le jugeront nécessaire, prendre communication, sans frais et sans déplacer, même faire de* extraits ou copies des titres, registres, papiers et documents dont le dépôt a été ordonné par les articles 9 et 10 du titre III du décret des 23 et 28 octobre dernier, et ils pourront se faire remettre, sous récépissé, les cueilloirs, papiers-censiers, ou papiers de recette, nécessaire j pour le recouvrement.
Art. 9.
« Les commissaires régisseurs feront faire, dans le plus bref délai, par leurs commis et préposés, des états exacts, par corps de domaines, de tous les droits incorporels fixes et annuels, tant en argent qu'en nature, avec évaluation de ces derniers, sauf à compléter ces états par des suppléments, successivement et à mesure des découvertes d'articles négligés ou inconnus. Les-dits états et suppléments seront faits à colonies, dont une sera destinée à faire mention des extinctions et rachats; et il en sera remis des doubles, tant à l'administrateur de l'extraordinaire qu'aux archives des administrations de département.
Art. 10.
« La régie est spécialement chargée de veiller à la conservation des droits incorporels fixes et casuels et des fonds sujets auxdits droits; en conséquence, elle fera tenir par ses agents et préposés, dans l'arrondissement de chaque bureau, des cueilloirs ou papiers de recette des droits qui y sont dus; elle veillera aux prescriptions, et elle exigera des débiteurs les titres nouveaux ou reconnaissances qu'ils sont tenus de fournir.
Art. 1l.
« Le relevé des recettes des droits incorporels, déjà faites par les receveurs de dis rict, sera remis par eux aux commis et préposés de la régie. Les directoires de département et de district leur feront délivrer aussi des copies des baux déposés dans leurs archives.
Art. 12.
« Les débiteurs des droits casuels, ci-devant féodaux, non rachetés, seront tenus d'en faire le payement dans les trois mois, au plus tard, du jour du contrat de vente, ou autre acte translatif de propriété, qui aura fait ouverture à ce droit.
Art. 13.
« Les acquéreurs et nouveaux propriétaires qui payeront, dans le délai de trois mois ci-dessus prescrit, les droits casuels ci-devant seigneuriaux, jouiront de la remise d'un quart sur le montant des dro'ts, soit que Iesdits droits soient perçus ou qu'ils soient affermés par la régie. Il ne sera accordé aucune remise après l'expiration des trois mois lixés pour le payement; et il ne pourra, en aucun cas, être fait une remise plus forte que celle du quart; le tout à peine, par les commis-
saires régisseurs, leurs commis et préposés, d'en répondre en leur propre et privé nom.
Art. 14.
« Il sera sursis, quant à présent, et jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné, à la vente et aliénation des droits incorporels nationaux.
Art. 15.
« Les codébiteurs solidaires de droits inCDrpo-rels nationaux pourront racheter séparément leur portion cootribuiive desdits droits, à la charge, par rapport à ceux qui possèdent divisément partie d'un fonds grevé d'un droit incorporel, de vérifier par des reconnaissances ou autres actes faits avec le possesseur de ce droit, la quotité dont ils sont tenus dans le total Ju droit; et par rapport à ceux qui possèdent indivisément, de faire préalablement constater, à leurs frais, Cette quotité contradictuirement avec le pré >osé de la régie, sous l'inspection du directoire du district.
« Quant aux autres codébiteurs du droit dont une portion seulement aura été rachetée, ils continueront d'être tenus solidairement du surplus, jusqu'au rachat qu'ils pourront en faire, aussi partiellement, dan s la forme qui vient d'être prescrite.
Art. 16.
« Dans les cas de vente et de rachat des droits fonciers, ou ci-devant féodaux, appartenant à la nation, elle a, pour sûreté de tout, ou de partie du prix, hypothèque et privilège sur le fonds qui était grevé desdits droits, et cette hypothèque pi ivilegiée subsistera, quoique le fonds soit passé en mains tierces, nonobstant toutes les lois, coutumes et usages contraires, même nonobstant toutes lettres ae ratification. »
(Ce décret est adopté.)
Un membre propose un article additionnel conçu en ces termes :
« Il sera permis à chaque redevable de droits seigneuriaux, consistant en grains et autres denrées, de S'acquitter cbaïue aunéedesdits droits, en payant le montant d'ieeux au percepteur, sur le pied du prix moyen du marché le plus voisin des lieux ae la situation des fonds à raison desquels Iesdits droits se trouveront dus, lequ"l prix moyen sera toujours celui de l'annéede l'échéance desiiits droits, si mieux le3 redevables n'aiment payer sur le pied du prix d'une anné a commune iixée d'après les mercuriales des dix années précédentes. »
(Cet article est renvoyé au comité.)
lève la séance à dix heures.
(du 6 février 1791 au
Pages.
er, art. ler : adoption (ibid. p. 70); — art. 2: Foucault
(ibid.); — adoption (ibid. p. 71); — art. 3: adoption (ibid.y, — art. 4 :
rejet (ibid.)', — art. 5 devenant l'art. 4: Folleville (ibid.)', — adoption
(ibid.); — art. 6 et 7, devenant les art. 5 et 6: adoption (ibid.); — art. 7
nouveau : adoption (ibid.); — ajournement des autres art. du titre Ier (ibid.); — titre II, art. 2 : Beauharnais,
Dubois-Crancé, Émmerv, Huot deGoncourt, un membre, de Bouthillier, Du
Châtelet, Dillon, un membre (ibid. et p. suiv.); — adoption de l'art. 2
amendé, devenant l'art. ler (ibid. p. 72); —
art. 3: de Crillon jeune, Babey, de Wimpfen, de Crillon jeune, de Tracy, de
Bouthillifr, Regnault, Victor de Broglie, de Tracy, de Bouthillier (7 mars,
p. 728 et suiv.); — adoption Wbid. p. 729) ; — art. 4 et 5 : adoption
(ibid.) ; titre III, art. 1-23: adoption (ibid. et p. suiv.); — titre IV,
art. 1-9 : adoption (ibid. p. 731 et suiv.);— titre V, art. 1-23: adoption
(9 mars, p. 754); — texte complet du décret (ibid. et p. suiv.).
Additions à l'article 1er du décret sur
l'organisation de la gendarmerie nationale, présentée par
Rabaud-Saint-Etienne (9 février, p. 77); — adoption avec amendement (ibid.
et p. suiv.); —disposition additionnelle (ibid- p. 78);—modification des
articles 3, 4 et 5 (devenant les articles 2 et 3), proposé par Bouthillier
(10 février, p. 113); — objection du Président Emmcry (ibid.); — discussion:
d'Estourmel, le Président, Dillon (ibid.); — question préalable (ibid.);
—consécration de la rédaction de l'article ler
(ibid.); —Bouthillier propose de discuter les articles 8 et 9 qui
deviendraient les articles 2 et 3 (ibid.) ; — discussion : Du Châtelet, de
Noailles, de Choiseul-Praslin, de Crillon jeune, le Président, de Foucault,
Dillon, Voidel, de Croy, de Bouthillier, de Croy, Emmery (quittant le
fauteuil), de Bouthillier, Emmery, Du Châ-telet, Dillon; de Crillon, de
Noailles, de Croy (ibid. et p. suiv.); — ajournement (ibid. p. 115).
Projet de décret présenté par Rabaud-Saint-Etienne relativement à la suspension d'un article des décrets rendus sur la gendarmerie les 23 décembre et 16 janvier derniers (13 février, p. 155 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 156;.
Rapport par Alexandre de Beauharnais sur les réclamations des lieutenants-colonels de l'armée (15 février, p. 205 et suiv ); — projet de décret (ibid. p. 207) ; — discussion : Foucault, d'Ambly, de Wimpfen, Alexandre de Lameth, d'Estourmel, Alexandre de Beauharnais, d'Estourmel, de Vir.eu, Alexandre de Beauharnais (ibid. et p. suiv.); — adoption (ibid. p. ï08).
Rapport par Camus sur la suppression des gouvernements militaires (20 février, p. 366 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 368 et suiv.) ; — adoption des articles 1 à 5 (ibid. p. 369); — discussion sur l'article 6: d'Estourmel, Goupil, de Custine, d'Estourmel (ibid.); — adoption (ibid. et p. suiv.) ; — adoption de l'ensemble (ibid. p. 370).
Projet de décret présenté par Bureaux de Pusy sur les colonels el lieutenants-colonels qui sont susceptibles de remplacement (3 mars, p. 651 et suiv.); — discussion: Gaultier-Biauzat, Alexandre de Lameth, de Wimpfen (ibid. et p. suiv.); — adoption (ibid. p. 652).
Projet de décret présenté par Emmery sur les officiers qui ont pris du service à l'étranger, parce qu'ils n'avaient pu obtenir d'emploi en France, à raison de leur naissance (4 mars, p. 658) ; —adoption (ibid.).
Projet de décret sur les troupes provinciales, présenté par Alexandre do Lauietli (ibid. p, 659 et
suiv.) ;—adoption des articles 1 et 2 (ibid. p. 661) ; — art. 3 : Cochelet (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — art. 4-8 ; adoption (ibid.); — art. 9: d'Estourmel, Alexandre de Lameth (ibid.)', — adoption (ibid.); — art. 10: adoption (ibid.).
Présentation par le même d'un projet de décret sur les maréchaux de France, les lieutenants généraux et les quatre principaux commandants de troupes fift/cf. p. 662) ; — discussion : de Crillon jeune, Lanjuinais, Mirabeau, d'André, Emmery, d'Estourmel, Lanjuinais, Martineau, Alexandre de Lameth, abbé Thibault, Goupil, Lanjuinais, Prieur, Lanjuinais, Alexandre de Lameth (ibid. et p. suiv.) ; — adoption du projet de décret amendé (ibid. p. 663).
Projet de décret présenté par Merlin, tendant à faire rendre compte à l'Assemblée des forces militaires du royaume (8 mars, p. 734); — adoption (ibid.).
Projet de décret, présenté par Kegnaud (de Saint-Jean-d'Angély), sur l'état de la gendarmerie nationale (ibid. et p. suiv.); — adoption (ibid. p. 735).
Lettre du ministre de la guerre (Duportail) à l'armée (9 mars, p. 749 et suiv.).
Proposition de Boussion sur l'emploi de 10 millions de la réserve des assignats de 2,000 livres (ibid ) ; — discussion : Foucault, Camus (ibid.) ; — ajournement (ibid.).
Proposition faite par Camus de faire 30 millions d'assignats de 100 livres et 20 millions de 50 livres (21 février, p. 391) ; — discussion : de Crillon jeune, d'André, Rewbell, Boussion, Mirabeau, d'André, De-landine, Mirabeau, Choiseul-Praslin, Long, Tuaut de la Bouverie, Camus, Tuaut de la Bouverie (ibid. et p. suiv.) ; — décret (ibid. p. 392) ; — adoption d'une motion complémentaire de Camus (ibid.).
ministratifs (p. 646), (p. 647), (p. 665), — sur une lettre de prétendus commissaires de Saint-Domingue (p. 679), (p. 680 et suiv.), — sur les corps administratifs (p. 705), — sur l'organisation du ministère (p. 726).
Projet de décret présenté par Lanjuinais sur les biens nationaux grevés de fondations dans les églises paroissiales (10 février, p. 84); — discussion: d'Es-tourmel, abbé Guillou, Tuaut de la Bouverie, Lanjuinais, Tronchet, Treilhard, Tronchet, de Folleville, de Lévis, Tuaut de la Bouverie, Boutteville-Dumetz, Treilhard, de Custine, abbé Breuvard, Foucault, Lanjuinais, Foucault, Murinais, Lanjuinais, Defermon (ibid. et p. suiv.) ; — adoption (ibid. p. 86) ; — art. additionnel présenté par le rapporteur (ibid. et p. suiv.); — discussion : un membre, de Lachèze (ibid. p. 87); — renvoi au comité (ibid.).
Rapport par Pison du Galand sur l'aliénation du domaine de Fénestranges (14 février, p. 181 et suiv.); — projet de décret (ibid. p. 186 et suiv.); — discussion : Foucault, de Custine, de Cazalès, Charles de Lameth, abbé Grégoire, Pison du Galand, de Tracy, Chabroud, de Folleville (ibid. p. 187 et suiv.) ; — adoption avec amendement (ibid. p. 189).
Projet de décret présenté par Vernier sur les fermiers des biens nationaux (16 février, p. 213); — discussion : Camus, Vernier (ibid.);— rejet des articles 1 et 3 (ibid.); — adoption de l'article 2 (ibid.),
Projet de décret présenté par Camus pour accélérer la vente des biens nationaux (24 février, p. 487); — adoption avec amendements (ibid. et p. suiv*).
Projet de décret contenant une réserve sur l'article 6 du précédent décret (28 février, p. 556) ; — adoption (ibid.).
Décrets de ventes aux municipalités et aux particuliers (6 février 1791, t. XXIII, p. 1) (7 février, p. 26), (ibid. p. 27 et suiv.), (8 février, p. 45), (ibid. p. 58 et suiv.), (9 février, p. 73), (ibid. p. 74).
Lettre des administrateurs du directoire du district de Tours sur des ventes de biens nationaux (11 février, p. 116)-
Décrets de ventes aux municipalités et aux particuliers (ibid. p. 121), (ibid. p. 133), 12 février, p. 136 et suiv.), (13 février, p. 156 et suiv.) (ibid. p. 168), (14 février, p. 169), (ibid. p. 180), (18 février, p. 192), (ibid. p. 204), (16 février, p. 212), (17 février, p. 223), (ibid, p. 236), (18 février, p. 272 et suiv.), (19 février, p. 281), (21 février, p. 392), (22 février, p. 400), (23 février, p. 450), (24 février, p. 490), (27 février, p. 551), (1" mars, p. 584), (2 mars, p. 639), (5 mars. p. 666), (ibid. p. 692), (9 mars, p. 741), (ibid. p. 752).
(p. 527), — sur les vicaires des églises supprimées (p. 600).
Projet de décret présenté par le même pour le remboursement de plusieurs porteurs de brevets de retenue liquidés (14 février, p.,170); — adoption (ibid.).
Projet de décret présenté par le même sur les indemnités dues aux porteurs de brevets de retenue (21 février, p. 386); — adoption (ibid.). — Ajournement de ce qui concerne les commissaires des guerres en activité (ibid. p. 387).
Décret pour le payement d'indemnités à divers porteurs de brevets de retenue (27 février, p. 552).
administratifs (p. 645), — sur la tontine Lafarge (p. 656), — sur les corps administratifs (p. 664), — sur une députation d'hommes de couleur (p. 666), — snr les corps administratifs (p. 674 et suiv.), — sur une demande d'extradition (p. 696).
Saumur. Propose un projet de décret sur l'entrée des noix de coco (t. XXIII, p. 602). — Parle sur une députation d'hommes de couleur (p. 666); — sur le tabac (p. 736).
Projet de décret sur les vicaires des églises paroissiales et succursales supprimées ou à supprimer, présenté par Lanjuinais (24 février, p. 489); — discussion : Legrand, Camus, Martineau, Rewbel (ibid.); — renvoi au comité ecclésiastique (ibid.).
Projet de décret sur le choix des vicaires des églises cathédrales et paroissiales, présenté par Legrand (2 mars, p. 597); — discussion : Buzot, abbé Grégoire, Martineau, Merlin (ibid.); — ordre du jour (ibid. p. 598).
Rapport par Lanjuinais, sur une pétition des vicaires des églises supprimées (ibid. et p. suiv.) ; — projet de décret en 2 articles (ibid. p. 600) ; — discussion : Camus, abbé Dillon, abbé Bourdon, Mirabeau (ibid.) ; — ordre du jour sur l'article 1er et renvoi de l'article 2 aux comités ecclésiastique et des pensions réunies (ibid.).
Projet de décret présenté par Merlin et tendant à faire informer contre le sieur Legrand, curédeSaint-Martin-de-Bergues, comme prévenu d'avoir troublé l'ordre public (8 mars, p. 734) ; — adoption (ibid ).
Rapport par Alquier sur l'affaire de Tabago (17 février, p. 234 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 236); — discussion : Malouet, Emmery, Voidel, Arthur Dillon, Moreau de Saint-Méry, Malouet, Bar-nave, Alquier (ibid. et p. suiv.) ; — adoption d'une nouvelle rédaction (ibid. p. 238). — Annexes : Mémoire adressé à l'Assemblée nationale, contenant les persécutions éprouvées par les Français à Tabago et notamment par le sieur Bosque (ibid. et p. suiv.) ;
— pièces justificatives (ibid. p. 255 et suiv.); — adresse présentée par la majorité des sections de Paris (ibid. p. 269 et suiv.).
Rapport par La Réveillère-Lépeaux sur les secours accordés aux Acadiens et Canadiens (21 février, p. 378 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 380); — adoption (ibid.). — Etat nominatif des secours tant civils que militaires (ibid. et p. suiv.).
Lettre de trois individus se disant commissaires de l'Assemblée générale de la partie française de
Saint-Domingue (5 mars, p. 679) ; — débat : Lavie, Barnave, Bégouen, Bouche, Barnave, plusieurs membres, Lavie, Mirabeau, Lavie, Barnave, Mirabeau, Treilhard, Montlosier, Chabert, de La Charrière, Mirabeau (ibid. et p. suiv.) ; — ordre du iour (ibid.-p. 681). 1
L'abbé Mulot présente une députation de la municipalité de Paris (14 février, p. 189 et suiv.); — discours de Lefèvre, au nom de la députation, signalant le projet de plusieurs membres de la famille royale de quitter le royaume (ibid. p. 190 et suiv.), — réponse de Mirabeau, président (ibid. p. 191) ; — renvoi au comité de Constitution (ibid.).
L'abbé Mulot présente une autre députation (17 février, p. 233); — un orateur de la députation demande la suppression des maisons de jeux [ibid. et p. suiv.); — réponse de Duport, président (ibid. p. 234); — renvoi aux comités de Constitution et de jurisprudence criminelle réunis (ibid.).
Plan de Delley (ibid. et p. suiv.) ; — débat sur le renvoi au comité des contributions publiques : La Rochefoucauld, Dauchy, de Delley, Goupilleau, abbé Maury, de Delley, abbé Maury, de Traey, de Delley, de Tracy, de Delley, Alexandre de Lameth (ibid. p. 395 et suiv.) ; — renvoi au comité de l'imposition (ibid. p. 396).
présenté par Vernier (25 février, p. 505 et suiv.) ; — adoption avec amendement de Ramel-Nogaret (ibid.).
adoption (ibid.) ; — propositions de Prieur et de Mu-rinais (ibid. et p. suiv.) ; — renvoi au comité de constitution (ibid. p. 30); — disposition additionnelle présentée par Bouche et combattue par Prieur (9 février, p. 73); — ordre du jour (ibid.).
Rapport de Le Chapelier sur le traitement et le costume de la cour de cassation (11 février, p. 121); — discussion : Babey, de Lachèze, Ramel-Nogaret, de Lachèze, Babey, Le Chapelier (ibid. et p. suiv.); — décret (ibid. p. 122);—modification des articles 5 et 6 (12 février, p. 140).
mentaire sur les voitures publiques (t. XXIII, p. 82). — Parle sur les patentes (p. 230). — Présente des articles additionnels au décret sur la contribution foncière (p. 392 et suiv.).
Etats sommaires des dépenses pour la marine et les colonies envoyés par Fleurieu, ministre de la marine (11 février, p. 116) ; — renvoi au comité de la marine (ibid.).
Présentation d'un projet de décret par Montesquiou (18 février, p. 273) ; — discussion : Lanjuinais, de Montesquiou, Lanjuinais, Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély), Camus, de Montesquiou, de Crillon jeune, Regnaud (de Saint-Jean-d Angély), Camus, de Montesquiou, La Rochefoucauld-Liancourt, Bouche, La Roche-foucauld-Liancourt,d'Estourmel, Montesquiou (ibid. et p. suiv.);—adoption de l'article 1er amendé (ibid. p.274 et suiv.) ;—art. 2 : adoption (ibid. p. 275) ;—art. 3 : de Folleville, de Montesquiou, Andrieu, La Rochefoucauld-Liancourt, de Montesquiou (ibid); — renvoi d'une motion d'Andrieu aux comités des finances et de mendicité réunis (ibid.) ;—adoption des articles 3 et 4 (ibid.); — disposition additionnelle présentée par Camus et devenant l'article 5 (ibid.).
Rapport par La Rochefoucauld sur les moyens de pourvoir aux dépenses de 1791 (19 février, p. 285 et suiv.); — discussion : de Folleville, de Crillon jeune, Defermon, de Cazalès, Malouet, de Crillon jeune, Lavenue, de Cazalès, de Crillon jeune, de Cazalès, La Rochefoucauld, Anson, de Cazalès, de Rochebrune, de Cazalès, de Rochebrune, de Custine, de Cernon, de Rochebrune, de Cernon, Ansou, de Montesquiou, Foucault, d'André, de Rochebrune, Prieur (19 février, p. 285 et suiv.); — question des taxes sur l'entrée des villes : Le Chapelier, de Cazalès, Foucault, de Lachèze, de Custine, Le Chapelier, de Cazalès, Le PeletierdeSaint-Fargeau (ibid. p. 291);—décret portant suppressiom des taxes d'entrée et chargeant le comité d'imposition de pourvoir à leur remplacement pour faire face aux dépenses de l'année 1791 (ibid. p. 292 et suiv.).
Etat des fonds extraordinaires provenant de l'emprunt national de septembre 1789 et emploi de ces fonds, présenté par Montesquiou (20 février, p. 372 et suiv.); — objections de Folleville (ibid. p. 377); — réponse de Montesquiou (ibid.).
par Chasset (5 mars 1791, t. XXIII, p. 696 et suiv.);— adoption (ibid. p. 697 et suiv.).
Fait un rapport sur les octrois (t. XXIII, p. 88 et suiv.). — Parle sur le tabac (p. 164), (p. 175), — sur les embouchures du Rhône (p. 432), — sur le Trésor public (p. 738).
(ibid. et p. suiv.). — Prudhomme la Boussinière, curé de Crucifix (Sarthe), nommé évêque de ce département (26 février, p. 527). — Bécherel, curé de Saint-Loup (Manche) et député, nommé évêque de ce département (ibid.). — Lollet, curé de Vandenesse, nommé évêque de Nevers (27 février, p. 554). — Brivat, curé de la Pleau, nommé évêque de laCorrèze, en remplacement du ci-devant évêque qui a refusé le serment (1er mars, p. 584). — Thuin, curé de Dannemary, nommé évêque de Meaux, en place du ci-devant évêque qui a refusé le serment (3 mars, p. 644). — L'abbé Lamourette, grand vicaire d'Arras, nommé évêque du département de Rhône-et-Loire (5 mars, p. 679). — Prudhomme, curé du Crucifix, Le Cesve, curé de Saint-Triaise, député, et Benoît-Roux, curés de la paroisse d'Errargues, nommés évêques du département de la Sarthe, delà Vienne et des Bouches-du-Rhône (ibid. p. 692.) — Maudru, curé d'Aydoilles, nommé évêque de Saint-Dié (8 mars, p. 740). — Guégan, député, nommé évêque du Morbihan (9 mars, p. 747). —Le cardinal de Brienne, nommé évêque métropolitain du Sud (ibid. p. 750). — Besaucelle, doyen du ci-devant chapitre de la cité de Catcassonne, nommé évêque du département de l'Aude (ibid.). — Jean Servant, prêtre de l'Oratoire, nommé évéque de la Vendée (ibid.).
factures, à la navigation et au commerce. Rapport par Roussillon y relatif(7 mars 1791, t. XXIII, p. 712 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 714) ; — discussion : Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély), Marti-neau, un membre, Lanjuinais, Defermon, Mbreau (de Saint-Méry), Regnaud (Saint J ean-d1 Angély), Mougins (ibid. et p. suiv.) ; — ajournement de l art. Ier (ibid. p. 715) ; — adoption des deux autres articles (ibid.}.
Adresse du commerce et des représentants du commerce de Paris relative à l'article 2 du décret du 5 décembre 1790 concernant les billets à ordre (ibid. p. 55 et suiv.) ; — adhésion des juges et consuls de Paris, et des députés extraordinaires des manufactures et du commerce de France (ibid. p 57) ; — renvoi au comité d'imposition (ibid.).
Rapport par du Châlelet sur le sort de trois prisonniers détenus à Huningue, prévenus de crimes de faux commis dans les Etats de l'empereur et réclamés par le ministre impérial (5 mars, p. 694) ; — discussion : Rewbell, Gaultier-Biauzat, Robespierre, Cochelet, Fréteau, Buzot, Du Châtelet, Robespierre, Cottin, Delavigne, Fréteau, Gaultier-Biauzat, Robespierre (ibid. et p. suiv.);— renvoi au comité de Constitution (ibid. p. 696).
toire du département de la Côte-d'Or sur le prochain départ de Mesdames tantes du roi (18 février 1791, t. XXIII, p. 276); — copie de la lettre écrite à ce sujet par le ministre de l'intérieur, Delessart, aux mêmes administrateurs (ibid.) ; — copie de la réponse de ces derniers (ibid.); — lettre du roi (20 février, p. 347).
Motion d'ordre de Barnave tendant à la présentation d'un projet de décret sur les obligations et les devoirs des membres de la famille royale (21 février, p. 387 et suiv.) ; — discussion : Fréteau, Mariineau, Goupil, Foucault, Pétion, Malouet, Foucault, Pétion, Foucault, Malouet, Gaultier-Biauzat, Malouet, d'André (ibid. p. 388 et suiv.) ; — décret portant que le comité de Constitution présentera le 23 février un projet de décret sur les obligations des membres de la famille royale et qu'il exposera ses vues sur les citoyens émigrants [ibid. p. 390).
Procès-verbal du passage de Mesdames tantes du roi, dans la ville de Moret, adressé par la municipalité de cette ville (23 février, p. 432 et suiv.); — débat : Rewbell, Clermont-Tonnerre, Rewbell, Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély), d'Aiguillon (ibid. p. 433 et suiv.) ; — renvoi aux comités militaire, des rapports et des recherches (ibid. p. 434) ; — lettre du ministre des affaires étrangères (Montmorin) concernant son contreseing sur le passeport de Mesdames (ibid. p. 453); lettre du ministre de la guerre (Du Portail) sur l'invasion de la ville de Moret par les chasseurs de Lorraine, auxquels il déclare n'avoir donné aucun ordre (24 février, p. 491) ; — discussion à ce propos: Mirabeau, Le Déist de Butidoux, Mirabeau, Montlosier, d'André, Foucault, Montlosier, de Folleville, Foucault, Mirabeau (ibid. et p. suiv.), -— adoption d'une molion de Mirabeau (ibid. p. 492); — lettre du ministre de l'intérieur (Delessart) sur l'arrestation de Mesdames, tantes du roi, à Arnay-le-Duc (ibid.) ; — protestation de Mesdames (ibid. et p. suiv.) ; — extrait du registre des délibérations de la commune d'Arnay-le-Duc (ibid. p. 493 et suiv.) ; — discussion : abbé Maury, Regnaud (de Saint-Jean-d1 Angély), Fréteau, d'André, Barnave, Mirabeau, Fréteau, Mirabeau, Gourdan, Mirabeau, de Tracy, Camus, Alexandre do Lameth, de Folleville, d'André, Mirabeau, d'André, Regnaud {de Saint-Jean-d'Angély), de Lévis, Briois-Beaumetz, Charles de Lameth, de Montlosier, Charles de Lameth, de Menou, Le Chapelier, Alexandre de Lameth, Le Chapelier (ibid. p. 494 et suiv.) ; — renvoi de l'affaire au pouvoir exécutif (ibid. p. 5u0); — lecture d'une lettre incriminant les chasseurs de Hainautà la place de ceux de Lorraine (25 février, p. 514) ; — renvoi aux comités des rapports militaire et des recherches réunis (ibid.) ; — lettre de Ségur, colonel des chasseurs du Hainaut (2 mars, p. 600 et suiv.) ; — renvoi aux comités des rapports et des recherches (ibid., p. 601); — lettre de Delessart, ministre de l'intérieur, accompagnant la copie de sa lettre aux administrateurs du directoire du département de la Côte-d'Or [ibid. p. 638 et suiv.) ; — Guiot assure l'Assemblée que la commune d'Arnay-le-Duc, visée par la lettre, se conformera au décret du 24 février qui maintient la liberté de voyager (ibid. p. 639) ; — lettre des commissaires de la Côle*-d'0r, envoyée par le ministre Delessart (3 mars, p. 649 et suiv.).; — l'abbé Bouillotte confirme le dire de Guiot ;ibid. p. 650) ; — lettre des membres de district annonçant le départ de Mesdames (6 mars, p. 703).
Victor de Broglie demande qu'en raison de ses services, le titre de maréchal soit conservé à son père absent du royaume (5 mars, p. 667 et suiv.); — Goupil etLavie appuient cette demande (ibid. p. 668); — décret (ibid.).
Rapport par Cernon sur la radiation des fonctionnaires publics absents du royaume (6 mars, p. 703 et suiv.); — Bouche demande la liste des pensionnaires absents (ibid. p. 704); — Voidel demande l'ajournement du rapport qui est décrété (ibid.).
Toulouse-Lautrec demande que le maréchal de Cas-tries bénéficie de l'exception faite en faveur du maréchal de Broglie (7 mars, p. 711); — discussion : Bouche, Toulouse-Lautrec, Millet, Vernier, Delley, un membre, le Président (Noailles) (ibid.) ;— ordre du jour (ibid.).
discussion : de Folleville, abbé Maury, Chabroud, Voidel, plusieurs membres, Régnier (ibid. p. 590); — ajournement (ibid.)
p. 123), — sur le tabac (p. 142), — sur la caisse de l'extraordinaire (p. 169), (p. 170), — sur une pétition des trappistes (p. 212 et suiv.), — sur les patentes (p. 225), — sur les gouvernements militaires (p. 369), — sur les bâtiments du roi (p. 387), — sur un projet de décret relatif aux obligations des membres de la famille royale (p. 388), — sur le pouvoir judiciaire (p. 554), — sur les émigrations (p. 567), (p. 572), — sur l'arrestation de deux maréchaux de camp (p. 590), — sur le traitement des maréchaux de France (p. 663), — sur le maréchal de Broglie (p. 668), — sur lé pouvoir judiciaire (p. 702), — sur l'organisation du ministère (p. 726).
de Villiers, des Royes (ibid. p. 26) ;— adoption(/Md.); — art. 10 à 18 : adoption (ibid.); — présentation de trois articles additionnels, relatifs aux contumaces (7 février, p. 31);— adoption des deux premiers (ibid.); — discussion sur le troisième : Thévenot, Martineau, Boulteville-Dumetz, Martineau, Duport. Hégnier (ibid. et p. suiv.); — adopiion avec amendement (ibid., p. 38) ; — question posée par Loys au sujet de la remise d'un conlumax après 20 ans (ibid.) ; — ordre du jour à la demande de Duport et de Murinais (ibid.); — titre XII : adoption (ibid. et p. suiv.); — titre XIII: adoption (ibid. p. 39 et suiv.).
— Présente des projets de décrets sur les biens nationaux grevés de fondations (p. 84),— sur la formation de quatre paroisses dans la ville du Mans (p. 112),— sur la circonscription des paroisses de la ville de Rouen (p. 221 et suiv.).— Parle sur les patentes (p. 225), — sur les dépenses (p. 263), (p. 274).—Présente des projets de décrets sur les vicaires (p. 489), — sur la vente des biens des fabriques (p. 525); — défend ce dernier projet (ibid. et p. suiv.). — Parle sur l'arrestation de deux maréchaux de camp (p. 590), (p. 591).— Fait un rapport sur une pétition des vicaires des églises supprimées (p. 598 et suiv.). — Présente un projet de décret sur les paroisses de Nantes et de Clisson (p. 657 ,et suiv.). — Parle sur l es maréchaux de France (p. 662 et suiv.), (p. 663), — sur les corps administratifs (p. 674), — sur les encouragements à donner à l'agriculture, au commerce et à l'industrie (p. 714).
Lettre de Donnai, ci-devant évêque de Clermont, dénoncée par Gaultier-Biauzat comme factieuse (19 février,. p. 284}; — Murinais en demande la lecture (ibid.).]—ordre du jour (ibi L)\—reprise du débat: Foucault, Marinais, Varia, Murinais, Duval d'Eprémesnil, Gaultier-Biauzat,. de Villehanois, Gaultier-Biauzat, Lavie (ibid. p. 288).; — Gaultier-Biauzat dépose la lettre sur le hur.eau (ibid.) — texte dû cette lettre (p. 293 et suiv.),
Lettre, dénoncée comme incendiaire, du ci-devant évêque de Dijon-, aux électeurs du département de la Côte-d'Or, assemblés pour procéder à l'a nomination" d'un autre évêque (20 février, p. 366) | — renvoi au comité des recherches (ibid.).
Projet de décret sur ïes bâtiments nationaux présenté par Roussillon (4 mars, p. 658 et suiv.) ; — adoption de l'article 1er (ibid. p. 659) ; — discussion sur l'article 2 j Regnamd [de- 8amt-Jean-d' Anyéiyr}, RoussiUojj, D» Cbâteleit (Sibid.) ; -*-» renvoi aux comités d'agriculture., de commerce et de marine réunis (ibid.. p. 659).
sur les employés supprimés (p. 733), — sur la, milice bourgeoise (p. 742).
position du comité de l'agriculture et du commerce (ibid.)
Projet de décret proposé par Rabaud-Saint-Etienne sur l'élection de la municipalité de Mauriac (3 mars, p. 656) ; — adoption (ibid.).
Rapport par Montesquiou sur la demande faite par la municipalité de Paris d'une avance de fonds (5 mars, p. 675 et suiv.).
Projet de décret concernant le département du Pas-de-Calais, présenté par Vernier (12 février, p 141) ; — discussion : de Folleville, Robe-pierre, de Folleville, Robespierre, Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély), de Croix, Briois-Beaumetz (ibid.); — adoption avec amendement (ibid. et p. suiv.).
Projet de décret présenté par le même sur le droit d'enregistrement appliqué aux quittances de liquidation et remboursement des offices (10 février, p. 112 et suiv.) ;
Projet de décret présenté par Cernon sur les officiers comptables supprimés (17 février, p. 224) ; — adoption (ibid.).
Projet de décret présenté par Vieillard sur la liquidation de plusieurs offices (24 février, p. 501 et suiv.); — adoption (ibid. p. 503).
question de savoir s'il y aura un droit de patente (ibid.) ; — discussion : d'Allarde (16 février, p. 213 et suiv.) ; ajournement de l'art. l«r (ibid. p. 214) ; — art. 2 : Loys, Martineau, d'Allarde, Rewbell, Defermon (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — art. 3 : Cas-tellanet, Gaultier-Biauzat, abbé Gouttes, Mougins, d'André (ibid. et p. suiv.) ; — renvoi de l'art, aux comités de finances, de liquidation et de judicature réunis (ibid. p. 215) ; — art. 4 : un membre, Cas-tellanet, Bouche, Gaultier-Biauzat, d'André, d'Allarde, Delavigne (ibid.) ; — adoption de la première partie de l'art. 4 devenant l'art. 3 et rejet de la seconde partie (ibid.);— renvoi au comité d'un amendement de Delavigne, modifié par Defermon (ibid.) ; — art. 5 devenant l'art. 4 : d'Allarde, Gaultier-Biauzat, Boucher, d'Allarde (ibid. p. 216 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 217); — art. 7 devenant l'art. 6: adoption (ibid.) ; — art. 8 devenant l'art. 7 : Bouche, Germain, Malouet, d'André, La Galissonnière, Buzot, d'Allarde, d'André, de Tracy, d'Allarde, de Sinéty, Defermon, Ulry, Gérard, d'André, d'Allarde, Malouet, d'Allarde, Perdry, Rœderer (ibid. et p. suiv.); — adoption de l'art, amendé (ibid. p. 218); — adoption des art. 9, 10 et 11 devenant les art. 8, 9 et 10 (ibid. et p. suiv.) ; — art. 11 (ancien art. 12) : Aubry-du-Bochet, Malouet, Rœderer, Malouet, de Boufflers, Chassenet, d'Allarde, Aubry-du Bochet, Populus, Lavie, Malouet, Garat, Andrieu, de Custine, Dupont (ibid. p. 219et suiv.); — adoption (ibid. p. 220) ; — art. 12 (ancien art. 13) : Decretot, deux membres, Lavie, d'André, Grelet de Beauregard, Delavigne, Goupil,Lanjuinais, Martineau, de Choiseul-Praslin, Malouet, Merlin, d'André, Defermon, Decretot, Defermon (17 février,p. 225 et suiv.); — adoption de l'art, amendé (ibid. p. 226) ; — art. 13 (ancien art. 14) : adoption (ibid.) ; — ancien art. 15 : suppression (ibid. et p. suiv.) ; — art. 14 (ancien art. 16) : un membre, Aubry-du-Bochet, de Lachèze, Defermon, de La Galissonnière (ibid., p. 227) ; — adoption (ibid.) ; — art. 15 (ancien art. 17) : Gom-bert, Lucas, de Delley, Heurtault-Lamervillc, Ramel-Nogaret, Rœderer, Moreau, Rœderer, de Delley, Gaultier-Biauzat, Moreau, de Delley (ibid. et p. suiv.) ; — adoption (ibid., p. 228r, — art. 16 (ancien art. 18) : de Delley, d'André, d'Allarde (ibid. et p. suiv.) ; — adoption de l'art, amendé (ibid. p. 229) ; — art. 17 (ancien art. 19) : Populus, d'Allarde, de Folleville, Populus, d'Allarde (ibid.) ; — adoption de l'art, amendé (ibid.) ; — supression des art. anciens 20 et 21 (ibid.); — adoption des art. 18, 19 et 20 (anciens art. 22, 23 et 24) (ibid.) ; — art. 1" réservé : d'Allarde, Gaultier-Biauzat, Dauchy (ibid., p. 230) ; — ajournement de la partie relative au droit sur les cartes (ibid.) ; — adoption du reste do l'art, (ibid.) ; — renvoi au comité d'agriculture de ce qui concerne les boucheries, plomb et marque (ibid.) ; — Motion de Bouche tendant à modifier l'art. 16 (18 février, p. 270) ; — dis-. cussion : Rpgnaud (de Saint-Jean-d'Angély), Martineau, Bouche (ibid.); — renvoi au comité d'imposition (ibid.) ; — autre motion sur les patentes des maîtres d'hôtels garnis, combattue par Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély) (ibid.) ; — ordre du jour (ibid.) ; — additions à l'art. Ier proposées par Rœderer (Ie* mars, p. 584); — discussion : Crillon jeune, Prieur, Rœderer (ibid. et p. suiv.); — adoption (ibid. p. 58b), — modifications à l'art. 2 proposées par le même (ibid.) ; — adoption (ibid.) ; — modifications à l'art. 4 proposées par le même (ibid.) ; — adoption avec amendement de Regnault (ibid.); — additions à l'art. 5 (ibid.); — fusion en 2 art. (7 et 8) des art. 7, 12 et 14 (ibid. et p. suiv.) ; — nouvelle rédaction de l'art. 9 proposée (ibid. p. 586) ; — adoption avec amendement de Moreau (ibid.) ; —modifications aux art. 10, 12 et 14, décrétées avec amendement de Folleville (ibid.); — additions à l'art. 16 : adoption (ibid.) ; — modification relative aux colporteurs ^ adoption (ibid.); — art. additionnels proposés (2 mars, p. 625) ; — discussion : Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély), Rœderer, Regnaud (de Saint-Jean-d'Angely), un membre, Rœderer, Germain, Regnaud (de Saint Je.an-d'Angély) (ibid.); — adoption (ibid.); texte complet du décret (ibid. et p. suiv.).
Projet de décret présenté par le même au sujet de 1'exécutiou de l'art. 4 de la loi du 44 janvier 1790 et de l'art. 5 de la loi du 22 décembre de la même année (47 février p. 223) ; — adoption (ibid.).
Rapport par Camus sur les secours à accorder aiux personnes qui jouissent de pensions et de gratifications annuelles, dont l'état n'est pas encore fixé (20 février, (p. 370 et suiv.)-; — projet de décret (ibid. p. 373) ; adoption des art. 1 et 2 (ibid.) ; *- discussion sur l'art. 3 : Malouet, CanJtis, ;Dillon, Murinais (ibid. et .p. suiv.)-; — adoption (ibid. p. 374); — art. 4:adoption (ibid.); !—art. 5 : d'Ambly-, de Vaudreuil, de^Noailles, Camus, Anson (ibid. et p. suiv.)v—adoption de l'art, modifié (ibid. p. 378)"; art. ;6 à 13 :adoption (ibid. et p. suiv.)-;— adtiption de l'ensemble (ibid. p. 376).
Projet de décret iprésénté ipar Camus sur les personnes ayant de nouveaux faidmoires à soumettre pour obtenir des pensions (22 février, p. 398); —adoption (ibid.).
Radiation des art. relatifs aux secours des septuagénaires, insérés dans le ;procès vërbal de la séahce du 30 janvier (27 février, p. 55-2)-.
d'un art. additionnel présenté "par Legrand (ibid.) ; — art. 10 : un membre, Chabroud, 'Long, 'Le Chapelier (ibid.)-; adoption de l'art, amendé, sauf 'rédaction (ibid.)-; — art. 11 et 12 : adoption (ibid.);-— disposition additionnelle : adoption ('ibid.)'; — observation d'un membre (ibid.) ; réponse du rapporteur (ibid:); — motion de Gaultier-Biaufcat : renvoi au Comité (ibid.) ; — autre disposition additionnelle : adoption (ibid.); — renvoi aux comités de Constitution et d'imposition réunis d'une proposition relative à certains droits accordés aux avoués (ibid.) ; — art. 14 : Prieur, Le Chapefôer, Regnault, Le Chapelier (ibid.) ; — adoption de l'art, amendé (ibid.) ; — art. 15 — 20 : adoption (ibid.); — art. 21 : un membre, Alexandre de Lameth, un membre, Alexandre de Lameth, plusieurs membres, Populus, Durand-Maillane, Le Chapelier (ibid. et p. suiv.); — adoption de l'art, amendé (ibid. p. 529) ; — motion de Ramel-Nogaret (ibid.)'; — rejet (ibid.)'; er">—proposition par Mougins d'un art. devant suivre l'art. 21 (27 février, p. 553);. — ajournemerit (ibid.); — adoption de lart. -22 (ibid.); — art. 23 : Gaultier-Biauzat, Chabroud, Martineau, Darnaudat, Martinëau,l)arnaudat, Chabroud, Le Chapelier (ibid.); — adoption de l'art, amendé Hbiâ.) ; — art. 24 : uelix membres, Brioîs-Beaunaétz, Le 'Chapelier (ibid. p. 554) ; — adoption de l'art, amendé ('tbid:); — art. "25 : Hébrard, Le'Chapelier, Ilébrard, deUX membres, Gaultier-Biauzat, Le Chapelier (ibid.); — ajournement (ibid.); — art. 26 : Merlin (ibid.); — adop'tion d'une disposition additionnelle (ibid.) ; — amendements proposés par Gou-pfl et deux autres membres (ibid.); — adqption de l'art, amendé (ibid.); — art. 27 : Chabroud, Le Chapelier (ibid. et p. suiv.) ; — adoption de l'art, amendé (ibid. p. 555); — art. 28 : Delavigne (ibid.);^ adoption de l'art, amendé (ibid.); — art. 29 : 'Le 'Chapelier, Lachèze, Le 'Bois Desguays, 'Emmery, Dufraisse-Duohey, Le Chapelier, de Montlosier (ibid.); — adoption (ibid.); — art. 30 et 31 : adoption (ibid.); — art. 32 : Emmery (ibid.) ; -^-adoption aux amendements (ibid.) ; — art. additionnel présenté par Merrlin (28 février, p. 557); — adoption (ibid.); — adoption de-33 art. additionnels (6 mars,'p. 699 et suiv.); — motion de Christin 'tendant au renvoi de l'inscription de faux au tribunal de district (ibid. p.'701); — adoption sauf rédaction (ibid. p. 702); — motion de Goupil (ibid.); — reiet (ibid.);-— adoption de deux nouveaux art. (ibid.); nouvelle rédaction du 2* de ces art. (ibid.) ; — adoption de cinq autres art. additionnels (ibid. p. 703) ; — art. additionnel relatif au département de Paris (9 mars, p. 743) ; — adoption (ibid.).
ments infligés aux détenus, impliqués dans l'affaire d'Aix (9 février 1791, t. XXIH, p. 73); —lettre à eux adressée à ce sujet par des officiers du régiment de Lyonnais {ibid. -et «p. soiv.)^ — observations de d'André (ibid. p. 74) : — renvoi au comité des recherches (ibid.)
Réclamations de la municipalité d'Issy-il'Éveque contre l'emprisonnement de son curé flO février 1791, t. XXIII, .p. 110 et suiv-.); — réponse de Mirabeau, président (ibid. et p. suiv.); — débat : Gaultner-Biau-zat, Merle, le Président, Merle (ibid. p. 111) ; — renvoi au comité des rapports (ibid.).
D'Ambly demande la mise en liberté d'une Cha-noinesse (ibid.) ; — discussion : Voidel, d'Ambly, Voidel (ibid. et p, suiv.) ; — renvoi au comité des recherches (ibid. p. 112).
Décret allouant à des brigadiers et cavaliers des frais de conduite des nommés Moret et Prudhomme, partis des prisons de Besançon pour être amenés à Paris (14 février, p. 191).
Rapport par Voidel sur l'affaire relative à l'arres-tion de la dame de Constable et des sieurs Chai Ho t et Dauquoi (17 février, p. 231 et suiv.);— projette décret (ibid. p. 232);— discussion : d'André, Voidel, de Tracy, Salle (ibid. p. 233); — adoption du projet amendé (ibid.).
Pétition de Bonne-Savardin, demandant à être jugé (22 février, p. 397); — débat : Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély), d'André , Bouche , Prugnon (ibid.) ; — renvoi au comité de Constitution (ibid.).
Voidel, au nom du comité des recherches, demande l'avis de l'Assemblée sur la situation d'un sieur Châlon, une des trois 'personnes arrêtées au sujet des troubles «de'Belfort set qui, malade, ne pourrait sans danger être itransfétfé à l'Abbaye (23 février, p. 450) ; — débat : Lavie, Mirabeau, Voidel, Lavie, un membre, Mirabeau, de Noailles, Digoine (ibid. et p. suiv.); — renvoi au comité des recherches pour résoudre la question de savoir si le sieur iChâlon a été arrêté sur le territoire français {ibid. p. 451).
Pétition du sieur Trouard de Riolles, détenu dans les prisons de l'Abbaye, tendant à obtenir des juges (26 .février, p. £23) ; — motion d'André (ibid.)', — décret portant que .le comité de Constitution, sous trois jours, présentera un projet de tribunal provisoire pour juger les crimes de lèse-nation (ibid.).
Demande de mise en liberté formulée par fl'Estour-. mel, au profit de deux maréchaux de camp, Louis et Joseph Hautefeuille, arrêtés faute de passeport (l',r mars, p.'590) ; — 'discussion mêlée de tumulte: Goupil, d'Estourmel, de Cazalès, abbé Maury, le Président (de Menou), de Custine, de Cazalès, Lanjuinais, de Cazalès, de Foucault, abbé Maury, Lanjuinais, 'Murinais, de Bois-Rouvray, de Cazalès, de Folleville, plusieurs membres, de Iboucault, de Cazalès, abbé Maury, de Foucault, de Bois-Rouvray, de Tolleville, plusieurs membres, de Tolleville, de Bois-'Rouvray, de Cazalès, de "Folleville, le président, plusieurs membres, 'Charles de Lamétli, de Foucault, de Murinais, 'Chabroud, abbé Dillon, de Folleville, un membre, le Président, de Folleville, de Foucault, plusieurs membres, de 'Folleville, de 'Président, "Chabroud, de Folleville, de Murinais, de Cazalès [idem et p. suiv.), de 'B&thizy, de Murinais, de Faucigny-Lu-cinge, 'Duval d'Eprémesnil (ibid. p. 593 et suiv.).
Projet de décret relatif au jugement des personnes arrêtées à Aix et à Marseille (8 imars, ,p. 133 et suiv.) ; — adoption .(ibid*, .p. 734).
Motion d'André tendant à transférer les prisonniers de l'Abbaye à Orléans (9 mars, p. 752) ; — discussion : Le Chapelier, Briois Beaumetz, Voidel, Montlosier, Gaultier-Biauzat, 'Duport, Rewbell, de Lachèze, Merlin, Parent, Briois-Beaumetz, Rewbell (ibid. et p. suiv.); —adoption {ibid., p. 754).
suiv.), — sur l'emplacement de l'administration des villes de Sa-rrelou'isj'de Chartres-et dlEpinal (p. 642)..
Mémoire relatif aux ouvrages qu'il est urgent de faire pour la navigation à l'embouchure du Rhône (ibid. p. 453 et suiv.).
lativement aux lettres de change tirées de l'étranger (ibid.), (p. 32^; — propose des additions (ibid.); — réfute des réclamations des parcheminiers et des papetiers (p. 33). — Parle sur les troubles des Haut et Bas-Bhin (p. 135 et suiv.), — sur le tabac (p. 143 et suiv.), (p. 151), (p. 153), (p. 165), (p. 167), (p. 173), (p. 174), (p. 175), — sur les octrois (p. 198), — sur les patentes (p. 218), (p. 219), (p. 228), (p. 625). — Présente des projets de décret sur le sel et le tabac (p. 670 et suiv.), — sur les employés des domaines (p. 735), — des articles additionnels sur la vente du sel et du tabac (ibid. et suiv.). — Parle sur le Trésor public (p. 737 et suiv.), (p. 746 et suiv.).
La sectioa des Quatre-Nations demande que le cardinal de Montmorency-Laval, grand aumônier de France, ayant refusé le serment, cesse d'exercer ses fonctions (27 février, p. 551);— discussion: abbé Gouttes, Bouche, un membre, Bouche (ibid.); — renvoi au comité ecclésiastique (ibid.)
L'abbé Lombard de Bouvans, suppléant de de Conzié, ci-devant archevêque de Tours, membre démissionnaire de l'Assemblée nationale, prête un serment restrictif (2 mars, p. 537) ; — Voidel demande son expulsion (ibid.) ; — discussion : d'André, Prieur, Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély), Prieur (ibid.); — adoption de la motion d'André concluant à la non-admission (idid.) ; — lecture de la formule du serment (ibid. et p. suiv.) ; — l'abbé persiste dans son serment restrictif (ibid. p. 636); — d'André demande qu'il sorte (ibid.), — l'abbé quitte la salle (ibid ); — l'abbé Maury demande la parole contre le Président (de Noailles) qui la lui accorde (ibid.) ; — sur la proposition de Le Bois Desguays et d'André, elle lui est retirée (ibid.) ; — ordre du jour (ibid.) ; — Bouche, à propos du procès-verbal, demande que le titre de député suppléant ne soit pas donné à de Bouvans (3 mars, p. 642) ; — de Bois-Rouvray demande au contraire que ce dernier soit admis après serment (ibid.) ; — d'André réclame sa déchéance (ibid.) ; — débat : de Bois-Rouvray, de Liancourt, d'André, de Bois-Rouvray, plusieurs membres (ibid.); — ordre du jour (ibid.).
Prestation de serment du curé et des vicaires d'Al-lanche (6 février 1791, t. XXIII, p. 1), — de plusieurs agents diplomatiques (7 février, p. 27), — des ecclésiastiques fonctionnaires publics et des curés, moins deux, de Ja ville d'Auxerre (ibid ), — de tous les fonctionnaires ecclésiastiques de Belley (8 février, p. 41 et suiv.), — de la plus grande partie des fonctionnaires ecclésiastiques ae Carhaix, Guin-gamp, Pont-Croix, Piouvenaz et Saint-Bemi (8 février, p. 51 et suiv.),— de tous les fonctionnaires ecclésiastiques du district de Brignolles (10 février, p. 108), — d'un ci-devant bénédictin, professeur à Avoise, et du supérieur de l'Oratoire de Pertuis (ibid.), — du curé de la paroisse de Coulange-sur-Yonne et du vicaire d'Aiguës-Vives (ibid.), — du curé, d'un vicaire et de quatre ecclésiastiques de la ville de Maurs (ibid.), — du curé d'Evry-sur-Seine (ibid.), — du curé de Ventouse (ibid., p. 112), — de tous les curés de la ville de Roye (11 février, p. 133),— du curé, des vicaires et de l'aumônier de la garde nationale deSaint-Valéry-en-Caux (13 février, p. 156), — de la presque unanimité des curés du diocèse de Saint-Claude (ibid. p. 158), — de douze ecclésiastiques fonctionnaires publics de la ville de Lorient et du curé de la ville ae Stenay (14 février, p. 169,),— de tous les professeurs du collège de Bergues et des curés et vicaires de la ville de Beaubourg et du bourg de Watten (ibid., p. 173), — de 60 sur 70 ecclésiastiques du district d'Epernay (ibid., p. 179 et suiv.), — de 350 curés fonctionnaires publics dans le département de l'Indre (15 février, p. 203 et suiv.), — des curés de Bonpère, Bouillonville, Saint-Médara d'Excideuil, de Saint-Jean-du-Gard, de Cahuzac, de Vertus-d'Avesnes, de Saint-Pourçain, de Longueil-Saint-Marcel, de Plassac, de Sainl-Mars-en-Brie et de Plancher (ibid. p. 204 et suiv.), — de tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics du district de Sézanne et de cinquante-six du district d'Is-sur-Til (ibid. p. 205), — du curé de Blaye et de l'aumônier de l'hôpital (17 février, p. 220 et suiv.), — du curé de Pau, de ses vicaires, de tous les religieux bénédictins, professeurs du collège de cette ville, du professeur doyrn de la Faculté de théologie, des deux aumôniers de l'hôpital et de plusieurs autres prêtres habitants de Pau (ibid. p. 221), — d'environ 60 ecclésiastiques fonctionnaires du district de Montmarault (ibid.), — du curé et maire de Bénarville (ibid.),— des ecclésiastiques du Blayois, d'abord réfractaires (17 février, p. 231), — du curé et des professeurs du collège d'Epinal (ibid.), — du clergé de Gentilly (ibid.), — des ecclésiastiques d'Et mpes (ibid.),— des ecclésiastiques fonctionnaires publics de la ville d'Issoudun (19 février, p. 280), — de ceux de Savignac et Cazouls-les-Béziers (ibid.), — de ceux du district de Samoins et de ceux de la ville de Dun-le-Roi (ibid.), — de ceux du district de Gasse (ibid.), — de ceux du district de Montluçon (ibid.), — de ceux, moins trois, du district de Saint-Claude (ibid.), — des curés et vicaires du district de Cussy (ibid.), — de ceux du district de Chérilly (ibid.), — d'un prêtre du district d'Uzès (ibid. p. 296), — de tous les fonctionnaires ecclésiastiques d'Issoudun (ibid.),
— du vicaire de Serre (ibid.), — du curé de Saint-Géry (ibid.), — du curé de Bréville (ibid. p. 297), — de tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics de l'Avanfranche (ibid.), — des ecclésiastiques de Pont-point (ibid.), — des ecclésiastiques fonctionnaires publics de la paroisse épiscopale de Cahors (ibid.), — du vicaire de la paroisse de Saint-Sauveur de Bayeux (22 février, p. 401), — de tous les fonctionnaires ecclésiastiques du district de Saint-Fargeau (ibid.), — de l'évéque de Viviers et de la grande ma orilé des ecclésiastiques de son diocèse "(ibid.), — de fonctionnaires publics ecclésiastiques, sans désignation (ibid. p. 405), t- du curé de Plassac (ibid.), — du curé de Vergigny (ibid.), — de 51 curés sur 60 du district de Saint-Germain-en-Laye et de 40 vicaires sur 47 (23 février, p. 450), — de tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics du district de Villeneuve et même d'un ancien curé non fonctionnaire (24 février, p. 500), — des curés et vicaires de Chanlac, de Saint-Angel et de Saint-Loup-les-Landes (ibid. p. 500 et suiv.), — de 38 fonctionnaires ecclésiastiques sur 51 dans le district de Loches (26 février, p. 537), — de 215 sur 216 de prêtres fonctionnaires dans le district de Grenoble (ibid.), — de tous les ecclésiastiques fonciionnaires publics du district de Chaumont-en-Vexin, moins huit (27 février, p. 554\J — de tous ceux du district d'Orange, moins quatre (ibid.), — des 600 ecclésiastiques fonctionnaires publics du département des Hautes-Pyrénées (28 février, p. 558), — de la presque totalité des fonctionnaires publics ecclésiastiques du département du Pas-de-Calais (1er mars, p. 588), — de la majorité des fonctionnaires ecclésiastiques_jiu district de Saint-Dié (ibid.), — du curé de Moù*.»- -mar (2 mars, p. 651), — des curés de Val-Saint-Germain (Seine-et-Oise) et de Fouilloux, district de Mont-leul et de Garnetot (5 mars, p. 692), — de tous les religieux du district d'Aubigny. sauf 7 curés et 1 vicaire (ibid.), — des ecclésiastiques fonctionnaires publics du district de Narbonne, moins 5 (6 mars, p. 699), — de 80 curés du district de Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély) (ibid.), — des sept huitièmes des ecclésiastiques fonctionnaires publics du département des Vosges (8 mars, p. 740), — de tous les curés du district de Clermont-en-Argonne, sauf 9 (9 mars, p. 742).
dement (ibid. p. 168) ; — art. 4 i Rœderer,, Nairac, Rœderer (14 février, p. 173) ;— adoption avec amendement (ibid.) ; — art. 5,: Populus,. Rœderer, Le Chapelier, La Rochefoucauld (ibid. et p. suiv-}; —ajournement (ibid. p- 1TAfa — art. 6 : Populus,. Rœderer, Rewbell, Le Chapelier, d'André» Dupont (de Nemours), d'Estourmel, Rœderer, Rewbell, de Delley, d'André, de Folleville. (ibid. et p. suiv.); — adoption avec amendement de l'art. 6 devenu l'art..(ibid. p. 175).
Projet de décret présenté par Roussillon sur l'entrée et l'importation par mer (1er mars, p. 593), (ibid. p. 594) ; — discussion : abbé Dillon, Roussillon, de Folleville, Lavie^ Roussillon, Lavie, tun membre, Lavie, Cochon de L'Apparent, Roussillon, d'Estourmel, Herwin,. Garat aîné, . Castellanet, Lavie, Roussillon, un membre (ibid. p.,594 et suiv.) ;—texte du décret (ibid. p.. 59o).
Rapport par Rœderer sur la suppression de la ferme et de la régie générale et sur la vente du sel et du tabacT (5 mars, p. 669 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 670 et suiv.);. — adoption des 3 premiers art. amendés (ibid. p. 671 et suiv.); — art. suiv. : Martineau, de Folleville, Camus, Rœderer, La-venue, Veruière (ibid. p. 672);.— ajournement des art. 4 et 10 jusqu'à la séance do lundi et de l'art. Il jusqu'au rapport, du comité d'agriculture et de commerce sur les douanes nationales (ibid.); — art. additionnels : Le Chapelier, Gigongue, Rœderer, de Folleville, Moreau, Cigongue,, Rœderer (ibid. et p. suiv.);
— adoption, sauf ce qui concerne le sel, qui est ajourné (ibid. p. 736).
Buzot (ibid. p. 654 et suiv.), — question préalable (ibid. p. 656).
Adoption d'un projet de décret présenté par Prugnon et tendant à autoriser le direetoire d» district de- Sancerre à acquérir la maison des Augustin» de cette ville (8 février, p. Hy.
Disposition additionnel^ M décret1 du 7 février préseatée par Bouche et acceptée par Prugnon, rapporteur (9 février, p. T4) ; — adoption (ibid. et p. suiv.).
Rapport par Gossin sur l'emplacement "des tribunaux criminels dans les- différents départements (11 février, p. 120) ; — projet de décuet (ibid. et p. suiv.); — adoption do l'article (ibid. p. ;er"> — articles 2 et 3 : Gaultier Biauzat (ibid.); — adoption (ibid.).
Rapport de Gossin. s«r l'établissemeat de tribunaux d© commerce (12 février, p. 138 et suiv.}; — projet de décret (ibid. p. 139) ; — adoption (ibid.).
Projet de. décret présenté par Prugnon pour l'établissement du tribunal de Pontoise dans la maison appelée le grand vicariat (17 février, p. 223 et suiv.) ; — adoption (ibdd. p. 224),
Prugnon demande, au nom du comité de remplacement des tribunaux et corps administratifs, {''autorisation de prendre des décisions, lorsqu'il s'y aura nulle contestation, afin de ménager le temps de l'As-
semblée., 6 à, 700 rapports sur cet objet restant à présenter (ibid.).
Présentation par Prugnon d'un projet de; décret conaernant le directoire et le tribunal de district du dépairtement de l'Ariège (22,février, p. 397 et suiv.) ; — adoption (ibid. p. 398).
Projet de décret présenté par Prugnon et tendant à l'annulation d'une adjudication faite en faveur du département de Loir-et-Cher (2-4 février, p. 488 et suiv.),;.— adoption (ibid. p- 489).
Projet de décret présenté par Gossin et concernant les tribunaux de commerce de Marseille, de Brest et de Saint-Elienne,, la, justice de paix de Gahors,, la réunion de la commune de Malvans à celle'de Yence, la fusion en une seule des deux municipalités établies dans la paroisse d'issigny, département du Calvados (25 février* p. 505.) ; — adoption (ibid.).
Projet de décret concernant l'emplacement nécessaire à l'administration des villes de- Sarrelouis, de Chartres et dTîpiual (3 mars, p. 642 et suiv.) ; — adoption (ibid.).
Projet de décret relatif à une acquisition nécessaire à remplacement du département et du district de Mende (7 mars, p. 712) ; —adoption (ibid.).
Projet de décret établissant des tribunaux de commerce et des juridictions de prud'hommes (9 mars, p. 741 et suiv.);— adoption (ibid.)
Rapport par Vieillard sur les troubles du Morbihan (14 février, p. 175 et suiv.) ; — adresses y relatives (ibid. p. 176 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 179); — discussion : Cazalès (ibid.)\ — adoption (ibid.)
Defermon demande et obtient un vote de remerciements pour la belle conduite des gardes nationales et des troupes de ligne chargées de réprimer les troubles dans l'ancienne province de Bretagne (17 février, p. 231).
Lettre concernant des troubles fomentés par des prêtres dans le Morbihan (19 février, p. 284) ; — motion de Dusers tendant à féliciter les gardes nationales de Vannes et de Lorient de leur courage et de leur patriotisme (ibid.)\ — adoption (ibid.). — Autre lettre du commissaire du "roi à Vannes (ibid. p. 297 et suiv.); — procès-'verbaux dressés par le directoire du département du Morbihan (ibid. p. 298); — détails donnés par Coroller et proposition faite par lui d'adresser de nouvelles félicitations (ibid.) ; — adoption (ibid.). >
Rapport par Alquier sur l'affaire de Nîmes (ibid. p. 299 et suiv.) ; — projet de décret (ibid. p. 320) ; — pièces justificatives (ibid. p. 321 et suiv.). %
Communication par Voulland de trois lettres relatives aux troubles d'Uzès (22 février, p. 402 et suiv.); — quatrième lettre, écrite par de Béthizy, membre de l'Assemblée, ci-devant évêque d'Uzès, et dénoncée comme factieuse (ibid. p. 403 et suiv.) ; — renvoi, sur la proposition de Voulland et de Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély), aux comités des rapports et des recherches réunis (p. 405) ; — rapport par Muguet (ibid. p. 451 et suiv.) ; — projet de décret Ubid. p. 452) ; — adoption avec amendement de Barnave (ibid. et p. suiv.); — documents sur les
troubles d'Uzès communiqués par Voulland (24 février, p. 500 et suiv.).
Troubles de Nimes : explications de Marguerittes, parlant à labarrecomme maire deNîmes (ibid.ji. 406-et suiv.), (p 470 et suiv.); — discussion : Rabaud-Saint-Etienne (24 février, p. 503 et suiv.) ; — un membre, Stanislas de Clermont-Tonnerre, de Cazalès, Barnave (26 février, p.. 540 et suiv.); — incident sur la clôture de lfet discussion générale : de Cazalès, de Laïutrec, de Foucault, de Bonoay, de Menou, le Président (Duport), Madier de M'outjau, le Président (ibid. p. 544) ; — discussion sur le préambule du projet ds décret : de Murinais, abbé Maury, Alquier, Barnave, - Chabroud, Garat aîné, Delavigne, Pétion (ibid. et p. suiv.) ; — décret (ibid. p. 545 fg suiv.).. — Opinion,, non prononcée, de Cortois dè\ Balore, évêque de Nîmes, (p.. 546 et suiv.) — Lettre des administrateurs du département du Gard (l""' mars, p. 587 et suiv.) — Lettre des officiers municipaux de la ville de Marseille ( ibid. p. 588). — Appréciation de l'affaire de Nîmes, par Voulland (ibid).
Rapport par Yictor de Broglie sur des menées factieuses dans les départements, du Haut et. du Bas-Rhin (4 mars.,, p. 639 et suiv..),; — projet de décret (ibid., p. 641); — adoption (ibid.)*
Faux bruits de troubles, à Jalès (Axdè.che), dénoncés par de Saint-Martin (3 mars, p. 642) ; — insertion au Brocès-verbal (ibid.),; — renseignements donnés par elmas, procureur général du département (5 mars, p. 681); — lettre des administrateurs du département du Gard (ibid. p. 691) ; — discussion : Rabaud-Saint-Elienne, Voulland (ibid. et p. suiv.); — décret {ibid., p. 693Î).
Relation des événements arrivés à Uzès du 13 février Î791 au 22, adressée par les administrateurs du district d'Uzès (7 mars, p. 708 et suiv.).
(p. 881), — sur le maréchal de Caslries (p. 711).
— Parle sur Tabago (p. 237). — Fait une communication, au nom du comité des recherches, sur le transfert d'un prisonnier à l'Abbaye (p. 450). — Parle sur émigrants (p. 581), — sur l'affaire de Fournier (p. 590), — sur une demande de congé (p. 601), — sur le refus de serment de de Bouvans (p. 637),— sur les fonctionnaires publics absents (p. 704), — sur les prisonniers (p. 753).